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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 050 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er mars 2011

[Enregistrement électronique]

  (0850)  

[Français]

     Bon avant-midi aux députés, aux témoins et aux invités.
    Il s'agit de la 50e séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, notre étude porte sur le traitement judiciaire des revendications particulières.

[Traduction]

    Il s'agit de la première séance où nous étudierons les revendications particulières, surtout celles qui dépassent la limite de 150 millions de dollars définie dans la politique et dans les dispositions législatives sur les revendications particulières.
    Avant tout, j'aimerais informer les membres du comité que nous avons, aujourd'hui, pas mal de questions à régler concernant les travaux du comité. Selon l'ordre du jour, la première heure est réservée aux témoins. Je crois que nous pourrons prendre un peu plus de temps au besoin, mais je tiens à réserver au moins 45 minutes aux travaux du comité. Nous procéderons ainsi.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à Colleen Swords, sous-ministre déléguée du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
    Colleen, je vous laisserai le soin de présenter Mme Dupont, si elle arrive à temps. Nous passerons ensuite au prochain témoin.
    Veuillez présenter vos exposés dans l'ordre prévu; les membres du comité vous poseront ensuite leurs questions.
    Madame Swords, vous avez 10 minutes pour votre exposé.
    Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité.
    Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui, et je remercie le comité de me donner cette occasion de contribuer à son étude du processus concernant le Tribunal des revendications particulières et celui visant à traiter les revendications particulières d'une valeur dépassant 150 millions de dollars. J'espère que ma collègue Anik Dupont arrivera sous peu.
    J'ai une brève déclaration, après quoi nous serons heureuses de répondre à toutes les questions que le comité voudra nous poser.

[Français]

    Comme vous le savez, le processus de règlement des revendications particulières est un mécanisme de règlement des différends offert aux Premières nations à titre de solution de rechange aux litiges. Le principal objectif de ce processus est de nous permettre de nous acquitter de nos obligations juridiques envers les Premières nations au moyen d'ententes de règlement négociées.
    En juin 2007, le premier ministre a annoncé l'initiative La justice, enfin. Cette initiative a engendré une réforme fondamentale du processus de règlement des revendications particulières et vise à corriger l'apparence de conflit d'intérêts dans un processus où le gouvernement évaluait les revendications et décidait de l'issue de celles-ci. De même, l'initiative La justice, enfin avait pour but de combler les lacunes du processus qui ont, au fil du temps, mené à l'accumulation d'un important arriéré de revendications non résolues.
    La pierre angulaire de l'initiative La justice, enfin était la Loi sur le Tribunal des revendications particulières. C'est une loi fédérale élaborée conjointement avec l'Assemblée des Premières Nations en vertu de la quelle le Tribunal des revendications particulières a été créé. Le tribunal est totalement indépendant du gouvernement. Il possède l'autorité de rendre des décisions exécutoires en ce qui concerne la validité des revendications particulières et d'octroyer des indemnisations pouvant atteindre un maximum de 150 millions de dollars. Le tribunal répond aux préoccupations relatives à l'apparence de conflits d'intérêts quant au processus.
    Le tribunal fournira aux Premières nations une décision sans appel et exécutoire en ce qui concerne le règlement de leurs revendications lorsqu'il n'a pas été possible de parvenir à un règlement négocié. Il offre une étape finale du mode parallèle de règlement de conflits.

[Traduction]

    À titre d'organisme indépendant, le Tribunal des revendications particulières est responsable de l'élaboration de ses propres règles de pratique et de procédure. Le gouvernement du Canada a fourni des commentaires sur la version préliminaire des règles de pratique et de procédure proposées par le tribunal et a participé à la réunion du comité consultatif sur les règles convoquée par le président du tribunal en octobre. Je vais laisser à mes collègues du ministère de la Justice l'occasion de fournir des commentaires supplémentaires sur le tribunal.
    La Politique sur les revendications particulières et le processus de règlement n'ont pas été conçus pour traiter les revendications de valeur exceptionnellement élevée. L'initiative La justice, enfin a reconnu que les revendications particulières de plus de 150 millions de dollars sont d'un niveau de complexité et d'une portée financière qui justifie un différent type d'examen. Le processus visant à traiter les revendications particulières de valeur élevée est, dans le fond, un processus du Cabinet. Les revendications de valeur de plus de 150 millions de dollars requièrent que le ministre obtienne un mandat du Cabinet précis avant d'accepter ces revendications pour négociation.
    Les discussions avec les Premières nations se poursuivent en ce qui a trait aux revendications pouvant avoir une valeur élevée ayant été acceptées aux fins de négociation avant la mise sur pied de l'initiative La justice, enfin. J'aimerais souligner qu'à l'heure actuelle, il n'y a que très peu de revendications de valeur élevée. Un examen attentif de l'inventaire actuel des revendications particulières a révélé qu'il n'y a aucune revendication dont la valeur pourrait éventuellement dépasser 150 millions de dollars, autres que celles qui sont actuellement traitées.
    Conformément à l'accord politique conclu en novembre 2007 entre le gouvernement du Canada et l'Assemblée des Premières Nations, les cadres supérieurs du ministère ont rencontré les représentants de l'APN à plusieurs reprises en 2009 afin de discuter du processus de règlement des revendications de valeur élevée et ont également participé à un groupe de réflexion sur ce sujet, parrainé par l'APN.
     Le point de vue de l'APN, des Premières nations et de leurs représentants juridiques est bien compris par le gouvernement du Canada.
    Le financement relatif au règlement des revendications particulières et des jugements du tribunal provient du Fonds de règlement des revendications particulières de 2,5 milliards de dollars établi dans le cadre de l'initiative La justice, enfin. Le règlement des revendications de valeur élevée, c'est-à-dire de plus de 150 millions de dollars, n'est pas financé à partir du Fonds de règlement des revendications particulières, mais est plutôt prévu dans le cadre budgétaire.
    Pour terminer, j'aimerais vous fournir un résumé des progrès réalisés en vue de combler le retard dans le traitement des revendications qui s'étaient accumulées avant l'initiative La justice, enfin. Le 16 octobre 2008, lorsque la Loi sur le Tribunal des revendications particulières a pris effet, il y avait au total 541 revendications à l'étape de l'évaluation et 144 revendications à l'étape de la négociation. Le 15 février 2011, le nombre des revendications particulières à l'étape de l'évaluation se chiffrait à 270, et le nombre des revendications particulières à l'étape de la négociation était réduit à 90.
    Comme vous le savez, le Tribunal des revendications particulières prévoit un délai de trois ans pour l'évaluation et trois ans pour la négociation de revendications particulières. Tout porte à croire que d'ici le 16 octobre 2011, le ministre aura informé toutes les Premières nations avec des revendications en attente à l'étape de l'évaluation du processus des revendications particulières de la décision d'accepter ou non la négociation de leurs revendications. Des plans sont également en place pour s'assurer que les tables qui touchent à leur fin sont dûment mandatées pour conclure des conventions de règlement.
    Depuis le 1er avril 2010, 12 revendications particulières ont été réglées pour une valeur de près de 507 millions de dollars, ce qui constitue le montant le plus élevé jamais versé au cours d'un exercice depuis l'adoption de la politique.
    Quoique des progrès considérables aient été réalisés, il reste encore beaucoup de travail à accomplir. L'année qui vient devrait être très chargée, surtout avant la mi-octobre. Nous continuerons de faire tout notre possible pour traiter l'arriéré de revendications et maintenir un processus efficient et équitable afin de traiter et de régler toutes les nouvelles revendications.
    Merci beaucoup de m'avoir accordé ce temps, et ce sera un plaisir pour moi de répondre à toutes questions que le comité voudra me poser.

  (0855)  

[Français]

    Merci, madame Swords.
    Nous allons maintenant souhaiter la bienvenue à Mme Pamela McCurry, qui est sous-procureure générale adjointe dans le cadre du portefeuille des affaires autochtones au ministère de la Justice, ainsi qu'à Mme Deborah Friedman, qui est avocate générale et directrice de la Section des revendications particulières, également dans le cadre du portefeuille des affaires autochtones au ministère de la Justice.

[Traduction]

    Mme McCurry, je crois, va prendre la parole.
    Nous allons vous écouter, puis nous passerons directement aux questions des membres du comité.
    Allez-y, madame McCurry
    Merci, monsieur le président. Je vous remercie de nous avoir invitées à comparaître.
    Comme vous l'avez dit, je suis accompagnée aujourd'hui de Mme Deborah Friedman, avocate générale de la Section des revendications particulières du ministère de la Justice ainsi que des services juridiques du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

[Français]

    Le ministère de la Justice et le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien sont des partenaires clés dans la mise en oeuvre du Plan d'action relatif aux revendications particulières datant de juin 2007, intitulé La justice, enfin. Cette mise en oeuvre a été et demeure une priorité pour le ministère de la Justice.

[Traduction]

    Mon exposé vise trois objectifs. Tout d'abord, je veux vous décrire le rôle qu'a joué le ministère de la Justice dans la création du Tribunal des revendications particulières, y compris dans le processus de nomination. Ensuite, j'aimerais faire le point sur les mesures prises par le ministère pour rattraper le retard dans le traitement des revendications particulières. Enfin, je veux vous donner un aperçu des mesures adoptées pour accélérer le processus interne.
    Comme l'a dit ma collègue, Mme Swords, le Tribunal des revendications particulières est la pierre angulaire de l'initiative La justice, enfin. Il s'agit d'un organisme fédéral indépendant composé de juges, qui a l'autorité de rendre des décisions sans appel et exécutoires pour le Canada et les Premières nations concernant la validité des revendications particulières qui n'ont pu être réglées au cours des négociations. Le tribunal peut octroyer des indemnités pouvant atteindre un maximum de 150 millions de dollars.
    Le 26 novembre 2010, le ministère de la Justice a annoncé le renouvellement de la nomination des juges actuels pour des mandats respectifs de cinq ans, de trois ans et d'un an. De plus, le ministre a annoncé l'ajout de trois noms à la liste de juges de juridiction supérieure qui pourraient être nommés au tribunal à une date ultérieure. Il s'agit de M. le juge W. Larry Whalen, de la Cour supérieure de l'Ontario, de Mme la juge Barbara L. Fisher et de M. le juge Paul Pearlman, tous deux de la Cour suprême de la Colombie-Britannique.
    J'aimerais prendre un instant pour parler plus en détail du processus de nomination des juges du Tribunal des revendications particulières. Naturellement, le ministre de la Justice y joue un rôle important. Toutefois, la nomination d'un juge à un tribunal doit respecter les principes constitutionnels entourant l'indépendance judiciaire. Les juges en chef sont les seuls responsables de tout ce qui touche les fonctions judiciaires de leurs tribunaux, y compris des directives sur la nomination des juges. Ce principe s'applique aussi aux décisions relatives à la nomination de juges pour des fonctions autres que celles de juge d'un tribunal relevant de leur autorité, y compris à la nomination des juges du Tribunal des revendications particulières.
    Les juges en chef doivent pouvoir décider librement des juges qui entendront les causes. Ils doivent alors prendre en considération l'ensemble des priorités des tribunaux placés sous leur autorité et évaluer l'expérience et les capacités de chaque juge. En outre, chaque juge doit aussi accepter une nomination à un tribunal pour y être nommé à titre inamovible.
    Dans le cas du Tribunal des revendications particulières, il est important d'observer que le ministre des Affaires indiennes et le chef national de l'Assemblée des Premières Nations ont signé un accord politique qui stipule que le chef national « participera au processus de recommandation des membres du Tribunal tout en respectant la confidentialité de ce processus ». L'accord a été négocié sous les auspices du groupe de travail mixte Canada-APN.
    Cet engagement visait à indiquer publiquement qu'on tiendrait compte de la position du chef national sur les compétences que devraient détenir les juges potentiels, même si la décision finale concernant la nomination des juges appartient au gouverneur en conseil. Je tiens à préciser que les dispositions de l'accord politique n'ont compromis d'aucune façon l'intégrité du processus de nomination. Le président du tribunal a soulevé la question dans son rapport annuel et le ministère de la Justice a fourni aux membres de ce tribunal une réponse satisfaisante à ce sujet.
    Ainsi, le ministre de la Justice a pris connaissance de la position de l'APN sur les compétences et l'expérience que devraient détenir les membres potentiels du tribunal, et il l'a transmise aux juges en chef des tribunaux concernés. Ces derniers ont ensuite proposé au ministre de la Justice les noms des juges susceptibles d'être nommés au tribunal. Finalement, le ministre a formulé des recommandations au gouverneur en conseil qui, en vertu de l'article 6 de la loi, est celui qui détient le pouvoir de choisir les juges, comme je l'ai dit.
    Comme vous pouvez le constater, la nomination des membres du tribunal s'est révélée un processus long et complexe, qui comportait plusieurs étapes et plusieurs éléments importants à considérer. Après la nomination des membres, le tribunal est devenu une entité administrative indépendante et pleinement fonctionnelle. Ni gouvernement ni aucune autre institution ne peuvent dire au tribunal comment gérer ses affaires.
    En vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, le greffier du tribunal possède les pouvoirs d'administrateur général du greffe. À ce titre, il a la responsabilité de gérer l'ensemble des activités et du budget du tribunal, sous la direction du président. Le greffe est un organisme fédéral qui rend des comptes au Parlement par l'entremise du ministre des Affaires indiennes. Ce mode de présentation de rapports est courant pour les organismes fédéraux et les tribunaux et il ne compromet nullement l'indépendance du tribunal.
    Le tribunal a déjà consulté le ministère de la Justice sur des questions administratives. Par exemple, en juillet 2010, le président nous a fait part de ses préoccupations entourant certains problèmes opérationnels. Le ministère lui a présenté des suggestions pour l'aider tout en respectant l'indépendance du tribunal.

  (0900)  

    Le tribunal est un organisme créé par la loi. Il a le pouvoir d’établir ses règles de pratique et de procédure. Cela étant dit, conformément à un accord politique conclu entre l’APN et le ministre des Affaires indiennes, des fonctionnaires du ministère de la Justice et du ministère des Affaires indiennes ont collaboré avec des représentants de l’APN afin de préparer un mémoire conjoint sur les règles de pratique et de procédures proposées. Ce mémoire a été remis au tribunal en décembre 2009.
    En juin 2010, les membres du tribunal ont publié leur propre version de ces règles. Par l’intermédiaire de mon bureau, le Canada a été un des 11 intervenants à présenter des commentaires au tribunal. En octobre 2010, ces 11 intervenants ont formé un comité consultatif et rencontré les membres du tribunal.
    À la suite de ces rencontres, le tribunal a publié la version définitive des règles de pratique et de procédure. Celle-ci présente un processus flexible et fait référence à des lignes directrices sur les pratiques à adopter, ce qui, à notre connaissance, n’avait pas encore été établi. Le ministère de la Justice a proposé d’aider le tribunal par l’entremise du comité consultatif, si d’autres discussions ont lieu sur l’élaboration de ces lignes directrices.
    Le tribunal travaille en étroite collaboration avec le service de rédaction législative du ministère de la Justice pour mettre la touche finale aux règles de pratique et de procédure aux fins de leur publication dans la Gazette du Canada, Partie II. Ces règles devraient être en vigueur sous peu, et les Premières nations pourront formuler leurs revendications auprès du tribunal d’ici la fin avril 2011.
    J’aimerais parler brièvement des progrès du ministère de la Justice au chapitre de l’arriéré des revendications particulières. Évidemment, cela fait partie intégrante du succès de l’initiative La justice, enfin.
    Comme vous l’avez entendu plus tôt, le Tribunal des revendications particulières fixe des délais serrés pour le Canada. Celui-ci doit, dans ces délais, analyser et donner suite à toute nouvelle revendication et aux revendications en inventaire lors de l’entrée en vigueur de la loi. À ce moment, 541 revendications figuraient déjà au registre et bon nombre d’entre elles étaient en attente de l’avis juridique du ministère de la Justice.
    Je suis fière de dire que nous avons fait des progrès considérables. En février 2011, le ministère de la Justice n’avait plus que 95 avis juridiques à rédiger concernant des revendications en inventaire. Autrement dit, nous avons réglé 80 p. 100 de l’arriéré accumulé en plus de 30 ans.
    Pour atteindre ce résultat, le ministère a d’abord reconnu que de nouvelles ressources ne seraient pas suffisantes. Nous devions modifier notre approche. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec le ministère des Affaires indiennes pour trouver des façons de réduire le volume de documents analysés et nous assurer que les demandes étaient complètes avant de les soumettre au ministère pour examen.
    Nous avons aussi adopté plusieurs processus internes visant à réduire les délais de production d’avis juridiques. Nous avons formé des équipes pour tirer profit des connaissances et de l’expertise de chacun, regroupé les revendications semblables et, dans la mesure du possible, formulé un avis juridique pour ces groupes de revendications.
    Le plus important, c’est que le ministère de la Justice a élaboré un processus simplifié permettant d’émettre des avis juridiques sur les revendications particulières moins complexes et inférieures en valeur, et ce dans un délai de 20 jours ouvrables. Étant donné qu’un grand pourcentage des revendications en inventaire tombe dans cette catégorie, ce processus a joué un rôle important dans notre succès.
    Pour les revendications plus complexes et censée avoir une valeur anticipée plus élevée, mais de moins de 150 millions de dollars, le ministère continue de préparer des avis juridiques ordinaires. Cependant, ces avis sont maintenant produits dans les 60 jours. Il s’agit d’une nette amélioration, puisqu’à une certaine époque, le délai était de plusieurs années.
    Il y a encore du travail à faire, mais le ministère s’engage à ce qu’un avis juridique soit émis pour toutes les revendications en inventaire et à ce que le ministre des Affaires indiennes puisse donner suite aux revendications dans le délai de trois ans fixé par la loi.
    J’aimerais parler brièvement du rôle du ministère par rapport aux revendications évaluées à plus de 150 millions de dollars. On ne connaît pas toujours l’importance d’une revendication au moment où celle-ci est présentée au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. On demande au ministère de la Justice d’émettre, en vertu de la politique sur les revendications particulières, un avis juridique sur l’existence d’une obligation légale à respecter. Lorsque l’importance de la revendication dépasse la compétence du tribunal et la limite fixées par la politique, c'est-à-dire qu’elle est évaluée à plus de 150 millions de dollars, à la suite de l’émission d’un avis juridique, le ministère continue de soutenir le Cabinet dans son analyse de cette revendication.
    En terminant, le ministère a toujours à coeur la mise en oeuvre fructueuse de l’initiative La justice, enfin, au profit des peuples des Premières nations et de tous les Canadiens.
    Merci beaucoup. Je suis impatiente de répondre aux questions des membres du comité.
     Merci.

  (0905)  

    Merci beaucoup, madame McCurry.
    Passons maintenant aux questions. Nous allons amorcer une série d'interventions de sept minutes chacune, en commençant par M. Bagnell.
    Allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Merci d’être venue. Vous nous avez fourni des informations plutôt utiles.
    Cette étude porte principalement sur les revendications de plus 150 millions de dollars. J’imagine, donc, que la plupart des questions se rapporteront à celles-ci. Cependant, j’aurais quelques questions à poser au sujet des revendications dont la valeur est moins importante, car vous y avez également fait référence.
    Les informations concernant le nombre de revendications qu’il reste à évaluer sont contradictoires. Selon le rapport national sommaire sur l’état d’avancement des travaux publié il y a deux semaines, 529 revendications figureraient encore au registre; 360 seraient à l’étape de l’évaluation et 169 à l’étape des négociations.
    Si je ne m’abuse, Mme Swords vient de nous dire que 270 revendications étaient à l’étape de l’évaluation et que 90 étaient à l’étape des négociations. C'est 150 revendications de moins que ce que le rapport nous apprend.
    Pouvez-vous…?

  (0910)  

    Certainement, mais j’aimerais d’abord vous présenter ma collègue, Anik Dupont. Elle est directrice générale de la Direction générale des revendications particulières au Secteur des traités et du gouvernement autochtone. C’est une spécialiste de ces chiffres.
    La différence vient du fait que je faisais uniquement référence à l’arriéré qui existait déjà en octobre 2008. Nous continuons à recevoir de nouvelles demandes d'examen de revendications particulières. Je crois que les chiffres que vous soulevez tiennent compte de l’arriéré et des nouvelles revendications.
    Je peux vérifier auprès de ma collègue.
    Lorsque la loi est entrée en vigueur, le registre comptait plus de 800 revendications. Notre objectif était de réduire ce nombre, tout en respectant le délai de trois ans, bien entendu. Nous faisons toujours rapport sur l’arriéré, mais depuis l’entrée en vigueur de la loi, nous avons reçu 109 nouvelles revendications.
    Vous avez dit, je crois, que 12 revendications ont été réglées dernièrement pour une somme de 507 000 $ environ, soit 42 000 $ par revendication. S’agissait-il de la moyenne de ces revendications?
    Il s’agit ici de millions: 500 millions de dollars.
    Donc, 500 millions pour 12 revendications?
    C’est exact.
    Certaines sont plus importantes que d’autres. Les montants sont très variés, alors on ne peut pas faire de moyenne. Une des revendications a été réglée pour moins de trois ou quatre millions, et une autre pour plus de 100 millions. Ça varie.
    Donc, vous parlez des revendications de plus de 150 millions de dollars, n’est-ce pas?
    Non, non, je parle de celles réglées avec les 500 millions. Je crois que la plupart d'entre elles tombent dans la catégorie des revendications de moins de 150 millions de dollars.
    D’accord, mais en divisant le nombre de revendications, on obtient une moyenne d’environ 40 000 $.
    Je suis désolée, mais je ne vous suis plus.
    Si vous prenez le nombre de revendications réglées et que vous divisez la somme dépensée, quelle est la moyenne, environ?
    Eh bien, 500 millions de dollars ont été dépensés au cours de l’exercice actuel, soit depuis le 1er avril, pour régler 12 revendications, alors je ne sais pas comment vous arrivez à 43 000 $.
    Douze revendications ont été réglées pour une somme de 500 millions de dollars. Il est très difficile de faire une moyenne, puisque certaines revendications sont plutôt petites, toutes proportions gardées, alors que d’autres sont plus importantes.
    Nous pouvons vous fournir la liste de ces revendications, si vous le désirez.
    D’accord.
    Mais à ce rythme, on dirait que… le budget ne prévoit que 250 000 $ par année, c’est bien cela?
    Non, 250 millions.
    Ah oui, c’est vrai, 250 millions.
    C’est 250 millions de dollars par année pendant 10 ans, mais ce montant peut être reconduit. Si nous ne dépensons qu'une partie de ce montant au cours d’une année, nous demandons au Parlement, dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses, de reconduire le reste à un exercice où l’on prévoit régler plus de revendications. C’est ce que nous avons fait cette année.
    D’accord.
    Si on poursuivait à ce rythme, combien de temps faudrait-il pour régler toutes les revendications?
    Tout dépend du genre de règlement. Si elles sont réglées grâce à la négociation, il faut tenir compte du délai de trois ans pour l’évaluation et du délai de trois ans pour la négociation.
    Non, je veux dire au rythme actuel.
    Ensuite, la Première nation doit décider si elle est satisfaite du résultat de l’évaluation. Si, par exemple, on conclut qu’il n’y a aucune obligation juridique à respecter et que, par conséquent, il n’y aura aucune négociation, la Première nation peut, en vertu de la Loi sur le Tribunal des revendications particulières, porter sa cause devant le tribunal.
    Il est donc difficile de dire combien de temps il faudrait, car…
    Si l’on se fie au rythme actuel et que nous le maintenons, combien de temps faudrait-il pour régler toutes les revendications?
    Anik, tu veux répondre?
    Dès qu’une revendication est formulée, elle est assujettie à un délai de trois ans pour l’évaluation, puis à un autre délai de trois ans pour la négociation. Nous faisons de notre mieux pour respecter ces délais, mais ce n’est pas toujours possible. C’est difficile à dire, parce qu’on ignore quel genre de revendication va être formulée. Nous en recevons constamment de nouvelles.

  (0915)  

    D’accord.
    Passons aux revendications de plus de 150 millions. Vous dites que les seules de cette catégorie figurent déjà à l’inventaire. Combien y en a-t-il?
    Encore une fois, c’est difficile à dire. J’aimerais d’abord faire une mise en garde. Parfois, les gens analysent la revendication d’une Première nation et disent que sa valeur dépasse les 150 millions de dollars, alors qu’elle est peut-être composée de 10, 15 ou 28 revendications plus petites qui totalisent plus de 150 millions. Parmi les revendications qui figuraient au registre, six avaient, selon nous ou selon la Première nation concernée, une valeur dépassant les 150 millions de dollars.
    Nous venons de régler la revendication de la Bigstone Cree Nation. Celle-ci était composée, en réalité, de trois revendications différentes. Donc, en théorie, il ne s’agissait pas d’une revendication dépassant les 150 millions de dollars si on prend chaque revendication individuellement.
    Il y a la revendication concernant la frontière de la Fort William Nation. À l’origine, on croyait que sa valeur dépassait les 150 millions de dollars, mais elle a été réglée pour moins que ça.
    Quatre autres font encore l’objet de discussions. Reste à voir si leur valeur est supérieure à 150 millions de dollars, mais les Premières nations concernées croient qu’une d’entre elles dépasse cette valeur. Il y a la revendication particulière du canton de Dundee d’Akwesasne. Il y a…
    D’accord. Je vous demanderais de conclure, car nous avons dépassé le temps prévu pour cette intervention.
    Il y a la revendication particulière de la Seigneurie de Sault-Saint-Louis de Kahnawake. Il y a la revendication particulière de Coldwater-Narrows, puis celle concernant la cession de 1910 de la Première nation de Siksika.
    Encore une fois, ces revendications sont celles dont la valeur dépasse les 150 millions de dollars, selon les Premières nations concernées.

[Français]

    Merci, monsieur Bagnell.
    J'invite maintenant M. Lemay à prendre la parole pour sept minutes.
    Je vous remercie d'être ici.
     J'ai écouté avec attention vos remarques et l'avocat en moi resurgit rapidement. Je ne veux pas passer une partie de la journée là-dessus, mais en ce qui a trait au Tribunal des revendications particulières du Canada, en fait, c'est réglé, c'est en chemin, ça va bien. Les remarques et les rapports indiquent que ça semble aller dans la bonne voie.
    Madame Swords, j'ai un peu de difficulté à comprendre vos chiffres. J'ai rencontré des représentants des Six Nations et ils ont des demandes de plusieurs milliards de dollars. On parle des Six Nations au coeur de Toronto et de sa région environnante. Faites-vous une différence entre les revendications particulières et les revendications territoriales? Selon vous, sont-elles fondamentalement différentes ou peuvent-elles être traitées ensemble?
    Monsieur Lemay, si vous me le permettez, je vais répondre en anglais.
    Oui.
    Je m'excuse, mais je veux être très précise.

[Traduction]

    Oui, il y a une différence de taille entre une revendication territoriale et une revendication particulière. Les revendications particulières s'appuient sur les dispositions d'un traité et allèguent que le gouvernement ne s'est pas acquitté des obligations énoncées dans le traité ou, d'une façon ou d'une autre, qu'il n'a pas rempli une promesse; elles peuvent également porter sur la mauvaise gestion des avoirs ou des fonds d'une Première nation. Les revendications territoriales sont présentées lorsqu'il n'y a pas de traité et qu'une Première nation revendique encore la propriété d'un territoire donné.
    Vous avez soulevé un point intéressant au sujet des Six Nations. J'ai moi-même posé cette question: où, dans tout cela, se situent les Six Nations? La réponse, c'est qu'elles ont environ 28 revendications particulières. Une a été réglée, et il en reste 27 dont la valeur globale pourrait se chiffrer à plus de 150 millions de dollars, mais individuellement, aucune n'atteint ce montant. Elles sont actuellement devant les tribunaux.
    Il faut se rappeler que le processus du Tribunal des revendications particulières constitue un mode substitutif de règlement des conflits. On négocie, et si les négociations achoppent, on va devant le tribunal. Les 27 revendications particulières des Six Nations qui n'ont pas été résolues sont actuellement devant les tribunaux. Nous avons aussi entrepris d'essayer de discuter avec eux de la façon de procéder pour ces 27 revendications. Devrions-nous tenter de les traiter une par une, ou toutes ensemble? Le dossier est très complexe.

  (0920)  

[Français]

    C'est non seulement complexe, mais surtout très difficile d'approche. À mon avis, c'est une question d'approche qui sera importante.
    Les Mohawks, qui viendront témoigner devant nous même si on les a à peu près tous rencontrés ici, ne reconnaissent pas ou ont de la difficulté à reconnaître l'Assemblée des Premières Nations. Ils sont complètement individualistes, que ce soit à Akwesasne, à Kanesatake ou à Kahnawake, pour ne parler que du Québec. Je vais laisser à mes collègues de l'Ontario le soin de parler de ceux de l'Ontario.
    N'y a-t-il pas moyen, par exemple, d'établir une médiation, d'avoir un médiateur et même, si on pousse l'idée un peu plus loin, d'avoir un arbitrage obligatoire? Comme vous le disiez vous-même dans vos remarques, vous devez encore aller au Cabinet pour les revendications supérieures à 150 millions de dollars. Il est donc encore possible qu'une intervention gouvernementale empêche la progression des négociations, du fait qu'on doit aller chercher un mandat au Cabinet, et souvent on en revient avec un mandat changé et ainsi de suite. Par contre, si ces dossiers étaient soumis au Tribunal des revendications particulières du Canada, la décision du tribunal serait irrévocable, sans appel.
     J'ai lu tout ce qui s'est écrit par le Sénat à ce sujet et je me pose la même question. Ne pourrait-on pas penser à établir, par exemple, une médiation ou même un arbitrage obligatoire qui lierait les deux parties? En effet, le problème est de lier les deux parties. Je parle bien sûr des revendications particulières de plus de 150 millions de dollars. Je ne parle pas des revendications territoriales qui, elles, constituent un tout un autre débat, selon ce que vous nous dites.
    Je me demande s'il n'y a pas une solution pour éviter que vous ne soyez toujours obligés, même pour ce qui touche la justice, de vous présenter devant le Cabinet, de faire des allers-retours incessants pendant plusieurs années. En effet, on ne parle pas de mois.

[Traduction]

    Le processus en vigueur pour les revendications d'une valeur de plus de 150 millions de dollars exige que nous nous adressions au Cabinet. C'est à lui, et non à nous, qu'il incombe de choisir les moyens possibles de régler une revendication particulière d'une valeur de plus de 150 millions de dollars. Nous serions obligés d'aller devant le Cabinet pour expliquer la teneur de la revendication et suggérer des solutions.

[Français]

    Excusez-moi de vous interrompre, madame Swords, mais j'aimerais savoir qui a établi la politique selon laquelle vous deviez aller devant le Cabinet. Est-ce le ministre, est-ce le Cabinet? Qui a décidé de cette politique vous obligeant à vous présenter sans cesse devant le Cabinet? Je n'ai pas trouvé cette information dans les documents.

[Traduction]

    Eh bien, en fait, les dispositions législatives sur le tribunal énoncent qu'il n'a pas compétence pour accorder une indemnité supérieure à 150 millions de dollars, alors c'est la loi qui fixe la limite de 150 millions de dollars.
    Ce sont en fait les ministres du Cabinet qui ont décidé qu'il faut s'adresser à eux pour les montants supérieurs à 150 millions de dollars. Je crois que le ministre Strahl, quand il a témoigné devant le comité à quelques reprises, a expliqué que pour les montants supérieurs à 150 millions de dollars, le Cabinet doit attribuer un mandat de négociation.

[Français]

    Même avec les 250 millions de dollars par année pendant 10 ans, ce qui totalise plus de 2 milliards de dollars, vous êtes obligés de retourner devant le Cabinet?
    Je vais émettre l'hypothèse suivante. Si vous régliez avec Kanesatake une entente de 151 millions de dollars, faudrait-il quand même que vous vous présentiez devant le Cabinet?
    Excusez-moi, madame Swords, mais si je pose ces questions, c'est parce que nos amis les Mohawks viendront témoigner devant nous dans quelques jours et je veux être capable de leur fournir les réponses à ces questions.
    Pourriez-vous répondre brièvement?

[Traduction]

    J'aimerais bien qu'une revendication d'une valeur supérieure à 150 millions de dollars puisse se régler rapidement, mais, quoi qu'il en soit, la Politique sur les revendications particulières, adoptée dans le cadre de l'initiative La justice, enfin, n'habilite pas le ministre des Affaires indiennes à régler ce genre de revendications. Pour tout ce qui est évalué à plus de 150 millions de dollars, il doit s'adresser au Cabinet.

  (0925)  

[Français]

    Merci, monsieur Lemay.
    C'est maintenant à Mme Crowder pour sept minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie pour votre présence.
    Moi aussi, j'ai deux ou trois questions à poser au sujet des chiffres. J'ai trouvé hier dans le Web le rapport national sur les revendications particulières. Il date du 28 février. Est-ce que ce sont les chiffres les plus récents? J'y vois qu'il y a 526 revendications en cours de négociation, que 893 ont été conclues et que 77 sont devant les tribunaux. Est-ce que ce sont les chiffres les plus à jour?
    Oui.
    Si je vous comprends bien, depuis l'entrée en vigueur de la politique, il y a eu 109 toutes nouvelles revendications. Il ne s'agit pas d'anciennes revendications reformulées, mais de toutes nouvelles revendications.
    C'est bien cela.
    Très bien. Ce sont donc bien les chiffres les plus récents.
    Oui.
    Au sujet des revendications conclues, les 800...
    Oui, je vois que 893 ont été conclues.
    C'est le nombre cumulatif, c'est-à-dire depuis l'entrée en vigueur de la politique.
    D'accord.
    Je suis curieuse aussi de savoir ce que sont ces 265 revendications au sujet desquelles il a été décidé qu'il n'y a « aucune obligation légale ». Est-ce que la Première nation pourrait choisir de les porter devant le tribunal? Cela voudrait dire, théoriquement, que sur l'ensemble des revendications, 265 pourraient être portées devant le tribunal.
    Oui.
    En ce qui concerne les 252 dossiers fermés, est-ce que c'était d'un accord mutuel, ou parce qu'il n'y avait pas d'activité, ou...
    L'un et l'autre. C'est parfois à la demande de la Première nation, d'autres fois, quand il n'y a eu aucune activité et nous ne recevons pas de réponse de la Première nation, nous fermons le dossier.
    Alors si c'est parce qu'il n'y a pas eu de réponse de la première nation, ces dossiers seraient encore ouverts si la première nation réagit?
    Elle pourrait décider de réactiver son dossier.
    Donc ces dossiers pourraient être rouverts?
    Oui.
    Je vois.
     À propos encore de ces chiffres, aux fins du compte rendu, 46 p. 100 des revendications particulières émanent de la Colombie-Britannique, ce qui est énorme, étant donné que nous avons si peu de traités. Je tenais à ce que ce soit au compte rendu.
    Et bien entendu, à cause de la limite fixée en 1973 dans la politique sur les revendications particulières, aucun nouveau traité qui sera signé ne sera admissible, n'est-ce pas?
    D'après le Plan d'action relatif aux revendications particulières lié à l'initiative La justice, enfin, il est possible à une première nation de saisir le tribunal d'une revendication si le ministre « a consenti par écrit, à toute étape de la négociation du règlement, à ce que le Tribunal soit saisi de la revendication ». Est-il arrivé que le ministre consente à ce que le tribunal soit saisi d'une revendication qui était en cours de négociation?
    Pas jusqu'à présent.
    Puisque le tribunal se prépare, sommes-nous au courant de revendications dont certaines premières nations entendent le saisir?
    Dans votre exposé, madame McCurry, vous avez dit que les Premières nations pourront présenter leurs revendications au tribunal d'ici à la fin d'avril 2011. Leur serait-il possible de signifier déjà leur intention de le faire?
    C'est possible, mais peu probable. Peut-être dans le cadre d'une conversation ordinaire, mais il n'y aurait pas de déclaration officielle d'intention jusqu'au moment venu.
    Elles ne peuvent donc pas signifier leur intention avant environ avril 2011?
    Elles pourront présenter leurs revendications à ce moment-là, oui.
    À ce moment-là seulement.
    Madame Swords, j'aimerais revenir à votre déclaration.
    Je fais mes excuses à tous les avocats qui sont ici, mais ce texte me donne l'impression d'avoir été rédigé par un avocat. À la page 7...

[Français]

    Holà! c'est dangereux, j'invoque le Règlement, monsieur le président!
    Des voix: Ah, ah!

[Traduction]

    Je voue avoue que mon fils est avocat.
    À la page 7 de la version française, dans le paragraphe qui concerne l'accord politique conclu en novembre 2007 entre le gouvernement du Canada et l'Assemblée des Premières nations, on dit que les cadres supérieurs du ministère ont rencontré les représentants de l'APN à plusieurs reprises en 2009 et, plus loin dans le paragraphe, que le point de vue de l'APN « est bien compris par le gouvernement du Canada ». J'ai l'impression, en lisant cela, qu'aucune entente n'a été conclue sur la manière dont les revendications de grande valeur seront traitées. C'est un peu comme si on dit « Nous avons entendu, nous comprenons ce que dit l'APN, et alors? »
    Donc pourriez-vous me dire combien il y a eu de rencontres avec l'APN depuis 2009 au sujet des revendications d'une valeur supérieure à 150 millions de dollars, et si le gouvernement et l'Assemblée des Premières Nations se sont entendus sur la manière de procéder? J'aimerais pouvoir rapidement passer à l'accord politique. Il stipule que les travaux futurs porteraient notamment sur « les revendications exclues de la compétence monétaire ou d'autres dispositions du projet de loi ». Ensuite, bien sûr, le plan de travail conjoint porte aussi sur le processus de règlement des revendications évaluées à plus de 50 millions de dollars.
    C'était assez vaste, mais à votre avis, est-ce que l'Assemblée des Premières nations partage le point de vue du gouvernement au sujet des revendications d'une valeur supérieure à 150 millions de dollars? Je devrais plutôt dire le point de vue du ministère, puisque c'est lui que vous représentez...

  (0930)  

    Je vais faire quelques observations, et ensuite je laisserai Anik répondre à votre question sur le nombre de rencontres avec l'APN. Vous pouvez voir dans l'accord politique que nous sommes « déterminés à travailler ensemble afin d'appuyer les travaux actuels ». Il ne s'agissait pas d'un engagement à travailler ensemble pour finaliser un accord quelconque, mais seulement à appuyer les travaux.
    L'affirmation de ma déclaration préliminaire à laquelle vous faites allusion, c'est que nous avons été informés de ces discussions, et il est clair que nous nous entendons largement sur l'intérêt que présentent des règlements négociés, et...
    Pourriez-vous m'expliquer les différences?
    Je crois que quand on pense aux enjeux qui entourent le processus du Cabinet... On ne peut pas changer ce processus unilatéralement. Le processus du Cabinet est confidentiel. Le Cabinet a établi des procédures de fonctionnement qui datent de longtemps. Pour les présentations au Cabinet, il y a une marche à suivre bien précise.
    À ce que je comprends, l'APN aimerait par exemple que la première nation puisse comparaître devant le Cabinet ou présenter elle-même ses revendications. Il est peu probable que cela puisse se faire dans le cadre du processus actuel. Ce serait en fait plus approprié pour un tribunal ou d'autres instances. C'est une autre façon de faire.
    Il y a donc des choses qu'il nous est impossible de changer, dans le mode de fonctionnement du Cabinet.
    Y a-t-il d'autres différences...? Cela semble en être une de taille, concernant la possibilité pour les Premières nations de présenter directement une revendication au Cabinet. Y a-t-il d'autres différences importantes dans le processus en ce qui concerne les revendications d'une valeur de plus de 150 millions de dollars?
    Eh bien, comme je l'ai dit, ces revendications doivent vraiment être présentées au Cabinet, alors le délai de traitement n'est pas le même que celui du Tribunal des revendications particulières, ou pour le traitement des revendications de valeur inférieure à 150 millions de dollars.
    Les délais sont donc un enjeu, pour ce qui est de ...?
    Je ne sais pas vraiment, parce que je ne suis pas sûre qu'un délai ait jamais été imposé au Cabinet, et je ne sais pas ...
    En fait, là où je veux en venir, c'est... Nous allons entendre le témoignage de représentants de l'Assemblée des Premières Nations, mais il est toujours intéressant de connaître l'idée que se fait l'Assemblée du processus, comparativement à celle qu'en a le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. J'essaie de cerner, selon votre perspective, les principaux obstacles auxquels se butent l'Assemblée des Premières Nations, vous et tout autre intervenant — le ministère de la Justice, je suppose — pour régler les revendications d'une valeur de plus de 150 millions de dollars.
    Nous n'avons plus le temps, alors soyez brève, autant que possible.
    Je vous remercie.
    Si c'est possible, nous vous fournirons une réponse au sujet du nombre de rencontres que nous avons eues.
    Nous devrons le confirmer ultérieurement, mais il y a eu six ou sept rencontres, et aussi une séance de réflexion avec l'APN.
    Je vous remercie.
    Merci, madame Crowder.
    La parole est maintenant à M. Rickford, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins. En fait, en faisant vos exposés, vous avez répondu à plusieurs questions préliminaires pour l'amorce de cette étude.
    Je tiens à remercier la Bibliothèque du Parlement. Elle a fourni à l'annexe A un graphique très utile du cheminement des revendications particulières. Étant infirmier, je connais bien ce genre d'illustration algorithmique, qui est très utile pour se repérer.
    Je tiens aussi à vous féliciter de l'important travail que vous faites pour réduire l'arriéré. Je suppose que ce n'est pas tout, pour y parvenir, d'avoir une politique comme la vôtre, qui vise à créer un mécanisme bien rodé. Il me semble que c'est parce que votre organisation a travaillé tellement fort et tant consulté, en collaboration avec l'APN, que le gouvernement a pu élaborer quelque chose pouvant convenir à tout le monde. Je vous en félicite.
    J'accompagnais le ministre à Fort William, il n'y a pas très longtemps, quand nous avons fait cette annonce. Je peux vous dire que ce genre de déclaration à la collectivité contribue largement à régler des problèmes de longue date, et permet à la nation de se tourner vers l'avenir. Nous sommes heureux pour Fort William et, par association, pour la ville de Thunder Bay.
    J'ai une première question à vous poser, un peu par curiosité, mais elle a un rapport avec l'objet de mon intervention. Tout d'abord, pourquoi une limite de 150 millions de dollars a-t-elle été fixée pour les règlements depuis l'initiative La justice, enfin? D'où vient ce chiffre? Comment a-t-il été établi? C'est une entrée en matière pour la question suivante, qui, je pense, ira plus loin.
    Madame Swords, peut-être pourriez-vous me répondre?
    Certainement, monsieur Rickford.
    Je conviens avec vous que ce graphique est très utile.

  (0935)  

    Il est effectivement excellent.
    On le trouve sur le site Web du ministère et dans les documents traitant du processus des revendications particulières qui sont diffusés à grande échelle. C'est un tableau bien conçu.
    Le montant de 150 millions de dollars proposé dans le cadre de l'initiative La justice, enfin sert en quelque sorte d'indicateur, de paramètre pour la mise en place d'un mode alternatif de règlement des conflits qui permettra de régler plus rapidement les revendications ne dépassant pas un certain montant.
    Les revendications évaluées à plus de 150 millions de dollars sont considérées, vu leur importance, leur complexité... parfois, cette complexité s'explique tout simplement par le fait qu'il faut remonter 200 ans en arrière, effectuer beaucoup de recherches pour les évaluer. En les retirant du processus, nous pouvons résoudre plus rapidement celles qui n'excèdent pas 150 millions de dollars. Grâce au fonds de 2,5 milliards de dollars qui a été établi, nous pouvons accélérer le règlement des revendications dont la valeur ne dépasse pas 150 millions de dollars.
    J'ajouterais que nous avons réussi cette année, en Colombie-Britannique, à venir à bout d'une revendication qui a demandé près de sept ans de négociations. Nous devions nous entendre avec les municipalités pour ce qui est des droits de passage, des permis, ainsi de suite. La revendication était évaluée à 300 000 $. Un dossier peut être complexe même lorsque sa valeur est inférieure à 150 millions de dollars.
    Madame Swords, vous avez soulevé le point suivant dans votre exposé. Comment décidez-vous... Quel est le facteur ou quels sont les facteurs qui vous permettent de déterminer qu'une revendication va peut-être dépasser les 150 millions de dollars si l'ensemble des revendications présentées par une collectivité sont regroupées? Qu'est-ce qui vous permet de dire, d'accord, en vertu des sous-catégories établies, nous allons traiter ces revendications séparément parce qu'elles sont inférieures à 150 millions de dollars, et non pas globalement, puisque leur valeur dépasserait à ce moment-là 150 millions de dollars?
    J'ai du mal à suivre le raisonnement. Je voudrais profiter des dernières minutes qui me restent pour en discuter. Je veux que les choses soient claires dans mon esprit.
    Je vais demander à ma collègue du ministère de la Justice de répondre également.
    Il faut essayer de voir si toutes les revendications que l'on veut regrouper sont effectivement assorties d'une obligation légale de la part du gouvernement fédéral.
    D'accord.
    Il se peut que dans certains cas, aucune obligation légale ne soit rattachée à la revendication. On voudra peut-être les regrouper en vertu du processus même si, séparément, leur valeur ne dépasse pas 150 millions de dollars, juridiquement parlant.
    Je vais céder la parole à ma collègue.
    J'ajouterais ceci.
    Lorsque nous examinons les revendications dans le but de déterminer si elles soulèvent une obligation légale non respectée, nous nous fondons sur une série de critères. Si nous sommes saisis de plusieurs revendications, que nous constatons qu'elles répondent toutes aux mêmes critères et qu'elles soulèvent toutes les mêmes problèmes, nous allons vraisemblablement proposer qu'elles soient regroupées.
    Par ailleurs, il arrive souvent que les revendications ne soient pas fondées sur les mêmes critères et qu'elles ne soulèvent pas les mêmes questions. Il peut s'agir de revendications distinctes, même si elles viennent de la même première nation.
    Merci.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste une minute, monsieur Rickford.
    Merci.
    Ma dernière question est très brève. Elle porte sur le processus des revendications particulières et le Tribunal des revendications particulières. Je veux tout simplement avoir quelques précisions.
    Le recours à la médiation par le tribunal se ferait dans quel but? Je présume que tout renvoi au tribunal sera précédé de négociations. Or, y a-t-il un mécanisme qui prévoit la poursuite des discussions? Est-ce que cela tomberait sous la gestion des instances, par exemple?
    Oui. La question de médiation a été abordée lors des discussions que nous avons eues, en octobre 2010, avec les membres du tribunal. Ils souhaitent que... L'article 12, si je ne m'abuse, précise que le tribunal peut établir des règles en matière de médiation. Nous estimons que la médiation s'impose dans le contexte de la gestion des instances pour améliorer l'efficacité du processus de règlement.

  (0940)  

    L'a-t-il fait? Compte-t-il en établir?
    Il reste encore beaucoup de travail à faire de ce côté-là. Le juge Slade, qui assume la présidence du tribunal, vient tout juste, si je ne m'abuse, d'envoyer une lettre au comité consultatif afin de l'inviter à participer à des discussions sur la médiation. Le consentement à la médiation est également un élément important à considérer. Nous aurons bientôt l'occasion d'examiner tout cela plus à fond.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Rickford.
    Nous allons maintenant entreprendre des tours de cinq minutes. Madame Fry, nous vous écoutons.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais revenir au tableau de l'annexe A, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. Merci.
    On précise, dans la deuxième case, que « la revendication respecte la norme minimale ». Il y a d'abord le « dépôt de la revendication », suivi de « la revendication respecte la norme minimale ». Qu'est-ce qu'on entend par norme minimale? La valeur en dollars de la revendication?
    Je vais demander à ma collègue de répondre, mais essentiellement, elle concerne la quantité et la qualité des renseignements fournis, pas simplement le montant d'argent réclamé.
    D'accord. Pouvez-vous me dire en quoi consiste cette norme?
    Ce que dit Mme Swords est exact. L'information figure sur notre site Web. La norme sert de guide aux Premières nations qui veulent soumettre des revendications. Il y a des exigences minimales pour ce qui est des documents à déposer. L'information doit être présentée d'une certaine façon pour simplifier et accélérer le traitement des revendications. Les Premières nations peuvent consulter le site Web pour obtenir ces renseignements.
    Merci.
    On voit, un peu plus loin, les mots suivants: « oui », « évaluation », et « acceptée pour la négociation ». Sur quels critères se fonde-t-on pour accepter une revendication pour la négociation?
    Le premier critère est l'existence d'une obligation légale de la part du gouvernement fédéral.
    Est-ce le seul critère, ou le critère principal?
    Le seul critère ou le critère principal?
    Une voix: [Note de la rédaction: inaudible]
    Le seul critère? D'accord. Merci.
    Vous dites que la décision du tribunal est finale. Or, au bas du tableau, on peut lire « révision judiciaire seulement ». Est-ce que cela veut dire que la décision n'est pas vraiment finale, qu'elle peut donner lieu à un examen judiciaire si la première nation concernée la rejette?
    Si je ne m'abuse, l'article 31 de la loi précise qu'une première nation peut s'adresser à la Cour fédérale aux fins d'un examen judiciaire. Ce sont surtout les questions de compétence qui seraient soumises à un tel examen.
    J'ai une dernière question à poser. Je sais que nous sommes en train de parler du processus des revendications particulières, mais qu'en est-il des négociations de traités qui se déroulent depuis maintenant une vingtaine d'années en Colombie-Britannique? Où en sont-elles? Pouvez-vous nous le dire, rapidement?
    Le processus des traités suit son cours. Il est très différent du processus des revendications particulières parce qu'il porte sur des enjeux qui ne s'appuient sur aucun traité. Il y a une commission d'étude des traités, et nous collaborons de près avec elle. Le ministre a récemment confié à un représentant spécial la tâche de trouver un moyen d'accélérer les négociations, de fermer le plus rapidement possible les dossiers qui sont sur le point d'être réglés.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Fry.
    Monsieur Weston, vous avez cinq minutes.
    Pour répondre à Mme Crowder, je tiens à préciser que certains de mes meilleurs amis sont avocats.
    Des voix: Oh, oh!
    M. John Weston: J'ai travaillé avec la commission des revendications particulières en Colombie-Britannique. Vous avez peut-être croisé certains de mes clients à un moment donné. Qui sait?
    J'appuie, évidemment, les mesures prises pour rationaliser le processus. D'importants progrès ont été réalisés. Les pays qui suivent nos travaux de près nous féliciteraient pour l'importance que nous accordons aux valeurs en matière de justice, vu que nous répondons aux besoins de personnes qui estiment avoir été laissées pour compte par le système en les réintégrant dans celui-ci. Je ne sais pas dans quelle mesure vous contribuez à ces efforts, mais je pense que les Canadiens doivent en être très fiers.
    Pouvez-vous nous dire ce que nous réserve l'avenir en termes de revendications nouvelles? Y a-t-il une fin en vue? Avons-nous l'impression qu'à un moment donné, il n'y aura plus de revendications à régler? Qu'est-ce qui nous permet de le croire?
    Vous avez dit que vous suivez l'évolution de la situation, que vous vous attaquez aux revendications plus complexes, que nous disposons d'un nouveau mécanisme pour régler les revendications dont la valeur est supérieure à 150 millions de dollars. Le Cabinet joue un plus grand rôle à ce chapitre. Toutefois, comment pouvons-nous conclure que le processus tire à sa fin? Comment les Premières nations et les Canadiens peuvent-ils dire...

[Français]

que c'est la fin du processus, qu'il n'y aura plus d'autres revendications?

[Traduction]

    Il est très difficile de répondre à cette question. Le processus qui a été mis en place prévoit la création d'un fonds spécial de 2,5 milliards de dollars sur 10 ans pour régler les revendications dont la valeur ne dépasse pas 150 millions de dollars. Celles-ci représentent, nous l'espérons, la grande majorité des dossiers en souffrance.
    Je ne sais pas si nous allons être en mesure de dire, un jour, qu'il n'y a plus de revendication à régler. Une revendication est une demande qu'une Première nation peut soumettre. Toutefois, elle doit être liée à des circonstances qui se sont déroulées dans le passé et j'ose croire qu'avec le temps, le Canada, les Canadiens, le gouvernement auront une meilleure idée de leurs obligations et qu'ils les respecteront.

  (0945)  

    Madame Swords, croyez-vous que le fait de rationaliser le processus, de diffuser des renseignements clairs sur le site Web revient à dire aux gens qu'ils doivent en profiter pour soumettre leurs revendications, car nous sommes en train de consolider celles-ci, d'aller de l'avant avec le processus de réconciliation nationale?
    C'est une très bonne façon de présenter la chose. Nous concentrons effectivement notre attention et nos efforts sur le règlement des revendications en souffrance.
    Est-ce que les représentants du ministère de la Justice souhaitent ajouter un commentaire?
    La loi — et, de manière générale, l'initiative La justice, enfin  — a pour objet de favoriser, comme elle le précise, la réconciliation. Comment? Par une transparence accrue, un meilleur accès au processus, une efficacité encore plus grande. Tout cela contribue à la justice.
    Voici une question subjective: comment les Premières nations réagissent-elles à ces démarches? Se disent-elles optimistes? Prêtes à y prendre part? Il est vrai que dans le passé, elles étaient totalement exclues du processus, elles se sentaient aliénées, insatisfaites. J'ai l'impression que ce n'est plus le cas, que les gens veulent que ce projet aboutisse.
    Il y a un peu des deux. Certaines Premières nations appuient le processus parce qu'il a été rationalisé. Elles savent que si elles soumettent une revendication, elles vont obtenir une réponse dans trois ans, que les négociations sont plus ciblées.
    Toutefois, nos équipes de négociation nous disent aussi que les Premières nations se sentent bousculées, qu'elles se sentent obligées de participer aux discussions. Avant le lancement de l'initiative La justice, enfin, nous pouvions passer sept, dix ans à la table de négociation. Aujourd'hui, elles se sentent un peu bousculées parce que nous réglons les choses plus rapidement, nous essayons d'en faire plus. Il s'agit d'une adaptation pour elles aussi. Il y a un peu des deux.
    Il est vrai qu'elles finissent par obtenir des résultats beaucoup plus rapidement, mais c'est ce qu'elles nous disent quand elles sont engagées dans le processus. Vous allez peut-être entendre la même chose des personnes qui vont comparaître devant vous.
    Je sais par expérience que les membres de la bande indienne de McLeod Lake ont remarqué, lors des négociations portant sur leurs revendications particulières, que la rationalisation du processus leur avait permis d'obtenir des résultats plus satisfaisants. Ils ont été agréablement surpris de voir que leur dossier avait été réglé.
    Avez-vous autre chose à ajouter au sujet de la certitude, du sentiment de finalité que dégage le processus?
    Malheureusement, croyez-le ou non, votre temps est écoulé.
    Merci beaucoup, monsieur Weston. Souhaitez-vous faire un bref commentaire? Je sais que d'autres intervenants ont parlé un peu plus longuement que prévu.
    Je pense que tout le monde, ici, aspire à ce sentiment de certitude, de finalité. C'est dans cette voie que nous nous acheminons.
    Vous hochez la tête en signe d'acceptation, ce qui veut dire que vous êtes du même avis.
    Merci beaucoup, monsieur Weston.

[Français]

    Monsieur Lemay, vous avez la parole. Vous disposez de cinq minutes.
    J'aimerais partager l'optimisme délirant de mon ami M. Weston. Votre optimisme déborde, monsieur Weston, mais je ne suis pas certain que ce soit partout pareil, comme on le verra au cours des prochaines semaines.
    Il est facile de faire une revendication particulière quand un train, une autoroute, un poteau d'Hydro-Québec passe sur le territoire des Autochtones, sur la réserve. C'est compliqué, mais selon moi c'est quand même physiquement palpable. Cependant, je cherche une solution dans les cas où un traité n'est pas respecté, où il y a des revendications. Lorsque je me penche sur tout le dossier des Mohawks, de la bande Six Nations de Grand River, d'Akwesasne, de Kanesatake, je cherche une solution. Ce sont les principales revendications actuelles. Je sais qu'il y en a énormément en Colombie-Britannique, et je laisserai mes collègues de ce coin en parler, mais quand je regarde le dossier des Mohawks, je ne vois pas de lumière au bout du tunnel. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais je n'en vois pas — et j'ai essayé d'en voir. Quand on les rencontre, on comprend qu'il n'y a pas de possibilité.
    C'est pour cela que j'en arrive à ma suggestion. N'y aurait-il pas moyen d'imposer une médiation ou un arbitrage obligatoire dans ce genre de revendications? Y a-t-il possibilité d'en arriver à cela?

  (0950)  

    Merci, monsieur Lemay.
    Dans le cas des Mohawks, les dossiers sont assez complexes. On parle beaucoup de l'histoire du Canada et du Québec. En ce qui a trait au dossier d'Akwesasne et de Dundee, on a quand même fait de vrais progrès à la table de négociations et on travaille très bien avec les groupes. Le processus est un peu plus long, car leur approche est différente et nous devons nous entendre et revoir notre approche pour y arriver. Néanmoins, dans ce cas, nous sommes tout près de régler une revendication particulière et nous discutons avec un autre groupe.
    En ce qui a trait à la médiation, il est certain que les deux parties doivent accepter cette idée et s'entendre sur le sujet sur lequel la médiation va porter. Parfois, c'est là que l'évaluation est plus difficile, car on ne peut même pas s'entendre sur le point de médiation, ou on ne peut pas avoir recours à la médiation pour une question de politique. Notre politique est claire, nous avons des balises à suivre. Quelquefois nous n'avons pas de marge de manoeuvre. Même s'il y avait un médiateur, nous ne pourrions peut-être pas aller dans la même direction que la Première nation.
     Vous êtes donc liés par la politique en place, et cela, les Premières nations doivent le savoir avant même de penser à soumettre une revendication. Est-ce la même situation en ce qui concerne le ministère de la Justice?

[Traduction]

    Nous nous en tenons à la politique qui a été mise en place.

[Français]

    Si les Autochtones veulent présenter une revendication et lancer un processus de négociations, le premier principe à suivre est le respect de la politique. Que se passe-t-il s'ils ne veulent pas la respecter? Est-ce que ça se termine là? Faites-vous alors face à une impasse?
    Oui, mais ils peuvent toujours emprunter la voie des tribunaux, ce qui est une autre option possible.
    A-t-on intérêt — c'est l'avocat en moi qui parle, n'en déplaise à Mme Crowder — à diviser une revendication, de sorte qu'on se présente devant le Tribunal des revendications particulières du Canada avec deux ou trois demandes ne totalisant pas 150 millions de dollars chacune? Je suis désolée, j'ai tendance à aborder les choses sous l'aspect juridique.

[Traduction]

    C'est une très bonne question, n'est-ce pas?
    Des voix: Oh, oh!
    Cela dépend encore une fois des faits. Ce n'est pas une bonne idée de diviser des revendications en fonction des faits, des circonstances qui les entourent.

[Français]

    A-t-on intérêt, si on fait face à un cas concernant trois communautés, à les regrouper? Cela peut-il se faire en vertu du processus?
    Oui, cela est possible. À certaines tables de négociations, partout au Canada, il y a plusieurs groupes.
    Merci.
    Merci, monsieur Lemay.

[Traduction]

    Je vais empiéter sur le temps de parole du parti ministériel pour poser une brève question à Mme McCurry.
    Nous avons mis l'accent, dans notre étude, sur les revendications particulières dont la valeur dépasse les 150 millions de dollars. Qu'en est-il du Tribunal des revendications particulières? A-t-il un rôle à jouer à ce chapitre?
    Non. La loi qui établit le Tribunal des revendications particulières fixe la limite des indemnités que ce dernier peut accorder à 150 millions de dollars.

  (0955)  

    Donc, il ne peut rendre une décision dans le cas d'une revendication dont le montant est incertain. Sur quel critère se fonde-t-on pour déterminer que la revendication dépasse ce montant? La valeur établie par le demandeur?
    Vous posez une question intéressante, car les revendications examinées dans le cadre du processus des revendications particulières ne sont souvent pas assorties d'un montant. Celui-ci est établi lors de l'analyse. Il est parfois mentionné, mais...
    Mais on arrive à la chiffrer à un moment donné.
    Oui. Si le dossier est renvoyé au tribunal, c'est en raison de certains critères déclencheurs qui ont permis de chiffrer la revendication.
    Si c'est le cas, le tribunal ne peut en être saisi.
    Madame Friedman, vous avez levé la main.
    Pour ajouter à ce que vient de dire Mme McCurry, c'est la loi qui fixe la limite des indemnités accordées par le tribunal. Les indemnités ne peuvent dépasser 150 millions de dollars. La revendication, lorsqu'elle est renvoyée au tribunal, est habituellement accompagnée d'un dossier qui réunit les éléments de preuve. Le tribunal examine le dossier et évalue l'indemnité à verser. Cette décision est prise lors du processus, avant que la revendication ne soit soumise au tribunal. Les membres du tribunal analysent les éléments de preuve.
    Le tribunal peut être appelé à jouer un rôle lorsque le processus est enclenché. Cela dépend des faits. Si, lors de l'examen de la preuve, on se rend compte que la valeur de la revendication dépasse la limite fixée, alors un autre processus est entrepris, soit celui que vous avez décrit plus tôt.
    La première nation sait ce que dit la loi, et ses avocats, eux, connaissent la limite qui a été fixée. On peut établir un parallèle avec la cour des petites créances. De nombreuses provinces et de nombreux territoires limitent les indemnités qui peuvent être versées. La personne qui s'adresse à cette instance est consciente du montant qu'elle peut recevoir. Il en va de même pour les Premières nations.
    Merci beaucoup.
    Mme Crowder va poser la dernière question. Nous allons ensuite conclure nos travaux.
    Monsieur le président, j'ai quelques questions, rapidement.
    Je crois que la revendication des Cris du Delta fait partie des revendications qui se sont retrouvées devant les tribunaux. Je sais qu'il y a eu une succession d'échanges avec le gouvernement à propos de l'accès aux documents concernant les Cris du Delta et le projet hydroélectrique du Manitoba. Je suppose que ces revendications ne sont pas incluses dans les chiffres sur les revendications particulières.
    Actuellement, on dénombre 77 revendications devant les tribunaux. Savons-nous combien d'entre elles dépassent les 150 millions de dollars?
    Non, je n'ai pas la réponse, mais nous pouvons regarder...
    Vous pourriez? Parce que cela pourrait représenter une énorme charge de travail au bout du compte.
    J'aimerais préciser que ce n'est pas possible à ce stade-ci. Lorsque des revendications se retrouvent devant les tribunaux, les revendicateurs déposent évidemment des plaidoiries, et dans ces plaidoiries, on n'indique pas nécessairement de montant limite. Nous pouvons y jeter un coup d'oeil, mais il se peut que ce ne soit pas nécessairement détaillé...
    Cela pourrait être un nombre considérable. Je ne sais pas... Parmi ces 77 revendications devant les tribunaux, y en a-t-il qui concernent les Six nations ou les Cris du Delta?
    Avant d'aboutir devant les tribunaux, les demandes doivent suivre le processus de règlement des revendications particulières. C'est ainsi que nous suivons leur évolution. Parce qu'à un moment donné, il est toujours possible d'abandonner les poursuites judiciaires et de reprendre le processus de règlement.
    Est-il possible de savoir combien, parmi les demandes se trouvant devant les tribunaux, sortent du cadre du processus de règlement des revendications particulières?
    Parmi les 77?
    Non, pourriez-vous nous dire combien de Premières nations ont porté leurs revendications particulières devant les tribunaux?
    Je le répète, certaines Premières nations peuvent s'adresser aux tribunaux en se fondant sur un certain nombre de motifs. Plusieurs de ces motifs peuvent ressembler à ceux prévus dans la politique sur les revendications particulières, mais, dans bien des cas, ils peuvent être beaucoup plus larges, de par leur nature et le type de réparation demandée au tribunal.
    Autrement dit... Je n'arrive pas à me rappeler du terme comptable approprié, peut-être que quelqu'un pourra m'aider. Il s'agit, en quelque sorte, de passif non capitalisé, n'est-ce pas? J'ignore si c'est le terme comptable exact. Avec toutes ces revendications devant les tribunaux, à un moment donné, le gouvernement devra faire face à ses obligations.
    Avons-nous une idée de ce que cela peut représenter? Je suis sûre que plusieurs ministères ont fait des estimations pour déterminer combien cela pourrait coûter.

  (1000)  

    Nous avons les chiffres pour le passif total éventuel en circulation, mais ils comprennent plusieurs éléments différents.
    Le passif éventuel, oui.
    Oui, nous avons les chiffres, mais je le répète, ils représentent un ensemble...
    Pourriez-vous nous les donner?
    Bien sûr.
    J'aimerais confirmer brièvement ce que j'ai entendu. Pour qu'il y ait médiation par consentement mutuel, il faut que les deux parties acceptent la médiation. Pourtant, ce n'est pas si clairement stipulé dans la partie concernant la médiation, dans l'initiative appelée La justice, enfin — Plan d'action relatif aux revendications particulières.
    Donc, pour qu'il y ait médiation, il faut que le gouvernement accepte. Si une Première nation fait savoir qu'elle veut se lancer dans un processus de médiation, le gouvernement doit être d'accord, pour toutes les raisons que vous avez invoquées. N'est-ce pas? Le gouvernement doit consentir à la médiation.
    Je ne crois pas qu'il puisse y avoir de médiation si une des parties n'est pas consentante; cela ressemblerait davantage à une forme d'arbitrage ou de solution imposée.
    Cela a posé problème lors de la mise en oeuvre des ententes de règlement des revendications territoriales, alors que les Premières nations voulaient la médiation, mais que le gouvernement ne souhaitait pas négocier, pour toute une série de motifs. Je comprends bien. Que ce soit clair pour tout le monde, ce n'est pas un instrument que les Premières nations peuvent utiliser pour signaler leurs intentions. Le gouvernement doit prendre part au processus également.
    Je vous remercie, madame Crowder.
    Mme Neville souhaite aussi poser une question rapidement.
    Très rapidement; la question tourne essentiellement autour des revendications supérieures à 150 millions de dollars. Comme vous le savez tous très certainement, lorsqu'on a évoqué la possibilité de fixer un plafond, dans la mesure législative, cela a suscité beaucoup de controverse, et bien des questions se sont concentrées là-dessus.
    Pourriez-vous nous donner ce que vous avez, par écrit, sur des directives, des processus ou quoi que ce soit d'autre concernant des revendications pouvant dépasser 150 millions de dollars, et nous indiquer quelles mesures vous envisagez, ainsi que toute information relative à des affaires ambiguës dont vous ignorez l'issue? Auriez-vous de la documentation à fournir au comité à ce sujet?
    Dans les documents qui sont postés sur notre site Web, il y a un paragraphe qui dit essentiellement que les revendications dépassant 150 millions de dollars relèvent de la responsabilité du Cabinet.
    Mais vous avez déclaré que vous aideriez le Cabinet à traiter les demandes dépassant 150 millions de dollars. Avez-vous des lignes directrices? Peut-être pourriez-vous nous les donner, mais j'aimerais en savoir un peu plus sur les revendications qui tournent autour de 150 millions de dollars ou qui les dépassent.
    Je crois que nous pouvons nous donner des informations sur l'aide que nous apportons aux Premières nations qui essaient de se lancer dans un processus de revendication et...
    Ce serait utile.
    Je pense que cela s'appliquerait aux demandes supérieures et inférieures à 150 millions de dollars. Cela pourrait répondre à quelques-unes de vos questions.
    Merci.
    Je vous remercie, chers collègues.

[Français]

    Je tiens à remercier les témoins de leurs présentations ce matin.

[Traduction]

    Je suis sûr que vous nous aiderez à documenter notre rapport le moment venu.
    Chers collègues, nous allons suspendre brièvement la séance pour dire au revoir à nos invités; nous reprendrons ensuite à huis clos pour examiner les affaires du comité.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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