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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 007 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 5 décembre 2013

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international tient sa septième séance, qui porte sur la situation en Syrie. La séance est ouverte.
    Je tiens à souhaiter une fois de plus la bienvenue à nos témoins. Je vous présente Mark Gwozdecky, directeur général, Bienvenue, monsieur. Je suis heureux que vous puissiez témoigner.
    Nous accueillons également Sabine Nolke, qui ne nous est pas inconnue puisqu'elle nous fait grâce de sa présence depuis quelques semaines. Elle est directrice générale. Bienvenue de nouveau parmi nous.
    Voici enfin Stephen Salewicz, directeur de la Division de l'assistance humanitaire. Merci de comparaître.
    Nous allons commencer par M. Gwozdecky, après quoi nous entendrons M. Salewicz et, enfin, Mme Nolke.
    Bienvenue, monsieur. Je vous laisse la parole.

[Français]

    Aujourd'hui, je mettrai l'accent sur les questions de politiques et de sécurité liées à la situation en Syrie. Des détails sur la conjoncture humanitaire vous seront donnés par mon collègue, Stephen Salewicz. Quant à ma collègue, Sabine Nolke, elle fera le point sur la réponse de la communauté internationale face à l'utilisation d'armes chimiques par Assad, en Syrie.
    La situation s'est développée de façon considérable au cours des dernières années et constitue maintenant une énigme très grave pour la communauté internationale. Le conflit a commencé en mars 2011 alors que le régime Assad a répondu aux manifestations prodémocratiques par une répression soutenue, aveugle et violente. Cette crise, qui était au début un conflit uniquement national, s'est depuis développée au point d'impliquer de multiples acteurs et d'avoir des conséquences sur les plans régional et mondial. Ces acteurs et programmes supplémentaires compliquent davantage la recherche d'une solution.

[Traduction]

    Suite à la répression du régime Assad, divers groupes d'opposition armés ont vu le jour. Les forces d'opposition armées comptent un assortiment disparate d'acteurs parmi tant d'autres, à partir d'éléments séculiers provenant des services de sécurité syriens qui ont fui le pays, en passant par des groupes islamistes nationaux jusqu'à des milices affiliées à al-Qaïda avec un nombre important de membres et d'appui.
    Divers groupes de l'opposition attirent un appui important de la part des États du golfe Persique, de l'Ouest, de la Turquie, et autres pays, alors que le régime Assad bénéficie de l'appui de l'Iran, du Hezbollah au Liban, et de la Russie.
    Les groupes de l'opposition ne sont pas unifiés; ces groupes alterneront entre les partenariats de complaisance et l'affrontement militaire. À l'heure actuelle, sur le plan militaire, les parties au conflit ont largement atteint une impasse, bien que l'avantage tactique passe d'un côté à l'autre au cours du conflit.
    L'intervention et l'appui du Hezbollah et de l'Iran ont favorisé le régime récemment, mais une victoire décisive d'un côté ou de l'autre demeure peu probable. La participation des supporteurs de l'extérieur ayant des visées religieuses a déclenché de fortes résonances sectaires au sein d'une société traditionnellement non sectaire.
    En outre, le conflit a été perçu par la population kurde en Syrie comme une occasion de poursuivre les aspirations nationalistes, ce qui complique les relations délicates entre les populations kurdes avoisinantes de la Turquie et de l'Iraq et leurs gouvernements respectifs.
    En raison de ces facteurs, toute solution au conflit de la Syrie doit concilier les intérêts de multiples puissances régionales et des groupes nationaux qui se disputent la prééminence, ainsi que les pays étrangers qui protègent leurs intérêts régionaux.

  (1540)  

[Français]

    Les intérêts canadiens sont renforcés par le fait que les voisins de la Syrie sont soit aux prises avec les pressions économiques, sécuritaires et politiques liées à l'hébergement de nombreuses populations de réfugiés toujours en croissance, soit préoccupés par les conséquences sur la sécurité des actions des groupes extrémistes qui agissent librement sur leurs frontières. Par ricochet, cela a servi à augmenter les préoccupations quant à la stabilité régionale et, notamment, la stabilité politique de la Jordanie et du Liban.

[Traduction]

    Dans ce contexte, permettez-moi de vous décrire brièvement l'approche du Canada face à la crise syrienne.
    Notre réponse s'est composée de cinq principaux éléments: l'un consiste à fournir une assistance humanitaire pour répondre aux besoins des personnes touchées en Syrie et dans les pays d'accueil de réfugiés; le deuxième, à répondre à des menaces chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires; le troisième, à augmenter la pression sur le régime Assad et ses alliés par des sanctions, ainsi que notre engagement diplomatique; le quatrième, à fournir un appui bilatéral au développement et à la sécurité aux pays de la région pour les aider à répondre aux réfugiés syriens; et le cinquième, à calibrer soigneusement l'appui aux efforts de l'opposition syrienne pour devenir une solution de remplacement viable au régime Assad en offrant une formation dans des domaines clés, y compris les communications, la documentation sur les violations des droits de la personne et la gouvernance locale.

[Français]

    Sur ce dernier point, il convient de noter que le Canada n'a pas reconnu la Coalition de l'opposition syrienne comme unique représentation légitime du peuple syrien puisque nous ne sommes pas convaincus que la coalition soit suffisamment représentative, qu'elle ait rassuré les communautés minoritaires en Syrie que leurs droits seront protégés ou qu'elle ait condamné l'extrémisme sans équivoque. Nous avons fait de grands efforts pour faire en sorte que toute aide apportée aux membres de l'opposition soit dirigée vers les éléments démocratiques, laïques et progressistes de l'opposition et ne soit pas détournée pour profiter aux groupes extrémistes.

[Traduction]

    Le Canada continue de croire que le seul moyen de mettre fin à la crise en Syrie est une transition politique dirigée par les Syriens en vue d'obtenir une Syrie libre, démocratique et pluraliste.
     Au cours des derniers mois, des efforts diplomatiques considérables ont été déployés auprès des parties au conflit syrien et des intervenants régionaux dans le but d'organiser une deuxième conférence de la paix de Genève. Présentement, cette conférence est prévue pour le 22 janvier 2014. L'ajournement demeure une possibilité omniprésente compte tenu du caractère récalcitrant de l'opposition, des désaccords sur les conditions préalables aux négociations entre le régime et l'opposition, et du débat persistant à savoir qui peut assister aux négociations.
     Aussi fragiles soient-ils, ces pourparlers constituent actuellement la meilleure chance pour arriver à une solution négociée qui pourraient mener à la mise en place d'un organe directeur transitoire.
    À l'approche de Genève Il, toutefois, il est fort probable qu'il y ait des efforts concertés des deux côtés pour acquérir un avantage sur le terrain afin d'augmenter leur influence à la table des négociations.
    C'est sur ces mots que je conclus mon exposé. Je cède maintenant la parole à mon collègue, Stephen Salewicz.
    Merci beaucoup, monsieur Gwozkecky.
    Monsieur Salewicz.
    Monsieur le président, honorables membres du comité, merci de me donner l'occasion de comparaître pour brosser le portrait de la crise en Syrie, de ses répercussions sur les pays voisins, des défis entourant l'acheminement de l'aide et de la façon dont le Canada répond à cette crise et à ces défis.

[Français]

    La situation en Syrie et dans la région a rapidement évolué en une crise humanitaire très grave qui met à rude épreuve la capacité de la communauté humanitaire à intervenir. En un peu plus de deux ans, plus de la moitié de la population syrienne en est venue à avoir besoin d'aide humanitaire à l'intérieur du pays ou à chercher refuge dans les pays voisins. De plus en plus, les réfugiés syriens gagnent l'Europe.

[Traduction]

    Les effets cumulatifs du conflit armé empêchent grandement la population d'accéder à la nourriture, aux soins de santé, à l'eau, au logement et à l'éducation. Il fut un temps où la Syrie, en tant que pays à revenu intermédiaire, offrait des services de soins de santé relativement modernes. Aujourd'hui, elle assiste à une éclosion de la poliomyélite, la première en 14 ans.
    Les enfants sont plus que quiconque touchés par la crise. Si le conflit perdure, nous serons devant ce que certains appellent une « génération perdue ». Les enfants, traumatisés, sont victimes de ce conflit. Toute une génération ne peut aller à l'école et est très vulnérable à l'exploitation. En Jordanie et au Liban, des enfants qui ont aussi peu que sept ans travaillent de longues heures en échange d'un maigre salaire dans des conditions qui, parfois, sont dangereuses et relèvent de l'exploitation. Plus de 3 700 enfants réfugiés ne sont pas accompagnés ou sont séparés de leurs deux parents.
    Né du Printemps arabe qui a marqué le début d'une transformation considérable du Moyen-Orient, le conflit syrien s'est muté en une situation d'urgence humanitaire prolongée et complexe qui risque de déstabiliser la région.
    Les pays voisins en subissent d'immenses contrecoups. Ils ont accueilli avec générosité près de trois millions de réfugiés. Ils l'ont fait à grands frais et, dans certains cas, au risque de déstabiliser leur propre pays. Imaginez les conséquences si, au Canada, notre population s'accroissait de 25 % en quelques mois seulement, comme c'est le cas au Liban.
    Au Liban et en Jordanie, les deux pays qui accueillent le plus grand nombre de réfugiés dans la région, on ne peut surestimer les effets du conflit sur les services sociaux, les infrastructures et les communautés. L'envergure et la complexité sans précédent de la crise exigent une approche globale pour surmonter les défis sociaux et économiques énormes auxquels font face ces pays.
    L'intervention humanitaire en Syrie est semée d'embûches. Il est toujours difficile d'atteindre les populations civiles pendant un conflit. En Syrie, où des centaines de parties s'opposent, la situation en matière de sécurité est hautement imprévisible. Ceux qui tentent d'acheminer l'aide humanitaire oeuvrent donc dans un environnement très hostile.
    Les travailleurs humanitaires ont eu leur lot de victimes en Syrie: des dizaines d'entre eux ont été assassinés, blessés, kidnappés ou sont portés disparus. La tactique employée, soit celle d'assiéger des régions où vivent des populations civiles pendant de longues périodes et de restreindre l'accès humanitaire, a aggravé la situation humanitaire et compromis la distribution de fournitures et de services permettant de sauver des vies.
    Bien que les restrictions se soient assouplies récemment, le régime Assad continue d'imposer des obstacles de nature administrative et bureaucratique à l'acheminement de l'aide humanitaire. À titre d'exemple, il limite les visas, retarde l'enregistrement des ONG et restreint les déplacements des organismes d'aide sur le terrain.
    Le 7 octobre, le Conseil de sécurité des Nations Unies a publié une déclaration approuvée à l'unanimité dans laquelle il exhorte la Syrie à accorder un accès immédiat aux organisations humanitaires qui tentent d'apporter une aide vitale aux populations touchées par la crise en cours. Christian Paradis, ministre du Développement international, a indiqué que le gouvernement du Canada appuyait fermement cette déclaration.
    Dans tous les forums internationaux pertinents, le Canada continue d'appeler toutes les parties au conflit à prendre des mesures immédiates pour faciliter l'expansion des opérations de secours humanitaires et lever les obstacles de nature bureaucratique ou autre. Nous savons en outre que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies travaille de près avec les pays qui ont une grande influence auprès des parties pour que ces obstacles soient supprimés.
    La communauté internationale s'est mobilisée massivement. En 2013, les Nations Unies et le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge ont sollicité plus de 4,5 milliards de dollars américains.
     Alors que la crise humanitaire se détériorait et que la communauté internationale se mobilisait, le Canada a accru son intervention au fur et à mesure que les besoins augmentaient. En 2012, le Canada a versé 23,5 millions de dollars et, en 2013, nous avons presque multiplié par huit nos contributions humanitaires, les faisant passer à 180 millions de dollars. Jusqu'à présent, la contribution humanitaire canadienne s'élève donc à 203,5 millions de dollars. Le Canada fournit également 110 millions de dollars en aide au développement à la Jordanie et au Liban. Actuellement, le Canada compte parmi les principaux donateurs dans l'intervention en Syrie.
    L'approche du Canada consiste à cibler les principaux besoins, en particulier la nourriture, les soins de santé, le logement, la protection, l'éducation, l'eau et l'assainissement. Avec la venue de l'hiver, le Canada appuie les activités de préparation à cette saison dans toute la région. Nous avons adopté une approche équitable d'un point de vue géographique en appuyant des activités qui se déroulent en Syrie et dans les pays voisins. Nous soutenons également les communautés d'accueil dans les pays voisins pour qu'elles puissent faire face à l'afflux de réfugiés.
    Nous acheminons notre aide par l'intermédiaire de partenaires humanitaires d'expérience et nous avons ainsi obtenu des résultats considérables. À titre d'exemple, en 2013, les partenaires ont fourni de l'assistance alimentaire à plus de 1,5 million de réfugiés, des articles d'hygiène à 1,25 million de personnes, effectué un million de visites à des installations de soins de santé primaires et permis à 175 000 enfants d'intégrer le système d'éducation formelle.
    En plus de demander un meilleur accès pour les acteurs humanitaires en Syrie et la protection de l'espace humanitaire, le gouvernement du Canada a souligné son engagement à l'égard des principes humanitaires. Lors de la Conférence humanitaire canadienne, qui a eu lieu en octobre dernier, le ministre Paradis a prononcé un discours sans équivoque: le Canada continuera d'insister sur l'importance de l'impartialité, de la neutralité et de l'indépendance de ses partenaires humanitaires.

  (1545)  

[Français]

    Il ne fait désormais aucun doute qu'une aide humanitaire de grande envergure demeure nécessaire. Les Nations Unies devraient lancer à la mi-décembre leur appel pour l'intervention en Syrie et dans la région. Nous pouvons nous attendre à une augmentation significative des ressources demandées. La communauté internationale se réunira au Koweït le 15 janvier, comme l'an dernier, pour engager des fonds à l'appui de l'intervention.

[Traduction]

    Alors que le conflit s'étire, il demeure impératif d'apporter une aide humanitaire et une aide au développement afin de sauver des vies et d'atténuer les répercussions de l'afflux de réfugiés sur les communautés d'accueil des pays voisins.
    Merci.

  (1550)  

    Merci, monsieur Salewicz.
    Nous entendrons maintenant Mme Nolke.
    Monsieur le président, honorables membres du comité, c'est un grand plaisir pour moi d'être devant vous aujourd'hui pour traiter des armes chimiques en Syrie, un sujet qui diffère quelque peu de ce dont j'ai parlé dernièrement. Il peut être utile de vous présenter un bref historique de la question.
     Comme mon collègue l'a indiqué clairement dans sa déclaration, les conditions de sécurité et la situation humanitaire en Syrie sont des plus sombres, comme elles l'ont été depuis le début du conflit en mars 2011.
    Depuis longtemps, la Syrie est soupçonnée de posséder un arsenal d'armes chimiques, qui, croyait-on, pouvait exercer un pouvoir dissuasif à l'endroit d'Israël. En juillet 2012, la Syrie a ouvertement admis qu'elle possédait des armes chimiques et biologiques, affirmant que celles-ci pourraient être utilisées pour contrer une « agression extérieure ».
    Alors que les combats en Syrie ne cessaient de s'intensifier, la communauté internationale s'inquiétait de plus en plus que le régime Assad puisse recourir à ces armes répugnantes contre sa propre population, ou que l'instabilité dans le pays puisse faire en sorte que ces armes se retrouvent entre les mains de groupes extrémistes, lesquels sont de plus en plus présents en Syrie.
    Les États-Unis et d'autres alliés ont fermement indiqué les lignes rouges à ne pas franchir pendant l'été 2012, avertissant le régime des conséquences qui pourraient découler de l'utilisation d'armes chimiques. Le Canada a consulté étroitement ses alliés sur la planification d'urgence concernant les réponses possibles à une éventuelle attaque aux armes chimiques, bien que cela constituait alors une possibilité peu probable.
    Le Canada a intensifié ses efforts et a joué un rôle clé en apportant des contributions importantes en réponse à la menace d'utilisation d'armes chimiques en Syrie. Grâce au programme de partenariat mondial, au groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction, et au programme d'aide au renforcement des capacités antiterroristes, le Canada a versé un montant de 47,5 millions de dollars sous forme d'aide liée à la sécurité dans la région pour aborder de façon plus large le conflit en Syrie, y compris des programmes et de l'équipement liés aux menaces d'armes de destruction massive comme celles que représente dans la région une attaque aux armes chimiques ou biologiques en Syrie.
    De plus, le Canada a fait une contribution de 2 millions de dollars à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques — l'OIAC — afin qu'elle soit capable de faire immédiatement enquête sur l'utilisation d'armes chimiques en Syrie, si cela devait s'avérer nécessaire.
    En mars de cette année, et en dépit des limites à ne pas franchir qui avaient été indiquées, des allégations d'utilisation d'armes chimiques par le régime syrien ont commencé à poindre. Tout au long du printemps, nous avons reçu des rapports non corroborés d'attaques de faible envergure contre des régions aux mains de l'opposition avec pertes humaines minimes; le régime prétendait en retour que l'opposition avait utilisé des armes chimiques.

[Français]

    À la suite d'attaques de faible envergure, le Secrétaire général des Nations Unies a déclenché, le 21 mars, un mécanisme rarement utilisé qui lui permet d'ouvrir une enquête relativement à l'utilisation présumée d'armes chimiques en Syrie en dépit du fait que la Syrie n'était pas à ce moment-là un État partie à la Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction. L'équipe était dirigée par les Nations Unies avec la participation d'experts de l'OIAC et de l'Organisation mondiale de la Santé. La contribution financière du Canada a l'OIAC a été essentielle au succès de cette enquête mandatée par les Nations Unies, un fait qui nous a été rappelé encore il y a deux jours par la Haut-Représentante pour les affaires de désarmement, Angela Kane, que certains d'entre vous ont peut-être rencontrée avant-hier soir.
    Les autorités syriennes ont initialement empêché l'équipe d'enquête des Nations Unies d'avoir accès à leur territoire en invoquant des négociations difficiles concernant le mandat de la mission. C'est seulement le 19 août que les enquêteurs des Nations Unies ont été autorisés à entrer en Syrie. Deux jours après l'arrivée de l'équipe chargée d'enquêter sur l'utilisation présumée d'armes chimiques au printemps, la mission était sur les lignes de front pour témoigner de l'attaque meurtrière aux armes chimiques perpétrée dans la région de Ghouta, dans la périphérie de Damas. Selon les estimations des États-Unis, cette attaque aurait coûté la vie à plus de 1 400 personnes, y compris plusieurs femmes et enfants. L'ampleur et la nature répugnante de l'attaque ont suscité des protestations vigoureuses de la communauté internationale et l'équipe d'enquête des Nations Unies a immédiatement modifié l'orientation de son enquête pour se concentrer sur cette attaque. La disponibilité d'éléments de preuve récents a considérablement facilité les efforts de l'équipe.

  (1555)  

    L'attaque a déclenché une réaction en chaîne d'activités diplomatiques sans précédent. La ligne rouge à ne pas franchir fixée par les États-Unis, le Canada et d'autres alliés occidentaux avait été si manifestement franchie que le régime syrien, qui craignait des représailles, a décidé de céder son arsenal d'armes chimiques. Pendant que les États-Unis et la Russie négociaient un accord cadre sur l'élimination des armes chimiques de la Syrie, le gouvernement de la Syrie soumettait sa lettre relative à l'accession à la Convention sur les armes chimiques. L'accord cadre conjoint des États-Unis et de la Russie du 14 septembre a dressé un plan de destruction détaillé du Programme des armes chimiques de la Syrie, assorti de délais d'exécution très ambitieux. Les décisions unanimes prises par le Conseil de sécurité de l'ONU, soit la résolution 2118 le 27 septembre, et par le conseil exécutif de l'OIAC ont abouti à la mise en place d'une mission conjointe sans précédent des Nations Unies et de l'OIAC afin d'éliminer l'arsenal d'armes chimiques de la Syrie d'ici le 30 juin 2014.

[Traduction]

    On n'insistera jamais assez sur le caractère ambitieux, mais aussi sur les risques associés à cette initiative. Jamais auparavant l'OIAC ou aucun autre organisme n'avaient tenté de procéder à des vérifications ou à des inspections de destruction d'armes chimiques dans une zone de conflit; l'octroi du prix Nobel de la paix à l'OIAC la semaine prochaine est à la fois opportun et bien mérité.
    La mission conjointe de l'ONU et de l'OIAC en Syrie a fait de remarquables progrès jusqu'ici dans la mise en oeuvre de l'accord-cadre des États-Unis et de la Russie. Deux des trois principales phases du plan de destruction sont achevées. La première et la deuxième phase consistaient en l'inspection par l'OIAC de l'ensemble des 23 sites d'armes chimiques déclarés par le gouvernement syrien et la destruction de tout équipement essentiel à la production d'armes chimiques dans les installations de mélange et de remplissage déclarées d'ici le 1er novembre. Une seule installation demeure non inspectée en raison des conditions de sécurité à l'échelle locale, mais on croit qu'elle a été précédemment abandonnée et vidée de composants d'armes chimiques par le régime qui les a maintenant déplacés vers d'autres sites aujourd'hui déclarés.
    La troisième phase sera la plus ardue. Elle consistera à retirer les agents chimiques du territoire syrien — à la fois en dépit et en raison de la guerre civile qui y sévit —afin de les détruire ailleurs. Ce travail sera réalisé en deux étapes.
    Il est prévu que les composés des armes chimiques les plus critiques soient retirés de la Syrie d'ici le 31 décembre. Ces composés seront soumis à un processus de destruction, connu sous le nom d'hydrolyse, à bord d'un navire modifié commandé par les Américains en dehors des eaux territoriales de la Syrie.
    Un second lot de précurseurs chimiques de nature moins délicate sera retiré de la Syrie d'ici le 5 février; ces précurseurs chimiques seront détruits dans une installation commerciale à un endroit qui n'a pas encore été déterminé.
     L'OIAC a invité des entreprises possédant l'expertise voulue à soumettre une déclaration d'intérêt à détruire le second lot de produits chimiques, de même que les résidus d'hydrolysat du premier lot.
     À la clôture de la période de soumissions, 41 entreprises des quatre coins du monde avaient manifesté leur intérêt, y compris, à ce qu'on sache, deux entreprises canadiennes. L'évaluation des propositions, la sélection et le suivi auprès des entreprises retenues seront assurés par le Secrétariat technique de l'OIAC.
    Le temps est un élément essentiel: la communauté internationale doit agir rapidement si nous voulons respecter les délais successifs nécessaires pour détruire une fois pour toutes le programme d'armes chimiques de la Syrie.
     En octobre, l'OIAC et les Nations Unies ont lancé des appels à la communauté internationale afin que des contributions supplémentaires et nécessaires soient apportées. En octobre, le Canada a répondu à une demande urgente de transport par voie aérienne de 10 véhicules blindés américains pour le transport sécuritaire des équipes d'inspection. Un Globemaster III des Forces aériennes a effectué deux voyages du Maryland jusqu'à Beyrouth pour livrer les véhicules. De nombreux autres pays ont intensifié leurs efforts et apporté d'importantes contributions.
    Les Nations Unies et l'OIAC ont toutefois besoin de bien plus. Le fonds de fiducie mis sur pied pour financer les opérations complexes s'épuise rapidement et un grand nombre de contributions en nature sont également nécessaires pour mener à bien la phase de destruction. Mon ministère étudie actuellement des solutions quant aux modalités selon lesquelles le Canada pourrait contribuer davantage à la mission conjointe.
    Selon certains, il y aurait un risque qu'en finançant la destruction des armes chimiques en Syrie, la communauté internationale puisse aider, si ce n'est légitimer, le régime Assad. Nous ne sommes pas d'accord.

  (1600)  

    Il est dans l'intérêt supérieur du peuple syrien, de la région et du monde entier de veiller à ce que ces armes ne puissent être utilisées à nouveau contre quiconque. C'est particulièrement le cas lorsque ces armes sont détenues par un État qui a déjà manifesté sa volonté de les utiliser.
    Le fait que le Canada, de concert avec la communauté internationale, s'efforce de veiller à ce que le régime Assad ou ses successeurs éventuels n'aient désormais plus accès à des armes chimiques ne disculpe aucunement le régime Assad d'avoir utilisé des armes aussi répugnantes, et un éventail d'armes conventionnelles, contre sa propre population.
    Enfin, une fois que la priorité immédiate, qui consiste à démanteler et à éliminer le programme d'armes chimiques, aura été traitée, la communauté internationale devra s'occuper de la question de la responsabilité pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité, y compris l'utilisation d'armes proscrites de longue date par les nations civilisées.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Nolke.
    Nous allons amorcer cette série de questions avec Mme Laverdière.
    Madame, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Si je peux me permettre, je vais profiter de l'occasion pour saluer un ancien collègue que je n'ai pas vu depuis probablement 15 ou 20 ans, mais j'ai vu Sabine la semaine dernière.
    En ce qui a trait aux contributions pour l'aide humanitaire, les chiffres mènent parfois à certaines confusions. Je regarde les chiffres fournis par les Nations Unies qui incluent, évidemment, les contributions du Canada à des organismes comme Handicap International, et ainsi de suite. Cela nous indique des fonds déboursés ou engagés de l'ordre de 131 millions de dollars pour 2013, alors que le chiffre que vous nous avez fourni est de 180 millions de dollars. Comment peut-on expliquer cette différence?

[Traduction]

    Merci pour cette question.
    La différence entre le chiffre donné par l'ONU et celui que je vous ai donné, c'est qu'un représente les contributions annoncées et l'autre les sommes affectées et déclarées par l'ONU. Il faut quelque temps à l'ONU pour recueillir les données et les enregistrer dans sa base de données. L'organisation travaille à rassembler de nouveau nos chiffres pour le reste des programmes et à les inscrire dans sa base de données. C'est là où nous en sommes. Les programmes financés grâce aux 180 millions de dollars ont été approuvés et vont de l'avant. Nos partenaires ont été informés de ces contributions.

[Français]

    Je vous remercie.
    J'ai une autre question à poser. Vous avez souligné, avec raison, l'inquiétude qu'il faut avoir qu'une génération soit perdue en Syrie, ce qui nuirait de façon dramatique à la reconstruction du pays, qu'on espère la plus prochaine possible.
    Que fait-on spécifiquement par rapport aux enfants? Je vais souligner un large éventail de questions car je sais qu'il y a beaucoup de dossiers. Je pense notamment à l'éducation à l'extérieur et dans les camps de réfugiés. Dans la mesure du possible, peut-on l'appuyer en Syrie même? Par ailleurs, que fait-on sur le plan de l'aide psychologique? A-t-on des programmes d'aide psychologique pour ces enfants souvent traumatisés? Je pourrais vous parler de nutrition et je reviendrai sur la polio si j'en ai le temps, mais, déjà, pouvez-nous nous parler de nos programmes destinés spécifiquement aux enfants?
    Merci.

[Traduction]

    Je crois effectivement que l'impact sur les enfants est énorme, et c'est une vraie tragédie. Je vais vous citer quelques chiffres.
    On rapporte que 11 000 enfants ont été tués. Il s'agit d'enfants identifiés. Ils ont été tués par des engins explosifs et des armes.
    Cinq mille des 22 000 écoles en Syrie sont fermées ou endommagées. Comme vous l'avez souligné, les réfugiés syriens ont de la difficulté à avoir accès à de l'éducation pour leurs enfants et 1,9 million des 5,4 millions d'enfants en Syrie ne vont pas à l'école.
    Comme vous le dites, on risque vraiment de perdre toute une génération. C'est une situation qui nous préoccupe beaucoup, car nous voulons nous assurer que nos programmes ciblent les besoins particuliers de cette génération. À cette fin, nous utilisons plusieurs approches différentes.
    Dans le cadre de nos programmes, nous travaillons avec des organisations comme UNICEF et Aide à l'enfance qui ont pour mandat d'intervenir auprès des enfants, notamment en matière d'éducation, mais aussi en matière de counselling psychologique, et de soutenir les enfants non accompagnés. Comme je l'ai souligné, le nombre d'enfants non accompagnés est plutôt imposant. Nous nous tournons vers les organisations qui ont ce genre de mandat et qui peuvent offrir des services psychologiques et médicaux, autrement dit tous les services que l'on pourrait offrir au Canada aux enfants traumatisés par la violence.
    UNICEF a mené une étude et amorcé une initiative que nous étudions attentivement. Nous discutons régulièrement avec l'organisation afin de trouver une façon d'élargir l'initiative et de réagir à cette possible perte d'une génération. UNICEF a développé une stratégie qui s'appuie sur la participation d'intervenants régionaux pour régler ce problème régional et tente de définir les points d'intervention — éducation, services médicaux et autres — qui permettraient à la communauté internationale d'unir ses efforts et d'intervenir.
    Pour répondre à votre question, comme je l'ai souligné, c'est toute la région qui est touchée, pas seulement la Syrie. Dans la région, la plupart des efforts sont menés par l'UNHCR, l'organisme responsable de la protection des réfugiés. Bien entendu, l'organisme travaille avec différents intervenants ainsi qu'avec les gouvernements locaux. Je dois dire qu'ils ont offert énormément de soutien et qu'ils ont accueilli des enfants de la région dans leurs écoles, même s'ils ont déjà de la difficulté à satisfaire les besoins de leurs propres citoyens et que cette ouverture ajoute aux pressions avec lesquelles ils doivent composer.
    Nous surveillons attentivement cette initiative de l'UNICEF ainsi que le plan très détaillé qui se définit. C'est sur ces éléments que nous nous appuierons au cours des prochaines semaines pour ajuster notre intervention en conséquence.

  (1605)  

    Merci beaucoup.
    Il me reste très peu de temps. S'il existe des documents sur cette initiative de l'UNICEF, nous aimerions en obtenir une copie, ainsi que toutes statistiques sur le pourcentage de nos contributions qui servent directement à aider les enfants.
    J'aurais une autre question à vous poser — d'ailleurs, j'aurais assez de questions pour vous interroger pendant une demi-heure. Ma question sera brève et j'espère que mon collègue y reviendra. Il est très difficile d'acheminer l'aide humanitaire dans la région. Que peut-on faire? Avez-vous constaté une amélioration ou est-ce que la situation empire?
    Je vais d'abord répondre à votre question sur les difficultés concernant l'accès. Je crois qu'il y a un engagement diplomatique très important autour de ce problème.
    Très brièvement, s'il vous plaît.
    En fait, nous allons laisser M. Dewar intervenir d'abord.
    On pourrait laisser le témoin répondre...
    Merci. Allez-y.
    ... puisque nous connaissons les problèmes.
    Très brièvement, s'il vous plaît.
    Nous avons remarqué récemment des signes d'amélioration. Plus de visas sont accordés, et ce, plus rapidement. Nous avons appris dernièrement que trois ou quatre cargaisons ont été autorisées à entrer au pays.
    Certaines hypothèses ont été avancées pour expliquer cette ouverture de la part du régime Assad. D'abord, il constate que ça fonctionne, que cela a un effet de légitimation. Une autre hypothèse, c'est que son partenaire et allié, l'Iran, a conclu un accord nucléaire avec la communauté internationale et qu'il suit les développements de ce dossier pour voir si son allié protégera ses intérêts.
    En ce qui a trait à l'engagement diplomatique, on maintient la pression sur le régime syrien pour qu'il continue de laisser libre accès aux convois, mais c'est compliqué, puisque le régime ne contrôle pas tout le territoire. De grandes régions du territoire, y compris certains postes frontaliers, ne sont pas sous son contrôle, mais plutôt sous celui de différents groupes de l'opposition. Et, comme je l'ai souligné, l'opposition est fragmentée.

  (1610)  

    Merci.
    Monsieur Anderson, vous avez la parole pour sept minutes.
    J'aimerais poursuivre sur le même sujet. Quel pourcentage de l'aide se rend jusqu'en Syrie et quel pourcentage se rend dans les régions frontalières de la Syrie? Avez-vous une idée générale?
    Je crois que la demande de l'ONU est une bonne indication de l'équilibre entre les régions frontalières et la Syrie elle-même. Les régions frontalières et les pays voisins où l'accès est possible reçoivent deux fois plus d'aide que la Syrie. En 2013, l'ONU a demandé près de 1 milliard de dollars en aide pour la Syrie. Donc, une grande proportion de l'aide est destinée à la Syrie elle-même.
    L'aide qui entre au pays se rend-elle aux gens qui en ont besoin? Beaucoup s'inquiètent à ce sujet. Même si le gouvernement laisse entrer les convois, ceux-ci sont détournés et aboutissent ailleurs. L'aide se rend-elle aux bons endroits dans le pays et dans les camps de réfugiés situés à l'extérieur des frontières de la Syrie?
    C'est une question importante et un dossier que nous suivons très attentivement, étant donné les inquiétudes selon lesquelles l'aide ne se rendrait pas aux gens touchés. Bien entendu, ce dossier est au coeur de nos priorités.
    Il y a moins de restrictions concernant la livraison de l'aide. En novembre dernier, l'ONU a réussi à faire entrer sept convois d'aide. Ils étaient destinés à des zones contestées et des zones contrôlées par l'opposition. C'est une amélioration. Nos convois sont livrés grâce à l'aide de partenaires d'expérience qui ont des réseaux dans la communauté. Des groupes communautaires syriens entretiennent des relations de longue date avec le Croissant-Rouge arabe syrien, une situation semblable à ce que l'on retrouve au Canada. Ils travaillent à identifier les communautés les plus vulnérables et à y faire parvenir de l'aide.
    Comme dans n'importe quel conflit, il y a du brigandage et du pillage. Nos partenaires et nous avons remarqué que lorsque les convois ne se rendent pas à destination, les pressions exercées par la communauté mènent souvent à des négociations pour que ces fournitures soient réacheminées là où elles étaient destinées. C'est très intéressant. Donc, en plus de la communauté internationale, les Syriens aussi font des efforts pour s'assurer que l'aide se rend là où c'est nécessaire.
    J'aimerais parler un peu des combattants étrangers et de leur impact actuel et futur. Certains s'inquiètent que des gens viennent de partout pour suivre leur formation dans cette région du globe. On peut s'attendre à ce qu'ils soient tout aussi enthousiasmés de mettre en pratique ce qu'ils ont appris et partager leur expérience dans d'autres régions. J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet.
    J'aimerais savoir également où ils trouvent leur argent. Des fonds sont acheminés à l'opposition, mais certains de ces fonds se retrouvent également entre les mains de groupes extrémistes. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
    Enfin, le Canada est-il à l'aise à fournir de la formation et des moyens de communication? Craint-on qu'un jour ces combattants ne se retournent contre nous?
    Je vais d'abord répondre à votre dernière question. Le fait que des fonds aboutissent entre les mains de groupes indésirables est une situation qui nous inquiète beaucoup. C'est pourquoi tous les projets que nous étudions et qui pourraient être approuvés font l'objet d'un examen très approfondi.
    Cela explique, en partie, pourquoi le Canada n'a pas fourni plus d'aide à ces groupes. Ils ne sont pas faciles à identifier et il est très difficile de prouver que des fonds ont été détournés, car nous ne sommes pas sur place et nous n'avons personne sur le terrain pour être nos yeux et nos oreilles. On ne peut être certain que des fonds ne sont pas détournés.
    Je n'ai pas beaucoup de choses à dire au sujet des combattants étrangers, sauf que c'est un dossier qui inquiète beaucoup le Canada et ses alliés. Nous savons que des Canadiens se rendent dans la région et réussissent à entrer en Syrie. Nous savons que certains d'entre eux combattent au sein de l'opposition, alors que d'autres se sont joints à des éléments plus extrémistes. Nous travaillons avec vos partenaires, des organismes de renseignements et des organismes de sécurité dans les pays voisins de la Syrie pour identifier ces individus.

  (1615)  

    Je suis désolé de vous interrompre, mais j'aimerais vous poser une question sur ce qui s'est produit hier, alors que l'opposition syrienne a offert de collaborer avec le gouvernement pour lutter contre les groupes extrémistes.
    Qu'en pensez-vous?
    Ce n'est pas la première fois que nous entendons de telles déclarations. Nous n'avons remarqué aucun effort concerté qui nous laisserait croire à une telle collaboration. Il s'agirait presque d'une guerre sur trois fronts. Comme je l'ai dit dans mon exposé, il y a eu quelques affrontements, mais pour le moment, ils ne semblent pas être de nature idéologique — soit un effort concerté pour lutter contre les extrémistes. Il s'agit davantage de groupes de l'opposition qui tentent d'affermir leur pouvoir sur leur territoire.
    Êtes-vous disposé à nous parler du financement de certains de ces groupes externes?
    Je ne peux pas vous en dire beaucoup, d'une part, parce que nous n'avons pas beaucoup d'information, et d'autre part, parce que certaines informations sont confidentielles.
    Il y a deux axes différents. Il y a le financement de groupes semblables aux Frères musulmans qui viennent du Qatar. Il y a aussi le financement d'autres groupes islamistes provenant de pays comme l'Arabie saoudite. Il est très difficile de savoir d'où vient cet argent, puisque ces pays n'avouent pas publiquement leur participation.
    Il est aussi très important de souligner que des fonds proviennent de sources non gouvernementales. Certains individus riches choisissent d'offrir leur soutien, et ils sont très difficiles à identifier.
    Nous allons terminer cette série de questions avec l'intervention de M. Garneau. Monsieur, vous avez sept minutes
    Monsieur Gwozdecky, vous dites que le Canada continue de croire que la seule façon de mettre un terme à la crise qui sévit en Syrie, c'est d'amorcer une transition politique dirigée par la Syrie et menant à l'émergence d'un pays libre, démocratique et pluraliste.
    Le Canada a-t-il dit qu'il allait également insister pour qu'Assad quitte la direction du pays? A-t-il pris position sur cette question?
    M. Baird a clairement indiqué qu'Assad avait perdu toute légitimité et qu'il devrait être tenu responsable des crimes qu'il a commis, y compris l'utilisation d'armes chimiques. Toutefois, je crois que la position du Canada serait que toutes les parties à la table définissent leur avenir. Selon nous, cet avenir inclut des mesures de protection pour les diverses minorités qui forment une société extraordinairement intéressante, très diverse, multiethnique et à religions multiples. Nous voulons que ces minorités soient protégées par un gouvernement laïc et démocratique.
    D'accord.
    La conférence Genève II est prévue pour le 22 janvier. Y a-t-il des règles établies au sujet de l'opposition, puisque les groupes sont si nombreux... revient-il à l'opposition de décider lequel de ces groupes prendra la parole? Ça ressemble un peu à une tour de Babel, je dirais.
    Y a-t-il espoir que l'opposition coordonne ses efforts ou est-ce que chaque groupe se dit en droit de participer aux négociations?
    C'est un des éléments complexes de cette conférence.
    Je dirais qu'il y a encore de chemin à faire à ce chapitre. Les principaux joueurs, soit la Russie, les États-Unis et l'ONU, travaillent fort pour en arriver là. Il y a des problèmes des deux côtés de la table. D'un côté, il y a les positions prises par le régime actuel, y compris le fait qu'Assad demeurerait en poste dans le cadre d'une transition. Cette option est inacceptable aux yeux de l'opposition.
    De l'autre côté, l'opposition affirme que le but de la conférence de Genève n'est pas de négocier, mais bien d'assurer le transfert de pouvoir du régime actuel à l'opposition. Cette position est également à l'extrémité du spectre.
    Les parties concernées doivent tenter d'atténuer ces divergences. Il faut notamment réunir l'opposition autour de certains principes clés. Je ne suis pas convaincu qu'on en soit rendu à cette étape, mais nous ne sommes pas au courant des consultations qui ont lieu en privé.

  (1620)  

    J'imagine qu'il y a eu une conférence Genève I. A-t-elle eu lieu à une époque plus simple où le nombre de groupes au sein de l'opposition était moins élevé?
    Effectivement.
    D'accord. Donc, il s'agissait essentiellement du régime actuel contre l'opposition syrienne.
    Cette première conférence a mené à l'adoption de principes directeurs pour les prochaines rondes de négociations. Ces principes constituent en quelque sorte le prix d'entrée pour la prochaine séance. Les parties concernées, que ce soit les Syriens ou les partenaires internationaux, doivent au moins convenir que ces principes de base doivent être respectés pour participer à la conférence.
    J'aimerais parler des réfugiés. Combien de réfugiés le Canada a-t-il accueillis? Combien ont été parrainés par des familles ou des organisations?
    Nous n'avons pas mis en place un programme de réinstallation pour les réfugiés syriens, en grande partie à la demande des pays voisins de la Syrie et de l'ONU qui ne veulent pas qu'un tel programme serve d'incitatif aux Syriens pour quitter le pays.
    La Syrie doit être rebâtie par les Syriens. La plupart des Syriens dans les camps de réfugiés situés près des frontières de la Syrie veulent revenir chez eux. À ma connaissance, il n'y a pas...
    Il n'y a pas de plan gouvernemental, mais qu'en est-il du parrainage? Le gouvernement a dit qu'il accepterait un certain nombre de réfugiés. Quels efforts ont été menés jusqu'ici?
    Je n'ai pas les chiffres, mais je pense qu'ils sont modestes. Je ne voudrais pas vous induire en erreur avec une estimation, mais nous pouvons vous fournir cette information.
    J'aimerais savoir où nous en sommes à cet égard, car je pense que le gouvernement a accepté de... Quel est le nombre exact?
    C'est 1 200.
    Merci. Oui, je pense que c'est 1 200.
    Mais vous dites que c'est un nombre modeste. Donc, peu...
    C'est un nombre modeste par rapport à notre principal programme de réinstallation dans le monde, qui a aidé plus de 20 000 réfugiés iraquiens en Syrie. Ce programme arrive à terme. Je dirais qu'en comparaison, 1 200 réfugiés constituent un nombre modeste.
    D'accord.
    L'aide humanitaire de plus de 200 millions de dollars que le gouvernement... et nous avons salué cette initiative. Veuillez m'expliquer comment ces fonds parviennent aux réfugiés. Devez-vous choisir parmi les organisations sur place qui présentent des demandes?
    Comment l'argent se rend-il aux réfugiés? J'aimerais connaître le processus.
    Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a le mandat international de répondre à ce genre de crises. C'est un de nos principaux partenaires, mais nous faisons appel à divers autres partenaires qui ont l'expertise dans ce type de situations et qui ont fait leurs preuves au fil du temps.
    Au sein de l'ONU, nous avons fourni 50 millions de dollars au Programme alimentaire mondial. L'aide alimentaire représente un des principaux soutiens. Nous avons versé plus de 27 millions de dollars au UNHCR au cours de cette année.
    Je pourrais vous expliquer les types de services que donne le haut commissariat. Vous avez sûrement constaté le soutien que reçoivent les réfugiés syriens en Jordanie, puisque vous y êtes allé. Je suis heureux d'en parler avec vous. Le UNHCR va procéder à l'inscription de tous les réfugiés. Il va évaluer leurs besoins et ceux de leurs familles au cas par cas, en fonction de la vulnérabilité, par exemple, pour adapter l'aide en matière d'éducation, d'alimentation, de soutien du revenu, etc. Notre approche de filet social vise à leur fournir une aide adéquate.
    Il y a aussi une série d'autres groupes communautaires et d'ONG internationales ainsi que la Croix-Rouge, qui travaillent de concert. Compte tenu de l'ampleur et de l'évolution rapide de la crise, nous avons renforcé notre soutien. En général, nous nous tournons vers le haut commissariat pour coordonner l'aide à fournir.
    En raison de l'ampleur et de l'évolution rapide de la crise dans le cas présent, nous avons dû renforcer le soutien accordé à diverses ONG internationales, comme Aide à l'enfance, Vision mondiale, CARE Canada et Handicap International. Ces organisations mettent à profit leurs capacités particulières.

  (1625)  

    Merci.
    Monsieur Garneau, votre temps est écoulé.
    Nous entamons la deuxième série. Je crois que Mme Brown va partager son temps avec M. Komarnicki.
    Merci, monsieur le président. Je vais essayer de réunir mes questions pour laisser du temps à M. Komarnicki.
    Tout d'abord, je veux remercier publiquement nos travailleurs humanitaires qui réalisent un travail colossal, là-bas. Vous avez parlé des situations dangereuses dans lesquelles ils se retrouvent. En tant que Canadiens, nous les remercions de leur travail. Ces gens sont de vrais héros.
    Monsieur Salewicz, vous et moi avons parlé des enfants, mais nous n'avons pas abordé l'éclosion de polio en Syrie. Pourriez-vous en parler un peu?
    En janvier dernier, notre ministre a participé à la conférence de financement d'Addis-Abeba. Le Canada a pris un engagement. Nous avons donné notre contribution, mais d'autres pays se font toujours attendre. Nous croyons qu'ils doivent tenir parole et verser l'argent promis. Si je comprends bien, les organisations internationales doivent travailler avec environ 27 % des fonds annoncés. En gros, c'est un réfugié sur quatre qui reçoit du soutien financier. Pouvez-vous en parler et dire où nous en sommes? Quelles sont nos attentes pour la conférence de janvier?
    Merci de vos questions.
    Je suis d'accord avec vous et je suis conscient des efforts que consentent les travailleurs humanitaires. Le portrait est assez sombre: 12 membres de l'ONU et 32 bénévoles du Croissant-Rouge arabe syrien ont été tués, 12 membres de l'ONU ont été enlevés et 9 membres du personnel sont disparus. De plus, 68 travailleurs de santé publique ont été tués, 104 ont été blessés et 21 ont été enlevés. C'est une crise d'une ampleur gigantesque.
    Le premier cas de polio a été constaté le 29 octobre 2013. C'est le premier depuis 1999. Malheureusement, il y a maintenant 78 cas confirmés. L'ONU, par l'intermédiaire de l'OMS et de l'UNICEF, et d'autres partenaires ont lancé une campagne musclée pour vacciner 22 millions d'enfants dans la région. Nous offrons un important soutien à l'UNICEF et à l'OMS qui donne des résultats. Jusqu'ici, 19 millions d'enfants auraient reçu des vaccins.
    L'approche consiste à se concentrer d'abord sur la Syrie, puis à élargir l'aide aux pays voisins. En tout, 2,2 millions d'enfants ont reçu des vaccins. Concernant l'aide humanitaire, l'accès demeure la grande difficulté. Les travailleurs collaborent avec des organisations sur place pour trouver des accès.
    Je sais que je prends de votre temps, mais nous devons remercier Rotary International, qui déploie des efforts majeurs.
    Oui, en effet.
    En ce qui a trait aux demandes internationales, je pense que nous faisons meilleure figure qu'auparavant. Nous avons répondu à près de 61 % des demandes de fonds, soit 2,7 milliards de dollars. C'est encore loin des 4,5 milliards nécessaires. Beaucoup d'argent a été versé, au Koweït. Le Canada a fourni une contribution importante. Nous avons ensuite versé d'autres fonds en voyant qu'il y avait des besoins. C'est difficile de suivre certains dons. Le système de suivi de l'ONU se fonde sur les déclarations des contributeurs. L'aide est en grande partie bilatérale, et le bilan est incertain.
    Nous continuons d'exhorter tous les contributeurs à déclarer l'aide humanitaire à l'ONU pour avoir une meilleure idée de ce qui se fait et pour coordonner les efforts. Je pense que nous devons applaudir le Koweït, qui a organisé la conférence l'an dernier. Les 300 millions de dollars qu'il avait annoncés ont été remis à l'ONU et à la Croix-Rouge.

  (1630)  

    Monsieur Komarnicki.
    Vous avez dit que les conditions sur le terrain étaient des plus sombres, à l'approche de la deuxième conférence de Genève. Je pense qu'une personne a parlé d'une intervention semée d'embûches et une autre d'une énigme très grave. Bref, le problème est difficile à régler.
    Y a-t-il des aspects positifs qui vous amènent à croire que nous pourrons accomplir des progrès à cette conférence, malgré la façon dont vous décrivez les conditions sur le terrain?
    Veuillez répondre très brièvement, si possible.
    Je dirais que trois aspects sont porteurs d'espoir. Les progrès diplomatiques récents au Moyen-Orient, l'accord sur le nucléaire iranien et l'entente de destruction des armes chimiques en Syrie montrent que les parties concernées peuvent s'entendre si les conditions sont réunies.
    Pour avoir travaillé en Syrie il y a bien des années, je peux dire que les Syriens sont fantastiques. À mon avis, cette société très séculaire ne veut pas maintenir le régime actuel. Elle souhaite un État différent, stable, démocratique et pluraliste.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Dewar, pour cinq minutes.
    Pour revenir brièvement au programme de l'OIAC, le gouvernement envisage-t-il d'accorder plus de fonds, comme on le laisse entendre?
    Nous évaluons diverses options, à l'heure actuelle.
    Une telle décision ferait sans doute consensus ici. Nous allons attendre et formuler des recommandations là-dessus, mais je suis content de l'entendre.
    En revanche, certains ont affirmé que l'opposition utilisait des armes chimiques. D'après les données disponibles, je dirais que la plupart des gens sont certains qu'il s'agit du gouvernement. Quoi qu'il en soit, mettons cette question de côté un instant.
    Le Canada veut-il que la Cour pénale internationale effectue un suivi? C'est clairement la prochaine mesure à prendre. Je ne crois pas que la Syrie soit signataire du Statut de Rome, mais c'est ce qui pourrait survenir si le Conseil de sécurité appuyait le travail des enquêteurs. Le Canada est-il en faveur d'une telle avenue?
    Je vais répondre en ma qualité d'ancienne avocate responsable de la Cour pénale internationale et des institutions afférentes.
    Bien. Je suis content que vous soyez ici.
    Le ministre Baird a dit très clairement qu'il faut traduire en justice les responsables des crimes commis contre les civils en Syrie et leur demander des comptes.
    Mais concrètement... Vous avez dit à juste titre que la Syrie ne fait pas partie du Statut de Rome, qui prévoit toutefois ce genre de situation. Par exemple, le Conseil de sécurité pourrait demander à la Cour pénale internationale et au procureur d'examiner la question de la Syrie, comme il l'a fait pour la Libye. Mais c'est bien sûr le conseil qui va prendre la décision.
    Sinon, la loi dans les pays comme le Canada permet d'intenter des poursuites pour les crimes de guerre perpétrés à l'étranger. Si M. Assad se trouvait en Grande-Bretagne ou au Canada, l'État pourrait entreprendre des démarches. C'est une possibilité, même si les chances sont minces.
    En tant qu'État membre, je suis sûr que nous allons appuyer cette demande du Conseil de sécurité.
    À l'approche de la conférence de Genève, bon nombre ont dit que le programme de Genève II reprend celui de Genève I. Nous devons commencer à envisager ce que certains appellent un gouvernement de transition, mais il faut renforcer la confiance pour savoir si c'est possible.
    Je veux simplement comprendre la question du point de vue du ministère. Dans son excellent rapport, le Crisis Group recommande de libérer des prisonniers et de donner accès à l'aide humanitaire. Selon vous, quelles autres mesures l'opposition devrait-elle prendre pour renforcer la confiance et témoigner de sa bonne volonté avant la conférence?

  (1635)  

    Je pense que les deux partis peuvent renforcer la confiance de diverses façons. C'est très important que les acteurs étrangers mettent fin au soutien militaire, d'un côté comme de l'autre. Le cessez-le-feu serait également une mesure très importante pour renforcer la confiance. Dans l'exposé, j'ai évoqué la forte possibilité que l'opposé se produise à l'aube de Genève II. La violence pourrait augmenter, parce que les partis veulent accentuer la pression.
    Dans l'idéal, un cessez-le-feu, une réduction ou la cessation de l'appui extérieur et l'ouverture de corridors constitueraient des avancées importantes, tout comme un accès complet aux organisations d'aide humanitaire. Les deux partis peuvent faire des concessions pour y arriver.
    Je n'ai pas beaucoup de temps, mais pouvez-vous répéter le nombre de réfugiés? Avez-vous tenu des réunions interministérielles avec CIC à ce propos? Si c'est le cas, combien de fois vous êtes-vous rencontrés? Je veux simplement en savoir plus sur la coordination.
    Nous nous rencontrons souvent, mais je ne peux pas vous dire si nous avons consacré une réunion à un programme de réinstallation éventuel. Une orientation claire a déjà été donnée. Nous n'avons pas choisi de nous rencontrer à cet égard, parce que la demande n'a pas été formulée.
    Merci.
    Merci.
    Merci beaucoup aux témoins d'avoir pris le temps de venir ici aujourd'hui.
    Nous allons suspendre la séance quelques instants pour passer à huis clos et examiner notre rapport sur l'OEA.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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