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RNNR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources naturelles


NUMÉRO 026 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 28 novembre 2006

[Enregistrement électronique]

  (1540)  

[Traduction]

    Je précise à ceux qui viennent d'arriver que, si la chose vous intéresse — et je crois que c'est le cas pour tout le monde — vous pouvez visionner un DVD présentant quelques-unes des photos prises à Fort McMurray. J'aurais aimé qu'il y en ait davantage, alors si quelqu'un d'autre a pris des photos dont il voudrait faire profiter tous les autres membres, je serais heureux de les intégrer. Je ne sais pas si quelqu'un d'autre avait apporté un appareil photo, mais il serait bien que nous puissions également les mettre en commun.
    Nous recevons aujourd'hui des témoins qui vont nous parler de remise en état des terres et de la forêt boréale. Nous accueillons ainsi Bruce Friesen, gestionnaire pour la remise en état des terres chez Syncrude qui représente l'Association canadienne des producteurs pétroliers. Mary Granskou de l'Initiative boréale canadienne n'a pas pu être des nôtres aujourd'hui, alors nous accueillons plutôt Alan Young, gestionnaire de programme, et Matt Carlson, coordonnateur scientifique, qui nous parleront en son nom et en celui de l'Initiative boréale canadienne.
    J'ai proposé à ces deux groupes de débuter par une déclaration de dix minutes afin de fournir certaines informations générales aux membres du comité qui pourront leur poser des questions par la suite.
    Je pense que nous allons débuter avec M. Young. Si cela vous convient, pourriez-vous d'abord nous expliquer très brièvement en quoi consiste l'Initiative boréale canadienne avant de présenter un portrait plus général de la situation aux membres du comité?
    L'Initiative boréale canadienne a été lancée en 2003 afin d'offrir une vision intégrée pour la promotion du développement durable de la forêt boréale canadienne. Un groupe extraordinaire de partenaires a ainsi été convoqué pour ratifier la Convention pour la conservation de la forêt boréale.
    Dès le départ, cette démarche s'est inscrite dans un mécanisme pancanadien intégré en matière de protection et de développement en guidant la recherche de solutions dans tous les secteurs. Parmi les signataires et les initiateurs de la Convention, on note de grandes entreprises comme Suncor, Alberta-Pacific, Tembec et Domtar. Il y a aussi les Premières nations Innu, Kaska, Deh Cho et de la rivière Poplar, pour n'en citer que quelques-unes. Nous pouvons également compter sur un intéressant spectre de partenaires au sein des ONG avec Canards illimités, le Fonds mondial pour la nature, ForestEthics et la Société pour la nature et les parcs du Canada.
    Mon organisation sert de centre nerveux et de secrétariat pour ce regroupement dont les membres conjuguent leurs efforts en vue de faire avancer cette vision fondée à la fois sur des mesures de protection à grand échelle permettant l'intégrité des écosystèmes à long terme dans toute la forêt boréale, et sur des pratiques de développement durable de calibre mondial dans les secteurs industriels.
    Je veux prendre un moment pour m'assurer que tous les membres ont un exemplaire du mémoire que vous avez eu l'obligeance de nous fournir. Sinon, notre greffier en a des copies supplémentaires. N'hésitez pas à me faire signe s'il vous en faut une.
    Désolé pour l'interruption.
    Mon rôle au sein de l'Initiative boréale s'articule en grande partie autour de la sensibilisation des entreprises; au cours des derniers mois, j'ai ainsi fait de nombreux allers-retours à Calgary pour travailler avec les entreprises du secteur énergétique afin de dégager des enjeux d'intérêt commun et de régler des questions qui nous préoccupent tous. Nous espérons donc que les travaux de votre comité pourront contribuer de façon importante à nos efforts de développement durable de manière à optimiser les avantages de l'exploitation des sables bitumineux pour tous les Canadiens, tout en minimisant les risques qui s'y rattachent.
    Dans le cadre de nos interventions, nous nous efforçons d'appuyer les solutions concrètes intégrées. Les sociétés forestières avec lesquelles nous collaborons détiennent une certification du Forest Stewardship Council, l'un des plus importants mécanismes mondiaux pour la gestion responsable des forêts, pour un territoire de plus de 42 millions d'acres. Chez les Premières nations, nos partenaires conçoivent des plans d'aménagement du territoire qui visent à établir un équilibre entre la protection et les possibilités de développement durable des ressources naturelles. Nous collaborons avec un éventail très large de groupes environnementaux qui s'emploient en priorité à inscrire des objectifs de durabilité à long terme dans le cadre des efforts actuels de développement économique. Nous avons conclu des protocoles d'entente avec les gouvernements et, fidèles à la tradition canadienne, nous entretenons des partenariats avec des intervenants de tous les secteurs.
    Nous voulons vous parler de la forêt boréale aujourd'hui à partir d'une perspective un peu plus planétaire, en prenant du recul par rapport aux incidences régionales pour vraiment examiner le portrait d'ensemble. L'Initiative boréale a été mise sur pied lorsqu'on s'est rendu compte que seulement trois pays, le Brésil, la Russie et le Canada, abritent plus de 70 p. 100 des dernières grandes forêts encore intactes sur la planète.
    De ces trois pays, le Canada ressort clairement comme celui qui est le mieux placé pour adopter une approche concrète axée sur la stabilité et la viabilité pour la gestion de ces forêts et de ces territoires. De fait, c'est une responsabilité d'ordre planétaire que nous assumons à l'égard de la forêt boréale et les activités liées aux sables bitumineux pourraient contribuer grandement à façonner l'avenir de ces régions.
    Notre région boréale couvre plus d'un milliard d'acres et représente 58 p. 100 de notre masse terrestre; elle s'étend de Terre-Neuve jusqu'au Yukon. Cette région revêt une importance capitale non seulement du point de vue écologique, mais aussi pour les quelque 600 collectivités autochtones qui l'habitent et en tirent leur subsistance. Nous sommes tout à fait conscients qu'il s'agit d'un moteur économique pour ces collectivités comme pour le pays dans son ensemble, et nous visons à atteindre un juste équilibre entre le développement et la protection du territoire.
    Les scientifiques réclament de grandes aires protégées afin de maintenir la faune et d'autres valeurs écologiques sur ce territoire. Dans certaines régions de la forêt boréale, une telle protection doit absolument être offerte de façon urgente. Par exemple, le caribou des bois est une espèce qui est très affectée par les perturbations actuelles dans l'ensemble de la région boréale et sa population est nettement en déclin, surtout en Alberta. À moins que des habitats critiques ne soient protégés et interdits au développement industriel, cette espèce déjà menacée risque de disparaître de la majorité de son ancienne aire de distribution géographique.
    De toute évidence, l'extraction des sables bitumineux risque de transformer une grande partie de la région boréale. On estime que le secteur touché totaliserait environ 150 000 kilomètres carrés. Maintenant que se pointent de nouvelles expansions, nous prêtons notre appui au nombre grandissant d'intéressés qui réclament un examen exhaustif du rythme et de l'étendue des activités d'exploitation des sables bitumineux. Il est temps que nous jetions un deuxième regard critique sur l'évolution de la situation et que nous apportions des modifications considérables afin d'assurer un meilleur équilibre entre les préoccupations environnementales et le développement et les intérêts des Autochtones.
    Comme je l'ai déjà indiqué, nous tenons à préciser que Suncor est membre de notre Conseil principal de la forêt boréale et signataire de la Convention pour la conservation de la forêt boréale. Nous collaborons d'ailleurs étroitement avec cette société dans plusieurs dossiers. Nous souhaitons toutefois souligner que nous ne nous exprimons pas en son nom ici aujourd'hui. Les représentants de Suncor se sont déjà adressés à votre comité. Nous demeurons constamment en contact et en discussion avec cette entreprise, mais ce sont les points de vue de l'Initiative boréale que nous vous exposons aujourd'hui.
    Pour en revenir à la question des sables bitumineux, il faut évidemment considérer qu'ils se trouvent dans le bassin hydrographique du fleuve Mackenzie. Ce bassin couvre une grande région comprenant la presque totalité des Territoires du Nord-Ouest, la moitié nord de l'Alberta ainsi que certaines portions de la Saskatchewan, de la Colombie-Britannique et du Yukon.

  (1545)  

    Nos recommandations concernent principalement les correctifs à apporter dans le contexte global de ce bassin hydrographique étant donné que les impacts de l'exploitation des sables bitumineux se font et se feront sentir sur l'ensemble de ce territoire. Je ne sais pas si vous avez lu les journaux aujourd'hui, mais la Première nation Deninu K'ue de Fort Resolution, à 600 kilomètres au nord d'une partie du site d'exploitation des sables bitumineux, vient d'exprimer officiellement ses inquiétudes quant à l'approvisionnement en eau et aux incidences à long terme sur sa population.
    En raison de l'envergure et de l'intensité des activités d'extraction des sables bitumineux, l'efficacité des mesures d'atténuation des impacts aura une influence déterminante sur l'intégrité de la région élargie de ce bassin hydrographique. Cela influera également sur la capacité du Canada de respecter les accords internationaux ainsi que sur la perception de notre pays à l'échelle mondiale. Déjà, la région des sables bitumineux est reconnue par le programme des Nations Unies pour l'environnement comme l'un des 100 points chauds du globe en matière d'altération de l'environnement.
    Il ne fait aucun doute que l'exploitation des sables bitumineux a un effet dévastateur sur le capital naturel de la région, c'est-à-dire l'intégrité de son habitat, de sa faune et de ses eaux. Nos écosystèmes boréaux évoluent depuis des milliers d'années et les dommages qui leur sont causés par cette forme d'activité minière sont fondamentalement irréparables. Des mesures d'atténuation sont possibles, mais le territoire changera, il sera altéré, et des processus écologiques comme l'hydrologie et le stockage de carbone seront transformés en profondeur et devront être sérieusement pris en compte pour déterminer les interventions requises.
    Le drainage par gravité au moyen de vapeur transformera également le paysage de la région. Comme vous le savez très bien, il laissera derrière lui une empreinte industrielle beaucoup plus considérable que l'extraction minière elle-même. L'infrastructure de routes, de pipelines, de plateformes d'exploitation et d'installations de transformation aura pour effet de détériorer l'intégrité écologique, ce qui nous préoccupe tout particulièrement pour l'avenir du caribou des bois.
    Compte tenu de l'intensité et de l'ampleur des impacts de l'exploitation des sables bitumineux, des mesures compensatoires de conservation devront absolument êtres prises pour maintenir l'intégrité écologique dans la région élargie de la vallée du Mackenzie. Une composante clef des mesures compensatoires requises est la mise en place d'aires protégées. De telles aires sont notamment nécessaires pour assurer la viabilité de processus écologiques régionaux, protéger des exemples représentatifs de communautés écologiquesindigènes et maintenir la biodiversité indigène. Des aires protégées adéquatement sélectionnées peuvent servir de jalons pour des stratégies de gestion et de développement durable. Des organismes de conservation, des Premières nations et des représentants de l'industrie ont déjà défini plusieurs aires protégées possibles.
    La Société pour la nature et les parcs du Canada a défini des sites de la région des sables bitumineux pouvant présenter une valeur écologique élevée et un minimum de conflit avec des ressources pétrolières. La principale société forestière active dans la région, Al-Pac, essaie de voir comme elle pourrait procéder dans cette veine à l'intérieur de son territoire autorisé. Nous considérons que cette démarche revêt une importance fondamentale dans le cadre du projet global de développement. Les aires protégées proposées par la Première nation Deh Cho dans son projet de plan d'aménagement du territoire et par des collectivités locales en amont et en aval de la vallée du Mackenzie en vertu de la Stratégie sur les aires protégées des Territoires du Nord-Ouest ouvrent la voie à d'autres mesures clés pour compenser l'exploitation des sables bitumineux sur le plan de la conservation.
    Nous recommandons donc au comité d'appuyer la mise en place des mesures compensatoires de conservation pour la création d'aires protégées dans la région entourant les sables bitumineux ainsi que dans la région élargie du bassin hydrographique du fleuve Mackenzie.
    Nous souhaitons également aborder la question des services actuellement rendus par l'écosystème de la région et des répercussions qui pourraient être ressenties à ce chapitre. Nous avons collaboré avec l'Institut Pembina pour réaliser une étude sur la valeur de ces écoservices dans la région des sables bitumineux. Si la chose vous intéresse, j'ai ici un rapport intitulé Les chiffres qui comptent vraiment où vous pourrez notamment prendre connaissance de l'intéressant travail de Mark Anielski de l'Institut Pembina.
    Les chercheurs ont établi à quelque 93 milliards de dollars par année la valeur non marchande totale des services de l'écosystème boréal. Les services les plus utiles incluent la filtration de l'eau, la maîtrise des crues, le piégeage du carbone et le contrôle des insectes et des animaux nuisibles. Les forêts et les tourbières de la région stockent quelque 67 milliards de tonnes de carbone, soit une valeur approximative de 3,7 billions de dollars.
    En raison de la grande quantité d'énergie requise pour extraire le pétrole des sables bitumineux, on prévoit qu'ils deviendront la principale source de croissance des émissions de gaz à effet de serre et pourraient être responsables de près de la moitié de l'augmentation prévue de ces émissions au Canada entre 2003 et 2010. La gestion des émissions des sables bitumineux devient donc un volet essentiel de toute stratégie canadienne efficace concernant les gaz à effet de serre.

  (1550)  

    Un meilleur recours à la technologie existante fait partie des actions à prendre pour atteindre cet objectif, mais il nous faut bien comprendre que les forêts canadiennes sont les plus grands sites terrestres de stockage de carbone sur la planète. Elles ont un rôle essentiel à jouer dans les mesures que prendra la communauté internationale en réaction aux changements climatiques. Afin d'atténuer les impacts globaux sur la forêt boréale, nous devons offrir des mesures incitatives qui permettront aux entreprises d'investir dans la conservation des forêts en stockant du carbone pour compenser les émissions résultant de l'extraction des sables bitumineux.
    Le gouvernement fédéral doit jouer un rôle de tout premier plan, de concert avec les gouvernements provinciaux, pour que ces incitatifs puissent intéresser concrètement les entreprises. De telles mesures incitatives incluent un système d'échange de droits d'émission de carbone axé sur le marché et un fond incitatif de conservation à intensité carbonique. Nous recommandons au comité de soutenir la proposition formulée par l'Institut Pembina visant à ce que l'industrie des sables bitumineux devienne neutre en carbone d'ici 2020 et d'appuyer des mesures incitatives de préservation du carbone forestier.
    Comme vous le savez, l'extraction des sables bitumineux est une activité qui consomme beaucoup d'eau. Comme il a été beaucoup question lors de vos audiences précédentes de la quantité d'eau requise et des problèmes pouvant en découler sur le plan de la qualité de l'eau, je ne vais pas m'éterniser sur le sujet. Nous savons que chaque baril de pétrole produit exige entre deux et cinq barils d'eau et que 65 p. 100 de la quantité totale d'eau puisée dans la rivière Athabasca sert à l'extraction des sables bitumineux. Cette proportion devrait d'ailleurs croître au cours des années à venir. Les répercussions sur l'habitat des poissons et l'intégrité du delta des rivières de la Paix et Athabasca sont considérables.
    Étant donné que l'eau n'est pas retournée dans le bassin hydrographique, mais est plutôt stockée dans des bassins de résidus toxiques qui ne pourront être valorisés avant plusieurs décennies — et il faut attendre pour voir quels seront les efforts consentis à ce titre — il va de soi qu'il y a certaines incertitudes et des risques de contamination de l'eau à long terme, si ces territoires et ces ressources aquifères ne sont pas gérés avec le plus grand soin. Il est évident que nous ne comprenons pas aussi bien qu'il le faudrait l'impact de l'extraction de l'eau sur l'écosystème de même que les risques que posent des toxines comme les hydrocarbures polyaromatiques.
    Des collectivités locales situées en aval de ces sites de développement doivent composer avec des altérations draconiennes de la qualité et de la quantité de leur eau. Elles nous demandent de mieux comprendre les impacts du développement sur l'eau, ce qui est absolument essentiel si nous voulons trouver une solution juste et durable sous cet aspect de notre développement.
    De fait, nous devons mieux comprendre toutes les composantes du capital naturel de la région. Les gouvernements seront ainsi mieux à même de tenir compte des coûts écologiques et socioéconomiques dans la prise de décisions concernant l'aménagement du territoire régional.
    Les Premières nations du Traité numéro 8 de l'Alberta réclament une évaluation environnementale stratégique de l'ensemble des impacts directs et des effets cumulatifs des projets présents et futurs d'extraction de sables bitumineux et de pétrole lourd dans la région. Une telle approche ouvrirait la voie à un examen exhaustif de l'empreinte actuelle et projetée de ces projets de développement et permettrait aux décideurs de tenir compte de l'ensemble des impacts à l'échelle régionale, plutôt que de se concentrer uniquement sur les impacts de chaque projet individuel, ce qui est inefficient pour les entreprises à bien des égards et fait souvent en sorte qu'on ne prend pas en considération les éléments clés qui pourraient être profitables à toutes les parties en cause. Dans un tel contexte, l'évaluation et la planification doivent tenir compte à la fois du rythme et de l'étendue des projets de développement proposés et de seuils critiques ou de limites à la croissance, de manière à assurer que la quantité d'eau utilisée pour extraire le pétrole ne dépasse pas un niveau qui porterait atteinte à une fonction écosystémique qui mettrait en péril des collectivités.
    Parmi les autres priorités qui pourraient être prises en compte dans le cadre d'une évaluation environnementale stratégique, on peut noter les impacts de l'exploitation des sables bitumineux sur les habitats de poissons dans la rivière Athabasca; les impacts de la construction de routes dans la région des sables bitumineux sur les poissons et la faune; les menaces pour l'intégrité écologique du delta des rivières de la Paix et Athabasca dans le parc national Wood Buffalo; et les menaces pour la faune, y compris le caribou, qui souffre déjà d'un déclin précipité de ses populations, ainsi que pour les populations d'orignaux, une espèce clé essentielle à la survie des collectivités des Premières nations locales.
    Nous recommandons au comité d'appuyer la mise en oeuvre d'une évaluation environnementale stratégique des impacts de l'ensemble des effets directs et cumulatifs de projets actuels et proposés d'extraction de sables bitumineux et de pétrole lourd dans le bassin hydrographique du fleuve Mackenzie.

  (1555)  

    Il est temps d'adopter de nouvelles approches pour protéger les écosystèmes et les cultures et promouvoir des économies viables. De telles approches pourraient même créer un avantage concurrentiel mondial dont bénéficieraient les entreprises et les collectivités du Canada. La région boréale du Canada nous offre l'occasion de penser différemment, d'entrer en partenariat différemment et de faire des affaires différemment. L'Initiative boréale canadienne s'engage justement à travailler différemment et estime que des solutions s'offrent à nous si nous adoptons l'approche appropriée et si nous prenons dès maintenant le temps de faire les choses comme il se doit.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Young.
    Nous passerons aux questions concernant notamment votre mémoire après avoir entendu M. Friesen. 
    Monsieur le président, et membres du comité, je suis ravi de vous entretenir aujourd'hui de la remise en état des terrains et de la fermeture des mines de sables bitumineux.
    Mon point de vue est celui d'un spécialiste de la remise en état des terrains. En tant que directeur responsable des terrains et de l'environnement chez Syncrude, je travaille avec une équipe de techniciens spécialisés qui s'emploient activement à remettre en état les sites d'exploitation des sables bitumineux de notre entreprise. Jusqu'à maintenant cette année, notre équipe a réalisé la remise en état d'une étendue de plus de 300 hectares, c'est-à-dire un peu plus d'un mile carré. Elle a planté plus d'un demi-million d'arbres et d'arbustes issus de semis. De façon toute aussi importante, nous avons investi au-delà de 1,5 million de dollars dans la recherche sur la remise en état.
    Je vais vous exposer certaines des principales difficultés auxquelles nous sommes confrontés dans le cadre de nos travaux de remise en état progressive et je vais vous parler aussi de l'orientation de notre programme de remise en état. J'ose espérer que cette information sera utile au comité dans le cadre de son étude.
    Tout d'abord, je dois dire — je suis à la troisième page du document — qu'il faut reconnaître la réalité, c'est-à-dire que l'exploitation des sables bitumineux nuit à l'environnement puisqu'elle nécessite de raser la forêt boréale, d'enlever le terrain de couverture, c'est-à-dire le terrain qui couvre les sables bitumineux, et de creuser dans ces sables. Comme il est évident que nous nuisons à l'environnement, nous veillons, chez Syncrude, à restreindre l'empreinte écologique de nos activités ainsi que la zone visée. Nous y parvenons grâce à la remise en état progressive. Cependant, puisque l'environnement à été touché, nous nous sommes clairement engagés à respecter l'obligation juridique et sociale que nous avons de remettre en état, selon des normes acceptables, les terrains altérés.
    À la page 5 du document, vous pouvez lire un extrait de la disposition d'une loi albertaine qui prévoit qu'au terme des activités d'exploitation, la capacité de production d'un terrain altéré doit être équivalente à ce qu'elle était à l'origine. Nous devons aussi, bien entendu, satisfaire aux exigences d'autres lois provinciales et fédérales, dont la principale est la Loi sur les pêches, précisément les dispositions concernant l'habitat du poisson et la santé des ressources halieutiques.
    À la page 6 de notre document, nous exposons notre vision sur l'état de l'environnement après la fermeture de notre site. Pour nous aider à relever le défi qui nous attend, en tant que spécialistes de la remise en état des terrains, nous avons élaboré une vision concernant le paysage que nous allons laisser aux gens qui vivront dans la région de Wood Buffalo une fois que nous aurons cessé nos activités. Nous sommes conscients du fait que la population, en particulier les collectivités autochtones, aura besoin de la nature pour continuer à subvenir à ses besoins. Nous voulons que cet environnement soit utile, et que son état soit suffisamment bon pour atteindre la maturité en harmonie avec la forêt boréale environnante.
    À la page 7 figure une image qui traduit cette vision. Et à la page 8, on peut voir clairement une partie d'un terrain remis en état conformément à cette vision. C'est presque dommage que le comité ait visité Fort McMurray durant l'hiver; nous aimons bien montrer les terrains remis en état lorsque tout est vert et que la nature s'épanouit.
    La photographie de la page 8 montre une partie de la mine de Mildred Lake, où on trouve maintenant une forêt, des prairies et des milieux humides. Le terrain qui se trouve à droite de la route était jadis une mine d'environ 60 mètres de profondeur. L'endroit a été remblayé avec le terrain de couverture puis remis en état.
    Passons maintenant à la page 9, qui expose le processus de remise en état. Comme je l'ai déjà dit, nous altérons tout d'abord le terrain, ce qui le rend inutile pour d'autres usages. À partir de ce moment-là, nous veillons à rétablir la capacité de façon à ce qu'elle soit équivalente, mais pas nécessairement identique, à ce qu'elle était à l'origine. Le graphique illustre les différentes façons d'y parvenir, qui sont plus ou moins rapides.

  (1600)  

    Le graphique illustre aussi les trois étapes de la remise en état d'un terrain. Premièrement, nous déterminons la forme finale du terrain, avec ses monts et ses vallées. Deuxièmement, nous étalons la couche supérieure de matériau, choisi pour sa compatibilité avec les horizons pédologiques futurs. Troisièmement, nous donnons un coup de pouce au développement de la faune et de la flore en plantant quelques essences d'arbres et d'arbustes.
    Je tiens à souligner que toutes ces activités s'appuient sur une vaste expérience et d'abondantes recherches. C'est ce que nous faisons lorsque nous procédons à la remise en état d'un terrain.
    La page 10 présente un diagramme, et je veux attirer votre attention sur l'encadré qui se trouve dans le coin supérieur gauche. Il nous incombe de planifier la fermeture d'un site. Nous devons élaborer un plan viable à suivre à partir de l'instant présent jusqu'à la fermeture du site. Il doit exister un tel plan que nous pouvons suivre à partir de n'importe quel moment jusqu'à la fermeture. Sinon, nous n'avons aucun droit d'altérer le terrain.
    Syncrude et d'autres exploitants de sables bitumineux ont défini un plan de remise en état et de fermeture pour chacun des sites. Nous avons mis par écrit toutes les activités que nous allons entreprendre ainsi que les méthodes et les technologies que nous allons appliquer. En faisant cela, nous étions conscients des nombreuses difficultés inhérentes à la remise en état d'un terrain en général et d'une mine de sables bitumineux en particulier.
    À la page 11 sont énumérés quelques-uns des plus importants éléments dont nous devons tenir compte. Comme nous devons remettre en état de grandes étendues de terre, nous devons connaître l'écoulement direct de surface et par conséquent assurer un drainage dentritique, et pour ce faire, nous devons étudier les zones naturelles environnantes pour voir ce dont la nature a besoin en termes de drainage. Deuxièmement, nous devons tenir compte du fait que des sels sont naturellement présents dans le terrain de couverture et dans les gisements de sables bitumineux, qui se retrouveront dans le nouvel environnement. Nous devons veiller à ce que la qualité du sol et de l'eau demeure acceptable. Troisièmement, nous devons déterminer la toxicité initiale des composés organiques naturellement présents dans les gisements de sables bitumineux, mais qui sont éliminés durant le traitement. Heureusement, comme il s'agit de composés naturels, ils se décomposent sous l'action des rayons du soleil et de bactéries. Nous sommes donc confiants de pouvoir relever le défi que pose cette toxicité initiale.
    La page 12 vise à illustrer la première étape du processus de remise en état, c'est-à-dire façonner le relief, principalement en conformité avec l'écoulement direct de surface de façon à ce que le rythme d'érosion soit acceptable. Soit dit en passant, le tiers supérieur droit de cette image montre une portion de terrain remis en état; on y voit des prairies et de la forêt.
    L'étape suivante consiste à choisir, avant de commencer l'exploitation, les types de matériaux qui composeront le sol par après. Idéalement, les matériaux de surface et la couverture morte, qui contient les racines, sont transférés directement au site à remettre en état de façon à ce que la flore s'établisse et se diversifie le plus rapidement possible.
    À la page 13, la photo de gauche montre un endroit où, avant l'exploitation, les matériaux de surface ont été enlevés en vue d'être chargés dans des camions. La photo de droite montre l'étalement de la première levée. Dans ce cas-ci, il s'agit d'une levée de 80 centimètres de loam argileux. La dernière levée consistera en la couverture morte.
    À la page 14, on voit à l'avant-plan un terrain de couverture peu de temps après l'étalement de deux levées. Je tiens à attirer votre attention sur le centre de la photo de façon à pouvoir vous expliquer la difficulté que pose la gestion de l'eau. Juste à côté d'un mont, on peut voir une étendue de verdure, qui est en fait un terrain remis en état. C'est en plein centre de la photo. À gauche de cela, on peut observer un élément de drainage, soit une future vallée. Étant donné la taille et la pente de ce terrain, il y aurait là naturellement une série de vallées, et c'est donc ce que nous avons créé. À la page 15, on peut voir cet élément de drainage en gros plan.
    Vous pouvez donc constater que Syncrude possède les outils et les méthodes nécessaires pour refaçonner un terrain et restaurer la végétation. La page 16 vous montre une forêt ainsi qu'une prairie et des milieux humides. À la page 17, on peut voir un terrain formé à partir de résidus sableux.

  (1605)  

    Passons maintenant à la page 18, qui porte sur l'aspect de notre travail qui est probablement le moins bien compris et qui nous pose le plus grand nombre de difficultés. Je veux parler de la consistance molle de certains de nos résidus. Le drainage de l'eau se fait lentement, ce qui fait en sorte que les résidus restent mous pendant une certaine période. Vous pouvez voir une photo d'un ingénieur en géotechnique démontrant la consistance molle de ce que nous appelons les résidus composites.
    Étant donné ce problème, Syncrude prévoit adopter deux méthodes de gestion de ces résidus mous. À la page 19, se trouvent des dessins très détaillés d'une de ces méthodes. Je suis désolé si ce n'est pas très clair, mais je voulais seulement insister sur le fait que nous devons avoir recours à de nombreuses technologies pour arriver au résultat final. Beaucoup de recherche et développement est nécessaire. Je ne vais pas vous expliquer chaque partie de ces dessins.
    Essentiellement, le dessin du bas présente une coupe transversale d'un gisement de résidus composites. Au-dessus se trouve une couche d'un matériau plus solide, soit des résidus sableux. Par-dessus cela se trouve une couche d'un matériau choisi pour la remise en état et duquel pousse de la végétation. Le dessin qui se trouve dans le coin supérieur droit constitue une coupe transversale de ce même terrain, mais de l'autre côté, et montre qu'il y a plusieurs collines et dénivellations. Elles servent à assurer un bon drainage des eaux de pluie et à faire en sorte que la nappe phréatique se trouve suffisamment loin de la surface du sol de sorte que les arbres puissent prendre racine. Le dessin que l'on voit dans le coin supérieur gauche donne une idée claire du paysage. On observe une série de crêtes où poussent des arbres. Entre ces crêtes se trouvent des dénivellations aqueuses où pousse de la végétation comme des saules et des massettes. En bas de ce paysage; on trouve des milieux humides plus vastes.
    À la page 20, il est question des facteurs liés au bilan hydrique, c'est-à-dire l'équilibre entre les précipitations, l'évaporation et l'écoulement jusqu'à un milieu humide. Il est très important de comprendre tous les facteurs qui entrent en jeu.
    Bien des gens se demandent s'il est réaliste de s'attendre à ce que les milieux humides se rétablissent d'eux-mêmes dans un terrain remis en état. La page 21 montre un milieu humide qui a évolué pour devenir très diversifié au cours d'une période de quatre ans seulement. Certaines personnes qui critiquent notre programme de remise en état des terrains font valoir que nous ne pouvons pas décider du type précis de milieux humides ou des essences d'arbres nécessaires à l'environnement. Nous sommes d'accord. Nous nous efforçons de créer des conditions qui peuvent permettre le développement d'une faune et d'une flore variées. Nous croyons avoir réussi à cet égard. Toutefois, comme un de mes collègues l'a fait observer, c'est la nature qui a le dernier mot. Nous nous occupons de jeter les bases, et ensuite la nature développe d'elle-même la végétation appropriée selon l'endroit.
    J'ai parlé de deux méthodes qu'on utilise pour incorporer dans la nature les résidus mous. La deuxième consiste à couvrir d'eau un gisement de résidus mous. Cette méthode est illustrée clairement à la page 22.
    La photographie de la page 23 montre une vue aérienne des installations de recherche. Pendant plus de 20 ans, Syncrude a effectué des recherches sur cette méthode et des expériences. En 1988, nous avons créé un étang expérimental — c'était donc il y a 20 ans pratiquement — et en 1993, nous avons créé un bassin de démonstration de quatre hectares. Grâce à nos recherches et à nos expériences, nous croyons maintenant bien comprendre cette méthode ainsi que le comportement d'un lac créé sur un gisement de résidus mous. Nous sommes convaincus que l'application à grande échelle de cette méthode, qui est prévue pour 2012, sera une réussite.
    Comme on le mentionne à la page 24, il faut souligner l'importance des recherches de qualité dans l'amélioration de nos méthodes de remise en état des terrains.

  (1610)  

    Dans le cadre de nos recherches, nous préférons collaborer avec les chercheurs les plus éminents des universités canadiennes et attirer ainsi les meilleurs étudiants diplômés, qui ensuite publient leurs travaux réalisés selon les exigences des universités. À l'été 2006, nous avons publié dans notre site les travaux de plus de 30 équipes de recherche formées d'étudiants de partout au Canada.
    La page 25 présente des chiffres, que je ne vais pas vous répéter. Si vous avez des questions à ce sujet, n'hésitez pas à me les poser.
    En résumé, au site de Mildred Lake, nous remettons des terrains en état plus rapidement que nous en altérons. Nous sommes en train de réduire l'empreinte écologique à cet endroit. Si nous continuons au même rythme qu'à l'heure actuelle -- l'an dernier nous avons remis en état 260 hectares, soit environ un mille carré -- il nous faudra encore 50 ans de travail. Les activités d'exploitation dureront encore pendant à peu près 30 ans, et une fois qu'elles auront cessé, la remise en état prendra encore cinq à dix ans. Il s'agit donc d'un projet qui s'échelonnera sur 35 à 40 ans. Si nous continuons au rythme actuel, nous aurons terminé dans 50 ans. Nous devrions accélérer le rythme, mais seulement un peu, car nous sommes pratiquement rendus là où nous devrions être.
    En terminant, j'aimerais mettre l'accent sur trois points. Premièrement, Syncrude est tout à fait conscient du fait que la remise en état des terrains est une condition préalable à l'exécution de ses activités. Si nous ne sommes pas en mesure de remettre le terrain en état, nous n'avons aucun droit de l'altérer. Si nous n'avons aucun plan pour nous mener au résultat final, nous n'avons aucun droit de commencer. Deuxièmement, nous savons que la remise en état des terrains et que la fermeture des sites revêtent beaucoup d'importance. Elles nécessitent l'application de technologies avancées et une grande expérience, mais Syncrude mène des recherches depuis plus de 40 ans et effectue des expériences sur le terrain depuis 30 ans. Cela exige beaucoup d'argent et d'efforts et un véritable engagement. Troisièmement, nous sommes d'avis que la remise en état des terrains donne de bons résultats, et nous avons tout à fait l'intention de poursuivre dans cette voie.
    Je vous remercie de votre attention et je suis prêt à répondre à vos questions du mieux que je le pourrai. Merci.
    Merci, monsieur Friesen.
    Nous allons commencer par M. Tonks.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Friesen, monsieur Young et monsieur Carlson, je vous remercie d'être ici.
    Vous comprendrez que ces deux exposés sont un peu impressionnants, même pour notre comité qui a déjà eu l'occasion — et je parle pour moi-même — de voir sur place l'ampleur du développement.
    Si je devais retenir l'essentiel de ce qui a été présenté aujourd'hui, du point de vue du déterminisme environnemental, de nombreuses questions sont soulevées quant au rythme du développement, l'affaiblissement de la capacité de la foret boréale de séquestrer le carbone dans son cycle naturel et la capacité des écosystèmes et des eaux souterraines et de surface de se régénérer. Tout cela est lié au rythme d'extraction et de développement, soit par l'exploitation minière ou par les projets in situ. Tous deux sont intrusifs dans la mesure où le développement se fait à un rythme qui dépasse la capacité de régénération.
    Monsieur Friesen, vous avez surtout parlé de la remise en état, et je respecte tout à fait ce que vous avez dit au sujet de l'engagement de votre entreprise. J'ai une question à ce sujet. Vous avez dit à deux reprises que si nous ne suivions pas ce cheminement, nous n'avions pas le droit d'entreprendre un projet de développement. C'est la première chose, et vous avez utilisé votre modèle de fermeture et de remise en état pour faire valoir cet aspect. Vous avez dit également que la remise en état était une condition préalable, et que nous n'avions pas le droit d'entreprendre un projet de développement si nous ne pouvions garantir la capacité de renouvellement comme vous l'avez décrit ici.
    J'imagine que c'est une question de proportion. Nous avons un graphique montrant l'ampleur du développement. La proportion des terres remises en état est représentée par la partie pâle du graphique. Vous pouvez voir, monsieur Friesen, alors que vous avez affirmé... Vous admettez que vous avez été un peu lent au début, que vous pourriez accélérer la remise en état.
    Cela étant dit, j'ai une question. J'aimerais que M. Young, M. Carlson et M. Friesen y répondent, et je crois que cela intéressera le comité. Nous sommes préoccupés par les applications individuelles de développement que vous, monsieur Friesen, avez dit ne pas vouloir entreprendre si vous jugiez ne pas être en mesure de reconstituer les ressources, et nous sommes préoccupés aussi par l'effet cumulatif.
    Ces questions sont-elles prises en considération dans le cadre de l'étude d'impact environnemental lorsqu'une demande est présentée en vue du développement initial d'un site? Existe-t-il un critère obligatoire, monsieur Friesen, concernant ce que vous avez dit, à savoir que vous n'entreprendriez aucun développement si vous jugiez ne pas être en mesure de remettre le site dans son état naturel? Cet élément fait-il partie de l'étude d'impact environnemental, de sorte que le bien public puisse être protégé durant le développement du site, mais aussi en regard de toutes les implications sur le plan de la remise en état, de l'eau, de l'hydrologie, des impacts toxiques, etc.?

  (1615)  

    Je crois que oui. Dans un sens purement mécanique, un prometteur est tenu d'inclure une évaluation des effets cumulatifs dans l'étude d'impact environnemental. Je sais que certains doutent de la qualité de cette évaluation, mais j'ai déjà été un intervenant en affaires réglementaires et je crois qu'en préparant une évaluation des effets cumulatifs, chaque entreprise s'efforce réellement de refléter la situation telle qu'elle se présente. Chaque fois qu'un nouveau projet est proposé, il s'ajoute à la liste existante des projets approuvés et le nouvel ensemble est soumis au débat public.
    Je crois que oui.

  (1620)  

    Monsieur Young, voulez-vous faire des commentaires?
    À mon avis, l'ampleur, la diversité et la complexité du défi que pose la reconstitution d'une forêt après un développement de cette envergure imposent un certain degré d'humilité. Je crois que vous serez d'accord pour dire que lorsque nous entreprenons une remise en état, ce sont presque des plans conceptuels, parce que nous apprenons à mesure que nous avançons. Il y a beaucoup de choses concernant les sols et l'hydrologie de la forêt boréale que nous ignorons à l'heure actuelle et que nous apprendrons au cours de la remise en état. Autant nous pouvons planifier, autant nous devons tenir compte du fait que nous n'en savons pas beaucoup sur ce qui marchera et ce qui ne marchera pas, et nous serons surpris dans les deux cas. Je dirais que nous devons faire preuve d'une grande humilité dans notre démarche et nous montrer prudents, à cause des gens qui occupent les terres, à cause de l'étendue des terres qui seront touchées.
    Dans certains cas, le problème pourrait venir simplement du fait que ce que Syncrude fait bien est peut-être mal fait par son voisin. Et tout le bon travail réalisé par le premier pourrait être miné par un manque de cohérence dans cette application.
    C'est pourquoi nous demandons et appuyons ceux qui demandent une évaluation à un niveau supérieur des principaux enjeux, les données nécessaires pour prendre des décisions éclairées. Sincèrement, je crois qu'on a beaucoup à gagner à faire cela. Je me suis entretenu avec des représentants de quelques entreprises qui affirment reproduire des documents inutiles pour les études d'impact et qui pourraient examiner ces enjeux de façon plus stratégique et plus intégrée. Je crois qu'il est possible maintenant d'examiner sérieusement les effets cumulatifs à un niveau supérieur, à un niveau stratégique, et de se servir de la recherche pour améliorer chacun des projets.
    J'ajouterais simplement que l'avantage d'avoir une perspective régionale lorsqu'on examine l'ensemble des applications, c'est qu'on peut cerner une solution, comme l'application de mesures compensatoires de conservation. À l'heure actuelle, parce que nous ne sommes pas certains de pouvoir remplacer ou remettre en état ces écosystèmes avec tout le capital naturel d'origine, nous devons nous prémunir contre cette incertitude et veiller à garder des écosystèmes intacts dans d'autres endroits de la région.
    Monsieur Friesen, concernant les mesures compensatoires de conservation, si vous aviez une possibilité de développement dans un secteur particulier et que votre analyse montrait qu'en raison des conditions du sol ou d'autres facteurs, vous ne pourriez suivre le cheminement prévu par votre modèle de fermeture et de remise en état, serait-ce le genre de site — je crois que le comité aimerait comprendre ce concept, et M. Carlson pourrait peut-être faire des commentaires à ce sujet — où une mesure compensatoire de conservation pourrait s'appliquer? Il y aurait une application; elle serait analysée dans un premier temps et on déciderait, par prudence, que le secteur est trop vulnérable. Diriez-vous, monsieur Friesen, qu'on devrait l'inclure dans l'inventaire des mesures compensatoires de conservation, tant d'un point de vue scientifique que d'un point de vue économique?
    Concernant le concept d'équilibre, l'idée voulant que l'on définisse de façon réfléchie et dans l'intérêt public le rythme de croissance de l'industrie des sables bitumineux et l'endroit où aura lieu cette croissance, l'industrie est tout à fait en faveur d'une approche équilibrée, et il existe une foule d'outils que nous pouvons utiliser. Comme il s'agit d'un défi de gestion régionale, je crois que nous devons utiliser tous les outils dont nous disposons. Nous avons établi dans notre région — et j'en parlais avec Alan avant le début de la réunion, et nous encourageons certainement une plus vaste participation — des mécanismes de gestion environnementale régionale consensuelle et multipartite. À notre avis, il est important que ces mécanismes soient appliqués. Ils nous permettent d'obtenir un équilibre global.
    Je me sens obligé d'admettre qu'il faut faire preuve d'humilité en ce qui a trait à la remise en état des terres, tout en ajoutant que nous menons des recherches dans ce domaine depuis maintenant 40 ans, et que nous les appliquons depuis 30 ans. Tout ce que nous avons fait durant ces 40 années de recherche est du domaine public et peut être consulté, tant par les autres entreprises que par tout autre intervenant qui voudrait travailler avec nous, encore une fois dans l'intérêt d'un équilibre.

  (1625)  

    Merci.
    Merci, monsieur Tonks.
    Monsieur Ouellet.

[Français]

    Monsieur Young, vous avez dit que les sables bitumineux doivent devenir neutres en carbone d'ici 2020. Or, si on arrêtait totalement et dès maintenant d'émettre des gaz à effet de serre, en l'an 2050, on commencerait à ressentir l'effet des gaz qu'on aurait émis auparavant. Il y en aurait donc assurément.
    Or, ce n'est pas ce que nous faisons, puisque nous continuons à en émettre. On continue comme si c'était

[Traduction]

    « business as usual ».

[Français]

    Comment en êtes-vous arrivé à opter pour l'an 2020? Les compagnies vous ont-elles torturé et forcé à mettre cette année?

[Traduction]

    Eh bien, il y a toutes sortes de torture, dont celle d'être dans des chambres d'hôtel et des salles réunion sans fenêtre pendant des jours d'affilée, mais ce n'est probablement pas écrit dans la Convention de Genève.
    Nous avons choisi 2020 d'après les travaux de l'Institut Pembina et d'autres, qui croient qu'en tenant compte de chaque projet, en combinant les réductions de GES sur place, l'efficacité énergétique, les mesures de remplacement des hydrocarbures, le captage et le stockage du carbone et les mesures compensatoires d'achat, les projets de sables bitumineux pourraient, d'un point de vue économique, physique et pratique, devenir neutres en carbone.
    Ce n'est certainement pas un scénario idéal, mais nous croyons qu'il s'agit d'un scénario réaliste et d'un objectif ambitieux. J'aimerais que ce soit 2010, mais je ne crois pas que ce serait réaliste dans l'ordre actuel des choses. Si nous ne parvenons pas à la neutralité en carbone d'ici 2020, l'impact sera inacceptable au niveau mondial. Nous avons donc tenu compte de ce que nous savons de la technologie, de ce que nous savons des outils dont nous disposons, et nous croyons que cet objectif est réalisable. Nous ne voulons pas nous arrêter là, mais nous voulons atteindre cet objectif et aller au-delà pour réaliser des économies. Nous sommes d'avis que les marchés d'échange du carbone, les gains technologiques et les économies que nous croyons pouvoir réaliser grâce à ces technologies rendront cet objectif réalisable.
    L'idéaliste en moi aimerait que ce soit plus tôt; le pragmatique en moi croit que nous devons commencer là. Nous devons établir un objectif clair, et le gouvernement a un rôle très important à jouer pour nous aider à réaliser cet objectif en créant le cadre stratégique qui donnera aux entreprises la certitude qu'elles doivent investir dans ce sens.

[Français]

    La forêt boréale commence déjà à être efficace en compensant pour les rejets de dioxyde de carbone que les compagnies rejettent dans l'atmosphère. Quelle proportion de dioxyde de carbone la forêt boréale pourra-t-elle absorber? Quelle proportion de dioxyde de carbone devrait être absorbée dans le sol par les puits de carbone?
    À votre avis, quelle proportion d'achats de compensation en carbone sera nécessaire? En quelle année pensez-vous que cela doit commencer? Vous donnez une date, mais est-ce que cela aurait dû commencer l'an passé, ou cela devrait-il commencer la semaine prochaine ou dans cinq ans?

  (1630)  

[Traduction]

    Pour commencer, la comptabilité du carbone n'est pas mon champ d'expertise. Nous pourrions certainement trouver des chiffres précis sur les puits et les pourcentages et revenir vous les présenter d'un point de vue technique.
    À mon avis, il faudrait s'employer entre autres à ne pas perdre la capacité de stockage existante de la forêt, là où c'est possible, et investir massivement dans la forêt intacte actuelle en désignant divers secteurs protégés et divers secteurs de conservation pour que nous puissions avant tout réserver notre option. Évidemment, ce ne sera pas toujours possible dans l'empreinte laissée par les sables bitumineux, mais comme nous savons que ce sera un enjeux permanent, il va falloir investir dans la protection, dans le cadre de notre stratégie globale.
    L'une des choses dont nous avons parlé avec les représentants des différentes entreprises pétrolières et différents groupes comme Pembina, c'est aussi d'investir dans la comptabilité du carbone pour pouvoir avoir des réponses plus précises à ce sujet. Je n'ai pas ces réponses précises. Mon collègue voudra peut-être en parler davantage.
    Encore une fois, il est essentiel d'adopter une approche prudente et de préserver le couvert forestier dans le cadre de notre stratégie de développement.
    Tout ce que je peux ajouter, c'est que je n'ai pas ces chiffres sous la main, mais nous avons le rapport de la capital nationale que Mark Anielski a rédigé pour nous. Il a estimé que la quantité totale de carbone stockée dans la foret boréale est de 67 millions de tonnes, ce qui est énorme et compterait pour de nombreuses années d'émissions de GES au Canada. Ce chiffre montre simplement que la foret boréale stocke une quantité énorme de carbone. En veillant à ne pas perdre le carbone stocké dans cette foret, on contribuera à compenser les émissions de gaz à effet de serre produites par les sables bitumineux, mais je n'ai pas de chiffres précis concernant les proportions.

[Français]

    En ne fournissant pas de chiffres précis, je trouve que vous abordez cette question avec un esprit de poète.
    Le propre de la forêt boréale est de pousser très lentement. La quantité de carbone est déjà dans les arbres. Le nouveau carbone émis par le processus d'extraction des sables bitumineux est absorbé par les nouvelles pousses d'arbres. Or, les arbres ne poussent que trois mois par année. Si un arbre pousse de x cm, il absorbera une quantité x de carbone, par rapport à un arbre de quelque 20 pieds de hauteur. Par conséquent, une forêt boréale ne peut presque pas absorber de nouveau carbone.

[Traduction]

    Il y a deux éléments. D'une part, les quantités que la forêt stocke à l'heure actuelle et, d'autre part, les quantités stockées par l'écosystème. Ces écosystèmes boréaux ont accumulé du carbone pendant des milliers d'années, en particulier les systèmes de tourbière. Une chose importante que les échanges de carbone permettront de faire, du moins je l'espère, c'est de veiller à ce que ces écosystèmes naturels, ces puits, ne soient pas perdus; si les échanges de carbone nous permettent d'offrir des incitatifs pour conserver ces secteurs, ces quantités de carbone seront maintenues. Ce n'est pas seulement le carbone qui est séquestré chaque année; il faut aussi faire en sorte que le carbone qui a été emmagasiné pendant des milliers d'années n'est pas perdu à cause de l'utilisation des terres.

[Français]

    Est-ce qu'il me reste du temps?

[Traduction]

    Vous avez une minute.

[Français]

    Votre document mentionne des mesures incitatives qui incluent un système d'échange de droits d'émission de carbone. À part les échanges de droits d'émission, quelles sont les mesures incitatives que le gouvernement fédéral devrait mettre sur pied?

  (1635)  

[Traduction]

    Il faut, entre autres, reconnaître le besoin de mener des recherches et reconnaître ce besoin dans le système d'imposition ou de subvention — les entreprises conjointes pouvant être mises sur pied de sorte que, lorsqu'une entreprise entreprend des travaux, ces travaux profitent à l'ensemble du secteur. On peut s'attaquer aux technologies et à des innovations technologiques particulières et reconnaître les coûts que comportent ces choses.
    À l'heure actuelle, beaucoup d'incitatifs visent à augmenter le volume et le rythme des dépenses d'équipement. Les allègements fiscaux et les redevances de cette nature pourraient être davantage liés aux types d'investissements qui permettront d'atténuer l'empreinte globale et de conserver le capital naturel. La recherche et l'innovation technologique devraient être reconnues dans le système comme des valeurs de base et comme des investissements profitant au bien public.
    En outre, je crois qu'il faut absolument clarifier ce à quoi peut ressembler un système d'échange, clarifier les mesures compensatoires possibles et présenter une chose dans laquelle les gens peuvent vraiment investir.
    Enfin, et c'est là un aspect que je connais mieux que les mesures concrètes de remise en état, les sommes d'argent investies dans la remise en état sont énormes, et dans bien des cas, cet investissement reste le même alors que la remise en état des terrains se poursuit. Il sera important de reconnaître que les investissements nécessaires à la remise en état constituent un bien public, pour permettre aux entreprises de les augmenter et d'obtenir la reconnaissance dont elles ont besoin dans le cadre de notre système fiscal pour faire en sorte que les travaux sont bien faits.
    En contrepartie, le système doit être basé sur le rendement, et nous devons finalement veiller à ce que les remises en état soient récompensées de façon adéquate.

[Français]

    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci.
    Madame Bell.
    Je vous remercie tous de ces exposés et d'avoir accepté de témoigner devant le comité.
    J'aimerais poursuivre dans le même ordre d'idées. M. Friesen, vous avez dit que la remise en état des terrains était une condition préalable au développement et qu'on devrait éviter de développer si l'on ne peut pas remettre en état. Je me réjouis de vous l'entendre dire. Quand nous avons visité le projet de sables bitumineux, nous avons survolé un terrain remis en état, et nous en avons par la suite vu un alors que nous étions sur la route. Même enneigées, ces terres ont l'air plutôt bien. Il est difficile de les distinguer du reste du paysage.
    J'ai quelques questions au sujet de ce qui trouve dans le sol, parce qu'il y a des bassins de décantation et de stockage, des matières ont été injectées de détersifs et de produits chimiques, de produits qui permettent d'extraire le pétrole, matières qui se retrouvent ensuite dans le sol. Je sais qu'il y a eu décantation, mais j'aimerais savoir combien des substances se trouvent dans le sol.
    Vous affirmez faire de la recherche et y consacrer 500 000 $ environ — vous avez bien parlé d'un demi-million de dollars. Est-ce suffisant? Sur combien de temps s'étale cet investissement? Pendant combien de temps cet argent est-il dépensé? Est-ce un demi-million par année ou pour tout le projet? Que reste-t-il dans le sol? Je m'inquiète de ce qui atteint les plantes, la végétation qui y pousse.
    Mon autre question s'adresse à M. Young. Vous avez utilisé le mot « disparaître », ce qui signifie que tout est complètement détruit. Donc, si quelque chose est entièrement détruit, si la faune et la flore ne peuvent ou ne veulent pas se rétablir dans ce secteur parce qu'il a tellement changé, car il a peut-être l'air inchangé, mais si quelque chose n'y pousse plus en raison des changements survenus dans le sol — c'était auparavant une tourbière ou une terre humide, ce qu'elle n'est plus maintenant en raison des changements survenus dans le sol —, peut-on vraiment parler d'une remise en état? Comme je l'ai dit, en surface tout a l'air bien, mais aurons-nous des surprises plus tard?
    Mon autre question — parce que je n'ai jamais suffisamment de temps pour toutes les poser — est de savoir qui est responsable en fin de compte? Je sais que les terres sont rendues au gouvernement après que vous avez satisfait aux exigences de remise en état et que vous avez assuré une surveillance pendant un certain temps. Si, après plusieurs années, nous découvrons que les animaux et la végétation n'y sont plus, n'y demeurent pas ou que les choses ne poussent pas comme elles le devraient, qui en est responsable?
    Enfin, pour ce qui est du piégeage du carbone — j'ai lu récemment un article, mais je ne me souviens plus de la source. On a découvert que le carbone qui était réinjecté dans le sol accélérait la croissance de la végétation, ce qui est une bonne chose je suppose, mais on a aussi découvert qu'il accroissait la concentration de poison dans le sumac grimpant, c'est-à-dire l'herbe à puce. Quels sont les effets sur la végétation?
    Les fonds affectés à la recherche sont-ils suffisants? Exécute-t-on des travaux permanents et...? J'ai posé beaucoup de questions. Je vais m'arrêter là.

  (1640)  

    Voilà d'excellentes questions, et fort bien posées. Je vous en suis reconnaissant et je vais tenter d'être à la hauteur.
    Tout d'abord, en ce qui concerne l'ampleur ou la quantité des recherches, Syncrude y consacre 1 million et demi de dollars cette année-ci. Collectivement, grâce aux autres entreprises qui contribuent l'équivalent ou plus des fonds versés par le CRSNG, l'investissement en recherche sur la remise en état des terrains dont ont été extraits les sables bitumineux est actuellement de 5 millions de dollars par année environ.
    La nature des travaux effectués correspond beaucoup aux préoccupations dont vous avez parlé. La qualité du sol est-elle durable et, plus particulièrement, les recouvrements de sol sont-ils sans danger? Y aura-t-il des changements dans l'écopaysage qui seront insatisfaisants, en termes de sécurité de la population et des animaux?
    Nous abordons cette recherche à partir d'un bassin hydrographique où ont été installés des instruments d'observation. Le matériau de remise en état— la couche superficielle —, quand nous le mettons en place, est naturel. Nous le récoltons au début des travaux d'exploitation minière et le déposons sur les terrains remis en état. La question à se poser devient alors de savoir s'il y a risque de changement? Le premier jour, le matériau est en fait sécuritaire; nous le savons.
    Le concept d'observation d'un bassin hydrographique instrumenté consiste à surveiller une parcelle de terre remise en état suffisamment grande pour nous permettre d'observer la circulation des eaux — les eaux de surface, les eaux souterraines — et, par conséquent, les changements qui surviennent dans l'écopaysage comme les sels ou d'éventuels contaminants. On vise ainsi à confirmer que nos pratiques courantes protègent la couche surperficielle. Tout dépend — vous l'avez fort bien exprimé — d'un sol qui au départ donnait des résultats satisfaisants. Si les procédés utilisés sont acceptables, alors le résultat à long terme devrait l'être aussi.
    C'est effectivement une question à très long terme, de sorte que la rétrocession des terres à l'État, le moment choisi pour le faire et l'intégrité des travaux sont importants. Nous croyons qu'il faudra beaucoup de temps. Nous estimons que nous devrons documenter l'évolution des écopaysages pendant de nombreuses décennies — aux fins de l'argument, pendant 50 à 100 ans — avant d'avoir la preuve que la situation est acceptable.
    Même là, ce ne sera peut-être pas une rétrocession complète; le transfert pourrait être appuyé par des fonds permanents ou une surveillance continue. Comme je l'ai dit, nous avons accumulé 30 années d'expérience environ. Quand je parle de 50 à 100 ans environ, ce que je dis en fait, c'est qu'il faudra peut-être 20 autres années, ou 50 à 70 autres années, avant de pouvoir prouver sans équivoque aux Albertains et aux Canadiens qu'une rétrocession à l'État est un risque acceptable.

  (1645)  

    Votre question au sujet de la disparition d'un endroit donné est, selon moi, de savoir si, puisque nous ne sommes pas sûrs que nous sommes capables de pouvoir le faire vraiment, on peut parler de remise en état. Parfois, il faut à mon avis accepter que l'écopaysage sera altéré, que, comme vous l'avez dit, il ne retrouvera peut-être pas son état d'origine. Par contre, il devrait être sécuritaire et bien fonctionner.
    Voilà qui met vraiment en relief la nécessité de planifier de manière à éviter les secteurs où il n'existe tout simplement pas de substitut pour certains habitats. Nous attirons l'attention sur le caribou des bois parce que sa population baisse sensiblement dans de nombreuses régions du pays et parce que toutes les études scientifiques que j'ai vues — et Matt peut vous en parler avec plus d'autorité — laissent croire qu'il ne se rétablit tout simplement pas sur des terres altérées, qu'il s'agisse d'exploitation forestière ou d'extraction de sables bitumineux. Il faut alors décider avec la plus grande prudence des endroits où nous allons mener l'exploitation et de la façon dont nous allons le faire, parce que certaines choses sont tout simplement irremplaçables.
    Pour ce faire, il est nécessaire de prendre un peu de recul et de faire un examen stratégique des fonctions assurées par l'écosystème et de leur valeur au niveau des habitats qui existent encore, pendant que nous avons encore le choix, et de faire des choix qui correspondent à l'intérêt de la société à long terme. Bien que nous puissions peut-être réaménager certains éléments de l'écopaysage pour en faire un endroit sûr, nous devrons tout simplement nous entendre sur le fait que nous ne pouvons pas remettre en état certains autres et que nous n'essaierons pas. Si nous décidons de faire un pareil sacrifice, il faudrait le faire en s'appuyant sur toutes les informations qui existent et en faisant le débat public qui s'impose.
    À nouveau, je vous exhorte à avoir une vue plus générale des valeurs et à faire preuve d'une certaine humilité, en reconmnaissant que certaines valeurs sont irremplaçables.
    Vous avez parlé de l'herbe à puce. Je n'en avais pas entendu parler, mais en un certain sens, cela ne m'étonne pas. Les études écologiques nous donnent toujours de pareils résultats bizarres. Nous ne connaissons tout simplement pas suffisamment les écosystèmes pour savoir comment ils vont réagir à l'activité humaine, surtout à des activités aussi intenses que l'exploitation des sables bitumineux.
    Cette incertitude, pour ma part en tout cas, souligne simplement le besoin d'adopter une approche fondée sur la plus grande prudence, d'avouer que nous ignorons ce que sera le résultat final, et la nécessité de prendre des mesures compensatoires de conservation. Donc, nous avons mis de côté certains secteurs qui demeureront intacts de manière à conserver le capital naturel de la région.
    Je vous remercie.
    Madame Bell, vous avez épuisé le temps qui vous était alloué.
    Monsieur Paradis.

[Français]

    Tout d'abord, en ce qui a trait à l'Initiative boréale canadienne, vous excuserez mon ignorance: je n'en avais jamais entendu parler avant aujourd'hui.
    J'aimerais connaître l'historique de votre organisme, à savoir qui vous êtes, comment vous obtenez votre financement, et ainsi de suite.

[Traduction]

    L'initiative a été officiellement lancée en 2003, mais elle s'appuyait sur plusieurs années de recherches visant à faire l'évaluation globale des écosystèmes forestiers intacts. Il a donc fallu plusieurs années avant qu'elle voit le jour.
    Le financement vient de fondations américaines et canadiennes. Les gouvernements et les entreprises ne subventionnent pas nos travaux. Ce sont toutes des organisations caritatives. À nouveau, nous avons un comité consultatif qui s'appuie sur des ONG, des entreprises et des premières nations... mais nous nous sommes efforcés de maintenir un équilibre dans notre approche. Nous comptons quelque 14 employés ici, à Ottawa, et nous avons des partenariats dans pas mal toutes les régions du pays. Nous finançons de la recherche, des études sur l'utilisation classique des terres, nous finançons des travaux de développement communautaire, nous finançons des études scientifiques par l'intermédiaire de l'University of Alberta. Nous tentons d'adopter une approche holistique de manière à cerner les solutions et à rassembler les gens en faveur d'une meilleure politique, d'une meilleure technologie, de meilleures connaissances scientifiques.
    J'ignore si cela répond à vos questions, mais nous...

  (1650)  

[Français]

    Je cherche simplement à vous situer plus exactement.
     Les organismes qui vous soutiennent sont-ils du genre Sierra Club, World Wildlife Fund ou autres organismes semblables?

[Traduction]

    Oui. Notre comité consultatif regroupe le Fonds mondial pour la nature, représenté par Monte Hummel, Canards Illimités Canada, représenté par Gary Stewart, qui a récemment pris sa retraite — j'ignore si vous le saviez. En font aussi partie la Société pour la nature et les parcs du Canada, ForestEthics, davantage axé sur le marché, la Société canadienne pour la conservation de la nature, et quelques ONG s'y ajouteront. Nous avons adopté très délibérément comme approche de ne pas nous limiter à certains des groupes les plus conservateurs comme Canards Illimités et le Fonds mondial, et de rassembler tous les organismes, parce que nous tenons vraiment, à mesure que nous proposons des solutions, offrir la solution la plus rassembleuse.
    Vous me direz que c'est un mélange plutôt disparate, mais je crois qu'il est efficace et qu'il représente une approche typiquement canadienne.

[Français]

    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse davantage à vous, monsieur Young.
    Vous avez dit que la neutralité du carbone pourrait être atteinte d'ici 2020, que vous visiez cet objectif avec optimisme, mais que vous demeuriez toutefois réaliste. J'aimerais savoir quel genre de défis techniques vont devoir être surmontés pour arriver à cette fin.
    Par ailleurs, d'après ce que j'ai compris — et corrigez-moi si je fais erreur —, vous êtes d'avis qu'au niveau international, il serait difficile d'atteindre un tel objectif avant 2020.

[Traduction]

    Tel que je conçois l'objectif — et à nouveau, je répète qu'il s'agit d'un domaine dans lequel nous appuyons l'excellent travail fait par des groupes comme Pembina, le Fonds mondial et d'autres qui ont fait une mûre réflexion à un niveau beaucoup plus technique —, nous nous fions à l'analyse de nature technique qu'ils ont faite pour affirmer que c'est possible. Ce ne sera pas qu'une seule solution. Il faudra miser sur l'efficacité de la consommation d'énergie in situ, sur des mesures visant à réduire la consommation de combustible carboné, une combinaison de techniques de piégeage et de stockage qui sont encore loin d'être parfaites.
    Il reste encore beaucoup à faire pour savoir comment aller de l'avant avec ces travaux. Comme certains d'entre vous qui suivent l'actualité le savent probablement, il est beaucoup plus question actuellement des pourparlers sur le gazoduc de transport de CO2 sur la scène publique. Des sujets comme ceux-là feront certes partie de la solution, mais les mécanismes de compensation également. C'est toute cette combinaison, y compris un engagement solide à atteindre la neutralité d'ici 2020, que nous estimons possible.
    Je répète que je me fie à un niveau d'analyse d'experts qui va bien au-delà de mon niveau personnel, mais le fait que ces partenaires sont bien établis nous rassure. Le travail envisagé est ambitieux, mais il est incontournable.
    Donc, vous m'excuserez si je me suis mal exprimé, mais je crois que c'est possible. Tant d'un point de vue économique que d'un point de vue technologique, il sera possible d'y arriver. Il faut simplement en prendre l'engagement et travailler à sa réalisation.

[Français]

    On a abordé les amendements de terrain, que ce soit en matière d'exploitation minière ou dans d'autres domaines. On a aussi parlé de sites où l'on fait du drainage par gravité au moyen de vapeur. Vous avez dit à cet égard qu'il y aurait des conséquences sur le sol.
    Monsieur Friesen, j'aimerais connaître votre opinion sur cette question. Pourriez-vous nous donner plus de détails à ce sujet? Quelles sont les implications?

[Traduction]

    Comme vous le faites remarquer, il existe deux méthodes permettant de récupérer le bitume dans l'industrie des sables bitumineux. L'une consiste à faire de l'extraction minière, soit de l'extraire des énormes mines à ciel ouvert, et l'autre, à récupérer le bitume in situ.
    Il existe plusieurs procédés de récupération in situ, mais pour ce qui est de l'altération du sol et des forêts, leur effet est analogue. Ils exigent l'exécution de travaux dans de larges couloirs pour y installer des canalisations et des lignes de transport d'électricité qui aliment un réseau distribué de chambres de récupération. Il faut creuser plusieurs puits à un site et plusieurs à un autre, et encore plusieurs à un autre. L'effet global, c'est que pour relier tous ces sites à un point central de collecte, il faut effectuer des travaux de défrichement et de construction dans de nombreux couloirs. Mes amis du milieu de la conservation insisteraient par conséquent sur la fragmentation des forêts associée à la récupération in situ.
    Ces couloirs exigent eux aussi de la remise en état comme point de départ au rétablissement de la diversité de la forêt. La superficie des terres affectées par la récupération in situ est plus faible, en termes de pourcentage, mais elle est probablement équivalente, au total. Dans un secteur particulier, seul un pourcentage des terres est affecté, mais la conséquence la plus importante est la fragmentation de l'habitat, du point de vue de la faune et de la flore.

  (1655)  

    Je reprends les propos de M. Friesen selon lequel l'extraction minière devrait toucher 3 000 kilomètres carrés, alors que le SAGD, soit le drainage par gravité au moyen de vapeur, pourrait en affecter presque 140 000. Ce genre d'exploitation pourrait affecter une grande superficie. Les travaux visant à permettre l'établissement de profils sismiques, à installer des canalisations, à construire des routes et des puits sont beaucoup plus intensifs dans l'exploitation par SAGD que dans l'extraction pétrolière classique, de sorte que l'on peut certes craindre un changement important de l'écosystème.
    Il existe des pratiques exemplaires visant à réduire l'intensité de la perturbation. Ainsi, ce genre d'exploitation exige de faire beaucoup de profils sismiques. Si les tracés sont très étroits, comme d'un mètre et demi de largeur, il est alors beaucoup plus probable qu'on pourra remettre en état la forêt en temps et lieu. Il faut que les pétrolières recourent à ces pratiques exemplaires pour aider à minimiser les effets de leur exploitation.

[Français]

     Monsieur Friesen, d'après ce que j'ai compris lors de la visite du site de Syncrude Canada Limited, ceux qui décident d'exploiter un nouveau site doivent obtenir une certification provinciale et s'engager à remettre les lieux en état. J'imagine qu'il y a des balises claires à cet effet. L'exposé de M. Young donnait à penser que le mode de fonctionnement pouvait varier d'une compagnie à l'autre.
    Est-ce qu'un partenariat existe dans le domaine de la recherche? Qu'avez-vous à dire à ce sujet?

[Traduction]

    Oui, nous menons notre recherche en collaboration. Les entreprises dialoguent beaucoup entre elles et certaines ont peut-être des domaines sur lesquels elles insistent. Grâce au dialogue, nous nous efforçons d'avoir un programme global logique et suffisamment complet. Comme je l'ai souligné plusieurs fois, de par la politique de l'entreprise, tous les travaux de nature environnementale que nous faisons, particulièrement en ce qui concerne la remise en état, font partie du domaine public, tant en raison de la manière dont ils sont exécutés, en collaboration avec les universités, que par les efforts de diffusion.
    L'augmentation du nombre de participants dans l'industrie nous a poussés à rendre le processus de dialogue encore plus formel, et cela se déroule fort bien. Donc, nous avons conclu une entente avec sept entreprises qui acceptent d'exécuter et de financer des travaux de recherche de manière intégrée.

  (1700)  

[Français]

    Merci.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Monsieur St. Amand.
    Merci, monsieur le président.
    J'aurais une brève observation à faire, après quoi j'aurai une question à poser.
    Comme vous le savez, nous avons eu l'occasion de visiter l'installation à Fort McMurray. C'est une exploitation monstre, et j'utilise le mot à bon escient. Donc, l'installation est gigantesque. J'irais jusqu'à dire qu'elle est presque sans précédent.
    En tant que profane, naturellement, j'ai l'impression que l'exploitation représente une assez grande attaque de l'environnement. La topographie des lieux, même à de nombreux mètres en profondeur, est plutôt invasive. J'ai été frappé par l'idée que les efforts visant à remettre en état les terres sont diligents, nobles, réfléchis et ainsi de suite, mais qu'en fin de compte, nous ignorons toujours en réalité quels sont les effets ou les conséquences à long terme sur l'environnement. Est-ce bien la conclusion finale, qu'il n'y a pas de façon réaliste de discerner les impacts à long terme?
    Il conviendrait de faire remarquer, je crois, que moi-même, en tant que membre de l'industrie, et l'Initiative boréale canadienne en tant qu'organisme de collaboration rassemblant plusieurs points de vue, nous sommes venus ici pour souligner l'importance des connaissances scientifiques.
    Nous avons entendu plusieurs points de vue différents au sujet de l'état actuel, de la qualité actuelle de ces connaissances, mais tous s'entendent sur leur utilité, et nous croyons, en tant que porte-parole de l'industrie, que nous avons acquis beaucoup de connaissances grâce aux sérieux efforts déployés pendant de nombreuses années.
    La prévision, prédire l'avenir, demeure un défi. Je vais simplement souligner, par rapport aux aspects soulevés par Mme Bell, que le plus grand défi et la chose sur laquelle il faut le plus insister en remise en état des terres est de protéger les couches de surface des altérations importantes. La terre épandue en surface est choisie en s'appuyant avec le plus grand soin sur beaucoup de connaissances scientifiques. Il faut insister pour que ces matières, sources de la capacité biologique et capsules du passé, soient protégées. Nous le faisons en surveillant l'évolution des écopaysages, particulièrement la circulation des eaux.
    En résumé, j'estime qu'il est possible de comprendre suffisamment ce qui se passe dans un paysage pour pouvoir affirmer avec confiance que le résultat sera acceptable. J'ai parlé au nom de mon entreprise quand j'ai dit que, si nous n'estimions pas pouvoir le faire, nous ne devrions pas pouvoir y faire de l'exploitation.
    Je crois sur parole Syncrude et son engagement. Je crois que cette entreprise fait sincèrement de son mieux, mais il est important de rappeler, comme vous l'avez fait, que l'ampleur des activités est réellement sans précédent. De nombreux intervenants sont à l'oeuvre simultanément dans un environnement qu'aucun de nous ne connaît. L'hydrologie, en elle-même, est extraordinairement complexe.
    Je mentionne à ce propos que Canards Illimités a mené récemment des travaux assez approfondis sur l'hydrologie qui donnent des résultats très intéressants et très surprenants, qui seront déterminants pour la viabilité à long terme des écosystèmes. Il s'agit d'une expérience d.envergure planétaire et nous devons la traiter ainsi.
    La conjugaison de la complexité de cette problématique et de l'accélération des changements climatiques, comme on l'a vu, nous permet de faire des expériences avec des plantes, et parfois des animaux, dans un milieu climatique qui change beaucoup, ce qui est vraiment crucial lorsqu'on tente de faire de nouvelles communautés de plantes. Quels seront les paramètres climatiques dans 50 ans? Nous ne le savons pas. Les hypothèses seront constamment remises en doute, constamment démenties, et c'est pour ça que je dirais que la véritable réponse à votre question, à mon point de vue est non, nous ne savons pas ce qui va se passer.
    Pouvons-nous gérer cela? La seule façon d'y arriver, c'est d'être d'emblée très prudents et très humbles. Cela suppose donc que l'obligation de rendre des comptes fasse partie intégrante du système. Ainsi, si un problème se pose, quelqu'un va l'apprendre en temps opportun, nous saurons qui a la responsabilité de le corriger et à quel moment nous avons atteint des seuils critiques, qu'il s'agisse de produits toxiques ou de la perte de l'habitat de certaines espèces, par exemple.
    Il nous faut des structures de responsabilité très bien définies. Il nous faut des mécanismes de rétroaction très clairs pour connaître les problèmes de santé dans la population et les problèmes d'ordre écologique sur le terrain. Il nous faut aussi des seuils concrets et assortis de sanctions et de récompenses financières, ainsi que de mécanismes réglementaires, car si nous ne prenons pas cela au sérieux, nous connaîtrons de graves problèmes plus tard.
    Une expérience est en cours. Nous devons la considérer traiter comme une expérience d'importance vitale, une expérience très dangereuse à certains points de vue, mais aussi comme une formidable occasion d'essayer ce faire ce qu'il faut, avec les énormes ressources financières dont nous disposons.

  (1705)  

    Je sais que je me répète, mais je souligne à nouveau qu'en raison des incertitudes... J'espère bien que M. Friesen a raison et que la remise en état des terres sera couronnée de succès, mais je pense que pour le moment, il ne faut y voir qu'une expérience.
    La première règle quand on modifie un tout, c'est de ne pas en modifier toutes les parties. Il faut laisser intacts certains secteurs. Si nous prévoyons perturber profondément la région des sables bitumineux, prenons soin de ne pas changer l'écologie de certains secteurs pour nous constituer une réserve de capital naturel. À mon avis, c'est l'approche de précaution qu'il faut suivre.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous et merci pour la réponse.

[Français]

    Madame DeBellefeuille, avez-vous une question à poser?
    Il est dommage que M. Paradis ne soit pas présent, parce que la question qu'il vous a posée plus tôt a permis qu'on dévie d'une réalité qui nous a été exposée.
    Quand nous sommes allés tous ensemble visiter un site d'exploitation de sables bitumineux à Fort McMurray, une dame de Shell Canada nous a dit que sa compagnie était prête et que la technologie pour le captage du CO2 était disponible. Le lendemain, M. Seeley, également de la compagnie Shell, a dit devant ce comité que c'était une question d'argent et non d'innovation, et que sa compagnie était prête à commencer.
    Je voulais simplement rétablir ces faits parce qu'on nous a donné l'impression contraire, à savoir qu'il fallait encore faire de la recherche parce que tout n'était pas prêt. Au moins une compagnie est prête.
    Ma question s'adresse à M. Friesen.
    Étant directeur de la compagnie, vous devez connaître le rapport intitulé Canadian Upstream Oil and Gas Industry Financial Performance -- Outlook 2006 - 2008, réalisé à l'intention de l'organisme Canadian Association of Petroleum Producers.
    Êtes-vous le directeur de la compagnie, ou simplement de la bonification des terres?

  (1710)  

[Traduction]

    Je suis le directeur de la remise en état des terres. Je vous prie de m'excuser, mais je ne connais pas le document que vous montrez. Je crois que, lors de votre passage à Fort McMurray, vous avez rencontré mon superviseur, M. Don Thompson. Cela relève sans doute de ses responsabilités, non des miennes.

[Français]

    D'accord.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Oui. Je rappelle à M. Ouellet que, le 12 décembre, nous consacrerons l'intégralité de notre séance à des témoins qui nous entretiendront expressément de la question de la séquestration du carbone.
    La parole est maintenant à M. Harris.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, messieurs, de votre exposé. J'apprécie les réponses que vous avez données à des questions difficiles.
    Pour nous, Canadiens, la forêt boréale constitue un trésor national. Bien que deux ou trois autres pays aient des forêts aussi étendues, il est bien certain que nous préférons la nôtre.
    J'aimerais connaître le pourcentage de la forêt boréale qui sera touché par le projet des sables bitumineux. Quel est le pourcentage de la forêt qui sera perturbé par ces activités?
    En outre, est-ce que cette forêt subira des dommages permanents, irréversibles, qu'on ne pourra réparer? Qu'en est-il des orignaux et des caribous — est-ce qu'ils vont disparaître, à certains endroits, ou est-ce qu'ils vont se déplacer pendant un certain temps?
    Enfin, est-ce qu'il est réaliste de s'attendre à voir un jour des bisons en train de brouter sur les terres remises en état, ou est-ce seulement un rêve fugace qui nous donne bonne conscience? Est-ce réaliste de s'attendre à cela?
    Veuillez m'excuser, mais je ne connais pas le pourcentage exact de la région boréale visée par l'exploitation des sables bitumineux. C'est une grande région. L'exploitation des sables bitumineux va perturber une grande superficie mais, fort heureusement, d'autres secteurs pourraient demeurer intacts si nous planifions bien. Voilà, au fond, l'occasion que présente la forêt boréale, car elle est en grande partie encore inexploitée. Si nous adoptons une vue d'ensemble, nous pourrons décider d'exploiter tel secteur et de préserver l'intégrité écologique, le capital naturel, de tel autre.
    Donc, je pense qu'il faut suivre cette approche. Selon notre cadre boréal, pour maintenir l'intégrité écologique, culturelle et socio-économique de la région, nous devrions préserver au moins la moitié de cette région et mettre en oeuvre des pratiques de gestion durable dans l'autre moitié. La forêt boréale est l'un des derniers endroits où nous pouvons faire quelque chose comme cela.
    Quant à l'impact des activités sur le caribou, par exemple, nous ne savons pas s'il reviendra. Si cela arrive, cela va demander beaucoup de temps. Rien n'indique, à ce jour, que le caribou des bois va revenir dans un secteur qui a été perturbé. Ce fait met de nouveau en relief la nécessité de réserver de grandes superficies équivalentes pour préserver le caribou si nous voulons exploiter la zone des sables bitumineux. Il y a de bonnes raisons économiques de le faire.
    Est-ce que quelqu'un a une idée de la proportion de la forêt boréale qui sera perturbée par l'exploitation des sables bitumineux, dans 20 ans?

  (1715)  

    D'après le chiffres que j'ai vus, les mines proprement dites s'étendront à terme sur environ 3 000 kilomètres carrés. Ce sont les projections actuelles. Ensuite, je crois, il y aura 149 000 kilomètres carrés qui s'ajouteront à cela.
    Est-ce exact?
    Je pense que l'étendue des gisements de sable bitumineux sera de 149 000 kilomètres carrés en tout. Je ne sais pas ce que cela représente en pourcentage du total de la région boréale.
    Je vais certainement retrouver ces chiffres et vous les communiquer.
    Je crois qu'il est important de voir dans la forêt boréale une grande ressource nationale pour déterminer les zones à protéger. Mais il importe aussi d'évaluer sur place ce qui va se produire dans les collectivités. Nous planifions en fonction des répercussions possibles pour les collectivités et de valeurs écologiques irremplaçables, comme l'habitat du caribou des bois et d'autres.
    Nous ne voulons pas que les gens perdent au change, même si cela va se produire dans certains cas. Nous devons également tenir compte de l'empreinte de la forêt et de sa valeur stratégique pour la santé écologique et économique du milieu, et réfléchir soigneusement aux moyens de mettre cette ressource en valeur. Puis, nous devons prendre en considération les facteurs de compensation. Il reste qu'il faut tenir compte des deux aspects de la question.
    Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Friesen.
    Je me suis dit que je pouvais répondre à quelques autres éléments de votre question, monsieur Harris. Je souscris, c'est certain, au concept de vision d'ensemble et d'équilibre de tous les éléments. Je reconnais le fait que la forêt boréale est un trésor naturel et que les sables bitumineux sont un trésor économique national. Je suis en faveur de l'adoption d'une vision d'ensemble pour trouver le juste équilibre.
    En réponse à votre question sur les bisons, à savoir s'il est réaliste de s'attendre à voir des troupeaux de grands ongulés broutant sur des terres remises en état, je dirais que, sans l'ombre d'un doute, tout ce que j'ai vu me pousse à répondre par l'affirmative. L'initiative visant les bisons qu'a prise Syncrude comportait deux éléments très différents. L'un d'eux concernait la recherche. Encore une fois, je reviens à cette question de la sécurité des terres remises en état. Nous avons fait brouter des animaux dans les pâturages et nous avons suivi la santé de ces animaux de très près pour vérifier notamment l'accumulation de tout produit. Il y avait donc, incontestablement, un volet de recherche mais, en outre, nous aidons la Première nation de Fort McKay à étudier, sans idées préconçues, les avantages éventuels, la valeur potentielle de ces terres remises en état pour cette communauté. Le troupeau de bisons pourrait fort bien donner lieu à une activité commerciale d'élevage, mais nous n'avons pas d'idées préconçues. Il pourrait susciter une possibilité d'écotourisme ou il permettre d'offrir du gibier en abondance.
    Donc, en gardant l'esprit ouvert à tout, nous travaillons avec la communauté sur toute une gamme de possibilités. Je porte aujourd'hui une épinglette qui représente un bison.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Harris.
    Nous allons nous arrêter là pour aujourd'hui. Je vous remercie de vos exposés et de vos réponses à nos questions. Cette discussion devient de plus en plus intéressante, au fur et à mesure que le comité obtient davantage d'informations et tente de soupeser les divers témoignages.
    Avez-vous une question pour les témoins, madame DeBellefeuille?

[Français]

    Non, elle s'adresse davantage à vous, monsieur le président.

[Traduction]

    Alors, je crois que je vais donner congé aux témoins d'abord. Merci.
    Je vous remercie beaucoup à nouveau de votre présence et je vous autorise à partir; nous allons peut-être prendre quelques minutes pour parler des travaux du comité. Merci.
    Madame DeBellefeuille.

  (1720)  

[Français]

    Plus tôt, M. Ouellet vous a montré un document dans lequel divers scénarios étaient abordés. Ils portent sur les revenus, les impôts et plusieurs autres sujets associés à la question.
    Il y a des tableaux que j'arrive difficilement à comprendre. J'ai parlé avec l'analyste du comité. Je voudrais, si possible, obtenir ce document en français. On pourrait en faire la demande à l'Association canadienne des producteurs pétroliers. Peut-être notre greffier pourrait-il s'en charger. C'est un document assez intéressant. On y dit entre autres qu'au cours des trois prochaines années, les impôts vont décroître, tout comme les redevances. J'ai obtenu quelques explications, mais j'aurais aimé que nous ayons le document en main, de façon à mieux le comprendre et à pouvoir poser des questions à notre analyste.

[Traduction]

    Je suis persuadé que nous pourrions intervenir à ce sujet. Je ne crois pas que ce document ait été déposé auprès comité. Donc, ce n'est pas à nous d'agir, mais je suis sûr, à en juger par la coopération que nous avons reçue de, est-ce bien l'ACPP, l'Association canadienne des producteurs pétroliers...? Oui, elle nous a bien aidés jusqu'à maintenant. Voulez-vous bien soulever cette question de façon à ce que le greffier puisse en prendre note, et je lui demanderai de communiquer avec l'ACPP afin de voir si nous pouvons obtenir une version pour vous ou si nous pouvons faire traduire ce document pour vous.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    D'accord. Je connais la réponse. Cela vient d'une des compagnies membres de l'Association. Il s'agit donc d'un exposé fait par une des compagnies, mais nous la connaissons. Je pense bien qu'elle sera disposée à vous rendre service.
    Nous allons voir ce que nous pouvons faire. Merci de votre demande.
    S'il n'y a rien d'autre, nous allons nous arrêter là pour aujourd'hui. Merci beaucoup encore une fois.