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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent des finances


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le vendredi 4 novembre 2005




À 1015
V         Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.))
V         M. Mark Jamison (membre, Comité directeur et directeur général de Magazines Canada, Canadian Arts Coalition)
V         M. Robert H. Thomson (acteur et directeur, Directeur artistique de Shakespeare Works, Canadian Arts Coalition)

À 1020
V         Le président
V         M. Robert H. Thomson
V         Le président
V         M. Guy Mayson (président et directeur général, Association canadienne de production de films et de télévision)

À 1025
V         M. Stephen Ellis
V         M. Guy Mayson
V         M. Stephen Ellis

À 1030
V         M. Guy Mayson
V         M. Stephen Ellis
V         Le président
V         M. John McAvity (directeur général, Association des musées canadiens)

À 1035
V         M. Cal White (président, Association des musées canadiens)

À 1040
V         Le président
V         M. Cal White
V         Le président
V         Mme Brigitte Kitchen (professeure, Travail social, Université York, Centre for Social Justice)

À 1045
V         M. Murray Cooke (associé en recherche, Centre for Social Justice)

À 1050
V         Le président
V         M. Murray Cooke
V         Le président
V         Victor Wong (directeur général, Conseil national des canadiens chinois)

À 1055
V         Mme Christine Li (exécutif national, Conseil national des canadiens chinois)

Á 1100
V         Le président
V         M. James Fleck (président, Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada)
V         Le président
V         M. James Fleck
V         Le président
V         M. James Fleck
V         Mme Billie Bridgman (présidente et chef de la direction, Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada)
V         M. James Fleck

Á 1105
V         Mme Billie Bridgman
V         M. James Fleck
V         Mme Billie Bridgman
V         M. James Fleck
V         Le président
V         Mme Alana Wilcox (présidente, Conseil d'administration, Literary Press Group of Canada)

Á 1110
V         Le président
V         Mme Bev Oda (Durham, PCC)

Á 1115
V         M. Mark Jamison
V         Mme Bev Oda
V         M. Mark Jamison
V         M. James Fleck
V         Mme Bev Oda
V         M. Robert H. Thomson

Á 1120
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD)
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         Le président
V         M. Robert H. Thomson
V         M. James Fleck
V         M. John McAvity

Á 1125
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         M. Murray Cooke
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         M. Victor Wong
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         M. Victor Wong
V         Le président
V         L'hon. John McKay (Scarborough—Guildwood, Lib.)
V         M. James Fleck
V         L'hon. John McKay

Á 1130
V         M. Victor Wong
V         L'hon. John McKay
V         M. Victor Wong
V         L'hon. John McKay
V         M. Victor Wong
V         L'hon. John McKay

Á 1135
V         M. Guy Mayson
V         L'hon. John McKay
V         M. Stephen Ellis
V         M. Massimo Pacetti
V         Mme Alana Wilcox
V         Le président
V         Mme Alana Wilcox
V         Le président










CANADA

Comité permanent des finances


NUMÉRO 144 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 4 novembre 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

À  +(1015)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)): Bonjour. Nous sommes ici dans le cadre des consultations prébudgétaires 2005, conformément à l'article 83.1 du Règlement. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir nous présenter vos mémoires.

    Voici comment nous allons procéder : je vais vous allouer sept ou huit minutes pour votre déclaration préliminaire. J'apprécierais que vous respectiez cette limite de temps parce que les membres du comité vont vouloir vous poser des questions. Je voudrais bien que nous nous en tenions à l'horaire prévu. Nous sommes déjà un peu en retard.

    Donc, si nous pouvons commencer tout de suite, nous allons entendre M. Jamison, de la Coalition canadienne des arts. Allez-y.

+-

    M. Mark Jamison (membre, Comité directeur et directeur général de Magazines Canada, Canadian Arts Coalition): Merci.

    Bonjour. Je m'appelle Mark Jamison et je suis directeur général de Magazines Canada. Nous vous remercions de nous avoir permis d'être ici ce matin.

    J'ai comparu devant votre comité à Winnipeg au sujet de questions touchant les magazines, mais nous sommes ici aujourd'hui au nom de tous les artistes canadiens et de tous les organismes artistiques et culturels du pays, qui ont formé une coalition pour attirer l'attention sur la nécessité d'investir dans le Conseil des Arts du Canada.

    Je suis en compagnie d'un de nos plus grands artistes de la scène et du grand écran, dont la carrière très riche nous a aidés, nous les Canadiens, à mieux nous connaître. R.H. Thomson est en train de tourner un film de fiction politique dans lequel il tient le rôle de James Cross. Évidemment, nous le connaissons aussi pour son incarnation du Dr Frederick Banting et sa contribution à la populaire série Les contes d'Avonlea. Il est aussi un des instigateurs de Shakespeare Works, une expérience théâtrale qui vise à éveiller l'imagination des jeunes, ici même à Toronto.

    Robert.

+-

    M. Robert H. Thomson (acteur et directeur, Directeur artistique de Shakespeare Works, Canadian Arts Coalition): Bonjour. Merci de nous recevoir. J'avais une première hier soir, alors je ne suis pas tout à fait au sommet de ma forme, mais comme vous vous êtes levés avant moi, vous avez toute ma sympathie.

    La semaine dernière, 70 artistes, administrateurs et cadres du domaine artistique se sont rendus à Ottawa pour rencontrer des députés et des fonctionnaires en vue de discuter d'une augmentation de 5 $ par habitant pour le Conseil des Arts du Canada, ce qui équivaut à peu près, je dirais, à deux cafés et un beigne.

    Je ne sais pas si je devrais vous parler de l'importance des arts au Canada. Je ne sais pas. Pour moi, c'est évident, mais pour d'autres, ce n'est pas aussi clair. Il y a une chose que je dois dire, cependant; c'est qu'il faut féliciter chaudement le gouvernement libéral pour son initiative concernant l'instrument culturel que constitue le traité sur la diversité dans les arts, qui vient d'être adopté à l'UNESCO par 149 voix contre 2, ce qui est absolument renversant. C'était une idée du Canada, que le gouvernement libéral a adoptée et défendue. Donc, le Parti libéral a fait un excellent... Je sais que le NPD fait un excellent travail aussi, tout comme les Conservateurs. Tout le monde fait de l'excellent travail!

    Des voix: Ah, ah!

    M. R.H. Thomson: Il s'agit d'une initiative internationale que nous n'espérions pas voir adoptée, à savoir un traité selon lequel la diversité des cultures de chaque nation est absolument essentielle, à tel point qu'elle ne peut pas être soumise aux règles du jeu commercial. C'est une réalisation extraordinaire, pilotée par des Canadiens et en particulier par le Parti libéral du Canada. Donc, nous en sommes très contents.

    Que pourrais-je dire d'autre au sujet de l'importance des arts au Canada? On lit des livres canadiens dans le monde entier; on entend de la musique canadienne dans le monde entier.

    En fait, la station de métro de la rue Bathurst est le meilleur exemple que je puisse vous citer sur l'importance des arts dans la vie des gens. Il y a cinq ans, cette station était un repaire de gangs, et elle grouillait de policiers et d'agents de la TTC — la commission de transports de Toronto. C'était un endroit difficile. La TTC devait dépenser de l'argent pour y faire régner l'ordre. Aujourd'hui, il n'y a plus de gangs là-bas, les policiers n'y sont plus nécessaires, et on y entend du Shostakovitch, du Tchaïkovski, du Strauss et du Mozart à l'intercom, ce qui me fait croire que les arts ont une influence civilisatrice. Ils apportent l'ordre et ils ont permis à la TTC d'économiser de l'argent parce qu'elle n'a plus besoin d'embaucher des policiers pour patrouiller la station de métro. Cette musique classique n'encourage pas les activités des gangs, ce qui en dit long sur les arts, à mon avis.

    Nous savons que 90 p. 100 des Canadiens croient que les arts améliorent la qualité de vie dans leur communauté, et nous savons aussi que 96 p. 100 des parents canadiens veulent que les arts fassent partie de l'éducation de leurs enfants. Donc, c'est important.

    Nous pensons également que les arts, au Canada, constituent un mécanisme d'inclusion qui rapproche les cultures et qui nous permet de nous faire connaître aux autres. Je peux vous donner un exemple. J'ai fait une tournée avec Tafelmusik. C'est un orchestre baroque de Toronto. Son siège social est tout près d'ici. Nous sommes allés dans le Nord de l'Ontario, et un des meilleurs concerts... Nous avons fait cette tournée avec une série de légendes grecques intitulée Metamorphosis, sur la transformation des humains en d'autres créatures. Nous avons présenté ces légendes en tournée, et nous avons donné un de nos concerts les plus mémorables à l'île Manitoulin, dans la réserve de Wikwemikong. Les jeunes de la première nation ont présenté leurs propres légendes de transformation, après quoi l'orchestre de Toronto, Tafelmusik, a présenté les mythes grecs. Ce genre d'échanges stimulants entre deux cultures, entre toutes les différentes cultures qui se réunissent de cette façon, c'est ce qui fait notre pays. C'est ce qui fait une nation. C'est l'expérience qui nous permet de grandir, et de bâtir notre identité avec beaucoup de succès.

    Bon, je vais poursuivre parce que je n'ai que cinq minutes.

    Les arts sont aussi une sorte d'infrastructure pour moi, parce que l'infrastructure d'un pays, ce sont ses routes, ses hôpitaux et ses écoles, et ce sont aussi les arts. Si nous voulons une infrastructure dans le domaine des arts, il faut investir. Il est important d'investir dans ce genre d'infrastructure. Les retombées sont énormes. L'industrie culturelle suscite une activité économique de 39 milliards de dollars, et elle emploie plus de 600 000 personnes. Donc, c'est un important moteur d'emploi.

    Le Conseil des Arts du Canada est l'organisme dont nous voulons voir le budget augmenter de deux cafés et d'un beigne par habitant. À mon avis, 5 $ par Canadien, c'est vraiment minuscule. Cela représente 155 millions, ce qui est minuscule aussi. Il ne s'agit pas de faire la charité aux artistes; c'est de l'argent qui permettrait de lancer des milliers et des milliers de projets et d'organismes artistiques. Et c'est un moyen très efficace de se servir des fonds publics pour favoriser des aventures beaucoup plus vastes, si je puis dire.

    Le Conseil des Arts a aujourd'hui 50 ans, et il s'apprête à entreprendre une deuxième étape de 50 ans. Pour les artistes comme moi, il est temps de dire : «Passons à l'étape suivante parce que nous avons très bien réussi pendant les 50 prochaines années. » Les arts et les artistes ont connu une croissance exceptionnelle, et le Conseil des Arts est tellement sollicité qu'il doit refuser de trop nombreuses demandes.

À  +-(1020)  

    Mais les artistes et les organismes artistiques sont aussi dans ce que j'appelle le « mode survie » en ce moment. Nous faisons des bilans de survie. C'est essentiel : quand on survit comme organisation, c'est tant mieux. Eh bien, non, ce n'est pas suffisant. Nous savons que nous pouvons faire tellement mieux!

    Donc, les 50 premières années du Conseil des Arts du Canada ont été une période de construction et de survie. Nous entrons maintenant dans la deuxième étape, celle de l'essor, et nous savons que nous pouvons y arriver parce que nos artistes se font voir et entendre partout dans le monde. Les arts sont aussi, sur la scène internationale, les ambassadeurs du Canada.

    Bon. Je continue. Que puis-je dire?

    Nous voulons que vous envisagiez de donner au Conseil des Arts les 5 $ supplémentaires — soit deux cafés et un beigne — par personne. Comme c'est une organisation efficace, vous devriez passer par le Conseil des Arts.

    Quand je travaillais au traité sur la culture qui a été adopté à l'UNESCO, je parlais souvent à de jeunes artistes de Corée du Sud, de Namibie, de Thaïlande, qui voyaient le Canada comme un modèle idéal. Ils me disaient : « Comment faites-vous? Comment les choses fonctionnent-elles, chez vous? » Nous leur décrivions comment fonctionnent le Conseil des Arts du Canada et les différents organismes qui subventionnent les arts, et ils n'en revenaient pas. Nous encouragions leurs gouvernements à signer le traité de l'UNESCO, et ils nous disaient : « Eh bien, pouvez-vous nous dire comment vous financez les arts? Vous avez tellement bien réussi, dans un pays aussi diversifié. » À cet égard-là, le Conseil des Arts est un modèle absolu d'efficacité pour encourager les projets artistiques dans tout le pays.

    Donc, deux cafés et un beigne nous permettront de passer à la prochaine étape. Merci.

+-

    Le président: Que diriez-vous d'un café et deux beignes?

+-

    M. Robert H. Thomson: D'accord.

+-

    Le président: Nous entendrons maintenant M. Mayson, de l'Association canadienne de production de films et de télévision.

+-

    M. Guy Mayson (président et directeur général, Association canadienne de production de films et de télévision): Merci, monsieur le président. Je suis très content d'être ici.

    Mesdames, messieurs les membres du comité, merci de nous avoir permis de comparaître devant vous aujourd'hui.

    L'Association canadienne de production de films et de télévision est une association professionnelle sans but lucratif qui représente près de 400 entreprises de l'industrie canadienne de la production. Notre association défend les intérêts généraux des producteurs canadiens en faisant du lobbying auprès du gouvernement sur les questions de politique, en négociant des conventions collectives, en gérant diverses initiatives relatives au droit d'auteur et en offrant des programmes de mentorat.

    Je suis en compagnie de M. Stephen Ellis, qui est président d'Ellis Entertainment. Il s'agit d'une importante société internationale de production et de distribution d'émissions télévisées. Depuis plus de 40 ans, elle approvisionne le marché mondial depuis sa base d'opérations, ici à Toronto. Ellis Entertainment est membre de l'ACPFT depuis longtemps, et M. Ellis est un des membres les plus anciens de notre conseil d'administration, dont il a aussi été président.

    Nous savons que vous avez déjà entendu d'autres représentants des producteurs à Vancouver et, il y a quelques jours, ici même à Toronto. Comme ils vous ont déjà fait part de certaines des difficultés que doivent surmonter les producteurs, nous allons vous présenter une déclaration préliminaire aussi brève que possible afin de laisser plus de temps pour vos questions.

    Stephen.

À  +-(1025)  

+-

    M. Stephen Ellis (président, Ellis Entertainment Inc., Association canadienne de production de films et de télévision): Merci, Guy.

    Comme vous l'avez entendu dire, les producteurs indépendants contribuent intimement à la pluralité culturelle et créative du Canada, et ils aident à stimuler la cohérence et la créativité du Canada. Ce rôle est particulièrement important dans un monde où les médias sont de plus en plus nombreux et offrent un choix de plus en plus grand, où l'Internet et la diffusion mobile n'ont pas encore atteint leur plein potentiel et où les frontières nationales restreignent de moins en moins la libre circulation du contenu médiatique.

    Depuis dix ans, l'industrie canadienne de la production cinématographique et télévisuelle est devenue l'une des grandes réussites de la politique gouvernementale. Nous fournissons des détails à ce sujet-là dans notre mémoire.

    Cela dit, malgré une croissance globale, la situation n'est pas aussi rose pour les producteurs canadiens indépendants. C'est ce secteur qui crée la majeure partie du contenu canadien diffusé aux heures de grande écoute, et à peu près tous les longs métrages canadiens présentés chaque année au Canada. Bien qu'il soit responsable d'environ 40 p. 100 de la production annuelle totale, c'est le seul secteur à avoir déploré un déclin depuis quelques années. Le volume annuel dans ce secteur a diminué de 12,4 p. 100 entre 1999-2000 et 2003-2004. De surcroît, des données préliminaires laissent entrevoir que cette tendance à la baisse s'est accélérée depuis.

+-

    M. Guy Mayson: En outre, la capacité commerciale du secteur ne s'est guère améliorée au fil des années.

    Dans l'ensemble, les producteurs indépendants canadiens sont encore très fragiles sur le plan financier; ces entreprises travaillent souvent de projet en projet, dans l'espoir de survivre assez longtemps pour se rendre au suivant. Cette existence précaire n'est pas la meilleure recette pour construire un environnement durable à long terme.

    Les producteurs indépendants vivent cette réalité au moment même où la demande de contenu canadien a connu une croissance exponentielle, avec la multiplication des choix de films et d'émissions offerts au public. Depuis dix ans, une foule de nouveaux services de télévision ont obtenu des licences, et les cinémas multisalles ont poussé partout comme des champignons.

    D'après une étude indépendante parrainée par le ministère du Patrimoine canadien, le volume estimatif de la programmation canadienne obligatoire en soirée a augmenté au total de plus de 150 p. 100 entre 1996-1997 et 2001-2002, ce qui représente un taux de croissance annuel d'environ 21 p. 100. Alors que les producteurs indépendants traversent une période difficile, les diffuseurs se débrouillent plutôt bien.

    Nous venons de rendre publique une étude préparée par le Groupe Nordicité, qui fournit des preuves tangibles de la situation financière précaire des entreprises de production indépendantes. La marge bénéficiaire des producteurs de cinéma et de télévision — mesurée en termes de revenus avant impôts — est passée de 6,7 p. 100 en 1999 à 1,6 p. 100 en 2002. Elle équivaut aujourd'hui à moins de la moitié de la marge bénéficiaire moyenne de toutes les industries combinées, et à moins du tiers de celle de l'ensemble des diffuseurs. En un mot, pendant que la rentabilité des diffuseurs est demeurée solide, et de loin supérieure à la moyenne des autres industries, la viabilité des producteurs a chuté.

    À cause de la politique fédérale actuelle, les producteurs se trouvent dans une impasse : pour attirer des investisseurs, ils ont besoin d'une plus forte capacité commerciale, mais pour augmenter leur capacité commerciale, ils doivent avoir accès à des investissements plus importants.

    Les producteurs indépendants se tournent maintenant vers le gouvernement fédéral pour qu'il les aide à mettre fin à ce cercle vicieux d'inefficacité chronique.

+-

    M. Stephen Ellis: Bien que les producteurs soient en meilleure posture aujourd'hui qu'il y a dix ans, il leur faudrait un environnement considérablement revitalisé pour que leurs entreprises aient des chances d'atteindre à l'avenir une croissance constante et durable.

    Nous avons écrit récemment à la ministre du Patrimoine canadien, Mme Liza Frulla, au sujet de notre proposition. Nous serons heureux de remettre une copie de cette lettre au comité.

    Voici quelques-uns des points saillants de notre proposition à la ministre.

    Nous recommandons l'adoption d'une nouvelle stratégie nationale qui viserait à mettre les producteurs indépendants canadiens sur la voie d'un avenir plus productif et qui refléterait notre rôle primordial dans le domaine du cinéma et de la télédiffusion par les moyens suivants : premièrement, miser davantage sur l'augmentation de l'efficience et de la compétitivité des producteurs canadiens indépendants; deuxièmement, assurer une meilleure synergie entre les producteurs indépendants et le réseau de radiodiffusion; ensuite, promouvoir un juste équilibre entre ceux qui produisent du contenu et ceux qui fonctionnent dans un environnement hautement réglementé et qui ont un accès direct aux spectateurs; et enfin, veiller à ce que chaque élément du système apporte une contribution significative à la cohésion sociale et culturelle et à la promotion de la diversité au Canada.

    Il faudra cependant apporter d'importants changements structurels à la Loi sur la radiodiffuson afin de soutenir cette nouvelle stratégie. Celle-ci exigerait également un rééquilibrage de l'offre de contenu canadien de qualité par rapport à la demande, ce qui nous obligerait inévitablement à augmenter sensiblement la masse critique du contenu canadien produit chaque année par les producteurs indépendants. En outre, dans une perspective tournée vers l'avenir, cela signifie que nous devrons tenir compte de l'avènement des nouvelles technologies.

    C'est pourquoi nous recommandons que, à compter de 2006-2007, le gouvernement du Canada augmente d'au moins 95 millions de dollars le financement accordé au Fonds canadien de télévision,et d'au moins 15 millions le financement dont bénéficie le Fonds du long métrage du Canada; qu'il s'engage à fournir ces ressources pour un minimum de cinq ans, avec indexation en fonction du taux annuel d'inflation; et qu'il porte à 30 p. 100 le taux du crédit d'impôt canadien pour la production de films et de vidéos, comme votre comité le recommandait déjà l'an dernier.

À  +-(1030)  

+-

    M. Guy Mayson: J'aimerais aussi faire un bref commentaire sur l'indexation du soutien public et des engagements de ressources à plus long terme : c'est que, lorsque les ressources publiques ne sont pas indexées à l'inflation, le secteur a nettement plus de mal à suivre le reste de l'économie, ce qui fait qu'il recule encore davantage.

    Nous tenons également à insister sur l'importance primordiale d'un environnement financier prévisible. Les producteurs tentent de planifier leurs activités d'affaires pour les deux ou trois années à venir, mais ils ne savent pas si les programmes de soutien seront encore là pour eux à ce moment-là, ni quelle sera la valeur de ces programmes.

    Pour avoir une chance d'améliorer la situation des producteurs et leur permettre, si possible, de gagner du terrain, nous croyons que les programmes d'aide fédérale directe doivent être en place pour au moins cinq ans et indexés à l'inflation.

    Le soutien direct est essentiel au maintien d'une masse critique de contenu canadien de qualité dans les nouveaux médias. Cependant, ce n'est pas en leur accordant uniquement une assistance projet par projet, dans l'espoir de solidifier leur base industrielle, qu'on assurera aux producteurs indépendants un avenir plus productif et une autonomie accrue.

    Nous estimons que les investissements privés sont un ingrédient essentiel pour accroître la productivité dans ce secteur. Cependant, les investisseurs privés se sont montrés plutôt réservés dans le passé, compte tenu des risques élevés inhérents à cette industrie.

    Si la politique gouvernementale fédérale vise à aider les producteurs canadiens à recueillir des capitaux privés et à créer du contenu capable d'attirer un plus vaste auditoire, surtout au Canada anglais, elle doit donner à ces producteurs les outils et la souplesse réglementaire nécessaires pour satisfaire les investisseurs privés.

    Le gouvernement peut également jouer un plus grand rôle à cet égard en lançant de nouveaux programmes visant à favoriser les investissements, surtout pour les productions coûteuses telles que les dramatiques et les longs métrages ambitieux, pour lesquels il est actuellement très difficile d'obtenir du financement.

    Steve.

+-

    M. Stephen Ellis: Pour conclure, nous tenons à répéter que, si le système actuel n'est pas considérablement modifié, la situation des producteurs indépendants va s'aggraver. Si nous ne faisons rien, la situation risque de se détériorer à un point tel qu'il sera extrêmement difficile d'atteindre les objectifs culturels du gouvernement.

    Ce qu'il faut, c'est une nouvelle stratégie fédérale relative à la production, qui servirait en définitive à rééquilibrer l'industrie et à mettre les producteurs indépendants sur la voie d'une croissance plus grande, plus équitable et plus durable.

    Les propositions que nous avons énoncées dans notre mémoire au comité et dans notre lettre récente à la ministre Frulla aideraient à établir une stratégie plus efficace pour permettre au gouvernement du Canada d'assurer, comme il s'y est engagé fermement, l'accessibilité d'un contenu canadien hautement diversifié au bénéfice de tous les Candiens.

    Encore une fois, merci de nous avoir permis de vous exposer nos vues aujourd'hui. Nous nous ferons un plaisir de répondre à toutes vos questions.

+-

    Le président: Merci.

    C'est maintenant au tour de M. McAvity, de l'Association des musées canadiens.

+-

    M. John McAvity (directeur général, Association des musées canadiens): Nous sommes très heureux d'être ici. Je vous signale que je suis en compagnie de notre président, M. Cal White, qui est directeur du Zoo de Toronto. Je suis le directeur général de l'association.

    Nous voulons tout d'abord remercier sincèrement le comité pour les recommandations successives qu'il a faites depuis quelques années au sujet des musées et de la nécessité de leur assurer un nouveau financement.

    Nous sommes ici aujourd'hui pour demander à votre comité de recommander instamment, une dernière fois, l'élaboration d'une nouvelle politique des musées et la mise en place du financement nécessaire.

    Je ne reviendrai pas sur vos recommandations passées, mais elles ont été très importantes, et je pense qu'elles ont dans une large mesure favorisé notre cause. C'est pourquoi je tiens à vous remercier.

    Avant d'entrer dans les détails, cependant, je voudrais vous présenter un portrait général de la communauté muséale au Canada.

    Notre pays compte plus de 2 000 musées, ce qui inclut des musées d'art, des centres des sciences, des zoos et d'autres établissements sans but lucratif, qui attirent plus de 58 millions de visiteurs par année et qui revêtent une importance phénoménale. Cependant, il s'agit probablement du secteur de la communauté culturelle canadienne qui connaît le plus de difficultés.

    Nous avons un problème chronique de financement. Le principal programme de financement fédéral date de 1972, et les niveaux de financement n'ont pas changé depuis 1972; ils sont restés à 9,5 millions de dollars par année, sans aucune augmentation pour tenir compte de l'inflation.

    Un certain nombre de musées ont dû fermer leurs portes au cours de la dernière année, dont le musée d'art inuit de Québec, pourtant très bien coté. Certains ont été forcés de vendre leurs collections, qui constituent des trésors nationaux. Ils ne bénéficient pas du financement de stabilisation à long terme que représentent les fonds de dotation accordés en contrepartie par le gouvernement fédéral, ni des subventions à la recherche allouées par les conseils subventionnaires comme le CRSH et le CRSNG.

    Ce ne sont là que quelques exemples. Je suis cependant très heureux de vous dire que, par suite de vos recommandations, la ministre Lisa Frulla a pris certaines mesures. Elle nous a promis qu'elle ferait adopter une nouvelle politique sur les musées et nous a donné l'assurance que cela figurait au haut de sa liste de priorités.

    Au cours des huit ou dix derniers mois, nous avons consulté nos membres et l'ensemble de la communauté muséale. Le ministère du Patrimoine canadien a travaillé en étroite collaboration avec nous et a rédigé un avant-projet de politique, qui sera soumis au Cabinet dans les prochains jours.

    Nous avons aussi rencontré des représentants de tous les partis politiques et nous sommes très heureux qu'ils appuient tous cette politique; deuxièmement, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux responsables de la culture se sont réunis et ont adopté une résolution à l'appui de cette nouvelle politique fédérale.

    Troisièmement, je tiens à vous rappeler que la vérificatrice générale a déclaré dans son rapport de l'an dernier que, si le gouvernement fédéral n'agit pas maintenant, notre patrimoine culturel sera perdu pour les générations futures.

    Mesdames, messieurs les membres du comité, il n'y aucune raison pour que ce plan ne se réalise pas. Nous vous demandons votre appui inconditionnel et nous sommes confiants de l'obtenir.

    Nous avons formulé des recommandations pour vous faciliter la tâche. Nous vous les présentons dans notre mémoire et nous nous ferons un plaisir d'en discuter plus longuement avec vous tout à l'heure.

    Je laisse maintenant la parole à mon président.

À  +-(1035)  

+-

    M. Cal White (président, Association des musées canadiens): Mesdames et messieurs, le Globe and Mail a publié récemment un article au sujet d'une étude internationale sur le rôle que jouent le patrimoine et la culture pour bâtir la réputation d'un pays. Les auteurs de cette étude ont demandé à des gens du monde entier comment ils percevaient l'attrait culturel, économique, politique et touristique de divers pays, de même que leur potentiel pour l'investissement.

    Le Canada s'est classé deuxième après l'Australie, ce qui est une bonne nouvelle. Mais pourquoi est-ce que nous ne sommes pas arrivés premiers? Parce que nous nous sommes classés très bas dans le secteur de la culture et du patrimoine. Ce n'est pas tellement surprenant pour ceux d'entre nous qui s'intéressent de près à ces questions. En fait, le Canada n'a pas de politique culturelle, et ses politiques sectorielles dans les domaines comme les musées sont terriblement dépassées, ce dont la ministre Frulla s'est engagée à s'occuper.

    Comme l'a dit John, nous sommes ravis — pour avoir travaillé avec le ministère — du soutien et des intérêts partagés que nous y avons trouvés. Après des années de compressions, comme l'a dit John encore une fois, il est temps d'investir dans les activités qui amélioreront la qualité de vie des Canadiens et la position du Canada sur la scène internationale.

    Quelles sont les recommandations de l'AMC?

    Comme l'ont souligné certains des autres témoins, je pense, il est essentiel que nous disposions d'un soutien plus prévisible. La clé de la planification d'entreprise, pour les musées, ce sont des revenus prévisibles de toutes leurs sources de financement. Même s'ils dépendent de moins en moins des fonds publics depuis quelques années, de nombreux musées connaissent encore des déficits critiques. Comme John l'a mentionné, un certain nombre de musées ont fermé leurs portes récemment, dont le musée d'art inuit de Québec. Il faudrait prévoir des investissements pluriannuels pour financer les programmes à l'intérieur de ce nouveau cadre. Les programmes d'un an ne conviennent vraiment pas à la planification à long terme.

    L'AMC recommande un nouvel investissement de 75 millions de dollars par année, qui s'inscrirait dans un ensemble de programmes flexibles et ciblés visant à atteindre les objectifs établis. Pour reprendre l'image employée par le témoin précédent, 75 millions de dollars, c'est un café et la moitié d'un beigne. John vous a déjà parlé du niveau de financement de 9,5 millions de dollars, qui remonte à 1972. C'est, en gros, une gorgée de café et une toute petite bouchée de beigne.

    Ces choses doivent changer. La portée limitée du financement de projets sur une base annuelle ne nous aide pas. Nous devons passer à des investissements pluriannuels.

    L'Association canadienne des musées reconnaît que nous faisons partie d'une communauté beaucoup plus vaste. Nous appuyons évidemment la hausse du financement accordé aux arts, par l'intermédiaire du Conseil des Arts du Canada, ainsi que les efforts du gouvernement — et les nôtres — pour inciter les citoyens à donner davantage. À notre avis, il est essentiel que le gouvernement fédéral exerce son leadership et qu'il joue un rôle de premier plan pour renforcer notre capacité dans le domaine des arts.

    Nous évoquons dans notre mémoire les nombreuses retombées très positives de la communauté muséale d'un bout à l'autre du pays. Nous sommes très heureux d'être à la veille d'une mise à jour très attendue de la politique sur les musées, qui date de plusieurs décennies, ce qui permettra d'insuffler une nouvelle vitalité et un nouvel esprit d'innovation dans les communautés de tout le Canada.

    Nous vous demandons instamment de soutenir la ministre Frulla dans ses efforts pour nous aider à faire de cette nouvelle politique une réalité, en l'appuyant sans réserve dans votre prochain rapport.

    Merci.

À  +-(1040)  

+-

    Le président: Merci.

    Vous réclamez 75 millions de dollars dans votre mémoire pour cette nouvelle politique sur les musées. Est-ce que vous en avez déjà discuté avec les gens de Patrimoine canadien?

+-

    M. Cal White: Oui.

+-

    Le président: D'accord, merci.

    Nous recevons maintenant les porte-parole du Centre for Social Justice.

    Madame Kitchen, ou M. Cooke.

+-

    Mme Brigitte Kitchen (professeure, Travail social, Université York, Centre for Social Justice): Je suis Brigitte Kitchen, du Centre for Social Justice. Nous nous sommes fait connaître avec un rapport intitulé The Growing Gap. Nous nous sommes penchés sur la question, et ce que je vous présente aujourd'hui, ce sont les nouvelles priorités que nous proposons pour la politique sociale dans un document intitulé Life-Chance Guarantees, ce que je pourrais traduire par des garanties de bonnes perspectives de vie. Pour replacer les choses dans leur contexte, j'ai lu ce matin dans le Toronto Star un petit entrefilet sur un jeune couple, dans la page consacrée au Père Noël. Le mari travaille dans la construction, de 5 heures le matin à 5 heures le soir. Il fait partie du nouveau groupe de personnes cantonnées dans des emplois qui ne mènent nulle part. Le défi que je vous lance est le suivant : que pouvons-nous faire pour améliorer les perspectives de vie de cet homme-là, et des autres qui se trouvent dans la même situation?

    Le but des garanties de bonnes perspectives de vie, c'est de donner aux gens des occasions concrètes de faire quelque chose de leur vie plutôt que de la gaspiller. Il s'agit de préparer les gens à obtenir différents emplois en leur fournissant une éducation de qualité, et du perfectionnement ou du recyclage quand ils en ont besoin. Il s'agit aussi de leur permettre de changer de vie pour éviter que le chômage ne les condamne automatiquement à la marginalité sociale. Tout en développant le potentiel des gens comme travailleurs productifs, ces garanties visent à leur donner plus de liberté pour vivre la vie qu'ils souhaitent comme membres d'une famille et d'une collectivité.

    Quels sont les composantes essentielles des garanties de bonnes perspectives de vie? D'abord, le travail à un salaire décent — ce n'est pas une revendication nouvelle; ensuite, le renforcement des capacités personnelles par l'éducation et le perfectionnement; le remaniement du régime d'assurance-emploi afin de refléter les nouvelles conditions d'emploi sur le marché du travail; et la promotion de la vie de famille.

    Les gouvernements n'assument plus la responsabilité de créer des emplois stables. Cela doit changer. Le gouvernement peut jouer un rôle dans la création d'emplois. Nous avons aussi besoin d'un régime fiscal juste et équitable afin de financer les composantes essentielles des garanties de bonnes perspectives de vie. Je vais vous expliquer de quoi il s'agit.

    Pour le renforcement des capacités personnelles, il faudrait par exemple une allocation pour la fréquentation scolaire, qui serait similaire aux allocations aux jeunes que nous avions anciennement. Elle serait versée aux jeunes de 15 à 20 qui fréquentent l'école secondaire ou qui suivent un programme de formation professionnelle ou spécialisée. Il faudrait aussi supprimer les frais de scolarité pour les études postsecondaires. Je sais que c'est une proposition très controversée, mais il y a beaucoup de pays européens qui l'ont fait et qui ne sont pas en faillite, sur le plan financier. Alors, je pense qu'il faudrait y songer sérieusement. Les employeurs canadiens devraient également donner aux travailleurs les moyens financiers nécessaires pour s'absenter régulièrement de leur travail dans le but de se recycler ou de se perfectionner, ou encore de rafraîchir leurs compétences afin d'être mieux qualifiés pour leur emploi. Les congés de travail, bien connus des universitaires sous forme de congés sabbatiques, pourraient aussi être étendus aux travailleurs à faible revenu qui occupent des emplois précaires.

    Pour régler le problème du chômage à long terme, nous devrions peut-être modifier le régime d'assurance-emploi, comme l'ont fait là encore certains pays européens, pour que les chômeurs à long terme continuent de toucher de l'assurance-emploi plutôt que de devenir bénéficiaires des régimes provinciaux d'aide sociale.

    Pendant que les gens toucheraient de l'assurance-emploi — en particulier ceux qui ont besoin d'améliorer leurs aptitudes en lecture, leurs compétences linguistiques, leurs connaissances en informatique ou d'autres compétences, pour se perfectionner sur le plan personnel ou professionnel —, ils pourraient recevoir une allocation de recyclage ou de mise à niveau.

À  +-(1045)  

    Il serait possible d'allonger les congés de maternité et les congés parentaux couverts par l'assurance-emploi et de hausser les niveaux de remplacement du revenu. Encore là, beaucoup de pays européens l'ont déjà fait, et ils ont également inclus les personnes qui ne sont pas sur le marché du travail en leur versant des allocations pour garde d'enfants pendant une période déterminée. Pour les gens qui doivent assumer le fardeau de personnes à charge sur une longue période, l'Allemagne et la France ont introduit un programme d'assurance sociale à long terme, en 1995 dans le cas de l'Allemagne et en 2004 pour ce qui est de la France.

    Nous avons beaucoup de problèmes dans notre pays en ce qui concerne le soutien aux enfants du divorce. Encore là, la Suède applique un programme avancé de soutien à l'entretien des enfants, que Condition féminine Canada préconise aussi depuis des années.

    En ce qui concerne la garde des enfants, les parents devraient être en mesure de bénéficier d'un régime universel de services de haute qualité. La plupart des familles, de nos jours, ont besoin de deux revenus, mais cette situation ne se reflète pas dans les services de garde offerts. Bien des gens doivent travailer dans des conditions tout à fait inhabituelles pour pouvoir s'occuper de leurs enfants. J'ai entendu parler de cas où un des parents partait quand l'autre arrivait. Est-ce qu'ils se voient de temps à autre? Comment s'étonner, dans ces circonstances, que les divorces soient tellement nombreux?

    Il ya un lourd prix à payer quand la société se permet de négliger les talents et les capacités de ses gens. Tout le monde mérite d'avoir vraiment la chance de développer son plein potentiel, et de s'en servir pour son propre avantage et celui de la société. Il faut mettre fin au gaspillage de nos précieux fonds publics, qui ne servent qu'à donner aux gens une formation tout juste suffisante pour passer d'un emploi sans avenir à un autre. Les garanties de bonnes perspectives de vie sont associées à une vision à long terme du rendement des investissements publics dans le capital humain, dont nous bénéficions tous en définitive grâce à l'augmentation de la prospérité nationale.

    Merci.

+-

    M. Murray Cooke (associé en recherche, Centre for Social Justice): Bonjour. Je m'appelle Murray Cooke. Je suis ici au nom du Centre for Social Justice, situé ici à Toronto.

    Je suis l'auteur d'un rapport qui doit être publié bientôt sous le titre de Banking on Mergers: Financial Power versus the Public Interest.

    Le document de consultation en vue des audiences en cours soulève la question du...

À  +-(1050)  

+-

    Le président: Je m'excuse de vous interrompre, mais j'ai le texte de votre déclaration. Vous n'aurez pas le temps de nous la lire. Il vous reste une trentaine de secondes. Désolé!

    Essayez de nous la résumer dans vos propres mots. Je suis désolé.

+-

    M. Murray Cooke: Oui. Eh bien, le document de consultation soulève la question du financement des entreprises. Je pense que c'est un programme trop restreint. Je pense aussi qu'il est trop réducteur d'insister autant sur la productivité dans ce document de consultation. Nous devrions plutôt penser à améliorer l'accès pour tous les Canadiens. Où qu'ils vivent au Canada, les groupes désavantagés doivent avoir accès au financement et aux services financiers.

    Je présente un certain nombre de recommandations dans le document que je vous ai remis, tout comme dans le rapport à venir. Elles portent sur diverses choses, notamment le fait que nous ne devrions pas continuer à permettre les fusions bancaires. Cela réduirait la concurrence et aurait des effets néfastes. D'un autre côté, nous ne devrions pas permettre aux banques étrangères de s'implanter encore plus dans notre pays. Je ne pense pas que ce soit avantageux, de façon générale.

    Le troisième point, c'est que nous devons favoriser les institutions parallèles comme les caisses de crédit.

    Je vous résume seulement les grandes lignes de ma présentation.

    Le point suivant, c'est que nous ne devons pas oublier que, même avec l'avènement et l'expansion des caisses de crédit, nous comptons toujours beaucoup sur les grandes banques. Nous avons besoin d'un régime réglementaire qui garantira que les services financiers et le crédit seront accessibles aux Canadiens des quartiers désavantagés et des communautés rurales.

    Il serait possible de remanier notre régime réglementaire notamment en adoptant une loi sur le réinvestissement dans les communautés, semblable à celle qui existe aux États-Unis depuis 1977. Nous devons adopter des mesures similaires ici au Canada.

    Il faut se rappeler que les grandes banques ont fermé plus de 700 succursales au Canada entre 2001 et 2003. Il ne suffit pas de les obliger à divulguer leurs projets de fermeture. Il faut des règlements pour les obliger à être présentes dans les quartiers qui en ont le plus besoin, pour éviter que les compagnies spécialisées dans les prêts accordés les jours de paie ne s'y implantent — ce qu'elles ont d'ailleurs déjà fait. Ces compagnies exploitent les gens des quartiers pauvres en leur imposant des taux exorbitants, et même illégaux.

+-

    Le président: Merci. Je suis désolé, mais nous avons un autre groupe. Nous ne pouvons pas continuer — même si je suis que vous, vous pourriez nous en dire plus long.

    Nous entendrons maintenant M. Wong, du Conseil national des Canadiens chinois.

+-

    Victor Wong (directeur général, Conseil national des canadiens chinois): Merci, monsieur le président. Je remercie le comité des finances de nous avoir permis de lui présenter une déclaration.

    Je m'appelle Victor Wong. Je suis directeur général du Conseil national des canadiens chinois. Je suis accompagné de Mme Christine Li, qui est membre de notre exécutif national, et de M. Apollo Chung, également membre de l'exécutif national.

    Le CNCC est une organisation nationale sans but lucratif. Elle a été constituée en 1980 et compte 27 sections locales dans tout le Canada. Depuis 1984, nous cherchons à obtenir réparation pour la taxe d'entrée et la loi d'exclusion imposées aux Chinois, au nom des 4 000 personnes qui ont payé cette taxe et de leurs familles. Le gouvernement canadien commence à reconnaître les injustices commises contre les pionniers chinois qui ont contribué à développer le Canada. Il était grand temps que cela se fasse.

    Nous espérons que le gouvernement corrigera ces injustices, plus particulièrement pour les gens qui ont été directement touchés : ceux qui ont dû payer la taxe d'entrée et leurs familles, qui ont souffert de cette mesure pendant plus de six décennies. Dans son budget 2005, le gouvernement du Canada a annoncé qu'il consacrerait 25 millions à un fonds de reconnaissance, de commémoration et d'éducation, mais ce fonds ne prévoit pas de mécanisme de redressement acceptable. Il n'est pas accepté non plus par les personnes et les familles directement touchées par la taxe d'entrée et la loi d'exclusion.

    Ce que nous demandons aujourd'hui, ce que nous réclamons, c'est le remboursement des montants perçus au titre de cette taxe, qui n'aurait pas dû être imposée pour commencer. La taxe d'entrée n'est plus en vigueur, mais elle a quand même rapporté environ 23 millions de dollars au gouvernement canadien avant son abolition. Ce que nous réclamons, c'est le remboursement de cette taxe maintenant qu'elle a été supprimée.

    Les montants provenant de cette taxe d'entrée sont inscrits dans les livres du gouvernement canadien. La solution la plus logique, et la plus morale, serait de retourner ces gains mal acquis aux gens qui ont été directement touchés. Ce que nous demandons aujourd'hui, dans notre mémoire, c'est que le comité des finances recommande au gouvernement canadien de dégager 23 millions de dollars, dans le budget 2006, pour rembourser la taxe d'entrée aux Chinois qui ont été victimes de cette loi raciste, appliquée durant 62 ans.

    Nous soutenons également les revendications des autres organisations qui prônent la justice sociale, en ce qui concerne l'adoption d'une politique gouvernementale inclusive. Nous recommandons aussi que le gouvernement élabore ses politiques et ses programmes en tenant compte des considérations raciales — le comité devrait se pencher sur cette question —, et que l'élaboration de ces politiques et de ces pratiques repose sur une consultation plus approfondie des différentes communautés raciales.

    Puisque votre comité s'occupe de finances, nous tenons à vous signaler qu'entre 1885 et 1923, le gouvernement du Canada a recueilli environ 23 millions de dollars au titre de la taxe d'entrée. Entre 1905 et 1914 seulement, il a perçu ainsi près de 14 millions de dollars, dont 500 $ de mon grand-père. Cette taxe d'entrée représentait un pourcentage important des recettes publiques, à l'époque, et elle a eu un effet dévastateur sur les familles — pas seulement la taxe d'entrée, mais aussi la loi d'exclusion.

    Nous travaillons à cette campagne depuis plus de 20 ans en collaboration avec d'autres groupes comme la National Association of Japanese Canadians. Or, le gouvernement du Canada s'est entendu avec les Canadiens d'origine japonaise en 1988.

    Je voudrais vous parler brièvement du fonds de 25 millions de dollars annoncé dans le budget 2005. Cet argent était destiné à des activités de commémoration et d'éducation, et devait s'échelonner sur trois ans. Cependant, le gouvernement avait fixé deux conditions préalables à la mise en place de ce fonds : il ne ferait pas d'excuses et ne verserait pas d'indemités individuelles. C'est inacceptable pour les gens qui ont été directement touchés par la taxe d'entrée et la loi d'exclusion.

    Nous trouvons cette situation préoccupante et nous nous demandons comment le gouvernement canadien va décider de dépenser ces 25 millions. Comment le programme sera-t-il appliqué? Où sont la transparence et la reddition de comptes? Nous vous renvoyons aux commentaires du juge Gomery; il a dit dans son rapport que les programmes sans règles ouvraient la porte « aux erreurs, aux abus et à l'incurie ».

    Nous tenons à le souligner au comité. Nous sommes inquiets et nous vous demandons d'exercer une surveillance attentive sur ces types de fonds parce qu'ils ne sont pas destinés à un groupe clairement défini, contrairement à ce qui aurait peut-être dû se faire.

À  +-(1055)  

    Nous présentons donc cette recommandation au comité. Elle est dans notre mémoire. Notre première recommandation, c'est que le gouvernement canadien rembourse les 23 millions de dollars qu'il a injustement perçus auprès de la communauté sino-canadienne sous forme de taxe d'entrée et qu'il fasse amende honorable pour la taxe d'entrée et la loi d'exclusion imposées aux Chinois, en versant des indemnités individuelles aux gens qui ont payé cette taxe et qui sont encore vivants, à leurs conjoints et à leurs descendants, ainsi qu'une indemnité globale à la communauté sino-canadienne.

    Je laisse maintenant la parole à Mme Li.

+-

    Mme Christine Li (exécutif national, Conseil national des canadiens chinois): Merci.

    Le CNCC a toujours soutenu les autres organisations pour la justice sociale dans leurs demandes de changements positifs — politique fiscale progressiste, service universel de garde d'enfants, augmentation du financement pour la santé et l'éducation, nouveau financement pour des logements abordables et plus grand engagement à l'égard du développement international. Nous devons signaler au comité que les politiques et programmes fédéraux ont un impact disproportionné sur les communautés raciales, y compris les immigrants et les réfugiés.

    La santé est une question importante au Canada. C'est une valeur canadienne centrale. Le racisme est une question de santé publique. Il est prouvé que les membres des communautés et des groupes raciaux sont victimes de racisme; qu'ils connaissent des taux de chômage plus élevés, qu'ils disposent d'un revenu moyen plus faible et que leur participation à la main-d'oeuvre active est moins grande; et que leur participation se heurte à d'autres obstacles.

    Par exemple, nombreux sont les nouveaux arrivants, recrutés en fonction de leurs compétences, qui se heurtent à des obstacles de taille pour faire reconnaître leurs diplômes internationaux, ce qui se traduit par une déqualification, des emplois sans possibilité d'avancement et un sentiment de désespoir. Je sais que certains de mes collègues autour de la table ont déjà soulevé cette question.

    Nous devons évaluer la conjonction de la race et de la pauvreté, étant donné que les communautés raciales continuent d'être surreprésentées dans la classe pauvre et ouvrière, tout en étant victimes d'exclusion et d'entraves à la participation dans la main-d'oeuvre active.

    Par exemple, le rabais pour le combustible de chauffage est une bonne initiative, mais elle est restrictive. Les immigrants âgés doivent attendre dix ans avant de pouvoir bénéficier du régime de pension. Si le programme est conçu pour inclure les personnes âgées à faible revenu, les immigrants âgés qui ne reçoivent pas une pension sont exclus.

    Le droit exigé pour l'établissement est un autre exemple, tout comme le droit d'établissement permanent. Ce droit représente environ deux semaines de travail pour les immigrants des pays les plus riches, mais les immigrants des pays en voie de développement doivent économiser pendant des années pour rembourser cette somme d'argent.

    Nous comprenons que la nature restrictive de ces programmes n'est pas intentionnelle. Cependant, ils sont cause de disparités que l'on pourrait éviter grâce à une consultation plus significative avec les communautés raciales et en adoptant une perspective tenant compte des considérations raciales lors de l'élaboration des politiques et programmes publics.

    Nous pressons le gouvernement canadien d'adopter une perspective raciale lors du développement de ces politiques publiques et de s'efforcer d'inclure et de consulter les communautés raciales. Le budget ministériel devrait contenir un poste à cet effet.

    Dans le cas des deux exemples que j'ai présentés, il faudrait une approche plus inclusive en ce qui a trait au rabais pour le combustible de chauffage et éliminer le droit exigé pour l'établissement. Nous devons multiplier les efforts pour éliminer cette disparité économique et sociale qui contribue à créer une société divisée.

    Merci.

Á  +-(1100)  

+-

    Le président: Merci, madame Li.

    Du Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada, nous avons... Mme Bridgman?

+-

    M. James Fleck (président, Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada): Eh bien je ne suis pas exactement Mme Bridgman, mais je vais commencer.

    Je suis Jim Fleck...

+-

    Le président: Mais Mme Bridgman est bien avec vous?

+-

    M. James Fleck: Tout à fait.

+-

    Le président: Très bien.

    Allez-y monsieur Fleck.

+-

    M. James Fleck: Je m'appelle Jim Fleck et je suis le président du Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada et je suis accompagné de Billie Bridgman qui excelle à la fois dans les arts et l'administration. Elle a été soliste dans l'ensemble Elmer Iseler Singers pendant un certain temps et s'est avérée également extrêmement compétente dans le domaine de l'administration des arts au cours des années.

    Merci de nous donner l'occasion de témoigner.

    Le Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada a été fondé il y a une trentaine d'années par un groupe de dirigeants d'entreprises de toutes les régions du pays qui étaient convaincus que les arts et la culture étaient des aspects essentiels de la vie canadienne et que le monde des affaires avait un rôle à jouer pour appuyer la communauté culturelle du Canada.

    Depuis quelques années, et encore cette année, notre présentation annuelle au comité permanent souligne deux aspects d'une importante initiative que le gouvernement avait lancée mais qu'il n'a pas encore menée à terme: l'élimination de l'imposition des gains en capital pour les dons de valeurs mobilières cotées en bourse et le traitement équitable des fondations publiques et privées.

    La décision prise par le gouvernement en 1997 de réduire le taux d'imposition sur les gains en capital pour les dons de valeurs cotées en bourse a eu un effet marquant sur les oeuvres de bienfaisance, occasionnant une augmentation des dons versés aux organismes se livrant à quelques-unes des nombreuses activités philanthropiques.

    Le nombre moyen de dons de valeurs mobilières a augmenté de 22 fois entre 1996 et 1999. La valeur moyenne de ces dons a augmenté de 1 800 p. 100 au cours de cette période. Les recherches réalisées par le ministère des Finances sont venues confirmer ces résultats. Le ministère a signalé que ces dons aux oeuvres de bienfaisance s'élevaient à 200 millions de dollars en 2000 et, pour chaque dollar de revenu d'impôt perdu au cours de cette année, 13 $ étaient mis à la disposition des oeuvres de bienfaisance.

    Ce constat ne se limite pas au secteur des arts, il est important pour toutes les oeuvres de bienfaisance au Canada. Il est temps d'éliminer complètement cette taxe et d'exploiter pleinement cette source potentielle de soutien de la part du secteur privé à notre secteur philanthropique.

+-

    Mme Billie Bridgman (présidente et chef de la direction, Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada): Cependant, nous souhaiterions accorder notre appui à plusieurs autres initiatives qui se rapportent expressément à notre travail au sein de la communauté culturelle.

    L'enquête annuelle nationale du CMAA auprès d'environ 700 organismes artistiques révèle que la communauté artistique a augmenté considérablement au cours des 30 dernières années. Il y a eu une augmentation du nombre des artistes et des organismes artistiques, une augmentation de la taille et de la variété des productions, une augmentation du rayonnement et des recettes gagnées, ainsi qu'un accroissement de la renommée nationale et mondiale.

    Le monde des affaires canadien appuie les arts. Au cours de la période visée, le milieu des affaires est passé de dons essentiellement modestes à des investissements de plus de 30 millions de dollars par année dans les arts. En revanche, l'appui du gouvernement fédéral n'a pas augmenté, offrant des possibilités pratiquement nulles de croissance aux compagnies existantes et aucun espoir aux nouvelles compagnies et ne proposant au monde des affaires aucun défi à relever.

+-

    M. James Fleck: Le gouvernement fédéral est également à la traîne par rapport aux autres pays en matière de financement des milieux culturels par l'intermédiaire des conseils des arts. La Norvège donne deux fois plus de subventions par habitant que le Canada, l'Irlande trois fois plus, le pays de Galles quatre fois plus et l'Angleterre et l'Écosse près de cinq fois plus. Ce sont, comme le Canada, des pays relativement petits.

Á  +-(1105)  

+-

    Mme Billie Bridgman: Des témoins vous ont déjà dit et d'autres le répéteront aujourd'hui, qu'au niveau macroéconomique, les industries culturelles emploient au Canada 100 000 personnes et produisent 39 milliards de dollars en PIB chaque année — plus que l'industrie forestière, l'agriculture, les mines, la pêche, l'industrie pétrolière et gazière réunies — par conséquent, le secteur des arts est aussi un exceptionnel moteur de l'économie.

    Cependant, si les arts ont un impact économique important, ce n'est pas exactement leur raison d'être. C'est un simple effet secondaire. L'art n'est pas une activité commerciale; il n'est pas axé sur les dépenses et les recettes et il est impossible de lui imposer de tels critères. L'art s'intéresse à la créativité. On ne peut pas vraiment le contrôler, mais on peut véritablement l'appuyer.

+-

    M. James Fleck: Au niveau microéconomique, Margaret Atwood dit par exemple que si l'on considérait comme un investissement la modeste bourse qu'elle avait reçue du Conseil des Arts du Canada en 1969, ce serait certainement, sur le plan du rendement, un des meilleurs investissements de tous les temps.

    Pourtant, le gouvernement fédéral n'accorde pas à ce secteur un soutien équivalent aux incitatifs qu'il accorde au secteur pétrolier et gazier. Pour nous, c'est un non-sens — et s'il faut parler affaires, dites-moi bien où trouver un secteur appartenant entièrement à des intérêts canadiens, qui est en pleine croissance, qui recrute du personnel dans toutes les collectivités, qui n'est pas assujetti au cycle d'expansion et de ralentissement, qui pratique des dizaines de langues en plus des deux langues officielles et de nombreuses langues autochtones et qui fonctionne à longueur d'année dans toutes les collectivités du pays?

    Soutenir les arts paraît logique sur le plan économique, mais également sur beaucoup d'autres plans — infrastructure sociale, éducation, pérennité, épanouissement des villes et des collectivités, identité nationale et internationale. La communauté des arts et de la culture est un moteur important de la société canadienne.

    Les gens d'affaires reconnaissent de plus en plus la nécessité croissante d'une vision plus novatrice et créative dans tous les aspects de leurs entreprises et, en fait, dans tous les aspects de la vie canadienne. Nous comprenons que ce sont les artistes canadiens qui occupent ce territoire, qui cultivent et entretiennent la créativité dans notre société et dont nous devons suivre l'exemple. Les artistes du Canada sont le visage que nous offrons au monde. Ils disent qui nous sommes. C'est essentiellement grâce à eux que le Canada se présente comme un chef de file mondial en voie de bâtir une société multiethnique, coopérative et respectueuse qui permet à de nombreuses voix différentes de s'exprimer.

+-

    Mme Billie Bridgman: Le monde des affaires que représente le CMAA reconnaît le rôle important qu'il doit jouer dans le soutien continu et croissant des arts. Par l'intermédiaire de programmes comme ArtsVest, nous saisissons ce défi à bras-le-corps et nous espérons également que tous les paliers de gouvernement — en particulier le gouvernement fédéral — maintiendront et surtout augmenteront leur appui proportionnellement à la croissance et à l'augmentation de la diversité de notre secteur culturel.

    C'est pour toutes ces raisons que le CMAA appuie deux importantes initiatives culturelles: une augmentation de 150 millions de dollars des crédits consacrés par le fédéral au Conseil des Arts et la demande des musées canadiens d'un programme quinquennal de 75 millions de dollars par an.

+-

    M. James Fleck: Ces deux initiatives vous ont déjà été présentées par l'intermédiaire de la Coalition pour les arts, et nous faisons partie de la quarantaine d'organisations qui se sont rendues à Ottawa la semaine dernière et ont rencontré certains d'entre vous.

    Merci.

+-

    Le président: Le prochain témoin est Mme Wilcox du Literary Press Group of Canada.

+-

    Mme Alana Wilcox (présidente, Conseil d'administration, Literary Press Group of Canada): Bonjour. Merci de me donner l'occasion de présenter mon témoignage ce matin.

    Je m'appelle Alana Wilcox. Je suis présidente du Literary Press Group of Canada et directrice de Coach House Books, éditeur qui a pignon sur rue tout près d'ici.

    J'aimerais vous parler d'un livre intitulé Dainty Monsters. Il s'agit d'un recueil de poèmes de Michael Ondaatje publié en 1967. Comme vous le voyez, longtemps avant Le Patient anglais ou Le Fantôme d'Anil, une petite maison d'édition appelée Coach House Press avait publié cet ouvrage. M. Ondaatje l'avait composé lui-même une fois que les imprimeurs lui avaient montré comment utiliser la Linotype et comment agencer un livre de poésie.

    Ce livre est de nos jours extrêmement rare — si rare en fait que je n'ai même pas pu en trouver un exemplaire dans notre bureau. Ils ont tous été volés. Chaque exemplaire vaut environ 1 000 $. Pourtant, cela n'est rien à côté du trésor national qu'est devenu depuis Michael Ondaatje. Son écriture est respectée dans le monde entier.

    Cependant, les écrivains ne sont pas le fruit de la génération spontanée et n'annoncent pas leur talent sur des enseignes au néon. C'est là qu'interviennent les petits éditeurs du Canada. Nous sommes des prospecteurs de jeunes talents, nous manipulons des montagnes de manuscrits que nous recevons des prochaines gloires littéraires du Canada et nous consacrons beaucoup d'énergie pour les aider à devenir les personnalités dont le Canada sera fier. Nous consacrons beaucoup de temps et d'argent à les relire et les encourager à devenir des écrivains florissants.

    Les éditeurs canadiens se sont développés un peu de la même manière que Michael Ondaatje. Il y a 50 ans, il aurait été sans doute difficile de trouver dans une librairie un livre écrit par un auteur canadien. Aujourd'hui, probablement un tiers des ouvrages que l'on peut trouver dans une librairie a été écrit par des Canadiens. C'est un retournement de situation remarquable en un demi-siècle. La plus grande partie de ce succès est directement attribuable au soutien du gouvernement fédéral au secteur de l'édition. Les auteurs peuvent bien écrire des millions de livres magnifiques, leurs talents seront gaspillés s'il n'y aucun éditeur pour les présenter aux lecteurs.

    Dès que le Canada a commencé à financer ces éditeurs, tout d'abord par l'intermédiaire du Conseil des Arts du Canada, puis par Patrimoine canadien, la littérature canadienne n'a cessé de s'épanouir. Au cours des 40 dernières années, nous avons présenté au lectorat canadien Michael Ondaatje, Margaret Atwood, Rohinton Mistry et Anne-Marie MacDonald, ainsi que quantité d'autres auteurs.

    Je représente le Literary Press Group of Canada qui est, depuis 30 ans, une association nationale qui représente 51 maisons d'édition appartenant à des intérêts canadiens et exploitées par des Canadiens tels que Coach House. Nous faisons la promotion des droits de nos membres et nous leur fournissons également des services commerciaux et de marketing pour permettre à leurs livres d'atteindre leur lectorat. Le but de notre association est d'encourager la survie et la croissance d'un large éventail de la littérature canadienne.

    Le LPG et ses éditeurs membres bénéficient du soutien financier du gouvernement fédéral par l'intermédiaire du Conseil des Arts du Canada et du Programme d'aide au développement de l'industrie de l'édition de Patrimoine canadien que nous appelons affectueusement le PADIE.

    L'an dernier, dans notre présentation au comité, nous avions demandé le renouvellement du fonds Un avenir en art. C'est avec grand plaisir que nous avons constaté le maintien de ce fonds qui permet au Conseil des Arts du Canada et au Patrimoine canadien de maintenir leur niveau de soutien aux arts. Je peux vous dire en passant que le fonds a été extrêmement utile à de nombreux éditeurs, leur permettant de maintenir le niveau et la qualité de leur production. Nous sommes reconnaissants au comité pour cette décision qui révèle son engagement en faveur des arts.

    Nous nous adressons à vous cette année pour vous demander de vous projeter dans l'avenir afin de nous aider à faire en sorte que cette prospérité durement gagnée ne s'essouffle. Les éditeurs et les écrivains ont travaillé très fort pour surmonter les obstacles et, si nous avons obtenu d'excellents résultats, nous ne pouvons cependant pas nous reposer sur nos lauriers.

    Les temps sont durs pour le secteur de l'édition. Les librairies indépendantes sont de plus en plus nombreuses à cesser leurs activités, nous devons composer avec un environnement malsain pour le commerce au détail faisant en sorte qu'il est de plus en plus difficile pour nos livres d'atteindre les lecteurs par les voies traditionnelles. La mise en place de nouveaux canaux de distribution est coûteuse et exige beaucoup de temps. Si l'on ajoute à cela l'intérêt de plus en plus marqué des consommateurs pour les loisirs axés sur l'électronique, ainsi que la concurrence des multinationales qui ne se soucient absolument pas de la canadianité de la littérature canadienne, on comprend mieux combien il est difficile de maintenir la viabilité du secteur de l'édition.

    Les Canadiens veulent lire des livres canadiens. Selon le sondage réalisé en 2005 par Patrimoine canadien, 71 p. 100 des répondants aiment lire des auteurs canadiens et 48 p. 100 l'ont fait au cours des 12 derniers mois. Ces résultats révèlent encore plus l'urgence de continuer à soutenir le secteur canadien de l'édition. À cet effet, nous demandons au comité d'appuyer la demande présentée par la Coalition canadienne pour les arts d'augmenter de 5 $ par habitant les dépenses consacrées aux arts par l'intermédiaire du Conseil des Arts du Canada.

    Le Conseil des Arts du Canada a effectué au cours de ses 50 ans d'existence, un excellent travail de soutien des arts et a contribué à les mettre à la disposition du public. Il a agi avec efficience et efficacité, utilisant jusqu'au dernier sou des crédits dont il dispose actuellement pour faire la promotion des arts. De fait, les résultats obtenus par le Conseil des Arts sont la preuve même qu'il est nécessaire d'augmenter son financement. Les Canadiens s'intéressent aux arts et, dans l'état actuel des choses, le Conseil des Arts n'a pas les moyens de maintenir son propre succès.

    En tant que pays, nous avons constitué un auditoire exceptionnel et un bassin de talents extraordinaires; nous ne devons pas laisser tout cela se perdre. Nos écrivains, nos danseurs, nos peintres ont rendu le Canada célèbre sur la scène mondiale. Dans un contexte de mondialisation, nous devons pouvoir être en mesure de conserver notre place sur la scène internationale. Nous devons disposer de mécanismes de soutien qui nous permettent de conserver les artistes au Canada. Déjà, les éditeurs canadiens commencent à perdre certains jeunes talents parce qu'ils n'ont pas les moyens de les payer à leur juste valeur. Ce sont les éditeurs britanniques et américains qui les recrutent. D'autres pays offrent beaucoup plus de soutien aux arts — et M. Fleck en a énuméré quelques-uns.

Á  +-(1110)  

    Le Canada consacre actuellement une somme moyenne de 4,73 $ par habitant aux arts. Nous pourrions doubler ce montant. C'est le coût d'un ou deux grands cafés au lait par an — ou, pour les poètes, d'une bière — et cela représenterait d'énormes avantages pour l'ensemble du pays. Il ne fait aucun doute qu'un tel investissement est raisonnable si l'on veut avoir la possibilité de découvrir et de soutenir un prochain Michael Ondaatje, une nouvelle Karen Kain ou une nouvelle Emily Carr.

    Le Conseil des Arts du Canada doit fêter prochainement son cinquantième anniversaire et c'est l'occasion idéale pour le Canada de manifester son appui pour les arts. Le Literary Press Group vous invite, au nom de ses membres, à profiter de cette occasion pour réaffirmer la position du Canada à l'avant-garde de la scène artistique mondiale.

    Merci.

+-

    Le président: Merci, madame Wilcox.

    Nous allons maintenant donner la parole aux membres du comité. Chacun disposera de cinq minutes pour poser des questions.

    Je rappelle aux témoins que les membres du comité disposent de cinq minutes, mais que cela comprend les questions et les réponses. Si vous êtes en mesure de faire des réponses brèves, cela permettra aux membres du comité de poser plus d'une question.

    Madame Oda.

+-

    Mme Bev Oda (Durham, PCC): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je voulais tout simplement préciser que les partis d'opposition soutiennent totalement la diversité culturelle et je félicite les libéraux d'en avoir pris l'initiative, parce que c'est important.

    Vous avez tout à fait raison, monsieur Thomson, de dire qu'il est superflu de rappeler l'importance des arts au pays. Nous disposons en particulier d'un bon bassin de talents. J'ai l'impression que nous sommes à l'aube d'une nouvelle étape et c'est important, parce que nous entrons dans une ère, celle de l'information, dans laquelle les arts et la culture seront des éléments clés qui nous permettront de nous affirmer en tant que pays.

    Ce n'est pas cinq minutes, mais cinq heures que je devrais passer avec chacun d'entre vous, mais je vais me limiter aux programmes qui sont déjà en place. Je constate que certaines modifications ont été apportées au programme de soutien aux magazines et au programme PAP, et il y a un certain nombre de points que j'aimerais aborder avec vous. Cependant , je ne peux essentiellement vous poser qu'une seule question. Je vais donc vous donner l'occasion de parler de cette demande en faveur du Conseil des Arts du Canada.

    Nous avons appuyé le renouvellement de Un avenir en art, mais ce n'était que pour un temps déterminé. Je n'ai entendu aucune demande concernant un aspect du programme Un avenir en art ni aucune demande d'augmentation du financement en provenance des programmes du budget de services votés. Je comprends tout à fait le découragement que peuvent susciter les engagements annuels et je suis tout à fait en faveur du maintien sur plusieurs années du programme Un avenir en art. Je crois cependant que certains aspects de nos nombreux programmes culturels devraient être financés à partir du budget de services votés — ce qui signifie qu'ils devraient bénéficier d'un engagement permanent dans le budget des finances du gouvernement.

    M. Jamison pourrait peut-être répondre à ma question.

Á  +-(1115)  

+-

    M. Mark Jamison: Pouvez-vous me préciser votre question? Vous avez commencé à parler du programme Un avenir en art, mais je ne suis pas certain...

+-

    Mme Bev Oda: Vous demandez pour le Conseil des Arts du Canada une augmentation des crédits correspondant à 5 $ par habitant. Personne n'a précisé s'il s'agissait d'une augmentation annuelle, quinquennale ou autre...

    D'autre part, le Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada appuie le financement à tous les niveaux et l'augmentation des niveaux, mais là encore, je ne sais pas si toutes ces demandes ou recommandations portent sur un, trois ou cinq ans ou si certains programmes sont considérés comme si essentiels qu'ils devraient être financés à partir du budget de services votés du gouvernement.

+-

    M. Mark Jamison: Nous proposons évidemment que cette augmentation soit permanente et qu'elle soit revue de temps à autre pour s'assurer qu'elle est suffisante pour répondre aux besoins d'un environnement prenant de plus en plus d'ampleur. L'instabilité entraînée par la remise en question du financement d'une année sur l'autre ne nous permettrait tout simplement pas de répondre aux demandes ou aux attentes des groupes artistiques de plus en plus nombreux. Nous demandons une augmentation de 5 $ par habitant, augmentation permanente et révisée de manière régulière.

+-

    M. James Fleck: Je peux confirmer que du point de vue du CMAA, il s'agit d'un financement découlant du budget de services votés. Autrement dit, il s'agit d'un financement constant. Le programme Un avenir en art était un programme quinquennal, alors que nous réclamons un financement perpétuel, dans la mesure où une décision gouvernementale peut être immuable.

+-

    Mme Bev Oda: Merci.

    J'aimerais poursuivre avec un autre aspect, l'infrastructure. Je suis convaincue que nous devons nous pencher sur le rôle que jouent les arts dans notre système éducatif. Nous devons également nous intéresser aux arts et à la vie culturelle des collectivités, parce que je crois que c'est une dimension qui enrichit considérablement nos collectivités, qui stimule le Canada à l'échelle locale.

    À propos d'infrastructure, M. Solberg nous a parlé d'un tout nouvel établissement des arts de la scène à Medicine Hat. Beaucoup de collectivités investissent dans les installations sportives et négligent les établissements artistiques alors que la fréquentation des manifestations culturelles est plus grande que celles des événements sportifs. Je crois qu'il faut répéter ce message à la population canadienne.

    Monsieur Thomson, vous avez parlé d'infrastructure, de théâtres, y compris des nouveaux établissements, mais je me préoccupe de l'entretien de ces établissements. Nous avons entendu parler des difficultés d'entretien de nos musées, de nos archives, de nos établissements des arts de la scène. Pouvez-vous nous donner votre point de vue?

+-

    M. Robert H. Thomson: Je peux vous donner brièvement deux exemples. Mais auparavant, j'aimerais vous remercier d'appuyer le traité pour la diversité culturelle.

    Je vais prendre comme premier exemple un de nos meilleurs écrivains, Alistair MacLeod qui a écrit un merveilleux livre intitulé No Great Mischief. L'an dernier, on en a tiré une pièce de théâtre que nous avons jouée au Tarragon. Notre théâtre a 210 places. Tous les sièges étaient vendus six semaines avant de présenter la production, puisque notre théâtre ne dispose que de 210 places. Nous n'avions aucun moyen de répondre à la demande du public désireux de voir cette pièce, ce qui aurait rendu la production plus viable financièrement à long terme. Le Tarragon ne dispose pas de l'argent nécessaire pour agrandir sa salle de spectacle et augmenter ses recettes provenant du public plus vaste qui souhaite assister à la représentation d'oeuvres canadiennes.

    Nous ne sommes plus à l'époque où il n'y avait que 13 spectateurs chaque soir dans la salle pour voir des pièces canadiennes. Plus jamais on nous demande pourquoi nous montons des pièces canadiennes pour 13 personnes seulement, tout simplement parce que désormais, ces pièces sont présentées à guichets fermés. La pièce dont j'ai parlé a été présentée par la suite au GCTC à Ottawa. Par conséquent, le Tarragon ne dispose pas de l'infrastructure nécessaire pour présenter ce genre de pièce.

    Comme deuxième exemple, je citerai le cas de Shakespeare Works, la compagnie que je dirige et qui est à la recherche de 35 000 $ pour un programme d'alphabétisation dans les écoles du Nord de l'Ontario. Ce n'est pas beaucoup d'argent, 35 000 $, et pourtant, tous les ans, nous devons faire des pieds et des mains pour réunir une telle somme.

Á  +-(1120)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Thomson.

    Merci, madame Oda.

    Mme Wasylycia-Leis.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président et merci à tous.

    Cinq minutes ce n'est pas beaucoup — pouvez-vous nous en donner sept?

+-

    Le président: Vous allez les prendre de toute façon, alors je vous en donne quatre.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Très bien.

    J'ai beaucoup de questions, mais je vais d'abord m'adresser à RH Thomson que je remercie d'être venu bien qu'il soit en pleine préparation d'un spectacle.

    J'ai beaucoup aimé ce que vous avez dit au sujet du traité sur la diversité culturelle. Je ne vous en voudrai pas même si vous avez encensé le Parti libéral — j'aimerais encore vous demander un autographe — mais je pense que ce n'est pas un fait accompli. L'engagement du gouvernement canadien vis-à-vis des arts, de la culture, du cinéma, de la littérature et des musées est vraiment menacé. Liza Frulla parle beaucoup, fait énormément de promesses, signe de nombreux traités, mais il n'y a pas beaucoup d'argent derrière tout cela, ni la garantie que nous sommes prêts à faire quelque chose pour soutenir la diversité culturelle au Canada, la diversité culturelle indigène, afin de nous protéger de l'influence américaine.

    J'aimerais vous demander, monsieur Thomson, ainsi qu'aux autres représentants des arts, de la culture et des musées, comment nous allons nous y prendre pour que cela devienne réalité dans le prochain budget. On nous a dit que l'excédent budgétaire était important, de l'ordre de 10 milliards de dollars. Beaucoup de chefs d'entreprise réclament une diminution de l'imposition des entreprises, des gens d'affaires nous réclament des allègements fiscaux, plutôt que d'augmenter les dépenses. Je ne suis pas certaine non plus que les conservateurs soient vraiment sincères lorsqu'ils se disent favorables à l'utilisation des deniers publics pour la promotion des arts et de la culture. C'est pourquoi j'aimerais bien entendre votre point de vue à ce sujet.

    J'aurai ensuite une question pour Murray sur les services financiers et une question pour M. Wong concernant la taxe d'entrée.

+-

    Le président: Allez-y, monsieur Thomson, mais rapidement, parce que je dois également laisser la parole à M. McAvity et M....

    Allez-y.

+-

    M. Robert H. Thomson: Ça ne représente que deux donuts et un café. Ce n'est pas beaucoup et pourtant, cela donnerait des moyens extraordinaires au milieu des arts; les projets artistiques ne cessent de germer dans nos têtes, mais nous n'avons tout simplement pas les moyens de les réaliser.

    Opera Atelier est un autre exemple. C'est une brillante compagnie qui se produit dans le monde entier. Elle ne donne que sept spectacles au Canada, parce qu'elle n'a pas l'argent nécessaire pour jouer à Toronto. On pourrait aussi parler de Robert Lepage ou de De-Ba-Jeh-Mu-Jig de l'île Manitoulin. Ce sont des compagnies incroyables qu'on devrait voir plus souvent, mais comme elles ont du mal à survivre, on ne les voit que rarement.

    Les projets sont légion. Il nous suffirait de deux cafés et un donut.

+-

    M. James Fleck: J'aimerais rajouter quelque chose qui va exactement dans le même sens.

    La santé et l'éducation sont des secteurs qui nécessitent des milliards et des milliards de dollars. Ce qu'il y a d'extraordinaire avec les arts, c'est qu'un investissement relativement modeste produirait des résultats exceptionnels. Il est certain que l'on vous presse de tous côtés, mais dans ce cas-ci au moins, vous pouvez régler la question sans faire de grosses dépenses.

+-

    M. John McAvity: J'aimerais ajouter, si vous le permettez, que nous sommes bel et bien dans le domaine de la santé et de l'éducation.

    Mais je crois qu'il faut surtout souligner que c'est véritablement une question de survie — il s'agit de fonds de fonctionnement. Aucun d'entre nous ne réclame des fonds pour de grosses immobilisations et je pense que c'est très important dans la politique des musées et dans la demande du Conseil des Arts du Canada. Nous demandons des fonds de fonctionnement qui nous permettraient d'optimiser les installations qui existent déjà.

    Il est certain qu'il faudrait peut-être faire quelques dépenses pour des améliorations mineures et certaines immobilisations, cependant il ne s'agit pas de construire de nouveaux bâtiments, mais plutôt de rentabiliser les investissements qui ont déjà été faits.

Á  +-(1125)  

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Je comprends.

    J'ai une question rapide pour Murray Cooke. Vous n'avez pas eu vraiment l'occasion de nous parler de votre rapport sur les services financiers communautaires, un sujet qui préoccupe beaucoup d'entre nous. C'est le cas notamment de ma circonscription où toutes les banques ont fermé leurs portes.

    J'aimerais que ce budget contienne une disposition visant à assurer que toutes les collectivités aient accès à des services financiers. Qu'est-ce que vous nous recommandez de faire pour le moment?

+-

    M. Murray Cooke: Merci de votre question.

    Premièrement, je vais faire deux commentaires. Évidemment, les points de vue sont partagés.

    Nous devons appuyer le secteur des coopératives de crédit — et je sais que les représentants de ce secteur témoignent fréquemment devant votre comité. Ils savent mieux que moi comment promouvoir le réseau des coopératives de crédit.

    D'un autre côté, comme vous l'avez dit et comme je l'ai mentionné plus tôt, on constate que les banques quittent tous les quartiers du centre-ville. Les études montrent qu'il y a une relation très nette entre ces départs et l'arrivée des compagnies de prêt aux pratiques déloyales qui s'installent dans ces mêmes quartiers à Winnipeg ou Toronto.

    Il faut trouver une façon de les réglementer. Les taux d'intérêt qu'elles pratiquent actuellement sont nettement supérieurs à ceux fixés par le Code criminel du Canada; elles se livrent à des pratiques illégales de prêt. Les gouvernements fédéral et provinciaux doivent s'entendre afin de les réglementer. Je crois qu'il faudra absolument obtenir la collaboration des provinces pour aller au fond de ce problème. Il faut absolument que tous les paliers de gouvernement collaborent pour réglementer ce secteur.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.

    J'ai une question très rapide pour Victor Wong concernant les mesures de réparation et la taxe d'entrée imposée aux Chinois. Le projet de loi qui a été déposé au Parlement était apparemment assez bon au départ, mais il a été totalement vidé de sa substance. Devons-nous l'appuyer ou non?

+-

    M. Victor Wong: Vous ne devriez pas l'appuyer.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Nous ne devrions pas l'appuyer. Avez-vous quelque chose à rajouter sur la façon dont nous pouvons nous y prendre pour obtenir ce que vous demandez?

+-

    M. Victor Wong: Selon moi, ce que nous demandons, c'est une solution négociée, juste et honorable.

    J'aimerais que l'on s'inspire du modèle de la Nouvelle-Zélande qui a connu une situation analogue avec la capitation. Le gouvernement et le premier ministre Clark ont présenté leurs excuses à la communauté chinoise et enclenché un processus étalé sur deux ans qui prévoit des consultations à grande échelle avant d'annoncer un éventuel règlement de la question. Cela a permis d'amener les personnes concernées à la table de négociation.

    Malheureusement, les libéraux n'ont pas saisi cette occasion. Nous attendons toujours et nous espérons qu'avec votre aide et celle du comité, nous pourrons enfin tourner la page et fermer ce chapitre de l'histoire canadienne.

    Nous cherchons la réconciliation avec le gouvernement canadien, mais nous tenons à restaurer la dignité des personnes concernées.

+-

    Le président: Merci, monsieur Wong.

    Monsieur McKay.

+-

    L'hon. John McKay (Scarborough—Guildwood, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Puisqu'il suffirait de deux cafés et un donut, ne pensez-vous pas que ce serait une bonne idée de nous payer la tournée à Tim Hortons?

    Des voix: Ah, ah!

    Hon. John McKay: Moi, je suis partant.

    Ma question s'adresse aux gens d'affaires qui s'intéressent aux arts. Voulez-vous que les taux d'inclusion des gains en capital soient étendus des dons de valeurs mobilières aux dons en immobilier?

+-

    M. James Fleck: Le ministère des Finances tient toujours à ce que le prix du marché soit clairement établi, afin qu'il n'y ait pas de calculs douteux, si je peux m'exprimer ainsi. Je pense que ce serait tout à fait souhaitable, mais nous voulons bien entendu mettre au point auparavant la formule qui s'appliquera aux valeurs mobilières. Mais c'est d'accord pour les biens immobiliers.

    Par ailleurs, dans le cas des fondations privées, on estime qu'il est possible de trouver des solutions dans la mesure où l'on peut clairement établir le prix du marché.

+-

    L'hon. John McKay: C'est là que se trouve le problème et je n'en connais pas la réponse.

    Ma première question s'adresse au Conseil national des canadiens chinois. Je suis intéressé par votre deuxième idée de perspective raciale. Vous avez utilisé l'exemple du rabais relatif au combustible de chauffage.

    Tout d'abord, il ne s'agit pas d'un rabais concernant le combustible de chauffage. Il s'agit d'une aide énergétique reliée à la prestation nationale pour enfants et au supplément de revenu garanti. Les personnes admissibles à l'un ou l'autre de ces programmes bénéficieront du rabais de 125 $ ou de 250 $.

    Mais, ma foi, je ne vois là aucune discrimination raciale. Je représente une des circonscriptions les plus multiculturelles et les plus multiethniques du pays et je peux affirmer que tous les membres de ces communautés ethniques recevront l'aide prévue, s'ils sont bénéficiaires du SRG ou de la PNE. C'est aussi simple que cela.

    Aussi, je comprends votre question, mais je ne comprends pas votre exemple.

Á  +-(1130)  

+-

    M. Victor WongNous avons tout simplement utilisé le rabais pour combustible de chauffage comme argument pour décrire le programme. C'est un simple exemple pour montrer que les meilleures intentions se traduisent parfois par des résultats différents.

    L'aide en question est liée au régime des pensions. Elle s'adresse par conséquent aux personnes âgées à faible revenu qui reçoivent une pension. Les immigrants âgés doivent en général attendre 10 ans avant de pouvoir percevoir une pension. Ces immigrants qui appartiennent parfois aux classes à faible revenu sont par conséquent exclus du programme tel qu'il est conçu actuellement.

    Ce que nous disons, c'est que vous avez l'intention louable de cibler la population à faible revenu...

+-

    L'hon. John McKay: Mais, n'est-ce pas le cas pour n'importe quel programme? Il y a toujours des exclus. Grosso modo, le revenu maximal des personnes admissibles est fixé à 30 000 $ dans les deux cas. Devrions-nous le porter à 31 000 $? Cette limite serait-elle encore discriminatoire? Ou devrions-nous la baisser à 25 000 $? Il me semble que cet exemple affaiblit votre argument de base.

+-

    M. Victor Wong: Il s'agit simplement d'un exemple concret. Nous pourrons avoir un débat sur l'universalité à un autre moment. Une approche plus universelle serait peut-être préférable. Je veux tout simplement vous faire remarquer que si vous voulez adresser ce rabais aux personnes âgées à faible revenu en le liant au programme de pensions, vous excluez par inadvertance un groupe de personnes. Et je comprends bien que c'est par inadvertance et que vous ne le faites pas exprès.

+-

    L'hon. John McKay: Nous sommes donc d'accord que c'est par inadvertance, mais cela arrive dans tous les programmes. Celui-ci vise 10 p. 100 de la population canadienne, soit 3,1 millions de personnes. Par conséquent, 90 p. 100 de la population est exclue du programme et il y a beaucoup d'autres raisons qui justifieraient que d'autres personnes puissent aussi bénéficier d'une certaine aide pour supporter les fluctuations des coûts de l'énergie.

+-

    M. Victor Wong: Oui, et ce serait un autre débat que d'envisager une approche plus universelle. Mais ce sont là les critères précis que vous avez fixés pour ce programme de rabais. C'est ce que le gouvernement a annoncé jusqu'à présent.

    C'est peut-être un cas limite, mais si vous le voulez, nous pourrions avoir une discussion plus générale sur l'universalité de programmes comme celui des rabais pour combustible de chauffage. Vous avez raison en effet de dire que certaines familles qui ne perçoivent pas le crédit d'impôt pour enfants peuvent vivre des situations financières difficiles et auraient besoin d'un tel rabais.

    Par conséquent, je comprends votre point de vue.

+-

    L'hon. John McKay: C'est un point intéressant de politique publique. Par exemple, l'analyse comparative entre les sexes est très populaire dans les milieux qui s'intéressent à la politique publique. Si l'on tient compte de l'analyse comparative entre les sexes, il faudrait que l'allègement fiscal soit asymétrique afin de favoriser l'extrémité inférieure étant donné que l'on peut dire — en généralisant beaucoup — que les femmes payent moins d'impôts que les hommes. Par conséquent, si l'on opte pour un allègement fiscal, il faut le faire porter sur l'extrémité inférieure de la fourchette. Mais il y a toujours un effet pervers et quelle que soit la formule choisie, la discrimination est inévitable.

    Je prends note de votre point de vue qui me paraît valable. Cependant, je ne pense pas que l'exemple que vous avez utilisé soit le bon.

    J'aimerais demander une autre précision à M. Mayson. Dans votre exposé, vous avez parlé de 95 millions pour le fonds de la télévision canadienne et dans le document que vous avez déposé, il est question de 75 millions. À quel chiffre dois-je me fier?

Á  -(1135)  

+-

    M. Guy Mayson: C'est une bonne question M. McKay. Au total, il s'agit de 95 millions de dollars qui comprennent 20 millions de dollars pour tenir compte de l'inflation, une augmentation de 50 millions de dollars tenant compte des demandes que reçoit le fonds et un montant supplémentaire de 20 millions de dollars pour la télévision numérique. Vous savez certainement que la demande d'émissions numériques est énorme et pourtant, c'est tout ce que l'on demande du fonds actuellement. Le fonds est extrêmement sollicité.

    Nous reconnaissons tous que la constitution des auditoires est un enjeu très important. C'est très bien de mettre en place un fonds comme celui-là — je reconnais que c'est un fonds fabuleux — mais si l'on souhaite créer une masse critique d'émissions dans l'univers médiatique en expansion exponentielle que les Canadiens regardent, il faut vraiment que ce fonds dispose du financement approprié.

+-

    L'hon. John McKay: Très bien. Merci.

+-

    M. Stephen Ellis: J'aimerais ajouter un petit détail pour faire suite à la conversation sur le café et les donuts que nous avons eue ce matin... L'augmentation que nous proposons d'apporter au fonds des long-métrages au Canada est l'équivalent du coût d'un long-métrage d'Hollywood présenté en Amérique du Nord.

+-

    M. Massimo Pacetti: Merci.

    Avant de conclure, j'aimerais poser rapidement une question au Literary Press Group.

    Madame Wilcox, vous êtes en faveur de l'augmentation du financement du Conseil des Arts du Canada de l'ordre de 5 $ par habitant. Votre secteur est-il concerné? Est-ce que votre secteur reçoit un financement du Conseil des Arts du Canada?

+-

    Mme Alana Wilcox: Oui, les éditeurs reçoivent des subventions par l'intermédiaire du programme de subventions globales du Conseil des Arts du Canada; il nous appuie énormément. Nous sollicitons également l'aide du Conseil des Arts pour nos écrivains qui sont directement concernés par...

+-

    Le président: C'est l'autre fonds, le programme de développement du secteur de l'édition?

+-

    Mme Alana Wilcox: Et les écrivains reçoivent aussi directement des subventions du Conseil des Arts du Canada. La branche du Conseil des Arts qui s'occupe de la littérature et de l'édition appuie à la fois les éditeurs et les écrivains. Par conséquent, nous nous intéressons à ces deux mécanismes.

    Le ministère du Patrimoine canadien ne soutient pas les écrivains, seulement les éditeurs; c'est plus un modèle industriel.

-

    Le président: Merci.

    Notre comité n'a pas eu peur d'affirmer ses opinions politiques, mais parfois il faut le faire.

    Monsieur Thomson, merci d'avoir appuyé notre parti.

    Des voix: Ah, ah!

    Le président: Et monsieur Wong, vous avez égratigné le Parti libéral. Je n'ai pas aimé votre intervention, parce que nous avons le ministre Chan qui travaille à un programme. Par ailleurs, je rencontre souvent des gens de la communauté chinoise et je constate que les avis sont partagés au sein de votre communauté au sujet de la taxe d'entrée.

    J'ai aussi un projet de loi d'initiative parlementaire pour la communauté italienne. Les 25 millions de dollars ne s'adressaient pas à une seule communauté. La seule qui a accepté est la communauté ukrainienne. Ce n'est pas une question facile. Cela n'a rien à voir avec le Parti libéral; c'est une question que le ministère du Patrimoine canadien a confié à son secteur du multiculturalisme. Voilà pourquoi les 25 millions de dollars sont réunis dans un même programme. Je travaille avec eux. C'est difficile d'obtenir un consensus dans un groupe culturel quand on s'adresse à plusieurs interlocuteurs. C'est difficile.

    Là-dessus, merci d'avoir pris le temps de venir témoigner aujourd'hui. Le groupe de témoins était très semblable... mais le comité aura la tâche délicate d'examiner certaines de ces questions. Je vous remercie pour vos exposés.

    La séance est levée.