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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 015 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 24 octobre 2006

[Enregistrement électronique]

  (0905)  

[Traduction]

    C'est la quinzième séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous procédons à l'étude du rapport de la Commission d'enquête sur les événements concernant Maher Arar.
    Nous souhaitons la bienvenue à notre témoin, l'honorable Wayne Easter, ancien solliciteur général.
    Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation, monsieur. Nous sommes honorés par votre présence et nous nous réjouissons d'entendre votre témoignage. La procédure habituelle consiste à vous accorder le temps dont vous avez besoin — une dizaine de minutes environ. Nous ne serons pas trop stricts à cet égard. Vous savez, bien entendu, comment cela fonctionne en ce qui concerne les questions; nous donnerons d'abord la parole à l'opposition officielle puis aux représentants du parti gouvernemental.
    Si vous êtes prêt, monsieur, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je pense qu'un exposé préliminaire de dix minutes, peut-être un peu moins, devrait faire l'affaire. J'en ai préparé un.
    Je tiens avant tout à vous remercier, mesdames et messieurs, pour cette occasion que vous me donnez de témoigner.
    Comme je l'ai signalé devant la commission d'enquête, au cours de mon mandat comme solliciteur général du Canada, j'ai participé à plusieurs initiatives que le juge O'Connor a mentionnées dans son rapport, la plus importante étant un code de conduite plus sûr et mutuellement accepté en ce qui concerne l'échange de renseignements avec des gouvernements et organismes étrangers, et surtout américains.
    En ce qui concerne les témoignages devant le comité, la raison spécifique de l'invitation à témoigner que j'ai reçue de votre comité s'inscrit dans le cadre des témoignages présentés par le commissaire de la GRC le 28 septembre. Les commentaires qui suivent porteront directement là-dessus.
    Le commissaire a rendu le témoignage suivant, et je citerai les passages correspondants des Témoignages du comité. Voici la déclaration du commissaire mentionnée à la page 3 des Témoignages:
Je me suis intéressé personnellement au dossier après que M. Arar ait été détenu et envoyé en Syrie.
    Toujours à la même page, il est écrit ceci:
... j'ai découvert que les enquêteurs avaient communiqué avec les autorités américaines pendant que M. Arar était en détention. J'ai appris que, dans le cadre de cette discussion ou de cette correspondance, les agents de la GRC avaient essayé de corriger les renseignements faux ou inexacts concernant M. Arar.
    De toute apparence, d'après le commissaire, la GRC avait tenté de corriger les renseignements avant l'expulsion de M. Arar, c'est-à-dire entre la fin de septembre et le tout début du mois d'octobre.
    D'après ce qui est écrit à la page 4 des Témoignages du comité, le commissaire a fait en outre le commentaire suivant:
À la suite de ce qu'on a appris, on a entamé des discussions pour le mettre au courant de la situation...
    Je dois présumer que le commissaire faisait allusion à la découverte de ce qui avait été décrit comme la communication de faux renseignements aux autorités américaines.
    J'aimerais faire des commentaires sur ce dernier point en ce qui me concerne, à titre de solliciteur général à l'époque. Étant donné que le commissaire, dans le cadre de ses témoignages devant le comité, n'a pas spécifié, pour autant que je sache, la période au cours de laquelle cette information m'a été transmise, je me baserai sur les renseignements que j'ai recueillis après avoir examiné le dossier et après les entretiens que j'ai eus avec des personnes qui avaient assisté à ce type de rencontres.
    Cependant, j'aimerais tout d'abord citer un passage du rapport du juge O'Connor pour situer le contexte de mes commentaires. À la page 31 du rapport intitulé «Analyse et recommandations», le juge O'Connor écrit ceci, à propos du projet A-O Canada:
... bien qu'il ait souligné qu'il ne pouvait indiquer si M. Arar avait des liens avec Al-Qaïda, le Projet n'est pas allé jusqu'à corriger l'information inexacte à son sujet qui avait déjà été fournie aux organismes américains, y compris l'étiquette d'extrémiste islamiste utilisée à son endroit.
    Je signale au comité que pas plus tard qu'hier, j'ai eu l'occasion d'examiner à nouveau la documentation qui avait été mise à ma disposition lorsque j'étais solliciteur général. J'ai examiné les documents d'information pertinents qui avaient été préparés à mon intention, incluant des notes d'information et des fiches parlementaires aide-mémoire.
    Alors que je n'ai pas le droit de révéler le contenu spécifique des documents en question, je signale que ces derniers avaient été mis à la disposition du juge O'Connor et que j'ai présenté devant la commission des témoignages sur leur contenu, le plus souvent dans le cadre d'audiences à huis clos.
    À ce propos, monsieur le président, je pense que le dilemme dans lequel se trouvent les membres de ce comité est un argument en faveur de l'instauration d'un comité parlementaire de surveillance ayant le pouvoir d'avoir accès à des documents sur la sécurité nationale, à des documents du Cabinet et à d'autres documents analogues, à certaines conditions, tel que recommandé au gouvernement par un comité dont j'ai fait partie, et dont ont fait partie également plusieurs d'entre vous.

  (0910)  

    S'il y a un cas dans lequel il est essentiel que les députés aient accès, à certaines conditions, à ce type de documents, c'est bien celui-ci. Nous sommes tous désavantagés lorsque nous avons affaire à des documents que certains d'entre nous ont examinés alors que d'autres n'y ont pas eu accès.
    Cependant, si le comité est capable d'avoir accès à la documentation mentionnée ci-après, la réponse à la question de savoir si, en ma qualité de solliciteur général, j'avais été informé des erreurs — et du fait que de faux renseignements avaient été communiqués aux autorités américaines et qu'un effort concerté avait été fait pour les corriger — serait d'une grande limpidité pour vous. Je n'en avais pas été informé. Je le répète: je n'en avais pas été informé.
    J'ai établi qu'avant d'entrer en fonction, le 22 octobre, deux notes d'information avaient été préparées pour le commissaire de la GRC. Le juge O'Connor a mentionné celle du 9 octobre 2002 à la page 177 du volume I du document d'information contextuel et factuel. Le juge O'Connor n'y fait pas mention d'erreurs ni de mesures correctives.
    Dans la note d'information du 18 octobre 2002, dont le juge O'Connor a également fait mention à la page 498 du volume II du document d'information contextuel et factuel, il n'est pas mentionné non plus que le commissaire avait été informé des erreurs commises ni des mesures correctives prises.
    Par conséquent, lorsque je suis entré en fonction, les dossiers, dans la mesure où j'ai examiné les notes d'information préparées pour le commissaire, ne contiennent absolument aucune mention du fait que l'information communiquée aux autorités américaines était inexacte.
    Après mon entrée en fonction à titre de solliciteur général, la première occasion à laquelle j'ai appris l'existence du dossier Arar est lorsqu'il m'a été présenté dans une fiche aide-mémoire parlementaire. Cette fiche aide-mémoire est préparée pour les ministres par les fonctionnaires du ministère ou organisme concerné en prévision des questions susceptibles d'être posées à la Chambre. C'est la GRC qui avait préparé cette fiche aide-mémoire. Elle est datée du 25 octobre 2002. J'ai reçu en outre une fiche aide-mémoire datée du 15 novembre 2002. Il n'y était fait aucune mention d'erreurs dans les renseignements communiqués ni de faux renseignements, ni d'efforts correctifs déployés par la GRC concernant l'un ou l'autre des renseignements communiqués.
    Le 26 juin 2003, mon bureau a demandé à la GRC une note d'information sur le dossier Arar. Dans la note d'information préparée par la GRC pour le solliciteur général, datée du 27 juin 2003, il n'est pas mentionné que la GRC était consciente d'avoir fourni des renseignements erronés ou inexacts aux autorités américaines ni qu'elle avait voulu prendre des mesures correctives concernant toute information communiquée à ces autorités.
    Dans une note d'information préparée pour mon bureau, datée du 10 juillet 2003, en préparation d'une rencontre que j'ai eue avec le procureur général américain, John Ashcroft, il n'est pas fait mention non plus de renseignements inexacts ni de mesures correctives que la GRC aurait prises en ce qui concerne des renseignements communiqués aux autorités américaines.
    On pourrait présumer que le solliciteur général en aurait été informé si des cadres de la GRC avaient appris que des renseignements erronés avaient été communiqués aux autorités américaines ou alors que celles-ci, en répondant au procureur général, l'auraient mis au courant des erreurs qui auraient eu pour conséquence la détention et l'expulsion de M. Arar. Si c'eût été le cas, le procureur général Ashcroft aurait certainement abordé la question avec moi, étant donné qu'un des objets de ma rencontre avec lui était de manifester mon mécontentement au sujet des agissements des autorités américaines à l'égard de M. Arar.
    Par conséquent, je pense bien et je suis même convaincu, qu'étant donné le type de contact que j'avais avec le procureur général Ashcroft, quand je suis allé aux États-Unis dans le but essentiel de manifester mon mécontentement au sujet de la façon dont M. Arar avait été traité et de son expulsion en Syrie, il aurait répliqué en termes très clairs que nous lui avions fourni de l'information erronée, mais il ne l'a jamais fait, monsieur le président.

  (0915)  

    Les dispositions que j'ai prises à titre de solliciteur général en ce qui concerne le cas de M. Arar étaient fondées sur les avis que m'avaient donnés des cadres de la GRC et du SCRS. Si des erreurs avaient été commises et si des mesures correctives étaient nécessaires ou avaient été prises, un ministre peut s'attendre à en être informé.
    Monsieur le président, je pense que tous les membres de ce comité admettent, comme je l'admets moi-même, que des problèmes de diffusion de l'information se posent en ce qui concerne le solliciteur général et la GRC, car nos procédures ne sont pas les mêmes que les procédures américaines. Les solliciteurs généraux ne sont pas informés des opérations de la GRC. C'est la nature du travail. Cependant, en ce qui concerne les questions de sécurité relevant du SCRS, on est en fait informé. Par conséquent, le solliciteur général n'intervient pas dans les affaires opérationnelles comme telles.
    En ma qualité de solliciteur général, je me basais sur le fait que M. Arar était et demeurait une personne d'intérêt. Je suis entièrement d'accord avec le commentaire suivant qui se trouve à la page 75 du rapport du juge O'Connor:
Je n'ai aucune raison de croire qu'il était déplacé, pendant la période visée, que la GRC, un organisme d'application de la loi, poursuive son enquête où M. Arar a de temps à autre attiré l'attention des enquêteurs.
    À la page 19, le juge O'Connor mentionne que l'on «a eu raison de considérer M. Arar comme une personne d'intérêt», dans deux autres contextes.
    Je ferai un dernier commentaire, concernant l'information que possédaient les autorités américaines sur M. Arar. À la page 168 du rapport du juge O'Connor, il est mentionné ceci:
Il s'agit de savoir si les autorités américaines se sont fiées à l'information fournie par la GRC lorsqu'elles ont rendu l'ordonnance de renvoi. Sans le témoignage des autorités américaines et la possibilité d'examiner l'annexe classifiée de l'ordonnance de renvoi, je ne puis savoir exactement quelle information elles ont utilisée.
    À la page 14 des Témoignages du 28 septembre 2006, il est mentionné que le commissaire de la GRC, témoignant devant le comité, a déclaré ceci:
on ne peut pas être sûr à 100 p. 100 des raisons pour lesquelles les Américains ont pris la décision d'envoyer M. Arar en Syrie. Le fait de dire qu'ils ont agi seulement sur la foi d'informations canadiennes n'est pas exact, selon le rapport de M. O'Connor.
    En conclusion, monsieur le président, en ce qui concerne le rapport du juge O'Connor et ses recommandations, je suis convaincu qu'il s'agit d'un excellent rapport. Je conseille aux gens de lire non seulement les passages du rapport qui ont été largement médiatisés par les journalistes en quête de sensationnalisme, mais aussi de le lire intégralement. Ce rapport est une mine de renseignements.
    Comme je l'ai signalé publiquement, j'approuve les recommandations du juge O'Connor. Nous verrons ce qu'il recommandera dans son deuxième rapport mais, d'après mon expérience, je suis convaincu que la création d'un organisme de surveillance différent pour la GRC est essentielle.
    La Commission McDonald avait recommandé que la GRC ne se charge plus des questions de sécurité nationale. À la suite des événements du 11 septembre, elle s'est remise à s'occuper de ces questions. Par conséquent, j'estime qu'un organisme de surveillance distinct est essentiel. En fait, nous avons étudié la question au cours de mon mandat à titre de solliciteur général, mais le travail n'a jamais été terminé. Je suis toutefois certain qu'il est essentiel de mettre en place une procédure de surveillance d'un type différent, se rapprochant quelque peu de la surveillance assurée par le SCRS, mais peut-être plutôt entre les deux. C'est sur cette note que je termine mon exposé.
    Je vous remercie pour votre attention et c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur. Votre exposé était très étoffé. Je suis certain qu'on vous posera beaucoup de questions.
    Voyant quelle heure il est, j'aimerais demander au comité la permission d'accorder des tours de questions de cinq minutes, afin de donner à tous une chance d'intervenir. Quelqu'un s'opposerait-il à ce que l'on opte pour des tours de cinq minutes? Sinon, de nombreux membres n'auront...

  (0920)  

    Vous voulez un tour de sept minutes.
    Pour le premier tour, oui.
    Je suis étonné de ne pas avoir obtenu la permission mais, dans ce cas, nous irons de l'avant.
    Monsieur Holland.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Easter, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation.
    Je me demande si nous ne pourrions pas commencer par mai 2003, période à laquelle il y a eu des discussions concernant la préparation d'une lettre commune qui aurait indiqué que le gouvernement du Canada n'avait pas de raison de soupçonner M. Arar d'avoir été mêlé à des activités terroristes. Je voudrais confirmer que le sous-commissaire de la GRC vous avait déconseillé de signer cette lettre. Aviez-vous reçu des conseils et des avis analogues du SCRS?
    En vous déconseillant de signer la lettre, la GRC vous a-t-elle donné à penser ou vous a-t-elle informé que l'on avait encore des raisons de présumer que M. Arar était un terroriste ou qu'il existait de l'information donnant à croire qu'il l'était?
    Les deux organismes en question m'ont conseillé de ne pas signer la lettre. C'était aussi ce que je pensais personnellement, car, comme on l'a mentionné — et le juge O'Connor est en fait d'accord sur ce point —, dans les conditions dans lesquelles nous nous trouvions, M. Arar était considéré comme une personne d'intérêt pendant toute cette période.
    En outre, j'estime personnellement qu'on prête une importance exagérée à cette lettre et à l'idée que le solliciteur général la signe. En ce qui concerne les agissements du Canada, notre visage à l'étranger est représenté par le ministre des Affaires étrangères et par le premier ministre. En fin de compte, j'estime que l'approche qui a été adoptée était l'approche la plus appropriée. Le premier ministre a signé une lettre et cette lettre a été envoyée à l'étranger.
    Vous estimez toutefois qu'à cette période-là, la GRC vous communiquait toujours, à titre de solliciteur général, des renseignements indiquant ou vous portant à croire qu'il existait toujours une possibilité de considérer M. Arar comme un terroriste. Est-ce que c'était toujours votre position? En d'autres termes, le juge O'Connor a exprimé certaines préoccupations en ce qui concerne l'information qui était communiquée lorsque vous avez eu cette lettre en main. La GRC avait-elle toujours les mêmes préoccupations et donnait-elle toujours les mêmes directives, à savoir que M. Arar était une personne d'intérêt et qu'il était un terroriste potentiel?
    Comme je l'ai mentionné — et cela a été également confirmé par M. O'Connor —, l'information qui m'a été communiquée ne concernait pas vraiment l'aspect que vous mentionnez — à savoir que M. Arar était un terroriste — mais plutôt le fait qu'il était une personne d'intérêt. C'est essentiellement la teneur de l'information qui m'a été communiquée, à savoir qu'il était une personne d'intérêt. C'est ce qui était également indiqué dans les notes d'information relatives à cette affaire.
    Ce n'est pas que je veuille insister lourdement sur la question, mais je voudrais seulement qu'il soit clair qu'on ne donnait pas alors l'impression que M. Arar avait des liens terroristes à cette période-là.
    On ne m'a jamais donné cette impression. Si vous examinez les passages du rapport O'Connor concernant l'information qui a été échangée avec les États-Unis, cet échange avec les autorités américaines pourrait vous laisser cette impression. Je signale toutefois que, dans son rapport, le juge O'Connor précise — et je le vois ici, monsieur le président — qu'il n'y avait aucune intention malveillante derrière tout cela.
    M. Zaccardelli a témoigné au mois de septembre devant notre comité et j'aimerais mentionner deux ou trois de ses commentaires. Le premier a été fait en réponse à une question dans laquelle on lui demandait si la GRC avait jamais reconnu avoir commis une erreur. Au cours de son témoignage, M. Zaccardelli a mentionné que la GRC avait rectifié l'information inexacte qui avait été fournie aux autorités américaines dès qu'elle a appris que cette information était inexacte. Il a ensuite dit ceci: «À la suite de ce qu'on a appris, on a entamé des discussions pour le mettre au courant de la situation». Pouvez-vous indiquer si M. Zaccardelli vous a effectivement informé de la situation, comme il l'a mentionné lorsqu'il a témoigné devant le comité?

  (0925)  

    J'ai lu attentivement le témoignage du commissaire Zaccardelli et c'est pourquoi j'ai insisté sur ce fait dans mes observations préliminaires, monsieur le président. Non, je n'ai pas été informé, par note d'information, par une fiche aide-mémoire parlementaire ou de quelque autre façon, du fait que la GRC avait fourni des renseignements erronés.
    Je pense que c'est une question que vous devriez poser à nouveau au commissaire. Je me demande si on ne donne pas un sens qu'elles n'ont pas aux déclarations que le commissaire a faites devant le comité. En tout cas, je signale clairement que j'ai parcouru tous les documents, que j'en ai discuté avec les personnes qui faisaient partie de mon personnel et que la GRC ne m'a jamais signalé explicitement qu'elle avait commis une erreur et avait fourni de l'information erronée. C'est une information que je n'ai jamais reçue.
    C'est certainement une question que notre comité voudra examiner à nouveau plus tard.
    Je voudrais toutefois continuer en posant maintenant des questions...
    Ce sera votre dernière question...
    C'est bien. J'en suis conscient.
    On se pose des questions en ce qui concerne les fuites de 2003. En juillet 2003 et par la suite, de nombreuses fuites ont eu lieu dans les médias laissant entendre que M. Arar avait des liens avec des terroristes. Certaines de ces rumeurs se propageaient encore lorsque M. Arar était en Syrie et plusieurs même en octobre 2003, après son retour au Canada.
    Avez-vous des informations indiquant de quel organisme ou ministère ont pu venir ces fuites, ou quelles personnes en sont responsables?
    Vous avez le temps pour une brève réponse.
    Non. La réponse simple est non, monsieur le président. Dès que ces fuites ont eu lieu, j'ai demandé personnellement qu'une enquête soit menée dans les services et ministères que j'avais sous ma responsabilité. Cette enquête a été faite et vous en connaissez les résultats, à savoir que rien n'a été découvert.
    Merci, monsieur.
    Je donne maintenant la parole au représentant du Bloc québécois, M. Ménard.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Si je vous comprends bien, c'est à partir d'une expression que vous avez utilisée souvent, c'est-à-dire l'expression « personne d'intérêt ».
     À votre connaissance, est-ce qu'à un moment donné M. Zaccardelli vous a dit qu'il était lui-même convaincu que M. Arar était innocent de toute relation avec des mouvements terroristes?

[Traduction]

    Je ne comprends pas très bien votre question, monsieur Ménard. À ma connaissance, dans les informations que j'ai reçues, probablement jusqu'en novembre 2003, période à laquelle les breffages sont devenus plus étoffés et où le contexte a été communiqué, pendant toute cette période, M. Arar était considéré comme une personne d'intérêt, un point c'est tout.

[Français]

    C'est l'expression que vous utilisez toujours, soit une « personne d'intérêt ».
     Dans votre esprit, une personne d'intérêt est-elle une personne qui est reliée aux mouvements terroristes ou simplement une personne dont on ne sait pas si elle y est reliée ou non, mais qu'on a vu avoir des contacts qui peuvent avoir été innocents, mais qui peuvent aussi avoir indiqué qu'elle était véritablement reliée aux mouvements terroristes?

[Traduction]

    Comme je l'ai mentionné, jusqu'au breffage très étoffé que j'ai eu en novembre 2003, on ne m'avait jamais rien signalé d'autre que le fait que M. Arar était une personne d'intérêt, un point c'est tout. C'était seulement une personne d'intérêt, qui jouait un rôle secondaire dans une autre enquête, si je puis dire.

  (0930)  

[Français]

    C'est ce que je veux savoir, parce qu'une personne d'intérêt peut être une personne qu'on a vue avoir des contacts avec des mouvements terroristes, sans savoir si ces contacts étaient à des fins terroristes ou bien si ces contacts étaient innocents comme, par exemple, quelqu'un qui va louer un local chez un propriétaire. Le propriétaire, évidemment, a eu des contacts avec cette personne, mais il peut très bien ne pas savoir du tout que cette personne est un terroriste. Est-ce ce que vous pensiez de M. Arar ou si vous pensiez qu'il pouvait effectivement être mêlé à des activités terroristes?

[Traduction]

    Une des difficultés, monsieur le président, c'est que... J'ai été déçu de la réaction du greffier du Conseil privé. Je lui ai demandé des conseils ou de l'aide au sujet de ce qui est considéré comme une question de sécurité nationale, comme une question opérationnelle et comme un secret. J'ai quelque difficulté à comprendre ce qui s'est passé, même après avoir examiné quelques documents hier, dont certains ont été déclassifiés et d'autres pas.
    En tout cas, voici comment j'expliquerais la situation, monsieur Ménard: le fait est — les Américains en étaient informés et je l'ai reconnu — que nous n'avions aucune preuve au sujet de M. Arar qui eût justifié son arrestation au Canada, s'il avait été ici. Comme je l'ai mentionné, il était considéré comme une personne d'intérêt — et c'est d'ailleurs indiqué dans le rapport du juge O'Connor —, l'intérêt étant dû à ses liens avec certaines personnes impliquées dans des activités terroristes.

[Français]

    En fait, vous ne saviez pas que M. Zaccardelli était convaincu que M. Arar était complètement innocent de toute relation avec des activités terroristes?

[Traduction]

    Non. Comme je l'ai indiqué dans mes observations préliminaires, je n'avais pas été informé du fait que la GRC avait fourni des renseignements inexacts aux autorités américaines. Je l'ai signalé abondamment, et je recommande au comité d'examiner lui-même certains des documents que j'ai évoqués, s'il peut y avoir accès. Je pense que nous en arriverons à la même conclusion. Surtout lorsque je suis allé rencontrer le procureur général Ashcroft, nous étions très déçus, très fâchés et très mécontents à l'égard des autorités américaines et de la façon dont elles avaient traité M. Arar. Ce dernier aurait dû être renvoyé au Canada.
    Le procureur général Ashcroft ne m'a en tout cas jamais dit qu'il avait été informé de ce que le Canada avait fourni des renseignements erronés aux autorités américaines. Il ne m'a jamais parlé de cela. Je connais l'homme et je sais qu'il m'en aurait parlé à coup sûr si...

[Français]

    Je vais être obligé de vous poser une question suggestive ou hypothétique.
    L'auriez-vous su que M. Zaccardelli croyait que M. Arar était innocent? Est-ce que votre attitude au sein du gouvernement aurait été différente avec vos collègues ministres dans les démarches que vous auriez alors faites pour le faire libérer de Syrie?

  (0935)  

[Traduction]

    Je ne pense pas que ce soit le moment de poser des questions hypothétiques, monsieur Ménard. En fait, la personne qui a fait le meilleur rapport et qui possède plus d'informations que quiconque en provenance de toutes sortes de sources sur cette affaire est le juge O'Connor. Le juge O'Connor maintient, tout au long de son document, l'approche fondée sur la «personne d'intérêt». Il expose certaines erreurs, mais j'estime qu'il serait déplacé de ma part de me lancer dans des considérations hypothétiques... Le fait est qu'on ne m'avait pas informé.
    Monsieur Comartin, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Easter, je vous remercie d'avoir accepté de témoigner.
    Au sujet de cette dernière question, j'ai l'impression que le juge O'Connor a vivement reproché à la GRC et au SCRS de ne pas avoir contribué à l'expédition de cette lettre du MAECI. C'est un commentaire que je fais en passant.
    J'aimerais que vous passiez maintenant à la page 30 du rapport, le volume intitulé «Analyse et recommandations». Vous avez déjà fait référence à la page 31. L'avant-dernier paragraphe commence par: «Le 3 octobre 2002...» et contient des renseignements généraux. Compte tenu des contraintes qui vous sont imposées en matière de sécurité nationale, êtes-vous en mesure de nous dire si vous êtes la personne qui a demandé l'information mentionnée dans ce paragraphe?
    Non, je ne suis pas la personne qui a demandé ces renseignements, mais en ce qui concerne votre premier commentaire, monsieur Comartin, le juge O'Connor a effectivement reproché à la GRC et au SCRS de ne pas avoir recommandé la lettre. Il indique également, dans ce rapport, qu'il comprend essentiellement pourquoi. Je me renseignerai à ce sujet.
    Je suis d'accord. Ne vous tracassez pas, je suis d'accord avec votre opinion, mais il reste qu'il fait des reproches. Il comprend les contraintes auxquelles vous étiez soumis. À en juger d'après votre témoignage, au cours de cette période, vous étiez toujours le ministre qui avait l'impression que M. Arar — et je me réfère au passage de la page 31 du rapport que vous avez cité — était toujours considéré par la GRC comme un extrémiste islamique. Jusqu'à cette lettre, on ne vous avait jamais mentionné que cette évaluation de la GRC avait changé. Est-ce exact?
    Pour la GRC, à l'époque où cette lettre a été préparée, vous aviez la conviction — ce n'était pas nécessairement celle de la GRC, car nous savons maintenant qu'elle avait changé alors d'opinion, sans toutefois vous l'avoir fait savoir — que M. Arar était un fondamentaliste ou un extrémiste islamique, pour employer les termes de la GRC.
    Non, car l'information qui m'a été donnée — et pour en être absolument certain, il faudrait que je consulte à nouveau les documents — était qu'il s'agissait d'une personne d'intérêt, sans plus. Elle n'était pas qu'il s'agissait d'un terroriste islamique.
    Donc, pendant toute la période au cours de laquelle vous étiez ministre et responsable de la GRC, vous n'avez jamais vu de document indiquant que M. Arar était considéré comme un extrémiste islamique?
    Pas jusqu'en novembre 2003, comme je l'ai déjà signalé.
    Par conséquent, après...
    C'est là qu'est la difficulté, monsieur le président: nous n'avons pas les documents. Ç'aurait pu être en juillet, mais je ne le pense pas. Je pense que c'est en novembre qu'a été portée pour la première fois à mon attention l'expression «extrémiste islamique» employée par la GRC.

  (0940)  

    Quand avez-vous appris pour la première fois que cette information était inexacte? Est-ce à la parution du rapport O'Connor ou pendant les audiences de la commission? Quand avez-vous appris que ce jugement porté sur M. Arar était faux, en fait?
    Pendant l'enquête O'Connor...
    En examinant la documentation ou à cause des témoignages...
    C'était à la suite des témoignages présentés.
    J'aimerais exclure d'autres possibilités. En ce qui concerne la chaîne de commandement, en matière de communications, serait-il possible que la GRC, ou que le commissaire ou des cadres supérieurs de la GRC aient communiqué à des sous-ministres du Bureau du solliciteur général de l'information au sujet de cette affaire qui ne soit pas parvenue jusqu'à vous?
    Je pense que c'est probablement... C'est possible.
    Avez-vous discuté avec vos sous-ministres pour savoir si on leur avait communiqué des renseignements indiquant que cette information sur M. Arar était fausse ou trompeuse?
    Non, pas récemment.
    Combien de sous-ministres y avait-il pendant la période de l'affaire Arar?
    Je n'en avais qu'un.
    Qui était-ce?
    Nicole Jauvin.
    Monsieur Easter, en ce qui concerne les communications, vous avez mentionné de la documentation, des aide-mémoire parlementaires et autres communiqués de la GRC. Avez-vous eu des communications verbales indiquant que l'information qu'avait initialement la GRC au sujet de M. Arar était fausse ou trompeuse?
    Non, et je l'ai signalé dans mes observations préliminaires. J'ai vérifié également auprès d'autres personnes qui auraient pu être avec moi au cours de ces communications verbales.
    D'après vos souvenirs, quel degré de gravité attribueriez-vous à l'affaire Arar en ce qui concernait votre ministère et en ce qui vous concernait personnellement, en qualité de ministre?
    Au début, c'est-à-dire en novembre-décembre 2001 et en janvier 2002, c'était une affaire parmi tant d'autres qui a acquis un degré de gravité croissant au fil des mois.
    Merci beaucoup. Le délai dont vous disposiez est malheureusement écoulé. Merci, monsieur Comartin.
    Je donne maintenant la parole au côté gouvernemental. Monsieur MacKenzie, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Easter.
    Mes idées sont embrouillées. Je pense qu'un des journaux a publié aujourd'hui un article indiquant que vous avez entendu parler d'informations erronées il y a un mois à peine. Si j'ai bien compris votre réponse à M. Comartin, vous étiez en fait au courant lorsque la commission O'Connor...
    Ma réponse à M. O'Connor a été faite lorsque le rapport a été déposé.
    Bien. Je suis désolé. Je pensais que c'était pendant les audiences. C'est bien.
    Vous étiez solliciteur général et pas seulement député. Lorsque vous avez pris conscience de la gravité de l'affaire — et je pense que nous reconnaissons qu'initialement, cette affaire n'avait probablement pas une importance cruciale, car c'était une affaire parmi tant d'autres, ce qu'a d'ailleurs essentiellement confirmé le commissaire —, lorsque cette affaire a pris de l'importance, avez-vous demandé au commissaire ou à un des fonctionnaires de votre ministère si on était certain de l'exactitude de l'information utilisée? Lorsque vous êtes allé discuter avec les autorités américaines, vous estimiez certainement nécessaire d'avoir cette information.
    Oui, monsieur MacKenzie, absolument. En particulier au printemps 2003, avant d'aller rencontrer le procureur général Ashcroft, nous avons demandé un breffage complet. Nous avons posé des questions très directes sur M. Arar, car c'était devenu une affaire publique. Nous étions préoccupés au sujet de sa détention et de son expulsion. Nous avons effectivement posé beaucoup de questions.

  (0945)  

    Et ces questions ont probablement été posées au commissaire?
    Il est possible qu'elles aient été posées au commissaire, mais elles ont pu être posées en fait au sous-commissaire Loeppky et au commissaire Zaccardelli, ainsi qu'à d'autres personnes qui étaient présentes avec le commissaire et le sous-commissaire.
    Il ne fait par conséquent aucun doute que, vers le milieu de 2003, des questions très directes ont été posées au sujet de l'authenticité de l'information qui avait été communiquée aux autorités américaines. À ce moment-là, il n'avait jamais été question d'erreur.
    Non, et c'est...
    Je trouve cela absolument étonnant. Si des erreurs avaient été reconnues dans un document ou au cours d'une conversation, elles seraient mentionnées dans le rapport du juge O'Connor. Pourtant, on n'y mentionne pas d'erreurs, si ce n'est que l'on indique que les ministres n'avaient peut-être pas obtenu toutes les informations.
    Étant donné toute la documentation en provenance de nombreuses sources — cela représente des milliers de pages — que le juge O'Connor avait à sa disposition, j'aurais tendance à penser qu'il en aurait été question dans son rapport si des erreurs avaient été reconnues.
    Je ne mets pas cela en doute. Je veux seulement m'assurer que l'on a posé des questions et que les hauts fonctionnaires l'ont alors nié ou reconnu.
    Comme je l'ai mentionné également dans mes observations préliminaires, la difficulté en l'occurrence réside dans les relations entre la GRC et le solliciteur général en ce qui concerne les opérations. Oui, des questions très directes ont été posées, mais je pense que la réponse indiquait à peu près que les faits étaient tels que décrits dans les notes d'information et les fiches aide-mémoire que j'avais reçues.
    Et le même scénario est que, pendant tout ce temps-là, il était question de la lettre commune. De toute évidence, il ne s'agissait pas alors d'une situation courante. Les relations entre le solliciteur général et la GRC ont-elles changé de quelque façon que ce soit et est-ce que cette dernière est davantage disposée, en quelque sorte, à mettre le solliciteur général au courant de ses opérations?
    Cette question déborde du simple cadre de l'application de la loi. Elle a franchi des frontières internationales et, pour bien des personnes, ce fut une affaire majeure, mais n'a-t-on toujours aucune indication que des erreurs ont été commises dans l'information communiquée aux autorités américaines?
    Non, pas en ce qui concerne d'éventuelles erreurs. Comme je l'ai déjà signalé en répondant aux questions précédentes, nous avons eu, à mesure que le temps passait, des breffages plus étoffés sur le contexte et les paramètres de l'affaire Arar ainsi que sur les raisons pour lesquelles il était considéré comme une personne d'intérêt. Je ne pense pas que cela ait été avant le mois de novembre 2003.
    Lorsque vous avez été mis au courant de l'échange d'informations entre les autorités canadiennes et les autorités américaines, à titre de solliciteur général, quelqu'un, vous-même ou un de vos fonctionnaires, a-t-il confirmé que les mesures d'avertissement qui sont censées être en place avaient été prises?
    Je pense que l'on a dit que oui. Une des exigences est qu'il y ait une circulation de l'information entre les divers organismes d'application de la loi, entre les deux pays et avec le service de sécurité. Cet échange d'informations est important.
    Je pense qu'en ce qui concerne la communication de l'information dans ce cas-là, le problème qui se posait — et cela se rapporte à ce que j'ai dit précédemment au sujet du fait que la GRC se chargeait à nouveau dans une large mesure des questions de sécurité nationale — c'est qu'il s'agissait de deux personnes différentes. Les agents de police ont tendance à recueillir l'information, à la réunir, à porter des accusations et à laisser les tribunaux s'en charger. Ce n'est pas ainsi que cela se passe en matière de sécurité et il faut par conséquent être absolument certain que l'information est exacte et faire des vérifications et des contre-vérifications. Je pense que c'est ce qu'a recommandé M. O'Connor, et je suis entièrement d'accord là-dessus.

  (0950)  

    Merci, monsieur.
    Nous passons au tour de questions suivant.
    Je donne la parole, pour le Parti libéral, à M. Alghabra.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur Easter. Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation.
    Je voudrais revenir à la question des fuites. En juillet 2003, comme vous l'avez mentionné et comme le sait le comité, il y a eu plusieurs fuites indiquant que M. Arar était allé en Afghanistan et qu'il y avait mené des activités liées à des activités terroristes. À titre de solliciteur général, avez-vous jamais été mis au courant de ces allégations et avez-vous su si, en fait, il s'agissait d'opinions de la GRC ou si, au contraire, nous ne savions pas d'où provenaient ces fuites et si elles contenaient des informations inexactes?
    Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, monsieur Alghabra, en ma qualité de solliciteur général, j'ai demandé, au moment où ces fuites sont survenues, si les informations étaient exactes ou inexactes. J'ai demandé que l'on mène une enquête dans tous nos services, y compris au SCRS et à la GRC.
    Je pense que l'on a fait également d'autres enquêtes pour déterminer si les fuites auraient pu provenir du ministère des Affaires étrangères ou du Conseil privé. Une enquête a donc bel et bien eu lieu; il est d'ailleurs un fait connu qu'elle n'a abouti nulle part et qu'elle n'a donné aucun résultat.
    Je me permets toutefois de signaler que les fuites ont bel et bien eu lieu et, par conséquent, j'aimerais savoir si vous aviez été mis au courant. On aurait pu vous dire deux choses, à savoir s'il s'agissait d'informations auxquelles la GRC prêtait foi ou si, lorsque les responsables de la GRC se sont rendu compte que ces fuites étaient fausses, ils vous ont signalé que c'était inexact et qu'ils ne prêtaient en fait aucune foi à ces allégations.
    Nous nous en sommes tenus à tenter de déterminer s'il y avait eu ou non des fuites. Toutes sortes d'informations circulent. Certaines de ces informations sont exactes alors que d'autres sont probablement inexactes. Ce qui était toutefois d'une importance cruciale pour nous, c'était de savoir si, le cas échéant, il y avait certaines fuites en provenance de services relevant de nous ou d'autres services gouvernementaux. Ce qui était d'une importance cruciale pour nous, c'était de déterminer si quelqu'un, quelque part, utilisait de l'information, exacte ou non, dans le but de miner la crédibilité de M. Arar. C'était ce qui nous intéressait.
    L'attitude alors, c'est-à-dire en 2003 — avant, pendant et après toute cette affaire —, provoquée par les fuites; je me souviens d'ailleurs de certains membres de l'opposition, qui était alors l'Alliance... Vous souvenez-vous du type de questions que posaient alors les membres de l'opposition au gouvernement, du type de pressions qu'ils exerçaient sur le gouvernement et de l'impact que cela avait sur le gouvernement et sur votre bureau?
    Bien sûr. En ce qui concerne les questions portant sur le dossier, disons qu'elles couvraient absolument tous les sujets. Il y avait notamment les questions posées par M. Day et d'autres personnes, à l'époque où le gouvernement n'était pas assez ferme à l'égard des terroristes. Quant à savoir si ces questions concernaient les personnes sur lesquelles portait alors l'attention dans les actualités, il faudrait que j'aille vérifier. Il est toutefois certain que M. Day a posé des questions très directes, laissant entendre que nos efforts de lutte contre le terrorisme étaient insuffisants. L'autre côté, en particulier le NPD, a également posé des questions, indiquant que nous ne faisions pas assez pour protéger les libertés civiles. Par conséquent, ces questions portaient sur toute une gamme de sujets.

  (0955)  

    Merci.
    Ce tour-ci sera plus court et, cette fois-ci, nous devrons donner la parole à M. Ménard, du Bloc.
    Merci.

[Français]

    Il faudrait qu'on s'entende au départ sur les termes, monsieur Easter. Une personne d'intérêt et un terroriste extrémiste ou un terroriste islamique, pour vous, ce sont deux choses différentes, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Si j'ai bien compris la réponse...

[Traduction]

    Monsieur Ménard, je pense que «personne d'intérêt» peut vouloir dire tout ce qu'on veut, qu'il peut s'agir d'une personne totalement innocente ou d'un terroriste. Cela peut donner lieu à toutes sortes d'interprétations. Cela veut dire qu'on a de l'information qui pousse un organisme d'application de la loi à s'intéresser à cette personne, en raison de ses relations ou d'autres activités, qui pourraient mener à une piste. Cela peut être bon ou cela peut être mauvais.

[Français]

    Maintenant, si j'ai bien compris votre réponse à M. Comartin, jusqu'en novembre 2003 ou juillet 2003 — vous ne semblez pas certain de la date exacte — pour vous, M. Arar avait toujours été décrit comme une personne d'intérêt mais non pas comme un terroriste extrémiste ou un terroriste islamique. C'est exact?

[Traduction]

    C'est exact.

[Français]

    Quand il a été décrit comme un terroriste extrémiste ou un terroriste islamique, soit en novembre 2003 ou en juillet 2003, est-ce bien par la GRC qu'il a été décrit de la sorte?

[Traduction]

    Oui, je le pense.

[Français]

    D'accord. Alors, en avez-vous discuter...

[Traduction]

    J'aimerais revenir quelque peu en arrière à ce sujet, monsieur Ménard. Cela devait être tout à la fin de mon mandat de solliciteur général et ce devait être du moins ce qu'on pensait à un certain moment.

[Français]

    Est-ce que je me trompe en pensant, monsieur Easter, que le fait qu'un terroriste extrémiste ou un terroriste islamique ait été envoyé en Syrie par les autorités américaines est beaucoup moins surprenant pour vous que si c'était simplement une personne d'intérêt, sans être un terroriste extrémiste?

[Traduction]

    Le fait est — et j'ai répondu plusieurs fois à cette question, que le juge O'Connor a examinée également — qu'aucun responsable, que ce soit de la GRC ou du SCRS, n'a joué un rôle dans la décision des autorités américaines d'expulser M. Arar. Le juge O'Connor indique que l'information fournie par le Canada était probablement une des raisons pour lesquelles elles ont pris cette décision, mais il signale à un autre endroit du rapport que de l'information circulait également à l'échelle internationale.
    C'est votre dernière question, monsieur Ménard.

[Français]

    Je reviens en arrière dans vos relations avec M. Ashcroft, des États-Unis. Si vous aviez su que M. Arar était innocent de toute relation avec des activités terroristes, vous en auriez parlé à M. Ashcroft et vous lui auriez demandé pourquoi l'avez- vous envoyé en Syrie? Vous lui auriez demandé cela pour savoir si, justement, ils avaient leurs propres raisons de l'envoyer en Syrie?

  (1000)  

[Traduction]

    Soyons clairs...

[Français]

    Finalement, comme c'est ma dernière question, il s'agissait de savoir s'ils avaient leurs propres raisons de l'envoyer en Syrie, parce que quand même, si ce citoyen revenait de Syrie, c'était un citoyen canadien.
     Alors, c'était bon de savoir si c'était un terroriste extrémiste ou simplement une personne innocente.

[Traduction]

    Soyons parfaitement clairs. En ce qui concerne M. Arar et la décision des autorités américaines de le détenir et de l'expulser, nous nous en sommes plaints amèrement auprès des autorités américaines, auprès de M. Ashcroft. Nous — ou moi, du moins — nous sommes fondés sur le principe qu'elles avaient violé le droit international en agissant de la sorte. Pour moi, M. Arar était innocent et il n'aurait pas dû être détenu et expulsé en Syrie. Nous l'avons fait savoir très clairement à M. Ashcroft. Nous lui avons demandé pourquoi les autorités américaines l'avaient expulsé, mais sans obtenir de réponse. M. Ashcroft maintenait que cette décision avait été prise en conformité des lois américaines et que les États-Unis avaient le droit de procéder de la sorte, ce que je conteste. Nous avons vigoureusement défendu ce point de vue.
    Merci.
    Madame Brown, pour un bref tour de questions.
    Avec votre permission, monsieur Easter, nous dépasserons le délai de quelques minutes. Cela vous cause-t-il un inconvénient?
    Ça ne pose pas de problème.
    Bien, voici les dernières questions.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Easter, c'est toujours un plaisir de vous voir. Merci d'être venu témoigner aujourd'hui.
    J'ai de nombreuses questions à vous poser et quelques minutes seulement pour le faire. Par conséquent, je les poserai très rapidement.
    En premier lieu, d'après les informations que vous possédiez, pensez-vous que les autorités américaines faisaient une enquête sur M. Arar ou se sont-elles basées uniquement sur des renseignements fournis par la GRC?
    Je pense que le problème est qu'il est question en l'occurrence de décisions fondées sur un jugement. Le juge O'Connor l'explique de façon précise. Je peux toutefois affirmer — et c'est cité dans le volume 3, si je ne me trompe — que le procureur général Ashcroft m'a dit que l'information ne venait pas uniquement du Canada.
    Par conséquent, les autorités américaines avaient d'autres informations.
    Vous avez mentionné des questions posées par l'opposition. Est-ce que des membres de votre parti ont posé des questions au sujet de M. Arar?
    Des questions ont été posées par des représentants de tous les partis.
    Quel était le ton des questions posées par les représentants de votre parti?
    Elles étaient de toute nature. Celles des représentants de mon parti portaient aussi bien sur les libertés civiles que sur la question de savoir si nous faisions assez d'efforts à l'échelle internationale pour lutter contre les menaces à la sécurité nationale.
    Pourquoi le gouvernement a-t-il entravé pendant de nombreux mois les efforts déployés en vue de libérer M. Arar?
    Le gouvernement n'a pas entravé les efforts déployés en vue de libérer M. Arar. Dès le début de cette affaire — et ce serait une question qu'il serait préférable de poser au ministère des Affaires étrangères —, les Affaires étrangères ont entrepris des démarches à New York pour assurer le retour de M. Arar au Canada. Nous pensions que M. Arar viendrait à Montréal et les Affaires étrangères ainsi que le Cabinet du premier ministre se sont démenés pour assurer le retour de M. Arar au Canada. Je pense que sans ces efforts, M. Arar ne serait peut-être pas encore revenu.
    Si c'est le cas, pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas fait davantage d'efforts pour vérifier l'information de la GRC concernant M. Arar? Pourquoi n'a-t-il pas tenté davantage qu'il ne l'a fait de faire éclater la vérité? Vous vous fondiez sur de l'information de la GRC, mais vous ne l'avez manifestement pas évaluée suffisamment, à mon avis.
    Nous l'avons certainement évaluée. Nous avons posé à la GRC les questions qu'il fallait poser. Je pense que la meilleure source pour vérifier si nous avons fait des efforts suffisants à ce chapitre, c'est le rapport du juge O'Connor; c'est lui qui possédait toutes les informations. Je pense que certaines leçons ont été apprises, et c'est pourquoi j'approuve toutes les recommandations faites par le juge O'Connor. En outre, comme je l'ai déjà mentionné, j'estime qu'il est essentiel d'instaurer un type différent d'organisme de surveillance.

  (1005)  

    C'est une de mes questions. À l'instar de M. Alghabra, je suis très préoccupé au sujet de ces fuites. Pourquoi, d'après vous, n'a-t-on pas été jusqu'au fond de cette affaire? Ces fuites étaient néfastes et elles sont en grande partie responsables de la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement.
    Si vous examinez le témoignage du commissaire Zaccardelli, vous constaterez qu'il a dit qu'un des types d'enquêtes les plus difficiles sont celles concernant les fuites. Je sais très bien qu'une enquête très minutieuse a été faite sur les fuites et qu'une enquête est probablement toujours en cours. C'est une question que le comité a posée au commissaire Zaccardelli et il est beaucoup plus apte que moi à y répondre. Tout ce que je peux dire, c'est que nous étions très préoccupés au sujet des fuites, même au Cabinet du premier ministre, et que des enquêtes ont été menées, mais je dois admettre qu'on n'a pas encore de réponse à ce sujet.
    Merci.
    Je voudrais savoir si vous êtes en faveur de la création d'un comité de surveillance en matière de sécurité nationale.
    Il faudra voir de quoi ce comité aura l'air lorsqu'on sera au courant de sa structure et de la forme qu'il aura. Comme plusieurs autres membres de ce comité, j'ai été membre d'un comité qui a examiné la question de la surveillance et qui a fait des recommandations à ce sujet et, comme je l'ai indiqué dans mes observations préliminaires, c'est absolument essentiel dans ce pays.
    Bien, merci.
    Merci beaucoup. Je vous suis reconnaissant d'avoir accepté notre invitation, monsieur Easter. Le temps a passé très rapidement.
    Je remercie tous mes collègues pour les questions qu'ils ont posées.
    Nous reprendrons nos travaux jeudi. La séance est levée.