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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 058 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 10 mai 2007

[Enregistrement électronique]

  (0905)  

[Traduction]

    Je vous souhaite la bienvenue à la 58e  séance du Comité permanent du patrimoine canadien. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le comité reprend son enquête approfondie du rôle d'un diffuseur public au XXIe siècle.
    Ce matin, nous sommes très heureux d'accueillir des représentants des médias d'information, car s'il est un sujet dont nous entendons souvent parler, c'est bien celui des médias d'information.
    Comme témoins ce matin nous avons Veena Rawat et Bernard Caron, du ministère de l'Industrie; Pierre Bélanger, de l'Université d'Ottawa; Philip Savage et Christina Oreskovich, de l'Université McMaster, et Jacques Bensimon, à titre personnel.
    Bienvenue, donc, aux témoins de ce matin. Nous allons nous efforcer de ne pas dépasser huit minutes, si possible, dans nos déclarations préliminaires. Nous allons aussi nous efforcer de poser des questions courtes et précises et de ne pas dépasser cinq minutes pour les questions et réponses de chacun.
    Nous allons commencer par le ministère de l'Industrie.
    Je m'appelle Veena Rawat et je suis présidente du Centre de recherches sur les communications, un organisme d'Industrie Canada.
    M. Bernard Caron comparaît avec moi aujourd'hui. Il est vice-président de la Direction de la recherche sur les technologies de la radiodiffusion, Centre de recherches sur les communications. Nous l'appelons CRC.

[Français]

    Le CRC est un organisme d'Industrie Canada. Il effectue des travaux de recherche et de développement dans des domaines comme les communications sans fil, les communications par satellite, les technologies des réseaux ainsi que la radiodiffusion. Le CRC est le seul laboratoire d'évaluation des technologies de radiodiffusion numérique avancées au Canada.

[Traduction]

    En tant que principal laboratoire de recherche en télécommunications du gouvernement du Canada, nous fournissons des conseils techniques aux ministères et aux autres organismes fédéraux sur les effets des technologies sur leur mandat. Nos recherches portent sur la radiodiffusion multimédia, la télévision interactive, la radio numérique, la diffusion par satellite aussi bien que sur la télé sur Internet, la télévision par protocole Internet et la télévision tridimensionnelle. C'est beaucoup.
    Nous serons heureux de répondre à vos questions sur l'une ou l'autre de ces technologies. D'abord, je demanderai à M. Caron de vous parler de la diffusion par ondes hertziennes.
    Bernard, à vous la parole.

[Français]

    Merci également, monsieur le président, de nous permettre de faire cette présentation aujourd'hui.
    Je souhaite tout d'abord vous parler des différents progrès technologiques qui pourraient avoir une incidence sur le futur mode de fonctionnement des radiodiffuseurs, dont Radio-Canada, et plus particulièrement sur les transmissions en direct, celles qui ont lieu sur l'air ou par antenne. Je traiterai d'abord de la télévision à haute définition, de la télévision numérique, de la télévision mobile, de la radio numérique et, finalement, de la radiodiffusion d'urgence et des réseaux d'émetteurs distribués pour la couverture régionale.
    L'introduction de la télévision à haute définition constitue l'un des principaux progrès actuels dans le domaine de la radiodiffusion. La plupart des téléviseurs vendus aujourd'hui peuvent afficher des images en haute définition. Nous pouvons désormais regarder des centaines de canaux de télévision, et certains de ces programmes sont en haute définition. Ils sont transmis par satellite et par câble grâce à l'efficacité des systèmes de transmission numérique. Mais avant de pouvoir livrer ces programmes de TVHD en direct dans chaque foyer par la voie des airs, il faut d'abord remplacer les anciens émetteurs analogiques par de nouveaux émetteurs numériques.
    De nouveaux émetteurs numériques en direct sont actuellement exploités à Toronto, Montréal, Ottawa, Québec et Vancouver. Ces émetteurs peuvent transmettre gratuitement aux spectateurs canadiens des émissions de télévision en haute définition dont les images sont d'une pureté très grande. Pour admirer ces images, il faut simplement se munir d'un téléviseur haute définition, d'un syntonisateur numérique et d'une antenne. Il faut aussi avoir un émetteur dans sa région. Seulement 15 de ces émetteurs ont été installés au Canada jusqu'à présent. En guise de comparaison, près de 1 500 sont exploités aux États-Unis.
    Ces émetteurs numériques offrent également aux radiodiffuseurs la possibilité d'offrir de nouveaux services à leurs clients. J'en décrirai quelques-uns.

[Traduction]

    Les nouvelles stations de TVN en direct peuvent servir à transmettre une émission de TVHD aux téléspectateurs ou bien plusieurs émissions simultanément. Les images ne seront pas présentées en HD, mais leur qualité ressemblera à celle d'un DVD. En outre, il sera possible de choisir parmi les nombreuses émissions d'une seule station. Par exemple, une seule station de la Canadian Broadcasting Corporation (CBC) permettrait à ses spectateurs de regarder la programmation ordinaire de la CBC, CBC Newsworld ou la programmation régulière de Radio-Canada, comme le Réseau de l'information (RDI) ou ArtTV. Le nombre d'émissions offertes grâce à cette option pourrait varier entre quatre et six.
    La télé numérique permet aussi aux diffuseurs d'offrir plus qu'une bande sonore. Tout comme on peut choisir l'anglais, le français ou l'espagnol quand on regarde un DVD, le diffuseur peut offrir à ses auditeurs un choix de langues différentes.
    Comme vous pouvez le constater, la flexibilité de la télé numérique permet d'offrir un éventail d'options, qu'il s'agisse du choix de multiples émissions et de multiples langues, à partir d'un seul radiodiffuseur.

  (0910)  

[Français]

    La télévision numérique en direct pourrait également offrir la possibilité de réception dans des endroits comme les voitures, les autobus ou les trains. Des services de télévision mobile sont déjà offerts aujourd'hui par les réseaux de communication cellulaire et par certaines technologies utilisées en Europe et en Asie.
    En Amérique du Nord, on étudie les améliorations proposées pour la norme de transmission de la télévision numérique qui est utilisée actuellement pour la télévision à haute définition. Grâce à ces améliorations, il sera possible de recevoir une émission de télévision en haute définition à la maison sur de grands écrans, mais aussi une seconde émission avec un petit poste portatif ou à l'aide de petits écrans qui seraient installés dans les voitures, les trains. Cette deuxième émission pourrait être identique à l'émission de télévision en haute définition, mais à plus basse résolution, ou elle pourrait être différente et présenter du contenu intéressant, plus particulièrement pour les gens en déplacement. D'un point de vue technique, la télévision mobile pourrait être offerte gratuitement ou en vertu d'un abonnement, et ce, en concurrence ou en collaboration avec les autres entreprises de télécommunications telles que les réseaux de téléphonie cellulaire.

[Traduction]

    Jusqu'à maintenant, j'ai parlé des changements dans le monde de la télévision, mais n'oublions pas que la même révolution touche la radio. La radio numérique est maintenant offerte au Canada par deux fournisseurs de services satellitaires par abonnement. Les Canadiens peuvent également écouter des stations de radio de partout dans le monde à l'aide d'Internet. Les lecteurs comme le iPod nous permettent maintenant de télécharger toutes sortes d'émissions de radio.
    Les stations de radio terrestres AM et FM sont aussi touchées par la révolution numérique. Il existe maintenant des technologies permettant de diffuser des émissions numériques en direct. Comme dans le cas de la télé numérique, cette technologie peut être utilisée pour diffuser plus d'une émission de radio provenant d'une station, ce qui nous donne le choix. Les systèmes numériques peuvent également être utilisés pour offrir de nouvelles possibilités, comme des cartes donnant des directions pour se rendre à un événement ou des photos d'un artiste qui chante à la radio. La technologie de la radio numérique peut aussi être utilisée pour diffuser des émissions de télé à faible résolution sur un téléphone portable ou un appareil de poche.

[Français]

    Depuis le début de leur développement, les réseaux de radiodiffusion se sont avérés de grandes sources d'information et de divertissement, mais ils ont aussi servi d'outils essentiels en situation d'urgence. Beaucoup de gens se rappellent avoir regardé la télévision et écouté la radio pendant la tempête de verglas de 1998. La radio était la seule source d'information durant la dernière grande panne électrique qui a frappé la majeur partie de l'Ontario à l'été 2003.
    Il faut préserver cette fonction de soutien en cas d'urgence, même le jour où tous les réseaux de radiodiffusion du Canada auront adopté le format numérique. Il est très agréable de regarder des émissions à la télévision à haute définition ou d'avoir accès à des cartes avec une radio d'automobile, mais en situation d'urgence, on a surtout besoin de renseignements qui sont essentiels compte tenu de la situation dans laquelle on se trouve.
    Les technologies numériques en cours de déploiement permettraient aux réseaux de radiodiffusion de fournir différents types de renseignements essentiels en cas d'urgence.

[Traduction]

    Les technologies numériques peuvent aussi couvrir plus efficacement de grandes régions en utilisant un certain nombre d'émetteurs distribués à faible puissance dont la couverture est limitée à une région peuplée. Les coûts de construction et d'exploitation de tels réseaux sont inférieurs à ceux des stations centrales à forte puissance utilisées par les systèmes de radiodiffusion analogique.
    Veena, à vous la parole.
    En conclusion, nous estimons que les nouvelles technologies de radiodiffusion dont il est question aujourd'hui -- la télévision numérique, la télévision mobile, la radio numérique, la radiodiffusion d'urgence et les réseaux d'émetteurs distribués pour la couverture régionale -- pourront offrir à la population canadienne un nombre croissant de services de qualité.
    Malgré l'installation de systèmes de radiodiffusion numérique partout dans le monde, aucun pays, du petit Singapour à la gigantesque Russie, n'a décidé d'abandonner complètement la radiodiffusion terrestre ou de la remplacer par des satellites ou Internet.
    Le CRC collabore depuis de nombreuses années avec l'industrie de la radiodiffusion, et Radio-Canada plus particulièrement, pour mettre au point et à l'essai différentes technologies. Les radiodiffuseurs canadiens peuvent utiliser ces technologies pour relever certains des défis suivants.
    D'abord, comme nous le savons tous, les technologies de télécommunication changent très rapidement, la qualité des images et du son s'améliore sans cesse, le nombre d'émissions offertes se multiplie et de nouveaux modes de diffusion apparaissent tous les jours. Mais cela ne suffit pas: les téléspectateurs s'habituent à l'interactivité et ils en veulent plus. Le dernier facteur, qui n'est toutefois pas le moins important, c'est qu'étant donné que nous vivons dans un monde de consommation, les consommateurs peuvent désormais choisir à quel endroit et à quel moment regarder leurs émissions favorites.
    Je vous remercie infiniment.

  (0915)  

    Merci.
    Monsieur Bélanger, vous avez la parole.

[Français]

    Je voudrais d'abord vous remercier, membres du comité permanent, de me donner l'occasion de partager avec vous ma vision des choses, ma compréhension du pouvoir des nouvelles technologies sur le diffuseur public.

[Traduction]

    Comme vous le savez, étant professeur d'université, je suis appelé à parler pendant trois heures consécutives. Il me sera donc assez difficile de me limiter à huit minutes. Je vais néanmoins m'efforcer d'être concis.

[Français]

    J'ai la chance, depuis une quinzaine d'années, de travailler à la confluence des médias traditionnels et des technologies émergentes. Vous remarquerez que dans mon discours d'aujourd'hui, je ne pense pas faire référence aux nouveaux médias. Je pense que c'est une expression qui est un peu révolue. Il est plus dynamique, selon moi, de traiter de la dimension organique des technologies émergentes, puisque c'est en effusion constante. Je prendrai à témoin la page titre de

[Traduction]

The Economist: Lorsque tout se touche.

[Français]

    Je pense qu'un des mandats du diffuseur public canadien est justement de tenter de multiplier les points de contact et de connexion avec ses usagers, les citoyens et citoyennes du Canada.
    Parce que je m'intéresse beaucoup aux technologies émergentes, je suis à même d'observer les tendances lourdes de l'heure. Je prends un plaisir certain à observer notamment les nouveaux comportements d'écoute que manifestent les jeunes en particulier, ceux qu'on appelle les millennials ou les digital natives.
    Je pense qu'on a énormément d'occasions ici d'observer cette espèce de fractionnement, d'éclatement. Le multitasking prend véritablement forme et donne lieu à de nouveaux modes de communication, et impose à Radio-Canada de nouveaux modes de distribution de ses contenus et aussi, bien entendu, de production de ses contenus.
    Un des dirigeants de la Australian Broadcasting Corporation disait, il y a quelques jours:

[Traduction]

Les médias numériques sont maintenant présents dans tout ce que nous faisons. Ils ne sont pas des ajouts, ils ne sont pas des nouveautés, ils sont la réalité aussi bien que l'avenir.

[Français]

    La BBC, j'y reviendrai dans quelques minutes, a modifié son mandat à la fin de 2006 pour maintenant octroyer et reconnaître l'espace qu'occupent les nouvelles technologies et les technologies émergentes dans le rôle et le mandat du radiodiffuseur public qu'est la BBC.
     Sur ce plan, on remarque comment les jeunes utilisent les contenus visuels ailleurs qu'à la télévision. Je pense qu'il est tout à fait pertinent que je cite quelques statistiques ici. Une étude récente, faite il y a quelques mois, révèle que lorsqu'on demande aux jeunes quelles plateformes ils utilisent lorsqu'ils regardent des contenus visuels ailleurs qu'à la télévision, 75 p. 100 d'entre eux, évidemment, répondent qu'ils le font sur un ordinateur,

[Traduction]

... 46 p. 100 sur un ordinateur portatif, 16 p. 100 sur un lecteur vidéo portatif, 13 p. 100 sur un iPod et, maintenant, le dernier arrivé sur le marché, sur un téléphone mobile cellulaire, qui est de toute évidence promis à un bel avenir.
À telle enseigne qu'un homme du nom de Michael Eisner, qui dirigeait une petite entreprise appelée Disney, a pris sa retraite il y a quelques années, pour ensuite lancer une série de 80 webisodes ou mobisodes, des clips de 90 secondes. La série s'intitule Prom Queen et tombe à point nommé à la fin de l'année scolaire. Ces clips de 90 secondes visent ce marché particulier et sont destinés à être visionnés sur des téléphones mobiles, des appareils mobiles ou des ordinateurs portatifs. Ces clips sont liés aux magasins Victoria's Secret et à tous les magasins de vêtements ou de bijoux pour filles qui font de la publicité sur les clips. Bref, ils s'intègrent à une vaste infrastructure commerciale.
    Je pense que cela est indicatif des technologies qui sont maintenant en développement. Il est évident que le radiodiffuseur public doit s'adapter et adopter certaines de ces importantes nouveautés. Car elles ne seront pas un feu de paille.

[Français]

    On peut reconnaître que toutes ces technologies... Le temps qu'accordent les jeunes et les citoyens en général aux nouvelles plateformes et aux contenus numériques est en croissance exponentielle. Non seulement Radio-Canada/CBC est-elle en concurrence désormais avec les plus grands producteurs de contenu du monde, mais aussi beaucoup avec un nouveau phénomène qui s'appelle le fameux

  (0920)  

[Traduction]

    ... le contenu créé par les usagers et le réseautage social. Il s'agit en l'occurrence des sites MySpaces, Facebooks, YouTubes et autres. Ce sont d'énormes compétiteurs maintenant.

[Français]

    On remarque ainsi un glissement des médias traditionnels vers les nouvelles plateformes numériques. Non seulement s'agit-il d'un glissement de contenu, mais aussi et surtout du modèle d'affaires. En effet, le glissement des assiettes publicitaires vers les nouvelles plateformes menace de façon significative non seulement le radiodiffuseur public mais également l'ensemble des radiodiffuseurs canadiens.
    Il y a une phrase que j'entends souvent à l'université et que je trouve fort emblématique. À la fin d'une classe, les étudiants disent:

[Traduction]

« Je t'appellerai ce soir » ou « Je te verrai au gymnase » ou « Je te verrai sur Facebook ».

[Français]

    Pour moi, c'est un univers complètement fictif, mais à la fois très réel. La constante mouvance des développements technologiques est un phénomène extraordinaire. J'enseigne dans le domaine des nouvelles technologies à l'université. La semaine dernière, on discutait des contenus sur

[Traduction]

... les téléphones mobiles. Les étudiants comparaient leurs expériences personnelles avec une série de nouveautés. L'un d'eux nous a parlé de son expérience avec Facebook et de l'observation que lui a faite un autre étudiant: « Vraiment, Coleman, tu es en retard de dix minutes. »
    Ce phénomène où nous tentons sans cesse de rattraper la concurrence nous force de toute évidence à penser à des façons nouvelles de réemballer notre contenu. Un dogme du milieu des nouvelles technologies veut qu'il faut distribuer ses produits en de multiples exemplaires. J'estime que l'un des plus grands producteurs de contenu au Canada est la CBC/Société Radio-Canada. Je pense que nous devons donner à cet organisme public les moyens non seulement de continuer de produire une plus grande variété possible d'émissions, mais encore de les diffuser sur le plus grand nombre possible de plateformes différentes.

[Français]

    J'imagine que le temps est limité, alors je vais conclure.
    L'exemple de la BBC est probablement pour moi le plus éloquent. En effet, l'État reconnaît dans ce cas le rôle central du radiodiffuseur public dans le nouvel environnement numérique. De par son mandat, la BBC a maintenant l'obligation de produire et de diffuser sur les nouvelles plateformes, notamment le fameux

[Traduction]

    ... la vidéo sur demande, qui constitue la prochaine révolution qui s'apprête à nous tomber dessus.

[Français]

    Il y a aussi toute la question du budget. La BBC, notamment, a commencé des travaux en vue de mettre en ligne

[Traduction]

... plus d'un million d'heures de documents archivés tant à la radio qu'à la télévision du radiodiffuseur public. Je pense que cela en dit long sur les possibilités que représentent les technologies numériques pour la radiodiffusion publique, et j'espère que le comité reconnaîtra qu'il faut de façon impérative exercer des pressions sur le gouvernement pour qu'il modifie et modernise le mandat de la SRC afin qu'il s'accorde complètement avec les tendances technologiques actuelles qui la touchent.
    Merci.
    Merci.
    De l'Université McMaster, nous entendrons maintenant M. Savage.

[Français]

    Merci beaucoup. C'est pour moi un grand plaisir d'être ici avec vous.
    Je vais faire la plus grande partie de ma présentation en anglais, mais si vous avez des questions en français, je pourrai y répondre.

[Traduction]

    J'enseigne depuis deux ans au département des études en communications et en multimédias de l'Université McMaster. Avant cela, j'ai travaillé pendant 16 ans à la Canadian Broadcasting Corporation, où je n'étais pas un expert en technologies des nouveaux médias. Je faisais plutôt le genre de travail que les ingénieurs faisaient avec les gens du CRC ainsi que la présentation des applications destinées aux diffuseurs au CRTC. Je m'occupais, notamment, d'expliquer en langage courant pourquoi un radiodiffuseur public devrait consacrer des deniers publics à ce genre de technologie. Tout repose sur certains des principes qui s'appliquent à un radiodiffuseur public.
    À l'instar de Pierre, je n'aime pas le terme « nouveaux médias ». Quand on examine l'histoire des télécommunications au Canada et dans le monde, on trouve une série d'articles datant des années 1940 qui portaient sur les nouveaux médias de l'époque. Un nouveau média était appelé à changer le monde. Il allait, entre autres choses, remplacer la radio. Savez-vous quel était ce média? C'était la télévision.
    Diverses plateformes ont vu le jour, pour ensuite disparaître. Pendant toute cette évolution, le radiodiffuseur public du Canada et d'autres dans le monde ont sans cesse réinventé leur rôle pour s'adapter aux nouveaux médias, mais ils sont restés fidèles à des principes clés. C'est de cela que je veux parler aujourd'hui, afin d'alimenter la discussion sur certaines des perspectives internationales en matière de nouveaux médias et de radiodiffuseurs publics.
    La question est la suivante. Les radiodiffuseurs des pays démocratiques ont été forcés de réinventer sans cesse la façon de diffuser leurs émissions et d'améliorer la communication démocratique entre les citoyens. Celles qui ont été couronnées de succès dans les années 1940, 1980 et maintenant sont soutenues par la population dans trois secteurs: les multiplateformes, les services publics et le financement public.
    D'abord, en ce qui a trait aux multiplateformes, les meilleurs radiodiffuseurs publics dans le monde, y compris celui du Canada, ne croient pas aux plateformes. Ils croient plutôt au contenu qui vient des collectivités locales, ils croient qu'il faut raconter l'histoire des Canadiens d'un bout à l'autre du pays, et ne croient guère que les médias les plus récents soient la solution au problème de la communication avec les auditoires. Ils veulent souvent s'impliquer eux-mêmes. Leur foi est confirmée lorsqu'ils atteignent leurs auditoires et se connectent avec eux de manières nouvelles.
    Ensuite, en ce qui concerne les services publics, tout se résume à la question de savoir si la prestation de services sur un large éventail de plateformes est clairement dans l'intérêt des services publics. Franchement, quand on étudie l'évolution de la radiodiffusion dans le monde, on se rend compte qu'au fil du temps les principes du service public et de la diffusion d'un contenu n'ont guère changé, que ce soit pour la forme ou la substance, bien qu'ils se soient adaptés aux particularités locales et aux possibilités des nouvelles plateformes.
    Troisièmement, puisque nous sommes ici — et vous maîtrisez un peu les cordons de la bourse à cet égard —, en ce qui concerne le financement public, ces radiodiffuseurs publics qui ont pu s'adapter aux nouveaux médias, encore une fois dans les années 1940, 1980 et dans le nouveau millénaire, sont en mesure de jouer un rôle de chefs de file dans l'expérimentation relative aux nouvelles plateformes aussi bien que de maintenir les traditions de la meilleure radiodiffusion publique. Ainsi, ils sont toujours comme c'était il y a 10 minutes, il y a 80 minutes. Ils restent toujours attachés aux principes, aux objectifs et aux passions qui ont été celles des Graham Spry et Alan Plaunt il y a presque 80 ans.
    Je présenterai, comme je l'ai fait dans ma déclaration préliminaire, quatre recommandations clés qui s'appuient sur les dernières nouveautés relativement à la réflexion sur la redéfinition du rôle de la radiodiffusion publique en fonction des nouveaux médias. Ce sont quatre recommandations sur lesquelles je vous demande de vous pencher lorsque vous songerez à vos propres recommandations.

  (0925)  

    D'abord, je pense qu'il est toujours utile pour nos parlementaires d'exprimer le souhait des Canadiens de réaffirmer constamment le rôle de la radiodiffusion publique et, notamment, le rôle central de la SRC dans le système de radiodiffusion.
    Ensuite, comme le diraient mes étudiants, cela tombe sous le sens. La SRC est au coeur des nouveaux médias. Peu importe que la Loi sur la radiodiffusion continue de ne pas parler des nouveaux médias — les nouvelles plateformes numériques qui font que la SRC continue d'être officiellement un diffuseur public d'émissions de radio et de télévision.
    En troisième lieu, c'est un problème, le comité devra sans doute commencer à penser aux façons de réexaminer l'exemption générale du CRTC relative aux nouveaux médias. C'est tout un débat. Nous pourrions peut-être en parler davantage. Mais dans la mesure où nous pouvons intégrer du contenu des nouveaux médias, qui est à certains égards non souhaitable, dans le cadre réglementaire, en cas d'échec de la solution réglementaire, nous avons à notre disposition une façon de financer la présence canadienne dans les nouveaux médias par le truchement de la SRC.
    Cela m'amène à la quatrième recommandation. Je sais que vous refléteriez les souhaits des Canadiens en appuyant un financement accru de la SRC en fonction des mesures objectives du niveau de financement que d'autres grands pays démocratiques occidentaux accordent à leur radiodiffuseur public.
    La SRC, à l'instar d'un grand nombre d'autres radiodiffuseurs dans le monde, s'adapte aux nouveaux rôles, aux nouvelles responsabilités et aux nouvelles possibilités dans le contexte des changements technologiques, démographiques, sociétaux et linguistiques, ainsi que dans le contexte d'une politique gouvernementale dynamique. Pour la SRC, c'est à la fois le moment idéal et le pire moment. Nombre d'entre nous ont envisagé sérieusement la possibilité très réelle que la SRC disparaisse — une possibilité à laquelle ont songé aussi d'autres radiodiffuseurs publics de par le monde. Mais un sort pire encore que la disparition menace la SRC: c'est la perte graduelle et lente de sa pertinence dans la vie des Canadiens.
    Cependant, il est également possible que les outils que permettent certains des médias les plus nouveaux en réseautage social, en matière de production de contenu par les usagers, donnent l'occasion de faciliter la participation publique à la constitution dont rêvaient initialement des visionnaires comme Graham Spry et Alan Plaunt.
    Le fait est que les radiodiffuseurs publics comme la SRC ont clairement un rôle à jouer dans l'ère numérique. Le comité l'a confirmé il y a trois ans lorsqu'il l'a mis au coeur du rapport Lincoln:
... plusieurs gouvernements occidentaux continuent d'investir massivement dans la radiodiffusion publique. Cela tient au fait qu'ils ont compris que la radiodiffusion publique demeure un outil essentiel pour promouvoir les valeurs et l'identité nationales.
    Presque un an après que vos prédécesseurs — je pense que M. Abbott siégeait au comité initial — eurent produit ce rapport, la BBC a amorcé le processus de renouvellement de sa charte. Elle a en fait repris certains éléments de votre rapport, mais, comme Pierre l'a dit, en accordant une réelle importance aux plateformes numériques.
    Elle a produit un merveilleux document intitulé Building public value, que vous connaissez tous sans doute. Elle a souligné que toute sa programmation relative aux nouveaux médias devrait se fonder sur son mandat initial de radiodiffuseur public. Elle a dit au sujet du monde numérique:
Ce monde présente la possibilité de choix illimités pour les consommateurs individuels. Mais il présente aussi le risque que la radiodiffusion ne devienne qu'une autre marchandise, avec pour seule mesure la rentabilité. Une nouvelle BBC [place] l'intérêt public devant tout le reste... certains principes clés ne sont pas négociables si l'on veut que la BBC reste la BBC. Ces principes-là sont que la BBC doit être accessible à tous, en donner pour leur argent à tous et être ouverte à tous. L'intérêt public doit rester au coeur de tout ce que fait la BBC.

  (0930)  

    Je vois que le président me pointe du doigt. Je vais donc en profiter, si vous me le permettez, pour vous présenter une personne qui a des idées... et qui est certainement infiniment plus belle que moi. Il s'agit d'une de mes étudiantes à l'Université McMaster, Christina Oreskovich.
    Christina a suivi quelques-uns de mes cours ces dernières années. Le dernier qu'elle a suivi concerne la politique canadienne en matière de communications, tout en ayant le bonheur de suivre ce que nous appelons le cours sur les statistiques, soit le cours de méthodologie de la recherche quantitative. Christina et un certain nombre d'autres étudiants ont rendu la politique intéressante en suivant le cours sur les statistiques et en l'utilisant en fait pour réaliser un sondage auprès des étudiants universitaires de première année. Ils se sont penchés sur la situation actuelle des médias, soit le début de ce dont Pierre a parlé, dans la vie des autres étudiants.
    Je voudrais donc vous présenter...

  (0935)  

    D'accord. Vous avez la parole pour faire une très brève intervention.
    D'accord. Alors, je serai très brève.
    Essentiellement, comme l'a dit le professeur, nous avons fait un sondage sur les médias auprès des étudiants de première année en communications à l'Université McMaster juste pour voir quelles étaient leurs perceptions et leurs attitudes en ce qui concerne les médias et les nouveaux médias. Nous nous sommes servis des données pour tracer le profil général des rapports des étudiants avec les médias.
    Selon les données que nous avons recueillies, l'étudiant universitaire normal a un téléphone cellulaire et un ordinateur portatif et il a accès aux services à large bande à la maison ou à certains endroits sur le campus. Il télécharge souvent de la musique gratuite. Quelque 93 p. 100 des étudiants sondés, si je ne m'abuse, téléchargent de la musique illégalement. Je pense que c'est une donnée intéressante.
    L'étudiant normal est un avide usager de YouTube, de MySpace et de Facebook. Disons-le d'emblée, Facebook est un grand succès à mon université. Tout le monde s'en sert, et si vous ne vous en servez pas, on vous trouve vraiment bizarre. Sa popularité est immense.
    Il consulte parfois un blogue, mais il n'en tient pas un lui-même, même si certains de ses amis le font.
    Il regarde la télé au moins une fois par jour, et il écoute régulièrement la radio, mais, malheureusement, rarement la radio de la SRC. Il lit aussi régulièrement des magazines, au moins une ou deux fois par semaine. Pour une source d'information sérieuse, il se tourne vers les médias conventionnels ou Internet. J'ai été assez surprise de constater qu'autant d'étudiants lisent les journaux, mais c'est pourtant le cas semble-t-il.
    Il se sert d'Internet pour rester en contact avec un large éventail d'amis. Mais c'est étrange parce qu'il s'inquiète de passer moins de temps avec sa famille et ses amis parce qu'il est si souvent sur Internet. C'est une sorte de contradiction. Il craint que le temps qu'il passe sur Internet ne le rende moins productif dans ses études, mais, en même temps, il se sert d'Internet pour trouver beaucoup d'informations et il pense qu'Internet lui fournit un large éventail d'avis.
    Ce sont là quelques traits de l'étudiant normal. Je vais maintenant aller à la conclusion.
    Durant toute notre étude, une importante facette des médias ou des nouveaux médias était l'interactivité. Je sais qu'il a déjà été mentionné à quel point cela était devenu important. Quatre-vingt-trois pour cent des étudiants interrogés ont dit qu'ils consultent des blogues et ce genre de chose. C'est une sorte d'interactivité dans la mesure où les gens ordinaires ont la possibilité de devenir auteurs, d'exprimer leur opinion et de dire aux autres ce qu'ils pensent sur divers sujets de leur choix.
    Si vous voulez savoir si les nouveaux médias sont en train de remplacer les médias conventionnels, nos données ne le confirment pas du tout. Les gens s'intéressent autant aux médias conventionnels qu'aux nouveaux médias. Ce qu'ils font, toutefois, c'est utiliser les nouveaux médias à titre de complément de ce qu'offrent les médias conventionnels. Ainsi, si je manque l'émission Grey's Anatomy à 20 heures, je peux aller sur YouTube pour en visionner des extraits, ou je peux télécharger l'émission à partir du site Internet alluc.org. Je peux donc profiter des médias conventionnels, mais pas directement. C'est plutôt par l'entremise des nouveaux médias.
    Je sais qu'il s'agit du radiodiffuseur public et de l'avenir de la SRC, de sorte que je vais aller droit au but. Essentiellement, ce que nous demandons, c'est: est-ce qu'Internet remplit le rôle de radiodiffuseur public? Autrement dit, Internet fournit-il un espace pour un discours à l'abri des intérêts commerciaux? On ne peut nier qu'Internet fournit de toute évidence aux gens une tribune sur laquelle ils peuvent exprimer leurs opinions au moyen de sites Web, de blogues et d'autres dispositifs. Toutefois, l'existence même d'une telle tribune ne garantit pas que tous ont la même possibilité de se faire entendre. Par exemple, il n'y a qu'une poignée de moteurs de recherche populaires. Si votre site n'est pas lié à Yahoo! ou à Google, notamment, vous n'aurez pas la possibilité de vous faire entendre autant qu'un autre qui l'est.
    Ainsi, le rôle de radiodiffuseur public est au coeur même de l'édification de l'identité canadienne. Nous ne pouvons pas laisser cette responsabilité à l'incertitude d'Internet.
    Voici simplement quelques données. Vingt-sept pour cent des étudiants interrogés ont dit être quelque peu ou fortement en désaccord sur l'idée qu'on trouve plus d'information canadienne sur Internet que dans les médias conventionnels, et une grande partie d'entre eux n'étaient ni d'accord ni en désaccord. En conséquence, ou bien les gens ne cherchent pas cette information, ou bien elle n'est pas fournie. Puis il y a quelque chose comme src.com. Toutes les fois que je faisais un travail ou une recherche et que j'avais besoin d'une information canadienne solide et crédible, c'est sur le site de la SRC que j'allais en premier parce que je savais que j'y trouverais une information digne de foi.
    Nous croyons donc qu'il est fondamentalement important que la SRC profite des nouvelles plateformes pour accroître sa popularité auprès des jeunes auditoires parce que nous avons besoin que notre radiodiffuseur public soit plus fort que jamais.
    Merci.
    La parole est à M. Bensimon.

  (0940)  

    Si vous me permettez, ma déclaration débordera un peu le cadre de la technologie parce que, ayant terminé mon mandat comme commissaire à la cinématographie, je pense que j'ai vu l'industrie d'un point de vue particulier, et je voudrais partager mon expérience avec vous.

[Français]

    J'en profite et je dis « commissaire sortant », parce que je suis étonné qu'après cinq mois, mon successeur ne soit pas encore nommé. J'espère qu'il va l'être très bientôt.
    D'entrée de jeu, je vous avoue être un ardent défenseur de la télévision publique en tant que garant de l'équilibre démocratique. Par contre, je pense que les gens de Radio-Canada et de la CBC ont des comptes à rendre au public canadien. Or, jusqu'à présent, je crois que Radio-Canada a fait la démonstration qu'elle était davantage axée sur la concurrence que sur le service.

[Traduction]

    Est-ce que tout est enregistré, en ce qui concerne la traduction?
    Allez-y.

[Français]

    Ce concept de service doit être un élément de base. En effet, pour concevoir l'avenir, il est crucial que la CBC pense en fonction du bien public et du partage plutôt qu'en termes de monopole et de concurrence.

[Traduction]

    En matière de bilan, avant de parler des nouvelles technologies, je voudrais souligner que la SRC devrait être plus englobante qu'elle ne l'est maintenant. Je vous donne un exemple. Lorsque j'étais commissaire à la cinématographie, la seule façon pour la SRC de travailler avec l'ONF était d'absorber l'ONF, essentiellement; il n'y avait pas d'autre façon de travailler avec cet organisme. Ainsi, à CTV ou Global, il y a plus de produits de l'ONF qu'il y en a à la SRC. C'est assez étrange qu'une institution de 1,5 milliard de dollars ne puisse travailler avec une autre de 80 millions de dollars. Or, la SRC trouve assez d'argent pour acheter un réseau comme le Documentary Channel, après avoir acheté aussi un réseau appelé Country Canada, qui, en ce qui me concerne, en ce qui concerne l'auditoire, n'est pas vraiment visible sur l'écran.
    Une autre initiative qu'aurait pu prendre la SRC au fil des ans — la SRC n'a pas fait preuve de leadership dans ce dossier — concerne les réseaux provinciaux.

[Français]

    Dans le cas de Télé-Québec, TVOntario, Knowledge Network, CTV Saskatoon,

[Traduction]

La SRC aurait pu jouer un rôle de chef de file parce que ces réseaux sont très pauvres. Ils n'ont pas les moyens de s'afficher. Pourtant, ils offrent beaucoup de très bons produits, et si la SRC pouvait jouer un rôle de fédérateur dans ce domaine, cela pourrait nous aider à accoucher d'une vision pour l'ensemble du pays, d'une province à l'autre.
    Nous investissons beaucoup dans notre cinéma national par l'entremise de Téléfilm, à l'aide de crédits d'impôts et d'une foule d'autres formules. Dans le reste du monde, tous les grands radiodiffuseurs publics ont une division qui investit dans le cinéma. Pas la SRC. La SRC est certes libre de choisir les films dans lesquels elle investira des fonds et de déterminer à quelle hauteur elle le fera.

[Français]

    En France, en Angleterre et en Allemagne, les chaînes publiques financent le cinéma.

[Traduction]

    Je citerai M. Andreas Weiss, de l'ARD en Allemagne, qui a dit que le film La Vie des autres, qui a remporté l'Oscar du meilleur film étranger en 2007, a pu être réalisé grâce à ces investissements de la télévision publique, et personne ne l'a contredit.
    Avant de passer aux nouvelles technologies, je voudrais attirer votre attention sur un autre point qui concerne la SRC et le développement international. À ce jour, j'ignore tout à fait, à mon grand étonnement, ce que fait la SRC sur la scène internationale. Par exemple, la BBC, dont on a parlé et dont je parlerai aussi, s'est dotée d'une structure appelée BBC Worldwide, qui génère des revenus de 1,7 milliard de dollars en vendant son produit, son format et son concept. En ce sens, je cherche toujours ce que la SRC fait sur ce front.
    En plus, outre le fait de vendre des programmes, qui n'est pas l'affaire de l'heure — ce concept d'il y a 10 minutes —, il y a l'activité plus prometteuse de la vente de signaux, de réseaux. On pourrait être à Buenos Aires aujourd'hui ou à Istanbul et regarder un réseau japonais, coréen ou britannique. Pas au Canada. Où sommes-nous? Quand on parle de marché mondial, où sont ces images canadiennes qui devraient être vues partout dans le monde? La SRC aurait pu jouer un rôle de chef de file à ce niveau. Et cela m'amène aux nouvelles plateformes.

  (0945)  

[Français]

    Quand ils sont venus vous rencontrer ici, les représentants de la CBC vous ont demandé un vote de confiance de 10 ans afin qu'ils puissent amorcer le virage en matière de nouvelles plateformes et technologies.

[Traduction]

    C'est un énorme acte de foi à demander, à l'heure où nous connaissons des changements technologiques à un rythme presque mensuel. Je suis plus généreux que mon collègue.

[Français]

    Dans le domaine des nouvelles plateformes, la CBC parle plus souvent de contenants et de tuyaux plutôt que de contenu, c'est-à-dire ce qu'elle va mettre dans les tuyaux. Alors qu'une véritable révolution s'amorce, c'est comme si elle plaçait quelques arbres devant la forêt pour cacher celle-ci.
    En termes concrets, comment va-t-elle se démarquer des diffuseurs privés? À mon avis, les enjeux qui s'amorcent vont avoir pour nous tous des conséquences si faramineuses que je recommande à votre comité d'élargir ses discussions et ses décisions, de façon à pouvoir entendre un plus grand nombre d'experts, comme vous le faites maintenant, et pas uniquement les dirigeants de la CBC. Dans le cadre de la télévision traditionnelle, la CBC a souvent joué la carte de la concurrence, mais maintenant, on ne peut concevoir l'avenir technologique que si l'on agit en tant que partenaire avec d'autres.
    S'il y a au monde un réseau qui a entamé le virage technologique, c'est bien la BBC, en Angleterre.

[Traduction]

    Nous ne nous sommes pas consultés là-dessus, mais chacun d'entre nous a donné la BBC comme modèle.

[Français]

    La BBC, par exemple, s'est alliée à YouTube et a élargi son moteur de recherche avec Google.

[Traduction]

    YouTube attire 20 millions de visiteurs par mois. Comme le directeur des médias numériques de la BBC Worldwide l'a dit, ils peuvent nous apprendre beaucoup de choses.
    Le partenariat avec Google entraînera la création de trois nouvelles chaînes sur Internet et pour les usagers de téléphones cellulaires.
    Dans le même ordre d'idées, la BBC a conclu des accords avec la Corée du Sud par le truchement de TU Media Corporation. Elle a également conclu des ententes avec des sociétés américaines comme Azureus, un distributeur en ligne, BitTorrent, et Joost, une entreprise de distribution à large bande P2B appartenant aux créateurs de Skype.
    Dans le nouveau marché mondial, la SRC ne peut faire comme si elle était seule au monde. Les changements les plus importants ne viendront pas uniquement des choix technologiques, ils viendront aussi du contenu.
    La révolution, cela a été dit encore, c'est le contenu d'une nouvelle source: celui produit par les usagers. J'insiste là-dessus parce que ce contenu vient de particuliers -- pas seulement de professionnels -- de tous les coins du pays qui veulent que leurs oeuvres soient vues par leurs pairs au Canada et dans le monde.

[Français]

    Des expériences de ce genre ont lieu en ce moment au Canada, entre autres Homeless Nation, un projet dans le cadre duquel des jeunes créent leur propre réseau dans la rue et s'entraident pour trouver leurs propres solutions. CITIZENShift et Parole citoyenne sont des sites Internet où les citoyens créent et échangent entre eux. ZTV, que diffusait auparavant la CBC, avait ce genre de potentiel, mais on a préféré la sacrifier et transférer ces investissements vers des projets plus traditionnels et commerciaux.
    Les nouvelles plateformes sont en train de changer radicalement la notion de réseau, de format de produit, de processus de création ainsi que de droit d'auteur. La CBC ne veut pas se placer au-dessus de la mêlée, mais elle doit intégrer ces changements. Il ne s'agit pas ici de procéder à des modifications cosmiques consistant par exemple à appeler les Canadiens à voter pour le nom du plus bel endroit au pays, mais d'impliquer véritablement les citoyens dans une redéfinition en profondeur de la notion de service public.
    Un des patrons de la chaîne allemande ARD, qui appuie le concept de

[Traduction]

... de contenu généré par l'usager, a dit ce qui suit: « Le CGU ne peut avoir une incidence sur la connaissance publique que s'il est diffusé sur les plateformes interactives générales. » Les radiodiffuseurs publics peuvent jouer un rôle clé en fournissant une tribune puissante, mais impartiale, pour les débats publics.
    Y a -t-il quelqu'un au Canada qui nous conseille de prendre de telles mesures? Alors qu'IPTV, Internet protocol networks, voit le jour à un coût minime, la SRC consacre toujours ses énergies à étudier les plus vieux réseaux, comme les chaînes documentaires, et reste prisonnière encore une fois du vieux paradigme et du concept de compétition plutôt que de se convertir à celui de la complémentarité.

  (0950)  

[Français]

    Des représentants de la CBC sont venus vous voir pour vous demander 60 millions de dollars de plus en vue d'amorcer des changements technologiques. La BBC, de son côté, a vu son plan de refonte être réduit de 8,61 milliards de dollars sur une période de six ans par le gouvernement anglais. Ce dernier a demandé à la BBC de remettre l'équivalent de 3,9 milliards de dollars canadiens pour assurer des changements technologiques. À la CBC, c'est le contraire qui se passe: on ramène tout à de nouvelles demandes de financement supplémentaire. L'approche est simple: « Vous payez; on fait ».
    C'est peut-être vrai que la CBC a besoin de plus de moyens pour se convertir à la haute définition et c'est vrai qu'elle a besoin de plus de moyens pour continuer à être dans la course, mais avant de parler de nouveaux investissements de la part de l'État canadien, assurons-nous, comme dans le cas de la BBC ou de la NHK au Japon, qu'elle a d'abord mis de l'ordre dans sa maison. En effet, on ne peut pas vouloir être tout pour tout le monde en même temps, à la radio, à la télévision. On ne peut pas concurrencer dans le domaine numérique, faire du rattrapage technologique, sans faire des choix.

[Traduction]

    Mais pour ce faire, elle doit changer de peau: la SRC ne peut continuer d'investir dans les studios, les espaces à bureaux, son effectif actuel, et croire qu'elle pourra se réinventer de l'intérieur.
    En conclusion, je dirai aux membres du comité que vous êtes confrontés à une situation assez complexe. Je ne pense pas qu'on devrait laisser à la SRC le soin de définir son avenir, mais je vous invite à faire ce que nos prédécesseurs ont fait dans le passé. Je vous rappelle une commission appelée Commission Applebaum-Hébert. Je pense qu'il est temps que le pays ait le courage d'instituer une commission qui contribuerait à redéfinir ce que sera la solution pour la SRC en matière de nouvelles plateformes. Personne ne conteste le fait que nous allons y arriver. Comment nous allons y arriver, dans quel état d'état d'esprit, voilà ce qui importe le plus, à mon avis.
    Merci.
    Je vous remercie.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Mme Fry a la parole. Je vous prie de ne pas dépasser 5 minutes.
    Je dois vous dire que j'ai trouvé des plus intéressantes toutes vos déclarations. Je pense que vous avez présenté exactement ce dont nous devons parler. J'ai aimé la déclaration sur les nouveaux médias, et j'estime que la dernière déclaration par M. Bensimon était très importante.
    Est-ce qu'Industrie Canada considère avoir un rôle à jouer? Compte tenu que vous collaborez avec Patrimoine canadien de façon continue, considérez-vous que vous avez un rôle à jouer en aidant la SRC sur le plan financier et sur d'autres plans à s'engager dans les médias numériques le plus rapidement possible? Je pense que c'est cela le défi. Ce n'est pas comme si elle peut le faire dans cinq ans; elle doit le faire de toute urgence. Je vous demande donc de nous dire si Industrie Canada a un rôle à jouer à cet égard.
    Nombre de gens ont dit bien des choses, mais je pense que c'est Mme Oreskovich qui a parlé de la fonction de décalage temporel dans les nouveaux médias numériques, ce qui est important à mon avis. Autrement dit, on n'est pas obligé de regarder une émission en direct; on peut la regarder n'importe quand, comme sur son iPod dans le bus. Je crois que c'est une fonction clé dont nous devrions parler.
    J'ai également été impressionnée par le rôle international de la SRC. Quand nous avons commencé en 1997 à l'UNESCO, le Canada a joué un rôle important en faisant de la SRC un joueur international, se servant de tout le concept de joueur sur la scène internationale. Cela me semble avoir été mis de côté et nous avons perdu cette innovation que nous avions présentée.
    Quel rôle international voyez-vous pour la SRC? Comment pensez-vous que la SRC fera, compte tenu de la concurrence de CNN, principalement, mais aussi de la BBC, en matière de couverture de l'actualité?
    Enfin, je voudrais que vous nous en disiez un peu plus sur la façon dont vous voyez la SRC abandonner sa tendance de tout produire à l'interne au profit de coproductions avec d'autres pays ou de la diffusion de productions indépendantes et accroître sa présence dans le secteur des films de long métrage, comme l'a fait la BBC.
    Voilà les trois questions auxquelles j'espère avoir une réponse.
    Merci beaucoup.
    En réponse à la question sur Industrie Canada, je puis certainement parler de la collaboration du point de vue technologique ou du développement technologique. Le CRC a travaillé avec la SRC sur la conception des nouvelles plateformes -- d'Internet à IPTV, à la télévision tridimensionnelle. Voilà le genre de collaboration qu'il y a eu.

  (0955)  

    Si vous collaborez là-dessus, toutefois, envisagez-vous un rôle à jouer pour que cela se réalise -- comme consacrer des fonds et des ressources maintenant, au lieu de simplement en parler?
    Je le répète, le rôle que nous jouons a trait à la technologie. Et puis Industrie Canada joue un rôle en compagnie d'autres organismes gouvernementaux s'intéressant à la radiodiffusion pour que cela se réalise. Ainsi, Industrie Canada n'est pas le seul à jouer ce rôle.
    M. Bensimon a la parole.
    Vous m'avez adressé trois questions. En ce qui concerne la SRC sur le plan international, je pense qu'en tant qu'institution publique, la SRC doit jouer un rôle de chef de file en regroupant les radiodiffuseurs publics et privés pour s'attaquer au marché international. C'est assez facile.
    Aujourd'hui, lorsque les Coréens ou les Japonais peuvent se retrouver dans les différents choix de réseaux dans le monde, c'est simplement parce qu'ils exportent leurs émissions après avoir libéré les droits pour pouvoir le faire.
    Je vous rappelle que la SRC a tenté de le faire aux États-Unis il y a cinq ans environ, mais qu'elle a vendu ce réseau et ne l'a jamais racheté. À mon avis, la SRC ne pense pas en fonction du monde; elle pense à vendre son produit, mais pas son signal.
    Prenons, par exemple, Tout le monde en parle une émission du réseau français de la SRC qui a remporté un grand succès, dont le concept a été acheté à la France. Nous sommes donc passés de la formule habituelle de vente d'un produit à la vente d'un signal.
    Et il y a une demande dans le monde pour la qualité que pourrait atteindre la SRC si elle parvenait à fédérer les réseaux publics et privés. Par exemple, Bell pourrait s'unir à la SRC pour créer un réseau TV5 canadien, si vous voulez, qui serait diffusé dans le monde entier. C'est faisable. Nous pourrions nous pencher sur les détails d'un tel projet.
    La deuxième question avait trait aux producteurs indépendants. C'est relativement simple. Cela est fait dans le monde entier, et c'est pourquoi je demande si la SRC a besoin de l'infrastructure qu'elle a dans tout le Canada. A-t-elle besoin de tout cet effectif d'un océan à l'autre?
    Prenons par exemple Alliance Atlantis ou tout autre réseau. Lorsque Channel 4 a été créé au Royaume-Uni, il n'y avait pas d'infrastructure. On n'a pas besoin d'une infrastructure parce que, comme il a été dit, elle devient assez rapidement désuète.
    Ne conservons que le strict minimum et fonctionnons comme cela. L'argent ainsi économisé ira dans le monde des producteurs indépendants parce que c'est de là que proviennent les productions de toute façon.
    À l'heure actuelle, ce qu'on voit, c'est que la SRC protège son vieil univers. Elle puise à deux mains dans le Fonds canadien de télévision. Elle profite de son propre produit. Elle profite des revenus qu'elle tire de la publicité. Pour quoi faire? Maintenir une énorme infrastructure.
    Pour pouvoir recourir aux producteurs indépendants, la SRC doit d'abord se libérer de son vieil univers au profit de l'univers des nouvelles plateformes, de sorte qu'elle pourra investir dans le secteur des indépendants et enrichir ce qui doit être fait dans notre pays en ce qui a trait aux producteurs indépendants.
    Votre troisième question, qui porte sur les films de long métrage, est assez simple. En France, il y a un organisme appelé CNC. En Angleterre, il y a le UK Film Council. La loi prévoit que les radiodiffuseurs privés et publics doivent investir dans le développement de l'industrie du film de long métrage. La France et l'Angleterre ont ainsi créé un organisme chargé d'investir dans la production de films de long métrage.
    Pouvez-vous imaginer ce que nous pourrions faire avec au moins le double des 240 millions de dollars qui sont actuellement consacrés à Telefilm Canada?Je ne pense pas me tromper en disant qu'on pourrait obtenir des fonds des radiodiffuseurs qui finiront par diffuser ces films. Mais ils attendent que les films soient terminés afin de les avoir pour 2 cents au lieu de prendre le risque d'investir dans le développement de notre industrie du cinéma.
    Cela, à mon avis, est la réponse à vos trois questions.

  (1000)  

    Merci beaucoup.
    Le prochain à poser des questions est M. Kotto.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Mesdames et messieurs, bonjour. Je vous remercie de nous avoir présenté ces exposés instructifs. Ceux-ci étaient complets. Nous avons donc suffisamment d'information pour élaborer des recommandations. Vous en avez amorcé certaines, et elles étaient pertinentes.
    Monsieur Bensimon, certains témoins nous demandent d'accorder, dans le cadre de l'enveloppe parlementaire, un financement adéquat à la CBC et à Radio-Canada. Vous avez laissé entendre qu'il y avait du désordre à la CBC et qu'avant de lui allouer quelque somme additionnelle que ce soit, il faudrait voir à ce qu'elle mette de l'ordre dans sa maison. Est-ce que ça vaut également pour le volet francophone, soit la Société Radio-Canada?
    Encore une fois, il faut mesurer les deux entités de façon différente. Il ne fait aucun doute qu'il y a une grosse différence entre les deux. À mon avis, on doit mettre plus d'ordre du côté anglophone que du côté francophone. Le côté francophone est sur la bonne voie, mais la réflexion doit avoir lieu au sein de l'équipe de direction de Radio-Canada et du conseil d'administration. Par exemple, il faut savoir si, à Montréal, on doit être préoccupé par le déménagement d'une tour ou si on doit construire des habitations à loyer modique. De telles questions viennent surcharger les responsabilités d'un diffuseur qui, selon moi, n'a rien à faire dans cet univers.
     Je crois que Radio-Canada, comparativement à CBC, a fait preuve de discipline en analysant le contenu de façon plus approfondie. Cependant, le fait que Radio-Canada fasse partie de CBC l'encombre de responsabilités qui appartiennent à l'ensemble de la société.
    Je prêcherai, par exemple, pour un lieu en particulier où, à mon avis, les deux entités ont fait une erreur: on a évacué complètement le documentaire long métrage ou le documentaire tout court des chaînes généralistes. Le documentaire est une forme de création qui a été littéralement inventée au Canada, où nous sommes très forts. CBC ne diffuse plus de documentaires en prime time. Ils ont été évacués pour être diffusés uniquement sur des chaînes spécialisées. Radio-Canada a peut-être deux créneaux, et il faut formater ces émissions de façon à ce qu'elles entrent dans ces deux créneaux et que leur présentateur puisse les faire.
     La SRC est affectée par l'ensemble de la société et doit faire preuve de plus de discipline que CBC. On doit refaire une réflexion globale. Sinon, vous monterez une structure de nouvelles plateformes sur du sable mouvant. Tant que vous n'aurez par réglé vos problèmes, il sera difficile d'intégrer de nouvelles plateformes et de nouvelles technologies, parce qu'elles prendront les mêmes vices de forme que ceux que l'on trouve aujourd'hui. Faites le constat de l'état des lieux de CBC/SRC avant de faire de nouveaux investissements.
    Je vous remercie beaucoup.
    On emploie souvent le mot « plateformes », mais j'aime beaucoup la nouvelle expression « technologies émergentes ».
    Des témoins nous ont dit qu'il fallait à tout prix investir dans cet univers. M. Bensimon et vous-même, monsieur Bélanger, avez évoqué les contenus. Selon moi, ils sont essentiels et fondamentaux. Vous avez parlé des plateformes actuelles qui n'ont pas de contenu illustrant la créativité, la richesse et l'identité.
    Comment pourrait-on évaluer l'importance de cette révolution technologique du point de vue de l'audience? Afin de comparer les médias traditionnels aux nouvelles technologies, avez-vous établi des statistiques sur le nombre de personnes qui ont cliqué sur une plateforme donnée pour voir telle information, à quelle heure, à quel jour ou à quelle semaine?

  (1005)  

    Spontanément, je n'ai pas de chiffres précis, mais je connais les sources. Il me fera plaisir de vous les communiquer.
    S'il vous plaît.
    Depuis sept ou huit ans, je gère une veille technologique sur une base quotidienne avec un groupe de recherche de l'université. J'aime penser que la plupart de ces grandes tendances sont couvertes par nos travaux.
    Un phénomène assez important s'est produit aux États-Unis l'automne dernier. Il a suivi d'un an l'entrée sur le marché du fameux iPod vidéo qu'Apple avait lancé à l'automne 2005.
    ABC, CBS et les grands réseaux privés américains ont mené, de concert avec Apple, une étude-pilote de trois ou quatre mois pour voir si le transfert d'émissions vedettes telles que Desperate Housewives et Lost sur cette nouvelle plateforme répondait à une demande. Il me fera plaisir de vous communiquer les chiffres à cet égard. Six mois plus tard, les résultats sont à ce point encourageants qu'ABC affiche maintenant sur son site Web

[Traduction]

    C'est un moment très déterminant, je pense, dans l'histoire récente des communications ou des médias de communication traditionnels. Si on va sur le site web abc.com aujourd'hui, non seulement on nous invitera à regarder Lost à 21 heures et Ugly Betty à 22 heures et aussi l'émission qui joue à 23 heures. On nous invitera aussi à regarder Lost ce soir à 21 heures et demain sur la toile.
    Cela représente pour moi un énorme changement de paradigme. Je vous dis qu'il n'est plus nécessaire de programmer votre magnétoscope. C'est maintenant mon travail traditionnel que de passer à ces autres plateformes. Nous avons maintenant les iPods pouvant afficher des vidéos, et nous pouvons maintenant aller sur iTunes pour acheter l'émission que nous avons manquée hier soir.
    M. Bensimon a parlé de la BBC et de YouTube. Eh bien, prenez la LNH et YouTube; il n'est pas nécessaire de regarder le match ce soir entre les Sénateurs et les Sabres parce qu'il suffit d'aller sur YouTube à 23 heures pour voir tous les buts marqués au cours du match.
    On voit donc que tous les radiodiffuseurs ont intérêt à explorer les possibilités et la viabilité de modèles commerciaux novateurs sur diverses plateformes.

[Français]

    Les chiffres sont abondants maintenant. On a entendu les déclarations que Bill Gates a faites hier au sujet des nouvelles plateformes mobiles, etc. J'en ai une ici.

[Traduction]

    Selon le président du réseau de câblodistribution Comcast aux États-Unis, il n'y aura plus de médias linéaires purs -- c'est-à-dire la notion de produit distribué en de multiples exemplaires.

[Français]

    Nonobstant les commentaires de M. Bensimon, qui sont tout à fait pertinents dans cette perspective, Radio-Canada demeure une des institutions culturelles les plus importantes du pays. Elle raconte le Canada aux Canadiens à partir de ses différentes têtes de réseau un peu partout au pays. L'idée de disséminer les contenus le plus largement possible et les plateformes mobiles... La tempête se lèvera dès qu'on aura les fameux réseaux WiFi

[Traduction]

    ..., la technologie de réseau sans fil. Toronto a été la première ville canadienne à posséder ce nuage numérique. Elle en a fait l'expérience pendant six mois. La technologie sera maintenant totalement mise en oeuvre. Certes, il faudra payer, mais elle s'adresse surtout aux gens d'affaires.
    Imaginez ce que ce sera dans 10 ans. Quand nous avons commencé à nous brancher sur Internet, nous payions un tarif horaire, comme s'il s'agissait d'appels interurbains. Nous payons maintenant 35 $ ou 40 $ pour un usage illimité. C'est comme la taxe d'eau. Personne n'évalue notre consommation, ce qui pourrait être un problème, mais sur Internet, l'utilisation est illimitée.
    Il y a un certain nombre de plateformes émergentes dont nous devons tenir compte afin d'optimiser la valeur et l'intérêt public de ce que fait la SRC. À l'heure actuelle, le mandat de la SRC la limite vraiment à la radio et à la télévision. Je pense que nous devons intégrer ce nouvel univers qui est extrêmement populaire et qui s'agrandit chaque jour.

  (1010)  

    Merci.
    Soyez bref, monsieur Savage.
    Merci.
    Je voulais simplement vous faire part d'une statistique concernant la radio. On oublie souvent de parler de la radio de la SRC. Cela concerne aussi un peu un des points soulevés par M. Bensimon.
    La radio anglaise de la CBC a vraiment beaucoup innové dans la baladodiffusion. Il semble que, ces derniers mois, il y a eu environ un million de téléchargements sur baladeur d'émissions de radio de la CBC par mois. Évidemment, cela se produit en même temps que la forte hausse de l'écoute de radios par satellite. M. Bensimon n'en a pas parlé, mais c'était une façon d'attirer les artistes musicaux canadiens sur un réseau nord-américain, tant en français qu'en anglais.
    Ce qui est intéressant à cet égard, c'est que lorsqu'on parle à des jeunes, on se rend compte qu'ils n'écoutent pas la radio par satellite. La radio par satellite n'intéresse pas les jeunes. C'est plutôt le téléchargement de contenus musicaux qui les intéresse. Sur un million de téléchargements sur baladeur mensuels venant de la radio anglophone, 500 000 étaient réalisés par des non-Canadiens à l'extérieur du Canada. On n'a pas besoin d'une infrastructure satellitaire pour faire cela. Ce qu'il faut, c'est que des gens produisent tous les jours, sur toutes les scènes culturelles, dans toutes les régions, les émissions constituant la base de la radio de la SRC -- cette bonne vieille radio ennuyante que 90 p. 100 des Canadiens écoutent toujours toutes les semaines, qui emploie des journalistes qui sont envoyés aux quatre coins du pays, que personne d'autre, qu'aucun autre radiodiffuseur n'exploite à au moins 60 endroits différents. Tel est le fondement du contenu qu'on trouve sur une plateforme numérique très peu coûteuse, dont le contenu est généré par les usagers et qui est vu par plus d'un demi-million de personnes à l'extérieur du pays tous les mois.
    Merci. Nous avons pris un peu plus de temps -- encore.
    M. Angus, je n'amputerai pas votre temps de parole.
    Je suis conscient du temps depuis l'époque où je faisais de la musique et où nous devions quitter l'estrade.
    Mais je suis très contrarié. C'est le temps du dialogue, mais il semble y en avoir si peu. Je vais poser trois questions tout de go, et attendre les répondre.
    Je voudrais commencer, Mme Rawat, avec la question des transmetteurs numériques à faible puissance.
    L'une des questions est celle de savoir ce qu'il faut faire avec les tours analogiques qui relient le pays et permettent aux gens de capter les signaux de télévision avec des antennes en V, qui pourraient disparaître. La seule option qui sera offerte aux gens pour regarder les émissions du radiodiffuseur public sera, semble-t-il, de s'abonner aux services d'un câblodistributeur. Comme première question, je voudrais savoir s'il y a moyen de transformer les tours analogiques que nous avons actuellement en tours numériques. Combien coûterait la transformation des émetteurs analogiques en émetteurs numériques?
    Ma deuxième question s'adresse à vous, M. Bensimon, en raison de votre expérience à l'Office national du film.
    L'Office national du film a connu d'énormes difficultés financières, mais cela ne l'a pas empêché, à mon avis, de produire des films d'une qualité toujours inégalée. Elle est une des grandes réussites du Canada. Je pense à toute une série d'icones culturelles qui ont été créées pour représenter le Canada du XXe siècle. Nous avons Téléfilm qui, selon certains, est très contestée. Nous avons la SRC. Nous avons l'Office national du film. Nous avons le Fonds canadien de télévision. Or, il ne semble pas y avoir de point de vue holistique dans cet univers multidimensionnel; nous avons une série d'organismes qui sont financés et parmi lesquels certains font sans doute très bien, et d'autres, très mal.
    Y a-t-il moyen de redéfinir complètement tous ces organismes pour qu'il y ait un peu de cohésion et que nous obtenions le genre de succès qui devrait être le nôtre en télévision?
    Ma troisième question s'adresse à nos universitaires.
    Nous avons entendu parler du million d'options qui existent dans les nouveaux médias. Par exemple, sur la toile, il y a 10 millions de blogues et ils sont tous absolument ennuyants. Mes enfants naviguent sans arrêt sur Internet pour trouver du contenu. Le bon contenu coûte cher. Ce qui a changé, selon moi, c'est qu'ils regardent toujours la télévision, mais jamais à 20 heures. Ils regardent la télévision en achetant des DVD. Nous regardons Buffy contre les vampires soir après soir, à l'heure de leur choix. Ils regardent YouTube. Maintenant, ils regardent The Mighty Boosh et Never Mind the Buzzcockstous les soirs -- à l'heure de leur choix.
    Il y a donc la question du contenu, mais quelqu'un doit produire ce contenu. Comment pouvons-nous le diffuser? Je voudrais entendre votre point de vue là-dessus.
    En guise de complément à cela, je voudrais savoir si vous avez lu le rapport LaPierre intitulé Une charte canadienne des citoyens branchés sur la culture : Culture canadienne en ligne . C'est une des études les plus sérieuses que j'aie lues ces dernières années -- et elle dort sur les tablettes quelque part au ministère du Patrimoine. M. LaPierre a parlé de la nécessité de créer une capacité culturelle en ligne pour promouvoir la notion de citoyenneté au XXIe siècle... Je n'ai jamais entendu parler de ce rapport depuis qu'il a été présenté. Est-il pertinent?
    Je vais le faire circuler.

  (1015)  

    Je demanderai à mon collègue, M. Caron, de répondre.
    Je voudrais vous donner l'exemple de la ville de Québec. Il y a un émetteur analogique dans la ville de Québec. Il se trouve au bout de l'île d'Orléans. Il dessert la ville de Québec et ses environs. Ce qu'il faut faire plutôt, c'est desservir toute la vallée du Saint-Laurent, de l'ouest à l'est du Québec. Au lieu d'avoir un émetteur central couvrant plus ou moins un cercle, on peut installer un certain nombre d'émetteurs le long du fleuve pour desservir toute la région. Le problème, c'est qu'il faudrait peut-être construire des tours plus petites, qui n'existent pas actuellement. Il faudrait peut-être les partager avec les entreprises de téléphone cellulaire, de sorte que le réseau ressemblerait davantage au réseau de tours de téléphone cellulaire que l'on voit le long de la route. Si on s'éloigne de cette ligne, le signal n'est plus capté. C'est la même chose dans le cas de la télévision.
    Le coût total devrait être plus faible parce qu'il faudra moins d'électricité pour émettre ces signaux, ce qui se traduira par une diminution des coûts d'exploitation.
    Pour ce qui est de ma partie de la question, tel a été le message que je vous ai adressé, en tant que comité permanent. Publiquement, nous investissons près de 5 milliards de dollars en tant pays dans les communications et l'audio-visuel. À mon avis, aujourd'hui -- et cela comprend l'Office national du film, compte tenu du succès avec lequel il doit composer. Je le dis depuis cinq ans. Il faut résister à l'idée d'examiner le mandat de la SRC sans examiner en même temps celui de tous les organismes culturels du pays, car ce serait rendre un mauvais service au pays que d'évaluer la SRC sans penser aux conséquences de cette évaluation sur tous les protagonistes. Et cela comprend Téléfilm. Cela comprend la SRC. Cela comprend le Conseil des arts. Cela comprend tous les intéressés. Si on ne le fait pas, je pense qu'on ratera l'occasion de tout réexaminer.
    L'ONF remporte un Oscar, mais, en même temps, il investit dans un concept appelé Hothouse grâce auquel les enfants peuvent créer leurs propres produits, avec les moyens accessibles aujourd'hui -- c'est la même chose qu'on a ici -- et ils peuvent vous le montrer presque immédiatement.
    Mais je ne prêche pas pour un modèle en particulier. Je pense que nous avons besoin d'un point de vue général.
    Revenant à la question du contenu, la beauté du contenu aujourd'hui, c'est qu'au même moment où nous ne sommes plus forcés de regarder une émission à 20 heures, les émissions d'aujourd'hui ont fait exploser le concept de la demi-heure, de l'heure et de l'heure et demie, qui était conçu pour la consommation de publicité et pour les besoins des radiodiffuseurs.
    Aujourd'hui, les produits et le contenu ont explosé. Ils durent trois minutes, une heure, deux heures. La beauté de tout cela, c'est que le contenu est produit par toutes sortes de gens. Il y a des professionnels chevronnés qui font de la télévision haute définition qui coûte plus de 1,5 million de dollars pour une émission de trois minutes et d'autres producteurs qui créent des émissions coûtant 5 000 $ au moins. Je pense qu'il va continuer d'y avoir une industrie professionnelle dans le secteur de la musique, mais qu'il y aura en même temps de simples citoyens qui seront capables de créer eux aussi à ce niveau. Il y a donc un univers multidimensionnel où le contenu n'a pas qu'une définition.
    En ce qui concerne le rapport LaPierre, je suis heureux que vous en ayez parlé parce que je suis d'accord avec vous. Il dort sur les tablettes, et c'est dommage, car il renferme une foule de bonnes idées. Mais telle est la réalité. J'ai donné l'exemple d'Homeless Nation, qui sert essentiellement à relier les jeunes sans-abri du pays de diverses façons. Qu'ils accèdent au site au moyen de leur propre ordinateur ou de celui d'un magasin, par exemple, ils créent, communiquent entre eux et trouvent des solutions entre eux sans avoir à recourir à une intervention de l'extérieur.
    À mon avis, cela est aussi lié à ce que dit le rapport La Pierre, à savoir que les citoyens devraient faire partie du processus de création. Nous avions coutume d'avoir des professionnels pour ceci et pour cela et nous croyions avoir créé -- la génération dont je fais partie -- des professionnels de l'audio-visuel. Aujourd'hui, nous sommes tous des professionnels de l'audio-visuel. Nous avons une langue pour décoder les images; par conséquent, nous sommes maintenant capables de produire des images.

  (1020)  

    Merci.
    Pour la dernière question, voulez-vous commencer, monsieur Bélanger? Et efforçons-nous de garder nos réponses relativement brèves.
    Je ferai de mon mieux.
    Je tente de vous donner le même temps de parole, monsieur Angus.
    Je vous en remercie, monsieur le président. Vous êtes merveilleux.
    Nous apprécions les questions de ce genre, car elles touchent à l’essence même de l’impact des technologies sur les diffuseurs traditionnels.
    Il y a de nos jours tellement de nouveaux appareils qui nous permettent de consommer ces contenus que je pense qu’une nouvelle espèce zoologique vient d’être créée, l’homozapiens ou le zappeur. Ce que je veux dire c’est que si le contenu n’est pas exactement ce que j’attends, j’ai des zillions d’options, non seulement à la télévision par satellite ou par câble, mais aussi et surtout sur le web.
    Un certain nombre de néologismes ont été créés ces dernières années. Il y a notamment la notion d’amalgame, mashup en anglais, qui veut dire que si j’ai accès au contenu, ainsi qu’aux outils nécessaires, je peux effectivement modifier à mon avantage et pour ma propre utilisation, certains des éléments du contenu original. Il y a également la notion d’approvisionnement par la foule lorsque le contenu lui-même est produit par l’utilisateur. Il est toujours question, surtout dans le secteur privé, d’impartition, notamment à des marchés moins chers. Dans les médias, il est surtout question d’approvisionnement par la foule, c’est-à-dire se tourner vers le public pour glaner du contenu. On demande alors au public s’il n’aurait pas un contenu que nous pourrions utiliser.
    Il faut cependant tenir compte des implications légales par exemple. N’était-ce pas lors de l’incident Rodney King, à Los Angeles, qu’un citoyen a filmé de son balcon des agents de police en pleine action? La notion de journalisme citoyen est un autre exemple de la direction que la SRC devrait prendre au cours des dix prochaines années, car c’est en demande.
    Je pense que les citoyens sont en fait à l’origine d’un certain nombre d’initiatives. Si le diffuseur public pouvait seulement s’ouvrir sur l’extérieur et se montrer plus sensible aux nombreuses initiatives venant du public, il deviendrait encore plus axé sur le citoyen.
    Je m’arrête là-dessus.
    Je vous remercie.
    Je donne maintenant la parole à M. Fast.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie tous les participants.
    Jusqu’à maintenant, cette séance a probablement été la plus instructive de toutes. En effet, nous avons ici des spécialistes des nouveaux médias. Monsieur Bensimon, votre témoignage est stimulant. Il jette un nouvel éclairage sur la question de la SRC, un diffuseur public, et sur les éléments que nous devons examiner avant de bonifier les ressources financières sur lesquelles elle peut déjà compter.
    Comme nous avons ici plusieurs spécialistes du domaine des nouveaux médias, je vais mettre l’accent sur les témoignages de M. Savage et de M. Bélanger.
    Comme vous le savez déjà, le CRTC a dit très clairement que, pour l’instant, l’exemption relative aux nouveaux médias serait maintenue. Vous y avez fait brièvement allusion, M. Savage. J’aimerais que vous élaboriez davantage.
    Monsieur Bélanger, vous n’avez pas parlé de cette question en particulier, mais vous avez probablement une opinion sur le sujet. Pourriez-vous nous dire si vous êtes en faveur du maintien de cette exemption dans les circonstances actuelles? Pour ou contre, expliquez-nous vos raisons.
    En général, ou en ce qui concerne la SRC?
    En général, c’est-à-dire en ce qui concerne l’exemption relative aux nouveaux médias déjà mise en place par le CRTC.
    Je vais commencer avec ce qui a été en quelque sorte un catalyseur. Il y a environ un an, à l’apparition de la télévision mobile, les diffuseurs ont été un peu surpris d’apprendre que cette nouvelle technologie serait traitée à part et qu’essentiellement le CRTC n’interviendrait pas dans le domaine.
    Je pense qu’il est temps de faire preuve de beaucoup d’imagination. Il faut que le CRTC prenne un peu plus de risques pour promouvoir vraiment les principes de la loi en ce qui concerne les mécanismes de soutien à la production et à la distribution de la programmation canadienne. Je ne peux dire précisément comment cela devrait se faire. Je pense toutefois que cette question doit être soulevée.
    Dans son Ordonnance d’exemption de 1999 relative aux entreprises de radiodiffusion de nouveaux médias, le CRTC a essentiellement dit qu’il reviendrait sur cette question en fonction de l’évolution de la situation. De toute évidence, il ne l’a pas encore fait. Le rapport Lincoln lui a pourtant demandé de le faire. Le CRTC a probablement manqué de temps et de ressources. Je pense qu’il est probablement temps qu’il lance un débat public et qu’il recueille toutes les suggestions à cet égard.
    J’ai l’impression qu’il y aura de larges domaines où les organismes responsables seront incapables de réglementer le contenu. En effet, pendant qu’ils seront occupés à mettre au point des moyens d’imposer un seuil minimum de contenu canadien à une nouvelle technologie, il y en aura déjà une plus nouvelle encore à l’horizon.
    D’autres États dans le monde se sont déjà saisis de la question. Ce qui devient de plus en plus évident, c’est qu’il existe un outil d’intervention encore plus efficace que la réglementation du contenu pour promouvoir la production locale. Je veux parler du diffuseur public. Je suis donc d’accord avec M. Bensimon sur le fait qu’il faut coordonner toute une gamme d’organismes.
    Je me méfie un peu de l’idée de réinvestir une partie du budget de la SRC dans des mécanismes comme le Fonds canadien de télévision, compte tenu des événements des derniers mois. En effet, certains intervenants du secteur de la télédiffusion et des télécommunications souscrivent à une telle perspective. Ils veulent simplement récupérer leur mise et se retirer.
    Il faut donc nous inspirer de ce qui se fait dans le monde, et prendre notamment l’exemple de la BBC, qui est un modèle à cet égard. Lorsqu’on veut promouvoir l’expérimentation, favoriser le contenu local, il faut utiliser les ressources du diffuseur public, de façon à ce qu’il y ait un choix. Il faut offrir un choix aux Canadiens en matière de contenu.
    Actuellement l’amalgamation a la cote. Selon les étudiants à qui nous avons parlé, le site web Facebook est une sorte de bricolage. Par exemple, j’y définis mon personnage, mon propre personnage médiatique. Je décide si je mettrai dans mon site des clips de Will Farrell ou des éléments tirés des archives de la SRC.

  (1025)  

    Je ne veux pas vous interrompre, mais notre temps est limité. Je crois que vos explications étaient claires.
     En passant, je tiens à féliciter Mme Oreskovich de sa participation. Son exposé était excellent.
    Merci.
    Vous avez mentionné que votre étude a démontré qu’un fort pourcentage d’étudiants téléchargent de la musique illégalement.
    Avez-vous dit 93 p. 100, ou était-ce plutôt 80 p. 100?
    Je peux vous donner le chiffre exact.
    L’étude semble indiquer 80 p. 100, mais je peux faire erreur.
    C’était bien 80 p. 100.
    C’est bien ce que je pensais.
    C'est ce que j'avais mentionné.
    C’est très bien. Pour moi, un vieux de la vieille, ça reste un chiffre. Je suis quelque peu choqué d’apprendre qu’au Canada il y a au sein du corps étudiant et chez les jeunes en général une culture où l’on ne voit rien de mal à s’emparer d’un contenu qui appartient à autrui et de le télécharger sans payer.
    M. Savage, vous venez de mettre le doigt sur le bobo. La technologie se développe à une telle vitesse qu’il devient quasi-impossible de saisir la valeur intrinsèque de tous ces contenus. C’est contre ce phénomène que nous devrons lutter à l’avenir pour résoudre les questions relatives aux nouveaux médias ou à la législation sur les droits d'auteur.
    J’aimerais revenir à M. Bélanger très brièvement.
    Vous avez également mentionné que le mandat de la SRC devrait être modernisé. Je voudrais que ce point soit éclairci. Voulez-vous dire que le mandat lui-même devrait être modifié, modernisé et adapté à la réalité contemporaine, ou que c’est plutôt l’application du mandat actuel qui devrait être modernisée? Il y a une nuance entre ces deux méthodes d’approche. J’ai en main le texte du mandat. Ce n’est pas très long, mais un passage du document dit que la CBC/Société Radio-Canada devrait :
[...] être offerte [...] de la manière la plus adéquate et efficace, au fur et à mesure de la disponibilité des moyens [...]
    C’est très général. Cette définition serait applicable aux nouveaux médias, mais vous laissez entendre que le mandat lui-même devrait être modernisé. Pourriez-vous être plus précis?
    Dans le mémoire que j’ai déposé hier soir, que vous recevrez probablement plus tard aujourd'hui ou cette semaine, je cite l'article 3, en français:

[Français]

la Société Radio-Canada [...] devrait offrir des services de radio et de télévision qui comportent une très large programmation [...]

  (1030)  

[Traduction]

    Je n’ai vu, dans cet article précis du mandat, aucune mention explicite à l’intégration ou à l’inclusion des nouvelles technologies. La réponse à votre question serait donc « la première option ». Lorsque vous dites qu’il s’agit de moderniser le mandat ou la façon dont le mandat est mis en œuvre, j’aimerais personnellement y trouver une mention explicite à l’inclusion de « […] de toute autre nouvelle technologie dans le cadre de ses mécanismes de diffusion ».
    Merci.
    M. Scott a la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    C’est étonnant de voir combien nous aimons tous la présidence, qui frappe du marteau et nous interrompt, notamment, si je puis faire allusion à M. Angus.
    J’ai été ravi d'entendre M. Savage parler de la raison d’être historique de la SRC. D’emblée, je pense que l’identité canadienne, pour bien des raisons que tous comprennent, est dans le meilleur des cas fragile. Avec la mondialisation et la prolifération de toutes ces nouvelles technologies, notre identité se fragilise donc à vue d’oeil et nous nous posons de plus en plus de questions à cet égard, ainsi que sur nos valeurs.
    Pour commencer, j’ai un certain nombre de questions très précises à poser. Je pense en fait qu’il y en a pour tout le monde.
    Du point de vue d’Industrie Canada, en mentionnant l’infrastructure nécessaire pour permettre au Canada d’être un acteur dans ce domaine, vous avez identifié le problème. Par contre, je n’ai pas entendu de solution. J’aimerais que vous m’en suggériez une.
    Je vais d’abord lancer toutes mes questions. Ensuite, je m'arrêterai.
    Deuxièmement, M. Bélanger, tout évolue très vite dans ce domaine. En effet, j’ai changé d’avis au moins deux fois pendant les discussions d’aujourd’hui. Il y a 20 ans, je croyais que l’interactivité avec les ordinateurs serait le nouvel aboutissement des médias. Mes enfants ont respectivement 22 ans, 20 ans, et 15 mois. À 22 ans et 20 ans, contrairement au gens de ma génération, ils n’ont eu aucune patience à l’égard de la télévision, car elle n’était pas interactive.
    Puis j’ai décidé que l’interactivité n’était pas le problème. C’était plutôt le fait que la télévision était axée sur le consommateur. Vous avez mentionné cet aspect en précisant que la nouvelle technologie permettrait de saisir l’information spontanément, plutôt que de la consommer de façon linéaire.
    Puis j’ai encore changé d’avis lorsque quelqu’un a parlé de point de vue du citoyen et de Rodney King. Cela me fait penser au système d'éducation et à tous les étudiants dans les salles de classe, équipés d’appareils-photo et de téléphones, en train de prendre des photos de leurs professeurs. On peut en conclure qu’en bonne partie ces progrès viennent des écoles et des étudiants car ils représentent l'avant-garde.
    J’aimerais donc adresser cette question à M. Bélanger. Je voudrais simplement savoir si j’ai raison au sujet de cette nouvelle tendance?
    M. Savage, ce que vous aviez à dire sur la fonction publique me fascine, mais je crains que cela ne nous éloigne du sujet. Tout à coup, je commence à penser comment nous pourrions utiliser le diffuseur public pour mobiliser les Canadiens en tant que communauté nationale. Ils ne demandent qu’à s'engager. Je pense qu’au début les gens ont vu les ouvertures potentielles, mais cela signifierait l’émergence d’une dimension tout à fait nouvelle de l’engagement des citoyens, notamment dans l’administration publique. Je pense que ma question risquerait de nous éloigner du sujet.
    Finalement, en ce qui concerne le rapport entre la SRC et l'examen du mandat, ainsi que les autres institutions dans le pays qui seraient complémentaires, pourrait-il en être autrement? Ne pourrions-nous pas simplement, dans le cadre de l'examen de son mandat, demander à la SRC de mieux jouer son rôle au sein des institutions préoccupées par cette question, plutôt que d’agir comme si elle était la seule institution concernée?
    Bien. Qui veut répondre?
    M. Caron souhaiterait prendre la parole.
    M. Caron a la parole.
    Si je comprends bien, vous avez demandé si l’infrastructure de la SRC, telle qu’elle est maintenant...
    Plus précisément, la différence que vous avez évoquée.
    La télévision disposerait actuellement d'environ 600 émetteurs, et il faut en compter quelques centaines de plus pour la radio. Remplacer tous ces émetteurs coûterait très cher. C’est pourquoi les diffuseurs explorent les nouvelles technologies. La diffusion répartie, par exemple, serait une solution, de même que le multiplexage des émissions. Il serait ainsi possible de desservir des régions peu étendues ou des régions à faible densité de population grâce à un émetteur permettant la diffusion d’une plus large gamme de chaînes. C’est donc une autre façon de procéder.
    C’est le même principe pour la radio. Par exemple, un émetteur unique peut diffuser simultanément des émissions en anglais et en français. J’ignore si vous...

  (1035)  

    Le temps est limité et j'aimerais que tous les intervenants aient le temps de répondre aux autres questions.
    Merci.
    M. Bélanger a la parole.
    Je vais probablement vous amener à changer d’avis une troisième fois ce matin en suggérant ce qui pour moi serait une nouvelle façon pour le diffuseur public de rester pertinent, comme le disait Phil. Il s’agirait notamment de concevoir et de mettre en œuvre le plus grand nombre possible d’outils permettant à la population de personnaliser le contenu offert par la SRC.
    Je pense que ce serait la grande nouveauté à laquelle le public s'attend de la part d'un diffuseur public. L’intérêt du public me permet de faire des choix et de fabriquer ma propre grille-horaire, quand je veux et sur l'appareil de mon choix. Tous connaissent les expressions classiques comme : tout ce que veut la population, quand elle le veut.
    Dans ce cas, « personnalisation » est le mot d’ordre.
    C'est bien. Je vous remercie.
    M. Savage a la parole.
    Il s’agit d’une question avec laquelle on jongle dans le monde entier. Aux Pays-Bas, une étude sur la façon dont les jeunes utilisent les nouvelles a démontré que les bulletins de nouvelles traditionnels du diffuseur public, basés sur le modèle de la BBC ou sur le modèle hollandais, étaient trop austères et que les jeunes n’étaient pas intéressés par l’information sérieuse.
    L’étude a démontré l’existence d’un phénomène appelé le « grignotage » 24 heures par jour, 7 jours par semaine. Les jeunes veulent s’impliquer dans diverses communautés, mais ils veulent pouvoir compter parmi les choix disponibles sur une source de nouvelles fiables, de haute qualité, produites de façon indépendante, bien documentées. C'est pourquoi ils se tournent alors vers le diffuseur public. Les jeunes étaient contents lorsque cette information a commencé à être diffusée en continu, à être disponible en pièces détachées sur un site web. Cela comblait un de leurs besoins essentiels.
    Encore une fois, du point de vue de la complémentarité, où peut-on trouver les informations journalistiques à partir desquelles les gens peuvent élaborer leur propre paysage médiatique? Les étudiants vont construire leurs propres collectivités et leurs propres blogues. Voilà qui est bien, mais ils veulent en même temps savoir ce qui se passe à Amherst ou au Nunavut. Ils ont besoin de cette source de référence et ils ont besoin de ce contenu crédible, produit professionnellement par un réseau de personnes couvrant l’ensemble du pays.
    Laissez-moi vous parler un peu de vos enfants. Aujourd’hui, contrairement à la génération de vos enfants, les jeunes passent plus de temps devant leurs médias qu’à l’école. Il faut donc en tenir dûment compte. Au moment où ils font leur apprentissage de citoyens, ils passent davantage de temps à naviguer les ondes mondiales qu'à l'école.
    Vous vous demandez si la SRC est en mesure de se charger du rôle de rassembleur et de fédérateur. Jusqu’à un certain point, mais je dois me baser sur le bilan du diffuseur public. Jusqu’à maintenant, la SRC s'est comportée davantage comme un portier que comme un fédérateur.
    La voix de la technologie nous dit que nous devons adopter une attitude totalement différente et faire preuve d’ouverture, de façon à ce que les 35 millions d’habitants de ce pays — bien que j’imagine mal les masses se transformer en cinéastes — participent au dialogue collectif grâce aux images, comme nous l’avons fait grâce à la presse à imprimer et au journal local, parallèlement au Globe and Mail, au journal La Presse ou aux autres quotidiens.
    La SRC pourrait se comporter davantage comme un fédérateur? Le rôle d’un « fédérateur », à mon avis, consiste à mobilier les plus grands esprits du pays pour les faire participer au processus de création, mais aussi à l'aspect technologique des choses. Je n’ai pas de réponse, mais jusqu’à maintenant, compte tenu du bilan de la SRC, ce n'est pas le cas.
    En réalité, nous sommes en train de vivre une guerre mondiale. Lorsqu'on observe ce qui se passe actuellement, par exemple Fox acquérant MySpace, on doit se demander quelle est la place du Canada dans tout ça. Devrons-nous habiter l’espace des autres pour exister? Sommes-nous plutôt en train de transformer ce pays en consommateur qui, de temps en temps, tôt ou tard, verra ses productions diffusées par d'autres médias?
    La question qui a été posée au sujet du CRTC recoupe le point que vous avez soulevé : le Canada peut-il vraiment faire quelque chose dans ce contexte? Je pense qu’il sera difficile de réglementer les ondes, mais vous pourriez à tout le moins unir vos efforts pour mettre au point des outils de recherche qui mettront en valeur ce qui est canadien dans cet environnement mondial. Quelle place occupe vraiment le contenu canadien dans YouTube, MySpace et les autres forums dont nous avons parlé? Si nous disposions de tels outils, nous pourrions le découvrir.
    Je rentre tout juste de France, où je participais à un événement connu sous le nom de marché MipTV, où le monde entier se réunit pour parler des nouveaux produits. Dans ce bazar, la BBC a introduit Content 360, un concept où les acteurs de la jeune génération se réunissent et font la promotion de leurs produits.
    Au moins, la BBC est à l'écoute du monde, car c’est le monde entier qui fait sa promotion, y compris les Canadiens. Plutôt que de rester en retrait, la BBC est attentive au pouls de la production mondiale de contenu médiatique. Elle y parvient en se positionnant sur la scène mondiale.
    Cela me ramène au fait qu’il est essentiel d'amalgamer tous ces éléments pour trouver une réponse, à condition bien sûr qu’il puisse vraiment y avoir une réponse simple à toutes les questions.

  (1040)  

    Merci.
    Beaucoup de ces réponses sont intéressantes et même passionnantes. J’ai un peu dépassé les bornes encore une fois. Je sais que les membres du comité essaient de poser toutes leurs questions, mais nous devons nous en tenir autant que possible à des interventions de cinq minutes. Le dernier orateur a parlé presque 11 minutes, mais ses réponses étaient excellentes.
    M. Kotto a la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais proposer un accommodement. J'ai préparé deux questions. J'aimerais, si possible, que vous me répondiez par écrit, parce qu'il s'agit de questions à la fois éthiques et philosophiques.
    Ma conviction est qu'un diffuseur public fort constitue aujourd'hui et demain un outil irremplaçable au service de la vie citoyenne, du développement culturel et du rayonnement international. Lors d'une conférence à Birmingham, le clan ultra-libéral, par la voix de Rupert Murdoch, prétendait que l'avènement du numérique marquait la fin de tout projet de régulation des médias et que l'audiovisuel public n'avait d'autre avenir que de laisser place aux lois du marché.
    Qu'en pensez-vous?
    Dans la perspective des contenus, comment un diffuseur public, à l'instar de CBC/SRC, tout en respectant son mandat actuel, peut-il survivre en s'étalant dans les technologies émergentes — pour reprendre la terminologie de M. Bélanger — sans entrer en compétition avec les diffuseurs privés?
    Pouvez-vous expliquer votre réponse?

[Traduction]

    Quelqu’un aimerait répondre?
    M. Bensimon a la parole.

[Français]

    Monsieur Kotto, comme vous voulez une réponse écrite, je vous dirai simplement qu'il faut un réseau public fort au Canada et dans le monde. Cela semble également être le consensus qui se dégage autour de cette table. Ce serait une erreur totale que d'abdiquer cet univers au libre marché. Par contre, nous devons être inventifs et créatifs dans notre recherche de solutions.
    On peut bien discuter de la technologie, que ce soit le satellite, l'Internet ou le téléphone portable, mais finalement, c'est le contenu qui compte. Le changement de contenu doit venir des citoyens qui participent aux discussions sur la télévision publique ou par l'entremise d'un porte-parole public.
    Tant qu'on restera dans la mentalité voulant qu'un télédiffuseur ne change pas de paradigme mais se convertisse aux nouvelles technologies, nous allons traîner les vieilles peaux avec nous, ce qui nous empêchera d'entrer dans cet univers. La CBC/SRC ne peut à elle seule décider de son avenir et parler au nom du public canadien. Nos responsabilités vont au-delà de cela. Pour arriver à quelque chose, les agences existantes et les citoyens doivent se mobiliser.

  (1045)  

[Traduction]

    Est-ce quelqu’un d’autre aimerait répondre? Il reste une minute pour une autre intervention.
    Nous répondrons par écrit.
    Je vous en remercie.
    Je donne maintenant la parole à M. Warkentin.
    Merci beaucoup.
    Nous avons apprécié les témoignages entendus ce matin. En fait, nous sommes en train de nous demander s’il ne faudra pas faire témoigner à nouveau certains d'entre vous. De toute évidence, vous avez abordé plusieurs sujets d’intérêt pour le comité, mais nous n’avons pas pu approfondir certains.
    Puisqu'il y a ici des représentants d'Industrie Canada, pourraient-ils répondre brièvement à une question d'ordre technique? De toute évidence, la SRC cherche à remplacer une bonne partie de son infrastructure existante, en parallèle avec l'émergence de nouvelles technologies. À votre avis, si la technologie existait, la SRC pourrait-elle s’associer avec l’entreprise privée pour investir dans l’infrastructure, de façon à ne pas porter à elle seule le poids de la mise à niveau qui s'impose? Qu’est-ce qui l’empêcherait de s'associer avec le privé ou avec d’autres diffuseurs pour atténuer le poids de cet investissement?
    Je pense qu’il y a des possibilités, mais c’est à la SRC de prendre l’initiative. Comme mon collègue l’a mentionné, la SRC pourrait commencer par les structures internet pour finir par l’équipement de transmission. Grâce aux nouvelles technologies, il est plus facile d’envisager le partage d’une partie de l’équipement de transmission par exemple. Les possibilités sont déjà là. Il reste que c'est le rôle de la SRC d'identifier les possibilités et de décider s'il serait rentable pour elle de vraiment partager l'infrastructure.
    Nous pensons qu’il serait préférable, jusqu’à un certain point, que la SRC ne s’embourbe pas dans les questions d’infrastructure et qu’elle puisse se démarquer dans le domaine de la diffusion. Nous avons soulevés ici un certain nombre de points. Ce matin, il a même été mentionné que la SRC devait tendre la main à d'autres diffuseurs canadiens, à l'échelle provinciale ou municipale par exemple.
    Comment pourrait-on faire cela? Il y a une discussion en cours sur la nécessité du maillage, qui permettra aux gens d'individualiser ce qu'ils veulent. Cela nous ramène probablement à la question de l’infrastructure et du partenariat, mais concerne surtout la diffusion.
    Est-ce que quelqu’un peut nous dire comment nous pourrions intégrer cet élément au mandat, de façon à permettre à la SRC de tirer parti d’une collaboration avec les autres diffuseurs publics?
    C’est très simple. Comme je l’ai déjà dit en introduction, lorsqu'on investit environ 80 millions de dollars dans la production d’émissions à l'ONF et qu’aucune de ces productions n'est diffusée en heure de pointe à la SRC, c'est signe que quelque chose ne tourne pas rond. Comment les contribuables canadiens peuvent-ils engouffrer 80 millions de dollars dans un organisme du nom d’Office national du film, alors que les productions de cet organisme ne sont pas diffusées par le plus important diffuseur public du pays? C’est un problème.
    Deuxièmement, en ce qui concerne les plus petits diffuseurs provinciaux éparpillés d’un bout à l’autre du pays, ils ne sont pas connus à l’extérieur de leur province d’origine. Sommes-nous au courant des productions de Télé-Québec? Les productions de TVOntario sont-elles connues des non-Ontariens? D’ailleurs, qui connaît le Knowledge Network à l’extérieur de la Colombie-Britannique? Je pense que c’est à ce niveau que la SRC devrait jouer son rôle de chef de file. Elle pourrait être un agent d’intégration qui pourrait rassembler ces diffuseurs. En tant que diffuseur, elle pourrait simplement commencer par investir dans une production importante qui pourrait être diffusée sur le réseau national.
    Aujourd’hui, la SRC prend ses décisions en fonction des recettes provenant de la publicité. Vous devrez vous faire une idée et décider si la SRC doit vraiment être un organisme dépendant financièrement des recettes de la publicité. La SRC devrait dorénavant être un intégrateur dont le rôle serait de refléter l’image du pays, non pas à partir de sa propre position éditoriale en tant qu’institution, mais en intégrant les acteurs provinciaux et l’Office national du film, en collaboration étroite avec un organisme tel que Téléthon Canada. C'est ce dont je parlais, c'est-à-dire réinvestir dans l'industrie des longs métrages.
    Pour l’instant, c’est le cloisonnement total. Tous ces organismes sont cloisonnés. Je crois qu’il serait possible de jeter des ponts du côté de la diffusion. Par vos conseils, vous pourriez les amener à se parler entre eux.

  (1050)  

    Merci.
    Je parlais de la fragmentation et notamment de la question de permettre à un diffuseur public de survivre dans cette industrie de plus en plus fragmentée. J’apprécie donc beaucoup votre témoignage. Je pense que nous sommes sur le point de changer notre façon d'aborder la question.
    Notre examen commence à peine, mais je pense que nous avons enfin fini par laisser de côté la bonne vieille solution facile, en l’occurrence investir davantage de ressources dans ce que nous possédons déjà. Le financement est probablement un problème, mais il y a également un grand nombre d'autres facteurs. Chacun d’entre vous, à votre façon, avez fait évoluer différents éléments de cette discussion. Je pense que nous sommes maintenant sur la bonne voie. J’en apprécie d’autant plus votre témoignage d’aujourd’hui.
    Merci.
    M. Savage a la parole.
    J’aurais une autre observation à faire. Je pense que vous constaterez que certains pays tentent actuellement de combiner la distribution privée et publique, mais seulement lorsqu’ils y sont tenus par une obligation en matière de service au public. Nous avons beaucoup parlé du cinéma. Au Canada, la distribution des films est très peu contrôlée. Quel est le pourcentage de contenu canadien sur nos écrans? Moins de 2 p. 100.
    Il ne faut pas être naïf. Le diffuseur public reste d'avis qu'il a l'obligation de garder un certain contrôle sur la diffusion à grande échelle de son matériel, notamment grâce à la transmission analogique. En effet, c'est sous une forme analogique que les gens captent la radio et qu'ils sont à l'écoute. Comme j’ai été impliqué dans certaines demandes de licences de télédiffusion, je sais pertinemment que, tout en passant à la radiodiffusion numérique terrestre, ils ont systématiquement exploré un modèle coopératif de multiplexage où, par exemple, l'émetteur diffuse CHUM en même temps que la SRC et d’autres chaînes.
    Pour ce faire, un modèle de réseau de transmission par ondes hertziennes ou autre doit être basé sur certains objectifs en matière de prestation de services au public. Autrement, une perte de contrôle est à prévoir. En conséquence, comme dans les cinémas, la présence canadienne sur les écrans d’ordinateur sera réduite à 2 p. 100, comme dans les cinémas.
    Merci.
    Pour le prochain tour de table, celui de M. Scarpaleggia, comme il ne nous reste qu’environ sept minutes, nous n’aurons le temps que pour une courte question et une courte réponse.
    Ma question s’adresse à Mme Oreskovich. Vous avez dit que la SRC est une bonne source crédible d’information. Que pensent les autres jeunes du campus au sujet de la SRC? Pensent-ils comme vous? Syntonisent-ils Radio-Canada assez souvent ou, au contraire, pensent-ils qu'en général son contenu canadien est trop provincial?
    Je serai franche. Je n’ai jamais vraiment parlé de Radio-Canada avec les autres étudiants. Cependant, je sais que dans deux ou trois cours de Philip la question de la SRC est souvent soulevée. Si j’en crois le ton des conversations en classe, notamment, il semble qu’ils soient naturellement plus intéressés par le téléjournal et des émissions telles que The Hour, animée par George Stroumboulopoulous. Cela correspond tout à fait avec mon groupe d’âge démographique. J’ai remarqué que la SRC diffusait maintenant beaucoup de films américains. Elle diffuse également les Simpsons et Arrested Development sur ses ondes. Un bon nombre d'étudiants regardent ces émissions. Ils ne regardent donc pas nécessairement du contenu canadien.
    Je ne donne aucun sens péjoratif à l'adjectif « provincial ». Je pense que le contenu est excellent. Parfois, cependant, on dirait que les gens ne sont pas vraiment intéressés par le contenu canadien et qu’ils veulent regarder CNN ou une autre chaîne. C’était le sens de ma question. Merci beaucoup de votre réponse.
    Je vous remercie.
    M.  Abbot, nous avons encore le temps pour une question brève et une réponse à l’avenant.

  (1055)  

    Mme Oreskovich, je serais curieux de savoir quel médium les étudiants utiliseraient pour regarder Radio-Canada. Seraient-ils confortablement assis devant un téléviseur au dortoir ou à la maison? Regarderaient-ils plutôt une émission sur un iPod? Quel est le point d’accès actuel pour les étudiants?
    Deuxièmement, à votre avis, si vous deviez prédire deux ou trois ans à l’avance, quel serait le point de contact des étudiants avec la SRC? Serait-il sonore ou visuel?
    Je suis persuadée que le web serait le médium le plus approprié pour rejoindre les étudiants. Comme je l’ai déjà dit, YouTube connaît un succès monstre. Une émission comme The Hour peut être regardée sur YouTube. L’émission est fractionnée en courts segments, mais il est possible de visionner l'émission en pièces détachées. Il est vraiment possible de regarder une émission de cette façon. Internet est donc le meilleur moyen pour rejoindre les étudiants et de loin.
    Comme je l’ai dit, je suis moi-même sérieusement impliquée dans cbc.ca. Si je pouvais prédire ce qui arrivera dans deux ou trois ans, je dirais que la SRC devrait profiter des nouveaux médias pour rejoindre la population, que ce soit par la publicité ou seulement pour se faire mieux connaître ou pour promouvoir les émissions de sa programmation ou encore les artistes qu'elle cherche à mettre en valeur. Elle pourrait également tirer parti de Facebook. Je ne sais pas comment la SRC pourra exploiter les nouveaux médias, mais, chose certaine, elle doit trouver le moyen de se joindre au mouvement. Je pense que ce serait la meilleure solution.
    Merci.
    Le temps commence vraiment à presser. Un autre comité doit siéger immédiatement après nous.
    Nous avons encore le temps pour une question et une réponse très brèves. M. Angus a la parole.
    Merci.
    Il a été décidé voilà une dizaine d'années environ de limiter progressivement la production interne pour avoir de plus en plus recours aux producteurs indépendants. Cette décision repose sur le fait que nous devons composer avec un marché très compétitif.
    Il y a une question que nous devons nous poser. Nous pouvons compter sur un certain nombre d’organismes qui produisent des produits exceptionnels, des produits médiocres et de purs désastres. Compte tenu de la concurrence actuelle entre les diffuseurs, comment pourrions-nous mobiliser l'Office national du film, Téléfilm Canada et le Fonds canadien du film et de la vidéo indépendants pour qu’ils produisent en synergie des produits de grande qualité et couronnés de succès en utilisant la SRC comme diffuseur national? Serait-ce envisageable dans le contexte actuel?
    C’est possible. Je vais vous donner un exemple. Pendant la durée de mon mandat à l’OLF, j'ai fait passer la coproduction de 7 à 43 p. 100. En cinq ans seulement. C’est faisable et c’est possible.
    La BBC a pris un engagement très simple. À partir de maintenant, plutôt que de produire à l’interne, elle produit un tiers du contenu à l'interne. Un autre tiers sera produit par les indépendants. Les producteurs maison et les producteurs indépendants se disputent le dernier tiers. Ce sont les nouvelles règles du jeu.
    Je pense qu’il est concevable et réalisable de faire graviter toutes vos questions autour de l’univers des nouvelles plateformes médiatiques. Pensez à Téléfilm, qui a témoigné devant le comité, et à son plan stratégique en matière de téléphonie cellulaire. Pensez à tous les investissements de l'ONF dans la nouvelle technologie. Pensez à tous les investissements de la SRC. Si vous mobilisez au moins tous ces éléments qui flirtent déjà avec les nouvelles plateformes et que vous les amenez à agir en synergie, vous aurez un début de réponse à votre question.
    Merci.
    Je remercie les témoins de leur participation aujourd’hui. Merci beaucoup d’être venus.
    Merci pour les questions et merci pour les réponses.
    La séance est levée.