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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 039 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 2 octobre 2012

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Bienvenue à la 39e séance du Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie.
    Nous accueillons quatre témoins qui représentent trois organismes différents. Karen Mazurkewich est directrice de la Propriété intellectuelle au Conseil international du Canada. Nous avons également des représentantes de l’Association des industries aérospatiales du Canada: Lucie Boily, vice-présidente des Politiques et compétitivité, et Maryse Harvey, vice-présidente des Affaires publiques. Je crois comprendre que vous partagerez votre temps. Enfin, nous entendrons Tony Stajcer qui est vice-président du Bureau de la recherche et développement au sein de COM DEV International.
    Je crois que vous avez tous été informés que vous aurez de six à sept minutes pour faire vos exposés. Ensuite, nous passerons aux séries de questions.
    Allez-y, madame Mazurkewich. Vous avez sept minutes, s’il vous plaît.
    Je m’appelle Karen Mazurkewich, et je représente le Conseil international du Canada. Il s’agit d’un conseil indépendant composé de membres fondé dans le but de renforcer le rôle du Canada dans les affaires internationales.
    Il y a presque deux ans, le CIC m’a approchée pour rédiger un rapport sur le classement du Canada sur la scène internationale en ce qui concerne son régime de PI. À titre d’ancienne journaliste du Wall Street Journal en Asie et du Financial Post, j’ai posé la première question évidente: qui s’occupe de la PI au Canada? La réponse m’a surprise: tout le monde et personne.
    Précisément, le travail de l’Office de la propriété intellectuelle est d’appliquer les règlements relatifs à la PI, mais il n’a pas le mandat de créer de politiques. En fait, ce sont pas moins de quatre ministres qui ont leur mot à dire à propos de la politique sur la PI. Cependant, la personne en poste qui occupe le plus haut échelon est seulement un fonctionnaire intermédiaire à Sciences, industrie et technologie. Alors que les États-Unis ont en place un tsar de la PI qui rend des comptes directement au président et que le Royaume-Uni a un économiste en chef dont relèvent trois autres économistes, le Canada n’a aucun cadre supérieur qui s’occupe de la PI.
    Madame Mazurkewich, nos interprètes auront peut-être de la difficulté à suivre votre cadence. Pourriez-vous ralentir un peu? Ils vous en seraient reconnaissants.
    Oh! Je m’excuse. D’accord.
    J’ai ensuite demandé pourquoi. À mon avis, la raison est que le Canada souffre de lassitude par rapport à la PI.
    Il y a des conflits prolongés au sein de l’industrie pharmaceutique, et la pression internationale pour une protection accrue du droit d’auteur a distrait les décideurs. Le Canada est enlisé dans un débat qui dure depuis des décennies et qui a déformé la perception de la PI. Par conséquent, le Canada n’a pas élaboré une politique complète sur la PI qui aborde les besoins des entreprises spécialisées dans les technologies de l’avenir. La recherche pharmaceutique est importante, mais ce ne sera pas la meilleure source d’emplois au Canada. Nous avons besoin d’une politique globale sur la PI pour soutenir les nouvelles technologies, d’autant plus que les limites sont maintenant floues entre l’agriculture et l’industrie pharmaceutique, la nanotechnologie et l’industrie forestière, et les logiciels et la médecine.
    Je parle au nom de certaines jeunes entreprises et de certains petits entrepreneurs qui connaissent la plus grande croissance et ont le plus grand potentiel d’emploi. La recherche menée au nom du CIC a démontré que l’achat de jeunes entreprises canadiennes par des entreprises étrangères favorise ceux qui ont des actifs de PI. En fait, 66 p. 100 de la PI vendue dans le cadre de fusions ou d’acquisitions entre 2005 et 2009 au Canada est devenue la propriété d’entreprises étrangères. Nous avons un problème; notre PI nous glisse entre les doigts.
    Même si je ne dis pas qu’il faut mettre un terme aux achats par des intérêts étrangers, si nous voulons des entreprises novatrices, nous devons garder une forte proportion de notre PI au Canada.
    Comment y arriver? Nous devons examiner la commercialisation de la technologie. Nous savons que nos universités ont collectivement l’un des pires bilans parmi les pays développés en ce qui concerne la commercialisation de la technologie. Nos chercheurs font des travaux, mais on dirait qu’ils n’arrivent pas à faire décoller le tout. La technologie dort sur les tablettes. Nous devons encourager les universités à travailler avec l’industrie pour accélérer la collaboration et commercialiser les idées.
    Il y a des solutions. Les universités canadiennes devraient centraliser leurs bureaux de transfert de technologie et élaborer des accords juridiques simplifiés qui tiennent compte des risques assumés par le secteur privé relativement à la commercialisation de l’invention.
    Le gouvernement fédéral peut encourager une telle approche en structurant ses programmes incitatifs de manière à récompenser les universités qui collaborent avec l’industrie et en soutenant les consortiums qui regroupent l’industrie et les universités et qui visent à combler les lacunes technologiques.
    Il faut concevoir des programmes de développement des capacités qui apprendront aux entrepreneurs comment gérer la PI. Par exemple, nous pouvons nous servir de l’expérience danoise de centres de croissance, qui offrent du financement pour que les jeunes entreprises puissent mener des recherches liées à la brevetabilité et qui subventionnent les frais relatifs au dépôt d’une demande de brevet ou d’enregistrement d’une marque de commerce. J’ai souvent entendu l’industrie se plaindre que les candidats au doctorat mettent l’accent sur des technologies qui ont déjà été brevetées ou qui sont obsolètes, parce qu’elles vont à contre-courant du marché. Il faut faire sentir davantage notre présence.
    Le gouvernement doit inciter les entreprises à générer plus de brevets. Le CIC appelle le gouvernement fédéral à créer une subvention directe ou à modifier le système de crédit d’impôt pour donner l’option aux entrepreneurs d’engager des avocats pour déposer des demandes de brevets.
    Le Canada devrait créer son propre fonds d’investissement public-privé pour les brevets dans certains secteurs essentiels. Les établissements investissent actuellement beaucoup de temps et d’argent pour trouver des tiers qui souhaitent utiliser leur technologie. Un fonds d’investissement pour les brevets regrouperait des brevets étroitement liés et permettrait à toute l’industrie d’en obtenir des licences. Le fonds d’investissement pourrait également acheter la PI d’entreprises de haute technologie qui font faillite, comme Nortel, ou offrir de l’argent aux entrepreneurs qui souhaitent échanger leurs droits d’accorder des licences contre de l’argent. Bref, un tel fonds d’investissement serait l’Amazon.com des brevets canadiens.
    Nous prônons également la création de tribunaux spécialisés en PI. Il en existe déjà dans certains pays développés et certains marchés émergents, dont la Chine. Les brevets servent d’armes de litige massif, et nous devons mieux soutenir nos entreprises par l’entremise du système de justice.
    Enfin, il nous faut établir une norme de référence concernant les brevets. À cette fin, le gouvernement devrait améliorer l’examen des demandes de brevets et moderniser l’antique basse de données de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada. Nous pourrions ainsi y faire des recherches en ligne aussi facilement qu’avec celle des archives américaines. Il faudrait aussi permettre aux tiers de contester une demande avant d’accorder le brevet. Israël publie les demandes, puis élimine les pommes pourries en réexaminant les demandes qui ont été contestées. Nous devrions aussi le faire.

  (1105)  

    En terminant, je dirai que la PI est complexe et en constante évolution. Les gouvernements sages s’appliquent à faire examiner régulièrement la PI par des spécialistes indépendants. La majorité des pays développés ont élaboré des stratégies sur la PI, parce qu’ils ont compris qu’une politique dynamique et soigneusement pensée sur la PI est essentielle à leur prospérité. Le Canada se doit d’entrer dans la danse.
    Au nom du CIC, je vous remercie de m’avoir invitée, et je serai heureuse de répondre à vos questions.
    Merci, madame Mazurkewich.
    Madame Harvey, madame Boily, allez-y. Vous avez sept minutes.

  (1110)  

[Français]

    Je vous remercie beaucoup de l'invitation à comparaître devant vous aujourd'hui.

[Traduction]

    Je vais d'abord vous donner un aperçu de notre industrie et du contexte. Ma collègue, Lucie Boily, vous parlera ensuite des défis précis avec lesquels nous sommes aux prises.
    L’Association des industries aérospatiales du Canada représente les fabricants et les fournisseurs de services des secteurs aéronautique et spatial. L’industrie emploie environ 80 000 Canadiens au pays. Il y a environ 150 000 emplois directs et indirects. Environ de 15 000 à 20 000 ingénieurs et scientifiques travaillent dans cette industrie. Il s’agit donc d’une industrie de très haut calibre et de très haut savoir. Ses revenus annuels se chiffrent à environ 22 milliards de dollars, et les exportations représentent de 73 à 75 p. 100 des activités de l’industrie. Les investissements en recherche et développement sont d’environ 2 milliards de dollars par année.
    Nos entreprises changent en fonction du contexte mondial évolutif. Nous devons nous adapter si nous voulons demeurer concurrentiels. Comme vous le savez peut-être bien, l’industrie est hautement mondialisée. Nos cycles de recherche et développement sont très longs et très coûteux. Nous n’avons en fait pratiquement aucune marge d’erreur. L’industrie exige beaucoup d’investissements. Pour décrocher des mandats mondiaux, les fournisseurs de « niveau 1 » ou de « niveau 2 » doivent prendre des risques, faire des travaux de conception et d’ingénierie, en plus de créer de la PI.
    En ce qui concerne la direction et les possibilités, l’industrie aérospatiale canadienne a une approche claire: étant donné la croissance incroyable dans les technologies liées aux avions commerciaux et les technologies spatiales dans le monde, nous voulons augmenter notre part de marché. On prévoit une croissance de 3 400 milliards de dollars pour les avions commerciaux. Il est question d’environ 34 000 nouveaux appareils, et ce, seulement dans le domaine des avions commerciaux.
    Si le Canada veut demeurer concurrentiel, nous devons prendre de l’expansion. La croissance doit se faire dans tout le pays. Pour ce faire, nous aurons besoin de politiques et de programmes, y compris des politiques sur la PI, qui évoluent avec nous et nous permettent d’être concurrentiels.
    Comment faire pour saisir et augmenter notre part de marché? Il faut se positionner stratégiquement et rapidement concernant les plateformes d’avions commerciaux qui voleront dans un proche avenir. Il faudra nous insérer dans la chaîne d’approvisionnement mondiale et nous assurer que nos entreprises nous suivent, y compris les PME. Nous devrons nous assurer d’augmenter la capacité de conception des moyennes entreprises et d’améliorer notre collaboration internationale en vue d’accroître l’intensité de notre recherche et développement tout au long de la chaîne d’approvisionnement.
    Au sujet des pressions mondiales et de leurs effets sur la gestion de la PI, les autres pays qui veulent attirer la recherche et développement et l’industrie aérospatiale ont des mécanismes très agressifs pour séduire les investisseurs étrangers. Il est notamment question de politiques flexibles sur la PI. Cela signifie aussi un accès à des marchés précis qui sont de plus en plus liés aux investissements locaux dans ces marchés. Par conséquent, si nous voulons avoir accès à certains gros marchés, il faut parfois chercher du travail dans ces marchés pour remporter des mandats et avoir accès aux marchés. Voilà la réalité.
    Les contraintes financières de la part des transporteurs aériens influent bien entendu sur la réduction de nos coûts en ce qui a trait à la production de systèmes et de pièces.
    Nous devons trouver de nouvelles façons de mesurer le succès dans l’industrie aérospatiale. L’important est vraiment la création d’emplois durables de haut calibre. Il faut percer de nouveaux marchés. Nous devons nous diversifier encore plus. Nous définirons notre succès et conserverons notre avantage concurrentiel par l’élaboration de mandats de produits mondiaux concernant les grands avions et la mise au point et la commercialisation de nouvelles technologies. La croissance de notre industrie sur le plan des revenus et des exportations viendra certainement de l’excellence continue en matière de création de technologies et de PI.
    Madame Boily, il vous reste deux minutes et demie.
    Eh bien, la PI devient vraiment de plus en plus un enjeu central dans la croissance de l’industrie aérospatiale canadienne, et je vais en aborder deux aspects. Il y a les ententes de financement commerciales de programmes comme l’ISAD; il y a aussi les marchés publics.
    Il y a quatre enjeux majeurs avec des effets importants. Les politiques restrictives sur la PI de certains programmes, dont l'ISAD, limitent la collaboration entre les pays, étant donné que la PI est réputée être la propriété du gouvernement du Canada. Comme Maryse l’a mentionné, les nouveaux programmes en aéronautique sont le résultat de collaborations, et les partenaires internationaux exigent la diffusion de la PI. Par conséquent, notre industrie est très désavantagée, parce que la PI est réservée au gouvernement.
    Cela met également un frein à l’exploitation commerciale de la part de certaines entreprises étrangères qui ont des filiales au Canada. Elles sont très souvent désavantagées comparativement à leurs sociétés soeurs lorsqu’elles soumissionnent à l’interne des mandats de produits mondiaux, parce qu’elles n’ont pas le droit de se servir de la technologie à l’extérieur du Canada. Il est également très difficile pour nos entreprises de mettre en oeuvre des stratégies concurrentielles pour l’industrie, parce qu’elles ne peuvent pas produire dans d’autres pays où il y a des sources d’approvisionnement à faible coût; elles sont donc désavantagées sur le plan des coûts.
    Le dernier enjeu est extrêmement important. Il s’agit des marchés publics ou des approvisionnements fédéraux relativement aux appareils étrangers. Il arrive très souvent que le gouvernement ne négocie pas les droits relatifs à la PI qui procurent du travail à haute valeur ajoutée aux entreprises, et les entrepreneurs principaux conservent ce travail dans leur pays. Nos PME sont particulièrement très désavantagées, parce qu’elles n’ont pas accès à cette PI, étant donné que le gouvernement n’en négocie pas les droits dès le départ.
    Il a de nombreuses solutions. Il faut certainement mettre en place des lignes directrices optimales sur la PI qui sont constantes dans tous les ministères, et nous devons diminuer les restrictions concernant les programmes. Nous devons faire preuve de beaucoup plus d’ouverture, ce qui nous permettra de répondre aux demandes des autres pays. Il faut améliorer nos politiques d’approvisionnement en négociant dès le départ l’accès à la PI. C’est un aspect essentiel à la création d’autres emplois bien rémunérés, comme c’est déjà le cas au sein de l’industrie.
    Merci beaucoup.

  (1115)  

    Merci beaucoup, madame Boily.
    Monsieur Stajcer, vous avez sept minutes, s’il vous plaît.
    Bonjour, monsieur le président, bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie de m’avoir invité à parler du régime de propriété intellectuelle du Canada.
    Je m’appelle Tony Stajcer, et je suis vice-président de la Recherche et du Développement à COM DEV International. COM DEV est une société internationale qui approvisionne en équipement de satellite les principaux intégrateurs de satellites de la planète. Je suis responsable du Bureau de la recherche et du développement, une unité au sein de COM DEV qui cherche à tirer profit de nos investissements dans la recherche et le développement, à tenir à jour une base de données consacrée à la PI et à veiller à la protection de notre PI ainsi qu’à sa commercialisation à l’échelle internationale.
    La PI joue un rôle important en matière d’innovation. Elle est le résultat de tout un enchaînement d’étapes qui vont de sa création initiale, en collaboration avec les universités, à sa commercialisation, en passant par la vallée de la mort et le développement des marchés.
    Aujourd’hui, je parlerai de deux aspects de cette démarche. L’un d’eux a trait au fait qu’en tant qu’entreprise, nous collaborons avec les universités. Comme mes collègues l’ont mentionné, il faut améliorer la collaboration entre les industries et les universités. Je tiens également à faire ressortir l’étape suivante, à savoir la vallée de la mort, pendant laquelle peu de fonds sont disponibles pour aider la technologie à franchir ce fossé et à passer à l’étape de la commercialisation, afin que nous puissions créer des emplois et de la valeur au Canada.
    En ce qui concerne le premier point, c’est-à-dire la collaboration entre les industries et les universités, lorsqu’on appuie ces dernières, de nombreux modèles peuvent être adoptés pour attribuer la propriété intellectuelle. Les industries fournissent des fonds aux universités. Dans certaines universités, la propriété des innovations est accordée aux inventeurs, c’est-à-dire aux professeurs. Dans d’autres cas, la propriété des inventions est octroyée au bureau de la PI d’une université. Dans ces cas-là, nous avons investi beaucoup d’argent dans les universités, mais aucun mécanisme ne définit uniformément les droits liés à la PI et ne les met en application, de manière à nous encourager à passer à la prochaine étape et à investir dans la commercialisation de la PI.
    Nous observons les mêmes problèmes. Comme ma collègue Karen l’a signalé, la PI amasse la poussière sur une tablette. Lorsque les inventions finissent par être mises en valeur, certaines d’entre elles sont désuètes. Un obstacle empêche les industries de commencer à retirer les inventions des tablettes, à investir dans celles-ci et à passer à la prochaine étape.
    Somme toute, il y a quelques bons exemples de programmes, comme MITACS, dans le cadre desquels on développe un programme en collaboration avec une université. On finance le titulaire de doctorat et les étudiants du deuxième cycle qui participent au programme. Ces derniers passent également au moins la moitié de leur temps à travailler dans l’industrie, mais la PI appartient à l’entreprise. Celle-ci est la mieux placée pour commercialiser la PI, parce que ses marchés sont bien développés. Un ensemble complet de fournisseurs se trouvent déjà dans la chaîne d’approvisionnement. Les membres de l’industrie qui exercent déjà leurs activités sur les marchés sont les mieux placés pour comprendre comment la PI s’applique.
    L’un des principaux problèmes est lié aux inventions mises en valeur. Les universités croient qu’elles innovent, mais elles ignorent totalement ce que le marché recherche. À partir de là, on a habituellement besoin de la PI et de nombreuses PI générales ainsi que d’autres PI qu’on ajoutera au cours des prochaines étapes de la mise en valeur, avant d’atteindre la période de commercialisation. Par conséquent, d’emblée, la valeur de la PI est difficile à prévoir.
    Nous devons élaborer un mécanisme qui encourage la collaboration et qui n’empêche pas les entreprises d’investir dans la PI et de la faire leur. Nous devons encourager les entreprises à déclarer qu’elles se procureront un permis de mise en valeur. Lorsqu’elles auront atteint ce stade, nous devrons suivre l’évolution de la PI — qui ajoute quoi à celle-ci — et du produit final. Une fois que le plan de commercialisation est en place, on peut commencer à négocier la valeur véritable de la PI. Au début, c’est sans importance, parce qu’il est très difficile de comprendre le rôle que la PI jouera dans le produit final. L’exemple que je viens de vous donner vise à encourager la normalisation initiale d’un modèle de PI. Ainsi, nous pourrons nous intéresser à la recherche et la faire passer à la prochaine étape.
    Le deuxième argument que je tenais à faire valoir est qu’à l’étape suivante, les fonds pour faire progresser davantage la PI sont limités. C’est l’étape qui présente des risques élevés. Les essais 1 à 3 ont été menés. Une invention fondamentale se trouve sur une tablette, et nous pouvons imaginer comment elle pourrait s’appliquer. Toutefois, la prochaine étape est une période pendant laquelle, il est très risqué d’investir.

  (1120)  

    C’est à cette étape de notre cycle canadien d’innovation, je crois — et l’examen de l’industrie aérospatiale mené par John Saabas a révélé la même chose —, que nous avons observé une vallée de la mort, une période pendant laquelle il n’y a pas suffisamment d’argent disponible pour financer les idées et leur faire franchir ce fossé. On doit être en mesure d’accepter l’échec. On doit pouvoir choisir 10 idées, 10 technologies, et affirmer que l’on comprendra si cinq, six ou sept d’entre elles ne sont pas couronnées de succès. C’est le prix à payer pour découvrir trois, quatre ou cinq idées gagnantes. Il est clair que nous aimerions qu’un plus grand nombre d’entre elles nous mènent à la réussite, mais nous devons être en mesure d’accepter ces échecs.
    Les entreprises ne sont pas très bien placées pour investir pleinement dans cette étape. C’est à ce stade que le gouvernement doit intervenir, comme dans le cadre de l’ISAD ou d’autres programmes comme MITACS. MITACS est un très petit programme dont le modèle me plaît. Cependant, il pourrait être élargi. À cette étape, le gouvernement et l’industrie doivent investir conjointement afin de permettre aux technologies de franchir ce fossé.
    Les règlements en matière de PI prévus par les mécanismes de financement ne sont pas uniformes. Si l’on tente d’avoir accès à une certaine source de financement, on se retrouve aux prises avec un ensemble de problèmes; si l’on tente d’obtenir un autre financement, on rencontre un tout autre ensemble de problèmes. La résolution des problèmes exige beaucoup de temps. À cet égard, la vitesse à laquelle on peut uniformiser les règlements en matière de PI d’un programme à l’autre ainsi qu’élaborer un mécanisme de manière à ce que rien n’empêche la transition de se dérouler rapidement…
    Par exemple, pendant deux ans nous avons pris part à un programme. La négociation du financement et du soutien a nécessité tellement de temps que nous avons failli manquer le moment propice pour la mise en marché. Lorsqu’on manque le moment propice, on ne peut pas s’en remettre. Il est très important que nous disposions de l’ensemble approprié d’outils requis pour négocier la PI promptement et de manière décisive, passer à l’étape suivante de la mise en valeur et permettre à la PI de franchir la vallée de la mort.
    Merci beaucoup, monsieur Stajcer.
    Je remercie tous les témoins de leur déclaration préliminaire.
    Nous allons maintenant passer à nos séries de questions. Au cours de la première série, les interventions dureront sept minutes. Nous allons donner la parole au Parti conservateur. Monsieur Carmichael, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous nos témoins de leur présence aujourd’hui.
    Il est clair que notre comité se soucie avant tout de trouver des solutions aux problèmes que vous avez soulevés. Chose intéressante, en mai dernier, les représentants du gouvernement nous ont indiqué que le Canada était un endroit de « deuxième dépôt » des demandes de brevets; pour de nombreuses raisons, ce n’est pas ici que les demandes de brevets sont présentées en premier. Nous avons maintenant rencontré les représentants d’un certain nombre d’universités. Je présume que vous avez lu leur témoignage. Nous avons discuté avec eux des différents modèles qu’ils emploient.
    Madame Mazurkewich, si vous me le permettez, j’aimerais commencer par vous interroger. Je me suis efforcé de suivre les solutions que vous avez présentées, mais elles étaient difficiles à… Je vais devoir lire le Hansard de demain pour m’assurer que je les ai toutes assimilées.
    Je m’entends avec vous pour dire qu’il faudrait trouver un modèle uniforme d’une sorte ou d’une autre parce que, selon moi, les solutions des universités sont trop diverses. Je pense que c’est là où le gouvernement peut jouer un rôle important. Il peut trouver des solutions qui sont plus uniformes, plus productives et plus susceptibles d’entraîner la commercialisation, un résultat que nous souhaitons obtenir.
    Je me demande, madame Mazurkewich, si vous pourriez aborder cet aspect. Dans quelques-unes de vos recommandations, vous avez parlé d’offrir des incitations aux universités favorables à la PI. Il m’a semblé que bon nombre d’entre elles étaient favorables à la PI, mais pourriez-vous parler du modèle et expliquer un peu plus en détail à qui la propriété est accordée, qui partagent les coûts, d’où provient l’argent, etc.? Ensuite, nous passerons peut-être à M. Stajcer, puis nous reviendrons à vous, mesdames.

  (1125)  

    La différence entre le Canada et les États-Unis, c’est qu’aux États-Unis, les accords entre les industries et les universités ont été normalisés, il y a de cela plusieurs années, grâce à la Bayh-Dole Act. Celles-ci ont été uniformisées. Au Canada, différentes universités prennent différentes décisions quant à la propriété des inventions et la façon de la répartir.
    Je pense que l’aspect le plus important que nous devons examiner… Je crois qu’il serait très difficile d’amener toutes les universités à adopter un accord uniforme. Lorsque j’ai commencé mon rapport, on m’a dit d’abandonner cette idée — qu’il y a 10 ans, on avait tenté en vain d’y parvenir. Par conséquent, je ferais valoir que nous devrions alors examiner l’aspect juridique des accords. Trouvons des accords qui sont plus uniformes sur le plan juridique et qui pourraient être utilisés dans toutes les universités, peut-être grâce à la rédaction de clauses modèles. Au lieu de tenter de convaincre toutes les universités de changer leurs règlements, on pourrait simplifier les choses au stade où les industries et les universités commencent à se réunir et à négocier certains de ces accords.
    Je pense que les responsables de programmes comme FedDev ont travaillé avec les universités afin de les amener à collaborer avec les industries. À mon avis, ils doivent examiner très attentivement la question de la propriété des inventions. C’est un problème lié à la culture des universités et à la façon dont elles considèrent la PI. Elles se comportent comme ce que nous appelons des « chasseurs de Google ». Elles sont toutes à la recherche de la grande affaire qui leur rapportera énormément de nouveaux revenus. Cela se produit peut-être une fois tous les 20 ans, en particulier dans l’industrie pharmaceutique où un important médicament peut être découvert. Mais, comme nous le savons, le brevet ne fait pas le produit. Les universités doivent en être un peu plus conscientes. Dans le cadre de certains des programmes que nous entreprenons, par le biais de FedDev et d’autres organisations, nous pourrions inciter les universités à changer la façon dont elles négocient des accords avec les industries.
    Les consortiums sont également une excellente façon de procéder. Il existe de très bons exemples de consortiums dans le cadre desquels plusieurs universités ont collaboré. Cela s’est produit au Québec, dans l’industrie aérospatiale, et cet excellent modèle a été copié à l’échelle internationale. On m’a dit qu’il leur avait fallu approximativement quatre ans pour arriver à une solution. Plusieurs universités se sont réunies et ont élaboré ce que vous appelleriez un accord préexistant, de sorte que chaque fois qu’une société aérospatiale négocie un accord avec une université, les deux parties ne sont pas forcées de revoir les mêmes clauses encore et encore. Je pense que les consortiums sont une excellente approche. Le gouvernement devrait vraiment tenter de favoriser la création d’un plus grand nombre de consortiums — des consortiums regroupant des industries et des universités — dans plusieurs secteurs distincts, et utiliser l’industrie aérospatiale comme modèle.
    Merci.
    Monsieur Stajcer, aimeriez-vous formuler des observations?
    J’ai tendance à approuver l’idée d’utiliser, si possible, un modèle normalisé. Ma principale préoccupation tient au fait que le modèle devrait être discuté à l’étape où l’industrie commence à prendre la relève. Celle-ci doit commencer à diriger le processus au moment où la recherche prend fin, parce qu’il est crucial qu’elle détermine comment introduire la technologie sur le marché. L’obstacle qui survient à ce moment-là, c’est qu’on doit avoir conclu un accord qui permettra à l’industrie de dire qu’elle peut en tolérer les termes et mettre en oeuvre la technologie. Il ne faut pas stopper les innovations à ce stade parce que, si aucune technologie n’est étudiée, aucune technologie ne sera commercialisée.
    Oui, nous devons encourager l’industrie à ce stade en lui disant qu’on lui accordera dans une certaine mesure la propriété de l’invention. Imaginons, par exemple, que je soutiens une chaire de recherche, à raison de plus d’un million de dollars répartis sur plusieurs années. En fait, j’ai investi plusieurs millions de dollars. La PI ne m’appartient pas; toutefois, j’ai le droit d’être le premier à négocier un accord, mais la PI ne nous appartient pas, ou nous avons seulement le droit d’examiner l’invention et de dire: « Oui, nous négocierons un permis pour mettre en valeur la PI », en tant que premier refus. Toutefois, je pense que les droits de l’industrie doivent aller plus loin, en ce sens que cela peut représenter un obstacle. Nous devons éliminer les obstacles.

  (1130)  

    Cependant, ce qui me frappe tient essentiellement au fait que la propriété intellectuelle est probablement l’obstacle le plus important que nous affrontons.
    Je me demande, madame Harvey ou madame Boily, si vous pourriez nous parler du modèle fondé sur les consortiums et du rôle que les universités jouent dans celui-ci.
    Oui, dans l’un de nos groupes de travail, quelqu’un a mentionné que les partenaires mettaient parfois des mois à négocier les clauses liées à la PI et qu’habituellement, le processus était encore plus long lorsque les universités y participaient. La PI n’a aucune valeur tant qu’elle n’est pas commercialisée. Le modèle auquel Mme Mazurkewich a fait allusion est un CRIAQ, c’est-à-dire un modèle que les partenaires industriels, autrement dit les grandes sociétés — habituellement des FEO —, les entreprises plus modestes et les universités négocient à l’avance. Tous les partenaires s’entendent au préalable sur le modèle. Par conséquent, il ne s’agit pas d’une situation où l’université met au point une invention et la transfère par la suite, ou d’un autre scénario du genre. Cela se passe beaucoup plus au début de la recherche, et il s’agit bel et bien d’une collaboration entre eux.
    Je suis désolé. Le temps alloué à la série de questions est écoulé.
    M. John Carmichael: Merci.
    Le président: Merci, monsieur Carmichael.
    Nous allons maintenant passer à Mme LeBlanc.

[Français]

    Vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leurs présentations très intéressantes.
    J'aimerais continuer sur la lancée de M. Carmichael au sujet du modèle collaboratif qui a été développé au Québec et qui, par la suite, a été diffusé ou repris un peu partout dans le monde. C'est une belle source de fierté.
    J'aimerais que vous précisiez quels sont les avantages de ce modèle et que vous indiquiez comment on pourrait s'y prendre pour reproduire ce modèle dans d'autres secteurs de l'industrie ou dans d'autres parties du Canada. Est-ce que ce serait possible?
    Tout d'abord, un des avantages de ce genre de modèle, c'est que ça permet à nos industriels et aux institutions universitaires de collaborer dès le départ. De plus, cela aide notre industrie à collaborer outre-mer avec des partenaires qui ont tous en place ce genre de choses, soit une capacité de collaborer. Il existe des modèles en Europe, dont le modèle FP5.
    Si on veut appliquer ça dans d'autres secteurs, au départ, il s'agirait vraiment de regarder ce modèle de collaboration. Ce n'est pas nécessairement quelque chose qu'on peut prendre et appliquer automatiquement partout au Canada. Il faut chercher à déterminer de quelle façon ça peut se développer dans différentes provinces. Quoi qu'il en soit, beaucoup de gens regardent avec grand intérêt bon nombre d'éléments contenus dans ce modèle du CRIAQ.
    Avez-vous eu l'aide et le soutien du gouvernement fédéral et du gouvernement du Québec pour développer ce programme et, comme je le mentionnais, peut-être le reproduire ailleurs au Canada? Avez-vous eu des ondes positives de la part des deux paliers de gouvernement?
    Le CRIAQ, soit le Consortium de recherche et d'innovation en aérospatiale au Québec, est un programme québécois. C'est donc le gouvernement provincial qui y a injecté des fonds, mais c'est quand même un programme dont bénéficient beaucoup de nos entreprises partout au Canada.
    Dans le cadre de l'examen de l'industrie que nous sommes en train d'achever, il est certain que ce modèle est proposé et examiné par tout le monde. Encore une fois, on cherche des solutions. On cherche une certaine aide pour mettre cela en place, mais on ne peut pas utiliser une cookie-cutter approach, si vous me permettez le terme anglais.
    Non, en effet.

  (1135)  

    Il faut vraiment impliquer le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux pour voir ce qui va fonctionner le mieux.
    Merci.
    Dans l'industrie aérospatiale, quels sont les principaux défis liés à l'innovation, d'une part, et à la propriété intellectuelle, d'autre part? Je pense que vous l'avez souligné, mais peut-être pouvez-vous nous donner plus de détails. Comment le développement de la propriété intellectuelle peut-elle aider l'innovation et vice-versa?
    Comme on l'a dit plus tôt, le développement de la propriété intellectuelle est extrêmement important, étant donné la mondialisation de l'industrie. Dans ce contexte, nos entreprises doivent de plus en plus envoyer à l'étranger du travail de moindre valeur ajoutée. Quelquefois, il faut faire des sacrifices, des concessions pour garder ici le développement d'une propriété intellectuelle de la recherche. Cela représente vraiment beaucoup d'emplois pendant cinq, six ou sept ans. Une de nos entreprises a beaucoup travaillé sur le programme Airbus de Boeing, et cela a pris sept ans à une soixantaine d'ingénieurs pour développer cette propriété intellectuelle. Ce sont des emplois très hautement rémunérés. À un moment donné, on appelle cela une stratégie IP.
    Quelquefois, on doit faire des concessions et envoyer à l'étranger une propriété intellectuelle moins stratégique, parce qu'autre chose est déjà en train de se développer, mais cela va aider notre industrie à produire ailleurs un produit à moindre coût. Cela permet aux entreprises d'être beaucoup plus concurrentielles. Cependant, cela peut devenir un problème pour l'appui qu'on reçoit de l'ISAD ou d'autres sources, si cela n'est pas permis.
    Maintenant, dans le cadre de la mondialisation, on doit souvent faire affaire avec d'autres pays et des transferts se font de cette façon.
    Dans votre mémoire, vous faites des recommandations sur la propriété intellectuelle concernant l'Initiative stratégique pour l'aérospatiale et la défense, soit l'ISAD.
    Quelles sont vos recommandations au sujet de la propriété intellectuelle, particulièrement à l'égard de l'ISAD?
    Je crois que les gens de l'ISAD sont conscients du problème et qu'à l'occasion, ils ont réussi à faire des ajustements qui ont permis à nos entreprises de le faire. Par ailleurs, s'il y a un changement au niveau de la gestion, il arrive que la nouvelle personne ne sache pas ce qui se passe. À ce sujet, il faut avant tout comprendre les impératifs de la mondialisation et le fait que notre industrie est extrêmement mondialisée. Il faut que le programme reconnaisse cela. C'est l'un des premiers éléments. Par la suite, il faut que d'autres puissent ajuster leurs conditions pour permettre à ceux qui bénéficient du programme de partager la propriété intellectuelle, ou PI, surtout s'il s'agit de PI moins stratégique. Il faut qu'il y ait une ouverture à cet égard. C'est ma première recommandation.
    Comme je le mentionnais plus tôt, le gouvernement fédéral a une possibilité absolument extraordinaire, à savoir d'utiliser les achats publics pour négocier des ententes avec les manufacturiers, les primes, pour obtenir la PI. Par la suite, cette PI permettra à nos entreprises de faire l'entretien des avions achetés. Il n'est pas normal que l'entretien ne soit pas fait par une industrie canadienne, ici au Canada. Or, pour ce faire, il faut posséder la PI. On ne peut pas permettre à d'autres compagnies de l'étranger de décider quelle partie de la PI elles vont garder et celle qu'elles vont accorder au Canada. Très souvent, ces gens demandent ce qui est dans l'intérêt de leur compagnie. Ils gardent donc ce qui a le plus de valeur ajoutée.
    Merci, madame Boily.

[Traduction]

    Je vous aurais permis de poursuivre votre intervention un peu plus longtemps, mais il convenait de mettre un terme à la réponse.
    Nous allons maintenant passer à Mme Gallant, qui dispose de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Par votre entremise, je m’adresse à nos témoins en commençant d’abord par M. Stajcer. Selon vous, quels outils sont requis pour négocier la PI plus rapidement et ne pas rater les débouchés auxquels vous faites allusion?
    Nous devons éduquer les gens. Je crois que la solution passe par l'éducation.
    J'ai déjà négocié avec des universités pour acheter des brevets et concéder des licences relatives à la PI. Il importe d'informer les universités sur ce que la PI signifie réellement. Bien souvent, nous devons rassembler plus d'une licence relative à la PI pour pouvoir commercialiser le produit. L'éducation est donc un facteur important pour faire connaître aux universités les étapes à franchir avant d'en arriver à la commercialisation.
    Par ailleurs, chaque université a un mécanisme légèrement différent. J'ai dû parfois négocier directement avec les inventeurs, à savoir un professeur et des étudiants. Quelques étudiants avaient déjà quitté l'université. D'autres universités possèdent un bureau qui négocie pour les inventeurs. Les universités doivent travailler ensemble. Il faut un mécanisme sur la façon de traiter la PI.
    On m'a notamment fait une suggestion entourant une licence de conception. Nous détenons une licence libre de redevance, mais si le produit est commercialisé, nous prenons alors conscience de l'importance de détenir la PI et de négocier une licence appropriée. Quand on retire cet obstacle en disant que l'entreprise aura les droits relatifs à la PI pour commercialiser le produit et l'université détiendra les droits à des fins pédagogiques, c'est suffisant pour aller de l'avant.
    À l'étape de la commercialisation, nous prenons conscience de la valeur de la PI. Nous négocions alors pour vrai, contrairement aux pourparlers initiaux. Les entreprises qui veulent que les choses avancent rapidement, surtout les PME, se heurtent à ce long processus et se disent: « Je n'ai pas le temps. Il va falloir affronter un tas d'obstacles et le processus est différent dans chaque université. » Elles ne pressentent même pas les universités pour certaines de leurs PI. Elles ne font rien. Elles trouveront le moyen de s'en occuper autrement.
    J'espère que l'on pourra faire quelque chose à cet égard.

  (1140)  

    D'accord.
    Comment d'autres pays franchissent-ils la vallée de la mort? Quels mécanismes ou instruments de financement utilisent-ils?
    Dans notre industrie, l'industrie spatiale, les gouvernements européens investissent massivement à l'heure actuelle. Ils s'aperçoivent qu'il y a un véritable moteur scientifique dans ce domaine qui crée des emplois de grande valeur. Au Canada, nous sommes légèrement désavantagés puisque l'Europe a reconnu l'importance de l'industrie spatiale. Je parle uniquement au nom de l'industrie spatiale. Les Européens investissent massivement dans le domaine de l'aérospatiale.
    En tant qu'entreprise, nous sommes désavantagées car nous manquons d'argent dans cette vallée de la mort pour financer les technologies dont nous pourrions avoir besoin afin de soutenir la concurrence mondiale. Nous sommes compétitifs dans deux secteurs et nous disposons de millions de dollars d'investissements à l'interne pour conserver une longueur d'avance, mais nous perdons lentement du terrain à cause des investissements massifs que d'autres pays font dans le même secteur tandis que l'entreprise peut conserver la PI pour commercialiser le produit et créer des emplois.
    D'accord.
    En ce qui concerne l'aérospatiale — je crois que Mme Harvey en a parlé —, quelle est notre politique en matière de PI qui empêche l'industrie aérospatiale canadienne de s'emparer d'une plus grande part du marché mondial?
    Le programme de l'ISAD est l'initiative stratégique pour l'aérospatiale et la défense. Dès que le gouvernement s'associe à une entreprise, il devient propriétaire de la PI qui est créée par l'entremise de ce programme de financement précis. C'est un problème car cela empêche nos entreprises de transférer une partie de cette PI — certaines des données de moindre valeur — à leurs filiales dans d'autres pays, où les produits ou une partie des produits pourraient être fabriqués à moindre coût, ce qui nous permettrait de conserver un avantage concurrentiel relativement aux coûts.
    C'est ce qu'on déplore souvent concernant l'ISAD, mais la sécurité nationale n'importe-t-elle pas davantage que la propriété commerciale?
    Pour l'industrie aérospatiale, ce n'est généralement pas une question de sécurité. Si le produit ne comporte aucune application militaire, cela ne s'appliquera pas dans ce cas-ci.
    D'accord.
    Pour ce qui est de l'ISAD, vous avez parlé des restrictions liées à la propriété intellectuelle. Est-ce précisément le fait que le gouvernement du Canada doive être titulaire de la PI qui nous empêche de commercialiser davantage?
    Oui. Cette exigence empêche le transfert de la PI, ce qui est important pour une entreprise sur le plan stratégique.

  (1145)  

    Merci.
    Ma question s'adresse au premier témoin. Vous avez dit que d'autres pays ont un tsar ou un chef responsable de la PI. Vous avez également mentionné que divers secteurs qui se recoupent en auraient besoin: pharmacologie, agriculture, nanotechnologie, foresterie et informatique.
    Êtes-vous en train de dire que nous avons une personne ou un groupe d'experts qui est responsable? Comment pourrait-on trouver une personne qui a l'expertise voulue dans tous ces domaines pour être un tsar de la PI?
    Eh bien, d'autres pays ont des tsars de la PI. Ce sont des gens qui comprennent simplement la nature de la propriété intellectuelle et la façon de la gérer.
    La propriété intellectuelle est un actif. C'est un actif incorporel, mais il doit être géré. Peu d'experts de la PI au pays pourraient assumer un rôle de leader au gouvernement. À l'heure actuelle, plusieurs ministères — Affaires étrangères, Industrie, Patrimoine et Justice — interviennent dans les politiques relatives à la PI. Contrairement à d'autres pays, on n'a pas de porte-parole désigné. Ces porte-parole sont des gens solides; ce peut être un juge du domaine de la PI ou un intervenant du secteur privé.
    On peut trouver un porte-parole pour la PI au Canada. Il n'a pas besoin d'être un expert dans tous les secteurs. Il n'a qu'à connaître les règles du jeu.
    Tous les témoins...
    Madame Gallant, c'est tout le temps dont nous disposons.
    Mme Cheryl Gallant: D'accord.
    Le président: Je suis désolé. L'horloge est notre ennemi dans tous les comités.
    Vous avez la parole, monsieur Hsu, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaiterais tout d'abord obtenir plus de précisions au sujet de l'observation de Mme Mazurkewich selon laquelle le Canada laisse sa PI lui glisser entre les doigts.
    J'aimerais que vous expliquiez en détail ce que vous entendez par là. Voulez-vous dire que des gens quittent le pays? Que voulez-vous dire exactement? Qu'est-ce qui part et où?
    Vous voulez savoir ce qui part et où. D'accord. Nous nous sommes renseignés sur le nombre de petites et moyennes entreprises qui ont conclu des ententes de fusion et d'acquisition sur une période de cinq ans. Nous avons découvert qu'environ 58 p. 100 des entreprises vendues ont été acquises par des acheteurs étrangers et que 66 p. 100 de la PI a quitté le pays, ce qui signifie que les acheteurs étrangers convoitent énormément nos entreprises qui sont riches en propriété intellectuelle.
    Je ne dis pas que nous devons cesser toutes les acquisitions étrangères d'entreprises canadiennes, mais nous devons reconnaître qu'il y a un manque au pays. Quelque chose fait défaut... Nous ne conservons pas une assez grande part de notre PI au Canada. Je pense, et Tony sera peut-être du même avis, que le maintien de la PI au pays contribuerait également à créer des emplois.
    Le problème, c'est le phénomène de la vallée de la mort. Nous mettons sur pied des entreprises, mais nous ne parvenons pas à les inciter à créer de la PI, du moins pas assez pour traverser cette vallée de la mort, afin que d'autres entreprises achètent ces sociétés et les sortent du pays. Qu'achètent-elles? Elles achètent nos entreprises qui sont très riches en PI.
    Je sais qu'il y a la propriété de la PI, la propriété des données et ce genre de choses, mais y a-t-il vraiment des gens qui quittent le pays?
    C'est une combinaison des deux. Parfois, des entreprises achètent nos sociétés, s'emparent de la PI et l'utilisent dans leurs propres entreprises. D'autres fois, elles achètent les entreprises, puis les créateurs de cette propriété intellectuelle quittent aussi le pays pour la développer ailleurs.
    D'accord. Ils déménagent dans un laboratoire situé dans un autre pays.
    Oui.
    Avez-vous des exemples de pays qui font le contraire, qui acquièrent la PI au lieu de la laisser partir? Y a-t-il...
    Ou qui gardent peut-être leur PI?
    Eh bien, non. Quelqu'un se l'approprie si nous la perdons, n'est-ce pas?
    Mme Karen Mazurkewich: Oui.
    M. Ted Hsu: Quels pays s'emparent de la PI?
    Vous voulez dire celle du Canada?
    Quels pays font le contraire?
    Eh bien, les États-Unis, par exemple, font le contraire. Ils achètent un grand nombre d'entreprises riches en propriété intellectuelle.
    La Chine le fait de plus en plus maintenant. Elle conclut de nombreuses ententes à l'heure actuelle. Elle sait que la PI est primordiale pour l'innovation et la Chine est un pays qui n'a pas été très fort dans ce domaine. Dans le passé, la Chine copiait beaucoup, comme nous le savons, mais ses politiques en matière d'innovation ont radicalement changé au cours des dernières années. Elle achète de nombreuses entreprises riches en PI et investit massivement dans celles-ci.
    De nombreuses entreprises le font. Si on examine la situation au Canada, je pense qu'on laisse partir plus de PI qu'on en conserve.

  (1150)  

    Si on examine tous les pays de l'OCDE, est-ce que la moitié d'entre eux s'approprient de la PI et l'autre moitié la perdent, où est-ce une poignée de pays qui acquièrent une grande part de la PI et les autres...?
    Eh bien, ce qui est intéressant — et il est difficile de l'expliquer —, c'est que lorsque la Banque mondiale s'est attardée au déficit en matière de PI, celui du Canada s'élevait à 4,5 milliards de dollars. C'est ce qu'on appelle les droits et redevances, c'est-à-dire qui paie les licences. Cependant, la majorité des autres pays de l'OCDE affichaient un bilan positif. C'est un indicateur que quelque chose ne va pas ici.
    Si j'ai bien compris, une faible minorité des pays de l'OCDE affichent un déficit en matière de PI et le Canada en fait partie.
    D'après la Banque mondiale, oui.
    D'accord.
    Ma dernière question porte sur le processus de concession de licences pour la PI dans les universités. Y a-t-il des universités qui font les choses correctement et les pratiques de quelles universités devrions-nous peut-être copier?
    Par exemple, dans ma circonscription, l'Université Queen's a PARTEQ, qui compte un organisme chargé de la commercialisation et un autre qui s'occupe de propriété intellectuelle. Y a-t-il des universités qui s'en tirent mieux que d'autres et que nous devrions prendre en exemple?
    Je pense qu'elles sont toutes différentes. Il y a certaines choses...
    Ce que je dis, c'est qu'elles prennent énormément de temps car nous devons expliquer aux gens l'étape suivante et les sommes qui doivent être investies après la PI initiale. Je pense que le mécanisme prend beaucoup de temps et semble fastidieux parce qu'il faut négocier.
    Comme je l'ai dit, on a actuellement le programme fédéral Mitacs, qui fait en sorte qu'une collaboration s'installe très rapidement. C'est prédéfini. Ce programme peut être mené conjointement avec n'importe quelle université. Je pense que c'est un exemple d'un bon modèle, d'un bon processus.
    Certains modèles sont plus faciles que d'autres, mais ils sont tous différents. Il m'a fallu quatre ou cinq mois pour négocier une très petite contribution pour une université, alors qu'il était très difficile d'en voir l'intérêt au départ.
    Il faut du temps. Mis à part le programme Mitacs, je n'ai trouvé aucun autre excellent modèle. Corrigez-moi si j'ai tort.
    Oui, le modèle de consortium est bon. PARTEQ tente d'établir un consortium également. Je pense que le modèle consiste à négocier au préalable certains éléments pour que l'industrie puisse conserver et développer la PI, que l'université puisse la garder à des fins de recherche et, comme Tony le disait, qu'on puisse plus tard négocier certaines des redevances.
    Je pense que c'est quelque chose que toutes les universités pourraient faire et que chaque province pourrait encourager. Ce n'est pas un modèle universel, mais un modèle qui pourrait convenir à divers secteurs. Je pense que nous devrions encourager cette idée.
    Le Canada laisse sa PI lui glisser entre les doigts et je crois que c'est en grande partie dû au fait que nous sommes toujours dans cette vallée de la mort. Nous avons besoin de financement et il y a un manque de financement disponible pour les entreprises, et les multinationales voient l'occasion de prendre possession d'une entreprise. Par ailleurs, le marché aux États-Unis — ou en Chine, en Europe ou en Allemagne — est beaucoup plus important. L'entreprise estime que si elle fusionne avec une entreprise américaine, elle pourra conquérir une plus grande part du marché et augmenter ses bénéfices.
    Le problème, c'est que nous ne gardons pas ces entreprises d'incubation assez longtemps. Le financement n'est pas suffisant pour développer assez les produits afin d'en voir vraiment la valeur commerciale élevée. Nous disposons d'un certain financement et nous vivotons, mais nous avons besoin de continuer d'en recevoir pour développer cette PI à l'échelle internationale, mais le financement fait défaut. Je pense que c'est également en partie la raison pour laquelle cette PI quitte le pays.
    Merci.
    C'est tout le temps que nous avons pour l'instant.
    Merci, messieurs Stajcer et Hsu.
    Les intervenants disposeront maintenant de cinq minutes. M. Braid prendra la parole en premier. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Madame Mazurkewich, en ce qui concerne la perte de notre propriété intellectuelle, pourriez-vous clarifier les statistiques de la Banque mondiale ou celles de l'OCDE? Quelle période couvrent-t-elles?
    Il y a une deuxième partie à ma question: commençons-nous à changer les choses ou la situation est-elle la même à l'heure actuelle?
    Ces organismes effectuent des calculs. La Banque mondiale le fait chaque année. Quand j'ai préparé mon rapport, je crois que c'était en 2009 ou en 2010, le déficit s'élevait à 4,5 milliards de dollars. Ces organismes continuent d'examiner ces données.

  (1155)  

    Avez-vous l'impression que nous commençons à renverser la vapeur? Nous sommes en 2012. Le savez-vous?
    Je ne le crois pas.
    D'accord.
    Au sujet de l'idée qu'un haut fonctionnaire du gouvernement agisse à titre de champion de la PI, vous avez donné l'exemple des États-Unis et du Royaume-Uni. Avez-vous une recommandation précise à propos de ce à quoi ce rôle pourrait ressembler dans le contexte canadien et où le poste pourrait être créé?
    Oui. Un poste pourrait être créé dans l'industrie ou au ministère de M. Goodyear, afin qu'il y ait un spécialiste de la PI pour répondre directement au ministre sur ces questions. Ce pourrait être un cadre supérieur.
    D'accord, merci.
    Dans votre exposé, vous avez mentionné un programme gouvernemental danois qui offre un soutien aux petites entreprises et les aide à franchir les étapes du processus de la PI. Pourriez-vous nous en parler un peu plus en détail et indiquer à nos attachés de recherche où ils peuvent obtenir plus de renseignements à propos de ce programme?
    Ils obtiendront plus d'information dans mon rapport.
    J'ai beaucoup voyagé. Le Danemark a mis sur pied ce qu'on appelle des centres de croissance, c'est-à-dire des centres d'innovation régionaux, un peu comme ce que fait Communitech. La différence, et j'ai trouvé cela très intéressant, c'est qu'en plus des fonctions de mentorat qu'assume par exemple Communitech, ces centres offrent aussi de modestes subventions, des investissements directs, pour aider les jeunes chercheurs et entrepreneurs à déterminer la brevetabilité, ou ce qu'on appelle la « liberté d'action », afin qu'ils soient sûrs de ne pas porter atteinte au droit d'auteur de quelqu'un d'autre lorsqu'ils développent une technologie. On accorde de 500 à 1 500 $, et on travaille parfois directement avec des avocats durant une certaine période.
    C'est tout simplement une étape de plus que ce que propose le modèle de Communitech, par exemple.
    C'est un centre d'accélération, un modèle de type mentorat.
    Oui, mais il met l'accent sur les mentors et il offre un investissement direct pour le développement de la PI.
    Excellent.
    Vous avez également parlé d'une communauté de brevets et d'un fonds d'investissement pour les brevets. Pouvez-vous nous dire s'il y a des modèles semblables ailleurs dans le monde?
    Le meilleur que j'ai vu était en Europe. La Banque européenne d'investissement, la Caisse des Dépôts en France, et plusieurs autres réunissaient des fonds pour acheter des brevets. C'était le modèle, selon moi, que le Canada devait envisager ou même adopter, car on pensait la même chose: on s'inquiétait qu'il y ait trop de brevets qui dorment dans les universités; si l'on pouvait acheter ces brevets, les regrouper par familles et obtenir des licences pour ces brevets, ce serait avantageux pour les universités, pour l'industrie, pour tout le monde. De plus, ce pourrait être là un bon petit investissement utile pour les banques, compte tenu de ce qui est arrivé relativement à Nortel et des sommes que ces brevets ont rapportées.
    Les États-Unis disposent d'un processus de brevet provisoire. Qu'en pensez-vous? Est-ce quelque chose que nous devrions envisager?
    C'est un processus de brevet provisoire en ce qui concerne...?
    Je remonte au printemps et aux débuts de notre étude. D'après ce que je comprends, aux États-Unis, il y a un processus qui permet aux gens de déposer rapidement une demande et d'accélérer le processus, et il s'agit d'une protection provisoire de brevet.
    Oui. La plupart des Canadiens, comme vous le savez, déposent d'abord une demande aux États-Unis; ils prennent donc part à ce processus provisionnel de toute façon. Tony pourrait probablement vous dire également si le Canada pourrait l'utiliser, mais la réalité d'aujourd'hui, c'est que la plupart des entreprises se tournent d'abord vers les États-Unis, puis vers l'Europe, et dès qu'elles le font, elles peuvent avoir des brevets provisoires.
    Nous déposons effectivement des demandes de brevets provisoires aux États-Unis, mais il y a des avantages et des inconvénients aux brevets provisoires. On ne peut pas y ajouter de nouvelle PI; on doit la décrire dans la première demande.
    C'est un moyen rapide et un bon moyen pour les entreprises de déposer une demande, car cela permet de fixer la date. On peut ensuite déposer des demandes de brevets aux États-Unis ou au Canada après cette date, car cela fixe la date de priorité. Ce n'est donc pas nécessairement un désavantage pour nous de le faire au Canada.
    Je crois que nous déposons une demande aux États-Unis d'abord parce que c'est le marché le plus important. Nous voulons le protéger.
    Excusez-moi; encore une fois, le temps est écoulé.
    C'est maintenant au tour de M. Harris, pour cinq minutes.
    Je tiens à remercier les témoins. C'est déjà très intéressant.
    Madame Mazurkewich, vous avez fait allusion tout à l'heure aux fonds d'investissement pour les brevets. Sans trop entrer dans les détails, auriez-vous un ou deux autres exemples de pays qui ont ce genre de fonds?

  (1200)  

    Oui. L'Europe est en train d'en mettre un sur pied. La France en a déjà un. La Chine en démarre un. On en voit plusieurs. Le Japon en possède un. La Corée en a un très dynamique. On en met sur pied partout dans le monde. Ces fonds souverains pour les brevets sont créés pour faire face aux fonds privés pour les brevets qui existent déjà et qui sont hautement litigieux.
    Si nous avions eu un tel fonds d'investissement pour les brevets, pensez-vous que nous aurions eu une meilleure emprise sur les brevets qui ont été vendus lorsque Nortel a fait faillite?
    Ils les auraient achetés.
    Il est également intéressant de noter, comme d'autres témoins l'ont déjà mentionné, que la PI de Nortel avait plus de valeur que ses actifs traditionnels et qu'elle s'est vendue plus cher.
    Vous parliez des entreprises canadiennes en développement qui sont achetées par d'autres entreprises et déménagées ailleurs. De toute évidence, elles sont de diverses tailles, mais quelle serait leur taille moyenne lorsqu'elles sont avalées?
    Elles le sont très tôt. Je pense qu'en moyenne, ce serait autour de 30 millions de dollars. Tony, en avez-vous une idée?
    Je ne suis pas trop au courant de cela. En général, elles entrent dans une période où elles commencent à faire des percées, mais elles ont tout de même besoin de plus de capitaux à investir, et c'est là qu'elles connaissent des difficultés. Elles peuvent voir le marché potentiel. Je crois moi aussi que c'est entre 10 et 30 millions de dollars.
    Ce sont donc des entreprises assez productives.
    Oui, en effet.
    Elles sont déjà en affaires. Elles voient qu'elles entrent sur le marché et elles ont déjà des marchés de démarrage. Voilà pourquoi on les achète.
    C'est la raison pour laquelle c'est intéressant.
    À ce stade, elles ont fait leurs preuves.
    Je suis heureux que vous ayez mentionné la vallée de la mort, tout à l’heure. La société COM DEV est-elle confrontée à des expériences concrètes en ce sens actuellement? Avez-vous à reporter des projets à cause d’un manque de fonds?
    Nous venons de former une entreprise appelée exactEarth et nous y avons investi plus de 50 millions de dollars de nos propres fonds. Les affaires commencent à démarrer. Il s’agit d’une entreprise de services de données satellitaires, une toute nouvelle industrie fort prometteuse que l’on développe au Canada. Elle a encore besoin de fonds, car à mesure qu’elle avance, la concurrence commence à gagner du terrain. Nous élaborons des programmes en collaboration avec le gouvernement afin de soutenir ce projet.
    Comme je l’ai déjà mentionné, il a fallu deux ans; donc, du début jusqu’à aujourd’hui, le monde a changé, la concurrence a changé, et notre calendrier a changé. Il est difficile d’obtenir les fonds au bon moment. On en est maintenant à 10 à 15 millions de dollars. Quelle est la prochaine étape?
    Il y a évidemment la propriété intellectuelle dans les brevets que possèdent et contrôlent les entreprises, mais il y a aussi la propriété intellectuelle qui est dans l’esprit des gens. Quand les personnes de grande qualité qui travaillent dans ces entreprises ne peuvent poursuivre le développement, elles s’en vont travailler ailleurs. Cette propriété intellectuelle les suit, bien sûr. Cela peut souvent poser problème, car elles passeront directement de cette entreprise canadienne à un compétiteur dans un autre secteur. Cela vous est-il déjà arrivé?
    Nous essayons de breveter la PI fondamentale. Lorsqu’une personne part, il y a effectivement un exode de la PI, car tout n’est pas intégré dans le brevet, mais on peut, avec ce brevet, s’assurer que l’entreprise ne peut livrer concurrence dans le même secteur. On doit faire preuve de diligence à l’égard de la PI fondamentale et veiller à la protéger et à la breveter dans les marchés que l’on va desservir. C’est la clé. Par exemple, on peut choisir de ne pas la faire breveter au Canada si le marché y est trop petit. On doit s’assurer de la PI fondamentale sur laquelle on bâtit une entreprise, ce que nous avons fait pour exactEarth. Nous demandons des brevets dans le monde entier. Nous le faisons dans de nombreux pays, là où sont les marchés, y compris au Canada. C’est là un point important. Même si mon scientifique en chef qui a élaboré les algorithmes quitte l’entreprise, nous protégeons cette entreprise.
    Merci, monsieur Harris.
    La parole est maintenant à M. McColeman, pour cinq minutes.
     Vous nous fournissez aujourd’hui des renseignements indispensables pour notre étude.
     J’ai quelques brèves questions à vous poser. Madame Harvey, vous avez parlé de 34 000 nouveaux appareils. Sur quelle période la demande repose-t-elle?

  (1205)  

    C’est une étude menée par Boeing, et Deloitte en a également fait une. Elles le font chaque année; c'est sur une période de 20 ans.
    On prévoit donc 34 000 unités, sur une période de 20 ans?
    Oui. Ce sont des avions commerciaux.
    Est-ce le volet commercial de l’industrie?
    Oui, uniquement le segment commercial de l’industrie aéronautique.
    J’aimerais savoir, monsieur Stajcer, qui sont les investisseurs dans cette période de la vallée de la mort. De quels groupes parlons-nous? S’agit-il d’investisseurs providentiels? Qui sont ces gens?
    C’est en fait notre entreprise, l’industrie. Nous avons également un partenaire stratégique ayant coinvesti dans l’entreprise et ayant accès aux marchés européens. Il a investi 15 millions de dollars pour acquérir une certaine part de l’entreprise; c’est de notoriété publique. Nous voulons nous assurer d’ouvrir les marchés avec un co-investisseur, car c’est important. L’entreprise doit maintenant passer à l’étape suivante.
     Il pourrait y avoir des retraits éventuels et d’autres grandes entreprises pourraient intégrer le marché, car c’est un nouveau service, un nouveau produit dans le monde. Il nous faut faire en sorte de protéger nos éléments de PI fondamentaux parce que c’est là-dessus que repose l’entreprise. Nous essayons de créer cette industrie au Canada, mais nous avons un partenaire européen et nous aurons peut-être un partenaire américain, car le marché vise les gouvernements et la fonction publique.
    Excellent.
    Madame Mazurkewich, le gouvernement fédéral joue un rôle dans l’éducation postsecondaire, en particulier dans les universités, mais un rôle très limité, honnêtement, compte tenu du transfert des responsabilités en matière d’éducation aux provinces et aux territoires. Vous comprenez cette question probablement mieux que nous. Comment envisagez-vous la mise en œuvre potentielle d’une politique unifiée en matière de PI? Selon vous, cela relèverait-il davantage des autorités provinciales, du gouvernement fédéral, ou d’une combinaison des deux?
     Je vais vous donner quelques informations. J’ai visité de nombreuses universités au pays en participant au caucus sur l’éducation postsecondaire. Il y a un écart très important sur le plan de la PI. Certaines universités n’ont aucune idée par où commencer; d’autres, comme l’Université de Waterloo, en sont à un tout autre niveau, et il y a tout un éventail entre les deux. Elles ont du mal à gérer cela; vous le savez, j’en suis sûr. De toute évidence, puisqu’il négocie avec ces établissements, M. Stajcer le sait.
     Si nous voulons faire un effort pour établir des normes et mettre en place une politique pour les universités, comment, selon vous, le gouvernement fédéral pourrait-il le faire?
    Soyons clairs. De nos jours, nous parlons beaucoup de ce que nous appelons le transfert technologique entre les universités et l’industrie. Ce n’est qu’un morceau du puzzle de la PI.
     Pour répondre brièvement, je dirais qu’effectivement, le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer, que ce soit en créant des fonds d’investissement pour les brevets, en ayant un unique coordinateur de la PI, faute d’un meilleur terme, qui défend la PI, ou diverses ententes relativement au CRSNG et à d’autres programmes de FedDev, etc.
     Il y a énormément de choses que le gouvernement fédéral pourrait faire pour aider à unifier la politique, à renforcer l’OPIC sur le plan de la gestion et de l’administration des brevets. Le transfert technologique est l’une des pièces du casse-tête que constitue la PI. Oui, il relève davantage des provinces, tout à fait; il doit donc y avoir une coordination, mais je pense que grâce au financement gouvernemental – notamment les programmes du CRSNG et du CNRC –, le gouvernement fédéral peut se servir de beaucoup de moyens pour aider à changer la culture des universités, afin qu’elles comprennent – car je ne crois pas que ce soit le cas – qu’un brevet aujourd’hui ne se traduit pas nécessairement par un produit, sauf peut-être dans le milieu pharmaceutique. C’est un stade de développement progressif, et toutes les ententes juridiques et les relations doivent changer.
     Merci.

  (1210)  

    Merci, madame Mazurkewich. Merci, monsieur Coleman.
     C’est maintenant au tour de M. Stewart, qui était avec moi tôt ce matin pour jeter un coup d’œil également sur la commercialisation de la recherche.
    C'est exact. On dirait que c'est le thème de la journée, n'est-ce pas?
    Merci beaucoup pour les exposés. Je commencerai par dire qu'il existe plusieurs idées intrigantes quant à la façon de régler des problèmes, comme celui de combler notre déficit en matière de propriété intellectuelle. La plupart des solutions semblent faire appel à des investissements accrus de la part du gouvernement dans des domaines particuliers, c'est-à-dire des investissements très stratégiques. Il semble que pour régler ces problèmes, il faudra essentiellement plus d'argent. Voilà donc, au fond, l’objet de nos discussions.
    Toutefois, cela semble aller contre la tendance. Le rapport Jenkins a révélé une baisse des dépenses liées à la recherche et au développement au Canada. Les investissements gouvernementaux dans la recherche et le développement ont diminué; ils représentent maintenant environ 0,2 p. 100 de notre PIB en ce qui concerne le développement d’entreprises, surtout à la suite de l'effondrement de Nortel. Je me demande donc si vous pourriez nous donner une idée du montant d'argent supplémentaire que nous devrions investir dans ce domaine afin de devenir concurrentiels à l’échelle mondiale et d’afficher à nouveau des résultats positifs au sein de l’OCDE.
    Combien investir? Voilà une question difficile à répondre. Selon moi, si nous disposons d’un mécanisme qui met de l’avant l'industrie grâce à des fonds équivalents de la part du gouvernement, il en résultera une commercialisation accrue, ce qui nous permettra de recevoir de l’argent. L'innovation est un cycle. On doit commencer par la recherche et passer par les phases du développement et de la démonstration jusqu'à la commercialisation. Encore faut-il savoir alimenter le tout.
    Combien investir de plus? C’est une question intéressante. On peut examiner différentes industries et dire qu’on a besoin de tant d'argent de plus. Toutefois, à mon avis, nous devons être concurrentiels à l’échelle mondiale. Si j’ai bien vu les chiffres, dans certains cas, l’investissement des gouvernements représente un pourcentage de l'ordre de 1 p. 100 du PIB.
    Quant à savoir ce que nous devons faire pour être concurrentiels, mes collègues sont mieux placés pour en parler.
    Je pense qu'il est vraiment difficile de préciser un montant. Je n'oserais pas le faire, mais comme je sais que l'argent est toujours un facteur, je crois vraiment que certains de ces problèmes ne sont pas nécessairement d'ordre financier. Nous ne voudrions pas régler le problème simplement à grands coups d’argent dans la recherche et le développement.
    Comment passer de l'idée au produit et trouver ce qui manque? Voilà ce dont il est question aujourd'hui. À mon avis, il y a quelques solutions, comme celles dont nous venons de discuter concernant les universités et la sensibilisation des petites et moyennes entreprises. Je travaille actuellement avec trois entreprises en démarrage; l’une d'entre elles a perdu sa propriété intellectuelle, faute de l’avoir brevetée. Quand je me suis attelé à la tâche, la première chose que nous avons faite a été d’élaborer un projet de brevetabilité. Beaucoup de petites entreprises ou de jeunes entrepreneurs ne comprennent même pas de quoi il s’agit.
    Il y a donc beaucoup de mesures que nous pouvons prendre, autres que celle d’injecter tout simplement plus d'argent dans la recherche et le développement. Je tiens à insister là-dessus.
    Je voulais ajouter que l'ISAD ou d'autres programmes de la même nature constituent une première étape, pour autant que nous établissions les bonnes modalités et que nous les exécutions sans tarder. Ensuite, il faut voir s'il y a des lacunes. Toutefois, je pense que certains de ces programmes ne sont pas utilisés à leur juste valeur à cause de certaines des dispositions en matière de propriété intellectuelle et de droit de propriété qui s'y trouvent.
    Par exemple, les modalités de remboursement tiennent compte, entre autres, du chiffre d'affaires global de l'entreprise, plutôt que du nouveau produit en cours de développement. La pilule est très amère: si le produit est un échec, le remboursement se fait alors en fonction du reste de la propriété intellectuelle qui n'a, en fait, jamais été financée par le gouvernement. Certains de ces programmes prévoient des dispositions qui découragent leur pleine utilisation. La première étape serait donc de les rationaliser et de les intégrer rapidement dans le processus, d’uniformiser certains des accords sur la propriété intellectuelle et de s'assurer que l'industrie n'accuse pas de retard.
    S'il me faut deux ans pour négocier une entente, j’accuse un retard de deux ans. Je tire de l'arrière. Je risque d’échouer complètement.
    Par exemple, vous avez parlé de l'idée d'un fonds d'investissement pour les brevets. Histoire de nous donner un chiffre approximatif, à combien pourrait s'élever la facture et quelle serait la meilleure façon pour le gouvernement de récupérer l’argent à partir d'un tel fonds?
    Un fonds d'investissement pour les brevets pourrait être une combinaison de fonds privés et publics. Il y a des sociétés de capital privé qui s’y intéresseraient beaucoup.
    Toutefois, ce n'est pas donné. Il faudrait plus de 50 millions de dollars pour créer un fonds d'investissement pour les brevets, mais regardez l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada. Cet organisme a beaucoup d'investissements; c’est une bonne partie de nos fonds de pension. Il pourrait être intéressant d'étudier des modèles semblables, comme celui de Northleaf, un modèle de capital privé qui fonctionne très bien, afin d’essayer d'aider le capital-risque. Je rappelle qu’il s’agit d’une initiative publique-privée en Ontario, dans le cadre de laquelle le gouvernement provincial a accordé un certain montant à une entreprise du secteur privé... Je crois que certains fonds de pension y ont également participé. Ils se sont mis à investir dans des entreprises.
    Il y a quelques modèles intéressants, que j'ai décrits dans mon rapport, et qui méritent qu'on s'y attarde. Ils coûtent cher, mais le gouvernement ne serait pas nécessairement tenu d'investir beaucoup de fonds dès le départ; cela se ferait en partenariat.

  (1215)  

    Merci, monsieur Stewart. C'est tout le temps dont nous disposons.
    Puis-je ajouter une observation au sujet de l'ISAD? Nous tenons à souligner que, grâce à de simples changements aux modalités, il est possible d’accroître le nombre de propriétés intellectuelles au Canada ainsi que les investissements dans la recherche et le développement.
    On connaît plusieurs exemples d’entreprises qui ne souscrivent pas à l’ISAD à cause des modalités. Pourtant, il ne coûte presque rien de les changer. Si vous voulez un chiffre, nous pourrions vous en faire part. C’est ce qu’il faut si nous tenons à accroître l'intensité de la recherche et du développement au Canada et à maintenir notre compétitivité par rapport aux autres pays.
    Bref, je veux faire valoir qu'on peut aussi prendre des mesures qui ne coûtent rien au gouvernement. C’est ce que nous étudions dans le cadre de l'examen actuel des politiques et des programmes sur l'aérospatiale.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Carmichael, qui dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Nous avons parlé des universités et de bien d’autres questions, mais pour poursuivre sur la lancée de mon collègue, j'aimerais qu'on s'attarde un peu sur le fonds d'investissement pour les brevets.
    Monsieur Stajcer, vous avez dit que les chances de réussite de, disons, 10 brevets — ou peu importe le nombre — sont assez faibles, compte tenu du niveau de risque. Comment peut-on encourager les partenariats entre les secteurs privé et public?
    Vous avez parlé du Régime de pensions du Canada, qui applique des lignes directrices très rigoureuses en matière d'investissement. La tolérance au risque posera un problème de taille dans le contexte qui nous occupe. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui: nous essayons de déterminer comment trouver le juste milieu afin que ça fonctionne.
    Pouvez-vous nous en parler?
    Je suis d'accord pour dire qu'il s'agit d'un domaine à risque élevé.
    Un des problèmes, c'est qu'on ne peut pas obtenir de fonds de capital-risque pour financer ce développement. Évidemment, les entreprises se serrent la ceinture. Elles n'ont pas, elles non plus, la pleine capacité d'investir dans ces projets.
    Par ailleurs, je ne parle pas d'environ 10 brevets, mais d'environ 10 idées. Il faudrait ensuite faire passer certaines d'entre elles à l’étape de la commercialisation. Quand on investit 1 million de dollars dans chacune des 10 idées, on doit être capable d'accepter le résultat. Ces 10 millions de dollars ont-ils généré trois entreprises qui affichent un revenu de 200 millions de dollars? On comprend alors qu’il faut faire ce qui s’impose et laisser tomber les sept autres; faute de quoi, on ne sera jamais au bout de nos peines.
    C'est ainsi que je vois les choses; je tiens compte du taux de réussite. Comme je suis plus près du marché, mon taux de réussite devrait être supérieur, car je devrais connaître les problèmes; toutefois, à l’étape de la recherche universitaire, il n’y a généralement aucun moyen de savoir si une idée ou un brevet va réussir. Il faut généralement l'ajouter à d'autres propriétés intellectuelles en cours d’élaboration et les faire passer à la production finale.
    Au Canada, les gens sont un peu moins enclins à prendre des risques. Je pense à certaines initiatives américaines; dans une réunion à laquelle j'avais assisté, nous avions examiné la possibilité de mettre au point un nouveau matériau servant à fabriquer des piles, ce qui nécessitait un investissement de l'ordre de plusieurs millions de dollars. Il fallait faire une quantité minimale de travail. La question que nous nous sommes posée, c’est: « À quel point en avons-nous besoin? »
    Cela peut se faire assez rapidement, mais il faut pouvoir accepter l'éventualité d'un échec.
    Dans ma carrière précédente, je travaillais dans le milieu des affaires. Je sais parfaitement bien qu’on peut connaître quelques faux départs sur la route vers la réussite.
    C'est ça.
    On doit mesurer l'investissement qu’on fera à ce moment-là par rapport au bénéfice total qu’on obtiendra à la fin. Si quelques projets échouent, on s’y attend déjà. Cependant, si nous ne prenons pas cette mesure...
    Oui, je suis tout à fait d'accord avec vous. C'est ce qui m'inquiète dans...
    Non, je pense qu'il y a confusion entre un investissement dans les brevets et un fonds d'investissement pour les brevets. Pour ma part, je parle d’un modèle de capital purement privé. Supposons que vous avez déjà 50 brevets et que vous voulez en vendre 20 pour économiser de l'argent ou pour générer des rentrées d’argent pour votre entreprise ou encore, pour concéder réciproquement des licences au fonds en question. Ainsi, le fonds devient une tribune dans laquelle un donneur de licence réciproque achète des brevets auprès de Tony pour qu'il puisse y réinvestir de l'argent.
    Je tiens à préciser que c'est très différent des subventions directes dans les brevets.
    Oui. Nous parlons ici d'idées plutôt que de brevets établis...
    Exactement.
    ... qui ont déjà des bases plus solides.

  (1220)  

    C'est ça.
    Les brevets constituent une des façons dont on peut protéger la propriété intellectuelle. Il y a un certain nombre d'autres facteurs à prendre en considération. Quelle est la taille de l'entreprise? S’agit-il d’un processus ou d’un logiciel? Le brevet peut-il faire l'objet d'un droit d'auteur? Il y a d'autres mesures de protection à cet effet. Ou encore, on peut tout simplement publier l’information en matière de brevet et avoir la liberté d’action.
    C'est ça.
    Il existe de nombreux mécanismes. Pour ma part, j'essaie de voir comment je peux utiliser mes brevets par l'entremise de courtiers et de licences accordées à d'autres entreprises, mais un tel fonds d'investissement me serait utile.
    Il me reste une minute, alors je vais être bref.
    Je me demande si vous pourriez nous parler du répertoire de type amazon.com. Comment pouvons-nous réunir les brevets dans un endroit où nous pouvons les utiliser de façon productive?
    À mon avis, il faudrait embaucher quelqu'un, un partenaire de capital privé comme Loudon Owen, qui l'a déjà fait. Vous vous souvenez de l’entreprise i4i; Microsoft lui a payé 250 millions de dollars pour un brevet. Les gens comme lui sont tout à fait disposés à investir dans des fonds de brevets qu'ils pourraient acheter ou utiliser au moyen d’une licence auprès d’universités, etc. Il s'agit de trouver le bon partenaire. Ce serait probablement un intervenant du domaine du capital privé qui comprend bien ce jeu et qui l'a déjà joué.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Mme Freeman; vous avez cinq minutes.
    Bienvenue au comité.
    Merci, monsieur le président; je suis ravie d'être ici.

[Français]

    Madame Boily, lorsque vous avez parlé à Mme LeBlanc précédemment, vous avez terminé en mentionnant que les acquisitions publiques visant à acheter le IP nous permettent d'être en mesure de développer en théorie des technologies d'entretien. Pouvez-vous élaborer à ce sujet? Je pense d'ailleurs que Mme Harvey voulait ajouter quelque chose à cet égard. Pouvez-vous continuer de parler de cet aspect et comment cela est réinvesti dans notre économie?
    Je vais vous donner un exemple. On vous a parlé tantôt de la Valley of Death et on parle de l'importance de faire des Technology Demonstration Programs. Cela est très courant dans d'autres pays où il y a des programmes de développement relatifs aux Tech Demos que les gouvernements financent à 50 %. Je sais que cela veut dire qu'il y a de l'argent investi par le gouvernement. Il y a eu ici une situation il y a sept ou huit ans où une compagnie est allée voir le gouvernement et voulait avoir de l'aide pour investir dans un Tech Demo. Le gouvernement n'était pas en mesure de le faire en raison des dispositions et des conditions du programme.
    Cette entreprise est donc allée dans un autre pays et a trouvé de l'aide non remboursable. Tout le développement et le IP est allé dans un autre pays avec tous les emplois de haute valeur ajoutée. Cet exemple montre à quel point ce n'est pas un zero sum game. On investit un certain montant qui est non remboursable à hauteur de 50 %, mais les impacts économiques et les revenus dans un autre pays sont assez incroyables. Nous avons perdu une occasion absolument extraordinaire de garder quelque chose d'important au Canada. Alors, dans ce sens, il est important qu'on collabore au chapitre des investissements qu'on appelle le IP parce que, finalement, unTech Demo consiste à amener le IP à un niveau où on fait la démonstration de la viabilité de la technologie.
    Dans le cas des achats militaires, il est clair que lorsque le gouvernement se prévaut des données et de la propriété intellectuelle afin qu'on puisse l'utiliser, en disposer et faire en sorte que nos compagnies puissent l'utiliser, cela apporte énormément de bénéfices. Vous êtes probablement au courant — vous avez beaucoup de compagnies dans votre comté — que cela leur donne la possibilité de bâtir sur cette propriété intellectuelle et de développer des solutions qui peuvent par la suite être exportées à d'autres pays sur des plateformes pour lesquelles s'applique cette propriété intellectuelle.
    En somme, il y a des possibilités de retombées économiques qui sont redoublées lorsque le gouvernement acquiert la propriété intellectuelle au même moment où il acquiert une plateforme, qu'elle soit aérospatiale ou autre.
    En effet, on entend parler de cela dans mon comté où il y a, comme vous le savez, des compagnies aérospatiales.
    Par exemple, quand on fait un investissement ou une acquisition publique — et que cela appartient donc au Canada —, mais que ce n'est pas notre propriété intellectuelle, l'entretien doit être fait par la compagnie d'origine qui n'est pas au Canada, la plupart du temps. On est donc constamment en train de réinvestir dans un autre pays.
    Pouvez-nous dire si c'est réinvesti plusieurs fois dans notre économie parce qu'on peut exporter cela?

  (1225)  

    C'est exact. Lorsqu'on possède la propriété intellectuelle, on peut exécuter des travaux de plus haut niveau sur les plateformes qu'on acquiert. On parle donc de travail d'ingénierie et non pas seulement de travail d'entretien de l'aéronef. Cela implique de l'ingénierie. Cela implique aussi de la recherche de solutions aux problèmes qui peuvent survenir après un certain nombre d'heures de vol, ou avant que le problème survienne, en se basant sur des tests qui peuvent être faits en collaboration avec des instituts de recherche, etc.
    C'est donc extrêmement complexe. Beaucoup de gens sous-estiment la qualité derrière le travail effectué lors de l'entretien des avions. Cela veut dire non seulement beaucoup d'argent, mais aussi beaucoup de temps, parce que les plateformes qu'on acquiert ont généralement une durée de vie de 20 à 30 ans.
    C'est exact.
    Madame Boily, voulez-vous ajouter quelque chose à cet égard?
    À force de donner seulement ce qu'on peut appeler les restes, autrement dit les petits travaux, aux entreprises canadiennes, on va faire perdre au Canada la capacité de faire l'entretien. Je ne pense pas que le gouvernement fédéral puisse permettre qu'il n'y ait plus cette capacité au Canada.
     Ce que je dis est réel. Il n'y a pas beaucoup d'entreprises. Elles sont très bonnes et très concurrentielles, mais, si on leur enlève cet accès à la propriété intellectuelle, elles vont tôt ou tard perdre leur avantage. Il n'y en aura plus au Canada.
    Par conséquent, en réalité, si on fait un investissement...

[Traduction]

    C'est tout le temps dont nous disposons, madame Freeman. Je suis désolé.
    C'est maintenant au tour de Mme Gallant; vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    En ce qui concerne les marchés publics, on a dit qu'il y a quelques domaines dans lesquels le gouvernement fédéral pourrait aider à surmonter les obstacles à la propriété intellectuelle. On a fait mention, entre autres, des acquisitions. Pourriez-vous fournir des précisions à ce sujet? Que pourrait faire de plus le gouvernement fédéral afin de stimuler la propriété intellectuelle et de vous aider à traverser cette vallée de la mort?
    En fait, dans le contexte de l'entreprise que nous avons démarrée, le gouvernement est le premier acheteur du produit. Il l'utilise et le développe. Le gouvernement a adopté le produit à l’interne, ce qui est fort utile. C’est très important pour la validation du produit; nous pouvons maintenant l’exporter et le présenter au monde entier.
    Pour ce qui est des marchés publics et même, dans la mesure du possible, des retombées industrielles régionales, je crois vraiment que le gouvernement devrait examiner à l'interne pour voir ce qu’on est en train de développer, au lieu d’acheter simplement quelque chose à l’extérieur. C’est très utile pour traverser la vallée de la mort. Cela aide à maintenir l’élan nécessaire pour passer à un marché d'exportation plus grand. Le Canada est encore un marché relativement petit à l'échelle mondiale, et nous sommes vraiment une entreprise internationale; nous devons agir de la sorte pour acquérir un avantage et stimuler la croissance économique au Canada, parce que les emplois se trouvent ici.
    À cet égard, il y a le Programme canadien pour la commercialisation des innovations à l’intention des petites et moyennes entreprises. Êtes-vous en train de proposer que nous appliquions ce programme en plus des retombées industrielles régionales versées aux entreprises de plus grande taille?
    À vrai dire, nous avons tout récemment présenté une demande dans le cadre du Programme canadien pour la commercialisation des innovations, parce que nous cherchons des fonds de participation à la recherche et au développement. Nous n'avons pas encore eu l’occasion d’essayer le programme, mais nous espérons pouvoir l’utiliser comme source de fonds pour améliorer notre compétitivité et pousser notre propriété intellectuelle plus loin sur le marché. C'est un bon exemple. Je ne connais pas encore tous les détails du programme. Nous n'avons pas travaillé dans le cadre celui-ci, mais nous osons espérer qu’il s’agit d’un moyen qui nous aidera à commercialiser et à exporter notre propriété intellectuelle.
    Pour ce qui est du Programme d'aide à la recherche industrielle, c’est sûr qu’une entreprise ayant le nombre d'employés que vous avez ne serait pas admissible, mais ce genre de modèle vous aiderait-il à passer à l’étape de la commercialisation?
    Je pense que le PARI est un bon programme et d'après ce que je retiens de ma lecture des rapports, il peut recevoir un plus gros financement.
    Je crois que le choix du moment est très important. Nous devons rendre ces fonds accessibles et le faire rapidement. Le choix du moment est l'un des plus importants éléments moteurs du marché, et si nous tardons à rendre ces fonds disponibles... Même dans les conditions actuelles, nous gagnerons à accélérer ce processus. Nous stimulerons beaucoup plus rapidement la croissance et aiderons ces entreprises à accéder plus vite au marché.
    C'est un modèle utile. La mise à disposition d'un plus gros financement à des compagnies même plus grandes aiderait aussi.

  (1230)  

    D'accord.
    Un peu plus tôt, un témoin a fait référence aux universités et à leurs partenariats, mais nous avons aussi une myriade de laboratoires nationaux. Ils sont financés par le gouvernement fédéral, nous pouvons donc jouer un plus grand rôle au niveau du choix des technologies à financer.
    Que faites-vous actuellement? Établissez-vous des partenariats avec ces laboratoires nationaux afin de baisser les coûts liés à votre accès à la recherche?
    Par exemple, je délivre actuellement des brevets du CRC. Nous nous intéressons aussi à des technologies dont les brevets sont développés au CNRC. Nous examinons des modèles de collaboration utilisant ces instituts de recherche parce que nous ne pouvons pas tout faire à l'interne.
    Je pense qu'il faut que ce soit un modèle. Une chose est certaine au sujet de la PI, c'est qu'il existe des liens très solides avec la PI dans ces domaines, nous devons donc trouver le moyen de travailler avec eux. Ils ont déjà fait des investissements. Nous investirons davantage pour commercialiser les produits, mais nous devons trouver le juste équilibre au niveau de cet accord sur la PI lors de son transfert du laboratoire au marché.
    Nous avons, dans un cas, un permis du CRC pour développer une PI particulière. Nous commencerons ensuite par les redevances lors de la mise en oeuvre de la commercialisation. Malheureusement, durant l'intervalle — cet intervalle peut parfois varier —, ils demandaient aussi un paiement minimal annuel qu'il est difficile de verser étant donné que le produit n'est pas encore commercialisé.
    Par conséquent, il faut agir plus rapidement et comprendre... Je pense que la compréhension et une certaine flexibilité font partie de l'équation. Nous pouvons collaborer avec ces instituts de recherche pour développer de bons modèles, mais je pense que tout le monde doit être prêt à...
    Mme Cheryl Gallant: Faire preuve de plus de flexibilité...
    M. Tony Stajcer: Oui.
    C'est tout le temps dont nous disposons. Voilà qui met fin à la deuxième série de questions.
    Nous passons à la troisième série de questions de cinq minutes. La parole est à M. Wallace.
    Merci monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici. Je suis désolé d'avoir été obligé de quitter la salle. J'ai entendu toutes les déclarations préliminaires, mais je devais rencontrer des représentants de RIM, et nous avons parlé du même sujet que nous soulevons aujourd'hui, donc j'étais content d'être présent à cette rencontre. Je suis désolé d'avoir été absent quand des questions vous ont été posées. Je vous prie donc de m'excuser si mes questions ont été déjà posées.
    Comme nous l'avons annoncé dans notre budget, des changements seront apportés cet automne au système fiscal, le système de soutien à la recherche et au développement, des changements fondés essentiellement sur le rapport Jenkins. Certains de ces changements seront probablement apportés dans le prochain projet de loi d'exécution du budget, mais je crois que ça n'entrera pas en vigueur avant 2014.
    Savez-vous ce que vos organisations ou entreprises ont à dire du rapport Jenkins, des recommandations ou si elles pensent qu'il faut utiliser les programmes RS&DE ou, comme le disait Cheryl, PARI? Vous avez en fait parlé du PARI, mais j'aimerais savoir ce que vous pensez du RS&DE.
    En résumé, notre compagnie estime que le RS&DE est un outil unique qui aide toutes les compagnies, quelles que soient leurs activités. Il ne s'agit pas d'un financement précis tel que le financement de la technologie verte qui n'est accordé qu'aux entreprises vertes.
    Nous pensons que c'est un outil remarquable que devraient utiliser tous les Canadiens. Je pense que l'une des choses qu'ils ont faites est de diminuer le taux à 15 p. 100. Nous croyons que pour s'assurer que les gens comprennent les règles et ce qui est applicable ou non, il serait extrêmement avantageux de procéder à une simplification générale du processus.
    Nous aimerions aussi que le taux remonte à 20 p. 100. Nous sommes en quelque sorte... Nous ne comprenons pas de quelle façon l'argent économisé retournera...
    Votre compagnie participe donc très activement au RS&DE, n'est-ce pas?
    Tout à fait.
    Savez-vous quelle somme d'argent cela représente annuellement?
    Nous avons généralement un budget de développement global annuel qui inclut la R-D et des applications techniques exceptionnelles. Le montant est d'environ 20 à 30 millions de dollars par année, donc nous sommes très actifs dans ce domaine. Notre compagnie affiche un chiffre d'affaires d'environ 200 millions de dollars, nous sommes très actifs, mais nous croyons vraiment en ce système. Nous pensons qu'il devrait au moins continuer au même niveau.
    Le programme RS&DE est le programme le plus utilisé dans l'industrie aérospatiale, même plus que l'ISAD.
    Cependant, je crois que l'une des intentions du gouvernement est de baisser le taux de 20 à 15 p. 100 mais d'accroître le soutien direct, l'investissement direct...

  (1235)  

    C'est exact...
    Nous avons consulté nos membres et ce qu'ils disent est très clair: l'industrie aérospatiale a besoin des deux programmes. Nous avons besoin du RS&DE pour planifier les plans et les programmes d'investissement à long terme. C'est un programme qui porte plus sur le long terme alors que l'ISAD aidera à financer les technologies de transformation au sein de l'entreprise, donc ils se complémentent. L'industrie a définitivement besoin de ces deux programmes.
    Je dois avouer que les changements apportés au RS&DE me préoccupent un peu parce que ce programme ne peut pas être pris en compte séparément. Les incitatifs fiscaux à la R-D sont une chose, mais un mécanisme de soutien direct plus ou moins efficace en est une autre. Le reste de l'environnement, la parité du dollar et toutes ces variables ont un impact global sur la compétitivité de l'industrie. Ce que je veux dire, c'est que le RS&DE ne devrait pas être pris isolément. Nous sommes d'avis qu'il devrait être considéré dans un contexte plus large.
    Avez-vous quelque chose à ajouter ou est-ce que je peux poser ma prochaine question?
    J'allais seulement dire que certains de ces changements ont été faits pour quelques petites entreprises. Elles estiment que le RS&DE peut coûter cher et il faut parfois avoir recours à PricewaterhouseCoopers pour remplir les formulaires. Je travaille avec beaucoup d'entreprises en développement et l'investissement direct visait certaines d'entre elles.
    D'accord.
    Ma prochaine question...
    Il vous reste 20 secondes.
    Il me reste 20 secondes.
    Je ferai une observation à laquelle vous pourrez peut-être répondre.
    Certains pays ont de l'argent entièrement remboursable et d'autres de l'argent non remboursable. L'un est un cadeau, à mon avis. Le risque d'investissement dans la R-D et dans la PI est énorme, parce que peut-être 30 p. 100 de cet investissement se concrétise sous forme d'un produit qui est commercialisé. Le contribuable ne serait-il pas rassuré s'il savait que c'est remboursable?
    Nous allons laisser cela sous la forme d'une question de pure forme pour le moment, monsieur Wallace. Si quelqu'un pourra répondre à cette question plus tard, qu'il en soit ainsi.
    Nous passons à Mme LeBlanc. Je crois que vous allez partagez vos cinq minutes avec M. Harris.

[Français]

    C'est exact.
    Présentement, il y a des préoccupations au sein de l'industrie de la défense. Le gouvernement du Canada semble plutôt tester les appareils aux États-Unis. Le fait que les tests soient faits aux États-Unis ferme-t-il la porte aux compagnies canadiennes?
    Je ne suis pas au courant de la situation à laquelle vous faites référence. Je ne savais pas que les appareils devaient être testés à l'extérieur du Canada. Pourriez-vous en dire davantage à ce sujet, s'il vous plaît?
    Je n'ai pas plus de détails, mais, par exemple, n'est-il pas écrit dans le contrat des F-35 qu'ils seront testés aux États-Unis?
    C'est possible, mais nous n'avons pas entendu de préoccupations à cet égard.
    Vous n'avez pas entendu de telles préoccupations?
    Non, nous n'avons rien entendu de la sorte.
     Je cède donc la parole à mon confrère.
    Je dispose de quatre minutes. C'est plus de temps que je ne pensais.
    Je suis préoccupé par le programme RADARSAT. C'est un programme de technologie canadienne, qui permettra d'apporter des solutions à plusieurs problèmes dans l'espace et comblera plusieurs besoins canadiens. Malheureusement, les fonds pour poursuivre ce programme ne figuraient pas au dernier budget.
     Madame Boily et madame Harvey, souhaitez-vous faire des commentaires sur ce qui se passe lorsque le gouvernement dit qu'il appuie encore un programme comme RADARSAT, mais que les fonds ne sont pas là? Qu'arrive-t-il à ce type de programmes?
    Il n'y a aucun doute que si un programme est annoncé, les compagnies dans le domaine spatial doivent se préparer à livrer une certaine partie de la production au moment où elles recevront le mandat de le faire. Si le financement ne suit pas, ces compagnies doivent prendre des décisions internes qui reflètent la réalité. Cela veut dire que s'il n'y a pas de transfert d'argent, il y aura probablement des employés en trop qui devront être mis à pied. C'est notre crainte lors de cas semblables.

  (1240)  

    C'est bien, je vous remercie.

[Traduction]

    Bien évidemment, je suis au courant de la participation directe de COM DEV à la Mission de la Constellation RADARSAT. La société COM DEV a-t-elle prévu quelque mesure visant à se passer du financement, peut-être du financement qu’elle a reçu à titre de sous-traitant, me semble-t-il? Quand ce financement va-t-il cesser?
    Je ne participe pas directement au projet en tant que tel ni au processus d’attribution des fonds. Je crois comprendre qu’il reste encore des fonds, mais je suis d’accord avec Maryse, c’est difficile dans le cadre d’un vaste marché public. On renforce le personnel, et dans le cas où le financement est soudainement suspendu ou si les fonds sont versés en retard, il faudra prendre des décisions d’ordre opérationnel. C’est tout ce que je peux dire à ce sujet.
    Si je peux ajouter quelque chose, cela souligne combien il est important pour le gouvernement d’avoir une stratégie à plus long terme dans le domaine spatial, des capacités qu’il faut avoir au Canada et qui doivent être renforcées, parce que nos sociétés doivent être informées à l’avance pour préparer des plans en fonction des priorités établies. C’est un parfait exemple d’une situation dans laquelle il aurait fallu dés le départ un peu plus de coordination.
    Excellent. Je suis entièrement d’accord, et si cela ne tenait qu’à nous, le financement aurait été inclus dans le dernier budget, car ce genre de programme offre toutes sortes d’avantages à de nombreuses régions du pays.
    Pour ce qui est de ce type de financement et de la propriété intellectuelle, puisque nous en parlons, avez-vous une idée du montant investi dans la propriété intellectuelle dans le cadre de ce programme? Bien sûr, il s’agit de la troisième génération de ce type de programme, donc cela dure depuis longtemps.
    Je peux dire que nous faisons des progrès en technologie de traitement des signaux. Cette technologie sera installée dans les satellites afin d’obtenir une résolution peut-être meilleure, plus de données, de meilleures photos des navires, etc., et de meilleures informations de la zone surveillée.
    Des progrès ont été réalisés, mais ce n’est pas la seule technologie au monde. Les Européens ont beaucoup de satellites SAR. Nous pensons que nous sommes compétitifs à l’échelon international. Je dirais que plusieurs centaines de millions de dollars ont été investis dans cette technologie au fil des années.
    Je suis désolé. Je vous interromps pour un très court instant. Y a-t-il eu…
    Monsieur Harris, votre temps est écoulé. Désolé.
    Allez-y, monsieur Lake, vous avez cinq minutes.
    Merci monsieur le président.
     Monsieur Stajcer, je reviens sur le point que vous avez soulevé dans votre déclaration, soit les différentes approches adoptées par les universités du pays à l’égard de la PI. J’ai eu l’occasion de rencontrer cet été des représentants d’universités et j’ai participé personnellement à ces discussions.
    Pouvez-vous nous dire pourquoi vous pensez que les universités ont des approches si différentes concernant la PI?
    Je pense que c’est une politique qui vient du plus haut niveau. Par exemple, à l’Université de Waterloo, le chercheur ou les chercheurs et aussi, les étudiants de troisième cycle, détiennent les droits de PI. D’autres universités, comme York, ont un bureau central avec lequel il faut faire affaire. L’Université de Waterloo a aussi un bureau de la PI qui aide les chercheurs dans leurs rapports avec l’industrie et à négocier, mais ce bureau est encore sous la responsabilité d’une seule personne, donc je dois passer par le bureau pour entrer en contact avec les chercheurs. Ils doivent accepter cette situation, mais je ne suis pas sûr que l’université ou les chercheurs l’aient acceptée. Comme je l’ai dit, c’est plus une question d’éducation.
    Il faut qu’ils comprennent. J’expose des faits concernant la PI et la façon dont les produits seront commercialisés et ils commencent à prendre conscience que c’est le début d'une période d’investissements que, pour commercialiser les produits, il faudra franchir d’autres étapes du processus de la PI. Et je pense donc que c’est en partie une question d’éducation.
    Une des raisons est que les inventeurs veulent conserver la PI. Ils estiment qu’elle a beaucoup de valeur. Nous voulons encourager les professeurs et les chercheurs, à investir dans l’innovation et avoir le sentiment de développer une nouvelle technologie. C’est ce que nous voulons faire, mais comme je l’ai dit, certaines des recherches que nous avons vues sont dépassées.
    À mon avis, l’industrie devrait s’intéresser plus à des recherches comme celles financées par le CRSNG. Les chercheurs et l’industrie ont des objectifs différents. Certains chercheurs veulent publier des articles. En faisant connaître leurs idées, en publiant des livres, etc., ils veulent se faire une réputation d’experts sur la scène internationale. La commercialisation de la PI ne les intéresse pas forcément.

  (1245)  

    Ce que je veux dire en posant cette question, c’est qu’on peut supposer que si les universités adoptent une approche particulière à l’égard de la PI, c’est qu’elles ont de bonnes raisons de le faire. Par conséquent, si ces approches leur ont été imposées, on pourrait alors aussi croire que la majorité des universités auraient probablement hésité à les adopter.
    Cela dépend beaucoup du secteur. Si Waterloo développe un logiciel, soit un produit qui est rapidement commercialisé, il est logique de protéger les droits de PI de ce logiciel. Par exemple, pour les produits pharmaceutiques, les représentants de MaRS Innovation ont déclaré ne développer des produits que lorsque l’université détient les brevets et pas les professeurs, et ce, pour éviter tout problème qui pourrait survenir ultérieurement.
    Pourquoi les universités adoptent-elles des politiques différentes? Parce qu’elles ont affaire à des secteurs différents. Tony et moi n’y voyons aucun inconvénient. Je ne pense pas que les universités puissent toutes adopter les mêmes approches.
    Ce que nous voulons, c’est que les ententes soient plus souples et indiquent clairement qu’il ne faut pas faire de paiements d’étape ou de versements de sommes à l’avance, etc. Pour que les ententes juridiques soient plus souples, il faudrait changer de fond en comble notre façon de penser.
    Tony, sur quels critères vous fondez-vous pour décider de travailler avec une université?
    Nous cherchons les universités qui ont une expertise dans le domaine en question et qui visent les mêmes objectifs que nous.
    En l'occurence, nous fournissons de l’équipement à hyperfréquences aux constructeurs de satellites, nous cherchons donc des universités qui ont une expertise dans ce domaine. Sont-elles réputées pour cela? Nous aurons tendance à investir dans un domaine où les chances de réussite sont plus grandes.
     L’une des premières choses que je fais quand je prends en charge les coûts associés à une chaire... En fait, le CRSNG a pour principe général — qu’il s’agisse d’une chaire ou d’un projet concerté — que l’université détienne tous les droits de PI. En premier lieu, je souhaiterais un peu plus de flexibilité au CRSNG pour qu'il y ait peut-être deux ou trois modèles, selon le secteur.
    Ainsi, les universités commenceraient à… Elles disent toujours que c’est le modèle du CRSNG et qu’elles doivent détenir les droits de PI. Je pense qu’elles calquent dans une certaine mesure leur attitude sur celle du CRSNG.
    Merci, messieurs Stajcer et Lake.
    Pour terminer, la parole est à M. Regan, pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais poser aux témoins une question sur le processus de brevet. Ce dernier est plus court aux États-Unis qu'au Canada.
    Pourriez-vous nous parler d'options que le gouvernement ou le comité devraient considérer pour améliorer ce processus et le rendre plus court?

[Traduction]

    Je voudrais certainement qu'il soit plus court. Parce que les avocats spécialisés en brevets d’invention me coûtent une fortune. Le temps qu'il prend nous pose des problèmes. Il faut y consacrer beaucoup de ressources et de temps. C'est un processus compliqué.
    Cela dit, ça devient très difficile, parce que la nouveauté réside de moins en moins dans la technologie. Nous devons être prudents; parfois le processus dure cinq ou six ans, mais les recherches sont très marginales, ce qui n'est pas forcément ce qu'il y a de mieux pour obtenir des brevets. Il serait utile d’accélérer le processus afin que les gens puissent dire qu’ils ont des brevets qui viennent appuyer les activités de leurs entreprises et que la pièce maîtresse est protégée.
    D’aucuns font aussi valoir que nous pourrions améliorer les bases de données archaïques de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada afin de faciliter la recherche de données. Beaucoup de gens disent que la recherche est facile dans les sites Web américains, mais pas dans les sites canadiens.
     Beaucoup d’entrepreneurs m’ont dit quelque chose d'autre, soit que les tierces parties devraient pouvoir contester une demande avant l’octroi du brevet, car c’est une excellente façon d’éliminer les « pommes pourries ». Par exemple, en Israël, les demandes sont publiées et les gens peuvent les contester; ce qui permet d’étudier plus en détail les mauvaises demandes.
    L'élimination des mauvaises demandes de brevet qui engorgent le système pourrait accélérer le processus.

  (1250)  

    Permettez de poser une question à Mme Boily.

[Français]

    Vous avez parlé des droits relatifs à la propriété intellectuelle par rapport à l'approvisionnement gouvernemental. Quelle est la pratique dans les autres pays?
    Que se passe-t-il quand une compagnie canadienne, par exemple, va ailleurs? Est-ce qu'elle négocie de telles lois avec les gouvernements étrangers?
    Habituellement, les autres pays ont leurs propres avions. Au Canada, nous avons un très petit marché de la défense. Ainsi, par exemple, nous sommes donc obligés d'acheter ailleurs nos avions, nos camions et tout l'équipement militaire. Donc, si on se compare à d'autres pays qui fabriquent eux-mêmes leurs avions ou leurs tanks, ils n'ont pas le même problème que nous avons ici au Canada.
    Un de nos problèmes, c'est que si nos entreprises n'ont pas accès à la propriété intellectuelle lors de l'achat d'avions, elles ne peuvent même pas offrir leurs services à l'étranger parce qu'elles n'en ont pas la propriété intellectuelle. De plus, elles n'ont pas accès à ces marchés étrangers parce qu'ils sont très fermés. L'Organisation mondiale du commerce permet, pour des raisons de sécurité nationale, de garder du travail à l'intérieur d'un pays et ainsi de suite.
    Nous sommes pénalisés dans les deux sens. On n'a pas une industrie de la défense ou un marché assez grand. On ne peut pas avoir accès très facilement à d'autres pays.
    Je ne sais pas si cela répond à votre question.
    C'est très bien, merci.

[Traduction]

    Le régime des brevets devrait-il être différent selon le secteur? En admettant que chaque secteur a ses propres caractéristiques, faudrait-il alors que les périodes de validité des brevets soient plus longues ou plus courtes en fonction de ces caractéristiques? Qu’en pensez-vous?
    Voulez-vous dire une procédure rapide comme pour l’industrie aérospatiale?
    Je parle plutôt de la durée des brevets.
    La durée me semble adéquate. La technologie évolue très rapidement aujourd’hui. Des brevets d’une durée de validité de 20 ans sont arrivés à échéance, mais la technologie a tellement changé que des brevets ont été déposés il y a cinq ou huit ans pour protéger le prochain produit. Le cycle est de plus en plus court, donc, pour le moment la durée de validité est adéquate.
    Madame Harvey, craignez-vous qu'à cause de l’importance moindre accordée au RS&DE, ce sera le gouvernement qui prendra les décisions relatives aux investissements et non pas les compagnies.
    Non. En fin de compte, ce sont, bien évidemment, les compagnies qui prennent leurs propres décisions. Mais, ces décisions sont prises en tenant compte du contexte international et des efforts que déploient d’autres pays pour attirer les investissements étrangers.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Regan.
    Au nom du comité, je remercie infiniment les témoins.
    Oui, madame Gallant.
    Un certain nombre de recommandations ont été présentées aujourd’hui. Pouvez-vous demander à l’analyste de faire une liste détaillée des recommandations afin que, lors de la préparation de notre rapport, elles soient séparées en fonction des témoins qui les ont formulées et que nous puissions discuter de leur inclusion dans notre rapport final.
    Connaissant les compétences des attachés de recherche, on peut dire que c’est comme si c’était déjà fait.
    Très bien, merci.
    Allez-y, monsieur Harris.
    Je passe à autre chose. Depuis que l’avis de convocation à la séance de jeudi a été envoyé, plusieurs avis de motion ont été présentés, et j’ai remarqué qu’on n’a pas prévu du temps à la fin de la prochaine séance pour discuter des travaux du comité.
    Les membres du comité ont convenu que, durant les 15 dernières minutes de la prochaine séance, nous ferons le point de l’étude de la PI en nous fondant sur le résumé préparé à notre intention, et nous parlerons des prochaines étapes. C’est ce qui a été convenu pour le moment.
    D’accord, donc ce n’est pas indiqué dans l’avis qui a été envoyé.
    Non, je pensais que tout le monde savait que nous en parlerons durant les 15 dernières minutes, mais nous pouvons, si vous le souhaitez, réécrire l’avis.
    Donc, il s’agira essentiellement des travaux du comité, n’est-ce pas?
    Oui, mais surtout de faire le point sur l’étude de la PI.
    Désolé, j’ai été interrompu. Je voulais vous remercier, au nom du comité, pour les témoignages que vous avez faits aujourd’hui.
    La séance est levée.
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