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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 022 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 7 novembre 2006

[Enregistrement électronique]

  (0905)  

[Français]

    J'aimerais vous souhaiter la bienvenue. Comme vous le savez tous, je m'appelle Yvon Godin et je suis le deuxième vice-président du Comité permanent des langues officielles.
     C'est la deuxième province que nous visitons. Hier, nous avons visité Terre-Neuve; nous sommes allés à St. John's, Terre-Neuve. C'est la première fois, au cours de ses 25 années d'existence, que le Comité permanent des langues officielles voyage au pays pour rencontrer les citoyens directement dans les provinces. On se demande peut-être pourquoi nous n'allons pas plutôt à l'Île-du-Prince-Édouard et en Nouvelle-Écosse pour visiter les gens directement dans leur province. Comme vous pouvez le constater, le comité existe depuis 25 ans et il n'a jamais voyagé. Mettons les cartes sur table tout de suite : ça n'a même pas été facile de se rendre à Moncton. Nous étions censés voyager l'an dernier, mais à cause des élections, cela a été annulé.
     Notre comité est formé de députés de tous les partis politiques. Comme vous pouvez le voir, le gouvernement est représenté par Sylvie Boucher, Pierre Lemieux et Daniel Petit, l'opposition officielle est représentée par Jean-Claude D'Amours et Raymond Simard, et Guy André représente le Bloc québécois.
     Ce matin, nous commencerons par l'Île-du-Prince-Édouard. Le but de ce voyage était d'aller dans les régions. Cela permettait de rencontrer des organismes qui, bien souvent, n'ont pas la chance de venir à Ottawa. Toutefois, ce n'était pas l'unique raison. Cela nous donnait aussi la chance de faire certaines vérifications. Par exemple, le Plan d’action pour les langues officielles fonctionne-t-il dans la région? Les citoyens ont-ils des questions à poser? Ont-ils des suggestions à faire au gouvernement? À partir de là, nous rédigerons un rapport et nous étudierons aussi le Plan d’action pour les langues officielles. Nous nous penchons sur la santé, l'éducation, le culturel, bref, sur tout. Je veux entendre ce que vous avez à dire sur ces sujets.
     Nous sommes accompagnés de notre analyste, Jean-Rodrigue Paré, de Samy Agha, greffière du comité, de Louise Thibault, greffière à la procédure, de nos techniciens ainsi que de nos traducteurs et traductrices. Du côté technique, notamment pour la traduction, vous n'avez pas à toucher aux microphones, car tout se fera automatiquement.
    Là-dessus, nous allons débuter, et vous devrez vous nommer. Comme je l'ai dit, nous commençons par l'Île-du-Prince-Édouard. M. Landry n'est pas vraiment de l'Île-du-Prince-Édouard, mais à ce qu'on m'a dit, il représenterait globalement la région Atlantique.
    Je représente l'Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques.
    Nous l'avons donc invité à cette réunion. Des personnes de l'Île-du-Prince-Édouard nous rejoindront plus tard, dont Mme Thorne... qui arrive justement. Bonjour, madame Thorne. Nous commençons tout juste.
    Chacun disposera de trois minutes. Vous direz que c'est très court, mais le comité est pas mal au courant de ce qui se passe, et nous voulons laisser la chance aux députés de vous poser des questions. Vous pourrez alors développer vos idées. C'est vous qui êtes les experts du chantier.
    Là-dessus, nous pouvons commencer. Merci.
    Bonjour. Je m'appelle Rodrigue Landry et je suis directeur de l'Institut national de recherche sur les minorités linguistiques.
    L'institut est financé par le gouvernement fédéral et s'intéresse aux minorités de langue officielle. Comme chercheurs, nous faisons des études sur les anglophones du Québec et les francophones hors Québec.
    Nous aurions eu bien des choses à dire sur le plan d'action, mais nous avons choisi de mettre l'accent sur quatre points. Nous vous avons donné un mémoire écrit que nous n'avons pas eu le temps de faire traduire, mais il vous sera bientôt remis dans les deux langues.
    Durant les trois minutes dont je dispose, je ne pourrai donner autant de détails que je le voudrais sur les quatre points que nous voulons souligner. Ils sont beaucoup mieux expliqués dans notre mémoire.
    Le premier point concerne la petite enfance. Selon nous, c'est le défi le plus important pour les communautés francophones et acadienne. Présentement, au moins 40 p. 100 des enfants d'ayants droit, en vertu de l'article 23, ne fréquentent pas les écoles de langue française.
    Un des facteurs déterminants est l'exogamie, qui va en augmentant. Environ les deux tiers de ces enfants sont issus de couples exogames; ils ont un parent francophone et un parent anglophone. Dans la plupart des cas, malheureusement, ces familles choisissent l'anglais comme langue parlée à la maison. Il y a environ un enfant sur cinq dont le français est la langue parlée.
    Nos recherches démontrent que l'exogamie n'est pas une cause directe de l'assimilation. C'est le choix des parents qui en est la cause directe. Il y a des parents qui font un choix éclairé. Par exemple, chaque parent transmet la connaissance de sa langue à l'enfant, qui va à l'école de langue française, parce que c'est l'école où étudie une minorité. Cela permet à l'enfant d'être bilingue. Nos recherches démontrent aussi que les enfants de familles exogames qui ont fréquenté l'école française sont les meilleurs bilingues au pays.
    La famille exogame est un microcosme de la société canadienne. Le rapport entre les deux langues officielles se situe au sein d'une famille. Il faut amener ces parents à faire un choix éclairé afin de respecter les deux cultures. Très souvent, il ne s'agit pas de mauvaise volonté. Je ne peux pas en parler davantage ici, mais les parents ne connaissent pas toujours les conditions.
    En guise de solution, nous vous référons à une excellente étude qui a été faite par le Comité permanent des langues officielles du Sénat, qui a déposé son rapport préliminaire en juin 2005. Dans ce rapport, le comité recommande que l'éducation fasse dorénavant l'objet de suivi, de la petite enfance jusqu'au postsecondaire. Nous pensons qu'il contient d'excellentes suggestions et nous vous référons à ce rapport, parce que nous ne pouvons pas vous donner tout de suite plus de détails sur nos recommandations.
    Le deuxième point que l'on aimerait souligner concerne le développement économique. Au début, le développement économique ne faisait pas partie du plan d'action. Après le rapport de mi-parcours, on lui a accordé une certaine attention. On trouve qu'on ne finance pas encore assez directement les projets. On fait surtout des études de faisabilité, des plans d'affaires, et il n'y a pas vraiment d'argent pour la poursuite des projets.
     Nous demandons donc à ceux qui vont préparer le plan de voir si on ne pourrait pas élaborer davantage sur toute cette approche.
    Le troisième point, et je pense qu'il est très important, concerne l'approche globale du plan d'action. Je fais des études sur les minorités linguistiques depuis environ 30 ans et je suis convaincu que le plan d'action, aussi intéressant puisse-t-il être, ne pourra jamais renverser la vapeur, si je puis dire, afin d'aider les communautés de langue officielle, surtout francophones, à se revitaliser.
    Dans le monde, il y a eu beaucoup de tentatives. Le Canada pourrait être un exemple de revitalisation des langues minoritaires dans le monde, parce qu'il a déjà une approche bien encadrée. Nous pensons que le plan devrait être l'objet d'une approche beaucoup plus globale et comprendre également les actions des provinces et des communautés. C'est peut-être beaucoup, mais nous sommes vraiment sérieux à ce sujet. Si on veut que le plan ait un véritable impact, il faut que le gouvernement fédéral établisse un partenariat global avec, par exemple, la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne et les communautés. Je pense qu'on pourrait même inclure le Québec.
    Le dernier point que je veux soulever concerne la recherche.

  (0910)  

    Il est certain que la recherche nous intéresse. Nous pensons que dans le premier plan, elle n'a pas été assez poussée en termes de planification linguistique. Un plan linguistique devrait répondre aux besoins des communautés. Si on veut répondre aux besoins, il faut les connaître, et la recherche peut beaucoup aider en ce sens. Il y a eu des tentatives louables. Par exemple, le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada réalise un projet de trois ans qui se termine cette année. Les Instituts de recherche en santé du Canada, ou IRSC, commencent à s'intéresser au sujet. Ils ont un comité consultatif sur les langues officielles, et celui-ci envisage de réaliser des programmes. Il reste qu'il devrait y avoir un programme beaucoup plus stable, à notre avis.
    La dualité linguistique est au coeur de l'identité canadienne. Je pense qu'il pourrait exister un fonds permanent de subventions de recherche consacré à cette question.
    Merci, monsieur Landry. Le temps dont vous disposez est assez bref, mais vous pouvez nous faire parvenir un mémoire. Ça nous aiderait à élaborer notre rapport.
    On l'a remis ce matin.
    D'accord. Vous pouvez y ajouter autre chose également.
    Madame Gilman.
    Merci beaucoup. Au nom du Réseau des services de santé en français de l'Île-du-Prince-Édouard, j'aimerais vous remercier de nous recevoir aujourd'hui. Je m'appelle Julie Gilman, et je suis coordonnatrice du réseau et analyste des services en français au ministère de la Santé de l'Île-du-Prince-Édouard.
    Je vous présente Mme Jeannita Bernard, qui est membre du conseil d'administration du réseau et infirmière de formation. Elle est présentement chef de département de la formation régulière à la Société éducative, le collège communautaire francophone de l'Île-du-Prince-Édouard.
    Notre réseau se distingue des 16 autres réseaux de santé en français du Canada, en ce sens que sa structure reflète une collaboration étroite entre le gouvernement provincial et la communauté acadienne et francophone de l'Île-du-Prince-Édouard. Nous avons deux coprésidences, l'une du côté communautaire et l'autre du côté gouvernemental. Je vous rappelle que vous avez rencontré le 5 octobre dernier à Ottawa le coprésident du côté gouvernemental, M. Donald DesRoches. Malheureusement, ni Claude Blaquière ni Donald DesRoches ne pouvaient être présents aujourd'hui.
    Notre réseau a bénéficié d'un appui communautaire, provincial et fédéral, et a connu beaucoup de succès avec les quatre projets issus du Fonds pour l'adaptation des soins de santé primaires de Santé Canada. Un site virtuel de services de santé en français, une centre de ressources en français, un programme de prévention et de promotion de la santé auprès des francophones et une initiative de vidéoconférence ont été mis sur pieds. Grâce à ce dernier projet, les élèves de l'école La-Belle-Cloche, à Souris, ont communiqué pour la première fois en français avec l'infirmière de santé publique. Le projet de vidéoconférence, comme les autres, a développé une habitude. Maintenant, le système de santé est équipé pour dispenser des services en français dans la région où la communauté acadienne et francophone est la plus isolée.
    De plus, nous sommes particulièrement fiers de notre Plan d'action pour la prestation de services de santé primaires en français, qui s'inscrit dans le cadre du projet Préparer le terrain. Ce plan, qui a été validé par nos partenaires aussi bien communautaires que gouvernementaux, présente en détail, par région, les services de santé primaires nécessaires.
    Nos partenariats sont établis, notre plan est dressé. Maintenant, il nous faut les ressources nécessaires pour mettre le tout en oeuvre, de façon à assurer des services de santé en français de qualité aux Acadiens et francophones de l'Île-du-Prince-Édouard.

  (0915)  

     La carence de ressources humaines aptes à fournir des services en français est un défi réel auquel fait face notre province. Si notre plan d'action était mis en oeuvre aujourd'hui, l'Île-du-Prince-Édouard serait incapable de combler tous les postes requis pour offrir des soins de santé en français à la population. Nous avons donc besoin du soutien du gouvernement fédéral pour faire avancer le dossier de la formation en français dans le domaine de la santé.
    A l'Île-du-Prince-Édouard, l'institution francophone postsecondaire, la Société éducative de l'Île-du-Prince- Édouard, n'est pas membre à part entière du Consortium national de formation en français, ou CNFS. D'ici à ce qu'elle le devienne, nous faisons face à des obstacles de taille quant à la formation et la rétention de professionnels de la santé. Notre réseau travaille ardemment à épauler la planification et la prestation de services de santé de qualité en français qui soient adaptés à la réalité locale et aux besoins de la communauté acadienne et francophone de l'Île-du-Prince-Édouard.
    Les résultats de nos efforts sont évidents quand on considère l'engagement de nos partenaires. Il reste cependant qu'un changement durable ne se fait pas en quatre ans. Afin de réaliser ce but, il est important que le gouvernement fédéral assure un appui continu à long terme qui aille au-delà de 2008, que ce soit pour la Société Santé en français, qui assure le fonctionnement des réseaux et l'amélioration de l'accès aux services, ou pour le Consortium national de formation en santé, qui facilite le recrutement de professionnels francophones grâce à la formation offerte par ses membres.
    Le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard s'est résolument engagé à appuyer l'épanouissement de la communauté acadienne et francophone de la province. La promulgation de la Loi sur les services en français en 2000 en témoigne. La présence de votre comité, ici en région, indique que vous appuyez la vitalité de la communauté linguistique minoritaire. Alors, tâchons de voir ensemble ce que nous pouvons accomplir pour le bénéfice de cette communauté qui nous tient tous à coeur.
    Merci.
    Madame Thorne.
    Bonjour à tous. Je représente la Société Saint-Thomas-d'Aquin de l'Île-du-Prince-Édouard, l'organisme porte-parole des Acadiens et francophones de la province. Je vous transmets les excuses de notre nouveau président, M. Edmond Richard. Il voulait être présent aujourd'hui, mais il a dû se rendre à Québec pour le lancement de la nouvelle politique.
    À l'Île-du-Prince-Édouard, on compte environ 136 000 habitants. De ceux-ci, environ 4,4 p. 100 ont comme langue maternelle le français. Par contre, si on ajoute tous ceux qui parlent français, on atteint un total qui dépasse 16 000 francophones, soit 12 p. 100 de la population. À l'Île-du-Prince-Édouard, on a donc un potentiel significatif pour ce qui est de développer la communauté acadienne et francophone.
    Comme M. Landry l'a déjà précisé, l'exogamie et l'assimilation sont pour nous des enjeux très importants. À l'Île-du-Prince-Édouard, le taux d'assimilation des Acadiens est beaucoup plus élevé qu'à l'échelle nationale. En effet, il est d'environ 56 p. 100 alors que la moyenne nationale est de 31 p. 100. Ça signifie que nous avons de sérieux défis à relever.
    Le plan d'action nous a permis de sensibiliser davantage les ministères ciblés à l'offre de services et aux défis de la communauté acadienne et francophone. Par contre, nous n'avons pas bénéficié d'investissements importants liés directement au développement communautaire, c'est-à-dire à nos communautés de langue française en milieu anglo-dominant. Si nous avions une recommandation à faire, ce serait de pallier cette lacune.
    Depuis 2001 à l'Île-du-Prince-Édouard, le nombre d'écoles de langue française est passé de deux à six. L'offre de services a augmenté et la demande augmente encore. Malheureusement, les fonds attribués à nos communautés n'ont pas augmenté. Par conséquent, nous avons du mal à répondre à la demande que nous avons créée en établissant ces centres.
    Comme leur nom le disent, les centres scolaires-communautaires possèdent une composante de développement communautaire, et celle-ci est reliée aux écoles de langue française. Ça fait toute la différence, dans nos communautés, quand il s'agit de développer la francophonie et contrer l'assimilation. Mais pour ce faire, nous avons besoin d'investissements importants, tant au niveau fédéral que provincial. Pour reprendre un peu le discours de M. Landry, je dirai qu'il faudrait inclure nos provinces dans le plan d'action pour ce qui est des champs de compétence dont elles ont la responsabilité.
    Par ailleurs, les centres préscolaires sont pour nous de la plus haute importance. Je sais que ma collègue Mme Nicole Drouin va en parler elle aussi. Pour le moment, nos petits entrent à l'école sans avoir une bonne connaissance de la langue. En effet, toute une génération de parents n'a pas eu accès à l'école en français. C'est une autre priorité très importante qui nécessiterait des investissements de plus grande envergure.
    À l'Île-du-Prince-Édouard, il y a malgré tout de bonnes choses qui se passent. Entre autres, on a créé un comité de développement des ressources humaines tripartite, où siègent des représentants des gouvernements fédéral et provincial ainsi que de la communauté. Depuis la mise en vigueur du plan d'action, on constate que le groupe prend de l'ampleur. Ça a créé du travail. De plus en plus de ministères fédéraux ciblés par le plan d'action s'ajoutent, de façon à rendre plus accessibles aux communautés de langue française les services dispensés par les gouvernements fédéral et provincial de même que par les communautés. On a vu entre autres plusieurs ministères s'impliquer dans l'élaboration d'un plan d'action qui servira spécifiquement à accroître l'accessibilité aux services offerts en français.

  (0920)  

    Une grande partie de ce plan d'action pourrait mettre à contribution le groupe tripartite et, entre autres, le Plan Vision, ce plan de développement global de la communauté acadienne et francophone. Il s'agit d'un plan exhaustif auquel ont participé plus de 500 intervenants membres de notre communauté, que ce soit dans le cadre de consultations ou de l'élaboration du plan. Ce dernier touche tous les aspects du développement de notre communauté.
    Merci, madame Thorne.
    Madame Drouin.
    Je m'appelle Nicole Drouin. Je suis directrice générale de la Fédération des parents francophones de l'Île-du-Prince-Édouard. Notre fédération représente les parents dans le cadre de tous les dossiers se rapportant à l'éducation et à la petite enfance à l'Île-du-Prince-Édouard.
    Au chapitre de l'éducation en français, nous avons fait énormément de progrès au cours des cinq ou six dernières années à l'Île-du-Prince-Édouard. Comme le mentionnait Mme Thorne, le nombre d'écoles de langue française est passé de deux à six. Il y en a maintenant une par région académique francophone, ce qui représente un bon pas en avant.
    À l'heure actuelle, nos priorités se concentrent largement sur la petite enfance. Nous sommes affiliés à la Commission nationale des parents francophones, dont la priorité est depuis plusieurs années la petite enfance. L'an dernier, nous avons pu travailler avec nos partenaires à l'élaboration d'un plan stratégique visant à développer la petite enfance à l'Île-du-Prince-Édouard, et ce, grâce à l'appui de la CNPF et du ministère du Développement social.
    À cet égard, il y a beaucoup à faire. Pour compléter les propos de M. Landry, je dirais que les défis sont nombreux parce que les besoins sont nombreux. Il s'agit dans bien des cas de familles exogames, et celles-ci sont souvent difficiles à atteindre. Il n'est pas facile d'offrir des services complets répondant à tous les besoins en matière de petite enfance. En effet, les régions sont petites, mais la clientèle est nombreuse. Obtenir des ressources humaines, financières et matérielles est difficile. En milieu minoritaire, dans le domaine de la petite enfance, il est même difficile d'accéder à des livres, des vidéocassettes, et ainsi de suite.
    Selon la recherche, le langage se développe très tôt. On parle de la période entre l'âge de six mois et trois ans. À cet égard, les services à la petite enfance souffrent de lacunes importantes à l'Île-du-Prince-Édouard, surtout quand il s'agit de familles exogames, où l'usage à la fois de l'anglais et du français à la maison est courant. Il est d'autant plus important d'offrir aux enfants la possibilité d'apprendre le français et d'accéder à toutes sortes d'activités.
    Dans le cadre du Plan d'action pour les langues officielles, des sommes importantes ont été allouées à la petite enfance en matière de recherche et d'alphabétisation familiale. C'est bien, mais il faudrait que ces investissements soient plus nombreux. Les projets ponctuels sont appréciés, mais il nous faudrait des plans à plus long terme, de façon à prolonger les projets qui nous font du bien à court terme.

  (0925)  

    Merci bien. Nous allons maintenant passer aux questions.
     Monsieur Jean-Claude D'Amours.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais vous remercier d'avoir pris le temps de venir faire part de vos revendications au Comité permanent des langues officielles. J'aimerais aussi souhaiter la bienvenue aux collègues de ma province, le Nouveau-Brunswick. Je tiens à vous souhaiter la bienvenue dans notre belle province bilingue.
    Ma première question pourrait aussi bien s'adresser à Mme Drouin qu'à Mme Thorne.
    Vous avez toutes deux mentionné qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, le nombre d'écoles de langue française était passé de deux à six. Je suppose que ce processus n'a pas été facile sur toute la ligne. Est-ce que vous pourriez me dire si le Programme de contestation judiciaire vous a été utile lors de ces démarches? En définitive, il s'agissait pour vous de promouvoir vos revendications de façon positive et de vous assurer de pouvoir offrir aux jeunes une éducation en français à l'Île-du-Prince-Édouard.
    Il est évident que le Programme de contestation judiciaire a été essentiel et crucial dans l'obtention de nos six écoles. Nous en avions deux, et si nous n'avions pas amené en cour le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard pour avoir des écoles dans les régions qui n'en disposaient pas, soit Summerside, Prince-Ouest et Rustico dans un premier temps, nous n'aurions peut-être pas encore nos écoles à ce jour.
    C'est grâce au Programme de contestation judiciaire que nous avons pu nous rendre jusqu'à la Cour suprême pour gagner le droit d'avoir nos écoles dans nos communautés.
     Avant, nous envoyions nos jeunes dans les écoles francophones par autobus, et le trajet durait parfois plus d'une heure.
    Encore maintenant, au moins deux ou trois de nos écoles ne disposent pas d'une installation adéquate. Elles sont présentement dans des édifices où les espaces sont loués. Une école primaire, entre autres, partage un édifice avec un salon-bar, et l'installation est nettement insuffisante.
    Nous étions même sur le point de préparer et de déposer une autre demande au Programme de contestation judiciaire pour faire avancer le dossier de cette école.
    Madame Thorne, si je comprends bien, vous n'auriez pas pu avoir six écoles si le programme n'avait pas existé, mais le besoin est encore plus criant. Les communautés francophones vivant en milieu minoritaire, où les marchés sont petits et la population moins nombreuse, ont besoin d'aide, et on constate que vos démarches pour aider les francophones et les jeunes de votre communauté sont impossibles maintenant que vous n'avez plus les moyens nécessaires pour avancer.
     Ce qui est honteux dans tout cela, c'est que vous soyez obligés de louer de l'espace adjacent à un salon-bar afin d'offrir aux communautés francophones le service qu'elles méritent.

  (0930)  

     C'est un exemple de ce qui me désole le plus. Ce sont des histoires d'horreur qu'on préfère ne pas entendre, mais il faut que certains députés du gouvernement les entendent et les comprennent aujourd'hui. Dans les faits, c'est le Programme de contestation judiciaire qui vous a aidés dans le passé, mais comme il est coupé, vous êtes obligés de garder ces élèves dans un milieu inapproprié pour leur permettre d'apprendre le français et d'étudier en français. Vous n'avez pas le choix.
    Exactement.
    Le gouvernement s'appuie souvent sur l'article qui dit : « là où le nombre le justifie ». Cependant, il est difficile de connaître ce nombre sans installation adéquate et si nous n'avons pas un service de qualité égale à celui des écoles anglophones. Nous l'avons constaté dans tous nos centres : à partir du moment où le centre scolaire existait, nos chiffres augmentaient de façon incroyable.
    En 2000, l'école élémentaire de Summerside avait des espaces dans nos bureaux. Il y avait quatre élèves en première année. C'est tout. En 2006, nous avons un centre scolaire formidable, qui répond bien aux besoins de la communauté. Nous croyons qu'il est un modèle pour toutes les autres régions. Nous avions quatre élèves en 2000, et nous en avons maintenant de 65 à 70. À la garderie du centre préscolaire pour les enfants de 22 mois à six ans, il y a plus de 50 élèves.
    Cela confirme la théorie qui veut que, lorsque les services existent, les gens y recourent. Si on se limite aux personnes qui fréquentent nos écoles, dans des salles et des installations inadéquates, il est vraiment difficile de juger du potentiel de clientèle.
    En somme, vous êtes la preuve vivante que les francophones hors Québec sont tournés vers l'avenir.
    Absolument.
    Vous en êtes la preuve vivante, et c'est louable.
    C'est incroyable, vous êtes passés de 4 à 60 élèves...
    ... en cinq ans...
    ... simplement parce que vous avez eu les moyens de faire valoir vos droits en cour.
    Oui.
    De plus, une autre école, le Carrefour de l'Isle-Saint-Jean à Charlottetown, a été construite en 1991. L'édifice a été construit pour accueillir 150 élèves. Lors des premières années, il s'y trouvait entre 60 et 75 élèves; ils sont maintenant plus de 250. Ils ont un beau centre, mais en 15 ans ils ont dépassé la capacité de cette école.
    Merci.
    Je vais maintenant aborder un élément plus général qui touche la petite enfance. Vous avez pratiquement tous effleuré ce sujet.
    Bien que je sache qu'indirectement les coupes ont eu un impact, j'aimerais tout de même savoir si, lors des coupes dans le fonds du programme national de développement de la petite enfance, vous aviez bon espoir de pouvoir faciliter davantage l'intégration des enfants. Espériez-vous alors que les jeunes allaient recevoir une formation en français dès leur plus jeune âge, ce qui aurait facilité leur entrée à l'école, en première année? Ces coupes vous ont-elles fait reculer? Aviez-vous bon espoir que cela allait faciliter les choses, les faire avancer davantage, vous aider à regarder encore plus vers l'avenir?
    Ce que nous avions prévu dans notre province, l'Île-du-Prince-Édouard, allait beaucoup améliorer le système existant de la petite enfance; cela allait améliorer l'accès aux services pour les plus jeunes; cela allait augmenter les fonds destinés aux services de la petite enfance pour que plus d'enfants puissent en bénéficier.
    Actuellement, il y a une grosse lacune: aucun service n'existe pour les enfants de 0 à 22 mois. Selon le modèle développé dans notre province, pendant les cinq ans de vie du programme, nous allions pouvoir ajouter davantage de services au fur et à mesure.
    Par conséquent, ces coupes ont vraiment beaucoup nui à notre développement sur le plan des services francophones offerts à la petite enfance. Notre déception a été grande.

  (0935)  

    La parole est maintenant à M. André.
    Bonjour. Je m'appelle Guy André et je suis originaire du Québec où, comme vous le savez, nous sommes majoritairement francophones.
    En guise d'introduction, je dois vous dire mon admiration pour le combat que vous menez à l'Île-du-Prince-Édouard afin de tenter de maintenir la vitalité de la langue française. C'est une lutte qu'on fait également au Québec. Sur le plan international et sur le plan mondial, la question de la diversité culturelle fait encore l'objet d'une lutte. En effet, on tente d'angliciser un peu toute notre planète en raison de l'américanisation, etc., et de faire de la culture un objet de marchandage à l'Organisation mondiale du commerce.
    Nous menons aussi cette lutte au Québec, mais vous devez la mener encore plus ardemment vu votre minorité plus importante.
    Nous avons entendu parler de la santé, mais nous n'avons pas entendu parler de la culture à l'Île-du-Prince-Édouard. Comment se vit la culture francophone, le théâtre, le cinéma, la radio, la télévision? Est-ce stimulé? Y a-t-il une certaine vitalité? Aurait-on besoin de plus d'appui pour promouvoir cette culture et l'organiser de concert avec les centres communautaires? J'aimerais vous entendre un peu à ce propos.
    Je vais répondre à la question.
    Le développement culturel se fait un peu à la manière du développement de toutes nos autres structures organisationnelles à l'Île-du-Prince-Édouard. L'enveloppe qui finance la plus grande partie de l'organisation du développement culturel provient de l'accord de collaboration avec Patrimoine canadien.
     Comme vous le savez fort probablement, à l'Île-du-Prince-Édouard, il n'y a pas eu d'augmentation significative de cette enveloppe depuis 1992. Pour nous, les choses sont donc très difficiles. Puisque nos communautés grandissent de façon exponentielle, les demandes deviennent de plus en plus grandes. Nous avons maintenant des centres scolaires-communautaires dans certaines régions, qui ajoutent au défi de la gestion de ces instances.
     Nous n'avons pas la masse critique nécessaire, comme dans d'autres provinces, pour que le développement culturel devienne plus autosuffisant. Notre clientèle n'est pas assez nombreuse pour défrayer les dépenses inhérentes à la venue d'un spectacle de grande qualité ou de formateurs et de formatrices. Par conséquent, de grands investissements sont nécessaires pour développer la culture et stimuler l'intérêt culturel.
    Pour contribuer vraiment au développement de nos communautés, il faut bien sûr apprendre la langue, mais il faut également s'approprier la culture. À cet égard, il nous manque énormément de ressources humaines et financières pour atteindre nos buts et répondre aux besoins de la clientèle.
    En dépit de cela — et vous êtes sans doute au courant —, des artistes et de groupes culturels de l'Île-du-Prince-Édouard, comme Barachois, Angèle Arsenault et Clack'Azing ont connu beaucoup de succès. Nous avons énormément de gens talentueux. Notre clientèle s'affiche et s'accroche à la culture et à son développement, mais nous n'avons pas atteint le niveau de soutien nécessaire pour répondre à ces besoins grandissants.
    À mon avis, en raison de votre taux d'assimilation, il faut que la francophonie à l'Île-du-Prince-Édouard se réveille, qu'elle soit vivante pour que les gens soient stimulés et envoient leurs enfants à l'école. Il faut la promouvoir. Il s'agit d'une approche globale.
    De plus, la culture nous aide à sensibiliser l'autre communauté à la valeur qu'ajoute notre communauté dans la province. L'Île-du-Prince-Édouard vit beaucoup du tourisme. De plus en plus, notre communauté anglophone reconnaît la valeur qu'ajoute notre communauté, ainsi que la nécessité non seulement de promouvoir la culture folklorique, mais de faire vivre aux touristes une expérience unique liée à une culture différente comme la nôtre.

  (0940)  

    Je vous remercie. Il me reste encore un peu de temps.
    Mesdames Gilman et Bernard, vous avez parlé du domaine de la santé. En effet, vous avez indiqué qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, il y avait des problèmes reliés au recrutement et à la formation du personnel de la santé.
    Quels sont vos besoins en matière de ressources? On sait qu'il y a actuellement des problèmes semblables un peu partout, surtout dans les régions rurales, où c'est plus difficile de recruter des médecins et des infirmières. Comme j'ai déjà travaillé dans ce réseau, je le connais très bien.
    Quel genre de formation est offerte? Quelle collaboration entretenez-vous avec le monde de la francophonie à l'extérieur de l'Île-du-Prince-Édouard? Et quelles seraient les solutions?
    En deux minutes et demie, ce n'est pas si mal! J'aimerais simplement connaître un peu l'état de la situation.
    Une minute et demie.
    Nos problèmes ne sont pas différents des vôtres: la rétention et le recrutement. Je ne peux pas dire que le système de santé est en pleine crise, mais il y a tout de même une carence dans le système de santé.
    Il y a le vieillissement de la population, et donc trop de pressions sur le...
    Exactement.
    Je fais partie d'un organisme qui fait de la formation, mais nous ne pouvons pas faire de la formation seuls, parce que nous ne sommes pas équipés pour ce faire. Dans l'île, nous sommes très petits.
    Cela dit, nous aurons bien besoin du Consortium national de formation en santé, le CNFS. Notre adhésion à cet organisme est donc cruciale pour nous.
    Nous avons déjà établi des partenariats avec des organismes, tels que le Cégep de Saint-Félicien, où l'on offre une formation liée à la petite enfance. Nous avons noué d'autres partenariats avec le Collège communautaire du Nouveau-Brunswick, où l'on offre une formation liée à l'aide en matière de santé. Nous planifions d'autres formations.
    Nous n'avons pas la présence dont nous avons besoin au sein du consortium. Néanmoins, cela pourrait nous servir de levier important pour établir davantage de partenariats et faire connaître ce qui se passe sur le plan national en matière de formation en santé.
    Est-ce une recommandation?
    Oui, c'est une recommandation.
    Nous allons en tenir compte. Je vous remercie.
    Je peux continuer, monsieur Godin?
    Non, c'est terminé, monsieur André. Vous aurez droit à un autre tour. C'est le recherchiste qui me distrayait. C'est sa faute, et seulement sa faute!
    Monsieur Lemieux.
    Bonjour. Merci de votre présence ici, aujourd'hui. Je suis un député de l'est de l'Ontario. Il y a 65 000 Franco-Ontariens dans ma circonscription.
    J'aimerais commencer par faire un commentaire. Malheureusement, mon collègue M. D'Amours a commencé par faire une petite présentation politique au sujet du Programme de contestation judiciaire. J'aimerais ajouter que ses commentaires n'étaient pas tout à fait précis.
    Ce qui est vraiment important, c'est que les associations et les personnes francophones aient accès aux cours. Et tel est le cas, que ce soit directement ou par le truchement du commissaire aux langues officielles. C'est garanti par la Loi sur les langues officielles. C'est l'accès qui est vraiment important, et vous en bénéficiez directement ou par l'entremise du commissaire.
    J'aimerais aussi souligner que nous engageons des dépenses pour améliorer les services et l'éducation dans les communautés linguistiques en situation minoritaire. Par exemple, nous venons d'annoncer une entente d'un milliard de dollars en matière d'éducation. Nous travaillons avec les provinces pour améliorer les services en matière d'éducation. En ce qui concerne les services aux francophones, en vertu de la Loi sur les langues officielles, une entente de 64 millions de dollars a été conclue, soit une augmentation de 25 p. 100; et pour nos communautés, il y a 120 millions de dollars. L'argent est là pour aider les communautés et améliorer les services.
    J'aimerais savoir si vous possédez les mécanismes pour savoir quelles associations locales reçoivent de l'argent du gouvernement fédéral, car de l'argent est effectivement consacré aux associations locales.
    Disposez-vous d'un système ou d'un réseau pour vous renseigner quant au nombre total d'organisations qui existent, qu'il s'agisse de 20, 25 ou 50, et qui se partagent l'argent destiné à l'amélioration des services offerts aux francophones?

  (0945)  

    J'aimerais en profiter pour parler de ce sujet. Effectivement, je pense que c'est un des effets pervers du plan d'action actuel, effet qui n'est pas intentionnel selon moi. On a voulu responsabiliser chacun des ministères. L'argent est donc distribué très largement.
    Il est tout à fait normal que les organismes cherchent à savoir où se trouve l'argent pour leurs besoins et leur propre organisme. Cela a créé une certaine fragmentation. On le voit. Je siège à beaucoup de comités à Ottawa avec toutes sortes de groupes et d'organismes. Je trouve qu'il y a très peu de collaboration. Les responsables des organismes présents à ce comité auront peut-être un point de vue différent. Je pense qu'il est assez visible que cet aspect du plan force un peu les communautés à devenir comme de petites entreprises qui cherchent à survivre et à garder leurs atouts. J'ai même entendu des personnes utiliser le terme de « néocorporatisme ». On cherche l'argent, mais on ne se préoccupe pas de l'ensemble des besoins de la communauté. Ce n'est pas parce qu'on ne le veut pas, c'est parce qu'on ne le peut pas. Il n'y a pas d'organisme central pour faire la planification et pour établir les grandes priorités du plan.
    J'ai commencé ma présentation en parlant de la petite enfance. Regardons les sommes d'argent consacrées à la petite enfance par rapport à celles consacrées à la santé. Je ne veux pas faire de comparaison d'argent, mais la petite enfance, c'est crucial. Si la moitié des enfants ne vont pas à l'école française, il est évident qu'à la fin de leur vie, des hôpitaux francophones ne leur serviront pas à grand-chose s'ils n'ont pas d'abord pu vivre en français.
    Je trouve cela dommage, parce qu'il manque un plan de communication au plan d'action. Faites le tour. Ici, vous parlez surtout à des organismes. Faites des appels au hasard et demandez à la population si elle sait qu'il existe un plan. J'ai déjà fait l'analogie suivante. C'est un peu comme si on avait voulu planifier une fête pour la communauté. Le gouvernement organise la fête et travaille avec la communauté. Une certaine forme de gouvernance horizontale fait en sorte que la communauté a participé à l'organisation de la fête. On fait l'évaluation de mi-parcours. On évalue comment s'organise la fête. Mais il faudrait peut-être se rendre compte que tout le monde a oublié une chose importante: la communauté n'a pas été invitée à la fête. Personne n'était responsable de l'invitation. La population ne connaît pas le plan d'action.
    C'est là que nos recherches deviennent importantes. Par exemple, quand nous faisons des sondages auprès des parents en situation d'exogamie — un parent anglophone et un autre francophone —, on leur demande quelle serait la meilleure solution afin que leur enfant devienne bilingue. La grande majorité des parents répondent tout bonnement que c'est moitié-moitié, qu'il faudrait de l'immersion ou quelque chose de semblable. Ils oublient qu'il existe une société. Ils pensent qu'à l'école, une répartition égale du temps entre le français et l'anglais va résoudre le problème. On a déjà utilisé l'expression « naïveté sociale ». C'est ce que c'est. On ne comprend pas que dans une société nord-américaine où l'anglais est très fort, il faut que l'école compense cela.
    S'il existait un bon plan de communication, les parents sauraient que les enfants issus de familles exogames en milieu minoritaire qui poursuivent leurs études jusqu'en 12e année ne deviennent pas seulement de bons étudiants bilingues, mais les meilleures personnes bilingues au pays. Nos recherches démontrent qu'ils sont équivalents aux francophones. Statistiquement, on ne peut pas les distinguer des francophones qui ont deux parents francophones, et ils sont aussi forts en anglais que les anglophones. Ce sont donc d'excellents bilingues. Toutefois, les parents pensent encore que la meilleure solution réside dans le moitié-moitié. Ce ne sont pas des sociolinguistes et ils ne font pas de recherches dans ce domaine. Des données semblables devraient être connues. Le plan ne devrait pas seulement exister. D'abord, les parents ne savent même pas qu'ils ont des droits. Beaucoup de personnes ne savent même pas de quoi il s'agit quand on parle de l'article 23 de la Charte des droits et libertés.

  (0950)  

    Je regrette de vous interrompre, mais votre temps de parole est écoulé.
    C'est maintenant le tour du NPD. Comme c'est normalement Yvon Godin qui s'assoit là, je vais prendre la parole.
    Je ne suis pas trop d'accord avec M. Lemieux quand il s'insurge contre ceux qui posent des questions politiques. Si ce sont des questions politiques, elles sont les bienvenues en politique. Comme nous sommes tous des politiciens, certains vont poser des questions politiques. Nous disons souvent qu'il ne faut pas mêler la politique à nos propos, mais nous sommes un groupe de politiciens. Ne soyons hypocrites : nous faisons de la politique.
    Cela dit, j'aimerais parler de la question qui a été posée au sujet du Programme de contestation judiciaire.
    D'abord, nous devons prendre nos responsabilités à cet égard. Le gouvernement a décidé — et c'est son choix — d'abolir le Programme de contestation judiciaire. Il ne faut pas dire qu'ils font maintenant de la politique. Le gouvernement a décidé d'éliminer le programme. Il doit prendre ses responsabilités et les arguments qui viennent avec.
    Le premier argument concerne les propos du ministre Baird. Il a dit à la Chambre que le gouvernement ne donnerait pas d'argent à des gens pour qu'ils aillent se battre contre lui, qu'il ne donnerait pas d'argent à des gens ou à des groupes pour qu'ils viennent contester ses lois, parce qu'il est parfait, lui. Quand il adopte une loi, il la respecte. Ce n'est pas moi qui ai dit cela, c'est le ministre. Je demande au gouvernement actuel de se débarrasser des cours, des juges, des avocats, car il est parfait.
    En ce qui concerne le Programme de contestation judiciaire, nous avons reculé énormément ou nous allons le faire. Il y avait deux écoles à l'Île-du-Prince-Édouard; il y en a maintenant six. Au Nouveau-Brunswick, quand la Loi sur la délimitation des circonscriptions électorales et la représentation a été adoptée, on a voulu mettre la ville des francophones dans Miramichi, mais grâce au Programme de contestation judiciaire, les francophones ont gagné leur cause.
    Si nous avons été obligés de nous servir du Programme de contestation judiciaire, c'est parce que l'ancien gouvernement voulait violer la loi. Il ne respectait pas la loi, et grâce au Programme de contestation judiciaire, les citoyens, en tant que groupe, ont été en mesure de contester sa décision.
    Il y a d'autres causes qui ont été gagnées. On n'a qu'à penser aux inspecteurs dans le domaine de l'alimentation de Shippagan qu'on a voulu envoyer à Dieppe ou à Shediac, à l'hôpital Montfort ou aux écoles en Colombie-Britannique.
    Pouvez-vous nous parler du tort que causera aux minorités francophones l'élimination du Programme de contestation judiciaire, dont vous avez pu vous servir? Quel tort cela fera-t-il si on laisse les citoyens à eux-mêmes ou si on confie au seul commissaire aux langues officielles la responsabilité de représenter toutes les minorités du Canada?
    Nous n'allons pas à l'encontre des lois et nous ne les contestons pas. Les lois existent pour notre protection. Nous avons amené le gouvernement de la province en cours. Le Commissariat aux langues officielles n'offre aucune protection nous permettant d'aller à l'encontre des décisions prises par notre province. Nous avons dû amener en cour notre province, et non le gouvernement fédéral. La province ne pouvait pas bâtir d'écoles francophones à l'Île-du-Prince-Édouard ou avait choisi de ne pas le faire.
    Nous avions toujours accès à la justice, mais la communauté ne disposait pas des moyens financiers pour le faire. Cela a coûté des milliers et des milliers de dollars pour aller en appel, jusqu'à la Cour suprême. La communauté de 6 100 francophones à l'Île-du-Prince-Édouard n'en aurait jamais eu les moyens. La cour existe, mais si vous n'avez pas les moyens de payer, vous n'y avez pas accès.
    Sans le Programme de contestation judiciaire, je doute fort qu'on aurait pu avoir nos écoles à l'Île-du-Prince-Édouard. Oui, il y a un engagement du fédéral, mais si la province n'a pas l'obligation de nous accorder du financement, rien n'est possible. Quand vous transférez de l'argent à la province, il n'y a pas de clause linguistique ou de choses écrites disant que telle tranche doit servir à la communauté acadienne et francophone. Parfois la province n'a pas les moyens de nous affecter cet argent.
     L'Île-du-Prince-Édouard est la province dont le déficit est le plus élevé. Ce n'est pas toujours un manque de volonté: c'est l'incapacité. Nous avons donc besoin de l'appui du gouvernement fédéral pour avoir les mêmes droits que tous les autres Canadiens au pays.

  (0955)  

    Encore une fois, penchons-nous sur le volet des services à la petite enfance. Par exemple, un couple envoie son enfant à l'école française. La tendance veut qu'il y ait des garderies dans les écoles, et les parents sont portés à inscrire leur enfant à une école qui possède une garderie.
    Le gouvernement actuel a décidé de donner 1 200 $ par enfant aux parents, argent qui était destiné aux garderies par l'ancien gouvernement.
    Selon vous, cette décision peut-elle affecter le développement du secteur de la petite enfance, et particulièrement celui des garderies? Les enfants vont d'abord à la garderie, un environnement francophone — puisque nous parlons des minorités francophones de l'Île-du-Prince-Édouard —, puis continuent leurs études dans une école ou un institut qu'on encourage ces jeunes à fréquenter, à cause de l'endroit d'où ils viennent.
    C'est particulièrement important pour les parents. Les fédérations de parents s'accordent pour dire que les parents ont besoin de fonds qui leur permettent de choisir des services.
    Toutefois, il est très difficile de faire en sorte que les services que nous sommes actuellement en mesure d'offrir soient de qualité égale à ceux des anglophones.
    Par exemple, j'habite Summerside. Il y a une garderie francophone et six ou sept garderies anglophones. Les francophones n'ont qu'un choix. De plus, il y a une liste d'attente, et plusieurs facteurs ne facilitent pas l'accès à cette garderie.
    Certaines éléments manquent au secteur de la petite enfance, et je ne suis pas convaincue que les 1 200 $ par enfant permettront à ces éléments d'exister. Appuyer les parents est très important. Nous sommes d'accord sur ce principe, mais il faut aller plus loin afin de pouvoir offrir des services de qualité qui répondent aux besoins des familles et des enfants.
    Monsieur Simard, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. Je désire souhaiter la bienvenue à nos invités.
    C'est maintenant un tour de cinq minutes.
    J'allais poser une question sur un autre sujet, mais les propos de M. Landry m'ont beaucoup intéressé. J'ai trois brèves questions à lui poser.
    Monsieur Landry, vous avez parlé des responsabilités horizontales des ministères. Personnellement, cela m'intrigue, et j'aimerais que vous en parliez davantage. Je pense que le ministère de la Santé, le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration et les autres ministères ont une responsabilité spécifique envers les communautés minoritaires. Ils doivent, eux aussi, respecter la Loi sur les langues officielles. Par le passé, les francophones ont toujours dépendu de Patrimoine canadien. Si la personne en poste n'était pas sensible à leurs problèmes, leurs communautés en pâtissaient. Il s'agit de ma première question.
    En ce qui a trait au rapport de mi-parcours, vous avez dit que les francophones n'avaient pas été invités à la table. Au cours des trois dernières années, j'ai participé à plusieurs événements où les francophones étaient les chefs de file. Les communautés étaient invitées une fois l'an avec les ministres responsables de ces ministères. En ce qui a trait au rapport de mi-parcours, il y a un gros événement au Centre de conférences du gouvernement à Ottawa, où une cinquantaine de personnes ou plus étaient présentes pour parler des lacunes du Plan d'action pour les langues officielles. J'aimerais que vous commentiez cela.
    Enfin, le gouvernement fédéral a commencé à inclure des enveloppes spécifiques dans les ententes qu'il signait avec les provinces. Selon moi, c'est très important. Par exemple, dans le domaine de la petite enfance, je sais que, dans l'entente de cinq ans, le Manitoba avait une enveloppe spécifique destinée aux francophones.
    Le mandat de ce comité est de voir si le Plan d'action pour les langues officielle a bien fonctionné. Pour ma part, j'espère que nous pourrons recommander au gouvernement de renouveler le plan, de le bonifier, et peut-être même de le modifier. Sans doute y a-t-il des choses qui ont mieux fonctionné que d'autres. J'aimerais aussi avoir vos commentaires à ce sujet.

  (1000)  

    Je pense que je vais d'abord répondre à la deuxième question, parce qu'elle englobe plusieurs choses.
    J'ai fait une analogie avec une fête pour la communauté. Quand je parle de la population, je ne parle pas des organismes; je parle de la société civile, de celle qui participe et qui connaît très bien ses droits.
    Ce n'était pas un reproche que je faisais à un gouvernement. Une telle chose est normale quand on est en situation minoritaire. Pour un parent ordinaire qui cherche à gagner sa vie et à donner certains biens à ses enfants, les préoccupations linguistiques ne sont pas toujours les plus importantes. Beaucoup d'immigrants et de minorités s'assimilent parce qu'ils pensent qu'il y a d'autres choses plus importantes dans la vie, etc. Cela crée des habitudes en quelque sorte.
    Je parlais de la population en général. Il y a beaucoup de bonnes choses dans le plan d'action, mais c'est comme si on ne l'avait pas accompagné d'une campagne de sensibilisation de la population. C'est le point que je voulais soulever.
    Les organismes connaissent leurs droits. Je ne m'en fais pas pour eux. Ils sont même très bons dans leurs représentations. C'est différent dans le cas de la population en général. Présentement, les deux tiers des parents sont en situation d'exogamie chez les ayants droit francophones. C'est au-delà de 80 p. 100 dans toutes les provinces de l'Ouest. Ce n'est pas un détail. Il faut vraiment que ces parents soient sensibilisés à leurs droits et sachent qu'il y a des possibilités qui donnent d'excellents résultats. Au fond, la solution est tellement simple. C'est ce qui est frustrant.
    C'est un choix, et bien sûr, ce sont les parents qui doivent le faire. On ne forcera pas les parents à envoyer leurs enfants à l'école française. Il faut qu'ils fassent un choix éclairé en connaissant les faits. Ils doivent savoir que les enfants de ces familles qui iront à l'école française seront, à leur sortie, les meilleurs bilingues au pays.
    Et qu'en est-il de la responsabilité des ministères?
    Je ne suis pas un expert à cet égard. Toutefois je pense que, peu importe la couleur du gouvernement, s'il y avait un véritable leadership, le gouvernement fédéral chercherait à tisser des liens avec les autres ministères provinciaux pour que ce soit un tout.
    Par exemple, si on a droit à une école, on n'a aucun droit pour ce qui est de la petite enfance. Il y a 60 p. 100 de ces enfants qui pourraient aller à l'école française si leurs parents étaient sensibilisés à la chose et s'il y avait un système de garderies associé à l'école. Cela a un impact énorme sur la communauté francophone. Parce qu'il n'y a pas de coordination des services, chacun agit individuellement. Tout le monde fait sa petite affaire, mais le tout n'y est pas.
    Je pense que le Manitoba a été la première province à conclure une entente. Je crois que la CNPF, la Commission nationale des parents francophones, avait conclu des ententes sur les garderies avec presque toutes les provinces. Il devait y avoir une aide spéciale pour les garderies. Je ne connais pas les détails des ententes, mais on m'a dit qu'elles prévoyaient clairement de l'aide pour les minorités de langue officielle. Le gouvernement actuel est arrivé avec une autre vision et ne semble pas vouloir régler la situation tout de suite.
    Madame Boucher.
    Je vous remercie tous d'être ici. Vous nous éclairez beaucoup sur ce que vous vivez.
    Nous sommes ici en tant que gouvernement pour vous écouter, pour voir ce qui se passe sur le terrain et pour prendre le pouls de la population. Vous savez que notre gouvernement va créer 125 000 places en garderie. J'ose espérer que vous aurez toutes les places qu'on créera pour vous.
    Par ailleurs, on entend beaucoup parler des défis. Je vais poser ma question à Mme Thorne.
    Vous avez parlé des défis auxquels vous faites face. J'aimerais savoir quel est votre plus grand défi immédiat. J'aimerais aussi savoir de quelle réalisation vous être la plus fière. On sait que vous avez fait des réalisations, et j'aimerais que vous m'en parliez, s'il vous plaît.

  (1005)  

    En ce moment, notre plus grand défi est de fournir un soutien adéquat à nos centres scolaires-communautaires, car ce sont vraiment les noyaux du développement de nos communautés. Nos régions sont éloignées et la masse critique n'est pas là, ce qui fait qu'il est impossible pour ces centres de devenir autonomes, d'être des instances d'affaires, si on veut.
    On essaie, depuis le développement de ces centres, de devenir plus efficaces. On a fait plusieurs exercices de restructuration et de réaménagement. Il y a présentement un processus de redéploiement des ressources humaines pour augmenter notre efficacité et pour voir s'il n'y aurait pas une meilleure façon de faire. Encore là, on n'arrive pas à équilibrer les budgets. Le financement est nettement inadéquat : le coût du chauffage augmente, on ne peut pas offrir de salaires compétitifs et on a un roulement de personnel énorme. Les gens en place se sont engagés de façon extraordinaire, mais si on ne peut pas être compétitifs, ces gens vont aller travailler au gouvernement provincial ou au gouvernement fédéral. On sert de centre de formation pour les gouvernements, et on fait bien notre travail parce qu'ils sont toujours contents de les avoir.
    C'est notre grand défi. Il nous faut d'abord des installations adéquates. Tous les centres ne peuvent pas être appelés « centres scolaires-communautaires ». Dans les espaces loués, il n'y a que des salles de classe; il n'y a même pas de gymnase, ni de salle de musique ni de théâtre. Il est très difficile d'être autosuffisant quand on n'a pas d'installations pour offrir des services adéquats.
    Par ailleurs, on n'arrive toujours qu'à essayer de combler nos budgets et de vendre nos services. Parfois, on ne respecte pas notre mandat. On n'arrive pas à joindre la clientèle quand on le veut, puisqu'on est obligés de présenter des spectacles anglophones et des groupes anglophones dans nos installations pour être en mesure de payer les factures.
    C'est cela, en gros, notre plus grand défi actuellement. Les ressources humaines, les installations et les ressources financières ne sont pas en mesure de combler les besoins actuels. L'envers de la médaille, c'est que la création de ces écoles et des centres est probablement notre plus grand succès. On voit un rayonnement. On est en train de repêcher une génération perdue, et même deux générations dans certaines régions.
    À Souris et à Rustico, par exemple, on doit la survie de la langue aux grands-parents et parfois aux arrières-grands-parents, qui sont acadiens, parce que depuis plusieurs générations, les francophones n'ont pas eu l'occasion de se faire éduquer en français. Mais ces gens-là sont fiers. On le voit dans les visages, comme on le voit dans les communautés. Ils inscrivent leurs enfants aux écoles de langue française sans en connaître un seul mot, mais c'est ce qu'ils veulent pour leurs enfants. Ils suivent des cours de français pour pouvoir tenir des conversations en français avec leurs enfants.
    Tout cela donne de la visibilité à une communauté qui a une dualité linguistique. Tout cela nous appartient, en tant que Canadiens. À l'Île-du-Prince-Édouard, on est en train de le transmettre de façon incroyable. C'est cela, notre plus grand plaisir. Notre plus grand plaisir, c'est aussi d'aller dans une région où on ne s'attend pas à avoir une rencontre en français, et tout à coup, de rencontrer un comité de parents dont 12 parents s'efforcent de parler dans une langue qu'ils connaissent à peine pour communiquer avec nous. Ils nous montrent qu'ils sont fiers, que même si c'est dommage qu'ils n'aient pas eu la chance d'aller à une école française, ils ne veulent pas perdre une autre génération. Ces parents inscrivent donc leurs enfants dans une école qui est tout à fait inadéquate, alors qu'en face, ou presque, une école a tout, mais est presque vide à cause de la dénatalité.
    C'est maintenant le tour de M. André.
    Si le Programme de contestation judiciaire disparaît, cela peut représenter un recul important pour les communautés francophones hors Québec. Voyez-vous d'autres solutions? Si ce programme disparaît, que fait-on? Comment s'organise-t-on? Comment va-t-on réussir, finalement, à faire valoir nos droits et nos besoins?
    Par ailleurs, les coupes dans les programmes d'alphabétisation vous ont-elles affectés? J'aimerais que vous m'en parliez.
    Ensuite, concernant le développement économique, vous avez indiqué, madame Gilman, qu'on finançait des études de faisabilité, mais qu'on ne finançait pas de projets concrets. Y a-t-il actuellement des projets, à l'Île-du-Prince-Édouard, qui sont importants pour la promotion de la francophonie et de la culture et qui manquent de ressources? Y a-t-il des initiatives importantes et structurantes pour la francophonie de l'Île-du-Prince-Édouard qui manquent de ressources?

  (1010)  

    Trois questions pour cinq minutes, c'est bien.
    Oui, il y en a. À l'Île-du-Prince-Édouard, le réseau a fait un plan d'action pour la passation des services de santé en français. C'est un beau plan, très bien détaillé, très faisable, mais il n'y a du financement nulle part pour le mettre en oeuvre. Il serait important pour les services de santé en français à l'Île-du-Prince-Édouard que le programme de financement débloque au gouvernement fédéral pour faire avancer ce dossier.
    Le financement annoncé ne correspond-il pas au plan d'action?
    Non, pas en ce moment. Aucun programme, à ma connaissance, ne peut aider à la mise en oeuvre de ce programme.
    En ce qui a trait au Programme de contestation judiciaire, voyez-vous des solutions ou des façons de pallier cela? Je crois que l'alphabétisation est le domaine de Mme Thorne.
    En ce qui concerne le Programme de contestation judiciaire, ce sont nos relations avec notre gouvernement provincial qui ont été le plus critiques pour nous.
    Comme je l'ai dit plus tôt, je ne pense pas que, la plupart du temps, il s'agit d'un manque de volonté. Notre gouvernement provincial manque de ressources pour respecter ses obligations en matière d'éducation pour sa minorité francophone. Si le gouvernement fédéral et notre gouvernement provincial concluaient un partenariat plus solide, de sorte que notre gouvernement puisse disposer du financement nécessaire pour combler les besoins de nos communautés, je suis presque certaine qu'il respecterait ses obligations en la matière.
    En effet, notre ministre l'a bien dit lors de la conférence ministérielle. C'est grâce au Programme de contestation judiciaire que l'Île-du-Prince-Édouard a pu avoir ses écoles. Tels sont les moyens de financement quand on supplée à un gros déficit : c'est difficile de prendre une décision qui comporte d'importantes sommes d'argent pour une minorité. De fait, c'est difficile pour un gouvernement en situation déficitaire.
    De plus, cela se transpose également à notre prochain plan au regard du Programme de contestation judiciaire, qui visait plutôt les services à la petite enfance. À l'Île-du-Prince-Édouard, on voit les services à la petite enfance comme faisant plutôt partie du domaine privé. C'est bien vrai pour les anglophones, qui bénéficient d'une grande variété de services. C'est une affaire assez lucrative pour les anglophones. Toutefois, pour les francophones, il est plus difficile de recruter des ressources humaines et les ressources matérielles coûtent beaucoup plus cher. En outre, puisqu'il n'existe qu'un centre par région et que notre population est moins nombreuse, nos services s'adressent presque exclusivement aux élites. Et ce n'est vraiment pas ce que nous voulons; nous voulons que ce service soit accessible à tout le monde.
    Mille deux cents dollars par année ne favorisent pas nécessairement l'accessibilité de ce service, surtout quand les gens doivent voyager une heure de plus pour déposer leur enfant à la garderie francophone.
    À notre avis, un plus grand engagement du gouvernement fédéral envers le gouvernement provincial serait certainement un atout qui pourrait combler le vide créé par l'élimination du Programme de contestation judiciaire.
    Les coupes en alphabétisation vont-elles vous toucher?
    Absolument.
    Ce n'est pas nécessairement mon domaine, mais je sais que le taux d'analphabètes chez les francophones de l'Île-du-Prince-Édouard est beaucoup plus élevé que chez les anglophones. Beaucoup de personnes de 40 à 60 ans ont été éduquées dans une langue qui n'était pas la leur. Ils ont été forcés de fréquenter des écoles anglophones, de sorte qu'ils éprouvent parfois de la difficulté autant en anglais qu'en français.
    Dans nos communautés rurales, c'est un grand défi. Dans toutes les régions, nous faisons encore face à de grandes difficultés en alphabétisation familiale. Nous venions à peine de commencer à faire de grands pas. Nous commencions à pouvoir offrir des programmes comportant des outils en français.
    Je répète que lorsque nous avons besoin d'outils pour n'importe quel programme d'enseignement, d'accompagnement ou de dépistage, cela coûte beaucoup plus cher parce que nous n'avons pas d'outils à portée de la main dans notre province.

  (1015)  

    Je vais passer mon tour cette fois. Nous allons entreprendre un autre tour de table, qui sera de trois minutes.
    Je vais aussi permettre à M. Petit de poser une question. En faisant un tour de table semblable, on donne à tous les députés la chance de poser des questions.
     Monsieur D'Amours, vous avez trois minutes pour les questions et réponses.
    Merci, monsieur le président. J'avais compris. Je vous remercie aussi de nous céder votre temps. C'est bien apprécié.
    Ma circonscription, Madawaska—Restigouche, englobe une portion du nord du Nouveau-Brunswick. C'est difficile d'attirer et de retenir des professionnels de la santé, même dans une région où le taux de francophones est très élevé.
    Avez-vous des moyens miraculeux pour attirer et retenir des professionnels de la santé dans vos différentes communautés? Est-ce que cela fonctionne bien? Si tel est le cas, avez-vous fait certaines choses? Vous êtes-vous basés sur quelque chose du genre de La grande séduction pour convaincre les professionnels de demeurer dans vos régions?
    C'est quasiment tout ce qu'on a, nos beaux paysages et notre qualité de vie. On est tous dans le même pétrin. Nous formons des gens chez nous, à l'Île-du-Prince-Édouard, et malgré tout, certaines infirmières choisissent de déménager en Alberta. Le manque actuel de mobilisation de la population nous affecte également beaucoup.
    On essaie présentement de travailler de concert avec une coopérative d'immigration, qui pourrait peut-être nous aider à combler quelques postes dans le domaine de la santé, mais nous avons le même problème que toutes les provinces maritimes. Ce problème est encore plus grave à l'Île-du-Prince-Édouard du fait qu'il est doublement difficile d'y vivre en français.
    Comme Mme Gilman l'a mentionné, nous avons un plan qui vise à remédier au problème de rétention de la main-d'oeuvre et à établir une présence francophone dans tous les établissements de santé de l'Île-du-Prince-Édouard, ne serait-ce qu'en comblant les trois quarts des postes. Mais la dotation de ces postes requiert du financement, et nous ne l'avons pas.
    Madame Gilman, nous avons rencontré récemment à Ottawa le président du Consortium national de formation en santé, M. Patry. Il nous a dit que le renouvellement du financement devait se faire en 2008 et que, présentement, il n'y avait pas grand-chose qui se faisait. En fin de compte, il y a urgence dans votre cas, car si on ne renouvelle pas votre financement, la crise pourrait s'accentuer dans votre région. Si vous en vivez déjà une, elle pourrait s'amplifier...
    Merci, monsieur D'Amours; vos 20 secondes sont écoulées.
    Monsieur Petit.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous pour votre présence [Note de la rédaction : difficultés techniques].
    Comme M. Godin l'a dit, c'est la première fois en 25 ans qu'on visite les communautés en situation minoritaire. Je suis heureux que ce soit mon gouvernement qui le fasse, et puisque je suis nouvellement élu, j'en profite.
    Vous avez mentionné aussi, monsieur Landry, et peut-être allez-vous couvrir [Note de la rédaction : difficultés techniques].

  (1020)  

    Je pense que nos difficultés techniques sont causées par les BlackBerry. Je suggère qu'on ferme ces appareils pendant la réunion.
    Monsieur Landry, vous avez mentionné plusieurs choses qui ont attiré mon attention.
    Tout d'abord, je suis issu d'un mariage exogame et mes enfants le sont également. Je peux voyager aussi bien chez les gens de la minorité anglophone que chez ceux de la minorité francophone. Je connais à peu près tous les problèmes qui y sont rattachés.
    On préconise un fédéralisme d'ouverture, mais il y a un élément provincial. Vous avez tous parlé de votre province respective. Monsieur Landry, vous avez dit qu'il faudrait peut-être que le plan d'action actuel tienne compte des provinces afin qu'on s'entende mieux avec elles.
    Pouvez-vous en parler davantage?
    J'ai écrit un article sur ce sujet récemment, et notre mémoire le cite en référence. Je vais utiliser l'exemple de Mme Thorne, qui illustre bien le sujet.
    Le centre scolaire-communautaire représente un bel exemple pour ce qui est de l'épanouissement des communautaires minoritaires, que la Loi sur les langues officielles vise à favoriser. D'ailleurs, le projet de loi C-3 vient renforcer cette loi.
    L'éducation est de compétence provinciale. Si le gouvernement provincial dit qu'il est de son devoir de s'occuper du volet scolaire et que le gouvernement fédéral s'occupe du volet communautaire, on obtient un bel amalgame avec pour résultat un beau centre scolaire-communautaire. Ce centre offrirait des activités communautaires permettant à toutes les générations de se rencontrer dans le cadre de toutes sortes d'activités. Pour les jeunes, il y aurait une école. On pourrait même y ajouter une garderie.
    Grâce à un tel établissement, on pallie les lacunes de la communauté. Cela est d'autant plus important dans les grands centres urbains, où il est très difficile de trouver une école près de chez soi.
    Voilà un bel exemple de collaboration.
    Merci, monsieur Landry.
    Monsieur André.
    Monsieur Godin, étant donné que nous sommes au Nouveau-Brunswick, dans votre province, et que vous avez passé votre tour, je vous donne les trois minutes qui me sont imparties.
    Merci, vous êtes très gentil. On va donc prendre deux minutes et 50 secondes.
    On arrive à la fin de la séance, parce qu'on voudrait arrêter avant 10 h 30 et reprendre à 10 h 30.
    J'aimerais que vous répondiez assez vite à la question que je vais vous poser.
    Quels sont les principaux défis que la communauté devra relever dans les années à venir? Que demandez-vous? Que recommandez-vous au Parlement?
    Il y a une chose qui n'a pas été mentionnée ici ce matin.
    C'est ce qu'on veut entendre: des choses qui n'ont pas été mentionnées.
    Dans notre communauté francophone, nous n'avons pas de développement économique durable, ce qui fait que notre communauté se dissipe. Il faut toujours être présents pour attraper toutes les occasions. On a parlé de l'alphabétisation. La scolarisation est ce qui nourrit la population, mais on doit trouver la chose ou la machine qui arrivera à nous donner une économie durable et qui nous permettra de nous doter d'un système de santé et d'un système scolaire.
     Si nous avons besoin d'aide, ce sera pour cela.
    Au sujet du principal défi, je souhaite que le fédéral exerce son leadership et travaille avec les provinces, les territoires et les communautés dans le véritable esprit de la dualité linguistique canadienne, dans le but d'établir un véritable plan d'action. Si le Canada arrivait à se doter d'un plan bien planifié, qui intégrerait les provinces et les territoires, ainsi que les communautés elles-mêmes, qui s'en trouveraient responsabilisées, au lieu de simplement semer de l'argent ici et là, cela pourrait être un exemple mondial. Si on réussissait à faire cela, beaucoup d'autres questions pourraient être réglées.

  (1025)  

    J'aimerais vous remercier sincèrement, au nom du Comité permanent des langues officielles.
    Le comité suspend ses travaux jusqu'à 10 heures 30. À 10 heures 30, nous entendrons des témoins de la Nouvelle-Écosse.
    Merci bien et bon retour chez vous. Bonne journée.

  (1025)  


  (1035)  

    Nous allons maintenant passer à nos invités de la Nouvelle-Écosse. Je vous souhaite la bienvenue. Comme vous étiez ici ce matin au début de la séance, vous connaissez déjà l'objet de la réunion. Je ne vais donc pas vous faire perdre votre temps en me répétant. Nous allons commencer.
    Est-ce que Mme Nicole Inamura va être présente ?
    Elle m'a dit hier après-midi que si tout allait bien, elle serait présente, mais étant donné qu'elle avait mal au dos, elle ne savait pas si elle pourrait faire le trajet jusqu'ici.
    Par contre, elle n'a pas envoyé de message disant qu'elle ne viendrait pas.
    On vous avait demandé de vous limiter à trois minutes, mais comme il y a des invités en moins, on pourrait vous accorder 10 minutes. Je suis certain que vous avez beaucoup de choses à nous dire. Donc, s'il ne vous est pas trop difficile de vous ajuster, vous pourrez profiter de ce temps supplémentaire. Monsieur d'Entremont, pour vous avoir déjà vu à l'oeuvre, je sais que ça ne sera pas un problème pour vous.
    Vous pouvez commencer.
    En fait, c'est moi qui vais commencer.
     Merci beaucoup. Nous apprécions grandement de pouvoir vous rencontrer et de faire valoir certaines préoccupations qui touchent la Nouvelle-Écosse.
    Je m'appelle Alphonsine Saulnier et je suis présidente du Réseau santé Nouvelle-Écosse, qui existe depuis 2003. D'après ce que j'ai compris ce matin, vous connaissez bien la Société Santé en français, le réseau national, et les 17 réseaux qui existent au Canada. Puisque je vais avoir la parole pendant 10 minutes, je vais vous parler un peu de la communauté acadienne de la Nouvelle-Écosse et de ses préoccupations. Soit dit en passant, nous avons déposé un mémoire ce matin. Le texte au complet s'y trouve.
    La communauté acadienne de la Nouvelle-Écosse date du XVIIe siècle. Vous connaissez sans doute l'histoire de Grand-Pré. De nos jours, les Acadiens et francophones de la province constituent environ 4 p. 100 de la population totale, ce qui représente environ 9 000 habitants. Les effectifs de cette communauté sont stables depuis 50 ans, mais son pourcentage tend à diminuer. Quoique notre poids démographique soit faible, nous sommes concentrés dans des communautés rurales assez homogènes, ce qui nous confère un certain poids politique. Par exemple, dans les régions d'Argyle et de Clare, au sud-ouest de la province, les Acadiens forment la majorité. Deux concentrations de population acadienne et francophone se situent aussi dans des régions urbaines, soit dans la région métropolitaine de Halifax-Dartmouth et à Sydney, au Cap-Breton. Dans quatre de nos comtés, les Acadiens forment plus de 15 p. 100 de la population.
    En Nouvelle-Écosse, l'absence de longue date d'une loi ou de politiques provinciales en matière de services en français explique pourquoi les services de santé en français sont si peu accessibles. Quand ils existent, c'est dû à l'acharnement des individus et des organismes communautaires. Les acquis, en ce qui concerne la prestation de services en français, sont très souvent le résultat du hasard, et la communauté en craint la perte. Les propos recueillis dans nos huit régions acadiennes lors des consultations tenues en 2002, 2003 et 2005-2006 auprès de la population acadienne et francophone attestent que les services en français sont peu accessibles.
    Toutefois, on a bon espoir que la loi portant sur les services gouvernementaux en français, promulguée à l'automne 2004, et les règlements qui en découleront inciteront les régies régionales de la santé à prendre des mesures allant dans ce sens. La mise en oeuvre de la loi et des règlements est prévue pour le 31 décembre 2006. De fait, les règlements ont été affichés hier dans le site web du gouvernement. Une période de deux semaines est prévue pour les consultations auprès de la communauté.
    Il reste que certaines régions reçoivent très peu de services en français. Je pourrais vous citer l'exemple de la région de Chéticamp, qui est majoritairement francophone. La régie a accepté d'exiger qu'à l'intérieur du système de santé, les personnes ayant un accès direct à la clientèle soient bilingues. Cette exigence fait maintenant partie du processus d'embauche. Pour la Nouvelle-Écosse, il s'agit là d'une rare exception.
    Dans les autres régions, les services sont très peu accessibles, bien qu'un certain nombre d'Acadiens et de francophones travaillent dans des hôpitaux ou autres services de santé. À l'heure actuelle, il n'est pas question d'offrir des services en français, mais il va de soi que les nouveaux règlements vont changer les choses.
    Une des régies les plus importantes de la province, soit Capital Health, est située dans la région de Halifax. On lui a confié la responsabilité des soins tertiaires et des soins spécialisés. Étant dispensés au centre de la province, ces services sont très rarement accessibles en français. De plus, les citoyens doivent se rendre sur place, ce qui implique trois heures de route. Je pense particulièrement aux femmes des régions du Cap-Breton et du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, qui n'ont pas accès à des services spécialisés, sauf dans la région métropolitaine.

  (1040)  

    Je voudrais maintenant vous parler de Réseau Santé Nouvelle-Écosse, qui se consacre avant tout à l'accessibilité des services de santé et au mieux-être en français en Nouvelle-Écosse. Notre réseau a été fondé en 2003 suite à un projet de consultation dirigé en 2002 par la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse et intitulé « Les services de santé en français en Nouvelle-Écosse ». Grâce à l'appui financier de Santé Canada et de Patrimoine canadien, la FANE, de concert avec ses partenaires, a consulté la communauté acadienne et francophone, les professionnels de la santé ainsi que les dirigeants et décideurs du domaine de la santé relativement à des stratégies d'action en matière de services de santé en français. Pour ce faire, une tournée de consultations publiques dans huit régions de la province a eu lieu.
    C'est en décrivant la situation telle qu'elle était vécue dans chacune des régions et en profitant de l'expertise des professionnels de la santé que les participants ont précisé les enjeux, les problèmes, les préoccupations, les initiatives existantes, les besoins d'intervention et les stratégies pouvant améliorer l'accès aux services de santé et le mieux-être en français. Les initiatives proposées favorisent le renforcement des capacités communautaires par l'intermédiaire de stratégies et de politiques relatives à la prestation de services de santé en français.
    J'aimerais, à ce stade de mon exposé, souligner la bonne volonté du ministère de la Santé de notre province. Avec l'appui de l'Office des affaires acadiennes de la Nouvelle-Écosse, il a embauché en février 2004 une coordonnatrice des services de santé en français. Il a été le premier à embaucher une personne chargée spécifiquement du dossier des services en français. De plus, ce même ministère réalise depuis trois ans un programme de sensibilisation et de conscientisation à la compétence culturelle. Il s'agit ici des groupes minoritaires habitant cette province ainsi que de l'importance de la langue et de la culture des utilisateurs des services. Ce programme de diversité culturelle et d'inclusion sociale a été conçu à l'intention de tous les prestataires de services de soins de santé primaires. En ce qui concerne la réussite de ces initiatives, nous avons obtenu un engagement de la part du gouvernement de la province, en l'occurrence de son ministère de la Santé, ainsi que de plusieurs partenaires importants. Il en revient maintenant au gouvernement du Canada de faire de même.
    Depuis quelques années, Santé Canada manifeste la volonté de s'ouvrir à cette question. En septembre 2001, le Comité consultatif des communautés francophones en situation minoritaire a déposé son rapport au ministère de la Santé. Ce rapport décrit de façon assez précise cinq leviers qui doivent être créés et utilisés en vue d'assurer le développement des services de santé en français en milieu minoritaire. Nous souscrivons au plan d'action proposé à cet égard, de façon à faciliter les initiatives des communautés et améliorer l'accessibilité aux services de santé en français.
    Depuis ce temps, Santé Canada a manifesté davantage sa volonté en appuyant de façon tangible les initiatives suivantes : le réseautage, jusqu'en mars 2008; le Fonds d'adaptation pour les soins de santé primaires, qui nous permet, en Nouvelle-Écosse, de bénéficier de la mise en oeuvre de cinq projets visant l'amélioration de l'accessibilité aux services de santé en français, entre autres un répertoire des professionnels de la santé pouvant offrir des services en français, un programme pour des jeunes et des aînés en santé, et le développement et l'adaptation de matériel éducatif, de promotion et de prévention. De plus, nous venons de terminer un autre projet, intitulé « Préparer le terrain ». Ce dernier nous a permis de planifier une stratégie visant l'amélioration de l'accès aux soins de santé primaires et de faire à ce sujet des recommandations au ministère provincial de la Santé, aux régies régionales de la santé et aux agences responsables de la prestation des services de santé.
    Il est évident que pour être en mesure d'offrir des services de santé en français, il faut que les professionnels de la santé soient sur place. Comme vous avez pu l'entendre, la situation à l'Île-du-Prince-Édouard n'est pas du tout différente de la nôtre. La formation ne doit pas se limiter à la médecine familiale, quoique nous considérions celle-ci primordiale, mais elle doit comprendre les professions du domaine des sciences de la réadaptation ou celles que rassemblent une équipe interdisciplinaire responsable de la prestation des services de santé primaires.
    En terminant, j'aimerais réitérer l'importance du rôle que doit jouer le gouvernement fédéral en matière de santé en français. En tant que protecteur des minorités de langue officielle, ce dernier doit contribuer de façon évidente à leur développement.

  (1045)  

    Nous lui rappelons sa responsabilité à l'égard de la santé et comptons sur votre appui.
     J'aimerais formuler à votre intention les deux recommandations suivantes, que vous pourriez adresser au gouvernement fédéral.
    Nous proposons d'abord que le gouvernement fédéral crée un programme fédéral-provincial conjoint comparable au programme des langues officielles dans le domaine de l'enseignement, de façon à soutenir le développement des services de santé en français en milieu minoritaire. C'est à partir d'un tel programme que seront assurés les partenariats et la pérennité. Nous suggérons ensuite que le gouvernement fédéral ajoute à la Loi canadienne sur la santé un sixième principe portant sur la dualité linguistique.
    Si vous le permettez, je vais réitérer les points suivants. C'est le 31 septembre 2006 que nous, le Réseau santé Nouvelle-Écosse, comme tous nos réseaux collègues d'un bout à l'autre du pays, perdrons l'appui financier du gouvernement visant à organiser les services de santé en français. L'importance d'un appui financier pour l'organisation des services en 2007-2008 et à long terme est avérée.
    Grâce à l'appui acharné de la Société Santé en français, nous pourrons continuer de nous consacrer à deux dossiers jusqu'en mars 2008. Il reste qu'il ne s'agit que de deux dossiers seulement, soit celui de la formation des professionnels de la santé, le dossier principal du Consortium national de formation en santé, avec qui nous travaillons en étroite collaboration, et celui du réseautage, au moyen duquel nous avons consulté et engagé nos partenaires dans le cadre de l'initiative visant à améliorer l'accès aux services de santé en français. Nous avons établi des partenariats très importants et très efficaces avec l'Office des affaires acadiennes, le ministère de la Santé de la province et d'autres organismes, dont le CNFS.
    Si je peux faire une analogie, je dirai que l'avion a quitté la piste d'atterrissage, mais que sans un appui soutenu du fédéral, il risque de s'écraser.
    Merci beaucoup.

  (1050)  

    Merci, madame Saulnier.
    Monsieur d'Entremont.
    Avant d'aborder le sujet de la Fédération acadienne, je désire faire un ajout aux propos de Mme Saulnier.
    Le vice-président (M. Yvon Godin): Tout cela en 10 minutes.
    M. Paul d'Entremont: Oui, c'est très court.
    Elle a dit que nous n'avions pas d'appui pour des projets  ponctuels  depuis la fin de l'étape en septembre dernier. C'est vrai. Bien que ce soit non officiel, le ministre n'en ayant pas encore fait l'annonce, nous nous préparons à réaliser deux projets, jusqu'en mars 2007. Après cela, il n'y a encore rien de tangible.
    Mesdames, messieurs, au nom du président de la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse, M. Désiré Boudreau, et de son directeur général, Jean Léger, qui tous deux sont dans la ville de Québec aujourd'hui même, je vous remercie de nous donner l'occasion de vous présenter la perspective des Acadiens et francophones de la Nouvelle-Écosse en ce qui concerne les enjeux qui sont les leurs et les grands défis qu'ils doivent relever à titre de communautés de langue officielle au Canada.
    En plus du groupe qui est à Québec aujourd'hui, il y a aussi un groupe qui voulait être ici aujourd'hui, mais le Commissariat aux langues officielles est à Halifax, Halifax ayant été choisie comme l'une des quatre villes où l'on fait l'étude de la vitalité d'une communauté minoritaire dans un centre urbain. Nous vous offrons les excuses de ces personnes qui ne peuvent être ici avec nous aujourd'hui.
    Voici quelques points. Premièrement, comme vous le savez et comme l'a dit Mme Saulnier, notre communauté compte plus de 35 000 Acadiens francophones de langue maternelle. Nous avons hâte d'avoir les chiffres du dernier recensement, pour savoir où nous en sommes rendus à cet égard. De plus, nous comptons une grande communauté immigrante dont la langue maternelle, que je qualifie souvent de « deuxième langue maternelle », est le français, surtout dans la région urbaine de Halifax-Dartmouth.
    La FANE joue le rôle d'organisme porte-parole des communautés acadienne et francophones et compte 23 organismes membres représentant la plupart des facettes de la société. En plus de ces organismes, la FANE s'occupe de plusieurs dossiers, dont le Programme d'accès communautaire, le PAC — jusqu'à ce qu'il arrête —, et de dossiers d'immigration, en partenariat avec la province de Nouvelle-Écosse et Immigration Canada
    Nos communautés acadienne et francophones sont réparties dans plusieurs régions d'un bout à l'autre de la province. Si, de là où j'habite, Pubnico-Ouest, je dois me rendre à Sydney à l'extrême nord, j'ai presque 10 heures de route à faire. La province de Nouvelle-Écosse est toute petite, mais elle est quand même assez grande lorsqu'on tient compte des communautés acadienne et francophones de la province. Le défi des distances est important, comme l'est la concertation communautaire.
    Tout de même, nous réussissons avec différents outils à organiser cette concertation et permettons à la communauté de se développer et de s'épanouir jusqu'à un certain point, grâce à notre travail avec les moyens du bord. Nous avons quand même des groupes très bien organisés et structurés, qui ont beaucoup d'objectifs de développement, mais souvent, très peu de ressources pour les réaliser.
    Nous devons toujours poursuivre nos efforts pour la survie de nos communautés, le statu quo pour notre communauté signifiant actuellement le recul. Il est important, d'ailleurs, que le gouvernement fédéral nous accompagne tout au long de ce développement avec des valeurs d'ouverture, d'innovation et de respect.
     Comme on le sait, au cours des dernières années, le gouvernement fédéral a été la clé de ce maintien et de cette survivance, et c'est grâce au financement du ministère du Patrimoine canadien, par l'intermédiaire des ententes Canada-communautés, que nos régions ont pu se doter d'un minimum d'infrastructures communautaires. Cet effort et cet appui du fédéral doivent se poursuivre, se renforcer et s'améliorer.
    La priorité ultime de nos communautés est de conclure des ententes-cadres ou de collaboration avec le gouvernement du Canada, afin d'assurer la mise en oeuvre de notre plan d'action ou de notre plan de développement global, qui est la carte routière du développement de nos communautés et qui est validé régulièrement par les communautés. Or, nos communautés n'ont pas encore renouvelé leur entente avec le ministère du Patrimoine canadien.
     Toute incertitude risque de tuer l'initiative des bénévoles et des employés, donc de fragiliser la situation de nos communautés. La raison principale de cette situation dans laquelle nous nous trouvons est, selon nous, le peu d'ouverture du gouvernement à élaborer de nouvelles approches de développement avec les communautés.
    Nous demandons donc que ces ententes soient renouvelées dans les plus brefs délais, dans le respect des besoins des communautés. Les priorités des communautés doivent être les priorités inscrites dans ces ententes et les ressources nécessaires à leur réalisation doivent y être.

  (1055)  

Donc, ces nouvelles ententes devraient être basées sur les priorités des communautés, et non pas sur les priorités des fonctionnaires ou, dans certains cas, des politiciens.
    Depuis plusieurs années, nous avons ce plan de développement global pour développer nos communautés, mais le gouvernement trouve souvent des raisons de ne financer qu'une infime partie de ce qui peut assurer la vitalité de nos communautés.
     Nous voulons même que le gouvernement fédéral signe avec nos communautés — comme il l'a fait avec les communautés autochtones —  des ententes spécifiques par secteur, comme on vient de le voir dans le cas de la santé et de l'économie sur le plan national. Il faudrait aussi que cela se fasse sur le plan provincial, pour vraiment donner aux communautés le coup de pouce qu'il leur faut pour encourager et surveiller le développement.
    Au cours des dernières décennies — M. Rodrigue Landry en a parlé —, le français a perdu beaucoup de terrain dans les communautés francophones à l'extérieur du Québec. Pourquoi cela se produit-il, alors que le gouvernement fédéral dit établir des programmes et des politiques qui visent à appuyer ces communautés? Les communautés ne sont-elles pas celles qui savent ce dont elles ont besoin?
    Bien souvent, les programmes et les politiques établis ne sont pas de nature à assurer un développement à long terme et ne bénéficient pas d'un financement adéquat. Ils sont toujours établis sur des bases temporaires et quasi incertaines, ce qui a une grande incidence sur les bénévoles et les employés : on épuise ces deux groupes. Il y a aussi eu l'abolition de certains programmes. Il en a été question plus tôt ce matin, et je n'y reviendrai pas pour le moment.
    Nous devons trouver un meilleur moyen d'assurer un dialogue régulier, constant et respectueux entre les deux parties, pour arriver à faire ce qu'il y a de bien pour les communautés. Nous ne pouvons pas non plus passer sous silence les défis liés aux exigences administratives des différents programmes. C'est souvent très lent, ardu, et différent d'un ministère à l'autre. Pourtant, tous reçoivent des directives du Conseil du Trésor. Je le vois en santé et dans d'autres domaines : les exigences ne sont pas toujours les mêmes. De plus, il y cette lenteur dans la prise de décision lorsqu'il s'agit d'annoncer qu'un projet a été approuvé.
    Mentionnons d'autres points. Le Programme d'accès communautaire a été coupé. Pour les communautés, c'est une grande perte. En outre, nous voulons réitérer l'importance d'établir un processus de consultation adéquat auprès des communautés dès maintenant, pour ne pas qu'il y ait de temps mort entre les plans, soit le plan Dion ou le Plan d'action pour les langues officielles et les plans des communautés.
    En terminant, nous voulons aussi appuyer publiquement notre organisme national, la FCFA, dans le dossier du contrôle judiciaire récemment déposé en vue de réévaluer la décision du gouvernement fédéral d'abolir le Programme de contestation judiciaire. Nous joignons notre voix à celles de tous les autres organismes du Canada qui décrient les récentes compressions budgétaires touchant nos communautés, l'Initiative canadienne sur le bénévolat, Condition féminine Canada, l'alphabétisation, etc.
    Sur ce, je vous remercie de nous avoir écoutés.

  (1100)  

    Merci, monsieur d'Entremont et madame Saulnier.
    Nous allons maintenant commencer notre premier tour de questions avec M. Simard.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à nos invités de s'être déplacés ce matin de la Nouvelle-Écosse.
    Monsieur d'Entremont, ce matin, nous avons entendu les gens de l'Île-du-Prince-Édouard dire qu'il y avait sur l'île 6 000 francophones, mais 16 000 parlants français. Chez nous, au Manitoba, il y a 45 000 francophones de souche, mais 110 000 parlants français. Ces chiffres commencent à être intéressants. On a investi dans le plan d'action au-delà de 50 p. 100 des fonds du domaine de l'éducation, de l'immersion, etc.
    Je voudrais savoir si des efforts se font chez vous pour mieux intégrer à la communauté les gens du domaine de l'immersion ou ceux de l'organisme Canadian Parents for French, pour les inviter à participer à vos activités. Un effort est-il fait de ce côté?
    Oui, un effort est fait, non seulement avec les gens de Canadian Parents for French, mais aussi avec l'association des immigrants, parce qu'il est question de parlants français. J'ai dit plus tôt qu'il y avait des immigrants dont le français est la langue maternelle ou la deuxième langue maternelle. Lors du recensement, ces gens ne sont pas comptés comme des parlants français. C'est pour cela que j'ai été heureux de constater que la dernière question du dernier recensement était un peu plus claire. Souvent, notre grand défi, nous devons le relever avec ces gens qui nous disent qu'ils parlaient français, mais qu'ils n'ont pas reçu leur instruction en français. Qu'est-ce que je dis devant cela?
    Oui, il y a les Canadian Parents for French, les immigrants et d'autres organismes. De plus en plus, il s'agit pour ces groupes de travailler en collaboration afin de former une masse critique et de devenir une force.
    D'ou viennent habituellement les immigrants francophones qui vont chez vous?
    Beaucoup viennent du Liban. Nous en avons reçu un qui est arrivé en tant que médecin. Après avoir quitté son pays, il est passé par la France, et il aurait ensuite travaillé au Danemark pendant quelques années. Il a voulu venir au Canada, et la Nouvelle-Écosse a été pour lui la province la plus accueillante dans tout le processus d'immigration au pays. Il s'est installé, et en une semaine, sa clientèle était complète. [Note de la rédaction : inaudible] plus de 80 p. 100 des parlants français de la communauté urbaine de Halifax.
    Je trouve cela intéressant. Hier, à St. John’s, les gens de Terre-Neuve nous ont dit que leur marché cible pour l'immigration était l'Europe de l'Est. Chez nous, c'est l'Afrique française et chez vous, c'est le Liban.
    Actuellement, c'est d'abord la communauté libanaise, et c'est ensuite la communauté arabe.
    C'est intéressant que ce soit aussi varié au pays.
    Mme Saulnier a parlé de la Régie régionale de la santé Capital du grand Halifax. Les parlants français et les Arabes y sont maintenant à part égale.
    Madame Saulnier, en ce qui concerne la santé, y a-t-il un centre de santé de langue française à Halifax?
    À Halifax, il n'y a pas de centre de santé en français. À l'heure actuelle, c'est tout à fait par hasard si on a accès aux services de santé en français à Halifax. C'est pourquoi le répertoire des professionnels est devenu très important pour nous. On commence à situer les professionnels. On trouve un certain nombre de francophones dans un centre, mais c'est un centre anglophone qui fonctionne en français. À Chéticamp, qui est une région très homogène, il y a un système qu'on pourrait officieusement appeler un centre francophone.
    Ah, oui?

  (1105)  

    Chez nous, nous avons un centre de santé qui connaît tellement de succès que les anglophones veulent en devenir les patients. Plus de 50 p. 100 de la clientèle est maintenant anglophone. Il serait intéressant d'envisager cette option. Je ne sais pas ce que vous planifiez pour l'avenir. J'imagine que cela fait partie de vos plans futurs.
    Oui, absolument. Tu parles probablement de Denis Fortier...
    C'est cela.
    ... que je connais bien. En fait, c'est un modèle que nous surveillons continuellement. Dans la région où j'habite, on planifie actuellement la création d'un centre de santé, et on étudie toute la question des services en français. Cela touche de près le recrutement et la rétention.
    Au Manitoba, on étudie aussi la possibilité d'avoir des cliniques ambulantes. Quand les populations francophones sont dispersées, c'est plus pratique de faire circuler les gens. Est-ce une option que vous considérez aussi?
    Cela viendra probablement dans un deuxième temps. Nous sommes tellement à la base des services, à l'heure actuelle, que nous ne considérons que les services primaires. Avec les règlements qui sont là et le plan sur trois ans de l'implantation des règlements, c'est évident qu'on s'en va vers la deuxième étape; il sera alors question de ce genre d'équipe.
    Vous avez parlé de la formation comme d'un des plus grands défis. Je pense d'ailleurs que c'est l'un des plus grands défis partout au pays. Avez-vous des universités où vous pouvez former des infirmières et des médecins? Avez-vous plutôt des ententes avec Moncton ou avec Ottawa? Comment cela fonctionne-t-il?
    Par l'entremise du CNFS, on commence à avoir des choses en place à l'heure actuelle. Nous avons des institutions. Il y a l'Université Sainte-Anne en province. On a pu mettre en place, même au niveau collégial, certains programmes, entre autres un programme de soins ambulanciers paramédicaux. Nous avons pu, au cours des quatre dernières années, former 50 ambulanciers. Donc, on a dans la province 50 ambulanciers paramédicaux francophones qui seront prêts, dès que les règlements seront là, à entrer dans le système. C'est un des endroits où on a connu un beau succès.
    Du côté du service social, nous avons pu conclure une entente avec l'Université Laurentienne à Sudbury, qui a un programme à distance en français. Nos étudiants peuvent donc demeurer chez nous. Je crois que c'est là la clé de la rétention. On peut bien recruter des professionnels, mais ils viennent pour un an ou deux, prennent de l'expérience, puis s'en vont ailleurs.
    L'hon. Raymond Simard: On les perd.
    Mme Alphonsine Saulnier: Ces deux-là sont maintenant en place. Nous négocions à l'heure actuelle avec l'Université de Moncton pour le baccalauréat en sciences infirmières. Il faudra évidemment attendre un an ou deux avant que ce soit en place, mais nous espérons pouvoir former des infirmières sur place et assurer ainsi une certaine rétention de professionnels.
    J'ai une dernière question à vous poser, monsieur d'Entremont. J'ai beaucoup apprécié votre recommandation de créer des fonds spécifiques à la santé, comme ceux que nous avons dans le domaine de l'éducation. Je pense qu'un effort a été fait, notamment dans le domaine de la petite enfance. Il y avait des enveloppes particulières pour la petite enfance et pour les francophones, parce que les besoins ne sont pas nécessairement les mêmes. Je prends l'exemple de chez nous parce que c'est ce que je connais le mieux. Les écoles francophones ont rarement une garderie. Si on limite les fonds de fonctionnement quand il n'y a pas de garderie, c'est inutile. Il faut avoir les fonds pour le principal. Avez-vous un commentaire à faire à ce sujet? Quand on signe des ententes avec les provinces, il doit y avoir des fonds et des enveloppes spéciales pour les francophones, qui soient utilisés pour leurs besoins.
    Il vous reste 20 secondes.
    Il faut que les fonds soient utilisés en fonction des besoins déterminés par et pour la communauté, et que les programmes fédéraux respectent ces besoins. C'est ce qui se fait en santé. C'est nous qui avons décidé de l'utilisation des fonds.
    Monsieur André.
    Bonjour, madame Saulnier et monsieur d'Entremont. Merci d'être présents aujourd'hui. Vous êtes partis de Nouvelle-Écosse pour venir ici; c'est un long voyage. Nous sommes contents que vous soyez parmi nous.
    Monsieur d'Entremont, vous avez beaucoup parlé du tissu communautaire. Je viens de ce milieu. C'est un milieu qui nous permet de renforcer notre communauté, notre tissu social. Un bon tissu d'organismes permet sûrement aux francophones de développer un sentiment d'appartenance envers leur communauté et d'obtenir des services. Vous avez dit qu'il y avait eu des coupes dans certains programmes, dont les programmes d'accès communautaire, d'alphabétisation, de Condition féminine et des initiatives émanant de bénévoles. Vous avez également parlé du Programme de contestation judiciaire, qui a permis d'avoir des écoles et d'offrir des services à la population.
    Quel impact ces réductions budgétaires auront-elles sur le tissu communautaire, sur les réseaux de services communautaires et, indirectement, sur la francophonie en Nouvelle-Écosse?

  (1110)  

    Sur le plan de la santé comme dans les autres dossiers dont s'occupe la fédération acadienne, nous faisons depuis quelques années la promotion de l'offre active. Nous disons au gouvernement provincial de faire de l'offre active.
    On a parlé des coupes en alphabétisation. Les gens qui profitaient de ces programmes n'étaient pas des jeunes assis sur des bancs d'école. C'était des personnes âgées de 40 ans et plus qui n'avaient pu avoir une formation en français et qui voulaient dorénavant jouer un rôle actif dans leur communauté.
    Ces personnes veulent être vivantes et, comme le dit la Sagouine, « être part entière ».
    Il veulent aussi que les enfants puissent être instruits dans leur langue.
    Oui. Ce sont souvent de jeunes parents et des grands-parents qui se disent que, même s'ils n'ont pas eu la chance d'apprendre le français formellement à l'école, ils peuvent tout de même apprendre à mieux écrire leurs phrases. Le but n'est pas de devenir des Molière.
    Les provinces et les autres instances gouvernementales doivent offrir leurs programmes de façon active. Ainsi, lorsqu'ils prendraient connaissance de ces programmes, les gens se sentiraient plus à l'aise de demander des services en français. Ils ne veulent pas nécessairement avoir les documents en français, mais ils veulent à tout le moins pouvoir s'exprimer dans cette langue.
    Un des bienfaits d'un programme d'alphabétisation est qu'il crée chez ces personnes une volonté, un désir d'être membres à part entière des communautés acadienne et francophones. Cela a manqué. Je suis également impliqué dans la communauté pour ce qui est d'une installation qui est à la fois un musée et un centre de recherche, qui offre à la communauté un programme d'accès communautaire.
    Oui.
    Quand j'arrive au bureau, les personnes qui sont là n'ont pas les mêmes moyens financiers que vous et moi. Elles ne peuvent peut-être pas se le permettre, mais elles l'utilisent et sont accompagnées par une personne qui peut les aider. Cela fait quand même partie de cette vitalité de grandir. De plus en plus, le gouvernement fédéral dit aux citoyens qu'ils doivent communiquer avec lui en utilisant l'Internet.
    Oui, c'est le cas de Ressources humaines Canada, de Service Canada et de tous les ministères.
    C'est vous qui avez créé cette situation. Pourquoi nous faucher les pattes? De plus en plus souvent, les deux conjoints d'un couple travaillent, et il y a de moins en moins de bénévoles. Ceux qui sont appelés à faire du bénévolat sont des personnes comme Mme Saulnier, qui vient de prendre sa retraite à un très jeune âge et qui deviendra une bénévole par excellence. J'ai également pris ma retraite il y a quelques années. Je suis encore un bénévole et je vais continuer, mais on nous brûle.
    On doit soutenir les bénévoles.
    Oui.
    Au niveau du personnel permanent et des organisations.
    L'appui financier du gouvernement fédéral ou au moyen d'ententes fédérales-provinciales ne suffit pas à répondre à tous les besoins en tout temps. Les bénévoles doivent y consacrer du temps et unir leurs efforts en ce sens.
    C'est une décision politique qui a un impact sur votre communauté.
    Tout à fait, et surtout sur une communauté comme la nôtre, en Nouvelle-Écosse, où 90 p. 100 de nos Acadiens francophones ne sont pas dans des milieux urbains, mais dans des milieux ruraux.
    Le Programme de contestation judiciaire a-t-il servi aux gens de la Nouvelle-Écosse, et à quelles fins?
    Il a surtout servi dans le domaine de l'éducation.
    Pour les écoles?
    Pour les écoles. Je pense que le cas Doucet n'est toujours pas réglé. Souhaitons qu'il le soit avant le 31 mars, date à laquelle le financement se terminera.
    Le Programme de contestation judiciaire a eu du succès. Comme l'a mentionné plus tôt Mme Thorne, l'idée n'est pas de contester ce que fait le gouvernement fédéral, mais ce que fait le gouvernement provincial, qui n'exécute pas ses obligations.
    Chez nous, c'est comme ailleurs: on a du rattrapage à faire.
    Il vous reste une minute et demie.
    Vous avez parlé d'une nouvelle loi sur les services en français en Nouvelle-Écosse. Pouvez-vous me parler un peu de ce que cela apporte aux communautés francophones? C'est une nouvelle loi, n'est-ce pas?
    C'est une nouvelle loi qui a été promulguée il y a deux ans. Cette loi a trait aux services en français dans tous les ministères, pas seulement dans celui de la Santé. La communauté a été impliquée dans la mise en place des règlements. Au début, il y a eu beaucoup de consultation. Le domaine de la santé avait été défini comme l'un des domaines prioritaires en matière d'offre de services en français.
    Cela permettra l'identification des services et l'accès à des services en français là où il y a des concentrations d'Acadiens. Le gouvernement a même identifié les agences touchées : cela touche toutes les régies où il y a des francophones dans la province. Cela touche aussi les tierces parties qui travaillent à contrat, par exemple le service VON et le service ambulancier.
    D'ici trois ans, nous devrions voir un énorme changement sur le plan des services en français en Nouvelle-Écosse, et cela à tous les niveaux. Déjà, la province a établi un système d'identification « bonjour ». Notre propre « bonjour » est bleu. Il ressemble à celui de la Nouvelle-Écosse. En plus, il y a une petite étoile jaune. Donc, on reconnaît tout de suite les professionnels. Cela a été mis en oeuvre avant même le dévoilement des règlements.
    Je pense que la province prend très au sérieux la question des services en français. Je ne crois pas avoir besoin de vous convaincre de l'importance des services dans la langue du patient dans le domaine de la santé.

  (1115)  

    Monsieur Lemieux.
    Merci, monsieur le président.
    Merci de vos présentations. À mon avis, nos réunions sont vraiment importantes, car nous sommes venus ici pour vous écouter. Cela nous donne aussi l'occasion de faire comprendre le message à ceux qui ne sont pas au courant.
    J'aimerais dire que le gouvernement dépensera 81 millions de dollars pour l'alphabétisation au cours des deux prochaines années.
    Également, en ce qui a trait à la petite enfance, j'aimerais mentionner que nous avons l'intention de créer 125 000 places en garderie dans tout le Canada. La ministre Finley a formé un comité pour trouver la meilleure façon d'établir ces places. On aimerait travailler directement avec des associations et des groupes spécifiques dans les communautés en vue d'établir ces 125 000 places.
    Si vous avez des idées à nous soumettre, veuillez communiquer avec le bureau de la ministre Finley le plus tôt possible, parce que nous sommes à la recherche de renseignements clés.
    Madame Saulnier, j'ai été très heureux de vous entendre parler du domaine de la santé. L'ex-commissaire affirmait que le secteur de la santé méritait la palme d'or sur le plan de l'amélioration des services qu'offre le gouvernement aux communautés linguistiques en situation minoritaire.
    Vous avez aussi parlé des défis. Vous avez parlé d'un programme de formation des ambulanciers paramédicaux. Avez-vous d'autres programmes de formation? Quand vous offrez de la formation, les gens ont-ils tendance à rester ici, dans la province, pour continuer à offrir les services?
     À long terme?
    À long terme, oui.
    Comme Paul l'a dit tout à l'heure, je suis présentement bénévole à temps plein, mais il y a une semaine et demie, j'avais un emploi : j'étais directrice du Département des professions de la santé à l'Université Sainte-Anne. C'est un peu à ce titre que je répondrai à votre question.
     Il y a le programme pour les ambulanciers paramédicaux. Nous examinons aussi la possibilité d'offrir un programme semblable dans le cadre du programme de sciences infirmières à l'Université de Moncton. L'Université Sainte-Anne a déjà pris la décision de mettre en place un programme pour les infirmières auxiliaires. Nous profitons aussi de l'entente Acadie-Québec pour les places en médecine au Québec. Il y a pour cela trois endroits : Sherbrooke, l'Université de Montréal et l'Université Laval. Je suis infirmière et travailleuse sociale de formation, et je pense que la clé est d'offrir de la formation le plus près possible de chez nous. Pour ce faire, il faut être très créatif. Par exemple, l'entente concernant nos étudiants en médecine prévoit entre autres que ces étudiants fassent leurs stages chez nous.
     Nous savons que nous n'aurons jamais une faculté de médecine francophone en Nouvelle-Écosse. Nous devons donc être créatifs et nous assurer que nos étudiants reviennent : c'est la clé, me semble-t-il. Je suis certaine que les gens du Nouveau-Brunswick vous en parleront cet après-midi. Nous avons la chance de bénéficier de leur expérience et ils sont bien disposés à nous aider à la mise en place de stages pour les étudiants en médecine chez nous. Ce n'est pas encore signé, mais il est fort probable que la première finissante en médecine dans le cadre de cette entente revienne pratiquer chez nous l'été prochain. C'est en négociation. Elle est en train de négocier avec la province pour venir pratiquer chez nous. On est très optimistes. Elle serait la première et témoignerait du très gros succès de ce dossier.
     Je pense que la formation en français le plus près possible de chez nous possible constitue la clé. C'est pour cela que nous fondons de grands espoirs sur l'entente avec Sudbury. Les étudiants peuvent étudier chez nous et suivre leurs cours à distance. Ils pourront faire chez nous des stages organisés par nos professionnels de la santé. Ils seront dès lors sur les lieux et ils sauront ce qu'est la pratique chez nous. Les employeurs viendront les chercher. En Nouvelle-Écosse, il y a une pénurie de professionnels de la santé en général, et la pénurie est encore plus importante chez les professionnels francophones. Nous devons donc faire de grands efforts pour former et retenir ces jeunes.

  (1120)  

    Il vous reste une minute et demie.
    Comme je l'ai dit, nous avons eu une présentation des représentants du CNFS. Ils ont parlé des réseaux, des réseaux provinciaux, mais surtout du réseau national. Ils étaient vraiment satisfaits des progrès accomplis dans ce secteur, et je suis content d'entendre dire que vous travaillez en réseau pour la formation.
     De fait, on ne peut pas sortir du triangle de la formation: il y a les réseaux, il y a le ministère et il y a la formation. L'un ne peut pas fonctionner sans les autres.
     Merci.
    Merci, monsieur Lemieux.
    Comme à l'Île-du-Prince-Édouard, le député Godin va reprendre sa place et poser ses questions.
     Mme Saulnier a parlé du plan d'action de la Nouvelle-Écosse pour les services de santé dispensés aux francophones minoritaires. Quelle sorte de pourparlers avez-vous eus avec la province? Je me demandais comment il se faisait que mon collègue du Bloc n'avait pas posé des questions sur la santé. C'est parce que c'est de compétence provinciale. Je pense qu'il faut que la question soit posée. On se demande comment cette compétence provinciale en matière de santé peut se concilier avec le plan d'action. En quoi consiste votre plan d'action? Je sais que l'Île-du-Prince-Édouard a un plan d'action et que le Nouveau-Brunswick en a également un, et vous nous dites que vous en avez un aussi. Pouvez-vous nous donner plus de détails sur votre plan d'action et nous dire comment le plan d'action fédéral peut aider la province à mieux répondre aux besoins des minorités francophones?
    Nous avons une excellente collaboration avec le ministère de la Santé. Je pense pouvoir dire que c'est plus qu'une collaboration. Le réseau connaît un grand succès parce qu'il inclut d'office le ministère de la Santé. Lorsque les membres du réseau ont des discussions, le ministère est déjà à la table. Il est représenté par la coordonnatrice des services en français, qui est là depuis 2004.
    Le réseau n'existe donc pas sans le ministère. Le ministère peut bien exister sans le réseau, mais ce dernier n'existe pas sans le ministère. Le ministère est là dès le départ.
    On parle du plan d'action. La première recommandation porte sur l'officialisation du rôle du réseau en tant que porte-parole de la communauté acadienne en matière de santé en Nouvelle-Écosse. À l'heure actuelle, nous sommes en train de discuter avec le ministère de la façon de le faire et de la signification concrète de tout cela. On s'entend déjà sur le principe de cette recommandation, qui veut que le réseau soit le porte-parole de la communauté acadienne. Nos liens avec le ministère sont donc très étroits.
    Lorsqu'il a été question des règlements de la loi, nous avons été consultés. Il y a eu des consultations publiques pour tout le monde, et nous avons aussi été consultés sur toutes les questions de santé. Le lien est donc très étroit. Je pense que le ministère de la Santé vous dirait qu'il ne prendrait aucune décision sans solliciter l'input des réseaux.
    C'est une relation privilégiée. Je n'ai jamais vu une relation semblable dans quelque autre dossier.
    Les autres recommandations du plan d'action ont trait à des choses beaucoup plus concrètes en termes de l'implantation, qui va s'effectuer en même temps que la mise en oeuvre des règlements. Il y a donc une relation très étroite entre le réseau et le ministère.

  (1125)  

    Nous allons maintenant commencer le deuxième tour. Chacun disposera de cinq minutes.
    Monsieur D'Amours.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais vous dire ce que nous allons faire. Vers 11 h 50, nous siégerons à huis clos pour discuter de choses relatives à notre voyage et de ce que nous allons faire cet après-midi
    Merci, monsieur le président, de m'accorder 30 secondes additionnelles.
    Monsieur d'Entremont, vous avez mentionné la question du Programme d'accès communautaire, le PAC. Vous avez prononcé à quelque reprises le terme « centre d'accès communautaire ». Voyons la réalité. Au cours des dernières semaines, on a parlé de certaines compressions budgétaires qui ont été annoncées et qui ont été plus faciles à identifier.
    Présentement, on vit une situation où le financement des centres d'accès communautaires ne sera pas renouvelé par le gouvernement fédéral actuel. Ce programme devrait se terminer le 31 mars. Par contre, selon l'information que j'ai reçue, on a demandé que le programme se termine le 31 décembre pour qu'on soit en mesure de finaliser le financement qui a été attribué, afin que le 31 mars, ce soit vraiment la fin. Cela indique que c'est vraiment la fin de ce programme.
    On pourrait aussi parler de l'alphabétisation et de bien d'autres choses, mais ce programme des centres d'accès communautaire permettait aux gens des régions rurales éloignées d'obtenir une formation ou d'utiliser des ordinateurs ou d'autres services pour faire leur curriculum vitae et préparer des documents relatifs à leur recherche d'emploi. Ces éléments existaient, mais peu de personnes étaient au courant de leur existence, sauf celles qui avaient recours aux services des centres d'accès communautaires.
    Le financement du gouvernement fédéral arrive à échéance, et il n'y a aucun renouvellement en vue, aucun plan d'avenir. Cela veut dire qu'on laisse ces centres d'accès communautaires à eux-mêmes, ou pratiquement à eux-mêmes, parce que la portion fédérale de leur financement n'existera plus. J'aimerais avoir votre opinion. Je trouve qu'il y a là une contradiction. Le gouvernement fédéral investit en partenariat avec la compagnie Aliant Telecom et les provinces pour que la large bande soit accessible dans presque toutes les régions de nos provinces, afin que tous les citoyens, peu importe la région qu'ils habitent, puissent utiliser la haute vitesse. Mais à quoi servira cette large bande lorsque les centres d'accès communautaires n'existeront plus sous leur forme actuelle pour donner la formation ou les outils nécessaires à ces gens afin de les aider à se développer?
     J'aimerais vous entendre sur ce point, car je sais que l'impact des compressions budgétaires sur les centres d'accès communautaires sera dramatique. Certaines personnes ne s'en aperçoivent peut-être pas maintenant, mais quand cela n'existera plus, dans quelques mois, il sera trop tard pour se lever et dire que c'est une erreur, pour le gouvernement fédéral, que de ne plus financer le Programme d'accès communautaire.
    J'aimerais vous entendre à ce sujet.
    Vous avez parfaitement raison. M. Lemieux a dit plus tôt que le gouvernement voulait savoir comment on pouvait mieux y arriver. Qui a-t-il écouté avant de prendre la décision de faire ces coupes?
    Il n'a pas consulté les communautés ni les usagers des sites PAC. Qu'allons-nous faire? Dans certaines communautés, les organismes membres de la fédération acadienne se demandent si leurs bureaux seront dotés de l'équipement nécessaire à leurs opérations. Ils cherchent des moyens de se dépanner après le 31 mars.
    Ces gens ne peuvent se permettre d'avoir un ordinateur à la maison. Le taux de pauvreté dans l'ensemble du pays est tout de même assez élevé, et cela touche aussi bien les régions urbaines que rurales. Ils devront trouver d'autres moyens, mais lesquels? Le gouvernement pourrait peut-être envoyer 1 200 $ à tous les citoyens pour qu'ils achètent un ordinateur?

  (1130)  

    Monsieur d'Entremont, ne pensez-vous pas qu'on fait tout pour maintenir la population dans l'ignorance et ne pas lui donner les outils nécessaires pour qu'elle puisse se développer et grandir?
    J'ai une petite fille de 18 mois. Lorsque ma femme n'est pas certaine de ce qui ne va pas chez la petite, elle va sur Internet pour essayer de comprendre.
    Vos cinq minutes sont écoulées. Votre petite fille ne pourra pas aller sur Internet.
    Madame Boucher.
    Je voudrais vous remercier de vous être déplacés. C'est très important pour nous, au gouvernement.
    Avant toute chose, j'aimerais dire que notre gouvernement a un engagement inébranlable envers les langues officielles et les questions relatives à la francophonie. Mme Verner, notre ministre, travaille très fort en ce sens avec toutes les communautés concernées.
    Vous avez beaucoup parlé des défis auxquels vous êtes confrontés, et on les comprend. Quel est votre plus grand défi actuellement?
    Je m'adresse à Mme Saulnier ou à M. d'Entremont. On constate que vous avez travaillé fort. Quelle est votre plus grande réalisation, celle qui vous rend le plus fiers après tout ce travail?
    En Nouvelle-Écosse, notre plus grande réussite est le partenariat que nous avons conclu avec la province. On parle souvent de l'influence des politiques.
    Monsieur Lemieux, nous espérons que ce que vous entendrez aujourd'hui vous aidera et que vous en parlerez peut-être au gouvernement. J'espère que ce « peut-être » deviendra un « oui », que vous allez convaincre votre gouvernement après entendu les communautés.
    Le partenariat provincial est une grande réussite. On est de plus en plus reconnus et on nous consulte parce qu'on travaille de bonne foi avec eux. On veut travailler de bonne foi à la vitalité communautaire. Notre communauté acadienne et francophone est en grande majorité rurale. C'est donc une grande réussite.
    Le défi, c'est de le faire. À la fin de ma présentation, j'ai parlé des distances et de l'appui des gouvernements. On entend souvent des employés, des politiciens et des fonctionnaires du gouvernement fédéral demander ce que la province investit dans ce domaine. Le ministère de la Santé a été le premier ministère à embaucher une personne dont la seule et unique responsabilité est l'offre de services en français. D'autres ministères vont l'imiter.
    Avec le peu de fonds dont nous disposions,  nous avons réussi à mettre sur pied des initiatives dans le domaine de la santé à l'intention des Acadiens francophones de la Nouvelle-Écosse.
    Les responsables de l'offre de services, qui sont à 99,9 p. 100 des anglophones, nous ont dit qu'ils collaboreraient avec nous à l'élaboration de projets. Ils nous ont également dit qu'on leur avait permis de repenser leurs programmes et qu'ils copiaient nos modèles afin de les appliquer aux communautés de langue majoritaire.
    Avec de l'appui, on peut y arriver. On n'est pas seulement des petits gars et des petites filles qui s'amusent avec des petits projets. On fait de notre mieux pour favoriser la vitalité de nos communautés. On veut que les gens puissent vivre en santé en français jusqu'à leur dernier jour. On veut également que, peu importe leur employeur, ils puissent travailler en français dans leur communauté, qu'ils soient éduqués et obtiennent des services dans leur langue.
    Le défi, c'est le maintien des infrastructures et des programmes qui permettront de créer la communauté que nous voulons. Cela ne se fait pas du jour au lendemain.

  (1135)  

    Merci.
    Il reste encore un peu de temps.
    En santé, vous avez fait beaucoup de chemin, et il vous en reste encore beaucoup à parcourir. J'ai cru comprendre que le plus grand défi en santé était la rétention des professionnels de la santé.
    Avez-vous élaboré un plan d'action en ce sens?
    Notre plan, c'est la mise en place des programmes. C'est pour cette raison que j'ai fait allusion à la créativité. On n'aura pas de faculté de médecine chez nous. Comment faire pour que nos jeunes puissent aller étudier en médecine en français et revenir ensuite chez eux?
    L'organisation des stages est également importante, car c'est ce qui les incite à revenir chez nous. S'ils constatent ce que cela veut dire que de travailler en Nouvelle-Écosse, ils seront beaucoup plus enclins à revenir que s'ils font leur stage en Ontario ou au Nouveau-Brunswick. Ils seront beaucoup plus attirés chez nous.
    La formation d'un médecin prend sept ans. Quand on envoie un jeune étudier à l'extérieur, on sait qu'il s'écoulera sept ans avant qu'on le revoie. Ce n'est qu'un exemple. L'implantation de services en français est un projet de longue haleine. La pérennité des programmes est donc importante. Le fait de recommencer les programmes et les projets tous les ans ou tous les deux ans nous ralentit. Chaque fois, il faut attendre de six mois à un an avant la mise sur pied d'un autre programme.
    Des programmes à long terme sont extrêmement importants dans le domaine de la santé.
    Monsieur André, c'est votre tour.
    Je vais continuer à parler du domaine de la santé, parce que j'y ai travaillé pendant plusieurs années avant d'entrer en politique. Je suis travailleur social de formation, un peu comme vous; on est donc un peu du même monde. Je travaillais dans un CLSC. L'enjeu du recrutement des médecins est un enjeu presque national. Je me demande même s'il n'est pas international. Les Américains se tirent assez bien de ce problème, parce qu'il font beaucoup de privatisation. On connaît un peu le dossier. Il reste que c'est un enjeu important.
    J'ai une question très brève à propos de la délégation des tâches. On manque de médecins, c'est vrai, mais on a des infirmières. Je suis de ceux qui croient que les infirmières devraient avoir plus de tâches déléguées. On manque de médecins, mais les infirmières sont compétentes. On sait qu'on manque de médecins et il y a le vieillissement de la population. Où en ce débat en Nouvelle-Écosse?
    On reconnaît de plus en plus les infirmières praticiennes en Nouvelle-Écosse. Je sais qu'à l'heure actuelle, 23 infirmières font leur maîtrise pour devenir infirmières praticiennes à l'Université Arthabaska. Parmi ces 23 infirmières, il y a des francophones. D'autres veulent s'inscrire. Les infirmières praticiennes prennent donc de plus en plus de place en Nouvelle-Écosse. Il reste des détails et les ententes à fignoler avec les médecins, mais on met beaucoup d'espoir — surtout dans les communautés rurales — dans les infirmières praticiennes. Je suis entièrement d'accord avec vous — je suis aussi infirmière aussi de formation —, les infirmières peuvent faire bien des choses. Cela libérerait les médecins et leur permettrait de bien mieux gérer leur temps.
    On vit les mêmes choses, et c'est pour cela que je pose la question. Il y a quand même une répartition du pouvoir.
    Je voudrais vous entendre rapidement sur la question de la culture. Comment se vit la culture francophone en Nouvelle-Écosse? Des moyens sont-ils mis à la disposition des communautés francophones pour promouvoir cette culture? Comment cela se déroule-t-il?
    Avez-vous des projets? Vous avez parlé de projets de développement et de lenteurs administratives. Vous avez dit présenter souvent des projets, mais il y a des lenteurs administratives. On comprend. On a un système technocratique et c'est parfois très long. Quel est l'impact de ces lenteurs administratives sur les projets sur le terrain? Voyez-vous des moyens qui accéléreraient le processus de réponse aux projets et qui renforceraient les moyens d'action des communautés? Elles pourraient ainsi avoir des budgets et les gérer, mener des actions concrètes sans toujours passer par l'appareil administratif et s'exposer à des refus, et mettre ces projets de l'avant.

  (1140)  

    Le domaine culturel n'est pas le mien, mais vous avez probablement entendu parler du Congrès mondial acadien 2004. Vous connaissez peut-être Grand Dérangement, Blou, La Baie en Joie, des artistes visuels comme Denise Comeau et bien d'autres en province. Je sais qu'une association d'artistes de toutes les disciplines existe en Nouvelle-Écosse et qu'elle ouvre des voies. Mais, d'après ce que j'entends, ils vivent les mêmes choses que nous: des lenteurs. Après qu'ils ont obtenu une réponse au sujet d'un projet, il ne reste que cinq mois au lieu d'un an. Il faut donc patiner et faire tourner les roues aussi vite que possible pour accomplir le maximum. La vitalité artistique et culturelle en Nouvelle-Écosse est incroyable, du côté des auteurs-compositeurs, entre autres. Je pense, je devine, qu'ils diraient à peu près les mêmes choses que nous sur le soutien et la lenteur des décisions Cela fait que les roues ne tournent pas vite.
    Je suis au courant d'un cas en particulier quant à l'appui au développement culturel, au spectacle et ainsi de suite au sein des écoles. Du côté du public, M. et Mme Tout-le-Monde doivent faire venir et payer les artistes. Mme Thorne en a parlé: il y a là des défis à relever. Mais je peux parler du fonctionnement au sein de l'école, car j'étais au Conseil scolaire acadien provincial jusqu'en 1988. J'ai pris une retraite anticipée. Nous travaillions en ce temps-là à créer un programme d'appui au développement culturel des élèves. On faisait venir des artistes de l'extérieur, mais les coûts devenaient de plus en plus exorbitants. Nous avons voulu aller chercher un soutien pour le faire plutôt avec des artistes et des artisans du milieu qui, eux, travaillaient avec les élèves. Huit ans plus tard, après que nous ayons fait des demandes et des demandes, un programme va débuter sous peu. On parle de lenteur, n'est-ce pas? C'est venu de la communauté, qui va travailler elle-même avec les élèves. On ne peut pas se permettre d'aller chercher des artistes de renom. Il faut donc travailler dans l'autre sens, avec eux, mais avec des programmes intégrés à l'école.
    Merci, monsieur d'Entremont et monsieur André.
    J'aimerais vous poser une courte question, puis j'aimerais donner la parole à M. Petit pour le reste du temps, soit de trois à quatre minutes.
    Vous avez parlé du petit « bonjour ». Je trouve que c'est vraiment formidable. Je suis allé à Sault Ste. Marie, et le comité francophone avait décidé de faire une petite épinglette identique. Quand je suis arrivé à l'aéroport, une dame s'est adressée à moi en français. Je lui ai demandé ce qui l'avait fait deviner que j'étais francophone, et elle m'a répondu que c'était grâce à l'épinglette sur laquelle était écrit le mot « bonjour ». C'est incroyable. En fait, on dit que beaucoup de gens à Sault Ste. Marie se sont connus et reconnus grâce à cette identification.
    J'aimerais qu'une chose soit notée dans notre rapport. Vous dites que l'important n'est pas seulement qu'on investisse des sommes d'argent ici et qu'on se batte avec le fédéral, etc., mais aussi qu'on donne l'occasion à la communauté francophone de se prendre en main et que la province décide que quelqu'un soit là pour vous entendre. Cela vous donne l'occasion de communiquer avec le gouvernement provincial afin qu'il puisse voir tout le travail que vous faites pour trouver des solutions. C'est ce que j'ai compris. Par contre, il faut qu'il y ait de l'argent pour les organismes. Vous faites du bon travail, et je vous en félicite, car c'est important.
    Je vais maintenant passer la parole à M. Petit. Il reste à peu près trois minutes et demie.

  (1145)  

    Merci, monsieur le président. Bonjour, madame Saulnier et monsieur d'Entremont.
    Ma question s'adresse principalement à M. d'Entremont, parce qu'il a une vue d'ensemble. Tout d'abord, je suis un nouveau membre du Parti conservateur. Vous voyez qu'on se déplace pour vous rencontrer. Nous n'étions pas venus depuis 25 ans. Alors, bonjour la visite, comme on dit chez nous.
    J'ai une formation juridique et je suis toujours avocat. Le fait que vous ayez une entente de partenariat qui semble très forte avec le gouvernement provincial, comme madame l'a confirmé, a attiré mon attention. Vous avez même parlé d'une loi qui, semble-t-il, constitue une manifestation d'ouverture. Cette loi couvrira-t-elle tous les domaines dont on parle aujourd'hui, par exemple la santé, l'éducation et la petite enfance? Pourriez-vous me parler de la genèse de cette loi? Vous avez dû travailler à son élaboration. C'est très intéressant parce que votre province n'est pas officiellement bilingue, comme le Nouveau-Brunswick, par exemple. Cependant, vous avez une loi qui semble dire quelque chose de particulier. Pourriez-vous m'en parler?
    La loi dont on a parlé un peu plus tôt est la Loi concernant l'Office des affaires acadiennes et la prestation par la fonction publique de services en français, que l'on appelait autrefois le Bureau des Affaires acadiennes. Malgré son titre d'office, il a le statut de ministère, cela depuis plusieurs années. Le ministre d'Entremont, du gouvernement actuel, a présenté la loi en Chambre, une loi sur les services gouvernementaux en français.
    On parle des services gouvernementaux de la province.
    C'est exact.
    La loi a été adoptée à l'unanimité au mois d'octobre 2004 et est entrée en vigueur le 9 décembre.
    Nous avons vu les règlements qui établissent la façon dont on va procéder. On dit bien que  tous les ministères sont ciblés. Des ministères, des commissions et des organismes désignés, qui découlent des ministères, sont ciblés. Par exemple, la Commission des accidents du travail est une agence régie par la loi sur le travail. Cette agence devra travailler et offrir des services en français.
    Il vous reste 30 secondes.
    Le ministère est responsable de la santé. Il mandate les régies régionales, qui peuvent ensuite engager des contractuels. Le ministère est responsable des soins continus. Pour cela, il engage des contractuels, qui sont des tierces parties. Ils devront tous offrir des services en français.
    Je vous remercie. Voilà qui termine notre...
    J'aimerais connaître le nom de la loi. On parle de la nouvelle loi, et je ne l'ai pas.
    Pouvez-vous nous donner...
    C'est la loi 111, la Loi sur les services en français.
    C'est ce dont j'avais besoin.
    Il s'agit de la loi 111, la Loi sur les services en français.
    J'aimerais remercier nos témoins de Nouvelle-Écosse de s'être déplacés. Comme je vous le disais ce matin, je suis sûr que vous auriez aimé qu'on aille en Nouvelle-Écosse. Au moins, pour la première fois en 25 ans, nous nous sommes rapprochés. Ce n'est pas grâce au nouveau gouvernement que nous sommes ici, mais grâce au comité parlementaire, qui est composé de membres de tous les partis politiques et qui a fait une demande au Parlement du Canada à cet effet.
    On vous remercie.
    Je voulais simplement remettre les pendules à l'heure.
    Nous reviendrons dans deux minutes pour siéger à huis clos. La séance publique est terminée.
    [La séance se poursuit à huis clos.]