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HERI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent du patrimoine canadien


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 21 mai 2002




0910
V         Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.))
V         M. Alan Goluboff (président, La Guilde canadienne des réalisateurs)

0915
V         Mme Pamela Brand (directrice exécutive nationale, Guilde canadienne des réalisateurs)

0920
V         Le président
V         M. Peter Grant (conseiller juridique, La Guilde canadienne des réalisateurs)
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ)
V         M. Peter Grant
V         Le président
V         Mme Maureen Parker (directrice exécutive, Writers Guild of Canada)

0925

0930
V         M. Jefferson Lewis (vice-président, Writers Guild of Canada)

0935
V         Mme Maureen Parker
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon

0940
V         Le président
V         M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne)
V         Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne)
V         Mme Maureen Parker
V         Mme Betty Hinton
V         M. Jefferson Lewis
V         Mme Betty Hinton
V         M. Peter Grant

0945
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         M. Jim McKee (directeur des politiques et communications, Writers Guild of Canada)
V         Mme Christiane Gagnon
V         Mme Maureen Parker
V         M. Jefferson Lewis
V         Mme Christiane Gagnon

0950
V         M. Jefferson Lewis
V         Le président
V         Mme Sarmite Bulte (Parkdale--High Park, Lib.)
V         M. Alan Goluboff
V         M. Peter Grant

0955
V         M. Jefferson Lewis
V         Mme Sarmite Bulte
V         M. Jefferson Lewis
V         Mme Sarmite Bulte
V         Mme Maureen Parker
V         Mme Sarmite Bulte
V         Le président

1000
V         M. John Harvard (Charleswood —St. James—Assiniboia, Lib.)
V         M. Jefferson Lewis
V         Mme Maureen Parker
V         M. John Harvard
V         Mme Maureen Parker
V         M. John Harvard
V         Mme Maureen Parker
V         M. Alan Goluboff
V         M. John Harvard
V         M. Alan Goluboff

1005
V         M. John Harvard
V         M. Alan Goluboff
V         M. Jim McKee
V         Mme Maureen Parker
V         Le président
V         Mme Maureen Parker
V         Le président
V         Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD)

1010
V         Le président
V         M. Dennis Mills (Toronto--Danforth, Lib.)
V         Le président
V         M. Peter Grant
V         Mme Maureen Parker
V         M. Dennis Mills

1015
V         Mme Maureen Parker
V         M. Dennis Mills
V         Mme Maureen Parker
V         M. Jefferson Lewis
V         Le président

1020
V         M. Peter Sandmark (directeur national, Alliance de la vidéo et du cinéma indépendants)

1025

1030
V         Le président
V         M. Douglas Frith (président, Association canadienne des distributeurs de films)

1035

1040
V         Mme Susan Peacock (vice-présidente, Association canadienne des distributeurs de films)

1045

1050
V         M. Douglas Frith
V         Le président
V         Mme Betty Hinton

1055
V         M. Douglas Frith
V         Mme Betty Hinton
V         M. Peter Sandmark
V         M. Douglas Frith

1100
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         M. Douglas Frith
V         Mme Susan Peacock
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon

1105
V         Mme Susan Peacock
V         Mme Christiane Gagnon
V         Mme Susan Peacock
V         Le président
V         M. Dennis Mills

1110
V         M. Douglas Frith
V         M. Dennis Mills
V         M. Douglas Frith
V         M. Dennis Mills
V         M. Douglas Frith
V         Le président
V         M. John Harvard

1115
V         M. Douglas Frith
V         M. John Harvard
V         Mme Susan Peacock

1120
V         Le président
V         Mme Sarmite Bulte
V         M. Peter Sandmark
V         Mme Sarmite Bulte
V         M. Peter Sandmark
V         Mme Sarmite Bulte
V         M. Douglas Frith
V         Mme Sarmite Bulte
V         Mme Susan Peacock

1125
V         Mme Sarmite Bulte
V         Le président
V         M. Peter Murdoch (vice-président, Médias, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier)

1130

1135

1140
V         Le président
V         M. Peter Murdoch
V         Le président

1145
V         M. Peter Murdoch
V         Le président
V         Mme Jacqueline Turgeon (présidente, Syndicat des employés de bureau et professionnels de Radio-Canada; présidente, Conseil provincial du secteur des communications, Syndicat canadien de la fonction publique)
V         M. Armand Dubois (journaliste au réseau TVA à Montréal; Conseil provincial du secteur des communications, Syndicat canadien de la fonction publique)

1150

1155

1200

1205
V         Le président
V         Mme Wendy Lill
V         M. Peter Murdoch
V         M. Michael Sullivan (représentant national, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier)

1210
V         Le président
V         M. Bernard Chabot (journaliste à la station régionale de Québec du réseau TVA, Conseil provincial du secteur des communications, Syndicat canadien de la fonction publique)
V         Le président
V         M. Armand Dubois
V         Le président
V         M. Armand Dubois

1215
V         Le président
V         Mme Betty Hinton
V         M. Peter Murdoch
V         Mme Betty Hinton

1220
V         Le président
V         M. Réal Leboeuf (président, Syndicat des employés de TVA-Montréal (CUPE section locale 687), Conseil provincial du secteur des communications, Syndicat canadien de la fonction publique)
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         Le président
V         M. Dennis Mills
V         Le président
V         M. John Harvard

1225
V         Le président
V         Mme Jacqueline Turgeon
V         M. Armand Dubois
V         Le président
V         M. Dennis Mills
V         M. Armand Dubois
V         Le président
V         M. Jacques Denommé (premier vice-président, Syndicat des employés de Vidéotron; vice-président de la câblodistribution, Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique)

1230
V         Le président
V         M. Peter Murdoch
V         Le président
V         M. Armand Dubois
V         Le président
V         M. Armand Dubois
V         Le président

1235
V         M. Peter Murdoch
V         Le président
V         M. Gilles Valiquette (président, Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique)

1240
V         Mme Alexina Louie (compositeure de musique classique, Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique)

1245
V         M. Paul Spurgeon (vice-président, Services juridiques et chef du contentieux, Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique)

1250
V         Le président
V         M. Alexander Mair (membre du Conseil, Canadian Independent Record Production Association)

1255
V         Le président
V         M. Brian Robertson (président, Association de l'industrie de l'enregistrement)

1300
V         Le président
V         Mme Christiane Gagnon
V         M. Paul Spurgeon

1305
V         Le président
V         Mme Sarmite Bulte
V         M. Alexander Mair
V         Mme Sarmite Bulte
V         M. Alexander Mair
V         M. Brian Robertson

1310
V         M. Dennis Mills
V         Le président
V         M. Rodger Cuzner (Bras d'Or—Cape Breton, Lib.)
V         M. Paul Spurgeon
V         M. Brian Robertson
V         M. Rodger Cuzner
V         M. Alexander Mair

1315
V         Le président










CANADA

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 064 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 21 mai 2002

[Enregistrement électronique]

*   *   *

  + (0910)  

[Traduction]

prochaine intervention 

Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)):
    Bonjour. La séance est ouverte. Le Comité permanent du patrimoine canadien se réunit aujourd'hui pour poursuivre son étude de l'état du système de radiodiffusion canadien.

    Nous sommes très heureux d'accueillir aujourd'hui la Guilde canadienne des réalisateurs, qui est représentée par M. Alan Goluboff, président, Mme Pamela Brand, directrice exécutive nationale, et M. Peter Grant, conseiller juridique.

    Nous accueillons également les porte-parole de la Writers Guild of Canada: M. Jefferson Lewis, vice-président, Mme Maureen Parker, directrice exécutive, et M. Jim McKee, directeur des politiques et des communications.

prochaine intervention intervention précédente

    La matinée est donc très chargée, comme vous pouvez le voir d'après le nombre de témoins qui figurent à l'ordre du jour. Nous avons eu tellement de demandes de comparution que nous avons dû mettre autant de groupes que possible à l'ordre du jour de la séance d'aujourd'hui. Nous siégeons trois jours par semaine et quatre heures les mardi et jeudi. Nous demanderions donc, tant aux députés qui posent des questions qu'aux témoins qui nous présentent un exposé, d'être aussi brefs que possible pour que nous ayons suffisamment de temps pour les questions.

    Je vais commencer par la Guilde canadienne des réalisateurs, représentée par M. Goluboff.

prochaine intervention intervention précédente

M. Alan Goluboff (président, La Guilde canadienne des réalisateurs):
    Merci beaucoup.

    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité. Je m'appelle Alan Goluboff, et je suis président de la Guilde canadienne des réalisateurs. Je suis accompagné aujourd'hui de Pamela Brand, notre directrice exécutive nationale, et de Peter Grant, du cabinet McCarthy Tétrault, qui est notre conseiller juridique.

    La Guilde canadienne des réalisateurs est une organisation syndicale nationale qui représente le personnel clé de la création et de la réalisation cinématographique et télévisuelle. L'association, qui a été fondée en 1962 pour regrouper les réalisateurs de l'industrie du cinéma et de la télévision du Canada, compte aujourd'hui plus de 3 500 membres, répartis parmi 47 différentes catégories de métiers et de professions couvrant toute la gamme des activités de programmation cinématographique et télévisuelle au Canada, depuis la conception jusqu'à la production, en passant par le montage. Nous sommes très honorés de pouvoir témoigner devant vous aujourd'hui. Le système de radiodiffusion canadien est un véhicule important d'expression culturelle au Canada et il tient énormément à coeur aux Canadiens, à la Guilde et à ses membres.

    Le régime de réglementation de la radiodiffusion est une histoire de réussite extraordinaire pour le Canada. Nous pouvons nous enorgueillir d'avoir un secteur de télédiffusion qui est sous le contrôle et la direction d'intérêts canadiens et qui offre des émissions que les téléspectateurs canadiens veulent regarder. Le régime de réglementation de la radiodiffusion canadienne a aussi contribué au succès et à la croissance incroyable du secteur de la production indépendante au cours des 20 dernières années. Nous comptons maintenant plus de 400 membres à l'ACPFT, et le volume de la production indépendante au Canada s'établissait à plus de 1,8 milliard de dollars en 2001.

    Les producteurs canadiens indépendants créent des émissions de grand calibre appartenant à une multitude de genres. Notre dynamique secteur de la production indépendante est à l'origine d'émissions de télévision comme la mini-série sur Trudeau, Made in Canada, The Red Green Show, Blue MurderTom Stone et Degrassi: The Next Generation

    Ces succès de la télédiffusion canadienne et de la production canadienne indépendante sont directement liés à l'existence de règles et de politiques gouvernementales. Comme nous l'expliquons aux pages 5 à 7 de notre mémoire, ces mesures forment ce que l'on pourrait appeler le modèle canadien. Y sont inclus le soutien aux radiodiffuseurs publics, CBC/SRC; l'obligation pour les radiodiffuseurs au Canada d'être sous le contrôle et la direction d'intérêts canadiens; les exigences relatives au contenu canadien dans la programmation canadienne; les exigences relatives aux dépenses en programmation canadienne; les critères régissant l'entrée dans les foyers canadiens de signaux étrangers; et le soutien au secteur de la production indépendante.

    La Guilde félicite le comité permanent d'avoir entrepris à ce moment-ci d'étudier la Loi sur la radiodiffusion au Canada. Le visage de la radiodiffusion canadienne s'est véritablement transformé depuis 10 ans. Nous avons notamment été témoins de l'arrivée de dizaines de nouveaux services conventionnels, spécialisés et payants; de l'avènement de la télévision et de la distribution numériques; de la nouvelle omniprésence d'Internet; de la montée du commerce mondial; ainsi que de l'accroissement de l'intégration horizontale et verticale des entreprises de communications. Ces tendances donnent à penser que la transformation de notre système de radiodiffusion est loin d'être terminée.

    Il y a un changement que nous aimerions apporter au mémoire que nous avons déposé l'été dernier. À la page 7, nous nous disions optimistes quant aux problèmes des SRD au Canada. Le problème des services de radiodiffusion directe du marché noir et du marché gris s'est toutefois aggravé, au lieu de se résorber, et il continue de menacer l'avenir du système de radiodiffusion. Nous espérons que la récente décision de la Cour suprême du Canada conduira à la prise de mesures supplémentaires pour corriger la situation, qui se traduit par des pressions énormes sur nos distributeurs, nos stations de télévision de même que sur les producteurs indépendants canadiens.

    Malgré les changements survenus, la réglementation de la télédiffusion continue à être d'une grande pertinence et d'une grande importance si les Canadiens veulent compter sur un secteur de production solide.

    Je vais maintenant donner la parole à Pamela Brand, notre directrice exécutive nationale, qui vous présentera brièvement nos recommandations.

  + -(0915)  

prochaine intervention intervention précédente

Mme Pamela Brand (directrice exécutive nationale, Guilde canadienne des réalisateurs):
    Merci, Alan.

    Bonjour, mesdames et messieurs.

    Le mémoire que nous vous avons soumis contient bon nombre de recommandations, mais nous en avons retenu sept pour l'exposé de ce matin.

    Notre première recommandation concerne les mesures structurelles. La Guilde est fermement d'avis que ces mesures devraient être maintenues. Il s'agit notamment de l'attribution de licences et de la réglementation par le CRTC, des règles d'investissement et des autres mesures de discrimination positive qui favorisent les émissions canadienne et les fournisseurs de service canadiens. Nous ne sommes pas d'accord pour dire que le rôle du gouvernement canadien dans le secteur culturel devrait se limiter à l'octroi de subventions.

    Deuxièmement, notre régime de réglementation devrait comprendre des mesures de soutien à la création et à la présentation de genres prioritaires, comme les émissions dramatiques, les émissions pour enfants, les émissions musicales et de variétés, les émissions humoristiques et les longs documentaires. Les mécanismes prévus pour le financement et la présentation de ces émissions devraient être maintenus.

    En outre, tous les radiodiffuseurs privés devraient être tenus de contribuer de façon importante à la production et à la présentation d'émissions canadiennes, notamment d'émissions dramatiques canadiennes. Nous incluons dans ce nombre les radiodiffuseurs conventionnels, les stations de télévision hertziennes comme CTV, CanWest Global, TVA, TQS, CHUM et Craig, de même que les services payants et spécialisés.

    Les entreprises de distribution doivent également continuer à contribuer aux fonds d'aide à la production afin d'assurer la diversité de la programmation dans notre système de radiodiffusion. Le Fonds canadien de télévision dont le budget provient en grande partie des distributeurs privés, a contribué au financement de beaucoup d'émissions canadiennes populaires, comme Cold Squad, Da Vinci's Inquest et Un gars, une fille. Selon nous, les services de programmation comme les services de télé à la carte et de vidéo sur demande devraient aussi être tenus de contribuer au financement de la création d'émissions canadiennes.

    Notre troisième recommandation concerne la Société Radio-Canada. Notre radiodiffuseur public canadien doit pouvoir continuer à compter sur l'aide gouvernementale. Radio-Canada et CBC demeurent une des pierres angulaires de notre patrimoine culturel canadien et doivent pouvoir compter sur une aide financière accrue et permanente afin de pouvoir présenter des émissions canadiennes appartenant aux genres prioritaires.

    Quatrièmement, l'aide à la production et à la présentation de longs métrages canadiens devrait être accrue. Les fonds nécessaires devraient provenir, non pas seulement des titulaires canadiens de licences de télévision payante, mais aussi des télédiffuseurs hertziens qui devraient, eux aussi, être tenus d'apporter leur contribution. La Guilde recommande qu'à l'avenir les radiodiffuseurs ne puissent obtenir le renouvellement de leurs licences de télédiffusion qu'à condition qu'ils s'engagent à consacrer au moins un certain montant aux longs métrages canadiens.

    Notre cinquième recommandation porte sur l'accès. Il est important pour la réussite de notre système que les entreprises de distribution assurent un accès équitable à tous les services de programmation canadienne titulaires d'une licence. Les services de télé à la carte et de vidéo sur demande devraient également être tenus de faire une place acceptable à la programmation canadienne dans le genre d'émissions qu'ils offrent à leurs clients.

    Sixièmement, la Guilde est d'avis que le CRTC devrait chercher à multiplier le nombre de portes offertes aux producteurs indépendants afin d'accroître la diversité des voix dans le système de radiodiffusion canadien.

    Notre septième et dernière recommandation concerne l'investissement et le commerce international. Dans les négociations commerciales internationales, le Canada devrait insister pour pouvoir maintenir les mesures de financement et de soutien structurel aux secteurs de la radiodiffusion, y compris aux entreprises de distribution de radiodiffusion. À cet égard, le gouvernement canadien devrait appuyer sans ambages l'idée de créer un nouvel instrument sur la diversité culturelle afin de préserver le droit des États à protéger et à aider leurs industries culturelles.

  + -(0920)  

    La Guilde canadienne des réalisateurs recommande avec insistance que les mesures de réglementation destinées à appuyer la production télévisuelle et indépendante canadienne soient maintenues afin d'assurer aux Canadiens un système de radiodiffusion encore plus riche et plus fort.

    Les politiques et les règles relatives à la télévision sont très complexes. Pour contribuer à une meilleure compréhension des obligations qui en découlent, la Guilde a accordé une somme considérable en guise de contribution à la publication d'un nouveau document expliquant les obligations des télédiffuseurs. Ce document a été rédigé par le cabinet McCarthy Tétrault. Nous sommes heureux d'en remettre gratuitement un exemplaire à chacun des membres du comité permanent.

    Merci. Nous serons heureux de répondre aux questions que vous voudrez nous poser.

prochaine intervention intervention précédente

Le président:
    Merci beaucoup pour votre exposé, surtout pour les recommandations. Elles sont très claires et nous présentent un message très important qui, je tiens à vous en assurer, recevra toute notre attention.

    Pour ce qui est de la publication, malheureusement, les règles de la Chambre des communes prévoient que tous les documents doivent être disponibles dans les deux langues avant de pouvoir être distribués. Auriez-vous des exemplaires en français de votre document?

prochaine intervention intervention précédente

M. Peter Grant (conseiller juridique, La Guilde canadienne des réalisateurs):
    Malheureusement, monsieur le président, McCarthy Tétrault, qui publie ce document tous les deux ans, le faisait en français jusqu'à il y a quatre ou cinq ans, mais nous ne recevons plus de subventions du gouvernement ni de quiconque pour cela, et on nous demandait si peu d'exemplaires en français, que nous avons cessé de le produire dans les deux langues pour des raisons d'ordre pratique.

    Le document fait toutefois état de tous les services français aussi bien que des services anglais. Le document renvoie constamment le lecteur au site Web, où il peut trouver toute l'information en français. Si vous vous reportez aux renvois qui figurent dans chaque document, vous verrez qu'on vous invite à consulter le site Web, où vous pouvez trouver essentiellement la même information en français.

prochaine intervention intervention précédente

Le président:
    Malheureusement, nous ne pourrons pas le distribuer tel quel.

    Madame Gagnon.

[Français]

prochaine intervention intervention précédente

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ):
     Vous dites que vous avez une version qui date déjà d'il y a quatre ans. Est-ce que cette version est acceptée? Ce document a-t-il été mis à jour?

[Traduction]

prochaine intervention intervention précédente

M. Peter Grant:
    Non, c'est la première fois que nous produisons la version en question dans cette langue.

prochaine intervention intervention précédente

Le président:
    Nous allons maintenant entendre le porte-parole de la Writers Guild of Canada, M. Lewis ou Mme Parker.

prochaine intervention intervention précédente

Mme Maureen Parker (directrice exécutive, Writers Guild of Canada):
    C'est moi qui vais commencer. Merci.

    Bonjour, mesdames et messieurs. Merci de nous donner l'occasion de témoigner devant votre comité. L'étude que vous avez entreprise sur l'état du système de radiodiffusion canadien est une étude très importante.

    Nous sommes la Writers Guild of Canada, et nous témoignons devant vous aujourd'hui au nom des scénaristes canadiens de langue anglaise. Je m'appelle Maureen Parker et je suis la directrice exécutive de la Writers Guild. Je suis accompagnée de Jefferson Lewis, notre vice-président, qui est aussi un scénariste réputé, ayant à son actif de nombreuses productions en anglais et en français, y compris Les Noces de papier et Democracy on Trial: The Morgentaler Affair, ainsi que de Jim McKee, directeur des politiques et des communications de la Guilde.

    La WGC est l'organisation nationale qui représente plus de 1 600 scénaristes professionnels travaillant dans le domaine du cinéma, de la télévision, de la radio et des nouveaux médias au Canada. En tant qu'organisation syndicale, la WGC a depuis 35 ans des conventions collectives en place avec la communauté des producteurs indépendants de même qu'avec la SRC, CTV et Global.

    Personne n'est plus intéressé au succès du système de radiodiffusion canadien que les auteurs canadiens. C'est par l'entremise des radiodiffuseurs publics et privés du Canada que les auteurs atteignent leur auditoire premier et primordial: les Canadiens. Naturellement, tous les auteurs souhaitent atteindre le plus vaste auditoire possible partout au monde, mais le principal objectif des auteurs canadiens est de communiquer avec les Canadiens, qui seront les plus interpellés par leurs histoires.

    Pour que le Canada puisse continuer à exister et à s'épanouir en tant que société, il faut que les membres de cette société puissent continuer à se raconter les uns aux autres et à aborder des thèmes bien de chez eux. Parce qu'il a pour voisin les États-Unis, qui sont le plus important producteur de films et d'émissions de télévision au monde, le Canada a à relever des défis que n'ont pas à relever les autres pays du monde.

    Il est bien sûr important que les Canadiens aient accès à leurs émissions de nouvelles et d'affaires publiques bien à eux ainsi qu'à des émissions qui reflètent leur expérience locale et régionale, mais ils doivent aussi avoir la possibilité de regarder des émissions dramatiques canadiennes. Ce sont les émissions dramatiques qui continuent à attirer le plus de téléspectateurs pendant les heures de grande écoute, et si les Canadiens n'ont pas accès à des émissions dramatiques de chez eux, ils vont regarder des émissions dramatiques américaines.

    Le Canada a un excellent système de distribution de télédiffusion, une infrastructure câblée bien établie de même que des système de distribution par satellite qui prennent rapidement de l'ampleur. Il a aussi un radiodiffuseur public, la SRC/CBC, qui offre une programmation exclusivement canadienne pendant les heures de grande écoute, et il a une bonne brochette de radiodiffuseurs privés, tant conventionnels que spécialisés, qui sont en bonne posture financière.

    À notre avis, l'actuel cadre politique et réglementaire a très bien servi les Canadiens en leur assurant un système de radiodiffusion sous le contrôle et la direction d'intérêts canadiens. Ce cadre devrait être maintenu. Le bilan n'est toutefois pas aussi reluisant quand il s'agit de présenter des émissions canadiennes. Le contexte est de moins en moins propice à la présentation d'émissions canadiennes, notamment d'émissions dramatiques et de documentaires d'opinion proprement canadiens.

    Ces trois dernières années, la production de séries dramatiques d'une heure qui sont proprement canadiennes est tombée du nombre record de 11 atteint en 1999 à 5 par année pour chacune des trois dernières années. Pendant cette même période, la production d'émissions dramatiques d'une demi-heure n'a pas bougé.

    Le documentaire long est soumis à des pressions semblables. Il est de plus en plus difficile de produire et de diffuser des documentaires d'opinion, un genre où les Canadiens excellent et qu'ils ont été les premiers à présenter.

    Avec l'arrivée de dizaines de nouvelles chaînes spécialisées et la fragmentation des auditoires, les radiodiffuseurs ont de plus en plus recours à des séries documentaires peu coûteuses de style magazine pour meubler leur grille horaire. Un certain nombre de facteurs ont contribué à la baisse des émissions dramatiques et des documentaires d'opinion canadiens. Il y a notamment eu la politique sur la télévision que le CRTC a adoptée en 1999. Cette nouvelle politique imposait un minimum de huit heures par semaine d'émissions prioritaires canadiennes pendant les heures de grande écoute, mais elle élargissait du même coup la définition de programmation prioritaire de manière à y inclure des genres moins coûteux, comme les émissions régionales et les émissions de divertissement de type magazine.

  + -(0925)  

    Le CRTC, dans sa nouvelle politique, ayant omis d'établir des exigences de dépenses à leur intention, les radiodiffuseurs classiques ont trouvé naturellement intéressant de respecter les exigences de programmation canadienne en choisissant la forme de programmation le meilleur marché possible. Ainsi, nous avons droit actuellement à des émissions comme Popstars, et No Boundaries, émissions de télévérité dont le principal objectif semble de vendre ou de commercialiser les VLT de Ford.

    D'autres facteurs expliquent le déclin des émissions dramatiques locales. Après des compressions budgétaires à répétition, la SRC n'a pas pu maintenir son rôle de principal radiodiffuseur canadien d'émissions dramatiques. En outre, en raison de nombreux regroupements de sociétés, il ne nous reste plus que quelques sociétés de distribution. Celles qui restent ne s'intéressent plus à la promotion de productions locales à moins de pouvoir compter sur une prévente internationale, ce qui est de plus en plus difficile à garantir.

    L'élément positif dans tout cela a été la décision du gouvernement fédéral en 1996 de créer le Fonds canadien de télévision. Le FCT a joué un rôle capital pour contrer ces pressions, en rendant possible le maintien d'un noyau de production dramatique canadienne de même que de documentaires d'opinion, d'émissions de variétés et d'émissions à l'intention des jeunes et des enfants. Mais l'investissement dans le FCT doit être régénéré grâce à un engagement plus sérieux de la part des radiodiffuseurs privés. On devrait exiger des radiodiffuseurs privés, en échange de la licence accordée et de la possibilité lucrative de diffuser simultanément des émissions américaines à des auditoires canadiens, qu'ils offrent un appui financier conséquent à la production locale et qu'ils lui donnent une place de choix dans leur horaire.

    Jefferson.

  + -(0930)  

[Français]

prochaine intervention intervention précédente

M. Jefferson Lewis (vice-président, Writers Guild of Canada):
    Merci de nous donner l'occasion de participer à cette importante discussion.

[Traduction]

    Parce que je suis scénariste et que je vis et travaille au Canada, on me demande pourquoi je reste ici et c'est la question la plus fréquente qu'on me pose. Tout le monde sait que la poule aux oeufs d'or se trouve à Hollywood. Je réponds que je suis Canadien et que je préfère écrire sur les invasions des fénians ou adapter un roman de Robertson Davies plutôt que d'écrire des scénarios sur les crimes et châtiments dans les rues de New York.

    On entend répéter que les Canadiens ne regardent pas les émissions dramatiques et documentaires canadiens, mais si on leur offre quelque chose, ils regardent ce que nous écrivons. Nous ne manquons pas de créativité ou de talent. Le problème se trouve du côté de la distribution et de la prestation. C'est aussi simple que cela. Quand les émissions et les films faits par des Canadiens sont offerts aux auditoires canadiens, l'accueil est extrêmement enthousiaste. CBC a eu des cotes appréciables, plus d'un million de téléspectateurs, pour les mini-séries sur Trudeau et d'autres émissions commeThe Last Chapter et Random Passage. Pendant des années, l'émission Royal Canadian Air Farce a attiré 1,2 million de spectateurs par semaine. This Hour Has 22 Minutes et Da Vinci's Inquest ont bénéficié également de cotes d'écoute élevées. La chaîne CTV a également attiré plus de 1 million de téléspectateurs pour deux films canadiens, pour ses spectacles de la semaine comme le film Lucky Girl et pour ses documentaires, comme The Parkinson's Enigma.

    Pourquoi ces émissions ont-elles eu un tel succès? C'est parce qu'elles ont bénéficié d'un battage publicitaire énorme et qu'elles étaient présentées aux heures de grande écoute, et non pas le samedi soir, en même temps qu'un match de hockey, et qu'elles n'étaient pas prévues en même temps qu'une série américaine populaire. Le Canada dispose d'un système de distribution parfaitement capable d'offrir aux Canadiens le choix d'une programmation canadienne et internationale complète, mais les radiodiffuseurs doivent accroître leur appui financer à ces émissions et leur donner la chance d'être vues à des heures de grande écoute.

    Dans le climat actuel, la tentation d'aller à Los Angeles, qui est toujours une possibilité pour les scénaristes canadiens, est à son comble. Si nous voulons que les scénaristes canadiens restent au Canada, il faut leur donner l'occasion d'exercer leurs talents et de nourrir leurs familles.

    Quand on parle d'une communauté canadienne de scénaristes, il faut songer en même temps à équilibrer les objectifs culturels et industriels de la radiodiffusion, en particulier les relations entre les émissions dramatiques locales et les émissions industrielles d'une heure, c'est-à-dire faites pour l'exportation. C'est ainsi qu'on décrit dans le jargon une série qui est orientée vers la vente et sur le marché international. Il s'agit essentiellement de science-fiction, de fiction-imagination et de séries d'aventures qui ne comportent pas de connotation canadienne évidente dans le scénario. Pour défendre ce type de production télévisuelle, on dit qu'elle permet de créer des emplois et d'appuyer une infrastructure de production qui sert elle-même à la production et à la création d'oeuvres qui reflètent le Canada.

    Malheureusement, ce genre d'émissions ne créent pas de travail pour les scénaristes canadiens. Ces émissions peuvent être étiquetées canadiennes, en vertu des règles actuelles du contenu canadien mais elles sont essentiellement créées et écrites à Los Angeles. Nos statistiques démontrent que 75 p. 100 des contrats pour les scénarios de ces émissions sont donnés à des scénaristes à l'extérieur du Canada.

    Si une émission n'est pas écrite par un scénariste canadien, elle n'est pas canadienne. C'est l'essentiel et ce sera toujours l'essentiel de notre argumentation. Les émissions et les films pour la télévision sortent de l'imagination fertile des scénaristes. Les scénaristes se servent d'une page blanche et ensuite les producteurs, les metteurs en scène et les acteurs donnent vie au scénario—sans scénario, par d'émission, pas de film. Si le Canada souhaite maintenir et consolider une véritable production télévisuelle locale, il est impératif que les émissions et les films, en plus d'être produits ici, soient également créés et élaborés ici—par des Canadiens. Sans un bassin de créateurs sur place pour écrire et élaborer des scénarios, nous ne pourrons pas avoir une industrie locale viable.

    La tendance vers un contenu canadien «fait en Amérique» s'accentue à un rythme alarmant. En 2000, sur 1 531 membres, 361 étaient américains, une augmentation de 250 p. 100 par rapport à la situation sept ans plus tôt. Ces scénaristes ont adhéré à la Guilde parce qu'ils travaillent à des productions canadiennes créant un prétendu contenu canadien.

  + -(0935)  

    Nous, les scénaristes de la Guilde, estimons qu'il est temps de hausser la barre de la définition d'une émission canadienne. Pour qu'une émission porte l'étiquette canadienne, sa production, sa mise en scène, le jeu des comédiens et le scénario devraient être l'oeuvre de Canadiens.

    Merci.

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Mme Maureen Parker:
    En conclusion, le Canada jouit d'un excellent système de distribution pour la télévision, mais il faut mettre davantage d'accent sur le contenu, pour réaliser le plein potentiel de ce système qui donne aux Canadiens la possibilité de reconnaître leur propre vécu dans ce qu'ils regardent.

    Malgré notre excellent système de distribution, le climat pour les émissions dramatiques et les documentaires d'opinion locaux est devenu de plus en plus difficile. Notre radiodiffuseur public national doit pouvoir compter sur un financement stable à long terme si nous voulons qu'il puisse s'acquitter de son mandat à cette égard. Les radiodiffuseurs privés doivent s'engager sincèrement à l'égard du système en échange de leurs licences lucratives.

    En outre, il faut modifier la définition de contenu canadien afin que la production dramatique industrielle serve les intérêts des créateurs locaux plutôt que de ceux qui sont basés à Los Angeles.

    Merci beaucoup. Nous répondrons volontiers à vos questions.

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Le président:
    Merci.

    Vous avez dit que les statistiques montrent que 75 p. 100 des contrats étaient donnés à des scénaristes vivant à l'extérieur du Canada, ce qui illustre de façon spectaculaire ce que vous essayez de dire. Nous vous remercions de votre exposé. Il nous donnera certainement matière à réflexion.

    Avant de passer aux questions, il me faudrait régler une petite question d'intendance. Il faut le quorum et nous l'avons. Comme vous le savez, nous avions adopté une motion portant que le sous-comité des sports ne peut pas siéger en même temps que le comité principal, pour éviter que les membres du comité n'ait des conflits. Malheureusement, notre horaire est très serré, et nous devons prévoir une réunion du sous-comité qui se penche sur la Loi sur les sports dont nous sommes saisis en même temps qu'une réunion du comité principal au cours de laquelle nous entendrons M. Keeble demain.

    Je vous demande le consentement unanime pour déposer une motion, sans préavis, afin de permettre au sous-comité des sports de siéger demain à 15 h 30, en même temps que le comité principal. Nous n'avons pas le choix. L'horaire ne permet pas un autre moment.

    Sommes-nous tous d'accord?

[Français]

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Mme Christiane Gagnon:
    Je suis d'accord, monsieur le président, parce qu'il y a déjà un autre député du Bloc québécois qui va siéger à ce comité, mais ce n'est pas le même porte-parole qui s'occupe du dossier de la Loi sur la radiodiffusion et de celui du sport. Je ne sais pas si c'est la même chose.

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Le président:
    Ce n'est pas toujours la même chose.

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Mme Christiane Gagnon:
    Je n'y vois aucun inconvénient: c'est quelqu'un d'autre qui va y aller.

  + -(0940)  

[Traduction]

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Le président:
    Ainsi, à l'unanimité, le comité accepte que le sous-comité siège?

    Des voix: D'accord.

    Le président: Soit. Merci.

    Nous passons aux questions, avec M. Abbott.

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M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne):
    Je n'ai pas de questions à poser pour l'instant.

    Le président: Madame Hinton.

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Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne):
    Bonjour. Votre exposé a été fort intéressant. Je n'ai jamais été déçue par les exposés faits devant le comité.

    Une de vos remarques a piqué ma curiosité. Vous avez dit que si un scénario n'était pas d'un auteur canadien, il n'était pas canadien. Je ne suis pas sûre d'être d'accord avec vous là-dessus. Si c'était la ligne de conduite adoptée par les Américains, beaucoup de scénaristes canadiens ne pourraient pas écrire aux États-Unis non plus. Il se peut que nous ne soyons pas du même avis concernant ce qui représente un contenu canadien, mais je comprends très bien votre orientation. Nous voulons protéger les scénaristes canadiens. Je peux très bien comprendre cela.

    Vous avez parlé tout à l'heure de succès. Je voulais vous demander comment vous définissez le succès. J'ai écouté vos remarques et j'en déduis que vous estimez qu'un million de téléspectateurs constitue un succès pour une émission canadienne. Est-ce que je me trompe?

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Mme Maureen Parker:
    Oui, pour ce qui est des cotes canadiennes, c'est le cas.

    Pour répondre à votre première question, la différence entre les deux systèmes, naturellement, c'est que nous travaillons dans un milieu protégé, subventionné, car notre pays est beaucoup moins peuplé. Donc, si c'était entièrement ouvert aux scénaristes non canadiens, je ne sais pas vraiment ce que l'on regarderait ou à quoi cela servirait d'avoir un pays distinct.

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Mme Betty Hinton:
    Devrions-nous nous inquiéter alors du fait que les émissions canadiennes ont un auditoire moins vaste que les émissions étrangères aux heures de grande écoute? Est-ce une chose dont nous devrions réellement nous inquiéter, à votre avis?

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M. Jefferson Lewis:
    Absolument. Les émissions canadiennes, lorsqu'on en fait le même genre de promotion que pour les émissions américaines, attirent inévitablement une auditoire aussi important. Tout ce qui nous arrive de l'autre côté de la frontière fait l'objet d'une publicité et d'une promotion constantes, et les budgets sont énormes, en comparaison.

    Les émissions canadiennes connaissent un succès extraordinaire lorsqu'on leur en donne la chance.

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Mme Betty Hinton:
    Je regarde avec beaucoup de plaisir un certain nombre d'émissions canadiennes. Je suis certainement d'accord avec ce que vous dites.

    J'ai regardé un film dans l'avion l'autre jour que vous pourriez peut-être définir pour moi. J'ai oublié le titre, mais cela se passait à Terre-Neuve, et c'était joué par des acteurs américains et canadiens.

    M. Jim Abbott:The Shipping News.

    Mme Betty Hinton: C'est cela. Je ne sais pas s'il s'agit d'une production canadienne ou d'une production américaine.

    M. Jefferson Lewis: C'est une production américaine.

    Mme Betty Hinton: C'était au sujet de Canadiens, alors j'ai trouvé cela très intéressant.

    Au début de votre exposé, vous avez exprimé des préoccupations au sujet du marché gris et du marché noir au niveau de la programmation. Nous en parlons constamment au comité du patrimoine, et je suis d'accord avec vous lorsque vous dites qu'il faut faire quelque chose à ce sujet. Ne croyez-vous pas cependant que c'est un peu tard?

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M. Peter Grant:
    Je peux peut-être répondre à cette question. J'ai travaillé directement aux modifications à la Loi de 1991 sur la radiocommunication, et cette question posait un problème. Comme vous le savez, il a fallu 10 ans pour que l'ambiguïté de cet article soit soulevée et soit enfin résolue devant la Cour suprême du Canada.

    Cela nous a vraiment empêchés, jusqu'ici, de nous en prendre vraiment aux vendeurs d'antennes paraboliques qui, au dire de nombreuses personnes, raconteraient une histoire frauduleuse à leurs clients. On leur a dit que cela ne posait pas de problème, qu'ils ne violaient aucune loi et que cela ne leur poserait aucun problème, même si tout le monde sur le marché gris indique en fait frauduleusement que leur adresse n'est pas au Canada. Naturellement, sur le marché noir, personne ne paie un sou pour quoi que ce soit.

    Depuis que la Cour suprême du Canada a défini la signification du terme, la seule question qu'il reste à régler est celle de la Charte. Je pense que ces vendeurs n'ont pas un argument très solide en vertu de la Charte, étant donné que lorsqu'on analyse la situation, les deux distributeurs d'émissions américaines au Canada, le Dish Network et DIRECTV, ont eux-mêmes indiqué qu'ils ne souhaitaient pas desservir les Canadiens.

    Il s'agit donc là d'un genre de travestissement du concept de la liberté d'expression, lorsqu'on tente de dire à un tribunal qu'il devrait protéger la liberté d'expression de quelqu'un qui ne veut pas l'exprimer, et qu'il considère en fait qu'il s'agit d'une conversation encodée qui ne devrait pas être partagée.

    Les tribunaux finiront par maintenir l'interprétation que nous avons toujours jugée applicable, ce qui donnera aux instances les outils nécessaires pour s'en prendre aux vendeurs d'antennes paraboliques.

  + -(0945)  

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Le président:
    Madame Gagnon.

[Français]

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Mme Christiane Gagnon:
     Merci pour vos présentations.

    J'ai une question sur le 75 p. 100 de rédacteurs qui sont à Los Angeles. Ça nous fait un peu sursauter quand on voit qu'un nombre aussi élevé de rédacteurs se trouvent à Los Angeles.

    Est-ce que ce sont des Canadiens? Dans le cadre du Fonds canadien de télévision, des points sont alloués quand la production, la rédaction et la scénarisation sont faites au Canada. Est-ce qu'à ce moment-là, il y a une perte de points pour la subvention qui est accordée par le Fonds canadien de télévision ou s'il y a une façon de contourner cela et qu'ils ont droit au même nombre de points qu'un rédacteur canadien?

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M. Jim McKee (directeur des politiques et communications, Writers Guild of Canada):
    Pour ce qui est de ce 75 p. 100, nous parlons de productions qui ne se qualifient pas pour des subventions du Fonds canadien de télévision étant donné qu'on utilise des scénaristes américains. Nous parlons de productions industrielles qui peuvent bénéficier des crédits d'impôt. Il leur faut atteindre un niveau de 6 sur 10 pour se qualifier. Donc, on peut y arriver sans utiliser des scénaristes canadiens.

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Mme Christiane Gagnon:
    Autant la Guilde canadienne des réalisateurs que la Writers Guild of Canada disent qu'elles ont à coeur le système de radiodiffusion, tant privé que public. Le lock-out à Radio-Canada nous interpelle quant à l'avenir de la radiodiffusion publique. Il n'y a pas seulement le fait que l'on diffuse un contenu canadien, mais aussi la question de la production interne. Est-ce qu'elle se fait à Radio-Canada ou à l'externe? Cette problématique vous concerne-t-elle? Si on donne un contrat au secteur privé pour faire une émission, si tout se fait à l'externe et que le radiodiffuseur public n'en porte que le nom et n'a pas d'équipe de production interne, est-ce qu'on peut encore parler d'un télédiffuseur public? C'est aussi cela, l'enjeu de Radio-Canada.

[Traduction]

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Mme Maureen Parker:
    Nous appuyons certainement la Société Radio-Canada comme diffuseur public, mais nous ne croyons pas qu'elle doive être responsable de la production de programmation également. En fait, d'après notre expérience, nous constatons que les choses fonctionnent très bien lorsque les émissions sont produites par des producteurs indépendants à l'extérieur de la SRC--mais qui travaillent avec la SRC pour produire des émissions qui sont présentées à la SRC. Il n'est pas essentiel que la SRC soit également producteur d'émissions canadiennes. À notre avis, cela fonctionne mieux lorsque des indépendants produisent les émissions.

[Français]

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M. Jefferson Lewis:
    Nous sommes en train de faire une distinction entre les nouvelles et les émissions dramatiques ou les documentaires à long terme. CBC et Radio-Canada sont tout à fait d'accord. Depuis quelque temps, elles mettent de plus en plus l'accent sur la production externe. Les nouvelles, évidemment, doivent être faites par Radio-Canada et CBC elles-mêmes. Aucune agence privée ne pourrait assumer le coût d'une programmation de nouvelles à ce niveau-là.

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Mme Christiane Gagnon:
    Vous savez qu'au Québec, une production très importante est faite par Radio-Canada, autant à la radio qu'à la télévision. On sait que ce n'est pas l'orientation qu'on a voulu prendre à CBC, mais cela a eu un impact énorme, parce qu'au Canada anglais, on déplore le fait qu'il n'y a pas autant de production interne à CBC.

    Cela viendrait aussi bouleverser la manière de faire au Québec, parce que si on ne produit plus à Radio-Canada français, cela aura un impact sur les productions qui pourraient être envoyées à l'extérieur du Canada et dans les communautés francophones hors Québec. C'est la crainte qui a été exprimée par ceux qui travaillent à la production publique. Si on n'a pas les équipes nécessaires pour tourner et quelques infrastructures, cela veut dire la mort d'une certaine production de qualité à Radio-Canada.

  + -(0950)  

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M. Jefferson Lewis:
    Vous avez tout à fait raison. Je pense que cela souligne le fait que la situation à Radio-Canada est très différente de celle à CBC en termes de possibilités de capter un auditoire et en termes de problèmes spécifiques pour les gens qui travaillent dans le milieu.

[Traduction]

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Le président:
    Ms. Bulte.

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Mme Sarmite Bulte (Parkdale--High Park, Lib.):
    Merci, monsieur le président.

    Je vous remercie tous les deux pour ces exposés très instructifs et je dirais même passionnés.

    J'aimerais commencer par vous, madame Brand. Vous avez aujourd'hui utilisé un terme que je n'avais pas entendu depuis longtemps dans le domaine des arts et de la culture. Vous avez utilisé le terme «subventions». Nous n'utilisons pas ce terme lorsque nous parlons d'investir dans la santé ou l'éducation. Bien que je comprenne les problèmes de commerce international que nous pourrions avoir, particulièrement par rapport à l'ALENA et le droit de représailles, je pense qu'il s'agit là d'un terme des années 60. Si nous voulons nous tourner vers l'avenir, nous devons investir dans nos réalisateurs, dans nos scénaristes. Je pense que nous ne nous rendons pas service lorsque nous parlons de subventions.

    En ce qui a trait au nouvel instrument sur la diversité culturelle, comme vous le savez, la ministre a mis sur pied son réseau international sur la politique culturelle en 1998. À l'heure actuelle, on est en train de préparer un projet d'entente. Elle travaille à la fois avec la Conférence canadienne des arts et avec le groupe de M. Pilon au Québec. Nous espérons que l'ébauche sera présentée en Afrique du Sud.

    Permettez-moi de vous poser une question. Au cours de votre exposé, vous avez parlé de la nécessité pour les radiodiffuseurs de subventionner un long métrage canadien ou d'y investir un montant minimum. Il y a environ 18 mois, je crois, le Fonds de financement de longs métrages canadiens a été créé pour la production de longs métrages—du scénario à l'écran—en passant par la distribution et le marketing. Ce que les radiodiffuseurs vous diront, et ce qu'ils nous ont dit, c'est que le CRTC a déjà des fonds excédentaires provenant des droits de licence de radiodiffusion. Pourtant, nous avons un projet de loi d'initiative parlementaire qui vise à s'assurer que les intervenants dans le domaine de la radiodiffusion aient de l'argent.

    Pourquoi est-ce que ça devrait toujours être les radiodiffuseurs? C'est la question que je pose. N'existe-t-il pas d'autres moyens ou d'autres mesures incitatives pour s'assurer que l'on recoure aux réalisateurs et scénaristes canadiens plutôt que...? Si vous croyez que les radiodiffuseurs devraient participer au fonds, alors pourquoi le Fonds de financement de longs métrages canadiens ne fonctionne-t-il pas?

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M. Alan Goluboff:
    Pour répondre à la dernière partie de votre question, c'est-à-dire pourquoi le Fonds de financement de longs métrages canadiens ne fonctionne pas--si effectivement il ne fonctionne pas, et je ne suis pas certain que ce soit le cas--la production de longs métrages au Canada est tout à fait différente de la production d'émissions de télévision. Nous avons certainement eu un certain succès ces dernières années en ce qui a trait à la production télévisuelle. Pour ce qui est de la production de longs métrages, peu importent les succès que nous avons eus avec des cinéastes... même aujourd'hui, Atom Egoyan est à la une du National Post. Il a toujours du succès sur la scène tant nationale qu'internationale.

    La vaste majorité des cinéastes au Canada qui travaillent dans le secteur des longs métrages n'ont pas de sécurité ni de succès financiers, parce que leurs films ne sont pas présentés dans les cinémas. C'est un tout autre problème. Ils ne le sont pas parce qu'aucune réglementation n'encourage la présentation de longs métrages canadiens dans les cinémas canadiens.

    Pour la télévision, c'est tout à fait différent, et nous avons eu du succès, à notre avis, car les organes de réglementation se sont engagés à présenter des émissions canadiennes sur les ondes. Ils ont conçu toutes sortes de mécanismes qui sont de toute évidence très complexes, comme tout le monde le sait, mais qui ont un certain succès. Nous avons certainement fait allusion à un certain nombre d'émissions qui ont eu beaucoup de succès aux deux organisations.

    Je pense que tout ce que nous disons, c'est que nous voulons nous assurer que le même engagement est maintenu sur le plan de la réglementation; car c'est grâce à l'engagement des gouvernements sur le plan de la réglementation que la télévision canadienne peut en fait exister.

prochaine intervention intervention précédente

M. Peter Grant:
    Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter une chose. Du point de vue international, certains de nos partenaires commerciaux se sont retrouvés face au même problème. Je pense notamment au Royaume-Uni et à la France. Au Royaume-Uni, comme bon nombre d'entre vous le savent, la BBC et Channel 4 se sont faits un devoir de produire et de commander des films qui sont présentés d'abord dans les cinémas, lorsque cela est possible; dans le cas contraire, ils sont présentés à la BBC ou sur le Channel 4. Ils sont considérés comme des mécanismes de financement essentiels pour ces films.

    De la même façon en France, au niveau de la télévision payante, Canal Plus contribue considérablement à toute l'industrie cinématographique française, mais s'attend également à ce que tous ses radiodiffuseurs en direct financent les films commerciaux en France. La France a sans doute le pourcentage le plus élevé de succès pour ses films locaux—plus de 40 p. 100—que tout autre pays au monde. Il s'agit là d'un succès assez stupéfiant, si l'on considère jusqu'à quel point il est difficile pour les pays européens de faire concurrence à Hollywood, comme tous les autres pays d'ailleurs.

    Franchement, il s'agit là d'une facette de l'aide gouvernementale, non seulement au moyen de subventions mais également en imposant des exigences à la télévision payante et aux émissions spécialisées de Canal Plus et en exigeant que les radiodiffuseurs privés financent des longs métrages. Voilà l'élément qui manque au Canada. Nous exigeons que les titulaires de licence de télévision payante financent les longs métrages. Ces paiements ont augmenté récemment à la suite du renouvellement des licences de Movie Network et de Movie Central. Mais en ce qui concerne les radiodiffuseurs classiques, on n'exige toujours pas qu'ils financent des longs métrages.

  + -(0955)  

prochaine intervention intervention précédente

M. Jefferson Lewis:
    Puis-je répondre brièvement à la même question, puisque vous parlez de longs métrages?

    Mme Sarmite Bulte: J'ai aussi une petite question à vous poser.

    M. Jefferson Lewis: Très bien.

    Eh bien, les statistiques les plus récentes que j'ai vues en ce qui concerne...et il est plutôt gênant de travailler dans un secteur où il faut constamment être soutenu par ce genre de protections, par ce genre d'investissement. Lorsqu'on écrit un scénario ou qu'on produit un film, la mesure du succès c'est que les gens vont le voir, ce qui signifie, lorsque les choses vont bien, que le film rapporte de l'argent et que cet argent devrait être récupéré afin de permettre aux producteurs d'émissions à succès d'investir dans d'autres émissions.

    Avec les subventions, on admet que le système ne fonctionne pas et que pour le moment les cinéastes canadiens n'ont pas accès aux cinémas canadiens. Si 4 ou 5 p. 100 des cinémas canadiens présentaient des films canadiens—c'est à peu près ce pourcentage à l'heure actuelle, bien qu'il fluctue d'une année à l'autre. Certains rapports révèlent que si 10 p. 100 des écrans canadiens présentaient des films canadiens, nous pourrions sans doute nous passer de la plupart des subventions ou investissements, peu importe comment on les appelle.

    Voilà donc pourquoi le système ne fonctionne pas.

prochaine intervention intervention précédente

Mme Sarmite Bulte:
    Très rapidement, monsieur Lewis, j'ai aimé votre nouvelle définition de ce qui est canadien. Vous dites qu'une production canadienne devrait être écrite, produite, réalisée et jouée par des Canadiens, et je dois dire que je suis d'accord avec cela.

    J'aimerais connaître votre avis sur quelque chose. Dimanche, après la partie de hockey, j'ai allumé la télé et il y avait un spécial à CBC avec Céline Dion. À cette émission, au cours des cinq minutes que j'ai regardé, il y avait aussi Destiny's Child. Est-ce qu'on peut appeler cela une production canadienne, est-ce quelque chose qui devrait être présenté par notre radiodiffuseur public?

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M. Jefferson Lewis:
    Si j'ouvre la bouche pour faire une observation sur le contenu d'une émission de Céline Dion, j'aurai sans doute des problèmes. Je vais donc laisser quelqu'un d'autre plus brave que moi répondre à cette question.

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Mme Sarmite Bulte:
    Merci. Nous en parlerons après la séance.

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Mme Maureen Parker:
    Je ne parlerai pas spécifiquement de Céline Dion, mais l'une des questions sur lesquelles nous nous sommes penchés, c'est le fait que nos membres quittent le pays pour aller gagner leur vie aux États-Unis. Nous leur souhaitons bonne chance. Le marché est beaucoup plus vaste là-bas. Ils ont donc davantage la possibilité de faire valoir leurs talents.

    Ce dont on ne tient pas compte cependant, et ce qu'on ne veut pas voir, mais ce qui se produit à l'heure actuelle, c'est que les scénaristes qui ont quitté notre pays travaillent à nouveau à des émissions canadiennes car ils semblent ne pouvoir trouver du travail qu'à Los Angeles. Alliance Atlantis a un bureau à Los Angeles, tout comme Fireworks Entertainment, etc. Il faut donc aller se faire embaucher à Los Angeles pour travailler à ces émissions canadiennes.

    Donc, ce que nous disons en ce qui concerne des gens comme Céline, qui ont réussi sur le marché international, c'est que nous leur souhaitons bonne chance. C'est très bien, mais cela ne devrait plus être considéré comme du contenu canadien.

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Mme Sarmite Bulte:
    Merci.

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Le président:
    Nous avons encore trois autres intervenants, M. Harvard, Mme Lill et M. Mills. Puisque nous n'avons pas beaucoup de temps, je me demandais si vous pouviez peut-être poser vos questions, les témoins pourraient les prendre en note et y répondre en bloc.

    Monsieur Harvard.

  + -(1000)  

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M. John Harvard (Charleswood —St. James—Assiniboia, Lib.):
    Merci, monsieur le président.

    Je suis préoccupé par le fait que l'on ne raconte pas d'histoires canadiennes. Si j'ai bien compris, nous disons que les histoires canadiennes ne sont pas racontées sous forme de dramatique.

    Si nous nous limitons aux dramatiques à la télévision anglophone, d'après ce que vous dites, en raison des critères sur le marché international, il semble que bon nombre des dramatiques qui sont produites à l'heure actuelle ne sont pas destinées au marché américain mais plutôt au marché international, si je vous ai bien compris. Ce que je voudrais savoir--plus particulièrement en ce qui concerne le FCT--c'est si la plupart des dramatiques qui sont présentées à la télévision canadienne anglophone sont pour le marché international.

    Si nous pouvions changer les règles, pourrions-nous faire en sorte que la plupart des dramatiques présentent de vraies histoires canadiennes? J'aimerais que vous m'en parliez, car je pense que si nous devons dépenser des fonds publics, ces fonds devraient servir surtout à raconter des histoires canadiennes.

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M. Jefferson Lewis:
    Les deux choses ne sont pas incompatibles. Random Passage, par exemple, est une histoire canadienne. C'est une coproduction avec l'Irlande. Elle sera présentée dans le monde entier pour les 25 prochaines années. Au cours de cette période, on aura sans doute récupéré l'investissement. C'est une bonne histoire. C'est bien fait. C'est filmé dans des endroits extraordinaires. C'est donc une production internationale et une production canadienne.

    Il y a deux types de production en ce moment. Il y a la production destinée à l'exportation sur le marché international et il y a la production indigène destinée à la télévision canadienne. Cela inclurait par exemple Da Vinci's Inquest, Blue Murder, etc., des émissions qui sont produites au Canada.

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Mme Maureen Parker:
    Ce que nous pouvons dire, c'est que le FCT finance des émissions purement canadiennes. Le FCT, le Fonds canadien de télévision, est un succès.

    L'autre type de programmation, qui est également considéré comme ayant un contenu canadien, est ce que nous appelons la programmation pour l'exportation, ou la programmation industrielle. Ce sont des émissions pour lesquelles la plupart des scénarios sont écrits par des scénaristes qui vivent à l'extérieur du Canada.

    Il y a donc deux différents types...

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M. John Harvard:
    Lequel est le plus important?

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Mme Maureen Parker:
    La programmation industrielle destinée à l'exportation. Par exemple...

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M. John Harvard:
    Dans quelle mesure?

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Mme Maureen Parker:
    Nous avons cinq dramatiques d'une heure qui devraient être produites cette saison. Par ailleurs, nous avons 14 dramatiques d'une heure destinées à l'exportation qui seront produites cette saison. C'est donc un rapport de trois à un.

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M. Alan Goluboff:
    Si vous me permettez d'intervenir, il est important de comprendre les deux extrêmes, car ils sont tout aussi valables, à mon avis, pour la santé globale de l'industrie. À mon avis, on ne peut séparer les émissions strictement canadiennes des émissions internationales industrielles...

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M. John Harvard:
    Sauf que vous dites, cependant, que des histoires canadiennes vous échappent.

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M. Alan Goluboff:
    Je n'ai pas dit cela.

  + -(1005)  

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M. John Harvard:
    Eh bien, quelqu'un l'a dit.

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M. Alan Goluboff:
    Je comprends cela, mais je veux tout simplement qu'il soit bien clair que cela est très important, et je ne voudrais pas que nous... Cette programmation industrielle internationale a une valeur pour tout le système. D'abord, des revenus importants découlent de l'industrie de la production au Canada, ce qui permet de financer particulièrement les cinéastes indépendants. Les avis divergent sur la question, bien sûr, mais cela a une certaine valeur. Il y a des gens qui forment, qui dirigent et qui travaillent. Ce genre d'émissions permet également de garder les Canadiens au Canada.

    Les scénaristes ont un problème plus aigu que les réalisateurs canadiens car les réalisateurs canadiens travaillent à toute cette programmation. Mes partenaires scénaristes canadiens écrivent surtout pour des émissions canadiennes, et ont beaucoup plus de difficultés à écrire pour des productions industrielles. Ce type de production affecte donc différemment les divers segments de l'industrie.

    Maureen a mentionné 14 émissions, et 5 émissions ou séries; je n'ai pas compris les chiffres exacts. Nous ne voulons pas prendre de décisions qui en élimineraient un au profit de l'autre, car je pense que les deux ont une grande valeur pour ce qui est de mettre en place une structure globale saine, à long terme, pourvu que cela rapporte de l'argent dans le système.

    Nous voulons garder les Canadiens au Canada. C'est ce que Jefferson disait. Il y a trop de gens qui sont attirés par les États-Unis--c'est le cas de mes membres également. J'ai 100 réalisateurs qui vivent à Los Angeles. Certains veulent être là-bas; certains y sont depuis 25 ans; et bon nombre d'entre eux aimeraient être ici. Ce qui est certain cependant, c'est qu'ils doivent aller là où il y a du travail.

    En autant que l'on puisse faire tout notre possible pour garder les gens ici au pays; lorsqu'ils restent ici, ils produisent, écrivent et réalisent des émissions canadiennes.

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M. Jim McKee:
    Pour revenir à la question des dramatiques canadiennes et ce que nous faisons à cet égard, pour revenir à l'impact de la politique de 1999 du CRTC, lorsque le Conseil a établi sa politique, plusieurs groupes, nous-mêmes, l'ACTRA, la Guilde des réalisateurs, l'association des producteurs--ont demandé qu'en plus d'établir une exigence au niveau du temps, on établisse aussi une exigence au niveau des dépenses pour les radiodiffuseurs.

    Autrement, il est logiquement trop tentant de choisir la programmation la moins coûteuse. Nous avons donc pensé qu'en plus de déterminer certaines durées pour les dramatiques, il fallait également déterminer un montant de façon à ne pas se retrouver avec des grilles qui faisaient en sorte que l'on se concentrait soit sur des dramatiques, pour lesquelles il est beaucoup moins coûteux pour les radiodiffuseurs canadiens d'obtenir une licence car une station de télévision par câble américaine paiera sans doute la facture, soit sur des émissions comme Popstars, qui sont beaucoup moins coûteuses.

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Mme Maureen Parker:
    Nous appuyons la Guilde des réalisateurs, car nous voulons que ce type de production continue d'être présentée au Canada, mais nous disons que nous voulons être en mesure d'écrire les scénarios pour les émissions industrielles.

    Ce n'est pas bien que des Canadiens soient obligés de s'expatrier pour revenir travailler à ces émissions, parce qu'ils doivent être embauchés par des réseaux américains de Los Angeles. Nous sommes d'avis que tous les artistes peuvent y recevoir une excellente formation, mais nous voulons nous assurer que nous avons tous la possibilité de travailler là-dessus, et cela exige une révision du système concernant le contenu canadien.

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Le président:
    M. Harvard a soulevé un point très important. Manifestement, cela montre qu'il y a une divergence d'opinions entre les deux organismes sur un point très essentiel.

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Mme Maureen Parker:
    Non, il n'y a aucune divergence d'opinions. Nous estimons tous les deux qu'il s'agit là de productions essentielles. En vertu du système de qualification selon les points, le producteur peut choisir de retenir un réalisateur ou un scénariste canadien, et pour la télévision—et je sais qu'ici vous ne serez peut-être pas d'accord avec moi—le scénariste est tout à fait primordial. Il ajoute souvent à ses fonctions la responsabilité de diriger la production, comme dans le cas d'Aaron Sorkin ou de John Wells, de l'émission ER. Ces derniers sont à la fois scénaristes et directeurs de production.

    Aux États-Unis, cela signifie qu'ils veulent un droit de regard absolu sur les scénaristes et, donc, les embaucher eux-mêmes. Ils tiennent à recruter des scénaristes qu'ils connaissent et qui vivent aux États-Unis. Ils n'ont aucune objection à ce qu'on embauche des réalisateurs canadiens, mais ils ne veulent pas de scénaristes canadiens, parce qu'ils tiennent à ce que tout le travail créateur s'effectue aux États-Unis.

    Nous demandons comment on peut parler d'un contenu canadien, lorsqu'il est conçu et réalisé aux États-Unis par des Américains? Cela dit, ce n'est pas une forme de production sans mérite, puisqu'elle crée des possibilités d'emploi pour tout le monde.

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Le président:
    J'aimerais que nos attachés de recherche demeurent en contact avec vos deux groupes, afin de bien comprendre votre point de vue sur la question et d'avoir une idée claire du sujet. Nous allons donc prendre les procès-verbaux. Je recommanderais donc à nos attachés de recherche d'avoir des contacts réguliers avec vous. Aussi, si vous tenez à nous écrire ou à nous donner davantage de détails sur votre position au sujet de cet enjeu primordial, n'hésitez surtout pas à le faire.

    Je vais demander à Mme Lill et à M. Mills de bien vouloir poser leurs questions l'un après l'autre afin que vous puissiez les prendre en note.

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Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD):
    J'aime bien que vous ayez mentionné la politique en matière de télédiffusion adoptée en 1999 par le CRTC parce qu'elle est d'une importance primordiale par rapport à tout ce dont nous discutons ici. Ainsi par exemple, vous avez rappelé que les séries d'une heure sont passées de 11 à 5 depuis 1999, et se sont maintenues à 5 ces trois dernières années. Cela semble clairement résulter de la nouvelle politique du CRTC.

    Le fait qu'à l'heure actuelle, il n'y ait pas d'exigence en matière de dépenses semble être au coeur de la question. Cependant, par le passé, est-ce qu'il y avait un lien entre ces deux réalités? Est-ce qu'une telle exigence pouvait protéger le contenu canadien?

    J'ai une autre question, celle-là sur les moyens que le CRTC peut prendre pour retenir les services de producteurs indépendants. Pouvez-vous développer quelque peu cette idée, l'étoffer? Dans toutes les régions du pays, on nous a dit que les producteurs indépendants ont besoin d'un soutien plus généreux afin de se maintenir, de continuer à produire. La Guilde canadienne des réalisateurs y a aussi fait allusion, j'aimerais donc que vous nous disiez comment on peut aider cette catégorie d'artisans de la télévision.

  + -(1010)  

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Le président:
    Monsieur Mills.

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M. Dennis Mills (Toronto--Danforth, Lib.):
    Merci, monsieur le président.

    Ces dernières années, depuis qu'on a enlevé tous ses moyens à la Société Radio-Canada, qui en avaient pourtant d'énormes, surtout au Canada anglais, en matière de production intégrale, il y a un vide. Cela signifie que les jeunes qui souhaiteraient faire partie de la guilde des réalisateurs ou devenir scénaristes auront moins de possibilités. Comment font-ils pour se lancer dans votre secteur? Où obtiennent-ils leur formation? Où sont les activités d'avenir dans votre industrie, dans votre secteur, puisqu'on a aboli presque tous les moyens dont la Société Radio-Canada disposait auparavant? Or j'ai pu observer moi-même à quel point elle offrait de merveilleuses possibilités de formation dans tellement de catégories d'occupation liées à votre industrie. Où est-ce que tout cela se passe aujourd'hui?

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Le président:
     Nous allons commencer par les questions posées par Mme Lill puis nous poursuivrons.

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M. Peter Grant:
    J'aimerais peut-être répondre à la question portant sur l'historique.

    À la fin des années 80, tous les radiodiffuseurs privés du Canada étaient tenus de consacrer à la production de contenu canadien une somme correspondant à la moyenne de ce qui y avait été affecté les années précédentes. L'obligation visait les entreprises autres que CTV et Global. Dans le cas de CTV, à partir de la même époque, la chaîne devait se conformer à une règle des dépenses portant sur l'ensemble des productions canadiennes, mais non de façon précise sur les émissions dramatiques. Dans le cas de la Global, l'obligation visait précisément les émissions dramatiques.

    Dans les années 90, le Conseil a cependant modifié les règles, de manière que les radiodiffuseurs privés, à part CTV et Global, puissent choisir soit la règle fondée sur la proportion des dépenses, soit celle du nombre d'heures d'antenne. Les choix ont d'ailleurs été partagés. Puis en 1999, le Conseil a éliminé toutes les règles relatives à la proportion des dépenses dans le cas des services hertziens, mais les a conservées dans le cas de la télévision payante et des chaînes spécialisées.

    Il y a cependant une légère exception à cela, à savoir les chaînes ayant récemment changé de main, et cela s'applique donc à CTV, TVA, TQS ainsi qu'aux stations WIC achetées par la chaîne Global. Si on a maintenu la règle d'une proportion des dépenses dans leur cas, c'est simplement parce qu'elle sert de point de repère auquel comparer leurs bénéfices.

    À l'heure actuelle, les principales sociétés de radiodiffusion qui ne sont pas tenues de respecter la règle de la proportion des dépenses sont les postes appartenant à Global autres que les WIC et les postes qui n'ont pas été acquis récemment. Par conséquent, CHUM et d'autres postes plus petits ne sont pas non plus obligés de respecter cette règle.

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Mme Maureen Parker:
    Pour ce qui est de la formation, monsieur Mills, le Canada compte d'excellents établissements de formation, dont le Centre canadien du film par exemple. Il est extrêmement utile.

    Je suis heureuse que vous ayez posé cette question, parce qu'une des choses que nous ont répétées nos scénaristes qui animent des colloques ou d'autres rencontres de ce genre, et les jeunes gens qui y participent, c'est qu'il n'est plus question maintenant de demeurer au Canada. On conseille en effet aux jeunes de déménager leurs pénates aux États-Unis, parce qu'il n'y a pas de travail ici. Ils n'en trouveront pas dans des productions canadiennes, et les scénaristes canadiens ne sont pas autorisés à participer aux émissions destinées à l'exportation. Je trouve cela très, très décourageant, et très triste.

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M. Dennis Mills:
    Excusez-moi, mais ce centre se trouve dans le Bayview Centre. Qui les encourage à déménager?

  + -(1015)  

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Mme Maureen Parker:
    Bien, c'est surtout qu'on ne les encourage pas. Ils vont demander à leurs mentors—les enseignants, les scénaristes qui leur donnent des cours—ce qu'ils doivent faire après?

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M. Dennis Mills:
    Au Canada, on ne peut acquérir d'expérience dans les tournages, ou de façon très limitée.

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Mme Maureen Parker:
    Cela tient surtout au fait que les possibilités de travailler sont extrêmement limitées en ce moment. S'il y a cinq émissions d'une heure en production, et si nous comptons 1 600 membres, dont tous sont des professionnels, des scénaristes d'expérience, à qui un producteur s'adressera-t-il?

    M. Dennis Mills: C'est tout à fait cela.

    Mme Maureen Parker: Il n'y a pas de possibilités de travail pour les jeunes scénaristes et les jeunes réalisateurs, qui veulent se lancer dans la carrière.

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M. Jefferson Lewis:
    Très brièvement, il faut préciser aussi que nous faisons tous cela tout le temps. Ainsi, par exemple, pour ce qui est de l'émission téléphonique qui appuie les productions indépendantes, chaque scénariste ayant reçu une subvention est jumelé à un autre scénariste, d'expérience celui-là, qui l'aidera à faire ses premiers pas. Il l'aidera à concevoir l'intrigue et il le suivra tout au long du processus. Nous comblons aussi la demande dans les universités, en offrant des cours, car il y a une demande constante, et cela nous tient occupés. L'encadrement lui s'effectue aussi de manière pratique.

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Le président:
    Merci beaucoup d'avoir témoigné devant nous aujourd'hui. Ainsi que le disait Mme Bulte, vous avez défendu vos idées avec passion et beaucoup de détermination. Nous vous sommes très reconnaissants des renseignements que vous nous avez fournis. Ainsi que je vous l'ai dit un peu plus tôt, nos attachés de recherche entreront très bientôt en contact avec vous. Encore une fois, merci beaucoup d'avoir été des nôtres aujourd'hui.

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    Je souhaite la bienvenue à l'Alliance de la vidéo et du cinéma indépendants, représentée par son directeur national, M. Peter Sandmark, et l'Association canadienne des distributeurs de films, représentée par le président, M. Douglas Frith, que nous connaissons bien, puisqu'il nous a souvent rendu visite ici même, et la vice-présidente, Mme Susan Peacock.

    Monsieur Sandmark, vous avez la parole.

  + -(1020)  

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M. Peter Sandmark (directeur national, Alliance de la vidéo et du cinéma indépendants):
    Merci beaucoup, monsieur Lincoln.

    Bonjour. Premièrement, je voudrais remercier le comité permanent de nous avoir invités à témoigner. Je m'appelle Peter Sandmark et je suis directeur national de l'Alliance de la vidéo et du cinéma indépendants.

    L'Alliance est une association nationale qui existe depuis maintenant 20 ans et qui représente les arts médiatiques indépendants et à but non lucratif dans le domaine du film, de la vidéo, des nouveaux médias et des centres artistiques médiatiques autochtones; bref, nous représentons le secteur des arts médiatiques de la communauté culturelle du Canada. Nous comptons 55 membres, dans toutes les provinces du Canada, et des centres de production, de distribution et d'exposition qui, collectivement, représentent, d'après notre estimation, plus de 8 000 créateurs.

    Je voudrais simplement ajouter qu'il s'agit en fait du milieu dont il a été fait mention tout à l'heure, là où les gens reçoivent leur formation. Il est certain que Patrimoine Canada a reconnu que c'est la source d'où proviennent beaucoup de talents qui font ensuite leur marque au Canada. Cela a été reconnu par la création à Téléfilm Canada, d'un fonds pour le long métrage à petit budget.

    Quant à notre définition de production indépendante, nous disons que c'est une production dans laquelle l'artiste, c'est-à-dire le créateur, maintient un contrôle complet sur le plan de la création et de la modification de son oeuvre. Le mandat du CRTC, qui est de maintenir l'équilibre délicat, dans l'intérêt public, entre les objectifs culturels, sociaux et économiques de la Loi sur la radiodiffusion établit le contexte pour l'examen de la politique de radiodiffusion.

    L'application de la Loi sur la radiodiffusion doit permettre au grand public de participer au système de radiodiffusion et de ne pas se contenter d'en être spectateur. La loi stipule que le système de radiodiffusion doit:

favoriser l'épanouissement de l'expression canadienne en proposant une très large programmation qui traduit des attitudes, des opinions, des idées, des valeurs et une créativité artistique canadiennes...

    Nous estimons que l'équilibre de ces éléments doit servir l'intérêt public. Pour l'aspect culturel, les oeuvres des créateurs canadiens doivent être diffusées à la télévision. Du côté politique, le système de radiodiffusion doit nous présenter un débat libre qui débouche sur une présentation franche et ouverte des idées dans la sphère politique. Pour ce qui est du bien collectif, les radiodiffuseurs devraient, je devrais dire, doivent, représenter la diversité canadienne.

    Sur le plan économique, il faut protéger les intérêts économiques du grand public, y compris des artistes professionnels canadiens indépendants qui produisent des émissions, et non seulement les intérêts économiques des radiodiffuseurs privés. Il doit y avoir harmonie entre les intérêts économiques et les intérêts culturels, mais la loi doit donner préséance à l'intérêt public. Je veux dire par là que l'intérêt public doit avoir la priorité sur les intérêts économiques des conglomérats médiatiques.

    Les grandes compagnies ont le levier économique leur permettant de défendre leurs propres intérêts. C'est notre façon de voir les choses. Le public est protégé seulement par la Loi sur la radiodiffusion et la volonté politique du gouvernement de veiller à l'application de cette loi. Des priorités doivent être établies et les licences du CRTC établissent déjà des règles que les radiodiffuseurs doivent suivre. Ces règles existent pour protéger l'intérêt public et veiller à ce que les radiodiffuseurs fournissent un service au public.

    Si les radiodiffuseurs ne veulent pas accepter ces règles, alors ils devraient laisser la place à d'autres qui relèveront le défi. Dans l'état actuel des choses, le public canadien finance déjà le système de radiodiffusion par l'argent de ses impôts, et nous voyons là un investissement du grand public dans la culture. La radiodiffusion publique rend plus facilement des comptes au public contribuable, en comparaison des radiodiffuseurs privés; dans ce dernier cas, le public n'a à peu près pas son mot à dire dans ce qui est diffusé, il doit se contenter d'être un consommateur passif.

    Pour leur part, les radiodiffuseurs privés veulent réduire le contenu canadien; obtenir plus de crédit pour le contenu qu'ils diffusent; combler leurs exigences de contenu canadien en diffusant des émissions maison réalisées à faible coût, au lieu d'acheter des productions indépendantes de créateurs canadiens; et aussi avoir accès aux fonds gouvernementaux et aux crédits d'impôt. En plus de tout cela, ils veulent aussi un meilleur accès aux capitaux privés, en levant les restrictions sur la propriété canadienne.

    Certains d'entre nous, dans le secteur des productions indépendantes, ont eu suffisamment de difficulté à obtenir que les radiodiffuseurs de propriété canadienne respectent les exigences qui leur sont déjà imposées en matière de contenu canadien. Quelles garanties pourrions-nous obtenir de radiodiffuseurs de propriété étrangère? L'Alliance de la vidéo et du cinéma indépendants s'oppose à ce qu'on ouvre la porte à la propriété étrangère des radiodiffuseurs canadiens.

  + -(1025)  

    S'ils cherchent à obtenir des crédits supplémentaires de contenu canadien, pourquoi ne donnons-nous pas des crédits supplémentaires pour la diffusion de productions réalisées au Québec, de productions en langue française au Canada anglais, avec des sous-titres, ou inversement, si nous voulons encourager le contenu canadien et leur donner des crédits supplémentaires?

    Les radiodiffuseurs privés n'ont pas besoin d'avoir accès au financement gouvernemental pour produire leurs propres émissions canadiennes maison. Il y a amplement de travail pour tout le monde. En fait, ce sont les artistes, les cinéastes, les vidéastes, etc., qui subventionnent déjà leurs oeuvres à même leur propre argent et à la sueur de leur front; c'est ce que nous appelons dans notre secteur un «apport de compétences». Ce sont eux, en fait, qui devraient avoir un meilleur accès à l'aide gouvernementale. Il y a des milliers de créateurs canadiens qui réalisent leurs propres films et vidéos et la grande majorité de leurs oeuvres sont systématiquement laissées dans l'ombre et ne sont jamais diffusées à la télévision.

    Je voudrais profiter de l'occasion pour présenter officiellement ce dossier en tant qu'annexe à notre mémoire. Il renferme des listes de films et vidéos indépendants que l'on peut se procurer dans des centres de distribution membres de l'Alliance de la vidéo et du cinéma indépendants. J'estime que ces listes renferment plus de 7 000 titres d'artistes professionnels indépendants du domaine des médias: Cinéma libre, Vidéographe et Groupe Intervention Vidéo de Montréal, Vidéo Femme de la ville de Québec; V tape et le Canadian Filmmakers Distribution Centre de Toronto; Video Pool de Winnipeg; et Moving Images Distribution and Video, de Vancouver. J'ai également ajouté la liste de nos membres.

    Les ondes sont un espace public. Les nouvelles technologies de diffusion doivent être perçues dans le même contexte, dans l'optique du citoyen. Internet doit être perçu comme un espace public, bien que virtuel. Les radiodiffuseurs canadiens, quel que soit le médium qu'ils utilisent—les ondes hertziennes, le câble, le satellite ou Internet—doivent toujours être tenus de respecter les objectifs de la Loi sur la radiodiffusion.

    Nous trouvons étrange d'entendre l'Association canadienne des radiodiffuseurs dire que la programmation canadienne est la clé de l'avenir, alors même qu'elle réclame la diminution du contenu canadien. S'ils croient tellement en la programmation canadienne, pourquoi n'en font-ils pas plus dès maintenant pour promouvoir les émissions, le talent et les créateurs du Canada?

    Nous avons le sentiment qu'il est improbable que nous obtenions des grandes entreprises médiatiques un véritable reflet de la culture canadienne locale ou régionale. Prenez par exemple la politique éditoriale nationale récemment adoptée par la chaîne de journaux du groupe Asper. À l'heure actuelle, nous dépendons de la culture d'entreprise pour nos médias locaux, alors comment le système de radiodiffusion peut-il continuer à refléter la réalité locale dans une ère de concentration de la propriété des médias? Les oeuvres des artistes médiatiques canadiens indépendants sont un véritable reflet de la trame même du tissu culturel canadien.

    J'ai été réconforté par les commentaires des porte-parole de la Writers Guild du Canada au sujet de l'importance des scénaristes, des réalisateurs et des producteurs. C'est la même chose pour nous. Les gens qui produisent des oeuvres dans notre secteur sont 100 p. 100 canadiens. Nous ne faisons pas venir de cinéastes américains indépendants pour réaliser des oeuvres.

    L'Alliance de la vidéo et du cinéma indépendants recommande que le Comité permanent renforce l'obligation des radiodiffuseurs de programmer des oeuvres de créateurs canadiens indépendants de films et de vidéos et des oeuvres d'artistes canadiens indépendants des nouveaux médias sur les sites Internet des radiodiffuseurs.

    Dans une ère où le profit est le principal objectif des radiodiffuseurs privés, les règles du CRTC sont des obstacles qui les empêchent de gonfler leurs profits. Si on leur donne la chance, ils pourraient se contenter de faire la diffusion en jumelé d'oeuvres américaines, puisque cela augmenterait probablement leurs profits. C'est un gaspillage de notre ressource nationale, nommément les ondes. Grâce au câble et au satellite, nous avons déjà accès aux émissions américaines et nous n'avons pas besoin que les radiodiffuseurs canadiens nous montrent les émissions américaines. Les temps ont changé depuis l'époque où la diffusion hertzienne était le seul moyen de capter des émissions. Si les radiodiffuseurs privés veulent avoir le droit de profiter de l'exploitation d'un bien public, alors ils doivent respecter les règles, et les règles doivent être édictées dans l'intérêt public.

    Je vais vous donner un exemple. Supposons que le CRTC accorde une licence à un canal, disons un canal qui diffuse des films indépendants, avec un objectif culturel particulier, et qu'une grande entreprise médiatique, disons Alliance Atlantis, achète tout simplement ce nouveau canal après que sa propre demande de licence ait été rejetée. Le processus du CRTC est ainsi invalidé, et l'on a permis au financement privé de contourner la loi et d'invalider l'application de la loi par le CRTC.

  + -(1030)  

    Si l'on veut que le CRTC applique la loi, alors il faut lui donner les pouvoirs voulus pour la faire respecter. C'est pourquoi nous avons écrit dans notre mémoire original qu'il faut faire quelque chose à propos de la situation de la souveraineté culturelle, ou bien simplement concéder que nous faisons partie du marché intérieur des États-Unis et renoncer à essayer d'avoir notre propre culture. Les règles de la Loi sur la radiodiffusion et la façon dont elles sont appliquées par le CRTC, tout cela doit être renforcé. Leur raison d'être est de servir l'intérêt du public canadien.

    L'Alliance de la vidéo et du cinéma indépendants croit que la diversité culturelle du Canada doit être reflétée dans le système de radiodiffusion et que les règles actuellement en place ne vont tout simplement pas suffisamment loin pour garantir le reflet de la réalité multiculturelle du Canada. Par exemple, maintenant que le Réseau de télévision des peuples autochtones a été créé, cela veut-il dire qu'aucun autre radiodiffuseur n'a l'obligation de diffuser des émissions autochtones? Le Canada a été bâti sur le territoire des Premières nations, et leur culture fait partie intégrante du tissu culturel canadien. Cette culture doit être représentée dans la radiodiffusion partout au Canada. Nous avons une responsabilité à cet égard.

    L'Alliance recommande que le comité permanent ajoute aux obligations des radiodiffuseurs des exigences spécifiques sur la radiodiffusion d'émissions provenant de producteurs de diverses communautés culturelles. Comme nous l'avons écrit dans notre mémoire, nous défendons le point de vue des créateurs. Il ne suffit pas de montrer des visages sur l'écran pour dire que l'on reflète la réalité canadienne; il faut aussi qu'il y ait des gens de diverses communautés culturelles derrière la caméra, plus précisément des communautés autochtones. C'est comme cela que l'on peut commencer à refléter la culture canadienne.

    Au lieu d'exiger que la SRC conclue des alliances avec les radiodiffuseurs privés, la SRC devrait simplement bénéficier d'un financement suffisant pour remplir son mandat. La Société est sous-financée, mais elle continue d'assumer la lourde tâche de faire contrepoids aux radiodiffuseurs privés et d'essayer d'atteindre les objectifs de la Loi sur la radiodiffusion.

    La télévision publique offre au public canadien un reflet des valeurs canadiennes, mais ne permet pas facilement la participation directe des créateurs canadiens. Nous applaudissons toutefois aux efforts déployés par la SRC pour tendre la main aux producteurs indépendants. Nous insistons encore une fois sur le fait que la Société doit avoir les ressources voulues pour faire un meilleur travail.

    Enfin, nous sommes préoccupés par la télévision communautaire, à laquelle il faut octroyer l'autonomie dont elle a besoin. La télévision communautaire a clairement besoin de plus d'appui si l'on veut qu'elle joue son rôle d'être l'un des trois piliers de la Loi sur la radiodiffusion. La plupart des canaux communautaires sont diffusés par une compagnie de câblodistribution, ce qui restreint l'accès à la télévision communautaire et l'empêche d'offrir une programmation vraiment locale.

    Les canaux communautaires doivent être indépendants et il faudrait les financer en prenant le pourcentage que les compagnies de câble sont obligées par le CRTC d'investir dans la télé communautaire et en mettant cet argent dans un fonds servant à financer directement les canaux communautaires, qui deviendraient alors des organisations communautaires à but non lucratif administrées publiquement. Nous avons déjà présenté cet argument au CRTC de façon plus détaillée et nous appuyons les arguments de l'Association de télévision communautaire du Québec.

    La télé communautaire permet au public de s'exprimer directement et, dans le contexte de la mondialisation, ce reflet local devient encore plus important. La culture locale est presque une ressource en voie de disparition, car les multinationales vendent leurs produits sur la scène mondiale et contribuent ainsi à une plus grande homogénéisation des cultures locales.

    Je voudrais remercier encore une fois le comité de nous avoir donné cette occasion de témoigner. Je me ferai maintenant un plaisir de répondre à toute question, dans l'une ou l'autre des langues officielles.

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Le président:
    Merci, monsieur Sandmark.

    Monsieur Frith.

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M. Douglas Frith (président, Association canadienne des distributeurs de films):
    Merci, monsieur le président, et mesdames et messieurs les députés.

    On m'a déjà présenté tout à l'heure, mais je m'appelle Douglas Frith et je suis président de l'ACDF. Susan en est la vice-présidente. Nous représentons exclusivement les intérêts des studios de Hollywood ici au Canada. Cela devrait nous rendre sympathiques aux yeux de bien d'autres personnes dans la salle.

    Une voix: C'est habituellement le cas.

    M. Douglas Frith: En effet.

    Je vais diviser la présentation en deux. Nous vous avons déjà remis le mémoire. Je vais traiter des questions du contenu canadien et de la diversité culturelle, en faisant une digression sur les obstacles commerciaux. Susan, qui est avocate, traitera de l'impact des nouvelles technologies et des questions de droit d'auteur. Nous en avons pour environ six ou sept minutes.

    Il faut reconnaître le mérite du gouvernement canadien, qui a augmenté considérablement ces 20 dernières années les subventions aux productions canadiennes. Le ministère du Patrimoine canadien est extrêmement vigilant à cet égard depuis deux décennies, s'efforçant de promouvoir les émissions canadiennes au Canada et d'en augmenter le nombre.

    Cela dit, la difficulté, et la réalité, après avoir mis l'accent exclusivement sur l'offre d'émissions, c'est que la demande de contenu canadien en langue anglaise à la télévision n'a pas augmenté. Cette question sera vraiment au coeur de l'étude du comité permanent sur la diversité culturelle et le contenu canadien. Comment agir sur l'autre élément de l'équation, nommément la demande? Je pense que l'on s'est déjà occupé de l'offre.

    Nous avons fait remarquer que le même régime de réglementation s'applique à la programmation en anglais et en français. Il est douteux que la demande beaucoup plus forte parmi les téléspectateurs francophones résulte de l'application de ce régime. Cela ne peut pas être attribuable à la politique gouvernementale. Il y a des raisons linguistiques qui expliquent qu'une proportion sensiblement plus élevée de la population du Québec écoute ses propres émissions. La réalité, c'est qu'après ces 20 ans d'effort, moins de 4 p. 100 du temps d'antenne anglophone est consacré à des comédies et dramatiques canadiennes, en comparaison de 16,6 p. 100 au Québec pour les francophones.

    Maintenant, nous reconnaissons que les intérêts ou les produits de nos membres ou des studios de Hollywood sont le moteur économique qui dicte l'évolution du système canadien de radiodiffusion. On ne peut pas changer le marché. Les recettes publicitaires provenant de la diffusion d'émissions américaines permettent à nos radiodiffuseurs canadiens, en particulier les radiodiffuseurs en langue anglaise, de payer leurs coûts de fonctionnement et d'éponger leurs pertes sur les émissions canadiennes.

    En principe, l'Association est contre les barrières commerciales, y compris les quotas de contenu télévisuel. Mais cela dit, si la politique publique au Canada et dans d'autres pays du monde consiste à appuyer des quotas de radiodiffusion, nous avons trois recommandations qui permettraient à notre avis de mieux promouvoir les objectifs culturels et industriels, en comparaison du système actuel. Nous sommes d'avis que vous devez recommander d'instaurer une plus grande souplesse dans la façon dont ces points de contenu canadien sont attribués.

    D'abord et avant tout, nous recommandons que les quotas de contenu canadien, actuellement exprimés en pourcentage du temps d'antenne, soient plutôt exprimés en pourcentage des dépenses totales consacrées aux émissions. D'autres groupes qui ont comparu ici même il y a quelques instants ont formulé la même idée.

    Deuxièmement, les radiodiffuseurs doivent être admissibles à des primes relativement à l'atteinte de leur quota quand un certain nombre ou un certaine proportion de téléspectateurs sont attirés par une émission canadienne particulière.

    Enfin, il faut modifier la définition d'émission canadienne. Je vais en parler, mais je crois que c'est la députée de la Colombie-Britannique, Mme Hinton, qui a dit qu'elle trouvait difficile à comprendre que Atlantic City soit considérée comme une émission canadienne, tandis que The Shipping News ne l'est pas. Cela touche au fond de l'affaire, à la façon dont nous déterminons ce qui est canadien et ce qui ne l'est pas.

    Nous proposons que la définition d'émission canadienne tienne compte des facteurs qui sont déjà pris en compte dans la définition actuelle. Si l'on examine les objectifs de la politique publique, il y a un objectif culturel pour les émissions dans le domaine patrimonial, une composante de formation de perfectionnement, et une composante industrielle. Nous pensons que c'est le mélange des trois qui peut permettre, grâce à la synergie déployée, de raconter un plus grand nombre d'histoires canadiennes et d'attirer un auditoire plus nombreux.

    Nous croyons qu'il y a lieu de faire appel à des Canadiens pour les rôles clés dans le domaine de la création et des dépenses, mais avec une plus grande souplesse. Chaque facteur doit pouvoir donner lieu à un certain nombre de points pour le contenu canadien. Le nombre total de points attribués à une émission servirait à pondérer les dépenses du radiodiffuseur pour cette émission, pour calculer le pourcentage d'atteinte du quota.

  + -(1035)  

    Le radiodiffuseur qui obtient 100 points de contenu canadien dans ces trois domaines peut faire créditer 100 p. 100 de ses dépenses aux fins du respect du quota. Le montant des dépenses défalquées diminue, mais en revanche, en cas de succès, si l'on accorde un incitatif pour assurer le succès des productions et pour en assurer la promotion, comme on l'a fait dans la mini-série sur Trudeau, on obtient des points supplémentaires aux fins du quota. Le radiodiffuseur est donc incité à remporter des succès.

    Nous considérons qu'actuellement, les trois catégories doivent être respectées par chaque émission qui satisfait aux exigences du quota, et qu'une plus grande souplesse favoriserait la créativité et les réussites commerciales.

    En ce qui concerne la nationalité des auteurs du récit, on accorderait des points pour chaque Canadien qui occupe un rôle dans cette catégorie—par exemple, le metteur en scène, le scénariste original ou l'auteur de l'oeuvre dont s'est inspiré le scénariste. Pour les autres créateurs essentiels, on accorderait des points, par exemple, aux producteurs ou aux acteurs canadiens et nous considérons que les dépenses canadiennes devraient comprendre les coûts de production hors bilan et les coûts de post-production si l'on veut faire la promotion de ce secteur.

    La quantité d'émissions spécifiquement canadiennes destinées à la télédiffusion constitue, apparemment, un autre objectif important. Pourtant, la définition que donne actuellement le CRTC de la programmation canadienne n'exige nullement que cette programmation soit spécifiquement canadienne, et bien souvent, elle ne l'est pas. Les séries télévisées pour enfants Babar et Madeline sont certifiées canadiennes, mais leur contenu culturel est international, comme en témoigne leur succès commercial.

    Le téléspectateur a sans doute du mal à déterminer si une émission est canadienne ou non. C'est ce que j'ai indiqué précédemment. On comprend mal pourquoi Atlantic City est censée être une émission canadienne alors que The Shipping News ne l'est pas.

    Je cite souvent l'exemple suivant: si l'on exige que le producteur soit canadien, il pourra aller étudier la distribution du lait en Albanie et son émission sera censée être canadienne, mais si un producteur britannique vient tourner au Canada une mini-série en 10 épisodes sur nos premiers ministres, elle ne sera pas considérée comme canadienne.

    À notre avis, il faudrait s'entendre sur la définition du mot «canadien». Si le récit est canadien, l'émission devrait obtenir des points supplémentaires, de même que si le décor est canadien, de façon à mettre en relief le caractère canadien de l'événement présenté.

    Enfin, je voudrais parler brièvement des usages commerciaux et des exportations, quitte à heurter quelque peu certains membres du comité. Je sais que le Canada a déployé des efforts considérables pour obtenir que les industries culturelles soient exclues des accords commerciaux, mais je considère qu'il serait bien préférable de mettre ces industries culturelles sur la table et de définir les règles du jeu, car il va y avoir des différends et si ces industries culturelles font partie des négociations, on pourra au moins définir les paramètres des mécanismes de règlement des différends. À mon sens, c'est infiniment préférable. Il faut un dialogue ouvert.

    D'habitude, dans les négociations commerciales, on met normalement en jeu... Il y a des clauses de consécration des droits acquis, et je considère à titre personnel—mais c'est aussi le point de vue de mes employeurs—qu'il est bien préférable de définir les règles de résolution des différends de façon à disposer d'un mécanisme pour atténuer les graves conséquences d'un différend commercial.

    Susan, c'est à vous.

  + -(1040)  

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Mme Susan Peacock (vice-présidente, Association canadienne des distributeurs de films):
    Le comité nous a demandé de nous prononcer notamment sur les conséquences des nouvelles technologies. Nous savons, d'après l'étude des nouveaux médias entreprise par le CRTC, que lorsque le son et l'image sont communiqués sur Internet, c'est de la radiodiffusion et c'est une activité qui relève de la compétence du CRTC. Initialement, l'organisme considérait—et nous étions d'accord avec lui—que les radiodiffuseurs utilisant les nouveaux médias étaient exclus de son domaine de compétence et à la lecture de ces délibérations, on voit que l'organisme avait l'intention de dispenser à l'avenir les producteurs d'émissions de l'application de la réglementation. Et nous avons accepté ce principe, mais on ne saurait ignorer que cette activité fait partie de la radiodiffusion.

    La politique actuelle en matière de radiodiffusion, qui s'applique aux technologies plus conventionnelles ou plus traditionnelles, est fondée sur la capacité limitée du spectre et sur le coût élevé de la production et de la distribution d'un contenu destiné au plus large public. La télévision à ses heures nécessite le plus large public.

    Si 84 p. 100 des foyers canadiens sont abonnés au câble ou aux services de radiodiffusion directe, ceux qui possèdent un magnétoscope sont encore plus nombreux. D'après les plus récentes données de Statistique Canada, 52 p. 100 des foyers canadiens ont un ordinateur relié à Internet. Ces deux sources assurent une diffusion électronique non réglementée d'information et de divertissement.

    Quel que soit le fondement de la réglementation de la radiodiffusion ou l'évaluation qu'on en fait, les préoccupations auxquelles elle répondait initialement n'ont plus de pertinence aujourd'hui. Certaines d'entre elles ont été apaisées par la nouvelle technologie, notamment par la disponibilité des fréquences et la réduction des coûts de production et de distribution. En outre, on ne peut justifier que des règlements qui ne sont pas applicables aux radiodiffuseurs sur nouveaux médias s'appliquent aux radiodiffuseurs sur supports conventionnels, avec lesquels les premiers sont en concurrence.

    Les nouvelles technologies assurent un volume illimité de fréquences et des coûts considérablement moins élevés de production et de diffusion de contenu novateur et attrayant, ce qui permet de produire et de diffuser dans de bonnes conditions commerciales un contenu présentant un intérêt extrêmement limité par sa destination géographique ou par son sujet. Il devrait donc en résulter une variété beaucoup plus grande que dans le système de radiodiffusion actuel qui a besoin du plus vaste auditoire pour sa programmation à heures fixes.

    Les restrictions réglementaires imposées aux producteurs de contenu canadien, aux distributeurs, aux radiodiffuseurs et aux titulaires des licences du CRTC limitent les capitaux disponibles, émoussent l'efficacité et la compétitivité des intervenants et accentuent la nécessité d'une protection de nature réglementaire. C'est ce qu'on a qualifié de culture de la dépendance. Mais lorsque, avec l'avènement de la nouvelle technologie, l'autorité de réglementation n'est plus en mesure de distribuer les avantages d'un accès restreint au marché, puisque les participants soumis à la réglementation sont confrontés à des concurrents qui n'y sont pas soumis, ces participants sont plus réticents à se conformer à leur part traditionnelle du compromis réglementaire, c'est-à-dire au respect des quotas, à la contribution au régime des subventions, etc.

    Si l'on maintient les restrictions imposées aux radiodiffuseurs et aux systèmes de diffusion conventionnels alors qu'on ne peut les imposer aux systèmes non conventionnels, on ignore le fait que ces différents systèmes sont en concurrence pour proposer des produits et des services semblables à la même clientèle. L'imposition d'un fardeau réglementaire coûteux à l'un des groupes, alors même que la protection dont il a toujours joui face à la concurrence est en train de s'amenuiser, ne peut que l'inciter à quitter au plus vite le camp des radiodiffuseurs réglementés.

    Je voudrais maintenant parler du droit d'auteur, mais en faisant évidemment référence aux nouvelles technologies, dont l'impact le plus net sur la radiodiffusion se situe au point d'intersection entre la radiodiffusion et le droit d'auteur. En 1989, les modifications apportées à la Loi sur le droit d'auteur ont créé une exemption de responsabilité au profit des retransmetteurs—on pourrait parler, dans ce contexte, des entreprises de distribution de radiodiffusion—comme le câble ou la diffusion directe. Lorsqu'ils distribuaient des signaux de télévision par les ondes hertziennes, ils ne portaient pas atteinte au droit d'auteur sur les émissions diffusées, même lorsqu'ils n'avaient pas le consentement des propriétaires des émissions ou des propriétaires des signaux.

  + -(1045)  

    Lorsqu'une entreprise de câble ou de diffusion directe diffuse des signaux spécialisés ou des signaux de télévision payante, elle enfreint le droit d'auteur à moins qu'elle n'ait obtenu ce consentement des propriétaires. Mais ce n'est pas le cas en ce qui concerne la télévision gratuite. Le consentement des titulaires du droit d'auteur n'est pas exigé. Leur rémunération n'est pas négociée. Ils reçoivent une redevance versée par la Commission du droit d'auteur du Canada. C'est à peu près l'équivalent d'une expropriation.

    L'exemption a été accordée en 1989 dans un souci de neutralité technologique. C'est un principe du régime canadien du droit d'auteur qui est fondé sur la théorie voulant qu'une telle mesure garantisse une plus grande stabilité statutaire. Or, la première technologie nouvelle de retransmission qui soit apparue depuis l'entrée en vigueur de cette disposition a été Internet, et cette mesure, au lieu de favoriser la stabilité, a débouché sur le chaos.

    La question rejoint celle de la politique de radiodiffusion, car la Loi sur le droit d'auteur, avec son exemption au profit des retransmetteurs, exige que les retransmissions exemptées soient conformes à la Loi sur la radiodiffusion—par conséquent, la Loi sur la radiodiffusion se trouve ici intégrée à la Loi sur le droit d'auteur—et ensuite, l'exemption inconditionnelle accordée par le CRTC aux nouveaux médias assure la conformité à la Loi sur la radiodiffusion des retransmetteurs sur Internet, puisqu'ils ne sont soumis à aucune exigence, bien qu'ils n'aient pas à obtenir de licence et qu'ils ne soient pas réglementés.

    C'est là une question essentielle pour la radiodiffusion canadienne et nord-américaine, sinon pour la radiodiffusion à l'échelle mondiale, puisque Internet est de portée planétaire. Il n'existe aucune technologie éprouvée qui limite efficacement la réception des retransmissions sur Internet à l'intérieur des frontières canadiennes. La retransmission sur Internet risque de priver la télévision gratuite de contenu canadien et non canadien au profit des canaux spécialisés, de la télévision payante et des autres moyens de diffusion d'émissions qui échappent à la portée du régime canadien de la retransmission. C'est un rapport de cause à effet.

    Les conséquences dramatiques et potentiellement fatales qui en découlent pour la télévision gratuite sont évidentes. À moins qu'on modifie la Loi sur le droit d'auteur pour priver les retransmetteurs sur Internet des avantages du régime de la retransmission, il faut leur interdire les avantages de la licence obligatoire: non pas interdire la diffusion d'émissions, mais rendre le consentement obligatoire. C'est pourquoi nous demandons instamment au Cabinet de donner au CRTC l'ordre de modifier son ordonnance d'exemption de façon qu'elle s'applique uniquement aux producteurs de contenu, à l'exclusion des retransmetteurs sur Internet.

    Il existe un autre secteur de recoupement entre la radiodiffusion et le droit d'auteur: il s'agit de la liste des signaux et des services transmis par satellite dont le CRTC a autorisé la distribution au Canada. Alors que le Conseil exige l'obtention de tous les droits nécessaires sur les émissions diffusées par ces signaux, les signaux de télévision gratuite ne nécessitent pas l'obtention de droits, à cause de cette exemption au profit de la retransmission.

    Récemment, le CRTC a ajouté des signaux de télévision gratuite provenant de France, d'Irlande, d'Australie et de Nouvelle-Zélande à la liste des signaux transmis par satellite. De nombreuses émissions à grand succès, pour lesquelles les radiodiffuseurs canadiens ont obtenu des droits d'exclusivité au Canada et dont dépend leur viabilité peuvent être importés au Canada sur ces signaux étrangers. Comme les émissions proviennent de fuseaux horaires différents, il est peu vraisemblable que les radiodiffuseurs canadiens soient en mesure d'appliquer les dispositions sur la substitution de signaux identiques, puisque les diffusions ne seront pas simultanées.

    Les propriétaires canadiens et étrangers du droit d'auteur sur les émissions diffusées par ces signaux n'ont pas consenti à ce qu'elles soient importées sur des signaux étrangers et ne recevront pas un sou de revenu supplémentaire dans le cadre du régime de retransmission. La meilleure solution consisterait à modifier la définition du mot «signal» dans la Loi sur le droit d'auteur de façon que seuls les signaux provenant de la zone continentale des États-Unis ou du Canada puissent être retransmis en vertu d'une licence obligatoire; à défaut d'une telle solution, nous demandons que le Cabinet empêche le Conseil d'ajouter des signaux non canadiens de télévision gratuite à la liste, à moins qu'ils ne proviennent de la zone continentale des États-Unis, où les fuseaux horaires sont les mêmes qu'au Canada, et que le Conseil soit tenu de supprimer les signaux qui ont été ajoutés à la liste mais qui n'ont pas encore été diffusés.

    En conclusion, j'aimerais dire que les travaux de ce comité et le fait qu'il ait entrepris cet exercice montrent bien que les nouvelles technologies et la mondialisation exigent une réévaluation critique de la culture et des dimensions industrielles des politiques de radiodiffusion. Il convient de déterminer si ces politiques sont fondées sur des réalités dépassées et, dans la négative, de décider du poids à accorder aux divers éléments dans la mesure où une émission à contenu canadien a peu de chances d'être parfaitement conforme à tous les éléments de toutes les politiques.

  + -(1050)  

    Des obligations accrues en vertu des ententes multilatérales d'échanges commerciaux et des protections renforcées de propriété intellectuelle créeraient au Canada de nouveaux emplois pour les Canadiens et élargiraient l'accès réciproque au capital et aux marchés étrangers. Une nouvelle approche axée sur l'assouplissement de la réglementation, la concurrence, la collaboration et la réduction de politiques protectionnistes faciliterait, à notre avis, l'atteinte des objectifs de politique du Canada.

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M. Douglas Frith:
    J'ajouterais un dernier commentaire, monsieur le président. Beaucoup de Canadiens, je crois, ne savent pas que les entreprises canadiennes ont connu de grands succès au cours des deux dernières décennies. Beaucoup de ces sociétés cotées en bourse tirent le gros de leur revenu des activités à l'étranger. Cela étant le cas, tout le monde a intérêt à veiller à ce que les ententes multilatérales de commerce respectent les besoins à la fois des Canadiens et des non-Canadiens. C'est donc pour cette raison que nous sommes d'avis que ce secteur, surtout dans le domaine de la culture, devrait faire l'objet de négociations commerciales, qu'il devrait être défini et un mécanisme de règlement des différends conçu.

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Le président:
    Monsieur Frith, je dirais que vous avez mis le loup dans la bergerie. Je crois que la période des questions sera des plus intéressantes.

    Je donnerai la parole d'abord à madame Hinton.

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Mme Betty Hinton:
    Merci.

    J'ai écouté vos exposés avec beaucoup d'intérêt.

    Monsieur Frith, vous avez abordé quelque chose qui me tient particulièrement à coeur. Vous avez dit que ce secteur devrait faire l'objet de négociations commerciales. Ma circonscription a beaucoup souffert à cause du différend entourant le bois d'oeuvre; ce ne sont pas les travailleurs dans ces régions qui ont créé le problème, mais plutôt l'entente commerciale et les mesures de protection employées. Je dois avouer donc que votre suggestion de conclure une entente sur encore un autre secteur, qui pourrait donner lieu à des différends commerciaux, me rend nerveuse.

    Par contre, je suis d'avis que le comité doit tenir compte, entre autres, de la liberté des Canadiens. Je crois qu'on ne peut pas dire aux gens ce qu'ils peuvent regarder ou ne peuvent pas regarder. Nous avons vu ce qui arrive quand nous essayons de faire cela. Nous avons constaté la création et la croissance d'un marché gris au Canada. L'existence de ce marché gris a sérieusement miné l'efficacité du Fonds canadien de télévision.

    Je ne sais pas si ce point a déjà été abordé. Vous savez peut-être qu'une émission intitulée Beachcombers II est au stade de développement. Les responsables ont fait une demande de subvention au FCT. Comme les réalisateurs, les titulaires de la licence et ceux qui ont payé les droits de distribution au Canada ont perdu des revenus, les profits ont disparu et le FCT a reçu moins d'argent. Par conséquent, Beachcombers II n'a pas vu le jour. C'était bien dommage, à mon avis.

    J'aimerais vous demander d'éclaircir cet aspect-là.

  + -(1055)  

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M. Douglas Frith:
    J'ai les mêmes préoccupations que vous. On a tendance à critiquer les Américains d'être tellement partisans du libre-échange qu'ils finissent par en payer les coûts. Cela dit, dans le dossier du bois d'oeuvre, il existe au moins un mécanisme de règlement des différends qui est défini. Espérons que le Canada va avoir gain de cause. Entre temps, la situation est très difficile. C'est là un des avantages d'un accord commercial multilatéral. Il comporte un mécanisme de règlement des différends, qu'il vaut mieux définir que laisser non défini, surtout quand on fait affaires avec un éléphant.

    En ce qui concerne le marché gris, je suis tout à fait d'accord avec vous. Quel est le rôle de la réglementation? Au fond, elle oblige les entreprises commerciales à faire quelque chose qui ne fait pas vraiment leur affaire parce que cela va nuire à leur position commerciale.

    Les conditions imposées au début par le CRTC sur les sociétés canadiennes qui voulaient établir leurs propres entreprises de distribution directe ont retardé l'arrivée sur le marché de ces entreprises. Entre temps, le système américain était disponible. Les consommateurs ont exprimé leur préférence dans le marché. Ils ont donné de fausses adresses, créant ainsi le marché gris. Vous avez raison de dire qu'on a perdu beaucoup d'argent, ce qui a fait diminuer notamment les cotisations au fonds de télévision. Mais c'est aussi pourquoi il faut faire très attention si on opte pour la réglementation. La réglementation sert généralement à obliger une industrie à faire quelque chose qu'elle ne ferait pas normalement.

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Mme Betty Hinton:
    Je suis partiellement en accord avec ce que vous venez de dire.

    Comme membre du comité, j'écoute attentivement depuis des mois et, jusqu'ici, personne ne m'a bien défini ce que signifie la culture canadienne. M. Sandmark a proposé une augmentation obligatoire de la programmation autochtone. Si on faisait cela pour les Autochtones, il faudrait le faire aussi pour d'autres groupes ethniques. On se retrouverait bientôt avec un pourcentage très élevé de programmation obligatoire, ce qui nous laisserait encore moins de marge de manoeuvre.

    Je voudrais que quelqu'un définisse pour moi ce qui constitue vraiment la culture canadienne.

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M. Peter Sandmark:
    Est-ce une question?

    Mme Betty Hinton: Je suppose que oui.

    M. Peter Sandmark: Nous devrions peut-être refléter davantage la nature multiraciale, multiethnique et multiculturelle du Canada. Faut-il rendre cela obligatoire? L'approche actuelle ne fonctionne pas. Les diverses cultures du Canada ne sont pas reflétées actuellement. Il y a seulement quelques gestes symboliques.

    Cela doit venir des créateurs. Dans mon mémoire, je suggère qu'on mette à contribution des réalisateurs des différentes communautés culturelles. APTN, par exemple, présente des réalisations autochtones, qui non seulement portent sur la culture autochtone mais qui sont produites par des Autochtones.

    Ce serait préférable de ne pas rendre cela obligatoire, mais que faire si ni le secteur privé ni le secteur public n'est prêt à combler le vide? Il s'agit de bien refléter la culture canadienne.

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M. Douglas Frith:
    Susan et moi nous avons beaucoup discuté de cette question, c'est-à-dire comment définit-on la culture canadienne? À notre avis, il y a un lien avec le scénario, qui doit être canadien et se dérouler au Canada. Mais la situation est la même au Canada ou aux États-Unis. Il faut partir d'un bon scénario, d'un bon script, et il faut du capital risque, même si on ne sait pas si le produit est bon avant de le présenter à un auditoire.

    S'il y avait des formules garanties, on n'aurait pas la situation actuelle où sept studios cinématographiques sur dix perdent de l'argent. Pourquoi faire quelque chose dans l'intention d'échouer? Personne ne le fait. Mais c'est une activité compliquée, et il y a toujours beaucoup de risque.

    C'est pourquoi nous demandons aux membres du comité, quand vous vous penchez sur la définition de la culture... Et l'ACDF ne s'oppose plus aux subventions culturelles, pour autant que nous n'ayons pas à les payer. À cette condition-là, nous pouvons les accepter.

    Cela dit, je crois que vous devriez être plus souples à bien des égards afin de créer un système où on peut récompenser les succès si le scénario est canadien, si le film est tourné au Canada, et si on a examiné les dépenses afin d'assurer que ce sont les diffuseurs, tels CTV, Global ou CBC/Radio-Canada, qui reçoivent l'incitatif pour la promotion du produit, et non les câblodistributeurs.

    Le succès ne devrait pas être défini en fonction de critères tels que le fait d'avoir huit heures par semaine aux heures de pointe. Nous avons les informations et les sports. Sans ces deux types d'émissions, il ne reste pas grand-chose. Ce qu'il faut faire, c'est encourager la production et accorder des incitatifs pour inciter les sociétés de diffusion à créer des réussites au lieu de tout simplement remplir le temps d'antenne.

  + -(1100)  

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Le président:
    Ms. Gagnon.

[Français]

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Mme Christiane Gagnon:
     Merci, monsieur le président.

    Monsieur Frith, vous parlez beaucoup d'un modèle de culture canadienne. Comme Québécoise, je sais ce qu'est le modèle de culture québécoise. Tout à l'heure, vous avez mentionné que c'est la langue qui fait en sorte que notre produit n'est pas compétitif sur le marché américain. Vous ne l'avez peut-être pas dit dans ce sens-là, mais il semble que ce soit la langue qui fait que nous n'avons pas le même problème que vous et que nous avons notre propre production.

    Cependant, je dis pour ma part que c'est beaucoup plus que la langue. Je pense que c'est attribuable à la manière dont la production québécoise est faite, à notre sensibilité par rapport à l'histoire, à la politique et à nos valeurs culturelles. C'est beaucoup plus cela qui nous identifie et qui a démarqué notre production.

    Je comprends que la langue puisse être un facteur de différenciation par rapport à la production américaine, mais les Québécois sont aussi interpellés par la production américaine. Toutefois, Bouscotte, par exemple, ou La Famille Plouffe autrefois ont en quelque sorte marqué la production québécoise, et cela s'est intensifié au fil des ans. Vous parlez de contenu canadien ou de production canadienne. Je pense que c'est une réalité qui appartient au Canada anglais et que c'est le Canada anglais qui se cherche dans sa culture canadienne.

    Je regarde l'ensemble des émissions qui ont été faites au Québec; on a peut-être mieux ciblé nos histoires. Notre statut minoritaire au Canada a peut-être fait en sorte qu'on a essayé de trouver une production qui nous distinguait du Canada d'abord, ce qui a fait en sorte que, dans le contexte actuel, on entend beaucoup parler de la souveraineté culturelle du Canada. J'aimerais que vous vous exprimiez de cette façon. Quand on parle d'un modèle culturel canadien, je pense qu'il faut aussi tenir compte de ces deux visions en abordant la problématique de l'identité canadienne et de la production culturelle canadienne.

    Monsieur Frith, avez-vous aussi cette perception?

[Traduction]

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M. Douglas Frith:
    Non, je n'ai pas la même perception. Je crains que vous ayez peut-être mal interprété mes propos.

    Je voulais dire qu'au Québec, avec ou sans les quotas, vous avez une cote d'écoute de 16 p. 100, soit quatre fois plus de gens, pour les émissions locales. Ces résultats ne sont pas attribuables aux quotas. Ils sont attribuables aux raisons que vous avez énoncées, toutes ces raisons. Et la situation existe dans d'autres pays. Au Québec, 9 des 10 émissions de télévision les plus populaires sont des productions locales, québécoises, des histoires québécoises, alors qu'à l'extérieur du Québec, 9 des 10 films les plus populaires viennent des États-Unis.

    Il existe donc une société bien distincte à cet égard au Québec, et je crois qu'il y a toute une gamme de raisons et de circonstances qui expliquent cette situation. À notre avis, ce n'est certainement pas attribuable au règlement.

    Susan, je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose.

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Mme Susan Peacock:
    Non, notre message était simplement qu'il existait une différence énorme. Je suis d'accord avec Doug qui lui est d'accord avec vous; cette situation est attribuable à toutes sortes de facteurs, comme ceux que vous avez mentionnés. Mais nous voulions simplement indiquer que les règlements ne pouvaient pas vraiment expliquer la situation puisqu'après tout les règlements sont les mêmes au Canada anglais et au Canada français.

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Le président:
    Ms. Gagnon.

[Français]

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Mme Christiane Gagnon:
    Je vous remercie. Cela m'interpelle beaucoup, surtout quand il est question de culture. Vous dites qu'il faudrait modifier la Loi sur le droit d'auteur en ce qui concerne la limitation du signal. Vous avez aussi parlé d'une loi d'exception sur la source du contenu et non sur le transmetteur. Pouvez-vous nous dire si les guides que vous nous donnez pour que le transfert sur Internet protège les droits d'auteur sont donnés ailleurs, dans d'autres pays? Est-ce un signal qui est donné par d'autres pays pour permettre de protéger les créations canadiennes ou autres? Y a-t-il d'autres pays qui ont entrevu cette façon de faire?

  + -(1105)  

[Traduction]

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Mme Susan Peacock:
    En réponse à votre question, si je l'ai bien saisie, j'aimerais signaler que la Loi canadienne sur le droit d'auteur protège les oeuvres canadiennes—celles qui sont créées au Canada par des Canadiens—, que ces oeuvres correspondent ou pas à la définition de «contenu canadien». La Loi canadienne protège également, au Canada, les oeuvres de ressortissants de nombre d'autres pays, en fait tous les pays qui sont signataires des mêmes traités internationaux que le Canada.

    Je ne veux pas passer en revue les subtilités de cette protection, mais je peux dire que dans l'ensemble, nombre de pays, la majorité des pays qui produisent des oeuvres protégées par le droit d'auteur, assurent une protection aux ressortissants d'autres pays si ces États font de même.

    Est-ce que cela répond à votre question? Je crois que l'interprète a eu quelques problèmes, peut-être moi aussi.

[Français]

prochaine intervention intervention précédente

Mme Christiane Gagnon:
    Je parlais de la captation du contenu canadien sur Internet. Vous avez donné des balises pour protéger le droit d'auteur, pour qu'il n'y ait pas de captation de contenu canadien sur Internet. Vous avez donné deux balises sur la limitation du signal pour qu'on puisse réglementer la diffusion sur Internet. Vous avez dit que ce serait la source du contenu et qu'il faudrait une loi d'exception sur le changement.

    Y a-t-il d'autres pays qui ont pensé à cela ou si c'est tout nouveau? C'est ce que je voudrais savoir. Où avez-vous pris les balises?

[Traduction]

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Mme Susan Peacock:
    Vous abordez ici deux aspects, je crois.

    J'aimerais commencer par la diffusion sur Internet. Beaucoup de pays ne traitent pas de cette question précise dans leur loi. Cependant, les États-Unis, l'Australie et la Communauté européenne abordent ces questions dans les lois pertinentes. Dans ces pays, la diffusion sur Internet représente une violation à moins qu'on ait obtenu le consentement des propriétaires de l'émission.

    Je ne saurais trop insister là-dessus. On nous a accusés de nous opposer à l'innovation, comme si nous voulions interdire la diffusion de films ou d'émissions de télévision sur Internet. Ce n'est pas le cas. Nous voulons simplement empêcher la diffusion des émissions de nos membres sur Internet si cela rapporte un bénéfice aux diffuseurs sans qu'ils aient obtenu notre consentement et si cela met en péril notre marché international.

    Donc il est vrai que certains pays ont abordé dans leurs mesures législatives cette question particulière. À ma connaissance aucun pays n'autorise la rediffusion sur Internet d'émissions sans le consentement des créateurs. Certains ne se sont pas prononcés dans un sens ou dans l'autre. Nombre de pays modernes interdisent simplement ce genre de pratique.

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Le président:
    Merci.

    Les intervenants suivant sont MM. Mills, Harvard et Volpe.

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M. Dennis Mills:
    Madame Peacock, je crois que vous avez très bien expliqué la situation en ce qui a trait à la retransmission. Il est clair que nous pourrons nous pencher sur la question lorsque le projet de loi C-48 nous sera renvoyé.

    Monsieur Frith.

    M. Douglas Frith: Oui, monsieur Mills

    M. Dennis Mills: Plus de 700 films ont été tournés dans ma collectivité depuis mon élection au Parlement. Les représentants des studios, qu'il s'agisse de Warner, de Disney ou d'autres intervenants, me disent toujours qu'ils sont au Canada, qu'ils réalisent ces films ici, principalement, en raison de la compétence de notre population active, comme nos meuleurs et polisseurs de verres optiques, nos décorateurs, et nos responsables du cadrage. Évidemment la deuxième raison c'est la valeur du dollar canadien. La troisième serait le régime fiscal progressif offert dans ce secteur.

    Êtes-vous d'accord?

  + -(1110)  

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M. Douglas Frith:
    Oui. Et je mettrais les raisons dans le même ordre également.

    Au cours des cinq dernières années, le nombre de longs métrages tournés au Canada a triplé. La situation est en parti attribuable à la valeur du dollar canadien. Le talent qui existe au Canada y est également pour beaucoup.

    Ce que vous avez dit est vrai.

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M. Dennis Mills:
    Nous sommes donc d'accord.

    Je ne comprends pas vraiment pourquoi nous devrions rajuster notre tir et cesser d'appuyer ce secteur. Vous indiquez dans votre exposé que nous devrions cesser d'intervenir et de réglementer le secteur. Ce n'est que grâce à une intervention massive du gouvernement du Canada que ce secteur se trouve dans une situation aussi saine.

    Ce n'est pas là mon interprétation. Je vois que vous êtes d'accord. Alors comment trancher? Vous dites que vous approuvez tout ce qui a été fait mais on propose maintenant de s'orienter dans une autre voie alors que les choses vont très bien.

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M. Douglas Frith:
    Il ne faut pas oublier qu'il existe au sud du 49e parallèle un mouvement visant à mettre un frein à la production extérieure, sous la direction du mouvement syndical américain. À notre avis, le réalisateur devrait pouvoir décider où il veut tourner le film. Il ne devrait pas y avoir d'après nous de règlements qui stipulent que si on vous offre un incitatif pour tourner le film ailleurs qu'aux États-Unis, votre produit sera visé par des mesures tarifaires. Nous désapprouvons une telle ligne de conduite. Nous jugeons qu'il faut laisser le marché...

    Dans le secteur du long métrage, le Canada livre concurrence à d'autres pays comme l'Australie, le Royaume-Uni, l'Union européenne. Ceux-ci offrent ce que nous appelons des programmes d'encouragement à l'industrie pour encourager les réalisateurs à tourner leurs films chez eux. Ces pays procèdent de cette façon parce que s'il n'est pas possible d'attirer les réalisateurs étrangers, vous ne pouvez pas créer l'infrastructure qui permettra aux réalisateurs locaux de tourner leurs propres films... Si du jour au lendemain il n'y avait plus de films américains tournés au Canada, l'infrastructure qui a été constituée au cours des cinq ou six dernières années ne saurait survivre, parce qu'elle dépendrait exclusivement de la réalisation canadienne ou locale.

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M. Dennis Mills:
    Vous parlez pratiquement de libre marché, et je n'arrive vraiment pas à comprendre pourquoi les gens d'affaires iraient ailleurs si l'on songe à tout ce que l'on offre, le talent, la valeur du dollar canadien, et le traitement fiscal préférentiel.

    De toute façon, j'espère que nous poursuivrons dans la même voie parce que nos efforts ont porté fruit, et si l'on changeait de cap nous pourrions devenir très vulnérables. Je crois que l'intervention du gouvernement et la réorientation de l'industrie ont permis de créer un secteur fort sain.

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M. Douglas Frith:
    Dennis, je ne voudrais pas que l'on pense que nous sommes venus avec une longue liste de plaintes, car à la suite de la convergence de certaines des sociétés au Canada au cours des cinq ou six dernières années, nous avons des liens beaucoup plus étroits avec les représentants des studios à Hollywood. L'Association canadienne des radiodiffuseurs et l'Association canadienne de production de film et télévision sont sur la même longueur d'ondes en ce qui a trait à la majorité des questions qui touchent le secteur parce que tous ces efforts visent à assurer l'emploi de Canadiens. Nous ne voudrions pas que vous pensiez que...

    M. Dennis Mills: Merci.

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Le président:
    J'aimerais rappeler aux députés que nous accusons un certain retard. Nos derniers intervenants seront donc M. Harvard et Mme Bulte.

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M. John Harvard:
    Si nous accusons un retard, vous êtes à blâmer. Après tout, monsieur le président, c'est pourquoi vous avez une prime de président de comité.

    Je dois dire que je comprends très bien Mme Hinton lorsqu'elle dit qu'elle n'arrive pas vraiment à définir ce qu'on entend par contenu canadien, mais Betty, je crois que vous saurez ce que c'est quand vous le verrez.

    Monsieur Frith, vous n'avez certainement pas perdu votre talent de politicien même si vous n'avez pas fréquenté les couloirs du Parlement depuis déjà plusieurs années; je crois que votre proposition, soit d'inclure la culture lors des négociations commerciales internationales, ne sera pas très populaire, surtout pas auprès du Comité du patrimoine canadien.

    Monsieur Frith, je crois que lorsque vous proposez d'inclure la culture parmi les sujets faisant l'objet de négociations, vous dites que vous voulez qu'elle devienne un produit qui ne serait pas traité de façon différente du blé, de l'acier ou des voitures. Vous ne proposez donc pas une politique culturelle, mais plutôt une politique industrielle. Vous dites également, monsieur Frith, que les sociétés canadiennes se sont bien tirées d'affaire. C'est vrai, lorsqu'elles décident de jouer sur le marché international, mais je ne crois pas qu'elles se tirent si bien d'affaire quand vient le temps de vendre l'identité canadienne et de faire la promotion de la culture canadienne. Il s'agit de gens d'affaires compétents, comme c'est le cas pour les Américains, les Britanniques, les Français et les Allemands. Ils ne sont pas différents des autres.

    Nous nous réunissons pour parler de la culture et de la promotion de la culture et de l'identité canadiennes. Si, comme vous le proposez, nous incluons la culture à la liste des questions abordées lors des négociations commerciales internationales, comment cela changera-t-il le monde à très court terme? Je dis à très court terme, mais il pourrait s'agir de quelques années. Je crois qu'il suffirait, monsieur Frith, de penser au cinéma canadien où 97 p. 100 du temps d'écran est réservé aux films étrangers. Ce n'est pas le monde que vous décrivez, dans votre exposé, mais c'est ce qui se produirait.

    J'aimerais passer à une autre question. Je sais que vous voudrez répondre à mes commentaires, mais j'aimerais signaler que lorsque vous parlez de mécanismes de règlement des différends, je comprends ce que vous entendez par là, mais je crois que cela nous éloigne de la question centrale. Ce genre de mécanismes peut certainement être utile, mais je crois qu'il s'agit plutôt là d'une question qui se trouve vraiment en périphérie de la question qui nous occupe vraiment, à savoir si nous allons avoir une politique culturelle. Allons-nous adopter une politique qui fasse la promotion de l'identité canadienne? Nous n'avons pas l'avantage dont jouit le Québec. Le Québec a un mur culturel, un mur linguistique, Dieu merci! L'ensemble du Canada n'a pas ces avantages et il nous faut donc avoir recours à d'autres mécanismes. C'est ce que nous avons fait par le passé. Ce n'est pas parfait, loin de là, mais je crois que vous proposez simplement d'abandonner.

  + -(1115)  

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M. Douglas Frith:
     Monsieur Harvard, vous faites preuve d'une grande éloquence.

    Je crois qu'il y a un malentendu. Je ne proposais certainement pas que le Canada abandonne la politique publique visant la création d'un programme culturel qui reflète les désirs des Canadiens qui veulent entendre leurs propres histoires et y avoir accès. La politique publique doit être en fait un ensemble d'éléments homogènes. D'un côté, vous avez les préoccupations culturelles. Je dis simplement que votre comité doit se pencher sur la question et s'entendre sur ce que cela représente. Si vous ne pouvez définir cette notion, vous pouvez au moins négocier là-dessus lors des négociations commerciales multilatérales.

    Je n'essaie pas de priver le Canada de l'habileté de créer sa propre politique culturelle publique, pas plus qu'on le fait en France, en Allemagne ou en Norvège. Mais à l'autre extrémité de cet ensemble se trouve l'élément industriel qui, monsieur Harvard, n'a pas de quotas ou de contenu canadien; cet élément est complètement axé sur le marché. Pour ce qui est du terme «culture», je recommande fortement au comité de consacrer beaucoup de temps à l'étude de ce concept.

    Je crois que la proposition que Susan et moi avons formulée, soit la création d'un système plus souple, l'attribution de plus de points... Tout compte fait, nous représentons les intérêts américains mais nous sommes des Canadiens. L'abus du système est à mes yeux frustrant simplement parce que vous êtes un Canadien et vous pouvez aller faire une chose ou une autre qui n'a rien à voir avec la culture canadienne—absolument rien—et toujours avoir accès à un financement canadien.

    Je crois que nous devons définir ce que nous entendons par culture, obtenir du Trésor tout l'argent nécessaire pour élaborer une politique culturelle. Je ne m'y opposerai pas du tout. Mais cet argent devrait provenir du Trésor et devrait servir à jeter les bases d'une bonne politique publique en matière de culture.

    Pour en venir au cinéma, je ne connais pas la solution à ce problème.

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M. John Harvard:
    Vous n'avez pas besoin de régler le problème. Vous n'avez pas de problème.

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Mme Susan Peacock:
    Vous parlez de 97 p. 100 du temps d'écran—ou peu importe le pourcentage—il y a de quoi s'alarmer.

    M. John Harvard: C'est lui qui l'a dit.

    Mme Susan Peacock: Beaucoup de gens le disent très souvent. Le pourcentage varie un peu selon l'intervenant.

    J'ai étudié cela de près et je connais plusieurs économistes qui l'ont fait également; à ma connaissance, personne ne calcule ou n'a calculé le temps d'écran réservé aux films canadiens. Souvent, lorsqu'on dit ce genre de chose, je crois qu'on parle du pourcentage de revenu, du pourcentage des recettes des salles de cinéma qui sont attribuables aux films canadiens. Je peux vous assurer que le pourcentage des recettes attribuables aux films canadiens est beaucoup plus faible que leur part du temps d'écran. Si ces deux éléments étaient égaux, les films canadiens auraient beaucoup plus de temps d'écran. C'est la façon dont les choses fonctionnent. C'est une question d'offre et de demande.

  + -(1120)  

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Le président:
    Nous passons maintenant à Mme Bulte puis à Mme Lill. Puis nous ajournerons nos travaux.

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Mme Sarmite Bulte:
    Merci, monsieur le président.

    Monsieur Sandmark, je lis la page cinq de votre texte et vous y parlez des diffuseurs à but éducatif et non lucratif et du Fonds canadien de télévision. Je crois que vous parlez ici des lignes directrices et de l'administration. Avez-vous suggéré au conseil qu'il devrait assouplir les règles pour qu'ils puissent obtenir un financement du Fonds canadien de télévision?

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M. Peter Sandmark:
    Non, nous n'avons pas comparu devant le conseil. Nous avons cependant fait parvenir une lettre.

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Mme Sarmite Bulte:
    J'aimerais vous poser une autre question. Croyez-vous qu'il est absolument nécessaire de prolonger le mandat du Fonds canadien de télévision? Le mandat n'a été prolongé que pour une année supplémentaire. Croyez-vous qu'il importe pour les groupes que vous représentez que le Fonds poursuive ses activités et qu'en fait on élargisse son mandat?

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M. Peter Sandmark:
    Franchement non. Le nombre de cinéastes, de vidéastes et d'autres intervenants indépendants qui reçoivent une aide financière du FCT est très petit. J'en connais quelques-uns. Il s'agit par exemple de très petites compagnies de réalisation de films. C'est pas facile de préparer tous les documents qu'il faut présenter au FCT. Pour être honnête, la réponse est non.

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Mme Sarmite Bulte:
    J'ai maintenant une petite question pour M. Frith et Mme Peacock. Je sais que vous aurez l'occasion de vous adresser à notre comité lorsqu'il étudiera l'article 31 de la Loi sur le droit d'auteur. Votre organisation désire-t-elle l'exclusion complète de l'Internet?

    Pour ce qui est des ententes commerciales, comme l'ALENA, nous avons prévu des mesures de représailles. Les gens disaient: «Vous allez nous nuire si vous optez pour des mesures de représailles.» Nous avons vu ce qui s'est passé dans le dossier des revues. Une décision touchant le secteur des arts a entraîné des mesures de représailles dans le domaine des plastiques et de l'acier.

    Depuis l'ALENA, dans l'accord de libre-échange entre le Chili et le Canada, et même dans le récent accord de libre-échange entre le Canada et Costa Rica, on exclut complètement la culture. Compte tenu de ce qui s'est passé avec l'ALENA, pourquoi une personne intelligente penserait-elle qu'on devrait procéder de cette façon?

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M. Douglas Frith:
    L'Accord de libre-échange nord-américain est en vigueur depuis 14 ans. Même les négociateurs de l'époque, Simon Reisman et les autres qui ont négocié au nom du Canada et des États-Unis, ont reconnu qu'il y avait des lacunes dans certains des mécanismes de règlement des différends. Cela prend du temps à surmonter. Prenons le canal de musique country--on a trouvé une solution, n'est-ce pas, madame Bulte? L'affaire a été résolue. Ce que j'essaie de dire c'est que le problème a été réglé, quoique vous n'approuviez peut-être pas la façon, mais c'est surtout parce que vous n'aviez pas de règles pour le règlement des différends.

    Si nous arrivons enfin à définir la culture canadienne, commençons par là. Je suis aux prises avec cette question. Je n'ai pas toutes les réponses. Quand vous en aurez, vous devrez être en mesure de la définir assez bien pour la négocier.

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Mme Sarmite Bulte:
    Le sous-comité sur le commerce international s'est penché sur l'Accord mutilatéral sur l'investissement, je m'en souviens. Nous avons examiné la définition de la culture et des produits culturaux au sein de l'ALENA et nous avons essayé de rédiger une nouvelle définition. C'était en fait la SOCAN qui a fourni la définition la plus récente, mais nous ne savons pas si elle s'appliquera aux médias qui ne dépendent pas de la technologie.

    Je me demande comment on pourrait jamais amener les Américains à la table pour renégocier régulièrement quelque chose qui est toujours en évolution. Voilà matière à réflexion.

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Mme Susan Peacock:
    Personnellement, je ne suis pas une grande experte en matière de commerce international. Ce qu'on voulait souligner c'est que nous les Canadiens avons déjà vu et sommes peut-être à la veille de revoir comment une exonération des ententes commerciales pour les industries culturelles ne veut pas dire qu'il n'y aura plus de différends commerciaux. C'est tout. Bien des gens disent que l'exonération des industries culturelles représente une forme de protection. Cela protège, mais seulement jusqu'à ce qu'il y ait un différend.

  + -(1125)  

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Mme Sarmite Bulte:
    Vous représentez les sudios américains, et ce qui est absolument formidable quand on négocie avec les Américains, souvenez-vous qu'il s'agit de négocier l'élimination de votre protection, mais vous ne serez jamais en mesure de négocier l'élimination du protectionnisme américain. C'est ça la réalité des négociations avec les Américains.

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Le président:
    Nous allons nous en tenir à cela. Je ne crois pas que nous allons parvenir à nous entendre aujourd'hui.

    Des voix: Oh, oh!

    Le président: Merci beaucoup d'être venus comparaître aujourd'hui. Vous nous avez certainement donné l'occasion d'avoir une discussion animée, et nous l'apprécions.

    Nous voulons maintenant souhaiter la bienvenue au Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, représenté par M. Peter Murdoch, vice-président, Médias, et M. Michael Sullivan, représentant national.

[Français]

    Nous souhaitons aussi la bienvenue au Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique, représenté par Mme Jacqueline Turgeon du Syndicat des employés de bureau et professionnels de Radio-Canada; M. Réal Leboeuf, président du Syndicat des employé(e)s de TVA à Montréal; M. Bernard Chabot, journaliste à la station régionale de Québec du réseau TVA; M. Jacques Denommé, vice-président de la câblodistribution et premier vice-président du Syndicat des employés de Vidéotron; et M. Armand Dubois, journaliste au réseau TVA à Montréal.

[Traduction]

    Je demanderai à M. Murdoch de commencer. Essayez d'être le plus bref possible, afin de donner la chance aux députés de poser des questions, s'il vous plaît.

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M. Peter Murdoch (vice-président, Médias, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier):
    Merci de permettre à notre syndicat de se faire entendre. Comme vous le savez, le Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier représente quelque 150 000 travailleurs canadiens dans de nombreux secteurs de l'économie. Notre syndicat est le plus important dans le monde des médias; il représente 20 000 Canadiens qui travaillent pour des radiodiffuseurs publics et privés ainsi que dans notre industrie cinématographique.

    Comme on l'a dit dans nos présentations précédentes, d'autres peuvent concevoir le pont; nos membres le fabriquent. Nos membres ont un point de vue particulier qui vient de leur engagement dans leur vie professionnelle. Je sais que vous avez déjà entendu un certain nombre de témoignages de nos membres dans votre tournée pancanadienne et je tiens à vous remercier de l'attention que vous avez accordée à leurs commentaires.

    Permettez-moi de souligner à quel point j'ai été frappé par l'esprit de culture qui se dégage de cette salle, par les peintures montrant des Canadiens au travail et par les deux tableaux principaux—celui derrière moi, L'imprimé, et celui devant moi, L'esprit de l'imprimé. L'un montre la technologie, l'autre illustre l'esprit de la culture. Ne l'oubliez pas dans vos délibérations.

    Permettez-moi de commencer mes observations par quelques remarques sur votre rôle. J'ai lu récemment un certain nombre de mémoires volumineux et je me demande comment votre comité peut s'y retrouver dans tout ce jargon technologique qu'il m'arrive moi-même de ne pas très bien comprendre. Plus encore, comment pouvez-vous croire les prévisions sur le monde futur de la radiodiffusion alors qu'il ressort clairement de la chute du prix des actions que bon nombre de grandes sociétés médiatiques ont lamentablement échoué du côté de la technologie et de la convergence?

    Le SCP est d'avis qu'il n'est pas nécessaire de travailler encore à l'aspect politique de votre travail. La Loi sur la radiodiffusion définit très bien les valeurs de base. Ce que vous devez examiner, ce sont les moyens et ces moyens s'expriment par le rendement. Notre culture de radiodiffusion et de réglementation arrive-t-elle à exprimer de façon suffisamment évidente nos valeurs de base, telles qu'elles sont énoncées dans la loi? Quels changements faudrait-il y apporter, le cas échéant, pour qu'elle fonctionne mieux?

    Nous avons abordé cinq ou six sujets dans notre présentation et j'avoue d'emblée que notre syndicat est d'accord avec la plupart des observations qui ont été faites par la Guilde canadienne des réalisateurs et la Writers Guild of Canada au sujet du contenu canadien et d'un certain nombre d'autres choses.

    Parmi les sujets dont nous avons choisi de parler, il y a d'abord la possibilité qu'un des plus grands intervenants dans le secteur de la radiodiffusion soit actuellement le secteur bancaire. Les banques ont consenti d'énormes prêts à une poignée de grandes sociétés multimédias; vu la responsabilité qu'elles doivent assumer vis-à-vis de leurs propres actionnaires, elles s'intéressent maintenant vivement aux conseils d'administration de nos grandes sociétés médiatiques. Nous ne disons pas que les banques décrètent ce que CanWest, par exemple, doit annoncer aux nouvelles de 23 heures, mais elles ont une influence indubitable sur la façon dont des sommes importantes devraient être dépensées ou épargnées.

    En dépit des bonnes intentions des politiques gouvernementales, les radiodiffuseurs privés ont parfois les mains liées par les obligations financières de leur société mère en raison des dettes contractées pour faire des acquisitions fondées sur une idée fausse des retombées prévues de la convergence, de l'augmentation du coût des ressources, des fluctuations des taux d'intérêt, des changements dans la demande publicitaire et d'autres facteurs encore.

    Ce climat n'encourage ni la créativité ni la prise de risque, deux ingrédients essentiels à un bon secteur de la radiodiffusion. Au contraire, il peut en résulter une diminution constante des investissements dans la production d'émissions canadiennes. En outre, cet endettement et ses créanciers pourraient compromettre ce qui, pour les Canadiens, sont des exigences de base pour le fonctionnement de sociétés médiatiques dotées d'obligations nationales.

    Notre syndicat croit que cet endettement a favorisé le développement d'un antagonisme et d'une agressivité injustifiés envers les radiodiffuseurs publics et augmenté les pressions pour déstabiliser l'engagement du gouvernement envers le radiodiffuseur national en vue de libérer des créneaux commerciaux pour le secteur privé. De plus, puisqu'une poignée de ces sociétés multimédias possèdent également les principaux journaux du Canada, les problèmes financiers graves de ces sociétés et leurs effets sur les principaux médias du Canada ne font peut-être pas l'objet d'une couverture médiatique aussi diligente qu'on pourrait l'espérer.

    Nous croyons également que cet endettement a motivé un lobbying frénétique visant l'allégement des règles sur la propriété par des intérêts étrangers. Les sociétés qui se trouvent à court de fonds en raison d'une mauvaise stratégie d'investissement préconisent des solutions rapides—la vente de médias, fort probablement à des investisseurs américains. Voilà qui est loin de respecter l'intérêt public. Il ne fait aucun doute qu'il s'agit de réduire la dette des sociétés et non d'augmenter le contenu canadien des émissions.

  + -(1130)  

    Les actionnaires de ces grandes sociétés ont vu leurs investissements partir en fumée, malheureusement, mais nous ne croyons pas que la solution consiste à réduire notre engagement envers les valeurs énoncées dans la Loi sur la radiodiffusion. De l'avis de notre syndicat, la seule solution est peut-être l'éclatement de ces géants des médias. Toutes ces considérations et d'autres tout aussi graves nous amènent à croire qu'il est essentiel que le gouvernement agisse maintenant au nom des Canadiens.

    Nous recommandons tout d'abord que le comité du patrimoine demande au gouvernement fédéral de faire immédiatement une enquête sur la santé financière des principales sociétés médiatiques du Canada, sur les effets de l'endettement de leur société mère et sur l'influence de leurs créanciers—notamment les banques. Dans une telle enquête, il faudrait également examiner l'effet qu'a eu cet endettement sur la capacité de ces sociétés de desservir les localités où elles se trouvent ainsi que de respecter l'esprit et l'objectif de la Loi sur la radiodiffusion. Cette étude devrait aussi recommander le désaisissement si cela est dans l'intérêt du Canada.

    Le deuxième sujet qui nous préoccupe est le CRTC. Comparaître devant le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes a été une expérience frustrante pour un grand nombre d'intervenants. La dernière controverse au sujet d'une licence de diffusion dans la région de Toronto a montré à quel point il est urgent de modifier ce conseil.

    Notre syndicat croit que le gouvernement peut, par divers moyens, influer sur la politique publique par le truchement du CRTC. C'est lui qui lui attribue son budget, qui en nomme les membres, qui peut établir le cadre d'action et qui peut fixer des directives avant et après que les décisions sont prises. Et pourtant, on peut se demander à la lumière de certaines décisions douteuses si l'intérêt public a eu autant de poids que l'intérêt commercial.

    Comme nous l'avons déjà proposé ailleurs, nous croyons que, dans ce contexte, le CRTC devrait davantage tenir compte de la population qu'il dessert. Par exemple, lorsqu'il s'agit de décider de l'octroi d'une licence locale ou régionale, le tribunal devrait être composé de personnes qui sont prêtes à examiner rigoureusement les demandes en vue de défendre les intérêts de cette collectivité. En gros, le CRTC devrait être davantage comme une société de services publics; il devrait défendre les intérêts de la population et des consommateurs et exiger que les demandeurs expliquent de façon précise de quelle façon les normes seront respectées. Les décisions ne devraient pas se prendre en fonction des beaux discours des demandeurs.

    Comme d'autres, nous croyons qu'il serait très utile de modifier le processus de nomination. Les nominations au CRTC doivent être plus transparentes, faire l'objet d'une plus grande reddition de comptes et être plus pluralistes.

    Deuxième recommandation: nous recommandons que soit créé un processus de nomination publique doté d'un comité de sélection composé de représentants de tous les groupes de la société canadienne.

    Nous recommandons également que les commissaires ne soient pas autorisés à tirer un bénéfice financier d'une licence pendant une période de cinq ans.

    Nous recommandons en outre qu'un fonds soit créé pour permettre à des groupes d'intérêts publics d'intervenir lorsque cela est justifié.

    Nous recommandons qu'il y ait au sein du Conseil une représentation plus pluraliste des points de vue du milieu d'origine et des intérêts et que les commissaires chargés d'examiner les demandes relatives à de nouveaux services ou au renouvellement de licences soient choisis dans les collectivités que le radiodiffuseur se propose de servir.

    Nous recommandons que le Conseil cesse de favoriser les intérêts commerciaux et accorde la priorité à l'intérêt public.

    Notre troisième préoccupation est la propriété étrangère. Notre syndicat estime qu'il faut maintenir les mesures actuelles visant à limiter la propriété étrangère. D'autres témoins ont démontré que les limites actuelles donnent les résultats escomptés. Rien n'empêche les émissions américaines d'être diffusées au Canada, mais l'augmentation de la propriété étrangère peut avoir des effets négatifs importants.

    Le simple fait de déménager des administrations centrales à l'extérieur de notre frontière nationale nous ferait perdre diverses fonctions relevant de ces administrations centrales, entre autres les décisions, la recherche, la réaction aux politiques culturelles, les compétences en gestion de la radiodiffusion, etc. Le lobbying pour faire modifier notre régime fiscal, l'imposition des missions étrangères affiliées grâce à la propriété partagée, tout cela serait la norme. Les Canadiens auraient moins de choix, les Américains plus d'influence.

    Il serait possible de conserver les règlements sur le contenu canadien, mais ce ne serait qu'une question de temps, à notre avis, avant que les propriétaires peu intéressés aux priorités nationales usent de leur influence pour les faire abroger.

    Comme nous l'avons dit, les sociétés qui insistent le plus pour que ces règlements soient changés sont celles qui sont cousues de dettes. Ce qu'elles veulent, c'est apaiser la colère de leurs actionnaires et non défendre l'auditoire canadien.

    Troisième recommandation: nous recommandons fortement qu'il n'y ait ni modifications ni ajustements aux mécanismes et aux lois actuels qui limitent la propriété étrangère de nos médias. Lorsque les Canadiens décideront de céder aux États-Unis leur culture et leur patrimoine national, ils nous le feront bien savoir. Nous n'en sommes pas encore là.

  + -(1135)  

    S'il est un sujet commun de colère et de frustration pour ceux qui ont travaillé à la radiodiffusion la majeure partie de leur vie, c'est bien l'abandon de la programmation locale. Votre comité a entendu les témoignages de membres de notre syndicat qui vous ont expliqué comment, d'un bout à l'autre du pays, des petites villes qui possédaient auparavant leur station locale n'existent plus dans le monde de la radiodiffusion. Malheureusement, au chapitre de l'abandon de la programmation locale, CBC/ SRC est aussi coupable que les radiodiffuseurs privés. Les ressources, les artistes, l'infrastructure et la technologie sont maintenant centrés dans trois grandes villes: Toronto, Vancouver et, dans une certaine mesure, Calgary. On ne tient plus aucun compte de villes plus petites qui possédaient auparavant des postes bien actifs et produisaient des émissions d'intérêt local. Leurs studios ont disparu. Ce ne sont plus que des entrepôts d'équipement qui, comme la machinerie des vieilles mines, attend qu'on en fasse de nouveau usage.

    Les petites et moyennes localités n'ont joui d'aucun des bénéfices promis de la technologie, des fusions ou du partage des ressources. Leur situation ne s'est pas améliorée, loin de là. Ces villes et ces localités ont été littéralement laissées pour compte sous prétexte que «plus c'est gros, mieux cela vaut». On ne les considère plus maintenant que comme des yeux et des oreilles à qui on peut vendre de la publicité nationale.

    Les radiodiffuseurs privés et publics ont déclaré que le bassin démographique n'est pas suffisamment important pour justifier ces émissions. On nous dit que c'est une question de géographie. Il est temps de leur répondre haut et fort que tout cela est de la foutaise. L'étendue de notre pays fait partie de sa nature. Si nous ne tenons plus compte de sa superficie, c'est le Canada que nous abandonnons.

    Nous ne disons pas que chaque localité de plus de 10 000 âmes devrait réaliser sa propre version de Da Vinci's Inquest. Ce que nous préconisons, c'est un intérêt accru dans la programmation locale, des histoires populaires jusqu'aux festivals de musique, pour montrer que l'idée même de communauté est importante et que les radiodiffuseurs traditionnels en tiendront compte. Laissons les postes communautaires apporter, comme auparavant, leur contribution aux émissions des réseaux. Toute une gamme d'émissions, entre autres Romper Room et The Galloping Gourmet, ont été conçues, élaborées et réalisées localement.

    Notre syndicat n'est pas prêt, et votre comité ne devra pas l'être non plus, à dire que les choix des habitants de Flin Flon ou de Pictou seront limités pour des raisons géographiques. En fait, grâce à la technologie, il est maintenant plus facile d'élaborer et de réaliser des émissions dans des localités éloignées, encore plus dans des villes de taille moyenne. La réalisation n'est pas coûteuse; elle est efficace et facilement faisable. Mais il faut que ces émissions soient diffusées.

    Notre syndicat est un chaud partisan de la télévision communautaire sans but lucratif. Nous sommes entièrement d'accord avec ceux qui disent que la télévision communautaire devrait recevoir davantage d'aide tant à ce qui a trait à l'accès garanti qu'au financement. Mais que ce soit clair, il y a une différence entre la télévision communautaire et les émissions locales des radiodiffuseurs traditionnels. Il ne faut pas croire que l'un peut remplacer l'autre.

    Notre quatrième recommandation est que soit mis sur pied un système à deux paliers de crédits de contenu canadien pour récompenser les radiodiffuseurs qui réalisent des émissions locales. Nous recommandons que le CRTC revoie ses programmes d'avantages et qu'il veille à l'avenir à ce que ces avantages soient offerts non seulement aux grandes villes mais aussi aux collectivités locales.

    Nous recommandons que les radiodiffuseurs soient obligés de conserver une présence locale dans les collectivités qui font l'objet de leur publicité ou desquelles ils retirent des recettes publicitaires.

    Nous recommandons qu'on accorde une aide supplémentaire et un accès garanti aux stations de télévision à but non lucratif et, plus particulièrement, que notre radiodiffuseur public revoie son mandat afin que, dans la concurrence qu'il livre aux radiodiffuseurs privés, son engagement envers tous les Canadiens demeure actif au lieu de simplement se traduire en slogans.

    Du côté de la radiodiffusion publique—

  + -(1140)  

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Le président:
    Monsieur Murdoch, pourriez-vous passer directement à vos recommandations, qui sont l'essentiel—

    M. Peter Murdoch: D'accord.

    Le président: Si vous le voulez bien...

    M. Peter Murdoch: Il me reste en fait quelques commentaires.

    Le président: Je sais, mais nous aimerions néanmoins que vous alliez directement aux recommandations.

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M. Peter Murdoch:
    D'accord.

    Nous recommandons que le financement de CBC/SRC soit considérablement accru afin de rétablir son mandat en matière de programmation locale. Nous recommandons que cette augmentation soit suffisante pour que CBC/SRC puisse progressivement réduire sa dépendance à la publicité commerciale. Nous recommandons que cette augmentation soit assortie de l'engagement de CBC/ SRC d'augmenter sa réalisation d'émissions à l'interne. Et je puis vous assurer qu'il a fallu beaucoup de temps à l'interne pour produire le préambule à ces recommandations.

    Nous recommandons que, dans toute la mesure du possible, le CRTC encourage également les gouvernements provinciaux à financer suffisamment les émissions de télévision éducatives.

    Nous avons une recommandation dans le domaine du cinéma. Plus de 2 000 de nos membres travaillent dans l'industrie cinématographique canadienne. Nous recommandons que le CRTC établisse un protocole à l'intention des radiodiffuseurs pour favoriser la diffusion d'oeuvres cinématographiques canadiennes afin d'encourager la production de films de chez nous.

    Il est important que je vous lise deux paragraphes dans le cadre de la recommandation que nous faisons au sujet de la propriété croisée et de la concentration des médias.

    On a entre autres pu voir les résultats de la propriété croisée et de la concentration des médias dans la diminution de la valeur des actions, qui a touché les régimes de pension canadiens, des comptes en banque, la qualité de vie et peut-être aussi la couverture médiatique. La concentration de la propriété dans les médias canadiens a suscité une inquiétude générale au sein de la population canadienne. Les Canadiens s'inquiètent à juste titre des abus de pouvoir que peuvent commettre les médias en raison de l'érosion de la diversité, des restrictions d'accès et de la crainte du manque d'objectivité.

    Des professeurs de journalisme, des groupes d'intérêts publics, des organisations professionnelles de journalistes, des syndicats, des citoyens éminents, d'anciens éditeurs, des députés et des sénateurs se sont dits inquiets de la concentration de la propriété et de ses effets sur le journalisme. Ils ont demandé au gouvernement d'agir. Mais malgré toutes les preuves évidentes, le gouvernement est demeuré muet—trop muet. Nous demandons à votre comité d'agir.

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    Nous recommandons que votre comité réclame une enquête immédiate sur l'état de l'industrie des médias et accompagne sa demande d'une recommandation de fractionner les énormes conglomérats médiatiques.

    Ce sont là nos dernières recommandations. Merci de nous avoir écoutés.

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Le président:
    Monsieur Murdoch, j'espère que vous n'avez pas l'impression que nous sommes injustes ou...

  + -(1145)  

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M. Peter Murdoch:
    Que je suis lésé? Non, pas de problème.

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Le président:
    En fait, c'est la quatrième audience que nous accordons à votre syndicat. Nous voulons simplement permettre à ceux qui vous suivent d'avoir aussi la parole.

    Merci beaucoup. Je crois que vous soulevez des questions très importantes et nous vous en sommes reconnaissants.

    Mrs. Turgeon.

[Français]

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Mme Jacqueline Turgeon (présidente, Syndicat des employés de bureau et professionnels de Radio-Canada; présidente, Conseil provincial du secteur des communications, Syndicat canadien de la fonction publique):
    Tout d'abord, je tiens à dire que nous sommes désolés que vous n'ayez pas les textes de notre présentation de ce matin ainsi que le document sur le financement de la télévision communautaire. Nous avons expédié les versions française et anglaise de ces documents à la fin de la semaine dernière, mais il semble qu'ils se soient égarés sur l'autoroute complexe des courriers électroniques. Nous en sommes fort peinés.

    Je m'appelle Jacqueline Turgeon et je suis la présidente du Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique et présidente du Syndicat des employés de bureau et professionnels de Radio-Canada.

    Le SCFP représente près de 500 000 membres au Canada, dont 100 000 au Québec dans plusieurs domaines des secteurs public, parapublic et privé. À titre de présidente du CPSC, qui regroupe près de 7 000 membres, il m'apparaît important de vous indiquer que le SCFP au Québec représente aujourd'hui une force de premier plan dans les domaines de la télévision, de la radio, de la télédistribution et de la presse écrite.

    Nous suivons depuis près de 20 ans l'évolution du système de radiodiffusion canadien et sommes intervenus à plusieurs reprises auprès du CRTC, des comités parlementaires et des groupes de travail en déposant plus d'une soixantaine de mémoires. Nous remercions le Comité permanent du patrimoine canadien de bien vouloir nous accueillir aujourd'hui afin que nous puissions participer et contribuer à cette réflexion collective sur l'avenir de notre système de radiodiffusion canadien.

    Permettez-moi maintenant de vous présenter les personnes qui m'accompagnent: Jacques Denommé, vice-président de la câblodistribution du CPSC et premier vice-président interne du Syndicat des employés de Vidéotron; Réal Leboeuf, président du Syndicat des employé(e)s de TVA à Montréal; et Bernard Chabot, journaliste à la station régionale de Québec du réseau TVA. Ils seront disposés à répondre à vos questions après la brève présentation que fera mon collègue Armand Dubois, journaliste au réseau TVA à Montréal.

    Auparavant, je tiens à vous préciser dès le départ que nous proposons une refonte complète du rôle et du mandat du CRTC, le rehaussement du financement public de la Société Radio-Canada et une protection accrue en ce qui touche la production locale afin d'assurer le maintien de services de qualité en région.

    À propos du phénomène de convergence des activités de diffusion et de la concentration des opérations de production, nous précisons que la concentration de l'information nous préoccupe au plus haut point et que nous croyons qu'il est urgent d'agir.

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M. Armand Dubois (journaliste au réseau TVA à Montréal; Conseil provincial du secteur des communications, Syndicat canadien de la fonction publique):
    Monsieur le président, distingués membres du Comité permanent du patrimoine canadien, merci du temps que vous consacrez à entendre notre point de vue.

[Traduction]

     Nous sommes heureux que votre comité se penche sérieusement sur l'état du système de radiodiffusion canadien et sur l'orientation qu'il devrait adopter pour encourager l'expression culturelle canadienn et pour assurer l'épanouissement de l'identité canadienne.

[Français]

    À la lumière des tendances observées ces dernières années, alors que l'équilibre entre le secteur privé et le secteur public a été rompu, nous croyons qu'il en va de même de la survie de notre système canadien de radiodiffusion si rien n'est fait pour corriger le tir. Nous tenons cependant à vous rappeler que nous ne mettons aucunement en cause l'actuelle Loi sur la radiodiffusion, qui réaffirme des principes auxquels nous adhérons entièrement. Cette loi demeure pertinente.

    De même, il n'est pas question pour nous de soulever la pertinence de revoir le mandat de la Société Radio-Canada. Ce mandat est clairement défini. Nous croyons que la SRC doit pouvoir obtenir les moyens financiers nécessaires pour s'y conformer adéquatement.

    Par contre, il nous apparaît urgent de revoir de fond en comble le rôle dévolu au CRTC. Nous allons jusqu'à envisager l'abolition pure et simple de cet organisme, s'il le faut, pour en créer un nouveau mieux adapté à la réalité d'aujourd'hui et mieux pourvu pour assurer la protection de la culture canadienne dans un contexte où seuls les intérêts économiques semblent primer. Nous sommes particulièrement et grandement préoccupés par les effets pervers et dangereux de la concentration de la presse. Le CRTC a démontré son inaptitude à jouer un rôle de sauvegarde en ce domaine. Le CRTC est devenu archaïque et inefficace.

    Nous estimons de plus qu'il faut revoir les mécanismes d'octroi des fonds publics en ce qui concerne la production et la distribution des contenus alimentant notre système canadien de radiodiffusion. La politique canadienne de radiodiffusion stipule que le système canadien de radiodiffusion devrait servir à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure culturelle, politique, sociale et économique du Canada.

  + -(1150)  

[Traduction]

    Qu'est devenue cette sauvegarde? Le paysage médiatique évolue à une vitesse vertigineuse depuis quelques années. Le mouvement a commencé aux États-Unis avec les fusions d'AOL-Time Warner et d'ABC-Disney. Le Canada n'a pas échappé à cette tendance avec les fusions CanWest-Global-Southam et Bell-Globe-CTV.

[Français]

    Au Québec, il ne faut pas oublier les achats de Gesca, qui possède maintenant sept des dix quotidiens francophones et qui vient de nouer un partenariat avec la Société Radio-Canada.

[Traduction]

    Les conséquences, ce sont des éditoriaux communs dans les journaux appartenant à la famille Asper, qui possède CanWest Global Communication, et des textes identiques pour les diverses salles de nouvelles, notamment le Globe and Mail et CTV.

[Français]

    Quatre-vingt-dix-sept pour cent de toute la circulation de l'information francophone au Québec est entre les mains de deux entités: Quebecor et Gesca. Ce ne sont que quelques exemples de la réalité actuelle.

    Est-ce ainsi que le CRTC protège la structure culturelle, politique, sociale et économique du Canada? Est-ce ainsi que le CRTC protège notre identité culturelle? Est-ce la façon de favoriser la diversité des contenus et des sources et de favoriser une meilleure identité canadienne? Nous disons non, bien sûr.

    Le CRTC émet des licences pour des canaux spécialisés et assouplit lui-même les règles par la suite. Le CRTC n'exerce plus de véritable contrôle sur les canaux généralistes qui, force est de le constater, s'appauvrissent au profit des canaux spécialisés. D'ailleurs, les deux types de canaux appartiennent souvent au même groupe financier, qui encaisse davantage en se départissant de ses responsabilités.

    Par exemple, où se retrouvent les émissions pour enfants dans la grille horaire de TVA?

    Qu'a-t-on fait récemment des émissions sportives à TVA? À quand les bulletins de nouvelles abolis les fins de semaine au profit de LCN? Nous venons d'apprendre, par exemple, que le groupe Astral, qui devient acquéreur du groupe Radiomédia, à compter du 27 mai, va abolir sa salle de nouvelles durant la nuit pour diffuser des bulletins préenregistrés.

    L'ancien directeur du Devoir et ex-chef du Parti libéral du Québec, Claude Ryan, exprimait à l'automne 2000, dans le cadre du congrès de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, sa vive inquiétude face à cette concentration de la presse. Il écrivait:

Partout où un groupe financier exerce un contrôle direct sur une entreprise de presse, on ne saurait s’attendre à ce que celle-ci traite avec une réelle liberté des sujets reliés aux intérêts de son propriétaire...

    Force est de constater à nouveau que le CRTC a baissé les bras. Au lieu de défendre l'intérêt public, car c'est son rôle, il s'attarde davantage maintenant à céder aux intérêts financiers.

    La loi reconnaît que notre système de radiodiffusion est composé des éléments public, privé et communautaire, bien sûr. Le CRTC a-t-il oublié ce principe inscrit dans la loi? Ses dernières décisions n'ont certes pas contribué à solidifier et à assurer la pérennité de l'élément communautaire.

[Traduction]

    Le CRTC s'est révélé incapable de renforcer la diversité culturelle qui est une des valeurs constitutives fondamentales du Canada.

[Français]

    S'il y a un domaine de la radiodiffusion où la diversité des contenus, des formes et des idées peut s'articuler de manière créatrice et représenter fortement notre identité culturelle, c'est bien le secteur communautaire. Or, que constate-t-on actuellement? Partout, les télévisions communautaires agonisent, quand elles ne sont pas déjà mortes.

    En 1997, le CRTC a rendu une décision qui, d'une part, permettait aux câblodistributeurs qui le désiraient de fournir un canal communautaire et qui, d'autre part, affaiblissait ceux qui voulaient continuer à l'offrir en leur soutirant une partie de leur financement. Ainsi, les gros câblodistributeurs qui conservent un tel canal voient leur contribution à la télévision communautaire limitée à un plafond de 2 p. 100, puisé à même la contribution de 5 p. 100 versée au Fonds canadien de télévision. Ceci limite d'autant l'ouverture de cette fenêtre de diffusion si importante pour les citoyens canadiens, s'ils veulent avoir une meilleure emprise identitaire sur leurs communautés, où que ce soit dans ce vaste pays qui est le nôtre.

    La Société Radio-Canada. La mission de la Société Radio-Canada est tout aussi essentielle, sinon davantage que lors de sa création, il y a plus de 60 ans. Nous le réaffirmons. Elle représente et doit demeurer la fondation solide du système canadien de radiodiffusion, une fondation sur laquelle s'appuie le reste de l'édifice.

    Vous savez fort bien qu'un secteur public fort ne peut qu'engendrer un secteur privé solide également. Sans fondation, la maison ne tient pas. La SRC doit demeurer un organisme résolument public, non défini par la rentabilité économique et indépendant du pouvoir politique. Elle doit conserver des responsabilités spécifiques qui lui permettent de rester cette balise de qualité à laquelle on peut se référer en termes de contenu et de diversité culturelle et à laquelle chaque Canadien peut s'identifier. Elle doit demeurer un phare éclairant où chaque Canadien trouve son expression.

    Pour ce faire, il est primordial que la SRC reçoive le financement public lié au mandat qui lui est confié. La SRC doit être libérée des contraintes commerciales trop importantes qu'on lui impose actuellement. La SRC demeure un outil indispensable à notre identité culturelle.

    Depuis déjà une bonne dizaine d'années, le CRTC se fait le complice et est même devenu le gérant de service des producteurs indépendants. Cela doit cesser. This has to stop.

  + -(1155)  

     Année après année, le CRTC a mis en place une gamme de mesures favorisant toujours davantage la production indépendante, sans pour autant s'assurer d'évaluer les résultats et surtout de mesurer les impacts sur l'ensemble du système canadien de radiodiffusion, sur lequel vous avez actuellement le mandat de vous pencher afin d'en revoir la validité.

    En clair, les producteurs indépendants profitent des politiques du CRTC et n'ont en retour aucun compte à lui rendre: ils ont le meilleur des deux mondes. C'est ainsi qu'on a assisté—et je pèse mes mots—à un détournement de fonds publics vers des projets pour le moins discutables. Par exemple, on a subventionné des émissions telles que Piment Fort, Sex-Shop, Je regarde, moi non plus, où bêtise et histoires de cul font bon ménage.

    Attention! Nous n'avons aucunement la prétention de nous poser en censeurs, mais nous ne croyons pas que les fonds publics doivent servir à financer des émissions vantant la nouvelle lotion pour tonifier le pénis ou le vagin du conjoint. Les mots sont crus, certes, mais la réalité l'est tout autant pour les contribuables. Nous vous le disons sans détours: si les impôts des citoyens canadiens servent à financer ce genre de productions, arrêtez de le faire et réinvestissez vite ces sommes dans le secteur de la santé. Les malades qui se trouvent actuellement sur des listes d'attente partout au pays et qui n'ont pas accès aux soins dans des délais raisonnables seront les premiers à vous remercier de votre courage politique.

    Le CPSC estime que la production indépendante coûte très cher aux contribuables canadiens.

[Traduction]

    Le conseil provincial estime que la production indépendante coûte très cher aux contribuables canadiens et que son financement est devenu pernicieux.

    Le CRTC n'exige plus que le nombre d'heures consacrées par les stations régionales des grands réseaux à la production soit chiffré et justifié.

  + -(1200)  

[Français]

    La formation des grands réseaux de télévision a eu pour effet de « métropoliser » les ondes. Les émissions produites dans les stations locales sont pour la plupart destinées aux réseaux et n'accordent que très peu de place au reflet local. Encore une fois, est-ce qu'on va assurer l'identité culturelle des Canadiens si tout provient de la métropole? Nous disons non, bien sûr.

    De plus, l'arrivée des services de radiodiffusion par satellite complique énormément la situation. Bien sûr, nous sommes tributaires de ces nouvelles technologies. Cependant, avec l'arrivée de ces services de radiodiffusion par satellite, l'identité locale se trouve noyée dans la somme faramineuse des signaux disponibles, incluant ceux d'un même réseau. Une personne vivant par exemple à Sherbrooke et abonnée au service Star Choice pourra regarder l'une ou l'autre des stations du réseau TVA. Encore une fois, le CRTC s'est affaibli en s'enlevant un mécanisme de contrôle essentiel à la sauvegarde d'une pluralité des sources. Vous devez vous y attarder.

    Pourquoi l'a-t-il fait? Simplement pour répondre aux attentes de rentabilité des propriétaires des grands réseaux de radiodiffusion, qui possèdent un pouvoir énorme de lobbying et qui savent très bien jouer la carte économique. Si vous ne nous cédez pas cet aspect, nous ne serons pas rentables et nous ne pourrons pas vous offrir du contenu, disent-ils. Il faudrait voir ce que ça signifie, du contenu.

    Tout cela, évidemment, se fait aux dépens de l'épanouissement de la culture canadienne. Ces propriétaires ont-ils intérêt à promouvoir la diversité? Leurs préoccupations ne relèvent pas de l'intérêt public, mais de l'intérêt financier.

    À titre de députés du Parlement, vous avez l'obligation de défendre l'intérêt commun. Bien sûr, en autant qu'on se conforme aux règles du jeu... Ces règles sont les grands principes formulés dans la Loi sur la radiodiffusion, que nous ne remettons pas du tout en cause. Or, le CRTC assouplit sans cesse les règles pour permettre aux dirigeants d'entreprises de radiodiffusion de répondre à l'appétit vorace et sans bornes des actionnaires.

    En conclusion, le CRTC est pour nous devenu un organisme archaïque mal adapté à la réalité moderne. Nous vous recommandons de dissoudre cet organisme et de créer deux nouvelles entités à tout le moins, l'une qui aurait la responsabilité d'accorder les licences d'exploitation et l'autre, indépendante de la première, qui serait chargée d'en exercer le contrôle. Nous recommandons que ces organismes puissent aussi embrasser tous les organes de diffusion de contenu: télés, radios, journaux et nouveaux médias en ligne, afin d'assurer une surveillance plus étroite des effets de la concentration de la presse.

    On aura fort probablement l'occasion de répondre à vos questions, mais vous n'avez pas à vous sentir frileux sur cette question puisque de nombreux États ont déjà légiféré pour limiter à tout le moins les propriétés croisées.

[Traduction]

Nous recommandons que ces organismes fonctionnent sur le principe de la transparence, de l'indépendance politique, de la représentation régionale et de la diversité des intérêts.

[Français]

    Nous recommandons également que la Société Radio-Canada puisse avoir accès à un financement qui ne compromet pas—et je le répète—qui ne compromet pas la mission qui lui est confiée.

    Nous recommandons qu'on oblige les distributeurs de signaux par câble ou par satellite à offrir une seule station d'un même réseau, soit celle de la région concernée.

    En terminant, nous recommandons qu'on assure pleinement l'essor de la télévision communautaire parce qu'elle offre également une programmation canadienne en permettant aux distributeurs de signaux de financer adéquatement leur présence dans toutes les régions qu'ils desservent.

[Traduction]

    Nous sommes fiers d'être Canadiens et c'est pour cela que nous nous inquiétons de ce qui se passe actuellement dans notre système.

  + -(1205)  

[Français]

    On a oublié une recommandation importante. Nous recommandons qu'on restreigne le financement public des producteurs indépendants et qu'on assujettisse ce financement aux mêmes règles de pertinence qui prévalent pour le soutien du radiodiffuseur public.

    Mesdames, messieurs, merci.

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Le président:
    Monsieur Dubois et madame Turgeon, vous avez certainement fait des recommandations qui vont provoquer notre esprit et, j'en suis sûr, susciter des questions. On vous remercie de votre présentation, qui est sûrement très claire quant à son impact.

    Nous allons donc passer à la période de questions. Je rappelle aux membres du comité que

[Traduction]

Nous avons encore trois groupes à entendre aujourd'hui, et je vous invite donc à faire preuve de discipline dans vos questions.

    Il est entendu que Mme Lill, qui doit partir à un autre comité, aura la parole en premier.

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Mme Wendy Lill:
    Merci.

    Merci beaucoup d'être venus nous rencontrer. C'est toujours un plaisir d'entendre parler des gens qui travaillent sur le terrain. Ce que vous nous dites n'a rien d'hypothétique.

    J'aimerais parler des émissions locales et de l'abandon de la programmation locale. Notre comité a parcouru tout le pays. Nous avons constaté des exemples incroyables de cette situation. Je crois que le plus frappant, c'était celui de Terre-Neuve où le seul présentateur de contenu local actuellement, c'est Rogers Cable. Ils ont une émission intitulée Out of the Fog. Autrefois, c'était la mecque des émissions canadiennes. Dans les années 80, il y avait 10 ou 11 émissions locales à St. John's, et il n'y en a plus. Je pense que nous l'avons tous bien constaté. Notre comité a constaté que c'était un problème fondamental.

    Dans le document du SCEP, on propose certains stimulants, des initiatives pour rétablir l'équilibre. Il me semble que l'octroi d'une licence de radiodiffusion est déjà un énorme stimulant à faire les choses correctement et à proposer un contenu canadien dans des émissions locales. Mais vous avez parlé de mieux récompenser les radiodiffuseurs qui ont pratiquement abandonné leurs petites filiales, d'avoir une sorte de régime d'incitatifs. Je me demandais ce que vous envisagiez.

    Avez-vous autre chose à nous dire sur les possibilités de rétablir les émissions locales?

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M. Peter Murdoch:
    Je vais laisser mon collègue Mike Sullivan répondre à une partie de cette question.

    Nous avons entendu parler d'un système de points. Le représentant de Hollywood Voice a parlé de systèmes de points. J'ai trouvé que cela ressemblait un peu à Kyoto, qu'on pourrait échanger un point pour Da Vinci's Inquest contre autre chose. Mais peut-être y aurait-il dans le contexte canadien une possibilité de récompenser les diffuseurs d'émissions locales en échange de leur investissement.

    Je crois que ce qui est regrettable, c'est qu'ils ne le fassent pas de leur propre initiative. Ce qui m'a étonné ici, c'est qu'en dépit de tous les beaux discours, de toutes les grandes déclarations, la scène est déserte depuis longtemps. Ce que disait ma collègue à propos du CRTC... Où était cet organisme de réglementation, qu'est-ce qu'il a fait sur cette question? Comment a-t-on laissé disparaître cette programmation locale au Canada?

    Comme je vous l'ai dit, il va falloir faire preuve de créativité pour régler le problème. Un système à deux paliers pourrait être une solution, et on pourrait aussi envisager un système de points qui récompenserait la programmation locale.

    Mike veut peut-être répondre aussi à vos questions.

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M. Michael Sullivan (représentant national, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier):
    Pendant 20 ans, jusqu'au début des années 90, c'est CBC/SRC qui a été le principal réalisateur d'émissions locales. Évidemment, CBC/SRC n'en a plus les moyens et elle a bien fait comprendre qu'avec son financement actuel, il n'était pas question de revenir à une programmation locale ou régionale.

    Étant donné ce qu'a dit ici le président de CBC/ SRC, même les petites émissions d'information locales qui subsistent encore semblent menacées. Je crois qu'il vous a dit: «Si nous ne recevons pas des fonds supplémentaires considérables, nous ne pourrons pas continuer à soutenir des émissions d'information déficitaires. Ces informations n'ont plus le public de naguère quand elles étaient correctement financées et comme nous n'avons plus les moyens de les financer, nous allons peut-être devoir les supprimer.»

    À mon avis, la situation risque d'empirer avant de s'améliorer. Il y a eu un déclin à la fois progressif et brutal. Le secteur privé s'est rendu compte progressivement qu'il n'avait plus besoin de concurrencer les informations de CBC/SRC parce qu'il n'y avait plus de concurrence sur ce créneau. Les radiodiffuseurs privés n'ont donc plus besoin de réaliser des émissions d'information de grande envergure et coûteuses. Ils abandonnent les petites localités. Quand ils abandonnent la réalisation d'émissions d'information, ils suppriment aussi leur capacité de production, et quand il n'y a plus de capacité de réaliser des émissions, il ne reste plus rien.

    Dans le cas du secteur privé, peut-être qu'un mécanisme de récompense, une carotte plutôt que le bâton, pourrait donner des résultats.

    Je crois que c'est M. Abbott qui a demandé pourquoi on ne pourrait pas supprimer la licence des radiodiffuseurs qui ne font plus d'émissions locales, qui abandonnent la scène locale mais qui conservent quand même leur licence. Peut-être votre comité pourrait-il y réfléchir. La Loi sur la radiodiffusion n'oblige pas CBC/SRC à avoir une présence locale ou régionale, et cela fait peut-être partie de ce que vous examinez.

  + -(1210)  

[Français]

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Le président:
    Pardon. Allez-y.

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M. Bernard Chabot (journaliste à la station régionale de Québec du réseau TVA, Conseil provincial du secteur des communications, Syndicat canadien de la fonction publique):
    Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter quelques mots sur l'aspect régional, puisque j'ai été au coeur de plusieurs batailles menées dans les stations hors métropole.

    J'ai la chance de travailler pour la plus ancienne station de télévision française en Amérique du Nord. La station CFCM-TV, à Québec, est la plus ancienne télévision francophone au Québec et au Canada. Cette station, qui est née dans les années 1950, produisait jusqu'à 50 ou 55 heures de télévision originale émanant de Québec. Il a fallu, dans les années 1990, mener une bataille de titans pour conserver à peine 20 heures de production émanant de Québec, la capitale du Québec. C'est une aberration.

    Pour illustrer ce que Mme Lill disait tout à l'heure, je vous dirai que dans la capitale du Québec, il n'y a plus de nouvelles télévisées les fins de semaine puisqu'on ferme alors les stations de télévision régionales. Cela me semble un non-sens. C'est une invraisemblance, mais ça existe. Même la société d'État, Radio-Canada, ne produit plus de nouvelles les fins de semaine.

    On dit que le système canadien de radiodiffusion fonctionne bien. C'est peut-être vrai pour ce qui est de l'aspect de la production des émissions autres que d'information. On subventionne et on donne des crédits d'impôt pour la production d'émissions à grand déploiement, et je pense que c'est bon pour les grandes dramatiques, mais dans le cas de l'information, le mal est grave.

    Dans les stations de radio du Québec hors Montréal, il ne se fait plus de nouvelles. Les animateurs de radio, le matin, lisent les journaux pour être en mesure de donner l'information. On ne voit plus de reporters de radio dans les rues à Québec, et c'est un non-sens. Je pense que le système est gravement malade et que la solution ne consiste certainement pas seulement en des incitatifs. Il faudra subventionner, mais il faudra aussi forcer les diffuseurs à remettre de la production à l'antenne aux heures de grande écoute. Il faut forcer les gens.

     Il y a une responsabilité qui est rattachée au fait de détenir une licence. L'information est fondamentale pour l'identité culturelle. L'information est aussi importante que la culture. L'information fait partie de la culture. Voilà.

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Le président:
    Merci.

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M. Armand Dubois:
    Permettez-moi d'ajouter un mot.

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Le président:
    Oui, mais très brièvement. Autrement, on sera ici jusqu'à 15 heures.

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M. Armand Dubois:
    Pour compléter ce qu'a dit mon collègue, je dirai que l'information est aussi un des fondements de notre système démocratique. Lorsque l'information ne circule plus, les fondements mêmes de la démocratie s'ébranlent. Madame disait, lors d'une précédente comparution, qu'elle venait d'une région où toute la question du bois d'oeuvre avait bouleversé la communauté. Je vous dirai qu'actuellement, en termes de diversité de contenu, on assiste à une coupe à blanc. On est aussi préoccupés par cette question.

  + -(1215)  

[Traduction]

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Le président:
    Madame Hinton.

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Mme Betty Hinton:
    Merci, monsieur le président.

    J'ai remarqué plusieurs points très intéressants. Je vais réfléchir à ce qu'a dit M. Dubois à propos de la séparation du fonctionnement et de la supervision, et je vais y réfléchir très sérieusement. J'ai trouvé que c'était une recommandation qui méritait d'être approfondie.

    Le problème de la concentration des médias que M. Murdoch a mentionné a déjà été évoqué dans le passé au comité, et je partage vos craintes. Je ne sais pas si ces craintes sont justifiées ou si je me fais du cinéma, mais j'examine soigneusement ce qui se passe. Je crois que l'indépendance de l'information est très importante et qu'il est très risqué de la concentrer entre les mains d'un tout petit groupe d'individus. Je l'ai dit moi-même ici.

    Mme Turgeon a dit qu'il faudrait que le gouvernement augmente ses crédits. Je peux vous assurer en tant que membre de ce comité que nous n'avons encore jamais entendu quelqu'un ici ne pas nous demander exactement la même chose: plus de crédits. Ce qui me dérange, c'est quand on demande que le gouvernement augmente son financement, c'est que ce financement ne crée pas de revenus. C'est de l'argent qui vient des contribuables. Les contribuables tiennent à s'assurer que leur argent est correctement utilisé, et je dois respecter cette volonté.

    Je souhaite avoir le même genre d'émissions locales que ce que réclame ma collègue, Mme Lill. Cela m'inquiète beaucoup qu'on n'ait plus d'émissions d'information locales. Vous en avez beaucoup parlé aujourd'hui, mais si vous aviez une solution simple à nous proposer, que serait-elle? Comment pourrait-on rétablir des émissions d'information importantes dans votre ville, si c'est ce que vous entendez par émissions locales? Est-ce que vous voyez les choses sous un angle plus régional ou pensez-vous strictement à votre localité?

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M. Peter Murdoch:
    Je crois qu'il y a plusieurs possibilités. Encore une fois, il va falloir faire preuve de créativité. Tout d'abord, l'une des raisons pour lesquelles on a abandonné ce secteur des informations, en tout cas au niveau de la presse et dans une certaine mesure au niveau de la radiodiffusion, c'est la concentration de la propriété, en plus de l'autre problème dont j'ai parlé, l'endettement. CTV n'avait aucune excuse de se retirer du nord de l'Ontario récemment, excepté que c'était une décision logique sur le plan des affaires. Mais sur le plan culturel, ce n'était absolument pas une bonne décision.

    Il va falloir tôt ou tard se pencher sur l'ensemble du tableau, que ce soit à ce comité ou ailleurs. Si cette concentration de la propriété se maintient, vous allez être obligés de la réglementer. Il va falloir imposer dans la licence de radiodiffusion une certaine obligation de programmation locale. Les radiodiffuseurs vont hurler et dire que ce n'est pas rentable et que cela va leur coûter de l'argent. Eh bien tant pis, quand on fait des affaires, il y a des coûts. En échange de votre part des ondes au Canada, vous devez faire un petit effort pour refléter la réalité canadienne.

    Il n'est d'ailleurs pas question d'empêcher les radiodiffuseurs d'être rentables, et je parle évidemment du secteur privé ici. CBC/SRC a besoin de fonds pour pouvoir réaliser son mandat, comme l'a dit ma collègue. Je ne crois pas qu'il soit très difficile de trouver des solutions. Je crois que ce qui est difficile, c'est de prendre ces décisions.

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Mme Betty Hinton:
    Les consommateurs peuvent choisir la télévision par satellite, que les diffuseurs aient une licence ou non. Ils peuvent choisir de regarder des émissions étrangères retransmises par satelite, et je n'ai pas d'objection à ce que les gens exercent leur liberté de choix.

    Pour moi, la différence entre cela et ce dont vous parlez aujourd'hui, c'est précisément la programmation locale. La télévision par satellite ne vous donnera pas de programmation locale. Les émissions étrangères non plus. Les seules émissions pour lesquelles on puisse encore parler de contenu culturel canadien, ce sont les émissions qu'on peut obtenir sur un plan local.

  + -(1220)  

[Français]

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Le président:
    Monsieur Leboeuf.

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M. Réal Leboeuf (président, Syndicat des employés de TVA-Montréal (CUPE section locale 687), Conseil provincial du secteur des communications, Syndicat canadien de la fonction publique):
    Vous avez demandé s'il fallait augmenter les budgets de Radio-Canada pour qu'elle assume pleinement son mandat. Nous ne demandons pas de nouvelles sommes d'argent. Je pense qu'il serait préférable de resserrer les mécanismes de financement de la production indépendante principalement et de remettre à Radio-Canada une partie de cet argent. De toute façon, on a pris une partie de l'argent qui était alloué à Radio-Canada pour augmenter le financement des producteurs indépendants. Donc, il ne s'agit pas d'avoir de nouvelles sommes d'argent, mais d'avoir un mécanisme beaucoup plus serré au niveau du financement.

    On a énuméré des projets qui sont très discutables. En resserrant les mécanismes, on n'enlèverait rien au niveau du contenu culturel parce que plusieurs émissions qui sont présentement financées ne représentent pas une plus-value au plan de l'identité culturelle canadienne. Ces émissions sont souvent présentées au télédiffuseur qui, avant de décider de les diffuser, se demande si elles seront rentables. Il ne se demande pas si cela apporte une plus-value au niveau de l'identité culturelle canadienne. Il se demande si c'est rentable et si cela va aller chercher des cotes d'écoute. Si c'est le cas, il accepte et diffuse ce que lui offre le producteur indépendant.

    Donc, il s'agirait d'avoir un mécanisme beaucoup plus serré et de prendre une partie de l'argent ainsi économisé pour augmenter le financement de Radio-Canada.

[Traduction]

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Le président:
    Je propose que les trois députés qui restent posent leurs questions, que les témoins en prennent note et qu'ils y répondent d'un coup. Nous pourrons ainsi gagner du temps parce qu'il y a encore trois autres groupes que nous devons entendre.

    Je vais commencer par M. Mills, suivi de M. Harvard et de Mme Gagnon.

[Français]

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Mme Christiane Gagnon:
    On me demande de céder ma place à Mme Lill pour qu'elle puisse aller à une autre réunion. Si je perds ma place ou que je dois poser mes questions tout à la fin, je ne donnerai plus jamais ma permission. C'est moi qui perds mon privilège de poser des questions.

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Le président:
    Madame Gagnon, on va arrêter cela tout de suite. C'est vous qui avez accepté de donner votre place.

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Mme Christiane Gagnon:
    Je n'ai pas accepté. On m'a dit que j'étais la troisième.

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Le président:
    Je ne sais pas qui vous a dit cela. Allez-y, madame Gagnon.

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Mme Christiane Gagnon:
    Merci, monsieur le président.

    Monsieur Dubois, vous parlez de coupe à blanc en ce qui concerne la diversité du contenu. Je pense que les deux mémoires qu'on a reçus ce matin sont le reflet des témoignages qu'on a entendus lors de notre tournée au Canada anglais et au Québec. C'est la même chose. Les francophones hors Québec nous ont parlé des besoins de la SRC, et on a entendu la même chose du côté du Canada anglais.

    Vous avez mentionné que la SRC et CBC devaient avoir un meilleur financement pour remplir leur mandat. Je pense qu'il faut plus que cela. Il faut aussi qu'il y ait un coup de barre au niveau de la gestion de Radio-Canada et des choix qu'on y fait. Même s'il y avait plus de financement, pensez-vous qu'il y aurait un changement de mentalités à l'intérieur de Radio-Canada, tant du côté anglais que français?

    Deuxièmement, vous dites que le CRTC est archaïque. On donne des licences et ensuite on en assouplit les conditions pour les canaux spécialisés. J'aimerais que vous me donniez plus d'information quant à cette façon de faire du CRTC par rapport aux canaux spécialisés. Qu'est-ce que vous entendez quand vous parlez d'un assouplissement après l'obtention d'une licence?

[Traduction]

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Le président:
    Monsieur Mills puis M. Harvard.

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M. Dennis Mills:
    J'ai trois toutes petites questions.

    Tous les témoins peuvent y répondre, mais je vais vous demander à vous, monsieur Murdoch, de répondre à ce que disait M. Frith au sujet de la compétitivité. Les salaires qu'on verse aux syndiqués de l'industrie du cinéma au Canada sont-ils comparables? Nous savons que la qualité des productions est meilleure. Je veux savoir si nos salaires sont comparables.

    Deuxièmement, monsieur Murdoch, voulez-vous nous dire quelle serait la valeur de votre caisse de retraite? Votre syndicat pourrait-il puiser dans sa caisse de retraite pour investir dans le secteur?

    C'est tout ce que je veux savoir. Merci.

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Le président:
    Monsieur Harvard.

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M. John Harvard:
    Je serai bref.

    Je me préoccupe de la concentration de la propriété. Nous aurions peut-être pu faire quelque chose à ce propos il y a 10 ou 20 ans. Je crains qu'il ne soit trop tard maintenant, à moins que nous ne prenions des mesures draconiennes. Aux États-Unis, il y a 100 ans de cela, on a démantelé l'empire Rockefeller. Je ne sais pas ce qu'on peut faire ici. Un de mes collègues a dit qu'il était trop tard. C'est vrai, il est trop tard. Je n'ai pas la moindre idée de ce qu'on peut faire.

    Je pense que nous pataugeons tous ici. C'est vrai. Nous pataugeons parce que les solutions possibles— vous dites qu'elles sont faciles—sont difficiles en réalité, monsieur Murdoch. Lorsqu'on songe aux solutions possibles, on s'aperçoit que la tâche est immense. Vous vous attaquez à des intérêts colossaux. Ce sont des adversaires redoutables.

  + -(1225)  

[Français]

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Le président:
    Veuillez répondre, s'il vous plaît.

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Mme Jacqueline Turgeon:
    Madame Gagnon, vous posiez une question sur le financement de Radio-Canada. Même s'il y a plus d'argent, on va encourager nos dirigeants à diffuser plus de contenu canadien. Malheureusement, on a pas beaucoup d'influence sur eux à l'intérieur. Donc, on ne peut qu'appuyer vos recommandations.

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M. Armand Dubois:
    Vous vouliez des exemples d'assouplissement des règles. Il faut d'abord se demander quel est le mandat d'une station généraliste. C'est d'offrir une diversité de contenu. Par exemple, les enfants n'ont plus accès à leurs émissions parce qu'on a envoyé ces émissions sur un canal spécialisé; on a assoupli la règle. Le Canal Nouvelles, à TVA, avait le mandat d'être un canal de manchettes, et on demande maintenant que ce canal puisse intervenir et transmettre en direct des conférences de presse sur des événements importants, comme le fait son pendant RDI; on a encore une fois assoupli la règle.

    Les propriétaires des grands réseaux le savent fort bien. Ils demandent une licence limitée, sachant fort bien que dans six mois, ils pourront retourner devant le CRTC pour demander un assouplissement de la règle et appauvrir la station généraliste. C'est scandaleux! Nous disons que c'est scandaleux!

    Pour ce qui est de la concentration de la presse, monsieur, vous demandez s'il n'est pas trop tard pour agir. Je dis non, mais il faut avoir le courage politique d'intervenir. C'est trop facile de dire qu'on va baisser les bras, qu'on aurait dû le faire il y a 20 ans et que cela ne nous concerne plus. Je vous dis de faire attention, car nous sommes à un tournant important.

    Quand il y a des éditoriaux uniques coast to coast, il y a un problème. Cela sert peut-être actuellement certains intérêts politiques, mais il y a un danger potentiel, et vous avez la responsabilité de défendre le bien commun. Si vous ne le faites pas, nous aurons la possibilité, à titre de citoyens, de vous dire que vous ne faites pas votre job correctement. On vient vous dire de faire votre job, et votre job est de défendre l'intérêt public pour le bien culturel du Canada. On a l'impression qu'actuellement, tout le monde se confine dans une langue de bois. On fait des comités, on se penche sur le système canadien de radiodiffusion, mais finalement, on n'intervient pas. Je dis que vous avez un travail à faire et que vous devez le faire. Ça presse! Les Canadiens ne se retrouvent plus dans leur contenu canadien et ça, c'est dangereux. Je vous dis à nouveau que ce sont les colonnes du temple de la démocratie qui sont actuellement ébranlées au Canada.

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Le président:
    Je vous suggère d'attendre notre rapport. Vous pourrez juger à ce moment-là.

[Traduction]

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M. Dennis Mills:
    C'est l'objet de notre étude.

[Français]

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M. Armand Dubois:
    Vous nous pressez, mais nous sommes prêts à répondre à toutes vos questions.

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Le président:
    Monsieur Dénommé.

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M. Jacques Denommé (premier vice-président, Syndicat des employés de Vidéotron; vice-président de la câblodistribution, Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique):
    J'aimerais ajouter quelque chose. On parle ici de l'identité canadienne et de la programmation canadienne. Il y a un volet qui n'a pas encore été touché et que je trouve important. Je demanderais aux gens de regarder le mémoire qui a été déposé. On y parle des observations sollicitées par le CRTC et de l'Avis public 2001-129 du 20 février 2002.

    On y décrit en quelques mots comment tout l'argent se retrouve à l'intérieur des grands consortiums et dans la production indépendante. On ne demande pas de nouvel argent. En 1998, le CRTC a décidé que la télévision communautaire ne serait plus obligatoire pour les câblodistributeurs. En même temps, on nous dit qu'on va plafonner le financement à 2 p. 100 à l'intérieur de l'enveloppe de 5 p. 100 de la programmation canadienne.

    Dans les faits, cela signifie l'asphyxie progressive de la télévision communautaire. La programmation locale et la programmation communautaire vont disparaître. Pourquoi? Parce qu'avec la déréglementation et la concurrence, le nombre d'abonnés des câblodistributeurs va diminuer et qu'en conséquence la valeur résiduelle du 2 p. 100 va aussi diminuer. Les abonnés s'en vont chez les distributeurs par satellite, qui investissent 5 p. 100 dans la production indépendante. Le capital va toucher essentiellement la production indépendante. La production indépendante, sauf les dramatiques, est constituée de jeux-questionnaires et de toutes sortes d'autres émissions qui n'apportent rien de plus.

  + -(1230)  

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    Avant de dire qu'il faut plus d'argent, il faut voir comment cet argent est distribué. Tel est le fond du problème.

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Le président:
    Monsieur Dénommé, je peux vous assurer que nous avons déjà entendu ce que vous nous dites. Nous avons entendu des quantités de témoignages semblables. Donc, nous sommes très conscients de ce que vous dites.

[Traduction]

    M. Murdoch.

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M. Peter Murdoch:
    Je vais répondre à quelques questions.

    Nos salaires sont concurrentiels, mais tout dépend des films. C'est en fait un système très compliqué, monsieur Mills. Certains syndicats américains, comme l'IATSE, font mainmise sur les grandes productions américaines, et certaines d'entre elles ont tendance à verser de meilleurs salaires. Nos tarifs augmentent, et nous avons eu tendance jusqu'à présent à nous limiter aux productions plus modestes.

    Chose intéressante, je crois que 85 p. 100 des productions que nous réalisons à Toronto sont destinées à l'exportation, c'est donc beaucoup—et ce n'est qu'un commentaire sur les problèmes dont ont fait état plus tôt la Writers Guild et la Guilde canadienne des réalisateurs.

    Pour ce qui est de notre caisse de retraite, nous avons un bon bas de laine, et je peux m'informer au sujet des investissements. Je fais des reproches aux autres caisses de retraite. Peut-être que la caisse de retraite de CBC/Radio-Canada voudrait aussi faire les mêmes investissements. Mais je prends bonne note de votre observation; je vais voir ce que je peux faire à ce sujet.

    Monsieur Harvard, vous dites qu'il est trop tard, mais rappelez-vous qu'on a démantelé AT&T; on a aussi mis des bâtons dans les roues à Microsoft; nous avons même vu le gouvernement du Canada chez nous se pencher sur... Mais la question de la santé publique est beaucoup plus importante. Donc vous avez absolument raison de dire que c'est une tâche colossale. Mais je ne crois pas qu'il y a lieu de baisser les bras.

    Je tiens à dire aussi que tous ces groupes que j'ai mentionnés ont réclamé la même chose, qu'il s'agisse des citoyens inquiets, des sénateurs, des écoles de journalisme ou des anciens éditeurs—y compris notre syndicat—à savoir une enquête. Commençons par là et tâchons de déterminer l'ampleur du problème. Et que pouvons-nous faire? Si nous ne pouvons pas démanteler le système, nous pouvons à tout le moins mettre un frein à certains comportements indignes. Ce serait un début.

[Français]

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Le président:
    Nous voulons vous remercier d'avoir témoigné aujourd'hui et d'avoir soulevé beaucoup de questions.

[Traduction]

    Merci beaucoup, messieurs Murdoch et Sullivan. Nous vous savons gré...

[Français]

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M. Armand Dubois:
    J'aimerais faire un commentaire. Je ne voulais pas présumer de la validité de votre rapport. Je voulais simplement vous signifier de regarder la couverture journalistique que vous recevez. Un comité qui se penche sur le système canadien de radiodiffusion devrait avoir une couverture importante, et il n'y en a pas. Pourquoi? Il faudrait peut-être se poser des questions sur la concentration de la presse. C'est dans cette optique que j'avais fait mon commentaire préalable.

    Merci beaucoup.

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Le président:
    Monsieur Dubois, il vaut parfois mieux travailler dans l'ombre. Je pense que le rapport n'en sera que plus valable.

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M. Armand Dubois:
    Victor Hugo a dit que Dieu avait donné deux dons aux hommes: la connaissance et l'ignorance. Force est de constater que l'ignorance a préséance sur l'autre.

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Le président:
    J'espère que cela ne s'applique pas à nous. Merci beaucoup d'avoir témoigné.

  + -(1235)  

[Traduction]

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M. Peter Murdoch:
    Merci beaucoup d'avoir pris le temps de nous écouter.

[Français]

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Le président:
    Nous recevons maintenant les représentants de la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, la SOCAN. Ce sont M. Valiquette,

[Traduction]

    M. Spurgeon, Mme Alexina Louie, la Canadian Independent Record Production Association, l'Association de l'industrie canadienne de l'enregistrement—MM. Mair, Robertson et Thompson—toutes nos excuses; nous essayons peut-être d'en faire trop. Nous recevons de très nombreux témoins et nous tâchons d'être aussi équitables que possible, mais malheureusement, cela nous oblige parfois à limiter les réponses des témoins. Nous avons tâché d'être aussi généreux que possible.

    Donc si vous n'avez pas assez de temps aujourd'hui et si on ne vous écoute pas assez, nous tâcherons de vous réinviter, si cela vous est possible. Je vois qu'on vous a mis tout à fait au bas de la liste et cela vous nuit, donc nous tâcherons de faire de notre mieux pour vous écouter le plus possible aujourd'hui. Si nous ne terminons pas, vous accepterez peut-être de revenir un autre jour, si c'est possible. Je vous fais toutes mes excuses.

    Nous allons commencer avec vous, monsieur Valiquette.

[Français]

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M. Gilles Valiquette (président, Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique):
    Monsieur le président, membres du comité, bonjour. Good afternoon.

    Je m'appelle Gilles Valiquette et je suis auteur, compositeur de chansons et président de la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, mieux connue sous le nom de la SOCAN.

    Je suis accompagné aujourd'hui de ma collègue Alexina Louie, qui est compositeure de musique classique, et de M. Paul Spurgeon, vice-président, Services juridiques, et chef du contentieux de la SOCAN.

    Avant que je vous fasse part de la position de la SOCAN en ce qui a trait à la situation du système de radiodiffusion canadien, permettez-moi de vous dire quelques mots au sujet de l'organisme que nous représentons. La SOCAN est une association canadienne à but non lucratif qui représente les compositeurs, paroliers, auteurs-compositeurs et éditeurs d'oeuvres musicales de toutes les régions du Canada et de tous les pays du monde. Au nom de nos membres canadiens actifs, qui sont au-delà de 20 000, et des membres de nos sociétés internationales affiliées, nous administrons les droits d'exécution liés à la musique et aux paroles de chansons.

    Sous le parapluie du droit d'auteur, le droit d'exécution accorde aux titulaires d'oeuvres musicales le droit exclusif d'exécuter celles-ci en public et d'en autoriser la télécommunication en public par d'autres, en contrepartie de paiements de redevances. Mes collègues et moi aimons bien dire que le droit d'auteur est notre salaire.

    Nos membres créent ce qu'on appelle des oeuvres de l'esprit. Celles-ci sont à l'image de notre société et sont généralement comprises dans l'expression «contenu canadien». Nous croyons fermement que les traités commerciaux internationaux ne doivent pas brimer le droit souverain du Canada de consolider et de faire respecter les règles qui ont trait au contenu canadien. Vous pourrez trouver de plus amples détails sur qui nous sommes et ce que nous faisons en consultant les 10 premières pages du mémoire que nous soumettons à votre comité.

    Nous aimerions prendre le reste du temps mis à notre disposition aujourd'hui pour souligner les points les plus importants de notre mémoire et nous serons heureux de répondre à vos questions par la suite.

    Permettez-moi de dire en partant que la SOCAN craint que les politiques et programmes du gouvernement du Canada n'aient pas vraiment réussi à gérer de façon efficace la relation entre les politiques culturelles et les politiques commerciales. Nous décrivons aux pages 11 à 23 de notre mémoire la manière dont la culture canadienne a été traitée jusqu'ici dans le cadre de l'Accord de libre-échange nord-américain, l'ALENA, et de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC.

    La SOCAN n'est pas seule à avoir conclu que le statu quo ne fonctionne pas. Comme vous le savez, le Groupe de consultations sectorielles sur le commerce extérieur du gouvernement canadien, le GCSCE ou, si vous préférez, le SAGIT en anglais, est arrivé à la même conclusion il y a plus de trois ans. En février 1999, après avoir étudié diverses options, ce groupe a recommandé au gouvernement canadien de négocier un nouvel instrument international sur la diversité culturelle. Le GCSCE a également recommandé que ce nouvel instrument définisse les règles concernant le genre de mesures nationales auxquelles les divers pays peuvent ou ne peuvent pas recourir pour favoriser leur diversité culturelle et leur langue.

    La SOCAN considère que les règles sur le contenu canadien devraient figurer sur toute liste de mesures légitimes, étant donné qu'elles respectent les principes commerciaux internationaux de transparence et de traitement national.

  + -(1240)  

     Nous appuyons vigoureusement la négociation portant sur l'instrument international sur la diversité culturelle. Nous collaborons avec le gouvernement du Canada et d'autres organisations qui sont d'accord sur cette idée, comme la Coalition pour la diversité culturelle, pour qu'elle puisse devenir réalité.

    Pour terminer mon intervention, j'aimerais dire que la SOCAN a bien peur que, si le gouvernement du Canada ne parvient pas à régler la question de l'instrument international sur la diversité culturelle dans les plus brefs délais, les décisions qui seront prises à l'OMC dans l'intervalle pourront venir sérieusement limiter nos options. Nous savons tous que les négociations sur les services se poursuivent à l'OMC depuis plus de deux ans et qu'elles devraient se terminer avant janvier 2005.

    Pour leur part, les États-Unis ont clairement indiqué leur intention de poursuivre agressivement leurs intérêts commerciaux dans le cadre des négociations sur les services audiovisuels. Monsieur le président, ce qu'il faut retenir de notre message est bien simple: il n'y a plus une minute à perdre dans ce dossier. Nous prions donc instamment le gouvernement du Canada de considérer cette question comme une priorité nationale. Il faut en arriver à une entente sur l'instrument international sur la diversité culturelle dans les plus brefs délais.

    Je cède maintenant la parole à ma collègue Alexina Louie, qui traitera de la position de la SOCAN concernant le contenu canadien.

[Traduction]

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Mme Alexina Louie (compositeure de musique classique, Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique):
    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs du comité.

    Comme Gilles l'a dit, je m'appelle Alexina Louie. Je suis membre du conseil d'administration de la SOCAN et compositrice de musique classique.

    J'aimerais prendre le relais de Gilles et parler de la question du contenu canadien. L'une des questions que votre comité pose est de savoir si la façon de déterminer le contenu canadien demeure valide dans les nouveaux médias. Nous avons répondu à cette question aux pages 21 à 23 de notre mémoire.

    J'aimerais résumer notre position en affirmant sans détour que de l'avis de la SOCAN, la façon de déterminer le contenu canadien demeure valide pour toute production audio sur les ondes ou sur Internet. En me basant sur mon expérience à titre de compositrice canadienne de musique classique, j'ai la conviction que les règles relatives au contenu canadien sont plus importantes aujourd'hui qu'elles ne l'ont jamais été étant donné qu'elles facilitent le choix, donnent de la visibilité à nos artistes chez nous et assurent leur succès à l'échelle internationale.

    Le mois dernier, la ministre du Patrimoine canadien a commandé une étude sur les règles relatives au contenu canadien dans les secteurs du cinéma et de la télévision. Les responsables de cette étude ne se pencheront pas sur l'application des règles relatives au contenu canadien au secteur de la radio, ce qu'on appelle les règles MAPL, que nous avons reproduites à la page 23 de notre mémoire. Nous sommes d'avis que la définition MAPL doit rester inchangée et qu'elle doit continuer d'être axée sur les créateurs du contenu pour que les Canadiens puissent mieux comprendre et apprécier notre culture unique.

    Aux pages 23 à 28 de notre mémoire, nous répondons à la question des coûts que le règlement sur le contenu canadien impose aux diffuseurs. Les données du CRTC montrent que les règles relatives au contenu canadien n'ont pas empêché les radiodiffuseurs d'accroître leurs recettes et leur rentabilité.

    Dans le même sens, les données du CRTC montrent que les profits de l'industrie canadienne de la télévision continuent d'augmenter parce que les profits qu'ils tirent de l'utilisation des ondes publiques dépassent leurs coûts, notamment tous les coûts liés au règlement sur le contenu canadien.

    Je terminerai en répondant à une autre question essentielle que pose votre comité. Dans quelle mesure l'actuel système de contingents pour le contenu canadien permet-il de promouvoir un contenu distinctement canadien dans un monde de canaux numériques et d'émissions accessibles par Internet?

    Aux pages 36 à 40 de notre mémoire, nous avons répondu à cette question en exprimant notre préoccupation face à la décision du CRTC de mai 1999 de ne pas réglementer les nouveaux services médiatiques sur Internet. La SOCAN craint que l'absence actuelle de réglementation des nouveaux médias risque d'affaiblir l'efficacité du CRTC et de créer deux catégories de diffuseurs: ceux qui sont assujettis aux lois du Parlement et ceux qui ne le sont pas.

    Pour nous assurer que les règles du CRTC relatives au contenu canadien demeurent pertinentes et efficaces, nous demandons à la page 37 de notre mémoire que votre comité demande à la ministre du Patrimoine canadien d'émettre une directive gouvernementale à l'intention du CRTC conformément au paragraphe 7(1) de la Loi sur la radiodiffusion.

    Merci, monsieur le président.

    Paul Spurgeon va maintenant achever l'exposé de la SOCAN en vous parlant de quelques questions essentielles relatives au commerce international.

  + -(1245)  

prochaine intervention intervention précédente

M. Paul Spurgeon (vice-président, Services juridiques et chef du contentieux, Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique):
    Bonjour, monsieur le président et membres du comité.

    Je voudrais terminer l'exposé de la SOCAN en me penchant sur l'une des questions d'importance critique figurant dans votre mandat, à savoir si les politiques et programmes actuellement en place assurent efficacement la gestion de la relation entre les politiques culturelles et les politiques commerciales. Nous traitons de cette importante question aux pages 10 à 21 et 45 à 46 de notre mémoire. Je sais que vous et votre personnel lirez notre mémoire et je n'ai donc pas l'intention de répéter aujourd'hui. Toutefois, j'aimerais souligner quelques points essentiels qui devraient figurer dans votre rapport. Vu le temps limité dont nous disposons je vais me concentrer sur les pages 19 à 21 de notre mémoire où nous abordons les négociations sur les services qui se poursuivent à l'Organisation mondiale du commerce ainsi que l'AGCS, l'Accord général sur le commerce des services.

    Le 14 mars 2001, le ministre canadien du Commerce international, l'honorable Pierre Pettigrew, a déclaré lors du lancement de la position initiale du Canada en vue des négociations sur l'AGCS à l'OMC, et je cite:

«...Le Canada réaffirme sa position en ce qui touche la diversité culturelle, c'est-à-dire que le Canada ne s'engagera d'aucune façon qui pourrait limiter sa capacité d'atteindre ses objectifs de politique culturelle, et le Canada s'engage à poursuivre ses efforts en vue de l'établissement d'un nouvel instrument international qui puisse protéger les droits de tous les pays à prendre les mesures qu'ils voudront pour protéger leur diversité culturelle.

Enfin, quant à la structure même des négociations, la position du Canada consiste dans le maintien de l'actuelle structure de l'AGCS, du bas vers le haut.»

    Afin de déterminer si la position du Canada à l'OMC protège réellement la culture canadienne, la SOCAN voudrait saisir le comité des trois enjeux suivants:

    Premièrement, il est important de noter que cette déclaration porte uniquement sur de nouveaux engagements et qu'elle ne traite absolument pas des préoccupations exprimées un peu plus tôt au sujet des engagements existants sous les régimes de l'Accord de libre-échange, de l'ALENA, du GATT, etc.

    Deuxièmement, l'engagement du ministre est fondé sur la position du Canada qui consiste dans le maintien de l'actuelle structure de l'AGCS, du bas vers le haut. Cette structure permet au Canada de choisir les secteurs à l'égard desquels il tient à assumer des obligations d'accès au marché ou de traitement national. Malgré son efficacité dans les négociations de l'AGCS, cette stratégie n'élimine pas tous les risques.

    Le Canada s'expose en effet à des risques puisqu'il n'est pas du tout garanti que toutes les négociations de commerce international adopteront la prétendue structure du bas vers le haut. Par exemple, aux pages 17 et 18 de notre mémoire, nous avons discuté de la poursuite intentée par l'Union européenne contre les politiques de distribution de films du Canada. Ce différend a été soulevé devant l'OMC en vertu de l'AGCS qui a adopté une politique du haut vers le bas en ce qui concerne le traitement de la nation la plus favorisée. En d'autres termes, l'AGCS n'est pas fondé uniquement sur une structure du bas vers le haut.

    Il convient aussi de noter que le chapitre concernant les services de l'ALENA a adopté une approche du haut vers le bas là où les obligations de traitement national s'appliquent à tout, à moins qu'une Partie n'exprime des réserves quant aux mesures existantes aux termes de l'annexe I ou des réserves aux mesures existantes et futures aux termes de l'annexe II. Cela a été dit un peu plus tôt. Il n'existe pas d'exemptions sectorielles générales.

    Qui plus est, il faut aussi reconnaître que les négociations de l'AGCS ne sont pas les seules négociations de commerce international pouvant avoir une incidence sur la souveraineté culturelle du Canada. Par exemple, il n'a pas encore été décidé si les négociations de la Zone de libre-échange des Amériques, ou la ZLEA, seront du bas vers le haut ou du haut vers le bas. Il est donc important que le comité reconnaisse qu'il n'est pas assuré que les négociations commerciales internationales à l'OMC et en vertu de l'ALEA n'adopteront pas une approche du haut vers le bas. SOCAN s'inquiète donc qu'une approche du haut vers le bas ne limite encore davantage l'aptitude du Canada à appliquer ses politiques culturelles.

    Le troisième problème susceptible de subvenir en raison de la position actuelle du Canada à l'OMC tient au fait que les négociations de l'OMC ne sont pas restreintes aux négociations de l'AGCS. D'autres secteurs clés, dont l'investissement, pourraient faire l'objet de négociations à la suite de la cinquième Conférence ministérielle de l'OMC qui aura lieu au Mexique l'année prochaine. Une des questions qu'étudie votre comité consiste à savoir si la mondialisation va nuire aux restrictions actuelles à la propriété dans la radiodiffusion.

  + -(1250)  

    Comme nous l'établissons aux pages 33 et 34 de notre mémoire, la SOCAN croit que les traités commerciaux internationaux pourraient éventuellement limiter la capacité du Canada à imposer des limitations en matière de propriété dans le secteur de la radiodiffusion.

    Comme avec le tout récent accord multinational sur l'investissement—l'AMI, auquel Mme Bulte a fait référence un peu plus tôt—nous ne pouvons pas garantir que les négociations de l'OMC seront du bas vers le haut. Un accord sur l'investissement fondée sur une démarche de du haut en bas pourrait limiter l'aptitude du Canada à faire respecter ses exigences d'exécution dont celles qui ont trait au contenu canadien. Par exemple, l'article 1106 de l'ALENA crée des obligations sur les exigences d'exécution. La SOCAN s'oppose à l'article 1106 puisqu'il limite l'aptitude du Canada à développer sa propre économie grâce à des exigences d'exécution comme les règles qui ont trait au contenu canadien qui obligent les investisseurs étrangers à embaucher des travailleurs canadiens et à utiliser des produits et services canadiens.

    Sans l'exemption culturelle de l'ALENA, qui n'est pas une garantie absolue en soi, l'article 1106 interdirait l'application des règles sur le contenu canadien aux investisseurs américains. Cela pourrait beaucoup nuire aux membres de la SOCAN.

    Jusqu'à présent, l'article 1106 n'a pas posé de probléme puisque l'investissement étranger se limite pour le moment au secteur de la radiodiffusion. Le comité doit donc nécessairement tenir compte du fait que les conséquences sur le contenu canadien qui résulteraient d'une ouverture du secteur de la radiodiffusion canadien aux investisseurs étrangers pourraient être considérables. Il est aussi important de souligner que les dispositions sur les différends investisseur-État pourraient exposer nos mesures de protection culturelle aux attaques des entreprises étrangères.

    Étant donné les préoccupations que nous avons exprimées au sujet de la position du Canada devant l'OMC, nous croyons que les efforts en vue d'établir l'instrument international proposé pour protéger la diversité culturelle devraient être déployés de façon agressive et le plus tôt possible.

    Monsieur le président, la SOCAN tient à vous remercier de votre invitation. Nous sommes maintenant disposés à répondre à vos questions.

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Le président:
    Merci beaucoup.

    Monsieur Mair.

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M. Alexander Mair (membre du Conseil, Canadian Independent Record Production Association):
    Merci, monsieur le président. Avec votre permission, même si mon exposé ne compte que deux pages, je le raccourcirai considérablement.

    Nous croyons que la Loi sur la radiodiffusion actuelle fonctionne bien, qu'elle a bien fonctionné au cours de la dernière décennie et n'a besoin que de quelques ajustements mineurs pour bien fonctionner pendant la prochaine décennie. Pour citer notre mémoire, si elle n'est pas cassée, nul besoin de la réparer.

    Les trois enjeux de notre mémoire que nous voulons mettre en relief ici sont d'abord le CRTC et les règles sur le contenu canadien, ensuite les questions de propriété et enfin, les questions de droit d'auteur et de technologie.

    D'abord, la CIRPA croit que le CRTC a un rôle essentiel à jouer au cours de la prochaine décennie dans la représentation des intérêts de la population canadienne pour l'octroi de licences—les Canadiens qui, après tout, sont propriétaires des ondes—ainsi que dans la surveillance des changements qui se produiront, pour s'assurer que les Canadiens continuent à avoir un accès privilégié aux oeuvres canadiennes. Nous croyons que le CRTC a un rôle à jouer aux termes du sous-alinéa (d)(i) du paragraphe 3(1) de la loi visant à garantir et renforcer la culture canadienne.

    La CIRPA croit aussi qu'il faut garder les limitations existantes imposées sur la propriété étrangère en matière deradiodiffusion. Sur les ondes radio, la concentration de la propriété se retrouve dans les grands marchés et donc l'auditoire est très vaste, ce qui crée aussi de graves problèmes comme le manque de diversité musicale et le manque d'exposition des nouveaux artistes, etc. Nous croyons que la concentration au Canada est déjà plus élevée par habitant qu'aux États-Unis et, comme le comité le sait, cette situation retient l'attention du Conseil fédéral des communications.

    La troisième chose que la CIRPA voudrait souligner a trait à la nécessité d'établir un seuil réaliste de redevances pour la propriété intellectuelle qui serait renforcé par une loi moderne, efficace, et régulièrement mise à jour, ainsi qu'un système d'application qui permettrait aux titulaires de droits d'auteur de recevoir les redevances auxquelles ils ont droit pour les oeuvres qui leur appartiennent.

    De toute évidence, l'industrie de la radiodiffusion canadienne tire des profits considérables de la musique préenregistrée sur laquelle elle compte énormément comme source de contenu. En contrepartie d'un versement très minime, elle reçoit un avantage très substantiel des campagnes de mise en marché et de productions fort coûteuses entreprises par les maisons de disque et les éditeurs de musique pour faire la promotion de leurs artistes et auteurs. À cet égard, la CIRPA a pris bonne note de la position de l'Association de l'industrie canadienne de l'enregistrement et l'appuie totalement dans sa cause de 1,25 million de dollars en exemptions dont il est question dans la loi de 1997 sur les droits connexes.

    Merci.

  + -(1255)  

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Le président:
    La parole est à monsieur Robertson.

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M. Brian Robertson (président, Association de l'industrie de l'enregistrement):
    Merci, monsieur le président. Je suis accompagné aujourd'hui de mon collègue Ken Thompson.

    L'Association de l'industrie de l'enregistrement compte 32 membres, et notamment les grandes maisons de disques, toutes les grandes étiquettes indépendantes et tous les fabricants de disques compacts, de cassettes et—pour ceux d'entre nous qui s'en souviennent—même de disques vinyle. En tout, ces membres comptent pour plus de 95 p. 100 de toute la musique enregistrée qui est produite et vendue au Canada et représente un investissement de plus de 60 millions de dollars par an dans la carrière et les enregistrements d'artistes canadiens de l'industrie de la musique.

    Le mémoire écrit que nous vous avons fait parvenir plus tôt vous a sans doute donné un aperçu plus détaillé, mais nous souhaitons aujourd'hui en résumer les points essentiels.

    Tout d'abord, parlons des nouvelles technologies, et de l'Internet et de la technologie numérique en particulier. Du point de vue contenu créatif, aucune industrie n'a jusque ici été autant touchée par l'évolution technologique que celle de l'enregistrement. Il a été dit que la musique représente relativement à la propriété intellectuelle le canari des mines de charbon. L'influence des progrès dans l'élaboration des compressions et les services de partage des fichiers comme Napster, combinés à la réputation du Canada comme pays ayant le taux de pénétration d'Internet à haute vitesse le plus élevé au monde, par habitant, ont produit une génération de jeunes élevés dans l'idée que la musique enregistrée est gratuite.

    Conséquence inévitable, les ventes au détail d'enregistrements sonores ont diminué de 16 p. 100 depuis deux ans. Les ventes de disques compacts légitimes ont chuté de 58 millions en 1999 à 51 millions cette année, selon les estimations. Inversement, la vente de CD vierges à enregistrer a augmenté, passant de 45 millions en 1999 à 155 millions cette année.

    Étant donné le nombre d'amateurs de musique et de consommateurs qui ont adopté la nouvelle technologie, l'industrie de l'enregistrement a réagi aussi rapidement que possible en élaborant de nouveaux modèles commerciaux qui offriront des services en direct novateurs et légitimes. C'est à ce niveau, toutefois, que l'on risque de franchir la ligne entre le commerce et la politique de radiodiffusion.

    Il va sans dire que la technologie et l'innovation sont très prometteuses pour le développement de l'industrie de la radiodiffusion, mais à notre avis, ces progrès ne doivent pas sortir du mandat de la Loi sur la radiodiffusion. Nous sommes d'avis que les principes relatifs au droit d'auteur international établis dans les deux traités de l'OMPI, outre les rapports et enquêtes internes comme l'étude du CRTC sur les nouveaux médias en 1999, prouvent qu'en ce qui a trait à la législation relative au droit d'auteur et à la radiodiffusion, la tendance est à maintenir la distinction qui existe entre la radiodiffusion et les nouvelles utilisations du contenu commercial, dans le contexte du téléchargement numérique. Même s'il s'est écoulé du temps depuis les audiences sur les nouveaux médias, la décision de ne pas appliquer à l'Internet les règlements sur la radiodiffusion est aujourd'hui plus pertinente que jamais.

    Dans sa décision, le CRTC a déclaré ce qui suit:

«Le matériel transmis par l'Internet, qui est essentiellement «personnalisable» ou susceptible de s'adapter de façon particulière aux besoins de l'utilisateur, n'englobe pas la transmission d'émissions destinées au grand public et ne constitue donc pas de la radiodiffusion.»

    S'agissant du contenu canadien, nous estimons que les exigences actuelles relatives au contenu des émissions de radio devraient rester en vigueur car elles sont compatibles avec la politique canadienne de radiodiffusion. Comme nous l'avons signalé dans notre mémoire écrit, les obligations des radiodiffuseurs tenus de verser des redevances comme les droits voisins et la question des règlements sur le contenu canadien sont deux choses tout à fait distinctes. La Commission du droit d'auteur a signalé, dans sa décision relative au tarif commercial d'émissions radiophoniques du NRCC que le respect des règlements canadiens relatifs au contenu n'est pas un compromis pour la diminution des redevances visant les enregistrements sonores diffusés lors d'émissions radiophoniques.

    Enfin, dans le domaine de la production, de la distribution et du droit d'auteur, nous avons pris note de la stratégie de l'Association canadienne des radiodiffuseurs visant à étendre aux droits voisins le seuil visant la redevance spéciale. La redevance spéciale dont parle l'Association est celle que prévoit la Loi sur le droit d'auteur. Elle représente une tentative d'ordre législatif remontant au projet de loi C-32 en vue de dispenser les petites stations radio du paiement de droits voisins tarifaires et de permettre en échange le versement d'un montant forfaitaire de 100 $ par an sur le premier montant de 1,25 million de dollars de revenu.

    Nous approuvons sans réserve le but de cette concession visant à avantager les petites stations de radio. Malheureusement, la diminution de la redevance spéciale profite également aux grandes stations rentables qui ne sont pas tenues de payer de redevances sur leur premier montant de 1,25 million de dollars de revenu.

  + -(1300)  

    La Commission du droit d'auteur a fait remarquer dans sa décision que le plancher de 1,25 million de dollars n'était pas nécessaire en indiquant ce qui suit:

«La preuve déposée par la SCGDV, et particulièrement la pièce NRCC-29, démontre clairement que l'industrie aurait eu les moyens d'acquitter le plein tarif sans égard aux dispositions spéciales de la loi. D'ailleurs, ni l'ACR ni ses témoins n'ont remis en question la validité ou la qualité de la preuve de la SCGDV à cet égard.»

    Il est évident que les redevances pour les droits voisins n'ont pas nui à la rentabilité de la radio commerciale, et il n'y a donc aucune raison valable de maintenir cette réduction des redevances inutile et injuste. À notre avis, le comité devrait recommander que cet article de la Loi sur le droit d'auteur soit abrogé ou, à tout le moins, modifié puisqu'il n'est pas valable dans sa forme actuelle.

    Voilà qui conclut mon exposé d'aujourd'hui, monsieur le président. Merci beaucoup.

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Le président:
    Merci à vous.

    Nous commençons par Mme Gagnon.

[Français]

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Mme Christiane Gagnon:
    Merci de votre présentation. Je ne l'ai pas entendue en entier puisque j'étais en train de discuter avec ceux qui vous ont précédés. J'aimerais avoir votre avis sur le sujet suivant.

    Nous avons visité une radio anglophone à Montréal, CHED, où on nous a donné l'exemple de la cassette dont le contenu était transféré dans la mémoire vive à des fins de diffusion. On nous a dit qu'il y avait des droits à payer si, par exemple, on avait à diffuser la cassette et qu'il y avait des coûts supplémentaires lorsqu'on voulait la transférer dans la mémoire vive d'un système de diffusion. Selon eux, ce coût est injuste étant donné qu'ils ont déjà payé pour avoir la cassette. Pourquoi doivent-il payer à nouveau lors du transfert de l'enregistrement dans la mémoire vive d'un système informatique? De toute façon, on fait cela seulement dans un but de diffusion. Que ce soit sur cassette ou dans la mémoire vive, la fin est la même.

    Je sais que vous avez dit que cela leur coûtait moins cher en personnel. Ils ne sont pas de cet avis et estiment que les coûts en personnel ne sont pas plus bas puisque la même personne fait le même travail. Donc, qu'on utilise ce qui est dans la mémoire vive ou la cassette, c'est le même geste qu'on pose. Êtes-vous d'accord sur cela?

[Traduction]

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M. Paul Spurgeon:
    À ce sujet précisément, la Commission du droit d'auteur du Canada est actuellement saisie de cette affaire. C'est ce qu'on appelle le droit mécanique ou droit de reproduction. C'est un droit que la Loi sur le droit d'auteur confère aux éditeurs et aux auteurs compositeurs, et le montant de ce droit est établi par la Commission en vue d'indemniser les sociétés collectives de droit d'auteur qui représentent ces titulaires de droit d'auteur--en d'autres termes, les auteurs et les éditeurs--pour ce droit.

    Cela ne s'applique que s'il existe une société de gestion collective. Au cas contraire, les stations peuvent copier la musique. Toutefois, s'il y a une société de gestion collective, il faut établir un tarif et une redevance pour cette utilisation. À combien se monte-il? Je n'en sais rien. Je ne sais pas à combien la Commission des droits d'auteur va établir la valeur de ce droit, car elle devra examiner les preuves présentées par les deux parties avant de déterminer ce que représente cette reproduction pour la station et pour le titulaire du droit d'auteur, en l'occurrence. Il faudra sans doute attendre plusieurs mois avant que la Commission ne rende sa décision à ce sujet, mais elle a été saisie de l'affaire. Je ne peux pas vous en dire plus pour le moment.

  + -(1305)  

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Le président:
    Madame Bulte.

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Mme Sarmite Bulte:
    Merci, monsieur le président.

    Au sujet du contenu canadien, votre point de vue est intéressant, par opposition à celui de l'Association canadienne des radiodiffuseurs. Selon elle, il faut modifier cette règle sur-le-champ car il est injuste que Céline Dion ne soit pas considérée comme du contenu canadien, bien qu'elle n'habite pas ici, ne paie pas d'impôts dans notre pays, ne produise rien ou n'écrive rien ici.

    Je vais donc vous poser une autre question. À votre avis, faut-il aller encore plus loin? Vous recommandez de maintenir cette exigence pour les émissions de radio. L'autre soir, après la partie de hockey, j'ai visionné une production de la CBC sur Céline Dion. La CBC présentait cette artiste car je pense que ni le réseau ABC, NBC ni aucun des réseaux américains lui ont donné la chance de se présenter.

    Pendant l'émission le groupe Destiny's Child qui, sauf erreur—et qu'on me reprenne si je me tompe—est américain... Vous parlez de radio, mais ne devrions-nous pas envisager d'appliquer également cette règle aux séries d'émissions de variété? S'agit-il simplement d'une échappatoire, grâce à laquelle un citoyen canadien ou une personne née au Canada peut profiter des avantages de la désignation MAPL en premier lieu, pour devenir une vedette internationale, et utiliser ensuite ce lieu pour présenter...? Qu'en pensez-vous?

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M. Alexander Mair:
    Je vais commencer. D'abord, Mme Bulte, je ne suis pas sûr que ce spectacle ait été réalisé au Canada. Je pense qu'il a été filmé aux États-Unis et radiodiffusé simultanément sur un des réseaux américains, ce qui est une des raisons de présenter Destiny's Child à ce spectacle. Il y aura une autre émission spéciale de Céline Dion plus tard cette année en provenance du nouveau théâtre à Las Vegas, qui sera probablement une autre émission en jumelé. Elle sera offerte aux réseaux canadiens, probablement au plus offrant.

    Vous soulevez une question très intéressante au sujet de la pénurie de spectacles de variétés, surtout des spectacles musicaux, à la télévision canadienne. En gros, on laisse ça au groupe MuchMore Bravo et MusiMax au Québec. Au Canada anglais, nous avons le Mike Bullard show, où on ne paie pas les artistes. Ils doivent renoncer à leur droit au paiement s'ils veulent participer à cette émission.

    Ce qu'on constate si on regarde le bénéfice net du Comedy Network est assez gênant. C'est un réseau qui fait beaucoup de bénéfices, des millions de dollars de bénéfices, mais il refuse de payer ses invités-musiciens un sou, même s'ils attirent les téléspectateurs. La CIRPA serait très contente si on exigeait que les réseaux de télévision canadiens présentent plus de programmation musicale et de spectacles de variétés.

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Mme Sarmite Bulte:
    J'aimerais poser une question complémentaire. Est-ce que le spectacle de Céline Dion, qui a été présenté à CBC--je l'ai regardé à CBC--aurait été considéré comme étant du contenu canadien?

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M. Alexander Mair:
    Je n'ai pas vraiment de réponse. Le spectacle a peut-être été réalisé par sa propre société de production. Elle a une au Canada et probablement une autre aux États-Unis. Il faudrait regarder l'avis de droit d'auteur que l'on affiche à la fin du spectacle pour savoir qui est le propriétaire de cette émission. Mais je soupçonne qu'elle en est propriétaire par l'entremise d'une de ses sociétés.

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M. Brian Robertson:
    Je ne pense pas qu'il faille tenir pour acquis qu'elle n'a aucun contenu canadien. Elle a une maison ici au Québec. Son premier enregistrement simple a été composé par un chansonnier canadien, et avait peut-être un producteur canadien aussi. Donc le niveau de contenu canadien est quand même élevé. Comme Al a dit, cette émission spéciale était produite aux États-Unis. Elle a été produite pour diffusion internationale, pas seulement nationale. La Société Radio-Canada a acheté les droits de l'émission pour pouvoir la présenter au Canada.

    Il s'agit d'une entreprise internationale, et je pense qu'on cherche à donner à elle et à sa musique autant d'apparition que possible. Voilà pourquoi cette émission spéciale a été tournée à Los Angeles, au nouveau théâtre Kodak. Même si elle a une maison aux États-Unis, elle demeure canadienne et a beaucoup de contenu canadien dans ses productions.

  + -(1310)  

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M. Dennis Mills:
    J'ai quelques questions à poser, monsieur le président, mais je vais les poser aux témoins individuellement, soit par courriel soit par téléphone. Donc je vais céder mon tour aujourd'hui.

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Le président:
    Merci beaucoup.

    M. Mills va envoyer ces questions par courriel, et vous pouvez faire de même.

    Monsieur Cuzner.

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M. Rodger Cuzner (Bras d'Or—Cape Breton, Lib.):
    Ma question s'adresse davantage aux représentants de SOCAN. L'Association canadienne des radiodiffuseurs préconise des incitatifs pour donner aux nouveaux artistes canadiens plus de possibilités de faire entendre leur musique et on accorderait plus de poids aux disques des nouveaux artistes. Je suppose que SOCAN connaît cette proposition. Qu'est-ce que vous en pensez?

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M. Paul Spurgeon:
    Je connais le principe. Je n'ai pas étudié les détails, mais il est évident que tout en dépend. Je pense qu'il est louable que les radiodiffuseurs veuillent encourager les nouveaux artistes talentueux. C'est essentiel, et d'ailleurs, c'est la raison d'être même du contenu canadien. Si l'on compte les artistes qu'on a actuellement dans l'industrie de la musique, c'est parce qu'ils ont eu ce tremplin. Cela leur a permis de réussir au Canada pour ensuite faire avancer leur carrière à l'étranger.

    J'aimerais savoir comment cette initiative fonctionnerait. De toute évidence, nous ne voudrions pas abandonner quoi que ce soit qui risquerait de compromettre le régime actuel qui nous permet de reconnaître tous les éléments du contenu canadien à la radio—c'est-à-dire le compositeur, le parolier et l'artiste, en plus de la production et du lieu de production. Ce sont tous des éléments très importants.

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M. Brian Robertson:
    J'aimerais faire une petite remarque en vitesse, M. Cuzner. À l'heure actuelle, rien n'empêche les radiodiffuseurs de faire entendre de la nouvelle musique et des nouveaux artistes pour ce qui est du respect des niveaux actuels. Rien ne les empêche de faire passer plus que le niveau actuel. Il va sans dire que nous allons examiner la proposition, mais il n'y a absolument rien en ce moment qui les empêche de faire ce qui est proposé.

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M. Rodger Cuzner:
    Oui, et je ne pense pas qu'ils voient des contraintes. Ce qu'ils veulent avoir, c'est un incitatif. Je suppose que c'est un peu risqué de faire passer de nouveaux artistes.

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M. Alexander Mair:
    Si vous le permettez, j'aimerais répondre au nom de la CIRPA. Nos membres produisent presque exclusivement du contenu canadien.

    J'ai deux petites observations à faire. D'abord, il y a entre 10 et 20 nouveaux albums par semaine qui respectent les critères du contenu canadien. Cela représente entre 120 et 250 chansons par semaine, chaque semaine. Normalement, à la radio, on ajoute deux nouvelles chansons, sur les 120 à 250 chansons qui sortent toutes les semaines, et ce chaque semaine. Ce n'est pas le contenu canadien qui manque. À mon avis, toute tentative visant à abaisser le niveau actuel de contenu canadien serait tout à fait ridicule.

    Lors d'une récente conférence à Toronto—la Semaine de la musique canadienne—j'ai demandé à un expert-conseil important en radiodiffusion, qui faisait partie d'un groupe de radiodiffuseurs, pourquoi on ne faisait pas passer la musique de Diana Krall. Il a dit que ce n'était pas du contenu canadien et donc, n'était pas compatible avec nos ordinateurs.

    Elle a maintenant vendu quelque 500 000 disques au Canada. Lors de la remise des prix Juno, elle a été votée l'artiste de l'année, et pourtant on ne joue pas ses disques à la radio au Canada, à cause d'un problème d'ordinateur. Elle se trouve dans une sorte de zone neutre. Son disque n'est pas parmi les 10 meilleurs vendeurs aux États-Unis, même s'il se classe 3e cette semaine au Canada, six mois après sa sortie. Apparemment, on pense ne pas pouvoir reprogrammer l'ordinateur pour l'inclure comme disque sans contenu canadien parce que la trame sonore ne respecte pas les critères de contenu canadien.

    La compagnie Chrysler lui paye une fortune pour faire ces annonces, lesquelles ont une incidence majeure sur les ventes de disques. C'est l'artiste la plus populaire au monde dans son genre, mais on ne fait pas passer ses disques à la radio au Canada. Quant à l'idée des radiodiffuseurs qui demandent un peu plus pour présenter des nouveaux artistes, le fait est qu'ils ne présentent pas les artistes qui connaissent un succès fou en ce moment.

   -(1315)  

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Le président:
    Merci beaucoup de votre comparution devant nous. Je pense que nous allons revoir certains d'entre vous lors de nos audiences sur le projet de loi C-48, qui modifie la Loi sur le droit d'auteur. Merci encore une fois.

    La séance est levée.