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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 033 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 2 décembre 2010

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Bienvenue à la 33e séance du Comité permanent des anciens combattants. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions le stress lié au combat et ses conséquences sur la santé mentale des vétérans et leur famille.
    Bienvenue à nos témoins. Il s'agit de M. Brad White, secrétaire national de la Légion royale canadienne, et de Mme Andrea Siew, officier d'entraide. Nous avons aussi avec nous M. Murray Brown, représentant des relations fonctionnelles, Santé et sécurité au travail, de la Gendarmerie royale du Canada.
    Monsieur White, vous êtes le premier sur la liste. Je vous demanderais de faire votre exposé, suivi de M. Brown. Nous pourrons ensuite passer aux questions.
    Merci, monsieur le président et honorables membres du comité, de votre accueil.
    J'aimerais vous présenter Andrea Siew, qui m'accompagne aujourd'hui. Andrea est l'une des officiers d'entraide à notre bureau d’entraide de la direction nationale. Elle compte 28 ans de service avec les Forces canadiennes et elle est depuis peu commodore à la retraite. Elle s'est jointe à nous dans le but de défendre les intérêts des anciens combattants.
    Au nom de la présidente nationale, Patricia Varga, c'est un honneur d'être parmi vous aujourd'hui pour aborder la question de ce que nous appelons le « stress lié au combat » ou le stress opérationnel. Pour les membres des Forces canadiennes qui ont servi dans des missions opérationnelles de combat partout dans le monde, l'expérience de ces déploiements pourrait bien les suivre toute leur vie. Elle aura aussi des conséquences sur leur famille pendant et après le déploiement.
    Nous nous sommes penchés sur un certain nombre de facteurs qui influent sur la façon dont les membres des Forces canadiennes réagissent au stress lié au combat. Ils figurent dans le document que vous avez devant vous.
    Nous étudions des facteurs de vulnérabilité préexistants, comme l'âge, les antécédents familiaux et l'état émotif.
    Nous examinons aussi l'entraînement et le contexte organisationnel, qui comprend entre autres le nombre de réservistes déployés. Un grand nombre de réservistes font maintenant partie des déploiements durant les opérations. Comme vous pouvez l'imaginer, les pertes encourues durant n'importe quel déploiement vont certainement avoir un effet sur l'état d'esprit qui règne sur l'élément de commandement touché et sur sa structure, mais aussi sur les membres de ce déploiement.
    Il faut bien sûr tenir compte de la nature des stresseurs liés au déploiement, y compris la durée -- parfois, il est beaucoup plus long que les membres des Forces canadiennes l'avait prévu --, le nombre de déploiements additionnels, le nombre de déploiements qu'une personne a connus durant une très courte période, et la complexité et l'exposition de ces déploiements. Certains sont faciles, et d'autres beaucoup moins.
    Il y a aussi l'effet de multiplication des problèmes préexistants de comorbidité, comme la douleur chronique, la dépression et l'alcool et les drogues.
    Un traumatisme affecte directement la façon dont les gens se définissent. Certains, pour différentes raisons, réagissent plus aux traumatismes que d'autres. Les plus à risque sont parfois ceux qui ont un trouble de personnalité multiple ou éclatée. Ils pourraient éprouver des difficultés à s'adapter. Leurs perceptions d'eux-mêmes, mais aussi du monde qui les entoure, pourraient être changeantes.
    Les traumatismes affectent les soldats de différentes façons selon leur sexe. Les soldates exposées à des traumatismes souffriront moins du SSPT et auront moins de problèmes d'abus d'alcool, mais elles seront plus sujettes à souffrir de dépression et de troubles alimentaires à des degrés plus élevés. Leurs traumatismes seront aussi probablement associés à une exposition accrue aux agents stressants sexuels, ce qui nécessitera un type d'intervention complètement différent.
    Les effets traumatisants peuvent être minimisés selon la durée de l'exposition et selon l'environnement, notamment la charge de travail, les objectifs et valeurs de l'organisme, l'appui démontré par les dirigeants et la cohésion du groupe, qui est importante. Aussi, l'exposition aux stresseurs pendant la petite enfance réduit la capacité de résilience future. Plus une personne y est exposée, moins elle court de risques de souffrir plus tard dans sa vie.
    Au cours du déploiement, l'exposition à la guerre peut être vue de différentes façons, selon la menace perçue et les inquiétudes au sujet des relations existantes qui pourraient déjà être fragiles, notamment si le déploiement est de longue durée (12 mois et plus) et si la personne subit de multiples déploiements.
    D'après une recherche effectuée au Royaume-Uni, une personne ne devrait jamais être déployée plus de 12 mois sur une période de 3 ans. Je m'aventurerais à dire que certains des déploiements effectués de nos jours le sont sur une plus courte période. Une fois ce seuil dépassé, le taux de SSPT double.
    Essayez d'imaginer l'état des relations des soldats qui ont servi dans la Première Guerre mondiale et dans la Seconde Guerre mondiale. Ils ont été absents pendant quatre ans et ne sont jamais revenus à la maison pendant cette période.
    La recherche en santé mentale a établi un lien direct avec l'exposition à un traumatisme, les blessures liées au stress opérationnel et les comportements suicidaires. Les personnes touchées se considèrent différentes, mais pas nécessairement d'une façon négative. Toutefois, elles voient le monde qui les entoure de façon négative. Elles développent une relation eux-nous avec les civils, et parfois d'autres organismes au sein des Forces canadiennes, et manifestent souvent une hostilité et un mépris envers ces organismes extérieurs.

  (1535)  

     Bien qu'ils mènent, de leur plein gré, une vie bien remplie, ils doivent vivre avec un « soi » diminué et font preuve de fragilité émotionnelle. Malheureusement, cette fragilité émotionnelle génère des difficultés pour les conjoints et les enfants, qui vivent la mission par l'entremise de notre connectivité moderne grâce à la technologie de l'information. Par exemple, combien de fois avez-vous entendu dire que six soldats de l'OTAN avaient été tués en Afghanistan? Imaginez comment les familles restées au Canada se sentent, alors que leurs proches sont déployés là-bas et qu'elles n'ont aucune idée de ce qu'il s'y passe. Aujourd'hui, les médias nous font vivre les évènements directement dans notre foyer.
    Non seulement les familles vivent-elles la mission par l'entremise de la connectivité de la technologie de l'information, mais elles sont aussi directement touchées par les conséquences du retour des membres de leur famille blessés. En fin de compte, ce sont tous des victimes. Les Forces canadiennes et Anciens Combattants Canada doivent assumer la responsabilité non seulement pour les soldats, mais aussi leur famille. Le statu quo actuel n'est plus une solution.
    On doit aussi reconnaître que de nombreux obstacles empêchent une meilleure santé mentale. Certaines personnes pourraient ne pas être intéressées à subir un traitement. D'autres abandonnent le traitement après une intervention trop brève, et les jeunes hommes sont plus à risque de refuser le traitement ou l'intervention. Les jeunes hommes qui souffrent de problèmes graves sont souvent ceux qui quittent les Forces canadiennes tôt dans leur carrière. Ils sont souvent seuls -- après un divorce par exemple --, et s'engagent dans une spirale dangereuse qui mène à la consommation d'alcool et de drogues et à l'itinérance. Ils touchent le fond. Ils n'ont pas développé la résilience nécessaire pour se sortir de cette situation. Il faut faire disparaître les obstacles à la santé mentale afin qu'ils ne souffrent plus en silence. Ils doivent recevoir l'appui des échelons supérieurs. Des changements commencent d'ailleurs à se manifester.
    Les médecins doivent gagner leur confiance et les obstacles à l'accès doivent être éliminés. On doit fonder le traitement sur la résilience au lieu de se concentrer sur la maladie, ce qui veut dire soigner la personne, ne pas se contenter de la gaver de médicaments. Les médicaments peuvent être une partie nécessaire du traitement, mais ils ne devraient pas en être le seul aspect.
    Malheureusement, les Forces Canadiennes et les spécialistes en santé mentale du ministère des Anciens Combattants ne disposent d'aucun exemple à suivre, dans les Forces, pour planifier leurs interventions. C'est la norme au Royaume-Uni et aux États-Unis. Au Canada, dans les cliniques où l'on traite les traumatismes et les blessures reliés au stress opérationnel, les médecins des Forces canadiennes et du ministère des Anciens Combattants suivent les directives informatives transmises par l'Association des psychiatres du Canada.
    De plus, l'accès à un point de service unique pour les membres des Forces canadiennes et leur famille demeure un objectif irréalisable. Comme les membres des FC qui désirent avoir accès aux services en santé mentale doivent se déclarer, s'identifier et demander le traitement, il faut trouver une approche qui serait plus cohésive.
    Une question qui doit être absolument réglée concerne les services pour les membres des familles qui sont aussi victimes de violence interpersonnelle. On doit améliorer l'appui offert aux familles des réservistes qui reviennent vivre à la maison afin de briser leur sentiment d'isolement. Imaginez comment cela se passe pour eux: ils ont été entraînés et déployés, ils ont connu la cohésion d'un groupe, ils reviennent et vivent une période de relaxation, après quoi ils retournent dans leur foyer, où ils sont isolés.
    On doit aussi mettre sur pied des programmes qui répondent aux besoins des enfants, en gardant à l'esprit que les besoins d'un enfant de cinq ans seront différents lorsqu'il deviendra adolescent.
    Des progrès ont été réalisés, mais il n'en demeure pas moins qu'à notre avis, des défis importants restent à relever. Par exemple, les cliniques de traitement des traumatismes liés au stress opérationnel et les CSTSO ne sont pas toujours bien situés. Fait encore plus important, il existe au Canada un manque criant de recherches sur l'évolution des questions relatives à la santé mentale qui touchent les membres des Forces canadiennes. Nous devons nous appuyer sur de l'information qui nous vient des États-Unis et d'ailleurs.
    Bien que l'on voie l'annonce récente de l'étude des Forces canadiennes sur le cancer et la mortalité d'un bon oeil, il reste que les Forces canadiennes et le ministère des Anciens Combattants doivent mieux coordonner leurs efforts en ce qui a trait à l'analyse de toutes les questions reliées à la santé mentale qui se présentent dans le parcours de vie des membres des Forces canadiennes, des anciens combattants et de leur famille.

  (1540)  

    Je vais retourner en arrière; la légion jouait jadis un rôle important, et elle le fait toujours aujourd'hui. À l'époque où le TSPT n'était pas une chose courante et reconnue dans les collectivités, les membres revenaient de la Première Guerre mondiale, de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée et se rendaient aux filiales de la Légion, où ils se soignaient eux-mêmes. Ils tissaient des liens serrés avec des amis en qui ils avaient confiance et c'est de cette façon qu'ils étaient traités pour le TSPT, ou « traumatisme dû au bombardement » comme on l'appelait dans ce temps-là.
    Nous continuons à travailler pour différents programmes, y compris les programmes de transition pour les sans-abris, comme la maison Cockrell, à Victoria -- un programme très efficace --, et le programme de transition de la Colombie-Britannique et du Yukon pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale. Ce programme est en place depuis 1998 en collaboration avec l'Université de la Colombie-Britannique et l'Université de Victoria. Il s'avère très efficace pour traiter les personnes souffrant du TSPT.
    Le programme Leave the Streets Behind, lancé récemment en partenariat avec le ministère des Anciens Combattants et localisé près de Toronto, en Ontario, est un exemple de programme qui fonctionne bien. Nous avons commencé à exporter ce modèle dans nos autres commandements provinciaux au pays pour qu'ils puissent envisager la possibilité d'établir, dans leurs collectivités, des programmes pour les anciens combattants sans-abris.
    Dans le commandement de l'Alberta et des Territoires du Nord-Ouest, on a mis en place le programme Outward Bound. Vous en avez peut-être entendu parler dans le cadre de l'émission Connect with Mark Kelley, diffusée par la CBC. On y parlait de ce programme pour les personnes souffrant du TSPT. La légion finance la participation de ses membres à ce programme. Il ne leur en coûte rien pour participer.
    En Alberta, et surtout à Edmonton, nous soutenons le programme du centre de ressources pour les familles des militaires de l'Alberta, pour les enfants dont les parents ont subi un traumatisme. Jusqu'à maintenant, nous avons financé huit séries de ce programme à Edmonton.
    Bien que l'on dise souvent que le temps efface tout, il ne faut pas oublier les conséquences du stress opérationnel sur les membres des Forces canadiennes, les anciens combattants et les familles. Le gouvernement du Canada doit offrir son appui aux membres qui ont servi et à leur famille, qui est mise à l'écart bien malgré elle. Le statu quo n'est plus une option; si nous ne commençons pas à être proactifs au lieu de nous contenter de réagir, nous allons régresser.
    Au bas de la page, vous pouvez lire le nom des différents organismes que nous avons consultés. La Légion royale canadienne donne des exposés comme celui d'aujourd'hui, et nous les préparons en collaboration avec différents organismes. Les idées exprimées dans l'exposé d'aujourd'hui sont partagées par les anciens combattants canadiens de la Force terrestre, de la Marine et de la Force aérienne, le Groupe canadien de l'aéronavale, l'Association nationale des anciens combattants autochtones, l'Association royale canadienne de la marine, l'Association de la Force aérienne du Canada, l'Association des anciens de la Gendarmerie royale du Canada et la Company of Master Mariners du Canada.
    Merci d'avoir pris le temps de nous écouter.

  (1545)  

    Merci, monsieur White.
    C'est maintenant au tour de M. Brown.
    Monsieur le président, si vous me le permettez, j'aimerais saluer la présence du député de ma circonscription,M. Stoffer. Je n'ai pas besoin de retourner dans ma région pour dire que je l'ai vu à l'oeuvre; d'ailleurs, la grande majorité d'entre nous savent que Peter fait du bon travail.
    J'aimerais aussi saluer un vieil ami de la famille sur le plan politique, M. Kerr, de Yarmouth, et aussi Mme Duncan, que j'ai rencontrée à quelques reprises. J'ai eu le plaisir de rencontrer Mme Duncan pendant une assemblée publique dans une filiale de la Légion il y a environ deux semaines.
    Cela dit, bonjour, monsieur le président, membres du comité et invités. Je suis honoré d'être ici au nom de mon organisme, bien que je ne parle pas encore au nom du commissaire. Je suis très content d'être ici en même temps que la légion, car je ne pourrais imaginer meilleure association pour mon exposé.
    Je suis sergent d'état-major dans ma 37e année de service avec la Gendarmerie royale du Canada. Dans le cadre de mes fonctions, j'ai été appelé à me déplacer pratiquement dans tout le pays, mais mes principales affectations provinciales se sont déroulées en Nouvelle-Écosse et à l'Île-du-Prince-Édouard. Mon travail au service des Canadiens a débuté là où la plupart des membres de la GRC entament leur carrière, c'est-à-dire dans l'uniforme de l'agent du maintien de l'ordre dans les collectivités à la grandeur du pays.
    Plus tard, ces fonctions ont évolué pour inclure la lutte anti-drogue, les activités d'infiltration et de couverture, la sensibilisation aux drogues dans deux provinces en vertu du mandat de la stratégie nationale antidrogue du gouvernement fédéral, et la collecte de renseignements dans le monde du crime organisé avec une spécialisation dans les bandes de motards criminalisées.
    Durant ces années de service, j'ai également été membre bénévole, pendant plus de 10 ans, de l'équipe des armes tactiques dans les interventions en cas d'urgence. J'ai occupé deux fonctions principales: la première en tant que tireur d'élite et la deuxième en tant que membre d'une équipe d'assaut, c'est-à-dire une des premières personnes à entrer dans un lieu, selon la porte qui est utilisée. Ces fonctions m'ont amené à vivre des expériences qui ont eu des conséquences sur ma vie et à subir des blessures.
    Mes fonctions actuelles à titre de représentant des relations fonctionnelles portent sur le bien-être et la sécurité de nos membres. J'ai assumé de nombreuses responsabilités dans le cadre du programme des représentants des relations fonctionnelles, qui est notre régime du travail non syndicalisé, pour lesquelles j'ai été élu de façon continue par les membres de la Nouvelle-Écosse et de l'Île-du-Prince-Édouard pendant plus de 16 ans. Avec mon partenaire RRF, je représente plus de neuf cents membres de la GRC dans ma division de la Nouvelle-Écosse.
    Je représente aussi des milliers d'autres membres à l'échelle nationale en ma qualité de membre du caucus au sein de notre comité de la santé et de la sécurité au travail. J'assume ce rôle depuis de nombreuses années et je compte continuer à l'assumer jusqu'à ma retraite à titre de défenseur des membres, de leur conjoint et de leur famille, qui continuent de donner sans rien recevoir en retour.
    Pendant le temps que j'ai le privilège de passer avec vous aujourd'hui, on m'a demandé de vous parler du problème du suicide chez nos membres, et des répercussions sur la santé mentale ainsi que des problèmes connexes avec lesquels sont aux prises les membres de la GRC en service ou retraités et dont j'ai été témoin.
    Étant donné que je ne suis pas encore membre de l'Association des anciens de la GRC, je ne m'exprimerai pas officiellement en leur nom. Cependant, on m'a informé que nos intérêts et les leurs se rejoignent. Je suis membre de la GRC, et il y a peu de secrets dans notre famille, car ceux qui sont encore en service et ceux qui ne le sont plus continuent de s'entraider.
    Au début de la semaine, avant même de savoir que j'allais vous adresser la parole aujourd'hui, j'ai écrit plus de 30 lettres, que j'ai envoyées à certains d'entre vous et à de nombreux autres destinataires. Ainsi, cette occasion, qui s'est produite tout à fait par hasard, permet de deux façons à notre organisme de porter à votre attention un certain nombres de points à examiner.
    Je suis venu ici aujourd'hui pour vous dire que je travaille pour un organisme qui ignore à peu près tout des préjudices découlant du stress professionnel, et qui fait moins que le nécessaire dans ce domaine. Nos anciens profitent des services d'Anciens Combattants Canada depuis 1947-1948, soit depuis à peu près 64 ans, mais cet organisme sait peu de choses sur les membres de la GRC en service et retraités.
    La GRC et ACC devraient tous deux avoir honte. Nous sommes des « cousins » éloignés de nos frères et soeurs des Forces canadiennes. Cela étant dit, nous croyons fermement l'un dans l'autre. Nous travaillons conjointement dans diverses fonctions, tant au pays qu'à l'étranger. Nous soutenons leur appel à la justice comme ils le font pour nous.
    Ce manque de compréhension de la part d'ACC était si manifeste qu'il y a plusieurs années, nous avons créé conjointement deux postes pour accroître l'efficacité de la formation et des opérations. Un inspecteur expérimenté de la GRC a été affecté à ACC, tandis qu'un employé chevronné d'ACC est venu se joindre à nous. Ces deux hommes étaient d'excellents choix.

  (1550)  

    Il est triste de dire qu'aujourd'hui, ce programme est pratiquement au point mort. Notre poste d'expérience et d'intervention sur le terrain pour ceux qui travaillent à Anciens Combattants Canada a été remplacé par un membre civil. Je tiens à ce que vous sachiez que cette remarque ne vise pas à insulter nos membres civils — ils sont aussi dévoués que n'importe quel autre employé —, mais le fait est que les membres civils n'ont pas l'expérience opérationnelle nécessaire pour montrer à ACC dans quel monde nous exerçons nos fonctions. Nous avons raté l'occasion de maintenir ce lien, et ACC n'a pas remplacé son représentant.
    Actuellement, il existe des programmes qui relèvent d'Anciens Combattants et auxquels la GRC n'a pas accès, et je dois demander, pourquoi? J'ai déjà posé cette question dans des salles similaires à celle-ci. Deux de ces programmes sont le Programme pour l'autonomie des anciens combattants et le Programme des soins prolongés ainsi que le programme des entrevues de transition, qui est le plus récent. De nombreux intervenants, dont des politiciens, les organisations d'anciens combattants, mes amis qui sont à ma droite, et d'autres associations communautaires au Canada, appuient la mise en oeuvre de ces programmes, mais ne peuvent expliquer leur manque d'efficacité. En 1988 environ, lorsque Anciens Combattants Canada a abandonné le Règlement sur le traitement des anciens combattants, la GRC en a tiré parti, bien que de façon minime, dans le cadre du PAAC. Par la suite, ACC a réécrit le règlement en 1988. ACC a adopté le Règlement sur les soins de santé pour anciens combattants et, bien que la GRC soit l'un des clients d'ACC, même en 1988, on ne l'a pas incluse dans le nouveau document, ou le règlement. Comment cela peut-il se produire?
    Nous nous sommes adressés — moi et bien d'autres — aux deux chambres. Nous nous sommes adressés au Sénat et à la Chambre des communes. Au fil des années, nous avons parlé à bon nombre de leurs membres et nous avons obtenu des lettres de soutien formidables, mais cela n'a toujours rien changé. Les anciens ministres de la Sécurité publique et d'autres politiciens, au pouvoir ou non, ont aidé la GRC a obtenir cette attention. Cependant, il ne s'est rien passé jusqu'à présent et rien ne se profile à l'horizon.
    La raison pour laquelle je dis cela, c'est que j'ai écrit au commissaire de la GRC il y a environ deux ou trois semaines, et je lui ai demandé s'il pouvait m'éclairer. Il m'a dit qu'il s'en allait à l'étranger et qu'il m'appellerait à son retour. Eh bien, il est de retour, mais comme je n'ai pas reçu d'appel téléphonique, je suppose que rien ne se profile à l'horizon. Vous avez peut-être maintenant un avant-goût de notre frustration de « parent pauvre ».
    Nos amis des Forces canadiennes combattent actuellement à l'étranger, et le prix à payer pour les Canadiens est élevé. Comme eux, nous sommes éplorés d'avoir récemment perdu des nôtres à l'étranger, mais ce ne sont pas les premiers que nous perdons. Nos membres et leurs familles sont principalement déployés ici au Canada, et dans les diverses collectivités où nous vivons, travaillons et faisons du bénévolat. Notre zone de combat est chez nous, et le nombre des blessés, des malades et des mourants grossit en silence. Deux de nos victimes les plus récentes ont péri dans un accident de la route dans l'Ouest, et un jeune homme a disparu sur une rivière du Nord. Nous avons cherché son corps pendant près de trois semaines et nous avons eu la chance de le retrouver et de le ramener chez lui.
    Il y a d'autres programmes et services que vous devez connaître en plus des deux dont je vous parle. Dans votre dossier, je vous ai laissé un espace pour prendre des notes à leur sujet si vous le voulez. Il y en a environ 17. Comme je sais que le temps est précieux, je vais en parler brièvement.
    Le premier est l'identité. ACC doit savoir qui nous sommes, ce que nous faisons, et il doit connaître la nature de nos services. C'est triste qu'ils ne remplacent même pas le membre qui s'était joint à nous. Il était utile et il travaillait avec notre haute direction ici à Ottawa pour que les deux puissent se comprendre.
    De plus, nous avons besoin de reconnaissance, qu'on reconnaisse ce que nous représentons, nos services et la nature de nos fonctions. Les pressions sont grandes pour un agent d'infiltration ou une personne qui travaille à des cas d'agressions sexuelles contre des enfants ou à des crimes d'agressions sexuelles commis via Internet. Ce n'est pas comme avoir un métier et réparer, par exemple, de l'équipement. Je ne fais pas ces liens dans le but de diminuer la valeur des militaires, car leur travail est aussi technique que le nôtre.
    Il y a des lacunes en matière de services à Anciens Combattants Canada. Chaque fois que je me rends à un bureau d'ACC au Canada, je vais toujours voir le présentoir de dépliants. Ils ont une publication qui ne s'adresse qu'à la GRC. Vous l'avez devant vous. La GRC a collaboré avec ACC pour créer ce dépliant en 2004 ou en 2006. C'est une copie exacte du dépliant bleu des Forces canadiennes, mis à part le contenu. Le leur est bleu et les photos qu'il contient représentent les Forces canadiennes.
    Il y a eu un tirage depuis. Maintenant, nous avons plus de 40 000 membres de la Gendarmerie qui sont soit en service, soit retraités. Il y a eu un tirage par la suite, et ils en ont fait, je crois, 10 000 exemplaires. Ils n'ont même pas produit assez d'exemplaires pour que chacun de nos membres puissent en obtenir un.

  (1555)  

    Je vais parler d'un autre dépliant, car c'est l'un de ceux que les membres reçoivent si leur demande de pension est acceptée. J'ai seulement la version anglaise; je suis sûr que la version française se trouve dans les dossiers français. C'est pour expliquer l'acceptation ou le rejet de la demande d'une personne. Il ne s'agit pas d'un dépliant d'information que l'on peut trouver dans un présentoir.
    J'ai visité les bureaux d'ACC de tout le pays. À chaque visite, je laisse une note ou je fais une plainte parce que leur présentoir ne contient pas d'information sur la GRC. Nous avons fait en sorte qu'on leur envoie des exemplaires du magazine Gazette et d'autres documents de la GRC, et on trouve enfin des affiches qui représentent la force dans les bureaux.
    Lorsque je travaillais à l'Île-du-Prince-Édouard, je suis allé à certaines de leurs audiences. Il n'y avait aucune plaque de la GRC dans les salles d'audience. On pouvait voir toutes les plaques de régiment dans la salle, mais on ne trouvait rien qui représentait le travail de la GRC. Je ne blâme personne; c'est seulement que je me demande si nous faisons partie de l'équipe ou non. J'ai écrit au commandant de la Division L de l'époque, et le problème a peut-être été réglé. On m'a transféré depuis.
    On doit augmenter le matériel. J'ai assisté à un grand nombre de présentations; ils ont un millier de diapos ou de photos, mais on ne voit jamais la couleur rouge. Il n'y a pas longtemps, à Moncton, j'ai dit « il n'y a rien dans votre présentation sur la GRC; la couleur rouge n'est même pas présente ». La personne m'a répondu, « eh bien, nous ajouterons quelque chose de rouge ». Je dois vous dire que je n'étais pas très impressionné; j'étais le seul membre de la GRC dans la salle avec des gens de la Croix bleue et d'autres personnes.
    Un homme que je ne connaissais pas est venu me voir; il avait un BlackBerry. Il s’est penché vers moi et m’a montré le site Web d'Anciens Combattants. Il y avait une bannière en haut du site où l’on pouvait apercevoir un membre de la Gendarmerie royale et un cheval. Je lui ai dit, « merci beaucoup, monsieur, mais vous me montrez cela seulement parce que j’en parle maintenant ». Lorsqu’on n’est même pas reconnu dans un auditoire lors d’une conférence… Je lui ai dit que je me fichais de ce qu’on y avait inclus, dans la mesure où c’était rouge. C’est le combat que nous menons. Cela n’a pas changé beaucoup, mais un peu.
    En ce qui concerne le PAAC, je ne vais pas en parler beaucoup, mais je me demande s'il a déjà été mentionné dans la lettre de mandat d'un ministre. Au fil des années, on a déjà dû rédiger 30 volumes de mémoires au Cabinet au sujet du PAAC et du Programme de soins prolongés. Que quelqu'un m'explique l’issue de ces discussions, car, vraiment, on doit se demander… Si l'on a rédigé 25 ou 30 mémoires au Cabinet au sujet d'un programme que tout le monde a ailleurs au pays, c’est qu’il y a un manque. Cela s'est peut-être tout simplement perdu dans les organismes parlementaires centraux. Je ne le sais pas, mais nous allons le découvrir.
    Les entrevues de transition sont un programme central d’ACC. Nous n’y avions pas droit jusqu’à ce que nous découvrions qu’il s’agit d’un programme central d’ACC. Nous avons alors lancé un projet pilote à la Division F en Saskatchewan. Cette province a été choisie, car Anciens Combattants Canada subissait des pressions en ce qui a trait aux ressources dans bon nombre d’autres provinces en raison du déploiement en Afghanistan; nous avons donc choisi Regina et la Saskatchewan pour notre projet pilote. Le projet pilote a été une belle réussite. Les commentaires étaient positifs. Ensuite nous nous sommes dit, « que faisons-nous maintenant »? Nous sommes donc allés au Canada atlantique, surtout parce que je faisais partie du conseil qui prenait les décisions. Nous sommes allés au Canada atlantique; le programme fonctionne là-bas maintenant, mais on ne lui accorde pas beaucoup d’importance. Je viens de recevoir une trousse d'information sur la retraite et j'ai vu qu'il y a une lettre, mais le programme est pour l’essentiel bloqué. On l’a fermé.
    Des négociations sont en cours entre la GRC à Ottawa et Anciens Combattants à l’Île-du-Prince-Édouard concernant les ressources et la question de savoir qui paiera pour ce programme, etc. Pendant que cet affrontement a lieu, nous avons des membres partout au Canada qui quittent notre organisme sans savoir à quoi ils ont droit, ni comment faire la transition vers le secteur privé.

  (1600)  

    Je suis un Canadien exclu de la Loi canadienne sur la santé. Je ne le prends pas mal. Le problème, c'est que l'employeur, le commissaire, est maintenant responsable de mes soins de santé. Je fais partie d'un groupe très spécial de gens qui sont exclus de la Loi canadienne sur la santé: tous les détenus sous responsabilité fédérale et tous les nouveaux immigrants au Canada. Ce sont les gens qui font partie de ce groupe. Si je ne reçois pas mes avantages du commissaire, alors je n'ai plus accès à des soins de santé.
    C'est une partie des questions que nous devrons régler lorsqu'il nous faudra négocier avec le commissaire à propos de programmes ou de changements.
    En ce qui concerne les entrevues de transition, ACC vient maintenant voir la GRC pour se faire payer. La question de savoir qui paie ne me préoccupe pas. Ce qui me préoccupe, ce sont les services. La Colombie-Britannique et l'Alberta réclament ce programme à grands cris, mais nous ne pouvons pas l'offrir. Il n'est mis en oeuvre nulle part au Canada, mis à part dans les cinq provinces que je vous ai mentionnées. Je pourrais vous donner un certain nombre de recommandations qu'Anciens Combattants Canada a faites le 20 janvier 2003 sur les exigences et les besoins quant aux entrevues de transition. Nous voilà bloqué, avec seulement cinq provinces.
    J'ai parlé des postes de liaison. Je vais vous faire une recommandation, avant qu'on m'interrompe je l'espère, et je n'en dirai pas davantage sur le sujet.
    Un autre élément, c'est que les membres ont peur de faire une déclaration volontaire. Cela vous surprend peut-être étant donné que ces gens portent des armes. De quoi avons-nous peur? Il existe un certain nombre de raisons pour lesquelles les membres quittent la Force. Les délais et les règles ont changé depuis que la Force a changé son programme de soins de santé pour un modèle de santé au travail, alors que nous avions un modèle basé en clinique qui nous permettait de consulter nos médecins et de recevoir des soins de santé. Les membres vous diront certaines choses — et je crois que Mme Duncan a pu en être témoin —, dont entre autres ce qui suit:
    « Si je révèle que je souffre de TSPT, de dépression ou d'autres maladies mentales, cela nuira à ma carrière ou à l'obtention d'une promotion ». C'est ce que l'on dit aujourd'hui, en 2010, à la Gendarmerie, et la plupart d'entre nous sont diplômés de l'université.
    « Les membres de mon unité pourraient avoir une mauvaise opinion de moi et avoir moins confiance en moi. »
    « Les dirigeants de l'unité pourraient me traiter différemment. »
    Les dirigeants blâment le membre pour son problème: « il nous manque maintenant une personne ».
    Comme on considère les membres faibles, ils se taisent. Je sais que vous avez déjà entendu cela.
    « Ce serait trop gênant pour ma famille. » Vous savez, l'une des caractéristiques de mon organisme, c'est que nous ne tenions jamais beaucoup compte de nos familles jusqu'à il y a quelques années.
    J'espère que ce que je vais dire maintenant ne figurera pas dans le procès-verbal. Je vous demande que ce ne soit pas le cas. Je suis des traitements depuis plus de trois ans pour un trouble de stress post-traumatique et une dépression. Je sais ce que c'est, et je peux le voir quand des gens souffrent de ce trouble, et j'ai parlé à beaucoup de gens qui en ont souffert, mais si vous demandez à la GRC de vous dire le nombre de membres qui en souffrent, elle ne peut pas le faire. Elle n'a pas ces renseignements.
    « Je ne fais pas confiance à la GRC. Je ne fais pas confiance aux services de santé de la GRC. Je vais régler cela tout seul. » Eh bien, j'ai essayé, mais cela n'a pas fonctionné. Je ne me suis pas effondré, mais je savais que j'avais des problèmes. Comme j'étais assez près d'un médecin de famille, je suis allé le consulter, et je vais mieux depuis ce temps.
    Ce n'est là qu'une partie des raisons pour lesquelles vous devez comprendre que ce n'est pas comme entrer dans un édifice d'IBM et de dire « je ne me sens pas bien aujourd'hui ». À cela s'ajoute le fait que les hommes et les femmes ne prennent pas de congé de maladie. Ils ne le font pas, car ils travaillent dans des unités de deux, trois ou quatre personnes. S'ils sont absents, il manque une personne dans l'unité et il n'y a pas de remplaçant. Notre organisme est le seul au Canada qui ne croit pas que son personnel féminin devrait se reproduire, car rien n'est mis en place pour remplacer les gens qui ne sont pas en fonction. Qui comble le vide? Ce sont les personnes qui restent.
    Voilà donc pourquoi les gens ont peur de faire une déclaration volontaire.
    Il y a ensuite la Loi sur la protection des renseignements personnels. Je n'ai pas à vous dire quoi que ce soit sur ACC et cette loi. Je vais vous épargner cette torture, et je ne veux pas dire qu'il y a eu des violations. Je ne le saurai pas avant d'avoir obtenu une réponse à ma demande de renseignements personnels.
    Lorsqu'on regarde la GRC présentement, si je devais présenter une demande, Anciens Combattants Canada partage ce succès — si on veut le dire ainsi — avec les unités de services de santé de la GRC partout au Canada. Si on reconnaît mon incapacité, ils envoient une lettre au personnel des services de santé. Le personnel des services de santé va dans la salle de dossiers, sort mon dossier médical et compare mon état de santé au profil médical. Ensuite, soit on change mon profil médical, soit on n'y touche pas. Je vais en parler dans une minute.

  (1605)  

    Qu'en est-il de la protection des renseignements personnels? Je sais que c'est une question d'argent — tout est une question d'argent —, mais pourquoi n'envoie-t-on pas la lettre au secteur de l'administration de la Chambre qui s'occupe des finances lorsque vient le temps de s'occuper des crédits? Dites-moi pourquoi deux organismes se communiquent ces renseignements?
    Monsieur Brown, si vous pouviez terminer, il se peut que nous posions des questions sur ce que vous dites, et vous auriez du temps pour y répondre.
    Je vous remercie beaucoup. Comme je suis allé plus loin que ce que je croyais possible de faire, je vous en remercie.
    D'accord.
    Il y a deux ou trois autres éléments. J'ai neuf recommandations à faire, et vous les avez devant vous.
    Je recommande que le PAAC et le PSP deviennent une priorité immédiate du gouvernement et que l'on adopte des lois pertinentes ou que l'on modifie les lois en vigueur pour permettre aux membres handicapés de la GRC de recevoir, au besoin, des soins à domicile; que l'on fournisse une orientation aux cadres de direction d'Anciens Combattants Canada et de la GRC pour la mise en oeuvre immédiate du Programme des entrevues de transition; que le comité exerce tous les pouvoirs qui lui ont été conférés pour que les deux postes de liaison entre la GRC et ACC soient rétablis; que les documents de communication et de sensibilisation fassent état du rôle de la GRC à titre de client d'ACC; que la GRC mette en oeuvre sans délai un programme complet pour faire face à l'augmentation des maladies causées par le stress professionnel; que l'on ordonne aux cadres de direction de la GRC de séparer les dépenses nécessaires de soins de santé du budget général et que ces allocations budgétaires générales soient réservées pour protéger les fonds versés dans le budget de fonctionnement pour la santé.
    Ainsi, ils ne pourront pas arnaquer en prenant 5 p. 100 ici et là pour se conformer aux compressions exigées par le gouvernement, ou quoi que ce soit. On doit protéger ces fonds.
    De plus, je crois que les niveaux des ressources pour la prestation de soins de santé, tant à ACC qu'à la GRC sont insuffisants. Je vais parler certainement pour mon propre organisme. On a procédé à un examen des politiques actuelles au sein d'ACC qui restreignent ou empêchent un membre retraité de la GRC d'avoir accès à un lit d'hôpital d'Anciens Combattants Canada ou à un lit dans un établissement qu'ACC gère dans le secteur privé. Pourquoi en était-il ainsi lorsque nous avons servi à l'étranger? Nous nous blessons dans le cadre de nos fonctions de la même façon que n'importe quelle autre personne.
    Je vais vous donner ma dernière recommandation, et ensuite, vous en aurez fini avec moi: il faut que le poste d'ombudsman à ACC soit examiné. Nous croyons que le mandat doit être élargi pour donner un peu plus de souplesse à cette personne afin qu'elle puisse parler au nom de la Gendarmerie royale du Canada également.
    Je vous remercie de votre patience et de m'avoir accordé plus de temps de parole.
    Merci.
    Mme Zarac posera la première question. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Brown, lorsque vous avez commencé, vous avez dit que nous changions de couleur. Je crois que nous avons fait plus que cela. Nous sommes passés à un tout autre monde: de la Légion, qui semble connaître le problème et qui a des statistiques, à un organisme qui ne sait pas exactement où il se situe. Vous nous avez amenés dans un monde complètement différent.
    Monsieur White, vous avez dit que vous aviez fait une analyse différenciée selon les sexes parce qu'il y a des problèmes différents. Avez-vous les statistiques là-dessus?
    Merci de l'occasion que vous me donnez, et j'aimerais remercier Murray. J'ai intérêt à écouter ce que la GRC dit, car j'ai deux fils qui sont à la GRC. J'aime voir les progrès qu'ils font et comment ils feront face à ces questions qui sont liées à mon expérience militaire.
    Bon nombre des renseignements et des statistiques que nous avons obtenus sur ces questions sont tirés du Rapport du Comité d'experts des Forces canadiennes sur la prévention du suicide, qui a été publié en février 2010. On y indique que le suicide au sein des forces armées a une signification particulière. On y compare les hommes et les femmes.
    C'est vraiment une étude initiale, et nous y avons pris nos statistiques.

  (1610)  

    Je suis heureuse que vous en parliez. Vous avez également parlé de perception, et je crois que si nous arrivons à trouver de quelle façon les hommes et les femmes réagissent au stress, nous pourrons peut-être déterminer exactement quels traitements il faut leur donner.
    Si vous me le permettez, je vais laisser Andrea vous en parler. Elle a organisé un groupe de consultation en quelque sorte.
    L'un des aspects bien connu, c'est le manque de recherches, surtout sur les problèmes de santé mentale. Il n'existe pas d'institut national de recherches pour établir des priorités, suivre la recherche et déterminer les programmes qui sont essentiels. Il y a une lacune importante pour ce qui est de la question du genre et des répercussions que le déploiement opérationnel a sur les femmes dans les Forces canadiennes. Très peu de recherches ont été effectuées à cet égard.
    Nous avons assisté récemment à deux séminaires de recherche parrainés par des établissements d'enseignement, tant internationaux que nationaux, et dans une partie de la recherche, on a relevé des différences entre les sexes. C'est très limité. L'un des documents, qui a été préparé par Ryerson, montre que les femmes qui sont dans des opérations de déploiement ont 2,2 p. 100 plus de risques que les hommes de souffrir de TSPT, mais on se base sur des renseignements de 2002. Depuis 10 ans, des femmes sont déployées en Afghanistan et font partie d'autres déploiements opérationnels, et il n'existe aucune recherche à cet égard.
    Il est important de faire ce type de recherches pour s'assurer qu'on répond aux besoins uniques des femmes. Les processus de sélection et réintégration, avant et après le déploiement, sont-ils adaptés aux besoins des deux sexes? Les gens ont-ils accès à des ressources adéquates lorsqu'ils reviennent chez eux?
    Si vous deviez préparer un budget, est-ce que vous consacreriez plus de fonds à la recherche ou au système de collecte de données?
    C'est une bonne question. Nous ne faisons pas de recherches au Canada. Nous devons nous en remettre à celles qui se font à l'étranger par d'autres militaires et d'autres gouvernements. J'aimerais que nous menions des recherches. Il s'agit de nos membres. Il nous faut déterminer leurs besoins, ce que nous n'avons pas encore fait. Nous pouvons nous servir des recherches effectuées dans d'autres pays, mais il nous faut une base de données sur nos gens si nous voulons vraiment évaluer nos programmes.
    Est-ce une recommandation que vous ajouteriez à celles de M. Brown?
    Je crois que oui, mais nous ne pouvons pas oublier la question des traitements dans tout cela. Comme nous faisons face à ce problème maintenant, il y a deux voies que nous devons suivre ensemble. Ces voies doivent être parallèles pour faire en sorte que les recherches appuient les programmes.
    Il semble que l'un des grands problèmes, c'est qu'il y a une coupure qui sépare tout le monde. Monsieur Brown, j'aime votre recommandation qui consiste à unir la GRC et ACC. J'ajouterais la Légion et tous les gens liés aux anciens combattants. Ils devraient se réunir avec le gouvernement pour déterminer ce qu'il faut faire. Je crois qu'il y a une coupure, et c'est ce que nous entendons. Lorsqu'un soldat quitte les Forces, nous le perdons et il n'obtient pas les soins qu'il faut. S'il vient demander des soins, on l'envoie chez un médecin régulier, un médecin de famille.
    Dans les deux organismes, l'une de mes principale préoccupations, c'est le passage du statut de membre actif des Forces canadiennes, à l'autre côté, le côté sombre.
    Qu'est-ce que le côté sombre? Pour bon nombre de membres des Forces canadiennes, c'est la vie civile. C'est traumatisant pour les gens. Si en plus, ils souffrent de problèmes de santé mentale, cela aggrave les facteurs stressants qu'ils doivent affronter.
    Nous devons nous assurer que la transition entre la période où ils sont en service actif, qu'ils soient militaires ou membres de la GRC, et la période où ils sont clients d'ACC se fasse en douceur. C'est une période critique dans leur vie et dans celle de leurs proches. Le stress qu'ils vivent se répercutera sur leur famille, et tout le monde passera par une période de transition critique.

  (1615)  

    Vous avez parlé de l'isolement et vous avez expliqué comment la Légion avait fourni de l'aide durant la Seconde Guerre mondiale. C'était comme de l'auto-médication.
    Que pouvons-nous faire pour ramener ces gens à la Légion? Avez-vous pensé à ce que la Légion pouvait faire?
    Je n'irais pas jusqu'à affirmer qu'il faut les ramener à la Légion. Ce que je veux dire, c'est qu'on doit utiliser les ressources. Le ministère des Anciens Combattants doit utiliser les ressources.
    Nous le faisons déjà. Nous administrons un programme appelé le Programme de moniteur de soins de longue durée. Nous avons signé un contrat avec le ministère des Anciens Combattants. Nos membres, qui sont répartis un peu partout au pays, se rendent dans des centres de soins de longue durée pour vérifier la satisfaction des clients. Ils rédigent des rapports qu'ils présentent ensuite au ministère des Anciens Combattants. Il s'agit d'un programme très efficace. Nous avons réglé beaucoup de problèmes.
    Ce que nous devons faire, c'est peut-être prendre appui sur ce programme et l'utiliser comme un outil de sensibilisation. La Légion, je dirais — plus que toute autre organisation de son genre au pays — est dotée d'une énorme infrastructure à la grandeur du pays, d'est en ouest et du nord au sud. Qu'on s'appuie sur cette infrastructure — c'est d'ailleurs ce que nous allons proposer au ministère des Anciens Combattants — en vue de s'en servir comme mécanisme de sensibilisation.
    Les réservistes et les blessés retournent dans leurs collectivités d'origine. Laissez-nous utiliser la formation que nous avons dans le cadre du Programme de moniteur de soins de longue durée. En cette ère de protection des renseignements personnels — comme Murray l'a dit, il s'agit d'un élément primordial à prendre en considération —, nos moniteurs de soins de longue durée ont la permission d'accéder aux renseignements dont ils ont besoin pour rendre visite aux gens. Nous avons surmonté cet obstacle.
    Utilisez un programme semblable et faites une transition vers un programme de sensibilisation. Parlez aux gens dans les réserves et aux blessés qui éprouvent probablement des difficultés. Nous sommes là pour eux. Nous pouvons y arriver. La transition se fait très facilement. Nous sommes là pour les aider.
    Merci.
    Nous passons à M. André.

[Français]

    Bonjour, monsieur White et monsieur Brown.
    Il est certain que les personnes aux prises avec des problèmes de stress post-traumatique font face à un manque de ressources et de services. J'ai l'impression qu'au départ, il s'agit de toute la question du dépistage. On parle ici des ressources et du temps que la GRC et les Forces canadiennes devraient consacrer au dépistage des personnes souffrant de stress post-traumatique ou de problèmes qui y sont reliés ainsi qu'à une prestation réelle de services. Dans le cas où les personnes ne seraient pas ciblées, il faudrait toujours qu'un suivi soit assuré auprès des individus ayant vécu des situations traumatisantes pouvant générer ultérieurement un problème de stress post-traumatique.
    Corrigez-moi si je me trompe, mais j'ai l'impression que si le ministère des Anciens Combattants reconnaît qu'une personne est aux prises avec le syndrome de stress post-traumatique, il remet la chose en question, il en doute, parce que ça entraîne des coûts. Quand cette personne s'adresse à des intervenants en santé mentale, à des fonctionnaires, elle doit se battre pour prouver qu'elle souffre réellement de ce problème. Elle doit donc non seulement faire face à un tabou, mais également se battre contre un système à l'intérieur duquel on hésite à reconnaître le problème à cause des coûts qu'il va engendrer.
    Je vais vous parler d'une situation que je connais et établir un parallèle. Lorsqu'une personne aux prises avec un problème de santé mentale se présente en vue de consulter un psychologue ou un intervenant du réseau des CLSC, on la voit à l'intérieur d'un délai qui, dans bien des cas, est de 48 heures, de façon à au moins répondre à la demande de cette personne. Il va sans dire que ce n'est pas le cas à Anciens Combattants Canada ou à la GRC. La différence, par contre, est que les organismes qui dispensent des services n'ont pas à déterminer si cette personne a droit à une prime d'invalidité.
     À plusieurs reprises dans le cadre de ce comité, des individus nous ont parlé de problèmes de santé mentale, de stress post-traumatique, qui les avaient amenés vers le suicide. Certaines personnes disent qu'il n'y a pas de lien. Pour ma part, je suis convaincu qu'il y en a un. Ces individus n'ont jamais obtenu de services. Il y a des zones grises. J'aimerais que vous me parliez de celles-ci et que vous commentiez ce que je viens de vous dire.

  (1620)  

    Excusez-moi, mais je vais répondre en anglais. J'aurai plus de facilité à m'exprimer de cette façon.

[Traduction]

    Vous avez soulevé deux ou trois véritables problèmes. En ce qui concerne la déclaration volontaire, il est facile pour une personne qui n'est pas dans l'armée ou la GRC de se rendre à une clinique locale ou d'aller consulter son médecin local pour dire qu'elle a un problème. Or, on parle ici de la culture militaire et de la culture de la GRC, un milieu composé principalement de jeunes hommes. J'ai moi-même deux fils, un de 24 ans et l'autres de 25. Pensez-vous qu'ils viendront me parler d'un problème qu'ils ont au travail? Je peux le savoir intuitivement, si c'est le cas, mais pensez-vous qu'ils vont venir me le dire? C'est une question de culture, de mentalité.

[Français]

    J'en suis convaincu.

[Traduction]

    Aujourd'hui, nous traitons le TSPT comme nous ne l'avons jamais fait auparavant. On commence à l’accepter. Les hauts dirigeants commencent à s'en occuper, ce qu'ils n'ont jamais fait avant. Nous en sommes vraiment aux premières étapes d'un processus en vue d'avoir un impact.
    Je vais aborder une des autres observations que vous venez de faire. Y a-t-il des ressources? Y a-t-il des systèmes? Non, il n'y en a pas. Nous sommes passés maîtres dans l’art de traiter des blessures physiques, parce que nous savons comment le faire — c’est quelque chose qu’on peut voir, toucher, guérir —, mais dans le cas de blessures psychologiques, c'est quelque chose qu'on ne peut ni voir ni sentir ni toucher; comment serait-ce possible? On doit se fier à ce que nous dit la personne; si elle ne dit rien, alors on est confronté à un problème réel parce qu'on ne sait pas ce que ressent la personne.
    Je pense toujours au cas du jeune homme des Cantons de l'Est qui avait été blessé par une bombe artisanale. Je ne suis pas sûr s'il était réserviste ou membre des forces régulières, mais il est rentré chez lui pour convalescence. Si je me souviens bien, pendant qu’il était sur le champ de bataille, le jeune homme avait essentiellement tenté de se donner la mort, et ses camarades l'avaient arrêté. Il a fini par rentrer chez lui. Combien de tentatives a-t-il faites pour finalement réussir? Beaucoup de voyants rouges auraient dû s'allumer pour qu'on prenne soin de cet individu, n'est-ce pas? Nous n’avons rien fait. Il est rentré chez lui. Était-il isolé? Oui. Nous n'avons pas pu sauver une personne. Nous avons vraiment manqué notre coup.
    Une foule d'éléments entrent en jeu, mais c'est d'abord une question de culture. Il s'agit d'un sujet tout nouveau. Disposons-nous des ressources à l'heure actuelle? Non, nous n'avons pas les ressources nécessaires pour nous occuper de tout. Ce n'est que le début de nos efforts pour essayer d’obtenir ces ressources, parce qu’il nous faut d’abord cerner les besoins et les comprendre. Ce n’est qu’ensuite que nous pourrons peut-être commencer à envisager de bons programmes.
    J'ai parlé trop longtemps.
    Monsieur Brown, avez-vous quelque chose à dire?
    Je n'ai que quelques observations rapides à faire. Premièrement, je voudrais vous renvoyer à un document qui a été remis à chacun de vous à la Chambre. Il s'agit d'un livre indispensable pour quiconque étudie le stress post-traumatique.
    Cette publication est basée sur des faits réels. Ce n'est pas dirigée par des gestionnaires. Ce que vous voyez ici, ce sont des membres qui donnent au lecteur un aperçu de leur vie personnelle, dans le but d'essayer d'aider nos gens.
    Brad a soulevé un point intéressant: les caractéristiques culturelles. Je viens d'une organisation qui est traditionnellement très silencieuse, très fermée sur soi et très inabordable, et la cruauté est aussi réelle aujourd'hui. Je ne le dis pas de façon négative, mais il s'agit d'un emploi où il y a beaucoup de tristesse, même si nous sommes fiers de la qualité de notre travail.
    La première fois que j'ai su que j'étais en difficulté et que j’ai commencé des traitements, la première personne à qui j'ai choisi d’en parler, c'était mon frère, dans un véhicule. Nous revenions d'une autre région de la province. Durant la discussion, je me suis vite rendu compte que ce n'était pas le moment propice pour moi de m'ouvrir. Mon frère est un agent de police à cheval à la retraite.
    Je peux vous donner des milliers d'exemples semblables. Nous ne comprenons pas. Il n'y a pas d'éducation, pas de recherche, pas de soins proactifs. Il s'agit d'un domaine qui en est encore à ses premiers balbutiements, même si nous sommes au courant du problème depuis des années. Nous l'avons désigné sous d’autres noms, comme l'épuisement professionnel, mais nous arrivons devant quelque chose d'aussi gros qu'un incendie de forêt. Nous devons ouvrir une piste et revenir en arrière.
    À certains égards, nous sommes désavantagés par rapport au militaire, parce que le militaire a sa propre infrastructure médicale. Nous l'avions nous aussi, et les médecins savaient ce à quoi étaient exposés les membres, mais maintenant que nous avons fait la transition d'un modèle clinique à un modèle professionnel, la dernière chose qu'un membre de la Gendarmerie royale fera de nos jours, c'est aller voir un médecin de la GRC. C'est hors de question. Si vous le faites, on va examiner votre dossier personnel et commencer à écrire des notes qui paraîtront dans vos profils; cela causera des limitations et des restrictions qui entraveront probablement votre avancement professionnel au niveau latéral et vertical. Si ces renseignements sont divulgués, alors vous ferez mieux de dire adieu à la Gendarmerie royale. Toutefois, cela ne signifie pas qu'on doive négliger ce qui se passe ou ne pas s'occuper du problème dès le début.

  (1625)  

    Merci.
    C'est au tour de M. Stoffer. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président et merci à vous trois d'être ici aujourd'hui.
    Une chose que Murray a omis de nous dire, c'est qu'il va prendre sa retraite à la fin de l'année. Murray, au nom du comité, je vous remercie pour votre excellent service et l'aide que vous avez offerte à tout le monde dans l'ensemble du pays, ainsi que pour ma formation auprès de la GRC. C'était très instructif. Lorsque cette revue a vu le jour pour la première fois, vous nous avez présenté l'histoire de Paul Smith. C'était vraiment troublant.
    Vous avez raison, Brad. Il y a plus d'une personne que nous n'avons pas pu sauver. Nous avons manqué notre coup à quelques reprises.
    Je me souviens très bien de la division de la Légion où j'avais l'habitude d'aller: la filiale 5 à Richmond, en Colombie-Britannique. Chaque vendredi et samedi, on organisait une loterie. Les anciens combattants de la Première et de la Seconde Guerres mondiales venaient s'exprimer là-bas; cela leur suffisait pendant une semaine avant de revenir et refaire le plein de camaraderie. La Légion a joué un rôle incroyable pour atténuer beaucoup de souffrances. Même si vous ne l'avez peut-être pas fait dans l'ensemble de l'organisation, vous leur avez offert du réconfort en leur donnant accès à des établissements partout au pays, où ils pouvaient se rendre et se sentir en sécurité.
    Ma collègue Mme Duncan pose cette question de temps en temps, alors je vais m'y essayer, moi aussi. Si vous pouviez faire trois choses maintenant pour améliorer la vie des gens que vous représentez, que feriez-vous?
    Murray, vous avez parlé de soins de transition. Je trouve plutôt troublant que ces services ne soient pas encore offerts. Je suis sûr que c'est un sujet que notre comité examinera sérieusement, mais si chacun de vous avait maintenant trois recommandations à faire au comité pour qu'il les inclue dans son rapport, de quoi s'agirait-il?
    Je pourrais probablement allonger la liste, mais je dirais qu'il faut avant tout de l'intérêt. Je ne veux pas être cruel, mais parfois ceux qui sont au pouvoir ne veulent pas savoir ces choses; voilà pourquoi le deuxième élément, c'est la connaissance. Le troisième, c'est le processus.
    D'accord, merci.
    Pour ma part, je dirais l'accès à des soins de grande qualité et en temps opportun pour les réservistes et les membres des forces régulières, où qu'ils soient au Canada. Des soins réactifs ne suffisent pas; il faut aussi des soins proactifs, qui permettent de rejoindre les gens, peu importe leur lieu de résidence. Les soins doivent être uniformes dans l'ensemble du pays.
    Je pense que la participation et la longévité sont très importantes. Il y a maintenant des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale qui commencent à dire qu'ils ont un problème. Un programme ne peut exister à court terme; il faut couvrir toute la durée de vie des gens visés. On ne peut pas se contenter de donner aux gens des ressources seulement une fois par année et leur dire de les utiliser tout au long de l'année. On ne peut pas leur dire qu'il n'y aura plus rien après cinq ans.
    C'est un problème auquel nous serons confrontés maintenant. Combien de personnes avons-nous déployées en Afghanistan ces 10 dernières années? Nous allons faire face à ces questions tout au long de la vie des militaires. Je parle du point de vue des Forces canadiennes, mais je sais que du point de vue de la GRC, les membres subissent du stress tous les jours, à chaque instant, dans les collectivités canadiennes partout au Canada. Il faut s'attaquer à ces problèmes. Murray compte 37 ans de service. Pensez à ces 37 ans et demandez-vous comment nous allons prendre soin de ces gens pour le reste de leurs jours. On ne peut donc pas avoir un programme à court terme.

  (1630)  

    En conclusion, je tiens à vous remercier d'avoir fait part de cette information à vos autres organisations d'anciens combattants dans l'ensemble du pays. Brad, nous nous en sommes déjà parlé en privé, mais la collaboration et l'intégration des discussions avec d'autres groupes d'anciens combattants — et peut-être même la GRC — en vue d'accroître le dialogue ne ferait qu'améliorer la situation pour tout le monde. Je remercie la Légion d'avoir fait cela.
    Je vous en suis reconnaissant. Merci.
    Allez-y, monsieur Kerr.
    Merci d'être des nôtres. Je suis heureux de vous rencontrer.
    Je vais m'attarder davantage sur les observations de Murrry parce que j'aimerais soulever deux ou trois points. Je tiens à remercier Brad et Andrea. Je vous signale que le dialogue est excellent, et nous savons que des progrès sont réalisés à mesure que nous nous apprêtons à faire face à ces problèmes. C'est ce que nous ont dit de nombreuses sources. Nous avons beaucoup de chemin à faire, mais c'est vrai dans bien des cas.
    Tout d'abord, il y a maintenant de la sensibilisation. On parle davantage du stigmate. Toutes ces questions sont abordées de façon beaucoup plus publique qu'il y a cinq ou dix ans. J'ai l'impression que la collaboration dont vous parlez est essentielle. Je crois que nous devons emprunter cette voie. Selon moi, nous reconnaissons un certain mouvement. Nous sommes d'accord, du moins en général, pour dire que nous faisons collectivement des progrès.
    C'est ce que je pense, moi aussi. Je crois que nous nous engageons sur cette voie. C'est, à mon avis, très important. Notre organisation essaie certainement de rejoindre toutes les collectivités d'anciens combattants et d'accueillir différents groupes — le groupe de Murray et de Tim Hoban ainsi que l'Association des anciens de la GRC. Nous tenons une réunion annuelle pour rassembler tout le monde. Nous parlons de ces questions et des prochaines étapes.
    Il y a aussi la consultation. Nous l'appelons le groupe de consultation. La consultation avec le gouvernement et le ministère des Anciens Combattants ainsi que le comité — avec vous tous — est essentielle pour que nous puissions vous expliquer où nous en sommes et pour que vous puissiez nous dire quelle direction prendre, ou peu importe. Il s'agit d'une consultation essentielle que nous devons poursuivre. Nous ne pouvons pas nous en débarrasser. Nous en avons besoin.
    À ce stade-ci, le ministère des Anciens Combattants travaille à réorganiser son processus consultatif, et il va créer une organisation ou un groupe de plus grande taille pour s'occuper des consultations. Il ne s'agit pas seulement du Groupe consultatif sur la nouvelle Charte des anciens combattants; le ministère va fusionner le Conseil consultatif de gérontologie et le Groupe consultatif de la nouvelle Charte des anciens combattants. Nous attendons toujours de voir ce que tout cela va donner.
    Excellent. Je suis certain que nous allons en reparler abondamment.
    La raison pour laquelle je veux laisser à Murray la plus grande partie du temps, c'est que bon nombre des problèmes que vous soulevez sont directement liés à la culture, je le répète. Beaucoup de vos problèmes viennent de l'intérieur de l'organisation. Je comprends qu'il y a une problématique avec Anciens Combattants, comme nous en avons parlé. J'aimerais que vous nous en parliez un peu plus, parce qu'il sera sûrement très instructif pour nous tous de comprendre que c'est une toute nouvelle culture qui doit s'installer à la GRC pour combler cet écart et créer un engagement.
    Les services sont là, mais ils n'ont jamais vraiment été conçus pour créer un lien fort comme entre l'armée et Anciens Combattants. C'est ce que vous nous dites depuis quelque temps.
    Pouvez-vous nous expliquer ce que la GRC doit faire pour créer le lien qu'il manque?
    Merci beaucoup. Je crois vraiment, en effet, que l'un n'est pas possible sans l'autre. Je vois un lien direct avec le PAAC et les soins prolongés. Si les deux ne convergent pas, nous allons stagner encore longtemps. Vous connaissez mon point de vue là-dessus.
    Mon organisation projette peut-être l'image d'être très régimentaire, mais ce n'est pas le cas à mon niveau. Il y a beaucoup de gens haut placés qui croient que ce doit encore être ainsi, mais nous nous éloignons lentement de cette philosophie.
    Il manque cruellement de personnel de la santé dans mon organisation. Depuis probablement trois ou quatre ans, il n'y a pas de psychologue en chef permanent à la Gendarmerie royale pour la prestation des services de santé. Ce poste est toujours vacant. En fait, le service utilise son budget salarial afin de financer deux projets. Donc, nous laissons le poste de psychologue en chef vacant pour financer deux petits exercices.
    Je peux vous dire qu'il y a énormément de personnes au sein de l'organisation qui profiteraient de ces services. Il y a entre 20 000 et 22 000 policiers à la GRC, pour seulement 14 psychologues. Le poste de psychologue en chef, celui de la personne qui devrait inciter tout le monde à adhérer au programme, sur les bases ou ailleurs, n'est même pas comblé.
    La force a vivement réagi au groupe de travail Brown et à l'équipe de gestion du changement, comme toujours. Les gens réagissent toujours à ce genre de choses parce qu'ils ont des intérêts à court terme à défendre, donc ils les font valoir.
    Ils se sont notamment insurgés contre la mise en place d'un programme pour la santé mentale qu'on appelait... le terme va me revenir. Quoi qu'il en soit, nous avons un sergent d'état-major en Colombie-Britannique qui est psychologue lui aussi. Il coordonne un programme de décompression. L'idée consiste à aller au-devant de l'invalidité, de la maladie ou des blessures et de former les gens à la façon de composer avec ces réalités. On forme des classes d'environ 21 à 24 personnes. Il y a eu trois ateliers de la sorte en Colombie-Britannique, et il devait y en avoir deux à Terre-Neuve pour la région de l'Atlantique en décembre. Il y en a aussi un par mois de prévu jusqu'en mars.
    Je vous ai déjà dit que notre force compte 22 000 personnes. Il va y avoir beaucoup de décès avant que les gens changent d'idée et que ce programme ait un effet manifeste.
    Je tiens à ce que vous sachiez qu'à ma connaissance, les 14 autres psychologues sont rarement consultés à ce sujet. Ce sont les haut dirigeants qui ont été sensibilisés à la question par le groupe de gestion du changement, et ils se sont dit que c'était une bonne idée. C'est ce qui a donné naissance au projet.
    Ce programme n'est pas sans risque. Ce n'est toutefois pas moi qui peut vous en parler, je ne suis pas psychologue.
    Pendant que je me préparais et que des membres de la force comparaissaient, il y a trois termes que j'ai trouvé intéressants. Il y a d'abord le programme de résilience de la GRC pour lutter contre le stress post-traumatique. Il y a aussi le programme de mieux-être mental, parce que ces programmes sont tous interreliés. Le troisième était le programme du mieux-être en milieu de travail. Il y a aussi un nouveau bébé dont le nom m'échappe, mais qui est un autre programme de bien-être. Je ne vous en parlerai pas plus.
    Depuis que quelqu'un essaie de rendre des comptes dans ce dossier, on a pondu un nouveau modèle de soins de santé dont on parle à tout vent. Le commissaire a signé un document de deux pages énonçant des principes de bien-être. Je vous mets au défi de me dire ce que cela signifie. On y trouve de très belles phrases, mais c'est de résultats dont nous avons besoin. Nous avons besoin de concret. Nous devons aider les gens. Nous devons rétablir la confiance à l'interne.
    Il y a beaucoup de frustrations injustement mises sur le compte d'Anciens Combattants. Certaines de ces frustrations viennent du fait que la force n'a pas tenu de très bons dossiers médicaux. Beaucoup de gens comme moi pensaient que notre employeur gardait nos dossiers médicaux, un peu comme dans l'armée. Quand j'ai voulu les consulter, je me suis rendu compte qu'il n'y avait rien, sauf un petit reçu de médicaments ou de je ne sais quoi acheté chez Walmart. Nous devons maintenant nous rattraper et nous doter d'outils pour traiter les blessures liées à nos fonctions. La plupart du temps, ce n'est pas facile.
    N'oubliez pas que nous n'avions aucun lien avec Anciens Combattants avant octobre 2001 ou 2002. C'est à partir de ce moment que les membres actifs des forces ou de la Gendarmerie royale ont eu le droit de toucher une pension d'invalidité pour des souffrances vécues pendant qu'ils étaient en fonction. Avant cela, même si nous étions associés au ministère depuis 1948, on ne nous en parlait pas vraiment, nous ne savions pas ce qu'il faisait, parce qu'il ne faisait rien qui nous concernait avant la retraite. Cela a changé un peu à partir de 2002, mais il n'y a jamais eu de bon volet éducation à cet égard, et l'entrevue de transition est critique pour combler ce manque.

  (1635)  

    Il y a aussi que les services réaffectent constamment l'argent qui devrait servir à combler les postes vacants du programme de santé. Cela doit cesser. Savez-vous comment est attribué l'argent en santé à la Gendarmerie royale? Les sommes allouées dépendent toujours de l'argent dépensé l'année précédente. Cela vous donne une idée de la façon dont nous finançons les soins de santé à la Gendarmerie royale depuis quelques années. J'aimerais que ces sommes soient réservées. Elles doivent vraiment être consacrées aux soins de santé. Nous n'arrivons même pas à recueillir des données! Savez-vous quelle est la seule façon pour nous de vous donner des chiffres raisonnables sur le stress post-traumatique et d'autres sources d'invalidité, comme les troubles dépressifs, l'anxiété, la dépression et les troubles anxieux? Ce sont les quatre principaux dans notre organisation, et ils causent...
    Je viens de lire le commentaire qu'un psychologue m'a fait parvenir. Il disait que de 60 à 75 p. 100 de nos membres malades souffraient de blessures liées au stress professionnel. AAC va sans doute être d'accord avec ça, parce que si l'on prend ses chiffres sur les 8 000 demandes qui viennent de nos membres, le plus grand nombre d'entre elles est présenté pour stress post-traumatique.
    J'appelle la GRC pour savoir quels sont nos chiffres. La seule façon que nous avons de vérifier ces chiffres, c'est d'appeler AAC et de demander au ministère pour quelles maladies il verse des prestations, et ce n'est pas suffisant, parce que les seuls chiffres que le ministère comptabilise sont ceux qui concernent les demandes acceptées. Il n'y a rien sur les personnes qui sont toujours dans le système, qui entrent dans le système, qui ont essuyé un refus ou qui sont en appel. Nous pouvons ramasser des statistiques sur ce qui arrête une personne et depuis combien de temps, mais nous n'avons rien à donner. Cela vaut également pour le suicide.
    Je vous implore de vous pencher sur cette question. Je vais m'avancer et dire que notre taux de suicide est à la baisse, mais je peux quand même vous donner quatre ou cinq exemples. La plupart de nos membres se tuent avec leurs propres outils. Parmi les derniers cas, celui de Paul Smith. Paul s'est tiré un coup de fusil. Sa femme reçoit maintenant une pension parce que Paul est mort suite à une blessure liée à ses fonctions. À vous de démêler tout cela, maintenant.
    C'est toujours comme ça.
    Il y a des problèmes inhérents au ministère des Anciens Combattants. Le premier, c'est que nous avons l'impression qu'il ne nous connaît pas. Il doit y avoir un poste de liaison entre les deux. En toute honnêteté, le gars qui occupait ce poste n'était pas très bien traité à Ottawa. Ils auraient très bien pu l'enfermer dans un édifice et le laisser là jusqu'à la fin de la semaine pour qu'il rentre chez lui, mais à l'inverse, le gars qui occupait le poste à Charlottetown était traité comme un roi. Il participait à toutes les réunions. Il faisait partie du processus.
    La haute direction de mon organisation doit acquérir de la maturité à cet égard. Ce que je dis là n'est rien de nouveau. Je répète la même chose au sein de mon organisation depuis un an. Ce n'est pas la première fois que j'en parle, et j'en ai parlé à mon employeur. Il faut régler ce problème.

  (1640)  

    Merci.
    Nous avons dépassé un peu notre temps, mais je voulais que vous puissiez nous dire tout cela, donc c'est très bien.
    Mme Duncan est la prochaine.
    Merci, monsieur le président. Merci à tous d'être ici et de rendre service à notre pays. Monsieur Brown, je vous félicite pour votre retraite toute proche.
    Merci.
    J'aimerais revenir au fait qu'on ne peut pas se contenter de mesures à court terme, comme vous l'avez dit. J'ai récemment rencontré des anciens combattants et des psychiatres qui m'ont dit qu'un monsieur avait eu sa première crise de santé mentale à l'âge de 87 ans. Il y a beaucoup d'anciens combattants, de la GRC ou des autres forces, qui portent leur blessure liée au stress opérationnel jusqu'à la tombe. Les psychiatres ont parlé de deux anciens combattants qu'ils avaient traités et qui avaient vécu dans une cave, dans l'obscurité, pendant 17 ans. Ils ont souligné à grands traits qu'ils n'avaient jamais rencontré quelqu'un qui n'avait pas envie de contribuer à la société.
    Vous avez mentionné les soins proactifs. C'est extrêmement important pour la prévention, et j'aimerais que vous donniez au comité les recommandations les plus précises que vous puissiez lui donner. De quelle manière assurez-vous ce type de soins?
    Tout commence par l'éducation avant le déploiement, et ce doit être une idée acceptée dans la culture militaire. Ce ne doit pas être une préoccupation de fin de carrière. De cette manière, les gens viendront eux-mêmes demander des traitements, parce qu'il est vital d'intervenir rapidement pour prévenir un isolement à vie. Cela a des répercussions sur la famille: la personne vit en silence complet au travail, ne signale pas ses problèmes et quand elle rentre chez elle, sa famille doit supporter son agressivité et l'isolement qu'elle ressent.
    Il doit y avoir des interventions et de l'éducation en amont. Il y a des programmes qui existent. Les Forces canadiennes ont fait beaucoup de progrès...

  (1645)  

    Est-ce que vous faites des recherches pour savoir si cela fonctionne?
    C'est ce que je voulais dire. Quel suivi faisons-nous pour veiller à ce que ces mesures fonctionnent. Quelles sont les difficultés à surmonter, les choses à changer? Les Forces canadiennes ont lancé la campagne Soyez la différence en 2009, mais elles n'ont rien entrepris pour en mesurer l'impact. Elles ont mis en place des programmes d'éducation dans toutes les écoles de commandement et dans la formation des recrues. Quel suivi en font-elles? Elles ne recueillent aucune donnée sur les traumatismes liés au stress opérationnel.
    Si vous comparez ce qui se trouve sur le site Web d'AAC au contenu du site américain, vous verrez que les États-Unis en font beaucoup plus que nous, ils décernent des médailles de service à ceux et celles qui ont eu le courage de parler, de crier... Est-ce que cela ne profiterait pas aussi aux Canadiens?
    Je pense que nous devons réfléchir à ce que nous faisons au Canada. Il est clair que les Forces canadiennes ont mis énormément d'efforts pour embaucher des professionnels de la santé et instaurer des programmes pour les personnes toujours en service.
    Notre modèle diffère de celui des Américains. Je pense qu'il pourrait y avoir des risques à suivre le modèle américain plutôt que de nous concentrer sur les circonstances uniques au Canada. Prenons les soins aux familles au Canada, où les sphères de compétence entrent toujours en jeu et où nous avons l'obligation morale... Oui, il y a un problème de compétences, mais il faut le régler et nous doter d'un programme qui englobe à la fois le membre et sa famille.
    Merci.
    Parlons un peu du traitement. Nous avons entendu des anciens combattants nous dire qu'il fallait avoir vécu ce qu'ils ont vécu, qu'il fallait avoir passé trois jours dans un trou de tirailleurs pour comprendre. Comment voyez-vous le traitement en groupe? Je sais que la Légion appuie un excellent programme de transition pour les anciens combattants de la Colombie-Britannique, un programme mené en collaboration qui vise également les conjoints et les enfants.
    Pouvez-vous nous dire ce que nous devons faire pour aider les familles? J'aimerais également avoir une réponse de la GRC. J'aimerais connaître vos deux points de vue.
    Pour ce qui est de votre comparaison avec les Américains, c'est une économie d'échelle, et nos systèmes de santé sont différents.
    Si vous voulez soustraire les militaires et les membres de la GRC à la Loi canadienne sur la santé à partir du moment où ils se joignent aux Forces canadiennes ou à la GRC, pour que leurs soins soient couverts par cette organisation jusqu'à la fin de leurs jours, c'est merveilleux, mais c'est justement le modèle américain. Dès qu'une personne s'enrôle dans l'armée américaine, les soins de santé lui sont prodigués par l'armée jusqu'à sa mort. C'est la façon de faire là-bas.
    Je vais mentionner deux autres choses. Je pense que si l'on créait un climat de changement, une mentalité de changement et d'acceptation, la personne souffrante ne sentirait plus la même stigmatisation. Pour y arriver, il faut que les hauts dirigeants soient totalement d'accord.
    Vous avez posé une autre question sur les traitements. Les programmes que nous finançons en ce moment sont très efficaces et très bienvenus. Je pense en particulier à celui d'Edmonton, mené en collaboration avec le CRFM, le Centre de ressources pour les familles des militaires, qui en est à sa huitième mouture. C'est un programme très efficace chez les enfants d'un très jeune âge jusqu'à la fin de l'adolescence, pour les aider à composer avec le TSPT, à le reconnaître, à comprendre pourquoi maman ou papa se met à crier devant eux sans raison. C'est ce que ce trouble crée chez les gens. Tout bascule en un rien de temps. Ces programmes sont très efficaces.
    Est-ce qu'on les copie?
    Non. Pas actuellement.
    Nous devons terminer. Merci.
    M. Vincent.

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais simplement formuler une demande.

[Traduction]

    Je vous cède la parole, puis ce sera le tour de M. McColeman. Je suis désolé, monsieur McColeman; j'ai mal lu la liste.
    Allez-y, monsieur Vincent.

[Français]

    Monsieur le président, avant que vous ne commenciez à compter le temps que j'utilise, j'aimerais vous faire une demande.
    J'ai cité comme témoin le major Michel Sartori. Je ne suis pas sûr qu'il va vouloir témoigner, parce qu'il fait encore partie des Forces canadiennes. Si le comité reçoit une réponse négative, j'aimerais qu'on puisse lui envoyer une assignation à témoigner, pour la raison fondamentale que le témoignage de M. Sartori est un élément important.
    En effet, selon les Forces canadiennes, seulement 7 militaires se sont suicidés en 2006 et 9 en 2007. Le major Sartori est un militaire qui a fait une thèse de doctorat sur le suicide chez les militaires. La différence entre les chiffres avancés de part et d'autre est très importante. En 2006, on parlait de 7 suicides, alors qu'il en a répertorié 20. En 2007, on parlait de 9 suicides, alors qu'il en a trouvé 36.
    Il serait important que le major Sartori puisse étayer sa thèse de doctorat devant le comité. Cela pourrait nous éclairer sur le suicide parmi les effectifs des Forces canadiennes.

  (1650)  

[Traduction]

    Poursuivez. Votre temps file. Est-ce que vous présentez une motion?

[Français]

    Si vous voulez que je présente une motion, ça me convient, mais je voudrais vous demander une chose. Si le major Sartori décline notre invitation, j'aimerais qu'on puisse lui envoyer une assignation à témoigner.
    Si vous voulez que je dépose une motion, je le ferai. Je peux déposer une motion et on procédera au vote. J'aimerais mieux qu'on procède par la voie d'une motion.

[Traduction]

    S'il s'agit d'une motion, il faudra un avis de motion. Je devrai en saisir le comité dans 48 heures.

[Français]

    Non.

[Traduction]

    S'agit-il simplement d'ajouter le nom d'un autre témoin? Pouvons-nous mettre la question en délibéré, pour voir si nous pouvons...?
    J'ai compris qu'il demandait d'ajouter un nom à la liste des témoins. J'ignorais qu'il fallait une motion dans ce cas-là.

[Français]

    Ce n'est pas ce que j'ai demandé. Vous parliez et vous n'avez pas entendu ma demande.
    J'ai déjà demandé que cet homme vienne témoigner. Le problème est qu'il fait partie des Forces canadiennes, lesquelles lui ont interdit, dans le dossier de Mme Lagimonière, de parler du suicide dans les Forces canadiennes. La comparution de ce monsieur pose donc problème.
    Si la greffière lui demande de venir témoigner et qu'il dit non, j'aimerais qu'on puisse lui envoyer une assignation à témoigner pour qu'il puisse venir.

[Traduction]

    J'ai compris que la personne figure sur la liste des témoins et que la greffière s'efforce de le faire venir. Quand on saura qu'il ne vient pas...
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Nous sommes en plein milieu d'une question adressée aux témoins et nous interrompons tout pour ajouter le nom d'un témoin à une liste. Je n'y vois pas d'objection, mais je pense que cela devrait être réglé entre le président et la greffière après la séance. Nous sommes en train de questionner les témoins. Ils sont ici pour peu de temps. Poursuivons sur les questions à l'ordre du jour.

[Français]

    Je n'ai pas d'objection à cela, mais il va falloir en débattre à la fin de la réunion. Je ne voudrais pas que les gens partent en courant pour ne pas en débattre. Je veux m'assurer qu'on le fera et qu'on ne se sauvera pas.
     Je vous ai précisé que j'avais une demande à vous faire, et je vous l'ai faite. Cette intervention ne devrait pas compter dans mon temps de parole. J'ai fait cette demande pour qu'on puisse débattre de cette question.

[Traduction]

    Des témoins sont ici. Le nom de la personne en question figure sur la liste des témoins. Nous verrons quand elle nous confirmera qu'elle ne vient pas. J'aviserai avec la greffière. Les choses se passeront ainsi. Je pense qu'il n'est pas correct de faire attendre les témoins. Nous verrons en temps et lieu.
    Vos cinq minutes sont écoulées.

  (1655)  

[Français]

    Va-t-on en parler à la fin de la réunion? On n'a pas fini. Je peux comprendre que...

[Traduction]

    Très bien. La réunion est pour nos témoins. Nous avons déjà cinq minutes de moins pour les entendre.
    Allez-y, monsieur McColeman.
    Merci, monsieur le président.
    Merci également aux témoins, pour leur présence et pour...
    Il y a un rappel au Règlement.

[Français]

    Monsieur Vincent a bien mentionné qu'il n'utilisait pas son temps et qu'il présentait une motion. Je pense qu'il devrait ravoir cette période de temps.

[Traduction]

    Non.

[Français]

    Oui, il l'a mentionné au début.

[Traduction]

    Non. Absolument pas. Nous ne pouvons pas jouer à ce jeu...
    Oui, il l'a demandé quatre fois.
    Cela s'appelle ne pas prendre ses responsabilités.
    Nous avons des témoins ici. Je ne me laisse pas entraîner dans...
    Cela dépasse les bornes. Je tiens à ce que nos témoins soient traités avec respect. Ils sont ici aujourd'hui. Nous nous occupons d'eux aujourd'hui.
    Je poursuis avec la liste. La parole est à M. McColeman. M. Vincent a épuisé ses cinq minutes. J'ai dit que le temps continuait de s'écouler.
    Monsieur McColeman, je vous en prie.
    Monsieur le président, est-il possible de réserver cinq minutes avant la levée de la séance? Nous pourrions alors discuter de ce qui tient à coeur à M. Vincent. Nous avons également une autre question à soulever.
    Nous avons déjà soustrait cinq minutes au temps de nos témoins, et, maintenant, M. André veut en prendre un peu plus.

[Français]

    Monsieur le président, M. Vincent avait bien précisé, avant de prendre la parole, qu'il proposait une motion et que cela ne devait pas empiéter sur son temps de parole. Vous lui avez accordé la parole dans cette perspective.
    J'aimerais rappeler à ceux qui sont devant moi que vers la fin de la dernière rencontre avec M. Lacoste, il y a eu un petit dérapage qui m'a empêché de poser une question. Cela s'est produit lors de la dernière rencontre, soit mardi passé.
    Je pense que M. Vincent devrait avoir la parole.

[Traduction]

    J'expliquerai ce qui est arrivé à la dernière réunion. La même chose qu'aujourd'hui. Des noms figuraient sur la liste, puis nous nous sommes occupés d'une motion qui avait été proposée. C'est pourquoi vous n'avez jamais eu pu prendre la parole. En fait, le dernier intervenant n'a pas eu droit à cinq minutes, mais à trois. Actuellement, encore plus de temps a filé. Je vais m'occuper...

[Français]

    Ils ont le droit de proposer une motion, mais pas nous, n'est-ce pas?

[Traduction]

    ... de nos témoins et demander à M. McColeman de bien vouloir poser sa question.
    Merci, monsieur le président.
    Sergent d'état-major Brown, je voudrais employer le temps qui m'est alloué pour clarifier vos commentaires. Nous avons une copie de vos remarques, et je vous remercie tous les deux de nous les avoir fournies.
    Je pense que vous vous êtes éloigné de vos notes lorsque vous avez dit que — je n'ai pas eu la possibilité de noter vos propos —, au départ à la retraite, il y avait comme une interruption dans la couverture des soins de santé. Je pense que c'était au milieu d'un des exemples que vous donniez.
    Pour clarifier vos propos, peut-être pourriez-vous nous décrire le cheminement d'un agent quelconque de la GRC, à son départ à la retraite. À quels soins de santé a-t-il alors droit?
    Le participant se fait offrir, à sa libération, un train de mesures, parmi lesquelles un certain nombre d'options en matière d'assurances et de soins de santé. Si sa libération a lieu dans des conditions normales, il conserve la pension d'invalidité des Anciens Combattants qu'il possède déjà. La plupart des participants choisissent de s'affilier au Régime de soins de santé de la fonction publique en complément du régime provincial de soins de santé. Dans ma province, c'est le Régime d'assurance médicale (ou MSI). Je demanderais donc la carte MSI dans les trois mois de mon départ à la retraite. Je pourrais ainsi m'affilier au régime provincial de soins de santé chez moi.

  (1700)  

    Vous bénéficiez du régime provincial de soins de santé. Je pense que c'est l'aboutissement normal pour la plupart des policiers canadiens. Je parle de ceux des services municipaux et régionaux de police, que je connais beaucoup. Vous bénéficiez du régime provincial, mais vous pouvez profiter d'un programme facultatif supplémentaire...
    Oui.
    ... grâce aux régimes d'assurance de la GRC ou à vos relations. Encore une fois, je tiens à m'en assurer. Y a-t-il des lacunes importantes dans l'accès aux services? En ce qui concerne les soins en santé mentale — c'est l'objet de notre étude — le système offre-t-il davantage aux participants de la GRC qu'aux autres participants?
    Le Programme pour l'autonomie des anciens combattants (PAAC) et les soins aux malades chroniques sont deux exemples de ces lacunes qui n'ont rien de médical, mais deux exemples quand même. Les participants peuvent avoir besoin d'assistance à domicile, à mesure qu'ils avancent en âge et qu'ils quittent le service, mais on ne donne aucun soin à domicile aux participants de la GRC, dans l'état actuel des choses. Nous sommes le seul organisme public qu'on prive d'un tel programme.
    Bien.
    Du point de vue médical, les lacunes concernent les soins dentaires ou médicaux qui ne sont pas terminés au moment du départ du participant. Le participant dispose de trois mois, après son départ, pour y voir. S'il omet de le faire, la Gendarmerie cesse de fournir le service et ne couvre plus rien d'autre dans la vie du retraité. La couverture est désormais fournie par les Anciens Combattants, le régime provincial de soins de santé ou le Régime de soins de santé de la fonction publique.
    Le retraité de la GRC a donc accès à trois enveloppes de soins de santé, et, selon le type de soins dont il a besoin, il pourrait être couvert par l'une d'elles.
    C'est exact.
    Maintenant, comme nous étudions le syndrome de stress post-traumatique...
    Vous devez terminer. Vos cinq minutes sont écoulées.
    Je pourrai peut-être revenir à la charge plus tard.
    D'accord.
    M. Lobb.
    Merci, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à M. Brown. Pour les besoins de notre recherche, est-il vrai que les agents de la GRC ont accès aux cliniques de traitement des traumatismes liés au stress opérationnel, ou cliniques TSO?
    Ce n'est pas tout à fait clair. Des participants de la GRC fréquentent-ils ces cliniques? Oui, effectivement. Le protocole a été un sujet de discussion. J'ai également eu la chance de faire partie du comité consultatif national de la santé mentale. Certains de nos membres sont très heureux de se trouver dans ces cliniques, tandis que d'autres souhaitent demeurer dans le secteur privé.
    D'accord.
    Le magazine que vous avez apporté dit que, en 2006, Anciens Combattants Canada, le ministère de la Défense nationale et la GRC ont signé un protocole d'entente qui assurerait un réseau pour cela.
    Il y en a un, et on peut adhérer à ce régime. De fait, je pense qu'on travaille actuellement à l'améliorer, à le simplifier et ainsi de suite.
    Voilà de bonnes nouvelles.
    Le général Dallaire, qui était ici il y a exactement deux semaines, je pense, a souligné l'importance des réseaux de soutien social aux victimes de blessures de stress opérationnel, ou réseaux SSBSO. Je crois que les agents de la GRC y ont accès également. Est-ce qu'ils rendent bien service à la GRC? Pouvez-vous nous en dire un peu à ce sujet?
    Je connais des participants qui ont recours à ces installations ainsi qu'au programme de soutien par les pairs. Ils semblent heureux. Encore une fois, d'autres ont choisi de ne pas avoir recours à ces services. C'est un choix personnel, qui n'a rien d'obligatoire.
    En ce qui concerne le programme d'aide aux employés offert aux participants, les deux entreprises pour lesquelles j'ai travaillé en avaient mis un sur pied. Ces programmes sont en évolution constante, s'adaptant toujours aux besoins des employés et du personnel, essayant de mieux y répondre. Je crois que votre programme fait actuellement l'objet d'un examen. Pourriez-vous nous en dire un peu sur les résultats que vous aimeriez que l'examen ait.
    Notre programme d'aide aux membres et aux employés, le PAME, est, au fond, identique à celui que vous avez connu. Il existe depuis un certain temps, et nous le considérons comme un programme de base. Il fonctionne tant qu'est respectée la confidentialité dont il est censé faire l'objet. Si une ou deux personnes trahissent cette confidentialité, il faut retirer la personne qui s'occupe du programme pour ne pas qu'il s'effondre. On n'a pas le droit à l'erreur.
    Le PAME est l'objet d'un examen. Après l'embauche d'un consultant, l'examen s'est interrompu brutalement, faute d'argent. Il a repris, mais au petit bonheur, et nous le contrôlons de très près, parce que, pour nous et nos membres, le PAME est un programme de base. Il dépend énormément de l'appui des pairs. Non pas que les bénéficiaires ne se confieraient pas à d'autres personnes que des policiers; ils s'ouvrent aux personnes en qui ils ont confiance, mais nous croyons qu'on essaie de remplacer les agents orienteurs de ce programme par des fonctionnaires, des civils ou n'importe qui d'autre.

  (1705)  

    Comme il me reste probablement peu de temps, j'aimerais passer à autre chose.
    M. White a fait des commentaires selon lesquels il y avait un besoin de médication, mais que le besoin le plus important, peut-être, c'était la consultation psychologique et le traitement des problèmes mentaux. Vous avez mentionné que la GRC employait directement 14 psychologues. De toute évidence, les Anciens Combattants donneraient également du travail à un nombre important de psychologues, dont les services, accessibles par les cliniques SSBSO, pourraient profiter aux agents de la GRC.
    Malgré les similitudes, les services offerts aux soldats des Forces canadiennes et aux agents de la GRC diffèrent manifestement. À l'avenir, aimeriez-vous que l'on puisse répondre aux besoins des agents de la GRC dans les cliniques TSO ou avez-vous l'impression que ce service y est déjà donné?
    Je pense que ces cliniques sont capables de fournir un certain service, dont nous profitons. Personnellement, je préférerais rester dans le secteur privé. J'ai confiance dans les ressources auxquelles j'ai accès, et beaucoup font comme moi.
    Je suis agent orienteur et je fais partie de la GRC depuis un certain nombre d'années. J'ai aidé beaucoup de gens, même si je ne suis pas médecin. Mes orientations ne sont pas de nature médicale, mais elles dépendent de la situation. Nous pouvons aussi nous adresser au coordonnateur du PAME, qui fera les orientations et qui avertira les services de santé que nous lui avons référé un participant pour un traitement spécial.
    Merci.
    Monsieur Mayes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins pour leur présence au comité.
    J'aimerais adresser ma première question au sergent d'état-major Brown. En ma qualité d'ancien maire, j'ai entretenu des rapports très étroits avec tous les sergents d'état-major de ma collectivité. Je lisais ce magazine, qui parlait de certains symptômes de stress. Je reconnais ceux du monde de l'entreprise et j'en connais les causes: fatigue, surmenage, manque de ressources. Je privilégie la prévention sur le traitement.
    Combien de travail consacre-t-on vraiment à ce problème? Très souvent, la GRC manque de personnel. Le service exige beaucoup. Les agents s'usent. Cela a des effets dans leur famille, puis survient le problème de stress, mais s'il faut aller à la racine du problème, c'est le surmenage.
    Pourriez-vous s'il vous plaît répondre à cette question?
    Vos observations sont très justes. La difficulté provient du fait que, d'après les statistiques des Anciens combattants, l'âge auquel la plupart de nos agents avouent avoir besoin d'aide se situe au-dessus de 50 ans. D'après moi, beaucoup d'entre eux gardent cela en dedans jusqu'au moment où ils ont droit à une pension.
    Voilà une différence énorme entre nous et les forces armées canadiennes. Elle est importante. Beaucoup de militaires quittent à l'âge de 33 ou 34 ans. Ils ont besoin de travailler. Ils ont besoin d'une deuxième carrière. Je pense que l'âge moyen du départ, dans notre milieu, est un peu au-dessus de 54 ans; la plupart de nos agents quittent avec une pension arrivée à maturité, mais ils pourraient également être mis aux soins médicaux. Cela dépend. Il existe un certain nombre de stratégies.
    Une autre solution au problème que vous avez fait observer, c'est de mieux former nos chefs et nos cadres intermédiaires. Mon organisation y consacre très peu d'effort. Ce n'est que depuis peu que l'on trouve quelque chose sur le sujet dans deux cours en particulier. Je ne demande pas que chaque agent de la GRC devienne spécialiste de la reconnaissance des symptômes du stress post-traumatique ou de la dépression, parce que, d'après moi, au cours de notre vie, nous avons acquis à cette fin des compétences de profanes.
    En ce qui concerne le secteur privé, il faut se rappeler que les 14 psychologues sont des employés affectés aux programmes. Ils établissent les politiques et les lignes directrices qui permettent de fonctionner dans le secteur privé.

  (1710)  

    J'ai bien aimé que vous ayez dit que vous êtes différents, parce que vous l'êtes vraiment des Forces canadiennes...
    En effet, nous sommes différents.
    ... et vous vous trouvez dans des circonstances totalement différentes.
    Par ailleurs — et j'aimerais que M.  White ou Mme Siew en disent quelque chose —, c'est que le service actif dans les Forces canadiennes est très exigeant, parce qu'il n'y a pas d'interruption, ni sur une base au Canada ni dans un avant-poste à l'étranger.
    Est-ce qu'on s'efforce de détacher les gens, d'identifier le...? Ceci ne fait pas partie de la discussion, mais j'essaie de faire cesser l'arrivée de patients, le stress, et je pense que c'est important.
    D'après votre clientèle et les réactions que vous obtenez, constatez-vous que le coupable n'est pas nécessairement le service commandé, mais l'impossibilité de s'évader de son emprise?
    Je n'ai pas dit qu'il ne s'agissait pas nécessairement de la mission de combat, mais on appelle ce phénomène le rythme opérationnel.
    D'accord.
    Si un militaire est continuellement déployé, un temps d'arrêt lui est accordé lorsqu'il revient chez lui. Le militaire en a habituellement besoin pour décompresser. Une fois détendu, il doit s'acquitter de ses tâches et suivre des cours de formation professionnelle. Après avoir accompli sa première tâche et avant même d'avoir entamé un cours, le militaire est remis en état d'alerte parce qu'il retournera en mission. C'est une question de ressources. Un gouvernement qui prend ce genre d'engagement doit préciser les ressources qu'il y consacrera. Puisque ces ressources ne sont pas illimitées, il se peut qu'un militaire qui revient d'une mission du 1er Bataillon du régiment PPCLI soit affecté au 2e Bataillon du régiment PPCLI et qu'il doive repartir en mission dans les six mois suivants. C'est une question d'évaluation des ressources disponibles.
    Vous avez demandé s'il y avait un moyen de s'en sortir. J'ai passé ma vie sur des bases militaires. C'était nous, sur la colline. Nous habitions des logements résidentiels du MDN. Nous avons vécu dans notre environnement et dans notre culture. Nous avons survécu en nous aidant les uns les autres. Les conjoints des militaires ne pouvaient pas travailler dans les localités sachant qu'ils n'y resteraient pas plus de deux ou trois ans.
    Les militaires créaient leur communauté et s'en servaient pour se protéger. C'est ce qu'ils devaient faire.
    Aujourd'hui, où vont les gens pour trouver de l'aide? Sur le Web. Le monde est maintenant à notre portée. Je compare cette situation à ce que j'ai vécu en Allemagne dans les années 1970. À l'époque, il y avait entre autres beaucoup d'excès d'alcool. Lorsque j'y suis retourné dans les années 1980, savez-vous ce que les jeunes hommes faisaient? Ils n'allaient plus au mess ou dans les bars. Ils allaient visiter des musées et voir les attractions touristiques. Tout un changement culturel s'était opéré relativement à l'endroit où voulaient être les militaires. On en est déjà là.
    Ai-je le temps d'intervenir?
    Veuillez demeurer très concis, monsieur.
    La question est tellement importante à mes yeux que j'aimerais moi aussi vous décrire notre situation. La plupart des agents de la Gendarmerie royale du Canada vivent au sein de la collectivité dans laquelle ils maintiennent l'ordre. Lorsqu'ils rentrent à la maison, qu'ils aient terminé leur quart de travail ou non, on frappe à leur porte jusqu'à ce qu'ils retournent au travail.
    De plus, un agent ne peut se cacher nulle part dans les collectivités. Tout le monde sait où habitent les agents de la police montée. Même au Canada, il y a certaines collectivités où nous sommes logés dans des complexes, non pas en raison de la collectivité en elle-même, mais plutôt parce que c'est ainsi que le gouvernement achète les terrains. Si des terrains marécageux où il n'y a pas trop d'eau sont à vendre quelque part, nous les achetons tous.
    C'est pourquoi le gouvernement a pu engager plus d'agents de la GRC et de militaires.

  (1715)  

    Quelqu'un d'autre aimerait-il poser des questions aux témoins? Mme Sgro aimerait soulever brièvement quelque chose.
    Monsieur Stoffer, vous pouvez poser une question. Allez-y, s'il vous plaît.
    À la suite des remarques de M. Mayes à propos du surmenage et du stress, vous avez dit qu'une femme agent qui tombe enceinte doit quitter ses fonctions, mais qu'elle ne peut être remplacée. Cela contribue justement à votre stress.
    Oui.
    Je me demandais si vous pourriez nous en dire un peu plus là-dessus. Si d'autres agents pouvaient poursuivre le travail afin que les autres n'aient pas à assumer les tâches de deux personnes... Pourriez-vous nous en parler un peu?
    Oui. Vous savez, je plaisantais dans une certaine mesure, mais j'en ai tellement parlé qu'on a l'habitude d'en rire un peu.
    À vrai dire, il y a encore beaucoup d'ostracisme envers les femmes agentes qui doivent quitter leur poste pour une durée déterminée afin de donner naissance à un enfant. Maintenant, les hommes aussi veulent prendre un congé de paternité lorsque leur femme retourne au travail. Vous savez ce qui arrive aujourd'hui? Les deux parents partent. Certains disent que dans leur temps, ils n'ont jamais eu droit à ces congés. Or, les jeunes parents ont droit à ces prestations, et je suis heureux qu'ils en profitent. Les problèmes surgissent dans les détachements comme celui de Sherbrooke, en Nouvelle-Écosse, qui compte quatre agents. Si la femme s'en va — elle est probablement la seule femme là-bas —, elle ne reviendra pas avant un an, à moins qu'elle partage son congé avec son conjoint. Or, personne ne viendra la remplacer.
    Nous travaillons à la mise au point de formules pour déterminer les ressources nécessaires depuis plusieurs années — depuis probablement 15 ans maintenant —, alors qu'il n'existait rien de tel dans les forces policières. Nous avons donc mis en place une formule pour déterminer les ressources qui nous permet de demander à la partie contractante le genre de services qu'elle veut afin que nous en tenions compte. Il peut s'agir notamment de congés pour raisons ou obligations familiales, de congés de formation ou de congés pour fonctions judiciaires. Si une municipalité veut aussi avoir une patrouille à bicyclette, nous pouvons en tenir compte. Nous lui dirons alors que nous avons besoin d'un nombre donné d'agents pour remplir le mandat du contrat. Toutefois, ce qui pose problème, c'est que la formule n'est pas employée de cette façon.
    Peter, rappelez-vous les deux agents qui, tout récemment, ont été emportés par les vagues alors qu'ils étaient sur les rochers de Peggy's Cove et qu'ils essayaient de sauver un jeune homme. Ils ne sont toujours pas de retour au travail. L'un d'entre eux a percuté les rochers de l'océan Atlantique assez violemment. Les deux hommes voulaient sauver un homme qui s'était fait emporter par les vagues, et l'un d'entre eux a subi des blessures plutôt graves. Comme Brad l'a dit — et je l'en remercie —, cela fait partie du lot quotidien sur le terrain.
    Monsieur le président, la seule raison pour laquelle je parle de cela, c'est que dans les années 1950, une femme militaire non mariée qui tombait enceinte était exclue de l'armée pour conduite déshonorante, alors que si elle était mariée, elle retournait à la vie civile pour des raisons médicales. Nous avons fait beaucoup de progrès à cet égard.
    Merci.
    Oui, c'est vrai.
    Merci.
    Je remercie beaucoup nos témoins pour leur comparution.
    Des voix: Bravo!
    Le président: Nous allons faire une pause de deux minutes, puis nous poursuivrons à huis clos.
    Monsieur le président, avant de partir, j'aimerais vous remercier sincèrement de votre patience.
    Merci.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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