Passer au contenu
Début du contenu

CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 034 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 23 février 2015

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Je déclare ouverte la 34e séance du Comité permanent du patrimoine canadien. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous entamons aujourd’hui notre examen de l’industrie canadienne du long métrage.
    Nous accueillons aujourd’hui trois représentants du ministère du Patrimoine canadien. Nous avons Jean-François Bernier, directeur général de la Direction générale des industries culturelles; Johanne Mennie, directrice du Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens; et Scott White, directeur de Politique et programmes du film et de la vidéo.
    M. Bernier et moi avons participé à la dernière étude il y a environ 10 ans. Il y a donc une bonne mémoire institutionnelle autour de la table.
    Monsieur Bernier, vous avez 10 minutes.

[Français]

    Le ministère du Patrimoine canadien apprécie votre invitation alors que le comité entreprend son étude sur l'industrie canadienne du long métrage.

[Traduction]

    Notre objectif aujourd’hui est de vous présenter une vue d’ensemble de l’industrie canadienne du long métrage et du cadre de politique fédéral.

[Français]

    J'aimerais commencer par la page 3, qui présente un aperçu de l'écosystème dans lequel évoluent les principaux intervenants que vous rencontrerez tout au long de vos travaux.

[Traduction]

    La création d’un long métrage nécessite plusieurs professionnels et activités avant que le public puisse le voir. Ce processus était autrefois assez linéaire, mais c’est une tout autre paire de manches de nos jours. Les technologies transforment les relations traditionnelles au sein de l’industrie cinématographique.
    Le secteur audiovisuel canadien est énorme; en 2012-2013, il a généré 5,8 milliards de dollars en production cinématographique et télévisuelle au Canada, et plus de 127 000 Canadiens y travaillent. En particulier, la production de longs métrages canadiens a représenté 6 % de l’activité globale du secteur. Environ 500 entreprises participent à la production télévisuelle et cinématographique au Canada, et 30 000 créateurs canadiens gagnent leur vie dans ces secteurs. Bon nombre d’entrepreneurs et de créateurs travaillent dans les deux domaines.
    Dans le monde, les longs métrages sont des activités culturelles à haut risque et très coûteuses. Le Canada n’y fait pas exception.

[Français]

    Premièrement, notre marché est petit, et les coûts de production ne peuvent être récupérés au niveau intérieur.

[Traduction]

    Deuxièmement, le Canada est divisé en deux marchés linguistiques qui ont chacun leurs caractéristiques et leurs défis.
    En particulier, dans le marché de langue anglaise, les producteurs canadiens doivent directement faire concurrence aux studios américains en ce qui concerne les artistes et le public. À l’instar de la majorité des pays, le gouvernement du Canada soutient son secteur intérieur. De plus, comme nous pouvons le voir dans le tableau à la page 5, le financement des longs métrages canadiens provient en grande partie de fonds publics.
    Les Canadiens regardent des films de diverses manières. Même si la consommation en ligne est en croissance, les formats traditionnels dominent toujours le secteur. L’affluence dans les cinémas au Canada demeure relativement stable. Les recettes ont dépassé 1 milliard de dollars au cours de chacune des cinq dernières années. La majorité des Canadiens regardent des longs métrages à la télévision. En 2013, plus de 90 % du visionnement de films canadiens a été fait à la télévision. Cependant, la croissance des plates-formes en ligne pour les films, notamment les services sur demande comme Netflix, est rapide et considérable.

[Français]

    L'utilisation du pouvoir des médias sociaux dans l'industrie du film est en pleine effervescence. Elle s'annonce comme un élément clé dans l'interaction entre les créateurs, les entrepreneurs et l'auditoire.
    Le cadre de politique fédéral aspire à une intégration optimale de ses outils législatifs, de financement et institutionnels, afin de s'assurer que des films canadiens sont créés et qu'ils sont accessibles.

[Traduction]

    Le système de points concernant le contenu canadien est un pilier du cadre de politique depuis les années 1970. Ce système de 10 points se fonde sur la nationalité du personnel de création qui occupe des postes clés dans des productions audiovisuelles.

  (1535)  

[Français]

     Le système de points est fondamentalement objectif: il ne s'intéresse pas aux facteurs subjectifs tels que le sujet de l'oeuvre ou l'endroit où elle se déroule.

[Traduction]

    Une coproduction audiovisuelle régie par un traité international est créée en mettant en commun les ressources créatives et financières de producteurs canadiens et étrangers. Le Canada fait des coproductions depuis 50 ans et a conclu des traités avec 54 pays. Nos principaux partenaires sont la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne. Le système de points concernant le contenu canadien ne s’applique pas aux coproductions régies par des traités, mais ces coproductions jouissent d’un statut national dans les deux pays. À ce titre, elles sont admissibles aux programmes de financement public. Le nombre de coproductions varie d’une année à l’autre; il y en a eu 20 en 2013.
    Créé en 1995, le crédit d’impôt pour production cinématographique ou magnétoscopique canadienne est le principal encouragement fiscal pour les productions cinématographiques et télévisuelles canadiennes. Le montant du crédit se fonde sur les dépenses de main-d’oeuvre canadienne. Les productions doivent obtenir 6 points sur 10 dans le système de points concernant le contenu canadien ou être des coproductions régies par des traités. Il y a eu 93 longs métrages qui ont été certifiés comme canadiens en 2012-2013. Finances Canada projetait que la valeur totale du crédit d’impôt était de 265 millions de dollars en 2013. Les longs métrages représentaient environ 9 % de cette somme, soit environ 23 millions de dollars.
    Depuis 1997, le crédit d’impôt pour services de production cinématographique ou magnétoscopique canadienne a encouragé l’embauche de Canadiens dans les productions au Canada. Le contenu canadien n’entre pas en ligne de compte quant à l’admissibilité à ce crédit d’impôt, qui se fonde également sur les dépenses de main-d’oeuvre canadienne. Ce programme a contribué à l’essor d’un secteur de la production de calibre mondial au Canada qui attire les producteurs étrangers. Finances Canada projetait que la valeur totale du crédit d’impôt était de 110 millions de dollars en 2013.
    Fondé en 1967, Téléfilm Canada est une société d’État dont le mandat est de favoriser et de promouvoir le développement de l’industrie audiovisuelle au Canada. L’organisme soutient le développement, la production, la distribution et la mise en marché de longs métrages canadiens. Téléfilm Canada gère aussi les traités de coproductions audiovisuelles et le Fonds des médias du Canada.

[Français]

    Téléfilm Canada soutient également les festivals canadiens de films et la participation canadienne aux marchés et festivals de films à l'étranger.
    En 2013-2014, Téléfilm Canada a investi dans 73 longs métrages, tous ayant un minimum de 8 points sur 10 de contenu canadien ou ayant été réalisés en coproduction.

[Traduction]

    CBC/Radio-Canada joue un rôle important pour les films canadiens. Selon ses exigences de licence, CBC doit diffuser des longs métrages canadiens.

[Français]

    S'agissant de Radio-Canada, son engagement envers les films canadiens est solide, et ce, depuis plusieurs années. Cela est important car, tel que je l'ai mentionné, c'est à la télévision que les Canadiens visionnent le plus de films canadiens.
    L'Office national du film du Canada produit et distribue des contenus audiovisuels depuis plus de 75 ans. L'ONF dispose d'un impressionnant catalogue de plus de 13 000 titres, dont plusieurs longs métrages canadiens.

[Traduction]

    Lancée en 2000, la politique Du scénario à l’écran a représenté un virage important dans la politique gouvernementale en ce qui concerne les longs métrages en vue notamment de construire une industrie et de bâtir un public. À l’époque, les ressources provenant du gouvernement fédéral pour les longs métrages ont été doublées pour atteindre 100 millions de dollars, et la politique avait comme objectif d’accroître à 5 % la part de marché des recettes en salle des longs métrages canadiens.
    Dans les années 1970 et 1980, le secteur de la distribution cinématographique au Canada était marginal. Le marché était dominé par les grosses machines d’Hollywood qui ne distribuaient pas de films canadiens. À la fin des années 1980, trois mesures ont été adoptées pour créer un secteur de la distribution au Canada en vue de soutenir les longs métrages canadiens: des restrictions sur les investissements étrangers; l’obligation d’avoir un distributeur canadien pour les films canadiens en vue d’être admissibles à des fonds publics ou à des crédits d’impôt; et un programme de financement pour les distributeurs canadiens par l’entremise de Téléfilm Canada.

  (1540)  

[Français]

     La Loi sur la radiodiffusion confère notamment des pouvoirs de réglementation au CRTC. Il y a trois principales mesures réglementaires en matière de contenu canadien: des exigences à l'égard de la diffusion de contenu canadien, des exigences de dépenses en contenu canadien ainsi que des contributions au financement de contenu canadien par les services de distribution par câble et par satellite.
    Les pages 18 et 19 présentent d'autres outils pertinents au cadre de politique du gouvernement du Canada pour le secteur du film. On parle de la Loi sur Investissement Canada, de la Loi sur le droit d'auteur, du Conseil des arts du Canada et de Bibliothèque et Archives Canada.

[Traduction]

    À la page 20, on constate que, même si certains films ont été encensés par la critique et qu’ils ont connu du succès en salle, il est encore difficile dans l’ensemble pour les films canadiens de trouver un public, en particulier dans le marché canadien de langue anglaise.
    Les résultats pour les diverses plates-formes, y compris la télévision, donnent une meilleure idée des résultats, et la part de marché global est généralement plus élevée.

[Français]

    De manière générale, sur la scène nationale, les films canadiens de langue française performent mieux, que ce soit dans les salles ou les autres plateformes. Les films canadiens de langue anglaise, les coproductions en particulier, performent bien à l'international.

[Traduction]

    À la page 21, nous avons donné des exemples récents de films canadiens qui ont connu un succès commercial ou qui ont été encensés par la critique. La semaine dernière, Mommy a gagné le César du meilleur film étranger lors de la cérémonie des César, soit l’équivalent français des Oscars.
    Le soutien continu du gouvernement à l’égard de la création de films canadiens et de leur accès a toujours été l’objectif principal des gouvernements qui se sont succédé. Les décideurs doivent demeurer attentifs aux conditions du marché qui évoluent rapidement. Notre adaptabilité nous assurera que les films canadiens continuent d’être un important moteur économique au Canada et un ambassadeur de la culture canadienne au pays et à l’étranger.
    Mes collègues et moi-même avons hâte de lire votre rapport et sommes disposés à répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Bernier.
    Passons aux questions. Nous aurons d’abord des séries de questions de sept minutes.
    Monsieur Young, allez-y en premier.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de leur présence aujourd’hui. C’était une présentation très intéressante.
    J’ai une grande question, mais je ne m’attends pas à une réponse très détaillée. Pourriez-vous brièvement résumer les principaux changements qui se sont produits dans l’industrie au Canada au cours de la dernière décennie? Nous avons réalisé une étude il y a 10 ans, et je n’étais pas là à l’époque, mais nous avons cette étude pour nous aider, et je crois que c’est une ressource utile dans une certaine mesure.
    Quels sont les principaux changements qui se sont produits de manière dynamique au sein de l’industrie cinématographique dans le monde? Comment y avons-nous réagi?
    Vous avez raison. Ce pourrait être une réponse passablement typique...
    Prenez tout le temps nécessaire.
    ... mais je vais essayer d’y répondre, et je vais peut-être demander à Scott de m’aider.
    Ce qui résume la dernière décennie, c’est l’avènement des technologies numériques. Netflix n’existait pas il y a 10 ans. De nos jours, 30 % des Canadiens y sont abonnés.
    Les technologies — et j’ai mentionné les réseaux sociaux — offrent d’incroyables possibilités aux films canadiens au pays et à l’étranger.
    Avant Noël, le film canadien Corner Gas est sorti en salle. Pour promouvoir le film, on s’est servi très activement des réseaux sociaux. Le film a été à l’affiche durant quatre ou cinq jours; il ne l’a pas été durant quatre ou cinq mois, comme c’était le cas il y a 10 ans. J’exagère peut-être un peu, mais le film n’a pas été à l’affiche très longtemps en salle. En même temps, le film était offert par l’entremise de services sur demande et de divers autres services qui n’étaient encore qu’au stade embryonnaire il y a une décennie.
    Une décennie, c’est l’espérance de vie d’un chien. Un chien de 10 ans a l’impression d’en avoir 100. Les 10 ans ont changé la donne non seulement dans l’industrie cinématographique, mais aussi dans l’industrie musicale et toutes les industries culturelles.
    Scott, aimeriez-vous ajouter quelque chose?

  (1545)  

    À mon avis, l’un des principaux facteurs est les changements technologiques. Nous avons constaté une diminution des coûts de production et de distribution.
    Les gens cherchent du contenu sur les plates-formes mobiles et du contenu qu’ils peuvent consommer quand ils le veulent. Il y a donc eu un changement dans la dynamique entre ceux que nous pourrions appeler les gardiens, soit les producteurs et les distributeurs, et les consommateurs. Les consommateurs sont de plus en contrôle de ce qu’ils regardent et quand ils le font.
    Ailleurs dans le monde, nous constatons également une croissance dans les marchés. C’est aussi un élément qui a changé depuis 10 ans. Les États-Unis sont toujours le marché audiovisuel dominant dans le monde, mais cela ne devrait pas tarder à changer. Le marché chinois est très fort, et le marché indien a toujours été très imposant. C’est dans le marché chinois que ça se passe actuellement pour les producteurs américains qui veulent se tailler une place. Voilà un autre changement important.
    Jean-François a fait allusion à la réduction des périodes. C’est un peu un sujet pointu, mais il est ici question du temps qui est accordé à la distribution d’un film sur diverses plates-formes. À l’époque, c’était fait de manière très ordonnée. Les cinémas étaient les premiers à avoir le film, et le film pouvait être disponible uniquement dans les cinémas durant plusieurs mois. Si vous vouliez ensuite le regarder à la télévision, vous deviez attendre plusieurs mois, voire plusieurs années. Il y avait une progression ordonnée en la matière.
    Cet aspect a été mis à rude épreuve, en particulier au cours des deux ou trois dernières années. Nous le constatons peut-être plus aux États-Unis, mais je crois que nous le verrons aussi au Canada. Nous voyons maintenant des films qui sont accessibles directement sur les plates-formes numériques et qui font fi des cinémas. Cette situation présente des défis, mais cela dépend de votre point de vue. Les propriétaires de cinémas en sont probablement anxieux, mais cela offre beaucoup plus de possibilités aux producteurs en vue de distribuer leurs produits sur diverses plates-formes, parce que ce ne sont pas tous les films qui conviennent à une projection en salle. Nous avons maintenant l’occasion de présenter divers types de films au public.
    Les changements technologiques ont-ils aidé les réalisateurs canadiens à faire connaître leurs histoires et leurs films à plus de gens? Je vois que le budget moyen d’un film canadien est de 4 millions de dollars, tandis que le budget moyen d’un film américain est de 70 millions de dollars.
    C’est de 100 millions de dollars.
    C’est de 100 millions de dollars.
    Nous sommes désavantagés, parce que notre économie et notre pays sont 10 fois plus petits que les leurs. Ces nouvelles plates-formes nous procurent-elles certains avantages? Dans l’affirmative, pouvons-nous le faire de manière indépendante ou faut-il que ce soient des coproductions? Quelle est l’importance des coproductions?
    La technologie a certainement donné des possibilités à tous les réalisateurs de films de la planète. Le marché n’est pas le Canada; c’est la planète. Vous pouvez publier quelque chose sur YouTube, que vous soyez en Corée du Sud, au Japon ou à Gaspé. La difficulté quant à l’élaboration de la politique publique, c’est qu’il est très difficile de mesurer les recettes d’un film sur ces nouvelles plates-formes. Les données sont difficiles à obtenir.
    Par contre, en théorie, les nouvelles technologies ouvrent le monde aux créateurs et aux produits canadiens. Parallèlement, elles ouvrent notre marché aux créateurs et aux produits étrangers. À l’instar des secteurs de la musique, des livres et d’autres secteurs, le défi demeure de sortir du lot.
    Les succès des dernières années... Nous avions du succès il y a 10 ans. Cependant, au cours de la dernière décennie, il y a chaque année quelque chose au sujet de films canadiens. Des films canadiens retiennent l’attention: Monsieur Lazhar, Incendies, Mommy et Resident Evil.
    Les Canadiens sont très bien perçus et ont la cote. Les directeurs canadiens reçoivent des appels ou des courriels de partout dans le monde pour aller travailler à l’étranger. Prenons l’exemple de M. Vallée, le directeur de Wild. Le film a été produit par une entreprise américaine, mais il s’agit quand même d’un artiste canadien qui se démarque.
    Vous avez demandé si les coproductions pourraient donner un coup de main à l’industrie canadienne du long métrage. Cela va de soi. S’il y a bien une chose qui n’a pas changé depuis 10 ans, c’est la difficulté de trouver du financement pour les films. L’argent ne pousse pas dans les arbres. Tous les gouvernements essayent d’équilibrer leur budget; cela vaut pour les gouvernements fédéral, provinciaux et étrangers. Il est difficile de trouver de l’argent pour produire des films.

  (1550)  

    Merci. Nous devons passer au prochain intervenant.

[Français]

     Monsieur Nantel, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos trois témoins d'être là.
     On pourrait croire que je dis cela par politesse ou par habitude, mais c'est très important pour nous car nous entreprenons une étude importante. Nous avons convenu de recevoir des gens qui ont une belle vision d'ensemble de la chose et de faire bien comparaître nos témoins. Nous voulons essayer de bien comprendre la situation en se centrant sur les questions prioritaires. Comme M. Brown l'a dit, une étude très poussée a été faite il y a 10 ans. Il faut, comme le dit M. Young, porter notre attention sur ce qui a changé. Je vous remercie donc d'être là.
    Parlons de ce qui a changé. Je parcourais votre document et je pense qu'il va nous aider à bien organiser les audiences de témoins. Je ne peux m'empêcher de remarquer que vous avez dit, un peu plus tôt, que la technologie constituait le grand changement. Nous sommes du même avis. J'aime beaucoup rappeler que quand tout le monde est arrivé ici, en 2011, à peu près personne n'avait un iPad, alors que tout le monde en a un maintenant. Il est évident que cela a changé.
    Vous avez dit que la question était d'avoir les statistiques sur l'auditoire des compagnies comme Netflix qui bouleversent complètement la donne. Dans un article que je lisais ce matin dans La Presse, on pouvait lire que Netflix avait le même effet sur le cinéma qu'Uber avait sur le taxi. On ne peut pas être contre la technologie, mais il faut tenir compte de ses impacts.
    Quand je vous entends dire qu'avoir les statistiques est ce qui va nous aider à nous ajuster à tout cela, j'ai le goût de vous demander comment vous comptez récupérer l'erreur de la ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles. En effet, elle a dit, lors du deuxième jour des audiences du CRTC qu'elle ne toucherait pas à Internet alors que, de toute évidence, c'est ce qui chamboule tout l'écosystème.
    Votre question contient un piège et je vais tenter de l'éviter.
    En ce qui a trait aux statistiques, il y a trois défis: avoir des statistiques disponibles, fiables et abordables. On peut envoyer un questionnaire à tous les gens de la planète pour savoir s'ils ont vu un film canadien la semaine dernière, mais je ne suis pas certain que ce soit très efficace.
     Pour le développement de politiques publiques, le défi est donc de bien évaluer le trafic. On sait, par exemple, que des films canadiens sont disponibles par l'entremise de Netflix. Ils vont imprimer des pages, etc. On peut voir des films canadiens, mais quel est l'auditoire pour ces films? On n'en est pas encore à pouvoir obtenir les statistiques.
     Je comprends, mais c'est une question que je me devais de poser. C'est dans la tête de tout le monde, même dans celle de ceux qui ne veulent pas qu'on en parle. Ils savent bien que cela a été dit. Je ne vous demanderai pas de commenter davantage.
    Je vais cependant me permettre de vous dire ceci. Je suis allé sur le site de Netflix tout à l'heure. J'ai calculé, avec une appli de iPhone — c'est sûrement similaire sur un iPad —, qu'il y avait 13 colonnes. Dans la première colonne, il y avait 77 choix, ce qui donne environ 1 000 titres. On peut donc imaginer que c'est volontaire. Je n'ai pas fait tout cela pendant que vous parliez puisque je vous écoutais. Sur les 77 choix de la première colonne, je n'ai pas vu de contenu canadien.
     C'est ce à quoi nous sommes confrontés aujourd'hui; c'est l'enjeu le plus important. Il faudra trouver un moyen, sans que ce soit invivable sur le plan politique pour certains d'entre nous. Nous devrons nous pencher sur cette question.
    J'ai 51 ans. Le contenu canadien dans les différents médias a fait toute la différence et m'a exposé à autre chose. Je me souviens très bien que la première série canadienne que j'ai écoutée était The Friendly Giant. Quelques années plus tard, j'écoutais la série The Beachcombers. Aujourd'hui, il y a des séries commeLittle Mosque on the Prairie et Corner Gas.
    Comme vous l'avez dit, c'est plus facile au Québec à cause du plus grand auditoire, de la barrière linguistique, de notre grande productivité et de notre aptitude à raconter des histoires. Cependant, on imposait un quota de contenu local au diffuseur qui voulait obtenir le droit d'utiliser les ondes dans son secteur. La grande question à se poser au sujet de la production cinématographique au Canada est: qu'allons-nous faire? La réponse est loin d'être simple.
    J'invite tous les membres du comité à consulter le livre intitulé The Birth of Korean Cool. Je me suis intéressé à ce sujet en feuilletant L'actualité et aussi parce qu'une de mes voisines de Longueuil — appelons-la Geneviève Duquette — me disait adorer la télévision coréenne. Cela m'a surpris. Le site dont elle me parlait était dramafever.org. Je ne parle que de la finalité, mais il y a toute une politique culturelle autour de cela.
    Veuillez excuser mon préambule long de huit siècles.
    Selon vous, comment pouvons-nous aiguiller notre étude sur les solutions concrètes liées aux multiplateformes? Ultimement, comment éviter que le CRTC puisse dire, en fin de compte, qu'il n'a pas le mandat d'étudier cela?

  (1555)  

    Si j'avais la réponse à cette question, j'en aurais parlé dans ma présentation.
    Monsieur le président, dans mon réponse, je préférerais me limiter aux moyens.
    La réglementation en place depuis les années 1970 a bâti l'édifice culturel du pays. Les temps ont changé. La réglementation est plus difficile à appliquer. Disons qu'elle est sous pression comme elle ne l'a jamais été. Ce n'est pas unique au Canada. C'est aussi le cas en Chine, en Russie et dans d'autres pays.
    Je comprends.
    J'ai encore quelques questions à poser. Me reste-t-il encore du temps, monsieur le président?
    Il ne me reste que dix secondes. Je pense que je vais vous donner une pause, monsieur Bernier.
    Monsieur Dion, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie également, madame et messieurs.
    J'aimerais que nous passions tout de suite à la page 20. Dans le tableau, pour 2014, il y a un chiffre de 10 %. Si je comprends bien, cela veut dire que sur les recettes faites au guichet au Québec, que ce soit en français ou en anglais, les films québécois francophones ont représenté 10 % du marché québécois.
    Est-ce bien cela?
    Il s'agit des films en langue française diffusés n'importe où au pays, mais principalement au Québec.
    Il s'agit de 10 % de quoi?
    Il s'agit de 10 % des recettes au guichet. Cela veut dire que les films canadiens en français...
    Vous dites qu'ils représentent 10 % des recettes au guichet?
    Oui, c'est cela.
    Si l'on ne considère que le Québec, à quel chiffre arrive-t-on?
     Ce serait probablement à peu près la même chose.
    Non, ce serait bien plus.
    Parlez-vous des recettes au guichet au Québec?
     Parle-t-on de 10 % des recettes au guichet des films français ou de 10 % des recettes au guichet tout court?
    On parle de 10 % des recettes au guichet tout court.
    Il est question ici des films de langue française, dans le marché de langue française.
    Dans le marché de langue française,...
    Ils constituent 10 % des recettes au guichet.
    Ils constituent 10 % des recettes au guichet dans le marché de langue française.
    C'est exact.
    Les films canadiens représentent 10 % des films présentés en langue française.
    Cela m'étonne que ce ne soit pas plus que cela. On se fait battre à plate couture par les Français.
    Il y a aussi des films américains qui sont présentés en langue française.
    Ah, c'est cela, des films doublés. D'accord, je comprends.
    Par ailleurs, quand il est question des multiples plateformes dans le deuxième tableau, de quoi s'agit-il?

  (1600)  

    Il s'agit de la télévision, de la vidéo à la carte, de la télévision payante, ainsi que des ventes et des locations de vidéos.
    D'accord.
    La télévision fait la différence.
    Je comprends.
     Pour revenir au premier tableau, les recettes pour le cinéma augmentent-elles ou diminuent-elles au Canada, en gros?
    On voit des pourcentages, mais on ne voit pas le total en dollars.

[Traduction]

    C’est d’environ 1 milliard de dollars par année pour les cinq dernières années. Le total n’a pas vraiment changé.
    Cela n’a pas changé.
    C’est plutôt stable.
    Par contre, il y avait une croissance à l’époque.
    Tout dépend jusqu’où vous remontez.
    Il y a un autre facteur. Au cours des cinq ou six dernières années, nous avons récemment vu la popularité des films 3D, et le prix de ces billets est plus élevé. Cette situation a une incidence sur les recettes en salle.

[Français]

    Vous avez parlé des changements de technologies. Si vous aviez eu à écrire ce document en 2005 quand nous avons fait notre dernière étude, qu'est-ce qui aurait été différent dans le cadre de politique? En quoi les politiques ont-elles changé au cours des dix dernières années?
    Essentiellement, les outils sont demeurés les mêmes: crédits d'impôt, Téléfilm Canada, l'Office national du film du Canada. Il faudrait voir, mais il y a dix ans, l'Office national du film produisait peut-être plus de longs métrages; depuis, il a migré énormément vers la production d'animation en ligne et vers tout ce qui est fait par ordinateur. Ce ne sont pas des longs métrages comme Kamouraska et Mon oncle Antoine.
    Je pense à la situation d'il y a dix ans et j'essaie de voir si nous avons pris des mesures en ce qui a trait au cadre de politique et aux outils.
    Auriez-vous écrit quelque chose de très différent il y a dix ans?
    Je n'aurais rien écrit de différent, absolument pas. Le premier tableau auquel vous faites référence, à la page 20, représente les tendances du marché en salles. En ce qui a trait aux outils des politiques, ce sont essentiellement les mêmes.
    Il est surprenant pour ce comité de voir que l'environnement technologique change énormément, mais que les politiques n'ont pas changé.
    Y a-t-il quelque chose là dedans?
    Attention, les outils n'ont peut-être pas changé dans leur forme, mais Téléfilm Canada, qui existe depuis 1967, a adapté ses programmes aux nouvelles technologies. L'ONF s'est adapté aux nouvelles technologies. Les industriels, les entrepreneurs distribuent des films par l'entremise des nouveaux canaux. Ils utilisent les médias sociaux. Des dépenses liées à l'utilisation de ces outils sont maintenant des dépenses admissibles, par exemple, pour les fonds de Téléfilm Canada.
    Le détail de la mécanique des fonds s'est donc adapté, mais le cadre de politique est essentiellement le même.
    Il y a donc eu des changements, mais ils ne figurent pas dans votre document. Nous allons les découvrir quand ces gens vont venir témoigner devant nous; est-ce exact?
    Oui, j'ai tenté de vous présenter une photo du cadre de politique aujourd'hui. Évidemment, je ne sais pas qui vous allez inviter, mais si des représentants de Téléfilm Canada ou du CRTC comparaissent...
    Ne pas les inviter serait très bizarre.
    Si des représentants du CRTC comparaissent, ils vous diront que les services de vidéo sur demande n'existaient peut-être pas il y a dix ans — je ne sais pas exactement à quel moment les premiers services sont apparus —, mais lorsque cela s'est produit, ils ont été réglementés. Pour ces services, le CRTC a imposé des règles, par exemple que l'on diffuse un film canadien par mois ou quelque chose comme cela. Il y a donc une certaine réglementation relative à ces outils.
     Est-ce que Patrimoine canadien s'est adapté aussi?
    On a fait des modifications à la Loi de l'impôt sur le revenu en matière de crédits d'impôt. On a adopté une nouvelle politique en matière de coproduction audiovisuelle, en 2011. C'était d'ailleurs une recommandation du comité, il y a plusieurs années. On s'est adapté en ce qui concerne la mesure du rendement. Il y a 10 ans, vous n'auriez pas eu le tableau qui figure à la page 20. Vous n'auriez pas eu les plateformes multiples. Notre objectif, à ce moment-là, concernait uniquement la situation en salles parce que les autres marchés étaient moins présents.

  (1605)  

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Monsieur Hillyer, vous avez sept minutes.
    Merci de votre présence. C’est très intéressant.
    En répondant aux questions de M. Young, vous avez dit que les changements technologiques sont le plus important changement dans l’industrie. Diriez-vous que ces nouvelles plates-formes donnent à l’industrie cinématographique canadienne accès à un plus vaste public? Nos productions sont-elles plus vues?
    En théorie, oui. Comme je l’ai mentionné, le marché est maintenant le monde entier. Dès qu’un film est disponible sur Netflix — et il y a des films canadiens sur Netflix —, ce film a accès à un public auquel il n’avait pas accès avant que soient offerts des films sur ce service en continu.
    J’ai de la difficulté à répondre à votre question, parce que je ne peux pas vous donner de statistiques sur le nombre que cela représente. Dans quelques années, nous le pourrons, mais les données ne sont simplement pas disponibles pour l’heure.
    Ces données sont-elles recueillies par qui que ce soit?
    Non, elles ne sont pas disponibles.
    Nous pourrions peut-être les demander à Netflix ou à quelqu’un d’autre?
    Je vous encourage à les demander à Netflix.
    Auriez-vous deviné qu’outre la croissance du marché mondial grandissant, ces plateformes permettraient à un plus grand nombre de Canadiens de regarder plus de contenu canadien?
    Comme Jean-François l’a mentionné, en théorie, oui, car, dans le passé, si un film n’était pas à l’affiche dans les cinémas, ou même s’il l’était, vous aviez très peu d’occasions de le visionner, en supposant que vous en ayez entendu parler, parce que certains films canadiens ne passaient dans les cinémas qu’à peu près une semaine.
    En théorie, les plateformes en ligne, où les films sont affichés pendant des mois ou des années, donnent aux films canadiens une meilleure chance d’être visionnés. Bien sûr, comme nous l’avons également mentionné, il y a un risque que ces films passent inaperçus dans une mer de contenu. Si des milliers de films sont affichés sur Netflix, comment nos films peuvent-ils se démarquer des autres? C’est assurément un autre problème à régler.
    Il se peut qu’en tant qu’enfant ou même en tant que jeune adulte, on ne se préoccupe pas vraiment de savoir si un contenu est canadien ou non. On ne remarque pas que de nombreux films canadiens sont à l’affiche dans des cinémas ordinaires. Je ne crois pas qu’il y en ait beaucoup. Même à la télévision, on en voit plus fréquemment à CBC/Radio-Canada, mais, même si CTV et les réseaux privés diffusent du contenu canadien, il s’agit plus souvent de séries télévisées que de films.
    Le pourcentage de contenu canadien est-il pire sur Netflix? Il ne semble pas y avoir grand-chose aux postes de télévision ordinaires, dans les clubs vidéo ou dans les cinémas, n’est-ce pas?
    Il y a des films canadiens sur Netflix, et nous nous contentons de parler de Netflix, mais il y a d’autres services de diffusion en continu, dont des options canadiennes comme Shomi, CraveTV et Illico. Il y a des solutions de rechange canadiennes.
    Je suis désolé, mais nous n’avons aucune idée du nombre de films canadiens affichés sur Netflix. Nous savons qu’il y en a, mais nous ignorons totalement combien de téléspectateurs les regardent. Ce serait une excellente question à poser à un représentant de Netflix, si vous invitiez cette entreprise à participer à votre étude.
    Pourriez-vous parler un peu du modèle de coproduction internationale et dire si vous pensez qu’il est avantageux et, le cas échéant, pourquoi? Aidez-nous simplement à comprendre davantage les rouages du modèle.
    Un nombre de plus en plus important de films devront diversifier leurs sources de financement. Comme je l’ai mentionné, le financement de cette industrie demeure une difficulté majeure. Les accords de coproduction sont des traités internationaux conclus entre deux pays. Je ne suis pas avocat et, lorsque j’ai commencé à exercer cet emploi, il y a quelques années, je ne m’étais pas rendu compte, monsieur Brown, de l’importance que revêt un traité. C’est la mère de tous les contrats conclus entre deux pays. Le traité ouvre des portes aux Canadiens.
    Le Canada a commencé à négocier avec la France en 1967. Par conséquent, nous étions les instigateurs des traités de coproduction avec la France. Après toutes ces années, nous faisons maintenant équipe avec 54 pays. Un accord de coproduction a essentiellement l’avantage de favoriser des programmes nationaux. Disons qu’il s’agit d’une coproduction entre la France et le Canada. La France met des outils à la disposition de son industrie cinématographique, tout comme le Canada met des outils à la disposition de son industrie du long métrage. La coproduction est considérée comme une production nationale dans les deux pays, et elle donne accès à du financement étranger et des marchés.
    L’année dernière, le Canada a signé un accord de coproduction avec l’Inde. L’Inde est un grand pays. L’accord permettra aux films canadiens d’être vus par un marché qui, autrement, leur aurait été fermé — je ne devrais pas dire fermé, car l’Inde n’est pas un pays fermé. L’accord ouvre des portes aux acteurs, aux talents et aux produits canadiens.

  (1610)  

    Tout comme certains Canadiens s’enorgueillissent de regarder des productions canadiennes, il y a probablement des Français qui s’enorgueillissent de regarder des productions françaises, et ils visionnent une production canadienne en même temps.
    Je veux juste m’assurer de poser la question suivante avant que mon temps de parole soit écoulé. Vous parlez de la nécessité d’obtenir du financement public, parce qu’il s’agit d’activités présentant un risque élevé. Vous avez donc du mal à trouver des investisseurs privés. Lorsque vous en trouvez et que le risque porte ses fruits, ces investisseurs sont remboursés, et même davantage. Toutefois, le public reçoit-il quelque chose en échange de ses investissements?
    Vous avez utilisé tout le temps dont vous disposiez. Peut-être pourrez-vous aborder ce sujet au cours de la prochaine série de questions.
    Nous allons maintenant passer aux séries d’interventions de cinq minutes. Nous allons entendre M. Stewart.
    Je suis originaire de Burnaby, en Colombie-Britannique. Ma région compte plus de 120 entreprises liées à l’industrie cinématographique, dont plusieurs studios. Nous sommes très fiers de notre industrie cinématographique là-bas. J’entends constamment les gens dire que l’industrie du film de la Colombie-Britannique est très différente de celles du reste du Canada en ce qui a trait à la nature des productions réalisées là-bas.
    Étant donné que nous sommes au début de notre étude, je me demande simplement si vous pourriez formuler des observations à ce sujet et mentionner particulièrement la Colombie-Britannique afin de nous donner une idée des différences qui existent entre les diverses régions du Canada.
    Vous pourriez peut-être expliquer également comment les politiques nationales contribuent à favoriser la croissance de l’industrie cinématographique de la Colombie-Britannique.
    Oui, vous avez absolument raison.
    La plupart des activités qu’on observe en Colombie-Britannique sont qualifiées de « productions de service ». Cela signifie que les entreprises de production de la Colombie-Britannique offrent leurs services à d’autres entreprises, principalement responsables de productions hollywoodiennes, qui utilisent le Canada comme lieu de tournage pour leurs films ou pour obtenir certains services spécialisés, comme les effets spéciaux ou les productions d’animation. Ces entreprises contribuent ou prennent part à la production d’un producteur étranger. Comme la Colombie-Britannique est plus près de la Californie et de Los Angeles, les Américains ont tendance à tourner leurs productions là-bas.
    Il est plus facile d’organiser le transport aérien de John Travolta à Vancouver, depuis Hollywood. Il peut revenir chez lui le même soir et dormir dans son propre lit. Alors que, si on l’amène à Halifax ou à St. John's, à Terre-Neuve.... Par conséquent, une grande partie des activités qui se déroulent en Colombie-Britannique sont liées à des productions étrangères. Toronto et Montréal sont d’autres grandes villes où de telles activités sont exercées.
    Dans l’autre partie de votre question, vous nous demandiez si certaines politiques nationales aidaient la Colombie-Britannique. Je vous répondrais que les politiques nationales ont une vocation nationale. Dans cette industrie, ces politiques ne mettent pas un accent particulier sur la Colombie-Britannique ou la Saskatchewan ou.... Grâce au programme de crédit d’impôt, si l’on embauche des travailleurs en Colombie-Britannique, on produit des feuillets T4, et l’on obtient un crédit d’impôt en retour.
    Une politique nationale ne vise pas nécessairement à aider l’industrie britanno-colombienne, ontarienne ou québécoise. Nous venons en aide à toutes les industries que d’un point de vue national, nous considérons comme des industries cinématographiques canadiennes.

  (1615)  

[Français]

     Merci, monsieur Bernier.
    Madame Mennie, vous avez évoqué la postproduction, une phase importante dans l'industrie du cinéma. Hier, un dénommé Craig Mann, un mixeur canadien, a remporté un Oscar pour le film Whiplash. Par ailleurs, le film d'animation de Dean Deblois était en lice.
     A-t-on des incitatifs pour la postproduction? Je pense entre autres à Rodeo FX, qui a réalisé 90 % des effets spéciaux du film Birdman, qui a été récompensé plusieurs fois hier.
     C'est un aspect très important de l'industrie. Est-ce que des programmes spécifiques lui sont destinés ou est-ce uniquement le taux de change qui l'avantage?
    Tous les coûts liés à la postproduction sont admissibles aux crédits d'impôts. Ils font partie des coûts totaux de la production. Cela fait donc partie du calcul permettant de recevoir un crédit d'impôt si la production est admissible.
    Certaines dépenses sont admissibles dans le cadre du fonds de Téléfilm Canada, le Fonds du long métrage du Canada.
    Le mandat du ministère du Patrimoine canadien est avant tout culturel. Évidemment, il est aussi économique, mais au quotidien, notre objectif n'est pas nécessairement de faire venir John Travolta à Vancouver. Si cela se fait, tant mieux, car cela permet de maintenir l'infrastructure dans cette ville et de faire en sorte que les techniciens soient occupés. Ceux-ci travaillent alors avec des outils d'aujourd'hui et non d'il y a 20 ans. Nos politiques sont destinées aux productions canadiennes.
    Vous avez bien raison. Ici, on parle davantage de la dimension industrielle.

[Traduction]

    D’accord, nous allons passer à M. Yurdiga, qui dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, merci, chers témoins d’être venus aujourd’hui. Vos exposés étaient très intéressants.
    Notre société est une énorme mosaïque culturelle. Dans ma collectivité de Wood Buffalo, dans le nord de l’Alberta, 100 pays sont représentés.
    Il est écrit ici que 59 des 93 films canadiens produits en 2012 et 2013 étaient en anglais et que 34, étaient en français. Y a-t-il des films produits dans d’autres langues qui ciblent, en particulier, n’importe quel groupe n’appartenant pas aux communautés anglaise et française?
    Oui, nous certifions des longs métrages produits dans des langues différentes du français et de l’anglais. Je dirais qu’en moyenne, ils représentent 2 % des productions que nous certifions annuellement. Environ 2 % des 1 100 productions que nous certifions sont tournées dans des langues autres que le français ou l’anglais.
    Observez-vous une demande plus importante de films produits dans d’autres langues?
    Cette demande est plutôt stable.
    D’accord, merci.
    J’examinais justement l’incidence économique exposée ici. Nous sommes maintenant à l’ère numérique; nous nous portons à la rencontre d’un plus grand nombre de personnes. Nous sommes plus mobiles; nous utilisons nos téléphones cellulaires, nos iPad ou n’importe lequel des appareils que nous possédons. Maintenant que nous suscitons l’intérêt d’un plus grand groupe de gens, quelle incidence économique globale cet intérêt aura-t-il? Auparavant, si vous souhaitiez regarder un film, vous deviez être à la maison et vous contenter de ce qui était diffusé. Cependant, vous pouvez maintenant regarder un film n’importe où. L’accès à un marché plus important accroît-il les profits de l’industrie cinématographique?

  (1620)  

    Je n’en suis pas certain. À l’annexe A, le graphique montre la valeur de 10 années de production dans les secteurs cinématographique et télévisuel. Vous pouvez constater qu’en général, la tendance est à la hausse, mais, selon moi, il est trop tôt pour distinguer les répercussions dont vous parlez.
    Oui, les répercussions financières. Il va sans dire que les recettes revêtent une grande importance pour n’importe quelle industrie.
    Vous avez raison. Je vais vous parler d’un phénomène que nous avons observé dans toutes les autres industries culturelles, à savoir que les produits physiques génèrent des recettes différentes de celles des produits numériques. Les industries en question ne se sont pas encore adaptées entièrement à cet état de choses. Dans l’industrie cinématographique, l’exemple le plus frappant serait les DVD. Leur vente générait beaucoup d’argent, et il y avait beaucoup de profits à réaliser auprès des divers acteurs, alors que les fichiers numériques et la distribution numérique de films coûtent beaucoup moins cher. Par conséquent, pour toucher les mêmes recettes, il faut accroître le nombre de ventes, n’est-ce pas?
    Oui.
    Au chapitre des emplois, il est évident qu’un nombre croissant de films sont produits. Le nombre de gens qui travaillent dans l’industrie cinématographique augmente-t-il?
    Non, nous n’avons pas encore observé cette hausse.
    Ce nombre est donc stable.
    Si nous examinons le nombre de productions que nous certifions depuis un certain temps, nous constatons que la courbe est assez plate. Nous n’observons aucune augmentation considérable d’une année à l’autre; le nombre de productions est plutôt stable. Vous pouvez envisager cela du point de vue des capacités, c’est-à-dire des étudiants qui sortent des écoles de cinéma ou d’ailleurs et de la mesure dans laquelle le marché est capable d’absorber les productions lancées.
    Si vous me le permettez, j’aimerais préciser que, même si la courbe est effectivement assez plate, les productions que Johanne certifie sont des productions cinématographiques et télévisuelles traditionnelles. Nous ne certifions pas de jeux vidéo ni une grande partie du matériel affiché en ligne, ce qui est une bonne chose. Ce contenu canadien est lancé, et il se taille une place.
    Si vous souhaitez voir un exemple révélateur de ce qui est produit à l’extérieur du cadre habituel, je vous invite à visiter le site Web epicmealtime.com, qui a été conçu par des types de Montréal. Ces derniers présentent des recettes extrêmes, comme une recette pour préparer un énorme hamburger. Ils ne cessent de compter les calories et, si elles sont inférieures à 250 000, elles sont jugées insuffisantes, alors ces types ajoutent de plus en plus de bacon. Ces recettes sont présentées, et des visiteurs les regardent. En fait, deux millions de personnes regardent ces présentations. Il s’agit là d’une autre forme de contenu.
    Devrions-nous être fiers d’epicmealtime.com? Je ne sais pas. C’est discutable, mais deux millions de personnes trouvent cela amusant et intéressant à regarder. Nous ne finançons pas cette production, mais je suis certain que des créateurs y travaillent, ne serait-ce que le type qui tourne ces présentations. Il se peut que, le jour suivant, ce type travaille avec Xavier Dolan ou à l’ONF. Des gens tournent ces productions audiovisuelles.
    D’accord, merci. Nous allons passer au prochain intervenant.

[Français]

     Monsieur Nantel, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais poser des questions brèves car le temps file rapidement.
    Je vous remercie de votre présence ici. Votre témoignage est très éclairant pour nous.
    Les deux graphiques de la page 20 m'interpellent beaucoup. Si j'ai bien compris le premier graphique, les films en salle en français au Canada obtiennent vaguement 10 % des recettes au guichet. Dans le deuxième graphique sur les multiplateformes, les films en français obtiennent 6,9 %.
    N'est-ce pas un indicatif de ce que j'évoquais, c'est-à-dire qu'il y a tellement de choix que les gens délaissent un peu le contenu canadien francophone?
    Nous n'avons pas fait une analyse sur la motivation des gens. Nous pourrions tirer une autre conclusion de votre analyse, à savoir que les gens, une fois qu'ils ont vu le film en salle, ne le regardent pas lorsqu'il passe à la télévision ou dans les autres médias.

  (1625)  

     Bien sûr, il faut comparer des pommes avec des pommes. Ce n'est pas le même spectre, le même nombre d'années, la même année. Il peut y avoir beaucoup de différence d'une année à l'autre. Quoi qu'il en soit, je vous remercie de votre réponse.
    Je veux vous demander autre chose. La société eOne détient un monopole ou un quasi-monopole. Elle est dirigée par M. Roy, un homme fantastique qui a à coeur le cinéma canadien. Cependant, n'est-il pas préoccupant qu'il n'y ait qu'un seul très gros distributeur au Canada?
    Je vais répondre à cette question, qui me semble contenir aussi un piège.
    Dans les années 1980, il n'y avait pas de distributeurs canadiens, sinon René Malo, peut-être. Les films canadiens ne sortaient pas dans les salles et n'étaient pas diffusés à la télévision. C'est comme si, 25 ans plus tard, nous étions victimes de notre succès. Une industrie de la distribution s'est développée. Combien a-t-on besoin de distributeurs dans un pays comme le Canada? En faudrait-il 5, 10, 150?
    Si vous aviez tenu cette étude il y a un an, il y aurait eu deux immenses distributeurs. Aujourd'hui, il y en a un encore plus gros. Nous analysons la situation pour savoir si elle pose des problèmes pour l'industrie canadienne du long métrage. C'est une question que vous pourriez poser aux quelques producteurs qui se présenteront ici.
    De notre perspective, les films canadiens trouvent un distributeur. La société eOne a des activités dans 40 pays. Est-ce que cela aide à distribuer les films canadiens à l'étranger? On pourrait sans doute prétendre que oui.
    M. Pierre Nantel: Oui, c'est fort probable.
    M. Jean-François Bernier: En fait, eOne est le plus gros distributeur indépendant au monde. Il y a les majors, puis il y a eOne. Il faut que cela présente des avantages pour le produit canadien, mais qu'en est-il des désavantages? Je vous laisse le soin de vérifier cela auprès des producteurs.
    J'aimerais poser d'autres questions pour que notre étude soit plus complète.
    À deux reprises dans vos réponses, vous avez dit que certains enjeux étaient davantage de nature industrielle. Avez-vous l'impression que nous devrions nous pencher sur cet aspect? Par exemple, la postproduction est un élément de l'industrie. Avez-vous le sentiment que certaines politiques émanant du ministère de l'Industrie touchent directement l'industrie canadienne du cinéma?
    C'est une bonne question, et je serais tenté de répondre que non.
    J'essaie de penser à certaines politiques. Industrie Canada a des agences de développement régional. Cela fait le pont avec la question qui a été posée plus tôt sur la Colombie-Britannique. Il y a quelques semaines, Diversification de l'économie de l'Ouest Canada a investi à peu près 1,2 million de dollars pour aider l'industrie de l'Ouest à attaquer les marchés étrangers et tout le reste.
    L'industrie canadienne du film a des outils à sa disposition, mais il n'y a pas de politique distincte pour elle, comme il en existe pour les pêches ou les télécommunications, par exemple.
    J'ai trouvé très intéressant d'entendre parler des traités avec les autres pays. Honnêtement, je ne pensais pas qu'ils avaient une aussi grande importance puisqu'une coproduction peut parfois arriver de manière naturelle.
    Quel est l'avantage d'avoir un traité avec un autre pays comme l'Inde, par exemple?
    L'avantage d'un traité est qu'il donne accès aux programmes qui existent dans les autres pays. Le traité ne comporte pas seulement des privilèges; il vient avec certaines obligations. Par exemple, dans une coproduction France-Canada, une participation financière minimale de 20 % est requise. Il faut que le producteur canadien ou le producteur français fournisse un minimum de 20 % du financement.

  (1630)  

[Traduction]

    Il nous reste à peu près une minute, et M. Young souhaitait poser une question.
    Merci, monsieur le président.
    Je me demande si vous avez des préoccupations et, le cas échéant, si vous pourriez me dire en quoi consistent celles liées aux sociétés de câblodistribution ou aux sociétés qui exercent des activités complètement différentes, comme la téléphonie, le contrôle des arts et le contrôle des films qui seront diffusés à la télévision ou distribués sur les chaînes par câble.
    C’est le monde à l’envers. Quelqu’un a une idée pour un film ou une émission de télévision et, pour présenter ces productions aux gens, cette personne doit obtenir qu’elles soient diffusées sur une chaîne par câble. Les propriétaires de ces chaînes font tellement d’argent qu’ils achètent les créations artistiques. C’est donc le monde à l’envers, comme je l’affirmais.
    Je pense à certaines des émissions que j’aperçois en changeant de chaînes. Il y a une émission portant sur des gens qui pèsent plus de 600 livres et sur des gens qui se promènent dans un taxi qui s’illumine. Il y a beaucoup d’absurdités, mais il y a également d’excellentes émissions. Êtes-vous préoccupé par le fait que des sociétés décident des créations artistiques que nous verrons au Canada, de ce à quoi nous serons exposés? Que pouvons-nous faire à ce sujet?
    Par exemple, CTV et The Globe and Mail appartiennent à Bell.
    Est-ce préoccupant? On pourrait qualifier ces grandes sociétés de « contrôleurs ». Grâce à la technologie, ces contrôleurs sont menacés. Il y a d’autres façons de présenter le contenu aux gens que de le faire diffuser sur CTV.
    En toute honnêteté, ces types prennent des décisions en matière de programmation créative, mais les productions — du moins celles que nous finançons à Téléfilm Canada ou que financent le Fonds des médias du Canada ou les programmes de crédit d’impôt — relèvent des intermédiaires, du producteur ou du distributeur... Ce n’est pas CTV qui réclame un crédit d’impôt. C’est un producteur indépendant.
    Donc, le système fonctionne dans une certaine mesure.
    Merci. Nous allons devoir conclure sur ces paroles.
    Le système fonctionne dans une grande mesure.
    Je remercie nos représentants officiels d’être venus aujourd’hui. Il se peut que nous ayons d’autres questions à vous poser et que nous vous invitions à comparaître de nouveau.
    Nous allons suspendre brièvement nos travaux.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU