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PACC Rapport du Comité

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HOUSE OF COMMONS
CHAMBRE DES COMMUNES
OTTAWA, CANADA
K1A 0A6


Conformément à l’alinéa 108(3)e) du Règlement, le Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes a l’honneur de présenter son

SIXIÈME RAPPORT

Le Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes a étudié le chapitre 14 du rapport d’octobre 2000 du vérificateur général du Canada (Agence canadienne de développement international La gestion des marchés et des accords de contribution), et il est convenu de déposer le rapport suivant.

Introduction

L’Agence canadienne de développement international (ACDI) est un organisme fédéral qui a pour mission d’aider les populations des pays en voie de développement à se donner les moyens d’un développement économique et social durable adapté à leurs besoins et à leur environnement. Elle a aussi pour mandat d’offrir de l’aide humanitaire et ainsi de contribuer à l’avancement des intérêts politiques et économiques du Canada à l’étranger en faisant la promotion de la justice sociale, de la stabilité internationale et de l’établissement de relations à long terme au profit de la collectivité internationale.

L’ACDI poursuit ces objectifs entre autres par le financement de projets d’aide et de développement. Elle gère environ 1,7 milliard de dollars d’assistance internationale. Sur cette somme, plus de 670 millions de dollars sont dépensés par les directions générales des programmes géographiques pour financer des programmes visant des pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine. Une bonne partie de cet argent est consacré à des accords de contribution et des marchés avec des tiers, appelés agences d’exécution, chargés de l’exécution des activités d’aide au développement. Une autre tranche de 260 millions de dollars est confiée à la Direction générale des partenariats canadiens qui accorde des subventions et contributions à des organisations pour les aider à exécuter leurs propres programmes d’aide.

La vérification s’est concentrée surtout sur la façon dont l’ACDI gère les marchés et d'autres types d'accords pour l'acquisition de biens et de services, y compris la sélection des agences d'exécution canadiennes qui mettent en œuvre les projets. On a vérifié si les processus utilisés par l'ACDI pour la passation des marchés et des accords de contribution sont conformes au Règlement sur les marchés de l'État, aux lignes directrices du Conseil du Trésor et aux politiques de l'Agence elle-même, si ces processus sont équitables et transparents et s'ils satisfont aux exigences de fonctionnement et aux besoins en matière de développement. Les vérificateurs ont en outre examiné le cadre de contrôle des accords de financement du Programme d'envoi de volontaires de la Direction générale du partenariat canadien.

Le Comité des comptes publics était préoccupé par la manière dont l’ACDI gère ses marchés et ses accords de contribution et a donc décidé de se réunir le 15 mars 2001 pour étudier les observations et recommandations contenues dans le chapitre 14 du rapport d’octobre 2000 du vérificateur général du Canada. Étaient présents à cette occasion M. David Rattray (vérificateur général adjoint), M. John Hitchinson (directeur principal, Opérations de vérification) et M. Paul Morse (directeur, Opérations de vérification), qui représentaient le Bureau du vérificateur général du Canada. Étaient aussi présents, pour le compte de l’Agence canadienne de développement international, M. Charles Bassett (vice-président principal), Mme Nicole Mendenhall (directrice, Vérification interne, Direction générale de l'examen du rendement) et M. Maurice Lepage (directeur général, Direction de la gestion des marchés).

Observations et recommandations

M. Rattray a longuement parlé des observations issues de la vérification. Au sujet de l’administration des marchés concurrentiels, la vérification a conclu que le processus était généralement « bien mené », mais qu’on avait relevé des cas où les marchés n'étaient pas conformes à la politique sur les marchés du Conseil du Trésor ou au Règlement sur les marchés de l'État. On a remarqué entre autres l'attribution inappropriée de marchés à fournisseur unique, le fractionnement de marchés, et la non-conformité à la politique sur les marchés avec d'anciens fonctionnaires touchant une pension de retraite.

L’ACDI conclut de très nombreux accords de contribution pour financer des activités de développement (ceux-ci représentent 45 % des dépenses des directions générales des programmes géographiques). Compte tenu de l’importance de ce mode de financement, on se serait attendu que l’ACDI se dote de règles précises de gestion des accords de contribution. Or, on a constaté que ce n’était pas le cas.

En outre, les conditions qui s'appliquent aux subventions et aux contributions relatives aux programmes géographiques sont très générales et n'indiquent pas comment ni quand utiliser les accords de contribution. Elles précisent certes que les contributions doivent être approuvées en conformité avec les procédures et les pouvoirs ministériels réguliers, mais l'ACDI peut traiter les exceptions au sein même de l'Agence. Par conséquent, l'utilisation par l'ACDI des accords de contribution pour la sélection des agences d'exécution s'est souvent écartée des politiques ou pratiques internes énoncées.
L'ACDI peut sélectionner les agences d'exécution au moyen d'accords de contribution qui correspondent à des marchés à fournisseur unique lesquels ne seraient pas autorisés aux termes du Règlement sur les marchés de l'État. La vérification a permis de constater que c'était le cas pour environ la moitié des accords examinés.

Les vérificateurs ont remarqué par ailleurs que les marchés et les accords de contribution ne soutenaient toujours pas la gestion axée sur les résultats. En effet, les résultats attendus qui sont mentionnés sont imprécis ou irréalistes, ou encore ne prévoient ni surveillance ni intervention lorsque des changements sont apportés aux hypothèses clés jugées essentielles au succès du projet. L'ACDI n'inclut, dans ses accords de gestion de projet, ni exigences formelles ni portes de sortie ― c'est-à-dire des mécanismes offrant au besoin à l’Agence l’option de continuer ou de se retirer d’un projet.

Par contre, les employés de l'ACDI attachent énormément d'importance à la surveillance des accords dont ils sont responsables. Ils ont couramment recours à des contractuels pour surveiller les progrès et faire rapport sur ceux-ci, et ils insistent pour que les agences d'exécution canadiennes leur soumettent les rapports requis.

Les vérificateurs ont constaté que l'ACDI obtenait une information adéquate sur la santé financière de ses partenaires canadiens du Programme d'envoi de volontaires, mais qu’elle recevait peu d'information sur les projets financés, les sommes dépensées et les résultats obtenus. Pour accorder un financement, l'ACDI se fonde surtout sur les niveaux historiques plutôt que sur le rendement de ses partenaires. Enfin, les vérificateurs estiment que le Rapport sur le rendement de l'ACDI devrait contenir une information plus pertinente et exacte.

Le vice-président principal de l’ACDI a donné un aperçu des activités de l’organisme et des problèmes que présente l’exécution des programmes d’aide. Il a parlé brièvement des mesures prises par l’ACDI pour améliorer la qualité de l’exécution des programmes, notamment des suivantes :

·           Des changements ont été apportés au processus de passation de marchés de l’ACDI afin de le rendre plus juste et plus transparent.

·           L’ACDI a aussi fait des progrès dans l'application de la gestion axée sur les résultats dans son processus contractuel.

·           L’ACDI est également en train d'appliquer ces principes de gestion à l'échelle de ses programmes. Elle a commencé à exploiter un nouveau système d'information intégré qui devrait lui permettre d’améliorer à la fois ses résultats et sa capacité d’en rendre compte au Parlement et aux Canadiens.


·           l’ACDI est en train de renforcer ses effectifs scientifiques et techniques afin de mieux appuyer l’élaboration de politiques judicieuses et de mieux gérer ses projets et programmes.

M. Bassett a terminé en disant : « […] l'ACDI accueille favorablement les rapports du vérificateur général. Nous sommes satisfaits des commentaires positifs émis sur les progrès que nous avons accomplis, et nous prenons bonne note des améliorations recommandées. Tout comme nos vérifications internes, ces rapports nous fournissent des informations sur notre rendement qui nous aident à améliorer la prestation de nos programmes. »

Un thème revient constamment tout au long de la vérification : la question du respect des directives et règlements par l’ACDI. Les vérificateurs ont remarqué de nombreux cas où l’ACDI n’avait pas respecté les exigences et règles du gouvernement. Ils ont aussi constaté des problèmes tout au long du déroulement des projets : des lacunes durant les phases de planification et de conception des projets, dans les processus de sélection des agences d’exécution et d’attribution des marchés et dans la surveillance de la phase d’exécution. Le Comité trouve ces observations très inquiétantes.

Le Comité s’est intéressé de près au pouvoir de l’ACDI de conclure des accords de contribution. L’ACDI a un cadre de gestion bien établi pour la passation de marchés, mais n’a pas l’équivalent au niveau de la passation d’accords de contribution. Le pouvoir qu'a l'ACDI d'utiliser les accords de contribution pour mettre en œuvre les projets est régi par des conditions approuvées par le Conseil du Trésor en mars 1996. Celles-ci sont très générales et n'indiquent pas comment ni quand utiliser ces accords. Les conditions de l'ACDI pour les subventions et les contributions devaient être renouvelées en mars 2001, ce qui devrait donner à l’Agence l'occasion de mieux définir le cadre des pouvoirs en ce qui concerne le recours aux accords de contribution. Le Comité a demandé si l’ACDI avait effectivement l’intention de demander des éclaircissements sur les modalités entourant la passation d’accords de contribution à ce moment-là.

Selon M. Bassett, le cadre régissant la passation d’accords de contribution devrait être prêt à la fin de mai 2001. En conséquence, le Comité recommande:

Recommandation no 1

Que, quand le Conseil du Trésor aura approuvé le renouvellement du nouveau cadre régissant les accords de contribution de l’ACDI, l’Agence en fournisse copie au Comité au plus tard le 31 août 2001.

Le Comité a ensuite tourné son attention sur la manière dont l’Agence évalue le rendement passé d’un soumissionnaire. Durant la présélection, l’Agence vérifie la capacité du soumissionnaire à s’acquitter de la tâche et son expérience en matière d’activités de développement, de même que sa solidité financière. Le Comité a demandé si l’Agence avait l’habitude de communiquer avec les autres ministères fédéraux avec lesquels les candidats potentiels ont traité par le passé et on lui a répondu que ce n’était pas le cas en général et que l’ACDI jugeait uniquement sur le contenu de la proposition du soumissionnaire. Chaque marché est attribué sur la base du contenu de la soumission de l’exécutant. Normalement, l’ACDI ne se renseigne pas auprès des autres entités gouvernementales sur le rendement passé des soumissionnaires.

On a signalé au Comité une récente directive du gouvernement fédéral qui permet à l’ACDI de déduire des paiements dus aux entités exécutantes toute somme due à un autre ministère ou organisme fédéral. L’ACDI étudie actuellement d’autres solutions relativement à l’examen du rendement passé des soumissionnaires potentiels, mais estime qu’il demeure délicat d’obtenir des renseignements sur le rendement passé d’un soumissionnaire. Cette démarche représente un surcroît de travail non négligeable et risque aussi d’exposer l’ACDI à des poursuites en cas d’évaluation défavorable.

Enfin, avant d’envoyer le paiement final à un entrepreneur, l’ACDI exige de celui-ci qu’il signe une déclaration attestant que tous les sous-traitants et leurs employés ont été payés. Il est effectivement arrivé que l’ACDI retienne un paiement final parce que l’entrepreneur devait encore de l’argent à des sous-traitants. Après avoir étudié cette question, le Comité recommande:

Recommandation no 2

Que l’ACDI élabore une politique qui permettrait de mieux évaluer le rendement passé d’un soumissionnaire potentiel, notamment de déterminer si celui-ci a des dettes en souffrance envers d’autres ministères et organismes, et qu’elle soumette un rapport provisoire à ce sujet au Comité au plus tard le 31 mars 2002.

Le Comité trouve inquiétant le fait que l’ACDI ne respecte pas ses propres directives concernant les phases de planification et de conception des projets. Les vérificateurs ont signalé des lacunes au niveau du respect des directives concernant la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (LCEE), l’élaboration des plans de marché, et des attentes pas toujours réalistes. Des mesures spécifiques ont été prises pour régler les problèmes. En particulier, l’ACDI insiste désormais pour que tous les dossiers des projets contiennent une documentation complète, quelle que soit la taille du projet. Il était encore trop tôt pour vérifier l’efficacité de ces mesures, mais les porte-parole de l’ACDI ont promis de remettre au Comité un rapport d’étape provisoire à ce sujet. Le Comité note les efforts déployés par l’ACDI pour remédier aux divers problèmes et apprécie l’idée d’un rapport d’étape. Compte tenu de ce qui précède, le Comité formule la recommandation suivante :


Recommandation no 3

Que l’ACDI applique les diverses mesures qu’elle a conçues pour remédier aux lacunes relevées au niveau de la planification et de la conception des projets et qu’elle soumette à ce sujet un rapport d’étape provisoire au Comité au plus tard le 31 mars 2002.

Les vérificateurs ont noté que l’ACDI n’avait pas l’habitude de résilier les accords quand les projets éprouvent de graves difficultés. Dans le cas d’un grand projet, il peut s’écouler cinq ans entre la conception et la mise en œuvre, et les dépenses de temps et d’argent, pour l’ACDI et pour le pays hôte, peuvent être considérables. Donc, vu cet important investissement en ressources et les coûts à court terme associés à une annulation, l’ACDI annule rarement un accord, même quand il ne donne pas les résultats escomptés. L'Agence n'inclut, dans ses accords de gestion de projet, ni exigence formelle ni portes de sortie (des occasions de faire le point et de décider au besoin de se retirer d’un projet). Le Bureau du vérificateur général a dit que l’ACDI avait commencé à explorer des pistes en ce sens, mais qu’on ne savait pas exactement où en était ce dossier.

M. Charles Bassett dit que la proposition de créer des portes de sortie était extrêmement utile. Selon lui, l’ACDI doit se montrer plus réaliste quant aux résultats attendus et au temps nécessaire, car les activités de développement sont souvent bien plus longues que prévu. L’ACDI affirme qu’elle a déjà commencé à appliquer cette approche dans le cadre de certains de ses grands accords de gestion de projets et qu’elle inclura maintenant de façon plus systématique, dans ses accords de services professionnels, une disposition prévoyant un examen officiel.

Recommandation no 4

Que l’ACDI intègre à ses accords de gestion de projets une disposition prévoyant un examen en bonne et due forme du rendement réel des projets de manière que celle-ci puisse alors décider si elle doit poursuivre ou annuler le projet concerné.

Le Comité s’est penché aussi sur la question de la non-conformité de certains marchés à la politique sur les marchés avec d’anciens fonctionnaires. La vérification a en effet mis à jour 10 marchés non concurrentiels passés avec d’anciens fonctionnaires à la retraite. Or ces marchés ne sont pas conformes au pouvoir délégué de l’Agence parce que cette dernière n'a pas obtenu au préalable l'approbation du Conseil du Trésor, exigible pour les marchés non concurrentiels de plus de 25 000 $ conclus avec d'anciens fonctionnaires touchant une pension de retraite. Le Comité est au courant des efforts déployés par l’ACDI pour identifier ces cas et des mesures prises pour éviter qu’une telle situation se reproduise.


Le Comité trouve néanmoins la situation préoccupante. Il trouve particulièrement troublant de constater que les enquêtes de l’ACDI ont été entravées par l’absence de registre central ou ministériel consignant les noms des anciens fonctionnaires qui touchent une retraite ou ont bénéficié de primes d’encouragement à la retraite. L'ACDI a eu recours à la mémoire institutionnelle pour identifier les marchés non conformes, mais cette mémoire collective ne pouvait pas toujours identifier les anciens fonctionnaires d'autres ministères qui avaient conclu des marchés avec l'Agence. En l’absence de renseignements précis sur les anciens fonctionnaires qui touchent une pension ou qui ont bénéficié de primes d’encouragement à la retraite, il est très difficile d’appliquer de façon rigoureuse les directives du gouvernement en matière de marchés publics dans tous les ministères et organismes publics. Ce constat amène le Comité à formuler la recommandation suivante :

Recommandation no 5

Que, pour faciliter l’application des lignes directrices fédérales relatives à la passation de marchés, en particulier en ce qui concerne les marchés de services passés avec d’anciens fonctionnaires, le Secrétariat du Conseil du Trésor étudie la faisabilité de mettre sur pied un registre central identifiant clairement les anciens fonctionnaires bénéficiaires d’une pension de retraite aux termes de la Loi sur la pension de la fonction publique ou ayant touché un montant forfaitaire aux termes de mesures d’encouragement à la retraite.

Conclusion

Le Comité est conscient des efforts déployés par l’ACDI pour remédier aux problèmes identifiés lors de la vérification, mais demeure préoccupé par ce qu’il considère comme la tendance de l’Agence à faire preuve d’inconstance durant les phases de planification, de sélection et d’exécution des projets. Ce laxisme dans le respect des directives et règlements mine la confiance du Parlement et de la population dans la capacité de l’ACDI de gérer de façon convenable et fiable les fonds publics mis à sa disposition. Dans l’intérêt de la transparence et de la reddition de comptes, l’ACDI doit assurer l’application plus constante et uniforme des politiques et pratiques. Le Comité s’attend que l’ACDI prenne toutes les mesures nécessaires à ce sujet et qu’elle fasse rapport des résultats obtenus dans les documents redditionnels qu’elle dépose devant le Parlement.

Conformément à l’article 109 du Règlement, le Comité demande que le gouvernement dépose une réponse globale au présent rapport.

Une copie des procès-verbaux pertinents (réunions nos 5 et 14) est déposée.



Respectueusement soumis,

 

 

Le président

John Williams, député