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SNSN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Sous-comité de la Sécurité publique et nationale du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 16 novembre 2005




¹ 1535
V         Le président (M. Paul Zed (Saint John, Lib.))
V         Mme Nicola Kelly

¹ 1540

¹ 1545
V         Le président
V         M. Bal Gupta (président, Association des familles des victimes du vol 182 d'Air India)

¹ 1550

¹ 1555
V         Le président
V         Dr Bal Gupta
V         Le président
V         Dr Bal Gupta
V         Le président
V         Mme Maureen Basnicki (à titre personnel)

º 1600

º 1605

º 1610
V         Le président
V         Mme Maureen Basnicki

º 1615
V         Le président
V         Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC)
V         Mme Maureen Basnicki
V         Mme Helena Guergis
V         Mme Maureen Basnicki

º 1620
V         Mme Nicola Kelly
V         Dr Bal Gupta
V         Le président
V         M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ)
V         Mme Nicola Kelly
V         Le président
V         Dr Bal Gupta

º 1625
V         Mme Nicola Kelly
V         Dr Bal Gupta
V         Mme Nicola Kelly
V         M. Serge Ménard
V         Dr Bal Gupta

º 1630
V         Mme Nicola Kelly
V         Le président
V         L'hon. Jack Layton (Toronto—Danforth, NPD)

º 1635
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         Mme Nicola Kelly
V         Dr Bal Gupta
V         Mme Maureen Basnicki

º 1640
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.)
V         Le président
V         M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC)
V         Mme Nicola Kelly
V         Dr Bal Gupta

º 1645
V         Mme Maureen Basnicki
V         Le président

º 1655
V         Le président
V         L'hon. Anne McLellan (ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile)
V         L'hon. Irwin Cotler (ministre de la Justice)
V         L'hon. Anne McLellan

» 1700

» 1705
V         Le président
V         L'hon. Irwin Cotler

» 1710
V         Le président

» 1715
V         M. Peter MacKay
V         L'hon. Anne McLellan

» 1720
V         M. Peter MacKay
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Peter MacKay
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Peter MacKay
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Peter MacKay
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Peter MacKay
V         Le président
V         L'hon. Anne McLellan

» 1725
V         M. Peter MacKay
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Peter MacKay
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Peter MacKay
V         Le président
V         L'hon. Irwin Cotler
V         Le président
V         M. Peter MacKay
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Serge Ménard
V         Le président
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Peter MacKay
V         L'hon. Irwin Cotler

» 1730
V         M. Peter MacKay
V         Le président
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Anne McLellan

» 1735
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Irwin Cotler

» 1740
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Anne McLellan
V         Le président
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Serge Ménard
V         Le président
V         L'hon. Irwin Cotler

» 1745
V         M. Serge Ménard
V         L'hon. Irwin Cotler
V         Le président
V         M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD)
V         Le président
V         L'hon. Anne McLellan
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Joe Comartin
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Joe Comartin

» 1750
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Joe Comartin
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Joe Comartin

» 1755
V         L'hon. Irwin Cotler
V         L'hon. Anne McLellan
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Joe Comartin
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         Le président
V         M. Stanley Cohen (avocat général principal, Section des droits de la personne, ministère de la Justice)

¼ 1800
V         M. Tom Wappel
V         M. Stanley Cohen
V         M. Tom Wappel
V         M. Stanley Cohen
V         M. Tom Wappel
V         M. Stanley Cohen
V         M. Tom Wappel
V         M. Stanley Cohen
V         M. Tom Wappel
V         M. Stanley Cohen
V         M. Tom Wappel
V         M. Stanley Cohen
V         M. Tom Wappel
V         M. Stanley Cohen

¼ 1805
V         M. Tom Wappel
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         L'hon. Anne McLellan
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         L'hon. Irwin Cotler
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         L'hon. Anne McLellan
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Tom Wappel
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Tom Wappel
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Stanley Cohen

¼ 1810
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Stanley Cohen
V         M. Douglas Breithaupt (avocat conseil, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice)
V         M. Tom Wappel
V         M. Stanley Cohen
V         L'hon. Irwin Cotler
V         M. Tom Wappel
V         L'hon. Irwin Cotler

¼ 1815
V         M. Tom Wappel
V         L'hon. Irwin Cotler
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         Le président
V         M. Stanley Cohen
V         Le président
V         M. Stanley Cohen
V         Le président
V         M. Douglas Breithaupt
V         M. Tom Wappel
V         Le président
V         M. Kevin Sorenson (Crowfoot, PCC)

¼ 1820
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Kevin Sorenson
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Kevin Sorenson

¼ 1825
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Kevin Sorenson
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Kevin Sorenson
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Kevin Sorenson
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Kevin Sorenson
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Kevin Sorenson
V         L'hon. Anne McLellan
V         M. Kevin Sorenson
V         L'hon. Anne McLellan
V         Le président
V         L'hon. Irwin Cotler

¼ 1830
V         Le président
V         M. Tom Wappel
V         Le président










CANADA

Sous-comité de la Sécurité publique et nationale du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


NUMÉRO 028 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 16 novembre 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Paul Zed (Saint John, Lib.)): Bonjour, chers collègues. Bienvenue au Sous-comité de la sécurité publique et nationale, du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile.

    Comme vous le savez, nous étudions la Loi antiterroriste et nous sommes ravis d'accueillir cet après-midi deux groupes qui représentent des victimes. Comme chacun le sait, nous écouterons aujourd'hui nos témoins en deux volets. Le premier groupe de témoins comprend Maureen Basnicki et l'Association des familles des victimes du vol 182 d'Air India.

    Bienvenue au comité.

    Nous recevrons ensuite les ministres McLellan et Cotler et une fois que nous les aurons entendus, nous passerons à une discussion à huis clos sur notre prochain rapport, en vue de donner des instructions de rédaction à nos attachés de recherche.

    Bienvenue à notre premier groupe de témoins. Si j'ai bien compris, vous allez nous donner deux discours liminaires. Vous avez la parole.

    Merci beaucoup.

+-

    Mme Nicola Kelly: Je suis Nicola Kelly et je suis porte-parole national de l'Association des familles des victimes du vol 182 d'Air India. Nous essaierons de respecter le temps de parole de 10 minutes, mais nous risquons de le dépasser d'une ou deux minutes. Nous avons eu 20 ans pour penser à ce que nous venions vous dire aujourd'hui.

    Merci beaucoup de me donner l'occasion de témoigner aujourd'hui. L'Association des familles des victimes du vol 182 d'Air India représente les membres des familles des personnes décédées lors de la plus importante tuerie de l'histoire du Canada. Ce fut un acte terroriste, comme le confirme sans l'ombre d'un doute le juge Josephson dans son verdict lors du procès sur le vol 182 d'Air India en mars 2005, qui a été organisé, financé et exécuté avec succès au Canada. Le nombre de décès par habitant était plus élevé que lors des attentats du 11 septembre 2001.

    Nous ne voulons en aucun cas déprécier les pertes américaines ou celles des familles des victimes du 11 septembre 2001. En fait, nous affirmons notre solidarité envers ces familles. Mon point est que nos lois et les opinions de nos décideurs et de nos politiciens n'ont jamais reflété ce fait. Malgré que des centaines de personnes sont décédées, dont 86 enfants, aucun membre du gouvernement, ni au niveau fédéral ni au niveau provincial, n'est jamais venu commémorer cet attentat avant le 23 juin de cette année. En fait, 2005 fut la première année au cours de laquelle les drapeaux étaient en berne. Nous avons totalement échoué non seulement à prévenir cette tragédie et à faire condamner les auteurs de cet attentat, mais également à écrire cet acte terroriste dans notre histoire. Ce dernier échec a été non seulement dommageable pour les familles, mais également pour tout le pays. Par conséquent, nous avons agi comme si aucun acte terroriste n'avait été perpétré, comme si nous étions en quelque sorte immunisés contre les menaces de terrorisme mondial qui planent à l'heure actuelle!

    Le terrorisme en sol canadien est d'ores et déjà un fait accompli. Plus nous en tirerons rapidement une leçon, mieux ce sera.

    J'aimerais maintenant aborder diverses dispositions de la Loi antiterroriste à la lumière des recommandations de l'Association des familles des victimes du vol 182 d'Air India.

    Cette loi ne fait rien pour les victimes et leurs familles. Les victimes et les membres de leurs familles ont certains besoins et certaines exigences. Pour les blessés et les survivants, l'apport de soins médicaux, psychiatriques et d'une sécurité financière est primordial. Pour l'attentat d'Air India, rien ne nous a été offert. Il n'y avait pas de représentant du gouvernement canadien pour nous rencontrer en Irlande, après l'attentat. Notre gouvernement n'a tout simplement pas pris de mesures efficaces afin d'aider les familles à la suite de cette tragédie. Nous voulons nous assurer que des professionnels formés sont en poste afin de répondre aux besoins et d'intervenir rapidement auprès des familles en cas de nouveaux attentats.

    Un soutien financier pour les familles: n'y pensez pas! Nous croyons qu'il est plutôt injuste qu'à la suite de cette tragédie, les contribuables aient été obligés de payer les frais juridiques des accusés alors que les familles des victimes éprouvaient des difficultés financières. Qui travaille à la protection des droits des victimes?

    Nous appuyons également le projet de loi d'initiative parlementaire C-394. Ce projet de loi faciliterait les actions en justice pour les victimes canadiennes de terrorisme qui souhaitent intenter des poursuites au civil au Canada contre les terroristes et leurs partenaires locaux et à l'étranger. Ce projet de loi attaquerait sur deux fronts. Premièrement, il fournirait une certaine compensation financière aux victimes et à leurs familles. Sur l'autre front, il pourrait être un outil important pour la désignation des organisations terroristes. D'autres pays comme les États-Unis et les pays européens utilisent ces actions au civil comme un outil essentiel à la désignation des organisations terroristes à l'intérieur de leurs frontières. L'étape de la communication de la preuve lors de ces actions en justice esquisse un portrait de la façon dont l'argent est réparti au sein de ces organisations et lève souvent le voile sur le fonctionnement de leur financement et sur l'endroit où ces organisations trouvent l'oxygène qui leur permet de subsister.

    J'aimerais soulever un autre point quant à la désignation des groupes dont les activités répondent à la définition d' « organisations terroristes » et qui, en toute connaissance de cause, participent, réunissent ou fournissent des fonds. Un des nombreux problèmes qui, nous l'espérons, sera mis en lumière à la suite d'une enquête sur l'attentat à la bombe contre Air India, si jamais une telle enquête nous est accordée, est que nos politiciens aident, sans le savoir, les organisations terroristes par l'entremise de l'appui politique et de dons. Nous ne pouvons pas laisser certains groupes qui courtisent les votes en blocs obstruer la voie à la sécurité nationale. Durant les années précédant l'attentat à la bombe, des politiciens assistaient à des rencontres au cours desquelles des personnes parlaient, en panjabi, de tuer des Indiens hindous. Il est encore possible de lire des documents portant sur des politiciens canadiens qui assistaient à des rencontres de groupes qui ont été bannis et désignés comme organisation terroriste dans d'autres pays. Je ne veux pas insinuer que ces politiciens agissaient intentionnellement. Je dis que nous aurions tort de jouer la carte de la naïveté à ce sujet.

    Il y a un besoin certain de renforcer nos lois sur le financement des organisations terroristes et sur les oeuvres de charité. Il devrait y avoir des enquêtes minutieuses sur la destination et la façon de dépenser les fonds de bienfaisance. Il faut enseigner plus efficacement aux politiciens les répercussions des liens qu'ils tissent avec certaines organisations culturelles.

    J'aimerais prendre quelques minutes pour parler des dispositions du projet de loi qui donneraient davantage de pouvoir aux agents de la paix et aux agences de sécurité nationale, puisque nous avons une longue expérience des échecs de ces systèmes dans notre pays. La coopération entre les agences est une question qu'il faut à tout prix soulever. De nouvelles règles et lois à propos de la coopération entre les agences doivent être adoptées. La relation entre le SCRS et la GRC est un des facteurs qui nous a empêchés d'éviter l'attentat à la bombe contre Air India et, par la suite, de faire reconnaître coupables les auteurs de cet attentat. Cet été, de nouvelles allégations ont refait surface quant à une guerre intestine entre le SCRS et la GRC au sujet de l'enquête Arar. Nous aurions tort de laisser des guerres intestines obstruer une fois de plus la voie de la sécurité nationale.

¹  +-(1540)  

    Il est également essentiel de nous tenir au courant des traités internationaux conclus par l'ONU afin de lutter contre le terrorisme. La coopération internationale entre les agences sera le principal atout afin de combattre efficacement le terrorisme dans le monde moderne.

    Un des facteurs qui ont nui à l'enquête sur l'attentat à la bombe contre le vol 182 d'Air India dans les mois qui ont suivi l'attaque, c'est que les agents de la GRC se sont heurtés à des barrières linguistiques et culturelles lors des interrogatoires des témoins et lors des échanges avec la communauté sikhe. Il faut donner une formation multiculturelle aux agents de la paix et encourager le recrutement auprès des différents groupes ethniques.

    Nous comprenons que ce projet de loi aidera à obliger les personnes qui détiennent des renseignements sur les organisations terroristes ou sur un acte terroriste à témoigner. Je suis complètement déconcertée par la raison pour laquelle Mme Reyat, la conjointe de l'homme reconnu coupable d'avoir préparé la bombe qui a servi à commettre l'attentat contre le vol 182 d'Air India et qui est également soutenue financièrement par Malik et Bagri, n'a pas été obligée de témoigner lors du procès. Il semble qu'elle craignait pour sa vie. Nous avons besoin d'outils plus puissants afin d'obliger les témoins à témoigner.

    Les autorités policières doivent également pouvoir outrepasser cette culture de la peur qui enveloppe la communauté à la suite de chaque cas de terrorisme. La population doit croire que les autorités policières ont réellement les ressources leur permettant de protéger les témoins. Nous devons également apporter quelques changements aux programmes de protection des témoins si nous voulons réussir à engager des poursuites contre ces terroristes.

    Les renseignements recueillis par les services de renseignement doivent non seulement être partagés, mais ils doivent également pouvoir être utilisés lors de tous les procès qui pourraient être intentés. Nous devons penser concrètement à la façon dont les renseignements recueillis par les services de renseignement lors de la surveillance des personnes mises en cause durant une enquête se traduisent en preuves concluantes qui pourront être utilisées lors d'un procès.

    De plus, nous devons nous attarder sur la façon d'obtenir une condamnation. Les familles des victimes de l'attentat contre le vol 182 d'Air India recommandent l'adoption d'un procès devant trois juges lors d'actes terroristes de cette envergure. Ce type de procès existe déjà dans d'autres pays.

    Nous recommandons fortement que les changements apportés à la Loi antiterroriste aient pour objectif de la renforcer, et non de l'affaiblir, en colmatant les brèches et les failles qu'elle comporte. Nous devons envoyer un message clair à la communauté internationale à l'effet que le Canada est capable de réagir rapidement et efficacement face aux menaces de terrorisme. Si nous jetons un oeil à la façon dont le gouvernement a réagi lors de l'attentat à la bombe contre le vol 182 d'Air India, nous envoyons plutôt le message contraire.

    Dans le monde où nous vivons aujourd'hui, il n'est pas choquant de savoir qu'il y a des fous prêts à faire exploser un avion comptant 300 passagers à son bord. Pour moi en tant que Canadienne, ce qui est choquant est que ces terroristes peuvent commettre des attentats dans mon pays sans subir de représailles. C'est un fait.

    Vous seuls pouvez y faire quelque chose. Je me présente devant vous pour vous dire à quel point il est facile pour des terroristes de commettre des attentats dans notre pays à moins que nous soyons très prudents. Ma famille et des centaines d'autres familles canadiennes en ont été victimes. Ma mère, Barsa Kelly, qui a été tuée sur ce vol, était la meilleure et la plus tendre mère et épouse. Son décès continue de terrasser notre famille. Elle avait des amis provenant de tous les milieux un peu partout sur le globe. Elle possédait une force créatrice, elle était une éducatrice, une activiste, une féministe et comme elle vous le dirait, « une étudiante de la vie ». Elle était également une bénévole dévouée. Elle traitait les gens avec respect et elle voyait la vie avec optimisme. Heureusement, son souvenir a marqué à jamais les mémoires de ceux qu'elle aimait et elle demeure aujourd'hui une profonde inspiration dans nos vies.

    Ma soeur Lorna et moi sommes nées et avons grandi dans ce pays, tout comme ma fille qui n'aura jamais la chance de connaître sa grand-mère. Nous sommes Canadiennes de souche. Malgré cela, au cours des années, de nombreux gouvernements différents nous ont laissé tomber. Ce qui me choque, en tant que personne qui se considère comme une Canadienne, c'est que le gouvernement a lamentablement échoué à nous protéger moi et ma famille, à condamner les coupables et à me fournir le soutien et les ressources dont j'avais besoin afin de traverser cette dure épreuve. En fait, avant cette année, le gouvernement n'avait même pas considéré nos demandes; encore moins allait-il nous donner des réponses. Si je n'avais pas dû faire face à cette situation, j'aurais été persuadée qu'un tel attentat ne puisse jamais se produire au Canada.

    J'aimerais conclure en disant que nous aurions tort d'être complaisants. Le coût est trop élevé. Des centaines de personnes sont décédées. Des milliers de Canadiens ont été touchés. Nous espérons que cette génération de politiciens sera saisie de l'inspiration nécessaire afin de mettre en application une nouvelle loi plus sévère qui aura pour effet de compliquer la vie des organisations terroristes qui souhaitent s'installer et prospérer au Canada. Nous espérons que notre pays ne sera plus jamais la cible d'attentats terroristes.

    Merci.

¹  +-(1545)  

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Gupta, vous avez la parole.

+-

    M. Bal Gupta (président, Association des familles des victimes du vol 182 d'Air India): Monsieur le président, membres du comité et députés, merci beaucoup de nous donner l'occasion de témoigner.

    Je ne suis pas un expert en droit, en renseignement ou en antiterrorisme. En tant que président de l'Association des familles des victimes du vol 182 d'Air India, j'aborde la question du point de vue des victimes touchées directement par l'attentat terroriste contre le vol 182 d'Air India survenu le 23 juin 1985. Cette tragédie était le résultat de l'explosion d'une bombe placée dans l'avion; un complot terroriste préparé et conduit en sol canadien.

    La majorité des 329 victimes étaient des Canadiens provenant de toutes les provinces sauf l'île-du-Prince-Édouard et les territoires. Des gens de presque toutes les religions. Quatre-vingt-six victimes étaient des enfants de moins de 12 ans, 29 familles (mari, femme et tous leurs enfants) ont été supprimées, 32 personnes se sont retrouvées seules, ayant perdu leur conjoint et tous leurs enfants, six parents dans la quarantaine ou la cinquantaine ont perdu tous leurs enfants et deux enfants de moins de 10 ans sont devenus orphelins.

    Il s'agit du plus important attentat terroriste jamais organisé et commis contre des Canadiens au Canada. Cet attentat terroriste continuera de causer des souffrances et des douleurs incommensurables à des milliers d'amis et de membres des familles des victimes pour nombre de décennies.

    La même journée, lors d'un acte terroriste contre la ligne aérienne Canadien Pacifique, une bombe a explosé tuant deux bagagistes à l'Aéroport Narita au Japon. Cette bombe provenait également du Canada.

    Cet attentat a été suivi des meurtres de deux importants témoins potentiels, Tara Singh Hayer au Canada et Tarsem Purewal au Royaume-Uni, deux éditeurs de journaux.

    Il aurait été possible de prévenir l'attentat à la bombe sur le vol AI182, mais ce ne fut pas le cas. Il a fallu près de 15 ans pour déposer des accusations, mais les poursuites ont fait chou blanc. Il s'agit là d'une preuve indiscutable que les déficiences de notre système judiciaire ont nui aux services de renseignement lors de la prévention des attentats terroristes, aux organismes d'enquête pour la mise en accusation des terroristes en temps opportun et au système judiciaire pour la condamnation et de l'imposition de peines aux terroristes. Nous ne savons pas et nous tentons toujours de comprendre si ces déficiences sont le résultat d'un manque d'outils, de formation, de ressources, de cadre juridique ou de volonté politique.

    Il semble que peu de leçons, si tant est qu'il y en ait, aient été tirées des attentats à la bombe contre le vol AI182. La Loi antiterroriste a été adoptée et certaines organisations terroristes ont été bannies seulement après les attentats du 11 septembre aux États-Unis, 16 ans après l'attentat à la bombe contre le vol AI182 au Canada. Pourquoi? Personne ne le sait. En tant que parlementaires, vous pourriez et devriez en connaître les raisons.

    En tant que familles des victimes de l'attentat à la bombe contre le vol AI182, nous avons souffert et nous continuons de souffrir d'une tristesse et d'une douleur incommensurables qui, nous l'espérons, ne seront jamais imposées à d'autres Canadiens lors de futurs attentats terroristes. Les victimes du vol AI182 provenaient pour la plupart du Canada et se trouvaient à avoir des origines dans les Indes orientales. Le prochain attentat terroriste pourrait toucher n'importe qui. Le terrorisme n'exerce aucune discrimination: il frappe, peu importe la couleur, les croyances, le sexe ou l'âge des victimes.

    Le terrorisme constitue un phénomène international et, dans la plupart des cas, les organisations terroristes peuvent avoir des cellules un peu partout dans le monde. Voici quelques exemples bien connus: au Canada, le vol 182 d'Air India, aux États-Unis, les événements du 11 septembre 2001, en Espagne, les attentats à la bombe dans un train, en Indonésie, l'attentat à la bombe de Bali, au Royaume-Uni, les attentats du 7 juillet dans les transports en commun, en Russie, l'attentat dans une école en 2004, en Inde, les explosions à New Delhi en octobre 2005, juste avant le festival hindou de Diwali, et tout récemment, en Jordanie, le 11 septembre 2005.

¹  +-(1550)  

    Nous n'aimons sans doute pas que certains qualifient le Canada de refuge pour les terroristes. J'ai remarqué que les honorables ministres avaient utilisé cette formule hier devant la Commission d'enquête du Sénat, mais il se pourrait que de nombreux terroristes soient en train d'attendre leur heure au Canada. Tous les comploteurs de l'attentat du vol 182 d'Air India sont encore en liberté au Canada. Des procès de plusieurs personnes suspectées de terrorisme se poursuivent aujourd'hui devant des tribunaux canadiens. Nous avons tous entendu parler des terroristes appréhendés alors qu'ils franchissaient la frontière canadienne à destination des États-Unis, la fameuse affaire de l'attentat du millénaire. Il y a d'autres cas, dont un a fait récemment la manchette du National Post de Toronto le 3 novembre dernier, avec la formule « terror cell busted » (découverte d'une cellule terroriste).

    Le SCRS et la GRC mènent sans doute d'autres enquêtes qui ne sont pas du domaine public. J'irais même jusqu'à dire que pour chaque terroriste identifié, il y en a sans doute des centaines d'autres qui se cachent dans l'anonymat au Canada. Il semble que les terroristes qui se trouvent en sol canadien disposent de ressources financières importantes. Le National Post du 5 novembre 2005 titrait: « Une levée de fonds terroriste atteint 80 millions de dollars ». La nouvelle provenait du CANAFE.

    Les fonds du terrorisme proviennent souvent d'opérations de blanchiment d'argent ou de dons à des oeuvres charitables, des organismes sociaux ou des groupes religieux. Des ministres du culte, qui devraient être les messagers de la paix, de la fraternité et de la compréhension... En fait, la religion est censée élever l'homme au-dessus du règne animal, mais malheureusement, certains ministres du culte prêchent le terrorisme et le soutiennent; ils recrutent des terroristes et recueillent des fonds destinés au terrorisme.

    On a de nombreux exemples de religieux soupçonnés, détenus, poursuivis ou condamnés pour avoir favorisé la violence et le terrorisme, comme Talwinder Parmar et Babar Khalsa, ainsi que plusieurs autres cas connus aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Indonésie. Je peux vous montrer une photo du Toronto Star du 4 novembre dernier, pages 8, 12 et 13, montrant un religieux brandissant un fusil devant une foule considérable lors d'une fête religieuse dans un lieu de culte. Les sympathisants, les partisans et les prosélytes du terrorisme peuvent facilement utiliser les lieux de culte comme repaires. Les activités de soutien au terrorisme aboutissent souvent à une culture de l'isolement, de l'intimidation et de la crainte dans la collectivité, et c'est ce qu'on retrouve dans les ghettos. Lorsqu'un terroriste se fait prendre, ses défenseurs dénoncent une forme de persécution, avec l'appui sans réserve des militants des libertés civiles — et je ne sais pas où se trouvent ces valeureux militants lorsque des victimes souffrent d'actes terroristes. Ils ne viennent jamais en aide aux victimes du terrorisme.

    Le gouvernement a l'obligation de mettre un terme aux activités haineuses de ceux qui font la promotion du terrorisme au nom de la religion, et il en a les moyens. Peu importe la religion en cause.

    Je vais maintenant aborder les aspects du droit qui traitent de la façon d'empêcher les terroristes de pénétrer au Canada.

    Nous sommes nous-mêmes des immigrants. Je suis arrivé dans ce pays en 1968. Nous sommes bien placés pour savoir que les nouveaux venus sont un atout pour ce pays, et nous espérons que le Canada pourra continuer à accueillir chaque année de nouveaux Canadiens sur son territoire. Cela étant dit, nous ne pouvons nous permettre la moindre naïveté quant au monde dans lequel nous vivons aujourd'hui. Les autorités canadiennes doivent se renseigner davantage sur les antécédents des nouveaux venus.

    Nous ne prétendons pas avoir toutes les réponses à cette question complexe. Je laisse à ceux qui ont davantage d'expérience le soin de choisir les méthodes à utiliser. Mais la seule existence de cellules terroristes présentes en territoire canadien et jouissant de ressources financières importantes montre que des changements s'imposent dans nos politiques d'immigration.

    Un article du National Post du 31 octobre 2005 signalait que 83 p. 100 des Canadiens étaient favorables à des normes d'immigration plus rigoureuses pour démasquer les terroristes. Je tiens à le souligner.

¹  +-(1555)  

+-

    Le président: Je me permets de vous interrompre, car je tiens à donner aussi la parole à Mme Basnicki, et les membres du comité auront de toute façon des questions à vous poser.

+-

    Dr Bal Gupta: Est-ce que je peux vous lire nos recommandations?

+-

    Le président: Oui, mais je vais vous demander de conclure, si vous voulez bien.

+-

    Dr Bal Gupta: Tout d'abord, au nom des victimes — et comme je l'ai dit, nous ne sommes experts ni en droit, ni en renseignement ni en lutte antiterrorisme — nous faisons les recommandations suivantes.

    La Loi antiterroriste ne doit être ni abrogée, ni assouplie, et il faudrait renforcer ses dispositions en éliminant toute échappatoire.

    Il faudrait alourdir les sanctions imposées à ceux qui participent à des activités terroristes, qui préconisent de telles activités, qui les appuient ou qui en font la promotion.

    Il faudrait éliminer les sources de financement des terroristes ou des organismes terroristes.

    Il faudrait surveiller les oeuvres charitables et les organismes religieux pour les empêcher d'apporter leur soutien à des activités liées au terrorisme. La loi devrait permettre aux victimes du terrorisme de demander réparation aux oeuvres charitables liées au terrorisme, comme on permet aux orphelins et aux enfants victimes de sévices sexuels de demander réparation aux églises.

    Il faudrait garantir aux victimes du terrorisme un minimum d'aide psychologique et financière pour faire face aux conséquences des attentats.

    Il convient d'adopter le projet de loi d'initiative parlementaire C-394 qui prévoit la dénonciation des groupes terroristes et propose des recours d'ordre financier pour les familles des victimes de terrorisme.

    Il faut améliorer les communications et la circulation de l'information entre les organismes chargés d'assurer la sécurité. Les rivalités entre ces organismes ne devraient jamais pouvoir nuire à la sécurité nationale.

    Il faudrait modifier les politiques des organismes canadiens de sécurité en matière de collecte de preuves pour que l'information recueillie puisse servir à des fins de poursuites.

    Il faudrait consacrer davantage de ressources à la formation des agents des organismes de sécurité en matière culturelle. Cette formation doit aller au-delà de l'apprentissage des langues et devrait comprendre des cours sur les normes culturelles et les attentes des groupes culturels.

    Il faudrait améliorer les relations entre la police et les membres de communautés culturelles. Il suffit de considérer l'affaire d'Air India pour constater que les craintes de simples citoyens qui ne se sentent pas suffisamment en sécurité pour communiquer librement avec les autorités policières peuvent avoir des effets dévastateurs.

    Les autorités devraient disposer de moyens juridiques supplémentaires pour contraindre certains individus à témoigner dans des affaires de terrorisme. Il faudrait de meilleures politiques pour assurer la sécurité de ceux qui fournissent des renseignements à la police et pour protéger les témoins dans les affaires de terrorisme.

    Les affaires de terrorisme de grande ampleur, comme le vol 182 d'Air India, devraient être jugées par un tribunal composé de trois juges.

    Dans les affaires de terrorisme, il faudrait mener automatiquement et sans délai une enquête publique afin d'exposer les problèmes inhérents à notre système et d'améliorer nos réseaux de sécurité et de renseignement de façon à prévenir de nouvelles tragédies.

    Transports Canada et les autres réseaux de transport intérieur comme la Commission de transport de Toronto devraient appliquer des politiques de sécurité plus rigoureuses.

    Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Madame Basnicki, s'il vous plaît.

+-

    Mme Maureen Basnicki (à titre personnel): Bonjour.

    Je m'appelle Maureen Basnicki et depuis que j'ai épousé mon meilleur ami et l'amour de ma vie, Ken Basnicki, j'ai toujours eu bien du plaisir lorsqu'on me demandait d'épeler Basnicki, qui était le nom de mon amoureux. Je disais qu'il fallait que ce soit le grand amour, car mon nom de jeune fille était Maureen Young, et pour passer de Young à Basnicki, il m'a effectivement fallu toute une vie. Et c'est avec joie que j'ai accepté de devenir Mme Ken Basnicki pour le reste de notre vie commune.

    Au départ, je voulais vous dire quel merveilleux mari, père, fils et frère avait été Ken pour moi, pour notre fille Erica et notre fils Brennan, pour ses parents et pour ses deux frères, mais j'ai changé d'idée. Nous sommes ici pour discuter des conséquences des attentats du 11 septembre, et je vais donc consacrer le temps qui m'est imparti à décrire la façon dont ce crime haineux et horrible affecte les victimes civiles innocentes ciblées par le terrorisme.

    Je tiens également à rappeler que la Loi antiterroriste a été initialement proposée en réponse aux attentats terroristes du 11 septembre. Je trouve déplorable et honteux que le Canada n'ait pas pris la peine de réagir à la menace terroriste après l'attentat mortel contre le vol d'Air India survenu il y a plus de 20 ans. Je trouve aussi scandaleux et honteux que 20 ans plus tard, mon ami ici présent, victime comme moi d'un crime terroriste, n'ait que 10 minutes pour expliquer en quoi sa vie s'en était trouvée transformée.

    Le comité étudie la Loi antiterroriste, adoptée dans les mois qui ont suivi le meurtre de mon mari et de milliers d'autres victimes, dont 24 Canadiens. Votre tâche est difficile. Vous devez d'une part tenir compte des droits et libertés civiles auxquels nous tenons dans une société libre et démocratique; d'autre part, vous devez veiller à ce que les forces de sécurité disposent d'outils appropriés pour protéger les Canadiens. Vous avez entendu les points de vue de ministres, de fonctionnaires, de chefs de police, d'avocats et de groupes communautaires. Vous allez maintenant entendre celui d'une victime. J'emploie le mot « victime », même si c'est mon mari qui a été assassiné, parce que je me suis sentie victimisée à maintes et maintes reprises depuis ce jour fatidique.

    Comme M. Gupta et comme Nicola, je ne suis experte ni en matière législative, ni en terrorisme, ni en sécurité nationale. Je suis agent de bord. Je suis aussi une mère et une épouse. J'étais mariée à un homme qui s'est dévoué à son pays et à sa famille. Je ne peux pas vous dire quelles dispositions de la loi il conviendrait de modifier, mais je peux vous aider à comprendre l'importance de l'exercice d'équilibrage qui vous a été confié.

    On m'a dit que les attentats du 11 septembre étaient des actes de terrorisme sans précédent. Je vous rappelle que comme l'a dit mon prédécesseur, le Canada a lui-même connu des attentats terroristes exécutés sur son propre territoire. Je veux parler des attentats du FLQ et de celui d'Air India. J'adresse mes condoléances aux familles des victimes du vol d'Air India, qui tentent toujours d'obtenir justice 20 ans plus tard. Par égard pour mes enfants et pour tous les Canadiens, je n'ai pas l'intention d'attendre aussi longtemps.

    Dans son livre — et j'espère que vous avez eu l'occasion d'en prendre connaissance, car je crois qu'il a comparu ici comme témoin, Kent Roach a dit: « Le projet de loi C-36 visait à réagir aux attentats du 11 septembre qui ont fait des milliers de victimes, mais il n'apporte absolument rien aux familles des victimes. »

    Je peux être en désaccord avec Ken Roach sur certains aspects du projet de loi, mais il a raison de dire que « l'on aurait mieux rendu honneur aux 24 victimes canadiennes du 11 septembre en leur consacrant des monuments, en indemnisant leurs familles ou en leur accordant des allégements fiscaux temporaires, qu'en essayant d'apporter en toute hâte des modifications au Code criminel. »

    Je suis ici pour vous rappeler ce qui se passe lorsque l'équilibre est rompu. Je sais qu'aucun pays, pas plus le nôtre que les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Espagne ou la Jordanie, n'est jamais véritablement à l'abri des terroristes, mais cela ne veut pas dire pour autant que nous n'avons pas l'obligation de tout mettre en oeuvre pour démasquer et maîtriser ceux qui entendent assassiner des Canadiens.

    Avant le 11 septembre, j'étais comme la plupart d'entre vous. J'étais une épouse heureuse, fière d'être la mère de deux enfants merveilleux; je menais une carrière qui me plaisait. J'ai été privée de tout cela par des fous qui me haïssaient sans me connaître.

    Je tiens à vous faire part de mon expérience en tant que victime canadienne du terrorisme. Ce faisant, je ne veux pas laisser entendre que je souffre davantage que les parents des autres victimes. Notre souffrance est la même, quelle que soit l'identité ou la motivation du meurtrier. Pourtant, à bien des égards, nos expériences sont différentes, et c'est de cela que je voudrais vous faire part.

º  +-(1600)  

    D'aucuns croient, et peut-être êtes-vous de ceux là, que les victimes des événements du 11 septembre ont été bien traitées et qu'elles n'ont pas à se plaindre; que nous nous sommes enrichis à même les fonds gouvernementaux américains. Nous avons eu plus de chance que d'autres types de victimes en ce qui concerne l'indemnisation.

    Je tiens à vous dire qu'aucune somme d'argent ne compensera jamais le meurtre de mon mari. Ken était un homme d'affaires prospère, au sommet de sa carrière. Comme bien d'autres hommes d'affaires canadiens pure laine, il savait que la ténacité et le courage conjugués à un travail acharné lui permettraient de réussir, et c'est ce qu'il a fait. En fait, il a remporté le « Bulldog Award » pour sa société. Ken n'a pas seulement atteint ses quotas de vente annuels, mais il les a dépassés.

    Si les événements du 11 septembre étaient survenus dans ce pays, il n'y aurait pas eu de fonds extérieurs auxquels les gouvernements du Canada et des provinces auraient pu me diriger pour prendre soin de ma famille. Par exemple, en Ontario, l'indemnisation maximale qui peut être versée pour un événement unique en vertu du régime d'indemnisation des victimes d'actes criminels est de 150 000 $. Cette somme doit être divisée entre toutes les victimes. Ainsi, si demain, la tour du CN était attaquée et que 500 Canadiens étaient tués, chacun recevrait 300 $. S'il y avait une attaque en Nouvelle-Écosse, les victimes recevraient peut-être 2 000 $ pour le counselling. À Terre-Neuve, je crois savoir que les victimes ne recevraient rien.

    Les régimes d'indemnisation de nombreuses administrations sont très lents et leurs arriérés sont substantiels. Il n'est donc pas réaliste de s'attendre à ce qu'un régime de compensation provincial traite une attaque dans laquelle il y a eu des centaines ou des milliers de personnes blessées ou tuées. La seule charge de travail serait un défi, sans mentionner les fonds pour compenser toutes les victimes.

    Dans mon cas personnel, il a fallu 3 ans et environ 200 000 $ en frais juridiques pour recevoir des fonds d'indemnisation pour les événements du 11 septembre. Il a fallu un tollé public pour me permettre de recevoir l'argent de l'assurance-vie. Il a fallu compter sur la compassion des Canadiens qui ont contribué personnellement à dédommager les familles touchées. Pour la plupart, cet argent a été acheminé au sud de notre frontière. Les Canadiens doivent-ils donc compter sur la charité?

    J'ai également appris qu'à la suite des paiements énormes qu'ont dû verser les compagnies d'assurance après le 11 septembre, ces dernières excluent désormais petit à petit les victimes de terrorisme de leurs polices d'assurance-vie. Alors que doivent faire les victimes, je vous le demande?

    Avant le meurtre de mon mari, j'étais hôtesse de l'air chez Air Canada. À cause de la façon dont Ken a été tué, j'ai été et je suis toujours incapable de retourner au travail. Je souffre de syndrome de stress post-traumatique. J'ai de la difficulté à dormir. Je suis traitée actuellement par un psychologue à mes frais parce que la province a cessé récemment de financer cette aide qui est tellement nécessaire.

    Après le meurtre de Ken, j'ai reçu des indemnités d'invalidité — hôtesse de l'air, avion , écrasement contre un immeuble. La compagnie d'assurance a mis un terme à ces indemnités après le deuxième anniversaire des événements du 11 septembre. J'ai dû embaucher à grands frais des avocats pour poursuivre la compagnie d'assurance. Quel était mon problème? Pourquoi ne pouvais-je pas retourner au travail?

    Une année après le meurtre de Ken, j'ai reçu une lettre du gouvernement fédéral exigeant le paiement d'impôts impayés et menaçant de prendre des mesures judiciaires. La lettre était adressée à mon mari... pas à moi, pas à sa succession, mais à mon mari qui avait été tué. Si j'avais vécu aux États-Unis, mon impôt sur le revenu aurait été annulé pour les années 2000 et 2001. J'aurais pu profiter d'avocats gratuits qui m'auraient aidée à remplir les formulaires interminables de demandes d'indemnisation. Au lieu de cela, j'ai dû retenir les services d'avocats aux États-Unis et au Canada. Les quelques Canadiens qui vivent au Canada ont eu l'impression que nous étions des victimes de deuxième catégorie; que nous n'avions pas l'importance aux yeux de notre gouvernement que les victimes américaines avaient aux yeux de leur gouvernement.

    En fait, les Canadiens qui ont choisi de vivre aux États-Unis ont reçu des avantages fiscaux, tandis que la poignée de Canadiens qui vivent au Canada n'ont pas reçu un traitement égal et en plus, nous avons dû assumer des dépenses. Non seulement mon gouvernement ne m'a pas manifesté la même sympathie que celle que les victimes américaines ont reçue de leur gouvernement mais en plus, mon gouvernement voulait imposer l'argent que j'ai reçu du fonds américain.

    Vous savez, au Canada une personne peut gagner la loterie sans être imposée, mais encore une fois, il a fallu que moi, la victime, j'engage des dépenses juridiques et comptables pour avoir l'assurance que mon gouvernement n'allait pas imposer l'argent de l'indemnisation américaine pour le meurtre de mon mari.

    Je tiens à vous dire que cela coûte très cher d'être une victime du terrorisme. En fait, j'irais jusqu'à dire que le Canadien moyen est absolument incapable d'assumer le coût entraîné par le fait d'être une victime du terrorisme.

º  +-(1605)  

    Ken était très fier d'être Canadien. Il n'aurait pas été aussi fier de la façon dont le Canada a traité son épouse et ses enfants. Je constate que mes chefs politiques font des prouesses pour s'assurer qu'un jeune inculpé du meurtre d'un soldat américain ait accès à son avocat canadien et que les droits de sa famille qui vit dans la même ville que moi sont respectés et qu'elle reçoit des indemnités de maladie. Je me demande où se trouvait mon gouvernement pour m'aider à retenir les services d'un avocat qui aurait pu m'aider. Quels sont mes droits à titre de victime de ce crime épouvantable?

    Rien ne peut changer mes sentiments après avoir été négligée par mon propre gouvernement et avoir été mieux traitée par le chef d'un autre pays, mais je suis ici aujourd'hui pour vous dire qu'il n'est pas suffisant de tenter de prévenir le terrorisme. Vous devez commencer par faire face à la réalité, non pas que le terrorisme peut survenir ici, mais qu'il a tué des Canadiens et que vous devez vous assurer qu'une stratégie est en place pour aider les victimes.

    Voulez-vous savoir comment je me sens lorsque j'entends mon premier ministre provincial et député dire que les membres d'une famille qui a avoué à l'antenne de CBC avoir des liens avec al-Qaïda et applaudit les attaques terroristes méritent l'équité parce qu'ils sont des citoyens canadiens? Il ne me revient pas de décider si la famille — je vais dire le nom — la famille Khadr y a droit ou pas, mais lorsqu'une famille qui a soutenu publiquement le groupe de terroristes qui a tué mon mari est traitée avec équité, je me demande ce que font mes premiers ministres provincial et fédéral pour faire en sorte que je sois traitée avec équité, parce que je suis également citoyenne du Canada.

    L'ancien premier ministre a refusé de faire ériger un monument commémoratif pour les victimes du terrorisme. Le premier ministre Chrétien a déclaré que ces choses arrivaient de temps en temps et il n'y avait pas de raison d'insister plus sur ce cas particulier. Ce n'était pas seulement une insulte pour nous, mais aussi pour les familles de l'attentat d'Air India.

    Les attentats terroristes — le 11 septembre, tous les attentats terroristes, sont des attaques contre la liberté et la démocratie. Je suis fière de dire que le soutien et le réconfort que les familles victimes des événements du 11 septembre ont reçus des Canadiens moyens étaient extraordinaires. Toutefois, au niveau gouvernemental, nous avons été invisibles.

    L'un des aspects peut-être les plus douloureux de cette aventure, c'est que je n'ai pas de tribune où je pourrais réclamer justice pour mon mari. Les hommes qui ont piloté les avions sont décédés. L'homme qui est le véritable responsable ne sera peut-être jamais arrêté et il ne sera probablement jamais traduit en justice. Je n'ai pas eu la possibilité de préparer et de soumettre une déclaration de la victime à un juge. En fait, ma démarche présente est peut-être ce qui se rapproche le plus d'une telle déclaration et il s'en est fallu de peu que je ne vienne pas ici.

    Je n'assisterai jamais à une audience de libération conditionnelle. Je ne serai jamais en face des hommes qui ont gâché ma vie. Je ne peux même pas demander justice en poursuites civiles contre les groupes terroristes responsables du meurtre de Ken. Si je vivais ailleurs, je le pourrais, mais pas ici.

    Bien que cela dépasse peut-être votre mandat actuel, j'espère que vous prendrez le temps, si vous ne l'avez pas déjà fait, d'examiner le projet de loi C-314, Loi sur l'indemnisation des victimes du terrorisme. Ce projet de loi a été présenté par M. Stockwell Day et a reçu l'appui des députés de tous les partis, y compris M. Ed Broadbent et Mme Susan Kadis. Je ne vais pas entrer dans le détail de ce projet de loi.

    Depuis le 11 septembre, un seul organisme a tenté de m'aider. L'ancien Office des affaires des victimes d'actes criminels de l'Ontario a été le premier groupe à me demander ce dont j'avais besoin. Aucun autre service aux victimes n'était disponible. Aucune autre personne n'a demandé ce dont nous avions besoin. Et j'ai été renversée d'apprendre que l'OAVAC n'était pas en mesure, pour nous contacter, d'obtenir les renseignements du gouvernement fédéral qui se souciait davantage de la protection de nos renseignements personnels que de notre bien-être.

    Le premier ministre Harris a créé un fonds d'urgence de 3 millions de dollars une semaine après le 11 septembre. J'ai appris récemment que je devais soumettre mes reçus à ce fonds puisqu'il allait être fermé. Je venais tout juste d'enterrer mon mari — les fragments qu'il en restait.

    Je consulte toujours un thérapeute que je dois maintenant payer moi-même.

º  +-(1610)  

    Le gouvernement McGuinty a effectué une restructuration de l'Office des affaires des victimes d'actes criminels.

+-

    Le président: Je suis désolé, je ne voudrais pas vous interrompre, mais je sais que mes collègues veulent pouvoir vous poser des questions, et je vous demanderais d'avoir l'obligeance de passer à vos recommandations.

+-

    Mme Maureen Basnicki: Oui, certainement. Merci.

    J'ai des recommandations d'ordre général, qui ont déjà été présentées.

    Si l'on modifie la Loi antiterroriste pour tenir compte des préoccupations formulées au cours de ces audiences, il ne faut pas affaiblir ou enlever les outils visant à soutenir l'application de la loi.

    Continuez de favoriser et d'améliorer la communication entre les organismes.

    Encouragez le gouvernement fédéral à travailler avec les provinces à établir une stratégie nationale pour prêter assistance aux victimes d'attaques terroristes.

    Encouragez le gouvernement fédéral à tenir une conférence nationale ou un sommet portant sur les besoins des victimes canadiennes du terrorisme.

    Adoptez le projet de loi C-394.

    Enfin, encouragez le gouvernement fédéral à lutter plus agressivement contre les levées de fonds au Canada pour soutenir les terroristes.

    En conclusion, je tiens à affirmer qu'il ne suffit pas de se souvenir de ceux qui ont perdu leur vie lors d'attaques terroristes. Il faut concentrer nos efforts sur la protection de l'existence des autres Canadiens qui sont menacés par le terrorisme. La réussite de cet effort sera le plus grand hommage possible à la mémoire de mon mari.

    Merci.

º  +-(1615)  

+-

    Le président: Je remercie les deux groupes d'être venus aujourd'hui. Je sais que c'est une journée pénible et je tiens à vous dire au nom de nous tous que nous sommes fiers de votre courage et de la conviction que vous êtes venus exprimer ici.

    Je voudrais maintenant laisser à mes collègues la possibilité de poser des questions. Vous pourrez y répondre pleinement. Nous allons avoir un dialogue.

    Merci beaucoup.

    Nous commençons par Mme Guergis.

+-

    Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC): Merci, monsieur le président.

    Je remercie les témoins d'être venus nous présenter ce très important témoignage.

    Je ne peux pas imaginer la souffrance et la douleur que vous et vos familles avez vécues. Il est très important que vous soyez là aujourd'hui. Il est important que nous sachions et que nous comprenions que des Canadiens ont été tués par des terroristes. Il est important aussi de savoir que des terroristes demeurent actifs aujourd'hui au Canada. Ce qui est le plus enrageant, je crois, c'est que plusieurs de ces groupes lèvent activement des fonds au Canada et se servent de cet argent pour appuyer les terroristes qui commettent des crimes, qui assassinent des gens comme votre mari, Maureen, et votre mère, Nicola.

    J'ai une ou deux questions à vous poser. Premièrement, j'aimerais savoir si vous êtes favorables à la création d'un bureau d'ombudsman des victimes financé à l'échelle nationale.

+-

    Mme Maureen Basnicki: Je suis désolé, Helena, pourriez-vous parler plus fort.

+-

    Mme Helena Guergis: Seriez-vous favorables à la création d'un bureau d'ombudsman des victimes qui serait financé au niveau national?

    Maureen, nous avons déjà parlé ensemble à maintes reprises et je vous ai entendue dire que vous voudriez qu'on poursuive les terroristes. Je crois que vous avez même dit qu'il faudrait les poursuivre en justice. Pourriez-vous nous dire comment? Pourquoi pensez-vous que cela pourrait être efficace?

+-

    Mme Maureen Basnicki: Je pense que les victimes sont les retombées des attentats terroristes et en tant que Canadienne, j'estime que je devrais pouvoir réclamer justice, avoir droit à des mesures dissuasives et à une reddition de comptes. Je cherche une méthode, et je sais que ce n'est pas facile. C'est un défi pour les Canadiens et pour tous les pays de lutter contre le terrorisme.

    Nous voyons les solutions auxquelles certains pays ont recours, et je ne suis pas d'accord avec toutes ces solutions, mais je pense que le Canada en tant que pays de maintien de la paix dans le monde a une occasion de prendre l'initiative sur ce plan. J'aimerais personnellement en tant que victime qu'on me donne la possibilité d'un recours civil, qui n'existe pas actuellement. Je pense que ce serait un moyen de compenser les coûts manifestes que j'ai encourus en tant que victime du terrorisme, mais je vois cela aussi comme un moyen de dissuader les terroristes, parce que nous savons tous que le terrorisme a besoin d'être financé.

    Les services de renseignement nous disent qu'il existe par exemple des organismes de charité fictifs. Le Canada ne peut pas fermer les yeux sur ce genre de levée de fonds en sol canadien. Si je pouvais intenter des poursuites auprès des tribunaux civils... Nous avons vu comment les tribunaux ont laissé tomber les familles des victimes de l'attentat d'Air India, mais si je pouvais intenter une action civile pour couper les fonds des organisations terroristes, je crois que ce serait un très fort élément de dissuasion. Je voudrais bien couper les fonds aux terroristes. On l'a déjà fait avec succès. Je pense au cas de Lockerbie. Les États-Unis et l'Irlande sont deux exemples de pays qui ont pris ce genre de mesure.

    Je pense que les victimes actuelles comme les victimes futures ne pourront pas se mettre à reconstruire leur existence tant qu'elles n'auront pas la possibilité d'obtenir une certaine forme de justice. Actuellement, nous sommes coincés et nous ne pouvons rien faire. Nous avons besoin de l'aide d'un ombudsman, évidemment, mais nous aurions besoin de gens pour s'occuper de notre situation particulière de victimes du terrorisme, mais nous avons besoin d'un véhicule, d'un outil quelconque.

    Je vous rappelle à tous que j'ai regardé aujourd'hui encore les informations télévisées et qu'on y parlait de l'accident d'un avion d'Air France qui n'était pas dû à un acte criminel. On en est encore à essayer de trouver la cause de cet incident. Heureusement, il n'y a pas de victimes. Mais je vous pose la question, qu'est-ce que je dois faire en tant que victime d'un crime? Je ne peux pas faire appel aux tribunaux. Je ne peux pas intenter de poursuites civiles pour toutes sortes de raisons, des raisons contractuelles, mais dans le cas du meurtre de mon mari... Je ne comprends pas que nous ne soyons pas capables d'adapter nos lois en fonction du fait qu'en tant que victimes de ces crimes nous devons avoir un recours.

º  +-(1620)  

+-

    Mme Nicola Kelly: Dans notre cas, depuis que le procès au pénal est terminé, nous n'avons plus aucun recours. Je pense que ce serait une bonne idée de créer une telle instance pour les victimes, parce qu'à l'époque de l'attentat contre l'avion d'Air India, on ne nous a pas proposé le moindre service de counselling psychologique. Encore une fois, il n'y avait même pas de représentants canadiens en Irlande pour accueillir les familles quand elles sont arrivés là- bas, même pas pour leur expliquer comment se rendre à la chapelle ardente qui avait été installée à l'hôpital. Il n'y avait absolument rien pour nous.

    Je crois qu'il faut tirer une leçon de cette expérience et mettre sur pied quelque chose pour que plus jamais les gens... Il faut renforcer nos services de renseignement et de sécurité pour empêcher des choses pareilles de se reproduire, et il faut voir ce qui se passe si jamais d'autres terroristes passent entre les mailles du filet, voire quels systèmes on peut mettre en place pour des gens comme nous.

+-

    Dr Bal Gupta: J'ajouterai que cette idée est très bonne. Notre recommandation no 6 prévoit même qu'une partie des ressources financières confisquées aux organismes terroristes soit affectée à cette fin. S'il est possible d'intenter des poursuites contre les confessions religieuses parce que les prédicateurs ou les prêtres ont commis des agressions sexuelles, pourquoi les familles des victimes du terrorisme ne pourraient-elles pas intenter des poursuites civiles contre les organismes qui ont perpétré des actes terroristes?

    Il s'agit d'une question très importante. Après un acte terroriste, les victimes ont déjà suffisamment de mal à poursuivre leurs vies. J'ai dû élever deux enfants âgés de 12 ans et 18 ans. Il est difficile aux victimes de livrer les batailles qu'elles doivent livrer et nous avons dû livrer bataille au gouvernement canadien devant les tribunaux civils. Ni le gouvernement provincial ni le gouvernement fédéral ne nous ont appuyés, et c'est ce qui a constitué le plus grand obstacle devant les tribunaux civils. Je suis heureux de pouvoir vous dire que toutes les familles qui ont perdu un être cher dans l'attentat contre le vol Air India sont demeurées saines d'esprit grâce au réseau d'appui familial. Nous n'avons cependant reçu d'aide d'aucun représentant du gouvernement fédéral. Le gouvernement provincial, à tout le moins, a offert aux familles certains services psychologiques. Le gouvernement fédéral ne nous a cependant donné aucune aide.

+-

    Le président: Je vous remercie, madame Guergis.

    J'accorde maintenant la parole à M. Ménard du Bloc québécois.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ): Croyez-moi, j'ai trouvé vos témoignages très émouvants. J'ai été très impressionné, voire scandalisé par la façon dont vous avez été traités comme victimes.

[Traduction]

+-

    Mme Nicola Kelly: Je regrette... [ Note de la rédaction: Inaudible]

+-

    Le président: Ne vous en faites pas.

+-

    Dr Bal Gupta: Permettez-moi de répondre à cette question.

º  +-(1625)  

+-

    Mme Nicola Kelly: Je n'ai pas entendu la question.

+-

    Dr Bal Gupta: Ce n'était pas une question, mais simplement une observation.

    Nous vous remercions pour ce que vous venez de dire. Je devrais vous remercier personnellement d'avoir demandé au Parlement le 7 avril 2005 la tenue d'une enquête au nom de l'Association des familles des victimes du vol 182 d'Air India.

+-

    Mme Nicola Kelly: Nous vous remercions tous.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Vous avez peut-être eu vent de mes interventions à la Chambre des communes. Nous avons peu de temps, mais dans le cadre de ce comité, qui n'est pas un comité de droits civils permettant l'indemnisation des victimes, je comprends à vos témoignages que ce sont une des choses très importantes. Je dirais que sur le plan humain, je trouve franchement honteuse la façon dont vous avez été traités.

    Il y a une question sur laquelle j'aimerais connaître votre opinion, parce que c'est un des problèmes les plus difficiles que nous cherchons à résoudre dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

    Je crois que vous avez reconnu que la plus grande partie de la lutte n'est pas tellement dans les lois, mais dans l'efficacité des agences de sécurité. Par conséquent, les méthodes qui doivent être prises sont des méthodes d'infiltration. Or, ce qui est terrible dans l'organisation policière actuelle est que ce sont des méthodes d'infiltration au sein de groupes culturels qui, bien qu'ils soient considérés comme l'une des grandes richesses du Canada, nécessitent un certain temps avant que des policiers puissent connaître suffisamment ces cultures pour que leur une action soit efficace.

    Je crois donc que vous reconnaissez aussi que nous avons besoin, dans l'immédiat, de la collaboration de ces communautés culturelles qui, elles aussi, traînent comme une honte ces prêcheurs de violence et de terrorisme qui ne respectent absolument pas l'essence de religions qui, bien qu'elles soient différentes de la nôtre, demeurent des religions d'amour, de pardon et de compassion. Je ne crois pas qu'un dieu, qu'il soit reconnu par les Indiens, par l'islam, par les musulmans ou par des chrétiens, puisse approuver le meurtre d'innocents pour atteindre des buts politiques. C'est certainement une déformation totale de la religion.

    Donc, il faut commencer à pénétrer ces organisations, probablement par l'audience de ces prêcheurs. Lorsque j'ai soumis ce problème aux musulmans qui sont venus ici, ils m'ont dit que la loi décourageait la collaboration des musulmans avec ces policiers, qui parfois — je le reconnais — cherchent maladroitement à infiltrer ces groupes.

    À la lumière de votre expérience, ne croyez-vous pas, comme eux, que la Loi antiterroriste telle qu'elle est rédigée semble viser les étrangers plutôt que les Canadiens qui sont ici depuis plusieurs générations et que cela joue un rôle nuisible aux infiltrations qui sont nécessaires si nous voulons prévenir d'autres actes terroristes, particulièrement des actes terroristes commis par des gens que la peur de la prison n'éloigne pas, puisqu'ils sont très souvent prêts à sacrifier leur propre vie? Cette loi n'a-t-elle pas un effet malheureux sur la collaboration nécessaire que l'on doit établir avec les communautés culturelles?

[Traduction]

+-

    Dr Bal Gupta: Permettez-moi de répliquer à cette observation.

    Je suis un immigrant. Je suis Hindou. Croyez-moi ou non, mais j'ai déjà été prêtre. Je suis sans doute le premier ou le deuxième prêtre en Ontario à avoir été autorisé à célébrer des mariages hindous.

    Comme je l'ai dit dans ma déclaration, peu importe la religion dont il s'agit, il ne faut pas oublier deux choses. Premièrement, la religion est un outil très puissant. C'est un bon outil pour faire des hommes à partir d'animaux, mais c'est aussi un outil puissant qui peut avoir l'effet inverse en faisant miroiter le ciel aux martyrs et en menaçant de l'enfer les infidèles ou les hérétiques.

    Il faut récompenser les fidèles respectueux de la loi qu'ils soient hindous, musulmans, sikhs, chrétiens ou zoroastriens. Il ne faut pas être indulgent à l'égard des dirigeants religieux qui prêchent la haine. Ces dirigeants religieux se reconnaîtront. Permettez-moi de citer un prédicateur d'Arabie saoudite... Je ne fais que répéter ce que j'ai lu dans un journal. J'ai lu tous les témoignages que vous avez entendus et qui portaient sur les gens comme moi qui ne pratiquent pas la religion dominante et dont la couleur de la peau n'est pas celle de la majorité. Le prédicateur d'Arabie saoudite a dit que si tous les musulmans n'étaient pas des terroristes, la plupart des terroristes qui ont été arrêtés étaient des musulmans.

    Nous ne nous en prenons donc pas à une religion en particulier. Nous agirions encore plus mal que les terroristes si c'est ce que nous faisions. Nous disons simplement de ne pas encourager ces activités.

    Nicola a fait observer qu'à titre de politiciens, vous devez vous assurer de ne pas participer sciemment à des activités qui se déroulent dans une langue que vous ne comprenez pas. Elle a donné en exemple le cas de personnes qui disaient en punjabi vouloir tuer des Hindous.

º  +-(1630)  

+-

    Mme Nicola Kelly: Pourrais-je ajouter quelque chose rapidement? Je sais que vous devez partir.

    Je crois que les personnes innocentes qui voudraient dénoncer certains agissements doivent être sûres qu'elles peuvent compter sur l'aide de la police et des organismes d'application de la loi. Cela n'a pas été le cas pour nous parce que des témoins ont été tués et que les membres de la communauté n'avaient pas l'impression qu'ils pouvaient coopérer à la tenue de l'enquête.

    Je sais bien que cela ne relève pas du mandat de votre comité, mais il faudrait se demander ce qui explique que dans notre société des jeunes soient attirés par le martyr. Dans le cas des attentats de Londres, pourquoi l'idée du martyr était-elle attirante pour des jeunes Anglais? Il faut s'intéresser aux causes premières du terrorisme.

    Je m'excuse et je vous remercie.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Ménard.

    Poursuivons.

    Monsieur Comartin, je suppose que vous allez céder votre temps à M. Layton.

    Bienvenue, au comité, monsieur.

+-

    L'hon. Jack Layton (Toronto—Danforth, NPD): Je vous remercie, monsieur le président.

    Au nom du Nouveau Parti Démocratique, je voudrais d'abord brièvement vous remercier de votre présence. Je me souviens à quel point j'étais ému lorsque je vous ai rencontrés pour la première fois dans mon bureau de circonscription de la rue Danforth. Je me souviens aussi des conversations que nous avons eues en Irlande où l'écrasement a eu lieu.

    J'aimerais d'abord rendre hommage à votre courage et à celui de toute votre communauté. On ne peut que trouver vraiment remarquable la façon dont tous les membres de la communauté se sont appuyées et se sont aidées pour transmettre cet important message comme le font maintenant toutes les victimes d'actes terroristes. Je sais qu'il aurait été sans doute plus facile pour vous de porter votre deuil seuls et de poursuivre votre vie, mais vous avez décidé d'essayer de faire changer les choses. Nous devons vous en remercier.

    À mon avis, les recommandations que vous nous transmettez méritent donc une attention toute spéciale. Nous n'aurons pas beaucoup de temps à consacrer à ces recommandations aujourd'hui, mais tous les partis représentés à cette table doivent s'engager à les étudier soigneusement et à les mettre en oeuvre. Voilà comment nous pouvons vous remercier le mieux.

    Vous nous avez fait tout un ensemble de suggestions. Je me réjouis de travailler avec vous à faire en sorte qu'une infrastructure, par exemple, soit mise en place pour aider les victimes d'actes terroristes. Ces victimes ne doivent pas être abandonnées par leur pays. Les exemples que vous nous avez donnés sont assez frappants. On oublie trop souvent les victimes et je sais que vous êtes ici pour veiller à ce que cela ne se reproduise plus.

    La prévention doit prendre plusieurs formes. La prévention suppose davantage que les quelques premières mesures auxquelles on peut songer. Comme certains de mes collègues l'ont fait remarquer, la prévention va bien au-delà de cela. Il faut analyser à fond la raison d'être de cette aliénation et de ce nihilisme qui sont maintenant tellement répandus. Nous pouvons avoir certaines idées là-dessus, mais je pense que nous devons étudier la question à fond.

    Nous nous réjouissons donc de travailler avec vous de façon continue dans ce domaine. Je rends hommage à votre sagesse et à votre courage et je reconnais combien ce que vous avez perdu était précieux. Engageons-nous à votre endroit et à l'endroit de tous les Canadiens à faire en sorte que la situation change très bientôt.

    Merci.

º  +-(1635)  

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Monsieur Wappel, vous avez la parole.

+-

    M. Tom Wappel: Je vous remercie, monsieur le président.

    Je serai bref. Je dirai simplement qu'il était très difficile d'écouter ce que vous nous avez dit. Je suis sûr que je ne peux même pas m'imaginer la douleur que vous avez ressentie, et l'on voit bien que malgré le temps qui s'est écoulé, cette douleur est toujours très présente.

    Je vous remercie en particulier de nous avoir présenter des recommandations.

    Je voudrais également ajouter, monsieur le président, que ces témoins nous rappellent encore une fois comme l'ont fait de nombreux témoins que nous avons entendus que la question qui se pose n'est pas de savoir si, mais quand nous ferons l'objet d'une attaque terroriste. Je trouve très important que vous nous ayez rappelé que nous avons déjà été victimes d'attaques terroristes. La question qui se pose est donc de savoir quand nous en serons à nouveau victimes. Je crois qu'il est absolument essentiel que nous le reconnaissions.

    Pour ceux qui pensent que nous ciblons des groupes en particulier en étudiant cette loi, je ne peux m'empêcher de faire observer que l'attaque contre le vol d'Air India n'est d'aucune façon, à notre connaissance, liée à l'Islam ou aux musulmans. Or, cette attaque a été un acte terroriste horrifiant.

    On ne pourra évidemment jamais répondre à la question que vous posez, à savoir pourquoi une loi antiterroriste n'a pas été adoptée après le désastre d'Air India. Je crois que nous devons simplement aller de l'avant et travailler à empêcher toute attaque dans l'avenir. Si nous ne pouvons pas prévenir une attaque, tous les paliers de gouvernement doivent au moins aider les victimes et atténuer ainsi leur douleur.

    Je vous remercie de nous avoir rappelé que nous avons déjà été l'objet d'actes terroristes et de nous avoir fait part de vos expériences personnelles qui revêtent beaucoup d'importance.

    Je vous remercie beaucoup.

+-

    Mme Nicola Kelly: Je vous remercie beaucoup.

    C'est la raison pour laquelle nous avons apporté un exemplaire de ce livre dans lequel on voit la photo de toutes les personnes qui sont mortes lors de l'attentat et qui contient des renseignements sur leur vie personnelle. On y trouve des choses très émouvantes que les enfants ont écrit. Ce livre nous rappelle tout ce que nous avons perdu et ce que le terrorisme nous a déjà coûté.

    Je vous remercie.

+-

    Dr Bal Gupta: Nous avons remis ce livre à M. Toupin et vous pouvez le regarder.

    Je vous remercie beaucoup de nous avoir donné l'occasion de présenter notre position.

+-

    Mme Maureen Basnicki: Je voudrais ajouter quelque chose à ce qu'a dit M. Layton et à ce que vous venez de dire.

    Nous ressentons une certaine satisfaction à l'idée d'être ici pour vous rappeler que des Canadiens ont déjà été victimes d'actes terroristes. Nous ressentons une certaine satisfaction à l'idée que nos voix soient entendues et nous demandons maintenant à ne pas être des victimes de la politicaillerie. Nous demandons à tous les partis leur aide. Les terroristes se fichent de la couleur de la peau ou de la religion des gens. Ils ne savent pas quel est votre pays d'origine. Nous ne voulons pas que les partis politiques profitent de l'occasion pour essayer de se faire valoir et pour dire... Je suis d'avis comme d'autres personnes que le Canada n'a pas encore accordé suffisamment d'importance à cette question.

    Je me demande vraiment comment aux États-Unis toute une élection a été consacrée à la question de savoir qui pouvait mieux combattre le terrorisme alors que cette question ne retient aucunement l'attention au Canada. Je ne pense pas nécessairement que d'autres pays ont de meilleures solutions à proposer. J'invite les Canadiens de tous les partis à se pencher sur ce problème très réel et d'y proposer des solutions.

    Compte tenu du fait qu'il s'agit d'une menace mondiale, les Canadiens ne peuvent pas faire preuve de complaisance. Des Canadiens ont déjà été victimes d'actes terroristes et nous devons être unis et collaborer à faire en sorte que cela ne se reproduise pas.

º  +-(1640)  

+-

    Le président: Monsieur Cullen, à vous. 

+-

    L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

    Il ne nous reste plus beaucoup de temps. J'ai deux ou trois questions à poser, mais je veux surtout vous remercier de votre présence et du courage que vous avez manifesté en témoignant devant nous.

    Sans vouloir être sectaire, je crois que notre gouvernement a déjà accordé beaucoup d'attention à la question de la sécurité nationale, mais je comprends pourquoi vous pouvez penser le contraire.

    En ce qui touche les victimes d'actes criminels dont vous êtes, je me demande si vous avez eu l'occasion de voir le projet ministériel C-46 que la Chambre étudie actuellement. Ce projet de loi modifie la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Il vise à resserrer les conditions régissant la libération conditionnelle, mais il comporte aussi des mesures visant à aider les victimes d'actes criminels. Vous ne suivez sans doute pas tout ce qui se passe sur la Colline, mais si vous n'avez pas encore vu ce projet de loi, je vous fournirai une trousse d'information à son sujet. J'aimerais vraiment savoir si vous pensez que ce projet de loi va assez loin et s'il répond aux préoccupations que vous avez exprimées aujourd'hui.

    Je vous remercie.

+-

    Le président: Chers collègues, je m'en remets à vous, mais il ne nous reste pas beaucoup de temps.

    Je suis heureux que vous ayez si courageusement comparu devant nous aujourd'hui. Je pense qu'il s'agissait d'une occasion importante pour vous de transmettre vos préoccupations. Comme vous le savez, nous examinons actuellement la loi et je crois que vous avez humanisé tout le débat pour nous.

    Étant donné que nos délibérations sont télévisées, j'aimerais vous montrer le livre qu'on a fait circuler parmi les membres du comité. Il s'intitule Love, Honour, Respect : The Memories of Our Loved Ones. Il porte sur les victimes de l'attentat contre le vol Air India.

    M. MacKay a demandé à faire une brève intervention. Je suis heureux de lui permettre de le faire et je vous donnerai ensuite l'occasion à tous de répliquer à ce qu'il dira. Il faudra ensuite conclure.

+-

    M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Je serai très bref. Je vous remercie de votre indulgence, monsieur le président. Je voulais simplement me joindre à tous ceux qui vous ont avant moi remercié d'avoir transformé cette tragédie personnelle en cause, cause que vous avez très bien défendue au nom des êtres chers que vous avez perdus.

    J'aimerais revenir à la question que vous posez à mon collègue sur la création possible d'un bureau central de l'ombudsman pour les victimes. Je dois à cet égard rendre hommage au travail de gens comme Steve Sullivan du Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes. Pensez-vous que l'idée de créer un bureau central qui aiderait les victimes de tout le pays est bonne?

    Madame Kelly, ce que j'ai retenu de ce que vous nous avez dit, c'est qu'au moment où vous aviez le plus besoin d'aide, cette aide ne vous a pas été offerte.

    Il existe déjà au Canada un enquêteur correctionnel qui s'occupe des droits des personnes reconnues coupables de crimes, mais il n'existe pas de bureau semblable pour les victimes. Pensez-vous qu'il conviendrait de créer un ombudsman national pour les victimes?

+-

    Mme Nicola Kelly: Je suis fermement en faveur de cette idée.

+-

    Dr Bal Gupta: Un ombudsman pourrait jouer un rôle utile, mais il ne pourrait pas régler tous les problèmes. On dit qu'il vaut mieux prévenir que guérir mais on ne peut pas prévenir après coup. Il faut s'occuper des conséquences des actes terroristes. Tout ce qu'on pourra faire pour aider les victimes du terrorisme sera utile.

º  +-(1645)  

+-

    Mme Maureen Basnicki: Je pense qu'il existe pour l'instant une grande confusion, monsieur MacKay, quant au palier de gouvernement qui doit s'occuper des victimes du terrorisme. Est-ce le gouvernement provincial ou le gouvernement fédéral? Compte tenu du fait que ce genre de crime touche des Canadiens de tout le pays, je pense que c'est le gouvernement fédéral qui devrait intervenir.

    Jusqu'ici, les deux paliers de gouvernement se sont renvoyé la balle et personne ne veut assumer la responsabilité pour l'aide aux victimes du terrorisme. Je crois qu'il est impératif de créer au niveau fédéral un organisme qui sera chargé d'aider les Canadiens qui sont victimes d'actes terroristes et pas seulement lorsque ces actes ont lieu à l'intérieur de nos frontières. Les Canadiens vont dans le monde entier. En fait, des députés canadiens étaient en Angleterre lors des attaques terroristes qui ont eu lieu le 7 juillet. Vous voyez comment il est facile...

    Il nous faut envisager des solutions novatrices. Les circonstances qui entourent ce genre de crimes sont inhabituelles et il faut prendre des mesures à l'échelon national pour y faire face.

+-

    Le président: J'aimerais encore une fois vous remercier tous d'avoir comparu devant le comité. Nous avons reçu vos mémoires et nous les étudierons. Comme vous le savez, nous approchons de la fin de nos audiences sur cette loi. Nous prendrons en compte vos recommandations. Je vous remercie encore une fois. Portez-vous bien.

    Nous allons maintenant suspendre la séance pendant environ cinq minutes pour permettre à notre groupe de témoins suivants de s'installer.

º  +-(1655)  

+-

    Le président: Le Sous-comité de la sécurité publique et nationale reprend maintenant ses travaux. Conformément à notre ordre de renvoi du 22 novembre 2004, nous poursuivons notre examen de la Loi antiterroriste.

    Je suis heureux de souhaiter de nouveau la bienvenue à l'honorable Anne McLellan et à l'honorable Irwin Cotler qui ont tous deux des déclarations préliminaires à faire. Ils répondront ensuite à nos questions.

    Veillez présenter les fonctionnaires qui vous accompagnent et je vous prie ensuite de faire votre déclaration préliminaire. Je vous remercie.

[Français]

+-

    L'hon. Anne McLellan (ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile): Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Je suis accompagnée cet après-midi de mon collègue Irwin Cotler et de Kimber Johnston de mon ministère.

    Irwin, vous êtes accompagné...?

+-

    L'hon. Irwin Cotler (ministre de la Justice): Je suis accompagné de deux spécialistes de ces questions, soit Doug Breithaupt et Stan Cohen.

+-

    L'hon. Anne McLellan: Avant de commencer, monsieur le président, j'aimerais dire que je pense que tous les membres du comité ont reçu la déclaration conjointe que mon collègue et moi-même avons préparée. Il s'agit d'une réponse détaillée qui a aussi été présentée au comité sénatorial. Cette réponse traite du contexte et certains des événements survenus récemment et elle le fait de façon beaucoup plus détaillée que les déclarations préliminaires ne peuvent le faire. Cette réponse tient compte des témoignages que vous avez entendus.

    Monsieur le président, ma déclaration préliminaire sera brève et même plus brève que celle que j'ai faite devant le comité sénatorial parce que je pense que nous n'avons pas beaucoup de temps cet après-midi. Je vais donc dire quelques mots et je céderai ensuite la parole à mon collègue le ministre de la Justice qui a une déclaration un peu plus longue à faire qui traite de certains aspects très importants de cette question et notamment du contexte mondial dans lequel elle se situe.

    Je remercie encore une fois les membres du comité de nous donner l'occasion de comparaître devant eux de nouveau dans le cas de cet important examen.

»  +-(1700)  

[Français]

    Je tiens à vous remercier de votre action, en mon nom et au nom du gouvernement du Canada.

[Traduction]

    Trois ans se sont écoulés depuis l'adoption de la Loi antiterroriste, mais la menace terroriste n'a pas pendant ce temps diminué. Cette menace est omniprésente. Le réseau de terroristes est diffus et plus difficile que jamais à cerner. Bien que la plupart des formes de violence politique dans le monde aient diminué depuis les années 1990, les voitures piégées et les attentats suicides ont augmenté et causent de plus en plus de victimes.

    Des innocents et même des enfants ont été tués dans les transports en commun de Londres jusqu'en Égypte, à Bali, en Inde et maintenant en Jordanie. À l'issue des attaques perpétrées à Londres cet été, al-Qaïda a publié de nouveau sa liste de pays cibles. Le Canada figure sur cette liste. Le Canada demeure aussi un pays que les terroristes du monde entier voient comme un pays — et je le dis sans en être fière — qui peut être une source de financement pour leurs activités horrifiantes.

    Nous devons donc prévenir, perturber et empêcher les attaques terroristes qui pourraient avoir lieu dans ce pays et qui pourraient être dirigées ou financées à partir du Canada. À cette fin, la Loi antiterroriste constitue un outil essentiel à notre sécurité nationale ainsi qu'un aspect important de la collaboration du Canada aux efforts déployés par l'ensemble des nations pour lutter contre le terrorisme. Son objet est de prévenir les attaques terroristes et les pouvoirs qu'elle confère visent la même fin.

    En proposant des mesures pour protéger les Canadiens de la violence terroriste, la Loi antiterroriste démontre l'engagement du gouvernement à défendre les droits et les libertés des Canadiens. À notre avis, cette loi représente un juste équilibre et les sondages d'opinion menés auprès des Canadiens le confirment. Les Canadiens souhaitent que la loi comporte des mesures vigoureuses qui seront appliquées avec le soin voulu. Nous tenons en particulier compte des préoccupations exprimées à cet égard par les communautés musulmanes et arabes. Voilà pourquoi mon collègue et moi-même ainsi que nos secrétaires parlementaires avons rencontré des citoyens et organismes des quatre coins du pays au cours de la dernière année et que nous poursuivrons ce dialogue.

    Pendant la fin de semaine, nous participerons d'ailleurs à la troisième réunion de la table ronde interculturelle sur la sécurité. Je ne sais pas monsieur le président si vous avez entendu des témoins provenant de cette table ronde interculturelle, mais il s'agit d'une importante initiative visant à favoriser la participation à l'examen de ces questions des membres de diverses communautés afin de tirer parti de leurs points de vue sur la sécurité nationale. Ce dialogue aide à faire en sorte que nous appliquions la Loi antiterroriste ainsi que les autres initiatives de sécurité nationale de façon conforme aux valeurs canadiennes. D'autres pays comme le Royaume-Uni ont aussi entamé un dialogue avec les communautés ethnoculturelles.

    Je suis allée au Royaume-Uni en septembre après les attentats à la bombe horrifiants qui ont eu lieu au mois de juillet. Il est bien évident que le Royaume-Uni, une société multiculturelle et diversifiée, cherche le juste équilibre et s'efforce de faire participer au débat tous les membres de la société, en particulier les membres des communautés ethnoculturelles qui peuvent se sentir injustement visés par les lois antiterroristes qui ont évidemment pour but de les protéger comme tous les autres citoyens. Nous faisons évidemment face aux mêmes défis et je sais que beaucoup de témoins vous en ont d'ailleurs parlé.

    Permettez-moi de dire quelques mots concernant une question en particulier, car je sais qu'elle intéresse le comité, bien qu'elle n'ait rien à voir avec la Loi antiterroriste, et c'est la question des certificats de sécurité. Depuis 1991, à peine 27 certificats ont été émis, et ce, bien que nous déportions plus de 9 000 personnes du Canada chaque année. Je pense que cela témoigne du fait que nous nous servons de ces certificats seulement quand c'est nécessaire et quand ce besoin est corroboré par un volume important de renseignements de sécurité. À mon sens, notre système intègre scrupuleusement la procédure établie et l'examen judiciaire, de même qu'il établit un équilibre entre les droits individuels et les mesures à prendre pour assurer la sûreté et de la sécurité collectives de la société. Ces certificats permettent de prendre des mesures préventives dans le cas d'un individu qui semble représenter une menace sérieuse à notre sécurité nationale; ils nous donnent la souplesse voulue pour réagir à des menaces émergentes avant qu'elles ne se concrétisent. Les certificats de sécurité sont un outil indispensable pour l'acquittement de cette responsabilité et devrait continuer d'être mis à notre disposition pour nous permettre de prendre des mesures exceptionnelles dans des circonstances exceptionnelles.

    Chers collègues, je sais que vous avez passé du temps à étudier les certificats de sécurité. Je hâte de répondre à vos questions et d'entendre vos recommandations concernant cet outil que sont les certificats de sécurité et l'utilisation de ceux-ci. Les tribunaux ont constamment confirmé la légalité de ces outils, mais la Cour suprême du Canada a indiqué qu'elle se penchera sur certains cas spécifiques impliquant l'utilisation des certificats de sécurité. Le ministre de la Justice et moi-même attendons impatiemment de connaître vos recommandations et vos points de vue, ainsi que ceux du comité sénatorial.

    Monsieur le président, j'aimerais terminer en disant que la Loi antiterroriste représente, à notre sens, une réponse purement canadienne, inscrite dans les valeurs canadiennes et conforme au droit canadien. De plus, elle nous aide à nous acquitter de nos obligations internationales, dont le ministre vous parlera dans une minute.

    Le gouvernement du Canada n'a pas l'intention d'abroger la loi. Les dangers qui pèsent sur les Canadiens et sur nos alliés partout dans le monde sont tout simplement trop graves. Comme pour toute mesure de sécurité, nous devons faire en sorte que nos mesures soient proportionnelles et équilibrées. Il me tarde de connaître le point de vue des membres du comité, notamment sur la manière dont nous pouvons continuer d'établir le bon équilibre entre le respect de la Charte des droits et libertés, les droits et les libertés individuels, le respect de la primauté du droit et l'acquittement d'une obligation capitale qui incombe à tout gouvernement où qu'il soit, soit assurer la sécurité et la sûreté collectives de ses concitoyens.

    Je vous remercie.

»  +-(1705)  

+-

    Le président: Merci, madame la ministre.

    Monsieur le ministre, la parole est à vous.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Je vous remercie, monsieur le président.

[Français]

    Je veux d'abord dire que suis très heureux d'être ici et de participer à la cause commune qui nous rassemble: la lutte contre le terrorisme comme étant partie de la plus grande lutte pour la protection de la sécurité humaine.

[Traduction]

    Permettez-moi aussi de vous dire combien nous apprécions les longues heures de travail assidu fait par le comité. L'étude que vous entreprenez n'est pas simplement prévue par l'article 145 de la loi. C'est une étude qui est favorablement accueillie par le gouvernement et très appréciée des Canadiens. Votre étude fait en sorte que les meilleures intentions et les résultats des meilleures enquêtes parlementaires soient incarnés dans la meilleure loi possible. Comme les juges Iacobucci et Arbour l'ont dit, et je cite: « Le défi que les démocraties sont appelées à relever dans la lutte contre le terrorisme ne consiste pas à savoir s'il faut réagir mais plutôt comment le faire. »

    Il est par conséquent capital de comprendre comment le Canada a choisi de réagir. Notre choix a été motivé par la sécurité humaine, la protection de la sécurité humaine, dont le socle est à la fois la protection de la sécurité nationale et celle des libertés civiles. Or, trop souvent, je le crains, nous voyons cette relation comme étant une alternative antithétique. C'est soit les libertés civiles, soit la sécurité nationale; soit la liberté individuelle, soit la sûreté nationale; soit les droits individuels, soit les pouvoirs de l'État. Mais en réalité, les deux doivent coexister dans le même temps, dans une relation de complémentarité et non de contradiction. C'est qu'il est impossible de parler de protection des libertés personnelles ou des libertés civiles sans assurer auparavant notre sécurité, de même que nous ne pouvons parler de sécurité sans la notion indissociable de la protection des libertés civiles.

    En ce sens, le premier principe sur lequel tout repose, comme je l'ai indiqué lors de ma dernière comparution devant le comité, c'est la protection de la sécurité humaine, un principe qui intègre la sécurité nationale et les libertés civiles, et c'est ce principe qui est à la base même de toutes les autres formes de liberté, puisque c'est le point de départ pour la protection de nos droits les plus fondamentaux. Il s'ensuit que le terrorisme transnational constitue une attaque directe contre nos droits les plus fondamentaux en tant que démocratie, nos droits à la vie, à la liberté et à la sécurité individuelle, comme vous l'ont dit les témoins qui m'ont précédé.

    Le contre-terrorisme c'est tout à fait le contraire. En effet, il vise à protéger ces droits en créant les conditions préalables à leur existence même. Le deuxième principe apparenté est que le terrorisme constitue une attaque de front contre la paix et la sécurité internationales et contre les principes qui ont présidé à l'élaboration de la Charte des Nations Unies. Le secrétaire général des Nations Unies disait récemment, depuis notre dernière rencontre, que le terrorisme constitue une attaque directe contre les valeurs fondamentales incarnées par les Nations Unies, c'est-à-dire l'état de droit, la protection des civils, le respect mutuel entre peuples de confessions et de cultures différentes, et la résolution pacifique des conflits. Il aurait peut-être pu ajouter: et contre les valeurs auxquelles souscrit le Canada.

    Le troisième principe sous-entendant notre approche dans la lutte contre le terrorisme est que s'il est vrai que le terrorisme en soi est une attaque fondamentale contre la primauté du droit, n'empêche que nous demeurons résolument attachés au respect de la primauté du droit dans notre action antiterroriste. Cela aussi est conforme à nos valeurs et à notre charte des droits, puisque nous sommes une nation de droit fondée sur la primauté du droit. Aucun individu, ni aucun groupe ne devrait faire l'objet d'un traitement discriminatoire, car il n'y a pas de Canadiens qui jouissent de moins de droits que leurs concitoyens. En effet, nous sommes tous égaux devant la loi et nous jouissons tous d'une protection égale et d'un traitement égal devant la loi. Cela est vrai que nous parlions de profilage racial ou de toute autre mesure de répression et d'application de la loi en vertu de la législation et des politiques antiterrorisme.

    En termes simples, notre législation antiterrorisme a pour but de protéger la sécurité humaine et les droits humains et, par conséquent, ne doit pas saper les droits mêmes qui assurent notre sécurité.

    Le quatrième principe est celui de la tolérance zéro face au terrorisme, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'activités terroristes qui soient justifiables ou exemptées. À ce propos, et pour la première fois, le Conseil de sécurité de l'ONU a dit ceci: « Nous condamnons fermement le terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations, quels qu'en soient les auteurs, les fins et les buts, car il constitue l'une des menaces les plus graves pour la paix et la sécurité internationales. »

    Le cinquième principe, lui aussi réaffirmé par le Conseil de sécurité de l'ONU et mis en relief par le secrétaire général, est le danger de l'incitation à la haine et à la terreur, l'incitation étant une cause immédiate du terrorisme international, ainsi que la nature transnationale de l'incitation.

    Le sixième principe, lui aussi affirmé par les Nations Unies, c'est le principe de la prévention. La raison pour laquelle je me reporte aux Nations Unies, c'est que notre loi antiterroriste découle des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU et des mesures prises au niveau national pour la mise en oeuvre de traités internationaux pour la répression du terrorisme. Le principe de la prévention consiste donc à détecter et à dissuader plutôt que de simplement poursuivre et de punir. Notre objectif doit donc être de perturber, de désamorcer et, dans la mesure du possible, d'infirmer la capacité de ceux qui veulent nous causer énormément de mal.

»  +-(1710)  

    Le septième est un principe dont on ne tient souvent pas compte, mais dont les témoins précédents viennent tout juste de vous parler — notamment, la souffrance des victimes et de leurs familles. Le terrorisme n'est pas une attaque contre l'État dans un sens abstrait. Le terrorisme est simplement le meurtre intentionnel de l'innocent. Non seulement il s'agit d'une agression contre la victime qui est ciblée, mais cela a aussi des conséquences corrélatives pour leurs familles et leurs communautés, souvent accompagnées de souffrances et de préjudices irréparables.

    En plus des initiatives législatives en vue de protéger les victimes du crime, nous examinons deux autres initiatives spécifiques à cet égard. La première, dont j'ai parlé précédemment aujourd'hui avec le président du Centre canadien des ressources pour les victimes de crimes, est l'adoption d'une charte canadienne des victimes d'un acte criminel. La deuxième consiste à offrir un recours civil pour les victimes de torture et de terrorisme conformément à nos responsabilités en vertu du droit international, à notre fédéralisme et à nos démarches juridictionnelles.

    Enfin, monsieur le président, la Loi antiterroriste doit être comprise dans le contexte plus général des efforts internationaux de lutte contre le terrorisme. En effet, s'il y a une dynamique dominante qui a émergé depuis notre dernière rencontre, c'est, comme le journal Le Monde l'a exprimé dans son commentaire le lendemain des attaques de Londres, la mondialisation du terrorisme international. Aucun pays ne peut à lui seul vaincre le terrorisme, et parce qu'il s'agit vraiment d'une menace mondiale, nous devons élaborer une réponse vraiment globale.

    Notre Loi antiterroriste, organisée autour du modèle de la justice criminelle internationale, notamment, comme je l'ai mentionné, la mise en oeuvre nationale de 12 et de maintenant 13 traités internationaux de lutte contre le terrorisme qui portent sur des sujets spécifiques et les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU, vise à faire exactement cela.

    Lors de l'assemblée générale des Nations Unies en septembre, le premier ministre a signé la Convention internationale des Nations Unies pour la suppression des actes de terrorisme nucléaire, tandis que j'ai signé à Strasbourg en juillet le protocole facultatif à la Convention européenne sur le cybercrime pour criminaliser les actes de haine raciaux et xénophobes sur des systèmes informatiques.

    J'aimerais conclure en faisant l'éloge des éléments de la Stratégie de lutte antiterroriste du secrétaire général de l'ONU, qui parle d'une approche qui serait ancrée dans des valeurs canadiennes; de rédiger une convention internationale globale de lutte contre le terrorisme; de faire en sorte que les dirigeants civils et religieux s'expriment contre le terrorisme, un peu comme ce dont les témoins précédents viennent de vous parler; de priver les terroristes de la capacité de passer à l'acte ou, par-dessus tout, d'avoir accès à des armes de destruction massive; de développer la capacité de l'État de prévenir le terrorisme grâce à la promotion de la bonne gouvernance et de la règle du droit, ce que nous avons tenté de faire en travaillant avec les systèmes de justice nationaux dans d'autres pays; et de protéger les droits de la personne en faisant observer et en appliquant la Loi antiterroriste.

    Monsieur le président, la Loi antiterroriste a été rédigée avec soin et se fonde sur des principes clairs, mais elle n'est pas coulée dans le béton. Nous serons heureux de connaître les résultats de vos délibérations, et nous tiendrons sérieusement compte de toute recommandation que vous ferez. Nous sommes confiants que grâce à votre contribution éclairée, cette loi continuera d'atteindre les objectifs visés lorsqu'elle a été conçue, c'est-à-dire aider à protéger les droits et libertés de tous les Canadiens.

    Merci.

+-

    Le président: Je remercie les deux ministres de leur exposé cet après-midi.

    Nous allons maintenant commencer avec M. MacKay.

»  +-(1715)  

+-

    M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président.

    Nous remercions les deux ministres et les membres de leur personnel de leur présence et de leurs témoignages. Je vous remercie également, monsieur Cotler, d'avoir reconnu le travail que le comité a fait. Comme vous le savez, nous avons beaucoup voyagé et nous avons déjà entendu de nombreux témoins, comme vous l'avez dit. Nous avons vu des exemples de ce que font d'autres pays, les mesures législatives qu'ils ont adoptées, plus particulièrement en Grande-Bretagne, où il y a eu des décisions judiciaires au sujet de leurs lois qui ont eu un impact sur des questions comme l'équivalent des certificats de sécurité.

    J'aurais deux questions à poser aux deux ministres — et je vous permettrai de répondre en ce qui a trait à la primauté du droit et à l'obligation suprême de protéger le public comme Mme McLellan l'a dit, et aussi de l'allusion à la Charte.

    Aucun parti ne respecte ni n'appuie la Charte plus que le Parti conservateur. Nous reconnaissons par ailleurs les origines de la Charte. Elle découle de la première Déclaration des droits qui a été adoptée au Canada par John Diefenbaker. Cette charte s'applique à tous les Canadiens, peu importe leur couleur politique.

    Je voudrais vous demander plus particulièrement, monsieur le ministre, ce que vous pensez de l'expulsion des demandeurs d'asile dont la demande a été rejetée et de la pratique actuelle selon laquelle ces derniers pourraient être expulsés vers des pays d'origine qui pratiquent la torture. Êtes-vous en fait convaincu, particulièrement avec vos antécédents dans le domaine des droits de la personne, qu'il est nécessaire d'avoir une protection législative à cet égard? Je sais que nous en avons parlé au cours de nos délibérations, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez. Le Conseil canadien pour les réfugiés fait cette recommandation, et elle est conforme au droit international, comme vous l'avez dit dans votre témoignage.

    Par ailleurs, monsieur le ministre, le commissaire à l'information et le commissaire à la protection de la vie privée ont tous deux exprimé des préoccupations au sujet de la période au cours de laquelle le procureur général — vous — a la possibilité de faire observer un certificat de sécurité — soit 15 ans. Il recommande que si cette disposition est maintenue, cette période soit réduite. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, encore une fois dans le contexte de ce qui s'est produit récemment à la suite d'une décision judiciaire en Grande-Bretagne.

    Pour vous, madame la ministre McLellan, j'ai deux questions. Nous avons entendu des témoignages et il y a eu un débat public au sujet de la Commission des plaintes du public contre la GRC, et du commissaire qui a parlé de la participation de la GRC dans des questions de sécurité nationale pour lesquelles elle ne pouvait faire enquête. J'aimerais avoir votre réponse à ce sujet et que vous me disiez comment le problème sera résolu.

    Il s'agit spécifiquement d'un problème permanent au niveau des ressources et de la capacité de la police de faire face à une demande croissante — dont vous avez vous-même parlé — et des pouvoirs élargis, des responsabilités et des attentes de la GRC à l'heure actuelle depuis la prolifération du terrorisme à l'échelle mondiale et ses conséquences ici au Canada. Les agents de la GRC ont manifestement maintenant des responsabilités supérieures en plus de devoir lutter contre le crime au Canada.

    En ce qui a trait à la GRC et à ses tâches supplémentaires en matière de sécurité, on pourrait s'attendre normalement qu'on ait besoin d'un plus grand nombre d'agents. Ces tâches supplémentaires devraient se traduire par une augmentation du nombre d'agents.

    Mon collègue de Yorkton-Melville a récemment reçu une réponse à une question qu'il avait fait inscrire au Feuilleton. Dans cette réponse du gouvernement, dans ce document, votre ministère a déclaré très clairement qu'il n'y avait « aucune demande non satisfaite d'agents de la GRC » au Canada. Pourtant, dans le même document, dans les tableaux qui y étaient joints — et c'est avec plaisir que je vous les remettrai — on dit qu'il y avait une pénurie nette de 1 059 agents de la GRC à l'heure actuelle, et une répartition régionale accompagne ce chiffre.

    La ministre peut-elle expliquer cet écart entre la réponse à la question inscrite au Feuilleton dans ce document et les tableaux qui l'accompagnent? Il semble y avoir une contradiction flagrante: alors que les provinces demandent un plus grand nombre d'agents, vous dites qu'il n'y a aucune demande insatisfaite d'agents de la GRC. Combien d'agents de la GRC consacrent maintenant leur temps à des questions de sécurité nationale? Sait-on combien d'agents de la GRC travaillent à plein temps à des questions de sécurité nationale et ne participent donc pas aux enquêtes nationales actuelles?

+-

    L'hon. Anne McLellan: C'est moi qui vais répondre à votre question sur le certificat de sécurité, puisque c'est moi et le ministre de l'Immigration qui signent ces certificats et non le ministre de la Justice.

    Comme je l'ai dit clairement à ma comparution devant le comité du Sénat, nous n'avons renvoyé personne dans un pays où il y avait un risque important de torture. Nous nous conformons tout à fait à l'arrêt Suresh de la Cour suprême du Canada ainsi qu'à nos obligations internationales.

    Il y a actuellement deux affaires entre les mains de la Cour suprême du Canada se rapportant à l'examen de certificats de sécurité. Bien entendu, nous attendrons le résultat de ces délibérations pour voir comment cela pourrait nous guider. Le ministre de la Justice et moi-même avons été très clairs. Nous n'avons déporté personnes dans un pays où il y avait un risque important de torture.

    Si vous voulez, quand ce sera à nouveau votre tour, nous pourrions parler de questions plus complexes entourant l'expulsion d'une personne, la demande de garanties et la vérification par une agence internationale indépendante de ces garanties. Mais vous n'avez pas posé cette question, il faudra y revenir, si vous le voulez.

»  +-(1720)  

+-

    M. Peter MacKay: Ce que j'ai demandé, madame la ministre, c'est si vous estimiez, et si c'était aussi le cas du ministre de la Justice, qu'il fallait codifier la chose, qu'il fallait que ce soit par écrit et même intégré à cette loi que nous examinons aujourd'hui.

+-

    L'hon. Anne McLellan: Comme vous le savez... toutes mes excuses, j'allais dire « Peter ». Comme vous savez, cher collègue, les arrêts de la Cour suprême, comme l'arrêt Suresh, font partie du droit, tout autant qu'une loi codifiée. Pour nous, l'arrêt Suresh de la Cour suprême est clair. Nous attendons d'autres indications. Il ne faut pas non plus oublier la convention internationale que nous avons signée et ratifiée Je présume que vous pourriez y voir une sorte de codification.

    Pour le moment, nous ne prévoyons pas d'autre codification dans nos lois, mais si vous avez des conseils à nous donner, je vous écoute volontiers.

+-

    M. Peter MacKay: Je ne suis pas un grand admirateur du cartésianisme.

+-

    L'hon. Anne McLellan: Pour nous, la loi est claire, et nous n'avons expulsé personne dans un pays où il y avait un risque important de torture.

    Au sujet de la GRC, la commission des plaintes du public a tout pouvoir pour enquêter sur les questions se rapportant au travail policier ou aux questions de sécurité nationale. Je pense que le président par intérim de la commission des plaintes du public vous l'a dit très clairement. Vous pourriez le convoquer, à votre guise, pour qu'il donne son avis sur le mandat de la commission. C'est une interprétation assez large de ce mandat, et qui me convient tout à fait.

    Au sujet des ressources de la commission, j'attends les conseils du président par intérim, ainsi que du nouveau vice-président, pour savoir s'ils disposent des ressources nécessaires pour mener à bien leur importante fonction de surveillance civile indépendante.

+-

    M. Peter MacKay: Vous dites donc que le président de la commission de plaintes du public n'a pas dit que son mandat l'empêchait de recevoir des plaintes au sujet des activités de la GRC en matière de sécurité...

+-

    L'hon. Anne McLellan: Le président précédent a bien dit que...

+-

    M. Peter MacKay: Le président précédent l'a dit. Bien.

+-

    L'hon. Anne McLellan: ...et je ne suis pas d'accord avec lui, non plus que le nouveau président intérimaire de la commission des plaintes du public, qui a réexaminé le mandat. Mais je le répète, vous pouvez l'appeler, ainsi que le nouveau vice-président, et discuter du mandat de la commission.

    Pour ce qui est des ressources de la GRC, elles ont été considérablement augmentées depuis le 11 septembre 2001. Nous comprenons certainement les pressions exercées actuellement sur la gendarmerie. Ce sont les mêmes que vivent tous les corps de police nationaux du monde. Il y a des pressions supplémentaires, puisque notre corps policier national fait du travail de police à contrat pour huit provinces et trois territoires.

    Pour ce qui est des agents, que je sache, à l'exception de... et je ne suis pas certaine. J'ai reçu une demande écrite officielle du ministre de la Justice du Manitoba pour qu'on augmente les effectifs, et nous en avons parlé la semaine dernière à Whitehorse. Nous donnons suite aux demandes que nous avons reçues.

    Ainsi, mon collègue Harvey Cenaiko, procureur général de l'Alberta, a demandé une augmentation des effectifs importante après la tragédie de Mayerthorpe.

+-

    M. Peter MacKay: Si je peux vous interrompre...

+-

    Le président: Je suis désolé, vous avez largement dépassé le temps qui vous était imparti.

+-

    L'hon. Anne McLellan: Nous répondons à la demande. Il faut une demande officielle...

»  +-(1725)  

+-

    M. Peter MacKay: Ce document dit que vous n'avez pas reçu de demande pour des agents de la GRC. On y dit précisément que toutes les demandes ont été exécutées. Mais vous venez de nous dire qu'il y avait des demandes.

+-

    L'hon. Anne McLellan: Non, nous disons que toutes les demandes ont été exécutées. Nous avons une demande, par exemple, de mon collègue Harvey Cenaiko, de l'Alberta. Nous donnons suite à sa demande.

+-

    M. Peter MacKay: Il y a donc des demandes pour augmenter le nombre d'agents de la GRC. En fait, on en demande un millier.

+-

    L'hon. Anne McLellan: Je pense que le mot clé, c'est « exécuté ». Il faut se demander si nous avons reçu des demandes officielles. Il faut que la province fasse la demande. Il faut que je reçoive une demande officielle, par écrit, précisant le nombre demandé et déclarant que la province a les ressources nécessaires pour payer sa part du financement. Vous connaissez la formule.

    Dans le cas de l'Alberta, nous avons dit au ministre Cenaiko que nous allons agir...

+-

    M. Peter MacKay: Vous me dites donc maintenant qu'il y un millier de demandes non exécutées, n'est-ce pas?

+-

    Le président: Je suis désolé, monsieur MacKay, vous avez largement dépassé le temps qui vous était accordé.

    Nous passons à M. Ménard, s'il vous plaît.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Je pense que cette question s'adresse à moi, si je ne m'abuse.

+-

    Le président: Bien, monsieur Cotler, vous pouvez finir de répondre à cette courte question, mais il a épuisé son temps.

+-

    M. Peter MacKay: Je n'ai pas dépassé mon temps. Il m'en restait encore beaucoup.

    Une voix:Au total.

    M. Peter MacKay:Oui, au total.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Ce sera très court.

+-

    M. Serge Ménard: Vous vous rappelez les règles que j'avais proposées, soit que seul le temps de question soit compté?

+-

    Le président: Monsieur Cotler, vous avez la parole.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Au sujet de la question de l'expulsion, que vous avez soulevée, permettez-moi de rappeler le dilemme que nous avons entre une détention prolongée, d'une part, et l'expulsion dans un pays où il peut y avoir un risque important de torture, d'autre part.

    La dernière fois que j'ai comparu devant le comité, je pense bien que c'était ici puisqu'il s'agissait d'une question semblable de Joe Comartin, je vous ai demandé d'explorer des solutions de rechange, ou des solutions mitoyennes. C'est ce qui m'a mis dans l'eau chaude pour le point de presse qui a suivi, et j'ai maintenant l'occasion de clarifier mes propos. J'ai donné l'exemple de l'article 810, autrement dit, de la possibilité d'émettre une ordonnance de surveillance en vertu du Code criminel. On en a parlé aux États-Unis, et c'est une variante de nos dispositions d'arrestation préventive, dans la Loi antiterroriste.

    Au point de presse, on m'a demandé si je voulais appliquer cela aux citoyens et j'ai répondu que cela existait déjà pour les citoyens. Pourtant, le lendemain, à la une, on pouvait lire que Cotler voulait élargir l'application de la Loi antiterroriste aux citoyens. Ce n'est pas du tout ça. Je cherchais un moyen de protéger les droits, une solution de compromis.

    Je suis donc content que vous posiez la question, pour préciser mon propos. Le comité trouvera peut-être une telle solution en examinant l'article 810 du Code criminel et les dispositions d'arrestation préventive, par exemple, pour une solution de surveillance judiciaire des mesures de contrôle. Ça c'est la première chose que je voulais dire.

    La deuxième, que vous avez soulevée, c'est ce que vous avez appelé les certificats de sécurité du procureur général. Je n'émets pas de certificat de sécurité, mais des certificats du procureur général. Je ne voudrais pas qu'on les confonde avec les certificats de sécurité. Cette question de terminologie étant réglé, je vais répondre à votre question.

    Comme je l'ai dit dans mon témoignage devant le comité du Sénat il y a deux jours, lorsque la première ébauche de la Loi antiterroriste a été présentée au comité parlementaire dont je faisais partie, j'ai déclaré que les certificats du procureur général qui ne pouvaient être l'objet d'un examen, et aussi tout à fait secrets, étaient pour moi une raison suffisante de m'opposer à la Loi antiterroriste. J'ai recommandé six amendements au pouvoir illimité du procureur général au sujet de l'émission des certificats et ma collègue la ministre de la Justice les a acceptés. Cela vous montre le rôle que peuvent jouer les comités parlementaires dans ces questions.

    Voilà donc comment fonctionne l'émission de certificats du procureur général. Le procureur général doit présenter le certificat à toutes les parties intéressées. L'émission doit se faire dans un cadre juridique, et seulement après qu'une ordonnance ou une décision ait été rendue au sujet de la divulgation de renseignements de sécurité sensibles. L'émission du certificat n'est plus un secret, comme auparavant, mais doit être publiée sans délai dans la Gazette du Canada. Le certificat peut désormais faire l'objet d'un examen, et toute partie à une procédure peut demander l'examen du certificat à la Cour d'appel fédérale. Le juge chargé de l'examen du certificat a maintenant le pouvoir de confirmer, modifier ou annuler le certificat. Le certificat ne peut plus être émis pour une période indéterminée, comme c'était possible auparavant, mais est limité à une période de 15 ans, comme vous l'avez signalé avec exactitude. Pour vous, c'est encore trop long, mais j'essaie simplement de situer votre question sur le certificat du procureur général...

+-

    M. Peter MacKay: Ma question se rapportait à... [ Note de la rédaction: inaudible]... et vos idées sur la durée.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Oui, c'est ce que je dis, en situant votre question dans la panoplie de solutions que nous avons apportées aux problèmes du certificat du procureur général qui ne faisait l'objet d'aucun examen, qui était illimité dans sa portée et qui était secret. Je vous présente les garanties assurant l'application régulière de la loi en ajoutant qu'enfin, la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels ne sont plus exclues, que le droit et le devoir de surveillance du commissaire à la vie privée et du commissaire à l'information ont été préservés, de même que les dispositions se rapportant à la collecte, à l'utilisation et à la protection des renseignements.

    En résumé, au sujet de la durée de 15 ans, je réitère que nous avons tout fait pour que la loi soit appliquée de manière régulière, mais on pourrait toujours rechercher... Je trouvais qu'une durée indéterminée, c'était trop long; vous pouvez penser que 15 ans, c'est trop long. Faites une recommandation, si c'est ce que vous pensez — et une recommandation bien fondée.

»  +-(1730)  

+-

    M. Peter MacKay: Vous n'avez pas d'opinion là-dessus?

+-

    Le président: Merci, monsieur Cotler.

    Monsieur Ménard, c'est à vous.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Je vais commencer par vous poser une question à laquelle vous pourrez répondre très rapidement, car j'aimerais bien pouvoir vous en poser plus d'une.

    Vous dites que la Loi antiterroriste est une loi qui établit des mesures extraordinaires pour des circonstances extraordinaires et qui comporte des risques que l'on enfreigne aux droits fondamentaux. Si nous devions reconduire la Loi antiterroriste, croyez-vous qu'il devrait y avoir une autre période de révision obligatoire dans trois ans?

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Oui, en effet, il devrait y avoir une autre période de révision.

+-

    M. Serge Ménard: Vous venez devant nous essentiellement pour défendre la loi telle qu'elle est. Pourtant, il me semble que lorsqu'on a décidé de prévoir une révision obligatoire après trois ans, c'était parce qu'on reconnaissait a priori que l'empressement apporté lors de la rédaction et de l'adoption de cette loi dans la foulée d'attentats terroristes spectaculaires serait nécessairement source d'erreurs, même d'excès possibles, dont on découvrirait la portée dans les premières années qui suivraient sa mise en vigueur.

    Toutefois, votre opinion aujourd'hui, après trois ans d'expérience, est qu'on a atteint, par chance, l'équilibre parfait et qu'on n'a aucunement besoin de le changer.

[Traduction]

+-

    L'hon. Anne McLellan: Je vais répondre parce que j'étais à la fois ministre de la Justice et procureur général.

    Comme l'a dit le ministre Cotler, une bonne part de cette loi n'a pas été adoptée à la hâte, et ces deux messieurs, entre autres, pourraient vous dire combien de temps nous avons passé à la table, aux Nations Unies. Le terrorisme mondial était une préoccupation majeure de chaque réunion internationale à laquelle j'ai participé pendant cinq ans. C'était une préoccupation majeure des Nations Unies et d'autres organismes internationaux pendant toutes les années 1990. En fait, le Canada était reconnu comme l'un des leaders dans ces discussions.

    Prenons les conventions adoptées par les Nations Unies: nous sommes parmi les pays qui les ont ratifiées. Il y a deux conventions importantes, et la Loi antiterroriste témoigne de notre obligation de les ratifier, autant que de ce qui s'est produit après le 11 septembre et de ce qui a été exigé des États dans les semaines et les mois qui ont suivi. Une bonne part de la réflexion et de la structure principale qui sont au coeur de cette loi, et dont Irwin a parlé, n'était rien de nouveau, n'a pas été adoptée à la hâte et était en préparation depuis longtemps. Je nie donc catégoriquement l'idée que d'une façon ou d'une autre...

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Je comprends votre point de vue. Vous n'avez pas besoin de vous étendre sur la question pendant trois minutes alors que j'e n'en dispose que de sept pour vous questionner. J'ai parfaitement compris votre réponse.

    Je n'étais pas ici lorsque vous l'avez adoptée. Pourriez-vous me rappeler à quelle date cette loi a été adoptée?

[Traduction]

+-

    L'hon. Anne McLellan: Elle a été adoptée en décembre, mais en fait...

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: En décembre de quelle année?

[Traduction]

+-

    L'hon. Anne McLellan: De 2001.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Donc, elle a été adoptée trois mois après les attentats du 11 septembre 2001, mais 19 ans après l'attentat d'Air India.

[Traduction]

+-

    L'hon. Anne McLellan: Rappelez-vous...

»  +-(1735)  

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Voudriez-vous dire aux gens ici que vous avez commencé à penser à la lutte contre le terrorisme lors de l'attentat d'Air India, mais que ce qui vous a vraiment poussé à agir, c'est l'attentat qui a eu lieu dans le pays voisin.

[Traduction]

+-

    L'hon. Anne McLellan: Non. En fait, si vous parlez des certificats de sécurité, ils n'ont rien à voir avec la Loi antiterroriste puisqu'ils font partie de la Loi sur l'immigration. Il faut éviter de semer la confusion chez les citoyens entre la Loi antiterroriste et ce qui existe ailleurs. Je sais que ce n'est pas délibéré de votre part. Les certificats de sécurité font partie de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et ils existent depuis près de 15 ans. Si c'est de cela que vous voulez parler, très bien, mais ne confondez pas avec la Loi antiterroriste.

    Le ministre Cotler et moi-même ne voulons pas laisser entendre que la loi est parfaite. D'ailleurs, comme on le voit maintenant en Grande-Bretagne, en Australie, en Nouvelle-Zélande, aux États-Unis comme ici, on revoit les mesures législatives qui ont été prises; certains pays, comme l'Australie et le Royaume-Uni, renforcent leurs pouvoirs. Nous ne vous demandons pas de pouvoirs supplémentaires, malgré les actes horribles qui se sont produits depuis le 11 septembre 2001. Nous estimons que nos outils sont satisfaisants et qu'ils sont utilisés d'une manière juste et équilibrée. Nous ne demandons pas de pouvoirs supplémentaires, comme le font les gouvernements du Royaume-Uni et de l'Australie.

    Toutefois, si vous voyez des améliorations qui peuvent être apportées à la loi elle-même, à son libellé ou à son mode d'application, nous les prendrons au sérieux.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Vous êtes donc ouverts à des changements?

[Traduction]

+-

    L'hon. Anne McLellan: Oui, oui.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Alors, je peux vous en suggérer, par exemple le commissaire anglais, l'amicus curiae dont la sécurité a été vérifiée, les conditions d'incarcération de gens qui ne sont pas trouvés coupables, etc. Mais n'avez-vous aucune suggestion à nous faire quant au genre de changements qui vous sont apparus nécessaires, vous aussi, après cette période d'essai de trois ans?

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Premièrement, comme l'a dit ma collègue, nous sommes ouverts à des recommandations. Deuxièmement, j'ai écrit un article sur le processus d'adoption de ce projet de loi, dans lequel je parle aussi d'amendements. C'est un article qui parle des travaux préparatoires, si on peut dire. Ce qu'on peut voir dans cet article, ce sont les mesures adoptées par le ministre de la Justice et qui avaient été proposées par le Comité de la justice de l'époque. C'est la même chose maintenant, nous sommes dans le même processus et nous sommes ouverts aux recommandations.

+-

    M. Serge Ménard: Monsieur le ministre, vous avez été un grand intellectuel et un grand juriste, mais ce qu'on attend de vous comme ministre aujourd'hui, ce ne sont pas des articles, ce sont des propositions de modification à la législation.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Je parle seulement des points que vous avez soulevés à notre intention. Vous nous demandez si nous sommes ouverts à des recommandations, et je vous réponds que nous le sommes. Je donne en exemple cet article pour démontrer quels ont été les travaux préparatoires et l'ouverture du ministre de la Justice à ce moment-là, car j'ai moi-même proposé 10 amendements importants. J'ai donné l'exemple d'un cadre d'amendements à l'égard du certificat du procureur général, mais il y en avait d'autres quant à la définition et quant aux infractions. Je dis maintenant que nous sommes ouverts à la question de l'amicus curiae.

»  +-(1740)  

+-

    M. Serge Ménard: Monsieur le ministre, en ce que a trait aux amendements, vous parliez vous-même de « intentional slaughter of civilians ». Je crois que vous avez bien décrit l'essence du terrorisme, mais votre définition est d'une étendue telle qu'elle pourrait s'appliquer à des revendications ouvrières dans un contexte de troubles syndicaux, à des revendications des premières nations. Vous n'êtes pas conscient de cela. Le problème n'est pas que votre définition s'attaque à « the intentional slaughter of civilians, ce que nous voulons tous, mais le fait qu'elle risque d'être utilisée à d'autres fins, pour casser des revendications sociales ou des moyens de revendications sociales qui, dans le passé, ont assuré le progrès de nos législations.

[Traduction]

+-

    L'hon. Anne McLellan: Mon collègue va...

+-

    Le président: Je vais permettre aux témoins de répondre puis nous passerons à M. Comartin.

+-

    L'hon. Anne McLellan: Mon collègue répondra quant à la définition donnée dans la loi, mais je veux dire une chose, pour que cela soit clair pour tout le monde.

    À mon avis, si nous permettons que des personnes soient massacrées délibérément par des terroristes ou un terroriste, nous manquons à notre obligation en matière de lutte contre le terrorisme. L'objectif de cette loi c'est la prévention et la dissuasion.

    Je l'ai déjà dit, et je le répéterai encore et encore: quand les terroristes sont dans l'avion, il est trop tard, nous avons échoué comme gouvernement par rapport à notre obligation fondamentale. Nous voulons essayer d'éviter des massacres délibérés, que ce soit dans le métro, dans un gratte-ciel ou ailleurs. Si un tel massacre d'innocents se produit, c'est un échec grave et nous ne pouvons pas...

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Vous savez très bien que vous ne répondez pas à ma question. Le Code criminel défend également de tuer des gens. Un terroriste en tue plusieurs, alors il enfreint déjà le Code criminel plusieurs fois.

[Traduction]

+-

    L'hon. Anne McLellan: Mais c'est une tout autre chose...

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Certainement, mais c'est justement ce que je vous dis. Pourquoi ne l'inscrivez-vous pas dans votre définition? Vous lui donnez une telle portée qu'elle pourrait couvrir des incidents violents dans le cadre de revendications des premières nations ou de revendications ouvrières.

[Traduction]

+-

    Le président: Je vais permettre au ministre Cotler de vous répondre, puis nous donnerons la parole à M. Comartin.

[Français]

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Pour moi, ce commentaire démontre que vous n'avez peut-être pas lu ni apprécié l'amendement que j'ai fait et qui se trouve présentement dans le projet de loi. Je vais vous écrire afin de partager cela avec vous, car j'avais moi-même la même inquiétude à ce moment-là. Je me disais que cela ouvrait peut-être la porte à une application de la loi lors de manifestations légales et autres choses du genre. J'ai proposé un amendement que je vais vous lire.

[Traduction]

    La suppression du mot « licite » à l'article 83.01 a pour but:

de veiller à ce que toute activité exercée dans le cadre de revendications, de protestations, d'un arrêt de travail, même si elle est illégale, même si elle s'accompagne d'actes de violence, même si elle perturbe un service public ou privé essentiel, ne sera pas considérée comme une activité terroriste à moins que:

    ...réponde aux quatre critères suivants...

- elle soit entreprise au nom d'un but de nature politique, religieuse ou idéologique

    ...il s'agit là d'un principe limitatif parce qu'il faut prouver cela alors qu'une disposition interprétative a été ajoutée pour en réduire l'aspect discriminatoire...

- elle vise à intimider la population, ou une partie de la population, quant à sa sécurité, entre autres sur le plan économique, ou à contraindre une personne, un gouvernement ou une organisation à accomplir un acte ou à s'en abstenir; et
- de manière intentionnelle, cause des blessures graves à une personne ou la mort de celle-ci, met une vie en danger ou compromet gravement la santé ou la sécurité de toute partie de la population;
- cause des dommages matériels considérables, qui peuvent avoir pour résultat de causer des blessures graves à une personne, ou la mort de celle-ci, à mettre la vie d'une personne en danger ou à compromettre gravement la santé ou la sécurité de toute partie de la population.
En un mot, à moins qu'un acte criminel violent réponde au moins à ces critères d'intention et de motivation, il ne peut être qualifié d'acte terroriste.

    Je pense que la définition à ce sujet a été précisée et a tenu compte des critères que j'a proposés pour définir l'infraction.

    Je le répète, si, comme moi à l'époque, vous estimez que la portée est trop large, n'hésitez pas à proposer des amendements.

»  +-(1745)  

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: C'est certainement trop compliqué, alors qu'il existe des définitions beaucoup plus simples suggérées par les Nations Unies. Vous en avez donné une:

[Traduction]

    Meurtre intentionnel...

[Français]

+-

    L'hon. Irwin Cotler: D'accord. C'est compliqué afin de protéger les accusés.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Comartin, s'il vous plaît.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): J'ai presque peur de commencer, monsieur le président.

    Est-ce que les ministres ont indiqué combien de temps ils pouvaient nous consacrer ce soir?

+-

    Le président: Toute la soirée, je suppose, n'est-ce pas, Anne?

+-

    L'hon. Anne McLellan: Non, en fait, je crois que nous devons partir...

+-

    Le président: Allez-y.

+-

    M. Joe Comartin: Eh bien, je vais faire une courte déclaration avant de poser une courte question.

    Madame McLellan, je m'adresse à vous car en vérité, je suis très mécontent des positions que vous avez exprimées publiquement à propos de la Loi antiterroriste par rapport au rôle que ce comité est censé jouer. Nous sommes chargés par la loi d'effectuer une révision, et bien qu'à plusieurs reprises, on nous ait proposé très sérieusement d'abroger carrément la loi, vous refusez cette éventualité. Vous insistez pour que les audiences d'enquête soient maintenues, que les clauses de temporarisation soient reportées et pour que la loi conserve ses dispositions concernant la détention préventive. Sur tous ces points, je dirais que si vous étiez juge, vous seriez en situation d'outrage au tribunal puisque vous préjugez du rapport que pourrait produire ce comité.

    Je pose donc aux deux ministres la question suivante: lorsque ce rapport sera présenté, quel membre du Cabinet aura la lourde tâche de déterminer si le gouvernement va le prendre sérieusement en considération ou s'il peut tout simplement le rejeter, comme je m'attends à ce que vous le fassiez, madame la ministre?

+-

    L'hon. Anne McLellan: Non, nous avons dit très clairement que nous prenons cette révision très au sérieux et que vous avez l'occasion de revoir le mode de fonctionnement de la loi, c'est-à-dire ses dispositions de fond, en tenant compte du contexte mondial du terrorisme, du rôle que le Canada doit jouer sur son territoire et à l'étranger pour protéger ses citoyens et les citoyens de ses pays alliés. Et j'en reviens au fait que le défi n'est pas nouveau. Vous avez entendu ici même aujourd'hui des victimes de l'attentat d'Air India, et ce défi ne va pas disparaître. Malheureusement, nous savons tous, comme les Nations Unies, comme le Conseil de l'Europe, que la menace du terrorisme transnational va persister pendant très longtemps et nous avons l'obligation de nous y préparer et de prévenir les attentats terroristes aussi bien au Canada qu'à l'étranger.

    Mon collègue et moi-même avons jugé bon de venir ici pour vous dire que le gouvernement prend très au sérieux les obligations que lui confèrent les Nations Unies aussi bien sur le territoire canadien qu'au plan international. Nous n'allons donc pas abroger la loi, car ce serait contraire à nos obligations les plus fondamentales, tant au plan intérieur qu'à l'égard de l'ensemble du monde civilisé.

    Cependant, nous aimerions savoir si, à votre avis, nous sommes parvenus à un juste équilibre compte tenu, par exemple, de la recrudescence des attentats terroristes dans le monde entier. C'est pourquoi certains pays envisagent de renforcer leur législation du fait des horreurs perpétrées contre leurs ressortissants.

    Nous sommes donc ici pour vous inviter à prendre en considération les attentes des Canadiens, qui ne manquent pas d'intérêt; prenez aussi en considération les attentes du monde entier et voyez si nous sommes parvenus à un bon équilibre. Dans le cas contraire, je peux vous assurer que le gouvernement tient à ce que vous lui indiquiez comment on pourrait rétablir l'équilibre. Mais...

+-

    M. Joe Comartin: En réalité, ma question est bien simple: lequel de vous deux est responsable de ce projet de loi et devra se prononcer sur notre rapport?

+-

    L'hon. Anne McLellan: Nous en sommes responsables tous les deux, mais c'est M. Cotler qui s'en occupe au premier chef.

+-

    M. Joe Comartin: Cette réponse me satisfait. Merci.

    Nous avons entendu — et monsieur Cotler, vous étiez là, vous l'avez entendu également — le témoignage des deux délégations les plus hardies. Elles ont recommandé fortement l'adoption du projet de loi C-394. Est-ce que le gouvernement est prêt aujourd'hui à nous faire part de son appui au projet de loi C-394? Il s'agit de modifier les dispositions concernant l'immunité.

»  +-(1750)  

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Je vais commencer par répondre sur le principe, puis j'irai aux détails.

    Je réfléchis depuis quelque temps à la notion d'un recours civil pour les victimes de torture et de terreur; je comprends donc bien le principe qui sous-tend ce projet de loi émanant d'un député et je reconnais que son approche est bien intentionnée. Le problème est que quel que soit l'amendement apporté, il faut prendre en compte le droit international et les développements dans ce domaine, et l'obligation entre les États qui, comme je l'ai dit, sont des questions fédérales et provinciales.

    Par exemple, les Nations Unies viennent de confirmer les principes établis sur l'immunité des États en adoptant la Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles, qui codifie l'état actuel du droit international et de l'immunité des États, mais ne fournit pas de recours pour des actes de terrorisme ou de torture parrainés par un État et commis dans d'autres pays. Ainsi, nous devrons, si nous modifions notre loi sur l'immunité des États... Je ne dis pas que les États-Unis ont une loi à ce propos. Les Nations Unies ont dit que ce n'est pas conforme au droit international et à la pratique. Il nous faudra cependant étudier la chose pour voir si nous pouvons nous doter d'un recours à ce sujet.

    L'autre élément du projet de loi, à savoir permettre aux victimes de terrorisme de poursuivre en justice des États étrangers, sur le plan de l'efficacité du principe, ne constitue pas forcément la façon la plus appropriée de satisfaire les besoins des victimes, parce qu'il ne prend pas en compte le fait que les jugements pécuniaires ne sont pas forcément exécutoires. Ayant participé à certaines de ces procédures, il m'est arrivé de tenter de faire exécuter certains de ces jugements, avant ma vie de parlementaire. Ainsi la seule propriété d'un État étranger contre lequel un jugement peut être exécuté est la propriété commerciale et les États étrangers n'ont pas en général beaucoup de propriétés commerciales à l'étranger.

    Puis il s'agit de savoir si le pouvoir du droit criminel peut être utilisé pour motiver une action au civil. Je parle simplement des questions qui ont été soulevées, et vous pouvez vous-même vérifier tout cela.

    Je voudrais conclure en disant que je suis d'accord avec le principe qui sous-tend ce projet de loi et que nous cherchons des moyens d'édicter une loi qui créera des recours, peu importent les préoccupations que je viens de souligner. Honnêtement, il me semble qu'il y a évolution au niveau international et que les Nations Unies n'ont peut-être pas complètement compris les principes en devenir du droit international et de la disposition de recours civils pour les victimes de torture et de terreur. Parfois, je ne suis pas tout à fait d'accord avec le point de vue pris par les Nations Unies.

+-

    M. Joe Comartin: Je suis d'accord avec vous en ce qui concerne l'évolution du droit international à ce propos, et l'on pourrait pratiquement dire que le droit international permet ce type de loi.

    Sur un autre point qu'ils ont soulevé, vous avez parlé du travail que vous faites à l'heure actuelle à propos des droits des victimes d'attentats terroristes. Il est bien évident que le système de compensation et d'aide au niveau provincial n'est absolument pas approprié pour ce type de pertes. Je parle de pertes financières et du besoin de soutien financier. Les systèmes provinciaux ne sont pas suffisamment importants, même en Ontario qui est le plus important du pays. Ils proposent d'établir un fonds national pour compenser les victimes d'attentats terroristes.

    Êtes-vous prêt à favoriser cela?

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Je ne peux pas répondre au nom du gouvernement au sujet d'une politique qui n'est pas encore lancée, mais c'est certainement quelque chose que moi je suis prêt à étudier.

    Je voudrais citer des extraits choisis d'un discours que j'ai prononcé — dont personne n'a entendu parler bien sûr — sur ce sujet, discours dans lequel je disais qu'il était important que les victimes de racisme et de terreur ou d'activités motivées par la haine comprennent que leur peur ou que leur indignation morale peut trouver son expression dans un recours légal tangible. Il y a d'autres possibilités que de ne rien faire ou de simplement appeler la police. Oui, la victime doit être au centre de ce recours juridique... etc.

    En d'autres termes, je suis réceptif et je suis certainement prêt à considérer favorablement cette option.

+-

    M. Joe Comartin: Manifestement, les victimes de ce genre d'actes sont plus intéressées par les actes que par les paroles. Comme politiciens, on peut tous nous reprocher de parler plutôt que d'agir. Est-ce que l'un de vos ministères a déjà cherché à établir ce type de fonds au Canada jusqu'à maintenant?

»  +-(1755)  

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Le ministère dispose à l'heure actuelle d'un fonds d'indemnisation des victimes. La question se pose plus précisément pour les victimes de terreur. Ce que je dis, c'est que dans le cadre de notre centre de politiques sur les questions relatives aux victimes et dans le cadre de notre fonds d'indemnisation des victimes, nous l'avons seulement étendu...

+-

    L'hon. Anne McLellan: Nous l'avons simplement étendu et amélioré.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: ... et autorisé 500 000 $ pour les victimes d'un crime, afin de soutenir leur comparution dans des audiences nationales de libération conditionnelle.

+-

    M. Joe Comartin: Mais ces dispositions sont pour toutes les victimes de crimes, d'une manière générale. La question portait précisément sur les victimes d'actes terroristes.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: C'est pourquoi je dis précisément que, conformément aux autres principes et politiques qui existent, la réponse est oui, nous allons nous en occuper.

+-

    M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci, monsieur Comartin.

    Monsieur Wappel, allez-y.

+-

    M. Tom Wappel: Merci, monsieur le président. Avant de commencer, je voudrais savoir, si jamais nous n'avons pas fini au moment où le ministre ou les ministres devront s'en aller, s'il serait possible pour certains de leurs représentants de rester auprès de nous. J'ai un certain nombre de questions très techniques de nature juridique.

+-

    Le président: Allez-y et nous verrons ce qu'il en est. J'aviserai en temps et lieu.

+-

    M. Tom Wappel: Très bien. Merci beaucoup.

    À la suite de ce que disait M. MacKay, permettez-moi de commencer en disant que ce comité a travaillé très fort. Nous avons investi beaucoup de temps personnel dans ce dossier — du moins c'est mon cas — et je serais personnellement très frustré si des événements indépendants de notre volonté faisaient en sorte que nous serions incapables de terminer notre tâche. À mon avis, ce serait gâcher une année de travail. J'espère que nous aurons suffisamment de temps pour terminer les recommandations, qui émaneront de ce sous-comité et que vous avez demandées.

    Comme je l'ai indiqué, mes questions sont en général très précises, parce que j'ai l'intention de proposer un certain nombre d'amendements très précis à discuter avec mes collègues, et qu'ils peuvent ou non accepter. Le problème, comme vous le savez, monsieur le ministre, puisque vous avez déjà fait partie de ce comité, c'est que lorsqu'on le considère ligne à ligne, il est très frustrant de lire ce projet de loi et très difficile de tout garder en tête.

    Je vais commencer par la page 22 de la déclaration conjointe. À la page 22 de vos remarques, au deuxième paragraphe, vous dites: « La définition d' « activité terroriste » cible les activités criminelles et non un groupe en particulier ». Je n'ai pas d'objection à cette phrase. La définition d'une activité terroriste, dans ce que j'appellerai (ii), décrit cinq situations. Par conséquent, j'aimerais savoir précisément si on peut caractériser toutes ces situations comme étant des descriptions d'actes criminels?

    Ce sont des questions précises et je serais content si les fonctionnaires y répondaient.

+-

    Le président: Pourquoi ne faisons-nous pas une liste de toutes ces questions et ne demandons-nous pas aux fonctionnaires de répondre après?

+-

    M. Tom Wappel: Cela ne fonctionne pas de cette façon. Je dois procéder par étape.

+-

    Le président: Très bien.

    Monsieur Cohen, j'imagine que vous voulez répondre à cela?

+-

    M. Stanley Cohen (avocat général principal, Section des droits de la personne, ministère de la Justice): Vous demandez si causer la mort ou des lésions corporelles graves par le recours à la violence constitue un acte criminel. La réponse est oui.

    Vous demandez si mettre en danger la vie d'une personne peut être un acte criminel. La réponse est oui.

    Si le fait de causer des dommages matériels à des biens privés ou publics est susceptible d'entraîner la conduite ou le tort dont il est question dans les paragraphes (a) et (c) dont nous parlons, cela peut également constituer un acte criminel.

    Le fait de perturber gravement ou de paralyser des services, installations ou systèmes essentiels, publics ou privés, sauf dans le cadre de revendications, de protestations, etc., est-il un acte criminel? Cela dépend de la façon dont les choses se déroulent, des circonstances de la cause et de l'importance des dommages causés. Cela finit bien par les mots suivants: « qui n'ont pas pour but de provoquer l'une des situations mentionnées aux divisions (A) à (C) ». Par conséquent, si on atteint le niveau de dommage qui peut avoir causé la mort ou des lésions corporelles graves, ou encore des dommages qui compromettent gravement la santé ou la sécurité de la population, oui, cela également peut représenter un acte criminel.

¼  +-(1800)  

+-

    M. Tom Wappel: Très bien, permettez-moi de poser la question différemment.

    Est-il envisagé que les descriptions contenues dans ces articles portent sur une infraction uniquement punissable par voie de déclaration sommaire de culpabilité?

+-

    M. Stanley Cohen: Pardon?

+-

    M. Tom Wappel: S'agissant des descriptions contenues dans cette définition, est-il envisagé qu'elles portent, dans quelque circonstance que ce soit, sur une infraction uniquement punissable par procédure sommaire plutôt que sur un acte criminel ou une infraction mixte?

+-

    M. Stanley Cohen: J'hésite à vous donner une opinion juridique là-dessus. Je peux vous répondre en termes généraux, mais, comme vous le savez, il existe en droit le concept de l'infraction incluse. Si le ministère public ne réussit pas à prouver l'existence d'un acte criminel, mais, qu'en même temps, il faut la preuve de l'existence d'une infraction incluse qui, de par sa nature, pourrait être punissable par procédure sommaire, il est possible qu'une personne soit condamnée pour infraction punissable par voie sommaire.

+-

    M. Tom Wappel: Si je pose cette question, c'est parce que, lorsque nous examinons la définition des infractions de terrorisme, le sous-alinéa 83.01(1)b)(ii)(C) nécessite que ce soit un acte criminel qui constitue également une activité terroriste.

    Je me demande simplement pourquoi on a établi cette distinction. Pourquoi, à la division (C), ne peut-on pas dire qu'une infraction terroriste inclut la définition de la perpétration d'une activité terroriste? Pourquoi faut-il que ce soit un acte criminel?

+-

    M. Stanley Cohen: Désolé, je ne suis pas le...

+-

    M. Tom Wappel: Est-ce que vous avez la division (C) sous les yeux?

+-

    M. Stanley Cohen: Oui.

+-

    M. Tom Wappel: Très bien. Donc, pour que ce soit une infraction de terrorisme, il faut que ce soit un acte criminel, en vertu de cette loi-ci ou de toute autre loi promulguée par le Parlement, pour lequel l'acte donnant lieu à l'infraction constitue également une activité terroriste. Je me demande pourquoi on a choisi cette définition plutôt que de dire simplement, à la division (C), que la perpétration d'une activité terroriste constituerait une infraction de terrorisme.

    Ce à quoi je veux en venir, c'est que toute activité terroriste doit certes être considérée comme une infraction de terrorisme, puisque, comme l'ont dit les ministres, la définition d'une activité terroriste cible toute activité criminelle.

+-

    M. Stanley Cohen: Si je vous comprends bien, vous dites que la définition de l'infraction a fait l'objet d'une prudence excessive et qu'essentiellement elle pourrait être simplifiée afin d'être plus accessible.

+-

    M. Tom Wappel: Je dis que cela pourrait être plus simple. Je ne vois pas pourquoi, si un acte est une activité terroriste par définition — ce qui, au dire même de la ministre, inclut une activité criminelle — cette activité terroriste n'est pas, par définition, une infraction de terrorisme.

+-

    M. Stanley Cohen: J'essaie quand même de comprendre ce qui découle de votre question.

+-

    M. Tom Wappel: Ne vous préoccupez pas de ce qui en découle, posez-vous seulement des questions sur la simplicité de la chose: pourquoi la perpétration d'une activité terroriste ne devrait-elle pas être considérée comme une infraction de terrorisme?

+-

    M. Stanley Cohen: Très bien. Vu autrement, ce qui découle entre autres choses de ce que vous dites, c'est que les infractions pénales graves sont toutes des infractions terroristes.

¼  +-(1805)  

+-

    M. Tom Wappel: Au contraire. Il y a une définition très précise — très précise, comme le ministre nous l'a déjà dit — de ce qui constitue une activité terroriste. Si cela est prouvé, pourquoi n'est-ce pas une infraction terroriste?

+-

    Le président: Je pense que nous devrions peut-être examiner la question que pose notre collègue et demander une réponse écrite. Cela serait-il acceptable?

+-

    M. Tom Wappel: Ce n'est qu'une question parmi de nombreuses autres, monsieur le président.

+-

    L'hon. Anne McLellan: Vos adjoints pourraient peut-être revenir et passer une ou deux heures avec le comité pour répondre à certaines des questions les plus techniques. Je suis sûre qu'ils se feraient un plaisir de le faire.

+-

    Le président: Oui, je...

+-

    M. Tom Wappel: Je veux bien poser des questions d'ordre plus général aux ministres, mais il s'agit de la seule occasion qui s'offre à nous, depuis la première comparution, pour aborder certains des détails techniques que j'espère pouvoir faire valoir à mes collègues.

+-

    Le président: Poursuivons et nous verrons bien à quoi nous aboutirons.

+-

    M. Tom Wappel: Je suppose qu'il ne me reste plus de temps.

+-

    Le président: Non, je vais vous laisser poursuivre. J'ai laissé tous les autres pousser leurs questions plus loin cet après-midi, et je tiens à être juste.

+-

    M. Tom Wappel: Très bien.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Un président permissif et juste.

+-

    Le président: Oui, tout à fait.

+-

    M. Tom Wappel: Nous passons à l'article 83.18 qui, comme nous le savons, traite de participer et de faciliter. Peut-on nous expliquer pourquoi le critère est double? Plus précisément, pourquoi une personne doit-elle participer « sciemment » et également « dans le but d'accroître la capacité de tout groupe terroriste de se livrer à une activité terroriste ou de la faciliter »? Pourquoi ne se contente-t-on pas de dire « sciemment »? Pourquoi y a-t-il deux exigences?

+-

    L'hon. Anne McLellan: Je crois que M. Cotler veut dire quelque chose à ce sujet.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Pour tout vous dire, ces infractions n'ont pas été conçues pour faciliter la poursuite. Elles visent plutôt à créer un seuil très sérieux pour la constitution de la preuve et une exigence en matière de poursuites. Ce qu'il faut faire, dans ce cas-ci, c'est tâcher d'établir ce qui constitue la mens rea, c'est-à-dire l'intention coupable. Il ne suffisait pas d'écrire « quiconque, sciemment, participe à une activité d'un groupe terroriste, ou y contribue, directement ou non, dans le but d'accroître la capacité de tout groupe terroriste de se livrer à une activité terroriste ou de la faciliter... ». Autrement dit, cela signifie que le ministère public doit, dans les faits, prouver les deux éléments de la mens rea ou de l'intention coupable pour établir la validité de la poursuite.

+-

    M. Tom Wappel: Mais l'expression « sciemment » ne suffit-elle pas à établir la mens rea ?

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Non, pour cette infraction, il ne suffit pas de dire  « sciemment ».

+-

    M. Tom Wappel: C'est discutable. J'estime que cela devrait suffire, parce que si vous faites une chose sciemment, vous en avez connaissance. Si vous savez qu'il s'agit d'une activité terroriste, vous avec manifestement l'intention coupable de contribuer à cette activité terroriste. Il ne faut pas qu'en outre vous ayez pour but d'accroître ou de faciliter la capacité d'agir. Enfin, nous pourrons en discuter longuement.

    Toujours dans le même article, revenons-en aux raisons pour lesquelles je pose des questions sur « l'infraction de terrorisme » et les « activités de terrorisme ». Au paragraphe (3), à l'alinéa c), on parle d'une infraction de terrorisme ». C'est pour cela que je demande pourquoi l' « activité terroriste » n'est pas incluse dans la définition d'une « infraction de terrorisme », parce que, dans ce cas-ci, si on recrute une personne en vue de faciliter ou de commettre une infraction de terrorisme, on est coupable d'un acte criminel en vertu de l'article 83.18. Par contre, si vous recrutez une personne en vue de faciliter ou de commettre une activité terroriste, vous n'êtes pas coupable d'un acte criminel en vertu de ce même article.

    Voici donc ma question: si vous recrutez une personne afin de faciliter ou de commettre une activité terroriste, quel est l'article de la Loi antiterroriste auquel vous contrevenez?

+-

    L'hon. Anne McLellan: Si vous recrutez, c'est du recrutement.

+-

    M. Stanley Cohen: Voulez-vous que je réponde à cela?

¼  +-(1810)  

+-

    L'hon. Anne McLellan: Oui, allez-y.

+-

    M. Stanley Cohen: Il est concevable que vous contreveniez à un très grand nombre de dispositions de la Loi antiterroriste. Chaque fois que vous contribuez à la perpétration d'une activité terroriste ou que vous la facilitez, la forme particulière de facilitation à laquelle vous participez peut constituer une infraction.

    Nous parlons d'une forme de participation qui n'est pas nécessairement la perpétration en bonne et due forme, mais le fait d'offrir de l'aide ou de contribuer à la capacité d'autres personnes de commettre des infractions. Il se peut que, de façon plus précise, ce soit une violation des dispositions sur le financement du terrorisme. Cela peut être une violation d'une disposition sur une autre forme d'activité terroriste qui constitue une infraction directe compromettant la sécurité de la population.

+-

    M. Douglas Breithaupt (avocat conseil, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice): Cela peut également inclure la partie antérieure de la définition d'infraction de terrorisme, c'est-à-dire « acte criminel visé par la présente loi ou par une autre loi fédérale et dont l'élément matériel — acte ou omission — constitue également une activité terroriste », parce que cette définition est importée dans cette disposition.

+-

    M. Tom Wappel: Oui, mais nous connaissons déjà la définition d'« activité terroriste » ou nous savons plutôt que l'expression « activité terroriste » n'est pas incluse dans la définition d'une « infraction de terrorisme ». C'est uniquement s'il s'agit d'un acte criminel, je suppose.

    Si vous défendez cette formulation, pourquoi ne pas inclure « recruter une personne en vue de faciliter ou de commettre une infraction de terrorisme ou une activité terroriste »? Je suis sûr que la plupart des Canadiens pensent que, si vous recrutez quelqu'un pour faciliter ou commettre une activité terroriste, cela devrait être interdit par la loi. Si cette disposition traite en particulier de recruter pour une « infraction de terrorisme », pourquoi ne vise-t-elle pas également le fait de recruter pour une « activité terroriste »?

+-

    M. Stanley Cohen: Ce qui figure à l'article 83.18 est une infraction en soi. On ne devrait pas supposer qu'on ne peut être coupable d'avoir commis l'infraction prévue au paragraphe 83.18(1) et qu'on est donc « passible d'un emprisonnement maximal de dix ans ». Cela veut dire que quiconque participe à une activité de cette façon-là, quiconque, sciemment, participe à une activité d'un groupe terroriste, ou y contribue, directement ou non — et cela devrait être précisé dans l'acte d'accusation — dans le but d'accroître la capacité de tout groupe terroriste de se livrer à une activité terroriste — telle qu'elle est définie — ou de la faciliter est coupable d'un acte criminel. Il s'agit donc d'une disposition qui, en soi, crée une infraction. Elle n'est pas simplement là pour aider à interpréter d'autres parties du Code criminel.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Je ne veux pas compliquer les choses encore plus, Tom, mais lorsqu'on en arrive à la question des transferts, tout d'abord, on doit se rendre compte que toute la méthode d'établissement des infractions visait à répondre également aux mandats onusiens établis à l'époque dans la résolution 1373 du Conseil de sécurité de l'ONU. Cette résolution demandait à tous les États signataires — et c'est peut-être une façon de mieux comprendre les choses — de criminaliser l'activité délibérée de collecte de fonds servant à commettre des actes terroristes; de s'abstenir d'apporter quelque forme d'appui que ce soit aux entités ou personnes impliquées dans des actes de terrorisme, ce qui inclut la formation, etc.; de prendre les mesures voulues pour empêcher que des actes de terrorisme ne soient commis, y compris les actes inclusifs; veiller à ce que les actes terroristes soient érigés en infractions graves dans la législation et la réglementation nationales et à ce que la peine infligée soit à la mesure de la gravité de ces actes; se prêter mutuellement la plus grande assistance lors des enquêtes criminelles et autres procédures portant sur les actes de terrorisme... et je pourrais poursuivre longtemps.

    Ce qui se passe donc, c'est que la loi, pour répondre à ces directives, a effectivement inclus la plupart d'entre elles dans son texte. Elle a établi toute une série de nouvelles infractions graves, dont les plus importantes portent en fait sur le financement du terrorisme, ce qui inclut tant la définition des activités terroristes que des groupes terroristes telle qu'elle figure dans la loi.

    Nous avons donc créé des infractions concernant la collecte et l'offre de fonds pour les fins des activités terroristes. On voit cela aux articles 83.02, 83.03, 83.04, etc. Participer ou contribuer à des activités terroristes ou les faciliter, comme vous l'avez dit, à l'article 83.18, sous réserve de l'article  83.1; donner des instructions à quiconque pour commettre des activités terroristes, à l'article 83.12, sous réserve de l'article 83.22; donner asile ou cacher un terroriste, article 83.23, etc.

+-

    M. Tom Wappel: Excusez-moi, monsieur le ministre, mais j'ai peu de temps. Je ne veux pas lancer un débat, je veux simplement poser des questions.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Je conclurai donc sur ce qui suit. J'ignore si cela vous éclairera ou vous embrouillera.

    La définition de terrorisme renvoie non seulement à ces nouvelles infractions créées à la partie II du Code criminel en réponse à la demande de l'ONU. Cette définition peut inclure tout acte criminel prévu par une loi fédérale au profit ou sous la direction d'un groupe terroriste ou en association avec lui, ainsi que tout acte criminel que représente l'acte ou l'omission constituant une activité terroriste. Cette approche englobante vise justement à ce que ne soit négligée aucune des choses que vous avez mentionnées.

¼  +-(1815)  

+-

    M. Tom Wappel: D'accord, mais voici ce qui sème la confusion dans mon esprit: l'article 83.19 crée l'infraction de facilitation d'une activité terroriste, qui est passible d'un emprisonnement maximal de 14 ans. Mais si vous facilitez une infraction de terrorisme, la peine est de dix ans d'emprisonnement. Il semble donc qu'une activité terroriste est moins odieuse qu'une infraction de terrorisme. Je suis donc curieux de savoir pourquoi une activité terroriste n'est pas considérée comme une infraction de terrorisme.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Je vais céder la parole à mes collaborateurs, mais je peux vous dire que c'est moi qui ai proposé, à ce sujet, qu'on inclue le mot « sciemment », mais je ne me suis alors pas demandé quelle était la peine d'emprisonnement prévue. Peut-être que les fonctionnaires pourront vous dire pourquoi...

+-

    Le président: Je vais devoir...

+-

    M. Tom Wappel: Je suis désolé, monsieur le président...

+-

    Le président: Pas du tout, vos questions sont très pertinentes. Je vais demander aux fonctionnaires de bien vouloir répondre, puis je céderai la parole à M. Sorenson.

+-

    M. Stanley Cohen: Je vais vous donner une réponse générale et si je peux vous donner plus d'information, je le ferai certainement.

+-

    Le président: Ce serait formidable.

+-

    M. Stanley Cohen: Les infractions créées aux articles 83.18 et suivants prévoient une gradation de peine proportionnelle à la gravité de l'activité; voilà ce qu'était notre intention. Ainsi, celui qui participe à une forme indirecte de terrorisme est coupable, mais seulement passible — et je dis « seulement », bien que ce soit des peines graves — de dix ans d'emprisonnement. Un peu plus loin, l'activité de charger une personne de se livrer à une activité pour un groupe terroriste ou d'héberger ou de cacher un terroriste entraîne des peines plus lourdes car ce sont là des infractions qui sont plus susceptibles d'être commises par les dirigeants.

    Nous avons conçu cette partie de la loi ainsi de façon à ce qu'il y ait une gamme croissante de peines qui reflètent la gravité des crimes.

+-

    Le président: Merci.

    Allez-y, monsieur.

+-

    M. Douglas Breithaupt: Très brièvement, les moyens de défense sont conçus en fonction de la participation à l'aide apportée à un groupe ou à une activité terroriste. Ainsi, l'article 83.18 criminalise le fait de participer sciemment à une activité d'un groupe terroriste ou d'y contribuer dans le but d'accroître la capacité du groupe terroriste de se livrer à une activité terroriste ou de la faciliter; alors que l'article 83.19 met plutôt l'accent sur la facilitation d'une activité terroriste.

    De même, l'article 83.21 porte sur le fait de charger une personne de se livrer à une activité pour un groupe terroriste, alors que l'article 83.22 porte sur le fait de charger une personne de se livrer à une activité terroriste.

    On voit la même symétrie dans la définition originale d'infraction de terrorisme, que vous avez portée à notre attention; l'alinéa b) dit qu'une infraction de terrorisme est tout « acte criminel — visé par la présente loi ou par une autre loi fédérale — commis au profit ou sous la direction d'un groupe terroriste ou en association avec lui » et est donc centré sur le groupe terroriste, tandis que l'alinéa c) dit qu'une infraction de terrorisme est tout « acte criminel visé par la présente loi ou par une autre loi fédérale et dont l'élément matériel — acte ou omission — constitue également une activité terroriste », centré sur l'activité comme telle.

    Les autres infractions ont donc été rédigées en fonction de ces deux dispositions.

+-

    M. Tom Wappel: Si commettre une activité terroriste ou faciliter une activité terroriste est si odieux, pourquoi n'est-ce pas une infraction de terrorisme comme telle? Cette question n'appelle pas de réponse. Je vous laisse y réfléchir.

+-

    Le président: D'accord.

    Monsieur Sorenson, vous avez la parole.

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, PCC): Merci, monsieur le président.

    Ces questions de nature technique sont très pertinentes, à mon avis. Nous attendrons avec impatience toute réponse écrite à toute question qui vient d'être posée.

    Aux fins du compte rendu, j'aimerais poursuivre dans le même ordre d'idées que M. Comartin, qui a abordé les travaux de notre comité. J'estime qu'au cours des derniers mois, des nombreux derniers mois, tous les membres du comité ont travaillé avec la meilleure attitude possible. Nous avons fait l'impossible pour nous réunir quand nous le pouvions. Nous nous sommes réunis pendant l'été. Nous avons passé une semaine ici alors que nous aurions dû être chez nous, dans nos circonscriptions, et nous avons travaillé très fort à cette étude.

    Voilà que lundi, un article de journal dit ceci:

    Le gouvernement fédéral envisage de demander à des avocats de surveiller les audiences à huis clos pour les présumés terroristes détenus sans procès pour une période indéterminée.

    The Citizen a appris que la ministre fédérale de la Sécurité publique, Anne McLellan, préconise ce compromis afin d'apaiser les critiques qui font valoir que cette procédure judiciaire secrète est injuste pour les accusés et contraire aux traditions et principes d'ouverture de la démocratie libérale qu'est le Canada.

    Dans le Ottawa Citizen d'hier, un article de James Gordon dit ceci:

    La ministre a défendu le bilan du pays sur toute une gamme de questions controversées — allant du profilage racial à la liste des entités terroristes — et a déclaré aux sénateurs que la loi demeurait la pierre angulaire de la lutte antiterroriste et permettait à la fois d'assurer la sécurité des Canadiens et de protéger les droits de la personne.

    Elle a déclaré que le gouvernement n'abrogerait pas la loi et qu'il n'invoquerait pas non plus la disposition de temporarisation pour supprimer les dispositions les plus dures.

    Si ces citations sont justes, je suis d'accord avec M. Comartin pour dire qu'une bonne part du travail de notre comité n'a plus aucune pertinence. Il m'est arrivé, quand je siégeais à d'autres comités, qu'à la veille du dépôt de notre rapport, le ministre décrive publiquement ce qu'il avait l'intention de faire, peu importe le contenu de notre rapport. Cette fois-ci, la ministre fait ses déclarations avant même que notre rapport ne soit déposé.

    Si vous avez été bien citée, il est évident que notre travail est maintenant en grande partie sans pertinence car il semble que vous ayez déjà conclu qu'en matière de droits de la personne, c'est une approche équilibrée et qu'en matière de sécurité, c'est une approche équilibrée, que les choses sont très bien comme elles sont, peu importe ce que dira le comité dans son rapport.

    J'aimerais donc d'abord savoir pourquoi vous avez jugé nécessaire d'annoncer vos intentions publiquement et de ne pas attendre notre rapport.

    Par ailleurs, comme j'ai peu de temps, j'aimerais vous poser tout de suite une autre question à laquelle je sais que vous répondrez. Elle porte plutôt sur le processus. Si le SCRS décide d'inscrire une organisation sur la liste des entités terroristes et que vous, madame la ministre, décidez qu'en dépit de cette décision du SCRS, cette organisation ne figurera pas sur la liste, votre décision est-elle examinée par qui que ce soit? Je sais que c'est le Cabinet qui décide de faire figurer une organisation sur la liste des entités terroristes, mais toute décision de rejeter la recommandation du SCRS peut-elle faire l'objet d'un examen par quiconque? Existe-t-il une forme d'appel?

¼  +-(1820)  

+-

    L'hon. Anne McLellan: Je répondrai aux deux questions et le ministre de la Justice voudra peut-être répondre aussi à la première question.

    S'il était décidé de ne pas inscrire sur la liste des entités terroristes une organisation particulière, c'est le Comité permanent du Cabinet sur la sécurité publique, la sécurité nationale et la protection civile qui se pencherait sur cette décision. Ce comité comprend une dizaine de membres à temps plein, des collègues qui dirigent des ministères qui s'occupent directement de sécurité nationale, de sécurité publique et de protection civile. Mais vous savez, quand le SCRS nous recommande d'inscrire une organisation sur la liste des entités terroristes, nous prenons ce conseil très au sérieux, et le SCRS témoigne d'ailleurs devant ce comité du Cabinet pour y présenter ses preuves. Le comité tient ensuite une discussion exhaustive et formule ses recommandations au Conseil du Trésor. En dernière analyse, c'est le Conseil du Trésor qui prend...

+-

    M. Kevin Sorenson: Les recommandations de ce groupe...

+-

    L'hon. Anne McLellan: Si on recommande d'inscrire l'organisation sur la liste....

+-

    M. Kevin Sorenson: Est-ce que les preuves et constatations sont présentées par écrit...

¼  +-(1825)  

+-

    L'hon. Anne McLellan: Le Conseil du Trésor...

+-

    M. Kevin Sorenson: Le Conseil du Trésor?

+-

    L'hon. Anne McLellan: C'est au Conseil du Trésor qu'on recommande d'inscrire une entité sur la liste.

+-

    M. Kevin Sorenson: Oui, je comprends, mais là n'est pas ma question. Si vous décidez de ne pas inscrire une organisation...

+-

    L'hon. Anne McLellan: On en discute au sein du Comité permanent du Cabinet sur la sécurité publique et la protection civile.

+-

    M. Kevin Sorenson: Combien de membres compte ce comité?

+-

    L'hon. Anne McLellan: Une dizaine de membres. Tous les ministres qui ont des responsabilités en matière de sécurité publique, de sécurité nationale et de protection civile y siègent.

+-

    M. Kevin Sorenson: Je vais reformuler ma question. Parce que ce comité peut décider... Ces décisions constituent des secrets du Cabinet et nous comprenons pourquoi les secrets du Cabinet restent secrets, mais si on décide de ne pas inscrire une organisation sur la liste des entités terroristes non pas pour des raisons de sécurité nationale mais pour des raisons politiques, quelqu'un pourra-t-il prendre connaissance de cette décision et l'examiner?

+-

    L'hon. Anne McLellan: Non, aucun examen judiciaire officiel n'est prévu, car la décision de ne pas inscrire une organisation sur la liste n'a pas d'incidence sur les droits, les obligations ou les responsabilités de ce groupe. Il n'y a donc pas d'examen judiciaire, mais, en revanche, des examens sont prévus dans les cas où une organisation est inscrite sur la liste, car cela pourrait notamment influer sur le traitement qu'on vous réservera aux termes de la Loi sur l'enregistrement des organismes de bienfaisance ou d'autres lois.

    Pour répondre à votre première question, permettez-moi d'abord de préciser certaines choses. Premièrement, en ce qui concerne l'article qui est paru dans les journaux et que vous avez cité, quand le ministre Cotler et moi avons témoigné devant le comité sénatorial, j'ai clairement affirmé que j'y étais mal citée. En fait, aucune décision n'a été prise concernant les certificats de sécurité — qui, je le répète, n'ont rien à voir avec la Loi antiterroriste.

    Les certificats de sécurité relèvent d'une autre loi, et nous n'avons encore pris aucune décision à ce sujet. Nous estimons respecter entièrement toutes les lois canadiennes et internationales. Mais nous attendons avec impatience les décisions de la Cour suprême et les recommandations des deux comités parlementaires sur tout changement qui pourrait s'imposer. Je crois avoir été très claire à ce sujet quand j'ai comparu avec le ministre Cotler devant le comité sénatorial.

    En ce qui concerne notre témoignage de cet après-midi, nous représentons le gouvernement du Canada. Il nous apparaît important de vous dire en personne que le gouvernement du Canada juge essentiel le maintien de la Loi antiterroriste compte tenu des menaces nationales et mondiales. Pourquoi ne serions-nous pas honnêtes avec vous? Nous ne préconisons pas l'abrogation de la loi, car il est pour nous essentiel que le Canada ait une Loi antiterroriste qui protège les Canadiens, et qui prévienne les actes terroristes et qui nous aide à défendre nos alliés.

    En ce qui a trait à des modifications possibles à la loi, nous avons dit clairement que nous sommes ouverts à toute suggestion et que nous examinerons toutes les recommandations que formuleront les deux comités parlementaires.

+-

    M. Kevin Sorenson: Mais si, à vos yeux, la Loi antiterroriste est la pierre angulaire du régime...

+-

    L'hon. Anne McLellan: C'est exact.

+-

    M. Kevin Sorenson: ... et que vous avez trouvé le juste équilibre entre la sécurité et les droits de la personne, à quoi sert cette étude? C'est la question de savoir si oui ou non la Loi antiterroriste a mené à des violations des droits de la personne qui est au coeur de toutes nos discussions. C'est un des principaux éléments...

+-

    L'hon. Anne McLellan: Et le gouvernement a une position à ce sujet. Nous, à titre de représentants du gouvernement, vous avons dit que nous estimons avoir trouvé le juste équilibre. Toutefois, vous et vos homologues du Sénat avez le droit, vous avez même la responsabilité législative, de nous faire part de vos vues que nous prendrons très au sérieux. Comme je l'ai dit au Sénat, il est fort possible qu'il nous faille renforcer la loi, comme d'autres pays semblent faire, en nous fondant sur vos recommandations. Nous sommes donc tout à fait prêts à écouter vos recommandations.

    Irwin, vouliez-vous ajouter quelque chose?

+-

    Le président: C'est le ministre de la Justice qui aura le dernier mot.

+-

    L'hon. Irwin Cotler: Si vous me le permettez, je vais commencer par vos mots et par mes premiers et derniers mots qui y sont reliés.

    Je comprends le sentiment de frustration lorsqu'on siège à un comité et qu'on se demande si ce que l'on va examiner ou recommander finira par voir le jour pour commencer, et maintenant, ce qui inquiète M. Wappel, si une élection peut interrompre cet examen, il ne sera donc pas possible de faire rapport, etc. Vous savez ce que je veux dire. Je comprends donc cette préoccupation. Je n'avais pas cela lorsque j'ai siégé au comité, mais c'est une préoccupation.

    Permettez-moi de passer à l'autre question, au sujet de la proposition de recommandations. À cet égard, je vais dire d'abord deux choses que j'ai dites au début.

    J'ai commencé par vous remercier pour les longues heures de dur travail. Ce sont les premières paroles que j'ai prononcées aujourd'hui, car je sais ce que c'est que de siéger à ce comité, d'étudier et d'examiner la loi. Elle n'est pas facile à lire. Elle est parfois difficile à comprendre. Donc, j'ai dit que cet examen n'était pas seulement mandaté par l'article 145 de la loi de façon officielle; comme je l'ai dit, il est bien accueilli par le gouvernement et très apprécié des Canadiens. C'est la première chose que je voulais dire.

    Ensuite, j'ai dit que votre examen veille à ce que les meilleures intentions et la meilleure étude parlementaire se reflètent dans la meilleure loi possible. Nous venons ici en fait pour vous demander de bien faire cette étude et cette enquête.

    Or, les juges Iacobucci et Louise Arbour ont dit quelque chose d'intéressant par rapport à ce que ma collègue a dit. Ils ont dit: « Le défi pour les démocraties » — et c'est ce par quoi j'ai commencé également — « dans la lutte contre le terrorisme n'est pas de savoir s'il faut réagir, mais plutôt de déterminer comment il faut le faire ». Je suis d'accord avec cela. La question n'est pas de savoir s'il faut ou non avoir une loi antiterroriste. Très souvent, vous savez, lorsqu'on a été professeur de droit on a des principes différents. Faux. Vous pouvez regarder ce que j'ai écrit dans les années 90. J'ai dit à l'époque que nous avions besoin d'une loi antiterroriste. Je n'ai pas changé d'avis. Je crois dans la validité d'une loi antiterroriste.

    Je pense que la question de savoir si on a un juste équilibre est quelque chose que votre comité a examiné et examinera, mais je veux dire quelque chose au sujet de cette question d'équilibre — et c'était la première chose. Lorsqu'on parle de la protection de la sécurité et de la protection des droits, on ne peut pas dire que c'est l'un ou c'est l'autre. C'est pour cette raison qu'en ce qui a trait à la protection de la sécurité humaine, j'ai voulu inclure à la fois la sécurité nationale et les droits de la personne.

    Il y a une autre chose. Nous devons faire attention à la sagesse conventionnelle qui dit parfois que ceux qui sont contre la Loi antiterroriste sont tous des défenseurs des libertés civiles et que tous ceux qui sont pour la Loi antiterroriste sont en quelque sorte contre les défenseurs des libertés civiles. Il y a de bons défenseurs des libertés civiles des deux côtés de la question. Il faut trouver un juste équilibre à cet égard.

    Je vais maintenant conclure avec la dernière chose que je vous ai dite.

    J'ai dit, monsieur le président, que cette loi avait été rédigée avec soin et était fondée sur des principes clairs, mais n'était pas coulée dans le béton. Nous serons heureux de connaître les résultats de vos délibérations et nous tiendrons sérieusement compte de toutes vos recommandations. Nous sommes convaincus que grâce à votre contribution éclairée, cette loi continuera de faire ce qu'elle devait faire, c'est-à-dire aider à protéger les lois et les libertés de tous les Canadiens.

    Il ne serait pas possible de dire plus clairement que nous sommes ouverts à toutes les recommandations que vous pourriez faire, à l'exception d'une, franchement, à l'exception d'une. Nous ne sommes pas venus ici pour vous dire que la loi devrait être abrogée. Nous sommes ici pour écouter toute recommandation sur la façon de l'améliorer. Si je disais que la loi devrait être abrogée — non pas en tant que ministre de la Justice — cela irait à l'encontre de ce que j'ai écrit et de ce en quoi j'ai cru pendant toutes ces années avant de devenir député ou ministre.

    Je crois donc dans la validité d'une telle loi. La question n'est pas de savoir si nous devrions avoir une loi, mais quel genre de loi nous devrions avoir, et vous pouvez nous aider à cet égard.

¼  -(1830)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Au nom de mes collègues, je voudrais remercier les deux ministres en leur disant que nous apprécions beaucoup qu'ils aient accepté de rester une heure de plus. Je pense que cela montre bien leur intérêt à s'assurer que nous faisons un examen détaillé.

    Chers collègues, comme vous le savez, nous allons poursuivre la séance à huis clos pour donner des directives relatives à la rédaction du rapport; nous allons donc suspendre la séance pour cinq minutes, afin de donner aux gens le temps de sortir de la salle.

    Encore une fois, merci beaucoup.

    Je voudrais également faire une observation au sujet de M. Wappel.

    Vous avez exprimé un intérêt pour des questions d'ordre technique en ce qui a trait au ministère de la Justice. Monsieur Wappel, si vous avez des questions de cette nature, l'attaché de recherche ou la greffière pourrait les faire parvenir aux hauts fonctionnaires. Je suppose, puisque vous me signifiez votre accord d'un signe de tête, que vous nous ferez parvenir cette information.

+-

    M. Tom Wappel: C'est exact.

-

    Le président: Très bien, merci beaucoup. Nous suspendons la séance.

    [La séance se poursuit à huis clos.]