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SCYR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Sous-comité des enfants et jeunes à risque du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 13 mars 2002




º 1615
V         Mme Neville
V         M. John G. Richards (professeur d'analyse politique, Faculté d'administration des affaires, Université Simon Fraser; chercheur Phillips en politiques sociales et chargé de recherche invité, Institut C.D. Howe)
V         Mme Monique Guay (Laurentides, BQ)
V         M. John Richards

º 1620
V         Mme Neville
V         M. J. Fraser Mustard (président fondateur et membre de l'Institut canadien de recherches avancées; Le réseau des fondateurs)

º 1625

º 1630
V         La présidente suppléante (Mme Anita Neville)
V         Mme Pauline Clarke (directrice générale des écoles du centre-ville, The Winnipeg School Division No. 1)

º 1635
V         La présidente suppléante (Mme Anita Neville)
V         Mme Monique Guay
V         Ms. Pauline Clarke
V         Mme Monique Guay

º 1640
V         M. Fraser Mustard
V         Mme Monique Guay
V         M. John Richards

º 1645
V         Mme Monique Guay
V         M. John Richards
V         La présidente suppléante (Mme Anita Neville)
V         M. Tonks

º 1650
V         M. John Richards

º 1655
V         M. Tonks
V         Madame Pauline Clarke

» 1700
V         Mme Neville
V         M. Fraser Mustard

» 1705
V         M. Tonks
V         M. John Richards
V         M. Alan Tonks
V         M. Fraser Mustard
V         Mme Neville
V         M. Alan Tonks
V         Mme Pauline Clarke
V         M. Alan Tonks
V         Mme Pauline Clarke
V         M. John Richards
V         M. Fraser Mustard
V         Mme Neville
V         Mme Monique Guay

» 1710
V         Madame Pauline Clarke
V         M. John Richards

» 1715
V         Mme Monique Guay
V         La présidente suppléante (Mme Anita Neville)
V         M. Fraser Mustard

» 1720
V         La présidente suppléante (Mme Anita Neville)
V         Madame Pauline Clarke
V         La présidente suppléante (Mme Anita Neville)
V         M. John Richards

» 1725
V         Mme Monique Guay
V         M. John Richards
V         La présidente suppléante (Mme Anita Neville)
V         M. Alan Tonks
V         La présidente suppléante (Mme Anita Neville)
V         M. Fraser Mustard
V         Mme Neville
V         M. Fraser Mustard
V         La présidente suppléante (Mme Anita Neville)










CANADA

Sous-comité des enfants et jeunes à risque du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 019 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 13 mars 2002

[Enregistrement électronique]

º  +(1615)  

[Traduction]

+

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.)): Je vous souhaite la bienvenue au sous-comité des enfants et des jeunes à risque de la Chambre des communes. Je m'appelle Anita Neville. Je suis la députée qui représente Winnipeg-Sud-Centre et je préside ce comité en l'absence de M. Godfrey, qui est à l'extérieur de la ville.

    Avant de commencer, j'aimerais souhaiter la bienvenue aux jeunes ici présents qui font partie du Forum pour jeunes Canadiens. J'espère que vous apprécierez la discussion qui aura lieu ici aujourd'hui. Vous représentez les différentes régions du Canada et nous sommes heureux de vous avoir parmi nous.

    Nous avons trois orateurs présents aujourd'hui et nous espérons que d'autres membres du comité se joindront à nous.

    Je suggère que chacun d'entre vous ait cinq à sept minutes à votre disposition pour nous présenter son exposé. Je voulais vous avertir que nous avons fêté les nombreuses années de service de M. Gray à la Chambre des communes, ce qui a provoqué un léger embouteillage et il nous a été difficile de nous rendre jusqu'ici.

    Je propose que nous respections l'ordre d'apparition des témoins. Je vais demander au professeur Richards de commencer, à moins que cela lui pose un problème. Ensuite, dans l'ordre, nous aurons le Dr. Mustard et ensuite Mme Clarke.

[Français]

+-

    M. John G. Richards (professeur d'analyse politique, Faculté d'administration des affaires, Université Simon Fraser; chercheur Phillips en politiques sociales et chargé de recherche invité, Institut C.D. Howe): Je vais commencer en français, étant donné que je n'ai pas suivi les règles nécessaires, paraît-il. Je devais tout traduire. Il y en a trois d'entre vous ici qui êtes... Si vous voulez avoir quelques graphiques et quelques tableaux qui sont uniquement en anglais, je vais vous les passer, mais je ne veux quand même pas vous obliger à accepter ce qui n'est pas traduit en français. Donc, à vous de choisir. Je n'ai pas l'argent nécessaire pour faire un système de traduction.

+-

    Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Madame la présidente, est-ce que je peux dire quelque chose? Monsieur, ne vous inquiétez pas. Vos documents seront traduits et nous seront remis, parce que la traduction aura été faite.

+-

    M. John Richards: Eh bien, vous pouvez le faire si vous le voulez. À mon avis, cela ne mérite pas une dépense d'argent.

[Traduction]

    Je vais brièvement parler en anglais.

    Il est très difficile de dire quelque chose de concret au sujet d'un problème aussi compliqué en seulement cinq minutes. Dès lors, j'en dirai peu, mais je plaiderai trois arguments. Je parlerai des caractéristiques de la migration des autochtones, du problème concernant l'apparition des ghettos dans les villes de l'Ouest et de l'aide sociale.

    Pour en finir avec les présentations, j'enseigne à l'université Simon Fraser à Vancouver. Il y a longtemps, en Saskatchewan, j'étais député à l'Assemblée législative du Nouveau Parti Démocratique. J'essaie aussi de renforcer la conscience sociale de l'Institut C.D. Howe pour lequel je travaille beaucoup.

[Français]

    Voici une première observation. Quels que soient les problèmes dans les villes, ça va mieux dans les villes que dans les réserves.

[Traduction]

    La première chose qui semble évidente, c'est qu'une migration a lieu des réserves vers les villes, et cela se poursuivra. Quels que soient les problèmes des enfants à risque dans les villes, ils s'en sortent mieux que les enfants dans les réserves. Le niveau d'instruction est meilleur. Quelque soit le niveau d'échec au niveau des études secondaires—notre amie de Winnipeg nous en parlera plus en détail—les problèmes sont moins graves à Winnipeg que dans les réserves. Les revenus hors réserve sont plus élevés. D'après le recensement de 1996, à travers tout le Canada, ils étaient supérieurs d'un tiers. Dans les statistiques ci-jointes qui ne sont pas traduites, vous trouverez le détail des chiffres.

    Étant donné que c'est dans les villes que les emplois sont les plus nombreux et étant donné qu'ils est quasi impossible de créer une base économique dans les réserves, cette migration se poursuivra. Parmi les indiens inscrits, environ la moitié vit en dehors des réserves, mais ces données ne sont pas fiables. Le recensement de 1996 a montré que presque la moitié de la population autochtone vit en ville. Le recensement de 2001 montre probablement que c'est maintenant plus de la moitié.

    Deuxièmement, nous avons beaucoup à apprendre de l'expérience menée par les Américains concernant la pauvreté dans les grandes villes. Malheureusement, malgré que la situation soit meilleure à l'Est de Vancouver, à l'Ouest de Saskatoon et au Nord de Winnipeg par rapport aux réserves, il existe de graves problèmes. Le Canada est en train de créer des ghettos urbains dans les provinces de l'Ouest avec les nombreux syndromes déjà présents dans les ghettos américains. Nous devons apprendre comment minimiser ces problèmes.

    J'ai examiné les statistiques à ce sujet, en étudiant les quartiers où vivent les personnes très pauvres qui se situent plus de deux fois en-dessous du taux national moyen de pauvreté. En utilisant ce procédé sommaire il apparaît qu'il y a une concentration d'autochtones dans ces quartiers du milieu urbain, plus particulièrement à Winnipeg. Si vous prenez en compte les différentes catégories de personnes—par exemple, d'origine mixte, d'origine célibataire et d'appartenance à un groupe d'autochtones; je crains qu'il n'y ait plusieurs manières de les définir au niveau des statistiques—la catégorie d'autochtones la plus représentée est celle des Indiens à origine unique. À Winnipeg, les deux tiers vivent dans des quartiers dits pauvres. Tous les syndromes qui sont liés aux quartiers très pauvres touchent les autochtones de manière disproportionnée.

    Au vu du temps qu'il me reste, je n'en dirai pas plus. Je pense que vous devriez interroger Pauline en profondeur pour savoir comment on pourrait améliorer les écoles. J'ai quelques idées à ce sujet qui m'ont été enseignées par mes mentors, dont Allan Blakeney. Il y a certaines expériences qui devraient être menées et j'ai quelques idées à ce sujet, mais elles sont certainement moins pertinentes que celles de Pauline. L'un des problèmes les plus importants en milieu urbain, c'est le nombre élevé de décrochages scolaires. Ce message s'adresse principalement aux gouvernements provinciaux qui ne font même pas ce qui est nécessaire pour faire fonctionner les écoles alliées des autochtones, et non pas à vous en tant que députés fédéraux.

    Je vais aborder mon dernier sujet avant de passer la parole. Tout d'abord je constate que les personnes viennent dans les villes et que cela se poursuivra. Ensuite, je constate que nous sommes en train de créer—il s'agit surtout d'un phénomène ouest canadien—des ghettos dans lesquels les communautés d'autochtones sont représentées de manière disproportionnée. Mais c'est ma troisième constatation qui est peut-être la plus controversée. Beaucoup d'études faites au sujet du sort des enfants mentionnent qu'il est important que les parents travaillent—et je pense qu'ils ont raison—mais il y a d'autres aspects importants à prendre en considération, tel que le revenu des parents et le quartier dans lequel vivent ces parents. Parmi les autres variables qui entrent en jeu pour savoir si les enfants des pauvres réussiront—qu'ils évitent une grossesse en tant qu'adolescente, qu'ils obtiennent un diplôme d'études secondaires ou qu'ils évitent de devenir bénéficiaires de l'aide sociale à l'âge adulte—il y a le fait que leurs parents travaillent ou non. Il est important que les parents qui travaillent puissent faire office d'exemple.

    Ceci m'amène vers ma recommandation qui est peut-être la plus controversée: il faudrait rendre plus difficile l'accès à l'aide sociale, en particulier aux jeunes. Ceci ne vaut pas seulement pour les autochtones. Néanmoins, ils représentent une partie essentielle de l'équation, car dans les provinces de l'Ouest, entre un tiers et 60 p. 100 des cas d'aide sociale sont des autochtones. Dans ma province natale, la Saskatchewan, les officiels estiment que 60 p. 100 des bénéficiaires sont autochtones, alors que 80 p. 100 des enfants placés sont autochtones. Dès lors, tout ce qui touche à l'aide sociale se rapporte principalement aux autochtones.

    L'Alberta est la province qui a fait le plus d'expériences, et ce n'est pas une coïncidence si cela a eu lieu sous le mandat d'un ministre du bien-être social autochtone. Il y a dix ans, un conservateur modéré, Mike Cardinal, a été un élément clé dans l'avancement des travaux pour rendre plus difficile l'accès à l'aide sociale. Là encore, dans mes tableaux qui ne sont pas traduits, il y a une série chronologique qui indique la proportion des populations provinciales qui font appel à l'aide sociale à travers le pays. L'Alberta sort clairement du lot.

    Ce qui est également significatif—je définis cela, car il y a encore bien plus de choses à dire—est que le taux d'emploi dans les quartiers pauvres d'Edmonton et de Calgary est considérablement plus élevé que dans les quartiers comparables de ma province natale c'est à dire à Régina, Saskatoon et Winnipeg.

    Je vais récapituler, mais il y a encore bien d'autres choses à dire à ce sujet. Je me réjouis d'entendre vos questions et d'écouter les autres orateurs. J'ai rapidement abordé trois points. Les autochtones viennent en ville et nous devons la leur rendre accessible. Deuxièmement, il faut s'occuper du problème concernant les nombreux décrochages scolaires au niveau secondaire. Troisièmement, le sujet le plus sensible politiquement: l'aide sociale. Il faut également s'en occuper.

[Français]

    Merci.

º  +-(1620)  

[Traduction]

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Merci beaucoup.

    Docteur Mustard.

+-

    M. J. Fraser Mustard (président fondateur et membre de l'Institut canadien de recherches avancées; Le réseau des fondateurs): Je ne possède pas de traduction en français des graphiques que j'utilise. Lorsque nous avons réalisé l'Étude sur la petite enfance : Inverser la véritable fuite des cerveaux pour l'Ontario, j'ai appris que traduire un document semi-technique vers un français correct est une tâche difficile et je n'étais pas prêt à le faire pour vous. La personne qui m'a donné un cours sur ce sujet s'appelle Marc Renaud, l'actuel président du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Il m'a dit que le texte anglais était bon, mais que la traduction française était un tas de conneries, alors j'espère que vous serez capable de vous en sortir avec ce matériel.

    Tout d'abord, le gouvernement du Canada a publié un document, le 11 septembre 2000, au sujet d'un projet de la petite enfance pour le pays et a indiqué le montant qui sera à disposition des provinces pour mener à bien ce projet. C'était un document très important, car, pour autant que je sache, nous étions les premiers à en parler sur la place publique, du moins en ce qui concerne la culture de la langue anglaise et française.

    Messieurs, j'apprécie vos commentaires, mais j'insiste lourdement sur le fait que c'est les premiers stades de la vie qui établit la structure du cerveau. Ce que j'appellerais le développement du cerveau basé sur l'expérience est crucial lors de la vie in utero et durant les trois premières années de vie. Si cela n'est pas fait correctement, il est ensuite difficile de rattraper le manque par l'instruction et par les structures d'emploi. Le fait que cela touche principalement la population des Premières nations n'est pas sans gravité, et ce n'est pas non plus sans gravité pour les autres populations de ce pays.

    Le développement précoce du cerveau n'affecte pas seulement votre capacité d'apprentissage et votre comportement, mais il peut également créer de graves problèmes de santé. Lorsque j'en parle aux communautés des Premières nations et que je leur dresse la liste des maladies qui apparaissent en bas âge et qui augmentent les risques—cela inclut les maladies coronariennes, le diabète non insulino-dépendant, l'obésité, la tension artérielle, le vieillissement, l'amnésie, et la santé mentale—ils me disent, «C'est à cause de vous que nous subissons cela». C'est très étonnant. Ils ont déduit cela, d'après le profil des maladies de leurs communautés. La manière dont les enfants ont été traités dans leur petite enfance a une influence sur ce profil.

    La manière dont nous avons été traités dans notre petite enfance, détermine notre personnalité actuelle. Je veux que vous y réfléchissiez, car si quelqu'un de votre entourage se comporte mal, examinez sa petite enfance.

    En résumé, le cerveau est définitivement la voie qui mène à l'apprentissage, au comportement et à la santé. Il est donc important que la société dans laquelle nous vivons s'assure que le développement des jeunes enfants soit financé de manière adéquate.

    Lorsque nous avons produit le rapport pour le gouvernement de l'Ontario, nous avons rassemblé un certain nombre de documents et avons examiné le dossier neuroscientifique qui s'intéresse à l'amélioration des connections du cerveau et au façonnement du cerveau durant la période de la petite enfance et le genre d'interventions qui seraient nécessaires. À la suite de notre examen, nous avons conseillé au gouvernement de l'Ontario—le terme employé est mentionné dans les documents du 10 et du 11 septembre que vous avez en votre possession—de mettre en place des centres pour le développement des jeunes enfants et de parentage—voyez le terme employé—car il est nécessaire que les parents maîtrisent l'art d'être parent dans le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui. C'est très important. Malheureusement, la province de l'Ontario n'a pas tenu compte du rapport comme elle l'aurait dû. Je n'en dirai pas plus, mais certaines choses me préoccupent.

    L'une des données de référence qui peut s'appliquer à n'importe quelle communauté—que ce soit dans les réserves ou hors réserve—est la mise en place de tels centres. Il existe un exemple. Le principe dont je parle ne consiste pas en une garde de jour officielle, mais il est appliqué dans plus de trente écoles à Toronto et il pourrait tout à fait être appliqué à Winnipeg. C'est une sorte de centre où l'on apprend l'art d'être parent et dans lequel les mères qui sont enceintes peuvent se joindre à un groupe qui les renseigne sur la grossesse et le fait d'avoir des enfants. Chaque unité est dirigée par une personne très compétente qui sait comment travailler avec des adultes en phase d'apprentissage. Cette personne sait également comment s'occuper des enfants dans les différentes étapes de leur apprentissage jusqu'à ce qu'ils intègrent le système scolaire.

    La mise en pratique de ce principe est relativement peu onéreux, cela coûte 1000 $ par enfant au système scolaire de Toronto. Le chauffage, l'éclairage, les locaux, etc., sont mis à disposition gratuitement. Mais ce qui est vraiment étonnant au sujet de ce programme, qui intègre tous les éléments clés pour favoriser le développement en bas âge, c'est que les parents apprennent en pratiquant et en travaillant dans les centres, ce qui est important dans le processus de compréhension de la stratégie. Lorsque j'ai visité le premier centre, je dois dire que je devais faire attention où je mettais les pieds, car il y avait des mères et des enfants partout. Autour de chaque adulte, il y avait un groupe d'enfants. C'était fantastique.

    Si on compare les enfants vivant dans un même district, ceux qui faisaient partie du programme étaient cinq fois plus performants lorsqu'ils commençaient l'école que ceux qui ne faisaient pas partie du programme. C'est donc un message important pour l'ensemble du pays. C'est faisable partout, dans une réserve des Premières nations, dans une école du centre-ville de Winnipeg ou de Toronto, avec des immigrants, etc.

º  +-(1625)  

    J'ai visité pas mal de réserves au Canada et je peux vous dire que, à Duncan—ils vous en ont peut-être parlé— et à Meadow Lake en Saskatchewan, il existe de très bon programmes de parentage et de développement des jeunes enfants. Ce qui s'y fait est vraiment étonnant. Ce qui caractérise les activités, c'est le fait qu'elles sont dirigées par les responsables de la réserve. Ils en ont assez que les programmes du gouvernement tournent autour du financement et qu'il leur est très difficile de faire partie de ces programmes.

    Il devrait y avoir une personne au gouvernement fédéral qui est responsable d'examiner pourquoi l'argent de différents ministères est investi dans les communautés sans qu'il y ait un suivi au niveau de la mise sur pied des programmes. C'est une des principales erreurs de ce programme. Si vous voulez être constructif, vous devez nommer un responsable pour le suivi.

    J'ai visité la communauté urbaine de Thunder Bay. Les personnes des Premières nations qui y habitent avaient l'un des plus beaux centres de développement des jeunes enfants et de parentage qu'il m'ait été donné de voir hors réserve. Je ne sais pas s'il est toujours ouvert, mais il était magnifique. Ils étaient compétents et savaient ce qu'ils faisaient. Étant donné qu'ils étaient autochtones et qu'ils ne se sentaient pas à l'aise avec les autres cultures, ils voulaient gérer ce centre eux-même. Il y a donc de bons exemples, dans les réserves et hors réserve.

    Mon dernier commentaire porte sur un article paru récemment dans le Scientific American—j'ai donné cet article à votre personnel de recherche—qui signale que les enfants qui subissent des abus sexuels ou physiques en bas âge sont traumatisés à vie. On ne peut pas éviter les problèmes auxquels je fais allusion, et vous connaissez ces problèmes. On les rencontre dans toutes les cultures et toutes les communautés. La mise en place des centres permettrait d'éviter ces problèmes.

    Voici, si nous pouvons nous permettre, le résumé de nos recommandations: augmenter et intégrer les ressources disponibles pour les centres de développement des jeunes enfants et de parentage aux communautés autochtones et aux enfants autochtones qui vivent dans des centres urbains. C'est la première règle.

    Deuxièmement, s'assurer que l'initiative tient compte au maximum de la période de développement des jeunes enfants et que les mères soient mises à contribution dans les centres de développement du jeune enfant, dès qu'elles sont enceintes. Ne placez pas simplement les mères dans les centres, car nous savons que les influences que l'enfant subit in utero ont des effets considérables.

    Troisièmement, utilisez les centres de développement des jeunes enfants et de parentage pour offrir plus de soutien aux adolescentes qui ont des enfants, avant leur grossesse, pendant et après la naissance de leurs enfants. Ceci afin de s'assurer qu'elles mangent correctement pendant la grossesse et pour prévenir la consommation de cigarettes et d'alcool—vous ne pouvez pas éradiquer le syndrome d'intoxication foetale à l'alcool, à moins de faire cesser la consommation d'alcool durant la grossesse—et pour s'assurer que les pères jouent un rôle déterminant dans le développement du jeune enfant après sa naissance.

    Pour terminer, vous devriez établir des politiques qui facilitent l'intégration des ressources fournies par les différents gouvernements pour toutes les régions. Les gouvernements de certaines provinces prennent maintenant une part active dans l'application de la loi, ce qui provoque des disputes territoriales entre les gouvernements fédéraux et provinciaux.

    Je vous recommande fortement d'approuver la déclaration du 11 septembre et de mettre en place les ressources nécessaires pour améliorer le développement du jeune enfant, en commençant par la conception. En effet, il a été démontré que l'échec dans ce domaine peut avoir des effets négatifs sur l'alphabétisation, les capacités de calculer, le comportement et les risques pour la santé.

    La bonne nouvelle—le document est à votre disposition—c'est que nous avons travaillé avec la Banque mondiale. L'économiste qui est en charge du dossier auprès de la Banque mondiale, le doyen de l'économie à Amsterdam, a soutenu qu'un investissement dans le développement du jeune enfant constitue un investissement à long terme et que toutes les sociétés devraient accorder la priorité à cet investissement. C'est cela ma demande, afin de pouvoir régler quelques problèmes des Premières nations.

    Merci.

º  +-(1630)  

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Merci beaucoup.

    Madame Clarke.

+-

    Mme Pauline Clarke (directrice générale des écoles du centre-ville, The Winnipeg School Division No. 1): Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invitée pour vous faire cet exposé. Comme vous le savez, je viens de Winnipeg. J'ai passé une grande partie de ma vie à y travailler et à y enseigner. Maintenant, je soutiens les écoles de notre centre-ville.

    Comme on vous l'a déjà dit, il y a une forte population d'autochtones à Winnipeg. À peu près un tiers des familles autochtones de la province habitent à Winnipeg. Ils font partie des personnes les plus pauvres de notre ville. Le revenu annuel moyen d'une personne autochtone est de 12 000 $, comparativement à 21 000 $ pour une personne non-autochtone.

    Beaucoup d'enfants de moins de 15 ans qui vivent dans notre division scolaire sont autochtones, et leur nombre augmente constamment. Le nombre de la population scolarisée non-autochtone est stable ou régresse. Ce qui affecte le plus la communauté autochtone, est leur migration continuelle. Soit ils déménagent d'un quartier vers un autre dans la ville ou alors ils déménagent de la ville vers la campagne et reviennent ensuite.

    Dans le travail que nous effectuons avec nos familles, notre mandat principal est de veiller à ce que les enfants reçoivent l'instruction à laquelle ils ont droit. Mais, nous savons également que l'instruction ne peut pas se faire en vas clos. Le succès d'un enfant dans son parcours scolaire dépend de beaucoup de facteurs. Dans le travail que nous effectuons avec les familles, nous nous rendons compte que certaines d'entre-elles font face à la solitude. Il y a des femmes célibataires qui élèvent six ou sept enfants et qui ne disposent d'aucun soutien et d'aucun réseau d'entraide. Nous constatons que ces personnes bougent souvent, qu'ils font face aux problèmes de santé que je vous ai mentionnés et nous observons la violence qui a cours au sein de la communauté. Mais nous voyons également la fierté des familles. Ils conservent l'espoir que leurs enfants seront capables d'avoir une meilleure vie qu'eux.

    Certains facteurs avec lesquels nous devons composer sont d'origine intergénérationnelle et ne semblent pas aller en s'améliorant. Dans les écoles du centre-ville de Winnipeg nous essayons d'implanter un certain nombre de choses qui dépassent le mandat de la division scolaire. Nous proposons beaucoup de programmes pour les autochtones. Nous avons mis en place beaucoup de programmes d'études dont le contenu est adapté aux autochtones. Nous avons ouvert des écoles pour les autochtones, afin de permettre aux parents de choisir.

    Nous ne voulons pas que nos parents d'élèves soient obligés d'envoyer leur enfant dans un genre d'école spécifique, mais nous voulons qu'ils aient le choix d'envoyer leurs enfants dans une école primaire ordinaire ou dans une école qui propose des cours d'immersion en français. S'ils veulent envoyer leur enfant dans une école pour autochtones qui met l'accent sur la langue autochtone et la culture autochtone, c'est leur choix. Ils doivent avoir ce choix, et nous le leur offrons dans notre système scolaire—je m'empresse d'ajouter que c'est sans l'aide de qui que ce soit; pour beaucoup de choses, nous n'avons pas eu d'aide de la part de tierces personnes.

    Nous devons nous assurer que tout le monde se préoccupe de la qualité de l'instruction dans nos écoles du centre-ville. Les choses que nous faisons en plus, nous ne les faisons pas dans le but de dire que nous voulons la meilleure qualité d'instruction possible. Nous voulons défendre les intérêts de nos familles.

    J'ai mentionné la solitude.Lorsque les familles arrivent en ville, ils n'ont personne qui les représente. Il y a beaucoup d'organismes et d'agences, mais beaucoup de familles ne se sentent pas proches de ces agences et de ces organismes. C'est pourquoi, nous avons un rôle important à jouer dans la défense de leurs intérêts.

    En ce qui concerne la migration, nous avons mis sur pied un certain nombre de programmes en collaboration avec d'autres agences. Il arrive souvent que ces agences encouragent la migration, parce qu'ils ne connaissent pas l'impact que peuvent avoir ces déplacements fréquents sur le parcours scolaire de ces enfants. Certains des enfants ont fréquenté 14 écoles lorsqu'ils sont en 3ème année et ils n'ont pas l'impression d'être intégrés dans le système scolaire et ils n'ont pas d'amis. La migration est leur mode de vie.

    J'ai mentionné les cours, dont le contenu est adapté aux autochtones, que nous proposons et pour lesquels nous formons notre personnel. Nous voulons améliorer les capacités des enfants dans les programmes artistiques et nous avons besoin d'aide pour cela. Nos enfants sont intelligents et talentueux et nous devons leur fournir des occasions pour qu'ils puissent nous le montrer. Nous le faisons pour les programmes artistiques, mais en sciences ce serait... tout est utile.

    Il est primordial de leur faire comprendre ce qu'est le travail. À l'école primaire, nous mettons sur pied des programmes pour faire comprendre la signification du mot «travail» à nos enfants. Depuis plusieurs générations, le travail n'est pas quelque chose qui fait partie de leur famille et nous devons les aider à mettre fin à ce cercle infernal. Pour nos familles, les programmes de transition entre l'école et le travail ne sont plus utiles lorsqu'ils sont proposés au niveau secondaire. Ils doivent être proposés au niveau primaire.

º  +-(1635)  

    Je pense que le gouvernement peut entreprendre un certain nombre de choses—et là je parle du gouvernement du Canada, même si j'approuve les commentaires du Dr. Mustard au sujet de l'argent qui proviendrait du gouvernement provincial. Il y a un certain nombre de programmes qui existent, comme Comprendre la petite enfance et les Centres d'excellence pour le bien-être des enfants.

    Je connais les deux programmes et je dois dire que les deux pourraient être améliorés. Selon nos constatations, ils ont tendance à faire de la recherche qui coûte certainement très cher. Au cours des 25 dernières années il y a déjà beaucoup de recherche qui a été faite. Il suffirait de parler aux familles, parents et personnes concernées pour savoir ce qu'il faut faire. Ils auraient pu vous dire il y a 20 ans déjà, que les centres parents-enfants sont très importants. Ce qu'il nous faut, c'est fournir le financement qui est nécessaire pour donner suite à ces idées, et non pas promouvoir la poursuite de la recherche.

    Le financement destiné aux autochtones qui vivent en-dehors des réserves n'est pas très accessible. Notre division scolaire a fait des propositions pour aider au financement de programmes comme le Girls Sitting Together et Children of the Earth High School. Mais, parce que nous ne sommes pas une agence autochtone, il ne nous est pas toujours possible d'avoir accès aux fonds, même si nous nous occupons de beaucoup d'étudiants autochtones. Nous voulons obtenir l'autorisation, en tant qu'agence non-autochtone, pour avoir accès aux dollars que vous allouez probablement aux réserves et aux communautés autochtones situées dans le Nord.

    Il y a beaucoup d'autres choses que je pourrais mentionner, mais je crois que je vais m'arrêter ici. J'espère que vous aurez des questions.

    Merci.

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): C'est un petit comité, alors je ne vais pas essayer d'aborder les choses de manière informelle. Je vais commencer avec Mme Clarke et ensuite j'accorde la parole à tour de rôle.

[Français]

+-

    Mme Monique Guay: Merci, madame la présidente.

    J'aimerais vous remercier d'être ici devant nous aujourd'hui. Parce que vous êtes sur le terrain, vos connaissances sont très importantes pour nous. On a besoin de cette information pour pouvoir soumettre un rapport qui aura de l'allure.

    Notre rapport va surtout porter sur les enfants de 0 à 6 ans en réserve et hors réserve, et sur les enfants de 6 ans à 12 ans en réserve et hors réserve. Vous nous apportez un point de vue hors réserve qui est fort important.

    C'est vrai qu'on a beaucoup de programmes, et on se l'est fait dire sans arrêt par les gens qui sont venus témoigner, par les communautés autochtones qui sont venues nous rencontrer. J'aimerais que vous nous disiez quels programmes fonctionnent vraiment, selon vous.

    Madame Clarke, vous venez de dire que vous pourriez appliquer certains programmes ou aider les autochtones, mais que vous n'avez pas accès à certains fonds parce que vous n'êtes pas autochtone. Quelque part, il y a un non-sens. Qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer la situation? On aura des recommandations importantes à faire et, si on n'arrive pas à agir maintenant, on perd notre temps. Alors, donnez-nous des choses concrètes. Les membres du comité vont prendre des notes et vont essayer, en bout de ligne, de mettre tout cela ensemble. Il y a des populations autochtones qui nous ont dit qu'elles préféreraient avoir des programmes dans leurs réserves, contrôlés par elles, administrés par elles, parce qu'elles connaissent leurs besoins. C'est sûr que les choses sont différentes hors réserve. Donc, allumez-nous encore davantage les lumières. Continuez à parler, car c'est intéressant.

[Traduction]

+-

    Ms. Pauline Clarke: Nous vivons dans un centre urbain. Il semble que ce qui s'est passé c'est que des communautés individuelles qui vivent dans les centres urbains aient été considérés comme les porte-parole des communautés autochtones. Ils peuvent certainement représenter un certain nombre de ces communautés autochtones, mais la communauté autochtone n'est pas une seule entité. Comme toutes les communautés, elle est constituée de plusieurs groupes.

    C'est comme si le financement passe entre les mains des groupes qui se sont définis comme les porte-parole de la communauté autochtone—je ne veux pas que cela cesse—mais lorsque nous essayons d'avoir accès à ces fonds, nous ne pouvons pas le faire, car nous ne faisons pas partie de la stratégie de développement des ressources humaines autochtones ou parce que nous ne sommes pas une agence autochtone. Par exemple, nous avons essayé d'obtenir des fonds pour que des stagiaires puissent venir travailler dans nos écoles. Ils auraient été payés par des fonds provenant de la stratégie de développement des ressources humaines autochtones, mais on nous a dit que nous n'avions pas droit à cet argent. Nous avons essayé d'obtenir de l'argent par le biais de Développement des ressources humaines Canada, mais il nous est difficile d'avoir accès à cet argent, néanmoins nous avons accès à d'autres fonds. Nous avons également essayé d'obtenir du soutien pour nos programmes destinés aux autochtones par le biais du patrimoine canadien, mais il nous a fallu une année et demi pour finalement obtenir qu'une partie de l'argent que nous avions demandé.

    C'est donc très lent dans certains cas et, dans d'autres cas, nous n'avons même pas la possibilité d'avoir accès à l'argent.

[Français]

+-

    Mme Monique Guay: Il va falloir remédier à cela et trouver des solutions pour vous aider. Si vous travaillez au mieux-être des jeunes dans les écoles, à leur adaptation, à leur intégration et à leur éducation, il est important qu'ils aient les ressources nécessaires pour continuer.

    Monsieur Mustard, vous avez beaucoup parlé des bébés, des enfants de 0 à 6 ans. Quand j'ai moi-même décidé d'avoir des enfants, on me disait toujours que c'était entre 0 et 5 ans que l'enfant se formait. C'est à ce moment-là qu'on lui donne le principal de ses outils pour fonctionner dans la vie. Il est donc important de leur donner le maximum à cet âge-là, mais encore faut-il avoir les outils nécessaires.

    Au Québec, on a un système de garderies à 5 $ qui aide beaucoup les mères à retourner ou à aller sur le marché du travail et à se scolariser si c'est nécessaire. Est-ce que vous avez vu des programmes semblables ailleurs? Et que pensez-vous de ces programmes?

º  +-(1640)  

[Traduction]

+-

    M. Fraser Mustard: Pour aider tous les enfants du Canada, je me permets de dire que je souhaiterais que le gouvernement du Québec puisse diriger le Canada, car aucune des autres provinces n'a atteint le niveau de performance du Québec en ce qui concerne l'aide accordée aux enfants. C'est tout à l'honneur du Québec d'avoir mis sur pied des programmes qui tiennent compte des enfants.

    Une des choses que le gouvernement actuel du Québec introduira probablement, est un programme qui s'attaque aux problèmes comportementaux des enfants. C'est un programme qui a des répercussions sur les communautés des Premières nations, qui sera mis en place de la conception jusqu'à l'âge de 5 ans et qui sera lié à d'autres programmes. Je pense qu'ils investiront près de 60 millions de dollars dans ce projet.

    La chose dont il faut se souvenir, c'est que le développement du cerveau in utero est largement influencé par les choses qui définissent les caractéristiques de comportement. Pour souligner ce que vous avez dit, notez que les données récoltées par le Québec ont démontré que le tiers des enfants de sexe masculin qui commencent leur parcours scolaire auront des comportements anti-sociaux et ce seront les perturbateurs de la classe. Le comportement d'un tiers de ces enfants s'améliorera, un tiers des enfants ne changera pas et le tiers restant tombera certainement dans le monde de la délinquance juvénile, sera difficile à éduquer et abandonnera l'école.

    Lorsque vous parlez de décrochage scolaire, il faut dire que le système scolaire peut faire quelque chose, mais les mesures prises par le gouvernement québécois seront probablement les plus efficaces. Alors je suis impressionné.

[Français]

+-

    Mme Monique Guay: Le décrochage scolaire ne touche pas que les autochtones. Nous vivons présentement--je peux parler pour le Québec--une période où le décrochage scolaire est redevenu un problème très important. On sait que l'éducation est de juridiction provinciale, mais on en parle parce que ça touche tout le monde. J'imagine que chez les autochtones, il y a encore plus de décrochage scolaire.

    Avez-vous des statistiques ou plutôt une image à nous présenter?

+-

    M. John Richards: En gros, au Canada, il y a à peu près un tiers des autochtones qui ont terminé le secondaire. Chez la population non autochtone, les deux tiers l'ont terminé. Donc, effectivement c'est la moitié. Ça,c'est en gros. Si on fait des agrégations, les pires résultats sont dans les réserves. Par exemple, j'ai plus ou moins en mémoire les chiffres pour le Manitoba.

    Au Manitoba, à peu près le quart de ceux qui habitent les réserves ont terminé leurs études secondaires. Donc, ça veut dire que les trois quarts ne l'ont pas achevé. Chez les Métis, qui n'habitent évidemment pas les réserves, un peu moins de la moitié, soit 40 à 45 p. 100, ont complété le niveau secondaire. Comme je le disais plus tôt, dans la population non autochtone, à peu près les deux tiers l'ont complété.

    J'ai ici des graphiques qui indiquent les résultats dans les huit villes où la population autochtone est plus importante, c'est-à-dire Vancouver, Edmonton, Calgary, Saskatoon, Regina, Winnipeg, Toronto et Montréal. Dans ces villes, on voit aussi une nette différence entre les quartiers ordinaires, où le taux pauvreté n'est pas très élevé, et les ghettos, les quartiers très défavorisés, quant au taux de scolarité, ce qui est prévisible.

    En plus, si on fait la distinction entre les aborigènes et les non-aborigènes, on peut résumer en disant que la scolarité chez les autochtones qui habitent les quartiers ordinaires correspond plus ou moins à la scolarité des non-autochtones dans les quartiers défavorisés. Donc, les plus défavorisés des défavorisés sont les autochtones qui habitent les quartiers défavorisés.

    Si vous me le permettez, j'aimerais bien ajouter quelques détails sur les autres questions que vous avez posées, qui sont bien. Qu'est-ce qu'on peut faire au niveau fédéral? On peut faire certaines choses, à mon avis, notamment des projets-pilotes. C'est très valable. Il peut s'agir d'expériences à Winnipeg ou dans diverses autres villes, au moyen desquelles on cherche les best practices.

    Permettez-moi de vous faire part d'une anecdote personnelle. Je suis né en Angleterre et je suis tricoté anglais à 100 p. 100, mais j'ai grandi à Saskatoon. Maintenant, mon école secondaire est devenue une école au centre-ville, dans un quartier défavorisé. Il y a cinq ou six ans, les enseignants ont décidé entre eux qu'ils devaient faire quelque chose pour aider la population autochtone du quartier. Voilà une expérience très valable. C'est une école qui reste dans le réseau. Ils enseignent la même algèbre ennuyeuse que dans n'importe quelle autre école, mais ils font beaucoup de choses, comme celles qu'a décrites Mme Clarke ici, pour souligner la culture autochtone, pour attirer les elders ou les conseillers et essayer par maintes façons d'empêcher le décrochage.

    Finalement, je réponds à Fraser Mustard. Je ne suis pas contre ce qu'il a dit sur l'importance des trois, quatre ou cinq premières années, mais il y a un cercle infernal, celui du fléau de l'alcoolisme qui atteint la population autochtone. Où peut-on le rompre? Si le syndrome alcoolo-foetal atteint les jeunes, on n'y peut pas grand-chose. On peut faire quelque chose, mais évidemment...

    Mme Monique Guay: On peut faire quelque chose après.

    M. John Richards: Il faut commencer avant, avec les parents.

º  +-(1645)  

+-

    Mme Monique Guay: C'est sûr que la prévention est importante. On a beaucoup de programmes mur à mur au pays, mais cela ne peut pas fonctionner comme ça.

+-

    M. John Richards: Je voudrais simplement terminer, si vous me le permettez. On a parlé de ce que peut faire le fédéral: des programmes-pilotes. Mais je reviens à ma critique de la politique actuelle. Ma critique est surtout axée sur les lacunes des quatre provinces de l'Ouest. Il y a la question de l'aide sociale, qu'on n'a pas abordée jusqu'à présent, et celle de l'éducation de la garderie jusqu'à la douzième année. S'il y a des domaines qui sont évidemment de juridiction provinciale dans une fédération comme la nôtre, ce sont ceux-là. À mon avis, les provinces ont manqué à ce qu'elles devaient faire dans ce domaine et, en quelque sorte, elles se sont servies de la division des pouvoirs, en gros, pour dire que ces problèmes-là étaient surtout des problèmes du fédéral. Donc, on ne veut pas vraiment aborder la question, la réalité de la migration actuelle qui est en marche.

    Si vous posez la question à un Canadien typique, qui n'est pas engagé dans l'affaire, il va vous répondre en disant que les autochtones sont surtout un phénomène des réserves, un phénomène rural. Nous savons très bien que cela n'est plus le cas.

[Traduction]

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Monsieur Tonks.

+-

    M. Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.): Merci, Madame la présidente.

    Je vous remercie pour votre députation de cet après-midi. Les thèmes que vous avez abordés, si je peux les extrapoler en termes très généralistes, ressemblent beaucoup à ce que nous avons entendu concernant le traitement de manière holistique des besoins de tous les enfants et de toutes les familles. Le soutien de ces enfants et de ces familles devrait se faire en collaboration avec la communauté, il faudrait qu'il soit inclusif et devrait se présenter sous la forme d'un cadre politique adapté aux besoins de la communauté et non pas sous la forme d'un modèle uniforme pour le pays qui tiendrait compte des Premières Nations.

    À maintes reprises nous avons entendu dire que l'implication des parents est absolument nécessaire. On nous a parlé des stratégies pour les jeunes enfants en se basant sur les résultats visés. Il y a deux choses qui n'avaient pas été abordées jusqu'à aujourd'hui, Madame la présidente, et nous en avons enfin entendu parler. J'aimerais interroger les témoins pour obtenir des réponses plus claires au sujet du concept «travailler pour obtenir l'aide sociale» et, à défaut d'une meilleure expression, le concept de l'école ségréguée.

    J'aimerais savoir pourquoi vos points de vue seraient plus susceptibles de fonctionner. Je m'excuse si j'interprète mal ou si je tire les mauvaises conclusions, mais les conclusions que j'en tire c'est que ces deux stratégies s'appliqueraient mieux aux autochtones qu'aux personnes pauvres, où qu'elles habitent. La première chose que j'aimerais savoir c'est si j'ai tiré les bonnes conclusions. La deuxième chose, à condition que mes conclusions sont exactes, c'est pourquoi vous pensez cela? Professeur Richards, peut-être pourriez-vous y répondre en premier, étant donné que vous êtes l'instigateur de ces concepts et nous pourrions permettre ensuite à d'autres témoins de répondre à cette questions.

º  +-(1650)  

+-

    M. John Richards: Les systèmes scolaires et l'assistance travail séparés—ou quelque soit l'étiquette que vous vouliez apposer à ces idées—sont deux sujets très controversés. Dès lors, la première chose que j'aimerais faire, c'est modérer les propos. On ne devrait jamais être certain à propos de ces sujets. Il faut toujours penser qu'on peut avoir tort. Cela étant dit, il n'est pas utile que je vienne ici pour spéculer à propos de leur faisabilité.

    Laissez-moi vous parler d'abord de la scolarisation. Dans ce que j'ai écrit, j'ai fait la comparaison avec le Québec. Si, en 1867, nous avions dit que nous voulions un système scolaire unique, protestant, nous n'aurions jamais pu construire un pays. Pour être clair, la religion était importante au 19ème siècle, ainsi nous avons mis en place la scolarisation confessionnelle. La langue aussi était importante—elle l'est toujours—et nous avons mis en place des écoles francophones et anglophones. Ceci a inévitablement crée des tensions aux frontières et si nous prenions part à un débat pour opposer nos idées, nous pourrions discuter de l'histoire de la scolarisation.

    Mais je vous fais remarquer que, au Canada, nous n'avons jamais appliqué l'idée qu'ont eu les Français d'instaurer les même système scolaire de Lille à Marseille, d'enseigner l'histoire de Louis XIV du 18e siècle de la même manière et en même temps à tous les élèves à 11 h 00 du matin le 8 octobre. Au Canada, nous avons choisi d'expérimenter.

    Le prochain point que j'aimerais faire valoir c'est que les autochtones canadiens qui vivent dans les réserves ou qui sont intégrés dans notre société industrialisée en tant qu'enseignants, programmeteurs, etc.—pas exactement de la même manière que les québécois l'ont fait, mais de manière analogue—ont exigé que leurs demandes spéciales concernant la préservation de leur culture soient respectées. Je pense donc que leur demande est justifiée et qu'il devrait y avoir une entente spéciale au sujet de leur culture.

    Outre le problème de la reconnaissance et les comparaisons qui peuvent être faites avec le Québec, j'aimerais attirer votre attention sur un livre qui s'appelle Immigration et diversité à l'école, écrit par Marie McAndrew, une femme parfaitement bilingue dont le nom trahit son origine écossaise. Ce livre résume bien le problème de l'intégration des enfants de cultures très différentes, à Montréal, au Canada, aux États-Unis, en Angleterre et en France, que ce problème concerne les Maghrébins en France, les immigrants vietnamiens qui s'installent sur la côte Ouest des États-Unis, les Honduriens dans la ville de Vancouver, les Jamaïcains à Toronto ou les Haïtiens. Dès que des cultures très différentes qui se côtoient, il est souvent utile de faire des expériences avec des écoles qui soulignent la culture indigène du groupe. Bien qu'il n'existe aucune formule magique, il faut établir des normes uniformes. Il faut que toutes les écoles enseignent le même programme d'algèbre, par exemple.

    Je ne dis pas que l'idéal serait d'avoir un seul et unique système scolaire. C'est plutôt une question pratique, et je ne suis pas certain de posséder toutes les réponses. Je pense que des expériences intéressantes sont actuellement menées à Winnipeg, à Saskatoon, dans une école d'Edmonton et dans une école primaire près de mon lieu de résidence dans l'est de Vancouver. C'est le premier point.

    Le deuxième point concernait la réforme de l'assistance sociale, qui est sujetsensible dans toutes les sociétés. En tant que peuple riche, nous décidons des politiques applicable aux pauvres. Dans un sens, je compare le Canada aux États-Unis d'il y a quarante ans. Dans les années soixante, les américains ont revu leurs lois concernant les droits de la personne et ont interdit la discrimination des personnes de couleur. Nous avons également passé à travers un processus similaire en interdisant les actes discriminatoires envers les autochtones.

    D'un autre côté, au cours des vingt dernières années, dans les années 1980 et 1990 aux États-Unis, je maintiens que les hommes et les femmes de bonne volonté—je résume, car il existe beaucoup de différences—ont conclu qu'il faut appliquer un certain nombre de restriction pour l'obtention de l'aide sociale. Il est important de rendre plus difficile l'accès à l'aide sociale aux personnes qui pourraient travailler et aux jeunes. En 1996, non sans problèmes, ils ont supprimé l'un de leurs programmes phares qu'ils avaient mis en place lors de la Crise de 1929—l'aide aux familles et aux enfants à charge—pour inciter les différents États à faire leurs propres expériences. Il y a de nombreux cas où cela a mal tourné, mais il y a aussi de bons exemples. En clair, au Canada nous devons être ouvert d'esprit. Pour que les gens retournent au travail et n'aient plus besoin de l'aide sociale, il faut que nous examinions les bons exemples du Wisconsin, du Minnesota et de la Californie.

    Comme cela a été le cas aux États-Unis, nous avons des problèmes avec les minorités. Il semblerait que cela fasse partie intégrante des dilemmes et des difficultés que provoquent les politiques mises en place dans les centre-ville pour les communautés noires et les communautés hispaniques. Le parallélisme avec l'Ouest canadien—vous le savez aussi bien que moi, si ce n'est mieux—c'est que 12 à 15 p. 100 de la population de ma province est d'origine autochtone. Au sein de la population jeune, la proportion est beaucoup plus élevée. La situation est comparable dans la province de Mme Clarke. En Alberta, ils sont 7 p. 100 et en Colombie-Britannique 6 p. 100.

    Dans l'Ouest canadien, l'importance des autochtones est considérable. Nous ferons face à un désastre social, si le nombre de personnes qui dépendent de l'aide sociale ne diminue pas. Bien que de nombreux problèmes existent dans les villes, je dois néanmoins insister sur le fait que les problèmes sont encore plus graves dans les réserves. En Saskatchewan, environ deux tiers des autochtones qui habitent dans les réserves dépendent de l'aide sociale. Au niveau national, ils sont plus de 40 p. 100, et, bien que l'État devrait en faire une priorité, la situation n'a presque pas évolué au cours du dernier cycle économique.

º  +-(1655)  

+-

    M. Alan Tonks: Merci.

+-

    Madame Pauline Clarke: J'aimerais faire un commentaire au sujet du dernier point abordé concernant le travail et l'aide sociale, c'est un peu en relation avec votre question au sujet du nombre de décrochages. Récemment, au Manitoba, beaucoup de programmes ont été mis sur pied pour permettre aux adultes de trouver du travail en leur finançant une formation. Beaucoup de parents autochtones, peu importe leur âge, qui avaient quitté l'école lorsqu'ils avaient 12, 13 ou 14 ans, s'inscrivent maintenant à des programmes de formation de notre école. Nous avons des parents qui ont 22 ou 50 ans dans nos cours. Nous avons des parents et des enfants de la même famille qui sont inscrits à des cours à l'école secondaire, mais leurs objectifs sont différents. Pour les adultes qui pensaient qu'ils n'avaient pas la possibilité de se former davantage, ce programme les aide en leur fournissant un lieu où ils peuvent étudier, tout en conservant leur fierté.

    Le problème qui se pose c'est de savoir s'ils trouveront du travail après leur formation. Ils suivent une formation en pensant que ce qu'ils apprennent sera très demandé à Winnipeg ou au Manitoba, mais ce n'est pas quelque chose que nous pouvons leur assurer. Néanmoins, je pense que nous formerons toujours des personnes pour quelque chose qui pourrait être très demandé dans le futur. Alors je pense que c'est un bon programme.

    J'aimerais encore une fois mettre l'accent sur le fait qu'il est absolument nécessaire que les jeunes de moins de douze ans comprennent la signification du mot travail. Nous voulons qu'ils considèrent l'école comme étant leur travail. Nous leur montrons que cela correspond à un travail et que c'est cela aller travailler: il faut se lever à une certaine heure le matin et il faut venir tous les jours. Ce sont quelques idées de base que nous devons inculquer à nos enfants du centre-ville. Beaucoup d'entre eux ont moins de douze ans, alors nous leur enseignons cela en même temps que le programme obligatoire.

    En ce qui concerne l'école et les systèmes scolaires séparés, une des raisons qui a poussé notre division scolaire à mettre sur pied des écoles publiques pour les autochtones il y a onze ans, c'est que nous voulions respecter le droit de choisir des parents. Ce n'est pas le milieu socioculturel des parents qui est important, nous pensons qu'il est important qu'ils puissent choisir le système et l'école que fréquentera leur enfant au sein du système public. Au départ, les écoles pour les autochtones ont été ouvertes en collaboration avec la communauté, pour pouvoir leur offrir ce choix, bien que de nombreuses autres écoles primaires offrent également des programmes pour les autochtones. Par exemple, l'école Children of the Earth et l'école Niji Mahkwa offrent des programmes intensifs qui mettent l'accent sur la culture et la langue. Nous avons constaté que les parents apprécient de pouvoir choisir.

    Certaines personnes qui travaillent dans ces écoles se sont dits préoccupés par le fait qu'on puisse dire qu'ils travaillent dans des écoles qu'on pourrait qualifier de racistes parce qu'elles sont ségréguées. Bien que nous acceptions des enfants non-autochtones, le fait est que 100 p. 100 des enfants inscrits à ces écoles sont autochtones. Il est intéressant de constater que même si vous mettiez en place quelque chose qui était nécessaire, vous êtes quand même critiqué.

    En tout cas en ce qui nous concerne, le fait d'avoir offert cette possibilité aux parents a donné des résultats positifs.

»  +-(1700)  

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Monsieur Fraser.

+-

    M. Fraser Mustard: J'aimerais faire un commentaire quelque peu différent.

    J'ai apprécié les déclarations de mes collègues, mais ce qu'il vous ont dit est applicable uniquement à certains enfants qui intègrent le système scolaire. J'ai une fille qui est enseignante dans le système scolaire de l'Ontario, et deux de mes petites-filles sont scolarisées dans ce système scolaire. Dès qu'elles ont commencé l'école, je leur posais des questions au sujet des enfants qui éprouvent des difficultés en classe. Ce ne sont pas les enfants autochtones qui posent problème, ce sont les enfants d'autres groupes ethniques.

    Ces enfants ont commencé à avoir des problèmes au fur et à mesure qu'ils avançaient dans le systèmes scolaire. Le système éducatif ne pouvait presque rien faire pour leur permettre d'atteindre le niveau désiré, car leurs problèmes étaient le résultat de ce qu'ils avaient subi avant d'intégrer le système scolaire. Ma fille a alors mis sur pied des cours spéciaux pour les élèves en 8ème année et elle a travaillé fort pour que ces personnes acquièrent des compétences. Elle n'a pas obtenu beaucoup de résultats.

    Quelque soit l'enseignant d'école primaire que vous interrogiez à ce sujet, il vous dira que si les enfants ne sont pas bien préparés lorsqu'ils intègrent le système scolaire, ils auront des problèmes. Cela me désole que les ministres de l'éducation ne s'en préoccupent pas—je ne parle pas des commissions scolaires, je parle bien des ministres de l'éducation.

    Des voix: Oh, oh!

    M. Fraser Mustard: Ils semblent faire la sourde-oreille. Je ne sais pas d'où ils sortent ceux-là.

    Mais lorsque quelqu'un aborde ce sujet et qu'il soulève ces questions, vous devriez y prêter attention. L'analyse que nous avons faite au sujet des enfants canadiens démontre que 25 p. 100 des enfants entre 0 et 6 ans rencontrent des difficultés lorsqu'ils intègrent le système scolaire. C'est un chiffre énorme. Cela représente plus de 250 000 enfants en Ontario. Je sais que ces données tiennent compte de l'illettrisme et des importants problèmes comportementaux. Le Québec est en avance sur les autres provinces et nous savons que d'autres pays ont moins de problèmes que nous parce qu'ils investissent de l'argent pour le développement des jeunes enfants.

    Lorsque vous abordez la question d'une économie moderne, dites-moi comment vous pouvez être compétitifs si votre population ne possède pas les qualités requises? Les Premières nations ont plus de difficultés que nous, car ils doivent d'abord s'adapter à notre culture.

    Je pense que vous avez raison John. Nous devons être flexibles. Nous devons être réalistes pour trouver un système qui fonctionne. Pour plusieurs raisons, je connais bien le système en place à Toronto. Là-bas la structure des centres de parentage est ouverte aux familles autochtones. Le travail effectué avec la population qui arrive à Toronto fonctionne très bien, car ils utilisent ce centre d'apprentissage basé sur le jeu, si je puis utiliser ce terme. Lorsque les mères enceintes arrivent au centre, elles reçoivent la formation en anglais. Mais la documentation utilisée par les personnes qui exploitent le centre a été traduit dans les langues parlées par les utilisatrices du centre. Ils ont été ingénieux.

    Je n'ai pas réussi à trouver un chauffeur de taxi pour traduire mon texte anglais, mais je vais vous raconter ce que Mary Gordon a fait. Elle s'asseyait dans les taxis à Toronto qui étaient conduits par des immigrants instruits. Elle choisissait les taxis conduits par des immigrants de l'Afrique de l'Est et de l'Asie du Sud. Elle leur disait de mettre en marche le compteur et leur faisait traduire ses textes. C'est ainsi qu'elle a réussi à traduire les textes qu'elle distribue dans ses salles de classe. Cela a été un réel succès. Ces enfants continueront à évoluer dans le système intégré, car ils se distinguent au sein du système scolaire.

    Mais vous soulevez une question intéressante. Pourriez-vous appliquer ce système à la population autochtone de Toronto? Nous avons fait du bon travail avec les autochtones à Toronto, et on m'a dit que nous avions le plus grand groupe urbain du pays. C'est une question très intéressante, car si nous n'en tenons pas compte rapidement, on va se retrouver avec des problèmes de ségrégation.

»  +-(1705)  

+-

    M. Alan Tonks: Je pense que c'est Winnipeg qui a le plus grand groupe, mais...

+-

    M. John Richards: [Note de la rédaction: Inaudible] ...information, je pense qu'elle mérite le premier prix.

+-

    M. Alan Tonks: Si je puis, madame la Présidente, j'aimerais...

+-

    M. Fraser Mustard: Je veux seulement dire que les gens de Toronto devront les remettre dans la bonne voie.

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Il ne s'agit pas d'un concours.

+-

    M. Alan Tonks: J'ai une question précise à poser à Mme Clarke.

    Je respecte la théorie ou les propositions du professeur Richards concernant les écoles ségréguées, de même que le modèle adapté qui nécessiterait un peu de travail. Mais avez-vous des données et des indicateurs qui comparent les taux de réussite des étudiants? Il me semble qu'elles pourraient contribuer au bien-fondé du modèle proposé par le professeur Richards.

+-

    Mme Pauline Clarke: Après cinq ans d'exploitation de la Children of the Earth High School, nous avons en avons revu les principes. Cette révision a été faite en 1996 et, depuis, nous avons fait des révisions annuelles. Il s'agit d'une petite école secondaire, mais c'est ce qui fait son charme. Nous avons constaté que le pourcentage d'élèves qui obtiennent un diplôme dans notre école est certainement supérieur aux étudiants des autres écoles.

    Mais nous devons affronter un autre problème. Même si les jeunes adultes obtiennent leur diplôme, nous devons mettre en place des programmes de transition entre l'école secondaire et l'université, car ce cadre de formation semble être très efficace pour les jeunes autochtones. Il se sentent beaucoup plus à l'aise dans une petite école secondaire, dans une sorte de programme alternatif, que dans une énorme école secondaire, où il arrive souvent qu'ils se perdent. S'ils sont déjà perdus et qu'ils doivent aller dans une énorme université... Ce que nous essayons d'obtenir c'est le financement pour des programmes de transition de l'école secondaire vers l'université. Dans ces programmes, nous offrons certains cours universitaires dans notre école secondaire, pour montrer aux étudiants qu'ils peuvent réussir, ensuite nous établissons les liens avec l'université.

    Il faut donc franchir beaucoup d'étapes pour avoir du succès, et nous pensons que c'est à nous de le faire constamment.

+-

    M. Alan Tonks: Mais les normes et les exigences d'admission influencent probablement cette démarche et sont en opposition avec les compétences intellectuelles, etc. Les universités ou les collèges ne feraient aucun compromis en ce qui concerne les compétences, les demandes, etc.

+-

    Mme Pauline Clarke: Les étudiants dont je vous parle obtiennent un diplôme d'études secondaire ordinaire—je parle donc de l'obtention de diplômes ordinaires—et ils possèdent donc les compétences nécessaires pour fréquenter l'Université du Manitoba ou la University of Winnipeg. Ce qui pose problème, ce sont leurs sentiments au sujet de ce qu'ils vivent. Nous voulons qu'ils réussissent et pas qu'ils abandonnent au bout de trois mois parce que l'université est trop grande... certains autres étudiants ont également des problèmes à l'université.

+-

    M. John Richards: Je pourrais encore vous faire part d'une observation à ce sujet. En Saskatchewan, au niveau universitaire, nous avons également entrepris des expériences qui sont destinées à calmer les inquiétudes concernant ces problèmes culturels. Le Saskatchewan Indian Federated College de la University of Regina existe depuis environ trente ans et a obtenu des bons résultats avec ce genre d'expérience. Par exemple, il existe un programme de formation des enseignants destiné aux autochtones, afin d'augmenter le nombre d'enseignants autochtones.

    Là encore, c'est beaucoup dû au fait que nous essayons d'être sensibles à leur culture et que nous voulons les rassurer au sujet des problèmes de transition qu'a mentionné Mme Clarke.

+-

    M. Fraser Mustard: J'aimerais intervenir à ce sujet, parce que j'ai visité ces collèges et leurs programmes sont très ingénieux. Les personnes des collectivités de Premières nations s'y sentent à l'aise en Saskatchewan. Lorsque je me suis rendu à Meadow Lake, beaucoup de personnes qui exploitent actuellement les systèmes scolaires ont fréquenté les collèges dont nous parlons.

    Au Manitoba, j'ai visité à maintes reprises l'Université du Manitoba en tant que professeur invité. Elle admet quelques étudiants des Premières nations, mais rien n'est fait pour eux au niveau culturel. Ces étudiants ont l'impression d'être des citoyens de deuxième classe, alors que la University of Regina et la University of Saskatchewan ont trouvé une solution en ouvrant le Saskatchewan Indian Federated College. Je pense qu'on a des choses à apprendre.

    Merci.

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Madame Guay.

[Français]

+-

    Mme Monique Guay: Madame la présidente, je veux simplement dire que c'est sûr qu'il faut aider nos jeunes. Nous avons aussi des problèmes au niveau du décrochage. Au Québec, on a dit aux jeunes que la plupart des emplois exigeaient maintenant une cinquième secondaire et que s'ils décrochent en deuxième, troisième ou quatrième secondaire, ils vont aller sur le marché du travail, oui, mais ils auront des emplois très précaires. Souvent, c'est l'occasion pour un jeune de travailler une année et de se rendre contre qu'en bout de ligne, il fait bien mieux de retourner à l'école, d'obtenir son diplôme et même d'aller au cégep. Au Québec, on a le cégep avant l'université.

    Les programmes, de toute façon, sont de juridiction provinciale. On pourrait en parler longuement, mais ça reste que chaque province décide pour son système scolaire. Mais il pourrait y avoir des projets-pilotes au niveau universitaire. Je ne pense pas que ça doit se faire au niveau secondaire. Je pense que si le jeune autochtone a obtenu son diplôme secondaire, il faut l'aider à faire la transition, mais au niveau universitaire ou au niveau du cégep. Au Québec, on a des programmes dans des régions où il y a des concentrations de populations autochtones, où il y a une intégration qui se fait au niveau du cégep, donc au niveau préuniversitaire, pour aider les jeunes à s'intégrer, parce que la transition est difficile. Encore là, c'est nous qui avons décidé de mettre des programmes en place. Je pense qu'il y a peut-être des possibilités d'avoir des programmes-pilotes, mais vraiment au niveau de l'université. Sinon, quand bien même on garderait un jeune trois ou quatre mois au niveau secondaire, il va arriver à l'université avec un problème parce que les autres seront en avance sur lui. C'est comme le surprotéger. Je pense qu'il faut que ce soit vraiment au niveau universitaire qu'une démarche se fasse.

    Cela étant dit, j'aimerais savoir si le taux d'analphabétisme est très élevé au niveau des autochtones. Je n'ai pas eu de données à ce niveau. Vous avez peut-être de l'information que je n'ai pas.

    J'espère qu'on trouvera des solutions qui sont de notre ressort. On ne peut pas faire des programmes mur à mur. C'est impossible de faire du mur à mur. Vous arrivez avec des visions différentes. D'ailleurs, vous représentez différentes provinces. Je pense qu'il faut être capable de trouver des moyens et de faire confiance au milieu. Puisque vous êtes dans le milieu, vous savez ce qui est nécessaire. Il ne vaut pas la peine d'essayer de tracer des grandes lignes pour tout le pays parce que ça ne fonctionne pas. En bout de ligne, on voit les résultats.

»  +-(1710)  

[Traduction]

+-

    Madame Pauline Clarke: En ce qui concerne le taux d'alphabétisation de nos élèves, toutes les évaluations que nous avons faites montrent un niveau d'alphabétisation souvent moins bon pour les élèves des écoles du centre ville que pour les élèves qui fréquentent les écoles d'autres quartiers. Néanmoins, je dois dire que si nous pouvons leur fournir un certain encadrement, si nous pouvons aider les parents à travailler avec leurs enfants à la maison en leur faisant comprendre les choses qui sont importantes pour favoriser l'alphabétisation de leurs enfants—s'asseoir et lire avec leurs enfants pendant dix minutes, etc.—nous pourrions avoir un impact sur l'amélioration des normes dans certaines de nos écoles.

    Il y a quelques années, une de nos écoles du centre-ville a obtenu le meilleur résultat de toutes les écoles de Winnipeg, dans le programme de mathématique des élèves de troisième année. Cela a fait la une du journal, comme si c'était pas normal que les enfants du centre-ville pouvaient obtenir de tels résultats. Les commentaires de ce genre faisaient mal, mais en tout cas ça démontre qu'avec un soutien prolongé à la maison, à l'école et dans le quartier, nous pouvons changer les choses. Mais il ne s'agit pas de programmes pilotes qui nécessitent un seul financement sur trois ans et après c'est fini. Les gens doivent savoir qu'ils peuvent se fier à ce genre d'approche mais il n'est pas question que ces programmes soient soumis au rendement financier.

[Français]

+-

    M. John Richards: Vous m'avez demandé des chiffres et je ne peux pas vous fournir quelque chose de très précis. Ce que j'ai devant moi, qui est tiré du recensement de 1996, c'est le pourcentage d'autochtones qui n'ont pas complété l'élémentaire. C'est un guide.

    Mme Monique Guay: Oui, c'est un bon guide.

    M. John Richards: En réserve, c'est 30 p. 100; hors réserve, c'est à peu près la moitié. Donc, cela indique qu'il y a un problème.

    Je ne veux pas vous contrer lorsque vous demandez des programmes au niveau du cégep et des transferts entre l'école secondaire et les études postsecondaires. C'est important. Les meilleurs résultats des autochtones existent en Ontario et au Québec, Dieu sait pourquoi. Peut-être est-ce parce qu'il y a une longue histoire et qu'il y a une meilleure intégration. Les pires problèmes de décrochage sont dans l'Ouest. Dans l'Ouest, je ne pense pas qu'on puisse atteindre le niveau universitaire. Bien sûr, ceux qui y arrivent ont le mieux réussi, mais la crise, si je peux utiliser le mot «crise», existe au niveau secondaire. Lorsqu'on assiste, à Winnipeg, à une situation où il y a plus de la moitié des jeunes qui décrochent, on ne peut pas atteindre l'université. Il faut des programmes spécifiques.

»  +-(1715)  

+-

    Mme Monique Guay: Vous m'avez mal comprise. Je disais que si l'enfant se rend jusqu'en cinquième secondaire et qu'il réussit, il ne faut pas le maintenir à l'école secondaire. Il faut l'aider à s'intégrer et à aller jusqu'au niveau universitaire, s'il veut aller à l'université, plutôt que de le garder au niveau secondaire pour lui donner trois ou quatre mois d'aide pour faire la transition au niveau universitaire, s'il a réussi. Comprenez-vous? C'est simplement ça.

    Mais c'est sûr que vous avez parfaitement raison. Il ne faut pas s'illusionner. Si le chemin n'est pas fait pour eux et qu'ils ne traversent même pas le niveau secondaire, c'est là qu'il faut frapper. C'est là qu'il faut essayer de les aider. Ça, c'est officiel.

[Traduction]

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): J'ai une ou deux questions à vous poser.

    Monsieur Mustard, vous avez abordé trois points en particulier: le développement et l'intégration des programmes existants; le développement du jeune enfant, dès la conception et après la naissance et les programmes préventifs destinés aux parents.

    On nous a communiqué les chiffres concernant la migration. Je viens de Winnipeg, alors je sais ce qui se passe dans cette ville. Je suis au courant pour les mouvements de va et vient entre la ville et les réserves. Je sais ce que cela signifie pour la division scolaire de Winnipeg et je sais ce que cela signifie pour le système social de la province du Manitoba. Mais ce qui m'inquiète par-dessus tout, ce sont les enfants autochtones qui vivent en ville et qui ne cessent de déménager de la ville vers la réserve, et vice-versa, et qui sont, dès lors, sous la responsabilité de deux niveaux différents du gouvernement.

    Je suppose que ma question devrait s'adresser à vous tous: Quelles sont vos suggestions pour: harmoniser les politiques et les pratiques qui permettent l'intégration des programmes, pour abattre certaines limites entre les différentes sphères de compétence et pour faire face aux choses de façon holistique, comme le mentionne Alan Tonks lorsqu'il parle de la migration perpétuelle des enfants entre la ville et les réserves ou lorsque l'enfant déménage de la réserve vers la ville, suite à une politique fédérale établie dans une autre région?

    Il se peut qu'une famille déménage en ville en raison de problèmes de santé. J'utilise toujours l'exemple du diabète. Puisque les transports ne sont disponibles que pour une durée de trois mois, la famille d'un membre diabétique est obligée de venir habiter en ville, si le diabétique veut obtenir les soins de santé dont il a besoin. Lorsque cela est le cas, comment vont-ils faire pour aborder les différentes sphères de compétence? Avez-vous des idées ou des suggestions à faire?

+-

    M. Fraser Mustard: Vous me mettez dans l'embarras.

    Je ne suis pas un expert en population autochtone, bien que j'ai des contacts avec eux et que je leur ai rendu visite. Au sein des Premières nations du Canada, nous avons quelques dirigeants éminents. Par exemple, Mary Ellen Turpel-Lafond, qui siège à la cour provinciale de la Saskatchewan. C'est une femme impressionnante. Je ne sais pas si vous allez la rencontrer, mais si elle était ici—je pense qu'elle est originaire d'une réserve, si mes souvenirs sont exacts—elle vous parlerait de l'importance qu'ont les premières années de vie pour développer les capacités. Elle vous le dirait franchement. Elle vous dirait que le décrochage scolaire des personnes des collectivités des Premières nations est la conséquence d'un manque de développement des capacités.

    Si je vous avais amené les juges de la cour provinciale qui ont affaire aux familles disfonctionnelles, qui examinent les violences familiales et collaborent avec la société de protection de l'enfance, ils vous diraient que lorsque vous devez gérer ces cas, ce sont les enfants qui sont dans l'incertitude pendant les années les plus critiques de leur existence. Ils m'ont dit que ces enfants subissent des dommages irréversibles. C'est une déclaration très intéressante de la part de personnes qui vivent dans le monde réel et qui essaient de gérer ce genre de problèmes.

    Je suppose que si Madame la juge était ici, elle vous dirait que vous devriez essayer de développer une sorte de module interchangeable, de cette façon vous auriez des centres et des systèmes d'instruction dans les réserves que vous pourriez intégrer à ceux des centres urbains. Ce n'est pas quelque chose qui nécessite beaucoup de réflexion. Je pense à ce qui se fait à Thunder Bay. Ce centre m'a laissé l'impression d'être un centre de développement des jeunes enfants et de parentage dirigé par une collectivité des Premières nations qui sont tout aussi talentueux et compétents que dans n'importe quel autre juridiction. Les zones tribales situées près de ce centre doivent avoir une relation d'échange avec celui-ci. Je ne sais pas à quoi ressemble le systèmes scolaire de Thunder Bay, mais il était évident qu'un peu d'intégration n'aurait pas fait de mal.

    Néanmoins, je suis d'accord avec vous que les budgets qui proviennent de plusieurs juridictions différentes ont tendance à être mis de côté, ce qui empêche la liberté de manoeuvre qui est nécessaire aux personnes qui veulent mettre sur pied de tels projets. Pour obtenir une réponse aux questions que vous vous posez, vous devez réfléchir comment vous pourriez favoriser la création de systèmes intégrés par les communautés.

    En ce qui concerne le point de vue de John, je pense qu'il y aura des régions qui s'en sortent bien. N'essayez pas de créer un modèle, essayez juste de savoir quelles sont les normes et les résultats que vous voulez atteindre. Vous les obtiendrez de la part des personnes concernées, car je pense qu'il existe un noyau au sein de la population qui peut faire avancer les choses et qui est capable de répondre à vos questions.

»  +-(1720)  

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Merci.

    Quelqu'un d'autre?

+-

    Madame Pauline Clarke: Je voulais juste dire que la migration a deux visages. Il y a un domaine dans lequel nous pouvons collaborer. Lorsque des enfants arrivent en ville et repartent de la ville pour des raisons d'aide sociale à l'enfance—on prend soin d'eux, ils viennent pour des raisons de santé ou autre chose—il y a généralement une autre agence qui travaille avec eux. Au Manitoba, nous nous dirigeons vers un autre genre d'aide sociale à l'enfance. Les communautés métis et les Premières nations en seront responsables à l'avenir.

    À l'heure actuelle, nous faisons disparaître notre système d'aide sociale à l'enfance. Dès lors, avec la contribution de nouvelles agences, il est possible que nous soyons capables d'avoir du personnel avec qui on peut travailler dans les réserves et dans les villes. Nous pouvons établir des liens qui n'existent pas actuellement. L'absence de ces liens est préjudiciable à l'enfant.

    Mais il y a de nombreuses autres raisons qui les poussent à déménager, et je ne sais pas comment nous pouvons les gérer. Les familles décident de déménager pour toutes sortes de raisons. Je peux vous parler d'une famille dont la mère a déménagé à Kenora pour des raisons professionnelles et dont l'enfant est venu en ville pour vivre avec sa grand-mère. On ne sait pas si cet enfant retournera à la réserve ou s'il ira habiter avec sa mère à Kenora si celle-ci y trouve du travail.

    Souvent ce sont des membres de la famille élargie qui habitent en ville qui se substituent aux parents, mais personne ne travaille avec eux. Les enfants arrivent d'eux-même, c'est leur droit, alors je ne sais pas ce que nous pouvons faire. Néanmoins, lorsqu'ils arrivent en ville, nous pouvons au moins nous assurer que nous avons un réseau, qui peut les soutenir sur place. À partir de là, nous pouvons nous intéresser à leurs origines et déterminer comment nous pouvons travailler avec eux. Mais je pense que c'est une situation qui est difficile à gérer.

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Merci.

    Professeur Richards.

+-

    M. John Richards: Nous nous entendons sur beaucoup de choses, mais je dois admettre que j'ai une opinion plutôt conservatrice à ce sujet. Je pense que ce qui doit être soulevé ici c'est la question de la dépendance de l'aide sociale et comment cette dépendance mène souvent à un style de vie transitoire. Dans l'ensemble, les observations que j'ai récoltées dans les organismes de service sociaux—au cours des 10 dernières années, j'ai parlé à pas mal de personnes dans tout le pays, à ce sujet—indiquent que l'évaluation qu'a fait le Canada concernant l'importance des liens avec le marché du travail a été insuffisante.

    Je ne veux pas vous donner l'impression d'être un représentant non qualifié de ce qu'ils ont fait, car certaines choses qu'ils ont faites ont été dures. D'après les preuves que je possède, je conclus néanmoins que même si l'augmentation des revenus a été modeste au cours des dix dernières années, en ce qui concerne l'expérience menée par les américains—et ils ont été modestes; ce qui s'est passé dans de nombreux cas, c'est qu'il y a eu moins de personnes qui sont retournés au travail, notamment en raison de l'introduction des emplois faiblement rémunérés—cela vaut la peine de le faire. Cela amène une certaine stabilité aux familles et, en considérant que nous avons un problème intergénérationnel, l'expérience a été bonne.

    Je suis économiste. J'hésite à m'aventurer dans les taux d'imposition et ce genre de discussions, mais je vais m'y aventurer un peu. L'un des modestes programmes que nous avons mis sur pied en Saskatchewan au cours de la dernière décennie, et qui fonctionne, rejoint ce qu'ont fait les américains pour compléter les très bas salaires.

    Vous pouvez critiquer le fait que nous subventionnons les employés des dépanneurs, mais la logique de ce programme—au niveau administratif c'est bien organisé; nous dépensons environ 50 millions de dollars par année pour ce programme—veut que si un personne, souvent une mère célibataire, travaille à temps partiel, nous complétons son salaire.

    Il serait peut-être mieux de le faire à la manière du Québec, avec les garderies à 5 $ par jour, mais l'idée est de mettre l'argent à disposition des parents pour qu'ils puissent en utiliser une partie pour faire garder leurs enfants. Cela se fait électroniquement. À l'aide d'un téléphone à clavier, vous indiquez que vous avez travaillé chez McDonald's et que vous avez gagné 600 $ le mois passé. Si vous avez deux enfants, vous recevrez environ 30 p. 100 de ce montant pour compléter votre revenu, dans un délai de deux ou trois semaines.

    Il y a beaucoup de discussions techniques au sujet des taux de récupération fiscale, pour savoir si ce système fonctionne ou pas. Nous ne l'avons pas évalué de manière approfondie, alors je ne peux pas vous dire quel pourcentage des personnes est autochtone ou non-autochtone. Mais la logique consiste à valoriser le travail, à consacrer un peu d'argent au travail et de l'investir pour compléter les salaires, au lieu de l'attribuer au budget consacré à l'aide sociale.

    Il semble évident que ce programme est destiné principalement aux autochtones, étant donné que le 60 p. 100 des cas que nous traitons concernent des autochtones. En quelque sorte, ça répond au problème de garde d'enfants, mais seulement dans une certaine mesure.

    Au niveau administratif, cela a bien fonctionné. Nous avons beaucoup collaboré avec les syndicats et la compagnie de téléphone, ce qui nous a aidé à mettre sur pied le programme et à le faire fonctionner sans heurts. C'est aux États-Unis qu'on trouve le programme de lutte contre la pauvreté le plus développé, il s'agit du Crédit d'impôt sur les revenus salariaux. Les États-Unis consacrent l'équivalent de 50 milliards de dollars américains pour leur crédit d'impôt sur les revenus salariaux. En Angleterre, ils ont mis sur pied un programme similaire, le crédit d'impôt sur les revenus des familles qui travaillent, et ils y consacrent l'équivalent de 12 milliards de dollars canadiens.

»  -(1725)  

[Français]

    Au Québec, vous méritez un certain crédit. C'est sous Claude Ryan, dans les années 1980, que vous avez eu APPORT. Cela a été la première expérience canadienne de ce genre.

    À mon avis, votre programme, on devrait le remodeler et le mettre à jour. C'est un vieux programme et c'est actuellement mal organisé relativement à ce qu'on peut faire. Ce n'est pas une critique; c'est seulement une observation.

+-

    Mme Monique Guay: Non, non. On a un programme pour sortir les gens de l'aide sociale. Une femme monoparentale qui veut retourner sur le marché du travail, au salaire minimum, aura un crédit d'impôt ou un salaire augmenté pour sortir de l'aide sociale, cela sur une période de trois ans.

+-

    M. John Richards: Ici, c'est universel.

[Traduction]

Nous n'avons pas de limites. L'idée c'est que les personnes ne fassent pas appel à l'assistance sociale. L'un des aspects qui est important lorsqu'on veut créer une stabilité au niveau des familles qui habitent dans les réserves ou hors des réserves, c'est de s'assurer qu'elles sont indépendantes financièrement et qu'elles n'ont pas besoin de faire appel à l'assistance sociale.

    Merci.

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Merci.

    Alan, avez-vous d'autres questions?

+-

    M. Alan Tonks: Non, je vous remercie beaucoup.

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Merci.

    Monique? Non?

    Y a-t-il autre chose que nous devrions savoir et dont vous ne nous avez pas parlé?

+-

    M. Fraser Mustard: J'aimerais faire valoir une point de vue qui diffère de celui de John. Si vous examinez la population selon des mesures fondamentales de la santé, l'alphabétisation, etc, et que vous faites le tracé des mesures obtenues pour la population de toutes les classes sociales sur un graphique, vous obtenez une pente.

+-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): On obtient une pente?

+-

    M. Fraser Mustard: Vous obtenez une pente. Si vous habitez dans les montagnes, vous avez des pentes escarpées et des pentes douces. John devrait savoir ces choses, puisqu'il travaille à Simon Fraser, qui se trouve en haut d'une sacrée pente.

    Néanmoins, lorsque vous examinez les graphiques de divers pays, vous constaterez que le graphique de certains pays donne une pente faible à haut rendement et que celui de certains pays donne une pente escarpée à haut rendement. En ce qui concerne notre population, nous avons un assez bon rendement, mais nous obtenons une pente plus escarpée que d'autres pays.

    Je devrais vous dire que si vous mesurez les compétences orales d'un enfant de cinq ans, le résultat que vous obtenez à ce stade du développement du cerveau aura des effets sur la santé et le comportement. Lorsque nous avons reporté les données obtenues pour l'Ontario sur un graphique—la soi disant province la plus riche, bien que cela puisse être contesté, n'est-ce pas John—nous avons constaté que 36 p. 100 des enfants de l'extrémité inférieure ne s'en sortent pas très bien, et que 12 p. 100 du côté de Margaret McCain—elle était ma coprésidente—ne s'en sortaient pas bien. La majorité des enfants en difficulté étaient des enfants de la classe moyenne. L'assistance sociale n'est pas le problème principal pour eux, il y a un autre problème, plus profond, qui existe: la structure de base de notre société. Je pense que, en ce qui concerne ce problème, le Québec a pris une longueur d'avance sur le reste du pays.

    Lorsque vous examinez le cas des populations des Premières nations, vous devez vous souvenir que—et, John, je ne sais pas à quoi ressemblerait le tracé de leur pente sur un graphique, mais je suppose qu'il serait assez escarpé—vous devez en tenir compte et vous devez trouver comment faire pour améliorer la situation. Mais, vous n'y parviendrez pas en une année, une génération sera nécessaire.

-

    La présidente suppléante (Mme Anita Neville): Je vous remercie d'être venus à Ottawa. Je m'excuse d'avoir dû retarder l'heure de la réunion, mais je n'ai pas eu le choix.

    Cette discussion nous a beaucoup aidé et a été très utile. Nous vous enverrons une copie du rapport dès qu'il sera terminé.

    La séance est levée.