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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 013 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 26 avril 2010

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous poursuivons l'étude sur la violence faite aux femmes autochtones. Il s'agit de notre deuxième réunion sur ce très important sujet. Nous avons l'immense plaisir d'accueillir les représentants des ministères des Affaires indiennes et du Nord canadien, de la Justice et de la Sécurité publique, ainsi que de la Gendarmerie royale du Canada, qui sont venus alimenter nos discussions.
    Chacun de vous aura 10 minutes pour faire ses observations préliminaires, et ensuite nous passerons aux questions et réponses.
    Nous commençons par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
    Madame Mary Quinn, est-ce vous qui allez lire la déclaration?
    Merci. Je vous laisse la parole.
    Merci, madame la présidente. Merci de m'avoir invitée à comparaître devant votre comité. C'est un privilège réel pour ma collègue et moi que de comparaître devant le comité à l'heure où vous entamez une étude sur la violence faite aux femmes autochtones du Canada.

[Français]

    En premier lieu, j'aimerais décrire certains programmes d'Affaires indiennes et du Nord Canada qui contribuent à la santé et à la sécurité des familles autochtones. De plus, je souhaite vous faire connaître les initiatives du ministère visant expressément la violence faite aux femmes et vous expliquer comment Affaires indiennes et du Nord Canada collabore avec d'autres ministères fédéraux, les provinces et les Autochtones à la formulation d'une réponse globale afin de régler ce problème grave, particulièrement dans les réserves, mais aussi dans les communautés autochtones et les centres urbains.

[Traduction]

    Le mandat du ministère est double: les affaires indiennes et inuites, et le développement du Nord. Sa mission est donc d'aider les Autochtones et les résidents du Nord à réaliser leurs aspirations sociales et économiques et à former des collectivités viables et en santé. Le ministère soutient également les Autochtones vivant en milieu urbain, les Métis et les Indiens non inscrits par l'intermédiaire du Bureau de l'interlocuteur fédéral.
    Comme vous le savez, certains facteurs socioéconomiques rendent les femmes autochtones plus vulnérables à la violence, comme le taux de chômage, la situation familiale et les niveaux d'instruction.
    Par le soutien qu'il fournit aux services à l'enfance et à la famille, ainsi qu'aux programmes de développement communautaire et d'éducation dans les réserves, le ministère collabore étroitement avec ses partenaires autochtones, fédéraux et provinciaux pour réduire ces risques sous-jacents et améliorer la santé et la sécurité des familles autochtones.
    Les gouvernements provinciaux assurent habituellement la prestation ou le financement des services aux femmes autochtones qui résident à l'extérieur des réserves. Dans le Nord, le gouvernement du Canada fournit une aide financière au Yukon, aux Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut au moyen de la formule de financement des territoires. Cette aide financière soutient les services publics essentiels, comme les hôpitaux, les écoles, l'infrastructure et les services sociaux.

[Français]

    La réforme des programmes sociaux existants d'Affaires indiennes et du Nord Canada et l'élaboration de nouveaux programmes sur les réserves sont essentielles à l'éradication des causes profondes de la violence faite aux femmes dans les réserves et à l'extérieur. Par exemple, le programme des services à l'enfance et à la famille sur les réserves vise une approche préventive pour aider les parents et garder les familles ensemble, ce qui contribue en fin de compte à rehausser le sentiment de sécurité chez les femmes qui habitent dans les réserves et ce qui peut diminuer le risque de violence.

[Traduction]

    Le programme de soutien du revenu dans les réserves du ministère ne vise désormais plus seulement qu'à répondre aux besoins fondamentaux, mais aussi à mettre en oeuvre des mesures concrètes pour aider les citoyens et citoyennes à participer à des programmes de préparation à l'emploi et de formation afin qu'ils puissent trouver de l'emploi. Au fur et à mesure de nos progrès, les résidents des réserves deviendront plus autonomes, ce qui contribuera à réduire l'incidence de la pauvreté.
    Il y a également le projet connexe de réinvestissement de la Prestation nationale pour enfants, qui vise principalement à réduire la pauvreté des enfants et à appuyer les familles vivant dans les réserves au moyen de services de garderie, d'activités de transition du domicile au travail, de soutien parental, d'aide à la nutrition et de programmes culturels appropriés. Le ministère a aussi des programmes directement axés sur la lutte contre la violence faites aux femmes. Le Programme de prévention de la violence au foyer vise à créer des refuges sûrs pour les femmes et les enfants des premières nations en cas de violence familiale. Il aide aussi les collectivités des premières nations à éliminer les causes profondes de la violence familiale au moyen de tout un éventail d'activités de prévention. En 2007, le ministère a annoncé un investissement de 55 millions de dollars sur une période de cinq ans pour appuyer le réseau actuel de maisons d'hébergement, dont une tranche de 2,2 millions de dollars est réservée à la construction de cinq nouvelles maisons. Le ministère appuie actuellement un réseau de 41 maisons d'hébergement dans les réserves et environ 350 projets communautaires de prévention s'adressant aux membres des premières nations vivant dans les réserves.
    Le Programme d'amélioration des maisons d'hébergement de la Société canadienne d'hypothèques et de logement assume les coûts de la construction et de l'entretien de ces maisons.

[Français]

    Pour ce qui est des programmes urbains, le Bureau de l'interlocuteur fédéral cherche à améliorer les conditions socioéconomiques des Métis, des Indiens non inscrits et des Autochtones en milieu urbain qui habitent à l'extérieur des réserves.
    Dans l'étude sur les Autochtones en milieu urbain publiée le 6 avril 2010, on constatait que la majorité des femmes recensées s'étaient établies en ville pour se rapprocher de leur famille, faire des études, fuir une mauvaise situation familiale ou encore pour trouver un meilleur endroit où élever leurs enfants. Dix pour cent de ces femmes ont déménagé afin de fuir une mauvaise situation familiale.

[Traduction]

    Conformément à la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain, le Bureau de l'interlocuteur fédéral s'allie à la collectivité autochtone, aux organismes locaux, aux administrations municipales, aux gouvernements provinciaux et au secteur privé pour contribuer à des projets dans trois domaines prioritaires, à savoir l'amélioration des compétences sociales; la promotion de la formation professionnelle et de l'entreprenariat; et l'aide aux femmes, aux enfants et aux familles autochtones. Depuis 2007, environ 7,5 millions de dollars ont été injectés dans plus de 140 projets relevant de cette troisième priorité, en particulier dans les domaines de la guérison et du bien-être; du leadership et de l'habilitation; de la réduction des préjudices et la prévention de la violence dans certains grands centres urbains du Canada. Par la voie de la réforme législative, comme le projet de loi S-4, la Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux, et les modifications à la Loi canadienne sur les droits de la personne, le gouvernement du Canada prend des mesures concrètes pour procurer aux femmes des premières nations une protection et des droits semblables à ceux dont bénéficient les autres Canadiens et Canadiennes.
    Une fois en vigueur, le projet de loi S-4 procurera les protections et les droits fondamentaux en ce qui a trait à l'occupation et à la juste répartition de la valeur du foyer familial dans les réserves en cas de séparation ou de décès du conjoint. La loi prévoit aussi des mesures de protection en cas de violence familiale.
    Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien participe à l'initiative globale de lutte contre la violence familiale de l'Agence de la santé publique du Canada. Lancée en 1988, cette initiative met à contribution 15 ministères et organismes fédéraux. De plus, l'Association des femmes autochtones du Canada, par la voie de l'initiative Soeurs par l'esprit, a contribué à mieux faire connaître l'étendue et la nature de la violence faite aux femmes autochtones. Le ministère contribue également à la coordination du Programme de prévention de la violence au foyer avec d'autres intervenants, comme le Cercle national autochtone contre la violence familiale, les provinces, les territoires et d'autres ministères comme Santé Canada, le ministère de la Justice et Condition féminine Canada.

  (1535)  

[Français]

    Ensemble, nous travaillons afin d'obtenir des résultats, mettre un terme à la violence faite aux femmes autochtones et éliminer les facteurs qui les rendent vulnérables.
    Ma collègue et moi ferons de notre mieux pour répondre à vos questions. Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous laissons maintenant la parole à Carole Morency, du ministère de la Justice.
    Bonjour. Je vous remercie de m'offrir cette occasion de témoigner devant le comité alors que vous entamez votre étude sur la violence faite aux femmes autochtones. Comme l'a demandé le comité, je compte donner un aperçu général du cadre actuel de la justice pénale en ce qui a trait à la violence faite aux femmes en général.
    Le comité sait que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux se partagent la responsabilité du système de justice pénale. Le rôle du gouvernement fédéral consiste à formuler et promulguer des lois pénales, dont le Code criminel du Canada, et également, par l'intermédiaire du Service des poursuites pénales du Canada, à intenter des poursuites contre les délinquants criminels en vertu de mandats fédéraux, de même que contre les auteurs d'infractions au Code criminel dans les territoires.
    Les provinces et territoires sont responsables de l'administration de la justice, ce qui englobe les services policiers, les poursuites, la prestation des services aux victimes de crimes et l'administration des tribunaux. Le système de justice pénale exige donc une collaboration et une coordination continues entre les deux ordres de gouvernement.
    La nature de notre mission, au ministère de la Justice du Canada, nous amène forcément à réfléchir aux incidences directes et indirectes de toute mesure ou action envisagée pour lutter contre la violence faite aux femmes, y compris à évaluer toute espèce d'incidence différentielle fondée sur des facteurs liés à la diversité, comme le sexe, la race, l'origine ethnique, la culture, l'âge et la capacité.
    La violence faite aux femmes est un enjeu complexe qui se répercute sur la santé physique et mentale des femmes, sur leur bien-être et sur leur sécurité économique, et elle influe sur leur capacité de parvenir à l'égalité dans la société canadienne. Ces effets se conjuguent dans le cas des femmes autochtones, des femmes de couleur, des femmes handicapées, des femmes âgées et des femmes pauvres. Pour cette raison, les mesures que nous mettons en oeuvre pour lutter contre la violence faite aux femmes sont variées et peuvent être de nature législative ou encore être axées sur les politiques, les programmes, la recherche ou l'éducation du public.
    Passons maintenant à nos réponses législatives. Un système de droit pénal solide et exhaustif sert non seulement à assurer l'imposition de sanctions adéquates lorsque sont commis ces actes de violence, mais aussi à prévenir ces actes ou à en dissuader les auteurs potentiels. Le Code criminel prévoit un large éventail de mesures qui visent à protéger tous les Canadiens contre la violence, notamment des dispositions interdisant les voies de fait, l'agression sexuelle, le harcèlement criminel, la séquestration, la traite de personnes ainsi que le meurtre et l'homicide involontaire coupable.
    Aucune distinction n'est établie entre les hommes et les femmes qui sont victimes de ces crimes, à une exception près peut-être. L'article 268, qui porte sur les voies de fait graves, comporte la mention « Il demeure entendu » précisant que la mutilation de l'appareil génital féminin constitue une forme de voie de fait grave.
    De même, les interdictions stipulées au Code criminel n'établissent pas de distinction entre d'autres types de victimes, à l'exception des enfants victimes d'agression sexuelle, bien que souvent, les dispositions générales relatives à l'agression sexuelle s'appliquent elles aussi lorsque la victime est un enfant.
    Les principes et les objectifs relatifs à la détermination de la peine que renferme le Code criminel reconnaissent néanmoins que certains crimes peuvent avoir une incidence différente sur certaines victimes. Ainsi, les tribunaux doivent-ils considérer certains facteurs comme des circonstances aggravantes aux fins de la détermination de la peine, notamment lorsque l'infraction a été motivée par des préjugés, de la haine ou des facteurs particuliers, y compris la race ou le sexe, et lorsque l'acte en question a été commis contre l'époux ou le conjoint de fait du contrevenant, ou encore contre une personne âgée de moins de 18 ans.
    Le comité sait certainement qu'étant résolu à lutter contre les crimes violents, le gouvernement continue de renforcer ce système pénal dans l'optique, surtout, de mieux assurer la protection des Canadiens, y compris les groupes vulnérables, contre toute forme de violence. La Loi sur la lutte contre les crimes violents de 2008, par exemple, a relevé l'âge du consentement à l'activité sexuelle dans le but de mieux protéger les jeunes contre les prédateurs sexuels adultes, et a promulgué des mesures plus efficaces de détermination de la peine et de surveillance pour empêcher les délinquants dangereux et à risque élevé de récidiver.
    Outre ces mesures de protection de fond, le Code criminel comporte aussi de nombreuses dispositions qui visent à faciliter le témoignage des victimes et des témoins vulnérables, y compris les plaignants — le plus souvent des femmes —, dans les cas d'agression sexuelle, de violence conjugale et de harcèlement criminel.
    Des moyens destinés à faciliter le témoignage, comme des écrans, la télévision en circuit fermé et la présence d'une personne de confiance peuvent être fournis sur demande s'il est démontré que le témoin n'est pas en mesure, sans cette aide, de livrer un récit complet des faits en raison de certaines circonstances, notamment la nature de l'infraction et des relations entre l'accusé et la victime ou le témoin, un handicap physique ou mental ou toute autre circonstance pertinente.
    Le ministère mène plusieurs initiatives stratégiques et programmes qui s'inscrivent aussi dans la réponse intégrée de la justice pénale à la violence faite aux femmes. Je citerais en particulier la Stratégie fédérale d'aide aux victimes que dirige le ministère de la Justice, laquelle vise à faciliter l'expérience des victimes de crimes, y compris des femmes qui ont été victimes de violence, dans le système de justice pénale. Menée en étroite collaboration avec les provinces, les territoires et les principaux intervenants, la stratégie soutient des initiatives visant à cerner les besoins et préoccupations des victimes de crimes, et à y répondre.
    Donnons un exemple des recherches qu'a entreprises le Centre de la politique concernant les victimes, qui administre la stratégie fédérale d'aide aux victimes sur le sujet. Le centre a publié en janvier 2006 un rapport intitulé « Revue de la recherche sur la victimisation criminelle et les membres des Premières nations, les Métis et les Inuits, 1990 à 2001 ». Une mise à jour de ce rapport est en cours.
    Le Centre de la politique concernant les victimes a aussi collaboré avec le Centre des enfants et des familles dans le système de justice dans l'élaboration de son guide de 2009 à l'intention des jeunes victimes et des témoins, intitulé Cheminer vers la justice : Un guide pour penser, parler et travailler comme une équipe en faveur des jeunes victimes d'actes criminel dans le Grand Nord canadien.
    Un autre exemple pertinent de la stratégie fédérale pour les victimes qu'il convient de souligner est celui d'une conférence tenue en septembre 2009 sur le thème « Approches et interventions auprès des victimes d'actes criminels dans le Nord... Miser sur la force intérieure et la résilience ». Cette conférence d'une durée de trois jours a rassemblé plus de 275 professionnels qui travaillent auprès des victimes de crimes dans les trois territoires. Plusieurs ateliers y étaient offerts portant sur les femmes autochtones en tant que victimes et témoins vulnérables.

  (1540)  

    L'autre stratégie que je voudrais souligner est la Stratégie relative à la justice applicable aux Autochtones, que dirige le ministère de la Justice et dont les provinces et territoires se partagent les coûts. Cette stratégie applique des méthodes de résolution des différends pour combattre le crime et la victimisation et soutient actuellement plus de 120 programmes de justice communautaire dans environ 400 collectivités autochtones du Canada. En vertu de ce processus holistique, les contrevenants sont tenus responsables de leurs actes et des tentatives sont faites pour réparer le mal fait à la victime tout en rétablissant la relation entre les victimes, les contrevenants et les collectivités.
    Enfin, j'aimerais donner deux exemples de collaboration fédérale-provinciale-territoriale dans des dossiers liés à la violence contre les femmes, à savoir les femmes portées disparues et les femmes victimes de violence conjugale.
    Les sous-ministres fédéraux-provinciaux-territoriaux ont créé au début de 2006 le Groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur les femmes portées disparues, qu'ils ont chargé d'examiner la question des femmes portées disparues. Le groupe de travail, qui est coprésidé par la Colombie-Britannique et l'Alberta, se concentre sur l'identification, l'enquête et la poursuite efficaces dans les affaires de tueurs en série qui mettent en cause des personnes dont le style de vie les expose à des risques élevés, y compris celles qui vivent de la prostitution. Cette démarche, qui devrait s'achever plus tard cette année, comprend un examen des pratiques exemplaires pour faciliter la détection précoce des tueurs en série potentiels, ainsi que des stratégies pour protéger les victimes potentielles.
    Le deuxième exemple dont je veux vous parler est le rapport final, datant de 2003, du Groupe de travail fédéral-provincial-territorial spécial chargé d'examiner les politiques et les dispositions législatives concernant la violence conjugale. En sa qualité de partenaire dans l'initiative de lutte contre la violence familiale, le ministère de la Justice a tenu le rôle de coprésident fédéral de cet examen. Ce rapport final a fait un examen approfondi de la mise en oeuvre et de l'application des mesures de justice pénale adoptées depuis 20 ans relativement à la violence conjugale, y compris des politiques favorables à l'inculpation et aux poursuites qu'ont adoptées toutes les compétences canadiennes au cours des années 1980.
    L'examen portait notamment sur l'incidence particulière de la violence conjugale sur les femmes autochtones. Outre les recommandations précises qui y sont faites, le rapport recense trois objectifs qui devraient éclairer à l'avenir les réponses du système de justice pénale à la violence conjugale: premièrement, il faut criminaliser la conduite — en l'occurrence, la violence conjugale; deuxièmement, la réponse doit accroître la sécurité de la victime; troisièmement, la réponse doit préserver la confiance dans l'administration de la justice.
    Pour terminer, nous reconnaissons que la violence faite aux femmes est un enjeu complexe et qu'une collaboration étroite entre tous les ordres de gouvernement et un éventail de mesures seront nécessaires pour que l'intervention du système de justice pénale contre ce problème soit exhaustive et efficace. Des lois et politiques pénales sévères, notamment, devront être mises en oeuvre dans le but de prévenir la perpétration des actes de violence et d'y réagir efficacement lorsqu'ils sont commis, d'offrir un soutien aux victimes, de continuer d'éduquer et de sensibiliser le public, ainsi que d'assurer la formation professionnelle.
    Je vous remercie.

  (1545)  

    Merci beaucoup.
    Notre troisième témoin aujourd'hui représente le ministère de la Sécurité publique.
    Est-ce que vous allez partager entre vous le temps qui vous est réservé?
    D'accord. Vous avez la parole.

[Français]

    Bonjour, je suis Daniel Sansfaçon, directeur exécutif par intérim du Centre national de prévention du crime du ministère de la Sécurité publique du Canada. Je vais partager cette période d'intervention avec mon collègue Ed Buller, qui est directeur de la Division des politiques correctionnelles autochtones.
    Je vais vous parler essentiellement de trois choses. Je vais essayer de le faire assez rapidement, pour qu'on ait suffisamment de temps ensemble. Dans un premier temps, il s'agira des grandes orientations de la Stratégie nationale pour la prévention du crime. Dans un deuxième temps, je parlerai de l'état des lieux, et dans un bref troisième temps, je vous donnerai au moins un exemple d'une intervention que l'on finance actuellement.
    La Stratégie nationale pour la prévention du crime a essentiellement pour objectif de réduire, dans la mesure du possible, les comportements de délinquance. On pense que des mesures de prévention bien réfléchies et bien mises en oeuvre sont la meilleure façon de réduire la victimisation. Bien évidemment, en même temps, on est conscient que c'est un travail à long terme, et que les effets ne se feront véritablement sentir que plusieurs années après que les interventions auront été menées, d'autant plus que nos groupes cibles sont plutôt des jeunes âgés de 6 à 24 ans. Je vous en parlerai plus tard de manière plus précise.
    La stratégie dispose notamment de trois mécanismes permettant de financer des actions de prévention sur le terrain, partout au pays. Le mécanisme plus général est le Fonds d'action en prévention du crime, qui est d'environ 37 millions de dollars pour l'année 2010-2011. Il s'agit du fonds principal en ce sens que l'on essaie, par ce mécanisme, de financer des actions qui sont largement basées sur l'état des connaissance de ce qui « fonctionne pour réduire la délinquance. »
    Le deuxième mécanisme, créé spécifiquement lors du tout récent renouvellement de la stratégie en 2008, est le Fonds de prévention du crime chez les collectivités autochtones et du Nord. Comme l'indique son titre, il a précisément pour objectif d'aider plus spécifiquement les collectivités autochtones à mettre en oeuvre des actions de prévention qui soient ciblées, mais aussi adaptées à leur réalités, à leurs circonstances. Ce fonds est de 8 millions de dollars pour 2010-2011.
    Finalement, même si c'est moins pertinent immédiatement, il y a le Fonds de lutte contre les activités des gangs de jeunes. Il s'agit d'un fonds à durée limitée qui se termine le 31 mars 2011 et qui dispose de 6 millions de dollars en 2010-2011.
    Comme je vous le disais, tout à l'heure, les grandes priorités de la stratégie sont de prévenir la délinquance — notamment chez les jeunes de 6 à 24 ans, puisque c'est la période où se manifestent les principales tendances délinquantes — parmi les peuples autochtones et les collectivités du Nord, et de prévenir la récidive des ex-contrevenants qui ne font plus l'objet d'une sentence.

  (1550)  

[Traduction]

    Le CNPC finance les interventions qui ciblent les enfants et les jeunes à risque élevé chez qui l'on reconnaît plusieurs facteurs de risque de délinquance plus tard dans la vie. Ces facteurs comprennent notamment le fait d'avoir été témoin ou victime de violence familiale. Le CNPC finance également des interventions visant à prévenir la récidive chez les délinquants chroniques et à risque élevé dans les collectivités, y compris ceux qui ont des antécédents connus de violence conjugale ou de violence faite aux enfants.
    Mes collègues en ont déjà parlé. Les données de recensement et d'autres données ont démontré que bon nombre d'Autochtones courent de plus grands risques de délinquance et de victimisation que les non Autochtones. L'une des priorités du CNPC consiste à appuyer des initiatives adaptées sur le plan culturel, qui favoriseront l'élaboration et la mise en oeuvre de stratégies de prévention du crime dans les collectivités autochtones, et ce, tant dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci que dans les collectivités du Nord. Le CNPC cherche aussi à accroître les connaissances et les capacités requises pour élaborer ou adapter des moyens efficaces de prévention du crime.
    Ces deux dernières années, le CNPC a été un partenaire actif et coopératif dans les collectivités autochtones, ayant investi plus de 46 millions de dollars pour financer 40 projets de prévention du crime destinés aux collectivités autochtones du Canada. La plupart de ces projets sont déjà en oeuvre, pour les deux prochaines années.
    Tout cela est expliqué dans la documentation que vous avez reçue. Le CNPC a financé des projets axés sur la réduction de la délinquance et, de fait, la prévention de la victimisation; les résultats sont assez positifs, notamment pour le projet Options de traitement de la violence familiale qui a été mis sur pied en 2000 à Whitehorse, ou le projet de classe en plein air Gwich'in, dans les Territoires du Nord-Ouest.

[Français]

    Toutefois, je n'insisterai pas sur ces programmes, puisque vous avez devant vous le sommaire d'évaluation qui montre effectivement que ces initiatives ont permis de réduire les comportements de délinquance parmi les jeunes.
    Un des projets actuellement en cours est le centre de soutien pour les femmes autochtones du pavillon Minwaashin, à Ottawa. Il s'agit d'un centre multiservices qui offre aux membres des collectivités autochtones des services de guérison, d'éducation et de loisirs adaptés à leur culture. Ce projet de trois ans vise à utiliser des approches éducatives pour essayer notamment de prévenir les formes de violence, y incluant les violences contre les femmes, parmi les filles et les garçons âgés de 12 à 18 ans. Les participants sont sélectionnés parmi ceux qui ont recours aux services de l'organisation qui parraine l'initiative ou aux services de leurs partenaires. On prévoit qu'environ 200 jeunes auront participé à cette initiative au fil de ses trois années d'existence.
    Voilà donc quelques exemples du type de projets que finance la Stratégie nationale pour la prévention du crime. On a de bonnes raisons de penser qu'ils contribueront à réduire les violences contre les femmes autochtones et, plus généralement, la violence.
    Merci.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Monsieur Buller, il vous reste quatre minutes.
    Bonjour. Je m’appelle Ed Buller. J’occupe actuellement le poste de directeur de la Division des politiques correctionnelles autochtones à Sécurité publique Canada.
    J’aimerais prendre le temps de vous présenter une démarche visant à prévenir la violence faite aux filles et aux femmes autochtones. Celle-ci consiste à reconnaître qu’il faut réduire la violence dans l’ensemble de la collectivité pour améliorer la sécurité des filles et des femmes autochtones.
    Un certain nombre de collectivités autochtones ont démontré que les démarches culturelles, fondées sur les croyances et les pratiques traditionnelles, constituent un moyen efficace de lutter contre le crime et d’appuyer les victimes dans leur traitement, sans compter qu’elles sont un pivot qui contribue au développement économique, social et culturel.
    Par exemple, une étude sur le processus de guérison dans la première nation de Hollow Water au Manitoba révèle que, sur une période de dix ans, la communauté de Hollow Water est venue en aide à plus de 100 délinquants et à environ 400 victimes de violence sexuelle ou physique dans la collectivité. Grâce au processus de guérison, le taux de récidive chez les délinquants était de moins de 2 p. 100. À titre de comparaison, aux services correctionnels du système judiciaire canadien, le taux de récidive habituellement accepté est de 19 p. 100 pour les délinquants sexuels. Les auteurs de l’étude ont conclu que pour chaque dollar investi par le gouvernement du Manitoba, celui-ci en avait épargné trois. De même, pour chaque dollar investi par le gouvernement fédéral, ce dernier avait épargné entre deux et onze dollars.
    Cette étude montre que l’appui apporté à la première nation de Hollow Water était un bon investissement financier, mais la collectivité a aussi signalé d’autres avantages pour ses membres. De fait, on a constaté qu’il y a eu une baisse importante de la toxicomanie, que les parents jouaient un rôle plus actif dans l’éducation de leurs enfants, que les enfants restaient à l’école ou y retournaient, qu’une quarantaine d’enfants d’autres collectivités étaient placés en foyer d’accueil à Hollow Water et que d’anciens résidents retournaient vivre dans la collectivité. Au départ, le processus de guérison lancé à Hollow Water avait pour but d’aider les victimes et les délinquants à se remettre d’actes de violence sexuelle ou familiale, mais il a contribué de façon importante à améliorer la sécurité et le bien-être de la collectivité en général.
    Un grand nombre de collectivités autochtones se tournent de nouveau vers des approches traditionnelles pour amener leur population à surmonter des obstacles liés à des problèmes communs. Après des dizaines d’années durant lesquelles le gouvernement a tenté de les morceler en offrant des programmes modestes pour régler différents problèmes, les collectivités appliquent des stratégies traditionnelles pour mobiliser les gens et régler des problèmes qui s’étendent à toute la collectivité.
    Les démarches axées sur la guérison amènent les collectivités à former une société civile et durable au lieu de s’en tenir à régler des problèmes. Il en résulte des collectivités plus saines, au profit de tous les résidents, que ce soit directement par l’entremise de programmes intégrés ou indirectement en répondant aux besoins et aux aspirations des particuliers.
    Au fil du temps, nous en sommes venus à croire que la première étape de la guérison pour une collectivité est d’établir un plan de sécurité communautaire, ce qui permet aux collectivités de définir des interventions globales et intégrées pour surmonter les problèmes de sécurité. Ces plans doivent préciser les questions et les enjeux clés qui nuisent au bien-être et à la sécurité de la collectivité tout en donnant une orientation pour les années à venir.
    Les plans de sécurité communautaires aident les collectivités à définir les risques qui peuvent mener à la criminalité et à la victimisation, à mettre à profit les ressources et à cerner les lacunes des interventions. Étant donné que ces plans sont globaux et ne s’en tiennent pas à la justice ou à la sécurité publique, ils permettent de collaborer avec d’autres fournisseurs de fonds et d’assurer une intervention intégrée. Ces plans servent de cadre pour s’attaquer de manière systématique aux causes profondes de la victimisation et pour régler les problèmes de sécurité de la collectivité.
    Il existe actuellement divers programmes de financement pour lutter contre la violence faite aux femmes. Cependant, dans bien des cas, ces programmes visent à corriger des problèmes en particulier et ne permettent pas à la collectivité de coordonner et de combiner leurs interventions.

  (1555)  

    Si l’on aidait les collectivités à adapter leurs interventions en fonction de la sécurité communautaire, on pourrait utiliser les programmes pour mettre à profit les ressources existantes tout en améliorant la capacité des collectivités d’accéder aux sources de financement existantes ou nouvelles.
    Je vais vous demander de conclure brièvement votre exposé, car je suis certaine que les membres du comité aimeraient vraiment vous poser des questions.
    Au fur et à mesure que les collectivités définiront leurs priorités et stratégies pour réduire la violence contre les femmes et les jeunes filles, cette démarche aidera les ministères fédéraux à cibler de manière plus efficace les divers services en fonction des besoins de la collectivité. De plus, le gouvernement sera mieux informé des besoins et des attentes des collectivités, ce qui lui permettra d’améliorer ses politiques en fonction des besoins réels et des démarches qui donnent des résultats.
    Je vous remercie.
    Comme je vous disais, je suis certaine que les membres du comité voudront avoir d’autres détails pendant la période de questions.
    Pourrions-nous terminer par la Gendarmerie royale du Canada? J'ignore qui est votre porte-parole aujourd’hui.

  (1600)  

    C’est moi qui vais parler. Je suis le commissaire adjoint Bob Paulson.

[Français]

    Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du comité, je veux vous remercier de nous donner l'occasion de discuter avec vous de la violence faite aux femmes autochtones au Canada.

[Traduction]

    Comme vous le savez, la GRC, en partenariat avec les autres services de police, a un rôle important à jouer pour rendre nos collectivités plus sécuritaires. Nous sommes le service de police provincial dans huit des dix provinces. Nous assurons le service de police dans les territoires et dans de nombreuses municipalités partout au Canada. À ce titre, nous fournissons également des services de police essentiels aux premières nations, aux Inuits et aux Métis.
    Les collectivités autochtones font partie des cinq priorités stratégiques de la GRC. Les actes de violence de toute nature qui ont lieu dans les collectivités autochtones nous préoccupent, tout comme dans toutes les autres collectivités canadiennes. Nous concentrons nos efforts sur la prévention, l’éducation et l'exécution et nous les améliorons activement. Pour réduire la violence, la clé est d'avoir un vaste engagement important de tous les ordres de gouvernement et de la société civile.
    M’accompagnent aujourd’hui mon collègue, le surintendant de police en chef Russ Mirasty, et d'autres collègues. Nous serons ravis de vous parler de nos initiatives et de répondre à vos questions.
    Je vous remercie.
    Merci infiniment.
    Nous allons donc entamer notre première série de questions, pour laquelle les membres du comité ont chacun sept minutes. Nous commencerons par Mme Neville.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je vous remercie tous d’être des nôtres aujourd’hui. J’ai beaucoup de questions, mais je n’ai pas suffisamment de temps.
    J'ai d’abord une petite entrée en matière. Permettez-moi de vous dire, monsieur Buller, que je connais l'initiative de Hollow Water au Manitoba. Je sais qu'il s'agit d'une approche intégrée et holistique qui est en cours depuis longtemps et que l’on y a affecté beaucoup de ressources différentes. Cette initiative a connu de nombreux succès et un certain nombre de revers en cours de route, mais ce pourrait bien être un modèle.
    Je m’adresse maintenant à la GRC. J'ai eu l'occasion de rencontrer le conseil d’administration de l’initiative Highway of Tears. J’ai été ravie de vous voir participer dans le but d'avoir une réponse plus unie et globale à ce problème.
    Cependant, je suppose que je suis vraiment inquiète. En mai dernier, mon collègue, Todd Russell, et moi-même avons écrit au ministre de la Justice pour demander une enquête sur les disparitions et les meurtres de femmes autochtones. On nous a pratiquement envoyé une lettre de réponse qui parlait de toutes les initiatives isolées en cours. Certes, il y a un certain nombre d'initiatives en cours, mais ce qui me frappe avant tout, en écoutant les exposés précédents du gouvernement, c’est que je me demande si vous communiquez entre vous. Existe-t-il une démarche intégrée globale à cet égard? C'est une question très complexe.
    Il y a eu des compressions quant au financement de la Fondation autochtone de guérison, qui traitait de nombreuses questions liées à la violence contre les femmes. Or, il ne semble pas y avoir de plan d'ensemble. Il y a beaucoup de mesures ponctuelles, mais il ne semble pas y avoir de plan stratégique global, intégré et holistique.
    En ce qui concerne les causes profondes, on en a cerné certaines, mais nous n'avons rien entendu à propos des problèmes de logement, de l'impact générationnel sur les peuples autochtones, des cycles de la pauvreté ou rien de tout cela. Dites-moi donc ce que fait le gouvernement pour nous donner l'espoir que l’on déploie des efforts réels pour traiter ce problème. C'est une question compliquée, mais les mesures ponctuelles ne vont pas nous mener loin.
    Je ne sais pas qui veut répondre à cette question.
    Qui aimerait répondre à cette question?
    Madame Quinn.
    Merci beaucoup pour la question.
    Je peux vous dire que l'Agence de la santé publique du Canada dirige effectivement une initiative de prévention de la violence au foyer, à laquelle 15 ministères participent. Cette initiative comporte trois objectifs: sensibiliser le public aux facteurs de risque de violence familiale et à la participation nécessaire du public pour intervenir; renforcer la capacité d’intervention des systèmes de la santé, du logement, de la justice pénale et des systèmes sociaux; et soutenir les efforts de collecte de données, de recherche et d'évaluation.
    Le rôle du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien à l’égard de la prévention de la violence familiale passe par notre programme de prévention de la violence au foyer. Nous collaborons également avec les parties intéressées, comme le National Aboriginal Circle Against Family Violence et l'Association des femmes autochtones du Canada.
    Nous faisons effectivement des efforts d'intégration et de coordination. C'est un domaine où nous pouvons toujours nous améliorer, surtout dans un domaine aussi important que la prévention de la violence familiale.
    Pour ce qui est des questions liées au logement, à l'éducation, à l’eau potable et à l’aide à l’enfance et à la famille, nous sommes en train de mettre sur pied des mesures de prévention dans cinq provinces. Ainsi, nous ne serons pas toujours en train de chercher de la protection et de soustraire des enfants à leur foyer. Au sein du ministère, nous travaillons sur plusieurs fronts avec des collègues et les provinces, car les services sociaux sont en grande partie un domaine où les provinces ont compétence ou beaucoup d'expérience sur laquelle on peut compter.
    Il y a donc des efforts en cours pour assurer la coordination et établir les priorités pour les années à venir. Cependant, comme je l’ai dit, c'est aussi un domaine où nous pouvons et devons toujours nous améliorer.

  (1605)  

    J'ai tant de questions! Vous avez dit que l'Agence de la santé publique du Canada joue un rôle de premier plan. Diriez-vous que l'Agence de la santé publique mène une initiative à l’échelle du gouvernement… et inclut-elle également les ministères de la Justice et de la Sécurité publique? Si c’est le cas, devrions-nous les inviter à témoigner?
    Existe-t-il un plan dans lequel on peut voir un graphique, un organigramme ou quelque chose qui décrit les activités en fonction de tels ou tels objectifs et les résultats anticipés? Je suis tout simplement étonnée de constater qu’il y ait tant de mesures ponctuelles sans aucune planification.
    Je me répète.
    Pour ce qui est de l’agence, elle dirige effectivement l'initiative, mais c'est en grande partie un rôle de coordination. Ce n'est pas comme si elle avait elle-même beaucoup de programmes.
    Ensuite, concernant les programmes, chaque ministère a son propre mandat, bien sûr. Il y a donc la question du logement, car il y a un besoin de logements dans les réserves. Évidemment, avec des logements de qualité et de l’eau potable, nous pouvons aider…
    J'ai énormément voyagé dans le Nord du Manitoba. Je suis allée chez les gens, où j'ai vu des familles de trois, quatre et cinq générations vivre sous le même toit — beaucoup de personnes. C'est un passe-partout vers la violence, en raison non seulement de la surpopulation, mais aussi des conditions de vie. Tient-on compte de tous ces facteurs?
    Oui et non seraient de mauvaises réponses, mais initialement…
    D’après mon expérience, la réponse serait en grande partie négative.
    Dans le cadre de l'initiative, nous faisons tous de notre mieux en vertu de notre propre mandat et nous nous tenons tous mutuellement informés des déroulements et des possibles améliorations à la coordination. Nous avons davantage de financement pour régler la question du logement et de l'eau. Nous nous efforçons de travailler avec les organisations des premières nations sur le plan de l'éducation. Nous collaborons avec des collègues pour trouver des moyens de faire avancer nos objectifs et obtenir de meilleurs résultats.
    L'hon. Anita Neville: Je vous remercie.
    Nous allons maintenant entendre Mme Demers.

[Français]

    Merci de votre présence aujourd'hui. J'ai beaucoup de questions à vous poser.
    Je constate qu'il y a beaucoup d'argent investi, et je me demande où il va. Personnellement, je suis allée au Nunavut où j'ai visité un refuge. Si ce refuge reçoit un million de dollars par année, il y a des choses que je ne comprends pas. Il n'y a pas de maison de transition ni de programme. Les gens de ce refuge n'ont pas de vêtements. Ils doivent demander la charité pour obtenir des vêtements pour les enfants. Ils doivent demander la charité pour obtenir des vêtements pour les femmes du refuge. Celles-là doivent y rester pendant plus de six semaines, car il n'y a pas de maison de transition.
    Il y a environ 30 millions de dollars par année qui sont destinés à 35 refuges, alors qu'on sait que les refuges pour femmes dans les communautés autochtones reçoivent 190 000 $ par année, qu'ils sont sous-subventionnés, comparativement aux refuges dans les autres communautés du Québec, par exemple.
    Dans certaines communautés autochtones au Québec, la situation est tellement dramatique qu'il y a deux ou trois enfants par famille qui se suicident. J'ai passé trois jours au Nunavut, à Iqaluit, et il y a eu là trois suicides de jeunes de 15, 16 et 17 ans. L'argent ne semble pas être la solution. C'est peut-être aussi la façon dont il est utilisé qui fait défaut. Travaille-t-on trop dans nos bureaux et pas assez sur le terrain?
    Cela m'inquiète énormément de savoir qu'il y a autant d'argent octroyé, soit présentement 30 millions de dollars par année, et les 56 millions de dollars additionnels qui ont été investis en 2007 sur cinq ans. Ça fait beaucoup d'argent. Où est passé cet argent? Vous avez parlé de programmes, madame Quinn, mais ce n'est pas suffisant.
    Madame Morency, pourriez-vous me dire ce que vous allez faire avec les 10 millions de dollars qui ont été investis dans la justice pour cette initiative de déterminer ce qui s'est produit par rapport aux meurtres non résolus? Vous nous dites que depuis 2006, vous enquêtez sur les meurtres, les viols et les disparitions non résolues des femmes autochtones. Qu'avez-vous découvert pendant ces quatre années? Avez-vous partagé vos informations avec les gens qui travaillent pour l'Initiative « Soeurs par l'esprit »? Est-ce que vous nous avez informés de ce que vous avez découvert? En effet, il y a quelques années qu'on demande une enquête, et, maintenant, vous nous dites que vous en faisiez une. Évidemment, on n'a pas été mis au courant. Le cas échéant, on n'en aurait pas demandé une.
    Je vais me limiter à ces deux questions pour le moment.

  (1610)  

    Merci de vos questions.
    En ce qui concerne les fonds octroyés par mon ministère, il y a les aspects de prévention et de protection, si je peux le dire ainsi.

[Traduction]

    Sur les 29 millions de dollars par année, nous investissons actuellement sept millions

[Français]

dans les projets de prévention.

[Traduction]

    Il s’agit donc de projets qui ont lieu aux quatre coins du pays et qui viennent en aide aux femmes, enfants et familles autochtones en leur offrant de développer des connaissances élémentaires et des compétences parentales. Certains projets visent à travailler auprès des gangs de jeunes.

[Français]

    Auriez-vous la gentillesse de nous fournir, si c'est possible, une liste de ces projets, s'il vous plaît?
    J'ai la liste ici, et je pourrais la partager avec vous. Je vais le faire.
    S'il vous plaît.

[Traduction]

    Les autres fonds sont affectés aux maisons de refuge. Quelque 22,6 millions de dollars servent à soutenir l’exploitation des refuges. Ce montant couvre les salaires des employés, des intervenants, des directeurs, etc.

[Français]

    Ils ne sont pas au courant qu'ils reçoivent cet argent, madame Quinn. Ils ne reçoivent que 190 000 $ par année. On ne sait pas où va le reste de cette somme, mais on sait qu'il ne va pas aux refuges. Les refuges ne reçoivent que 190 000 $ par année pour le fonctionnement de base, c'est tout.
    Les fonds du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour les refuges sont attribués à 41 centres. Cependant, au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest,

[Traduction]

    le financement provient en grande partie de la formule de financement des territoires. Il s’agit de l’enveloppe de financement qui ne fait pas partie de notre ministère. Les fonds vont aux territoires, et les gouvernements des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut aident à soutenir les refuges sur leur territoire.

[Français]

    Pour ces deux endroits, nous avons certains fonds prévus pour des projets de prévention, mais nous n'en avons pas pour les centres proprement dits.
    Dans ce cas, d'où proviennent les fonds? Les territoires, en particulier le Nunavut, n'ont pas le pouvoir de taxation ni d'imposition. En conséquence, tout l'argent qu'a le Nunavut provient du gouvernement fédéral. S'il ne reçoit pas d'argent de votre part pour le refuge, d'où vient l'argent?
    Le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest reçoivent des fonds du gouvernement fédéral par l'entremise de la formule de financement. Il appartient aux territoires de décider des priorités d'investissements. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ne finance pas les maisons d'hébergement au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest. C'est par la formule de financement du gouvernement du Canada que le gouvernement du Canada transfère l'argent aux deux territoires.
    Donc, il y a seulement 41 refuges qui sont concernés par la somme de 22,6 millions de dollars.
    C'est ça. Ils sont financés par...

  (1615)  

    On ne compte pas les Territoires du Nord-Ouest.
    Ni le Nunavut.
    Madame Morency?
    Vous m'avez posé deux questions. Premièrement, l'annonce du gouvernement dans le budget de 2010 faisait référence à un investissement de 10 millions de dollars.

[Traduction]

    Le ministre de la Justice va annoncer les détails de cette affectation budgétaire dans les prochains mois. Comme c’était indiqué dans le budget, on dépensera cette somme d'argent sur deux ans pour s’attaquer au problème des disparitions et des meurtres de femmes autochtones, et en particulier pour prendre des mesures concrètes pour que le maintien de l’ordre et le système judiciaire répondent aux besoins des femmes autochtones et de leur famille.

[Français]

    La deuxième question était au sujet du travail des gouvernements fédéral et provinciaux. Je parlais du travail...

[Traduction]

    Je suis désolée, mais je crois que vous allez devoir répondre à la seconde question lors de la prochaine série de questions. Le temps est déjà écoulé.
    Je cède maintenant la parole à Mme Boucher.

[Français]

     La discussion d'aujourd'hui est très intéressante. Moi aussi, j'ai énormément de questions à poser et je ne sais pas par où commencer.
    Beaucoup de gens ont témoigné devant le comité et nous avons fait beaucoup d'efforts, au comité, pour comprendre la violence faite aux femmes autochtones. Comme on l'a dit la semaine dernière, je suis Blanche et je ne vis pas cette réalité. Souvent, on méconnaît la situation ou on a une mauvaise image de ce que sont les réserves des Territoires du Nord-Ouest et ce qu'est la violence faite aux femmes autochtones, aux Innues et au Métisses.
    Madame Demers a demandé si vous vous parliez entre vous. La collaboration entre les différentes parties est-elle bonne? Lorsque des programmes sont mis en place, les femmes autochtones sont-elles mises au courant? Sont-elles conscientes qu'elles ont accès à ces fonds?
    Par ailleurs, en tant que femme du Québec — et en tant que femme tout court — je me pose la question suivante: comment peut-on vous aider à changer l'image qu'on se fait de la violence faite aux femmes autochtones? Souvent, trop souvent, on dépeint les femmes autochtones comme étant toujours dans des situations de crise. La violence, c'est aussi une réalité de l'éducation. Comment le gouvernement peut-il vous aider à avancer vers des solutions positives pour contrer la violence faite aux femmes autochtones?
    Je vais essayer de répondre pour l'ensemble des collègues.
    Pour ce qui est de la collaboration, elle existe effectivement. Ce n'est pas la première fois que nous nous voyons, nous qui sommes ici autour de la table. Nous nous connaissons et nous nous parlons. Bien entendu, conformément à nos mandats respectifs de ministère, nous travaillons à mettre en place des initiatives et nous cherchons à travailler avec les partenaires.
    La violence faite aux femmes autochtones est un enjeu complexe. Énormément de facteurs entrent en cause ou génèrent une violence envers les femmes autochtones. La réponse nécessaire est tout aussi complexe. On compte des intervenants à l'échelle du gouvernement fédéral, mais aussi à l'échelle des provinces et des territoires, et même jusque dans la communauté. C'est cette approche coordonnée qui nous permettra d'obtenir des résultats.
    Abordons maintenant la question de l'implication des associations de femmes autochtones dans nos initiatives. Quand on travaille à mettre en oeuvre des initiatives et des programmes, chacun de nous a une façon d'impliquer ces associations. On a aussi la possibilité de financer des organisations de femmes autochtones, par exemple l'Association des femmes autochtones du Canada et Pauktuutit, qui représente les femmes inuites. Au Québec, l'Association des femmes autochtones du Québec reçoit du financement pour des projets qu'elle présente au gouvernement fédéral ou au gouvernement provincial pour mettre en place des initiatives permettant de répondre aux besoins et aux spécificités de ces groupes.

  (1620)  

    Si j'ai bien compris, quand le gouvernement donne de l'argent, il s'agit d'une étape dans le travail horizontal. Vous donnez ensuite cet argent aux provinces et territoires, puis c'est à eux de décider où va l'argent, par exemple pour les refuges ou autres. C'est un peu ce que je comprends.
    Dans le cas du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest, quand il est question de maisons d'hébergement, c'est au gouvernement territorial de prendre des décisions.
    Quant aux programmes que nous avons au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien qui touchent les réserves, le financement ira aux communautés par le truchement d'ententes de contribution, selon les programmes. Dans le cas de l'initiative pour appuyer l'Association des femmes autochtones du Canada, par exemple, l'argent va du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien à cette association.
    Je ne sais pas si Daniel peut parler du mécanisme d'allocation de financement du Centre national de prévention du crime.
    Effectivement, on finance essentiellement des organismes communautaires sur le terrain. Cela peut arriver que l'on finance directement des gouvernements provinciaux ou territoriaux, mais c'est assez rare. Il s'agit véritablement d'organismes communautaires, dans ce cas-ci d'associations qui travaillent directement en milieu autochtone.
    Par ailleurs, la question de départ, soit la question difficile de l'horizontalité du travail entre les différents ministères, est une excellente question, une question lancinante, et ça s'applique dans tous les domaines. Cependant, on remarque des percées. Je pense notamment à ce travail qui se fait actuellement dans la communauté de Pangnirtung, au Nunavut. On dénote effectivement une volonté de sept ou huit ministères de travailler sur place, de manière holistique et globale, et d'intervenir de manière coordonnée sur le terrain, de sorte que tous les financements des différents partenaires passent par un même véhicule, qui est le Secrétariat des relations avec les Inuit du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
    Voilà l'exemple d'une initiative. C'en est une, on est d'accord que cela ne résout pas le problème. Néanmoins, on fait des pas dans la bonne direction, vers une meilleure intégration et une meilleure coordination des actions fédérales.

[Traduction]

    Il vous reste une trentaine de secondes pour poser une question.

[Français]

    Je vais adresser ma question au policier.
    Comment faites-vous, vous qui êtes sur le terrain, pour essayer de contrer la violence faite aux femmes autochtones?
    Je vais répondre dans ma langue maternelle.

[Traduction]

    De toute évidence, nous répondons aux besoins de la collectivité lorsque les choses tournent mal. Ainsi, nous devons avoir une intervention exhaustive en situation de crise en prévision du moment où ont lieu les actes de violence. Il faut donc former nos policiers et procéder aux collectes de preuves, activités légalistes dont nous nous occupons jour après jour.
    Cependant, dans les domaines de la prévention et de l'éducation, la formation de nos agents se révèle un défi. Nous nous en chargeons du début à la fin, grâce à des initiatives de l’École nationale de formation et de formation continue, des questions de sensibilité culturelle, la création d’équipes et l’esprit d’équipe tel que l’on vient de vous décrire.
    On semble vouloir m’interrompre, mais alors il y en a encore beaucoup à dire.
    Je suis désolée, monsieur Paulson. Les questions très compliquées sont souvent posées quand il reste seulement 30 secondes.
    Madame Mathyssen.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie d’être des nôtres et de nous faire part de votre savoir-faire.
    J’aimerais commencer par M. Buller. Vous avez parlé de démarches traditionnelles, d'un processus de guérison communautaire efficace. Pourriez-vous nous en dire un peu plus pour étoffer cette mesure? Dans quels types de processus vous lancez-vous? Lesquels donnent les résultats escomptés?
     Je pense qu'il faut envisager cette question de plusieurs points de vue et examiner diverses démarches possibles. Aucune approche n'est universelle, c'est sur cette base que repose notre travail.
     Premièrement, je dirais que nous n'offrons pas un programme. Nous sommes plutôt responsables d'une initiative stratégique. Donc, lorsque vous entendez parler de millions de dollars dépensés pour certains projets, ce n'est pas de mon budget qu'il est question, car le mien est considérablement moins élevé.
     Nous cherchons des collectivités qui ont pris l'initiative de s'attaquer à certaines des causes sous-jacentes de la criminalité et de la victimisation, et qui peuvent nous présenter une approche unique ou nous aider à mieux comprendre comment les collectivités elles-mêmes abordent ces questions.
     Chaque fois que nous avons collaboré avec des collectivités, c'étaient toujours des femmes qui avaient établi et maintenu les processus de guérison, quel que soit la province, le territoire ou la collectivité.
     Les gens ont le sentiment que lorsque quelqu'un admet être la victime ou l'auteur de mauvais traitements, la collectivité doit prendre la responsabilité de donner suite à la divulgation. À Hollow Water, à Mnjikaning et dans plusieurs autres collectivités avec lesquelles nous travaillons, il a fallu qu'un groupe de gens dévoués qui collaboraient avec les dirigeants de la collectivité déclarent que la violence à répétition, qu’elle soit dirigée contre des hommes, des femmes, des garçons ou des filles, était inacceptable au sein de la collectivité. Il est donc essentiel que la collectivité fasse preuve de leadership et de détermination.
     Les travailleurs dévoués passent du temps à la fois avec la victime et le délinquant afin de recueillir les renseignements et de les consigner sous une forme qui peut être présentée à la police. Les renseignements sont ensuite transférés aux tribunaux et, dans certaines collectivités, le tribunal et les avocats de la Couronne ont élaboré un protocole d'entente qui autorise la collectivité à régler ces problèmes elle-même. La victime et le délinquant retournent au sein de la collectivité où ils participent à des cérémonies ou reçoivent des services de counselling individualisés ou du counselling en groupe.
     Le travail effectué pour résoudre les problèmes de colonisation contribue à la réussite de bon nombre de processus. Un processus de décolonisation est utilisé pour aider la personne à comprendre à quel moment de sa vie elle est entrée en conflit avec la loi ou elle est devenue une victime, et quelles expériences l'y ont conduit. Le processus, en soi, est très important. Il permet de mettre un terme à beaucoup d'activités qui sont devenues la norme au sein de la collectivité, parce que les parents ne savent comment élever leurs enfants. Dans certains cas, les victimes ont l'impression qu'elles sont responsables des gestes qui ont été posés à leur endroit.
     Un processus de guérison se préoccupe davantage des raisons pour lesquelles le crime a été commis que de l'incident lui-même. Dans tous les cas, la victime est traitée par un groupe de femmes, dont bon nombre sont des victimes elles-mêmes. Elles sont en mesure de partager leur histoire et de montrer comment, avec le temps, elles ont réglé leur problème de victimisation, à un point tel qu'aujourd'hui, elles n'ont plus l'impression d'être des victimes.
     Pour participer à ces processus, le délinquant doit reconnaître sa responsabilité en public et doit être mis au courant des répercussions que ses actes ont eues sur sa famille, la victime et la collectivité en général.

  (1625)  

    Le processus expose le problème au grand jour et prouve que la collectivité est prête à régler ces questions ouvertement et qu'elle en est capable.
     Vous abordez une question complètement fondamentale. Nous avons entendu des témoins de l’AFAC, de Pauktuutit et de l’association des femmes métisses dire qu’il était nécessaire que les collectivités gèrent elles-mêmes la situation.
     On nous sort toutes sortes de chiffres quant aux sommes qui sont dépensées. Nous savons que, dans le budget, 10 millions de dollars étaient consacrés à ce problème, mais il semble qu’une grande partie de cet argent soit destinée au maintien de l’ordre et au système judiciaire. Comment pouvons-nous nous assurer que l’appui, le financement et les initiatives sont confiés aux Autochtones? À mon avis, seuls eux peuvent venir à bout de ce problème et redresser les torts incalculables qu’ils ont subis ici, au Canada.
     Comment pouvons-nous faire savoir aux gens qu’il y a des experts en la matière, mais que nous n’en faisons pas partie — nous, les non Autochtones?

  (1630)  

     Je vais devoir vous interrompre ici. Vous avez posé une autre question très compliquée, alors qu’il ne vous reste plus que trois secondes. Avec un peu de chance, nous aurons l’occasion de revenir sur cette question.
     Nous entamons maintenant notre deuxième série de questions. Les intervenants disposent de cinq minutes pour poser leurs questions et obtenir des réponses. Nous commencerons par Mme Simson.
    Merci, madame la présidente.
     Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd’hui. Cette question est très complexe.
     J’aimerais simplement reprendre quelque chose que ma collègue a dit. Le gouvernement semble avoir les meilleures intentions et avoir accordé à cette question un financement acceptable, mais il lui manque un plan stratégique national pour s’attaquer au problème. J’ai un peu l’impression que notre pays utilise des solutions de fortune à défaut d’autre chose.
     J’aimerais m’adresser d’abord à Mme Morency. J’aimerais que vous nous en disiez davantage à propos, par exemple, des 10 millions de dollars sur deux ans que le Budget 2010 comporte. Ce financement découle-t-il d’un plan que le ministère de la Justice a élaboré et dans le cadre duquel des fonds ont été accordés? Y avait-il un plan derrière ce financement, ou est-ce que les membres du gouvernement ont simplement dit « Voici 10 millions de dollars et voici comment nous aimerions que vous les utilisiez »? Y a-t-il bel et bien un plan que nous pourrions voir et lire afin de déterminer s’il a une valeur quelconque? Pourriez-vous, je vous prie, nous fournir quelques précisions à ce sujet?
    Je ne suis pas en mesure de vous fournir des renseignements, quels qu’ils soient, sur la prochaine affectation des 10 millions de dollars. Tout ce que je peux faire, c’est répéter au comité ce qui a déjà été annoncé dans le budget et mentionner que le ministre de la Justice expliquera lui-même comment cet argent sera dépensé.
    Cet argent était prévu précisément pour s’attaquer au problème lié au grand nombre de femmes autochtones disparues ou assassinées. Le budget était très précis à cet égard. Donc, les fonds sont disponibles, mais personne ne sait si un plan existe ou, du moins, aucun plan ne semble avoir été établi.
    Je n’ai pas dit cela.
    D’accord.
    J’ai dit que le ministre de la Justice annoncerait les détails de son plan dans les mois à venir. C’est tout ce que je peux dire.
    Le ministre de la Justice fera une annonce qui apportera des précisions.
    C’est exact.
    D’accord.
     Dans un autre ordre d’idées, j’aimerais interroger le commissaire adjoint Paulson au sujet de la formation offerte aux agents et aux civils. Vous avez mentionné brièvement l’existence de cours de sensibilisation aux réalités culturelles. Pourriez-vous m’expliquer étape par étape en quoi cette formation consiste exactement, combien de temps est consacré à cet élément et si cette éducation est permanente? Les membres civils de la force en bénéficient-ils également?
    Je vous remercie de votre question. Je peux parler de ce que j’appellerais les membres réguliers de la force policière et de la formation qu’ils reçoivent à la Division Dépôt. Les membres commencent par suivre 35 séances de sensibilisation à la violence familiale.
    C’est ce qu’ils reçoivent en général.
    Oui, mais je vais simplifier les choses pour vous.
     Outre les 35 séances auxquelles j’ai fait allusion, ils suivent 14 ou 15 cours sur la culture autochtone et sur les questions liées aux collectivités autochtones. Selon l’endroit où l’agent est posté, il suit presque immanquablement d’autres cours dans le cadre de ce que nous appelons la « formation pratique des recrues ».
    C’est ce à quoi je faisais allusion. Si un nouvel agent est affecté à un détachement situé près d’une collectivité autochtone, il sera appelé à interagir continuellement avec ses membres. Recevra-t-il de la formation supplémentaire ou permanente au sein du détachement?

  (1635)  

    Oui, il en recevra, et elle variera d’un détachement à l’autre. Mais elle sera uniforme en ce sens que, dans les six mois qui suivront le transfert ou l’affectation des recrues à un détachement, ils recevront la formation pratique des recrues qui leur permettra de perfectionner les compétences qu’ils ont commencé à acquérir à la Division Dépôt. Le programme est homogène en ce qui a trait à l’interaction avec les collectivités autochtones locales, à la compréhension des enjeux locaux et au perfectionnement de la formation. Tout au long de la carrière d’un membre, il recevra d’autres types de formation centralisée et localisée.
    Selon ce que les médias ont rapporté au fil des années, il semble y avoir beaucoup de tension entre la GRC et certaines collectivités autochtones. Je suppose qu’on pourrait dire la même chose de notre Police provinciale de l’Ontario. Pour que ces mesures fonctionnent, il faudrait que la confiance règne.
     Ma question concerne vos pratiques d’embauche.
    Je suis désolée. Vos cinq minutes sont écoulées. Nous passons à la prochaine personne. Il se peut que nous ayons l’occasion d’avoir une troisième série de questions.
    Madame Brown.
     Merci beaucoup, madame la présidente.
     Par déférence pour mes collègues qui ont parlé plus tôt de la coordination des programmes, j’ai fait quelques recherches avant que nous entreprenions toute cette enquête. J’ai découvert que la violence à l’égard des femmes autochtones avait fait l’objet de plus de 21 000 études au Canada. Son existence est fort bien documentée. Notre présidente, qui est absente aujourd’hui, m’a confié avoir pris part à des études sur cette question depuis 17 ans.
     J’apprends aujourd’hui qu’il s’agit probablement de la meilleure coordination de programmes et de services que nous avons vue depuis longtemps. Je suis très heureuse d’entendre dire que ces efforts sont en cours et que Santé Canada et Affaires indiennes et du Nord y participent. Vous travaillez en collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux afin d’obtenir des fonds qui seront affectés là où ils sont nécessaires.
     En tant que femme, et j’espère que c’est le cas pour toutes les femmes du comité, je ne tolère absolument pas que les femmes autochtones soient victimes de violence. Nous en avons examiné les causes. D’après ce que j’ai lu sur la psychologie de la violence à l’égard de qui que ce soit, cela se produit très souvent parce que l’agresseur a une piètre estime de lui-même. Comment pouvons-nous nous employer à résoudre ce problème?
     Monsieur Sansfaçon, vous avez mentionné que d’excellents projets étaient en cours dans le domaine de l’éducation. L’une des choses que j’ai lues ici concerne l’un de vos projets:
[Le projet] a permis à des garçons de 6 à 9 ans d'acquérir des aptitudes sociales positives. On a constaté une différence importante, tant chez les garçons que chez les filles, sur le plan de la réussite scolaire (en lecture, en mathématiques et en orthographe).
    J’aimerais que vous nous parliez du processus d’éducation. Quel est le taux de fréquentation scolaire des garçons et des filles, mais en particulier des garçons?
     Quant au représentant de la GRC qui a été plus ou moins interrompu, pourriez-vous nous donner davantage de renseignements sur vos initiatives en matière de prévention?
     Je vous remercie de votre question. Je vais m’efforcer d’y répondre aussi rapidement que possible afin de laisser suffisamment de temps à M. Paulson.
     Vous avez essentiellement raison. Les facteurs de risque, les causes de la violence à venir, sont bien connus, que ce soit… vous avez mentionné l’estime de soi. Au sein de la famille, la violence est transmise de génération en génération, et il existe d’autres facteurs de risque connus et d’autres contextes sociaux plus généraux, comme la consommation excessive d’alcool ou d’autres drogues et la toxicomanie, pour n’en nommer que quelques-uns.
     Ce qui est moins connu, ce sont les pratiques efficaces. Quelle est la meilleure façon de prévenir, en particulier chez les jeunes, les facteurs de risque qui les pousseront plus tard à la délinquance, à la criminalité et à la perpétration d’actes de violence à l’égard des femmes? Nous en avons encore beaucoup à apprendre — et pas seulement au Canada — au sujet des méthodes qui réussissent à prévenir…
     Les démarches mentionnées ne sont que quelques exemples, mais nous osons espérer que ces programmes, ces interventions, qui ont connu un certain succès sont bel et bien des exemples qui pourraient être reproduits, adoptés par d’autres provinces, d’autres territoires ou d’autres collectivités, et faire partie intégrante de ce que Ed a appelé plus tôt des approches plus globales. Aucune approche unique ne suffira à régler le problème, mais nous aimerions croire que ces interventions réussies nous permettront de dresser une liste des méthodes qui fonctionnent, et qu’ensuite, nous appuierons ces types de programmes afin de veiller à ce que les femmes soient moins souvent victimes de violence.

  (1640)  

    Merci.
     Monsieur Paulson.
     En ce qui concerne votre question à propos de la prévention, je pense que j’ai déjà parlé de notre formation, qui commence lorsqu’un agent intègre la force policière et qui continue tout au long de sa carrière, mais aussi des efforts qui sont déployés localement par les commandants de nos détachements et par les gens qui les composent. Nous leur fournissons un vaste cadre stratégique ainsi que des documents provenant du quartier général de la GRC.
     Nous offrons des programmes tels que celui du Bouclier autochtone. Il s’agit d’un programme éducatif que les jeunes peuvent suivre au sein de leur collectivité. Nous incitons les commandants des détachements à créer des groupes locaux pour mettre en place un volet éducatif à l’intention des membres de la collectivité et pour y faire participer de larges segments de population locale. Nous essayons d’encourager les travailleurs sociaux et d’autres groupes au sein des collectivités que nous desservons à trouver des solutions préventives qui favorisent surtout la participation des jeunes dès leur enfance.
    Je vous remercie de votre intervention.
     Allez-y, monsieur Desnoyers.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Bienvenue à vous tous.
    Comme tous mes collègues, j'essaie de comprendre comment on coordonne tout ça. On m'a dit la semaine passée, dans une rencontre, que 582 femmes étaient mortes, disparues, tuées.
    Mme Morency, vous avez dit plus tôt à ma collègue, que vous aviez une enquête en cours depuis 2006. On se pose des questions sur ce qu'est cette enquête, ce que vous faites. Ma question va aussi s'adresser à la GRC, parce que vous semblez dire qu'il y a aussi une certaine coordination, un certain partage.
    La GRC participe-t-elle aussi à cette enquête? On veut savoir ce qui arrive à ces femmes. Que fait-on en matière de justice pour tenter de résoudre ce problème.
    D'abord, ce n'est pas une enquête. C'est un groupe de travail des gouvernements fédéral et provinciaux. De plus, on a des partenaires dans tous les secteurs, comme à la GRC et dans d'autres ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux.
    Ce qu'on fait dans ce groupe de travail, c'est une étude. On examine toutes les questions qui se présentent relativement aux cas de femmes disparues.

[Traduction]

    Bien que nous nous efforcions surtout de déterminer si nous pouvons signaler des pratiques exemplaires et, finalement, des facteurs de risque qui pourraient pousser quelqu’un à devenir un tueur en série et à cibler les femmes en particulier, l’éventail est manifestement vaste, car il y a une grande différence entre un cas de personne disparue et une situation où la police et les professionnels de la justice pénale soupçonnent que la personne a été victime d’un tueur en série.

[Français]

    Où en est rendue l'étude actuellement?

[Traduction]

     Nous espérons terminer le rapport et l’étude destinés aux ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux plus tard cette année. Le processus est donc en cours…

[Français]

    À quel moment?

[Traduction]

    Plus tard cette année — c’est tout ce que je peux dire.

[Français]

    La GRC a-t-elle participé à cette étude? Et si oui, comment?
    Moi, je ne suis pas au courant de cette étude, mais ça ne veut pas dire que...
    Une voix: Elle a dit qu'ils étaient partenaires.
     Vous devriez être au courant: 582 femmes mortes, disparues...
    Je suis au courant de cette étude.

[Traduction]

    Je suis renseigné au sujet de l’étude consacrée aux 582 femmes disparues; je l’ai lue. Je comprends tout cela.

[Français]

    Est-ce de cette étude dont vous parlez?
    On vous écoute.

[Traduction]

    D'accord. Je suis au courant de cette étude.
    Concernant les mesures que nous prenons pour les femmes disparues et assassinées, je voulais également vous donner des exemples de nos groupes de travail qui sont à l'oeuvre présentement dans le nord de la Colombie-Britannique, le long de l'autoroute des pleurs, et vous parler de l'étude en cours au Manitoba.
    Je voulais dire que la GRC et les autres services de police travaillent ensemble aux enquêtes et à la recherche des tueurs, des auteurs des crimes. Mais nous n'axons pas nos efforts uniquement sur les démarches d'enquête, car nous faisons cela. Nous travaillons également avec nos collègues de la Justice et d'autres domaines dans toutes les collectivités pour comprendre la nature des crimes sur lesquels nous enquêtons dans les collectivités...

  (1645)  

[Français]

    Vous savez que ces crimes sont commis depuis un certains temps. Il y a encore d'autres crimes qui se produisent actuellement. Il y a des prédateurs qui sont encore là. Vous dites que vous faites une étude pour tenter de comprendre comment ça arrive.
    Ce n'est pas ce que j'ai dit, monsieur.

[Traduction]

    J'ai dit qu'on mesure l'ampleur du problème à deux niveaux, comme l'indique l'étude dont vous avez commencé à parler. Lorsqu'on constate que quelqu'un s'en prend à des gens vulnérables de notre société, on veut tenter de l'arrêter immédiatement, et nous mettons de l'avant un grand nombre de pratiques exemplaires; par exemple, la façon dont nous avons organisé le travail de recherche et le travail judiciaire dans l'affaire Picton. De même, dans d'autres affaires, nous travaillons très fort à nous munir de la technologie de pointe et des moyens techniques judiciaires pour trouver les suspects. Mais, en même temps, nous avons constaté que la collectivité a besoin d'être informée sur les répercussions qu'ont ces types de crimes sur les collectivités, de les connaître et de mieux les comprendre, ce qui peut aider à la prévention.

[Français]

    Merci.
    Monsieur Buller, avez-vous aussi contribué à cette étude? Et si oui, comment?

[Traduction]

    Durant deux ou trois ans — dans un certain nombre de réunions —, j'ai siégé à titre de représentant de Sécurité publique Canada dans le Groupe de travail fédéral-provincial-territorial.

[Français]

    Vous dites que vous travaillez sur cette étude depuis deux ou trois ans?

[Traduction]

    J'ai été...
    Excusez-moi, je dois maintenant vous interrompre et donner la parole à Mme Mathyssen. Je suis désolée.
    Merci, madame la présidente.
    J'estime que je devrais donner la possibilité à chacun de terminer les déclarations qui n'ont pas été terminées, mais je voulais parler un peu de certaines choses que d'autres témoins ont mentionnées.
    Entre autres, nous avons entendu que c'est problématique. Ils estiment que 582 femmes ont disparu ou ont été assassinées, mais il n'y a pas de mesure claire et définitive. Ce pourrait être bien plus, parce qu'il n'existe aucune manière de rassembler des données sur la race des victimes. On a avancé que ce serait un élément important pour vraiment comprendre ce qui se passe dans nos collectivités. Je sais qu'Amnistie Internationale l'a recommandé.
    Est-ce quelque chose qui est possible? Je sais que ce type de collecte de données suscite des réactions, mais serait-ce une mesure positive?
    Nous sommes très prudents en ce qui a trait aux renseignements que nous recueillons sur l'origine ethnique ou la race des gens, par exemple.
    Par contre, au moyen de chiffres, je voulais indiquer au comité que, pas plus tard qu'en mars dernier, 10 477 personnes étaient portées disparues au Canada, parmi lesquelles 5 824 étaient considérées blanches et 4 653, non blanches. C'est le plus loin que nous pouvons aller dans ce type de discussion.
    Nous collectons effectivement certaines données sur l'origine ethnique et la race, en autant qu'elles fassent avancer l'enquête, c'est-à-dire qu'elles nous aident à identifier la victime. C'est une question très délicate. Pour être honnête, nous sommes prudents sur cette question, car nous ne savons pas... Nous savons que cela contribue aux types de travaux en matière de politique publique auxquels vous prenez part présentement, mais ce n'est pas nécessairement utile, et ce n'est pas toujours révélateur pour les mesures d'enquête que nous devons prendre à l'égard de certaines de ces choses.
    D'accord.
    Monsieur Buller, je sais que cela relève plutôt des provinces, mais je voulais vous poser une question au sujet des enfants pris en charge, des enfants qui ont été appréhendés. Il me semble que les conséquences sur les enfants sont très négatives, car on les retire de leur collectivité, de leur famille, et ils ne peuvent plus avoir cette sorte de lien affectif qui renforce une famille et une collectivité; le genre de lien, de resserrement dont vous parlez dans le processus de guérison.
    Vous êtes-vous penché sur cette question? Avez-vous des commentaires ou des recommandations à faire sur le fait que beaucoup d'enfants sont appréhendés et pris en charge?
    Nous n'avons pas examiné cette question en particulier, mais en raison du travail que j'ai effectué dans un certain nombre de collectivités au cours des années, je crois que cette question comporte deux aspects. Tout d'abord, nous savons que le fait de les retirer de leur foyer et de les placer dans une famille non autochtone leur crée des problèmes plus tard dans la vie, lorsqu'ils prennent conscience qu'ils sont Autochtones, mais qu'ils ne vivent pas dans un milieu autochtone ou selon leurs traditions et leur culture.
    Un certain nombre de premières nations et d'organisations claniques ont pris leurs responsabilités en matière de protection de la jeunesse. Elles retirent l'enfant de son foyer, mais tentent autant que possible de le laisser dans sa collectivité ou de l'envoyer dans une autre collectivité où vivent des membres de sa famille. Donc, un enfant ojibway ne sera jamais envoyé dans une collectivité de Pieds-Noirs. On va plutôt chercher un endroit où l'enfant sera en sécurité et dans lequel il sera capable de vivre comme un enfant ojibway.

  (1650)  

    Nous avions un projet comme celui-là dans ma collectivité, mais les fonds ont été coupés et, malheureusement, le projet semble avoir disparu.
    Je vous en remercie.
    La dernière personne à intervenir dans cette deuxième série de questions est Mme Wong.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Et merci beaucoup à vous d'être venus comparaître devant notre comité.
    J'ai une question qui s'adresse au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien en particulier. Je crois comprendre que vous aviez le programme pour la prévention de la violence familiale. J'aimerais simplement entendre vos observations sur la mesure dans laquelle il a donné de bons résultats et sur les attentes que vous avez, et que vous nous disiez si le programme existe toujours.
    Merci.
    En ce qui concerne le programme, plus de 55 millions de dollars sur cinq ans ont été injectés depuis 2007. Ces fonds ont permis l'élaboration d'un plus grand nombre de projets de prévention dans les collectivités. Comme dans la plupart des domaines de la politique sociale, c'est sur l'aspect prévention qu'il nous faut axer nos efforts. Il y a d'autres solutions, mais la priorité, c'est de veiller à ce que le problème ne se présente pas.
    Je crois que le financement pour cinq nouveaux refuges a été l'une des avancées importantes des dernières années. Trois de ces nouveaux refuges ont été construits, et deux devraient ouvrir leurs portes en mai.
    Il est difficile de répondre à votre question sur les résultats. Le fait que les refuges sont utilisés montre qu'on en a besoin. Nous préférerions plutôt travailler à la prévention pour en arriver au point où nous n'en aurions pas besoin, mais ils sont utilisés. Des projets de prévention ont été mis en place, et les deux nouveaux refuges seront mis en service bientôt.
    Merci.
    J'ai une autre question. Je veux que la GRC parle plus longuement des femmes et des filles autochtones disparues, surtout en Colombie-Britannique. Je suis originaire de cette province. Je crois comprendre qu'il y a eu des efforts de collaboration, car comme l'indique un rapport, vous mettez en place un groupe de travail qui examine des affaires de femmes autochtones disparues ou assassinées. Également, en plus d'enquêter activement, vous élaborez des pratiques exemplaires en matière de mise en commun de l'information, de gestion et de coordination des dossiers. Pouvez-vous décrire certaines des pratiques exemplaires qui ont été mises en place jusqu'à maintenant?
    Oui, je peux le faire. Nous parlons de l'enquête sur l'autoroute des pleurs, le long de l'autoroute 16 dans le Nord de la Colombie-Britannique. Je crois que 13 jeunes femmes ont été trouvées sans vie et que cinq sont portées disparues. En fait, j'ai enquêté sur l'une d'entre elles à Smithers lorsque j'étais caporal enquêteur dans le nord de la Colombie-Britannique.
    Chaque enquête commence généralement par un rapport de personne disparue. L'une des pratiques exemplaires que nous avons mises en place, c'est une politique actuelle de la GRC selon laquelle il faut présumer que toute personne disparue a été tuée, jusqu'à ce que les enquêteurs puissent démontrer qu'il y a une autre explication. En ce qui a trait à la mise en commun de l'information et à la comparaison des éléments de preuve recueillis sur les lieux des crimes de toutes ces affaires distinctes, nous avons utilisé des programmes d'ordinateur qui lient ces enquêtes et permettent les comparaisons et la mise en commun des renseignements avec ceux d'autres groupes de travail. Par exemple, il y a l'affaire dans le Lower Mainland en Colombie-Britannique, celle de la femme qui est disparue dans la région de Vancouver. Il y a également le projet Kare en Alberta.
    Cet échange d'information et la comparaison des preuves et ce genre de choses sont les pratiques exemplaires qui ont découlé de cela.

  (1655)  

    Merci.
    Il y a aussi la question de la guérison. Comme je crois comprendre que les fonds pour la guérison et d'autres volets ont été transférés à Santé Canada, je ne sais pas qui d'entre vous serait en mesure de parler de la question de la guérison.
    Je peux vous dire également qu'il n'y a plus de financement pour la Fondation autochtone de guérison dans ce budget. Toutefois, des fonds de l'ordre de 200 millions de dollars pour les prochaines années ont été affectés à Santé Canada, à Affaires indiennes et du Nord Canada et à Service Canada pour qu'ils puissent dispenser des services. Ces services sont en grande partie destinés aux gens qui participent au programme de soutien en santé - résolution. Ce que la fondation appuyait et ce à quoi servent les fonds pour ce qui est du nombre de participants visés par la convention de règlement... c'est la guérison des personnes à la suite de leur passage dans les pensionnats.
    En ce qui concerne les répercussions des pensionnats et la propension à la violence familiale ou le besoin de compétences parentales ou le genre de choses qui amènent les gens vers une autre voie, il y a une fine distinction entre les répercussions des pensionnats et la contribution du processus de guérison. Je n'irais pas jusqu'à dire que c'est multidimensionnel, mais on reconnaît vraiment le besoin de poursuivre le processus de guérison en continuant d'y affecter des fonds.
    Merci beaucoup.
    Nous avons le temps de faire une courte troisième série de questions. Vous disposerez de trois minutes chacun. Nous allons commencer par entendre Mme Neville.
    Merci beaucoup.
    Madame la présidente, je me demande si nous pourrions déposer au comité la liste des projets financés par AINC dans le cadre de son programme de prévention.
    Je crois qu'ils ont accepté de l'envoyer.
    C'est bien. Je suis désolée, je n'avais pas saisi cela.
    Je serai heureuse d'y voir et de communiquer avec le comité.
    Merci.
    Ma question s'adresse à la GRC, et je n'avais pas l'intention de m'engager dans cette voie.
    Je suis allée à Prince George. J'ai rencontré le conseil. J'ai rencontré les familles des femmes autochtones disparues et assassinées, et je suis heureuse que vous participiez aux enquêtes. Des familles ont dit qu'on avait retrouvé les membres de leur famille, mais non les auteurs des crimes.
    Pouvez-vous me dire pourquoi, à votre avis, on ne les a pas retrouvés et pourquoi il a été nécessaire de mettre en place des groupes de travail spéciaux? Pourquoi ne l'a-t-on pas fait tout au long des enquêtes en cours? J'ai également rencontré des membres du groupe de travail au Manitoba.
    Je vais d'abord donner la raison pour laquelle, selon moi, les contrevenants n'ont pas encore été arrêtés. Ce ne sont que des suppositions, mais je pense que lorsque beaucoup de ces crimes sont motivés par le sexe... et, dans beaucoup de ces crimes, la victime et l'auteur ne sont pas reliés; il s'agit alors de ce que nous appelons « des meurtres impliquant des gens qui ne se connaissent pas ». Lorsque c'est le cas, il s'agit probablement d'un des types de dossiers les plus difficiles ou, du moins, les plus compliqués à résoudre. Il faut un travail médico-légal soutenu et un esprit innovateur et audacieux pour arrêter l'individu alors qu'il fait ce qu'il fait. Il s'agit d'un ensemble de faits très compliqué.
    En ce qui concerne la raison pour laquelle il a fallu attendre si longtemps pour qu'un groupe de travail soit créé, je crois...
    Pourquoi était-il nécessaire de créer un groupe de travail pour aborder cet enjeu qui revêt une importance primordiale? Nous commandons une enquête nationale.
    Pourquoi cela n'a-t-il pas été fait au fil des années? C'était 580...
    À bien des égards, cela a été fait.
    Dans le dossier que j'ai abordé, il s'agit du meurtre de Ramona Wilson, à Smithers. Je me souviens...
    C'est d'elle que je parle. J'ai rencontré sa famille.
    Je m'en souviens comme si c'était hier. Elle a été portée disparue durant des mois, et elle a été retrouvée dans un endroit isolé près de l'aéroport. Nous n'avions pratiquement aucune preuve médico-légale pour nous donner une piste.
    C'était très difficile. À cette époque, nous y travaillions avec acharnement. Nous avons demandé l'aide de la section régionale des crimes majeurs, grâce à laquelle nous avons eu accès aux dossiers des autres meurtres: Alishia Germaine, Nicole Hoar — je me souviens des noms de toutes ces femmes, parce que nous traitions le dossier comme une série d'infractions.
    Est-ce que nous nous sommes vus comme un groupe de travail, et nous sommes-nous donné un nom? Non, mais nous y travaillions avec acharnement. Lorsqu'on comprend que l'ampleur de la tâche de chacun de ces dossiers exige la prestation précise de ressources importantes, selon moi, c'est une bonne nouvelle.

  (1700)  

    J'ai rencontré Mme Wilson et sa soeur.
    Votre temps est écoulé.
    D'accord.
    Monsieur Calandra, vous avez la parole, et je répète que vous n'avez que trois minutes, assez pour une courte question et sa réponse.
    Oui. Trois minutes, c'est peu.
    Je n'ai pas le point de vue d'un habitant d'un village isolé du nord. Je vous demanderai donc seulement de me décrire, du point de vue d'un policier, ce à quoi l'une de ces collectivités ressemble. Combien de gens y vivent? Combien de policiers maintiennent l'ordre dans une collectivité comme celle-là? Si je m'y rendais, qu'est-ce que j'y verrais? Quelles sont les perspectives d'emplois? À quoi ressemble l'une de ces collectivités isolées?
    Je vais peut-être prendre 15 secondes pour vous décrire Smithers, puis je demanderai peut-être à mon collègue de vous décrire un autre endroit du nord de la Saskatchewan où il a travaillé.
    Smithers est une ville d'une assez bonne taille, et il s'agit d'une collectivité forestière. Environ 20 policiers font régner l'ordre dans la ville, auxquels s'ajoute le personnel de soutien; ils sont épaulés par l'infrastructure régionale du bureau régional, le bureau de district. La collectivité est charmante, et on y trouve une combinaison de nombreuses attractions touristiques et d'activités forestières.
    Peut-être que Russ pourrait décrire une collectivité du nord de la Saskatchewan.
    C'est une question difficile à répondre, au sens que nos collectivités sont si différentes.
    Tout d'abord, je vais commencer par décrire ma ville natale. Je suis Autochtone et je suis originaire de Lac La Ronge, qui se situe plutôt au centre de la Saskatchewan; avant, c'était là que s'arrêtait la civilisation, bien honnêtement.
    La collectivité est répartie assez également: il y a environ 2 500 non-Autochtones et environ 3 000 Autochtones. Elle est assez moderne, parce que le siège du gouvernement pour le nord de la Saskatchewan s'y trouve. Il y a beaucoup de services offerts autant aux Autochtones qu'aux non-Autochtones.
    Il n'y a pas beaucoup d'industries locales. Les gens obtiennent du travail dans les mines environnantes. Bien entendu, il y a les emplois gouvernementaux et les emplois de soutien connexes. Il y a un peu de tourisme. Il y avait des activités forestières jusqu'à il y a probablement quatre ans. Bref, comme base économique, il n'y a vraiment pas grand-chose. La ville est quasiment autosuffisante en ce qui concerne les services gouvernementaux.
    Si nous regardons légèrement plus au nord de La Ronge, — et ce n'est pas si loin au nord — la collectivité voisine s'appelle Stanley Mission; en fait, elle fait partie de la bande de Lac La Ronge, dont je suis membre. La collectivité compte environ 2 500 Autochtones et probablement 100 non-Autochtones.
    Il n'y a aucune industrie, mais il y a un peu de tourisme. Des gens pratiquent encore un mode de vie traditionnel et subviennent à leurs besoins grâce à la pêche et au piégeage, mais ce nombre diminue aussi très rapidement. Ils profitent eux aussi de l'industrie minière qui est tout près. Donc, de plus en plus de gens y travaillent.
    Les gens qui réussissent et qui reviennent dans la collectivité y sont parvenus grâce à l'éducation. Bon nombre d'enseignants locaux qui sont partis chercher un diplôme d'enseignement à Saskatoon ou à Regina reviennent ici enseigner aux enfants.
    La parole est à Mme Demers.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Madame Morency, depuis 2005, Soeurs par l'esprit fait un travail important sur les disparitions et les meurtres des femmes des Premières nations. Leur avez-vous demandé de participer à votre groupe de travail?

[Traduction]

    Dans le cadre de son travail, le groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur les femmes portées disparues est tenu informé des travaux en cours et des travaux accomplis ailleurs. Donc, les fonctionnaires fédéraux et provinciaux qui y travaillent sont tout à fait au courant du projet Soeurs par l'esprit.

[Français]

    Je vous ai demandé si vous aviez demandé à Soeurs par l'esprit de participer à votre groupe de travail.

[Traduction]

    Non, c'est un groupe de travail gouvernemental. Mais, bien entendu, nous tenons compte des travaux importants accomplis par l'Association des femmes autochtones du Canada.

[Français]

    Madame Quinn, en parlant de The Healing Foundation, vous avez dit que l'argent qui avait été redistribué à la santé allait servir quand même au processus de guérison. Cet argent servira-t-il à The Healing Foundation ou à des individus? Ai-je bien compris si je dis que vous aviez dit que ça allait servir à des individus plutôt qu'à l'entité qui desservait les individus?

  (1705)  

    Merci d'avoir posé la question.
    J'aimerais clarifier mes réponses. Ce que je sais, c'est que les fonds ne sont pas réservés à la fondation parce que cette dernière n'existe plus. Ce sont les fonds

[Traduction]

    ... d'Affaires indiennes et du Nord Canada, de Service Canada et de Santé Canada.
    Selon moi, les fonds sont dirigés vers les personnes, mais je vais devoir m'en assurer pour le comité. J'ai certains renseignements en main, mais je n'ai pas toute l'information sur les fonds, le budget et les prestataires.

[Français]

     Monsieur Paulson, il y a deux jeunes femmes qui sont disparues de Maniwaki, depuis maintenant deux ans. Leur disparition est passée inaperçue, malheureusement. On n'a toujours pas de nouvelles d'elles, non plus. Il semble que personne ne se préoccupe de la situation. C'est très décourageant. Quand c'est un Blanc ou une Blanche qui disparaît, la photo est dans les médias, c'est à la télé pendant des mois. Quand c'est une Amérindienne, une femme des Premières nations — les deux jeunes filles avaient 16 ans et 17 ans —, on ne voit rien; on n'en entend pas parler.

[Traduction]

    Une réponse très brève, s'il vous plaît.
    D'accord.
    C'est le cas dans bien des dossiers de personnes portées disparues. C'est l'aspect tragique.
    Entre autres, nous essayons de coordonner un peu plus les efforts pour rendre l'information disponible aux victimes et aux collectivités, pour qu'elles puissent accéder, à partir d'un emplacement centralisé, à l'information sur le statut de leur dossier ou sur les actions entreprises relativement à leur dossier.
    C'est très frustrant. J'en conviens.
    La dernière intervention, d'une durée de trois minutes, revient à Mme Mathyssen.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais poursuivre dans le même ordre d'idée que Mme Demers, parce que, pour moi, ce n'est pas clair. J'aimerais connaître le rôle que jouera l'AFAC, au moyen de la campagne des Soeurs par l'esprit, dans le groupe de travail et dans les travaux qui seront accomplis dorénavant. J'aimerais savoir ce qu'elles feront et aussi connaître la manière dont leur savoir-faire sera utilisé.
    À moi aussi, la situation de la Fondation de guérison autochtone semble très nébuleuse. Je sais qu'elle n'existe plus. Je sais que vous avez mentionné qu'il reste 200 millions de dollars pour AINC et pour Santé Canada. Je sais ce que la Fondation de guérison fournissait — des services d'aide à la famille, de consultation et d'aide juridique —, mais qu'est-ce que Santé Canada va faire? Précisément, que vont-ils faire? Selon moi, on dirait que c'était les gens de la Fondation de guérison autochtone qui possédait le savoir-faire. On a vraiment l'impression que... qu'il y avait un bref élan de paternalisme, mais on dirait qu'on a pris l'habileté de ceux qui avaient le savoir-faire, la volonté et l'engagement de poursuivre dans cette voie et qu'on l'a jetée, qu'on l'a dispersée.
    Donc, si vous pouviez m'aider à comprendre cela, s'il vous plaît...
    Par rapport à la première question concernant le groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur les femmes portées disparues, il est composé de fonctionnaires du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux qui mettent en commun leur savoir-faire. Ce groupe utilise l'information qui provient de travaux entrepris aux niveaux local, régional et provincial pour se pencher sur les cas de toutes les femmes portées disparues au Canada, y compris, évidemment, les femmes autochtones. En ce qui concerne l'idée que les Soeurs par l'esprit ou que l'AFAC siègent au groupe de travail, la réponse est non, elles n'en font pas partie. Toutefois, cela ne veux pas dire que le groupe de travail ne tient pas compte du travail important qu'ont accompli les Soeurs par l'esprit dans le cadre de leur rapport. Il y a d'autres groupes qui ont été très actifs dans le domaine. Je mentionne aussi, par exemple, le rapport sur les personnes portées disparues publié en 2007 par la Saskatchewan.
    La mission du groupe de travail consiste à étudier la manière dont tous les éléments du système de justice pénale gèrent tous les rapports de personnes portées disparues, à partir du moment où une personne, la famille ou un proche avise la police, les services d'aide aux victimes ou tout autre service social. Existe-t-il une façon d'améliorer la collaboration entre les organismes? Existe-t-il un moyen d'aborder certains aspects que la GRC a qualifiés de pratiques exemplaires?
    Notre intention actuelle est d'essayer de l'aborder au moyen d'une approche systémique et générale pour simplifier la façon dont nous traitons les victimes et dont nous soutenons les familles des victimes tout au long du processus de traitement des dossiers. Sécurité publique a estimé que 100 000 personnes sont portées disparues par année et qu'environ 4 800 le sont toujours après un an. Nous essayons de déterminer les pratiques exemplaires qui nous permettront de séparer les personnes réellement portées disparues des enfants en fugue, des personnes qui fuient pour diverses raisons et qui reviennent ou de celles qui sont retrouvées par leur famille.

  (1710)  

    Merci beaucoup.
    J'aimerais remercier tous les témoins. Je crois que vous avez été très utiles à notre étude.
    Nous allons prendre une pause. Nous allons poursuivre à huis clos. Donc, nous allons prendre une minute pour laisser les gens sortir.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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