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AFGH Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan


NUMÉRO 008 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 4 juin 2009

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Mesdames et messieurs, nous sommes ici réunis pour cette huitième séance du Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan.
    Notre réunion d'aujourd'hui comportera deux volets. Nous aurons tout d'abord le bonheur de passer notre première heure avec Elissa Golberg. Elle est l'ancienne représentante du Canada à Kandahar, ou RCK. Et, bien sûr, M. Brodeur est de retour parmi nous également. Dans la deuxième moitié de notre rencontre, nous allons examiner à huis clos l'ébauche du rapport.
    Avant de commencer, madame Golberg, je tiens à vous présenter nos excuses pour la semaine dernière. Nous allions vous accueillir ici conjointement avec une vidéoconférence nous reliant à Kaboul. Cela a été reporté, et c'est ainsi que vous n'étiez plus à l'ordre du jour. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir accepté notre invitation et de vous être montrée aussi souple avec nous. Comme vous le savez, il arrive que les emplois du temps des comités se trouvent chamboulés.
    Nous sommes très heureux de vous accueillir parmi nous aujourd'hui. Nous envisageons avec plaisir de vous entendre.
    Monsieur Obhrai, souhaitez-vous dire quelque chose avant que nous ne commencions?
    Oui, mais j'attendrai la fin des exposés et de la période des questions. J'aurai alors un rappel au Règlement, avant que nous ne levions la séance.
    D'accord. Très bien.
    Madame Golberg, auriez-vous quelques remarques liminaires à faire avant que nous ne passions aux questions? Je pense que vous connaissez le mode de fonctionnement des comités. Vous êtes ici pour une heure. Vous ferez votre déclaration, après quoi nous ferons un tour de table au cours duquel chacun des partis pourra vous poser des questions.
    Vous avez la parole. Merci d'être venue.

[Français]

[Traduction]

    Merci beaucoup. Je suis vraiment très heureuse de l'occasion qui m'a été ici donnée de comparaître devant vous aujourd'hui.
    J'aimerais dire à l'intention de ceux d'entre vous qui ne me connaissent pas, qui ne m'ont pas rencontrée — je connais certains membres du comité que j'ai eu l'occasion de rencontrer à Kandahar —, que j'ai, pendant 11 mois, soit entre février 2008 et janvier 2009, été la représentante du Canada à Kandahar, ou RCK. C'est en effet le plus beau titre que j'aie jamais porté en tant que fonctionnaire.
    Vous m'offrez aujourd'hui une occasion formidable de vous entretenir de certaines des grandes leçons que j'ai apprises pendant mon séjour à Kandahar. Si vous me le permettez, avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais rendre hommage à l'équipe fabuleuse composée de civils et de militaires avec laquelle j'ai eu le plaisir de travailler à Kandahar. Chaque membre de l'équipe a montré une volonté et un engagement considérables et, surtout, fait d'énormes sacrifices, chose qui n'est peut-être pas toujours bien comprise ni reconnue.

[Français]

    Notre mission à Kandahar est nouvelle pour le Canada. Assurément, les antécédents sont en partie issus de notre expérience ailleurs, mais le fait de prendre part à une contre-insurrection active dans le cadre de laquelle nous sommes un agent d'exécution à l'échelle nationale, provinciale et locale oblige le Canada à élaborer de nouveaux outils et de nouvelles approches, tant sur le plan militaire que civil.
    Je crois que nos efforts des deux dernières années nous ont permis d'en apprendre beaucoup. Certaines initiatives sont uniques, propres au contexte, mais certains aspects peuvent être généralisés et appliqués à d'autres contextes. J'en suis très consciente, et j'espère mettre cela en application dans le cadre de mon nouveau rôle de directrice générale du Groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction, au ministère des Affaires étrangères du Canada.

  (1110)  

[Traduction]

    J'aborderai aujourd'hui trois leçons importantes que j'ai retenues de mon expérience dans le théâtre des opérations.
    Premièrement, l'importance des approches communes, d'une stratégie unifiée, si vous voulez. Cela signifie qu'il faut une intégration et pas simplement une coordination, sur le terrain et à Ottawa.
    Deuxièmement, la valeur de mesures concrètes, de repères, de l'établissement de priorités et d'évaluations objectives, tant sur le terrain qu'à Ottawa.
    Troisièmement, l'impact que l'on peut obtenir avec un plus grand engagement de la part des civils — disposer des bonnes personnes, dotées des bons outils —, conjugué au leadership et à l'appropriation des Afghans.

[Français]

    J'aimerais d'abord faire quelques commentaires sur les fonctions de représentant du Canada à Kandahar. Comme vous le savez, le représentant du Canada à Kandahar, qui relève du chef de mission, est le principal représentant du Canada dans le Sud de l'Afghanistan. Il est chargé des volets liés à la gouvernance et au développement de la mission. J'étais le principal lien avec le gouvernement de la République islamique d'Afghanistan, à l'échelle provinciale, ainsi qu'avec les autres pays, les organisations non gouvernementales et les organisations internationales des Nations Unies, notamment.
    Le représentant du Canada à Kandahar est aussi l'homologue du brigadier-général canadien responsable de la Force internationale d'assistance à la sécurité dans la province de Kandahar. Ensemble, nous avons tous les deux assuré une approche civile et militaire unifiée pour réaliser les priorités canadiennes et internationales.
    Lorsque j'étais sur le théâtre des opérations à Kandahar, nous avons fait passer notre équipe civile de 15 à 63 personnes, ce qui comprenait des membres de la police civile canadienne ainsi que des agents correctionnels politiques et des agents de développement de l'ACDI.

[Traduction]

    Si vous me le permettez, j'aimerais aborder les cinq principales mesures qui ont selon moi fonctionné pendant mon séjour à Kandahar. J'aimerais également traiter des possibilités qui existent, d'après l'expérience que j'ai acquise au cours de la dernière année.
    La première leçon clé pour moi est l'importance de la gouvernance politique et de mécanismes souples. Vous en êtes un parfait exemple. Je citerai la création du comité ici réuni et celle du comité du Cabinet sur l'Afghanistan. Les mécanismes que nous avons créés à l'interne sont des communautés de pratique, réunissant les différents éléments en vue d'entretiens réguliers et intégrés, choses qui ne se faisaient pas forcément auparavant. Une orientation claire du palier politique, émanant de vous-mêmes et du comité du Cabinet, ajoutée à un engagement au niveau ministériel lorsque des décisions sont nécessaires, ont changé la situation.
    J'ai vécu le pré-CCOA, ou Comité du Cabinet sur l'Afghanistan, et j'ai vécu le post-CCOA. J'ai eu l'occasion de vivre les deux choses. Ces mécanismes de coordination sont très importants en vue d'imposer des liens qui, autrement, ne s'établiraient pas, et ils facilitent également l'effet de levier. Je vais vous donner un exemple. Nos communautés de pratique réunissent l'équipe à Kandahar, Kaboul, Ottawa, ainsi que nos autres missions à l'étranger. Lorsque nous vivons un problème, mettons avec l'OTAN, il ne s'agit pas simplement d'aller à Kaboul et de demander à Kaboul de s'entretenir avec le COMISAF, le Commandant de la Force internationale d'assistance à la sécurité de l'OTAN. Nous pouvons également faire intervenir Bruxelles, possibilité que nous n'exploitions peut-être pas de manière suffisamment efficace autrefois.
    La deuxième leçon clé est qu'ils faut des intentions claires. L'établissement des six priorités et des trois projets de premier plan était à mon sens absolument essentiel, aux côtés des mesures qui ont suivi et des évaluations objectives des progrès que nous faisions. Je me souviens de mon premier jour au PRT à Kandahar lorsque notre collègue de l'USAID est venue me voir, et la première chose qu'elle m'a dite était que le problème de nous autres Canadiens était que nous essayons d'être tout pour tout le monde. Les six priorités nous ont en vérité aidés à ne pas être tout pour tout le monde. Cela ne veut pas dire qu'il ne demeure pas d'importantes autres activités devant être menées à Kandahar. Cela veut dire que le Canada n'a pas forcément à toutes les diriger. Nous pouvons veiller à ce que d'autres dirigent ces initiatives. Nous nous concentrons sur la livraison de choses que les gens de Kandahar nous ont dit vouloir, et qui sont intégrées dans ces six priorités.
    Ce sont ces types d'investissements que souhaitent les habitants de Kandahar. Vous l'entendez dire à toutes les shuras auxquelles vous assistez. Peu importe où vous vous trouvez dans la province. J'ai beaucoup voyagé. Je ne passais que deux journées et demie par semaine au KAF, l'aérodrome de Kandahar. Le reste de la semaine, je la passais ou au PRT ou dans des bases d'opérations avancées. Je me déplaçais sans cesse sur les routes. J'avais le sentiment d'avoir une assez bonne idée de ce que recherchaient les habitants de Kandahar.
    La troisième leçon clé que j'ai apprise est la nécessité de l'adoption d'une approche intégrée entre l'équipe civile et l'équipe militaire. C'était là l'objet même de la création du poste de RCK. Il s'agissait de veiller à l'établissement d'une meilleure intégration entre les éléments militaire et civil de la mission. Pour ce qui est du premier élément, il s'agissait de reconnaître et d'apprivoiser les différences culturelles, englobant tant les cultures bureaucratiques que les expériences de vie générales.
     J'ai travaillé étroitement avec le brigadier-général Laroche et le brigadier-général Thompson à la co-occupation physique de nos personnels, à la planification conjointe entre les personnels, aux activités conjointes de renseignement et à la co-affectation des ressources. Cela a été un progrès énorme, et il s'agit d'un aspect que le Canada réussit beaucoup mieux que n'importe lequel de nos alliés. Le développement sur le terrain d'une stratégie civile-militaire conjointe intégrée, le plan d'action de Kandahar, a été la première initiative du genre. Certains de nos alliés ont relevé la chose et ont régulièrement fait état des progrès qu'ils ont constatés sur le plan de l'intégration. Ils savaient que lorsque le général Thompson et moi travaillions ensemble, nous avions un front uni. Ils savaient que s'ils s'entretenaient séparément avec nous, nous allions chacun renforcer la vision des choses de l'autre, ce qui était très important.
     La leçon à tirer de notre expérience est fondamentale. Il importe que chaque membre de l'équipe épouse la même analyse. Pour faire avancer cela, nous avons envoyé nos civils de plus en plus loin, sur les bases d'opérations avancées, où nous avions en place, dans « l'omelette », des policiers, des agents de développement et le groupement de combat. Nous avons tout de suite, dans les deux semaines qui ont suivi, constaté une différence dans l'analyse qui nous revenait des équipes sur le terrain. Les gens avaient une vision commune de ce qui se passait au niveau du district, et c'est ainsi que nous avons pu mieux mettre à profit les ressources du PRT. Nous avons ainsi pu envoyer dans les districts certaines des ressources du gouvernement afghan à Kandahar. C'était là quelque chose que nous n'avions pas pu faire auparavant, sans avoir sur place nos collègues du développement politique ou de la police.

  (1115)  

    La quatrième chose que j'aimerais souligner est l'expertise et l'engagement actif autonome des civils, tout en mettant l'accent sur le leadership et l'appropriation des Afghans, même si cela doit prendre du temps.
    Nous avons tiré de nombreuses leçons de nos deux premières années à Kandahar et nous sommes adaptés pour livrer des résultats en matière de gouvernance et de développement dans un environnement non permissif. C'est vraiment là la clé. Nous nous efforçons d'exécuter des programmes de gouvernance et de développement dans un contexte que le Canada n'a, franchement, jamais connu auparavant. Nous avons modifié notre cycle de planification et notre approche de manière à pouvoir mieux mettre en oeuvre nos stratégies. Comme je l'ai dit, nous avons augmenté sensiblement l'empreinte en matière d'exécution. Cela a été tout particulièrement important en ce qui concerne la police et les agents correctionnels. Le fait que mon équipe de policiers et d'agents correctionnels travaille aux côtés de leurs homologues afghans chaque jour fait toute la différence. Il vous faut avoir une proportion suffisante de votre équipe dans le théâtre afin d'y maintenir dans le temps une incidence soutenue. L'autre chose a été l'engagement auprès des autorités civiles. Avec la création du poste de RCK, il y avait maintenant un homologue civil, une personne à laquelle pouvait s'adresser le gouverneur, une personne à laquelle les ministères responsables pouvaient faire appel dans un contexte civil, et qui était en mesure d'établir pour eux le lien avec Kaboul et ses ministères responsables. Il n'y a pas toujours un lien évident entre ce qui se passe aux paliers national et provincial; nous pouvions faciliter cela, ce qui fournissait en même temps la preuve que l'intérêt du Canada à Kandahar s'étendait bien au-delà des questions de sécurité et était intimement lié à nos préoccupations en matière de développement et de gouvernance.
    Enfin, la cinquième leçon pour moi a vraiment été la délégation de pouvoirs, et sur ce plan, il y a eu toute une évolution. Les pouvoirs décisionnels et financiers délégués ont beaucoup changé le cours des choses en ce qui concerne notre souplesse et notre possibilité de réagir aux développements sur le terrain. Par exemple, le fait que le RCK se soit vu accorder un pouvoir de signature d'une valeur de 2 millions de dollars — ce qui est sans doute, franchement, le pouvoir de signature le plus important que ce soit jamais vu accorder, dans l'une quelconque de nos missions, un agent sur le terrain civil — nous a, lors du bris de prison de Sarapoza, permis d'intervenir dans les 24 heures, nous rendant sur place avec les ingénieurs et les fonctionnaires du ministère de la Justice afghan pour y faire une évaluation préliminaire des mesures à prendre. C'est ainsi que, dans les 24 heures, nous avions déjà un plan de réhabilitation du périmètre de sécurité, de manière à pouvoir aider les Afghans à renforcer leur capacité, mais, ce qui est plus important encore, à faire en sorte que les résidents de Kandahar ne voient pas chaque jour en passant dans la rue l'entrée défoncée de la prison, ce qui avait une incidence sur leur perception de la sécurité. Du fait que nous ayions des pouvoirs délégués, il ne m'avait pas fallu revenir à Ottawa pour discuter de l'allocation de ressources. J'ai tout de suite pu distribuer les ressources et lancer le travail d'ingénierie. C'est ainsi que nous sommes beaucoup mieux en mesure de réagir aux situations au fur et à mesure qu'elles surviennent.
    Nous avons également créé de nouveaux outils adaptés à l'environnement non permissif dans lequel nous oeuvrons. La création du Fonds pur la paix et la sécurité au Kandahar et du Programme d'initiatives locales à Kandahar a été un réel tournant. Encore une fois, grâce à ces initiatives, le directeur politique et le directeur du développement sur le terrain sont en mesure de réagir aux initiatives locales au fur et à mesure qu'elles sont lancées. Nous pouvons établir des liens sans être soumis à un processus étiré, ce qui était le cas auparavant. Nous pouvons également être plus créatifs aux côtés des partenaires avec lesquels nous travaillons. Je dirais cependant que le défi en ce qui concerne nos partenaires, et c'est un défi auquel nous continuerons d'être confrontés, est de trouver et de conserver un mélange de partenaires ayant une certaine tolérance à l'égard du risque et qui soient prêts à travailler dans certains de ces secteurs de Kandahar.
    En conclusion, je dirais que nous avons fait des progrès considérables au cours des 16 derniers mois. Nous continuons de manifester notre leadership et de nous engager de manière positive auprès de nos homologues afghans, mais il nous faut maintenir le cap. Il nous faut continuer de nous adapter aux circonstances changeantes et de fixer des objectifs réalistes par rapport auxquels faire état de nos progrès tout en facilitant un plus grand leadership de la part des Afghans.

  (1120)  

[Français]

Je suis très consciente que le temps passe. Je m'arrête donc ici pour qu'on puisse faire des échanges et répondre aux questions.
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup de ces commentaires.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
     Nous allons commencer avec l'opposition officielle, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Elissa, il est bon de vous revoir, dans des circonstances quelque peu différentes.
    J'ai été frappé par deux points que vous avez soulignés relativement à l'engagement, soit la nécessité de disposer des bonnes personnes et celle de disposer des bons outils. Clairement, dans le cadre du rapport fait par le gouvernement en mars de cette année, la deuxième priorité concernait l'augmentation de la capacité de prestation des services essentiels, le développement économique, etc.
    Vous n'avez pas traité de ce dont je vais vous parler, mais je vais vous demander si vous en êtes au courant. La Fédération canadienne des municipalités avait provisoirement prévu de se rendre en Afghanistan fin juin, l'idée étant d'examiner la possibilité d'élaborer certains programmes d'établissement de capacité au niveau des villages, c'est-à-dire plus ou moins ce dont il est question ici. Elle n'y va plus, pour quelque raison, qu'elle soit politique, financière ou autre. Mais pour moi, il s'agit là d'un partenaire. J'ai soulevé la question il y a un mois ou deux avec l'USAID. À mon sens, il s'agit d'un partenaire essentiel. Si vous voulez parler d'établissement de capacité, et j'ai un certain parti pris en tant qu'ancien président, mais, je peux vous dire, je connais les projets que nous avons entrepris de par le monde et en règle générale on faisait appel à nous dans le but précis — surtout dans les régions où il n'existe aucune infrastructure quelle qu'elle soit — d'essayer de développer le genre de travail que nous autres Canadiens, quel que soit notre parti politique, appuyons.
    Je vous invite à vous prononcer là-dessus, pour commencer, puis à nous dire quel rôle, s'il en est, vous proposeriez que nous jouions pour faire avancer les choses sur ce plan.
    Je ne peux pas me prononcer sur la FCM en particulier, car j'ai quitté le théâtre en janvier. Ce que je peux dire est qu'essayer d'engager ce genre d'expertise était et continue d'être important pour nous. J'ai passé beaucoup de temps à essayer d'encourager une présence accrue de la part d'ONG partenaires, par exemple, dans le sud de l'Afghanistan. Nous avons eu des conversations très positives avec la Fondation Aga Khan, par exemple, ainsi qu'avec CARE. Il y a déjà 13 ONG partenaires avec lesquelles nous avons de solides relations de travail à Kandahar, en plus de la présence de tous les fonds et programmes des Nations Unies. De ce point de vue-là, nous sommes très privilégiés du fait que la plupart de ces agences aient au moins une présence à Kandahar.
    Pour ce qui est de questions comme la capacité de gestion municipale et la gouvernance de base, nous avions en cours des projets avec le PNUD, notamment un programme appelé PGSA. Je ne me souviens bien sûr pas de ce à quoi correspond ce sigle, mais il s'agit en gros d'un programme de gouvernance ayant pour objet de renforcer la capacité du bureau du gouverneur afin que ce bureau puisse succéder à tout individu, chose à laquelle je vous sais sensible, du fait d'être allé là-bas. Trois gouverneurs se sont succédés pendant mon séjour à Kandahar.
    Nous avons également eu des initiatives avec ONU-HABITAT, initiative qui visait principalement à établir comment bâtir la capacité du bureau du maire, par exemple, étant donné que la ville de Kandahar est une grosse municipalité.
    Il s'agit donc définitivement d'un volet auquel nous sommes très désireux de continuer à travailler. Nous étions très enthousiastes lorsque j'y étais. Cependant, veiller à ce que les partenaires comprennent bien la situation est important, et nous prenons donc notre temps pour intégrer tout nouveau partenaire. Nous leur faisons en général faire une visite de repérage. Nous avons avec eux des discussions au sujet du devoir de diligence à l'égard de leur personnel. Il est vraiment important qu'ils réfléchissent à ces questions.
    Ce genre d'expérience sur le terrain, ayant les bonnes personnes, les bons outils, serait logique, alors nous devrions peut-être recommencer à les faire frapper de nouveau aux portes.
    Monsieur le président, M. Brodeur aurait-il quelque commentaire à faire là-dessus?
    Non, pas vraiment. Je pense que Mme Golberg a assez bien expliqué notre mode de fonctionnement là-bas, et je pense que l'essentiel pour nous est que toute capacité... disons que je pense que toute personne pouvant ajouter son appui pour augmenter le niveau de capacité serait, je pense, la bienvenue. Mais, encore une fois, vu les circonstances, il importe d'examiner attentivement les conditions, et nous travaillons en partenariat avec un grand nombre de personnes. Ce n'est pas toujours facile, car les conditions ne sont pas toujours porteuses, mais il est certain, encore une fois, que nous serions favorables à toute initiative en ce sens.

  (1125)  

    Et ces initiatives seraient bien sûr financées par l'ACDI, et les participants auraient donc l'habitude de ces genres d'arrangements.
    Je vais poser encore une petite question rapide, après quoi je céderai la parole à mes collègues. Il y a en Afghanistan plus de 230 000 personnes déplacées, et leur nombre semble augmenter encore. Il semble que ce soit un problème croissant autour de Kaboul et d'autres centres importants. Comment recommanderiez vous que nous y réagissions en tant que communauté internationale conjointement avec les autorités afghanes?
    La question des personnes déplacées est un dossier que je connais assez bien. Dans une vie antérieure, j'ai été directrice des affaires humanitaires et de l'action en cas de catastrophe, alors j'ai eu de nombreuses rencontres avec des collègues de UNHCR à Kandahar. Il y a sur place un solide Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. C'est lui qui est l'organisme chef de file pour ce qui est des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays. Le Canada lui assure en Afghanistan un soutien considérable. Nous oeuvrons également avec lui sur le plan des politiques. L'une des choses dont nous discutons avec le gouvernement afghan, tant au niveau provincial qu'au niveau fédéral, si vous voulez, est sa politique à l'égard du déplacement interne, le fait qu'il n'existe pas forcément une politique nationale en matière de déplacement interne, mais il y a une politique à l'égard des réfugiés et des réfugiés qui reviennent.
    Les conditions sont atroces, et ce pourrait être un terrain fertile pour...
    À Kandahar, nous investissons dans la facilitation du retour de réfugiés. Nous avons aidé à l'établissement d'un centre UNHCR et nous avons passé beaucoup de temps à travailler sur le dossier des personnes déplacées. Le nombre de personnes déplacées a reculé à Kandahar au cours des 16 derniers mois, phénomène plutôt intéressant et que nous nous efforçons de suivre. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés réinscrit les personnes déplacées pour veiller à éviter une situation dans laquelle des personnes ont été déplacées, sont retournées dans leurs collectivités, n'ont pas voulu y demeurer et ont préféré se rendre dans une autre localité. Nous examinons donc également des possibilités d'intégration locale.
    Merci.
    Je cède maintenant le micro à mon collègue.
    Merci d'être des nôtres. Je suis heureux d'être ici. Je ne siège pas habituellement à ce comité.
    Vous avez fait une déclaration et esquissé le plan stratégique ciblant ce que veulent les habitants de Kandahar. Pourriez-vous nous en dire davantage? Je pense que le comité serait peut-être intéressé de juxtaposer cela à l'approche stratégique que vous suivez.
    Ce que vous entendrez régulièrement de la bouche des habitants de Kandahar est qu'ils s'attendent à ce que leur gouvernement leur assure les services essentiels et une sécurité de base. C'est ce qu'ils recherchent. Vous entendrez ces choses sans cesse répétées. Différents résidents de Kandahar appartenant à différentes couches sociales auront en tête différentes choses en prononçant ces mots, mais ce sont là les deux éléments communs dont vous entendrez sans cesse parler.
    Ils veulent également voir de plus importants projets d'infrastructure, ce qui vient appuyer la décision d'investir dans le barrage Dahla, par exemple, et d'autres importants travaux en matière d'approvisionnement en eau et de services sanitaires auxquels nous nous adonnons dans la ville de Kandahar. Les projets à retombées rapides que nous avions menés au préalable continuent d'être utiles. Ils sont particulièrement utiles dans certaines des régions plus isolées, mais les gens veulent aujourd'hui voir ces plus gros investissements qui amèneront croissance économique et création d'emplois. Voilà certaines des choses qui leur tiennent tout particulièrement à coeur.
    Merci, monsieur le président.
    Nous avons entendu des choses semblables lorsque nous nous sommes rendus au Camp Nathan Smith et avons rendu visite à des conseillers locaux. Il était question de choses plutôt fondamentales. Nous leur avons demandé de nous donner leur cinq ou 10 premières priorités, et leur liste correspond exactement à ce que vous nous avez dit.
    Allez-y, monsieur Bachand.

[Français]

    Je remercie nos deux témoins d'être ici ce matin.
    Madame Golberg, j'ai été surpris de voir autant de flexibilité. Auparavant, il y en avait un peu moins. J'aimerais que vous nous expliquiez comment vous en arrivez à vos décisions. Vous relevez de l'autorité civile qu'est le gouvernement canadien, et les gens avec lesquels vous traitez sur le terrain relèvent souvent du gouvernement afghan. Vous me dites que vos décisions et celles du général Laroche ou Thompson se renforcent mutuellement.
    Êtes-vous libre de prendre vos propres décisions? Le gouvernement fédéral vous donne-t-il une ligne de conduite et vous demande-t-il de changer votre philosophie, ou est-ce l'inverse, c'est-à-dire que vous agissez sur le terrain et en avisez ensuite le gouvernement, qui vous dit de continuer dans ce sens?

  (1130)  

    Si vous permettez, je vais simplement donner une amorce de réponse, et Elissa pourra compléter, en se basant sur son expérience personnelle.
     En gros, nous sommes toujours guidés par les priorités que le gouvernement a adoptées —, ces six priorités que vous connaissez. Ces priorités comportent un certain nombre d'objectifs, comme vous le savez, de même que l'indicateur de rendement auquel on essaie de se conformer. Le travail de nos collègues sur le terrain est un travail intégré, comme Elissa l'a expliqué. Il vise à atteindre les objectifs contenus dans ces six priorités.
     Je peux parler du point de vue d'Ottawa. Évidemment, nous essayons de donner à nos collègues les outils dont ils ont besoin pour prendre les décisions nécessaires pour atteindre nos objectifs. C'est ce qui nous guide. On ne revoit pas les objectifs en fonction de ce qui se passe lors d'une journée en particulier. Par contre, on essaie de voir comment mieux atteindre nos objectifs compte tenu des circonstances au moment où on travaille.
     Je vais vous donner des exemples du quotidien. Ainsi, Elissa nous envoyait souvent des messages, à mes collègues du Conseil privé ou de l'ACDI et moi, parce qu'on travaille de manière très intégrée. Nous tenir tous informés en même temps est un défi que j'avais à relever. Elle pouvait nous dire que selon elle, la meilleure façon d'atteindre tel ou tel objectif était de faire ceci ou cela. Elle pouvait aussi nous dire qu'elle avait besoin qu'on lui fournisse telle ou telle chose. Si elle a la latitude de prendre des décisions, elle en prendra sur le terrain.
    Un des principes de base que nous avons essayé d'adopter et de respecter était de laisser à nos collègues qui oeuvraient sur le terrain le plus de marge de manoeuvre possible. Ils sont là-bas, mais nous, pas. Notre tâche est de leur donner les moyens de remplir leur mandat. Comment cela se passe-t-il sur le terrain? Elissa peut parler de son expérience.
    J'aimerais souligner une chose intéressante et importante: nous sommes les seuls! Le Canada est le seul pays à travailler de manière aussi étroite et intégrée que cela. En pratique, les civils — représentés d'une certaine façon par Elissa — et les militaires sont sur le même pied. Il n'y a pas de hiérarchie. Les militaires et nous devons nous rejoindre. Nous devons travailler ensemble, nous sommes des partenaires. C'est couché par écrit dans un document que l'on appelle le plan d’action de Kandahar. Ce document, auquel tous les partenaires souscrivent, reflète les priorités du gouvernement dans son ensemble. Les partenaires s'engagent donc à travailler dans ce sens.
    C'est un bon modèle, et c'est d'ailleurs le seul. Je crois que seul le Canada fait cela, à tel point que même nos partenaires américains s'y intéressent. Ce document évolue dans le temps et on arrivera probablement à une deuxième mouture dans les semaines à venir. On discutera de cette mouture avec nos collègues américains, étant donné leur présence croissante.
    Je vais m'arrêter ici. Elissa, tu peux peut-être continuer.
    Cette mouture sera-t-elle soumise au comité avant qu'on prenne une décision finale, ou si on ne pourra qu'en prendre acte?
    C'est un document de travail, un outil qui nous permet de coordonner le travail sur le terrain de la même façon. On fait ce qu'on pense nécessaire.
    C'est un document rédigé par des gens qui sont sur le terrain. On a eu des plans stratégiques, et c'était tout ce dont on avait besoin d'Ottawa. C'est à nous, les personnes qui travaillent sur le terrain, de mettre en oeuvre ce plan stratégique et de l'adapter à Kandahar.
    Que veulent dire les six priorités au jour le jour à Kandahar? Je me sentais toujours libre de faire ce que j'avais besoin de faire, parce qu'Ottawa m'avait remis un plan très clair. C'était la question de la mise en oeuvre.
    Par contre, il y a une hiérarchie militaire qui remonte jusqu'au chef d'état-major de la Défense. Y a-t-il eu des divergences d'opinion, à certains moments, entre vous, le général Laroche ou le général Thompson, au point où ils ont dû se référer à leur supérieur pour obtenir confirmation de changements de tendance ou de changements de philosophie?
    J'avoue qu'on a eu des conversations de temps en temps, mais jamais nous n'avons eu besoin de faire appel à nos supérieurs.

  (1135)  

[Traduction]

    C'est là l'avantage d'avoir un commandement de mission, si vous voulez, du côté civil et du côté militaire, car nos cadres supérieurs nous font confiance pour prendre ces décisions et en arriver à une entente avec eux.
    Oui, il a parfois fallu que le général Thompson ou le général Laroche rajustent leur plan militaire, si cela voulait dire que, du côté civil, nous ne comptions pas forcément avoir dans les secteurs concernés des projets de gouvernance et de développement. C'est là l'avantage d'avoir cette conversation. Il s'agit de dire « Oui, vous pourriez aller dans ce secteur, mais si vous y allez, sachez que les gens de la collectivité nous ont dit qu'ils ne veulent pas forcément des écoles ou des postes de police en cet endroit, mais plutôt ailleurs, plus loin ». C'est là la valeur ajoutée que nous apportons du côté civil. Et, inversement, le général Thompson et le général Laroche pouvaient me dire « Nous avons besoin de vous pour vous entretenir avec cette collectivité et déterminer s'il s'agit d'un secteur dans lequel le Canada devrait faire certains de ces investissements ». C'est ainsi qu'intervient cette conversation, qui est d'une importance critique.
    Nous avons tous les deux été guidés par les six priorités et par les plans opérationnels de l'OTAN. Nous revenait alors, nous qui étions les deux cadres supérieurs sur le terrain, la décision quant à savoir quelle orientation donner à l'équipe conjointe militaire-civile pour veiller à ce que le travail débouche.

[Français]

    Ce n'est pas toujours évident. Il est absolument nécessaire qu'il y ait une grande collaboration entre nous, mais je crois que nous avons réussi ce que peu de gens auraient pu réussir.

[Traduction]

    Excusez-moi, mais c'est tout le temps que nous avons pour ce premier tour.
    Nous passons maintenant au parti au pouvoir, avec Mme Glover.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais dire

[Français]

bienvenue à nos témoins.

[Traduction]

    J'aimerais simplement prendre un instant, madame Golberg, pour vous dire merci au nom des Canadiens, et des femmes canadiennes, plus particulièrement, de nous avoir si bien représentés lorsque vous étiez à Kandahar en Afghanistan. Je pense qu'en tant que femmes nous voyons les choses quelque peu différemment, et c'est un réel privilège pour moi d'être ici aujourd'hui. Je ne suis en temps normal pas membre du comité, mais j'y ai siégé une fois et j'ai pu constater que nous voyons bel et bien les choses différemment, et c'est un privilège pour moi d'être ici de nouveau aujourd'hui. Merci, donc, en mon nom propre et au nom d'autres femmes canadiennes.
    J'aimerais vous poser des questions au sujet des droits de la personne en ce qui concerne les femmes, car j'estime que cela est extrêmement important. Lorsque j'ai siégé la dernière fois au comité, cela m'a vraiment étonné de constater que certains membres du comité ne savaient pas que les femmes n'allaient pas à l'école. C'est pourquoi je dis que les femmes voient les choses quelque peu différemment. Lorsque nous voyons d'autres femmes se faire opprimer ou abuser, nous prenons cela très à coeur.
    C'est ainsi que, compte tenu de votre expérience, j'aimerais que vous nous disiez, si vous le pouvez, à quel point il est important que ces femmes et ces jeunes filles aillent à l'école. Qu'avez-vous constaté, et dans quelle mesure la chose est-elle importante?
    Merci beaucoup. Je suis heureuse de l'occasion qui m'est ici donnée d'être parmi vous.
    L'on ne saurait trop insister sur l'importance de la fréquentation scolaire pour ces filles et leurs parents. Il s'agit d'un virage fondamental dans la société afghane.
    Et vous en êtes tout particulièrement frappé lorsque vous rendez dans une des écoles que le Canada ou qu'un autre donateur a aidé à réhabiliter et que vous y voyez des enfants de sept ans, et je dis sept ans car, bien sûr, vous regardez ces enfants âgés de sept ans, qui apprennent à compter, à lire, à chanter, et vous êtes tout de suite frappé par le fait qu'il y a sept ans cela ne leur aurait pas été permis. C'est nouveau, la situation est en train de changer, et c'est une adaptation que vit la société afghane.
    Je ne vais pas vous chanter une jolie chanson fêtant la liberté. Il reste encore beaucoup de travail à faire. La région de Kandahar en particulier, le sud, sont extrêmement conservateurs. Il s'agit de la région la plus conservatrice du pays.
    Néanmoins, chaque fois que, dans le cadre de nos pérégrinations, je m'entretenais avec un comité enseignants-parents — car nous ne construisions pas d'écoles à moins que les comités soient d'accord —, les gens disaient vouloir que leurs filles aient l'occasion de fréquenter l'école. Ils demandaient que cette possibilité leur soit offerte. Et ce n'était pas que des filles. C'était aussi des adultes.
    L'un des mes projets préférés sur le terrain — et permettez-moi de chanter un petit peu mes propres louanges là-dessus — est un petit projet que nous finançons dans le cadre du Programme d'initiatives locales de Kandahar pour la littératie et la numératie chez les adultes. Près de 14 000 adultes, dont 80 p. 100 de femmes, ont participé à ce programme. Lorsque je discutais aux diplômés de ce programme, ces femmes me disaient « Je peux maintenant aller au marché et savoir qu'on me donne la monnaie juste ». Elles vous disent également que cela a changé la façon dont leur mari les regarde. Cela est purement anecdotique, tiré des commentaires faits par certaines des diplômées. Elles vous diront également que cela a modifié la dynamique de leur famille, que leur conjoint est maintenant davantage en faveur de laisser les enfants, tant les filles que les garçons, fréquenter l'école.
    L'autre chose que nous faisons pour essayer de faciliter cela dans ces contextes dans le cadre desquels il y aurait peut-être, autrement, certains soucis — car les enfants sont, bien sûr, souvent considérés également comme étant un atout économique pour la famille — , c'est assurer un appui additionnel. Grâce au Programme alimentaire mondial, nous assurons des programmes de vivres contre littératie. C'est ainsi que nous distribuons des légumineuses et des huiles pour encourager les familles à laisser leurs enfants aller à l'école. Il y a toute une gamme de choses que nous faisons dans cette perspective.
    Cela ne se limite pas à l'éducation; il y a également des possibilités d'emploi. L'une des choses que nous essayons de faire par l'intermédiaire du Programme d'initiatives locales à Kandahar est de cibler tout particulièrement, aux côtés du ministère du travail et des affaires sociales de l'Afghanistan, des possibilités d'emploi pour les femmes.
    Encore une fois, la province de Kandahar est différente du reste du pays. Je sais que le comité a déjà parlé du MISFA, le programme de microfinancement. Celui-ci a connu un succès extraordinaire ailleurs au pays. Nous avons eu beaucoup plus de difficulté à l'implanter au Kandahar. Pourquoi? Selon ce que l'on nous rapporte, c'est parce que le sud est beaucoup plus conservateur. La raison pour laquelle les programmes de microfinancement réussissent généralement est que les femmes peuvent travailler à l'extérieur de la maison.
    Nous oeuvrons avec nos collègues américains pour essayer de trouver des possibilités de création d'emploi pour les femmes chez elles — élevage de volailles, couture et confection, et ainsi de suite — afin qu'elles aient une activité rentable, tout en respectant la culture dans laquelle elles vivent.
    La dernière chose que je mentionnerai concerne les soins de santé. L'accès aux soins de santé pour les femmes dans le sud s'est amélioré de manière incroyable. Toute personne qui s'est rendue là-bas par le passé sait que les femmes n'étaient bien franchement pour la plupart pas autorisées à chercher par elles-mêmes à se faire soigner. Il leur fallait toujours être accompagnée par un parent du sexe masculin. Et, franchement, le système de soins de santé lui-même n'était pas à un niveau tel qu'il pouvait répondre aux besoins des femmes.
    Certaines choses dans lesquelles nous investissons visaient précisément à faciliter l'accès par les femmes à de meilleurs services médicaux, qu'il s'agisse de sages-femmes, par exemple, ou de choses comme le premier foyer pour femmes enceintes en attente d'accoucher à ouvrir en Afghanistan, et qui se trouve à Kandahar. Ce centre va améliorer sensiblement les chances des femmes de survivre à l'accouchement et, en conséquence, celles de leurs enfants de grandir.
    Voilà donc quelques uns des progrès marquants que nous faisons, mais ce n'est là que la pointe de l'iceberg. Ce travail va demander un gros investissement en temps, et croire autre chose serait se bercer d'illusions.

  (1140)  

    Je sais que le temps qui m'a été alloué est sans doute écoulé, mais j'ai une question au sujet du fait que des femmes ont protesté contre la loi chiite afghane. Quelle en est l'importance? Il me semble que le mouvement a été important, mais je n'étais pas sur place. Je ne sais trop quelle pertinence cela a pu avoir, car je ne suis pas allée en Afghanistan et je n'ai pas pu constater les choses de visu. Pourriez-vous nous dire l'importance de ce moment dans l'histoire du pays?
    Je pense que j'aurai la réponse à cette question, car Elissa avait déjà quitté Kandahar et l'Afghanistan lorsque cela est arrivé.
    Cela a été très important. Ce que nous avons constaté là-bas était véritablement une crise de conscience chez les femmes concernant leur rôle et leur importance dans la société. Il y a eu une mobilisation très importante et marquante de femmes désireuses de protester contre la loi. Ce qui s'est passé, et j'en ai déjà entretenu le comité, est qu'il y a eu au début un débat entre femmes, et pas seulement entre femmes opposées à la loi, car y ont également participé des femmes dont les prises de position étaient fondées sur la religion.
    Cela a été un moment déterminant. Dans l'histoire récente de l'Afghanistan moderne, voilà que tout d'un coup il y avait des femmes ayant décidé qu'il leur fallait intervenir, participer activement à la définition de leur propre destin. Cela est une très bonne chose, et est reconnue en tant que telle. Je pense que les femmes souhaitent pour la plupart maintenir cette tendance, et je pense que c'est ce que vous avez entendu de la bouche de Mme Sobhrang il y a deux semaines.
    Il s'agit d'un travail qui doit se poursuivre. Il nous faut l'appuyer, et c'est ce que nous faisons. C'est en fait très positif.
    Merci, madame Glover.
    Nous passons maintenant à M. Harris.

  (1145)  

    Merci, monsieur le président. Merci de votre déclaration ce matin.
    Je suis intéressé par votre bilan des progrès accomplis en ce qui concerne le nombre de civils engagés dans la mission en Afghanistan. Je pense que vous nous avez dit qu'ils sont aujourd'hui au nombre de 63, et votre ventilation faisait état de policiers, de membres des services correctionnels, d'agents de développement et d'agents politiques. Pourriez-vous nous donner la ventilation numérique des 63 dont il serait maintenant question?
    Il y en a davantage que cela en Afghanistan. Je pense que nous en sommes à 102. Nous pouvons vous donner la ventilation pour Kandahar, ce dont j'étais responsable. Pendant mon séjour là-bas, nous sommes passés de 15 à 63, dont 24 policiers civils et quatre agents des services correctionnels, et les autres étaient un mélange d'agents politique et d'agents de l'ACDI.
    Je suppose que vous avez été le premier RCK. Vous avez été remplacée. Qui vous a remplacée?
    Ken Lewis.
    J'ai également fait mention de la structure et de certains autres membres du comité. Vous avez parlé du commandement de la mission, du commandement civil et du commandement militaire de la mission. Considérez-vous le RCK comme étant le commandant civil de la mission?
    Oui, en ce qui concerne le sud de l'Afghanistan. Je rendais compte à l'ambassadeur, qui surveille bien sûr tout ce qui se passe dans le pays. L'objet de l'établissement d'un RCK était d'avoir dans le sud un responsable de la gestion du personnel civil et de la programmation en matière de gouvernance et de développement. C'est en fonction de ces paramètres que le travail a été en gros réparti entre le général Thompson, le général Laroche et moi-même. Les généraux étaient au premier chef préoccupés par la sécurité, mais pas toute la sécurité.
    Comme Denis a dû vous le dire — je pense qu'il a comparu devant le comité —, nous avions autrefois une liste de choses qui étaient essentielles au quotidien pour la population afghane. Nous blaguions à l'occasion, car le premier élément était la sécurité, le reste correspondant à des services essentiels. Denis avait l'habitude de dire « Je suis responsable du premier élément ». Puis il ajoutait « Non, je ne suis en vérité pas seul responsable du premier élément, car s'inscrivent sous la rubrique sécurité les services correctionnels et policiers, ce qui relève, bien sûr, d'Elissa ». Nous travaillions très étroitement ensemble, mais c'était moi qui étais en bout de ligne responsable des questions de gouvernance et de développement dans le sud.
    Ces personnes relevaient donc essentiellement de vous?
    C'est exact.
    Bien.
    Je suis également intéressé par le Fonds pour la paix et la sécurité dans la province de Kandahar que vous avez mentionné et par le Fonds pour les initiatives locales. S'agit-il de fonds distincts relevant de votre contrôle? Dans l'affirmative, de combien d'argent parle-t-on? Nous savons que le Canada envoie énormément d'aide en Afghanistan, et, d'après ce que je crois comprendre, il n'y en a pas gros parmi cette aide qui relève directement du contrôle des décideurs canadiens. Vous pourriez peut-être m'éclairer en la matière.
    Le Fonds pour la paix et la sécurité est un fonds renouvelable de 400 000 $. Il relève, par voie de délégation de pouvoirs, du directeur politique au PRT, l'agent des Affaires étrangères. Il vise à appuyer des initiatives relatives à la paix et à la sécurité, au fur et à mesure qu'elles surviennent. Si le gouverneur souhaitait tenir une réunion de jirga, par exemple, nous pourrions puiser dans ces ressources pour appuyer rapidement ce genre d'initiative de réconciliation.
    Quant au Programme d'initiatives locales au Kandahar, alors que je quittais, il était passé à 15 millions de dollars. Le PILK est un fonds de développement social et économique visant à travailler avec des partenaires locaux et, encore une fois, à tirer profit des occasions locales pouvant se présenter, et l'idée est de pouvoir débourser rapidement des fonds. L'appui que nous donnons à l'Université de Kandahar, par exemple, et une partie du travail que nous faisons en matière de création d'emplois et de développement d'entreprises sont assurés grâce au fonds du PILK.
    Ces fonds s'inscrivent-ils dans un cycle budgétaire donné, ou bien s'agit-il d'initiatives ponctuelles? Si vous êtes engagé auprès d'une université, il me semble que cela ne doit pas se résumer à une intervention unique, mais plutôt faire l'objet d'une aide continue.
    Tout dépend du projet. Les ressources sont en place pour x années et, selon le projet, vous pouvez distribuer des fonds sur plusieurs exercices financiers ou alors, s'il s'agit d'un projet unique, les ressources sont versées et l'intervention s'arrête là.
    Le Programme pour la paix et la sécurité au Kandahar a été un projet pilote la première année. Ce programme a depuis été renouvelé pour cette année, car nous avons constaté que cela aide réellement les agents politiques sur le terrain de disposer d'une base de ressources d'accès facile. Nous pourrons augmenter encore ce programme, selon les résultats qu'il affiche au fil du temps.
    Comment cela se comparerait-il à notre engagement d'ensemble en matière d'aide à l'Afghanistan? Ces deux programmes, pris ensemble, doivent sans doute se chiffrer à 15 ou 16 millions de dollars. Comment cela se compare-t-il à l'engagement total en matière d'aide à l'Afghanistan de la part du Canada?

  (1150)  

    Voulez-vous dire sur une base annuelle? Le montant total a été d'environ 132 millions de dollars l'année où j'ai été là-bas. Le volet dont vous parlez n'en représente qu'une fraction, mais l'idée était de « faire petit mais beau ». Nous étions réellement intéressés par des initiatives locales, et il y a donc l'aspect capacité d'absorption également. Il s'agit d'intervenir de manière stratégique. Ces fonds ont pour objet de repérer les possibilités très ponctuelles qui peuvent survenir et auxquelles nous pouvons ajouter de la valeur et qui peuvent venir compléter les programmes plus vastes que nous avons en place. C'est ainsi qu'il se déroule deux choses en parallèle.
    Par exemple, avec les importants fonds pour les projets de premier plan visant les programmes d'études primaires et secondaires, vous pouvez recourir au PILK pour appuyer les programmes universitaires. Il s'agit d'outils complémentaires.
    Nous avons il y a une ou deux semaines vu dans le journal ce qui a pour moi été un rapport plutôt troublant: un agent d'éducation de district ou un représentant local a brossé un tableau plutôt décourageant du développement en matière d'éducation et de construction d'écoles, choses sur lesquelles le Canada s'est beaucoup concentré. Cet agent a dit que la construction d'écoles en région rurale était presque impossible. Il estimait que le plus gros problème était le manque d'enseignants, le fait qu'il n'y ait pas d'enseignants — la capacité de faire tourner les écoles. Par ailleurs, assurer la sécurité était trop difficile à l'extérieur des zones urbaines. Dans ce même article, il était question que le Canada utilise des véhicules aériens sans pilote pour surveiller les projets de construction ou vérifier si les chantiers progressent comme ils le devraient.
    Il me semble, tout d'abord — et je suppose qu'il s'agit d'une question militaire —, que cela est plutôt étrange d'utiliser un drone de 2,5 millions de dollars pour vérifier si les entrepreneurs exécutent comme il se doit leurs contrats. Cela laisse en même temps deviner que l'exécution de telles vérifications n'est pas aussi simple qu'on pourrait le croire.
    Vous ne disposez que de quelques secondes pour répondre. Je sais que cela va être chose difficile, mais je vous invite à essayer.
    La raison pour laquelle nous travaillons toujours avec les collectivités est que celles-ci doivent être copropriétaires des écoles qui se font construire. Cela aide à assurer la sécurité. Nous n'allons pas ériger une école dans un secteur où ni les gens eux-mêmes ni le ministère de l'Éducation n'en veulent. Il s'agit là d'un pilier essentiel dans nos décisions en matière de construction d'écoles.
    Je ne dis pas que les enseignants ne sont pas eux aussi un élément essentiel, et c'est justement ce pour quoi nous ciblons les 3 000 enseignants. Ce n'est pas une simple question de briques et de mortier; les enseignants doivent s'y inscrire, en parallèle, absolument.
    Merci.
    Cela met fin au premier tour. Il ne nous reste que quelques minutes pour le deuxième. Nous allons commencer par le parti au pouvoir, après quoi nous reviendrons à l'opposition officielle.
    Monsieur Hawn.
    Je remercie les deux témoins d'être des nôtres ici.
    Madame Golberg, vous avez mentionné la nécessité de trouver des partenaires qui tolèrent bien le risque. En avez-vous trouvé pendant votre séjour là-bas? Dans l'affirmative, quels étaient-ils?
    Comme je l'ai dit, nous avons travaillé avec environ 13 ONG, aux côtés de toute un panoplie d'agences des Nations Unies. Nous avons bien sûr également travaillé étroitement avec le CICR. Il y avait aussi un certain nombre d'entreprises privées. Development Works est une ONG, mais pas vraiment, si vous comprenez ce que je veux dire. Ce groupe fait également du travail à but lucratif. Et CADG, le Central Asia Development Group, est une société davantage axée sur le secteur privé, avec laquelle nous avons fait beaucoup de travail d'infrastructure, aux côtés du ministère du Développement et de la réhabilitation rurale. Il existe donc un certain nombre de partenaires qui tolèrent bien le risque, mais c'est un défi. Il leur faut prendre en compte le bien-être personnel de leurs employés.
    L'une des choses que nous faisions régulièrement avec tous nos partenaires a été de nous asseoir avec eux et de délimiter sur une carte les secteurs de la province dans lesquels ils se sentaient tout à fait à l'aise d'aller, les secteurs dans lesquels ils ne souhaitaient pas aller à moins d'avoir une garantie de la communauté qu'ils allaient y être en sécurité, puis les secteurs dans lesquels ils n'étaient tout simplement pas prêts à aller. Cela a contribué à infléchir les discussions que nous avions ensuite avec les Forces canadiennes et nos partenaires de la FIAS au sujet des secteurs dans lesquels il leur faudrait se concentrer pour aider à asseoir la confiance et la perception d'une bonne sécurité parmi les partenaires afin qu'ils soient prêts à aller y travailler. Il en était de même avec les ministères responsables afghans. Nous menions avec eux le même genre d'exercice de cartographie sur la base d'impressions anecdotiques de l'état de la sécurité, car leur personnel n'était souvent pas très à l'aise non plus à l'idée de se rendre dans certains secteurs de la province.

  (1155)  

    Avez-vous relevé des progrès pendant vos 11 mois passés là-bas?
    J'ai relevé des progrès dans certains secteurs, et j'ai vu la situation se dégrader dans d'autres. Cela dépend de la période de l'année. Ce n'est bien sûr pas au beau milieu de la saison des combats que vous voulez forcément poursuivre certaines de vos initiatives de plus grande envergure. C'est pendant cette période de l'année que vous devriez vraiment faire du travail de planification et d'organisation.
    Dans la ville de Kandahar, nous avons fait d'importants progrès pendant l'année que j'y ai passée, si vous incluez les banlieues, et même dans les districts de Zhari et de Panjwai, qui sont très difficiles, comme le savent les membres du comité. À Panjwai même et à Bazar-e-Panjwai, nous avons vu cette petite ville s'épanouir. Pendant la durée de mon séjour, la ville est passée d'une situation où presque personne n'y vivait ni n'y travaillait à l'installation d'environ 200 petites boutiques. Alors tout dépendait. Et nous pouvions alors faire venir des partenaires. Mais il importe d'entretenir avec les gens un dialogue constant et une conversation très transparente au sujet des risques pour la sécurité.
    Vous avez parlé de la nécessité de travailler non seulement de manière coordonnée mais également de manière intégrée. En bout de ligne, l'important est que les Afghans travaillent de manière intégrée les uns avec les autres à l'intérieur de leur pays. Pourriez-vous nous dire si vous avez constaté quelque progrès de la part des Afghans quant à leur capacité de se comprendre et de fonctionner de manière intégrée, non seulement avec les alliés mais entre eux, entre leurs différents services?
    Oui. Les gens ont l'impression qu'il n'existe pas de structures qui fonctionnent, mais il y en a. Je pourrais vous citer plusieurs exemples. Nous avions chaque semaine une réunion sur la sécurité que présidait le gouverneur et à laquelle devaient assister les chefs du 205e Corps, de la police provinciale, de la police frontalière, et de la Direction nationale de la sécurité, ainsi que moi et le général Thompson, pour une conversation intégrée au sujet des menaces à la sécurité et des soucis en matière de sécurité.
    Il se tenait toutes les deux semaines une réunion semblable portant sur les questions de développement et réunissant tous les ministères responsables pertinents afghans présents à Kandahar, ainsi que les intervenants des Nations Unies et les ONG.
    Il y a un comité que j'ai vu s'améliorer au fil du temps, le Comité provincial de gestion des catastrophes. Là encore, il s'agit d'un comité réunissant les ministères responsables afghans pertinents, ainsi que des dirigeants de district qui avaient des préoccupations en matière de planification pour imprévus, qu'il s'agisse d'inondations ou de sécheresse ou des suites de situations de conflit pouvant survenir, comme nous en avons vu un exemple l'été dernier dans le district d'Arghandab.
    Il existe donc des structures qui réunissent les Afghans. Il s'agit d'un travail en cours. Les Afghans conviennent en tout cas de la nécessité de collaborer. L'enregistrement des électeurs a été un autre exemple de situation pour laquelle tous les éléments pertinents en matière de sécurité devaient travailler ensemble pour mener à bien l'exercice d'enregistrement des électeurs. Il s'agit d'une chose dont les Afghans conviennent de la nécessité, mais le défi est celui du déficit de capacité. Les différents ministères responsables n'ont pas la profondeur requise. Vous aurez un directeur à la tête, puis peut-être un ou deux fonctionnaires, mais, au fur et à mesure que vous descendez dans la bureaucratie, vous ne trouvez pas forcément la profondeur requise pour que cette intégration puisse fonctionner à tous les niveaux de travail qui la requièrent.
    Cette question s'adresse peut-être davantage à M. Brodeur. C'est une question difficile, concernant les défis post-2011. Quel est, selon vous, le plus gros défi pour ce qui est de la poursuite de nos efforts en matière de reconstruction, de développement et d'établissement de capacité au-delà de 2011?
    Il faudra que la réponse soit très courte. Nos excuses.
    Deux secondes. C'est là que réside le défi. Encore une fois, il est difficile pour moi de prédire à quoi ressemblera le monde en 2011, mais je pense que l'on peut supposer que la sécurité demeurera. Va-t-elle être bien pire ou bien meilleure? Cela est difficile à dire en ce moment, mais cela demeurera , je pense, un facteur très important. Comme l'a dit le premier ministre, nous demeurons engagés sur les plans construction et diplomatie.
    Pour moi, personnellement, l'élément primordial est la durabilité — comment appuyer véritablement les Afghans au-delà de 2011 pour qu'ils maintiennent les gains qu'ils ont réalisés jusqu'ici, pour lesquels ils ont payé un lourd prix, et comment faire pour passer au palier suivant. Je suis plutôt confiant quant à la possibilité pour nous d'y parvenir, mais il s'agit d'un projet à long terme.

  (1200)  

    Bien. Merci.
    La parole est maintenant à M. Rae.
    Merci beaucoup à tous les deux.
    Pour faire simple, j'ai deux questions, et vous pourrez décider entre vous qui va y répondre et comment vous allez vous partager le temps entre vous.
    La dernière page du rapport du gouvernement d'hier — le rapport trimestriel — fait état de la question de la réconciliation politique et du fait que la chose va être difficile. Voici ce qu'on peut lire dans le rapport, et je cite:
... le Canada continue d'appuyer les efforts, spécialement à Kandahar, visant à accroître la confiance et la capacité des collectivités locales en vue de futurs efforts de réconciliation.
    Madame Golberg, du fait de votre travail à Kandahar, vous pourriez peut-être nous expliquer un peu ce qui doit réellement intervenir dans cet effort de réconciliation politique.
    Notre approche d'ensemble en ce qui concerne la réconciliation — et je suis certaine que M. Mulroney et M. Brodeur en ont déjà fait état — est, bien sûr, dirigée par les Afghans, surtout au niveau national.
    Au fur et à mesure que cela filtre jusqu'au niveau provincial, l'important est de cerner des possibilités à saisir. L'une des choses sur lesquelles nous nous sommes concentrés, en premier lieu, a été l'appui à donner au conseil provincial. Le conseil provincial est l'une de ces tribunes qui réunit les différents segments de la société pour discuter régulièrement de questions d'intérêt pour les collectivités. Il s'agit d'une tribune essentielle. Et nous avons passé du temps à renforcer non seulement l'infrastructure du conseil provincial, afin qu'il y ait un lieu approprié où les gens puissent se rencontrer — comme vous le savez, il s'agit là d'un élément important de ces processus —, mais également la gestion du conseil provincial.
    Le deuxième volet auquel nous avons passé du temps à oeuvrer est le processus de jirga dirigé par les gouverneurs. Le gouverneur Raufi et le gouverneur Wesa ont tous les deux exprimé un intérêt quant à l'établissement d'un processus de jirga rassemblant les aînés tribaux. Le gouverneur Raufi en a une vision plus expansive. Il souhaitait réunir non seulement les « habitués » parmi les aînés tribaux, mais également des enseignants et des dirigeants religieux afin d'avoir une conversation élargie. Nous avons surveillé le processus, mais nous l'avons également appuyé. Nous l'avons appuyé personnellement, non seulement en faisant office pour lui de groupe de rétroaction, mais également en lui assurant des ressources en provenance du Fonds pour la paix et la sécurité au Kandahar pour lui faciliter la chose, lui obtenir un lieu de rencontre et de la nourriture afin que ces rencontres puissent avoir lieu. Une grosse partie du travail de réconciliation que nous faisons n'est pas terriblement sexy. Il s'agit en fait de créer l'occasion et les conditions pour que ces conversations aient lieu.
    Puis, il y a d'autres choses que nous faisons. Nous avons assuré un appui quelque peu modeste, il y a de cela un moment, au bureau du programme Peace through Strength, afin que ce bureau puisse fonctionner. Et nous avons contribué à quantité d'autres choses, dont un projet de cartographie que nous finançons auprès du Tribal Liaison Office. Ce projet a pour objet d'aider les Afghans à mieux comprendre les modalités et certains des griefs afin qu'ils puissent au fil du temps avoir des conversations au sujet de ces questions.
    J'ose espérer que ma question suivante n'est pas trop détachée de la réalité. Le président Obama a aujourd'hui parlé des droits de la personne. Il a parlé de l'égalité et de son importance. En tant que père de trois jeunes femmes, j'ai dû, par nécessité, au fil des 30 dernières années, devenir un défenseur des droits des femmes, et j'en suis très fier. La question de savoir dans quelle mesure ces valeurs sont perçues en Afghanistan, à Kandahar, comme étant des valeurs occidentales, par opposition à des valeurs tout simplement humaines que les Afghans embrassent maintenant ou perçoivent en tant que telles est une question fort intéressante.
    Monsieur Brodeur, vous avez parlé de durabilité. Comment pouvons-nous véritablement avancer? Comment avancer en étant confiant que les genres d'institutions que nous créons et que les valeurs que nous tentons d'inscrire dans la société afghane...? Dans quelle mesure ces éléments sont-ils perçus comme étant une greffe venant de nous, par opposition à des éléments viscéraux de la société afghane?
    Je vais faire vite, car je sais qu'Elissa veut intervenir, et c'est elle qui a vécu là-bas, et non pas moi.
    Il est important de comprendre que notre véritable moteur n'est pas la volonté d'imposer des valeurs. Vous pourriez organiser toute une conférence autour de ce que cela signifie et de ce que sont les valeurs occidentales comparativement aux autres. Il s'agit d'un débat fort complexe. Il est d'autant plus complexe du fait de la nature de la société afghane, qui est familiale, tribale, et vous venez y ajouter encore une couche de plus qui ressemble, à bien des égards, à ce que nous avons, à ce que nous vivons en tant que démocratie parlementaire, avec ces infinies variantes.
    Il est clair dans mon esprit, et je pense qu'il en est de même pour mes collègues, que nous ne sommes pas là-bas pour essayer d'imposer des valeurs. Nous sommes là-bas pour essayer d'aider les Afghans à bâtir la société qu'ils veulent pour eux-mêmes. Ils ont une constitution, et si vous ne l'avez pas lue, il vaudrait la peine que vous y consacriez un quart d'heure. Il s'agit d'un très court document. Il traite de bien des façons du genre de société dans laquelle les Afghans veulent vivre. Cette constitution n'est pas en train d'être contestée. Je pense que les Afghans appuient dans l'ensemble la constitution, mais ils sont en même temps très profondément attachés à certains aspects de leur vie traditionnelle: clans, familles, tribus. Cela est très important. Il nous faut en fait garder cela très présent à l'esprit lorsque nous intervenons sur le terrain, s'agissant d'essayer de mettre les gens à l'aise et de les aider à renforcer leur structure décisionnelle.
    Ces différents aspects entrent parfois en collision, non pas avec nous, mais avec l'Afghanistan lui-même. Ce n'est pas facile, mais, compte tenu de la complexité de la situation, les Afghans font un assez bon travail. La situation est difficile pour nous aussi, car dès lors que vous prenez une décision, il vous faut examiner le puzzle depuis différentes perspectives; il existe différentes perspectives, et il vous faut trouver le point de rencontre, le point de convergence de tous les éléments.
    Je ne pense pas que les Afghans nous rejettent. Je ne pense pas qu'ils veuillent que nous leur disions comment mener leurs vies, mais ils souhaitent certainement que nous les aidions à bâtir un espace dans lequel ils pourront mener une vie qui soit conforme à leurs propres valeurs.
    Voulez-vous...?

  (1205)  

    Nous n'avons presque plus de temps.
    Monsieur Obhrai, vous avez dit vouloir faire un rappel au Règlement. Cela a-t-il à voir avec les témoins?
    Oui, et ma question en est une de procédure.
    Nous avons ici le sous-ministre adjoint responsable du Groupe de travail sur l'Afghanistan, et il s'agit donc du meilleur moment pour lui poser des questions. Lorsque le comité a été formé et que nous nous sommes lancés, l'aspect le plus important était la surveillance de la mission en Afghanistan. L'un des aspects les plus importants a été que le comité décide qu'il nous fallait nous rendre en Afghanistan pour mener à bien notre travail. Je sais que Greg, Bob, Mme Lalonde et moi-même ne sommes pas allés en Afghanistan. Vous, vous y êtes allé, mais c'était avec le comité de la défense, et non pas celui des affaires étrangères. J'aimerais donc interroger le greffier et le sous-ministre, relativement à notre voyage en Afghanistan, au sujet de la logistique et de toutes ces autres choses, afin que nous puissions avoir une mise à jour. Je pense qu'il est très important que nous fassions cela.
    Je comprends. Je sais que nos plans de voyage ont été débattus à huis clos pour des raisons de sécurité et ainsi de suite, alors il faudrait que ce soit une discussion très générale.
    Très bien. Parlons-nous-en tout simplement. La chose est très importante.
    Je ne suis pas certain que M. Brodeur soit libre de répondre.
    Si vous aimeriez intervenir, monsieur, je sais que cela n'a rien à voir avec le sujet pour lequel vous vous étiez préparé.
    Très brièvement, monsieur le président, et gardant à l'esprit ce que vous avez dit au sujet du fait que nous ne siégeons pas ici à huis clos, ce que je crois comprendre — et il a été pris bonne note de l'intérêt du comité, et cela va sans dire —, il y a eu certaines discussions avec le Bureau du Conseil privé, qui est en fait le chef de file en la matière. D'après ce que je sais, la requête est à l'étude, alors vous devriez très prochainement recevoir un signal quant à la possibilité de vous déplacer là-bas et le meilleur moment pour un tel voyage.
    Merci de ces renseignements.
    Monsieur le président, j'aimerais dire quelque chose ici. Il est essentiel que le comité tout entier se rende en Afghanistan, que le comité dans son ensemble ait une perspective quant à notre mission en Afghanistan. Nous préparons l'autre rapport au sujet de la mission américaine en Irak, et nous siégerons à cette fin à huis clos.
    Le voyage en Afghanistan, avec la logistique et tout le reste, est quelque chose de très important pour le comité, et je tiens donc à souligner l'importance pour tous les membres du comité, oeuvrant ensemble, de discuter du moment à choisir pour notre déplacement en Afghanistan.

  (1210)  

    Je suis tout à fait d'accord avec vous.
    Monsieur Brodeur, c'est chose très complexe que d'envoyer un comité tout entier en zone de combat. Cela demande beaucoup d'efforts et beaucoup de ressources de la part de tous les intervenants, non seulement les militaires, mais également les civils. Il nous faut veiller à ce que lorsque nous nous rendrons sur place, cela représente une valeur, non seulement pour le Canada, mais pour nos gens là-bas, et à ce que le tout se déroule comme il se doit.
    Je ne sais pas si cela répond à votre question.
    Mon principal souci ici est que le comité agisse en la matière en tant que comité. Je ne sais pas si je devrais soulever cet aspect, mais je crois comprendre que le porte-parole libéral entend se rendre là-bas tout seul, ce qui ne contribue pas à la cohésion qui est à l'oeuvre au sein de ce comité, car interviendra alors la vision d'une personne qui s'inscrit à part. Cela pourrait créer quantité de problèmes. Je pensais que nous faisions tous partie d'un seul et même comité et que nous avions l'écoute du sous-ministre en ce qui concerne la logistique.
    Si mon ami Bob souhaite dire quelque chose en la matière, il est le bienvenu, mais je pense que nous devrions faire partie... Bob a fait partie du comité lorsque nous nous sommes rendus à Washington. Dans le rapport que nous préparons, sa contribution a été très bien menée. J'espère qu'il fera de même dans ce cas-ci.
    J'ose espérer que tous les membres du comité pouvant faire le déplacement, si et quand il a lieu, seront de la partie.
    La question n'est pas celle de savoir si cela va avoir lieu: cela doit avoir lieu.
    Eh bien, je comprends cela, mais, comme cela a été souligné, nous siégeons ici en séance publique, et il nous faut faire preuve de prudence.
    C'est le mandat du comité.
    En effet. Cela est juste, et cela correspond à ce que nous avons dit que nous ferions.
    Quelqu'un d'autre souhaite-t-il intervenir?
    Merci de cette intervention.
    Madame Golberg, je tiens à vous remercier. Cela a été tout à fait remarquable de vous écouter ici ainsi qu'en Afghanistan, lorsque nous vous y avons rendu visite. Il nous arrive manifestement à l'occasion de placer la bonne personne au bon endroit pour faire le bon travail, et je crois réellement que vous vous êtes très bien acquittée de vos devoirs sur ces trois plans. Votre engagement envers le Canada et le peuple afghan est remarquable. Il a été très rafraîchissant pour le comité d'entendre quelqu'un s'exprimer avec la clarté qui est la vôtre, et nous vous en remercions sincèrement.
    Si vous avez quelque remarque à faire en guise de conclusion, je vous y invite.
    Non, monsieur. Merci beaucoup de l'occasion qui m'a été ici donnée de comparaître devant vous. Je peux vous dire que vous avez une équipe de fonctionnaires remarquables, qui sont jour après jour sensibles au fait qu'ils vous représentent, vous ainsi que tous les Canadiens, et ils le font de leur mieux.
    Pourriez-vous simplement faire un commentaire sur l'importance que des Canadiens, qu'il s'agisse du comité de la défense, de ce comité-ci ou de fonctionnaires, se rendent sur place pour interagir avec tant les militaires que les civils?
    J'ai certainement toujours trouvé cela extrêmement utile. Je pense que les membres du comité ont eux aussi jugé que la chose était précieuse. Cela vous donne une meilleure idée du travail quotidien qui est en cours. Je dirais qu'il s'agit d'un défi sur le plan de la logistique, et vous invite à ne pas sous-estimer cet aspect. Il nous faut, afin de veiller à ce que vous puissiez voir les choses qui vous intéressent, être certains de mettre en place les bonnes dispositions.
    Très bien.
    Merci beaucoup.
    Le comité va suspendre ses travaux pendant cinq minutes, pour reprendre ensuite à huis clos.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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