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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 31 octobre 2005




¹ 1530
V         Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.))
V         M. Ian McKillop (directeur, Canadian Cattlemen's Association)

¹ 1535

¹ 1540
V         Le président
V         M. Clare Schlegel (présidente, Conseil canadien du porc)
V         Le président
V         M. Clare Schlegel
V         M. Edouard Asnong (premier vice-président, Conseil canadien du porc)

¹ 1545
V         Le président
V         M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC)
V         Le président

¹ 1550
V         M. Henry Van de Velde (vice-président exécutif, Risque et stratégies d'intégration, Hytek Inc., Association de nutrition animale du Canada)

¹ 1555
V         Le président
V         M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, PCC)
V         M. Henry Van de Velde
V         M. David Anderson
V         M. Henry Van de Velde
V         M. David Anderson

º 1600
V         M. Edouard Asnong
V         Le président
V         M. Clare Schlegel
V         Le président
V         M. Ian McKillop
V         M. David Anderson
V         Le président
V         M. David Anderson
V         Le président
V         M. André Bellavance (Richmond—Arthabaska, BQ)
V         M. Edouard Asnong

º 1605
V         M. André Bellavance
V         M. Edouard Asnong
V         M. Ian McKillop
V         M. André Bellavance
V         M. Ian McKillop
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter (Malpeque, Lib.)

º 1610
V         M. Clare Schlegel
V         L'hon. Wayne Easter
V         M. Clare Schlegel
V         M. Henry Van de Velde

º 1615
V         L'hon. Wayne Easter
V         Le président
V         M. Charlie Angus (Timmins—Baie James, NPD)
V         M. Clare Schlegel
V         M. Charlie Angus
V         M. Clare Schlegel
V         M. Charlie Angus
V         M. Clare Schlegel
V         M. Charlie Angus
V         M. Clare Schlegel
V         M. Charlie Angus
V         M. Clare Schlegel
V         M. Edouard Asnong
V         M. Charlie Angus
V         M. Edouard Asnong

º 1620
V         M. Charlie Angus
V         M. Edouard Asnong
V         M. Charlie Angus
V         M. Edouard Asnong
V         Le président
V         M. James Bezan (Selkirk—Interlake, PCC)
V         M. Ian McKillop
V         M. James Bezan
V         M. Ian McKillop
V         M. James Bezan

º 1625
V         M. Ian McKillop
V         M. James Bezan
V         M. Ian McKillop
V         M. James Bezan
V         M. Ian McKillop
V         M. Edouard Asnong
V         M. James Bezan
V         M. Henry Van de Velde
V         Le président
V         Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.)

º 1630
V         M. Clare Schlegel
V         M. Henry Van de Velde
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Henry Van de Velde
V         M. Edouard Asnong
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Ian McKillop
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Henry Van de Velde
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Henry Van de Velde
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Henry Van de Velde
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Henry Van de Velde
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Henry Van de Velde
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Clare Schlegel

º 1635
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Clare Schlegel
V         Le président
V         M. Réal Lapierre (Lévis—Bellechasse, BQ)
V         M. Edouard Asnong
V         Le président
V         M. Ian McKillop

º 1640
V         Le président
V         Le président
V         Mme Ellen Mills (directrice, Élaboration des politiques, Produits alimentaires et de consommation du Canada)

º 1650

º 1655

» 1700
V         Le président
V         Mme Annalisa King (première vice-présidente, Coordination verticale, Aliments Maple Leaf Inc.)

» 1705

» 1710
V         Le président
V         L'hon. Mark Eyking (Sydney—Victoria, Lib.)
V         Mme Ellen Mills
V         L'hon. Mark Eyking
V         Mme Ellen Mills
V         Le président
V         Mme Ellen Mills
V         Le président

» 1715
V         Mme Ellen Mills
V         Mme Annalisa King
V         L'hon. Mark Eyking
V         Mme Annalisa King
V         L'hon. Mark Eyking
V         Le président
V         M. Larry Miller (Bruce—Grey—Owen Sound, PCC)
V         Mme Annalisa King
V         Le président

» 1720
V         M. Larry Miller
V         Mme Annalisa King
V         M. Larry Miller
V         Mme Ellen Mills
V         M. Larry Miller
V         Mme Ellen Mills
V         M. Larry Miller
V         Mme Ellen Mills
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter

» 1725
V         Mme Ellen Mills
V         Mme Annalisa King
V         Mme Ellen Mills
V         Le président
V         M. André Bellavance

» 1730
V         Mme Ellen Mills
V         Le président
V         Mme Rose-Marie Ur
V         Mme Annalisa King
V         Mme Rose-Marie Ur
V         Mme Ellen Mills
V         Mme Rose-Marie Ur

» 1735
V         Mme Ellen Mills
V         Mme Rose-Marie Ur
V         Mme Annalisa King
V         Mme Rose-Marie Ur
V         Mme Annalisa King
V         Mme Rose-Marie Ur
V         Mme Annalisa King
V         Le président
V         M. Gerry Ritz

» 1740
V         Mme Annalisa King
V         M. Gerry Ritz
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 061 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 31 octobre 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¹  +(1530)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.)): Mesdames et messieurs, je déclare la séance ouverte. Il manque encore quelques membres. Espérons qu'ils arrivent avant que nous ne soyons rendus trop loin.

    Cet après-midi, nous continuerons nos débats sur la question des importations de maïs, c'est-à-dire l'imposition d'un tarif sur le maïs provenant des États-Unis. Nous avons déjà tenu plusieurs séances à ce sujet.

    Cet après-midi, nous entendrons les témoignages de représentants de certaines industries liées à la production primaire de produits agricoles. Aujourd'hui, notre séance sera séparée en deux segments de une heure. Au cours de la première heure, nous entendrons le témoignage des représentants du Conseil canadien du porc, de la Canadian Cattlemen's Association et de l'Association de nutrition animale du Canada.

    Du Conseil canadien du porc, nous accueillons Clare Schlegel, président, qui n'en est pas à sa première présence devant notre comité, et Edouard Asnong, premier vice-président. De la Canadian Cattlemen's Association, il y a David Stewart, directeur exécutif de l'Ontario Cattlemen's Association -- bienvenue, David -- et Ian McKillop, directeur, qui a également déjà comparu devant le comité.

    De l'Association de nutrition animale du Canada, nous accueillons Henry Van de Velde, vice-président exécutif, Risques et stratégies d'intégration, Hytek Inc.; et Dennis Kornelsen, directeur des services des achats, Grain et ingrédients, Hytek Inc.

    Comme la déclaration préliminaire et les présentations sont terminées, permettez-moi de vous demander de commencer. Monsieur Schlegel, je crois que vous... Oh, c'est M. McKillop qui sera le premier à prendre la parole.

    Dans la mesure du possible, soyez aussi succinct que possible. Je comprends que vous avez un message à livrer. Nous voulons vous donner l'occasion de le faire, mais nous voulons également avoir du temps pour poser des questions. Vous disposez de une heure pour faire votre présentation, alors si vous pouvez nous aider, nous tenterons de faire la même chose pour vous.

    Monsieur McKillop.

+-

    M. Ian McKillop (directeur, Canadian Cattlemen's Association): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis heureux de présenter ce mémoire au nom de la Canadian Cattlemen's Association.

    Je m'appelle Ian McKillop. J'ai une ferme dans le sud-ouest de l'Ontario, près de Dutton. La terre appartient à ma famille depuis cinq générations, soit depuis 1851. J'y exploite une entreprise d'élevage-naissage de 140 vaches. Je cultive également du maïs, du soya, du blé et du fourrage. J'ai été élu au conseil d'administration de la Canadian Cattlemen's Association en 2003 et je suis en ce moment président de l'Ontario Cattlemen's Association. Je suis accompagné par David Stewart, qui est directeur exécutif de l'Ontario Cattlemen's Association.

    Nous avons remis le texte de notre exposé, et j'aimerais qu'il fasse partie du compte rendu du comité.

    Nous savons tous que les producteurs de bétail canadiens ont subi depuis deux ans et demi des pertes de marché et de revenu importantes comme aucun autre secteur agricole canadien n'en a encore connu. Nous n'avons pas cessé de travailler au rétablissement intégral de nos marchés, mais le plan stratégique mis de l'avant par l'industrie du bétail et du boeuf pour se repositionner commence tout juste à nous aider à redevenir rentables. Le plan stratégique a été principalement établi par la Canadian Cattlemen's Association et a été annoncé par le gouvernement fédéral en septembre 2004.

    Ce plan a pour objectif principal de rendre les producteurs canadiens de bétail moins dépendants de l'exportation d'animaux vivants. En gros, si nous acquérons la capacité d'engraisser et de transformer le bétail au Canada, nous pourrons nous immuniser contre d'autres pertes de marché possibles dans l'exportation des bovins sur pied.

    Le plan a été couronné de succès. La capacité d'abattage du bétail est déjà passée d'environ 72 000 têtes par semaine à environ 93 000. Elle devrait atteindre 103 000 têtes par semaine d'ici la fin de 2006.

    Le principal aliment d'engraissage des animaux au Canada est le grain. Le choix du type de grain dépend surtout du coût et de la disponibilité. Les bovins engraissés dans l'Ouest sont nourris principalement à l'orge, tandis que la plupart des bovins dans l'Est sont nourris au maïs. Les éleveurs canadiens, surtout ceux de l'Ontario, sont donc des clients des producteurs canadiens de maïs, mais ceux-ci cherchent à accroître le prix de notre intrant le plus vital.

    Nous sommes sympathiques à la situation financière des producteurs canadiens de maïs. Les représentants de la CCA et de l'OCA les ont rencontrés à plusieurs reprises l'été dernier et au cours des années précédentes pour tenter de trouver des solutions mutuellement acceptables. Nous avons proposé des moyens d'encourager les engraisseurs de bovins de l'Ontario à utiliser du maïs canadien quand l'offre est faible et que les prix sont élevés. En échange, nous avons demandé aux producteurs de maïs canadiens de nous assurer qu'ils continueraient d'approvisionner les engraisseurs de bovins en tout temps de l'année, même quand l'offre est basse et que les prix sont élevés.

    La réaction des producteurs de maïs a été décevante et a forcé les engraisseurs de bovins de l'Ontario à se tourner vers l'importation, en complément du maïs canadien, pour s'assurer un approvisionnement constant pendant l'année.

    Nous avons entendu des accusations selon lesquelles les engraisseurs de bovins voulaient simplement s'approvisionner à bon marché en maïs des États-Unis. La vérité n'est pas que nous voulons du maïs à bon marché, mais qu'il faut une parité de coûts entre les aliments de sources américaine et canadienne. La parité de coûts est absolument essentielle à la survie à long terme du secteur de l'engraissage du bétail canadien.

    Regardons le désavantage concurrentiel qui résultera si les aliments canadiens coûtent beaucoup plus cher que les aliments américains sur un marché nord-américain intégré du bétail et des bovins. Les engraisseurs américains seront en mesure d'utiliser l'avantage concurrentiel fourni par les aliments au moment de soumissionner pour les veaux, au détriment des engraisseurs canadiens. Les engraisseurs américains bénéficieront d'un prix de vente au seuil de rentabilité plus bas pour le bétail d'abattage. Les abattoirs américains auront accès à du bétail d'abattage à meilleur prix que les abattoirs canadiens. Le boeuf produit à partir du bétail gardé au Canada à des coûts d'alimentation plus élevés sera moins concurrentiel sur le marché de l'exportation, et la concurrence du boeuf importé sur le marché intérieur sera plus forte.

    Tous les objectifs du plan stratégique pour repositionner les industries du bétail et des bovins souffriront de l'imposition de droits de douane sur les importations de maïs des États-Unis. En résumé, les producteurs canadiens de bétail et les entreprises de conditionnement produiront moins de boeuf, et les consommateurs canadiens mangeront plus de boeuf importé. Pour vous dire la vérité, nous avons l'impression d'être jetés à terre avant même d'avoir eu la chance de nous remettre sur pied.

¹  +-(1535)  

    Nous sommes aussi inquiets des réactions possibles des Américains face à des volumes beaucoup plus élevés d'exportation d'animaux vivants aux États-Unis pour profiter des coûts plus bas des aliments.

    La seule solution dont dispose l'industrie canadienne du bétail pour compenser le désavantage concurrentiel qui serait créé par l'imposition de droits de douane sur le maïs américain serait de demander le remboursement de ces droits de douane au moment de l'exportation du bétail ou du boeuf engraissé. En ce cas, il faudrait effectuer un suivi des droits de douane payés sur le maïs importé et demander un remboursement au moment de l'exportation du bétail ou du boeuf.

    Le remboursement de douane est d'une grande complexité administrative, mais l'autre solution, c'est-à-dire nourrir le bétail en situation de désavantage concurrentiel, n'est tout simplement pas viable. Malheureusement, même cette formule encouragera fort probablement la vente du bétail engraissé aux États-Unis au lieu de nous permettre d'utiliser la capacité canadienne de transformation que nous avons tant cherché à accroître.

    Dans un cas comme dans l'autre, que les veaux canadiens soient engraissés aux États-Unis ou qu'ils le soient au Canada avec remboursement de douane, l'imposition de droits de douane finira par faire baisser la demande de maïs canadien, laissant les producteurs canadiens de maïs dans une situation pire que maintenant.

    Nous comprenons que les utilisateurs de maïs notamment les engraisseurs canadiens de bétail, n'auront pas l'occasion d'influer sur la vision du Tribunal canadien du commerce extérieur avant la phase d'intérêt public qui suivra sa décision finale concernant l'existence d'un préjudice. Il est possible par conséquent que des droits de douane soient imposés et perçus pendant au moins quatre mois avant que nous ayons la possibilité de témoigner devant le Tribunal, et qui sait combien de temps s'écoulera avant que les recommandations ne soient mises en oeuvre.

    Monsieur le président et membres du comité, nous témoignons devant vous aujourd'hui pour vous demander votre avis et votre aide concernant ce que le Parlement peut faire pour éviter cette situation extrêmement grave et porteuse de conséquences aussi négatives pour l'industrie canadienne du bétail.

    J'aimerais remercier le comité de m'avoir donné l'occasion de témoigner et de vous parler de ce problème. Nous serons heureux de répondre aux questions à la fin des exposés. Merci.

¹  +-(1540)  

+-

    Le président: Merci, monsieur McKillop.

    Monsieur Schlegel, avez-vous un exposé à présenter?

+-

    M. Clare Schlegel (présidente, Conseil canadien du porc): Oui.

+-

    Le président: D'accord.

+-

    M. Clare Schlegel: Merci.

    Le Conseil canadien du porc est une fédération des associations provinciales de producteurs de porcs. Il représente les intérêts nationaux et internationaux de plus de 10 000 producteurs de porcs au Canada.

    En 2004, l'industrie canadienne du porc a mis en marché plus de 31 millions de porcs, dont 23 millions environ ont été transformés au Canada; les huit autres millions de porcs, ou peut-être un peu plus que cela, ont été exportés vivants vers les États-Unis.

    Si l'on comptabilise les ventes à l'exportation de porcs vivants et plus de 900 000 tonnes de porcs et de produits du porc expédiées dans un peu moins de 100-pays partout dans le monde en 2004, l'industrie a généré des recettes d'exportation de 3,4 milliards de dollars au Canada l'année dernière. Plus de la moitié de notre production porcine est au bout du compte vendue à des consommateurs vivant à l'extérieur du Canada.

    Le CCP remercie le comité d'avoir organisé cette discussion sur un sujet d'une grande importance pour les éleveurs de bétail, mais qui est tout de même litigieux au sein du milieu agricole.

    Nous aimerions commencer par présenter les points de notre approche qui sont en opposition avec l'action commerciale en cours sur le maïs.

    Tout d'abord, les producteurs de porcs canadiens ne veulent pas avoir accès à du maïs bon marché ou subventionné. Nous préférons de loin voir les marchés, qu'il s'agisse du nôtre ou de celui de nos fournisseurs d'intrants et de nos clients en aval, fonctionner sans subventions gouvernementales, tarifs douaniers ou autres mesures de protection qui faussent les échanges. Le fait que nous dépendions des marchés d'exportation pour plus de la moitié de notre production exige cependant que nous ayons accès à du maïs à des prix concurrentiels à l'échelle internationale.

    Ensuite, nous ne contestons pas le fait que la perte du soutien au Programme d'assurance-revenu du marché de l'Ontario ait affaibli le programme de protection de revenu accessible aux producteurs de maïs de l'Ontario et qu'il est intrinsèquement injuste que les mécanismes de protection de revenu des agriculteurs de l'Ontario diffèrent de ceux offerts dans d'autres régions de l'ALENA, surtout aux États-Unis.

    De plus, nous ne croyons pas que l'imposition de mesures de rétorsion sur le maïs américain aura des effets punitifs remarquables sur les États-Unis. En d'autres mots, cela ne changera pas le prix du maïs aux États-Unis. Comme les producteurs de maïs américains exportent très peu leurs produits vers le Canada -- moins de 1 p. 100 -- les tarifs ou les droits de douane canadiens ne diminueront pas les prix de ces producteurs de façon à les persuader de demander des réformes de leurs programmes agricoles. Nous croyons que la plupart des inconvénients découlant des droits de douane seront vécus par les utilisateurs de maïs du Canada.

    Enfin, le CCP n'accepte pas non plus que les producteurs de porcs portent une si grande part du fardeau causé par le déséquilibre entre les États-Unis et le Canada au chapitre du soutien gouvernemental, situation qui surviendrait si les producteurs de porcs devaient payer davantage pour le maïs, et fort probablement pour d'autres céréales fourragères, en raison des mesures de rétorsion.

    Le déséquilibre entre les subventions offertes en Ontario et aux États-Unis est une question d'intérêt public à laquelle doit s'intéresser le public canadien, pas seulement les utilisateurs de maïs. De plus, il faudrait régler la question en faisant attention de ne pas nuire à l'économie canadienne en raison d'une diminution de la concurrence au chapitre des exportations et d'une perte d'occasions d'affaires à valeur ajoutée au profit des États-Unis et d'autres pays concurrents, qui auront un avantage important sur le Canada sur le plan des coûts des céréales.

    Je vais céder la parole à Edouard Asnong, qui présentera le reste de notre exposé.

[Français]

+-

    M. Edouard Asnong (premier vice-président, Conseil canadien du porc): Je ferai ma présentation en français.

    Les abattoirs de porcs canadiens ont besoin de fournisseurs de porcs qui peuvent être économiquement viables à long terme. De la même manière, les producteurs de porcs canadiens ont besoin d'une industrie de céréale domestique économiquement viable à long terme. Étant donné que nous sommes si dépendants des exportations et de la nécessité de rester compétitifs face à nos principaux rivaux étrangers, un changement important dans n'importe quel secteur de la chaîne de valeurs, des intrants aux produits finis, peut avoir des effets sur tous les secteurs de l'industrie.

    L'imposition de droits de douane sur le maïs américain pourrait procurer à nos compétiteurs sur le marché mondial — non seulement les États-Unis, mais aussi le Brésil et d'autres — un avantage important pour les porcs de finition. Cependant, nos problèmes ne s'arrêteraient pas là.

    Nous prévoyons une série d'événements qui pourraient nous mener une fois de plus à devoir nous défendre contre des efforts américains pour l'imposition de droits compensatoires sur les porcs vivants en provenance du Canada. Plus tôt cette année, le Canada a réussi à éviter l'imposition permanente de droits compensatoires et antidumping sur les porcs vivants, dans une cause entamée par le National Pork Producers Council. Les producteurs de porcs canadiens ont dépensé plus de 12 millions de dollars seulement pour assurer leur défense, sans compter les coûts de droits de douane provisoires et de sérieuses incertitudes pour la planification à long terme des affaires. Nous soulignons le fait qu'il s'agissait du troisième conflit commercial que l'industrie de la production et de l'abattage des porcs a eu à vivre au cours des 20 dernières années, et que nous avons eu un droit compensatoire sur les porcs vivants pendant 15 de ces années.

    Même si nous avons gagné, nous sommes très préoccupés par la reprise des efforts américains pour lancer une nouvelle enquête.

    Si les propositions des producteurs de maïs du Canada pour l'imposition de droits de douane devaient être mises en place, les droits compensatoires et antidumping sur le maïs américain ajouteraient de 5 $ à 10 $ au coût d'un porc de finition au Canada. Leur avantage important en matière de coûts des aliments permettrait aux entreprises finisseuses de porcs américaines de payer beaucoup plus cher pour des porcs en engraissement canadiens que les entreprises finisseuses canadiennes ne seraient en mesure de le faire. Cela entraînerait des volumes plus élevés d'importation de porcelets aux États-Unis.

    Non seulement cela aurait-il pour effet de chasser les porcelets du marché canadien, où ils pourraient être engraissés avec des grains canadiens et abattus dans des usines canadiennes, mais cela augmenterait de beaucoup le risque que ces producteurs américains, opposés aux importations, n'entament une autre action commerciale contre le Canada.

    Maintenant que nous avons expliqué les problèmes causés à l'industrie canadienne du porc par l'imposition de droits sur les importations de maïs, on peut se demander à quelle situation font face les producteurs de maïs canadiens.

    En prenant position contre l'imposition de droits compensatoires sur les importations de maïs américain, le Conseil canadien du porc a aussi entrepris d'engager un dialogue avec les producteurs de maïs pour trouver, aux droits compensatoires, des alternatives qui les rassureraient.

    Ils nous ont parlé de l'inadéquation des programmes de protection du revenu de l'Ontario, et nous avons étudié leurs propositions en vue d'une couverture accrue en matière de gestion de risques.

    Le Conseil canadien du porc recommande: que le gouvernement du Canada, à la demande des producteurs de maïs du Canada, entame un processus de résolution des conflits devant l'OMC et conteste la légalité des subventions au maïs américain; qu'il y ait un examen des alternatives permettant d'évaluer la pertinence des programmes de protection du revenu qui ont été développés pour les producteurs de maïs du Canada, incluant la proposition sur la gestion des risques mise de l'avant par le Comité sur les grains et les oléagineux de l'Ontario, en prenant pleinement en considération les répercussions sur les utilisateurs du maïs comme l'industrie du porc.

    Il est absolument essentiel que toute modification ou ajout aux programmes de protection du revenu soit conçus de façon à minimiser les risques de mesures compensatoires pour les industries d'exportation. Cela veut dire qu'il faut s'assurer: que toute nouvelle initiative ne remettra pas en question la neutralité commerciale du programme PCSRA; que le problème ne sera pas transféré aux utilisateurs du produit affecté; qu'ils seront conformes aux engagements canadiens à l'OMC en matière de support domestique.

    Merci de nous avoir fourni l'occasion de nous exprimer sur les questions liées à l'importation de maïs des États-Unis. Nous serons heureux de répondre à toutes les questions que les membres du comité pourraient avoir.

¹  +-(1545)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Nous allons commencer la période de questions. Je vais imposer une limite de cinq minutes pour ce segment, car il y a de nombreux membres mais peu de temps.

+-

    M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC): Nous n'avons pas encore entendu le représentant de l'Association de nutrition animale du Canada.

+-

    Le président: Je suis désolé. Je pensais à ce qui s'en venait, je regardais le temps qu'il me restait.

    Monsieur Van de Velde, avez-vous un exposé à présenter?

¹  +-(1550)  

+-

    M. Henry Van de Velde (vice-président exécutif, Risque et stratégies d'intégration, Hytek Inc., Association de nutrition animale du Canada): Merci, monsieur le président.

    Je suis Henry Van de Velde, vice-président exécutif, Risques et stratégies d'intégration, de Hytek Ltée située à La Broquerie, au Manitoba. Je suis accompagné par Dennis Kornelsen, gestionnaire des achats de grains et d'ingrédients de Hytek.

    Hytek est une entreprise intégrée qui se livre à la production porcine au Manitoba. Notre exploitation compte 50 000 truies qui mettent bas plus de un million de porcs par année. Nous sommes également un important fabricant d'aliments pour animaux.

    J'aimerais ajouter que Hytek est détenu à 90 p. 100 par cinq familles d'agriculteurs, y compris la mienne. Hytek emploie 326 personnes réparties dans nos collectivités agricoles locales. Nous travaillons avec plusieurs familles d'agriculteurs à l'échelle locale pour offrir un produit de qualité destiné au marché mondial de l'exportation.

    Dennis et moi sommes ici aujourd'hui au nom de l'industrie canadienne de l'alimentation animale. L'ANAC est l'association professionnelle nationale qui représente environ 90 p. 100 des fabricants et fournisseurs commerciaux de produits de nutrition animale au Canada. Parmi les membres de l'ANAC, on trouve des fabricants d'aliments destinés au bétail et à la volaille, de même que des fournisseurs de grains, de moulées d'oléagineux, de micro-ingrédients et d'autres services à l'industrie.

    À titre d'utilisateur important de grains fourragers, l'industrie de l'alimentation animale accueille favorablement l'occasion de partager ses opinions sur les importations de maïs américains et sur la plainte déposée par les producteurs canadiens de maïs concernant les allégations de parrainage et de dumping.

    J'aimerais d'abord commencer par vous parler un peu de notre industrie. Chaque année au Canada, le bétail consomme environ 25 millions de tonnes métriques d'aliments. Cela comprend l'industrie commerciale de l'alimentation animale, dont les ventes atteignent plus de 3,5 milliards de dollars canadiens et qui emploie quelque 9 000 personnes dans 550 provenderies de partout au pays. Chaque année, le secteur commercial fabrique environ 15 millions de tonnes métriques d'aliments pour animaux. Le reste provient d'établissements non commerciaux à la ferme.

    Selon nos estimations, les secteurs du porc, des bovins laitiers et de la volaille représentent environ 85 % de la consommation de tous les aliments fabriqués et vendus par les provenderies commerciales. Comme vous le savez tous, les producteurs de maïs du Manitoba, de l'Ontario et du Québec ont déposé une plainte visant des mesures anti-dumping et des droits compensatoires à l'égard des importations de maïs-grain des États-Unis. Des droits provisoires, actuellement estimés à 1,20 $ canadien le boisseau, pourraient être imposés et perçus à compter du 15 décembre 2005. Une telle mesure, si elle se concrétise, fera augmenter le prix du maïs et d'autres grains fourragers produits au Canada.

    L'imposition de droits sur les importations de maïs aura des conséquences très négatives pour les utilisateurs de maïs, les fabricants d'aliments et les éleveurs de bétail. Même si le Tribunal canadien du commerce extérieur décide éventuellement de réduire les droits dans l'intérêt du public, des droits pourraient être tout de même perçus pendant une période de huit à neuf mois, voire pendant plus longtemps.

    Nous nous présentons devant le comité aujourd'hui pour vous faire part du fait que l'industrie de l'alimentation animale se préoccupe grandement de l'application potentielle de droits sur les importations de maïs américain. Non seulement le prix des importations de maïs américain augmentera-t-il, mais ces droits contribueront à hausser le prix du maïs canadien et d'autres grains fourragers. Cette augmentation affectera également tous les autres agriculteurs qui doivent acheter des ingrédients entrant dans la composition des aliments pour animaux.

    La possibilité que des droits soient appliqués sur le maïs influe déjà sur le marché. Nous avons déjà constaté un dérèglement dans les achats réguliers de maïs en réaction à la tenue d'une enquête. Les producteurs nationaux de maïs ont commencé à stocker leur produit dans l'espoir de toucher un prix plus élevé. Dans plusieurs régions du pays, les acheteurs de grain ont cessé de commander du maïs à l'avance.

    L'imposition de droits sur le maïs aura des répercussions importantes sur la production d'aliments et sur les utilisateurs de ces produits. Les aliments destinés aux animaux sont composés à 80 p. 100 de grains fourragers -- soit du maïs, du blé ou de l'orge. Le coût de l'alimentation est la composante la plus importante du coût de production. Comme certains d'entre vous le savez déjà, 50 p. 100 des coûts d'élevage sont attribués à l'alimentation. Si des droits sont imposés sur le maïs, les éleveurs de bétail en subiront les conséquences, les producteurs de porc et de bétail étant le plus à risque.

    Les conséquences éventuelles d'une telle mesure sont importantes. En 1998, Hytec a vendu 100 p. 100 de sa production aux États-Unis sous forme de porcelets de 50 livres. Aujourd'hui, 60 p. 100 de sa production est élevée et transformée au Canada. L'élevage et la transformation de bétail jouent un rôle important dans l'amélioration de la viabilité économique du secteur agricole au Canada.

    Le Canada a besoin des marchés d'exportation. Nous produisons simplement au-delà de nos besoins de consommation. Il est donc nécessaire que le Canada produise des produits que le reste du monde est prêt à acheter.

    Bon nombre d'éleveurs canadiens de bétail ne pourraient livrer concurrence étant donné le coût plus élevé des aliments. S'il n'est plus rentable d'élever et de nourrir des animaux au Canada, les producteurs pourraient expédier les jeunes animaux aux États-Unis pour épargner les frais d'alimentation. Des pressions accrues seraient alors exercées sur un secteur qui a déjà connu sa part de difficultés au cours des dernières années.

    Dans certaines régions du Canada, nous éprouvons déjà de la difficulté à offrir des produits de maïs en quantités suffisantes. En 2004, le gel a réduit notre approvisionnement de maïs local. En 2005, un ensemencement tardif causé par l'humidité excessive a contribué à réduire notre approvisionnement de maïs local. L'humidité excessive a également augmenté les niveaux de mycotoxines dans le blé et l'orge. L'industrie porcine doit avoir régulièrement d'accès à des grains fourragers dont les niveaux de mycotoxines sont inférieurs à 500 parties par milliard.

¹  +-(1555)  

    Comme vous pouvez le constater, l'imposition de droits sur les importations de maïs aura des conséquences importantes qui doivent être prises en considération.

    Nous sommes déçus que les producteurs canadiens de maïs aient demandé au gouvernement canadien de mener une enquête sur l'importation de maïs-grain. Il existe de meilleures façons de régler ce problème, comme convaincre les États-Unis de réduire leurs subventions au secteur du maïs dans le cadre des négociations de l'OMC.

    L'industrie de l'alimentation animale est sensibilisée aux difficultés qu'éprouvent actuellement les producteurs de maïs. Toutefois, il est important que les solutions à leur problème ne fassent pas vivre leurs difficultés à d'autres producteurs. Malheureusement, les producteurs de maïs ont choisi de se servir de leurs clients pour obtenir une garantie améliorée de leurs revenus.

    Comme toujours, l'ANAC est disposée à participer à l'élaboration d'une solution de rechange qui répondrait aux préoccupations des producteurs de maïs sans nuire aux autres secteurs de la chaîne agro-alimentaire.

    En résumé, les industries à valeur ajoutée de l'élevage du bétail et de la surtransformation sont des composantes essentielles de la viabilité économique du secteur agricole au Canada. Nous devons nous pencher sur des méthodes de diversification et d'expansion sur ce marché mondial extrêmement concurrentiel pour garantir que notre famille et celle de nos enfants peuvent poursuivre et choisir une carrière en agriculture, comme nos ancêtres l'ont fait il y a plusieurs années en utilisant pour la première fois leur charrue.

    Nous vous remercions, monsieur le président, du temps que vous nous avez accordé.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Van de Velde.

    Nous allons donc commencer notre période de questions. M. Anderson souhaite prendre la parole en premier. Vous avez cinq minutes.

+-

    M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, PCC): Merci, monsieur le président.

    Ma question concerne l'exposé du représentant de l'Association de nutrition animale du Canada; j'aimerais vous demander de m'expliquer quelque chose. Vous avez déclaré que l'Agence des services frontaliers du Canada avait parlé de la possibilité d'imposer des droits de 1,20 $ le boisseau. Lorsque les représentants de l'ASFC ont témoigné ici, ils ont déclaré qu'il y avait, selon eux, une marge de dumping moyenne de 4,4 p. 100. L'industrie a fait mention d'une moyenne beaucoup plus élevée que celle-là. Mais sur un prix moyen de 2,86 $, cela représente, si je ne me trompe, 12 ¢ ou 15 ¢, ou quelque chose comme cela.

    Pouvez-vous me dire à quel moment l'ASFC a parlé d'un montant de 1,20 $? Ses représentants n'étaient pas prêts à utiliser un tel chiffre. Pouvez-vous me dire où vous l'avez trouvé?

+-

    M. Henry Van de Velde: Ce montant m'a été fourni par l'ANAC elle-même. On a parlé de ce chiffre à quelques reprises. Moi-même, je ne suis pas absolument certain d'où il provient.

+-

    M. David Anderson: On a demandé aux représentants de l'Agence s'ils avaient une idée du droit que l'on pourrait imposer, mais ils étaient très réticents à répondre, c'est pourquoi j'aimerais savoir d'où ce chiffre provient.

    Il ne correspond pas au rapport de l'Agence des services frontaliers. On y parle plutôt d'un subside de 91 ¢ US sur les prix de cette année. L'année dernière, c'était 44 ¢ ; cette année, c'est 91 ¢. J'imagine que nous présumons tous que cette situation affecte le prix aux États-Unis, ce qui a également des incidences négatives sur notre prix.

    Vous parlez tous du fait que vous ne voulez pas du maïs à bon marché et que vous plaignez les producteurs. Mais vous profitez de ces 91 ¢. Pourquoi devrait-on s'attendre à ce que les producteurs canadiens fassent concurrence au trésor américain? Pourquoi seraient-ils les seuls à ressentir le plein effet de ces 91 ¢ sur le prix du maïs?

    L'un d'entre vous peut répondre, ou plusieurs d'entre vous pouvez le faire.

+-

    M. Henry Van de Velde: Selon notre point de vue, je crois que ce qui est important pour nous, c'est que nous devons être en mesure de faire concurrence sur le marché mondial lorsque nous exportons nos produits à valeur ajoutée. En 1998, nous avons produit environ 24 000 tonnes d'aliments et nous fabriquons actuellement plus de 240 000 tonnes d'aliments, simplement pour répondre à nos propres besoins. Le fait que nous renvoyions la production dans l'Ouest canadien, d'où provenaient tous ces aliments, explique cette situation.

    Nous avions également l'habitude d'élever beaucoup de porcs aux États-Unis, ce qui est toujours le cas aujourd'hui. Si nous sommes obligés de couvrir ces frais supplémentaires que nous ne sommes pas tenus de payer pour notre production américaine, nous éprouverons beaucoup de difficulté à vendre notre production au Canada à un prix concurrentiel. Au bout du compte, nous, dans l'Ouest canadien, devons faire concurrence aux autres producteurs sur un marché mondial, que nous soyons d'accord ou non. Nous exporterons notre produit vers d'autres pays. Nous devons simplement choisir ce que nous exporterons. Mais nous ne pouvons offrir notre produit à un prix élevé, car il disparaîtra tout simplement.

+-

    M. David Anderson: Je n'ai aucun problème avec le fait de concurrencer d'autres producteurs sur un marché mondial. Je crois que c'est excellent. Mais en vérité, le trésor américain subventionne le prix du maïs en offrant un montant de quelque 90 ¢ le boisseau, montant que devraient tout simplement payer les agriculteurs canadiens, comme l'ont proposé la plupart des représentants que nous avons entendus aujourd'hui. Je trouve cette proposition inacceptable.

    Je n'ai entendu qu'un seul représentant des entreprises de transformation et de l'industrie venir près de dire que nous devrions remettre en question le Farm Bill américain à ce chapitre. On a émis une seule proposition ici aujourd'hui. En réalité, les agriculteurs devront payer ce droit si l'on ne fait rien, et je me demande simplement comment on peut s'attendre à ce qu'ils soient capables de le faire.

º  +-(1600)  

[Français]

+-

    M. Edouard Asnong: Dans ma présentation, j'ai dit que les producteurs de maïs devaient être soutenus par des programmes de subventions ou autres. Les producteurs de maïs canadiens ne doivent pas être pénalisés. La pire chose qui puisse nous arriver serait qu'ils arrêtent de produire du maïs. Nous ne serions pas plus avancés. Nous sommes en compétition avec les producteurs américains et nous devons avoir accès aux intrants au même prix que nos compétiteurs américains. Les producteurs de maïs canadiens n'ont pas à se battre contre le Trésor américain, c'est le Trésor canadien qui doit mener cette bataille. J'ai aussi dit dans ma présentation qu'on encourageait les producteurs de maïs à aller devant l'OMC dénoncer la situation ou vérifier la légalité des subventions américaines.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Schlegel, avez-vous un commentaire à formuler?

+-

    M. Clare Schlegel: Je crois que c'est très simple. Le prix du maïs doit être semblable aux États-Unis et au Canada. Cette mesure ne changerait pas le prix du porc, problème auquel nous faisons face actuellement. Elle augmenterait le prix du maïs au Canada, le prix des aliments au Canada, mais nous pourrions vendre notre produit à un prix concurrentiel. Je crois que c'est également vrai pour le boeuf.

+-

    Le président: Monsieur McKillop, est-ce la même situation?

+-

    M. Ian McKillop: C'est exactement la même situation pour le boeuf, et j'aimerais simplement préciser que, pour chaque dollar de différence entre le prix du maïs américain et celui du maïs canadien, cela ajouterait 60 $ par tête au coût lié à l'engraissement d'un animal au Canada. Il s'agit d'un montant qu'on ne peut couvrir lorsque l'on vend des produits sur le marché mondial et que l'on fait concurrence à des pays comme les États-Unis.

+-

    M. David Anderson: Puis-je demander une précision à ce sujet?

+-

    Le président: Nous n'avons vraiment plus de temps et nous devons poursuivre si nous voulons entendre tous les témoins.

+-

    M. David Anderson: Était-ce un dollar pour le maïs?

+-

    Le président: Oui, un dollar pour le maïs.

    Monsieur Bellavance.

[Français]

+-

    M. André Bellavance (Richmond—Arthabaska, BQ): Merci, monsieur le président.

    Merci, messieurs, de vos présentations. Au sujet de l'OMC, les producteurs canadiens de maïs demandent au Canada d'être plus actif sur ce plan; cela fait partie de leur offensive. Le ministre du Commerce international a déclaré qu'il agirait très rapidement. Dans le langage du gouvernement, cela n'est pas toujours aussi rapide qu'on le voudrait.

    J'apprécie beaucoup le fait que vous ayez pris la peine de présenter vos propres solutions. Par contre, comme vous l'avez dit, monsieur Asnong, vous ne pouvez pas souhaiter non plus que les producteurs de maïs disparaissent. Lors de leur présentation devant le comité, ils ont dit que ce n'était pas par plaisir qu'ils demandaient au Canada de faire cette plainte devant le Tribunal canadien du commerce extérieur, mais parce qu'ils étaient poussés dans leurs derniers retranchements. Cela aussi fait partie de leur offensive.

    Vous avez discuté avec eux. Quel genre d'entente pourriez-vous prendre avec eux pour aider à dénouer l'impasse actuelle? Vous demandez au Parlement de se pencher sur la question, mais je demande à chacun d'entre vous quelles sont vos suggestions pour tenter de dénouer l'impasse?

+-

    M. Edouard Asnong: Le PCSRA ne semble pas fonctionner pour les producteurs de céréales en général. Les marges de référence sur lesquelles le programme est basé sont en déclin continuel. S'il n'y a plus de marge de référence positive, le programme ne paie plus. Y a-t-il moyen d'adapter ce programme? Nous leur avons aussi demandé s'il y avait moyen de développer un programme dans ce qu'on appelle une « boîte bleue » ou d'autres programmes moins susceptibles d'être contestés. Il est certain que les producteurs de maïs doivent continuer à produire, parce que nous devons continuer à acheter du maïs et nous avons besoin d'eux.

    Par contre, je ne sais pas si nous devons en absorber le coût. Eux aussi ont besoin de nous et de notre clientèle. Il y aurait donc lieu d'explorer, avec le gouvernement, une façon d'adapter les programmes d'aide et la possibilité de développer d'autres programmes d'aide.

º  +-(1605)  

+-

    M. André Bellavance: Quelqu'un d'autre souhaite-t-il répondre?

    Avez-vous déjà pensé à une offensive commune pour obtenir des modifications au PCSRA et la possibilité de créer d'autres programmes? Croyez-vous que ce serait une avenue qui pourrait être intéressante? Le nombre de participants pourrait donner du poids à cette démarche. Avec l'aide des partis d'opposition, les choses pourraient bouger. Avez-vous déjà envisagé cela?

+-

    M. Edouard Asnong: Oui, nous avons déjà parlé avec les producteurs de céréales de l'intérêt que nous aurions à faire une offensive.

    Actuellement, nous sommes à établir quel programme serait acceptable. Nous comprenons que les producteurs de céréales ou de maïs n'exportent pas. Cependant, nous devons faire attention à la structure des programmes de soutien. Si nous soutenons un intrant ou un autre production, cela peut aussi créer ce qu'on appelle en anglais un pass through et avoir un effet sur la production qu'on exporte. Il faut donc créer un programme pour que ce phénomène ne se produise pas. Nous étudions cela. Mais il est certain que nous allons faire front commun pour que nous en sortions tous gagnants.

[Traduction]

+-

    M. Ian McKillop: L'industrie du bétail a fait beaucoup de lobbying afin que l'on apporte des changements au PCSRA en vue d'améliorer son efficacité pour l'agriculture canadienne, pour l'ensemble des producteurs canadiens. Les changements apportés au PCSRA se feront lentement. Il y a des changements pluriannuels. Cette mesure relative au commerce du maïs pourrait probablement avoir un effet immédiat. Les membres du TCCE doivent prendre leur temps pour examiner de façon approfondie les deux aspects de cette question. Nous ne pouvons permettre aux membres du Tribunal de prendre une décision rapide à ce sujet. Ils doivent mener un examen adéquat. Ils doivent tenir compte des intérêts des deux parties.

[Français]

+-

    M. André Bellavance: Monsieur McKillop, vous nous demandiez dans votre allocution ce que peuvent faire le Parlement et les parlementaires pour dénouer l'impasse, qui est grave pour l'ensemble de l'industrie. Au fond, vous répondez à votre propre question et, à l'instar des producteurs canadiens de maïs, vous avez des solutions en tête.

[Traduction]

+-

    M. Ian McKillop: Je crois que, pour l'instant, le président de l'Agence des services frontaliers du Canada ne doit pas imposer de droits provisoires. C'est une décision discrétionnaire, et le président devrait utiliser son pouvoir discrétionnaire pour autoriser la tenue d'une enquête.

    De même, l'enquête d'intérêt public et l'enquête de dommage devraient être menées en même temps pour permettre de formuler des recommandations au moment où l'on rend la détermination finale de dommage.

    Encore une fois, il faut mettre l'accent sur le fait que l'on doit enquêter de façon approfondie sur les deux parties avant que le gouvernement ne prenne de décision rapide à ce sujet et tenir compte des répercussions sur les trois organismes et les membres présents aujourd'hui; il faut également reconnaître les préoccupations des producteurs de maïs.

+-

    Le président: Monsieur Bellavance, votre temps est écoulé.

    Monsieur Easter, vous avez cinq minutes.

+-

    L'hon. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je vous remercie, messieurs, d'avoir présenté vos exposés.

    Monsieur le président, il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'une situation très grave. La triste réalité, c'est que la politique agricole des États-Unis, qui autorise les producteurs de maïs américains à réduire nos prix au Canada tout en protégeant les leurs, pourrait créer une situation où nous, au Canada, n'avons d'autre choix que de nous tirer dans le pied. Je crois que tous vos exposés soulignent la croissance de notre industrie, qui nous permet de présenter une valeur ajoutée, de créer des emplois au Canada, de réaliser la transformation ici et d'exporter le produit fini. En contrepartie, si nous attendons que l'OMC s'occupe de la situation, combien de producteurs de maïs et de céréales canadiens feront faillite au bout du compte?

    J'apprécie les propositions formulées dans le mémoire du Conseil canadien du porc à la page 4. Je crois qu'elles sont dignes de mention. Je suppose que la question fondamentale que l'on doit se poser est la suivante : de quelle façon le gouvernement peut-il aider l'industrie à atteindre...? Pour avoir une industrie du bétail en santé, il faut également que l'industrie céréalière le soit, et chacun doit recevoir sa juste part des revenus. Pouvez-vous proposer des façons d'y arriver?

    J'aimerais vous poser directement une question : qu'arrivera-t-il dans le cadre des discussions de l'OMC si nous établissons, d'une façon ou d'une autre, un prix plancher équivalent à celui des États-Unis? C'est probablement la seule solution à ce problème. Si nous confrontons les Américains et que nous établissons un prix plancher équivalent au leur, qui nous protégerait et protégerait également notre industrie céréalière, et que la lutte se poursuit à l'OMC et partout ailleurs, où cela nous mènerait-il par rapport à l'OMC? Serait-ce la solution?

    Je connais la réponse que l'on donne toujours, même dans la collectivité agricole lorsqu'on aborde ce sujet, c'est-à-dire que le pays ne peut pas se le permettre. Eh bien, ne sommes-nous pas rendus au point où nous n'avons plus d'autre choix que d'essayer, compte tenu de la situation actuelle?

º  +-(1610)  

+-

    M. Clare Schlegel: Je pourrais très bien être le premier à me mettre les pieds dans le plat. Wayne, je crois que vous tapez dans le mille en ce qui concerne les problèmes que nous tentons de régler.

    Il est probablement plus facile de cerner le problème que de trouver une solution. L'industrie du bétail représentée ici s'engage à collaborer avec les producteurs de maïs et le gouvernement pour tenter de trouver une solution qui permettra de régler le problème. Précisément, à long terme, nous devons trouver, en Amérique du Nord, un système qui contient des programmes semblables afin que nous puissions éliminer ces différends commerciaux que nous devons actuellement surmonter dans de nombreux secteurs différents.

    Il s'agit d'une solution à long terme. Entre temps, pour être franc, nous n'avons pas trouvé la bonne solution, mais nous sommes certainement prêts à examiner les façons dont le gouvernement du Canada pourrait soutenir l'industrie céréalière du Canada afin qu'elle soit concurrentielle. Nous savons toutefois que la solution à court terme ne consiste pas à faire porter le fardeau aux producteurs de bétail et à nous retirer des affaires, mais il faut trouver une solution. Nous en proposons quelques-unes dans le mémoire; nous nous engagerions certainement à collaborer avec vous et avec les producteurs de maïs.

    Nous les avons justement rencontrés la semaine dernière. Nous les avons également rencontrés en septembre. Nous ne sommes pas leurs antagonistes ni leurs opposants, mais nous devons trouver une façon de collaborer en vue de trouver une solution. Il est malheureux qu'ils aient réagi de cette façon avant que nous n'ayons l'occasion de discuter.

    Maintenant, je vais être juste envers eux et dire qu'il est également malheureux que nous n'ayons pas reconnu les effets -- en fait, je vais être proactif et dire que nous devons trouver une solution.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Quelqu'un d'autre a-t-il quelque chose à dire sur la question soulevée?

+-

    M. Clare Schlegel: La question de l'OMC est importante. Bien entendu, au Canada, nous pensons tout d'abord à l'OMC avant de penser à la politique nationale. Il est manifeste que les Américains pensent tout d'abord à la politique nationale, puis à l'OMC. D'une façon ou d'une autre, nous devons trouver un moyen pour que cela fonctionne dans le cadre des négociations actuelles, qui portent sur l'ensemble du soutien interne. Lorsque nous entendons des propositions concernant une réduction du soutien interne aux États-Unis, qui peuvent tout de même administrer tous leurs programmes actuels au moyen de la capacité actuelle, cela n'aide pas à établir un équilibre entre le Canada et les États-Unis. Cette situation pourrait perpétuer le genre de problème dont nous parlons aujourd'hui pour lequel il n'existe aucune solution facile.

+-

    M. Henry Van de Velde: J'aimerais ajouter quelque chose à ce sujet.

    Je suis d'accord avec tout ce que les autres témoins ont dit, mais je crois qu'il convient de rectifier le tir concernant l'un des aspects -- soit l'offre. Compte tenu de la croissance qu'a connue l'Ouest canadien -- où l'on est passé de 2,8 millions à 8 millions de porcs, production qui a plus que doublé au cours des 10 dernières années, sans compter que l'industrie de l'élevage bovin a augmenté de 30 p. 100 en raison de l'EBS -- la demande en grains fourragers dans l'Ouest canadien a augmenté de façon importante.

    En 2004, lorsque le gel a frappé, la production de maïs du Manitoba ne répondait qu'à 4 p. 100 des besoins en maïs dans l'Ouest canadien. Hytek utilise l'équivalent de 10 millions de boisseaux de cet aliment; au cours d'une bonne année, le Manitoba en produit 10 millions. Au cours des trois dernières années, cette province n'a même pas produit 10 millions de boisseaux de maïs. Nous ne pouvons nous fier au fait qu'il y aura du gel chaque année dans l'Ouest canadien pour avoir des grains fourragers.

    Les vomitoxines représentent un autre problème. J'ai parlé à M. Trevor Smith, qui a passé 28 ans à étudier les vomitoxines à Guelph. Il mentionne que l'on trouve plus de 100 différentes mycotoxines -- ce sont des moisissures -- dans les grains fourragers. Plus de 50 p. 100 des échantillons qu'il a récemment analysés affichaient un niveau supérieur à ce qui est acceptable dans la production porcine. Nous regardons toujours en arrière et nous disons que nous allons simplement trouver ces grains ailleurs; il y en a -- nous n'avons qu'à le prendre.

    Nous pouvons discuter de beaucoup de choses. Je suis d'accord pour dire que ce devrait être fait dans le cadre des discussions de l'OMC, mais la réalité, c'est qu'il n'y a pas d'offre, à moins que nous n'ayons qu'à nourrir les porcs avec du blé de catégorie 1 et 2.

º  +-(1615)  

+-

    L'hon. Wayne Easter: Puis-je vous interrompre, Henry, pendant une seconde? Si l'offre est inférieure à la demande, pourquoi les prix n'augmentent-ils pas?

+-

    Le président: Monsieur Easter, votre temps est écoulé.

    Le fait que l'on ait accès au maïs américain explique en partie cette situation. C'est un bon débat, mais nous voulons que davantage de personnes y participent. Peut-être pourrions-nous résumer.

    Monsieur Angus, c'est à vous.

+-

    M. Charlie Angus (Timmins—Baie James, NPD): J'aimerais savoir ce que l'on peut faire en ce qui concerne notre économie agricole. Il me semble que le problème le plus important que nous vivions actuellement concerne les marchés déformés en raison des subsides américains. Je ne veux pas vous offenser, mais je ne peux m'empêcher de penser que, au bout du compte, la situation est plutôt bonne pour vous à cause de ce marché déformé. N'ai-je pas raison?

+-

    M. Clare Schlegel: De quoi parlez-vous?

+-

    M. Charlie Angus: Vous avez accès à du maïs à très bon marché en raison des généreuses subventions américaines. Si nous avions un marché équitable, vous payeriez davantage.

+-

    M. Clare Schlegel: Alors, quel est le coût du maïs pour un producteur de bovins ou de porcs américain qui nous fait concurrence? Paie-t-il le même montant que nous?

+-

    M. Charlie Angus: C'est à vous de me le dire.

+-

    M. Clare Schlegel: Le montant est semblable, plus ou moins la base, ce qui représente simplement le coût du transport du maïs de l'Iowa au Manitoba ou au Nord de l'Iowa. Alors, le maïs ou tout autre grain se vend à un prix donné en Amérique du Nord. La seule chose qui détermine l'écart est le coût du transport. Si vous augmentez le prix du maïs au Canada, vous nous placez simplement dans une position désavantageuse.

    Dans cette situation, on pourrait donner comme exemple -- en passant, David, nous pouvons vous fournir le mémoire déposé devant la commission.

+-

    M. Charlie Angus: Désolé, c'est à mon tour de poser des questions. Vous pouvez lui parler plus tard.

+-

    M. Clare Schlegel: On nous a parlé d'un prix aussi élevé que 2 $ le boisseau. Alors nous avons utilisé un montant de 1 $ le boisseau ou 40 $ la tonne pour évaluer les répercussions.

+-

    M. Charlie Angus: Cela entraînerait un montant de 90 ¢ le boisseau.

+-

    M. Clare Schlegel: Nous devrions payer 10 $ le porc, et ce montant augmenterait nos coûts au Canada. Aux États-Unis, le prix des aliments et le prix du porc demeurent les mêmes. Alors, vous venez de désavantager d'autant l'industrie canadienne du bétail.

+-

    M. Edouard Asnong: Simplement pour répondre à votre question, nous avons mentionné que nous ne voulons pas du maïs bon marché. Nous ne voulons pas acheter du maïs à 90 $ lorsque le coût de production tourne autour de 160 $. Nous sommes très heureux de payer 160 $, mais si nos concurrents aux États-Unis paient 90 $, nous ne pouvons nous permettre de payer 160 $ et leur faire concurrence au chapitre des prix du porc.

+-

    M. Charlie Angus: Je comprends. Le problème est le suivant : que pouvons nous faire?

    Vous avez souligné que, pour les Américains, la politique intérieure passe avant l'OMC. Il me semble plutôt que l'OMC est au quatrième rang sur la liste des Américains. Peut-on penser que, compte tenu de la crise actuelle entourant le maïs, les États-Unis cesseront de subventionner fortement le maïs à la suite des négociations de l'OMC, quand nous avons tenté de leur faire prendre des mesures dans l'ensemble du secteur et qu'ils n'ont manifesté aucun intérêt à le faire? Encore une fois, est-ce même envisageable d'y croire?

+-

    M. Edouard Asnong: Je crois que le Canada doit faire un choix. La décision qu'il a prise il y a bon nombre d'années consistait à ajouter de la valeur à ses grains et à ses graines oléagineuses. Cette valeur a permis de produire de la viande ou de l'éthanol, ou Dieu sait quoi. À l'heure actuelle, nous mettons en danger le produit à valeur ajoutée. Pourquoi? Parce que les producteurs de maïs américains sont subventionnés et qu'ils peuvent survivre dans cet environnement. Ce n'est pas le cas des producteurs de maïs canadiens. Pourquoi ne peuvent-ils pas y arriver? Parce que le PCSRA ne fonctionne pas pour eux. On devrait les aider.

    Nous disons simplement que, comme nous devons faire concurrence aux producteurs américains, nous ne pouvons nous permettre de payer davantage que nos concurrents américains. Nous avons également été affectés par la valeur du dollar canadien. La valeur du dollar canadien a augmenté de 30 p. 100. Cette augmentation a déjà eu d'énormes répercussions sur les éleveurs de porcs, de même que sur les producteurs de maïs.

    Alors, je crois qu'il faut modifier le PCSRA, et les solutions... et M. McKillop a très bien résumé nos demandes. Mais je ne crois pas que nous devrions aller si loin. Je crois que nous devrions régler le problème, et les producteurs de maïs seront satisfaits et retireront leur action en justice. Nous devrions élaborer un plan à cet égard et tenter de trouver une solution.

º  +-(1620)  

+-

    M. Charlie Angus: Je crois que je cherche toujours cette solution, car il me semble que le PCSRA est un désastre -- nous le savons bien -- mais avons-nous l'habitude de demander aux contribuables canadiens de faire concurrence aux énormes subventions versées aux États-Unis? Les Américains ont beaucoup plus de pouvoir que nous. Si nous concluons une affaire à Doha, d'après les plafonds déjà en place, nous n'avons pas beaucoup de marge de manoeuvre. Alors, à moins que nous ne réglions la distorsion des prix des grains et du maïs, nos agriculteurs peuvent-ils au bout du compte être en meilleure posture?

+-

    M. Edouard Asnong: Je ne suis pas certain de bien comprendre votre question. Je crois que vous me demandez si nous devrions aider les contribuables? Je crois que, en tant qu'exportateurs, nous générons beaucoup de revenus pour le Canada, et nos exportations apportent également beaucoup d'argent, de nouveaux dollars, au pays.

+-

    M. Charlie Angus: Est-ce faisable, à 90 ¢ le boisseau, de faire concurrence aux États-Unis?

+-

    M. Edouard Asnong: Je n'ai pas calculé combien cela faisait au bout du compte. Mais si vous comparez les coûts et que vous tenez compte de ce que nous risquons en diminuant le nombre de produits à valeur ajoutée que nous exportons et de leur valeur au moment de la comparaison, je crois que les résultats révéleraient simplement la différence que cela ferait.

+-

    Le président: Monsieur Bezan, c'est à vous, vous avez cinq minutes.

+-

    M. James Bezan (Selkirk—Interlake, PCC): Merci, monsieur le président, et je vous remercie, messieurs, d'être venus aujourd'hui.

    Ian, vous avez dit que l'imposition du droit compensatoire allait coûter environ 60 $ de plus par tête au chapitre des coûts d'alimentation, ce qui signifie que vous paierez 60 $ de moins sur chaque veau vendu au marché en vif.

+-

    M. Ian McKillop: C'est exact, selon un écart et une différence de 1 $ entre le prix du maïs américain et celui du maïs canadien. Pour chaque dollar de différence, il y aura une augmentation de 60 $ dans les coûts d'alimentation d'un animal canadien. Par exemple, en Ontario, nous engraissons environ 600 000 animaux par année; à 60 $ par animal, nous devrions assumer des frais supplémentaires de quelque 36 millions de dollars en Ontario.

+-

    M. James Bezan: C'est tout un problème.

    D'un côté, il y a une industrie du maïs qui profite certainement des subventions américaines, notamment en ce qui concerne le Farm Bill américain, et de l'autre, il y a des utilisateurs de grains fourragers et de produits du maïs qui seront désavantagés si l'on impose un tarif. Si je travaille dans l'industrie d'élevage-naissage, je ne veux pas recevoir moins d'argent pour mon troupeau puisque j'ai subi des pertes en raison de l'EBS et de tout le reste. Je ne veux plus voir l'industrie porcine faire face à d'autres problèmes, et nous devons nous assurer qu'elle continue de croître et de prospérer. Au Manitoba, on parle de construire une nouvelle usine de transformation de la viande. Nous en avons besoin. Nous devons nous assurer que l'industrie prospère et qu'elle ne périclite pas. Alors, comment allons-nous régler ce problème?

    Je ne crois pas que le PCSRA soit la solution. On a prouvé que le PCSRA était un très mauvais programme au chapitre de l'aide offerte aux agriculteurs -- les cas d'ESB ont mis cette situation au jour -- et nous vivons une crise, qui n'aidera pas les producteurs de maïs de l'Ontario, du Manitoba ou du Québec. Ces producteurs feront face à un manque à gagner en raison de la diminution de leurs revenus et de la qualité marchande de leur produit.

    Que pouvons-nous faire pour aider les producteurs de maïs sans porter atteinte à nos utilisateurs de grains fourragers? Je sais que les représentants de l'industrie porcine ont fait mention du programme de l'Ontario, mais, de façon générale, nous devons également nous assurer de concevoir des programmes qui ne sont pas axés sur les droits compensatoires. Il faut trouver quelques solutions à cet égard. C'est ce que nous cherchons.

+-

    M. Ian McKillop: Le programme actuel recommandé par le comité sur les grains et les graines oléagineuses de l'Ontario représente l'une des solutions. Un tel programme serait financé par le gouvernement provincial de l'Ontario et le gouvernement fédéral. Il donnerait aux producteurs le soutien des prix dont ils ont l'impression d'avoir besoin pour faire concurrence aux producteurs américains, dont le produit est subventionné.

    Ce programme représente en fait un complément à l'ancien programme d'assurance-revenu du marché, qui comprenait les grains autoconsommés. Je crois comprendre que, en vertu des règles commerciales de l'OMS, il s'agissait d'un programme de subvention agricole pour le bétail acceptable. C'est l'une des solutions. C'est un programme qui a fait l'objet d'une vaste promotion en Ontario.

+-

    M. James Bezan: Quel est le montant par boisseau?

º  +-(1625)  

+-

    M. Ian McKillop: C'est la même chose que le prix payé à Chicago. Ce n'est pas un prix fixe par boisseau. On pousse davantage le producteur à vendre la récolte lorsque les prix sont bons, ou on lui demande d'assumer une plus grande part de responsabilité; le gouvernement n'a donc pas à lui verser autant d'argent. On ne s'attend pas à ce que ce dernier paie autant le manque à gagner que dans le cadre de l'ancien programme d'assurance revenu du marché; les producteurs doivent donc vendre leurs récoltes à un prix raisonnable s'ils ont l'occasion de le faire.

+-

    M. James Bezan: Vous avez mentionné que cela s'appliquera également au grain autoconsommé.

+-

    M. Ian McKillop: C'est exact.

+-

    M. James Bezan: Le producteur profitera donc du fait qu'il engraisse ses animaux avec du grain à faible coût, puis il recevra en plus la subvention? C'est comme si l'on facturait deux fois.

+-

    M. Ian McKillop: Le programme ressemble au programme d'assurance revenu du marché qui comprenait les grains autoconsommés. En tout, cela représente une enveloppe de 500 millions de dollars.

+-

    M. Edouard Asnong: Ce serait bien si nous pouvions trouver toutes les solutions cet après-midi et que tout le monde s'entendait sur les mesures à prendre, mais certaines personnes doivent certainement s'asseoir à la même table pour discuter du problème et tenter de trouver une solution. Cela signifie que toutes les parties concernées doivent participer, y compris les gouvernements.

+-

    M. James Bezan: Nous faisons face à un problème un tant soit peu pertinent et opportun. Nous subissons beaucoup de pression de la part de agriculteurs, qui ressentent actuellement les dommages puisqu'ils tentent de commercialiser la récolte de cette année; ils les ont ressentis tout au long de l'année pendant qu'ils commercialisaient la récolte de l'année dernière.

    Nous devons prendre des décisions assez rapidement. L'OMC est probablement le meilleur endroit pour négocier en vue d'éliminer les subventions énoncées dans le Farm Bill américain ou proposer des solutions de rechange pour l'avenir, mais cela prend du temps. Le TCCE mènera son enquête -- encore une fois, cela prendra du temps. Nous devons agir aujourd'hui sans nuire aux utilisateurs, mais nous devons également examiner de façon générale la façon dont nous pouvons mettre en oeuvre un programme qui n'est pas axé sur les droits compensatoires.

+-

    M. Henry Van de Velde: J'ai remarqué quelque chose... J'ai quelques points rapides à soulever, mais pour répondre précisément à votre question, on me qualifie d'utilisateur. Ma famille et les autres familles de Hytek s'occupent toutes de céréaliculture. Lorsque la subvention du Nid-de-Corbeau a été annulée, nous cherchions tous des façons de gérer nos activités, de réaliser des revenus supplémentaires et de faire en sorte que tout fonctionne.

    Un simple commentaire : un céréaliculteur pourrait investir dans du bétail. Il y a deux parties en cause. Le céréaliculteur dit : « Monsieur le producteur de bétail, sauvez-moi », puis le producteur de bétail dit : « Monsieur le céréaliculteur... », mais au bout du compte, nous produisons tous la même chose. Si nous créons tous notre propre demande... C'est ça, l'écart -- créez une demande pour votre produit, que ce soit au moyen de l'exportation ou à l'échelle locale. Vous pouvez éliminer l'écart. Dans l'est du Manitoba, l'orge se vend 50 ¢ de plus que dans l'ouest du Manitoba. Pourquoi? Parce que c'est là que se trouve tout le bétail. Si vous créez une demande pour votre produit, vous pourrez augmenter les prix.

    L'autre chose qui semble être... Nous tenons cette conversation chaque fois que le dollar canadien atteint 85 ¢. Ce n'est pas sorcier. Un porc de 200 $ vaut aujourd'hui 150 $; du colza canola à 8 $ vaut aujourd'hui 6 $; du blé, qui se vendait à 5 $ est maintenant offert à 3,75 $; et je suis désolé, mais du maïs à 3,60 $ vaut aujourd'hui 2,70 $. C'est l'une des fonctions du dollar canadien. Ce n'est pas sorcier, et nous pouvons tenir cette conversation chaque fois que le dollar connaît une hausse rapide, mais c'est la réalité qui prévaut lorsque l'on fait des affaires sur le marché mondial. Nous gagnons sur le prix du pétrole, mais nous perdons sur le prix du grain.

+-

    Le président: Monsieur Schlegel, je sais que vous avez des commentaires à formuler, mais peut-être pourriez-vous les garder pour notre prochaine questionneuse.

    Madame Ur, vous avez cinq minutes.

    Nous allons poursuivre au cours de la prochaine heure, mais si nous n'avons d'autre choix, nous pourrons prendre quelques minutes supplémentaires à la fin. Attendons de voir comme se déroulera la prochaine séance, mais je crois qu'il y a encore quelques questions que l'on doit poser.

+-

    Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Je vais tenter d'être brève, car cinq minutes ne suffisent pas pour poser des questions aux trois personnes qui ont présenté des exposés.

    Après avoir écouté tous les exposés, je peux certainement comprendre le dilemme auquel vous faites face, puisque j'ai déjà été agricultrice. Je suis certaine que les Américains sont intéressés par notre rencontre, qu'ils regardent notre comité aujourd'hui, qu'ils rient tout au long de la séance et qu'ils se disent : « Nous causons tout un désordre au Canada et dressons les secteurs les uns contre les autres. » Comme vient de le mentionner M. Van de Velde, ce n'est pas nous contre eux, c'est nous, ensemble.

    Cela dit, y a-t-il eu beaucoup de discussion? Je sais que certains d'entre vous y avez fait allusion au cours de votre exposé. Avant qu'on ne soulève la question auprès de l'APMO, a-t-on discuté de la possibilité de se réunir -- pour formuler des propositions, des solutions -- avant que des droits compensatoires ne soient prélevés ou que les préoccupations ne soient soulevées?

    Monsieur Schlegel.

º  +-(1630)  

+-

    M. Clare Schlegel: Non, pas avant.

+-

    M. Henry Van de Velde: Pas à ce sujet. La seule conversation que nous avons eue s'est tenue au Manitoba. Cette province prélevait des droits compensatoires semblables à cette époque.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Alors, les membres de l'APMO n'ont tenu aucune consultation. Ils se sont simplement lancés.

+-

    M. Henry Van de Velde: C'est exact.

+-

    M. Edouard Asnong: En fait, c'était surprenant pour nous, mais je sais qu'ils participent entièrement -- les producteurs de maïs, peut-être pas directement, mais par l'entremise des producteurs de grain, au comité consultatif sur le programme de protection du revenu -- à toutes ces tables, où ils militaient pour que l'on élabore des programmes qui répondent à leurs besoins.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Bien.

    Monsieur McKillop, lorsque vous avez connu la situation désastreuse relative à l'EBS, a-t-on tenu des consultations avec les céréaliculteurs, au moment où vous éprouviez des difficultés? Pouvaient-ils jouer un rôle dans cette situation?

+-

    M. Ian McKillop: Non, je dirais que nous étions en grande partie laissés à nous-mêmes à ce moment-là.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Laissés à vous-mêmes encore une fois.

    Je crois que c'est M. Van de Velde, ou peut-être M. Schlegel, qui a dit que l'industrie porcine au Manitoba était passée de deux millions à huit millions, je crois?

+-

    M. Henry Van de Velde: Il y avait 2,8 millions de porcs en 1995 et il y en a plus de 8 millions à l'heure actuelle.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Vous avez besoin de 10 millions de boisseaux de grains pour nourrir ces animaux?

+-

    M. Henry Van de Velde: Je suis désolé, mais les 10 millions de boisseaux, c'est seulement pour Hytek.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Simplement pour Hytek...

+-

    M. Henry Van de Velde: Dans l'Ouest canadien.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Et nous ne pensons même pas à l'éthanol. Wow.

+-

    M. Henry Van de Velde: C'est l'équivalent de 10 millions de boisseaux d'aliments que nous produisons au cours d'une année. Simplement pour vous donner une idée, en 2004, le Manitoba a uniquement produit moins de un million de boisseaux de maïs, et 95 p. 100 du maïs de l'Ouest canadien proviennent du Manitoba.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Bien. Dans votre exposé, vous avez mentionné que les producteurs de maïs intérieurs gardent déjà leur maïs. La semaine dernière, nous avons accueilli des personnes de Chatham qui ont présenté un exposé; ils recevaient 20 ¢ le boisseau, et personne ne vendait de maïs à Chatham. C'est ce que nous avons entendu la semaine dernière.

+-

    M. Henry Van de Velde: J'aimerais mentionner une autre chose : ce n'est pas comme si nous allions acheter aux États-Unis à prix moindre. Actuellement, nous payons au minimum 24 $ la tonne, simplement pour transporter le maïs des États-Unis. Cela représente 60 ¢ le boisseau. Le blé fourrager de grande qualité de la Saskatchewan dont nous avons besoin nous coûte 40 $ la tonne. Cela représente un dollar le boisseau, simplement pour le transport.

    Les agriculteurs locaux du Manitoba demandent tous ce prix. En février 2004, nous avons signé des contrats avec les producteurs de maïs du Manitoba afin qu'ils nous livrent du grain à l'automne à un prix qu'ils jugeaient raisonnable. Il s'agissait d'une mesure de suivi de l'an 2000, année pendant laquelle nous avions adopté une approche active. L'automne suivant, après le gel, nous avons demandé proactivement à tous ces agriculteurs s'ils étaient d'accord pour annuler leurs contrats. Nous leur avons offert cette solution -- chacun d'entre eux avait signé un contrat -- parce qu'ils n'avaient pas de maïs à nous fournir. Aucun producteur n'est resté. Par la suite, nous avons été obligés de trouver notre propre maïs. Si nous les avions forcés à respecter ces contrats, ils auraient dû se tourner vers les États-Unis pour trouver le maïs en vue de respecter les contrats.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Monsieur Schlegel, je crois que vous avez dit que les gouvernements devaient se réunir et présenter une proposition. Je crois que les gouvernements doivent être présents, mais qu'ils doivent collaborer avec les producteurs de maïs et les divers secteurs touchés par ce problème. Ils doivent se réunir dans une salle et régler le problème.

    Est-ce que je rêve en couleurs si je crois que cela pourrait se produire?

+-

    M. Clare Schlegel: Je crois que cela pourrait se produire, mais la solution -- vous faites partie de la solution, et l'on doit régler la question de l'inéquité entre le Canada et les États-Unis. On trouvera probablement des solutions à court et à long termes. Notre problème, c'est que la situation est urgente...

º  +-(1635)  

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Exactement.

+-

    M. Clare Schlegel: ... et il s'agit d'une procédure judiciaire, alors la procédure se poursuit, malgré le fait que nous sommes probablement remplis de bonnes intentions. Si nous pouvions trouver un moyen d'avoir une marge de manoeuvre et de demander aux producteurs de maïs de se retirer pendant une certaine période, de mobiliser toutes les parties concernées et d'établir un véritable partenariat entre le gouvernement et l'industrie... Je crois réellement qu'il existe une solution et je crois qu'ils s'agit d'une transition vers un marché mondial à long terme.

    Ce n'est pas la position du Conseil canadien du porc, mais nous devrons peut-être, au bout du compte, mettre en place un marché commun en Amérique du Nord qui élimine certaines des iniquités que nous voyons. Nous avons encore un long bout de chemin à parcourir, mais la réalité, c'est que le Canada produit 30 millions de porcs, que les États-Unis en produisent 100 millions, mais que le Canada doit en exporter la moitié. Je ne veux pas acheter du maïs subventionné à bon marché, mais ne me demandez pas de payer 40 $ de plus la tonne que l'agriculteur américain pour ces 100 millions de porcs. Autrement, nous ne pouvons pas faire concurrence sur le marché mondial. Le commerce mondial du porc représente environ quatre millions de tonnes. Environ le quart de cette production provient du Canada, et un autre quart provient des États-Unis, alors nous n'avons pas le choix : il faut être concurrentiel. C'est ce qui définit nos prix et c'est ce qui, fondamentalement, nous préoccupe.

    Nous n'avons pas déclenché le processus, mais nous nous engageons à collaborer avec tous les autres agriculteurs pour tenter de trouver une solution. Si nous pouvons trouver une façon de le faire dans un délai raisonnable, nous pourrions, avec un peu d'espoir, nous en sortir.

+-

    Le président: Notre temps est écoulé.

    Le dernier intervenant de cette séance est M. Lapierre.

[Français]

+-

    M. Réal Lapierre (Lévis—Bellechasse, BQ): Je vais récapituler les propos que j'ai entendus depuis le début de la semaine dernière. L'Agence des services frontaliers a comme rôle de vérifier s'il y a des cas de dumping. Les gens que nous avons rencontrés jusqu'à maintenant arrivent tous au même constat. Que ce soit les brasseries, les distilleries, les producteurs d'éthanol ou les éleveurs, tous disent être confrontés à un problème. Ce dernier risque de pénaliser gravement les producteurs de maïs. Les événements entourant le bois d'oeuvre nous ont appris toutefois qu'il ne faut pas compter sur une négociation immédiate susceptible de porter fruit dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce.

    Quelle solution reste-t-il, alors? À mon avis, toutes les parties qui ont à travailler avec les producteurs de maïs pourraient faire front commun et proposer aux autorités gouvernementales la mise sur pied d'un programme. Celui-ci n'existe pas comme tel présentement, mais aussi longtemps que ce dossier ne sera pas clarifié à l'OMC, cela permettrait de combler le manque à gagner. D'après ce que j'ai entendu à ce comité, un état de panique se serait installé. Il y a péril en la demeure. Tout le monde semble se regarder en se demandant d'où viendront les solutions.

    Bien sûr, si toutes les parties concernées se regroupaient pour faire une proposition commune, quitte à se diriger vers des horizons nouveaux, le problème à court et à moyen terme pourrait probablement être réglé. Je ne vois pas de quelle manière ce dossier pourrait se régler selon la formule actuelle.

+-

    M. Edouard Asnong: C'est ce que je crois aussi. À mon avis, il est urgent qu'on adopte cette solution. Par contre, il faut être bien conscient du fait qu'à l'heure actuelle, nous tombons dans le piège de la politique américaine. Celle-ci subventionne les produits primaires, et parce que le prix de ces derniers est peu élevé, les autres secteurs peuvent se développer, qu'il s'agisse de la production d'éthanol, de la production animale ou d'autres types de production. La politique américaine réussit si bien que ces gens sont en train de nous voler nos industries. Nos usines d'éthanol vont déplacer leur production vers les États-Unis. Comme je le disais plus tôt, les porcelets vont aller se faire engraisser et se faire abattre là-bas également, et on va les exporter ici sous forme de viande. Ce sera sans doute la même chose dans le cas du boeuf.

    Il faut faire attention. Il est urgent que le gouvernement s'intéresse à la question. Il faut agir vite et trouver une solution acceptable qui permettra à tout le monde de survivre. Il est essentiel qu'on continue à produire de la valeur ajoutée et qu'on exporte des produits qui génèrent une activité économique au Canada.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur McKillop, voulez-vous commenter?

+-

    M. Ian McKillop: De plus, en vertu de la disposition sur le remboursement de douane, cela nous nuira considérablement si le tarif est imposé. Je suis d'accord pour dire que nous devons trouver une solution. Toutes les parties doivent se réunir. Il doit y avoir une solution, mais le remboursement de douane nuira grandement à notre industrie de transformation si l'on nourrit le bétail avec du maïs américain, puis qu'on l'exporte vers les États-Unis pour obtenir le remboursement. En vertu des dispositions sur le remboursement, on perdra la capacité supplémentaire acquise si durement par l'industrie et le gouvernement au cours des deux dernières années; nos producteurs profiteront de ces dispositions si l'on impose un tarif sur le maïs américain. Une diminution de notre capacité d'abattage -- après avoir connu une augmentation -- nuira non seulement à notre industrie, mais également à toutes les régions rurales du Canada.

º  +-(1640)  

+-

    Le président: Nous faisons face à un véritable problème. Il ne fait aucun doute qu'il y a des industries concurrentielles qui tentent de survivre dans un bourbier de perte financière sur le plan agricole. Au cours des 12 dernières années, nous avons doublé nos exportations agricoles à partir du Canada, mais l'agriculture ne s'est jamais trouvée dans une telle situation financière. Manifestement, le producteur primaire -- le producteur ou la productrice -- ne reçoit pas sa juste part du marché.

    Aujourd'hui, nous allons entendre des représentants d'autres groupes, mais il y a des secteurs de notre société qui reçoivent leur juste part. De quelle façon pouvons-nous prendre au moins une partie de la juste part du marché pour la redonner au secteur agricole, à qui elle appartient? C'est le problème auquel nous faisons face au Canada.

    On a présenté beaucoup d'options. Je suppose que quelques-unes sont acceptables, dans une certaine mesure, mais nous sommes dans un marché mondial. Nous pouvons nous en sortir pendant un moment, mais ce genre de...

    Je crois que notre comité comprend le problème auquel vous faites face. C'est un problème dont nous devons débattre davantage, mais nous vous remercions beaucoup d'avoir présenté vos exposés et d'être aussi sincères. Nous comprenons, mais nous n'avons pas de solutions à vous offrir aujourd'hui. Nous allons tenir compte de vos problèmes; nous les avons bien pris en note et nous espérons que, au cours de notre prochaine rencontre, nous pourrons discuter d'un enjeu complètement différent de celui d'aujourd'hui.

    Merci beaucoup.

    Nous allons prendre une courte pause pendant que nous réorganisons la table et nous reprendrons la séance par la suite.

    Merci beaucoup.

º  +-(1642)  


º  +-(1647)  

+-

    Le président: La séance est ouverte. L'un des témoins est avec nous. Est-ce que l'autre témoin est dans la salle?

    Nous voulons reprendre nos travaux. Notre comité ne peut exercer ses activités que s'il y a des gens à la table. Nous avions fixé l'heure à laquelle les gens devaient être ici, et nous nous attendons à ce qu'ils soient ponctuels.

    Nous poursuivons notre débat sur l'imposition de droits sur le maïs avec Mme Ellen Mary Mills, directrice, Élaboration des politiques, Produits alimentaires et de consommation du Canada. Quand elle arrivera, nous accueillerons Mme Annalisa King, première vice-présidente, Coordination verticale, Aliments Maple Leaf Inc. Je crois que ce sont nos deux témoins.

    Madame Mills, voulez-vous commencer?

+-

    Mme Ellen Mills (directrice, Élaboration des politiques, Produits alimentaires et de consommation du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je suis très heureuse d'être ici, et je tiens à dire, au nom de Produits alimentaires et de consommation du Canada, que nous sommes très heureux d'avoir l'occasion de présenter au comité notre point de vue sur l'importation de maïs-grain et sur l'imposition éventuelle d'un droit de douane.

    Vous avez devant vous, du moins, je l'espère, un mémoire en anglais et en français. Je n'ai pas l'intention de vous le lire mot pour mot, mais je vous demanderais de verser le contenu de ce mémoire dans le compte rendu de votre comité.

    Avant de commencer, j'aimerais dire quelques mots au sujet de notre industrie et de notre association. Nombre d'entre vous le savez peut-être, mais d'autres ne le savent peut-être pas. Notre association représente environ 130 sociétés membres canadiennes qui produisent et mettent en marché des marques privées et nationales qui font partie intégrante de la vie quotidienne à la maison, au travail et dans les loisirs. Ces entreprises offrent à la population canadienne des produits alimentaires et des produits de consommation sains et de grande qualité, par l'entremise d'une diversité de chaînes de magasins, de supermarchés, de pharmacies, de dépanneurs, de grandes surfaces et de services alimentaires. Cela vous donne une idée de l'éventail de produits: des produits alimentaires, des boissons, des services alimentaires et des produits de consommation.

    Histoire de vous donner une petite idée de l'impact que nous avons, l'industrie a généré, en 2004, 22,5 milliards de dollars en PIB. Cela correspond à environ 12,4 p. 100 du produit intérieur brut de la fabrication. Nous avons employé 350 000 Canadiens dans toutes les régions du pays, ce qui nous place au premier rang des employeurs dans le secteur de la fabrication au pays. De plus, cette industrie offre annuellement 33 millions de dollars aux causes caritatives, et fait don de plus de cinq millions de sacs d'épicerie aux Canadiens dans le besoin.

    Je ne crois pas devoir vous mettre en contexte; vous savez pourquoi nous sommes ici. L'Ontario Corn Producers Association, les Producteurs de maïs du Québec et d'autres organismes ont demandé à l'Agence des services frontaliers du Canada de se pencher sur les allégations de dumping et de subventions dommageables du maïs-grain au Canada, et sur l'impact sur leur industrie.

    J'aimerais signaler certaines préoccupations de nos membres. Je reconnais que nous sommes un autre utilisateur final. Vous venez d'entendre le témoignage d'un utilisateur final de taille; nous en sommes un autre.

    De façon générale, nos fabricants et nous-mêmes avons besoin d'un approvisionnement fiable et peu coûteux d'intrants de maïs-grain. Notre exposé d'aujourd'hui s'attache à l'imposition éventuelle de droits provisoires par l'ASFC. Nous savons également que les producteurs de maïs de l'Ontario ont aussi demandé que cette mesure soit reconnue par l'OMC et ajoutée à la liste des mesures de représailles contre l'amendement Byrd, mais le maïs-grain et ses dérivés sont de très importants ingrédients de la transformation des aliments et des boissons au Canada. Ils sont grandement utilisés dans les produits finis qui sont fabriqués au Canada et qui sont destinés tant au marché intérieur qu'au marché international.

    Nos membres ont besoin d'avoir accès à un approvisionnement en maïs prévisible et stable des deux côtés de la frontière canado-américaine pour assurer la flexibilité et l'efficacité du secteur de la transformation. Dans certains cas, les variétés de maïs nécessaires à la transformation des aliments ne sont pas disponibles au Canada et sont également impossibles à cultiver au Canada à cause des conditions agronomiques.

    La stabilité de la chaîne d'approvisionnement en maïs-grain est d'un intérêt vital pour nos membres et est essentielle à la protection des emplois de milliers de Canadiennes et de Canadiens travaillant au sein de l'industrie agroalimentaire de ce pays. Cela est tout aussi important pour les consommateurs canadiens qui sont également touchés par la disponibilité et le prix des produits que nous fabriquons.

    Notre secteur est très préoccupé par la possibilité qu'une action commerciale lancée par le gouvernement canadien entraîne une interruption dans l'approvisionnement de maïs, une augmentation du prix des principaux intrants manufacturiers des fabricants canadiens, une incertitude commerciale résultant des tensions commerciales croissantes entre le Canada et les États-Unis, une augmentation du prix des aliments pour les consommateurs canadiens, des pertes d'emploi dans le secteur de la transformation agroalimentaire, et une perte de choix dans les produits -- ou des prix plus élevés -- pour les consommateurs canadiens.

    Je vais tout d'abord parler brièvement de l'impact sur le consommateur canadien. De nos jours, le maïs est une denrée servant à la fabrication d'une vaste gamme de produits destinés à être utilisés par les consommateurs, et sur lesquels ils comptent, mais ils stimulent également la mise au point d'un grand nombre de nouveaux produits. Des découvertes récentes indiquent que pratiquement tout ce qui est fabriqué à partir du pétrole peut également l'être à partir du maïs, comme les plastiques sans pétrole, les substances absorbantes des couches pour bébés et d'autres produits, ainsi que le carburant à l'éthanol.

    Selon les producteurs de maïs de l'Ontario, le maïs est utilisé dans la fabrication d'environ 25 p. 100 des 10 000 produits trouvés dans les supermarchés modernes, ainsi que d'une vaste gamme d'autres produits tels que le papier et le carton. Ce sont justement ces produits que fabriquent les entreprises membres de l'association des PACC. Les fabricants, qui doivent déjà composer avec des hausses importantes du coût de l'électricité et le rétrécissement des marges bénéficiaires causé par la hausse de la valeur du dollar canadien, devront sans doute refiler aux consommateurs le coût de toute augmentation découlant de l'imposition éventuelle d'un droit de douane.

º  +-(1650)  

    Avec l'imposition d'un tarif de rétorsion de 1 $ le boisseau sur les importations américaines de maïs-grain, les consommateurs devront faire face à une hausse du prix des produits alimentaires fabriqués par les membres de l'association des PACC pouvant varier de 5 p. 100 à 10 p. 100 selon le produit. Je vous mentionne quelques exemples remarquables de produits alimentaires visés, et cela vous donnera une idée de la portée de cette mesure : confiseries, aliments pour animaux domestiques, biscuits, craquelins, boissons surgelées, garnitures aux fruits, galettes de riz, etc.

    Du côté des fabricants, la hausse du coût des intrants de fabrication mènera probablement à la disparition de produits et d'emplois. D'après le rapport sur les perspectives de l'industrie canadienne du Conference Board du Canada pour l'hiver 2005, la structure de coûts de l'industrie de la transformation alimentaire est dominée par l'élément du prix de revient des matériaux qui représente 82 p. 100 du coût total, pouvant aller de 68 p. 100 dans l'industrie boulangère jusqu'à 89 p. 100 dans l'industrie laitière.

    L'imposition éventuelle de droits de douane sur le maïs-grain originaire ou exporté des États-Unis augmentera de façon importante le coût des grains de maïs crus et dérivés du broyage primaire utilisés dans la fabrication des aliments. En imposant une hausse de 1 $ le boisseau, on estime que le coût des intrants pour les fabricants qui utilisent les grains de maïs crus augmentera annuellement de 15 p. 100 à 20 p. 100. On estime que les fabricants qui utilisent le sirop de glucose ou le sirop tiré du maïs à haute teneur en fructose devraient être confrontés à une hausse moins marquée du coût des intrants, de l'ordre d'environ 5 p. 100, en raison de la plus faible teneur en maïs. L'ensemble de l'industrie de la fabrication de produits alimentaires prévoit connaître une augmentation annuelle du coût des intrants de maïs-grain de quelque 50 millions de dollars.

    La pérennité des gammes de produits est en jeu, car la hausse des coûts ne peut être transmise aux consommateurs. D'ailleurs, il n'est pas toujours possible de refiler les hausses de coût à autrui. Étant donné l'élasticité de la demande par rapport aux prix associée à de nombreux produits, les hausses de prix pourraient s'avérer impossible. De plus, la concurrence avec les produits américains non assujettis à une hausse de tarif peut également empêcher le report de la hausse des prix sur les consommateurs. Pour ces motifs, les fabricants canadiens doivent décider s'il convient de comprimer les marges de profit ou d'annuler la production des gammes de produits touchées par l'augmentation des droits de douane.

    De plus, il risque d'y avoir pertes d'emploi. Les effets de l'augmentation des coûts dus à l'imposition de droits de douane sur le maïs-grain laissent peu de choix intéressants pour les fabricants: augmentation des prix de détail et menace à la continuité des ventes; compression des marges de profit; abandon de la fabrication d'articles; et fermetures potentielles des usines, selon leur taille. Selon la catégorie de produits, toutes ces options ne sont pas possibles, et, à l'exception de la hausse des prix de détail, les pertes d'emploi sont inhérentes à chaque option. Les entreprises membres de l'association des PACC touchées par cette imposition potentielle prévoient des pertes d'emploi, de l'ordre de 15 à 75 p. 100, pour les petites et moyennes entreprises, la fermeture d'usines spécifiques étant une possibilité bien réelle. Les plus grandes entreprises estiment que les pertes d'emploi éventuelles pourraient se situer entre 500 et 700 emplois.

    De surcroît, l'imposition de droits de douanes peut engendrer le déplacement de la production canadienne vers les États-Unis. Les entreprises ayant des usines à la fois au Canada et aux États-Unis cèdent le mandat de production à l'usine la moins coûteuse. L'avantage de coûts dont disposaient les usines canadiennes avant le renforcement du dollar canadien a presque disparu. Par conséquent, une augmentation de coûts touchant seulement les fabricants canadiens par rapport aux entreprises américaines équivalentes continuera d'éroder leur capacité concurrentielle et de sérieusement menacer la production au Canada.

    Les options possibles pour éviter l'augmentation du coût des intrants due à un tarif de rétorsion sont limitées. L'importation de produits finis en provenance des États-Unis au lieu d'importer le maïs-grain ou les ingrédients de grain pourrait également se révéler coûteuse. Le coût de frais supplémentaires pour la production américaine et le supplément potentiel pour les petites entreprises canadiennes pourraient se révéler aussi coûteux que les augmentations résultant d'une imposition de droits de douane. Fait plus important encore, les fabricants qui comptent sur leurs fournisseurs au pays risquent d'être confrontés à l'élimination de leur source canadienne au fur et à mesure que les meuneries canadiennes feront faillite. Je sais que Casco principal fournisseur canadien de maïs-grain transformé des entreprises membres de l'association des PACC, a indiqué que la viabilité commerciale de son exploitation advenant l'imposition de droits de douane serait compromise, et il se pourrait que l'entreprise soit forcée de fermer ses portes.

    Nous savons que les Canadiens ont déjà entendu le témoignage de Casco portant sur les défis qu'elle doit relever advenant l'imposition de droits de douane et sur la perte possible d'emplois, aussi nous ne nous épancherons pas sur sa situation critique. Cependant, une telle fermeture forcerait les fabricants canadiens à s'approvisionner chez les fournisseurs américains, ce qui ne ferait qu'augmenter l'utilisation des importations américaines. De plus, cela risquerait d'avoir des répercussions très perturbatrices en créant un environnement instable et imprévisible pour les fabricants du Canada qui met en jeu la viabilité de nombreuses entreprises au Canada.

º  +-(1655)  

    En conclusion, l'association des PACC respecte le mandat de l'Agence des services frontaliers du Canada et les paramètres établis pour son enquête sur les allégations de dumping et de subventions dommageables des importations de maïs-grain en provenance des États-Unis pour l'industrie canadienne de la production de maïs. Cependant, nous soumettons respectueusement qu'une analyse du présumé effet dommageable devrait tenir compte de l'impact sur une plus vaste gamme de parties prenantes -- je crois que d'autres témoins vous ont déjà dit cela --, y compris les utilisateurs de maïs-grain au bout de la chaîne alimentaire et certainement l'utilisateur final des produits finis, soit le consommateur. Nous espérons avoir réussi à vous présenter aujourd'hui une analyse préliminaire de l'impact sur notre industrie et sur les consommateurs.

    En résumé, les consommateurs risquent de perdre certains produits ou de subir une hausse de prix d'environ 5 p. 100 -- ou les deux. Les fabricants devront faire face à des augmentations de coût des intrants pouvant varier entre 15 p. 100 et 20 p. 100, alors que les fabricants qui utilisent le sirop de glucose et celui à haute teneur en fructose devront faire face à des augmentations du coût des intrants d'environ 5 p. 100 à 10 p. 100. Les fabricants ont un choix limité de moyens pour combattre les augmentations de coût des intrants, ce qui entraînera probablement la perte d'emplois. La compétitivité des usines canadiennes par rapport aux usines américaines serait éliminée, et la production serait probablement transférée au sud de la frontière. De plus, les fournisseurs canadiens d'ingrédients du maïs-grain pourraient devoir fermer leurs portes, ce qui créerait des interruptions de production pour les fabricants canadiens et un recours supplémentaire à des fournisseurs américains.

    Enfin, le Canada est un pays importateur net de maïs-grain, et l'imposition d'un tarif douanier sur les importations américaines aurait un effet préjudiciable sur toute la chaîne alimentaire, nuisant ainsi aux fabricants de produits alimentaires et, par conséquent, aux consommateurs canadiens.

    Nous vous remercions de cette occasion de comparaître devant le Comité permanent de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et de présenter le point de vue des membres de l'association des Produits alimentaires et de consommation du Canada, lesquels ne représentent, je le concède, qu'un seul secteur d'utilisateurs finaux.

»  +-(1700)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Madame King, avez-vous un exposé à présenter? Pourriez-vous veiller à ce qu'il soit relativement bref? Nous manquons de temps.

+-

    Mme Annalisa King (première vice-présidente, Coordination verticale, Aliments Maple Leaf Inc.): Oui, certainement.

    Je m'appelle Annalisa King, et je suis première vice-présidente aux Aliments Maple Leaf Inc. Je tiens tout d'abord à remercier le comité de m'accueillir aujourd'hui, et de se pencher sur la question de la prise de mesures compensatoires et antidumping relative au maïs. Notre entreprise est, bien sûr, très préoccupée par cette situation, surtout en ce qui concerne notre section de production porcine, dont je parlerai plus tard.

    Maple Leafs est la première entreprise de transformation des produits alimentaires en importance au Canada. Nous exportons nos produits dans plus de 80 pays, nous affichons un chiffre d'affaires d'environ 6,5 milliards de dollars, et nous comptons approximativement 23 000 employés. Ce qui est particulièrement pertinent, et c'est l'une des raisons de ma présence -- ce qui peut sembler évident --, c'est le fait que notre secteur de production porcine est l'un des plus gros groupes de production porcine au Canada. Nous produisons plus de 1,7 million de porcs chaque année.

    Maple Leaf craint que les droits imposés au maïs importé des États-Unis ne placent les industries canadiennes touchées dans une position non concurrentielle par rapport aux industries comparables des autres pays. Même si nous reconnaissons que le prix du maïs à l'échelle internationale est à la baisse depuis quelque temps, et que les sommets atteints il y a quelques années sont désormais choses du passé -- en raison principalement de l'amélioration des conditions météorologiques et du rendement, la valeur du maïs au cours des deux dernières années était particulièrement faible --, nous croyons que l'imposition de droits sur le maïs n'est pas la solution idéale. Cela va orienter la demande et faire passer des emplois à valeur ajoutée dans d'autres pays, et les producteurs de maïs canadien perdront des clients et, au bout du compte, ne seront pas plus avancés.

    Maple Leafs prend les échanges commerciaux très au sérieux. Nous nous sommes récemment alliés avec le Conseil canadien du porc en vue d'éviter la prise de mesures antidumping sur les porcs vivants exportés aux États-Unis. Comme l'ont mentionné les représentants du conseil, c'est une dépense de 12 millions de dollars qui s'est révélée utile. Cependant, dans le sillage de cette victoire, nous devrons peut-être augmenter les coûts. Puisque l'alimentation est un élément important de la production porcine, nous accroîtrons nos coûts au Canada, et les producteurs américains pourraient de nouveau demander que des mesures antidumping soient prises contre nous. Si nous imposons des droits sur le maïs américain, nous risquons, de fait, de nous tirer dans le pied, pour ce qui est des porcs vivants destinés au marché américain.

    Je sais que d'autres témoins et d'autres industries vous ont parlé de l'éthanol, et que vous avez également entendu le témoignage des producteurs de porc, mais je tiens à réitérer certains aspects liés à la production porcine, ainsi qu'au secteur de la volaille et à l'industrie de l'alimentation pour animaux domestiques. Ce sont les industries qui ont le plus d'incidence sur Maple Leaf.

    En ce qui concerne l'industrie porcine, la demande des Producteurs de maïs du Canada relativement à l'imposition de droits compensatoires et antidumping sur le maïs aura un effet dévastateur sur l'industrie porcine canadienne, tant à court qu'à long terme -- à court terme pour ce qui est de l'accroissement des coûts, et à long terme pour ce qui est du déménagement d'entreprises à valeur ajoutée au sud de la frontière, et de la disparition de la transformation au Canada. En ce qui concerne l'accroissement à court terme des coûts, si on se fonde sur un droit de douane de 1 $ américain le boisseau -- et si vous vous demandez d'où vient ce chiffre, je peux vous l'expliquer -- un tel droit occasionnerait un accroissement d'environ 9,20 $ du coût de production d'un porc de marché au Canada. L'État de l'Iowa produit une enquête qui révèle souvent que le rendement quinquennal moyen pour un producteur porcin est d'environ 4,76 p. 100. Cela mènerait donc à une baisse très marquée, voire à la disparition, de la rentabilité des activités de production porcine au Canada.

    En ce qui concerne les effets à long terme ou à moyen terme, nous avons entendu, plus tôt, que l'élimination des profits forcera les producteurs porcins du Canada à trouver d'autres moyens de faire de l'argent. Par conséquent, ils exporteront de jeunes porcs aux États-Unis, car le maïs a moins d'impact sur le coût de production à cette étape. Pour chaque porc de marché d'une valeur approximative de 150 $ canadiens qu'on exporte aux États-Unis lorsqu'il n'est que porcelet, à un prix pouvant aller de 35 $ à 40 $ canadiens, le Canada perd 115 $ de valeur économique. Cela occasionnerait la perte d'environ 345 millions de dollars pour l'économie canadienne, ce qui, au bout du compte, influerait sur l'emploi et, par conséquent, sur l'exploitation à valeur ajoutée, sur l'assiette fiscale, etc.

    Finalement, si les porcelets prennent la voie du sud, le secteur de l'abattage aura également des problèmes à long terme. Nous serons incapables d'exploiter nos usines à raison de deux quarts de travail, et c'est ce que nous devons faire pour faire concurrence aux États-Unis. Ainsi, on assistera à une rationalisation des usines au Canada, et, encore une fois, il y aura perte d'emplois et de valeur ajoutée économique lorsque d'autres entreprises de transformation réduiront leur capacité d'abattage.

»  +-(1705)  

    L'industrie de la volaille est confrontée à un problème similaire. C'est légèrement différent, en raison de la gestion de l'offre, mais l'imposition imminente de droits compensatoires sur le maïs aura également des répercussions à court et à long terme. L'impact à court terme prendra, encore une fois, la forme de coûts accrus, fondés sur le droit de 1 $ le boisseau. La hausse de coût pour un poulet vivant, en fonction de la formule de gestion de l'offre, serait de 5 ¢ à 7 ¢. Ce coût sera essentiellement refilé à l'entreprise de transformation, en raison de la formule régissant les poulets vivants qui est appliquée en vue de la gestion de l'offre au Canada.

    Il est possible que l'industrie de la transformation soit en mesure de refiler ce coût aux surtransformateurs, aux exploitants de services d'alimentation, aux détaillants, etc, mais peut-être pas. Si elle le fait, les exploitants de services alimentaires, les surtransformateurs et les détaillants devront déterminer s'ils peuvent, de fait, refiler la note aux consommateurs. En chiffres nets, les répercussions sur la chaîne de valeur canadienne s'élèveront à environ 70 millions de dollars c'est-à-dire 5 ¢ à 7 ¢ multipliés par 934 millions de kilogrammes de poulets produits annuellement au Canada.

    Certaines entreprises ne seront pas en mesure d'absorber l'accroissement des coûts, de sorte que les prix à l'épicerie et sur les menus assumés par le consommateur canadien vont probablement augmenter, comme l'a déclaré mon collègue. Cependant, il y a des répercussions à moyen et à long terme sur la gestion de l'offre. Aux États-Unis, le coût d'élevage d'un poulet est de 55 ¢ le kilogramme. Le coût d'élevage d'un poulet au Brésil est d'environ 50 ¢ le kilogramme. Chez nous, selon la région, le prix vif s'étend de 1,11 $ à 1,14 $.

    Par conséquent, les sociétés brésiliennes et américaines réussiront à exporter des poulets au Canada malgré un droit de douane de 249 p. 100, et cela pourrait miner la structure de la gestion de l'offre. Cela ne se produirait que si nous étions en mesure de hausser les prix. Cependant, comme je l'ai mentionné plus tôt, il est improbable que les transformateurs et les exploitants de services alimentaires, ainsi que les surtransformateurs, soient en mesure d'absorber pleinement l'impact de ces hausses de coût, de sorte que les prix sur les menus et ce genre de choses vont probablement augmenter.

    Nous voyons déjà l'impact de cela, car nous voyons des produits brésiliens nous arriver sous forme congelée, malgré le droit imposé, et cela aggraverait davantage le risque. Même si je ne peux établir une corrélation directe à cet égard, nous jouons avec le feu. Une pression marquée sur la gestion de l'offre a une grande incidence sur les activités des aviculteurs canadiens, et toute aggravation de la situation va déstabiliser ce secteur.

    Afin de maintenir la compétitivité canadienne dans l'industrie de la volaille, l'industrie de transformation de la volaille doit également jouir d'une certaine marge bénéficiaire. Si le secteur de la transformation n'arrive pas à refiler une partie ou la totalité du droit sur le maïs aux intervenants subséquents de la chaîne de valeur, cela pourrait avoir un effet néfaste sur les investissements futurs nécessaires pour maintenir la viabilité de ces entreprises, et les transformateurs continueront d'imposer une tendance à la baisse de la gestion de l'offre afin de maîtriser leur situation. Cela va créer un cercle vicieux dans l'industrie.

    Enfin, pour ce qui est de l'industrie des aliments pour animaux domestiques, l'explication est assez simple. Le principal ingrédient des aliments pour animaux domestiques est, bien sûr, le maïs. L'impact sera considérable, car on va aggraver davantage une situation où les marges sont déjà très minces. On ne pourrait pas refiler le droit de douane aux clients dans ce cas, car ils ont accès à de nombreux produits américains qui ne sont pas soumis à ce droit. Ils pourraient se procurer des aliments pour animaux domestiques produits aux États-Unis. En particulier dans le secteur des marques maisons et dans d'autres secteurs, on assisterait au remplacement de fabricants canadiens par des fabricants américains.

    En somme, l'imposition éventuelle d'un droit de douane aura un impact négatif à grande échelle dans l'ensemble des secteurs de transformation agricoles et agro-alimentaires du Canada. Au bout du compte, l'imposition d'un droit va davantage nuire aux producteurs de maïs que cela ne les aidera. Il faut résoudre le problème des producteurs de maïs d'une autre façon.

    L'établissement d'une barrière protectionniste à l'égard d'un produit de base mondial n'est pas la solution. Nous devons envisager des solutions à long terme viables, comme la diversification vers d'autres domaines, que ce soit l'éthanol, la production porcine, bovine, l'innovation, la réduction des coûts par l'amélioration du rendement, la biotechnologie, les économies d'échelle, ou ce genre de choses, avec des réductions importantes des coûts.

    On devrait envisager la mise au point de variétés spécialisées novatrices permettant d'exiger un prix supérieur, ainsi que l'établissement de programmes de gestion des risques. C'est le genre de programmes que tous les intervenants de l'industrie peuvent appuyer. Nous pouvons tous investir dans ces types de programmes. Nous pourrons tous appuyer ces types de programmes. Nous devons travailler ensemble en vue de trouver des solutions plus permanentes et novatrices pour accroître nos revenus et réduire les coûts dans l'ensemble de l'industrie. Nous n'avons pas avantage à nous nuire mutuellement.

    Merci beaucoup de cette occasion de vous parler aujourd'hui. Je serai heureuse de répondre à toutes vos questions.

»  +-(1710)  

+-

    Le président: Merci, madame King.

    Commençons avec M. Eyking, pour cinq minutes.

+-

    L'hon. Mark Eyking (Sydney—Victoria, Lib.): Merci, monsieur le président.

    C'est drôle, comment il suffit de quelques jours pour changer de point de vue: quand les producteurs de maïs étaient ici, ils avaient un point de vue totalement différent à l'égard d'un grand nombre d'enjeux que vous avez soulevés.

    Premièrement, le groupe qui vous a précédé a mentionné la qualité de notre maïs au Canada et a parlé de l'incapacité de produire suffisamment de produits de qualité. Les producteurs de maïs de l'Ontario étaient ici, et ils ont dit qu'avec un prix conséquent, ils pourraient s'arranger, en un an, pour obtenir la qualité et la quantité nécessaires pour le marché. J'aimerais entendre vos commentaires à cet égard.

    Deuxièmement, je suis membre du comité depuis quatre ou cinq ans, et on nous présente ces écarts de prix, en fonction de ce que touche l'agriculteur pour le produit de base, ce que le détaillant paie à l'autre bout, et ce que tout le monde reçoit entre les deux. Je ne sais pas si je vous ai mal compris, mais vous dites que jusqu'à 80 p. 100 du coût d'un produit provient... Par exemple, si j'achète un sac de croustilles de maïs pour 1 $, je serais étonné -- et j'ai peut-être tort -- si 10 ¢ du prix de ce sac était lié au maïs, à ce qui a été produit par l'agriculteur. Toutefois, vous dites que cela correspond en moyenne à presque 80 p. 100. C'est ma deuxième question.

    L'autre chose qui me préoccupe, parce que nous parlons tous de travailler ensemble, c'est le principal enjeu : les subventions américaines relatives aux produits du maïs. On penserait que, si nous avions tant à coeur d'aider les producteurs de maïs, nous ferions des pieds et des mains pour obtenir des résultats auprès de l'OMC en décembre, on se mettrait en quatre pour que ces subventions soient réduites.

    Alors, c'est ma question à l'intention des deux groupes. C'est peut-être dans votre intérêt d'avoir accès à du maïs à prix modique, car vous avez même déclaré que cela vous permet d'offrir le produit au consommateur à un prix plus bas. Mais, techniquement, c'est un produit subventionné, et vous êtes en concurrence avec d'autres produits à haute teneur en protéines, qu'il s'agisse de poissons ou de produits similaires auxquels vous faites concurrence.

    Ce sont mes trois déclarations. Vous pourriez peut-être commenter.

+-

    Mme Ellen Mills: Je ne suis pas certaine de pouvoir ajouter quoi que ce soit à votre première déclaration, monsieur Eyking. Il est clair qu'un certain nombre de nos membres nous ont dit qu'ils ne peuvent obtenir des producteurs de maïs de l'Est la qualité ou le type de maïs dont ils ont besoin. Je ne peux pas vous donner de détails, mais je peux certainement vous fournir des renseignements supplémentaires plus tard, si vous voulez.

    Pour ce qui est des différences de prix, encore une fois, nous avons consulté un certain nombre de sources, et pas seulement nos membres. Il est difficile d'obtenir des renseignements exclusifs, alors nous avons consulté les données du Conference Board du Canada, lequel jouit, je crois, d'une très bonne réputation, pour nous donner une idée. Il a établi une ventilation sectorielle du coût des intrants matériels. À la lumière de la documentation du Conference Board, je vous ai parlé d'une moyenne de 82 p. 100, le taux le plus bas étant de 68 p. 100, et le plus élevé, de 89 p. 100, comme je vous l'ai dit.

    Encore, une fois, je ne suis pas certaine de pouvoir ajouter grand-chose à cela.

+-

    L'hon. Mark Eyking: Monsieur le président, je ne sais pas si nous pouvons faire cela, mais j'aimerais bien qu'une ventilation soit présentée à notre comité. Ils avancent que 80 p. 100 du prix de vente de leur produit est lié, par exemple, au maïs, mais pourrions-nous voir une documentation permettant de corroborer leurs dires?

+-

    Mme Ellen Mills: Oui, de leurs coûts liés aux intrants.

+-

    Le président: Je crois que nous aimerions voir un ordinogramme décrivant les coûts liés aux intrants, à partir du producteur primaire, jusqu'au bout de la chaîne. On nous a déjà présenté cet argument, on avait fait valoir que la hausse du prix des pizzas découlait de la hausse du prix des produits laitiers. Finalement, elle ne tenait pas vraiment aux produits laitiers. Elle découlait d'une foule d'autres incidents connexes qui ont occasionné une hausse du prix, et ils ont dû se rétracter. Je crois que la même chose s'applique probablement à l'industrie dont nous parlons aujourd'hui.

+-

    Mme Ellen Mills: Je peux certainement vous fournir cela. Comme je l'ai dit, cette moyenne de 82 p. 100 calculée par le Conference Board du Canada fait l'objet d'une ventilation par secteurs. Comme je l'ai déjà dit, je ne suis pas certaine que nos membres consentiront à fournir des renseignements exclusifs, mais je pourrais certainement voir ce que je peux vous trouver d'autre.

+-

    Le président: Je crois que vous avez l'obligation -- quelqu'un a une obligation -- d'aborder cette question, car les agriculteurs courent à la faillite. Les producteurs primaires de notre pays courent à la faillite, alors que les autres disent que cela n'a rien à voir avec les agriculteurs. Eh bien, cela concerne énormément les agriculteurs, car si nous n'avons pas d'agriculteurs, vous devrez vous procurer ce produit ailleurs dans le monde. Dans ce cas, nous ne nous nourrissons plus.

    Notre comité devrait avoir le droit de savoir quels sont les coûts liés à vos produits sur le marché, par rapport à ce que touchent les agriculteurs ou les producteurs primaires à l'égard de ce produit. Je suppose que c'est l'argument que je vous soumets, alors je vous demanderais de fournir cette information à notre comité.

»  +-(1715)  

+-

    Mme Ellen Mills: D'accord.

+-

    Mme Annalisa King: Dans le cas des activités de Maple Leaf, un maïs peu coûteux ne nous permettrait pas d'accroître notre marge, car nous envisageons tout cela du point de vue de la production porcine. Nous nourrissons les animaux avec du maïs, et ensuite nous les vendons sur le marché nord-américain, et du porc transformé est également vendu sur le marché nord-américain.

    Nous sommes également preneurs de prix, et nous savons que chaque cochon consomme 9,2 boisseaux de maïs. Par conséquent, le maïs compte pour plus de 50 p. 100 du coût d'un cochon.

    Nous serions certainement heureux de fournir cette information, mais il est très important de comprendre que, dans la relation, nous devons uniformiser les règles du jeu avec nos homologues américains en vue de faire concurrence dans le domaine du porc et du poulet dans notre pays. Ce n'est pas que nous jouissions de marges excessives ou quoi que ce soit de ce genre. Nous sommes dans une situation où nous sommes également des preneurs de prix, et lorsque nous devons composer avec des hausses de coût qui ne se comparent pas à celles de nos concurrents du Sud, c'est là que les problèmes commencent.

+-

    L'hon. Mark Eyking: À cet égard, si je me demande si nous allons manger un rôti de porc ou un saumon pour souper, si le rôti de porc est subventionné, le prix devrait être plus bas, et ça m'intéresse.

    Au bout du compte, quand les gens viennent ici et disent qu'ils sont du côté des agriculteurs, qu'ils aimeraient qu'il y ait moins de subventions, cela occasionnerait une hausse de vos coûts, et vous seriez moins concurrentiels face à d'autres produits riches en protéines. Alors, ce n'est pas vraiment dans votre intérêt même d'accroître ce coût, car, techniquement, votre prix de vente augmenterait.

+-

    Mme Annalisa King: Au bout du compte, tous les animaux d'élevage mangent du grain, et tous les grains se déplacent sur le marché mondial, et ils sont tous interreliés. Dans la mesure où les règles du jeu sont uniformes, dans la mesure où la production totale de protéines est gérée et s'accroît dans l'ensemble de l'économie mondiale, tout simplement parce qu'il y a des pays en développement qui consomment davantage de protéines que jamais auparavant, cela crée une situation où, dans la mesure où les règles du jeu sont uniformes, alors, que ce soit plus haut ou plus bas, puisque l'impact sur tous les animaux d'élevage est quelque peu similaire...

+-

    L'hon. Mark Eyking: Je comprends tout cela.

+-

    Le président: Votre temps est écoulé, alors nous passerons à la prochaine question, qui sera posée par M. Miller.

+-

    M. Larry Miller (Bruce—Grey—Owen Sound, PCC): Merci, monsieur le président.

    Revenons à ce dont M. Eyking et vous-même parliez, en ce qui concerne le coût du produit alimentaire final; sans trop sombrer dans la fiction, j'oserais dire que les chiffres que vous avez avancés étaient probablement corrects, mais totalement à l'inverse. Par exemple, pendant la crise de l'ESB, nous savons quel secteur n'a jamais cessé de réaliser des profits. C'est non pas l'agriculteur, mais bien le transformateur.

    J'en arrive donc à ma question. Nous avons un groupe de producteurs spécialisés, les producteurs de maïs, qui demandent l'imposition d'un droit compensatoire, mais presque tous les autres groupes de production spécialisés, des éleveurs jusqu'aux transformateurs, comme vous-même, sont contre.

    Comme l'a signalé le président plus tôt, nous avons tout un défi à relever pour ce qui est de trouver une solution à ce problème. Nous savons qu'il y a un problème. À votre avis, que pouvons-nous faire? À votre avis, qu'est-ce qui devrait être fait à cet égard? Nous savons que le maïs américain est probablement bradé ici.

+-

    Mme Annalisa King: Il y a d'autres solutions que d'envisager tout simplement la création de subventions ou de tenter d'établir des programmes équivalant aux programmes de sécurité américains. Ces solutions de rechange sont liées à des choses comme l'amélioration du rendement. Le représentant de Hytek en a parlé, et a mentionné la diversification. Si les producteurs de maïs diversifient leurs activités en se tournant vers des cultures de remplacement, la production porcine, la production bovine, des coopératives de production d'éthanol, ou ce genre de chose, ils se dotent d'une stratégie de gestion des risques leur permettant d'afficher un rendement supérieur à celui du producteur de maïs qui ne fait rien d'autre.

    Il y a des choses, comme les programmes de gestion des risques, que nous pouvons mettre en place. Nous envisageons la possibilité d'accroître le stockage afin que nous puissions mieux gérer nos prix et résister à certaines périodes creuses de courte durée. Nous pouvons tirer avantage de la biotechnologie. L'industrie et le gouvernement devraient peut-être investir ensemble dans ce genre de choses.

    Je sais que ce ne sont pas nécessairement des solutions à court terme, mais je n'ai pas de solutions à court terme à vous suggérer aujourd'hui.

+-

    Le président: Je vous arrête là, car si vous croyez que c'est la solution, je vous inviterais à rencontrer nos groupes d'agriculteurs et à leur expliquer cette analyse qui vous permet de trouver une solution à leurs problèmes. Je crois que vous obtiendriez peut-être une réponse différente de leur part, et peut-être que, eux, contrairement à la présidence, mettront des gants.

»  +-(1720)  

+-

    M. Larry Miller: Je suis probablement d'accord avec vous, monsieur le président. J'espère que vous ne me voliez pas mon temps.

    Madame King, si je vous comprends bien, vous dites que l'imposition d'un droit sur le maïs mènerait certainement à une défaite dans le cadre de l'appel relatif au dumping de porcs américains. C'est bien ce que je vous ai entendu dire?

+-

    Mme Annalisa King: Je n'avancerais pas nécessairement que c'est une certitude, mais cela aggraverait sûrement la situation en augmentant nos coûts de 9 $ le porc. Je vous propose ce chiffre approximatif, fondé sur un droit de 1 $ le boisson. Ensuite, nous vendrions probablement le porc à perte, ce qui, aux yeux des Américains, aggraverait la situation. Ainsi, une autre démarche des Américains relative au porc vivant nous mettrait gravement à risque.

+-

    M. Larry Miller: Essentiellement, d'une certaine façon, on peut le faire à un, mais pas à l'autre. Je voulais simplement comprendre un peu mieux à quoi vous vouliez en venir.

    Ce qui suit va ressembler davantage à une déclaration, mais il y a une question au bout.

    Au Canada, les aliments sont peu coûteux. Nous consacrons une moins grande part de notre revenu disponible aux aliments que tous les autres pays aisés du monde. J'ai vu cette statistique au cours de la dernière année, et si la réalité a changé, je reconnaîtrai mon erreur, mais je ne crois pas que cela ne s'éloigne trop de la réalité.

    Premièrement, est-ce que c'est équitable envers nos producteurs d'oeufs? Deuxièmement, croyez-vous que les Canadiens seraient disposés à payer un peu plus pour des aliments canadiens d'une grande qualité? C'est un aspect que vous avez mentionné tous les deux dans vos exposés.

+-

    Mme Ellen Mills: Concernant votre première question, monsieur Miller, j'aimerais dire que je -- à titre de représentante de l'association des PACC -- ne suis pas venue en vue de suggérer une solution, car nous ne sommes pas près du secteur agricole, et je ne voudrais pas mettre de l'avant des idées qui ne vaudraient pas la peine d'être envisagées. Mais nous ne sommes pas ici pour dire que les producteurs de maïs devraient porter le poids de cette affaire.

    Je crois que nous sommes un peu comme les producteurs précédents, affirmant que nous nous tirons peut-être dans le pied si cela occasionne des pertes d'emploi dans d'autres secteurs. C'est ça qui nous préoccupe, car un certain nombre d'usines ici doivent faire concurrence aux usines américaines. Alors, je n'ai pas la solution, mais je ne veux certainement pas vous laisser l'impression que nous sommes inconscients du malheur des producteurs de maïs.

+-

    M. Larry Miller: Je comprends.

+-

    Mme Ellen Mills: Par contre, il est très difficile de déterminer ce que les consommateurs sont prêts à payer. De sondage en sondage, qu'il porte sur l'environnement... on demande aux gens s'ils sont prêts à payer davantage. Théoriquement, la plupart du temps, ils disent qu'ils paieront davantage pour un produit de haute qualité -- une automobile hybride, ou autre chose -- mais on ne sait jamais vraiment la réponse avant que le consommateur soit confronté à un prix réel, qu'il soit vraiment dans le supermarché, en train d'effectuer cet achat. Alors, il est très difficile de dire s'ils le feront ou pas.

+-

    M. Larry Miller: Juste pour aller un peu plus loin sur cette question, croyez-vous que les Canadiens comprennent vraiment à quel point ils obtiennent leurs aliments à bon marché?

+-

    Mme Ellen Mills: Vous savez, je ne suis pas vraiment certaine. Manifestement, nos fabricants reçoivent des plaintes lorsque leurs prix augmentent. Certes, les détaillants, les supermarchés, sont très préoccupés lorsque nos fabricants veulent augmenter les prix, car ce sont eux qui subissent les foudres du consommateur à la caisse. Je ne sais pas ce que je pourrais ajouter.

+-

    Le président: Passons à autre chose.

    Monsieur Easter.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Merci, monsieur le président.

    Madame King, vous avez déclaré que se nuire l'un l'autre n'est pas la solution, et je suis d'accord avec vous. Mais, l'an dernier, à l'échelon de la production primaire, à la ferme, sans paiements gouvernementaux, le revenu net de l'industrie s'élevait à moins 2 milliards de dollars. Maintenant, je dirais que nous avons un problème.

    Peut-être que cette démarche des producteurs de maïs montre aux autres intervenants de l'industrie que le problème des agriculteurs est désormais leur problème aussi. Je crois que nous devrons trouver des solutions sensées à long terme, car on ne peut avoir une industrie où les producteurs primaires éprouvent constamment des difficultés financières, même si -- et j'ai produit un rapport à cet égard l'hiver dernier -- les agriculteurs canadiens sont efficients.

    Je conteste effectivement les solutions de rechange que vous proposez. Oui, nous devons toujours chercher à améliorer le rendement, mais, si on prend l'exemple de l'éthanol, le gouvernement fédéral a investi des sommes importantes dans l'usine de Chatham. On m'a dit que 85 p. 100 du maïs qui se rend à cette usine provient des États-Unis. Et la production d'éthanol au moyen de maïs peu coûteux n'est pas la solution non plus. Je veux dire, les producteurs doivent être payés.

    Je suppose que, ce que je vous demande à tous les deux, c'est si vous avez des propositions qui nous aideraient à résoudre le problème de la rentabilité des fermes, parce que c'est ça, le problème qu'il faut régler. Les producteurs ne veulent pas être subventionnés; ils veulent que leur prix échappe aux fluctuations du marché, et c'est dans cette voie que nous devons aller. Je vous laisse réfléchir à cela.

    J'ai une autre question pour Mme Mills. Dites-vous que vous appuieriez l'ajout du maïs parmi nos mesures de rétorsion relatives à l'amendement Byrd?

»  +-(1725)  

+-

    Mme Ellen Mills: Non, je n'ai pas dit ça. J'ai dit que j'étais tout à fait consciente du fait que les producteurs de maïs de l'Ontario demandent à l'Agence des services frontaliers du Canada de mener une enquête, et que l'imposition éventuelle d'un droit n'était qu'une des solutions possibles. Ils ont demandé que cette mesure soit ajoutée aux mesures de représailles à l'amendement Byrd, et qu'on prenne également des mesures dans le cadre de l'OMC.

    Il faudrait que je vous revienne là-dessus. Nous n'avons certainement pas consulté nos membres en ce qui concerne la position qu'ils adopteraient si cette mesure était ajoutée aux mesures de rétorsion relatives à l'amendement Byrd. Je ne sais pas.

+-

    Mme Annalisa King: Pour répondre à vos questions, je crois effectivement que le revenu agricole pose problème. Puisque Maple Leaf est principalement une société agricole, nous avons des liens très étroits avec nos producteurs, et leur survie et la nôtre sont liées. Nous savons que nous ne pouvons survivre sans eux. Nous savons qu'il y a des problèmes à l'heure actuelle.

    Loin de moi l'idée de sembler désinvolte lorsque je parle de certaines choses que nous pouvons faire, pour ce qui est de mener des recherches et de consacrer du temps à tenter de trouver des solutions novatrices à ce problème. Je sais que tous les agriculteurs du Canada sont, en réalité, très innovateurs, et qu'ils sont des gens d'affaires extrêmement efficaces. Ils se sont très bien tirés de situations très difficiles, tout compte fait.

    Mais si nous pouvons nous mobiliser et tenir des séances de remue-méninges et des tables rondes, nous pourrions voir s'il y a autre chose à faire. Nous pourrions envisager, par exemple, l'établissement de contrats à long terme qui permettraient de maintenir un prix supérieur et de sécuriser notre approvisionnement, ce genre de choses. Tout ce que je dis, c'est que nous devrions nous réunir, parler de ces choses, faire du remue-méninges, et parcourir, du mieux que nous pouvons, toute une liste d'idées novatrices, y compris les solutions scientifiques, la gestion du risque, le partage des profits -- toutes ces choses.

    Je n'ai pas la solution, monsieur Easter. Mais je partage vos préoccupations, car, au bout du compte, notre survie dans ce secteur est en jeu. Nous préférons le maïs canadien, mais s'il y a un droit de 1 $, le fait de privilégier le maïs canadien constitue un fardeau énorme pour nous, les producteurs porcins. Alors, nous pouvons privilégier le maïs canadien, mais seulement dans la mesure où cela ne nous mène pas à la faillite.

+-

    Mme Ellen Mills: Concernant votre première question, monsieur Easter, au sujet de la solution, et le fait que le problème du secteur primaire soit notre problème, je crois que notre industrie est très consciente de cela. Même si je n'ai pas de solutions à vous proposer, car nous sommes loin de la situation en question, nous sommes très heureux de participer à la démarche.

    En mars dernier, notre président a assisté à une réunion des sous-ministres de l'Agriculture, de la Santé et de l'Industrie. Nous estimons que, dans un certain sens, c'est la façon dont nous devrions aborder ce genre de choses, car ces enjeux transcendent divers secteurs. Nous serions très heureux de participer à une analyse multisectorielle de ces enjeux.

    Je crois qu'il faut établir des mécanismes permettant de lancer une telle démarche.

+-

    Le président: Monsieur Easter, votre temps est écoulé.

    Monsieur Bellavance.

[Français]

+-

    M. André Bellavance: Je ne sais pas si j'ai vraiment des questions à poser, mais j'ai certainement un commentaire à faire. Heureusement, madame Mills, qu'en réponse à une question de M. Miller vous avez dit ne pas être insensible au sort des producteurs de maïs. Je n'ai perçu dans vos propos que de l'insensibilité. Nous avons entendu cet après-midi deux témoignages complètement opposés. Les producteurs de porc et de boeuf, qui ne sont pas d'accord avec la plainte déposée par les producteurs de maïs, nous proposent néanmoins certaines solutions, par exemple de demander au gouvernement de revoir des programmes ou encore d'en créer un autre. L'opinion des producteurs de maïs est évidemment différente.

    Pour votre part, vous nous présentez un scénario de catastrophe. Vous en êtes même à chiffrer les pertes d'emploi, alors qu'on ne sait pas s'il y aura des droits compensatoires et, le cas échéant, de quel ordre ils seront. Vous parlez d'une perte de 50 à 75 emplois dans la petite et moyenne entreprise et d'une perte de 500 à 700 emplois dans la grande entreprise. Vous parlez aussi de déplacement de la production. Je vous dirai pour ma part que s'il n'y a plus de producteurs de maïs au Canada et au Québec, la production va certainement se déplacer. Or, le jour où les Américains cesseront de subventionner leur maïs ou seront les seuls à en avoir à vendre, le prix du maïs américain ne sera peut-être pas aussi avantageux qu'il ne l'est actuellement. Peut-être alors pourrez-vous revenir nous présenter des scénarios catastrophiques.

    Je trouve plutôt choquant que vous énumériez tous les impacts négatifs possibles. Parmi tous les témoins que nous avons entendus, vous n'êtes pas des plus à plaindre. Pourtant, vous n'avez aucune solution à présenter au comité. Je trouve cela déplorable. Je repense à ce que disait plus tôt M. Miller concernant la crise de la vache folle. Pendant que les producteurs étaient dans la grosse misère, les consommateurs n'ont eu pas la possibilité de tirer parti de la situation puisque le prix du boeuf à l'épicerie est resté le même. Je vois un parallèle entre ces deux cas.

    Vous arrivez en disant que les conséquences seront très graves. Par contre, les solutions que pourraient adopter les producteurs de maïs ne semblent pas vraiment vous intéresser.

    C'est plus un commentaire qu'une question, monsieur le président, et je n'attends pas vraiment de réponse.

»  +-(1730)  

[Traduction]

+-

    Mme Ellen Mills: J'aimerais dire quelque chose. Je suis désolée si ce que j'ai dit vous a offensé. Nous sommes venus ici pour décrire l'impact et nous estimons que le comité devrait être au courant de cela.

    Les programmes de subventions, le PCSRA, et les négociations de l'OMC sont des questions très complexes, et je ne voudrais pas proposer une solution boiteuse ou fondée sur une recherche bâclée. En toute franchise, je pourrais peut-être vous dire que, lorsqu'on représente 130 entreprises chacune différente des autres... Environ 38 p. 100 d'entre elles sont des sociétés canadiennes fermées. Il y a un certain nombre de multinationales qui exercent leurs activités au Canada, dans les secteurs de l'alimentation et des produits de consommation. Le simple fait d'obtenir de leur part, en trois semaines seulement, de l'information sur l'impact initial d'un droit de douane de 1 $ le boisseau tiendrait de l'exploit.

    Je m'excuse, mais nous avons consacré notre énergie à tenter de décrire au comité l'impact de cette mesure sur notre secteur, et je ne veux d'aucune façon laisser entendre que nous ne sommes pas sensibles à la situation des producteurs de maïs.

+-

    Le président: Passons à madame Ur.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Merci, monsieur le président.

    Ma première question pour vous deux est la suivante : avez-vous parlé à l'OCPA avant qu'elle n'amorce cette démarche? Est-ce que vos entreprises ont eu un mot à dire?

+-

    Mme Annalisa King: Non, nous n'en avons pas eu l'occasion. Toutefois, le Conseil canadien du porc et l'ANAC, qui nous représentent, ont rencontré des représentants de l'OCPA, mais les réunions n'ont pas eu lieu avant le lancement de cette démarche.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Et c'est la même chose pour vous?

+-

    Mme Ellen Mills: Madame Ur, nous n'étions même pas au courant de cette démarche avant qu'elle ne soit prise.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: D'accord, merci.

    Juste pour donner suite aux questions de M. Eyking, vous avancez que 82 p. 100 de votre coût total est lié aux matières premières. Vous dites que ce chiffre est tiré du profil des perspectives industrielles établi par le Conference Board. J'aimerais seulement partager cette information avec vous, puisque nous parlons de maïs. Je vous lis un extrait de The Farmers' Share: Compare the Share, étude menée au début des années 80, et ensuite mise à jour en 2003: « Le prix d'une boîte de corn flakes a plus que doublé entre 1981 et 2003, augmentant de 1,91 $ -- ce que vous savez sûrement déjà, car vous êtes dans le milieu --, mais « le prix du maïs... n'a augmenté que de 0,03 $ par boîte. » Cela me semble un prix équitable, et cela n'a pas l'air... Je sais que le maïs n'est pas le seul ingrédient des Cornflakes, mais c'est certainement l'un des principaux ingrédients.

    Si vous le permettez, j'essaierai d'obtenir une copie de cette étude, et je pourrais peut-être vous l'acheminer. Cela pourrait vous éclairer sur l'établissement du prix que touchent nos agriculteurs, car je crois que ce rapport est un peu plus réaliste que cette information que vous nous avez fournie.

    De plus, vous avez parlé à plusieurs reprises de « perte de produit », et j'aimerais que vous me donniez des précisions. Il semble que c'est une phrase que vous utilisez beaucoup -- si cette démarche va de l'avant, il y aura perte de produit. Votre organisme dit cela assez souvent. Qu'est-ce que vous laissez entendre? Qu'est-ce qui est voué à disparaître des tablettes?

»  +-(1735)  

+-

    Mme Ellen Mills: Je peux dire, spécifiquement, que vous voyez dans le mémoire l'éventail de produits que nos membres ont établis -- les principaux produits qui sont des produits finis ayant comme intrant le maïs-grain. Nous leur avons demandé ce qu'ils feraient si ce droit de douane était imposé, et quelles étaient les options qui s'offrent à eux. Nombre d'entre eux ont répondu, sans fournir de détails, que certains produits seraient probablement voués à disparaître.

    Je ne peux vous préciser lesquels pour l'instant. Encore une fois, je sais qu'on nous demande toujours exactement ce que vont faire les fabricants. Ils font de leur mieux pour nous donner une estimation, mais il s'agit toujours de situations hypothétiques.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Ce que je vais dire ressemble probablement davantage à un commentaire qu'à une question, mais, dans votre mémoire, vous dites:

Les fabricants, déjà encombrés par les hausses substantielles des coûts des services publics et par la tension des marges de profit due à la hausse du dollar canadien, vont certainement avoir besoin de transmettre ces augmentations de coûts aux consommateurs.



Le report sur autrui des augmentations de coûts, en l'occurrence les consommateurs, n'est pas nécessairement la solution qui s'impose.

    Eh bien, vous savez quoi? Vous entrez probablement dans la réalité des agriculteurs. Ils sont là depuis longtemps et il est à peu près temps que certaines organisations reconnaissent -- comme vous l'avez dit au début de votre exposé -- que nous avons besoin d'intrants peu coûteux. Payer moins cher, c'est bien beau, mais il y a tout de même des limites à ce que les agriculteurs peuvent faire.

    J'ai déjà été agriculteur, et quand on commence à liquider ses actifs en vue de procurer des aliments à prix modique aux consommateurs, il est temps de voir la réalité en face. Tout le monde doit faire de l'argent, y compris les organismes qui sont ici aujourd'hui, je le concède. Mais M. Easter a effectué cette étude, et la part des agriculteurs s'amincit depuis 25 ans. Il ne reste plus grand-chose pour notre secteur agricole.

    Vous dites que vous n'avez pas fait partie d'un groupe global, ou que vous aimeriez analyser la situation avec un tel groupe. Je ne vois rien de mal à ce que l'un d'entre vous prenne l'initiative de téléphoner -- vous n'avez pas besoin d'attendre que le gouvernement le fasse -- et de dire : « Mobilisons-nous. Nous avons un problème à régler. Vous risquez de disparaître. Qu'allons-nous faire? »

    Je ne sais pas si vous avez déjà songé à prendre une telle initiative.

    Madame King.

+-

    Mme Annalisa King: Oui, nous avons effectivement tenu des tables rondes. Nous avons également participé à la démarche du gouvernement ontarien en vue d'établir des tribunes relatives à l'innovation visant à mieux comprendre certains enjeux.

    Pourrions-nous aller plus loin à cet égard? Certainement.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Mais nous ne pouvons attendre éternellement. Vous êtes les entreprises et les producteurs primaires du domaine; nous sommes le gouvernement. Je ne dis pas cela pour nous exclure... mais les producteurs et vous-mêmes êtes l'âme de cette industrie, alors je crois qu'il est impératif pour les deux groupes de se réunir et de faire appel au gouvernement par la suite.

+-

    Mme Annalisa King: Oui. À vrai dire, au cours des dernières années, nous nous sommes consacrés à ces différends commerciaux, en particulier la démarche relative aux porcs ...

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Oui, j'en ai fait partie.

+-

    Mme Annalisa King: ... qui a été lancée contre nous par les États-Unis, mais aussi aux différends liés au maïs. J'aimerais bien passer tout ce temps à travailler avec les producteurs de maïs, en vue de trouver des solutions, mais, malheureusement, nous passons notre temps à nous défendre. Mais je prends bonne note de votre remarque, et nous continuerons de faire tout ce que nous pouvons pour nous réunir avec eux.

+-

    Le président: Merci, mesdames King et Ur.

    Voici maintenant M. Ritz, avec la dernière série de questions.

+-

    M. Gerry Ritz: Merci d'être venus aujourd'hui.

    Il s'agit de la dernière séance relative au problème du maïs, et je crois que la frustration de certains membres du comité est palpable, car il n'y a pas de solution facile. Cela ne s'est pas produit du jour au lendemain, et nous n'allons certainement pas trouver une solution si facilement.

    Avant même que ne commence le cycle de négociations de Doha, nous étions confrontés à un nombre grandissant de facteurs échappant à notre contrôle. Le Canada, toujours de bonne foi, a pris les devants et a été le premier à se départir des subventions, loin devant tout le monde. Nous sommes confrontés à ce manque à gagner aujourd'hui, et ce sera la même chose demain. Nous ne pouvons plus récupérer ce qui a été perdu.

    Nous parlons du marché mondial et de l'uniformisation des règles du jeu, et je suis parfaitement d'accord avec vous. Nous ne nous contentons pas de vendre nos produits dans les grands centres canadiens, nous nous aventurons sur le marché mondial.

    Outre les études sur le coût des intrants, avez-vous mené des études visant à comparer la production canadienne à la production américaine, à la production européenne, ou à la production brésilienne? Les obstacles sont nombreux : les taxes sur vos intrants, l'impôt sur vos revenus; le fardeau de la réglementation au Canada, beaucoup plus lourd que celui de tout autre pays; et le côté financier de tout cela. Il n'est plus possible d'accéder à des emprunts à long terme stables. Avez-vous établi une ventilation des coûts liés à la capitalisation de votre équipement, à l'amortissement de votre équipement, aux coûts de la main-d'oeuvre, d'un pays à l'autre? Je crois que cela pourrait se révéler utile lorsque nous commencerons à chercher une solution globale à certains de ces problèmes.

    Il ne s'agit pas uniquement du coût des intrants. Les agriculteurs servent de baromètre à cet égard, car ils sont en première ligne. Comme l'a signalé le président, nous avons vu au cours des cinq à dix dernières années cet effritement dans l'Ouest canadien, mais ces autres questions entrent également en jeu. Je serais très intéressé si vous pouviez assembler quelque chose comme ça, pour montrer comment Maple Leaf se compare aux Brésiliens... C'est là qu'on commence à voir que les règles du jeu ne sont pas uniformes.

    Nous savons très bien qu'une bonne part de l'activité industrielle se déplace vers la Chine, en raison du faible coût de la main-d'oeuvre là-bas, et, bien sûr, on n'accorde pas la même importance aux questions environnementales et autres choses du genre. Alors, cela va bien plus loin que de dire que nous devons recevoir davantage pour notre maïs.

    Je sais que mon propos ne fera pas le bonheur des producteurs de maïs, car ils sont à la recherche d'une solution à court terme. Je ne suis pas capable d'en voir une.

    Si vous pouviez nous orienter à cet égard, ce serait fantastique.

»  -(1740)  

+-

    Mme Annalisa King: Certainement.

    En notre qualité d'entreprise, surtout en ce qui concerne le porc et le poulet, nous consacrons beaucoup de temps à l'analyse des coûts de production. Nous avons établi des modèles détaillés qui tiennent compte du rendement moyen et du coût des immobilisations, ainsi que du coût lié à la construction de nouvelles étables, etc. Nous passons beaucoup de temps à essayer de comprendre les petits détails afin de réduire nos coûts et de l'emporter contre les Américains -- et de cerner les endroits où on peut intervenir. Il faut également faire cela avec l'assiette du revenu. Il n'y a pas de solutions faciles.

    Les producteurs de maïs et les producteurs porcins font cela régulièrement. Ils comprennent leurs coûts lorsqu'ils travaillent dans leurs étables au quotidien. Je connais ces gens. Leur travail les passionne, ils en mangent, et ils comprennent probablement leur domaine mieux que quiconque. Mais nous avons des modèles détaillés sur lesquels nous travaillons. Il y a des occasions; nous pouvons nous pencher sur certains aspects, comme l'amélioration de l'indice de conversion, et ainsi de suite. Mais il y a beaucoup de solutions à long terme et à moyen terme. Je n'ai pas de solutions à court terme à proposer aux producteurs de maïs.

+-

    M. Gerry Ritz: Personne n'en a une.

    Merci.

-

    Le président: Merci, monsieur Ritz.

    Je suppose qu'une part de la frustration ressentie à l'occasion des réunions précédentes, et la frustration des témoins que nous avons entendus.... C'est une industrie que certains des membres du comité ici présents comprennent très bien, car nous en faisons partie, et nous en avons fait partie toute notre vie. Heureusement que certaines de nos collectivités agricoles n'ont pas vu ce que nous avons lu cet après-midi. Vous mettez en relief les préoccupations de vos membres à la page 2: un approvisionnement fiable et économique en intrants de maïs-grain. Économique? C'est ce qu'on dit toujours aux agriculteurs, et ces économies sont toujours réalisées aux dépens du producteur primaire. C'est ça, vraiment, qui nous irrite, et qui nous a fait craquer. On nous a déjà mentionné cela à une ou deux reprises -- 82 p. 100 du coût est lié aux intrants pour certains produits, et le taux passe à 89 p. 100 dans le secteur des produits laitiers. On ne pourrait jamais trouver un exploitant de ferme laitière qui refuserait de vous parler de cette question à l'extérieur.

    En toute franchise, je comprends que vous faites votre travail. Vous représentez 130 entreprises. Je vous dis aujourd'hui que les membres du comité représentent 230 000 agriculteurs. Ce sont tous des hommes d'affaires autonomes qui essaient d'assurer leur subsistance au sein d'une économie qui ne les favorise pas, et, par conséquent, ils ressentent actuellement de la frustration. Nous nous tournons vers un grand nombre de personnes en vue d'obtenir de l'aide à l'égard de cette question, mais, au bout du compte, quelqu'un devra prendre une décision, et ce sera probablement les membres du comité, ainsi que d'autres politiciens.

    Merci beaucoup d'être venus nous parler. Je vous encourage à nous transmettre le plus tôt possible l'information demandée cet après-midi.

    La séance est levée.