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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 022 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 11 juin 2009

[Enregistrement électronique]

  (0905)  

[Traduction]

    Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration se réunit pour la séance numéro 22, le jeudi 11 juin 2009. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le comité entreprend son examen de la teneur du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté, lequel a été adopté durant la deuxième session de la 39e législature.
    Nous entendrons un nombre appréciable de témoins aujourd'hui. Plusieurs sont présents et un témoignera par téléphone, à partir de Vancouver.
    Nous accueillons M. Don Chapman, de la Lost Canadian Organization. Nous accueillons plusieurs personnes à titre personnel, soit Jacqueline Scott, Marcel Gélinas et Ken Neal. De Vancouver, nous parlerons à Nick Noorani, qui est l'éditeur du Canadian Immigrant Magazine.
    Je dois dire que je n'ai jamais participé à une séance où il fallait communiquer par téléphone, mais je ferai de mon mieux. J'espère que tout se passera bien.
    Mesdames et messieurs les témoins, vous disposez de cinq minutes chacun pour faire votre exposé. Ensuite, les membres du comité vous poseront des questions.
    Nous commencerons par M. Neal.
    Bonjour. Je m'appelle Ken Neal, et je viens de Portland, en Oregon. Je suis ici aujourd'hui pour témoigner au nom de ma fille, Casey, qui a deux ans. Le vol aurait été un peu trop long pour elle.
    Je suis un très grand partisan de la deuxième génération du projet de loi C-37. Je suis de la première génération. Ma mère a été reconnue des années après avoir été déplacée et dépouillée de sa citoyenneté de manière illégitime. Elle a récemment acquis de nouveau sa citoyenneté canadienne, et ma citoyenneté sera reconnue grâce au projet de loi C-37, pour lequel des formulaires n'existent pas encore.
    Ma fille est donc laissée pour compte. Le projet de loi C-37 ne s'applique pas vraiment à elle, car elle est de la deuxième génération. Pourtant, si on prend mon oncle, qui a une fille et une petite-fille, la petite-fille est reconnue, et ce, nous croyons, en raison de la discrimination basée sur le sexe. Le père peut transmettre la citoyenneté à la famille, et pourtant la mère ne le peut pas. Je suis du côté de ma mère, et par conséquent je ne peux pas la transmettre.
    Puis-je faire une brève intervention?
    Non, je suis désolé. Le temps nous presse, monsieur Chapman. Je ne veux pas être impoli, mais nous devons permettre à M. Neal de témoigner.
    Allez-y, monsieur.
    Essentiellement, je demande simplement l'égalité entre les sexes. Ce serait juste. Ce serait la bonne chose à faire. Je ne veux pas que ma fille obtienne la citoyenneté; je veux qu'elle ait droit à la citoyenneté. Ainsi, ce sera sa décision, pas la mienne ni celle de quelqu'un d'autre.
    Merci.
    Merci, monsieur Neal.
    Merci d'être ici, monsieur Gélinas. Vous avez cinq minutes.
    Je suis né au Canada et je vis maintenant aux États-Unis.
    Je préférerais que Don Chapman raconte mon histoire. Il la connaît aussi bien que moi.
    Est-ce possible?
    Certainement. Nous donnerons vos cinq minutes à M. Chapman.
    Monsieur Chapman, vous avez 10 minutes.
    D'accord.
    Permettez-moi de commencer par vous dire que ce que nous étudions aujourd'hui remonte à 1868.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Pourriez-vous simplement apporter une précision?
    Ce monsieur disposait de cinq minutes. Vous lui permettez de les transférer à quelqu'un d'autre afin que cette personne puisse disposer de 10 minutes?
    Oui.
    D'accord.
    Merci, monsieur Chapman. Allez-y.
    Merci.
    Nous retournons en 1868, à l'époque où la première forme d'identité canadienne a fait son apparition. On l'appelait la Loi des ressortissants du Canada. Elle avait été rédigée par les Britanniques, et presque toutes les colonies britanniques étaient visées par le même libellé. C'est sur ce libellé que nous travaillons aujourd'hui: « les femmes mariées, les enfants, les faibles d'esprit et les idiots font partie de la même catégorie de personnes handicapées pour ce qui est de l'obtention de la nationalité ».
    Maintenant, j'aimerais que vous vous rappeliez qu'en réalité, la citoyenneté n'a commencé que le 1er janvier 1947. C'était la première fois que les femmes avaient droit à la citoyenneté, mais elles avaient moins de droits que les hommes.
    C'est ce que vous pouvez constater avec M. Neal et tous les autres cas de grande discrimination basée sur le sexe, des causes qui ont été portées devant la Cour suprême du Canada et qui sont actuellement ignorées par le ministre de la Citoyenneté. La Cour suprême a rendu des décisions unanimes, selon lesquelles on ne peut pas agir ainsi, et c'est ainsi que nous agissons. Dans le cas de M. Neal, il a fallu attendre 44 ans avant que sa mère soit reconnue comme Canadienne.
    Lors de mon témoignage devant le Sénat il y a cinq ans, j'ai parlé de l'affaire Benner, c'est-à-dire de l'arrêt Benner c. Canada. Je parle de cette affaire en particulier parce qu'elle traitait de discrimination basée sur le sexe.
    Elle disait que la Loi sur la citoyenneté de 1947 était manifestement discriminatoire et contraire à la Charte des droits et libertés, et que tous les enfants nés à l'étranger d'un parent canadien avaient le droit à la citoyenneté canadienne. Ce qui se produisait, c'était que les Canadiennes ne pouvaient transmettre la citoyenneté à leurs enfants, tandis que les Canadiens pouvaient le faire. C'est ce qui est arrivé à M. Neal.
    Alors j'ai dit que d'après la décision unanime rendue par la Cour suprême dans l'affaire Benner, selon laquelle tous les enfants nés à l'étranger d'un parent canadien avaient droit à la citoyenneté, si j'étais donc né à l'extérieur du Canada, je serais Canadien et mes enfants le seraient aussi. Tous les sénateurs étaient perplexes, et disaient: « Cela n'a aucun sens, parce que maintenant, nous faisons preuve de discrimination envers les enfants nés au Canada. »
    Une semaine après mon témoignage, Patricia Birkette, directrice générale par intérim à Citoyenneté et Immigration Canada, s'est adressée au Sénat. Elle a dit que la décision de la Cour suprême était annulée.
    C'est quelque chose que je trouve particulièrement intéressant. Pendant cinq ans, vous avez agi de façon tout à fait contraire à la décision rendue par la Cour suprême.
    Une autre affaire a été entendue par la suite, Babcock c. Canada. Les juges ont maintenu la décision de la Cour suprême.
    Au même moment, aujourd'hui nous sommes devant une importante discrimination basée sur le sexe. Non seulement lui a-t-on refusé la citoyenneté, mais maintenant on refuse de l'accorder à sa fille pour des raisons de sexe. Le cas de Jacquie est fondé sur le sexe. Marcel est né au Canada d'une mère canadienne et d'un père américain.
    Maintenant, revenons à la discrimination basée sur le sexe. La mère de Joseph Volpe, ancien ministre de l'Immigration, a été dépouillée de sa citoyenneté parce qu'elle a épousé un Italien. La loi était ainsi faite. Si nous regardons autour de la table, je peux vous dire que dans les années 1940, les Asiatiques, les Indiens ainsi que les Autochtones n'avaient pas le droit de vote dans ce pays. Les mauvaises lois étaient nombreuses, et nous fonctionnons actuellement avec l'une d'entre elles.
    Le projet de loi C-37 est un projet de loi formidable. Je suis désolé de ne pas avoir le temps d'en parler. Je suis la principale personne derrière ce projet de loi. J'en connais tous les tenants et aboutissants. Je sais où on doit aller et comment on peut corriger ce projet de loi, très simplement, pour les deuxièmes générations nées à l'étranger et tous les autres aspects, mais nous n'avons pas le temps de s'y attarder.
    Actuellement, le gouvernement et, en particulier, le ministre de l'Immigration, ne rendent pas justice à la réputation du pays.
    Ce magazine a deux ans. C'est le magazine Réfugiés. Il est publié par la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. Il traite du monde étrange, caché des apatrides et des pays qui font de leurs citoyens des apatrides. Et chaque pays qui y est présenté est un pays du tiers monde, à l'exception de ce pays, directement au milieu, appelé le Canada. Saviez-vous qu'ils comparent la situation des droits de la personne au Canada avec celle du Zimbabwe, du Vietnam et du Bangladesh?
    Nous sommes les Canadiens qui ont perdu leur citoyenneté, et nous sommes 10 000. Le département de la Sécurité intérieure a récemment affirmé que nous étions 240 000 seulement aux États-Unis; cette donnée ne tient pas compte des enfants nés de Canadiens ayant perdu leur citoyenneté, ou des enfants de ces enfants.

  (0910)  

    Nous savons très bien qu'il y en a plus de 200 000 seulement au Canada. Marlene Jennings — je vois son nom là-bas — s'est fait demander si elle était Canadienne, et, je peux vous dire qu'elle ne l'était probablement pas. Elle a obtenu un passeport italien en janvier 1977, ce qui aurait eu pour effet d'annuler sa citoyenneté.
    Ce que Ken essayait de dire, c'est qu'il existe deux petites filles, des cousines; sa fille se voit refuser la citoyenneté parce que le lien de sa fille est par sa mère, une femme. La cousine est la bienvenue au Canada parce que le lien est par un homme.
    Marcel Gélinas est né au Canada en 1922. Comme je l'ai dit, il a pris l'identité de son père. Les États-Unis lui ont donné la citoyenneté. Il ne le savait pas. Il était un soldat de la Seconde Guerre mondiale. Même s'il se trouvait aux États-Unis, il est parti à la guerre. Il ne s'en souciait pas; il s'est simplement enrôlé et est parti à la guerre et s'est battu. Apparemment, aujourd'hui on lui refuse la citoyenneté, en fonction du fait qu'il n'est pas Canadien.
    Cet homme, Guy Vallière, est mort il y a deux ou trois mois seulement. Il était un soldat canadien né au Canada. Il s'est battu pour le Canada et on lui a refusé la citoyenneté. Il est mort privé de ses droits à cause de son propre pays, malgré le fait qu'il y a un peu plus d'un an, le 10 avril, Diane Finley disait à la CBC que nous allions attribuer la citoyenneté à tous ces Canadiens ayant perdu leur citoyenneté, en vertu du paragraphe 5(4). Elle a dit que c'était la bonne chose à faire pour les bonnes raisons.
    Nous avons Jacquie, qui est sur le point de procéder à une révision judiciaire contre le gouvernement du Canada. Pourtant, le gouvernement conservateur nous dit que dans l'affaire Taylor, qui correspond exactement au cas de Jacquie — nous l'avons déjà gagné, et nous avons fini par conclure une entente avant que la Cour suprême ne rende sa décision —, il en coûterait des dizaines de milliards de dollars aux contribuables canadiens pour régler cette affaire. Elle est sur le point de procéder à une révision judiciaire.
    J'ai essayé de rencontrer le ministre; il ne veut pas m'appeler. J'ai essayé d'appeler M. Dykstra; il n'a pas retourné mes appels.
    Je suis pilote de ligne. Nous participons à des enquêtes sur les accidents, comme celui d'Air France, pour savoir pourquoi telle chose s'est produite. Le ministre ou M. Dykstra doit me rencontrer. Nous pouvons régler l'affaire en quelques semaines.
    Une personne, et seulement une personne, s'est vu attribuer la citoyenneté en vertu du paragraphe 5(4), tel que promis, et c'était le dernier vétéran de la Première Guerre mondiale encore en vie. Il l'a obtenue parce que j'ai rencontré l'un des chefs... l'ancien chef de l'opposition, à l'époque c'était les conservateurs, et il est allé voir le premier ministre et lui a dit que cela pourrait vraiment nuire au gouvernement, car, rappelez-vous, le premier ministre a reçu énormément de critiques parce qu'il refusait de mettre le drapeau du Parlement en berne lorsqu'un soldat était tué.
    Eh bien, le dernier soldat de la Première Guerre mondiale encore en vie est Américain. Il a quitté le Canada en 1920. Lorsque le projet de loi C-37 a été adopté, l'Institut du Dominion a obtenu 90 000 signatures afin que cet homme puisse avoir des funérailles d'État.
    Pour s'assurer que ça ne laisserait pas de tâche indélébile, avec un premier ministre qui dit que nous ne pouvons pas offrir de funérailles d'État à cet homme, l'institut a réglé tous les détails administratifs en 21 jours.
    Entre-temps, il reste encore 71 personnes, dont 65 qui ne pratiquaient pas la bonne religion, et à qui on a donc refusé la citoyenneté pour des raisons fondées sur la religion. On nous a promis que ces personnes l'obtiendraient. Je suis ici pour vous demander des comptes et pour vous dire allons, il faut agir.
    Si un jour vous voulez connaître la vraie histoire derrière ce projet de loi, j'y travaille depuis l'âge de 18 ans, et j'aurai bientôt 55 ans. Je suis la personne à l'origine du projet de loi. J'ai travaillé avec des ministres de partout à ce propos, et je n'ai jamais travaillé avec un ministre de si piètre qualité.

  (0915)  

    Merci, monsieur. Le temps est écoulé.
    Nous passons à M. Nick Noorani, qui est à Vancouver.
    Nous entendez-vous, monsieur?
    Bonjour à tous.
    Bonjour. Merci pour votre participation. Vous avez cinq minutes pour présenter votre exposé au comité.
    Merci.
    Le 17 avril 2009, une nouvelle loi modifiant la Loi sur la citoyenneté est entrée en vigueur. Cette loi redonne la citoyenneté canadienne à certaines personnes qui l'ont perdue parce que la loi était incomplète. L'obtention de la citoyenneté est automatique et rétroactive à la date de naissance des personnes ou à la date où elles ont perdu leur citoyenneté, selon la situation. On a attendu longtemps avant que ces Canadiens apatrides soient reconnus comme citoyens, et cette reconnaissance reflète bien la réputation et les traditions du Canada sur le plan humanitaire.
    La nouvelle loi définit ce qu'est un Canadien apatride de deuxième génération ou plus. Bien que ces petits-enfants et arrière-petits-enfants de citoyens canadiens tiennent sans doute à conserver leur citoyenneté, nous devons mettre des balises dans la façon dont on définit le mot « Canadien ». En donnant ce privilège à des citoyens de convenance, qui souhaitent bénéficier de la citoyenneté canadienne sans offrir quoi que ce soit en échange à ce pays, contrairement à ceux qui sont nés ici, qui vivent dans ce pays ou l'ont choisi comme terre d'adoption, nous banalisons la citoyenneté canadienne.
    Louis LaFontaine, grand cofondateur de l'union qui a mené à notre Confédération, a défini ainsi le terme « Canadien » lorsqu'en 1848, à Terrebonne, il s'est adressé à ses électeurs:
Le Canada est la terre de nos ancêtres; il est notre pays, de même qu'il doit être la patrie adoptive des différentes populations qui viennent des diverses parties du globe, exploiter ses vastes forêts dans la vue de s'y établir et d'y fixer permanemment leurs demeures et leurs intérêts. Comme nous, elles doivent désirer, avant toute chose, le bonheur et la prospérité du Canada. C'est l'héritage qu'elles doivent s'efforcer de transmettre à leurs descendants sur cette terre jeune et hospitalière. Leurs enfants devront être, comme nous, et avant tout, Canadiens.
    Cette déclaration historique établit clairement que pour devenir Canadien, il faut souhaiter ardemment le bonheur et la prospérité des Canadiens, et il faut transmettre cet héritage aux générations futures. À mon avis, la citoyenneté canadienne n'est pas un bijou de famille qui peut être transmis indéfiniment d'une génération à l'autre. Il y a un prix à payer, et ce prix lui donne encore plus de valeur.
    En accordant la citoyenneté canadienne à une personne, on lui donne accès aux avantages sociaux et économiques du Canada. Si les parents d'enfants de deuxième génération n'ont aucun lien avec le Canada, ils devraient perdre ce privilège. Le Canada n'est pas une terre d'asile utilitaire pour ceux qui n'ont que des liens très ténus avec ce pays. Nous devons poser des balises pour l'avenir de notre pays, et les personnes qui n'ont aucun lien avec le Canada ne devraient pas bénéficier des avantages de la citoyenneté canadienne.
    Le bruit court que des personnes qui se jouent de notre foyer et notre berceau abusent constamment de la citoyenneté canadienne; plusieurs générations plus tard, ces personnes exigent un droit qui est extrêmement ténu, mais qui leur donne les avantages socioéconomiques de la citoyenneté canadienne. Je ne veux pas pointer personne du doigt, mais je crois que nous en avons tous entendu parler. Ce mariage de convenance doit arrêter ou il videra notre pays de ses ressources économiques.
    J'appuie le projet de loi C-37 avec certaines réserves. Ma crainte, c'est que plusieurs pays, bien qu'ils emploient des Canadiens comme ressources temporaires, n'accordent pas la citoyenneté aux nouveaux-nés, ce qui pouvait résulter en une génération d'apatrides. Ça serait plus grave si les deux parents étaient Canadiens. Le fait d'avoir une ascendance canadienne devrait leur permettre d'obtenir la citoyenneté canadienne. Ce sont l'engagement humanitaire et la compassion pour lesquels le Canada est reconnu partout dans le monde. Au Royaume-Uni, le ministre de l'Intérieur a le pouvoir discrétionnaire d'accorder la citoyenneté britannique à un enfant apatride né de parents d'ascendance britannique. Cependant, un représentant de Citoyenneté et Immigration Canada m'a fait comprendre que dans un tel cas, les parents peuvent faire une demande pour que leur enfant puisse résider légalement au Canada.
    Le Canada est un pays signataire de la Convention des Nations Unies sur la réduction des cas d'apatridie et à ce titre, il doit s'assurer que les dispositions visant les apatrides qui pourraient devenir Canadiens soient claires et qu'elles ne soient pas un fardeau pour les agents qui doivent décider ces cas. L'incertitude à cet égard pourrait mener à une perte d'efficacité et à un encombrement des tribunaux.
    Le projet de loi mentionne également que les fonctionnaires du gouvernement et les membres des Forces canadiennes sont exemptés de la clause de deuxième génération. Je propose que cette disposition soit étendue aux personnes travaillant au sein d'organismes canadiens à but non lucratif, ainsi que d'organismes caritatifs tels que la Croix-Rouge.

  (0920)  

    Monsieur Noorani, merci beaucoup.
    Madame Scott, vous avez au plus cinq minutes. Je vous remercie de votre participation.
    Je m'appelle Jacqueline Ellis Scott, et je suis toujours une Canadienne qui n'a plus sa citoyenneté. Je me bats depuis cinq ans pour avoir le droit d'affirmer que je suis une citoyenne canadienne.
    Je suis née en 1945 en Angleterre. Mon père était un soldat canadien et ma mère, une épouse de guerre britannique. Ma mère et moi avons rejoint mon père à Toronto en janvier 1948, avant la suspension, en mars 1948, du programme gouvernemental payant le déplacement des épouses de guerre et des enfants des soldats. Le décret C.P. 858 permettait de différer ou de retarder l'entrée au pays si des problèmes de santé s'avéraient un danger ou un risque pour la personne. J'avais des problèmes de santé qui ont été réglés juste avant mon départ pour le Canada.
    Le crime que j'ai commis, c'est d'être née hors mariage. On ne m'a jamais raconté les circonstances de ma naissance. J'ai découvert ce qui en était par moi-même plusieurs années plus tard. Pour ma génération et celle de mes parents, c'était mal d'avoir un enfant, ou de naître, hors mariage, et c'était un sujet tabou. La chose restait secrète.
    Mes parents se sont mariés en 1948, et ils sont restés mariés jusqu'à la mort de mon père en 1995. En raison des conditions dans lesquelles je suis née, CIC a fait preuve de discrimination envers moi en raison de mon sexe, en me collant l'étiquette d'enfant illégitime même dans la société d'aujourd'hui, ce qui va à l'encontre d'ordonnances rendues dans le cas d'appels entendus et accueillis par la Cour fédérale en matière de discrimination basée sur le sexe. Si, comme l'exigent les tribunaux, on corrige cette discrimination causée par une question de mariage, je pourrai ravoir ma citoyenneté en raison de mon lien avec mon père.
    J'ai grandi au Canada, j'y ai étudié, j'y ai travaillé, j'y ai payé des impôts, et je m'y suis mariée. Ma fille est née à Toronto et elle est citoyenne canadienne, comme le sont mes petits-enfants. Mes parents ont été enterrés ici. J'ai voté lors d'élections fédérales. Dites-moi, ne doit-on pas être citoyen pour voter? En me permettant de voter, le Canada n'affirmait-il pas le fait que j'étais canadienne?
    Je n'ai jamais eu aucune raison de douter de ma citoyenneté canadienne. Toute ma famille, y compris ma mère, qui a été naturalisée en 1955, a la citoyenneté canadienne. On n'a jamais dit que je n'étais pas canadienne. C'est ce que j'étais, ce que je suis, et ce que je serai toujours dans mon coeur. Je suis remplie de fierté lorsque j'entends l'hymne national du Canada. Le Canada sera toujours mon pays. Mon coeur est ici et je me sens chez moi, mais CIC dit que mes liens avec le Canada ne sont pas importants. Le ministère devrait examiner l'alinéa 16b) du Règlement sur la citoyenneté de 1993 avant de déclarer de telles choses.
    En 2004, j'ai demandé mon certificat de citoyenneté. En 2005, on a refusé cette demande parce que j'étais née hors mariage. J'ai voulu cacher cette lettre. Le choc, l'embarras, la honte que j'ai ressentis sont indescriptibles. Je me suis sentie diminuée. En 2008, j'ai fait une demande de citoyenneté à titre spécial et, une fois de plus, on a refusé ma demande pour la même raison dans une lettre signée par Stephane LaRue et reçue en mars 2009.
    Le Canada se vante de ne pas faire de discrimination. Ma situation ne représente-t-elle pas un cas de discrimination et de déni de mes droits en vertu de la Charte des droits et libertés? Le juge Mosley a déclaré, lorsqu'il a accueilli l'appel dans l'affaire Augier en 2004, qu'il était réducteur et préjudiciable de nier le droit à la citoyenneté par le lien paternel, simplement parce qu'Augier était né hors mariage. Il a déclaré que l'alinéa 5(2)b) était inconstitutionnel. Pourquoi CIC continue-t-il à violer ouvertement les droits et à faire de la discrimination, en ne reconnaissant pas une ordonnance des tribunaux?
    En 2004, le ministre ne s'est pas conformé à une ordonnance de la Cour fédérale qui lui demandait de modifier l'alinéa 5(2)b) de la loi de 1985, afin d'inclure les mots « ou un père citoyen » et d'enlever la phrase « né hors mariage ». Puisque le ministre de l'époque ne s'est pas conformé à l'ordonnance de la Cour fédérale, est-ce que le ministre Kenney va corriger cette omission?
    On ne m'avait jamais dit que je n'étais pas une citoyenne canadienne avant 2005, lorsqu'on m'a refusé pour une première fois mon certificat de citoyenneté. Lors du traitement de ma demande, et j'ai vu pour la première fois qu'il existait un document de résident permanent qui me concernait. Dans l'affaire Benner, on a conclu que l'article 15 de la Charte s'applique la première fois où une demande est examinée et où on refuse le droit à la citoyenneté. C'est mon cas. Puisqu'on m'a refusé pour une première fois en 2005, CIC a violé mes droits garantis par la Charte. L'application de la Charte n'est ni rétroactive ni rétrospective.
    Ma situation ressemble à celle de Joe Taylor. Ce qui nous diffère, c'est que je suis restée au Canada de l'âge de deux ans jusqu'à bien après mon 24e anniversaire, alors que sa mère et lui sont retournés en Angleterre quand il était toujours un enfant. Par conséquent, je ne devrais pas être visée par cette disposition de la loi relative aux personnes qui ont perdu leur citoyenneté, comme il l'a été. On lui a accordé la citoyenneté à titre spécial en 2008 lors de l'adoption du projet de loi C-37. Je crois qu'on considère qu'il est citoyen depuis 1947.
    Pourquoi est-ce que CIC a refusé ma demande? Pourquoi Joe Taylor est-il maintenant un citoyen tandis que je ne le suis pas? Pourquoi M. Kenney n'honore-t-il la pas promesse faite par Diane Finley, qui avait dit qu'elle s'occuperait des cas qui n'étaient pas visés par le projet de loi C-37 par l'entremise du paragraphe 5(4)?

  (0925)  

    Monsieur Kenney a dit récemment qu'il croit que les personnes qui veulent obtenir la citoyenneté canadienne le font pour des raisons de « convenance » associée à la possession de ce passeport. Ce mot « convenance » est le sien et non le mien.
    Merci madame Scott.
    Je suis désolé de tous vous interrompre, mais nous sommes réellement pressés par le temps.
    Selon les règles, chaque caucus dispose de sept minutes pour poser des questions à vous quatre qui êtes ici aujourd'hui ainsi qu'à M. Noorani qui se trouve à Vancouver.
    La première personne à poser des question est M. Karygiannis.
    Ma question s'adresse à M. Noorani.
    M'entendez-vous monsieur?
    Oui je vous entends.
    Vous êtes éditeur d'un magazine. Est-ce exact?
    C'est exact.
    Vous arrive-t-il, de temps à autre, de recevoir du gouvernement du Canada des annonces à publier dans votre magazine?
    Je vous demande pardon?
    Recevez-vous, de temps à autre, des annonces venant du gouvernement du Canada à publier dans votre revue?
    Oui, j'en reçois.

  (0930)  

    Avez-vous reçu, au cours de la dernière année, de l'argent de CIC pour la publication d'annonces dans votre revue?
    Oui, j'ai reçu de l'argent.
    Et à combien s'élevait ce montant monsieur?
    Je ne peux répondre à cette question, je n'ai pas les chiffres en main.
    Monsieur, avez-vous reçu de nombreuses annonces ou quelques annonces?
    Quelques annonces.
    Monsieur, ai-je raison de dire que certaines des annonces que vous avez reçues pourraient aujourd'hui fausser quelque peu votre jugement?
    Sauf le respect que je vous dois, monsieur, je ne suis pas d'accord. En plus d'être éditeur, je suis aussi connu comme un défenseur des droits des immigrants et je me suis opposé publiquement à certains gouvernements. Mon soutien se fonde sur des questions qui, à mon avis, sont bonnes pour mon pays.
    Monsieur Noorani, serait-il exact de dire qu'au cours des dernières années certaines de vos publications étaient en faveur du gouvernement conservateur? Oui ou non, monsieur.
    Cela dépend du sujet abordé, monsieur Karygiannis.
    Avez-vous appuyé le projet de loi C-50?
    Non, je ne l'ai pas appuyé.
    Le gouvernement vous a-t-il fait parvenir des annonces au sujet du projet de loi C-50?
    Je vous demande pardon?
    Est-ce que le gouvernement vous a fait parvenir de la publicité concernant le projet de loi C-50 aux fins de publication?
    Je vous rappelle, monsieur Karygiannis, que nous parlons du projet de loi C-37.
    Merci monsieur le président.
    Monsieur, avez-vous reçu de la publicité concernant le projet de loi C-50?
    Monsieur, nous parlons du projet de loi C-37.
    Monsieur, je lui ai demandé s'il avait reçu de la publicité du gouvernement.
    Et moi je vous dis que nous parlons du projet de loi C-37 et non du projet de loi C-50.
    C'est correct, mais monsieur, vous ne pouvez pas me dire quoi demander à un témoin. Je lui demande s'il a reçu la publicité.
    Oui, je peux et je le ferai.
    Monsieur, avez-vous reçu de la publicité concernant le projet de loi C-37?
    C'est bien, je vous remercie beaucoup.
    Ma question s'adresse à toute personne du groupe qui souhaite y répondre. Madame Mendes et moi-même avons des enfants qui sont nés à l'extérieur du Canada de citoyens canadiens. Si, aujourd'hui, nos enfants travaillaient dans un des pays du Moyen-Orient, au Japon ou en Suisse, qu'ils se marient et aient eux-mêmes des enfants avec une personne d'un autre pays, croyez-vous que ma fille ou que la fille de Mme Mendes pourraient obtenir leur citoyenneté?
    Nous discutons ici uniquement de la question des enfants de la deuxième génération nés à l'étranger, n'est-ce pas?
    Oui.
    Non, ils ne pourraient l'obtenir à moins d'avoir travaillé pour le gouvernement du Canada. En vertu de cette nouvelle loi, s'ils sont des enfants de deuxième génération nés à l'étranger, non, vos petits-enfants ne seraient pas canadiens.
    Ils seraient apatrides.
    Pas nécessairement. Ils pourraient toutefois l'être, selon le pays. Mais l'apatridie est vraiment un enjeu important. Il y a une différence entre ce qui a été transmis à l'appareil bureaucratique pour fins d'élaboration de la loi et la loi elle-même. Et ça, c'est tout un problème. À mon avis, avec cette loi le Canada violera bon nombre de conventions internationales sur l'état d'apatride.
    Monsieur le président, je souhaiterais partager mon temps d'intervention avec Mme Mendes.
    Madame Mendes.
    Monsieur Noorani, de la Colombie-Britannique, merci d'être parmi nous.
    J'essaie de séparer les personnes visées par cette loi en deux catégories: les personnes qui, comme Mme Scott et M. Gélinas, sont nés à l'étranger, ou d'autres personnes nées au Canada de parents nés à l'étranger, et qui ont perdu leur citoyenneté, et les personnes de deuxième génération pour lesquelles nous déployons des efforts afin qu'elles soient visées par la loi.
    J'ai déjà été adjointe d'un député et j'ai eu à traiter avec des Canadiens dépossédés de leur citoyenneté — des femmes qui, sans le savoir, ont perdu leur citoyenneté par suite de leur mariage à des non-Canadiens avant 1947. Par ailleurs, elles n'ont jamais obtenu aucune autre citoyenneté. Je me rappelle d'une femme qui a épousé un citoyen polonais, et qui n'a jamais su qu'elle avait perdu sa citoyenneté canadienne et n'a jamais obtenu la citoyenneté polonaise. Elle a été apatride pendant les 52 années de son mariage. Elle ne s'est rendu compte de sa situation que lorsqu'elle a demandé son cinquième passeport — c'est seulement à ce moment-là qu'on lui a dit qu'elle n'était pas canadienne.
    Voilà un cas typique de ce genre de situation.
    En fait, nous avons déployé beaucoup d'efforts pour les informer de cette situation, mais qu'en est-il aujourd'hui?
    Il reste toujours des personnes considérées apatrides. La première personne apatride de première et de deuxième génération née à l'étranger que nous connaissons vient de l'Autriche. En effet, l'Autriche n'accorde pas la citoyenneté. J'ai travaillé dans les coulisses de la mise en oeuvre de ce projet de loi. Nous ne voulions pas que la question des personnes de deuxième génération nées à l'étranger soit liée à ce projet de loi, mais ce ne fut pas le cas; c'était à prendre ou à laisser. Et maintenant cette disposition en fait partie... Et le monsieur que vous devriez entendre également s'appelle Mark Davidson. Il occupe maintenant un poste de DG dans un autre ministère, mais il a participé à ce processus.
    L'argument avancé était que si un enfant naît dans un pays qui n'accorde pas sa citoyenneté, disons la Grèce, le Japon et ainsi de suite, le Canada ou un autre pays, peut intervenir immédiatement et accorder à cet enfant une citoyenneté en se fondant sur la Convention des Nations Unies sur la réduction des cas d'apatridie. Ce qui s'est retrouvé dans la loi est très différent. En fait, la loi dit que vous devez ramener votre enfant au Canada — et c'est tout un défi que de faire traverser les frontières à un enfant apatride — et que cet enfant doit résider au Canada pendant trois ans pour enfin obtenir sa citoyenneté.
    Attendez une minute, cela fait de cet enfant un Canadien immigrant, ce qui est tout à fait contraire à la Convention des Nations Unies. Cela n'a aucun sens. Essentiellement, si une personne, comme dans le cas présent, est apatride, vous pouvez lui accorder la citoyenneté en trois semaines. C'est d'ailleurs ce que le premier ministre a fait avec le dernier ancien combattant de la Première Guerre mondiale. Fin de l'histoire: cela doit être fait immédiatement.
    Il y a toutefois des problèmes d'importance. Un exemple: une mère dont le père est âgé et vit aux États-Unis. Ce père est mourant. La mère a un enfant apatride au Canada et ne peut le quitter pour aller prendre soin de son père à elle, parce que l'enfant ne peut passer la frontière.
    Ce sont des problèmes importants pour lesquels il y a des solutions très faciles. En fait, des mécanismes à cet effet ont été intégrés au projet de loi afin de régler ce problème.
    J'ai un dernier point à soulever. De grandes choses ont été promises par le Sénat entre autres lorsqu'on a dit « Si nous approuvons le projet de loi C-37, vous nous donnerez une toute nouvelle loi sur la citoyenneté et nous pourrons commencer à travailler ». On nous l'a promis mais cette promesse ne s'est pas concrétisée.

  (0935)  

    Merci, monsieur Chapman.
    Monsieur St-Cyr, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous d'être présents.
    Comme vous l'avez dit, madame Mendes, il y a deux problèmes, côte à côte, relativement à la citoyenneté.

[Traduction]

    Arrêtez l'horloge ici.
    Une voix: La traduction ne fonctionne pas.
    Le président: Cela fonctionne-t-il maintenant?

[Français]

    Je reprenais essentiellement les propos de Mme Mendes. Il faut distinguer deux choses.
    Il y a d'abord la question des Canadiens qui ont été dépossédés de leur citoyenneté et qui ne l'ont pas retrouvée par suite de l'adoption du projet de loi C-37. Il y a ensuite la question des Canadiens de seconde génération qui, selon vous, seraient traités inéquitablement par suite de l'adoption de ce projet de loi.
    Je suis porte-parole du Bloc québécois en matière de citoyenneté et immigration. Je me suis joint à ce comité au cours de l'étude du projet de loi C-37. Je le connais bien, mais sans en connaître toute l'histoire.
    Notre comité a produit un rapport, qui avait été adopté à l'unanimité, et qui recommandait les mesures exactes contenues dans le projet de loi C-37. Presque tous les témoins qui ont comparu devant nous ont dit qu'il fallait l'adopter, que c'était urgent. Il a été adopté à l'unanimité par tous les partis.
    Selon vous, comment un projet de loi qui oubliait tellement de gens a-t-il pu franchir toutes les étapes sans qu'il y ait de résistance?

[Traduction]

    En réalité, c'était un bon projet de loi. Nous n'y abordions pas la question des personnes de deuxième génération nées à l'étranger. Il s'agissait d'un projet de loi visant les Canadiens dépossédés de leur citoyenneté. Il visait des centaines de milliers de personnes. C'était un excellent projet de loi.
    Il y a toujours eu des personnes dont la situation ne correspondait pas tout à fait aux dispositions du projet de loi C-37. En fait, nous en comptions 73. Depuis, deux sont décédées sans citoyenneté, ce qui a ramené ce chiffre à 71. On nous avait promis que ces cas seraient régularisés. Ils étaient encore en suspens lorsque nous vous avons présenté nos témoignages. En fait, ils sont toujours là malgré les promesses faites de les régler. Il ne reste vraiment plus beaucoup de personnes et leur cas pourrait être réglé très rapidement.
    Pour ce qui est des personnes de deuxième génération nées à l'étranger, c'était à prendre ou à laisser. Nous avons adopté la loi sous réserve de la promesse, encore une fois par le Sénat, qu'une nouvelle loi sur la citoyenneté serait élaborée étant donné que celle de 1977 était devenue un document gênant. Cette loi continue d'évoluer à coup de modifications et d'ajouts qui deviennent aussitôt désuets. En fait, elle a connu de meilleurs jours. Il est temps de se donner une nouvelle Loi sur la citoyenneté.

  (0940)  

[Français]

    Je veux m'assurer d'avoir bien compris. Si on exclut la question des Canadiens de deuxième génération, les discussions de ce comité portent sur les Canadiens qui ont perdu leur citoyenneté, qui sont au nombre de 71. On fait une étude parce que ces 71 cas ne sont toujours pas réglés.

[Traduction]

    Oui, il y a 71 personnes dont la situation n'a pas été régularisée. Le paragraphe 5(4) permet de régler cet aspect. Mais il y a un autre problème. En vertu du projet de loi C-37, vous avez créé une catégorie de citoyens canadiens qui ont moins de droits que d'autres citoyens canadiens.

[Français]

    Je veux mettre cela de côté pour régler cette question. Finalement, sans dispositions légales supplémentaires, le ministre pourrait très bien utiliser le paragraphe 5(4) de la Loi sur la citoyenneté pour régulariser ces 71 dossiers, et on pourrait passer à autre chose. Il n'a pas besoin de dispositions légales supplémentaires pour régler ces 71 cas. Le ministre pourrait utiliser son pouvoir et accorder directement la citoyenneté à ces gens.

[Traduction]

    Tout à fait. C'est d'ailleurs ce que nous avions demandé. C'est cela qu'on nous avait promis et c'est cela que nous attendions.

[Français]

    Quand vous avez parlé de discrimination fondée sur le sexe, vous avez dit que ces 71 personnes étaient discriminées par les lois de l'époque. Ces lois faisaient une discrimination entre les hommes, les femmes, hors mariage, à l'intérieur du mariage. Vous avez évoqué la religion, etc. Ce n'était pas en vertu des dispositions du projet de loi C-37.
    Oui.

[Traduction]

    Absolument, toute cette disposition vise les 71 cas. La discrimination se poursuit.

[Français]

    Vous dites que c'est parce qu'à l'époque, les lois accordaient la citoyenneté en fonction du sexe du parent canadien.

[Traduction]

    C'est exact. D'ailleurs, plusieurs cas ont été présentés devant les tribunaux. Les affaires Augier et Benner traitaient spécifiquement de discrimination entre les sexes et le gouvernement d'il y a cinq ans a décidé de les annuler — non pas de les annuler, ce qu'ils ne peuvent faire, mais de les ignorer. Ce qui fait que, depuis les cinq dernières années, nous poursuivons nos activités comme si les tribunaux n'avaient jamais statué sur ces affaires.

[Français]

    Mettons de côté ces 71 cas et passons à la question des citoyens de deuxième génération.
    Au téléphone, notre intervenant a parlé de l'attachement au pays. C'est naturellement une question primordiale dans le cas de la citoyenneté. Selon vous, si on ne tire pas la ligne au niveau des citoyens de deuxième génération, où la tire-t-on? Que suggérez-vous au comité?
     Vous ne direz certainement pas que la citoyenneté des personnes qui ne vivent même plus au Canada devrait se perpétuer de siècle en siècle. Il faudra tirer une ligne quelque part.

[Traduction]

    C'est une excellente question qui va au-delà de mon expertise. Je ne suis pas la bonne personne à qui poser cette question. Vous devez inviter Donald Galloway et Don De Voretz à se présenter, ici pour vous répondre, ce sont deux spécialistes du domaine.
    Puis-je me permettre un commentaire?
    Non monsieur, vous ne pouvez intervenir que lorsqu'on vous le demande. Merci, monsieur Noorani.
    Je peux peut-être vous guider. Je peux vous dire où sont toutes les petites notifications. Toutefois, pour cette question, vous devez vous adresser à eux. Il y a certaines questions concernant les Canadiens de deuxième génération auxquelles je peux répondre, mais à cette question, non je ne peux répondre. Je suis un spécialiste de la citoyenneté.

[Français]

    J'aimerais bien qu'on me donne la réponse.

[Traduction]

    Je suis désolé, monsieur, mais votre temps de parole est écoulé.
    C'est au tour de Mme Chow.
    J'ai devant les yeux les notes d'allocution de Mark Davidson, directeur de la Législation et de la politique du programme, Section de la citoyenneté, au sujet de l'étude du projet de loi C-37. Dans son allocution qu'il nous a présentée le 11 février 2008, il dit « Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration continuera, dans des cas particuliers et avec l'approbation du gouverneur en conseil, d'exercer les pouvoirs qui lui sont conférés et d'attribuer la citoyenneté en vertu du paragraphe 5(4) de la Loi sur la citoyenneté. »
    Ces cas particuliers sont au nombre de 71. Ce faisant, ce paragraphe permettrait de régler tous les problèmes, à l'exception de celui concernant les Canadiens de deuxième génération. Permettez-moi de poser la question suivante à Jacqueline Scott et Marcel Gélinas: dans votre situation respective, après avoir obtenu la citoyenneté canadienne en vertu du paragraphe 5(4), seriez-vous fiers d'être Canadiens? Bien que dans votre coeur vous étiez des Canadiens, maintenant que vous l'êtes sur papier, vous serez fiers d'être citoyens canadiens. Est-ce exact?
    C'est exact.
    C'est exact.

  (0945)  

    D'accord.
    Au moment où l'approbation a été donnée, la ministre était Diane Finley. C'est maintenant Jason Kenney qui est ministre. Je me demande s'il y a un mouvement ou une promesse qui permettrait de dire: « Hé, vous savez, vous êtes maintenant canadien. Vous êtes né au Canada et vos enfants sont canadiens. Vous payez des taxes. La citoyenneté est assurée pour des générations à venir. » Rien de ce que vous pourriez dire ne montrerait qu'il s'agit d'un cas « d'opportunisme » en ce qui concerne le fait d'être canadien. Vous êtes canadien dans votre sang et dans votre ADN.
    Alors dites-moi Jacqueline, que se passe-t-il?
    Je ne suis pas légalement canadienne. On ma refusé la citoyenneté à deux reprises. Mon dernier essai a été fait en vertu du paragraphe 5(4), et on m'a dit...
    C'était en 2009.
    C'était en 2009.
    Pourquoi? Quel mois était-ce?
    C'était en mars. Ma lettre était datée de février, et je l'ai reçue en mars.
    La raison, c'est qu'elle est née hors des liens du mariage. C'est la raison pour laquelle sa demande a été rejetée.
    Je suis victime de discrimination en raison des circonstances entourant ma naissance. Les deux lettres que j'ai reçues indiquaient que c'était la raison du rejet de ma demande. C'est discriminatoire.
    Mais votre identité n'est pas remise en question...
    Si j'étais née deux ans plus tard, je serais assujettie au projet de loi C-37, mais je suis née en 1945.
    D'accord.
    Et dans le cas de Marcel Gélinas, la situation est-elle la même?
    Oui.
    Votre demande a été rejetée également?
    Oui.
    Marcel, savez-vous pour quelle raison votre demande a été rejetée, et quand a-t-elle été rejetée?
    C'était en février.
    Voulez-vous dire en février de cette année?
    C'était cette année, oui.
    Pourquoi? Est-ce que vos parents...
    Mes deux parents sont nés au Canada. Ils se sont mariés au Canada. Tous mes ancêtres vivaient au Québec.
    Tous vos... Oui, c'est qu'indique votre nom de famille. Vos grands-parents sont du Québec et vos parents sont nés au Canada, mais cette année, en 2009, le ministère a rejeté votre demande?
    M. Marcel Gélinas: Oui.
    Mme Olivia Chow: Votre demande a-t-elle également été rejetée par le ministre?
    Non.
    Non. Alors demain le ministre, s'il en décide ainsi, peut agir au nom du gouverneur en conseil et accepter la demande en vertu du paragraphe 5(4) qui porte sur les cas spéciaux. Est-ce exact?
    C'est tout à fait exact.
    Cela permettrait de résoudre les 71...
    Cela résoudrait le problème. Cette promesse a été faite. Toutefois, le ministre a remis le dossier aux bureaucrates, et les bureaucrates ont rejeté les demandes. Un permis ministériel est accordé par le ministre, et non par les bureaucrates. D'une certaine manière, il s'est délesté de sa responsabilité envers ces cas et il a remis le tout entre les mains d'autres personnes.
    Est-ce exact de dire que dans tous les 71 cas, une demande a été présentée et que ces demandes ont été rejetées par le ministère?
    Nous avons 65 Mennonites qui sont dans l'impasse, et sa fille est dans une impasse, alors nous ne savons pas ce qui va leur arriver. Les autres demandes ont toutes été rejetées.
    Jacqueline, comment vous êtes-vous sentie lorsque cet homme qui est responsable de la revue vous a dit au téléphone qu'il pourrait s'agir d'une citoyenneté par opportunisme? J'ai vu l'expression de votre visage lorsqu'il a déclaré cela, et vous avez couvert votre bouche. Pouvez-vous me dire ce que vous avez ressenti à ce moment?
    Je peux vous dire que ce n'est pas par opportunisme. C'est ma nationalité. Elle représente le droit de faire du Canada mon pays, et de dire à tout le monde d'où je viens et que je suis fière d'être Canadienne. Lorsqu'on me demande quelle est ma citoyenneté maintenant, que puis-je répondre? Je ne sais pas. Je ne suis pas à l'aise de dire où je vis. Je ne me sens pas liée à l'endroit où je vis. Le Canada a toujours représenté cette loyauté.
    Où vivez-vous?
    Nous sommes des retraités migrateurs. Nous vivons la moitié du temps en Colombie-Britannique et pendant les hivers, nous passons l'autre moitié de l'année en Arizona.
    Comme de nombreux autres Canadiens.
    C'est exact. Il y en a beaucoup là-bas.
    Il est déjà arrivé que lorsque j'ai traversé la frontière, j'ai été retenue pendant deux heures et demie au poste frontalier. Et la dernière fois, j'ai aussi été envoyée au bureau d'immigration. Mon nom a été inscrit dans leur ordinateur. Ils sont au courant de renseignements concernant ma demande de citoyenneté. Ils savent que ma demande a été rejetée. À ces deux occasions, j'ai été retenue à la frontière. Je ne pensais pas qu'on me laisserait rentrer au pays.

  (0950)  

    Que se serait-il passé si vous n'aviez pas pu revenir au Canada? Vos enfants sont ici, n'est-ce pas?
    Non, mes enfants ne sont pas ici. Ma fille est née à Toronto, mais elle vit également aux États-Unis. Nous sommes déménagés aux États-Unis à cause du travail de mon mari. Il n'y avait pas d'emploi pour lui en Colombie-Britannique à ce moment, et son ancien employeur lui a offert un poste. Nous vivons donc maintenant aux États-Unis. Ma fille habite là-bas. Je reviens chaque année. Je reviens habituellement pour offrir des soins à ma mère. Aujourd'hui, c'est l'anniversaire de naissance de mon père.
    Merci, madame Chow.
    Madame Scott, avez-vous un passeport?
    Je possède un passeport, mais ce n'est pas celui que j'aimerais utiliser. Il s'agit d'un passeport américain. Je devais faire quelque chose...
    Alors, vous possédez un passeport américain?
    Oui, j'en ai un. J'ai dû le faire pour répondre aux exigences mises en place après les attentats du 11 septembre. Il fallait posséder un passeport. Je n'ai jamais eu l'intention d'obtenir la citoyenneté américaine. Je n'ai jamais voulu cela. Le Canada a toujours été le pays où je me sentais chez moi, et jusqu'à ce que ma demande soit rejetée en 2005, je me suis toujours considérée comme Canadienne.
    Merci.
    Madame Wong, puis monsieur Dykstra. Vous avez sept minutes au maximum chacun.
    Merci beaucoup d'être venus.
    Monsieur Chapman, je crois comprendre que mon collègue, M. John Weston, a examiné ce dossier, et qu'il vous a apporté son aide au cours des quatre dernières années. Pouvez-vous nous dire ce qu'il a fait pour vous?
    Pas beaucoup. John n'a pas retourné tous mes appels.
    Un grand nombre de personnes de votre parti ont été absolument extraordinaires. À commencer par John Reynolds. Nous ne serions pas ici aujourd'hui sans lui. Il est un véritable héros de la cause des Canadiens qui ont perdu leur citoyenneté.
    Et il y a Mme Diane Ablonczy. Je ne peux dire tout le bien que je pense d'elle.
    Si nous continuons, il y a beaucoup de personnes dans votre parti qui m'ont aidé dans ce dossier. Le sénateur Kinsella nous a aidés à plusieurs reprises en ce qui concerne les projets de loi S-2 et S-17.
    Il y a aussi Inky Mark. J'ai toute une liste ici de citations venant de gens merveilleux de votre parti qui ont essayé de nous aider continuellement.
    Je ne peux pas dire que John Weston a fait... Je veux dire, je ne l'ai pas vu.
    Je dois tout de même dire qu'il ne m'a pas mentionné qu'il avait travaillé avec vous au cours des quatre dernières années.
    Je n'ai pas...
    Je voulais simplement mentionner cela.
    Bien. Je redonne le temps de parole à M. Dykstra.
    Merci.
    Si vous le permettez, monsieur le président, j'ai quelques questions à poser à M. Noorani. La façon dont le système fonctionne en ce qui concerne les annonces dans votre revue, c'est qu'on peut les acheter par le biais d'un certain nombre de ministères fédéraux. Vous n'êtes évidemment pas le seul à recevoir de l'argent pour les annonces placées par un ministère fédéral. Êtes-vous d'accord?
    Absolument. En réalité, je ne suis pas le propriétaire de la revue, elle est la propriété du Toronto Star.
    C'est intéressant. Alors est-ce que vous considéreriez que le Toronto Star est un bon porte-parole pour le gouvernement conservateur?
    Vous savez, je mange un Big Mac à l'occasion, mais je ne m'exprime pas ouvertement en soutien à McDonald's.
    Merci, monsieur Noorani. Je voulais simplement éclaircir tout cela.
    Retournons maintenant au projet de loi C-37, monsieur Dykstra.
    Tout à fait. Cela sert très bien ses objectifs, monsieur le président.
    Monsieur Noorani, j'aimerais vous demander ce que vous en pensez. Vous alliez nous faire part d'autres réflexions, et bien entendu, en raison des contraintes de temps, le temps est réduit. Que pensez-vous des dispositions relatives aux personnes de deuxième génération nées à l'étranger qui se trouvent dans la Loi sur la citoyenneté et dans le projet de loi C-37?
    Merci.
    Regardons les choses autrement. De nombreux Canadiens ont des liens avec d'autres personnes en ce qui concerne leur patrimoine culturel, parce que leurs grands-parents ou leurs arrière-grands-parents ont immigré au Canada. Mais ça ne donne pas nécessairement à leurs descendants des droits dans ces autres pays. À quel moment pouvons-nous tirer un trait?
    J'ai vu des gens sourciller — malheureusement, je ne suis pas enregistré sur vidéo — lorsque j'ai fait mon commentaire sur un mariage de complaisance. Je veux dépasser les lignes partisanes. Je veux dire ce qui est bien pour notre pays. C'est ce que nous devons commencer à examiner. Ça n'a rien de politique.

  (0955)  

    Par conséquent, pensez-vous que le gouvernement a atteint un bon équilibre pour assurer un lien entre le Canada et ses citoyens?
    J'ai mis de côté mes réserves, et je crois que les réserves en question étaient liées aux apatrides. Les réserves exprimées visent à s'assurer que personne n'est laissé de côté.
    Lorsque des parents s'en vont dans un autre pays, ils ont des options. Il est possible que l'enfant soit né au Canada. Ces options, nous les avons tous. Nous choisissons les options. Nous avons des possibilités pour des raisons économiques, mais nous ne pouvons pas nous attendre à revenir 100 ans en arrière et retrouver notre maison au chaud ainsi que notre petit coin auprès du feu.
    Nous avons une loi... et j'ai écouté les récits difficiles de M. Neal, de Mme Scott et de M. Gélinas. Si vous deviez suggérer une façon qui nous permettrait d'aller de l'avant d'une façon plus sûre avec le projet de loi C-37 en ce qui concerne la façon d'aborder certaines de leurs préoccupations — et pardonnez-moi, c'est la première fois que je les rencontre tous les trois ou qu'on me les présente — il me semble que peu importe que ce soit pour leur fille ou pour eux-mêmes, leur désir et leur passion est d'obtenir la citoyenneté canadienne.
    Ils croient que le projet de loi C-37 leur a donné cette possibilité. Il semble que personne ne soit en désaccord avec la loi, mais il existe des désaccords ou des préoccupations en ce qui concerne son interprétation. Avez-vous des suggestions sur la façon que nous pourrions renforcer cela d'un point de vue ministériel?
    Cette question m'était-elle adressée?
    Oui.
    Je connais personnellement Don Chapman. Je crois que c'est quelqu'un de bien. Je pense qu'il en sait beaucoup et que nous pouvons collaborer avec lui pour tirer au clair certains de ces points. Je ne me décrirais jamais comme un meilleur expert que Don, et je reconnais son expertise en la matière.
    Je crois que nous devons travailler sur la législation d'une manière qui soit équitable pour tous. Parallèlement, il nous faut nous souvenir de ce qu'a dit Louis LaFontaine et ne jamais oublier que nous devons agir dans le meilleur intérêt du pays.
    Merci.
    Madame Scott, j'essaie réellement de comprendre le combat que vous menez. Vos démarches pour établir votre citoyenneté m'intéressent réellement. Avez-vous réussi, avec l'aide de votre député, à faire avancer les choses?
    Je collabore avec un député. Jusqu'à maintenant, rien n'a changé.
    D'accord. Habituellement, les gens ne comparaissent pas comme ça devant le comité comme lorsqu'ils ne parviennent pas à régler leurs problèmes personnels, alors il est clair que la question de notre citoyenneté canadienne revêt pour vous une grande importance si vous êtes rendue ici. Je veux donc remercier chacun d'entre vous pour ce que vous faites.
    Je tiens à souligner que nous tenons ces deux réunions et ces audiences pour améliorer votre situation et tenter de régler ces problèmes. Le projet de loi vise à faire en sorte que les personnes qui sont canadiennes à juste titre obtiennent leur citoyenneté. Je peux vous assurer que tous ceux et celles qui sont de ce côté de la Chambre feront tout en leur pouvoir pour vous aider.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Dykstra.
    Madame Jennings, il vous reste très peu de temps.
    J'ai deux questions très brèves.
    Non, madame Jennings, une seule s'il vous plaît. C'est tout ce que vous pouvez avoir.
    Cette question s'adresse à M. Noorani, qui est au téléphone: que pensez-vous des femmes qui viennent au Canada dans l'unique but de donner naissance à leur enfant et qui repartent ensuite parce que la loi sur la citoyenneté canadienne confère automatiquement la citoyenneté canadienne à ces enfants?
    Ma deuxième question...
    Non, arrêtons-nous ici.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur?
    Vous n'avez plus de temps, je suis désolé. Je vous ai fait une faveur; ne la gaspillez pas.
    Bien, je vais essayer de répondre brièvement.
    Je crois que tous les transporteurs aériens fixent des restrictions — il s'agit d'une restriction internationale — quant à la période au cours de laquelle les femmes enceintes peuvent voyager. Je suis personnellement contre tous les types d'abus, et ça inclut les femmes qui viennent ici pour avoir leur bébé. C'est la réponse courte.

  (1000)  

    Merci beaucoup, monsieur Noorani, ainsi que vous tous qui comparaissez devant nous, de prendre le temps de transmettre vos commentaires aux membres du comité.
    Au nom du comité, je vous remercie beaucoup d'être venus raconter votre histoire. Cette séance reprendra dans cinq minutes.

  (1000)  


  (1000)  

    Nous allons reprendre la séance. Plusieurs témoins sont avec nous pour la prochaine heure.
    De la Canadian Expat Association, nous avons M. Allan Nichols, directeur général, représentant du groupe concerné.
    De Terre des hommes pour les enfants et Terre des hommes Ontario, nous avons Mme Dorinda Cavanaugh, directrice.
    Mme Sandra Forbes représente Children's Bridges à titre de directrice générale.
    Le Conseil d'adoption du Canada est représenté par Mme Sarah Pedersen, directrice intérimaire.
    M. Andrew Bilski témoignera à titre personnel.
    Silence, s'il vous plaît, mesdames et messieurs. Je vais devoir vous demander votre collaboration.
    Je veux vous souhaiter la bienvenue au nom du comité. Vous disposez tous de cinq minutes pour faire un bref exposé, après quoi les membres du comité vous poseront des questions.
    Nous commencerons avec Mme Cavanaugh.
    Merci de votre présence.
    Je suis directrice de TDH pour les enfants Québec et de TDH Ontario. Je suis psychologue clinicienne et je travaille dans le milieu de l'adoption depuis 1974. Au cours de ma carrière, j'ai supervisé personnellement environ 2 000 adoptions. Mon mari et moi avons cinq enfants; quatre d'entre eux ont été adoptés, dont deux à l'étranger. J'ai vu évoluer les processus d'immigration au cours de ces années.
    Il y a quelques années, on a aboli l'obligation de soumettre les enfants adoptés à un examen médical au même titre que les autres immigrants, ce qui leur reconnaissait au moins un statut similaire à celui des enfants biologiques. Mais le milieu de l'adoption demeurait pleinement conscient de l'immense différence qui subsistait entre la façon dont étaient considérés les enfants adoptés et les enfants biologiques du point de vue de l'immigration. Si un parent canadien donnait naissance à un enfant à l'étranger, cet enfant était immédiatement reconnu comme citoyen canadien, mais un enfant adopté à l'étranger par des parents canadiens devait suivre grosso modo la même procédure que n'importe quel immigrant, bien que de façon accélérée.
    Pour les parents adoptifs, le processus qu'ils devaient suivre signifiait que le Canada continuait de considérer différemment leurs enfants adoptés. Cependant, ils étaient censés devenir des citoyens canadiens et mener une vie productive pour eux, pour leur famille et pour la société canadienne en général. Récemment, la Loi sur la citoyenneté de 2007 a mis un terme au sentiment d'injustice que vivaient depuis longtemps les parents adoptifs. Le processus qu'ils devaient suivre pour que leurs enfants obtiennent la citoyenneté canadienne se rapprochait dorénavant de celui par lequel la citoyenneté est automatiquement accordée aux enfants nés à l'étranger de parents canadiens, et ce, grâce à la mise en place de ce que l'on appelle maintenant la citoyenneté par voie directe.
    C'est donc avec beaucoup d'enthousiasme que nous avons accueilli cette loi qui a pris effet en décembre 2007 et qui reconnaissait finalement l'égalité des enfants adoptés et des enfants biologiques, leur octroyant le droit de demander immédiatement leur citoyenneté. Les conditions préalables étaient simples: l'un des parents devait être citoyen canadien, et l'adoption devait être une adoption légale reconnue dans la province canadienne de résidence. Le processus a été accueilli très positivement par les parents, et jusqu'à maintenant, notre agence a vu quelque 100 enfants entrer ainsi au Canada, et il y a peut-être 200 autres demandes en cours.
    Nous avons appris avec consternation que dans les mois qui ont suivi l'entrée en vigueur de cette nouvelle loi, un projet de loi avait été présenté, adopté et sanctionné, un projet de loi qui dénierait tous les droits garantis par la loi de 2007 en créant deux catégories de citoyens. Tout enfant adopté dont les parents passeraient par la voie directe perdrait le droit de transmettre cette citoyenneté dans des circonstances qui sont loin d'être exceptionnelles: donner naissance à un enfant ou adopter un enfant à l'étranger.
    Cette attaque inattendue nous a quelque peu abasourdis. Nous avons l'impression que le gouvernement nous a trompés, que nos enfants adoptifs font injustement l'objet de discrimination. Nous croyons fermement que les dispositions actuelles de la loi sont contraires aux droits de leurs parents en tant que citoyens canadiens. Les modifications qui ont été récemment apportées à la législation en matière d'immigration l'ont été dans des circonstances telles qu'il était difficile de remarquer et d'interpréter les lourdes implications qu'elles auraient pour les parents adoptés et leurs enfants.
    Je suis donc ici pour demander au Parlement du Canada de rectifier ce qui, nous l'espérons tous, n'était qu'un effet négatif involontaire sur les droits des Canadiens adoptés. Cette nouvelle loi devait notamment éviter la transmission intergénérationnelle de la citoyenneté canadienne à ceux qui ne contribuaient pas de façon appréciable à l'économie, à la culture et à la vie sociale de ce pays. Mais dans le cas des enfants adoptés, la réalité est tout autre. Ces enfants peuvent arriver au Canada bébés et citoyens canadiens, passer leur enfance, leur adolescence et le début de leur vie d'adulte au Canada, puis pour quelque raison que ce soit avoir un enfant à l'étranger pour découvrir que cet enfant n'est pas considéré comme un citoyen canadien, ou pire, qu'il est apatride. Ce n'est pas seulement injuste, c'est un manque de respect et même un traitement cruel envers ces enfants qui ont grandi en tant que citoyens canadiens et qui s'attendaient à être traités équitablement par leur gouvernement. Cela fait d'eux des citoyens de deuxième classe.
    Cette nouvelle loi menace et restreint les activités des enfants adoptés qui grandiront et seront sur le marché du travail d'ici vingt ans. Avec cette nouvelle loi, les enfants adoptés depuis le 17 avril par des parents canadiens seraient bien mal avisés de travailler un jour pour des sociétés, des universités et des établissements d'enseignement canadiens, des ONG ou des organisations internationales telles que les Nations Unies, ou d'accepter tout autre poste important dans le monde, bien qu'il y ait des exceptions pour les postes diplomatiques et militaires. Si l'une de ces personnes travaille à l'étranger, y déménage temporairement et a ou adopte un enfant alors qu'elle est dans un autre pays, alors cet enfant sera privé de son droit de citoyenneté. C'est injuste et discriminatoire, et je pourrais même dire contraire à la Charte canadienne des droits et libertés.

  (1005)  

    La nouvelle loi crée deux catégories de citoyens au Canada, un concept qu'abhorrent la plupart des Canadiens.
    Merci, madame Cavanaugh.
    Monsieur Nichols, vous avez cinq minutes.
    Je suis Allan Nichols. Je suis le directeur général de la Canadian Expat Association. J'aimerais remercier le comité pour m'avoir invité ici afin de m'adresser à vous au sujet du projet de loi C-37.
    Pour vous mettre dans le contexte j'aimerais vous parler brièvement de la Canadian Expat Association.
    L'association non gouvernementale et sans but lucratif réunie tous les Canadiens qui vivent à l'étranger. Les Canadiens peuvent aujourd'hui établir des liens avec l'association sans égard à l'endroit où ils travaillent et vivent et où ils se trouvent dans le monde. Depuis qu'elle a ouvert ses portes à l'été 2007, la Canadian Expat Association a offert à ses membres, tant en français qu'en anglais, de nombreuses occasions pour jouer un rôle important dans la représentation des expatriés canadiens qui, jusqu'à aujourd'hui, n'avaient pas de voix.
    L'association sert de plate-forme aux Canadiens pour qu'ils puissent avoir accès au réseau d'entreprise et de clubs canadiens du monde entier. Elle fournit aux Canadiens des analyses et des renseignements utiles pour faciliter leur installation lorsqu'ils déménagent et vivent à l'étranger ou lorsqu'ils reviennent à la maison. Elle aide les entreprises canadiennes et les ONG dans la promotion des activités auprès des Canadiens dans le monde. L'association défend, en collaboration avec les entreprises, les ONG, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux les intérêts et promeut la valeur des expatriés canadiens en soulignant leur culture et leur contribution économique. L'association cherche à développer et à favoriser les relations ainsi qu'à établir des partenariats avec ces différents acteurs.
    L'objectif est de promouvoir sur la scène internationale le Canada et sa ressource la plus chère: son peuple. L'association représente en ce moment environ 1 000 personnes et un certain nombre d'entreprises canadiennes de premier plan. Des efforts sont déployés pour accroître le nombre de membres et étendre son profil à l'étranger ainsi qu'au Canada.
    Environ 2,7 millions de Canadiens vivent et travaillent à l'étranger soit presque 9 p. 100 de la population totale du Canada. En fait, des milliards de dollars transigés dans des échanges bilatéraux peuvent être attribués directement ou indirectement à ces expatriés canadiens qui participent à des entreprises dans le monde. Les expatriés canadiens sont reconnus comme étant parmi les réseaux ayant le plus de succès et d'influence, et grâce à leurs efforts, le Canada bénéficie sur le plan économique, culturel et politique.
    Les Canadiens qui vivent et qui travaillent à l'étranger sont qualifiés sur le plan linguistique, prolifiques culturellement et mobiles sur le plan international. Ils représentent toutes les régions du Canada et la plupart s'identifient encore à leur pays, le Canada. L'expérience, les connaissances et les réseaux que ces Canadiens ramènent au pays ont une grande valeur et une influence certaine sur le pays et son économie.
    J'aimerais maintenant centrer mes observations sur le projet de loi C-37. Bien que l'objectif de ce projet de loi est de limiter l'octroi de la citoyenneté canadienne à ceux qui n'ont pas de liens avec le pays, nous pensons qu'il peut être amélioré afin que les Canadiens qui ont un réel lien soient eux reconnus. Laissez-moi vous expliquer.
    Selon nous, le projet de loi actuel peut avoir pour effet de limiter la liberté des citoyens canadiens de transmettre leur patrimoine à leur descendance. Comme le savent déjà les membres de ce comité, les populations sont aujourd'hui très mobiles. Les Canadiens cherchent et trouvent des opportunités sur la planète et reviennent avec des compétences et des investissements importants. Cependant, ces avoirs pourraient être limités s'il y a la possibilité que leurs descendants ne puissent réclamer leur patrimoine canadien.
    Les Canadiens qui ont des enfants à l'étranger doivent composer avec le fait que leurs petits enfants puissent ne pas satisfaire les exigences de la citoyenneté canadienne. Laissez-moi vous donner un exemple. Une personne qui décide de travailler à l'étranger et qui, à un stade de sa vie, décide d'avoir des enfants. Cette personne revient ensuite au Canada et y élève ses enfants. Ces enfants, grandissent et deviennent des membres de la population active et contribuent à la société canadienne. Cependant, si ces enfants veulent commencer leur propre famille, leur liberté peut être réduite. Car leurs enfants, s'ils naissent à l'étranger, ne pourront obtenir la citoyenneté canadienne.
    Nous comprenons bien que l'intention du projet de loi de C-37 est de protéger la valeur de la citoyenneté canadienne, l'exemple que j'ai souligné n'est qu'une conséquence malheureuse et non intentionnelle. Lorsque environ 2,7 millions de Canadiens vivent et travaillent à l'étranger et qu'ils en font bénéficier de manière tangible le Canada, il est insensé sur le plan économique ou culturel d'imposer des limites aux chances des générations futures.
    Nous suggérons comme solution ce que d'autres pays ont réussi à instaurer. Par exemple, les États-Unis et l'Australie ont dû faire face au même dilemme. Leur solution a été de mettre en place une disposition portant sur le lieu de résidence de ces enfants qui étaient nés à l'étranger. En gros, ce type de disposition reconnaît de facto leur citoyenneté et ne tient pas compte de leur lieu de naissance en ce qui concerne leurs propres enfants. Une telle solution pourrait satisfaire la notion que ces personnes ont des liens bien ancrés au Canada.
    Encore une fois, merci de m'avoir invité à Ottawa. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.

  (1010)  

    Nous vous remercions pour votre exposé, monsieur Nichols.
    La parole est maintenant à Mme Forbes.
    Pour commencer, je tiens à dire que Children's Bridge est la plus importante agence d'adoption internationale du Canada. Nos membres ont accueilli avec un sentiment d'encouragement le dépôt du projet de loi C-14, parce qu'il permettait à leurs enfants de devenir citoyens canadiens une fois les formalités d'adoption achevées. La majorité des personnes adoptées à l'étranger sont des enfants de moins de trois ans et, pour reprendre les mots d'un père, « mes filles ne sont plus citoyennes chinoises. Elles sont Canadiennes. » À n'en pas douter, ces personnes ne sont pas citoyennes canadiennes par opportunisme.
    Au moment où je vous parle, Children's Bridge a reçu de ses membres l'expression des préoccupations suivantes: les règles ne sont pas les mêmes selon la façon dont on est devenu citoyen canadien — autrement dit, il y a au Canada un processus à deux niveaux d'accession à la citoyenneté. Les enfants nés à l'étranger qui arrivent au Canada et qui empruntent la voie directe d'accession à la citoyenneté seront inaptes à transmettre la citoyenneté canadienne à leurs enfants si ceux-ci naissent à l'extérieur du Canada. Si les mêmes enfants arrivent au Canada par l'intermédiaire du processus d'immigration par parrainage, ils seront aptes à la transmettre. Une personne née au Canada est apte à transmettre la citoyenneté canadienne. Il est entendu que si l'un des parents d'un enfant né à l'extérieur du Canada était un Canadien né au Canada ou une personne naturalisée canadienne, l'enfant aurait le statut de citoyen. Ces règles sont discriminatoires et elles portent atteinte aux droits humains. Elles justifient par conséquent une contestation constitutionnelle.
    La perception d'un processus d'accession à la citoyenneté à deux niveaux trouve une confirmation dans le libellé des règles, lesquelles traitent spécifiquement des personnes adoptées. Il s'agit d'un ciblage caractérisé d'un groupe particulier de personnes auxquelles on reconnaît moins de droits qu'à d'autres Canadiens. Nous avons du mal à voir l'utilité de traiter spécifiquement de ce groupe.
    Certains enfants pourraient se retrouver apatrides s'ils naissaient dans un pays où la citoyenneté n'est pas accordée aux personnes nées de parents de nationalité différente. Mentionnons à titre d'exemples la Suisse et les Bahamas.
    Voici quelques exemples des problèmes auxquels se heurtent nos familles:

Notre famille se rend en Suisse pour affaires et c'est une possibilité réelle pour notre famille que nos petits enfants soient apatrides.
Dois-je abandonner la voie directe d'accession à la citoyenneté aux fins de l'adoption pour opter pour l'immigration? J'ai téléphoné aux services d'immigration et on m'a répondu qu'on n'avait jamais entendu parler d'un problème de ce genre.
Nos enfants sont déjà victimes de discrimination. Ils doivent déjà s'intégrer à une famille et à une culture mixtes. Quand ils seront grands, ils apprendront que leurs enfants n'ont pas les mêmes droits rattachés à la citoyenneté que leurs neveux et nièces dont les parents sont nés ici.
Il y a deux niveaux de citoyenneté dans notre propre maison. Des membres de la famille nés au Canada et/ou adoptés au Canada, et d'autres membres dont les enfants pourraient devenir apatrides ou qui pourraient être forcés de parrainer leurs propres enfants pour que ceux-ci deviennent Canadiens.
    L'impact de ce genre de situation sur le processus d'adoption est que les familles ne tirent pas avantage du projet de loi C-14, bien qu'il ait été fort bien accueilli quand il a été présenté. Ils choisissent davantage la voie du parrainage. Le traitement des dossiers est beaucoup plus rapide et cela fait en sorte que les petits enfants des personnes qui choisissent cette voie auront la citoyenneté canadienne, quel que soit l'endroit où ils sont nés ou quelle que soit la nationalité de l'autre parent biologique.
    On pourrait soutenir que le nombre des personnes touchées dans l'avenir sera restreint. Dans le milieu de l'adoption, il y a des familles qui voyagent à l'étranger ou qui y ont un foyer. Leurs enfants peuvent être appelés à se rendre en voyage dans le pays de leur naissance; et il peut arriver que ces enfants travaillent à l'extérieur du Canada. On peut envisager de nombreux scénarios. Il n'est pas du tout inconcevable qu'ils épousent des personnes qui ne sont pas nées au Canada ou qu'ils donnent naissance à des enfants à l'extérieur du Canada, même si leurs liens avec le Canada sont très forts et si ce pays demeure leur patrie.
    Le gouvernement fédéral a des responsabilités à l'égard de tous les citoyens. Si on tente de faire un bien d'un mal, on fait payer aux enfants de nos enfants un prix exorbitant; ils pourraient se retrouver apatrides. Nous devons parler au nom de nos enfants, qui sont trop jeunes pour le faire en leur propre nom. Nous devons également être la voix des familles qui sont très inquiètes et très confuses à un moment de leur vie où elles vivent déjà beaucoup de stress et d'angoisse tandis qu'elles font leurs préparatifs en vue de l'adoption internationale.
    Au nom des personnes qui arrivent au Canada au terme d'un processus d'adoption dont le point final est mis dans le pays d'origine, nous devons obtenir de notre gouvernement l'assurance que leurs enfants et leurs petits enfants bénéficieront des mêmes droits rattachés à la citoyenneté que leurs frères et soeurs nés au Canada.
    Merci.

  (1015)  

    Merci beaucoup, madame Forbes.
    Madame Pedersen, vous disposez de cinq minutes sans dépassement possible.
    Permettez-moi de dire en commençant que le Conseil d'adoption du Canada est le seul organisme national qui se fait la voix des personnes adoptées, des parents biologiques et des familles adoptives de partout au Canada. Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir invités ici aujourd'hui pour vous faire part de nos préoccupations au sujet de l'impact du projet de loi C-37 sur les droits rattachés à la citoyenneté des personnes adoptées.
    Nous nous inquiétons des conséquences imprévues du projet de loi C-37 à travers le règlement d'application. La nouvelle loi qui est entrée en vigueur le 17 avril 2009 limite la citoyenneté canadienne à la première génération née de parents canadiens vivant à l'extérieur du Canada. Cette loi est censée rationaliser et simplifier le processus d'accession à la citoyenneté dans le cas des enfants adoptés à l'international. Or, elle prive plutôt de leurs droits rattachés à la citoyenneté certains de ces enfants. Partout au Canada, les parents adoptifs s'inquiètent de ce que la réglementation crée deux types de citoyens jouissant de droits différents, les enfants adoptés étant relégués à une classe inférieure de citoyenneté aux termes du projet de loi.
    La loi avait à l'origine été rédigée pour empêcher qu'il y ait ce qu'on appelle des Canadiens par opportunisme — c'est-à-dire des familles qui transmettent la citoyenneté sur plusieurs générations sans jamais résider au Canada. Toutefois, dans sa tentative pour résoudre ce problème, le gouvernement a conçu un règlement qui sème la confusion et qui crée des iniquités pour les enfants adoptés à l'étranger.
    Je me permets de citer Douglas Chalk, directeur général du Sunrise Adoption Centre et membre du Conseil d'adoption du Canada:
Le gouvernement a réduit les droits rattachés à la citoyenneté de certains enfants adoptés à l'étranger et il a dans les faits créé une classe inférieure de citoyenneté pour eux. Était-ce vraiment nécessaire? C'est comme utiliser une masse pour tuer une mouche.
    Sandra Scarth, présidente du Conseil d'adoption du Canada, affirme pour sa part que « l'intention de départ de la loi telle que nous la comprenions était de simplifier le processus d'accession à la citoyenneté afin de traiter de façon plus équitable les enfants adoptés à l'étranger », au lieu de créer une nouvelle iniquité.
    Ce qui préoccupe le plus les parents adoptifs c'est l'idée que leurs enfants seront des citoyens de classe inférieure. La loi établit en effet une distinction discriminatoire à l'égard des enfants adoptés à l'étranger. Les parents adoptifs ne veulent pas avoir l'impression que leurs enfants sont des citoyens de deuxième classe. Les parents adoptifs du Canada ont de plus en plus de difficulté à supporter la discrimination dont ils font l'objet. Le ressentiment qu'inspire la discrimination à l'endroit des familles adoptives — cette discrimination inhérente à la législation administrée par Emploi et Immigration — couve depuis une dizaine d'années. Et voilà que ces familles sont aux prises avec une nouvelle loi qui est discriminatoire à l'égard de leurs enfants.
    Le Conseil d'adoption du Canada est consterné de ce que les dispositions de la Loi sur la citoyenneté, qui sont entrées en vigueur en avril, créent deux classes de citoyens. Nos enfants adoptés, des citoyens canadiens qui auront vécu la majeure partie de leur vie au Canada, n'auront pas les mêmes droits que les autres citoyens nés au Canada, même ceux de leur propre famille. Ils seront inaptes à transmettre leur citoyenneté canadienne à ceux de leurs enfants qui naîtront éventuellement à l'étranger.
    Le Conseil d'adoption du Canada presse le gouvernement de revoir ces dispositions et de trouver une solution qui n'ait pas pour effet de limiter les droits rattachés à la citoyenneté des enfants adoptés à l'étranger.
    Merci.

  (1020)  

    Merci pour votre exposé, madame Pedersen.
    Monsieur Bilski, vous disposez de cinq minutes sans dépassement possible.
    Je suis parent adoptif et ancien membre du conseil de la Children's Bridge Foundation, qui est la branche caritative de Children's Bridge.
    J'aimerais remercier le comité de me donner la possibilité de prendre la parole ici aujourd'hui sur un sujet d'une très grande importance pour moi, ma famille et des milliers d'autres familles canadiennes qui ont adopté des enfants nés dans d'autres pays.
    Il est bien connu que le Canada est un pays d'immigrants. Née à Haïti, Michaëlle Jean est venue vivre au Canada à titre d'enfant réfugiée il y a une quarantaine d'années et elle est maintenant le 27e gouverneur général du Canada. D'innombrables autres immigrants, célèbres ou non, ont apporté d'importantes contributions à leur pays d'adoption. Ils sont élus au Parlement, chefs d'une entreprise qu'ils auront eux-mêmes lancée, enseignants dans nos écoles, artistes et créateurs, policiers patrouilleurs dans nos rues, producteurs des aliments qui nous nourrissent et bâtisseurs de nos infrastructures, et ils ont élevé des familles douées d'esprit civique.
    J'ai moi-même émigré des États-Unis en 1976. Pour moi, le Canada était synonyme de multiculturalisme, d'égalité, de justice, de démocratie multipartite, de politique sociale progressiste, et c'était une voix de la raison dans un monde de plus en plus hostile. J'ai travaillé à titre de journaliste au Canada pendant près de 30 ans et jamais je n'ai regretté ma décision de devenir citoyen de ce grand pays. Mais ces derniers temps, j'ai été troublé par certains aspects du projet de loi C-37, dont l'objectif louable est de restaurer les droits rattachés à la citoyenneté de ceux qu'on appelle les Canadiens déchus de leur citoyenneté, mais qui, sans que ce soit intentionnel, peut-être, crée une citoyenneté canadienne à deux niveaux.
    Mon épouse Pamela, née au Canada, et moi-même avons deux filles: Bridget, née à Toronto en 1990, qui entreprendra sa deuxième année d'études à l'Université Western Ontario en septembre prochain, et Nina, née en 1998 à Zhangjiagang, en Chine, élève de cinquième année à l'école Clinton Street Junior Public School de Toronto. Fort heureusement, Nina n'est pas touchée par les dispositions du projet de loi C-37 et elle a les mêmes droits rattachés à la citoyenneté que sa soeur née au Canada.
    Je suis ici pour parler au nom des milliers et peut-être des dizaines de milliers d'autres enfants qui n'auront pas la même chance.
    Quand des Canadiens adoptent un enfant à l'étranger, ils lui donnent leur nom de famille, leur amour, leur soutien émotionnel et financier et leur citoyenneté. Mais avec le projet de loi C-37, des milliers d'enfants adoptés à l'étranger deviennent des citoyens de deuxième classe. Ils sont dépouillés du droit de transmettre la citoyenneté canadienne à leurs propres enfants nés ou adoptés à l'étranger, droit dont jouissent leurs frères, soeurs et amis nés au Canada.
    Pour empirer les choses, il semble que cette situation déplorable tienne à la méthode même par laquelle les enfants adoptés à l'étranger obtiennent au départ la citoyenneté canadienne. Les enfants qui arrivent au Canada en vertu d'un visa de résident permanent et qui obtiennent ensuite leur citoyenneté par naturalisation ne sont pas assujettis aux dispositions du projet de loi C-37. Autrement dit, ils sont considérés comme des citoyens de première classe jouissant des mêmes droits que la plupart d'entre nous. Toutefois, un autre groupe, qui acquiert la citoyenneté par voie directe, la méthode la plus populaire depuis décembre 2007, est assujetti aux dispositions du projet de loi C-37. Autrement dit, ils deviennent des citoyens de seconde classe qui n'ont pas le droit de transmettre leur citoyenneté canadienne aux générations futures nées ou adoptées à l'étranger.
    Pourquoi cela? Pour quelle obscure raison les auteurs de ce projet de loi font-ils une distinction entre ces deux groupes d'enfants adoptés? S'exprimant sur l'objectif du projet de loi, M. Jason Kenney, ministre de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme du Canada, a affirmé que le gouvernement souhaitait réserver le droit à la citoyenneté aux seules personnes qui peuvent revendiquer une présence ou un engagement durables à l'égard du Canada.
    Si tel est le cas, qu'est-ce qui prouve que le deuxième groupe d'enfants, ceux qui ont été adoptés à l'étranger et qui ont acquis la citoyenneté par la voie directe, ne pourront revendiquer une présence ou un engagement durables au Canada? Sont-il plus susceptibles que d'autres Canadiens, comme le chef du Parti libéral du Canada, M. Michael Ignatieff, de vivre à l'étranger pendant de longues périodes au cours de leur vie? Sont-ils moins susceptibles que d'autres Canadiens, tels que les 40 p. 100 environ qui n'exercent même pas leur droit de vote aux élections fédérales, de s'engager à l'égard de ce pays?
    Je voudrais rappeler aux membres du comité que de nombreux pays, dont la Chine, retirent sa citoyenneté à un enfant quand il est adopté par des parents étrangers. Si ces enfants adoptés ne sont pas Canadiens, que sont-ils? Leur unique allégeance nationale est celle qu'ils ont à l'endroit de leur pays d'adoption.

  (1025)  

    Je suis venu ici aujourd'hui pour vous demander respectueusement de corriger cette injustice. En tentant de renforcer la valeur de la citoyenneté canadienne, le projet de loi C-37 restreint les droits de beaucoup d'enfants adoptés nés à l'étranger, de sorte que la réputation de champion des droits de la personne que le Canada a à l'étranger est ternie.
    Je vous remercie pour votre témoignage, monsieur Bilski.
    Chaque caucus a un maximum de sept minutes.
    Monsieur Karygiannis.
    Monsieur Nichols, vous représentez les expatriés à l'étranger. Avez-vous des faits et des chiffres à nous présenter sur le nombre de Canadiens qui vivent à l'étranger en ce moment et qui sont enregistrés dans les ambassades? Avez-vous des chiffres à ce sujet?
    Il est difficile de savoir combien d'expatriés canadiens sont enregistrés dans les ambassades. J'ai communiqué avec plus de 150 missions à l'étranger. Mais comme les ambassades ne peuvent pas fournir de tels renseignements en raison des lois sur la protection des renseignements personnels, je n'ai pas de chiffres précis sur le nombre de personnes enregistrées.
    La Fondation Asie-Pacifique du Canada estime qu'il y aurait environ 2,7 millions de Canadiens à l'étranger. Selon les évaluations que les missions canadiennes m'ont données — ils ne m'ont pas dit combien il y avait de personnes enregistrées, mais ils m'ont souvent donné le nombre approximatif de Canadiens qui vivent à l'étranger —, il y aurait près de 2,5 millions de Canadiens à l'étranger.
    Combien de ces Canadiens ont des familles et des enfants nés à l'étranger?
    Je ne connais pas les chiffres exacts.
    Alors faites une évaluation.
    J'hésite à deviner le nombre total. En 2006, Statistique Canada a indiqué qu'un peu plus de 70 000 Canadiens avaient déclaré travailler à l'étranger. Ces personnes ont déclaré qu'elles travaillaient à l'étranger. C'était en 2006.
    Comme c'est un groupe qui se déplace beaucoup, les 70 000 Canadiens qui étaient à l'étranger à ce moment-là ne sont probablement pas les mêmes qui sont à l'étranger en ce moment, ni les mêmes 70 000 Canadiens qui seront à l'étranger dans cinq ans. Il serait naïf de croire qu'ils seront peu nombreux à avoir des enfants.
    Le comité compte 12 membres. Je peux dire sans détour que tous mes collègues conservateurs sont probablement des Canadiens de première génération. De ce côté-ci, je sais que Mme Mendes, Mme Chow et moi-même sommes des Canadiens de première génération. Une de mes cinq filles est née à l'étranger. Ma cinquième fille se sent comme une citoyenne de seconde zone, et c'est la même chose pour Mme Mendes.
    Vous parlez des enfants adoptifs. Comprenez que je sais que vous êtes dans une mauvaise posture, c'est certain, mais nos enfants aussi sont dans une mauvaise posture.
    À combien de générations pouvons-nous accorder la citoyenneté canadienne? À la deuxième, troisième, quatrième génération de personnes nées à l'étranger? Est-ce que ma fille née à l'étranger devrait se sentir différente?
    J'ai une autre question. Si j'arrivais à les regrouper, peut-être que l'un d'entre vous pourrait répondre. Savez-vous combien de pays dans le monde n'accordent pas la citoyenneté aux personnes nées à l'intérieur de leur frontière — par exemple l'Arabie saoudite, le Yémen, le Japon?
    Je vais répondre à cette question en regardant des pays qui sont, à l'instar du Canada, fondés sur l'immigration, comme les États-Unis, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Ces trois pays, comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, ont ajouté des dispositions à leurs lois. Ces dispositions sont fondées sur la durée de résidence. Ainsi, les personnes qui habitent dans un pays pendant une période de temps importante démontrent au gouvernement qu'ils ont développé des liens significatifs avec le pays. Aux États-Unis, il faut avoir demeuré au pays pendant cinq ans après l'âge de 14 ans, alors qu'en Australie, c'est deux ans.
    Je ne dis pas combien d'années sont nécessaires, mais c'est un point qui devrait être étudié de façon approfondie. On pourrait peut-être se pencher sur cette question.
    J'ai entendu un des experts dire que si un enfant adopté voulait adopter un enfant à son tour, il serait traité différemment. Pouvez-vous nous donner des précisions à ce sujet s'il vous plaît?
    Si un enfant adopté...?

  (1030)  

    Je veux dire les enfants adoptés qui entrent au pays et qui sont nés à l'étranger. Lorsqu'ils entrent au pays, ils sont considérés comme des enfants de première génération nés à l'étranger.
    Oui.
    Vous connaissez peut-être des histoires que vous pourriez nous raconter concernant des enfants adoptés nés à l'étranger qui entrent au pays, qui se marient et qui ne peuvent pas avoir d'enfant. Ils décident de se rendre à l'étranger et de parrainer un enfant, ou ils ont des enfants, comme M. Andrew Bilski. Ils peuvent être originaires de Chine ou de Roumanie, et ils décident de donner une chance à quelqu'un qui vient de leur pays et ils souhaitent adopter un enfant qui vient de cet endroit du monde.
    Donc, vous voulez dire s'ils veulent...
    M. Bilski a deux filles. Une qui est née au Canada et l'autre qui est née à l'étranger.
    Monsieur Bilski, vous pourriez peut-être répondre à cette question.
    Est-ce que sa deuxième fille, si c'était la situation aujourd'hui...? Si je décide d'adopter un enfant dans mon pays d'origine, est-ce que cet enfant sera canadien?
    Non, à moins de présenter une demande de résidence permanente, puis de demander la citoyenneté canadienne lorsque l'enfant arrive ici. Il n'y a pas d'autre solution.
    Ils doivent passer par le parrainage. Ils doivent parrainer leur propre enfant.
    Cela me mène à dire que si Mme Mendes ou ma fille allait travailler à l'étranger et avait un enfant, et souhaitait revenir au Canada — disons qu'elle travaille en Arabie saoudite —, alors cet enfant n'aurait pas de passeport.
    C'est exact.
    L'enfant serait apatride.
    C'est exact.
    Alors comment ma fille peut-elle rentrer au pays et parrainer son enfant alors que cet enfant n'a pas de passeport?
    C'est le problème avec le projet de loi C-37.
    Nous produisons donc un autre groupe de Canadiens apatrides. Le projet de loi C-37 ne fonctionne tout simplement pas.
    Il ne fonctionne pas pour ce groupe de personnes, c'est certain.
    La chose qui me frappe moi aussi est que nous avions compris que les nouvelles règles avaient pour objectif d'aider les Canadiens ayant perdu leur citoyenneté à la retrouver et de cesser de l'accorder aux personnes qui n'ont pas d'attachement pour le Canada.
    La seule chose à laquelle je pourrais penser concernant les enfants adoptés est qu'il y a peut-être une crainte que les enfants plus âgés soient adoptés au Canada pour des raisons pratiques. C'est la seule chose que je peux voir.
    Le problème avec ça c'est que pour adopter un enfant, il faut démontrer qu'il y a un lien de filiation véritable. Donc, en fait, ces enfants ne sont pas admis au Canada pour cette raison. Ça n'a aucun sens. Il y a très peu d'adoptés âgés.
    Merci, madame Forbes.
    Monsieur St-Cyr.

[Français]

    Merci, monsieur le Président.
    Pour ce qui est des enfants adoptés, peu importe le processus suivi lors de l'adoption, est-ce que le fait de les considérer tout simplement comme étant nés au Canada ne réglerait pas la question?
    Mme Sandra Forbes: Yes.
    M. Thierry St-Cyr: Selon le mécanisme utilisé lors de l'adoption, certains enfants sont considérés comme étant nés au Canada tandis que d'autres sont considérés comme étant nés à l'étranger; tel est le problème. À mon avis, la nature même de l'adoption fait qu'on considère les parents adoptifs comme des parents biologiques, en pratique. Pour ma part, je suis tout à fait d'accord.
    Par contre, j'ai des réserves concernant la rhétorique sur le citoyen de seconde classe. À mon avis, si on établit qu'il faut tracer une ligne, il va néanmoins y avoir des gens qui ne pourront pas transmettre leur citoyenneté. Imaginons que Mme X, qui est enceinte, entre au Canada à titre de touriste. Son enfant naît prématurément et obtient la citoyenneté canadienne. Mme X retourne dans son pays avec cet enfant. Ce dernier, qui est toujours citoyen canadien, épouse plus tard une femme de son pays. Ils ont des enfants ensemble, et ceux-ci croient être citoyens canadiens. Ils ne devraient pas pouvoir l'être.
    Êtes-vous d'accord pour dire que les gens ne devraient pas pouvoir transmettre indéfiniment leur citoyenneté à leurs descendants?

  (1035)  

[Traduction]

    La question est cependant que dans le projet de loi C-37, on parle spécifiquement des personnes adoptées.

[Français]

    À mon avis, les enfants adoptés devraient être considérés comme étant nés au Canada. Ça réglerait le cas. Cependant, je pense que la rhétorique sur le citoyen de deuxième classe n'est pas fondée. En effet, quelqu'un, à un moment donné, ne transmettra pas sa citoyenneté, et ce sera légitime. Selon cette rhétorique, cette personne sera aussi un citoyen de deuxième classe.
    Selon vous, la citoyenneté est-elle un droit des parents ou de l'enfant?

[Traduction]

    Quelqu'un peut répondre à la question?
    Je reviens sur un point que j'ai tenté d'aborder. Nous croyons que la citoyenneté doit être accordée à une personne qui peut démontrer qu'elle a des liens significatifs avec son pays, qu'elle soit de première, deuxième ou troisième génération. Mes deux enfants sont nés au Japon. Ils grandissent au Canada, mais si ma fille donnait naissance à un enfant pendant qu'elle voyage aux États-Unis et qu'elle revient au Canada, cet enfant sera un Canadien de deuxième génération.
    Il est possible, bien que fort peu probable, que cet enfant, mon petit-fils ou ma petite-fille, voyage dans un autre pays et ait un enfant de façon inattendue. Cet enfant serait un Canadien de troisième génération. Si on dit que cet enfant de troisième génération ne peut pas obtenir la citoyenneté canadienne, c'est qu'on ne tient pas compte des liens avec le Canada, même dans le cas où il grandit et va à l'école au Canada. Si l'enfant étudie en France ou à Genève et qu'il a lui-même un enfant, pouvons-nous dire qu'il n'est pas canadien parce qu'il fait ses études à l'étranger?

[Français]

    Vous êtes donc d'avis que la question n'est pas de savoir si, de façon intrinsèque, les citoyens canadiens ont le droit absolu de transmettre leur citoyenneté. Elle est plutôt de savoir si on a un certain attachement au pays au moment de la naissance de nos enfants.

[Traduction]

    C'est effectivement une façon de voir les choses.
    Merci, monsieur Nichols.
    Madame Chow.
    Monsieur Bilski, vous n'aviez pas terminé votre présentation. Aviez-vous autre chose à ajouter?
    Non, j'avais pratiquement terminé. Il ne me restait rien d'important à dire, merci.
    D'accord.
    Nina est entrée au Canada comme immigrante reçue.
    C'est exact. Elle est naturalisée.
    C'est parce qu'elle est arrivée avant l'adoption du projet de loi C-14.
    C'était avant 2007. C'était en 1999.
    L'avez-vous fait entrer comme citoyenne canadienne...
    Elle serait devant ce dilemme aujourd'hui.
    Il se pourrait que votre petite-fille ou votre petit-fils ne soit pas canadien.
    C'est exact.
    Si c'était le cas et que Nina devenait une journaliste de renom basée en Chine, par exemple, un genre de deuxième Jan Wong, si elle donnait naissance à un bébé là-bas, ce bébé ne serait pas canadien. C'est bien ça?
    Si elle était entrée au pays directement, oui.
    C'est absurde. Personne ne peut justifier cela. Les parents adoptifs ont fait beaucoup de pressions pendant cette période pour faire valoir que les enfants adoptés devaient entrer au pays comme citoyens parce que le parrainage prenait plusieurs années et que pendant ces années, ils ne bénéficiaient pas des droits rattachés à la citoyenneté canadienne. Je me souviens de cette vaste campagne de lobby, et le gouvernement conservateur a dit que vous aviez tout à fait raison. C'est pourquoi la première chose qu'il a faite — je pense à Diane Finley — a été de modifier le projet de loi. Tout le monde célébrait et disait que c'était génial. J'ai dit que c'était génial. Tout le monde a dit que c'était génial sans savoir qu'il s'était mis les pieds dans les plats.
    Je vais mettre ce problème de côté.
    Monsieur Nichols, je me suis rendue au Japon, à Tokyo, à Beijing et à Shangaï avec le ministre des Affaires étrangères pendant quelques jours, et il y a eu plusieurs réunions avec des gens d'affaires très prospères, des gens qui travaillent et qui font des affaires, qui emploient beaucoup de monde au Canada et ailleurs. Le ministère des Affaires étrangères a tenu un dîner. Il est arrivé quelque chose d'intéressant; après le dîner, plusieurs personnes sont venues me voir et m'ont dit qu'elles étaient vraiment inquiètes parce que si elles avaient un enfant, elles devraient peut-être quitter le pays, rentrer au Canada et cesser leurs activités afin de pouvoir avoir leur enfant au Canada. Elles m'ont dit à quel point elles trouvaient la situation absurde parce qu'elle les restreint dans leurs activités. Ces personnes sont citoyennes canadiennes. Elles ont des entreprises canadiennes ici.
    Est-ce quelque chose dont vous entendez parler, que les gens sont vraiment préoccupés?

  (1040)  

    Tout à fait.
    Vous avez parlé du Japon. Mme Bader-Johnston, la présidente de la Chambre de commerce du Canada au Japon, s'est dite inquiète de la situation, et particulièrement préoccupée par le fait qu'à la suite de l'adoption de ce projet de loi, la responsabilité repose entièrement sur les épaules de la femme. En effet, si elle tombe enceinte et que ses enfants naissent à l'étranger, puis que sa fille occupe un poste de direction, au Japon ou ailleurs, et décide d'avoir un enfant, elle devra quitter son poste et rentrer au Canada pour accoucher pour que son enfant ait la citoyenneté canadienne. Pour une cadre de direction, ce n'est pas une solution très convenable.
    Parlez-moi d'elle. Est-elle Canadienne? Est-elle une femme d'affaires prospère?
    Patricia Bader-Johnston a habité dans différents pays et dirige plusieurs entreprises au Japon. En ce moment, elle est présidente de la Chambre de commerce du Canada au Japon.
    Mais elle est Canadienne?
    Oui, elle est Canadienne.
    Et ses parents sont Canadiens?
    Ses parents sont Canadiens, c'est exact.
    Et elle ne se considérera jamais autrement que comme...
    Elle ne se considérera jamais autrement que comme une Canadienne.
    Le gouvernement du Japon considère l'organisation qu'elle dirige comme l'image du Canada. Lorsqu'il y a un grand festival ou une activité ayant un lien avec le Canada, notre chambre de commerce au Japon est toujours invitée à y participer. C'est ainsi non seulement au Japon, mais également partout dans le monde, qu'il s'agisse de la Chambre de commerce du Canada à Hong Kong, du Canada Arizona Business Council à Phoenix, en Arizona, de Network Canada, une organisation sociale située à Londres, ou de la Chambre de commerce du Canada en Suisse. Toutes ces organisations ont exprimé des préoccupations similaires à propos de ce projet de loi — et elles sont toutes considérées comme l'image du Canada.
    Et ça restreint les femmes...
    Tout à fait.
    ... parce qu'elles doivent décider si elles auront des enfants. Elles doivent rentrer...
    Elles doivent rentrer au Canada. Et si elles occupent un poste de direction, il n'est pas raisonnable de s'attendre à ce qu'elle quitte leur emploi pendant un mois ou deux pour rentrer au Canada afin de donner naissance à leur enfant.
    C'est exact. Et vous affirmez que c'est vraiment une question de lieu de résidence et d'attachement dans de nombreux autres pays.
    Connaissez-vous d'autres pays qui fonctionnent de cette façon — qui exigent une ou deux années de résidence?
    Les États-Unis, l'Australie et, pour autant que je sache, la Nouvelle-Zélande, ont des dispositions similaires dans leurs lois sur la citoyenneté.
    Cela permettrait à Patricia, par exemple, si son enfant venait au monde à l'étranger, de dire qu'elle a ce genre de liens. Mais si elle était américaine, son enfant n'aurait aucun problème.
    Aux États-Unis, les dispositions prévoient qu'une personne doit vivre au pays pendant cinq ans ou plus après l'âge de 14 ans. En Australie, c'est deux ans peu importe l'âge.
    Ce qui importe n'est donc pas l'endroit où vous êtes né...
    Ce n'est pas l'endroit où vous êtes né.
    ... c'est vos liens avec le pays.
    C'est logique, vous parlez à un grand nombre de députés qui ne sont pas nés au Canada. Vous savez, nous sommes des députés...
    C'est exact. Il est évident que vous avez des liens très solides avec le Canada.
    Tout à fait.
    Ça serait donc une façon de modifier les règles. Une autre façon serait peut-être de modifier le nombre de générations ou d'éliminer cette question de générations étant donné que le Canada a besoin de beaucoup de bébés de toute façon. Nous sommes un grand pays; nous avons besoin de plus d'enfants. C'est pourquoi nous demandons aux gens d'émigrer au Canada.
    C'est absurde que d'un côté, on demande à quelqu'un de venir au Canada parce que nous devons accroître la population et que d'un autre côté, tous les petits-enfants...
    Quoi qu'il en soit, vous savez où je voulais en venir.

  (1045)  

    Merci, madame Chow.
    J'ai interrompu M. St-Cyr par mégarde. Je lui donne deux minutes de plus.
    Je suis désolé.

[Français]

    Je vais poursuivre avec ce que Mme Chow disait à la fin de son intervention.
    Le concept de la citoyenneté a été élaboré principalement au XIXe siècle, à une époque où les gens se déplaçaient beaucoup moins et où la citoyenneté impliquait moins de choses. Il n'y avait pas de programmes sociaux ni d'État providence. C'était essentiellement un titre et un passeport, en quelque sorte.
    On voit les limites de ce concept. Le concept du lieu de naissance d'une personne est-il encore pertinent pour évaluer la citoyenneté? Certaines personnes sont manifestement attachées au pays dont elles n'ont pas la citoyenneté, tandis que d'autres n'ont aucun attachement au pays dont elles ont obtenu la citoyenneté.
    Ne devrait-on pas repenser la citoyenneté en fonction du XXIe siècle et établir de réels critères d'attachement, plutôt que des critères arbitraires tel le lieu de naissance?

[Traduction]

    Nous pourrions certainement recommander l'étude de cette question lors de l'examen du processus.
    Il serait difficile de définir ce que sont des « liens étroits avec le Canada ». Ce serait un processus intéressant, c'est certain.

[Français]

     Y a-t-il d'autres commentaires là-dessus?

[Traduction]

    De toute évidence, vous faites de cette question une question distincte, mais je crois qu'il n'est pas logique de dire qu'il faudrait que les enfants adoptés aient habité dans un pays pendant un certain nombre d'années après l'âge de 14 ans. Les enfants adoptés doivent être...

[Français]

    La citoyenneté est toujours fonction de l'attachement des parents. À la naissance ou au moment de l'adoption, il est clair que le bébé n'a pas d'attachement. Au moment de sa naissance, on dit où il est né. Ne devrait-on pas demander quel est l'attachement de ses parents au Canada? Cette vision de la citoyenneté ne serait-elle pas plus moderne?

[Traduction]

    Nous devons conclure.
    Toutes mes excuses, monsieur St-Cyr. Je ne peux pas vous accorder plus de temps.
    Monsieur Shory, vous avez un maximum de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais également remercier les témoins d'être ici.
    Monsieur le président, des questions intéressantes ont été soulevées en ce qui concerne l'adoption internationale et la citoyenneté canadienne accordée aux enfants par la suite. Je constate que cette loi a été adoptée le 15 février 2008, et qu'elle a été adoptée à l'unanimité. Je constate que quelques collègues de l'autre côté étaient députés à cette époque.
    Comment pensez-vous qu'il serait possible de régler ce problème tout en préservant l'intégrité de la citoyenneté canadienne et en exigeant que tous les citoyens canadiens aient des liens concrets avec le Canada.
    Pour moi, ça ferait une différence si on ne ciblait pas un groupe particulier, comme les personnes adoptées, les enfants adoptés. Il serait très important de ne pas cibler un groupe particulier lorsqu'on discute de citoyenneté parce que cela mène automatiquement à la mise en place d'un processus discriminatoire. Lorsqu'on examine les nouvelles règles adoptées en avril, on constate qu'il y a une section « personnes adoptées ». Autrement dit, ces règles s'appliquent uniquement à ce groupe particulier et à personne d'autre.
    Ça serait ma suggestion.
    En les ciblant, on crée automatiquement une situation discriminatoire. Nous sommes d'accord avec ce que Mme Forbes a dit.
    Mais cette partie de la loi n'a-t-elle pas été adoptée à l'unanimité par le Parlement?
    C'est exact et c'est ça le dilemme. Mais j'ai compris que les nouvelles règles qui en quelque sorte définissent comment la loi devrait être appliquée sont entrées en vigueur au début avril. Est-ce exact?
    Une voix: Oui.
    Mme Sandra Forbes: En avril 2009.

  (1050)  

    Le Conseil d'adoption du Canada propose d'améliorer le projet de loi existant en y ajoutant une exception visant les enfants adoptés, une exception similaire à celles qui s'appliquent aux familles des militaires. C'et une des recommandations de notre conseil d'administration.
    Qu'avez-vous à dire à ce sujet, madame Cavanaugh?
    J'approuve ce qu'elle vient de dire. Il me semble qu'il serait facile de prévoir cette exception pour les enfants adoptés. Cependant, j'imagine que ça ne réglerait pas la situation des Canadiens expatriés. Mais s'il y a une exception pour les militaires et les employés du gouvernement, pourquoi n'y en aurait-il pas une pour les enfants adoptés?
    On aurait gagné beaucoup de temps si ces questions avaient été soulevées lorsque la loi a été adoptée à l'unanimité.
    Je suis désolée, je n'ai pas compris.
    Ça aurait été plus facile si ces questions avaient été soulevées lorsque la loi a été adoptée à l'unanimité.
    À ce que je sache, aucun organisme d'adoption n'a été consulté à ce sujet.
    D'accord.
    Je suis également un immigrant. Je suis venu ici en tant qu'immigrant — comme M. Karygiannis l'a dit, la plupart d'entre nous sommes des immigrants de première génération — et je me souviens encore du jour où j'ai obtenu la citoyenneté canadienne. Je revois cette journée. J'étais si fier de moi. Aujourd'hui, je suis citoyen canadien. C'est très important pour moi.
    Croyez-vous que les adultes qui renoncent volontairement à leur citoyenneté canadienne devraient pouvoir la recouvrer?
    Il s'agit là d'une toute autre question. Je n'ai pas de réponse.
    Je vais passer à la question de la citoyenneté.
    Vous savez, monsieur Shory, la ligne est mince. Je vais vous laisser continuer encore un peu, mais nous discutons du projet de loi C-37.
    D'accord, je vais laisser mon temps de parole à Mme Wong.
    D'accord.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Nous savons très bien que des expatriés travaillent outre-mer.
    Ma question pour M. Nichols est la suivante. Pouvez-vous nous dire comment on pourrait s'assurer que les citoyens ont des liens concrets avec le Canada?
    Bien sûr.
    Une contribution concrète au Canada ferait référence à une contribution économique de la part de ces Canadiens. J'ai mentionné les chambres de commerce et les conseils professionnels locaux qui sont présents dans pratiquement toutes les grandes villes du monde et qui travaillent d'arrache-pied pour promouvoir les entreprises canadiennes. Ces organisations aident également les entreprises qui tentent d'investir au Canada, souvent de concert avec le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada.
    Il y a des personnes comme Glenn Williamson du Canada Arizona Business Council. En 2005, la valeur des échanges commerciaux entre l'Arizona et le Canada était de 2,5 milliards de dollars. L'organisation avait pour objectif de porter cette somme à 5 milliards de dollars en 2008, et elle y est parvenue.
    C'est un exemple de leur façon de contribuer considérablement à l'économie canadienne.
    Je comprends, mais lorsque nous parlons de citoyenneté, un citoyen est un individu. On ne peut pas dire: je fais partie de cette association professionnelle, j'ai donc le droit d'obtenir la citoyenneté.
    Comment peut-on s'assurer que ces citoyens auront des liens concrets avec le Canada? Quelle serait la solution?
    Ce que nous suggérons est de reconnaître la volonté de nos membres et, je crois, du grand public canadien d'accroître la valeur de la citoyenneté canadienne tout en permettant aux Canadiens qui ont des liens significatifs avec le Canada de contribuer à l'essor du pays s'ils décident de devenir des expatriés. Nous suggérons que si on met en place des exigences en matière de résidence pour les parents de ces enfants...

  (1055)  

    Je vous remercie, monsieur Nichols et madame Wong.
    Avant que je permette aux témoins de se retirer, les analystes auraient besoin que les membres du comité leur donnent des directives. J'espère que le comité accepte que la séance se poursuive à huis clos. Je présume que ça vous va.
    Des voix: D'accord.
    Le président: Mesdames et messieurs, j'aimerais vous remercier d'être venus témoigner et de nous avoir présenté vos réflexions sur le projet de loi C-37. Merci beaucoup pour le temps que vous nous avez consacré et pour votre attention.
    Le comité reprendra la séance à huis clos. Il faudra donc que tout le monde à l'exception des membres du comité et d'un membre du personnel quitte la salle de réunion.
    La séance est levée.
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