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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 039 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 29 mai 2012

[Enregistrement électronique]

  (1140)  

[Traduction]

    Nous tenons à remercier les témoins d'être venus aujourd'hui. Nous avons suffisamment de membres du comité assis à leur place et un témoin au bout de la table. Un autre témoin se joindra à nous, M. Tiberghien, de Colombie-Britannique. Il fera sans doute une déclaration aussitôt après les personnes qui sont ici, à la table.
    Nous allons commencer par les témoins ici présents. Nous recevons l'hon. Allen Roach, de l'Île-du-Prince-Édouard. Merci infiniment d'être venu. C'est le ministre de l'Innovation et de l'Enseignement supérieur. Vous êtes accompagné de M. Kal Whitnell. Merci pour votre présence parmi nous.
    Nous avons également le plaisir d'accueillir Brad Wildeman, de l'industrie canadienne du boeuf.
    Nous allons commencer par vous, monsieur Roach. La parole est à vous et nous avons hâte d'entendre votre témoignage.
    Avant cela, j'ai oublié de mentionner le sujet de notre étude. Il s'agit d'un projet d'accord de partenariat économique global et de haut niveau entre le Canada et le Japon.
    Monsieur le président et membres du comité, merci de m'avoir invité à votre séance d'aujourd'hui. C'est la première fois que je participe à une séance d'un comité parlementaire et j'ai l'honneur de représenter l'Île-du-Prince-Édouard en tant que ministre de l'Innovation et de l'enseignement supérieur.
    Dans le dernier discours du Trône de l'Île-du-Prince-Édouard, et de nouveau dans son exposé budgétaire pour 2012-2013, notre gouvernement a énoncé des objectifs concrets pour la croissance de notre secteur privé, de notre commerce extérieur et de nos exportations ainsi que de notre population. Notre PIB atteindra 6 millions de dollars d'ici 2016, nous visons le chiffre de 75 000 emplois d'ici 2016 et nous aurons une population de 150 000 habitants d'ici 2022.
    Pour que notre province puisse atteindre ces objectifs, il est essentiel de consolider et d'élargir le commerce avec des puissances économiques internationales comme le Japon. Nous sommes sur la bonne voie. Pas plus tard que la semaine dernière, le Conseil économique des provinces de l'Atlantique a prédit que l'Île-du-Prince-Édouard sera la région de l'Atlantique qui enregistrera la plus forte croissance de son PIB en 2012. Notre gouvernement travaille diligemment avec ses homologues provinciaux, territoriaux et fédéraux à l'amélioration des débouchés commerciaux.
    L'Île-du-Prince-Édouard entretient depuis longtemps des relations avec le Japon. Le Japon reste un des principaux partenaires commerciaux de la province, puisqu'il se classe au troisième rang. En 2011, le commerce des marchandises s'est chiffré, au total, à près de 15 millions de dollars, ce qui représentait 2 p. 100 de nos exportations totales vers les différents pays.
    Nous avons également de solides relations culturelles qui ont attiré près de 29 000 touristes japonais dans l'Île-du-Prince-Édouard au cours des sept dernières années. Nous constatons que nos visiteurs du Japon ont tendance à dépenser plus que le touriste moyen, soit 95 $ par visiteur, par nuit, en moyenne. Le Japon est le seul marché dans lequel l'Île-du-Prince-Édouard possède une figure emblématique du Canada, Anne de la maison aux pignons verts, et c'est toujours la principale raison pour laquelle les Japonais visitent la province. L'orpheline aux cheveux roux est un personnage de roman très célèbre au Japon.
    L'Île-du-Prince-Édouard tient à élargir et accroître son partenariat avec le Japon par l'entremise de l'accord de partenariat économique Canada-Japon. Nous voyons des possibilités s'offrir à nous dans nos secteurs traditionnels, les produits de la pêche et l'aquaculture, l'agriculture et l'agroalimentaire, le tourisme et la fabrication. D'autre part, nous nous intéressons vivement à l'élargissement du commerce dans les secteurs des services, des biosciences, de l'aérospatiale et des technologies de l'information.
    À l'heure actuelle, les denrées alimentaires représentent la majeure partie de nos échanges commerciaux avec le Japon. L'Île-du-Prince-Édouard exporte vers le Japon divers produits qui sont souvent très diversifiés ou spécialisés. En 2011, nos principales exportations de produits de la pêche et de produits de l'aquaculture ont été le homard, pour 3,5 millions de dollars; les moules, pour 1,2 million de dollars et le thon, pour 600 000 $. Les autres produits de ce secteur que nous commençons à exporter sont les oeufs de hareng et le crabe des neiges.
    Malheureusement, comme une bonne partie de notre production est acheminée vers les provinces ou des États voisins avant d'être exportée, les statistiques fédérales concernant les exportations ne reflètent pas fidèlement la quantité de produits de l'Île-du-Prince-Édouard qui vont vers le Japon. Les statistiques d'Agriculture et Agroalimentaire Canada chiffrent les exportations canadiennes de poisson et fruits de mer à 250 millions de dollars pour 2011 et à 300 millions de dollars pour 2010. Les exportations de poisson et fruits de mer de l'Île-du-Prince-Édouard vers le Japon s'élevaient à 6 millions de dollars en 2011 et à 10 millions de dollars en 2010. En réalité, la valeur des exportations de produits de la pêche de la province vers le Japon en 2010 et 2011 se situait entre 18 millions et 20 millions de dollars. Nos exportations de ces produits vers le Japon se chiffrent en réalité à 12 millions de dollars pour le homard, 3 millions de dollars pour le thon et 2 millions de dollars pour les moules.
    Nous avons compilé ces chiffres à la suite des discussions que nous avons eues avec les entreprises de l'Île-du-Prince-Édouard qui approvisionnent le marché nippon en produits de la pêche. Par exemple, nous savons que 99 p. 100 du thon rouge de l'Atlantique pêché à l'Île-du-Prince-Édouard est vendu au Japon, ce qui explique l'écart dans les chiffres. Le chiffre réel est beaucoup plus près de 3 millions de dollars que des 600 000 $ mentionnés.

  (1145)  

    Nous voyons une excellente occasion d'augmenter nos ventes de homard et de moules, de même que de nouveaux produits comme les oeufs de hareng et le crabe des neiges. Notre province envisage le conditionnement sous marque commune pour réduire les frais de transport et nous sommes en train d'établir des filières d'exportation entre l'Île-du-Prince-Édouard et les marchés mondiaux. Le gouvernement a consacré des ressources à l'établissement de filières d'exportation pour un certain nombre de nos industries.
    En ce qui concerne nos exportations agricoles et agroalimentaires, les principaux produits sont le fromage, les produits à base de pomme de terre, le canola et le soja. Le Japon est notre troisième partenaire commercial — en réalité, le deuxième si l'on tient compte des écarts que j'ai mentionnés dans les données sur les exportations.
    Nous fondons beaucoup d'espoir dans les relations commerciales que nous avons établies en approvisionnant les acheteurs japonais en canola. Nous sommes seulement en train de développer ce marché, mais nous savons que le Japon a un gros appétit pour notre canola de haute qualité et sans OGM. L'agriculteur de l'Île-du-Prince-Édouard, Raymond Loo, et l'entreprise régionale Atlantic Oil Seed Processing ont été les principaux artisans de l'établissement de ces relations.
    Nous espérons pouvoir exporter davantage d'huile de canola à valeur ajoutée que de grain non transformé. Nous possédons des installations pour la production d'huile de canola et notre gouvernement examine ce qu'il peut faire pour aider ce secteur à trouver le moyen le plus efficace de livrer ce produit tout en assurant la haute qualité qu'exige le marché japonais.
    Nous savons aussi que le Japon désire obtenir des produits alimentaires et surtout des produits sains et de haute qualité. Cela nous a aidés à vendre notre soja de qualité alimentaire. À l'heure actuelle, la production de 8 000 acres de soja va vers le Japon et notre sarrasin, qui sert à faire des nouilles, fait partie de l'alimentation de base des Japonais.
    Pour continuer d'exporter avec succès des produits alimentaires vers le Japon, l'Île-du-Prince-Édouard souhaite que le gouvernement fédéral recherche ce qui suit dans ses négociations: une réduction des droits de douane sur le poisson et les fruits de mer, de même que les produits agricoles et industriels; des résultats positifs à l'égard des obstacles techniques au commerce; et un assouplissement des règles à l'égard des mesures sanitaires et phytosanitaires.
    Des règles d'origine aideraient nos secteurs clés à mieux pénétrer le marché japonais. Par exemple, pour faciliter nos exportations de produits organiques, nous aimerions conclure un accord avec le Japon au sujet de l'équivalence des normes à l'égard des produits organiques. À l'heure actuelle, les produits organiques canadiens sont sérieusement désavantagés par rapport aux produits organiques américains, car les États-Unis ont déjà des normes d'équivalence avec le Japon.
    En plus des relations commerciales que nous avons dans les secteurs traditionnels des produits alimentaires et du tourisme, nous aimerions élargir nos relations dans les domaines des services, de l'éducation et de l'investissement. L'Île-du-Prince-Édouard continue de développer une solide économie du savoir ainsi qu'un secteur des services évolué et concurrentiel. Le secteur des services emploie près de 54 000 personnes et c'est un important moteur de l'économie de l'Île-du-Prince-Édouard puisqu'il représentait 76 p. 100 du PIB de la province en 2010. Certaines entraves pourraient freiner les échanges dans ce secteur, à savoir les exigences en matière de citoyenneté ou de résidence, l'absence de dispositions transitoires ainsi que les restrictions touchant la propriété et l'investissement. La négociation de règles favorables dans ces domaines avantagerait directement les entreprises et les travailleurs de ce secteur vital de l'Île-du-Prince-Édouard.
    Le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard envisage d'augmenter le nombre d'étudiants étrangers qui étudient dans notre université et nos collègues. Nous pensons que leur présence renforce nos écoles et que les étudiants qui vivent une expérience positive dans nos établissements envisageront peut-être d'immigrer dans notre province. Un grand nombre d'étudiants étrangers pourraient venir du Japon et nous allons suivre l'évolution de la situation avec intérêt.
    Nous voyons également une possibilité d'investissement étranger. En négociant des règles d'investissement prévisibles et en garantissant l'accès aux marchés japonais, on contribuera à créer des conditions équitables pour les investisseurs et les entreprises de l'Île-du-Prince-Édouard et à réduire les risques associés à l'investissement à l'étranger. Cela augmentera l'investissement dans les deux sens et aidera à créer des emplois et une prospérité durable pour les travailleurs de la province.

  (1150)  

    Au nom du gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard, je tiens à remercier les membres du comité de nous avoir invités à participer à cette discussion. Nous trouvons encourageant de voir progresser les discussions sur l'accord de partenariat économique Canada-Japon. L'Île-du-Prince-Édouard espère un élargissement du commerce entre nos deux pays.
    Merci.
    Merci infiniment.
    Nous passons maintenant à M. Brad Wildeman, président de Boeuf Canada Inc.
    La parole est à vous, monsieur.
    Merci, monsieur le président et membres du comité.
    Je vais me présenter rapidement. Je suis Brad Wildeman, le président de Boeuf Canada Inc., qui résulte de la fusion de trois organismes antérieurs que vous connaissez probablement: Canada Beef Export Federation, le Centre d'information sur le boeuf qui faisait de la commercialisation au Canada et aux États-Unis pour l'industrie du boeuf, ainsi que l'agence nationale chargée de percevoir auprès des producteurs de bétail des contributions basées sur leurs chiffres d'affaires. Nous avons regroupé ces trois organismes en un seul.
    Personnellement, je suis exploitant d'un parc d'engraissement et éleveur de bovins dans le centre de la Saskatchewan.
    Je vais vous donner un bref aperçu général de Boeuf Canada. C'est un nouvel organisme qui est entré en fonction le 1er janvier. Nous en sommes encore à notre première année d'activité, mais il y a eu certains changements. Boeuf Canada Inc. cherche uniquement à créer de la valeur pour les parties prenantes de notre secteur en faisant de la commercialisation. Nous ne jouons pas un rôle politique. Il est relativement rare que nous tenions ce genre de discours, mais nous estimons que c'est très important. Le Japon est pour nous un marché essentiel.
    Nous sommes uniquement financés par les producteurs de boeuf du Canada, par l'entremise du système national de contributions. Nous sommes chargés de la commercialisation au Canada et à l'étranger. Notre principal rôle est d'obtenir la valeur maximale pour chaque morceau de viande, dans l'intérêt de nos principales parties prenantes, qui sont surtout des producteurs de boeuf, mais pas exclusivement.
    Notre conseil d'administration est composé principalement d'éleveurs de bétail des quatre coins du pays, de chaque province du Canada. Nous comptons également des représentants des principaux secteurs soit les abattoirs, les exportateurs, les transformateurs de second cycle, le secteur des services alimentaires, etc. Nous avons donc un conseil d'administration assez représentatif.
    Pour ce qui est du Japon, bien entendu, depuis la crise de l'ESB, ce marché nous a été fermé jusqu'en 2005. Nous sommes maintenant limités aux bovins de moins de 21 mois, même si ce n'est pas une norme mondiale. C'est une norme que le gouvernement japonais nous a imposée. Cela a sérieusement limité notre capacité d'exporter vers le Japon.
    Le Canada se classe au troisième rang des fournisseurs de denrées agricoles du Japon où il a exporté pour plus de 2,9 milliards de dollars en 2010. Le Japon est également le troisième importateur mondial de viande de boeuf. Près de 60 p. 100 du boeuf qu'il consomme — soit 58 p. 100 — est importé de l'étranger, surtout des États-Unis et de l'Australie.
    En 2001, nos exportations de boeuf vers ce marché ont atteint leur niveau le plus élevé, soit de près de 29 000 tonnes. En 2002, nous sommes retombés à environ 24 000 tonnes. En 2010, depuis que le marché nippon nous a été rouvert en 2005, nous avons expédié 15 500 tonnes métriques de boeuf, d'une valeur d'environ 78 millions de dollars.
    Nous constatons que la préférence des consommateurs de ce pays s'oriente vers un régime alimentaire plus occidental incluant plus de boeuf et que la viande persillée de boeuf nourri au grain est de plus en plus appréciée. Nous avons éduqué le personnel des services d'alimentation au sujet des avantages de cette qualité de viande. Nous considérons qu'il s'agit des marchés mondiaux ayant le plus de valeur ajoutée pour notre produit de première qualité.
    Les consommateurs commencent également à rechercher le boeuf nourri à l'orge, qui est intéressant en raison de sa couleur plus pâle et de sa teneur plus faible en gras. Nous pensons que cela pourrait constituer pour nous un facteur concurrentiel très important par rapport aux États-Unis.
    On ne saurait trop insister sur l'importance de ces ALE. À titre de comparaison, comme vous le savez, le Mexique et le Japon ont conclu un accord de libre-échange, même s'ils ont maintenu des droits de douane. Cet accord, qui a été conclu en 2005, prévoyait un abaissement des droits de douane en dessous de certains volumes. En 2011, le Mexique a exporté 27 500 tonnes de boeuf vers le Japon. En fait, il détient la quatrième part du marché nippon après l'Australie, les États-Unis et la Nouvelle-Zélande.
    En 2012, 10 500 tonnes de boeuf mexicain ont été assujetties à un droit de douane plus bas, de 30,8 p. 100 au lieu des 38,5 p. 100 qui s'appliquent au Canada. Vous pouvez voir que même une petite réduction des droits de douane a d'énormes conséquences sur la capacité d'exportation de pays que nous n'aurions pas cru suffisamment compétitifs. En réalité, le Mexique exporte actuellement, vers le Japon, près de deux fois plus de boeuf que le Canada.

  (1155)  

    Les négociations entre l'Australie et le Japon durent depuis sept ans, mais elles n'ont pas encore abouti. J'ai lu dernièrement des articles au sujet de l'exaspération de l'Australie devant son incapacité de conclure une entente. L'Australie détient environ 60 p. 100 du marché nippon. Étant donné la valeur élevée de ce marché, nous le considérons comme un des marchés les plus importants et les plus prioritaires pour le boeuf canadien, immédiatement après notre marché national et les marchés des États-Unis.
    Il est prévu qu'au Japon la consommation de boeuf augmentera d'environ 63 000 tonnes au cours de la prochaine décennie. Les importations s'élèveront à 103 000 tonnes, si bien que la production japonaise ne pourra pas suivre la croissance de la consommation, surtout si l'on tient compte des catastrophes naturelles que le pays a connues. Je pense que c'est pour nous une excellente nouvelle et que cela nous ouvre d'excellents débouchés.
    Si l'APE Canada-Japon est conclu à des conditions favorables, cela nous permettra d'accroître nos exportations et d'obtenir une plus grande part du marché.
    Si le Japon acceptait la viande désossée de bovins âgés de moins de 30 mois et une suppression des droits de douane ou une réduction des droits de 38,5 p. 100, cela pourrait augmenter la valeur de nos exportations de boeuf vers le Japon d'environ 47 millions de dollars, pour donner un total de 125 millions de dollars, ou accroître de 20 000 tonnes nos exportations actuelles. Par ailleurs, le Japon a la possibilité de rétablir un droit de douane maximum de 50 p. 100, je crois, si les exportations dépassent 17 p. 100 d'une année à l'autre, et il faudra en tenir compte.
    Bien entendu, d'importants obstacles réglementaires limitent notre capacité d'exportation. Comme nous pouvons seulement exporter les bovins de moins de 21 mois, nous ne pouvons pas approvisionner le marché nippon de façon régulière pendant une année complète. Nous avons normalement un déficit de bovins de cet âge de janvier à mars. Nous ne pouvons pas approvisionner suffisamment le marché et cette restriction ne nous permet pas de trouver là-bas des partenaires stratégiques qui investiront dans la commercialisation de notre produit toute l'année simplement parce que l'approvisionnement ne peut pas être garanti.
    Nous entendons souvent dire que c'est un excellent produit pour lequel nous pouvons obtenir le prix maximum, l'équivalent ou même plus que pour la qualité U.S. Choice, qui représente la norme d'excellence dans le monde. Néanmoins, que faire pendant les trois autres mois où nous devons nous tourner vers les États-Unis, le Brésil ou d'autres pays pour acheter leur boeuf. Nous n'avons tout simplement pas vraiment réussi à exploiter ce marché. Nous pensons que si nous pouvons relever l'âge limite à 30 mois, nous pourrons exploiter pleinement le marché japonais de façon rentable, mais pour ce qui est du prix à la tonne, c'est certainement un de nos marchés les plus payants.
    L'accès au marché de la viande non désossée pourrait porter nos exportations à 25 000 tonnes, pour une valeur de 168 millions de dollars. Bien entendu, nous avons une perspective très positive à l'égard de l'APE Canada-Japon. Il aura certainement d'énormes conséquences pour nous et pour l'agriculture et il représente un énorme potentiel, surtout pour la Saskatchewan.
    La visite que M. Ritz et les autres ministres ont faite au Japon, où ils ont rencontré les négociants en viande nippons, etc., est une chose que nous apprécions. Je tiens seulement à préciser que nous ne serons jamais les principaux fournisseurs de boeuf de ce pays, mais nous sommes convaincus de pouvoir obtenir une part importante de son marché, en tout cas pour notre viande de première qualité. Étant donné la taille relativement petite de notre cheptel, surtout si on le compare à celui des États-Unis, ce n'est pas tant le volume que la valeur qui compte pour le Canada.
    Il est difficile de faire des prévisions concernant ce marché étant donné que nous en avons été évincés pendant longtemps, et même avant la crise de l'ESB. Comme les troupeaux sont en diminution, cela va limiter la croissance de nos exportations.
    J'ajouterais qu'à mon avis nous avons beaucoup parlé du potentiel, mais nous devons réfléchir à l'autre dimension du problème et à ce qui se passera si nous n'arrivons pas à conclure un partenariat économique et que d'autres pays y parviennent avant nous. J'ai mentionné ce qui se passe en Corée. Je suis allé là-bas récemment. Nous pouvons y voir un autre exemple de la stratégie américaine. Les États-Unis réduisent leurs droits de douane de 2,7 p. 100 par an pour les 15 prochaines années. D'après ce que m'ont dit nos principaux clients là-bas, nous pourrions tenir un an, peut-être deux. Dès que la différence dans les droits de douane atteindra 5 p. 100, 6 p. 100 ou 7 p. 100, ce sera probablement la fin de ce marché pour nous.

  (1200)  

    Si le Japon se classe au premier rang de nos marchés étrangers et la Corée, probablement au deuxième rang, sur le plan de la valeur, nous pouvons voir que nos marchés numéros 1 et 2 sont sérieusement compromis. Nous exhortons donc le gouvernement du Canada à faire de gros efforts pour veiller non seulement à ouvrir ces marchés, mais à les préserver.
    Nous pourrions certainement nous rediriger vers d'autres marchés et nous continuons à le faire. Nous expédions notre production dans plus de 60 pays, mais aucun d'entre eux ne peut nous offrir la même valeur que le Japon.
    Pour conclure, d'énormes possibilités s'offrent au Canada. Comme vous le savez, nous avons une grande superficie de terres agricoles. Nous avons certainement la capacité de développer notre secteur. Notre cheptel bovin est en diminution. Pourquoi? Parce que nous avons perdu beaucoup d'argent. Ces marchés nous permettront de regagner notre rentabilité. Nous pouvons ouvrir ces marchés et préserver les marchés où nous pouvons développer notre secteur et nous croyons pouvoir reconstituer le cheptel de 3,5 millions de vaches que nous avions avant l'ESB.
    Je vous remercie de votre attention.
    Merci beaucoup.
    Nous allons entendre un autre témoin avant de passer aux questions. Je donne la parole à M. Tiberghien, professeur agrégé au Département de science politique de l'Université de Colombie-Britannique, à titre personnel.
    C'est pour moi un grand plaisir d'être ici. Je témoigne en tant qu'universitaire qui a consacré beaucoup de temps à étudier le Japon — l'économie politique japonaise — mais qui ne représente aucun groupe d'intérêt. Je vais essayer de vous donner une vue d'ensemble de ce que cet APE pourrait apporter. Je vais surtout parler des avantages que cela représente pour le Canada sur le plan de sa politique étrangère, mais j'entrerai aussi dans les détails vers la fin.
    Cela fait une vingtaine d'années que je fais le va-et-vient entre les deux pays, que je fais des recherches au Japon et des séjours au Japon. J'ai été chercheur invité auprès du ministère des Finances nippon pendant un an. Je vais souvent au ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie, le principal ministère chargé des négociations commerciales et j'ai enseigné la politique japonaise ici, à Vancouver, pendant de nombreuses années.
    Premièrement, nous traversons actuellement une période très instable. Comme chacun sait, l'économie mondiale connaît de grandes incertitudes — les négociations de Doha, les négociations de l'OMC piétinent — et le pouvoir se déplace vers des économies émergentes comme la Chine
    Cette période de grande incertitude incite de nombreux pays à se montrer très entreprenants. Leur instrument de choix, pour le moment, semble être les accords de libre-échange. De nombreux pays, surtout ceux qui manifestent un vif esprit d'entreprise, comme la Corée, ou de plus en plus le Japon, considèrent ces ALE comme les principaux outils permettant de rééquilibrer la politique étrangère et la géopolitique.
    Les pays qui connaîtront le succès sont ceux qui utilisent énergiquement les ALE et qui sont très habiles à exploiter leurs avantages comparatifs. Deux excellents exemples, en Asie, sont la Corée et Singapour. Ils se sont servis de cet outil de façon très combative pour profiter du contexte économique mondial en cette période d'incertitude. Dans ce contexte, je dirais que l'avantage comparatif du Canada est d'être un pont entre l'Occident — c'est-à-dire les États-Unis et l'Europe — et les économies émergentes du Pacifique ainsi, bien sûr, que la Chine et l'Inde, tout en étant tout aussi très actif avec le Japon.
    Je vais maintenant parler du Japon. Ce pays est actuellement dans une situation très intéressante. C'est un acteur de premier plan dans la compétition géopolitique entre les États-Unis et la Chine. Comme la Corée, Taïwan et d'autres économies de l'Asie de l'Est, le Japon s'intègre de plus en plus dans l'économie chinoise. Il y a 10 ans, les exportations nipponnes n'étaient que de 10 p. 100 vers la Chine et 20 p. 100 ou 30 p. 100 vers les États-Unis. Aujourd'hui, 22 p. 100 des exportations japonaises vont vers la Chine, 18 p. 100 vers les États-Unis et d'ici 2020, ce sera 30 p. 100 vers la Chine et 10 p. 100 vers les États-Unis.
    Le Japon est de plus en plus lié à la Chine, mais le renforcement de la capacité institutionnelle n'a pas suivi. Un traité d'investissement vient seulement d'être signé et en général, même si l'industrie japonaise souhaite une plus grande intégration dans l'Asie de l'Est, la classe politique et le public s'inquiètent un peu de l'intégration croissante avec la Chine. Ils désirent conserver des liens solides de l'autre côté du Pacifique avec les États-Unis, et maintenant avec le Canada.
    En même temps, de leur côté, les États-Unis sont en train de faire un effort important. Après être restés 10 ans sans trop s'intéresser à l'Asie, les États-Unis cherchent à y reprendre leur place et se servent du PTP, dans le cadre de l'APEC, pour éloigner un peu plus ces économies de la Chine. Le Japon est le principal acteur dans cette bataille.
    Le Canada se retrouve au milieu de cette importante partie. Une joute géopolitique se déroule actuellement et, bien entendu, le Canada cherche maintenant à profiter de l'essor de l'Asie. Nous savons que le premier ministre est allé en Chine et qu'il insiste beaucoup sur ce pays et le renforcement des liens économiques avec la Chine. Toutefois, il est également très logique d'équilibrer la stratégie vis-à-vis de la Chine avec une stratégie très solide vis-à-vis du Japon.
    Le Japon est le plus ancien partenaire diplomatique du Canada. Nos relations diplomatiques remontent à plus de 78 ans. Le Japon est beaucoup plus semblable au Canada que nous avons tendance à le croire. Il a le même système parlementaire sur le modèle de Westminster, le même genre de monarchie constitutionnelle et si nous examinons l'opinion publique, nous constatons que le public canadien et le public japonais ont des opinions très similaires et partagent les mêmes valeurs.

  (1205)  

    Le Japon est un partenaire naturel pour le commerce, mais aussi pour de nombreuses autres initiatives en matière de politique étrangère. Le Canada est actuellement avantagé par rapport au Japon en ce sens qu'il a adhéré avant lui au G8. Le Japon n'a pas encore conclu d'accord de libre-échange avec les pays du G8. La conclusion d'un ALE est souvent une compétition. Il y a l'ALE comme tel, mais il faut surtout battre les autres concurrents. Par exemple, si nous concluons un ALE avant l'Australie ou l'Europe qui négocient toutes les deux, les exportateurs canadiens seront très avantagés. Le choix du moment est également important.
    Le Japon a des priorités différentes. D'une part, il cherche à conclure un accord trilatéral avec la Chine et la Corée. C'est un lent processus. C'est très difficile sur le plan politique. D'autre part, il y a le PTP, qui est également un exercice périlleux sur le plan politique. Il est très difficile d'avancer dans les conditions actuelles. L'APE canadien arrive au milieu de tout cela et les réformateurs japonais ou le gouvernement nippon le voient comme la solution de facilité. C'est une occasion à saisir indépendamment de la politique nationale.
    J'ajouterais quelques mots au sujet du contexte politique actuel au Japon. C'est un contexte difficile. Il est impossible de le nier. Comme vous le savez sans doute, le premier ministre, M. Noda joue son avenir politique sur une augmentation des taxes à la consommation de 5 à 10 p. 100. Il est confronté à une double opposition, premièrement de la part de son propre parti, de l'autre dirigeant, M. Ozawa, et deuxièmement, de l'opposition, le PLD, qui est majoritaire à la Chambre haute. Au moment où je vous parle, Noda et Ozawa sont censés se rencontrer aujourd'hui. Le premier ministre aura énormément de difficulté à obtenir un accord au sein de son propre camp, et encore plus à obtenir l'appui de la Chambre haute.
    Noda est dans une situation politique difficile. Il est en train de livrer la bataille de sa vie. Plusieurs scénarios sont envisageables. Ou bien il tombera avant la fin de son mandat, en septembre, son parti élira alors un nouveau chef, il y aura un nouveau premier ministre et peut-être de nouvelles élections, ou bien Noda négociera avec l'opposition pour faire adopter sa taxe à la consommation, en échange de quoi des nouvelles élections auront lieu cet été ou à l'automne. C'est ce contexte qui complique les choses; néanmoins, une fois qu'on saura à quoi s'en tenir d'ici cet automne, un APE avec le Canada restera pour le Japon l'initiative de libre-échange la plus facile à conclure.
    Nous devrions comparer cette situation avec celle du Partenariat transpacifique. Le PTP crée énormément de dissensions au Japon. D'une part, le premier ministre et les élus réformistes l'ont appuyé pour trois raisons. La première est qu'ils veulent maintenir l'équilibre entre l'intégration avec la Chine et l'Amérique du Nord. Ils veulent équilibrer les deux. La deuxième est qu'ils veulent renforcer l'alliance et les relations entre les États-Unis et le Japon. La troisième est qu'ils veulent se servir du PTP comme d'un catalyseur de réformes structurelles, car le Japon reste coincé dans une certaine mesure. Néanmoins, le PTP suscite une forte opposition de la part d'un grand nombre de députés tant du PDJ que de l'opposition, le PLD. Il ne semble donc pas que le PTP puisse obtenir l'appui politique nécessaire pour le moment.
    Par contre, les réformistes et les dirigeants du PDJ voient l'APE avec le Canada comme une option beaucoup plus réalisable. En novembre dernier, j'ai eu une conversation avec l'ancien vice-président aux Affaires internationales du PDJ, Iwakuni Tetsundo. Il m'a dit qu'il espérait que le Canada viendrait au Japon et essaierait de conclure rapidement l'APE — ce n'était pas encore fait — car il n'y avait pas, selon lui, d'opposition organisée contre un APE avec le Canada au sein du PDJ ou des grands groupes d'intérêt, en partie en raison de l'absence de contentieux sur le riz, les oranges, le mikan ou le thé. Ce sont généralement des produits très sensibles pour les pays d'Asie ou les États-Unis. Par contre, il est possible de négocier pour des produits comme le boeuf et le poisson. Il est possible de pousser les limites.
    En échange, les dirigeants nippons espèrent qu'un APE avec le Canada débloquera leur programme de libre-échange. L'accord avec le Canada rendra service au ministère du Commerce extérieur. Par conséquent, ce ministère voudra peut-être exercer des pressions politiques et ne sera peut-être pas un négociateur trop coriace, car ce premier pas débloquera son programme commercial plus vaste.

  (1210)  

    Je voudrais ajouter une chose. Un APE avec le Japon va sans doute améliorer de façon marginale le commerce de certains produits, comme les deux derniers témoins viennent de nous le dire. Il y aura probablement une amélioration des exportations de boeuf et de poisson et fruits de mer. Les exportations de produits sans OGM, particulièrement de canola, augmenteront peut-être avec un APE. En général, il est possible de négocier toutes les conditions, les règles indirectes, etc., pour que le Canada obtienne un avantage sur ses concurrents.
    Le principal avantage pour le Canada est qu'un APE servira de catalyseur pour améliorer largement les relations entre le Canada et le Japon. Cela signifiera probablement que le Canada et le Japon auront des relations plus étroites, qu'il y aura plus d'échanges entre les deux pays et une plus grande coopération entre les gouvernements, ce qui se répercutera dans d'autres domaines.
    Pour conclure, au moment où le Canada procède à un rééquilibrage essentiel de ses relations avec la Chine ainsi que le Japon, un APE raffermira davantage la position du Canada en tant que puissance du Pacifique du XXIe siècle et jouera un rôle crucial dans ce rééquilibrage géopolitique.

  (1215)  

    Merci beaucoup.
    Nous avons certainement apprécié tous les témoignages. Nous passons maintenant aux questions.
    Nous allons commencer par M. Davies. La parole est à vous, monsieur.
    Monsieur Tiberghien, l'attention portée aux barrières non tarifaires est une caractéristique que l'on retrouve maintenant plus souvent dans les accords commerciaux et les accords d'intégration économique et je reconnais que nous le devons au gouvernement. Le gouvernement actuel a cherché beaucoup plus que ses prédécesseurs à s'attaquer aux barrières non tarifaires.
    Je sais que la question revient souvent sur le tapis à propos du Japon. Ce ne sont pas toujours les droits de douane qui empêchent les entreprises des autres pays d'avoir accès aux marchés japonais; mais plutôt les barrières non tarifaires de toutes sortes et de toute envergure.
    J'aimerais avoir votre opinion à propos de l'une d'elle. J'ai été amené à croire que les modèles commerciaux sont différents au Japon et au Canada. Au Japon, il y a beaucoup plus de conglomérats, beaucoup d'intégration verticale. Un grand fabricant aura aussi des relations avec la banque et avec ses fournisseurs et parfois même avec les actionnaires ordinaires. Cela peut empêcher les concurrents étrangers d'essayer de soumissionner pour divers éléments de ce travail.
    Je voudrais savoir à quel point c'est vrai, si vous voyez cela comme une barrière commerciale et si vous avez des suggestions quant à la façon d'y remédier dans un accord commercial.
     La question des conglomérats, des keiretsu, ne date pas d'hier. C'est un élément crucial des négociations entre les États-Unis et le Japon depuis le début des années 1980. D'ailleurs, au milieu des années 1980, les États-Unis et le Japon ont eu un gros litige précisément à propos de ce problème qui bloque l'accès au Japon à certains fabricants étrangers. Si vous devez bâtir votre propre réseau de magasins au détail, cela revient très cher.
    C'est un gros problème structurel pour le Japon. Il est difficile de résoudre un problème structurel aussi énorme dans un APE avec un pays, avec le Canada. La situation a beaucoup évolué depuis 15 ans. Depuis le milieu des années 1990, surtout autour de 1999, il y a eu une série de réformes touchant la gouvernance des sociétés, des réformes structurelles qui ont favorisé la liquidation de ces participations croisées. Ces conglomérats se défont, autrement dit. Avant la guerre, ils étaient très serrés, comme en Corée. Ils sont plus serrés en Corée. Au Japon, ils se sont transformés en simples participations croisées. Les participations croisées ont vraiment diminué depuis 1999 environ. Le nombre d'actions qu'elles représentent constitue environ 60 p. 100 du marché boursier. Depuis, cela a diminué d'au moins la moitié. Les actionnaires étrangers possèdent maintenant 30 p. 100 du marché boursier japonais. Il y a donc eu une transformation très importante.
    En pratique, cela varie d'une entreprise à l'autre et d'un secteur à l'autre. Certaines entreprises comme Nissan, par exemple, ont vraiment mis fin à leurs participations croisées. D'autres, comme Toyota, les ont maintenues ou les ont réduites, mais ont gardé certains liens. C'est un processus qui se poursuit lentement en faveur d'une économie plus ouverte. C'est une transformation longue, structurelle et générale et le Canada devrait peut-être travailler dans ce sens avec d'autres partenaires comme les États-Unis.
    J'ajouterais toutefois que le ministère du Commerce extérieur, est aussi le ministère de l'Industrie et que c'est un ministère résolument réformiste. Il croit que le Japon devrait avoir une structure industrielle plus souple, mais pas pour les mêmes raisons. Il croit que le Japon n'est pas suffisamment concurrentiel parce qu'il n'est pas suffisamment rapide, parce qu'il ne peut pas réaffecter ses capitaux assez rapidement. Il poursuit donc le même objectif. Souvent, ce ministère cherche à se servir d'un APE ou de négociations commerciales comme d'un cheval de Troie pour faire avancer son propre programme de réformes.
    Par conséquent, les points communs des ministères réformistes et de certaines entités réformistes…

  (1220)  

    Désolé, mais je voudrais aborder d'autres sujets. Merci pour cette réponse approfondie.
    J'ai dit quelque chose de gentil au sujet du gouvernement. Je vais maintenant le critiquer. Le gouvernement conservateur a laissé gonfler le déficit commercial du secteur manufacturier. Il est passé d'environ 16 milliards de dollars, en 2005, à près de 81 milliards de dollars, en 2010. La tendance est également négative en ce qui concerne la composition des exportations canadiennes, je pense.
    À la fin des années 1950, les exportations de produits non transformés représentaient 90 p. 100 des exportations canadiennes. En 1999, cette proportion était tombée à 45 p. 100, mais depuis, les chiffres montrent que les produits non transformés composent environ 60 p. 100 de nos exportations. Cela soulève la question des importations à valeur ajoutée. Je sais que le Japon a pour politique d'essayer délibérément d'ajouter de la valeur à ses exportations. J'aimerais savoir si vous avez des suggestions quant à la politique commerciale que le Canada pourrait adopter vis-à-vis du Japon pour essayer d'ajouter de la valeur à ses exportations.
    Je conclurai en disant que notre comité a appris que les cinq principaux produits exportés du Canada vers le Japon sont le charbon, le cuivre, le canola, le porc et le bois d'oeuvre. Ce sont des marchandises relativement peu transformées ou à peine ou moyennement transformées. Le Japon nous renvoie de l'équipement lourd, des automobiles, de l'équipement aérospatial et des matières hautement transformées.
    Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Oui, c'est une question complexe. C'est structurel. Cela prendra du temps. Une solution qui vient à l'esprit serait d'accroître l'investissement japonais au Canada. Généralement, un moyen rapide ou assez direct d'augmenter les exportations à valeur ajoutée est d'inviter les fabricants japonais à élargir leur chaîne de production, leur répartition du travail dans d'autres pays… À mon avis, en favorisant les investissements japonais au Canada, on augmenterait la réexportation vers le Japon. C'est une solution.
    L'autre solution serait de favoriser des partenariats conjoints pour l'innovation. Il faudrait explorer la question. C'est complexe. C'est une voie qui pourrait être explorée avec les Japonais.
    La solution ne sera probablement pas du côté des automobiles. Elle ne sera pas du côté des produits d'hier, mais des produits ou des industries de demain, dans le domaine des sciences de la vie, dans les investissements conjoints dans l'innovation. Ce serait une approche à examiner.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Cannan. Je crois que vous partagez votre temps avec M. Hiebert. Allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, merci infiniment de vous joindre à nous aujourd'hui et de parler avec nous des avantages et des possibilités que cet accord commercial avec le Japon offre aux entreprises canadiennes de tout le pays.
    Je tiens à remercier M. Davies pour les compliments qu'il a adressés au gouvernement, qui est en train de résoudre certains problèmes commerciaux et douaniers, mais je tiens également à apporter une rectification au sujet de la perte d'emplois dans le secteur de la fabrication dont il a parlé. Il ne faut pas oublier que 2009-2010 a été marqué par le pire ralentissement économique que toutes les personnes présentes dans cette salle aient jamais connu.
    Nous avons regagné environ 750 000 emplois depuis 2009, et la majorité de ces emplois, soit 80 à 90 p. 100, sont dans le secteur privé et à plein temps. Cela en dit long, je pense, sur l'importance de diversifier notre économie. Nous centrons toujours notre attention sur notre principal partenaire commercial, les États-Unis, mais nous avons parlé de l'importance du commerce bilatéral, et c'est pourquoi nous sommes ici, aujourd'hui, pour travailler avec le Japon et, en fin de compte, avec le Partenariat transpacifique.
    J'étais à Taïwan, la semaine dernière, avec l'ancien coprésident de Canada-Taïwan. Un des enjeux à propos desquels nous avons rencontré le président Ma était l'importance de réintroduire notre boeuf à Taïwan. Monsieur Wildeman, je sais que votre association et vous-même avez milité énergiquement en ce sens, et pour souligner l'importance de la Corée du Sud. Nous sommes conscients de l'importance de ces questions et nous continuons à travailler dans toute l'Asie… Taïwan a parlé aussi du Partenariat transpacifique. Il veut en faire partie.
    Nous nous dirigeons tous ensemble dans la bonne voie.
    Venant de la Colombie-Britannique, comme M. Davies et M. Sandhu, car nous sommes plusieurs autour de cette table, je tiens à souligner l'importance de cet accord, ce que cet accord commercial signifiera pour la côte ouest, pour l'économie de la Colombie-Britannique en particulier. Nous pourrions peut-être commencer par le professeur d'UBC. Le campus UBC Okanagan se trouve dans ma circonscription. En tant que professeur, pourriez-vous nous parler de certains des avantages économiques que cet accord avec le Japon apportera à la Colombie-Britannique? Deux de nos collègues reviennent tout juste du Japon.

  (1225)  

    En résumé, un APE aura des avantages directs pour certains produits d'exportation. Néanmoins, les principaux avantages seront indirects et seront ressentis en aval. En général, cet accord servira de catalyseur pour l'amélioration de nos relations. Les journaux et les médias en parleront beaucoup. Cela fera venir plus de touristes. Plus d'étudiants iront à l'Université de la Colombie-Britannique. Le Canada sera sur la carte pour les décideurs politiques et les bureaucrates occupés qui envisageront d'autres partenariats et d'autres accords sur tout un éventail de questions. De façon générale, je pense que cela va renforcer les relations humaines et les relations intellectuelles entre la Colombie-Britannique et le Japon. Cet accord sera forcément un catalyseur. C'est difficile à mesurer à l'avance, mais en général, un APE sert de catalyseur pour beaucoup d'autres choses.
    La première ministre de la province, Mme Clark, revient tout juste d'Asie. Cela va renforcer notre porte de l'Asie-Pacifique.
    Je vais céder la parole à M. Hiebert qui s'intéresse également de très près à cette porte.
    Merci beaucoup.
    Pendant le temps limité dont je dispose, je vais m'adresser à M. Tiberghien.
    Je viens aussi de la Colombie-Britannique. Ma circonscription est celle de South Surrey—White Rock et j'ai deux diplômes d'UBC.
    Je voudrais vous poser quelques questions pratiques. Vous semblez très bien connaître le domaine. L'Australie a commencé à négocier un APE en 2007. Il y a eu 15 rondes et on nous a dit que l'agriculture est l'obstacle qui l'empêche de conclure cet accord. Si l'Australie ne peut pas franchir cet obstacle, comment le Canada pourrait-il le faire?
    Il doit y avoir un obstacle particulier et j'essaie de réfléchir à ce qu'il pourrait être.
    Au Japon, l'agriculture est très inégale. Il y a certains enjeux essentiels sur lesquels le Japon ne bougera pas et l'un d'eux est le riz. Le riz est un gros obstacle. Je pense que l'Australie cultive un peu de riz, ce qui serait déjà un obstacle incontournable.
    Il y a ensuite les oranges, les mandarines et le thé. Certains produits constituent des sujets sensibles sur le plan politique. Ils font partie de l'alimentation de base dans de nombreuses régions du Japon. Ce n'est pas le cas du canola et par conséquent le canola ne pose pas de problème. Le maïs ne pose pratiquement pas de problème.
    C'est plus délicat pour le boeuf, en effet, mais c'est négociable. Dans le cas du boeuf, même s'il y a des lobbys très puissants, les Japonais n'en produisent pas beaucoup. Ils produisent une certaine qualité de viande, le boeuf de Kobe, pour laquelle ils donnent de la bière à leurs vaches. C'est une production minuscule. Elle ne suffit pas à alimenter le marché. Il s'agit surtout de répondre aux préoccupations du public sur le plan sanitaire et ce genre de choses. Je crois possible de travailler avec des partenaires au Japon.
    Par conséquent, je crois qu'en général, c'est faisable.
    En ce qui concerne l'opposition au PTP au sein du Parlement japonais dont vous avez parlé, pensez-vous qu'il y ait suffisamment d'appuis en faveur d'un APE avec le Canada dans l'ensemble des partis politiques du pays?
    Les députés avec qui j'ai parlé l'automne dernier m'ont dit que pour le moment, il n'y a aucun grand mouvement d'opposition contre cet APE. Premièrement, aucun produit ne semble constituer un obstacle majeur. Deuxièmement, le Canada a une image relativement positive au Japon et ne traîne pas derrière lui le même passé que les États-Unis.
    Beaucoup de gens pensent que les États-Unis essaient de se servir d'eux contre la Chine ou qu'ils essaient… Ils considèrent le Canada comme un intermédiaire honnête.
    On ne m'a pas parlé de questions qui pourraient susciter une vive opposition. Cet accord demeure le plus réalisable pour le Japon.
    L'autre problème dont des témoins précédents nous ont parlé est le fait que Japan Post Insurance appartient à 30 p. 100 au gouvernement japonais. Compte tenu des avantages législatifs qui viennent d'être adoptés en avril, pensez-vous que le gouvernement serait prêt à accorder des conditions équivalentes aux compagnies d'assurance canadiennes pour qu'elles puissent être compétitives? Les Japonais sont-ils prêts à aller jusque-là pour conclure un accord?

  (1230)  

    La question de la Poste est la plus délicate. C'est un enjeu politique. Cela pose probablement plus de problème.
    Sous le gouvernement Koizumi, en 2005, il y a eu une libéralisation de la Poste en faveur du secteur privé du Japon et des compagnies d'assurances internationales. Le gouvernement vient de faire machine arrière, car il forme une coalition avec un petit parti dirigé par Kamei Shizuka, qui tient à ce que les choses redeviennent comme avant sur le plan de la Poste. Il faudra voir si, après les élections, le lobby politique concernant la Poste sera suffisamment affaibli. C'est probablement un sujet plus délicat. C'est négociable, mais je pense que les négociations seront plus difficiles.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Easter.
    La parole est à vous, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à tous les témoins. La présence de quelques insulaires me réjouit toujours, monsieur le ministre.
    Je peux certainement témoigner de l'importance que le marché japonais revêt pour l'Île-du-Prince-Édouard, monsieur le président, mais je ne peux m'empêcher de penser…
    À la rouquine.
    Non. La rouquine est importante, mais quand le ministre a cité des chiffres, je n'ai pu m'empêcher de penser que certains d'entre vous, qui venez de l'Ouest, doivent trouver ces chiffres terriblement petits pour ce qui est de nos exportations de canola. Néanmoins, cela apporte beaucoup de stabilité à un bon nombre de producteurs de l'Île-du-Prince-Édouard.
    Al, vous avez parlé de l'écart dans les chiffres, des statistiques selon lesquelles nous sommes… Nous savons que nous exportons une plus grande quantité de produits, surtout dans le secteur de la pêche. Je suppose que c'est parce que nous devons les expédier à partir de New York ou de Halifax, car il n'y a pas de place pour le fret dans l'avion partant de l'Île-du-Prince-Édouard.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus? Devons-nous inclure certaines dispositions dans un accord commercial…? Je suppose que cela ne peut pas figurer dans l'accord commercial, mais y a-t-il quelque chose que nous devons faire sur le terrain, peut-être pour expédier nos produits plus directement à partir de l'Île-du-Prince-Édouard, surtout le thon? Le thon représente un marché énorme.
    Une chose que nous devrions envisager, en tout cas pour la région de l'Atlantique, c'est une plaque tournante pour le transport maritime dédiée à la région de l'Atlantique. J'ai eu des entretiens à ce sujet avec le ministre de l'APECA et cela nous permettrait de prendre livraison des marchandises où qu'elles soient, qu'il s'agisse de thon, de bleuets, de moules ou autre chose, de les conditionner sous marque commune et d'en regrouper le transport. Ce sont des solutions que nous devrions certainement examiner.
    C'est ce que vous préconisez de faire sur le terrain. C'est une des dimensions d'un accord économique global avec le Japon, mais il y a d'autres choses que les provinces de l'Atlantique et le gouvernement fédéral doivent faire ensemble ou en coopération pour que nous puissions nous prévaloir de ce marché.
    Absolument.
    C'est peut-être une chose à envisager.
    Vous avez dit aussi que les possibilités sont énormes. C'est ce que vous voulez dire quand vous parlez de conditionnement sous marque commune…
    Oui.
    … le travail en collaboration avec la Nouvelle-Écosse ou une autre province?
    Exactement, et aussi entre les différents secteurs, que ce soit l'agriculture ou les produits de la pêche.
    Brad, pour revenir à ce que vous avez dit au sujet de la Corée, je dois mentionner, comme je le fais souvent — le gouvernement s'attend à ce que je le fasse — qu'un des problèmes que nous constatons dans la stratégie commerciale du gouvernement est qu'il semble jouer sur les chiffres: dans combien de pays peut-il aller et combien d'accords peut-il conclure de façon à pouvoir citer des chiffres ou au moins en parler. Souvent, ces pays ne représentent pour nous qu'un marché très limité.
    Ce qui nous inquiète, c'est que pendant que nous nous affairons à explorer de nouveaux marchés potentiels, nous perdons du terrain dans nos marchés actuels, par exemple, aux États-Unis, mais aussi en Corée, qui est un marché important. Le gouvernement regarde passer le train. Je tiens seulement à le dire.
    Pour ce qui est du Japon, devons-nous recommander d'inclure quelque chose dans l'accord commercial à propos des 21 mois? La norme OIE réglerait-elle la question? Que devons-nous exiger dans ces négociations afin d'éviter cela…? Je veux dire que la limite devrait être de 30 mois et non pas de 21 mois.

  (1235)  

    Je devrais peut-être dire qu'en général, dans tous ces accords commerciaux, comme nous l'avons constaté, bien sûr, pour certains des ALE que nous avons déjà signés, par exemple avec la Colombie et le Pérou, nous n'avons pas le même accès aux marchés que, disons, les États-Unis ou d'autres pays.
    La norme mondiale est l'OIE pour ce qui est des règlements sanitaires. Pourtant, très peu de pays suivent ces recommandations. Le Japon limite donc ses importations aux animaux de moins de 21 mois alors que cela ne repose sur aucune base scientifique. Nous constatons que la ractopamine pose un problème en Chine et à Taïwan alors que cela ne repose pas non plus sur des bases très scientifiques. Si les animaux de moins de 30 mois étaient admis, cela nous permettrait d'approvisionner le marché toute l'année et ce serait donc important.
    Pour un grand nombre de ces pays, il est important que nous puissions exporter de la viande non désossée et pas seulement désossée, surtout en Corée où on aime la viande non désossée, par exemple. Cela limite vraiment notre capacité d'exportation. Même si nous exportons vers ces pays, nous ne pouvons pas avoir des échanges commerciaux vraiment importants.
    Nous conseillons à nos négociateurs d'essayer d'inclure les normes OIE dans ces accords afin que nous puissions avoir de véritables échanges commerciaux.
    Serait-il utile que le comité fasse cette recommandation?
    Oui.
    Et l'adoption de la norme OIE porterait la limite à 30 mois?
    En réalité, monsieur Easter, si l'on adopte la norme OIE qui autorise la viande de bovins de tout âge dont les MRS ont été enlevés, cela ne nous limitera même pas aux animaux de moins de 30 mois. Néanmoins, nous n'exporterons probablement pas de viande de bovins de plus de 30 mois, car il s'agit alors de viande provenant de vaches de réforme alors que le Japon est un marché très important pour les morceaux de première qualité. Toutefois, l'OIE autorise la viande de bovins de tout âge dont les MRS ont été enlevés.
    Je voudrais seulement une précision au sujet de ce que vous avez dit concernant la Corée, car c'est la première fois que je l'entends dire de façon aussi précise.
    Les droits de douane sur les produits américains qui entrent au Japon diminuent d'environ 2,7 p. 100 par année. Nous risquons de perdre ce marché au bout de deux ans, probablement lorsqu'ils auront baissé d'à peu près 5 p. 100 ou 6 p. 100.
    J'ai consulté les principaux importateurs du pays le mois dernier. Nous avons participé à une réception où il y avait plus d'une centaine d'importateurs de viande et nous avons donc eu l'occasion de discuter avec eux assez longuement. Notre ambassadeur était là aussi, ce que nous avons apprécié. Le Canada jouit d'une excellente réputation à l'étranger. Je ne sais pas si on en a parlé souvent ici. Le Canada est considéré comme un environnement immaculé, comme un producteur de grain et d'aliments salubres. Malheureusement, il n'y a pas beaucoup de gens qui nous connaissent très bien. Par conséquent, un grand nombre d'importateurs disent maintenant que s'ils peuvent obtenir une quantité suffisante de nos produits, ils vont les positionner au sommet du marché des produits de première qualité. C'est bon pour nous, car nous ne serons jamais un fournisseur de gros volumes. Les importateurs ont dit néanmoins qu'à un moment donné, une Porsche devient trop coûteuse pour que tout le monde puisse en conduire une.
    Par conséquent, ils nous disent qu'avec une diminution de 2,7 p. 100, de 5 p. 100 l'année suivante et 7 p. 100 l'année d'après, nous finirons par nous faire évincer du marché. Cela préoccupe énormément les importateurs qui craignent de dépenser des millions de dollars pour promouvoir un produit qu'ils n'auront plus les moyens d'importer.
    Très bien, merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Keddy, qui revient tout juste du Japon.
    La parole est à vous, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à nos témoins.
    Je crois que nous avons une discussion très utile et très intéressante. Je voudrais aborder certaines questions.
    Premièrement, je voudrais parler du boeuf.
    D'après la discussion que nous venons d'avoir, il faut, de toute évidence, que nous puissions approvisionner le marché du boeuf canadien toute l'année en animaux de moins de 30 mois. Nous nous sommes attiré la bienveillance du Japon en devenant le premier pays à accepter de nouveau les produits japonais après la fusion du réacteur de Fukushima. Nous l'avons fait sur des bases scientifiques. Ce que nous demandons aux Japonais, c'est d'ouvrir leur marché à notre boeuf en fonction de données scientifiques. Il n'y a aucune raison sanitaire, aucune raison scientifique d'imposer un embargo sur la viande de bovins de plus de 21 mois.
    Je voudrais avoir l'opinion de Boeuf Canada, et peut-être une réponse rapide de M. Tiberghien quant à ce que cette bienveillance vaut pour nous.

  (1240)  

    Bien entendu, c'est également notre opinion. Nous avons aussi été l'un des premiers pays à accepter et à réexporter le boeuf de Kobe. Nous avons donc établi quelques précédents, mais la réaction à notre égard n'a pas été la même.
    Ce que nous trouvons curieux, c'est la contradiction entre le positionnement de notre produit que les Japonais considèrent comme un produit de haute valeur — nous n'y voyons pas d'objection — et l'imposition de barrières tarifaires qui empêchent notre boeuf d'entrer. Nous estimons qu'ils devraient s'en tenir à la norme scientifique pour nous permettre d'être compétitifs et laisser les consommateurs décider de ce que doit être la différence de valeur. C'est essentiel pour nous permettre de progresser dans ce marché.
    Monsieur Tiberghien.
    Le boeuf pose un problème intéressant, car c'est un enjeu assez délicat au Japon. Il ne suffit pas que le gouvernement négocie et fasse une concession stratégique. Cela dépend surtout de ce que pensent les bureaucrates quant à l'influence que la classe politique peut avoir sur le public. C'est donc plus compliqué.
    En fin de compte, la solution consiste tout d'abord à vérifier quelles sont les conditions qui s'appliquent aux États-Unis. Je ne me souviens plus s'ils ont pu passer à 21 mois ou s'ils en sont encore à 30 mois. Si les États-Unis en sont à 21 mois, cela montre que le public comprend mieux la situation, ce qui facilitera les choses pour le Canada. Dans le cas contraire, il faut trouver un moyen d'aider la classe politique à faire face au public, à montrer que cela ne pose pas de problème sanitaire. Ce n'est pas seulement une question scientifique, n'est-ce pas? Le public du Japon, de la Corée ou de Taïwan est devenu méfiant à l'égard de la viande de boeuf — ainsi que des OGM — et c'est donc quasiment une question culturelle et socioéconomique.
    Par conséquent, l'aide d'un ONG japonais, un étiquetage ou un moyen de rassurer le public de façon crédible permettrait peut-être à la classe politique d'accepter notre viande.
    Ce n'est qu'une simple observation, mais il faut bien comprendre que le commerce agricole du Japon vers le Canada et du Canada vers le Japon est vraiment complémentaire. Vous l'avez mentionné tout à l'heure.
    C'est exact.
    Nous ne nous concurrençons pas pour le riz ou pour les oranges. Nous nous complétons dans un certain nombre de domaines.
    Une autre question dont je désire parler un peu est celle des produits de la pêche de l'Île-du-Prince-Édouard, de la région de l'Atlantique et de la Colombie-Britannique.
    Un de nos problèmes en Nouvelle-Écosse est que nous avions un certain nombre d'exportateurs — environ 25, je crois — qui visaient principalement le marché japonais, surtout pour le homard, mais qu'il n'en reste que deux. Nous sommes évincés par la plupart des États américains, surtout Rhode Island, pour le homard de deux livres à deux livres et demie expédié de la région de l'Atlantique vers les États-Unis. Ce homard est reconditionné sous une marque américaine et expédié au Japon à cause de l'IPP, l'empoisonnement marin paralysant. En réalité, les Américains ont un taux d'IPP plus important que nous. Nous avons des eaux plus froides et moins d'IPP, mais les Américains ont un accord commercial qui prévoit l'acceptation réciproque du régime de réglementation de l'autre pays.
    C'est une barrière non tarifaire qui nous touche énormément et que nous n'avons pas pu résoudre. Nous y travaillons, mais c'est également un des arguments de commercialisation et tout le monde a parlé de la commercialisation.
    J'étais au Japon vendredi et samedi pour des réunions commerciales et j'ai ensuite passé une semaine avec notre groupe interparlementaire. Une chose dont les Japonais ont parlé, surtout les importateurs de poisson et fruits de mer, était la stratégie de marque. C'est une idée qui leur plaît énormément. Le drapeau japonais est rouge et blanc et le drapeau canadien est rouge et blanc. La feuille d'érable est reconnue partout où vous allez. Les Japonais disent qu'elle devrait figurer sur tous les produits qui arrivent au Japon. C'est souvent le cas, mais pas toujours. Qu'il s'agisse de boeuf ou de produits de la pêche, de n'importe quel produit canadien, que pouvons-nous faire pour qu'il arbore la feuille d'érable rouge sur un fond blanc?

  (1245)  

    C'était certainement un élément important des discussions que j'ai eues, le printemps dernier, quand j'étais à la Foire aux produits de la pêche de Boston. J'ai rencontré là-bas un grand nombre de producteurs et de transformateurs et nous avons eu de bonnes conversations au sujet de la stratégie de marque. Bien entendu, la question s'est posée de savoir si ce serait la marque de l'Île-du-Prince-Édouard pour les produits venant de la province, ou celle de la Nouvelle-Écosse ou du Nouveau-Brunswick, mais ce doit être, en tout cas, la marque canadienne. Je suis d'accord avec vous pour dire que le drapeau rouge et blanc fait bonne figure un peu partout. Je pense que c'est une question très importante pour nous.
    Quand des homards pêchés en Nouvelle-Écosse, à l'Île-du-Prince-Édouard ou au Nouveau-Brunswick, dans des eaux beaucoup plus froides et qui sont un bien meilleur produit sont vendus…
    Ils ont une carapace dure.
    Un bon argument est la carapace dure par opposition à la carapace molle. Une bonne partie du produit que nous vendons — vous savez quelles sont les difficultés de la Nouvelle-Écosse sur le plan de la vente du homard — les acheteurs disent automatiquement que c'est un homard à carapace molle. La plupart des homards, pratiquement tout le homard pêché dans l'est du pays, a une carapace dure, mais il est vendu comme du homard à carapace molle. Cela nous fait beaucoup de tort. Nous avons besoin d'une solide stratégie de marketing pour notre produit. Cela va certainement hausser sa valeur au niveau où elle devrait être.
    Merci.
    Votre temps est écoulé.
    Nous allons commencer le deuxième tour.
    Je tiens à faire savoir aux membres du comité que nous avions prévu, à l'ordre du jour, un peu de temps pour nos travaux. Nous nous en occuperons jeudi.
    Nous allons poursuivre l'audition de nos témoins jusqu'à 13 heures.
    Monsieur Sandhu, vous disposez de cinq minutes. Allez-y.
    Monsieur Tiberghien, je voudrais faire suite à la question de mon collègue concernant le déficit commercial qui a gonflé depuis six ans, surtout pour les produits manufacturés. Nous avons assisté à la disparition de centaines de milliers d'emplois au Canada, ces dernières années.
    Qu'est-ce qui cloche dans notre politique commerciale? Comment pouvons-nous réduire ce déficit commercial structurel pour les produits manufacturés? Quelle leçon pouvons-nous tirer de l'expérience passée pour négocier des nouveaux accords avec d'autres pays?
    C'est toujours une question complexe. Il n'y a pas de recette magique. Nous pouvons voir que les pays qui s'en tirent bien, qui réussissent à maintenir une solide industrie de fabrication, même avec des coûts de main-d'oeuvre élevés, comme le Japon ou la Corée, continuent d'augmenter la valeur de leur production.
    La solution pour un pays comme le Canada est de compléter son secteur des ressources et des denrées agricoles, qui reste un important atout, en développant les industries de l'avenir, les industries fondées sur le savoir. Il est possible de le faire au moyen d'investissements conjoints avec des entreprises de l'Asie, notamment, car c'est là qu'est la croissance. Cela peut être fait grâce à une politique un peu plus industrielle.
    Si vous examinez la formule qui donne de bons résultats en Asie, en Corée, au Japon ou à Singapour, elle repose en partie sur une politique industrielle qui connaît parfois, ou même souvent, du succès. Il faudrait des capitaux de démarrage pour la R-D, investir beaucoup dans l'innovation et la R-D, etc., pour développer notre industrie au-delà du cadre de l'industrie manufacturière traditionnelle. Compte tenu de la répartition mondiale du travail, il est normal que le nombre d'emplois n'augmente pas dans l'industrie automobile. Il pourrait même diminuer graduellement. L'important, c'est de créer d'autres emplois bien rémunérés dans d'autres secteurs, dans le prochain type d'industries.
    Cela veut dire, je suppose, qu'il faut avoir des bonnes universités, des recherches solides, une solide base d'innovation qui pourra prendre des dimensions plus importantes et ensuite, des bonnes lois et politiques favorisant l'investissement de capitaux de risque et des entreprises novatrices. Voilà, je crois, la voie à suivre. Ensuite, il faut jouer un rôle clé, en réseau avec de nombreux partenaires, au lieu de dépendre seulement de l'économie des États-Unis. Il faut plutôt trouver de nombreux autres marchés, à l'est comme à l'ouest, surtout là où les économies sont en plein essor, c'est-à-dire en Asie de l'Est et en Inde.

  (1250)  

    Vous avez dit qu'il faut plus d'étudiants dans nos universités, surtout des étudiants étrangers et je vois que le groupe de l'Île-du-Prince-Édouard qui est ici souhaite également attirer des étudiants étrangers dans nos universités.
    Je crois qu'on a effectué des coupes dans les services consulaires de Tokyo qui fournissent des renseignements aux étudiants et s'occupent de leurs demandes de visas. Je vais demander à M. Roach quelles répercussions la réduction des services consulaires aura sur notre capacité d'attirer des étudiants.
    Comme nous l'avons souligné, je pense, dans notre témoignage, pour que nous fassions venir ces étudiants, il faut que le système soit ouvert et transparent et qu'il soit… Je ne dirais pas rapide, mais fluide. C'est certainement ce que nous souhaitons. S'il y a des compressions, je pense qu'elles auront des conséquences.
    Diriez-vous qu'à l'heure actuelle le processus est transparent et relativement rapide?
    Pour ce qui est des étudiants, le processus semble bien fonctionner. Il faut simplement que nous l'utilisions davantage et que nous comprenions mieux ce que le gouvernement japonais est prêt à faire pour faciliter les choses et pour que nous puissions travailler avec lui.
    Me reste-t-il un peu de temps?
    Pour une question très rapide.
    Monsieur Tiberghien, pourriez-vous nous dire quels sont les secteurs qui profiteraient de cet accord commercial et ceux qui y perdraient, surtout du côté canadien?
    Nous devons d'abord faire une distinction entre le court terme et le long terme, car la situation évoluera avec le temps en fonction des diverses conséquences de cet accord.
    Du côté des gagnants, nous devrions retrouver l'agriculture, le boeuf, les produits de la pêche, etc., les services d'éducation et pour le reste, cela dépendra de certaines conditions. Tout dépendra des négociations et des résultats. Certains secteurs des services pourront probablement progresser et élargir leur accès. Ce sera peut-être l'assurance. Ce sera peut-être le secteur des services juridiques. Tout cela dépendra des conditions particulières, de ce que nous pourrons faire accepter ou non par le Japon.
    Pour ce qui est des perdants, c'est difficile à prédire. D'après ce que j'ai lu, les Japonais espèrent surtout la suppression du droit de douane de 6 p. 100 sur les automobiles importées. C'est ce qu'ils visent. Ils visent aussi un meilleur accès aux produits de base. Cela ne créera pas des perdants au Canada, mais va plutôt détourner vers le Japon une petite partie des exportations que nous faisons vers les États-Unis et la Chine. Les perdants ne sont peut-être pas au Canada, mais ailleurs.
    Du côté des automobiles, je ne suis pas certain que la suppression des droits de douane de 6 p. 100 va beaucoup changer les choses, surtout si elle est graduelle. Souvent, les fluctuations du taux de change sont plus importantes que cela. Je ne sais pas si cela aura des conséquences réelles sur le plan de l'emploi. Je suis sûr qu'au Canada, ce sera présenté sous cet angle, comme l'échange de produits agricoles contre des produits manufacturés.
    En général, je pense que les perdants seront à l'extérieur. Les ALE ont tendance à avantager les deux partenaires aux dépens de pays tiers, qui seront donc l'Australie et la Chine.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant demander à M. Holder de conclure. La parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais remercier nos invités de s'être joints à nous. Comme je viens de la dixième plus grande ville du Canada, il est normal que je donne la touche finale à nos questions d'aujourd'hui. J'ai apprécié la qualité des observations de tous nos invités.
    Je voudrais apporter une précision au sujet des demandes de visas. Les membres du comité ne le savent peut-être pas, car c'est relativement récent, mais pour le Japon, le délai de traitement des demandes de visas électroniques est maintenant de moins de 10 jours. Je tenais seulement à le préciser pour qu'il n'y ait pas de malentendu.
    Monsieur Roach, comme nous avons tous les deux une mère originaire du Cap-Breton, nous sommes presque parents. En fait, j'ai une question sérieuse à vous poser. Vous avez parlé des obstacles qui empêchent d'exporter le canola sous forme d'huile plutôt que de graine. Pouvez-vous m'aider à comprendre un peu mieux le problème? Que se passerait-il si vous pouviez exporter le canola sous forme de produit transformé?

  (1255)  

    Je crois que nous en avons déjà parlé un peu. Si nous avions le même accord que les États-Unis à propos de la qualité, de l'acceptation et de la certification du produit, la valeur ajoutée réduirait les coûts de transport. Cela nous permettrait de fabriquer un produit fini qui créerait de l'emploi dans l'Île-du-Prince-Édouard et qui augmenterait notre PIB. Si nous pouvions créer un marché pour le canola et élargir ce marché, nous pourrions tripler notre production d'huile de canola en un an. Nous avons les moyens de le faire. Nous avons une usine qui peut produire de l'huile conforme aux normes qu'exigent les Japonais. Ce sont des choses que nous pouvons faire. Il suffirait que nous puissions…
    Vous êtes donc prêts à le faire.
    Nous sommes prêts à le faire pour le canola qui est un produit-créneau au Japon.
    Monsieur Tiberghien, un de nos collègues a demandé si le Japon faisait preuve de bonne volonté étant donné que les produits agricoles sont un des sujets de contestation. Je dirais que c'était la principale question en litige dans toutes les négociations auxquelles j'ai participé.
    J'ai quelques questions à poser. D'après ce que M. Roach vient de dire au sujet d'une certaine denrée agricole, d'après votre expérience concernant cette denrée, à quoi vous attendez-vous — et ma question est peut-être trop précise.
    Deuxièmement, et c'est peut-être le plus important, quel avantage le Japon tirera-t-il de cet accord? Pourquoi en a-t-il besoin, selon vous?
    J'ai souvent entendu dire du côté japonais que c'est un accord commercial intéressant. Il ne suscite pas de vive opposition au Japon — ce qui est rare — étant donné la complémentarité de l'agriculture. Cet accord ne présente pas de gros risques pour l'agriculture nipponne, mais il manque d'appuis solides. Tel a été le problème pendant longtemps. Néanmoins, à la suite de la visite de l'empereur, l'année dernière, on a voulu améliorer les relations entre le Japon et le Canada et c'est dans cette optique que s'inscrit ce partenariat. Le contexte est donc favorable. Telle est la situation.
    Quant au canola, je ne m'attends pas à une opposition importante, même si les producteurs d'huile japonais auront peut-être des objections. Je peux vous raconter une anecdote intéressante. Elle ne concerne pas le canola sans OGM de l'Île-du-Prince-Édouard, mais la grande quantité de canola que le Canada exporte au Japon. C'est du canola génétiquement modifié, ce qui suscite la controverse au Japon. Certaines semences de canola se sont échappées des camions entre le port et la raffinerie, elles ont poussé dans les champs et n'ont pas pu être éliminées avec le Roundup étant donné leur tolérance à cet herbicide. Cela a causé des inquiétudes au Japon et les ONG ont souligné que les gènes du canola risquaient de contaminer les légumes poussant à proximité. Par conséquent, l'envoi de canola raffiné sous forme d'huile éliminerait le problème et pourrait mettre les ONG de votre côté.
    C'est intéressant.
    Ce serait considéré comme un avantage, n'est-ce pas? Si les ONG appuient l'accord, la classe politique bougera. Cela peut donc donner différents résultats.
    Le secteur agricole du Japon comprend-il la science à la base des OGM, au Canada? Je crois avoir entendu dire tout à l'heure — j'en suis même sûr — qu'il faut suivre la science. J'ai parfois du mal à comprendre. Nous sommes tellement obnubilés par les groupes de pression qui contestent une science reposant sur des bases solides.
    Je vous demande de répondre très brièvement.
    M. Ed Holder: Merci.
    C'est une longue histoire, mais en deux mots, le public japonais se méfie des OGM. Il n'est pas certain que nous connaissions tous les risques qu'ils posent à long terme pour la santé et il s'inquiète de la contamination environnementale. Il y a donc un malaise général à ce sujet au sein du public, comme en Europe, et on ne considère pas que c'est une science.
    Merci beaucoup, monsieur Tiberghien.
    Je remercie infiniment M. Brad Wildeman, ainsi que l'honorable Allen Roach et M. Whitnell.
    Merci pour votre témoignage. Le comité l'a certainement apprécié.
    Sur ce, nous allons lever la séance.
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