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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CITIZENSHIP AND IMMIGRATION

COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 20 mars 2001

• 0909

[Traduction]

Le président (M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.)): Bonjour, chers collègues. Nous reprenons nos audiences sur le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger.

Ce matin, le premier témoin représente la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Nous souhaitons la bienvenue à Peter Showler, président, ainsi qu'à Philip Palmer, avocat général principal et directeur général de la mise en oeuvre de la loi et Glen Bailey, directeur général des politiques, de la planification et des recherches.

Peter, vous avez signalé que vous avez comparu lors des audiences sur le projet de loi C-31, qui a précédé le projet de loi C-11. Je tiens à vous en remercier sincèrement et je crois savoir que vous avez également fourni pour la gouverne des membres du comité, un document explicatif sur les règles proposées de la CISR aux termes du nouveau projet de loi C-11.

• 0910

M. Peter Showler (président, Commission de l'immigration et du statut de réfugié): Oui, je crois que ce document vient d'être distribué aux membres du comité.

Le président: Merci beaucoup de nous fournir cette information.

Je sais que vous avez des notes d'allocution pour vos remarques liminaires. J'espère que vous pourrez nous les présenter en cinq à sept minutes environ car nous avons énormément de questions à vous poser. Encore une fois, soyez le bienvenu et merci de votre participation à nos délibérations et de votre travail assidu à la CISR.

M. Peter Showler: Merci, monsieur le président. Vous avez déjà présenté mes collègues, mais permettez-moi de répéter que M. Palmer est l'avocat général principal de la commission, responsable de la mise en oeuvre du projet de loi et que M. Glen Bailey est le directeur de la planification et des recherches.

Je tiens à dire que ces deux messieurs ont participé de près à l'élaboration du projet de loi pour le compte de la commission, et c'est pourquoi ils m'accompagnent aujourd'hui, pour répondre à vos questions éventuelles.

Vous avez reçu le texte écrit de mon allocution. Je vais faire quelques brèves remarques aujourd'hui, monsieur le président, pour vous permettre de poser le plus de questions possible.

Étant donné qu'il y a des nouveaux venus autour de la table, je vais faire quelques brèves remarques au sujet de la commission en général pour vous brosser un tableau de nos activités. Puis, bien sûr, je parlerai du projet de loi proprement dit et de son incidence sur la commission.

Vous n'êtes pas sans savoir que la Commission de l'immigration et du statut de réfugié est le plus grand tribunal quasi judiciaire indépendant du Canada. La commission rend compte au Parlement par l'entremise du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Elle rend environ 50 000 décisions par an. La CISR se compose de trois sections, chacune étant un tribunal distinct auquel la loi confère un mandat différent.

La commission est indépendante du point de vue judiciaire. Pour comprendre ce que cela signifie, il vous faut savoir que l'indépendance judiciaire repose sur deux principes. Le premier principe est l'indépendance institutionnelle, qui oblige la commission à exécuter sa mission séparément de la fonction exécutive du gouvernement et des ministères fédéraux. Les décisions de la commission ne peuvent pas faire l'objet d'ingérence de la part d'un organisme quelconque au sein du gouvernement fédéral. En outre, le second principe est l'indépendance des décideurs de la commission, qui rendent leurs décisions en se fondant uniquement sur les éléments de preuve dont ils sont saisis et conformément à la loi. À l'instar de la CISR, qui bénéficie de l'autonomie institutionnelle, les décideurs sont libres de rendre des décisions sur des cas sans ingérence de la part du président ou de toute autre personne non partie à la procédure.

[Français]

Au point de vue de l'organisation actuelle, la commission est dotée d'un peu plus de 1 000 employés, comprenant des personnes nommées par décret et des fonctionnaires. Bien que son siège soit situé ici, dans la région de la capitale nationale, la commission a structuré ses activités de façon à avoir des bureaux régionaux à Toronto, Montréal, Vancouver, Ottawa et Calgary. De plus, elle a du personnel permanent en place à Winnipeg et à Niagara Falls.

La commission tient des audiences dans la plupart des grandes villes canadiennes et dans de nombreuses installations de détention au Canada. La section la plus grande de la commission, la Section du statut du réfugié, tranche les revendications du statut de réfugié présentées au Canada. Les 180 commissaires de la SSR s'attendent à régler environ 30 000 revendications du statut de réfugié cette année.

La Section d'arbitrage est chargée de faire des enquêtes sur des personnes qui ne seraient pas admissibles au Canada ou qui pourraient en être renvoyées, et de faire l'examen des motifs de détention des personnes détenues pour des raisons d'immigration. Les 28 décideurs s'attendent cette année à tenir 3 600 enquêtes et 11 000 examens de motifs de détention.

La troisième section de la commission, soit la Section d'appel de l'immigration, entend les appels interjetés contre le rejet de demandes parrainées de résidence permanente de parents et les appels contre les mesures de renvoi des résidants permanents et d'autres personnes. On s'attend à ce que les 27 décideurs de la SAI finalisent cette année 4 440 appels.

• 0915

[Traduction]

La CISR ne sélectionne pas les réfugiés à l'étranger ni ne renvoie les gens du Canada. Je signale cela parce que ce sont deux malentendus fréquents relatifs au rôle de la commission. Ces deux fonctions relèvent du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.

Je voudrais maintenant parler du rôle de la commission dans la rédaction du projet de loi. La CISR a participé à toutes les étapes des diverses consultations qui ont donné lieu au projet de loi, depuis la formation du groupe consultatif pour la révision de la législation sur l'immigration, en 1996, en passant par l'élaboration du Livre blanc et jusqu'à la rédaction des projets de loi C-31 et C-11.

La commission ne propose ni ne met en branle une nouvelle législation ou une politique de réglementation, car ce n'est pas le rôle d'un tribunal indépendant. Nous avons conseillé la ministre sur les répercussions éventuelles des politiques envisagées qui touchent directement ou non les activités de la commission. En outre, nous avons fourni des conseils sur la rédaction de dispositions précises du projet de loi qui visent directement les activités de la commission. En général, les observations de la commission se sont bornées aux questions de droit, de clarté du libellé ou de faisabilité de la mise en oeuvre. La ministre a pris connaissance des observations de la commission et y a donné suite dans la mesure où elles allaient dans le sens de la politique gouvernementale.

Le projet de loi C-11, qui est le résultat définitif, représente à notre avis une version améliorée de son prédécesseur, le projet de loi C-31. Le nouveau projet de loi est libellé de façon plus claire et plus précise et sera, par voie de conséquence, plus facile à mettre en oeuvre.

Je passe maintenant aux effets du projet de loi sur les activités de la commission. Le projet de loi confirme et modifie à la fois le rôle de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Il clarifie les principales fonctions des trois sections, confirme le pouvoir de trancher certaines affaires et modifie parfois leurs compétences.

Le projet de loi aura une incidence importante sur pratiquement tous les aspects des activités de la CISR et nécessitera beaucoup de préparation afin d'en assurer la mise en oeuvre efficace. Les modifications qui sont les plus évidentes et qui ont le plus de ramifications visent la protection des réfugiés. L'actuelle Section du statut de réfugié (SSR) deviendra la Section de la protection des réfugiés, la SPR. Sa compétence sera étendue afin de regrouper les motifs de protection. Trois motifs seront maintenant prévus pour accorder la protection à une personne. Le premier vise la catégorie de réfugié au sens de la Convention, le deuxième est la protection selon les motifs de la Convention contre la torture et le troisième est la protection contre la notion de menace pour la vie ou de traitement et châtiment cruels et inusités.

Dorénavant, la grande majorité des décisions de protection seront rendues par un seul commissaire, contrairement au modèle actuel en vertu duquel les revendications sont normalement entendues par un tribunal composé de deux commissaires. Les audiences tenues par un commissaire unique sont un moyen beaucoup plus efficace de trancher les revendications. Il est vrai que les revendicateurs ne pourront plus tirer profit du bénéfice du doute actuellement accordé par un tribunal composé de deux commissaires. Toutefois, cet inconvénient perçu est largement compensé par la création de la section d'appel des réfugiés, la SAR, où tous les demandeurs d'asile déboutés et le ministre pourront interjeter appel des décisions rendues par la SPR.

Les appels interjetés devant la SAR seront uniquement faits par écrit et examinés par des décideurs chevronnés de la SPR, dotés des pouvoirs de confirmer la décision de celle-ci, de l'infirmer ou de lui substituer leurs propres décisions; ou encore, dans certains cas exceptionnels où il sera nécessaire d'entendre des témoignages supplémentaires de vive voix, ils pourront renvoyer le cas à la SPR pour une nouvelle audience. Nous avons l'intention de doter la SAR de personnel et de ressources dont elle aura besoin pour traiter, selon nos estimations, entre 8 000 et 9 000 cas par an.

Nous croyons que la SAR obtiendra deux résultats différents, mais complémentaires. En examinant les décisions individuelles de la SPR sur le fond, la SAR pourra, de manière efficace, corriger les erreurs faites par la SPR. De plus, la Section assurer la cohérence dans le processus décisionnel grâce à la jurisprudence uniforme à l'échelle du pays que cette section établira sur les questions liées au droit des réfugiés. Comme je l'ai déjà dit devant votre comité, ce système n'aura pas selon nous pour seul avantage d'améliorer la qualité de nos décisions. Si la jurisprudence est plus cohérente et uniforme, les décideurs de la SPR pourront en fait également rendre leurs décisions plus rapidement.

• 0920

Ensemble, toutes ces modifications rendront assurément le régime global de protection plus efficace, tout en permettant à la commission de maintenir son engagement de rendre des décisions équitables.

[Français]

La Section d'arbitrage s'appellera dorénavant la Section de l'élaboration. Cette section n'est pas appréciée à sa juste valeur. Pourtant, elle joue un rôle essentiel dans le système d'immigration du Canada. Plus précisément, les décisions liées à la détention ont pris une importance accrue en raison des pressions à la hausse exercées par la migration planétaire. Le mandat fondamental de cette section ne changera pas mais au moins certaines modifications opportunes y seront apportées. Par exemple, le nouveau projet de loi précise les modalités de détention au point d'entrée et limite la détention aux cas où celle-ci est clairement justifiée pour maintenir l'intégrité du système et garantir la sécurité des Canadiens.

La Section d'appel de l'immigration continuera à entendre les appels de mesures de renvoi et de refus de demande de parrainage, sauf que les droits d'appel seront supprimés pour certains individus, notamment les grands criminels, les membres du crime organisé et les personnes qui constituent un danger pour la sécurité. Aux termes du projet de loi C-11, la section entendra maintenant les appels interjetés par les personnes qui ont perdu le statut de résidant permanent en raison d'un manquement aux obligations de résidence au Canada.

[Traduction]

Enfin, la mise en oeuvre du projet de loi C-11 aura des effets sur tout le personnel et tous les systèmes de la CISR. Il nous faudra revoir les règles de la commission, modifier sa procédure et ses formulaires, remanier les outils de référence et de formation et rédiger de nouveaux manuels et de nouveaux guides. Tous ces changements devront être apportés pendant que la commission continue d'entendre les cas.

Même si la tâche semble être de taille, et elle l'est, soyez assurés que la commission est tout à fait en mesure de soutenir et de mettre en oeuvre la nouvelle loi. Nous sommes convaincus que la commission continuera de rendre, avec efficacité et équité, des décisions éclairées, conformément à la loi—ce qui est au coeur de notre mission. Nous le ferons maintenant, pendant la période de transition et après l'adoption de la nouvelle loi par le Parlement.

Merci beaucoup de votre attention. Nous sommes tous les trois prêts à répondre à vos questions.

Le président: Merci, Peter.

J'aimerais vous poser une question de forme. Lorsque j'ai parlé du document sur l'explication des règles de la CISR proposées, cela s'appliquait essentiellement au projet de loi C-31. Je sais que la page titre du document fait état du projet de loi C-11, mais j'aimerais vous poser une question. Étant donné les différences qui existent entre le projet de loi C-11 et son prédécesseur, le C-31, ce document est-il toujours pertinent pour ce qui est des règles et des explications, ou va-t-on nous proposer un autre document plus à jour sur l'incidence du projet de loi C-11?

M. Peter Showler: C'est la même chose, mais un autre document vous sera communiqué. Il va sans dire que le projet de loi C-11 prévoit certaines modifications et qu'il y aura des changements.

Le président: Très bien. Nous pouvons maintenant passer aux questions. Certaines d'entre elles porteront peut-être sur les différences qui existent entre les projets de loi C-11 et C-31, et sur les modifications que vous prévoyez. Vous pourrez peut-être nous en dire un peu plus sur ce point.

M. Peter Showler: Voulez-vous que je commence par cela?

Le président: Non, je laisse à mes excellents collègues le soin de vous poser des questions.

Nous commençons par Inky.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, AC): Merci, monsieur le président.

Je voudrais tout d'abord souhaiter la bienvenue à nos témoins. Je suis heureux de revoir Peter parmi nous.

Comme nous le savons tous, l'immigration a joué un rôle très important dans le passé de notre pays. Dernièrement, j'ai appris que plus de 45 députés sont en fait Canadiens par choix. Cela prouve bien l'importance de l'immigration, et pas seulement à la Chambre des communes. Il va sans dire que les législateurs savent que notre priorité absolue est d'offrir aux réfugiés authentiques la protection dont ils ont besoin.

Comme vous le savez, toutefois, étant donné la couverture médiatique des événements survenus ces quelques dernières années, il semble que les demandeurs d'asile fassent les manchettes. C'est regrettable, car lorsqu'on considère les chiffres, ils ne représentent qu'une faible proportion—même s'il existe, selon les rapports, 15 000 immigrants ou visiteurs faisant l'objet d'une ordonnance d'expulsion ou d'un mandat pour leur expulsion. Ce n'est pas non plus une bonne nouvelle.

• 0925

L'autre question qui préoccupe les Canadiens, d'après ce que j'ai pu lire dans le procès-verbal de la dernière réunion, est la perte du statut de résident permanent.

Voici ma première question. Je conviens que certaines procédures que vous avez mises en place contribueront sans doute à résoudre une bonne partie des problèmes, mais en quoi ce projet de loi va-t-il améliorer la qualité de votre personnel? Vous et moi avons déjà parlé des problèmes de personnel par le passé. Ce projet de loi vous donnera-t-il le pouvoir d'améliorer la qualité des effectifs de façon à pouvoir faire le travail?

En second lieu, comme l'a demandé le président, quelle différence y a-t-il entre ce projet de loi et son prédécesseur, le C-31? Les changements vous aideront-ils à résoudre les problèmes des demandeurs d'asile et du facteur temps? On entend toujours parler des délais en cause dans le traitement des revendications de réfugiés, selon qu'il s'agit de réfugiés authentiques ou de faux réfugiés. Ils sont pris dans les rouages du système et restent indéfiniment, semble-t-il—le processus prend des années.

J'aimerais que vous répondiez à ces questions.

M. Peter Showler: Volontiers.

Tout d'abord, pour ce qui est de la qualité des effectifs, il n'y a en fait aucun rapport direct entre ce projet de loi et le personnel. Je ne sais pas si vous voulez parler, monsieur, des décideurs ou du personnel administratif. Nous avons près de 220 décideurs, sur des effectifs totaux de plus d'un millier de personnes. Rien dans ce projet de loi ne concerne directement le personnel administratif ou les personnes nommées par décret.

Pour ce qui est d'éventuelles différences dans les délais relativement au projet de loi C-31, j'ai déjà mentionné la principale différence. Dans deux des sections, nommément l'arbitrage et la section d'appel de l'immigration, cela ne ferait aucune différence, mais il y aurait une différence importante dans la nouvelle section de la protection des réfugiés. Il y a une énorme différence, sur le plan de la rapidité, entre une audience devant deux commissaires et une audience devant un seul commissaire.

Vous devez comprendre qu'il arrive souvent que l'audience soit ajournée, parfois faute d'éléments de preuve ou pour d'autres raisons. Eh bien, quand l'audience est devant deux commissaires qui ne siègent pas toujours ensemble, vous pouvez vous imaginer que cela peut provoquer très facilement des casse-tête sur le plan des horaires. Cela devient extrêmement complexe. C'est un problème avec lequel nous nous débattons constamment.

Le fait d'avoir un seul commissaire permet d'éviter beaucoup de ces problèmes. Cela permet également à un seul commissaire d'assumer la responsabilité d'un dossier depuis le début jusqu'à la fin. C'est pourquoi l'on s'attend à ce que les audiences devant un seul commissaire permettent de réaliser d'importants gains d'efficacité et de rendre des décisions plus rapidement.

Bien sûr, comme vous le savez, on nous a interrogés au sujet de la section d'appel des réfugiés. C'est vrai que l'on ajoute du temps pour cela. Mais notre objectif est de rendre une décision sur les dossiers d'appel des réfugiés dans un délai de trois mois. Comme cela se fera sur dossier, puisque nous prévoyons que ce sera centralisé, nous pensons pouvoir être en mesure de le faire beaucoup plus rapidement et efficacement qu'au premier palier, où il y a des audiences avec présence physique des revendicateurs.

Il y a donc une importante différence entre les deux. Nous pensons qu'en fin de compte le délai sera le même délai qu'auparavant. Mais comme je l'ai déjà dit, nous escomptons des décisions de meilleure qualité, parce que nous aurons bénéficié de deux essais. Il y aura en effet la décision originale, suivie d'une révision de cette décision par des personnes expérimentées et faisant autorité.

M. Inky Mark: Seriez-vous en faveur d'ajouter dans la loi une disposition pour que les nominations à la commission se fassent davantage en fonction du mérite et soient plus transparentes?

M. Peter Showler: Je n'ai pas d'opinion là-dessus, comme vous le comprendrez. Je suis le chef d'un tribunal indépendant. C'est une question de politique gouvernementale et il ne conviendrait pas que je me prononce là-dessus. Je suis désolé.

Le président: Peut-être, Peter, en réponse à cette question très importante, pourriez-vous nous parler brièvement—surtout à l'intention des nouveaux membres du comité—du temps considérable que vous consacrez pour vous assurer que les gens qui sont nommés reçoivent une bonne formation et soient bien conscients de la gravité des décisions qu'ils ont à rendre.

• 0930

Si vous pouviez nous en parler pendant deux ou trois minutes, je ne réduirais pas d'autant le temps imparti à Inky.

M. Peter Showler: Certainement, avec plaisir, et je voudrais vous parler notamment de la question de savoir si les nominations sont fondées sur le mérite.

Il est important que les membres du comité comprennent bien que depuis quatre ou cinq ans, on a apporté des changements importants à la procédure de nomination. Ces changements n'ont pas été inscrits dans la loi, mais ils n'en sont pas moins très importants. Pour vous donner une idée du processus et des résultats obtenus, j'ai passé en revue nos statistiques pour l'année dernière.

Je pense que vous n'ignorez pas qu'il existe un conseil consultatif du ministre. La commission sert de secrétariat à ce comité et en est responsable, bien que ce soit le comité du ministre. Je fais partie de ce comité.

Je vous rappelle que les personnes nommées par décret du gouverneur en conseil deviennent membres de la section d'appel de l'immigration ou de la section de la protection des réfugiés, qui s'appelle actuellement la section du statut de réfugié au sens de la Convention. Nos arbitres sont des fonctionnaires et font partie d'une section différente.

Quand des candidats se présentent pour devenir membres de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, ils doivent respecter certaines exigences fondamentales. Il faut qu'ils aient fait des études universitaires ou qu'ils aient de l'expérience en milieu de travail. La ministre a dit à maintes reprises que la commission tient beaucoup à permettre à un vaste éventail de Canadiens de se présenter comme candidats.

Le processus de sélection commence par un examen écrit, et je peux vous dire que cet examen est très exigeant. Environ 40 p. 100 des candidats ne réussissent pas à cette première étape, l'examen écrit.

Après, il y a une longue entrevue menée par un membre du Comité consultatif du ministre qui est accompagné d'un expert-conseil. C'est une entrevue détaillée et structurée qui vise à confirmer la présence de certaines qualités et caractéristiques prédéterminées que nous jugeons essentielles pour faire un bon décideur.

On examine ensuite deux références professionnelles, et le Comité consultatif du ministre discute de chaque candidat, après quoi il fait des recommandations au ministre.

L'année dernière, sur plus de 200 candidats, les deux tiers ont été éliminés entre l'examen écrit et les recommandations faites par le comité. Environ un tiers seulement des candidats ont été recommandés au ministre.

Une fois que le ministre est saisi des recommandations, c'est bien sûr le cabinet qui décide quels candidats seront effectivement nommés à la commission. Ils demeurent admissibles pendant deux ans. S'ils souhaitent rester candidats après cette période, ils doivent présenter une nouvelle candidature.

La deuxième partie de votre question, monsieur le président, porte sur la formation. Comme le gouvernement du Canada a décidé de ne pas exiger que toutes les personnes nommées à la commission possèdent une formation juridique, nous estimons qu'il est extrêmement important que les membres de la commission aient une formation très poussée et complète. Cette formation a d'ailleurs été renforcée depuis un an et demi.

Maintenant, un commissaire reçoit trois semaines de formation initiale. Seule la Commission nationale des libérations conditionnelles a un programme de formation aussi long. Je dois vous dire—et je m'excuse si je donne l'impression de me vanter—que nos programmes de formation sont maintenant utilisés dans le monde entier par l'Association internationale des juges aux affaires des réfugiés. Moi-même et le directeur général de notre programme de formation, qui est également président du Comité de la formation de l'association internationale, sommes les véritables responsables de la formation des décideurs en matière de réfugiés dans le monde entier.

Je termine rapidement là-dessus. Je pense qu'il est important que vous sachiez que les nouveaux commissaires reçoivent une formation de suivi pendant les six premiers mois. Chaque commissaire se voit assigner une équipe de formateurs: un avocat chargé d'encadrer leur formation, et un gestionnaire responsable. Les nouveaux commissaires sont suivis de très près jusqu'à ce que nous ayons la conviction qu'ils sont vraiment capables de faire le travail.

C'est important, bien sûr, puisque nous adoptons des audiences devant un seul commissaire et il est absolument essentiel que chaque commissaire reçoive toute la formation voulue avant de présider une audience.

Le président: Merci, Peter. Ces précisions nous sont extrêmement utiles.

Avez-vous une autre question, Inky?

M. Inky Mark: Je voudrais seulement faire une brève observation.

Je vous félicite pour tous les efforts que vous déployez pour améliorer le système. Je pense que vous avez signalé un point très valable: ce que vous avez fait devrait être identifié, soit dans la loi, soit dans les règlements, soit dans votre politique. Est-ce que ce que vous venez de nous décrire est écrit quelque part?

M. Peter Showler: Non. Cela ne figure dans aucun règlement ni dans les règles de la commission. Bien que ce soit en place, cela n'a aucun fondement législatif.

• 0935

Le président: Gurmant, vous avez trois ou quatre minutes du temps d'Inky.

Je vous remercie de partager votre temps, Inky.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, AC): Merci, monsieur le président, et je me joins à mon collègue pour souhaiter la bienvenue à nos témoins, les membres de la commission.

J'entends dire, par des réfugiés potentiels qui présentent une demande, ou de candidats au statut de réfugié, qu'il y a beaucoup de frustration quand ils font affaire à des gens qui sont avocats ou d'autres qui sont de soi-disant experts-conseils n'ayant aucune formation juridique et n'étant assujettis à aucun règlement. La commission fait-elle quelque chose pour limiter les responsabilités des experts-conseils non juristes? Essayez-vous de rendre le système plus efficace afin que les candidats au statut de réfugié obtiennent des conseils professionnels des gens qui s'occupent de leurs dossiers? Je pense que ce sont ces conseillers qui font l'essentiel de la préparation des dossiers, et quand des conseillers ou soi-disant experts-conseils non juristes leur donnent des conseils, ce ne sont pas des conseils professionnels. Ils se font payer cher et ils font parfois le malheur de ces réfugiés dont la demande est refusée.

M. Peter Showler: C'est une excellente question et l'on voit bien que vous connaissez le dossier. C'est une question qui préoccupe également la commission.

De la façon dont le système fonctionne actuellement, si une personne est représentée par un conseiller juridique, un avocat, cette personne peut bien sûr porter plainte au barreau. Mais vous n'ignorez sûrement pas qu'il n'y a aucune province... la Cour suprême du Canada est actuelle saisie d'une affaire qui a soulevé la question de savoir qui a le mandat de réglementer les gens qui travaillent comme techniciens juridiques professionnels.

La commission s'emploie actuellement à rédiger un code de déontologie. Ce code s'appliquerait aux techniciens juridiques exactement de la même manière qu'il s'appliquerait à un avocat ou à n'importe quel autre intervenant. Il existera un lien entre ce code de déontologie et les nouvelles règles que nous rédigeons, mais j'espère pouvoir mettre en vigueur le code avant l'adoption de ce projet de loi. L'un ne dépend pas de l'autre. C'est une question qui nous préoccupe sérieusement et nous aurons un code de déontologie qui nous permettra non seulement de définir la conduite et le comportement auxquels il faut s'attendre dans la salle d'audience, mais aussi de mettre en pratique les mesures correctrices nécessaires.

Je dois toutefois vous signaler que la nouvelle loi renforcera considérablement les pouvoirs de la commission, puisqu'elle donne expressément au président le pouvoir de rédiger un code de déontologie régissant la conduite dans la salle d'audience. À l'heure actuelle, c'est implicite et la jurisprudence est quelque peu discutable quant à la mesure dans laquelle nous avons le pouvoir de le faire. Le projet de loi nous conférera explicitement ce pouvoir.

M. Gurmant Grewal: Pouvez-vous me dire où cela figure dans le projet de loi? Je ne le trouve pas.

M. Peter Showler: Oui, c'est là. Je vais demander à M. Palmer de vous trouver la disposition précise.

M. Gurmant Grewal: Bien, merci.

M. Peter Showler: C'est dans les pouvoirs conférés au président aux termes de l'article 159.

Le président: Je crois que cela figure précisément à l'alinéa 161(1)b), Gurmant.

M. Gurmant Grewal: Bien, le 161(1)b).

Le président: Je dois dire que c'est une question très importante, Gurmant, et je pense que vous voudrez peut-être poser la même question à d'autres témoins qui comparaîtront. Je suis entièrement d'accord avec vous et il est fort possible que le comité fasse une recommandation ferme à cet égard, pour avoir l'assurance que les gens qui conseillent les candidats au statut de réfugié savent comment le système fonctionne et représentent leurs clients le mieux possible, excluant les gens qui prétendent savoir comment le système fonctionne et qui font payer des sommes énormes à ces pauvres réfugiés.

Nous allons donc nous pencher sur l'alinéa 161(1)b).

Je donne maintenant la parole aux libéraux. Je pense que Gurbax a une question.

M. Gurbax Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Merci, monsieur le président.

Est-il exact que le projet de loi C-11 donnera au président de la commission davantage de pouvoirs sur la façon dont les commissaires s'acquittent de leurs fonctions? Quelle en est la raison, et que cherche-t-on à obtenir par cette mesure?

M. Peter Showler: Plus de pouvoirs sur la façon dont les commissaires s'acquittent de leurs fonctions?

M. Gurbax Malhi: On donnera plus de pouvoirs au président de la commission, n'est-ce pas?

M. Peter Showler: Non, en fait, il n'y a pas de surveillance renforcée quant à la façon dont ils s'acquittent de leurs fonctions. À titre de chef de la direction de la commission, le président a déjà le pouvoir d'exiger qu'ils s'acquittent de leurs fonctions en conformité d'un code de déontologie, qui s'applique déjà aux commissaires, mais il n'y a aucun changement au pouvoir conféré au président.

Il y a certaines différences en ce sens que le président aura dorénavant le pouvoir de nommer des commissaires à titre de coordonnateurs, c'est-à-dire de commissaires gestionnaires. À l'heure actuelle, ces commissaires coordonnateurs sont nommés par le gouverneur en conseil, de sorte qu'au premier niveau, le pouvoir de nommer les commissaires gestionnaires incombe actuellement au président. Mais pour ce qui est de la conduite des commissaires eux-mêmes, les pouvoirs du président sont ni plus ni moins étendus qu'actuellement.

• 0940

Monsieur Palmer, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Philip Palmer (avocat général principal et directeur général de la mise en oeuvre de la loi, Bureau de mise en oeuvre de la loi, Commission de l'immigration et du statut de réfugié): Je pense que les pouvoirs généraux de la présidence n'ont pas changé en ce qui a trait aux commissaires. Comme vous le savez, les commissaires sont des décideurs indépendants.

Le projet de loi apporterait un certain nombre de modifications qui rendraient plus explicite le rôle de la présidence pour la gestion de la commission en tant qu'institution quasi judiciaire. Le projet de loi explicite son pouvoir d'établir le calendrier des affaires et autres questions administratives.

Par ailleurs, son pouvoir est renforcé relativement aux affaires qui font précédent. Le président a maintenant le pouvoir de désigner certaines décisions comme devant servir de guide aux commissaires, mais sur le même pied que les actuelles lignes directrices publiées par le commissaire, c'est-à-dire que les commissaires doivent en tenir compte dans leurs décisions, mais ne sont pas liés par cette jurisprudence pour rendre une décision dans un dossier particulier. Ce sera comme avant.

M. Gurbax Malhi: À quel pourcentage des audiences les représentants du ministre participent-ils?

Le président: Peter, je crois que la question porte sur les représentants du ministre aux audiences. Dans combien de cas participent-ils aux audiences proprement dites?

M. Peter Showler: Je ne connais pas ce chiffre par coeur. Je vais demander à M. Bailey s'il en a une idée.

M. Glen Bailey (directeur général, Politiques, Planification et recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié): Je ne connais pas le chiffre, mais je dirais que c'est très minime. De plus, il y a deux manières dont les représentants du ministre peuvent intervenir. Ils peuvent remettre des documents ou intervenir oralement à l'audience.

M. Peter Showler: Je pourrais peut-être apporter une précision, parce que les représentants du ministre comparaissent bien sûr devant les trois sections. Mais quand on parle d'interventions, cela arrive ordinairement devant la Section du statut de réfugié. Dans les deux autres sections, ils comparaissent régulièrement comme parties devant nos décideurs, et la situation est donc tout à fait différente. M. Bailey a raison de dire que c'est vraiment très rare, mais il y a deux formes d'interventions.

Il arrive souvent qu'ils font parvenir des documents qui sont présentés comme preuves, mais il est beaucoup moins rare qu'ils comparaissent en tant que parties devant la commission. Je peux vous dire que c'est essentiellement une question de ressources dont dispose le ministre.

Je tiens à dire qu'ils sont souvent tout à fait les bienvenus. En particulier dans les affaires difficiles, surtout lorsqu'il y a possibilité de renvoi, nous accueillons à bras ouverts les représentants du ministre simplement parce que nous avons alors une plus grande assurance que tous les éléments de preuve pertinents seront présentés aux décideurs.

M. Gurbax Malhi: Quand le ministre intervient dans une affaire, cela a-t-il un impact important?

M. Peter Showler: Oui, il y a un impact important. Premièrement, la nature même de l'audience change, passant d'une procédure d'enquête, qui est la façon ordinaire de procéder pour la Section du statut de réfugié, à une procédure contradictoire. Aux termes des pouvoirs d'enquête, qui sont confirmés dans la nouvelle loi, le rôle du décideur consiste simplement à tenter d'obtenir toute l'information, tous les éléments de preuve disponibles pour rendre une décision.

Dans le modèle contradictoire, qui se rapproche beaucoup plus de celui des tribunaux ordinaires, il s'agit davantage d'un affrontement entre l'avocat du revendicateur et l'avocat du ministre. Ils défendent des positions contraires et, bien sûr, il y a alors contre-interrogatoire.

De plus, et c'est un élément très important, le ministre a accès à toutes les formes d'information, en particulier en ce qui concerne les questions criminelles et de sécurité, et nous n'avons ordinairement pas accès à ces renseignements. Leur rôle est donc en fait tout à fait crucial.

M. Gurbax Malhi: Comme vous l'avez dit, il n'y a pas beaucoup de représentants du ministre à l'heure actuelle. Qu'arrivera-t-il si leurs interventions deviennent plus fréquentes? Que fera la commission à l'avenir?

M. Glen Bailey: Comme le président vient de le dire, c'est vraiment les ressources dont le ministre dispose qui dictent le nombre des interventions. S'il y a augmentation importante du nombre des interventions, cela aura un impact, par exemple, sur les délais de traitement. Comme le président l'a dit, cela aura également une incidence importante sur le plan de la preuve présentée et des questions difficiles qui seront abordées. Il y a donc un avantage qualitatif, et il y a aussi possibilité, si le volume des interventions est élevé, que cela influe sur le délai de traitement.

• 0945

Nous croyons qu'avec la nouvelle loi il y aura une légère augmentation du nombre d'interventions. C'est ce qui explique l'affectation des ressources pour le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration ainsi que pour la commission. Encore une fois, je souligne que les chiffres ne sont pas très élevés; nous ne croyons pas non plus que cela nous empêchera globalement de rendre les décisions rapidement et impartialement.

Le président: Merci.

Pour le temps qui reste du premier tour, Anita, vous avez 10 minutes.

Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Merci. Je crois qu'on vient de répondre en partie à mes questions, mais je dois d'abord dire que je suis nouvelle ici et que j'ai beaucoup de choses à apprendre.

Ce qui m'a frappé dans votre exposé, c'est l'accent que vous avez mis sur l'efficacité. Le mot est revenu sans cesse et ça m'a fait tiquer. Par exemple, je ne suis pas convaincue qu'il fallait supprimer le tribunal à deux commissaires pour des raisons d'efficacité. Parlez-m'en davantage. Pourquoi est-ce si important, et en quoi un tribunal à deux commissaires retarde-t-il les audiences?

M. Peter Showler: Volontiers.

Tout d'abord, je regrette d'avoir employé le mot efficacité si souvent parce que je pense qu'il a été employé à propos du tribunal à un commissaire, parce que c'est le principal avantage ici. Je vous assure que la justice est aussi importante pour la commission—pour moi en tout cas—et s'il faut choisir entre l'efficacité et la justice, c'est la justice qu'il l'emportera. Comme les décisions portent sur des questions d'une grande importance pour l'intéressé, il est essentiel que dans les trois sections, la justice vienne en premier.

Cela dit, pour ce qui est du gain d'efficacité, j'ajouterai qu'à propos des tribunaux actuels à deux commissaires, il peut y avoir dissidence et que la décision favorable l'emportera sur l'autre. À peine 1 p. 100 des décisions sont prises avec dissidence; plus de 99 p. 100 sont prises à l'unanimité.

En toute justice, toutefois, cela masque un problème et je le sais pour avoir été décideur pendant six ans. Il y a consultation entre les deux commissaires tout au long du processus, il s'agit juste de définir les questions en litige, les questions importantes, la décision finale. Cela se règle donc ensemble. Si les commissaires prenaient leurs décisions chacun de son côté, sans se parler, la dissidence serait sans doute supérieure à 1 p. 100, mais ce n'est pas le cas: elle est inférieure à 1 p. 100.

Pour vous donner une idée, je peux vous assurer que plus de 50 p. 100 de nos décisions sont prises par un seul commissaire. En vertu de la loi actuelle, si le revendicateur y consent, la décision peut être prise par un seul commissaire. Il y a énormément de cas où l'avocat et le revendicateur ont toute confiance dans la qualité des décideurs et les laissent décider seuls. Ils trouvent souvent que l'audience est plus courte et plus directe. Quand il y a deux commissaires, il peut y avoir une certaine confusion, ce qui n'est pas le cas autrement. Si le commissaire connaît bien le pays, connaît la loi et les problèmes, plus de la moitié des avocats acceptent l'audience à un seul commissaire.

Mme Anita Neville: Merci.

Le président: Je vous redonnerai la parole au tour suivant, Anita.

Gurmant, vous avez une question à poser, puis nous passerons à Madeleine, Judy et John, qu'ils aient des questions ou pas.

M. Gurmant Grewal: Merci, monsieur le président. Aux termes de l'article 158 du projet de loi, les nominations par le gouverneur en conseil, notamment pour le poste de secrétaire général vont changer. Il s'agit dorénavant d'un poste de la fonction publique. Est-ce à dire que les nominations antérieures n'étaient pas basées sur le mérite ou la compétence? Est-ce la raison de ce changement?

• 0950

M. Peter Showler: Je pense que le secrétaire général de la commission et son prédécesseur seraient inquiets d'entendre dire que leur nomination ne s'est pas faite au mérite.

Je peux vous dire que tous ceux qui ont occupé le poste, y compris celui qui l'occupe aujourd'hui, sont des fonctionnaires de très haut rang qui ont déjà occupé le niveau de SMA. On a simplement jugé opportun que le rôle du secrétaire général, comme c'est le cas d'autres tribunaux, a normalement été celui d'un fonctionnaire, et il était plus approprié de revenir à ce poste.

M. Inky Mark: J'ai une courte question à poser.

Dans le document qui vous nous avez remis ce matin, il est dit que la commission a un rôle consultatif important à jouer à propos de la préparation des améliorations législatives au système d'immigration du Canada. Sur ce point, je vous repose la question, ne pensez-vous pas qu'il serait bon d'introduire une disposition relative au recrutement, à l'examen et à la formation des commissaires?

M. Peter Showler: Si vous me le permettez, monsieur Mark, vous m'avez cité un peu hors contexte parce que j'ai clarifié la nature de ce rôle qui n'est pas de créer ou d'élaborer la politique mais de donner des conseils sur les effets de telle ou telle politique ou proposition du gouvernement. Nous sommes allés plus loin. Nous avons fait des observations sur le droit parce que dans certains domaines du droit, honnêtement, les avocats de la commission sont les spécialistes. Nous avons donné des conseils sur ce point pour que le libellé soit plus efficace. Mais nous ne disons pas au gouvernement—ce serait inapproprié pour un tribunal indépendant—quels genres de lois il devrait adopter.

Le président: Merci, Peter.

Inky, comme vous le savez, dans son rapport sur le système de détermination du statut de réfugié, le comité a formulé des recommandations assez vigoureuses. Comme Peter, je pense qu'il appartient au comité ou au gouvernement d'établir les règles.

Dans notre rapport précédent, nous avons fermement recommandé que des ressources supplémentaires soient accordées à la commission, mais aussi que le système du mérite soit le premier critère de nomination à ce niveau. Si nous voulons le répéter dans nos recommandations, au moment de l'examen du projet de loi, libre à nous de le faire.

Je donne maintenant la parole à Madeleine, du Bloc québécois.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Merci, monsieur le président. Messieurs, bonjour.

J'ai un certain nombre de questions, alors, je vais vous les poser en rafale parce qu'il n'est pas évident que j'aurai le temps de finir d'ici 10 h 15. Vous avez dit dans votre intervention que vous avez été des consultants pour la rédaction de la loi actuelle. Vous avez dit que certaines de vos recommandations ou suggestions n'avaient pas été retenues puisque celles qui étaient retenues l'étaient dans la mesure où elles étaient conformes à la politique gouvernementale. J'aimerais que vous précisiez quelles sont les recommandations que vous jugiez intéressantes qui n'ont pas été retenues.

Ça vous donne le temps de réfléchir.

Deuxièmement, vous avez fait mention, avec beaucoup de conviction, de l'indépendance de la commission. Par ailleurs, il y a des changements dans le projet de loi C-11, notamment tout ce qui touche la Section d'appel des réfugiés. Si je me fie aux chiffres que vous annoncez, c'est pratiquement 30 p. 100 des causes entendues qui vont en appel: de 8 000 à 9 000 sur 30 000, c'est à peu près 30 p. 100. C'est donc beaucoup de monde.

Je sais que vous allez me dire que vous ne voulez pas répondre à cela, mais je prends une chance quand même. Compte tenu que les nominations à la commission sont essentiellement des nominations politiques, ce qui n'exclut pas la compétence—on s'entend là-dessus—, mais ne l'assure pas nécessairement, et malgré la formation dont vous nous avez fait part et qui me paraît intéressante, est-ce que vous ne seriez pas plus à l'aise avec un processus de nomination des commissaires qui ne serait pas politique? On n'a qu'à penser, par exemple, qu'une seule personne va décider du résultat d'une procédure d'appel et que cette personne-là ne verra même pas celle dont elle décide de la situation.

Il y a eu un certain nombre de bavures; il va y en avoir encore, mais on veut qu'il y en ait le moins possible. J'aimerais vous entendre un peu là-dessus si, bien sûr, je réussis à vous faire parler.

• 0955

Troisièmement, dans l'actuelle loi, l'agent d'immigration dispose de beaucoup de pouvoirs, notamment celui de détention. Est-ce que vous ne voyez pas là des risques?

J'ai été infirmière très longtemps et j'ai enseigné très longtemps. Or, malgré toute ma bonne volonté, il m'est arrivé de ne pas poser le meilleur geste. J'imagine que tout le monde ici, autour de la table, peut reconnaître cela. Est-ce que le fait qu'un agent d'immigration est un peu roi et maître dans sa petite cabane n'est pas un peu inquiétant?

Voilà, la parole est à vous.

M. Peter Showler: Merci beaucoup pour vos questions. Je vais d'abord répondre à votre deuxième question et je laisserai ensuite la parole à M. Palmer qui répondra à votre première question et, finalement, nous répondrons à votre troisième question, celle sur la détention des pouvoirs.

D'abord, au sujet de la deuxième question, je dois dire franchement que c'est presque la même question que celle de M. Mark. Les deux systèmes me conviendraient bien, mais ce n'est pas à moi de décider lequel ce sera. Vous avez raison de dire que c'est une décision politique. Nous sommes responsables de nous assurer que tous les candidats sont compétents. Quand je dis «nous», je veux dire le comité de la ministre. C'est à lui de s'assurer que tous les candidats sont compétents, mais après cela, bien sûr, la décision est celle du Cabinet.

Je vais céder la parole à M. Palmer qui répondra à votre première question.

M. Philip Palmer: D'abord, j'aimerais dire que ce n'est peut-être pas approprié de divulguer les recommandations et les conférences entre la ministre et ses agents. Mais il faut noter que la dernière fois que nous avons comparu ici pour discuter du projet de loi, nous avons souligné trois points importants concernant notre commission, et dans chacun des trois cas, nous sommes maintenant satisfaits des amendements apportés au projet de loi par la ministre et ses agents. Donc, je pense que c'est un exemple du progrès accompli en collaboration avec le ministère et la ministre.

[Traduction]

Le président: Philip, pour l'information des autres membres du comité, pourriez-vous nous dire quels sont les trois domaines où vous avez pu convaincre le ministre d'apporter des améliorations, pour que nous le sachions? Vous nous avez peut-être fait gagner du temps.

M. Philip Palmer: Je l'espère bien.

Nous avions certaines réserves. La première concernait la section d'appel des réfugiés et plus particulièrement le caractère obligatoire de ses décisions. Le ministère a répondu à nos inquiétudes. Nous sommes maintenant convaincus que les décisions de la SAR sont obligatoires comme il se doit pour les commissaires de la SPR et les commissaires qui prennent des décisions seuls de la SAR elle-même.

Le deuxième sujet d'inquiétude concernait les dispositions relatives à la détention. Nous estimions que les pouvoirs des commissaires de la section de l'immigration, comme elle s'appellera dorénavant, n'étaient pas suffisamment clairs pour garantir la portée de leur juridiction—les facteurs dont ils pouvaient tenir compte pour accorder la libération ou maintenir la détention—et leurs pouvoirs d'imposer des modalités de libération. Ces points ont été clarifiés et nous sommes maintenant tout à fait satisfaits.

• 1000

Le président: Excusez-moi un instant; je vous reviens.

Peter, aviez-vous quelque chose à rajouter à propos des questions de Madeleine? Sinon, je vais passer...

[Français]

M. Peter Showler: La troisième question portait sur les pouvoirs de détention de l'agent d'immigration. Du point de vue de l'agent d'immigration, c'est autre chose. Je le répète, cela doit être porté devant le tribunal dans les 48 heures. La base des décisions et les pouvoirs de détention sont clarifiés maintenant. Ils sont plus précis. Il n'y a pas de différence entre ce projet de loi et la loi. Il n'y a pas d'autre motif pour détenir des personnes en vertu de la loi. C'est seulement plus précis.

Le président: Merci.

[Traduction]

Judy.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Merci, monsieur le président.

Beaucoup de groupes qui s'intéressent au domaine de l'immigration et des réfugiés ont dit que le projet de loi C-11, même s'il représente des changements importants par rapport à la situation antérieure, a surtout pour objectif de protéger les Canadiens de ce qui se passe à l'étranger et d'exclure des individus ou des forces négatives, plutôt que de maintenir la tradition canadienne en faveur de l'aide humanitaire et de l'ouverture à l'immigration et aux réfugiés. Comment Peter voit-il son rôle et celui de la commission? Êtes-vous là pour contrôler et protéger les Canadiens ou veiller à ce que tous les moyens possibles soient employés en faveur de ceux qui ont des motifs légitimes de venir au Canada?

M. Peter Showler: Pour moi, le rôle de la commission n'est ni l'un ni l'autre. Le rôle de la commission, en droit, est de prendre des décisions claires, motivées et efficaces mais surtout motivées et justes. Il faut bien le comprendre. Je sors un peu de mon rôle comme président du tribunal, mais je peux vous en parler, puisque j'ai enseigné le droit de l'immigration pendant de nombreuses années à l'université. Je peux affirmer, relativement parlant, que les systèmes du Canada, son système de détermination du statut en tout cas, est bien supérieur à n'importe quel autre système dans le monde. Nous allons plus loin pour nous assurer que nous prenons des décisions justes. En ce qui concerne les réfugiés, mon premier devoir, comme je l'ai dit au député précédent, est de nous assurer que les décisions sont justes. Quand je dis justes, cela signifie qu'elles doivent être fondées sur les faits. Il est extrêmement important de connaître ces faits et de les comprendre pour prendre des décisions bien motivées.

Parallèlement, on ne saurait nier qu'il y a une immigration illégale importante. Il appartient donc au décideur d'examiner tous les faits. Si un candidat présente ce qui semble être une histoire mensongère, de faux documents, il appartient au décideur de prendre la décision qui s'impose. Je dirais toutefois qu'en bout de ligne les décisions justes justifiant le système de protection des réfugiés pour les réfugiés authentiques.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je vous remercie de votre réponse, et je reconnais le rôle de la commission dans l'application de la loi, qu'elle quelle soit. Cela soulève toutefois la question, vu le témoignage de la semaine dernière de l'Association du barreau canadien, que ce projet de loi est rempli de pouvoirs d'arrestation draconiens et va à l'encontre de la tradition canadienne en matière d'immigration et de réfugiés. Pouvez-vous nous aider à évaluer ces observations et à nous montrer comment améliorer le projet de loi, pour que vous puissiez effectivement faire votre travail en fonction de l'esprit des antécédents historiques du Canada dans ce domaine?

M. Peter Showler: Encore une fois, ce n'est pas à moi de me prononcer sur les pouvoirs d'autres participants dans le système de l'immigration, comme les agents d'immigration. Mais il est vrai qu'il y a des personnes qui, en vertu de la loi actuelle, ont accès à la section d'appel de l'immigration ou à la section du statut de réfugié qui n'auront pas accès à ces systèmes de décision en vertu du nouveau projet de loi. La ministre a été très claire et très directe là-dessus. Des gens mêlés au crime organisé, coupables de crimes graves, et qui ont commis certaines atteintes aux droits de l'homme à l'étranger, n'auront plus accès à la commission. C'est clair et c'est clairement dit dans la loi.

• 1005

Il ne m'appartient pas de dire si c'est indiqué ou pas. C'est une décision de principe qui se fonde sur des informations et des connaissances techniques qui ne relèvent pas de la commission. Ces gens-là savent des choses sur la sécurité qui ne relèvent pas de la compétence de la commission sur le plan de la discussion. Mais il est vrai qu'il y aura des gens qui n'auront plus accès à la commission mais qui auparavant avaient accès à nos décisions.

Le président: John.

M John Herron (Fundy—Royal, PC): Je veux revenir sur une certaine série de questions. Tout d'abord, est-ce un problème d'appels par écrit par opposition aux appels de vive voix?

Avant la création de la commission en 1985, on se contentait de passer en revue les documents et les dossiers et on décidait des moyens d'existence, de l'avenir ou même de situation de vie ou de mort des gens. Ce que je crains, c'est que depuis que le dossier a été préparé la première fois, la situation de famille du demandeur puisse avoir changé. Peut-être même aussi celle de son pays. Le risque pourrait être plus grand que lorsque le dossier a été préparé. Comment pouvez-vous nous rassurer un peu vu que nous allons faire ceci uniquement à partir de documents, par opposition au droit à un appel de vive voix?

M. Peter Showler: Nous parlons de 1989. Avant 1989, lorsque la commission a été créée, à une certaine époque les décisions sur le statut de réfugié étaient prises par le Comité consultatif du statut de réfugié uniquement à partir de documents. C'est ce qui a amené la décision de la Cour suprême dans l'affaire Singh, et aussi la création de la Section du statut de réfugié.

La principale différence, monsieur, c'est qu'il y a une audience complète de vive voix devant la Section du statut de réfugié. L'exigence d'une audience de vive voix—qui est absolument essentielle pour entendre les renseignements du réfugié, cela est incontestable—existe déjà. La Section d'appel des réfugiés, pour commencer, passe en revue une audience complète, y compris tous les témoignages entendus.

En ce qui concerne le moment et les changements de situation, nous nous attendons à ce que ces appels soient déposés dans les 30 jours qui suivent la première décision de la SPR. Il y aura de très rares cas où la situation du réfugié qui a séjourné au Canada pour toute la période entre la décision de première instance et celle de deuxième instance aura changé.

M. John Herron: Qu'allez-vous faire dans ces très rares cas? Quelle est la marge d'erreur?

M. Peter Showler: Cela serait étudié non pas par la Section d'appel des réfugiés, mais par le mandataire de la ministre qui prend la décision avant le renvoi. Dans l'hypothèse où la Section d'appel des réfugiés confirme une décision défavorable—à savoir que la personne n'est toujours pas un réfugié—elle aura le droit de demander l'examen judiciaire des deux décisions devant la Cour fédérale. Elle suit la filière, et demande l'autorisation. Si l'autorisation n'est pas accordée, ou si l'autorisation est accordée et que la Cour ne casse pas les décisions précédentes, c'est à ce moment-là qu'elle peut être renvoyée du pays.

Avant son renvoi, il y a une troisième ou si vous préférez une quatrième étape. Il y a une demande devant un agent chargé de l'évaluation des risques avant le renvoi. Cet agent, un agent d'immigration, examinera justement les changements de situation. Cela arrive.

Il y a une autre chose que je tiens à vous signaler—et c'est pourquoi j'en ai parlé dans ma déclaration—c'est que j'ai pris connaissance des critiques du Canadian Council of Refugees à propos des audiences de vive voix. Je vous rappelle que lorsque nos décideurs de la Section d'appel des réfugiés passent en revue le témoignage et estiment qu'il n'y a pas suffisamment de preuves pour prendre une décision—lorsqu'ils vont casser une décision, ce qui signifie qu'ils rendraient normalement une décision positive mais qu'ils manquent de preuves pour le faire—ils peuvent toujours renvoyer l'affaire à la Section de la protection des réfugiés pour décision.

• 1010

Je rappelle au comité qu'il est absolument essentiel que, s'il fallait entendre des témoignages de vive voix à la Section d'appel des réfugiés, nous ne pourrions pas le faire comme organisme centralisé. Il faudrait essentiellement répéter en entier ce qui a eu lieu à l'audience de première instance. Vous n'allez pas obtenir ces décisions en trois ou quatre mois; elles vont prendre au moins autant de temps que l'audience de première instance. Il faudra une période beaucoup plus longue et ce sera extrêmement coûteux.

M. John Herron: On pourrait soutenir que, vu votre rôle, votre mandat, et même le titre de l'institution, c'est votre équipe qui devrait être experte en matière de situations concernant les réfugiés. Pourquoi est-ce que votre commission n'est pas l'entité naturelle pour prendre la décision concernant le renvoi?

M. Peter Showler: En un certain sens, nous sommes naturellement désignés pour le faire vu que les experts capables de prendre des décisions concernant les réfugiés se trouvent à la commission. Toutefois, n'oubliez pas que, pour la majorité des personnes renvoyées, à cette étape elles ont déjà franchi les trois étapes de prise de décisions que j'ai décrites.

C'est une question qui est apparue comme une possibilité simplement parce que pour renvoyer quelqu'un du pays, cela doit souvent se faire rapidement. Je suis certain que vous savez, et je suis certain que le ministère de l'Immigration vous a dit, que même si cela relève du ministère, il s'agit souvent de pouvoir trouver les documents de voyage appropriés. Le ministère ne dispose que de très courts délais. Dans ces circonstances, la commission n'est pas en mesure de réagir de manière aussi rapide pour pouvoir tenir le genre d'audiences qui seraient nécessaires pour renvoyer les gens. Nous ne sommes pas structurés d'une manière qui nous permette de tenir des audiences courtes et rapides au Canada avant le renvoi, de sorte qu'en ce sens nous ne sommes pas l'entité toute désignée.

Le président: John McCallum.

M. John McCallum (Markham, Lib.): Merci.

Je devrais d'abord dire que, comme Anita, je suis nouveau ici. J'ai les mêmes préoccupations qu'elle à propos de la justice et de l'efficacité. L'idée d'un tribunal à un commissaire m'inquiétait un peu, mais j'ai ensuite pensé au système judiciaire, où il y a un seul juge, dont la décision peut faire l'objet d'un appel. C'est peut-être donc la même chose. Il est certain que l'efficacité se trouve améliorée avec un tribunal composé d'une seule personne, mais la justice souffre-t-elle de cette efficacité? Dans l'affirmative, dans quelle mesure? C'est la question que je vous pose.

M. Peter Showler: Je n'aime pas beaucoup l'expression «la justice en souffre». Je suis convaincu que les commissaires qui décident seuls peuvent prendre des décisions justes. On a consacré beaucoup de ressources à leur formation pour qu'il en soit ainsi. Ils peuvent aussi compter sur l'aide des agents responsables de la revendication qui se trouvent dans la salle d'audiences. Ils ont évidemment accès à tout l'éventail des services juridiques, dirigés par M. Palmer, s'ils ont besoin de conseils. À tout moment, ils peuvent lever la séance pour demander des conseils sur tel ou tel point. Ils bénéficient donc de nombreuses sources d'aide à la commission.

En revanche, j'estime que chaque commissaire doit avoir toute la compétence nécessaire pour prendre les décisions dans la salle d'audiences. J'estime comme président que si à mon avis un commissaire en était incapable, il devrait suivre une formation supplémentaire et il ne déciderait plus seul.

N'oubliez pas que la loi prévoie des audiences à trois commissaires. En vertu de la nouvelle loi, on prévoit que tous les commissaires suivront une formation pendant laquelle ils feront partie d'un tribunal de trois—c'est ce tribunal qui prendra les décisions—jusqu'à ce que la commission soit convaincue qu'ils peuvent faire cavalier seul.

M. John McCallum: Ma deuxième question—et ce sera la dernière—porte sur l'exposé par Amnistie Internationale lors de notre dernière rencontre. Ses représentants affirmaient qu'en vertu de ce projet de loi, il est beaucoup plus probable que les gens soient renvoyés dans un pays où la torture sévit. La question que je vous pose, vu que l'évaluation du risque avant le renvoi est effectuée par le ministère et que, comme on l'a dit tout à l'heure, les spécialistes des conditions qui existent dans les divers pays, ce sont vous, comment réagissez-vous à l'affirmation d'Amnistie selon laquelle le risque est plus grand de renvoyer des gens dans des pays où on pratique la torture, en vertu de ce projet de loi?

• 1015

M. Peter Showler: L'expertise se trouve actuellement à la commission, mais cela ne signifie pas qu'elle ne peut pas se trouver ailleurs, ou que le ministère ne puisse pas avoir des décideurs bien formés au processus de pré-renvoi. Cela peut arriver.

La loi actuelle est telle qu'elle est très franche et directe—et la ministre a été directe là-dessus—à savoir qu'il faut trouver un juste milieu au sujet du renvoi de certaines personnes qui seraient normalement exclues ou qui ont été exclues à cause de certains actes qu'elles ont commis, que ce soit des atteintes aux droits de l'homme ou d'autres crimes graves. Il faut trouver un juste milieu entre les intérêts du Canada sur le plan de la sécurité et les risques possibles pour cette personne. La commission n'a aucune expertise dans ce genre de compromis. Pour être honnête, cela ferait du tort à la commission si elle faisait ce genre de chose, qui est tout à fait différente des décisions directes et claires sur le statut de réfugié que nous prenons.

Le président: Jerry, puis Yolande et Anita.

M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'ai noté avec intérêt une observation que vous avez faite à propos des trois motifs qui permettent aux gens de se faire accorder une protection. Il a été question de la première convention sur le statut de réfugié, et vous avez dit avoir des inquiétudes à ce propos. Ce n'était pas dans les notes, mais c'est ce que vous avez dit. Quels sont vos sujets d'inquiétude et quelles recommandations avez-vous faites pour les apaiser?

M. Peter Showler: Je ne pense pas...

Le président: Il va falloir que les réponses soient plus courtes aussi, Peter, si possible.

M. Peter Showler: Eh bien, je pourrais être très bref. Je ne me souviens pas avoir dit avoir des réserves à propos de l'actuelle définition de réfugié dans la Convention, parce que ce n'est pas le cas. Je pense qu'elle est très bien. J'ai seulement dit que c'est maintenant le premier de trois motifs, et c'est la base de la loi actuelle sur laquelle on se fonde pour prendre des décisions.

M. Jerry Pickard: D'accord, je pensais avoir entendu cela, mais le compte rendu montrera sans doute...

Le deuxième point sur lequel j'avais des questions porte sur les parajuristes. Comme député, je me retrouve souvent avec de vrais problèmes à propos de plaintes concernant beaucoup de gens qui donnent des recommandations et des conseils. Souvent, ces conseils ne servent pas l'intérêt du client, mais ceux qui les donnent se trouvent dans diverses communautés où beaucoup de gens font l'objet d'un examen. Ils essaient de gagner pas mal d'argent; je sais que des sommes énormes sont versées. En dernier recours, les gens viennent dans mon bureau quand ils estiment que la justice n'a pas été servie. C'est souvent le cas dans les bureaux de beaucoup de députés lorsque vous êtes à la dernière étape, et ce n'est peut-être pas la meilleure situation. Quelles sont les qualifications exigées, et faites-vous des recommandations?

Vous avez parlé d'un code de déontologie, je crois, et c'est important. Je suis d'accord, et je pense qu'il faut faire davantage. Je pense qu'il faut tester les qualifications, mettre en place un système pour s'assurer qu'ils ne font pas partie d'un groupe consultatif malhonnête, mais que ce sont des gens instruits, formés, capables de servir au mieux la société, de la façon la plus juste possible.

M. Peter Showler: Je suis tout à fait d'accord. Le problème c'est de savoir comment y parvenir.

Comme je l'ai déjà dit, la décision Mangat, dont est saisie la Cour suprême, porte sur la question de savoir de quelle compétence il s'agit en ce qui concerne la réglementation des parajuristes. Est-ce du domaine provincial ou fédéral?

Nous allons adopter un code de déontologie, mais il y a des limites à ce qu'un tribunal donné peut faire. C'est ce qui arrive quand quelqu'un comparaît devant un juge et veut être représenté par tel ou tel conseil. Il est très difficile pour nous de mettre en doute les compétences de la personne, surtout avant qu'elle n'ait commis un écart de conduite devant la commission. Mais je comprends tout à fait vos préoccupations et nous serions en faveur d'une réglementation si elle émanait de l'organisme approprié.

• 1020

M. Jerry Pickard: Une recommandation que vous pourriez faire, et nous pourrions la transmettre à l'un ou l'autre palier de gouvernement, est qu'il y ait quelque chose en place pour s'assurer que les Canadiens sont protégés. Je pense que c'est le législateur plutôt que le juge qui doit prendre la décision.

M. Peter Showler: Il faut que vous sachiez que c'est un sujet d'inquiétude en Ontario. Le rapport Cory est le résultat d'une enquête sur le rôle des parajuristes en Ontario, et la commission a présenté un exposé devant le groupe Cory, qui va dans le sens de ce que vous préconisez.

Le président: Merci.

Anita, une seule question, ou Yolande.

Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Merci, Joe.

[Français]

Messieurs, merci d'être là. Vous nous avez parlé avec beaucoup d'éloquence du processus de nomination des commissaires qui travaillent avec vous. S'agit-il du même processus pour nommer les gens à la section d'appel des réfugiés, ou si le processus de sélection, pour les gens qui vont travailler dans cette section, sera différent?

M. Peter Showler: Non. On utilise la même procédure pour sélectionner les candidats aux deux types de postes de commissaires, si vous voulez. D'autre part, comme vous le savez, selon la nouvelle loi, au moins 10 p. 100 des commissaires de la section d'appel doivent être des avocats.

Mme Yolande Thibeault: Merci.

[Traduction]

Le président: Peter, j'ai une question à vous poser. Je devrais peut-être dire en guise d'entrée en matière que, après que nous aurons consulté le public, si jamais nous avons l'autorisation de voyager—malheureusement, cela pose des problèmes, mais si nous avons l'autorisation de voyager pour entendre les Canadiens, nous vous réinviterons.

Je mentionnerai deux choses. Si les députés ont des questions à adresser à la CISR, ils peuvent vous les poser, car nous vous réinviterons à la fin du processus, après avoir entendu ce que les Canadiens ont à nous dire. Entre-temps, vous pourriez peut-être faire ce qui suit. Premièrement, j'aimerais que vous nous présentiez un tableau décrivant le fonctionnement du régime en vertu de la loi actuelle et un autre décrivant le fonctionnement, de votre point de vue, aux termes du projet de loi C-11. On dit qu'une image vaut mille mots. Je crois que cela nous serait très utile. Deuxièmement, j'aimerais que vous mettiez en relief pour nous les différences, telles que vous les voyez, entre les projets de loi C-11 et C-31; cela aussi serait utile.

Ma question porte sur la reddition de comptes au Parlement. L'article 66 de la loi actuelle prévoit que vous présentiez un rapport annuel au Parlement à titre de président. Le projet de loi C-11, toutefois, ne vous oblige pas à rendre des comptes au Parlement. Il prévoit seulement la présentation d'un rapport au ministre, et non pas nécessairement le dépôt d'un rapport annuel au Parlement et, par conséquent, directement aux Canadiens. Peut-être ai-je mal compris... Peut-être pourriez-vous m'expliquer si la CISR déposera un rapport annuel au Parlement, comme elle l'a toujours fait dans le passé.

M. Peter Showler: C'est l'un des sujets favoris de M. Bailey et puisqu'il n'a pas encore pris la parole, je lui demanderai de répondre.

M. Glen Bailey: La Loi sur la gestion des finances publiques exige le dépôt de rapports sur les plans et les priorités ainsi que d'un rapport sur le rendement de la commission. Cette exigence ne figure pas dans la nouvelle version de la loi, parce qu'elle figure déjà dans la Loi sur la gestion des finances publiques.

Le président: Je sais, mais la Loi actuelle sur l'immigration prévoit une disposition particulière à ce sujet, l'article 66, ce que ne fait pas le projet de loi C-11. Vous m'avez rassuré à moitié. Je me demande pourquoi, lorsque vous avez passé en revue le projet de loi C-11, vous n'avez pas constaté cette omission. Ne vous sentiriez-vous pas plus à l'aise si cette exigence figurait dans la Loi sur l'immigration, afin que l'obligation de rendre des comptes annuellement au Parlement soit clairement indiquée.

M. Glen Bailey: On nous a dit que, puisque la LGFP le prévoyait déjà, l'inclure dans ce projet de loi ferait double emploi. Voilà pourquoi on a préféré ne pas l'inclure ici.

Le président: De toute évidence, ce sont des avocats qui vous ont conseillé.

M. Glen Bailey: Oui.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Peter, Glen et Philip, je vous remercie encore une fois; cette séance a été des plus instructives. Je sais que vous avez consacré des efforts considérables au projet de loi C-31, et qui est maintenant le projet de loi C-11. Nous vous réinviterons afin de nous assurer que nous avons réponse à toutes nos questions. Si vous pouvez nous aider davantage en nous faisant parvenir d'autres détails, nous vous en saurons gré. Merci beaucoup.

M. Peter Showler: Merci.

• 1025

Le président: Chers collègues, nous entendrons maintenant le deuxième groupe de témoins. Comme toujours, il y a eu d'excellentes questions.

Le deuxième groupe de témoins, que j'invite à prendre place, représente le Bureau de la commissaire aux langues officielles, Mme Dyane Adam, qui les accompagne. Nous leur donnons quelques minutes pour prendre place.

Je souhaite la bienvenue à Dyane Adam, Johane Tremblay, Gérard Finn et Michel Robichaud.

Vous avez la parole.

Mme Dyane Adam (commissaire, Bureau de la commissaire aux langues officielles): Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité,

[Français]

j'aimerais vous remercier de m'avoir invitée à commenter le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger.

Il me paraît très important d'être ici parce que mon mandat est de faire tout en mon pouvoir pour assurer la reconnaissance du statut égal de nos deux langues officielles ainsi que le respect de l'esprit et de la lettre de la Loi sur les langues officielles. Cette loi régit non seulement le fonctionnement des institutions fédérales, mais s'intéresse aussi au rôle que jouent ces institutions dans la promotion du français et de l'anglais au sein de la société canadienne et vise à appuyer, bien sûr, le développement des communautés minoritaires de langue officielle.

À cet égard, l'article 41 de la Loi sur les langues officielles stipule que:

    Le gouvernement fédéral s'engage à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne.

[Traduction]

Votre comité examine présentement la législation sur l'immigration en vue de l'importante réforme. Dans ce contexte, on ne peut ignorer l'impact qu'aura l'immigration sur le renouvellement démographique des communautés de langue officielle francophone et anglophone. En effet, les décisions que vous prendrez auront une incidence majeure sur la santé des communautés minoritaires de langue officielle et, partant, sur la vitalité de la dualité linguistique d'un océan à l'autre.

Comme vous le savez, le Canada a toujours dépendu de l'immigration pour accroître sa population. Depuis la Confédération, 14 millions de personnes ont immigré au Canada. Leurs descendants ont participé au développement économique et social du Canada et ont aidé à définir notre identité collective.

Dans l'ensemble, les immigrants ont contribué à maintenir et à renforcer la population de langue anglaise alors que les francophones comptaient surtout sur un accroissement naturel de la population. Lorsque le taux de natalité des francophones a diminué toutefois, vers les années 60, l'immigration s'est aussi révélée importante pour l'accroissement de la population francophone.

• 1030

Depuis les années 70, le Québec a réussi à recruter des immigrants de langue française. Entre 1968 et 1999, quelque 310 000 personnes de langue française ont immigré dans cette province. Il ne fait aucun doute que les immigrants francophones continueront de jouer un rôle important dans le renouvellement démographique de la population francophone au Québec.

[Français]

Outre le phénomène de la dénatalité, l'important taux de transfert linguistique vers l'anglais au sein des populations francophones de l'extérieur du Québec rend encore plus difficile la situation dans laquelle se trouvent les communautés de langue officielle. Selon le recensement de 1996, dans les communautés francophones de l'extérieur du Québec, le pourcentage des personnes pour lesquelles le français est la première langue apprise et encore comprise, mais qui ont effectué un transfert linguistique vers l'anglais en parlant le plus souvent l'anglais à la maison, est passé de 30,1 p. 100 à 31,3 p. 100. Probablement que le prochain recensement indiquera un pourcentage plus élevé. La situation varie d'une communauté à l'autre, bien sûr, mais l'immigration est une des composantes essentielles du renouvellement démographique des communautés francophones à l'extérieur du Québec, ainsi que des communautés majoritaires, d'ailleurs. Voilà pourquoi j'ai inclus l'immigration parmi les priorités stratégiques du commissariat dans mon premier rapport annuel déposé au Parlement l'automne dernier.

Revenons brièvement au passé. Dans son rapport annuel de 1988, le Commissaire aux langues officielles de l'époque constatait que malgré l'importance grandissante de l'immigration pour assurer la croissance démographique du Canada, les décideurs n'avaient que très rarement évalué l'incidence de l'immigration sur la vitalité démographique des minorités de langue officielle. Étant très préoccupée par cette question, j'ai commandé une étude sur ce sujet l'été dernier. L'étude est toujours en cours, mais certaines observations confirment l'absence d'efforts pour recruter des immigrants francophones dans les communautés de l'extérieur du Québec et les problèmes d'intégration d'immigrants de langue française dans les communautés minoritaires de langue officielle.

Selon le démographe Maurice Beaudin, l'immigration n'a pas eu d'incidence réelle sur l'accroissement de la population francophone à l'extérieur du Québec. Parmi les immigrants qui sont arrivés au Canada au cours des 15 dernières années, seulement 3 p. 100 étaient d'origine francophone et 82 p. 100 d'entre eux se sont installés au Québec. La situation n'est pas la même dans les communautés anglophones du Québec. L'immigration a contribué à la croissance de ces communautés, mais le taux de migration interprovinciale a contrecarré cette croissance et s'est traduit par d'importantes baisses de population entre 1971 et 1986.

[Traduction]

L'intégration des immigrants pose aussi des problèmes. Les communautés minoritaires de langue officielle à l'extérieur du Québec ont beaucoup de difficulté à intégrer les francophones qui y immigrent. Dans un rapport de 1996, le Commissaire aux langues officielles notait qu'à l'exception des anglophones de Montréal, les communautés minoritaires de langue officielle du Canada disposent rarement des ressources voulues pour créer les institutions et les structures nécessaires à l'intégration des immigrants dans leur nouvel environnement. Il est très important de communiquer avec les immigrants francophones de l'extérieur du Québec afin de les aviser de la présence d'institutions de langue française dans les milieux minoritaires et des nombreux services en français qui y sont offerts.

• 1035

À ce stade-ci, j'aimerais souligner que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration s'est montré sensible à un grand nombre des problèmes susmentionnés et a adopté certaines mesures pour y remédier. Je crois toutefois qu'une approche plus complète s'impose pour répondre adéquatement à toutes les questions qu'on ne peut ignorer. Je crois aussi qu'il faut adopter une attitude proactive dans ce domaine. Il faut élaborer des règlements, des politiques et des programmes ministériels pour contribuer au renouvellement démographique des communautés de langue officielle.

[Français]

Nous avons soigneusement examiné ce qui, dans le projet de loi C-11, fait référence à l'égalité du français et de l'anglais à titre de langues officielles du Canada, afin de voir si cela répondait à mes préoccupations au sujet du renouvellement démographique équitable des communautés minoritaires de langue officielle. L'alinéa 3(3)d) se lit comme suit:

      d) L'interprétation et la mise en oeuvre de la présente loi doivent avoir pour effet d'assurer que ceux qui veulent être admis au Canada sont régis par des orientations, des critères et un processus conformes à la Charte canadienne des droits et libertés, notamment en ce qui touche les principes, d'une part, d'égalité et de protection contre la discrimination et, d'autre part, d'égalité du français et de l'anglais à titre de langues officielles du Canada.

Étant donné que cet alinéa se réfère explicitement aux orientations, aux critères et au processus qui s'appliquent à ceux qui veulent être admis au Canada, nous craignons que cet alinéa ne soit interprété de façon à ne s'appliquer qu'aux premiers stades du processus d'immigration. En outre, l'alinéa 3(3)d) ne parle que du principe des langues officielles mentionné dans la charte. Il ne tient pas compte de la déclaration plus large des principes de langues officielles incluse dans la Loi sur les langues officielles.

Qu'allons-nous faire pour régler ces problèmes?

Je propose quelques amendements à la loi. Je propose d'abord que le texte suivant soit ajouté au paragraphe 3(1) du projet de loi, de façon à ce que l'un des objets de la nouvelle loi soit, et je lis:

    d'assurer le renouvellement démographique de nos communautés de langue officielle du Canada par l'entremise des processus de sélection et d'établissement des immigrants, ainsi que par leur intégration dans la société canadienne.

De plus, nous proposons l'ajout d'un nouvel alinéa au paragraphe 3(3) du projet de loi. Celui-ci commence ainsi:

    (3) L'interprétation et la mise en oeuvre de la présente loi doivent avoir pour effet:

Et nous suggérons que cet alinéa suive:

      de reconnaître et démontrer l'engagement statutaire du Gouvernement du Canada à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement.

De plus, nous recommandons que le projet de loi soit amendé afin de charger les comités parlementaires, comme le vôtre entre autres, d'examiner les règlements relatifs aux articles 1 à 32 de la loi avant qu'ils ne soient mis en vigueur et ceci en consultation avec les communautés de langues officielles.

Nous recommandons également que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration entreprenne des activités promotionnelles pour renseigner les immigrants éventuels de l'existence des communautés minoritaires de langue officielle et qu'il appuie ces communautés dans leurs efforts d'intégration des immigrants.

[Traduction]

Dans leur examen des propositions qui leur sont soumises, les membres de ce comité ont la responsabilité de promouvoir les principes fondamentaux de l'identité canadienne. Le gouvernement a clairement exprimé dans le discours du Trône de janvier 2001 son engagement par rapport à la protection et à la promotion de nos deux langues officielles. Il a aussi renouvelé son engagement à l'égard du développement durable de nos communautés minoritaires de langue officielle et d'un renforcement de la culture et de la langue françaises. Nous croyons que nos recommandations visent à reconnaître la réalité linguistique qui a enrichi le Canada depuis 200 ans et à assurer qu'elle demeurera l'une des forces majeures du pays au cours des années à venir.

• 1040

Je vous remercie de votre attention et je serai heureuse de répondre à vos questions.

Le président: Merci, Dyane, de vos remarques ainsi que vos suggestions et recommandations. Je suis certain que les membres du comité ont des questions à vous poser.

Je cède d'abord la parole à Inky, pour 10 minutes.

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

Je souhaite la bienvenue à tous les témoins. Merci de votre exposé.

Vous avez mis dans le mille quand vous avez parlé du soutien à l'intégration. J'estime que c'est l'une des lacunes de la politique d'immigration du pays. Nous savons tous que la formation linguistique est, en dernière analyse, la plus importante réalisation des nouveaux Canadiens.

Nous comprenons aussi que nous avons tous le même problème, soit faire en sorte que les nouveaux Canadiens s'installent dans toutes les régions du pays. Je sais que ma province, le Manitoba, connaît une baisse démographique.

Comme vous l'avez dit, la Loi sur les langues officielles constitue l'engagement du gouvernement à l'égard de la promotion de l'anglais et du français. Dans votre mémoire, vous faites quelques suggestions visant à améliorer le projet de loi. Le soutien à l'intégration étant si important, devrait-on prévoir une disposition distincte ne portant que sur ce sujet?

Mme Dyane Adam: Dans mon exposé, je n'ai pas donné de détails sur les mesures d'intégration car, en général, elles font l'objet de réglementation ou de programmes ministériels particuliers. Mais si vous, en votre qualité de membre du comité, croyez bon de renforcer cet aspect dans le projet de loi, je vous donnerai certes mon appui. Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il ne suffit pas d'attirer des immigrants dans certaines provinces, telles que la vôtre, ou dans des régions rurales ou moins urbaines du pays; il faut aussi prévoir les ressources et créer l'environnement qui les inciteront à y rester. J'appuierais donc toute suggestion de modifications de la loi ou de la réglementation que présenterait votre comité afin d'assurer l'intégration des immigrants dans les communautés des deux langues officielles du pays.

M. Inky Mark: C'est bien.

Le président: Anita, allez-y.

Mme Anita Neville: Je n'ai pas de question.

Le président: Madeleine.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: C'est à mon tour. C'est extraordinaire! Que se passe-t-il, monsieur le président?

[Traduction]

Le président: C'est vraiment incroyable, n'est-ce pas?

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: On va écrire ça dans le grand livre.

Bonjour, madame Adam. Je vous remercie de votre présentation.

Ce qu'il y a d'extraordinaire chez les femmes, c'est qu'on a toujours cette capacité de mettre l'idéal sur papier. Bien sûr, l'apport de la population immigrante est essentiel au développement du Canada tout comme il l'est au développement du Québec. Ça fait 30 ans que l'on a compris cela.

Par ailleurs, est-ce qu'on peut raisonnablement croire—à moins d'investir des sommes absolument extraordinaires—qu'une famille immigrante, ou un immigrant qui connaît déjà le français et qui choisit de ne pas aller au Québec a vraiment envie d'aller sauver des communautés francophones hors Québec? Évidemment, j'ai l'air un peu brutale en disant ça. J'essaie de me mettre à sa place. C'est certain que cette famille qui choisit de ne pas aller au Québec mais d'aller ailleurs au Canada veut surtout devenir partie prenante de la société américaine dans son grand sens.

• 1045

À quoi pouvez-vous bien penser comme ressource, comme incitation, comme motivation? Si vous réussissez ça, madame,vous aurez droit à une statue sur la colline. Dieu sait que les femmes ne sont pas nombreuses là.

Mme Dyane Adam: J'imagine que c'est une question. Vous avez parlé d'idéal. D'abord, un pays, c'est en somme un idéal, c'est-à-dire que c'est un projet de société qui a des principes.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Je comprends cela.

Mme Dyane Adam: Il y a des principes directeurs qui gouvernent, en fait, les décisions de ce pays. Une des caractéristiques fondamentales de notre pays, c'est la dualité linguistique. On a une responsabilité ici, et particulièrement votre comité, de s'assurer de préserver cette caractéristique.

Je vais aller au spécifique. Comment peut-on penser, imaginer, espérer recruter des personnes d'expression française dans des communautés minoritaires où les conditions ne sont pas toujours favorables? Comme on le sait, les minorités où habitent les francophones vivent parfois des situations difficiles. Il n'en demeure pas moins qu'il y a des efforts qui sont faits. Je vous en donne quelques exemples.

Il y a des efforts qui sont présentement en cours au Manitoba, entre autres, où le gouvernement provincial et les communautés et, bien sûr, le fédéral, travaillent en partenariat pour le recrutement de personnes francophones et d'immigrants. Ce n'est qu'un début. Il y a des immigrants qui ont déjà manifesté leur intérêt et qui y ont immigré. Vous me direz que ce n'est pas un grand nombre, mais comme l'a soulevé un intervenant précédemment, on parle non seulement du facteur francophone, mais aussi du fait qu'il s'agit de régions qui, souvent, ne sont pas des métropoles. Je dirais que c'est un défi additionnel.

Il faut comprendre aussi qu'il y a tout de même l'étude dont je parlais plus tôt. Je n'ai pas les tableaux avec moi présentement, mais on serait étonnés de voir combien il y a d'immigrants francophones à divers endroits aux États-Unis, entre autres, et même dans une province comme la Colombie-Britannique qui recrute passablement d'immigrants sans faire trop d'effort et même sans avoir de mécanismes d'appui à l'heure actuelle.

Je me fie là-dessus pour dire que si l'on avait une volonté bien ferme et que l'on avait des programmes et des politiques qui nous permettaient d'accueillir adéquatement ces immigrants et de les intégrer, ce n'est pas un idéal irréalisable. C'est vraiment une question de s'assurer d'y mettre les ressources. Je ne pense pas que l'on parle de ressources super exorbitantes. Il faut tout de même penser à la chaîne de services, c'est-à-dire au moment où l'on est en train de faire du recrutement à l'extérieur du pays ou de promouvoir le Canada comme pays jusqu'au moment où l'immigrant arrive, qu'il est accueilli et qu'il doit apprendre d'autres langues ou même renforcer ses connaissances de la langue française, car il peut en connaître seulement des rudiments dans certains cas.

[Traduction]

Le président: Y a-t-il d'autres questions? Je suis généreux et libéral aujourd'hui.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Vous l'êtes vraiment. Je ne sais pas ce que vous avez mangé ce matin.

[Traduction]

Le président: Je vous assure que c'était très bon.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Dans votre réponse, vous avez parlé de la quantité d'immigrants francophones qui vont aux États-Unis. Ça tend à démontrer ce que je disais. Les immigrants francophones qui choisissent les États-Unis veulent devenir partie prenante de la société nord-américaine. Leurs enfants parleront peut-être le français s'ils ont encore des grands-parents en France ou en Belgique ou Suisse. Je fais le pari—et je pense que je ne me tromperai pas—que, dans trois générations, ces gens qui parlaient français et qui ont choisi d'immigrer aux États-Unis ne parleront plus français. Ils parleront l'espagnol s'ils sont en Californie ou en Floride. C'est tout ça le défi.

Bravo pour l'idéal. Bravo pour la foi. Toutefois, quand on pense à nos communautés hors Québec qui travaillent tellement fort, c'est un déclin que l'on voit en dépit de leurs efforts personnels et de société. Plus on s'éloigne du Québec, plus il y a un déclin, plus l'assimilation est grande. C'est un constat épouvantable, mais on ne peut pas ne pas le l'ignorer.

• 1050

Mme Dyane Adam: Si vous me permettez, monsieur le président, je pense qu'aujourd'hui on pourrait aborder toute la question de l'assimilation qui est une des choses qui nuit, bien sûr, aux communautés. Aujourd'hui, cependant, on parle aussi d'immigration et on sait fort bien que la majorité anglophone du pays se renouvelle largement par l'immigration. Alors si on ne permet pas ou si on ne crée pas les conditions propices pour que la minorité francophone se renouvelle par l'immigration, on accroît beaucoup le problème de l'assimilation. Alors, je crois qu'il ne faut pas confondre l'un et l'autre.

En ce qui concerne l'immigration, l'important pour une communauté, c'est d'avoir des structures et des institutions d'appui. Les personnes d'expression française qui choisissent les États-Unis comme pays d'accueil y vont sûrement pour toutes sortes de raisons, dont l'attrait financier. Le Canada est aussi un pays attrayant pour les immigrants, pour cette raison et pour bien d'autres; c'est une société qui a des valeurs humanitaires quand même très importantes.

Donc, pour une personne d'expression française attirée par l'Amérique, parlons de l'Amérique du Nord, l'accès à sa langue première par le biais de toute une infrastructure, dont les écoles, qui n'est peut-être pas comparable à ce qui existe du côté de la majorité, permet au moins de s'intégrer à la société canadienne tout en préservant son héritage culturel personnel. C'est cela qui est nécessaire pour assurer le succès de cette tentative de recruter des immigrants. Il faut aussi vraiment s'assurer que les communautés sont prêtes à les accueillir et qu'elles ont aussi, bien sûr, les moyens de les retenir. On parle alors d'institutions, d'écoles, de services, etc.

[Traduction]

Le président: Merci. John McCallum

M. John McCallum: Étant un Montréalais anglophone, j'ai beaucoup de sympathie pour votre cause, mais je me demande si c'est réaliste. Nous n'avons pas encore abordé la question, mais pour des raisons d'économie, de vieillissement de la population, et ainsi de suite, nous voulons relever les niveaux d'immigration. Je crois que le gouvernement a pour politique de tenter de fixer ce niveau à 1 p. 100 de la population du pays, ce qui est bien supérieur au niveau actuel.

Que se passerait-il si cet objectif, soit un taux d'immigration plus élevé, allait à l'encontre de votre objectif d'assurer le renouvellement démographique de nos langues officielles? Je présume que vous parlez des communautés minoritaires au Canada, par le biais du processus de sélection et d'établissement des immigrants. Il me semble qu'il pourrait y avoir conflit. Si nous accueillons de nombreux immigrants, ce que nous voudrons peut-être faire pour des raisons économiques et autres, il sera difficile de réaliser ce que vous proposez. Vous parlez «d'assurer», c'est un mot très fort. Cela signifie-t-il qu'il faudrait accueillir moins d'immigrants pour tenir compte des préoccupations que vous avez soulevées si ces deux objectifs allaient à l'encontre l'un de l'autre?

Mme Dyane Adam: J'ai lu quelque part que les hommes politiques savent très bien concilier l'inconciliable. Lorsqu'on a de nombreux objectifs, on se heurte parfois à des difficultés.

Mais, à mon avis, voilà ce qui importe dans ce projet de loi. L'objectif économique est certainement très important. La population canadienne s'est renouvelée grâce à l'immigration depuis environ 15 ans.

Mais ce processus de renouvellement ne devrait pas nous faire oublier les autres objectifs du Canada. J'estime qu'il faut que ce soit évident, bien présent dans les programmes ministériels et les activités de promotion que j'ai mentionnées. Il faut en faire davantage car, pour l'heure, les efforts restent timides.

Je ne réclame pas l'équilibre ou la proportionnalité. Je n'ai rien mentionné de tel. Je dis simplement que nous devons garder cela à l'esprit. Cela doit nous guider dans notre politique d'immigration et dans notre législation sur l'immigration.

• 1055

M. John McCallum: Merci.

Le président: John.

M. John Herron: J'aimerais faire deux remarques sur la question de l'équilibre qu'a abordée John. J'ai été assez abasourdi par ce que vous avez dit dans vos remarques liminaires, à savoir que nous devons voir à ce que notre population augmente considérablement. Le niveau d'immigration étant près de 300 000, bien des démographes estiment que c'est suffisant. Avec un nombre trop important d'immigrants, il deviendrait difficile pour nous d'atteindre tous nos objectifs en matière d'immigration. John a souligné à quel point cet équilibre est délicat à maintenir, et j'abonde dans le même sens.

[Français]

Et peut-être que ce sera une belle occasion pour moi d'utiliser un peu mon français.

J'ai été un peu surpris de ce que vous avez dit deux fois dans votre présentation. Une de ces fois, vous avez dit:

[Traduction]

    Nous recommandons aussi que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration entreprenne des activités promotionnelles pour renseigner les immigrants éventuels au sujet de la présence des communautés minoritaires de langue officielle et qu'il appuie ces communautés dans leurs efforts d'intégration des immigrants.

Vous avez aussi dit plus tôt:

    On a vraiment besoin de communiquer avec les immigrants francophones de l'extérieur du Québec afin de les aviser de la présence d'institutions de langue française dans les milieux minoritaires et des nombreux services en français qui y sont offerts.

[Français]

Je suis du Nouveau-Brunswick et dans ma circonscription, qui est presque la plus anglophone du Nouveau-Brunswick, on comptait, il y a 10 ans environ, 2 000 personnes capables de parler français et anglais. Maintenant, il y en a 14 000. Or, il n'y a pas une phrase dans la section du rapport qui parle de la dualité linguistique, pas une seule phrase sur le Nouveau-Brunswick, la seule province qui soit vraiment bilingue.

Actuellement, on a deux buts dans ma province: améliorer notre population et protéger les deux langues officielles. S'il vous plaît, la prochaine fois, auriez-vous l'obligeance de dire quelque chose comme

[Traduction]

    «Nous devons promouvoir la dualité de notre pays.» N'oubliez pas ma province à cet égard.

Merci.

Mme Dyane Adam: J'ai préféré ne pas parler de l'une ou l'autre province en particulier.

M. John Herron: Mais vous avez fait allusion à Montréal et au Québec.

Mme Dyane Adam: C'est vrai.

M. John Herron: Vous avez même parlé de la Colombie-Britannique. N'oubliez pas que le Nouveau-Brunswick est la seule province bilingue. Voilà pourquoi nous n'aimons pas parler du Canada français et du Canada anglais. Ma province est très fière de sa dualité. Nous estimons qu'elle devrait être promue comme telle.

Mme Dyane Adam: Dans mon exposé, du moins, en ce qui a trait à ce projet de loi, je considère que les minorités de langue officielle et les minorités francophones se trouvent dans toutes les provinces sauf le Québec, et le contraire pour le Québec. Voilà pourquoi le Québec est la référence, tout simplement parce que c'est là que se trouve la minorité anglophone. C'est simplement une façon de désigner les minorités anglophone et francophone.

M. John Herron: Les anglophones comme moi qui ont été élevés dans une culture anglophone au Nouveau-Brunswick et qui ont embrassé cette dualité y sont très sensibles.

[Français]

Il faut se rappeler aussi que le Sommet de la Francophonie s'est tenu dans ma province la dernière fois.

[Traduction]

Mme Dyane Adam: Je ne veux surtout pas minimiser le rôle très important que joue le Nouveau-Brunswick. Vous savez probablement que dans votre province, la seule province officiellement bilingue au Canada, comme vous l'avez fait remarquer, le taux d'immigration n'est pas très élevé. Mais au chapitre des immigrants francophones, il est de 6 p. 100.

• 1100

M. John Herron: Si vous voulez faire la promotion des services qui existent dans les deux langues—pour protéger la langue française, en l'occurrence—même dans une déclaration de cette nature, parler de l'immense infrastructure... Même dans les circonscriptions anglophones comme la mienne, protéger, aborder, promouvoir et célébrer la dualité linguistique voilà qui aiderait à augmenter cette proportion de 6 p. 100...

Mme Dyane Adam: Vous avez tout à fait raison.

M. John Herron: ...et ma région est probablement celle à laquelle vous pensiez.

Mme Dyane Adam: Je terminerai là-dessus, monsieur le président...

Le président: Ce débat me plaît bien.

Mme Dyane Adam: Nous rendrons publique notre étude sur l'immigration. Nous y dressons le tableau des provinces. Nous avons conclu que le Nouveau-Brunswick est certainement l'une des provinces où existe cette infrastructure qui pourrait faciliter l'intégration de la minorité francophone. Cela vous intéressera peut-être de le savoir.

M. John Herron: Merci.

Le président: John, nous savons tous que le soleil se lève à l'est, et qu'il ne fait aucun doute que le Nouveau-Brunswick a toujours été à l'avant-scène de programmes nationaux formidables. Vous avez raison. C'est la seule province qui reconnaît officiellement nos deux langues, et on doit l'en féliciter. Peut-être que d'autres provinces verront la lumière à mesure que le soleil se déplacera vers l'ouest.

Je dois vous dire—puisqu'il est question du Nouveau-Brunswick—que je suis de l'Ontario, et que dans le nord de l'Ontario où j'ai grandi, il y a une communauté francophone importante. J'ajoute que nous sous-estimons parfois la vitalité et la vigueur des diverses communautés linguistiques de notre pays, et je ne parle pas seulement de la communauté anglophone au Québec, ou de la communauté, mais également des communautés minoritaires partout au pays, ce qui comprend évidemment celles du Nouveau-Brunswick. Mais, même si l'Ontario, n'est pas officiellement bilingue, cette province offre toute une gamme de services et de programmes à ceux et celles dont la première langue officielle est le français.

Inky veut intervenir, après quoi le secrétaire parlementaire fera une brève intervention.

Allez-y, Inky.

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

Je peux dire moi aussi qu'il y a dans ma circonscription plusieurs communautés de langue française très dynamiques.

Dans mon esprit, la question la plus importante est la formation et le soutien linguistique. Peu importe s'il s'agit de l'anglais ou du français. J'aimerais vous demander si vous avez des détails relativement au soutien que le gouvernement fédéral doit donner au niveau du temps—je parle du nombre d'années—pour les nouveaux immigrants, qu'il s'agisse de l'anglais ou du français?

Le président: Vous parlez d'intégration?

M. Inky Mark: De formation linguistique.

Mme Dyane Adam: De formation linguistique?

M. Inky Mark: De formation, oui.

Mme Dyane Adam: Je vous avoue que je n'ai pas d'opinion à ce sujet. Je suis psychologue de profession, je vous répondrai donc en psychologue clinicienne.

Le président: On nous étudie.

Mme Dyane Adam: La formation linguistique, c'est quelque chose de subjectif. Il y a des personnes qui ont besoin de beaucoup moins de temps. Tout dépend de l'environnement et des ressources dont on dispose. Je crois donc que, si nous voulons attirer des immigrants, et si nous voulons leur offrir un milieu accueillant, nous devons nous adapter aux besoins de chacun. C'est la psychologue qui parle.

Le président: Mark.

[Français]

M. Mark Assad (Gatineau, Lib.): Bonjour, madame.

Le mandat de la Loi sur les langues officielles est évidemment de promouvoir les deux langues officielles dans tous les ministères. Mais à la page 7, vous faites une recommandation. Si je la comprends bien, vous voudriez qu'on incorpore certains aspects de la Loi sur les langues officielles dans notre projet de loi C-11. C'est la partie où il est écrit: «De plus, nous recommandons que le projet de loi soit amendé afin...»

Mme Dyane Adam: Oui, oui, d'accord.

M. Mark Assad: Qu'est-ce que cela implique exactement dans...

Mme Dyane Adam: Je fais cette intervention parce que l'article ajouté dans le nouveau projet de loi qui a été déposé, le C-11, fait référence seulement à ce qui est contenu dans la charte, c'est-à-dire à l'égalité de statut et de reconnaissance du français et de l'anglais.

• 1105

La Loi sur les langues officielles est, bien sûr, quasi constitutionnelle, mais elle fait beaucoup plus que reconnaître que le français et l'anglais sont les deux langues officielles du pays. Elle définit les obligations du gouvernement. Par exemple, elle décrit en détail l'obligation du gouvernement d'assurer le renouvellement démographique, c'est-à-dire la vitalité des communautés de langue officielle, leur épanouissement, leur développement.

Toute cette notion-là ne se trouve pas dans la charte et c'est le prestige de la langue. C'est le sens de la proposition qui est faite et qu'on devrait retrouver dans le projet de loi C-11. Celui-ci devrait refléter l'engagement et l'obligation du gouvernement fédéral de ne pas seulement favoriser la connaissance des deux langues—des deux langues officielles oui—, mais aussi de les faire pénétrer dans des communautés. Une langue se vit, doit être parlée et vécue dans des communautés.

C'est le sens de l'amendement que je suggère d'ajouter.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup. Au nom du comité, je tiens à vous remercier tous—et Dyane tout particulièrement—pour vos mémoires, vous nous avez donné matière à réflexion, et nous allons maintenant envisager notre pays sous un angle tout à fait différent et exaltant.

Vous avez mentionné l'étude que vous faites. Vous avez dit, je le sais, qu'elle pourrait être terminée en juin. Nous sommes d'accord avec vous lorsque vous dites que notre pays a été fondé par des immigrants, et que son avenir tient pour beaucoup à la capacité que nous avons d'attirer des gens du monde entier. Si vous avez des conclusions préliminaires que vous aimeriez communiquer au comité au moment où nous discuterons de ce projet de loi sur l'immigration, nous en ferons sûrement notre profit. Donc, si vous pouvez nous en faire part, je vous en serais reconnaissant.

Mme Dyane Adam: D'accord, merci. C'est ce que nous ferons.

Le président: Merci beaucoup. Au revoir.

Avant que tout le monde se sauve—vous aussi, Mark, asseyez-vous—il faut adopter rapidement une motion si nous voulons avoir un budget de fonctionnement.

Comme vous savez, c'est notre budget de fonctionnement. Nous voulons seulement avoir les moyens de faire notre travail au cours du prochain exercice financier, soit du 1er avril au 31 mars 2002. Nous n'aurons besoin—pour le moment du moins—que de 42 800 $, pour les dépenses reliées aux témoins, les vidéoconférences et diverses dépenses.

Quelqu'un propose-t-il que l'on adopte le budget de fonctionnement de 42 800 $ que nous soumettrons ensuite au comité de liaison comme il se doit?

Des voix: D'accord.

Le président: Merci. La séance est levée.

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