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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 4 juin 1998

• 0905

[Français]

Le président (M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.)): Mesdames et messieurs, je vous souhaite la bienvenue à cette rencontre du Comité de la défense nationale.

[Traduction]

Nous avons le plaisir d'accueillir ce matin le général Baril, chef d'état-major. Je crois que ce sera notre dernière réunion avant que nous ne commencions à rédiger notre rapport sur les problèmes socio-économiques auxquels font face les membres des Forces canadiennes et, général, nous sommes extrêmement heureux de vous avoir comme témoin aujourd'hui.

Vous connaissez notre procédure. Vous faites votre exposé et ensuite nous passerons à une période de questions et de réponses. Sans plus attendre, monsieur, vous avez la parole.

Le général J.M.G. Baril (chef d'état-major, ministère de la Défense nationale): Merci, monsieur.

[Français]

Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis heureux d'être ici aujourd'hui, au moment où vous vous apprêtez à mettre un terme à la partie publique de votre étude sur les facteurs économiques et sociaux qui influencent la qualité de vie de nos militaires. Cette étude sur la qualité de la vie a suscité énormément d'intérêt dans les médias et a déclenché un processus interne de révision, de renouvellement et de changement. Votre étude a également galvanisé les membres des Forces canadiennes et fait naître de nouvelles attentes chez nos soldats, nos marins et nos aviateurs de tous grades, hommes et femmes.

[Traduction]

Lorsque j'ai abordé ce sujet devant vous l'automne dernier, je vous ai dit combien il me tenait à coeur. Aujourd'hui, huit mois plus tard, je suis encore plus déterminé à améliorer la qualité de vie de nos militaires. Je suis accompagné aujourd'hui de l'adjudant-chef des Forces canadiennes et des chefs d'état-major des trois armées. En leur nom et en mon nom personnel, je peux vous assurer que nous appuyons tout le processus qui a été amorcé par votre comité.

Comme je vous l'ai dit la dernière fois, l'efficacité opérationnelle comporte quatre dimensions: un bon équipement, une bonne formation, un bon leadership et de bonnes conditions de service. Résoudre les questions liées à la qualité de vie des militaires est la priorité numéro un des Forces canadiennes et du ministère de la Défense nationale. C'est notre priorité numéro un parce que nous avons négligé cette dimension, et qu'il est devenu parfaitement clair que sans conditions de service raisonnables, il est impossible d'optimiser l'efficacité opérationnelle.

Comme les autres personnes présentes ici aujourd'hui, j'ai suivi vos délibérations de très près, d'abord comme chef d'état-major de l'armée de terre, puis comme chef d'état-major de la Défense. Vos audiences et vos discussions ont élargi notre compréhension des problèmes de qualité de vie auxquels font face les membres des Forces canadiennes. Vous nous avez amenés à nous poser des questions sur nos méthodes de travail et sur les services que nous offrons à nos militaires.

Monsieur le président, vous et les autres membres du comité avez tenu 20 audiences publiques ici à Ottawa, vous avez passé plus de 25 jours sur la route à visiter des bases militaires et, d'après nos estimations, plus de 6 000 personnes ont assisté à vos audiences d'un bout à l'autre du pays.

Vous avez rendu visite à nos militaires dans leurs garnisons et sur leurs théâtres d'opération. Vous êtes montés avec eux dans des navires, des chars de combat et des hélicoptères. Et si mes renseignements sont exacts, en Bosnie, vous avez même marché quelques kilomètres avec eux.

Avant d'aller plus loin, je tiens à vous remercier pour la détermination dont vous avez fait preuve dans votre étude, et pour avoir pris le temps d'en tirer une connaissance approfondie du milieu militaire.

[Français]

Monsieur le président, comme dernière preuve de votre volonté d'améliorer la qualité de la vie de nos militaires, je vous demande de m'accorder 30 minutes pour terminer ce long processus. J'aimerais prendre quelques instants pour discuter du diagramme que vous avez devant vous. Je vais commencer par passer en revue les cinq piliers de la dimension «qualité de la vie» de l'efficacité opérationnelle, en mettant l'accent sur les principes sous-jacents à chacun d'entre eux. Je vais également vous donner quelques exemples de ce que nous avons fait dans chaque domaine avec les ressources existantes.

Comme vous le savez, les trois armées, l'armée de terre, la marine et la force aérienne, se sont engagées à améliorer la qualité de la vie de leur personnel, et les exemples que je vais vous donner aujourd'hui ne sont qu'un échantillon des initiatives qui ont été prises.

• 0910

Pour chacun des cinq piliers, je vais également vous expliquer comment vous pouvez nous aider. Comme vous le verrez, vous pouvez nous aider de trois façons principales. Premièrement, vous pouvez nous fournir votre propre évaluation des questions qui doivent être abordées en priorité. Deuxièmement, vous pouvez mettre l'accent sur les modifications qui devront être apportées à certaines lois pour permettre une amélioration de la qualité de vie de nos militaires. Troisièmement, vous pouvez confirmer les quatre dimensions de l'efficacité opérationnelle, reconnaissant ainsi qu'il n'y a pas de compromis possible, et recommander que des fonds additionnels soient affectés à l'amélioration de la qualité de la vie. Ensuite, je vais faire quelques observations sur les deux autres éléments du programme, le toit et les fondations. Et, bien sûr, pour terminer, je vais vous dire quelques mots sur le financement.

[Traduction]

Parlons tout d'abord de la rémunération et des avantages sociaux.

Tout au long de vos déplacements, vous avez entendu des témoignages de militaires canadiens qui fréquentent les banques d'alimentation, et d'individus qui exercent deux ou trois emplois simplement pour joindre les deux bouts. Vous avez entendu parler de cette femme qui a dû payer son épicerie avec des chèques qu'elle savait sans provision. Vous avez entendu des militaires exprimer leur frustration parce qu'ils sont incapables de prévoir leur niveau de vie et de se prémunir contre les variations considérables du coût de la vie entre les diverses régions du Canada. Vous avez entendu des mères de famille avouer en pleurant qu'elles ne peuvent pas amener leurs enfants chez le médecin parce qu'elles n'ont pas les moyens de se payer un plein d'essence. Vous avez entendu des gens se plaindre qu'il y a des problèmes dans le régime de rémunération de la Réserve, que les cotisations à l'assurance-emploi et aux mess ne sont pas équitables, et que la structure fiscale annule les avantages de notre système d'indemnités et de prestations.

Ces situations sont typiques d'un système qui a perdu de vue ses principes de base, qui sont au nombre de trois.

Premièrement, il faut savoir que le métier des armes est une occupation unique en son genre. Ce n'est pas un emploi comme un autre. C'est plutôt une vocation, un engagement à servir sa patrie, et un consentement à faire le sacrifice suprême au besoin.

Deuxièmement, les membres des Forces canadiennes ont droit à un niveau de vie raisonnable et constant, quel que soit l'endroit où ils vivent et travaillent. Ils n'ont pas la possibilité de choisir leur lieu d'affectation. En effet, nous leur donnons l'ordre de déménager, et ils doivent subir les conséquences des disparités économiques régionales de notre pays.

Troisièmement, le métier des armes est aussi une profession et comme toute autre profession, il doit être concurrentiel, et il doit attirer et retenir les éléments les plus brillants et les plus talentueux de la société canadienne.

Pour être fidèle à ces principes, le système de rémunération et d'avantages sociaux des Forces canadiennes doit être juste, équitable et attrayant. Les taux de rémunération de base de nos militaires doivent être alignés sur les salaires versés dans la fonction publique. Cependant, ces taux de base doivent être complétés par des indemnités, pour compenser la perte de liberté individuelle, les difficultés liées aux fréquents déménagements, les longues périodes d'absence du foyer et les heures supplémentaires qui sont le lot quotidien des membres des Forces canadiennes.

Vous êtes tous au courant des mesures que le ministère et les Forces canadiennes ont prises pour améliorer la rémunération de nos militaires: 190 millions de dollars ont été dépensés pour rétablir la parité entre la solde des militaires et les salaires de la fonction publique, et 58 millions de dollars ont été affectés au Programme d'amélioration des conditions professionnelles des réservistes. Les indemnités d'environnement, qui sont versées aux membres des Forces canadiennes qui travaillent continuellement ou sporadiquement dans des conditions difficiles ou périlleuses, ont été augmentées de 7,9 p. 100 au cours des 15 derniers mois. Nous avons également amélioré l'indemnité de déplacement pour congé au domicile pour les militaires déployés pendant plus de quatre mois successifs. Cette indemnité leur donne droit, pendant l'opération, à un vol aller-retour et à 15 jours auprès de leur famille, sans compter la durée du déplacement. La plus récente initiative dans ce domaine est l'annonce d'un programme destiné à encourager les pilotes à demeurer dans les Forces canadiennes de façon à réduire le nombre de ceux qui les quittent.

Tout cela, et plus encore, a été accompli dans le cadre des budgets existants. Cependant, j'ai le regret de vous annoncer aujourd'hui que nous ne pouvons rien faire de plus sans argent neuf. C'est pour cela que nous avons besoin de votre aide.

Commençons par la rémunération de base des recrues. Comme vous le savez, la solde versée aux soldats et matelots de troisième classe, aux élèves-officiers, aux sous-lieutenants et aux lieutenants n'est pas raisonnable compte tenu de ce qu'on attend d'eux. La situation est critique, et elle doit être corrigée de toute urgence. À mon avis, la seule solution est d'accroître la rémunération de base à ces échelons.

Deuxièmement, il est temps que les membres des Forces canadiennes soient indemnisés adéquatement pour les exigences et les difficultés propres à la vie militaire, comme la perte de liberté individuelle, les longues périodes d'absence du foyer et les fréquents déménagements. Le facteur X, c'est-à-dire le niveau d'indemnisation pour ces conditions de service très particulières, n'a pas changé depuis 1981. Cependant, nous savons tous que la nature du service militaire a changé, que les attentes de nos membres ont changé, et que la réduction des effectifs a entraîné une augmentation de la charge de travail, des perturbations et du niveau de stress de nos militaires. Et parce que cette occasion ne se représentera pas, je voudrais vous signaler un certain nombre d'autres problèmes auxquels il faudra trouver une solution.

• 0915

Tout d'abord, il y a la question de l'indemnité d'aide au logement, qui devra être augmentée afin de compenser l'impact de la ponction fiscale. Il faudra également mettre en oeuvre une indemnité de vie chère indépendante de l'indemnité d'aide au logement.

Enfin, je suis en faveur de l'établissement d'un système de progression latérale des salaires qui nous permettrait de rémunérer les militaires en fonction de leurs compétences, et non pas simplement en fonction de leur grade. Nous devons trouver d'autres moyens de récompenser les militaires compétents dans un environnement où la progression verticale est très lente.

[Français]

Je passe maintenant au deuxième pilier de la dimension de la qualité de la vie: les conditions de logement de nos militaires et de leurs familles.

Pendant vos déplacements, vous avez visité de nombreux logements familiaux et logements pour célibataires. Vous avez entendu parler des dangers que posent les infiltrations d'eau, les moisissures toxiques et la vermine. Vous avez entendu parler de l'état déplorable des logements pour célibataires, de l'insuffisance des mesures prises par les responsables du logement dans certaines bases et des problèmes liés au Plan de garantie de remboursement des pertes immobilières et au Programme de vente d'habitation garantie. Enfin, vous avez entendu dire que certains de nos logements sont tellement décrépits que cela menace la santé des enfants et que certains immeubles sont jugés inhabitables par les organismes de service social.

Bien sûr, les logements militaires ne se sont pas détériorés en un jour. La situation actuelle est le résultat de plusieurs décennies de mauvaise gestion et de financement insuffisant. Mais le fait que les membres des Forces canadiennes acceptent de vivre dans de pareilles conditions est la preuve qu'il nous faut des logements militaires. Par conséquent, il faut poser comme principe que tous les membres des Forces canadiennes ont droit à un logement décent. Où qu'ils soient, les militaires doivent également avoir accès à des logements dont le prix est abordable. Les moyens utilisés peuvent varier d'un endroit à l'autre, mais il faut absolument répondre aux besoins de nos militaires. Pour y arriver, nous devons éliminer tout ce qui entrave l'action de l'Agence de logement des Forces canadiennes. Actuellement, les loyers sont la seule source de revenus de l'Agence de logement des Forces canadiennes. Ce n'est pas suffisant pour maintenir les normes actuelles, et encore moins pour améliorer la qualité de notre parc de logements. Comme vous l'ont dit le directeur de l'Agence de logement des Forces canadiennes et les représentants du Conseil du Trésor lorsqu'ils se sont présentés devant vous les 17 et 19 mars, nous devons donner à l'Agence de logement des Forces canadiennes les pouvoirs, la flexibilité et les ressources dont elle a besoin pour gérer de façon efficace les logements des Forces canadiennes.

Les Forces canadiennes ont pris certaines mesures pour améliorer le parc de logements. Ainsi, la force aérienne a affecté 1,4 million de dollars à la réfection de logements pour célibataires. La marine a affecté près de 5 millions de dollars à la rénovation des cuisines principales dans ses immeubles d'habitation de la côte est et de la côte ouest. À la base d'Edmonton, plus de 24 millions de dollars ont été consacrés à la construction de quatre bâtiments de caserne, où l'on trouvera 540 chambres doubles et 293 chambres simples. Une somme additionnelle de 12,5 millions de dollars a été affectée au remplacement du système de distribution d'eau et de collecte des eaux usées dans les logements familiaux de la base Trenton. Par ailleurs, le Comité de gestion de la défense a demandé que l'Agence de logement des Forces canadienne se voie accorder 5 millions de dollars cette année, et encore 5 millions de dollars l'an prochain, pour faire face aux dangers les plus pressants, dans le domaine de la santé et de la sécurité, que l'on trouve dans les logements des Forces canadiennes. Nous savons tous que le parc de logements a désespérément besoin d'être amélioré, mais l'Agence de logement des Forces canadiennes n'a pas le pouvoir de générer suffisamment de revenus pour répondre à ce besoin.

La première requête à cet égard, c'est que vous reconnaissiez l'importance du logement militaire pour l'efficacité opérationnelle des Forces canadiennes. L'Agence de logement des Forces canadiennes doit être autorisée à fonctionner comme un organisme sans but lucratif là où il est essentiel de fournir à nos militaires des logements adéquats à prix abordable, et ses décisions doivent être fondées sur des analyses de rentabilisation. Une agence de logement des Forces canadiennes dotée des pouvoirs requis et régie par les principes que je viens d'évoquer aiderait énormément nos militaires à résoudre les problèmes matériels et financiers liés au logement.

Ma deuxième requête est l'élimination de la règle des 10 p. 100 dans le plan de garantie de remboursement des pertes immobilières comme mesure de sécurité financière pour les militaires qui choisissent d'acheter une maison. Cela permettrait aux membres des Forces canadiennes d'avoir confiance dans leur capacité de se constituer un capital dans le courant de leur carrière, sans leur donner un avantage indu.

• 0920

[Traduction]

Le troisième pilier de la qualité de vie est la famille du militaire. Vous avez tous entendu des histoires bouleversantes au sujet de familles qui se sentent déchirées—parce que nous ne pouvons pas affecter les couples de militaires au même endroit, parce que les conjoints ont trop de difficulté à trouver un emploi ou parce que nous exigeons de nos militaires qu'ils soient éloignés de leurs proches pendant de trop longues périodes chaque année.

Vous avez entendu parler de la nécessité de mettre sur pied de meilleures garderies adaptées au mode de vie des militaires. Vous avez été mis au courant des répercussions des restrictions budgétaires sur les installations récréatives et des effets du stress sur la famille du militaire. Il semble que l'intensification du rythme opérationnel au cours de la présente décennie a donné lieu à une augmentation spectaculaire du nombre de familles qui ont éclaté.

Il serait naïf de croire que la réduction des Forces n'a pas contribué à augmenter le stress de la famille du militaire. Le service militaire repose sur trois principes fondamentaux qui ont tous d'importantes incidences sur la vie du militaire:

1. Les militaires doivent faire passer le service de leur pays et le besoin des Forces canadiennes avant leur préférence personnelle.

2. Les militaires doivent garantir leur mobilité afin de poursuivre leur instruction, d'élargir leur expérience et d'assurer le maintien des capacités opérationnelles générales.

3. Le bien-être de la famille est un facteur clé qui contribue à l'efficacité des membres des Forces canadiennes. Cependant, dans un avenir prévisible, le désir de stabilité des proches et l'exigence de mobilité du militaire entreront en conflit de plus en plus. Par conséquent, il incombe à l'employeur—c'est-à-dire les Forces canadiennes et le gouvernement—de mettre en oeuvre les programmes de soutien nécessaires et d'apporter un soutien systématique et complet, peu importe où se trouvent les familles des militaires et chaque fois qu'elles sont appelées à déménager. Les Forces canadiennes doivent également disposer d'options et de politiques souples qui permettent aux militaires et à leurs familles de faire des choix raisonnables lorsqu'ils sont confrontés à l'instabilité.

Nous adhérons à ces principes dans la mesure du possible. Au cours des deux dernières années, plus de 23 millions de dollars ont été dépensés pour améliorer les services de base du programme de soutien des familles de militaires, c'est-à-dire des services touchant les déploiements, des rajustements relatifs aux affectations, le partage de renseignements, les services à l'enfance et à la jeunesse, le soutien en cas de crise et l'emploi des conjoints.

Nous avons entamé un projet de renouvellement de l'infrastructure de 150 millions de dollars pour appuyer notre programme de soutien du personnel. Il s'agit de la plus vaste initiative de ce genre que nous ayons entreprise depuis 45 ans. Elle est financée à la fois de fonds publics et de fonds non publics.

Les 57 projets visés permettront de construire ou de rénover des arénas, des piscines, des gymnases et des centres communautaires pour les membres des Forces canadiennes et leurs proches.

Nous avons aussi adopté une approche proactive en fournissant aux superviseurs des avis sur la façon d'appliquer et d'interpréter diverses politiques clés du personnel en tenant compte des besoins des familles. Nous examinons actuellement la politique concernant les affectations pour motifs personnels en vue d'y apporter des changements.

Enfin, je suis heureux de préciser que nous augmenterons les services de planification financière du régime d'assurance revenu militaire, puisque ces services seront désormais fournis dans 13 installations des Forces canadiennes à l'échelle du pays.

Pour continuer d'améliorer et d'accroître les services de soutien offerts aux familles des militaires, nous devons disposer d'une allocation de frais de garde d'enfants conçue en fonction des besoins opérationnels, des heures de travail irrégulières et du rappel au travail sur court préavis aux fins des opérations. Vu l'augmentation, au sein des Forces canadiennes, du nombre de chefs de famille monoparentale et de familles dont les deux parents sont des militaires, il faut disposer en tout temps d'options de soutien de garde d'enfants pour veiller à ce que l'efficacité et les capacités opérationnelles ne soient pas compromises. Nous ne pouvons laisser les parents à eux-mêmes.

Par le passé, le Conseil du Trésor a offert de financer un service militaire de garde d'enfants équivalent à celui qui est fourni aux fonctionnaires. Cette offre a néanmoins été refusée parce que les conditions étaient très restrictives et risquaient d'entraîner d'importantes injustices. Les Forces canadiennes ont besoin d'une allocation de garde dont pourront bénéficier tous les militaires qui devront être éloignés de leurs familles pendant plus de 14 jours de suite pour des raisons professionnelles.

Pour reconnaître les sacrifices des conjoints des militaires, nous voudrions que des conseils à temps complet puissent aider les conjoints à trouver un emploi lorsqu'ils déménagent.

Par ailleurs, nous devons faire davantage afin de préparer les familles des militaires à vivre dans des régions où leur langue maternelle n'est pas parlée couramment. Ainsi, nous voudrions que les familles de militaires suivent des cours de langue seconde et d'autres langues pour leur éviter de se sentir paralysé et coupé de leurs voisins.

• 0925

Le dernier élément de ce thème que je veux vous signaler est la nécessité d'autoriser les militaires et leurs conjoints à faire des déclarations de résidence ordinaire; ainsi, ils pourront désigner une province de résidence aux fins de leur inscription officielle et de l'obtention de permis. Un tel mécanisme leur donnerait une plus grande stabilité et réduirait les coûts liés au déménagement d'une province à l'autre.

[Français]

Le quatrième pilier de la qualité de la vie a trait aux soins fournis aux militaires blessés, aux anciens combattants et aux retraités. Lors de vos déplacements, vous avez été informés de la façon épouvantable dont nous avons souvent traité nos blessés, nos anciens combattants, nos retraités et les familles des militaires décédés. Vous avez entendu parler de l'énorme bureaucratie à laquelle doivent faire face les blessés pour être indemnisés, ainsi que de la manière injuste dont sont actuellement accordées des indemnités aux militaires blessés en vertu de la Loi sur les pensions. De plus, vous avez entendu dire que les membres des Forces canadiennes hésitent à consulter les autorités médicales parce qu'ils craignent qu'on mette fin à leur carrière en vertu de la politique d'universalité du service.

Le principe fondamental du service militaire est la responsabilité illimitée, c'est-à-dire être prêt à donner sa vie pour servir les intérêts du Canada, ici même ou à l'étranger. Le colonel Calvin vous l'a bien expliqué: les membres des Forces canadiennes sont prêts à mourir si vous le leur demandez. Comme le gouvernement du Canada et les forces canadiennes exigent un tel dévouement, nous devons mettre en oeuvre pour les militaires malades ou blessés des programmes cohérents et complets qui garantissent la continuité des soins médicaux pendant le service et après la libération ou la retraite. De plus, comme nous reconnaissons les effets immédiats et considérables de blessures ou du décès d'un militaire sur le bien-être psychologique et financier du militaire lui-même ou de ses proches, selon le cas, nous devons fournir des soins aux personnes touchées de façon humaine et au moment nécessaire.

C'est dans cette optique que les Forces canadiennes ont établi un groupe consultatif d'information sur l'indemnisation en cas d'invalidité. Nous avons créé des postes de liaison réciproques et amélioré les rapports avec Anciens combattants Canada. En outre, nous fournissons aux militaires libérés le nom et le numéro de téléphone de personnes ressources qui répondront à leurs questions sur l'indemnisation. Nous avons aussi consacré des ressources à l'amélioration de l'infrastructure médicale et dentaire des Forces canadiennes. De nouvelles installations ont été construites à Gagetown et nous avons récemment rénové la clinique à Cold Lake, en Alberta.

Cependant, l'initiative la plus complète dans ce domaine est l'examen des soins fournis aux militaires blessés et à leurs proches. Cet examen en est actuellement à la deuxième de ses trois phases. Il s'agit d'un examen rigoureux portant sur la politique des Forces canadiennes relative aux soins médicaux du personnel, les indemnités fournies aux blessés, les systèmes d'administration de ces indemnités et les effets de ces politiques sur les militaires et leurs familles.

Cela n'est toutefois pas suffisant. Nous avons besoin de votre aide pour fournir une indemnisation en cas d'invalidité de longue durée pour l'occupation propre. Cela garantirait une plus grande sécurité aux militaires qui ne peuvent plus servir en raison de leur invalidité, mais qui n'ont pas droit à une pleine pension d'invalidité. Ainsi, avec une indemnisation en cas d'invalidité de longue durée pour l'occupation propre fournie par le régime d'assurance-revenu militaire, ces militaires bénéficieraient de deux années de recyclage, de rémunération et de préparation au travail à l'extérieur des Forces canadiennes.

Nous avons aussi besoin d'un appui législatif pour prêter main-forte aux membres de la réserve qui souffrent ou qui risquent de souffrir du syndrome de stress post-traumatiqe. Enfin, nous devons apporter des modificatifs à la Loi sur les pensions afin que tous les membres des Forces canadiennes reçoivent les mêmes indemnités lorsqu'ils sont blessés dans l'exercice de leurs fonctions au Canada ou à l'étranger. Je suis d'ailleurs heureux de préciser que le ministre de la Défense nationale a récemment porté cette question à l'attention de son collègue, le ministre des Anciens combattants. Toutefois, vous savez mieux que quiconque combien il est compliqué d'apporter des changements à la loi, et nous apprécierions votre soutien dans le cadre de ce processus.

[Traduction]

Permettez-moi maintenant de traiter de la question des attentes professionnelles. C'est dans ce dernier volet qu'on peut classer les préoccupations touchant le militaire lui-même. Vous avez entendu dire que les membres des Forces canadiennes estiment qu'ils ne disposent pas du matériel nécessaire pour remplir leur travail, qu'il s'agisse de leurs vêtements personnels ou de plus grosses pièces d'équipement. Vous savez aussi que les militaires sont d'avis qu'il existe des déséquilibres entre les grades et un certain immobilisme au niveau des promotions. Les militaires se préoccupent de la façon dont est gérée leur carrière et voudraient recevoir plus de formation en langue seconde. Vous savez que la confiance s'est érodée sur plusieurs plans, que le moral des troupes est bas et qu'il y a souvent deux poids, deux mesures dans les forces armées. Vous êtes également au courant du fait que les membres des Forces canadiennes ont reçu une couverture négative de la part des médias pendant plusieurs années. Lors de vos déplacements et de vos audiences, vous avez pris connaissance des effets cumulatifs de tous ces facteurs, soit la montée du stress, une grande frustration et parfois même de la colère.

• 0930

Pour que la profession de militaire soit une profession de choix, les Forces canadiennes doivent demeurer une institution qui est caractérisée par le professionnalisme et qui traite tous ses membres avec dignité, honnêteté et respect. Les membres des Forces canadiennes ont droit à des attentes professionnelles raisonnables, à une reconnaissance appropriée et à une évaluation équitable du rendement. En outre, il devrait y avoir des possibilités raisonnables et équitables d'avancement fondées sur le mérite et le besoin des Forces canadiennes. Ils doivent aussi recevoir les ressources et l'instruction dont ils ont besoin pour s'acquitter de leurs tâches.

Pour commencer à améliorer la situation de chaque militaire, nous avons consacré une grande somme à l'achat de nouvel équipement, à l'amélioration de l'instruction et au renforcement du leadership à tous les paliers de la chaîne de commandement. Comme le sait le comité, le gouvernement a déjà approuvé l'achat de nouveaux hélicoptères, de transports de troupes blindés et de sous-marins «déjà utilisés».

Le programme d'habillement du soldat, pour lequel ont déjà été livrés des articles et qui devrait se terminer en 2002, vise à consacrer 170 millions de dollars à des vêtements de protection individuelle. Qui plus est, 31 millions de dollars servent à améliorer l'équipement de détection des mines et de déminage. La marine dépense actuellement 7 millions de dollars pour remplacer du matériel d'arraisonnement désuet, ainsi qu'une somme supplémentaire de 1,6 million de dollars pour assurer l'alimentation par satellite des postes de télévision installés à bord de navires.

Enfin, nous révisons la politique en matière de congé dans le but de la rendre plus souple et de répondre aux besoins des militaires. Conscients de l'évolution de la démographie et des attentes de la société canadienne, nous mettons en place un certain nombre de mesures pour garder le rythme et veiller à ce que les Forces canadiennes reflètent toujours la société qu'elles servent.

Le Conseil sur la diversité de la défense, composé de cadres supérieurs du ministère et d'un membre de la Commission canadienne des droits de la personne, a été mis sur pied et chargé de formuler des politiques et de surveiller les progrès accomplis en ce qui concerne l'augmentation du nombre de femmes, d'Autochtones et de membres de minorités visibles au sein des Forces canadiennes. Des groupes consultatifs sur les minorités ont été créés afin de me tenir au courant de leurs besoins et des progrès réalisés. Nous menons continuellement des recherches et nous surveillons la situation sur le plan de la diversité.

Nous tenons à intégrer les hommes et les femmes au sein des Forces canadiennes, et nous déployons des efforts concertés pour attirer les femmes, tout en veillant à ce que notre culture militaire soit ouverte à leur égard. Les attitudes ne se transforment pas du jour au lendemain, et des situations inacceptables se sont produites. Nous avons mis en place une politique sévère de lutte contre le harcèlement, et toutes les unités comptent des conseillers en matière de harcèlement. Tous les membres militaires et civils de l'équipe de la défense doivent suivre des cours sur la prévention du harcèlement sexuel et du racisme. Nous avons fait des progrès en ce sens, mais nous ne serons satisfaits que le jour où il n'y aura plus aucun incident de ce genre.

Nous simplifions considérablement le processus de règlement des griefs et nous nommons un ombudsman au sein des forces armées de manière à fournir aux membres des Forces canadiennes l'occasion d'exprimer leurs doléances en toute liberté sans crainte de représailles. En outre, nous établirons un système de gestion des conflits, semblable à celui qui est utilisé par la Gendarmerie royale du Canada, qui nous permettra de répondre aux plaintes au plus bas niveau possible et le plus rapidement possible.

La qualité du leadership dans les Forces canadiennes influe considérablement sur la qualité de vie des militaires. Les auteurs du rapport au premier ministre sur le leadership et l'administration dans les Forces canadiennes ont étudié la question en profondeur, et nous nous sommes appliqués à donner suite aux recommandations issues de ce rapport. Nous avons entrepris notamment de renforcer la formation au commandement que nous prodiguons à notre personnel. Ainsi, nous avons presque terminé la mise au point de nouveaux cours de leadership à l'intention du corps des officiers. Il s'agit d'un cours de trois mois pour les sous-officiers supérieurs, qui met l'accent sur la cohésion, les qualités de chef et l'éthique, et d'un cours de six mois destiné aux nouveaux officiers généraux et officiers généraux de marine, qui fait porter l'accent sur le leadership pour les cadres supérieurs, les opérations stratégiques et la gestion des ressources.

En ma qualité de chef d'état-major de la défense, je me suis préoccupé de donner aux Canadiens toutes les raisons d'être fiers des Forces canadiennes pour le travail accompli ici et à l'étranger. Nous avons la responsabilité de façonner un produit de haute qualité et de fournir un service qui soit excellent et inégalé. Nous vous demandons de prendre une part active à ce projet et d'assumer vous-mêmes la responsabilité pour la commercialisation du produit.

• 0935

[Français]

Voilà, nous nous avons présenté les cinq piliers de la qualité de la vie. Les exemples sus-mentionnés de mesures prises à l'interne par le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes ne sont pas exhaustifs. Ce n'est qu'un éventail des efforts que nous déployons pour changer de cap. Par ailleurs, les suggestions que j'ai avancées quant aux éléments particuliers que nous aimerions voir intégrés dans votre rapport final ne sont pas exhaustives non plus. Toutefois, les ingrédients sont là. Les Forces canadiennes et le comité partagent un engagement. Ils sont également sur la même longueur d'onde pour ce qui est des difficultés que doivent surmonter les militaires.

[Traduction]

Comme je l'ai mentionné au début, les conditions de service sont un élément essentiel de l'efficacité opérationnelle. Je sais fort bien que les histoires qu'on vous a racontées dans vos déplacements en ont été une preuve éloquente. Les principes inhérents à chaque pilier doivent être respectés pour que les Forces canadiennes puissent constituer une organisation marquée au coin du professionnalisme, de la stabilité et de l'efficacité.

Comme l'illustre le diagramme, la qualité de vie repose essentiellement sur cinq piliers. Il existe un facteur humain à prendre en considération dans la mise sur pied d'une force, et l'on ne saurait l'ignorer. Ce facteur humain, vous l'avez entendu, vous l'avez vu et vous l'avez ressenti lorsque les émotions ont éclaté au grand jour à l'occasion des audiences publiques. Je ne m'étendrai plus sur l'analogie avec le toit d'une maison. Vous savez sûrement ce qui arrive à celui-ci lorsque les piliers ne sont pas équilibrés.

[Français]

Nous en sommes maintenant à la fondation, l'élément de la structure qui est vraisemblablement le plus important. Nous savons tous qu'une fondation stable empêche l'effondrement de la maison. L'analogie est donc on ne peut plus concrète. La fondation qui nous intéresse particulièrement est un engagement de la part de notre pays à soutenir, respecter et nourrir ses institutions militaires. Il vous a été signalé maintes et maintes fois que les soldats déplorent ce qu'ils perçoivent comme étant un manque d'engagement du gouvernement du Canada à l'égard de ses militaires. Examinons cette relations une dernière fois.

Le gouvernement exige en tout temps des Forces canadiennes qu'elles fassent montre d'un rendement exceptionnel et d'un dévouement hors pair. Le gouvernement et le pays réclament un très haut niveau d'intégrité personnelle, d'honneur, de loyauté, de courage et d'engagement de la gent militaire. Le gouvernement perçoit ses 90 000 militaires comme autant d'ambassadeurs, comme le prolongement de sa politique étrangère et souvent comme l'outil qui sert à montrer sa résolution sur le plan politique. Au pays, les Forces canadiennes sont aussi celles à qui on s'adresse en dernier recours en cas de sinistre. Lorsqu'une catastrophe se produit, nos militaires quittent leurs familles, elle-mêmes souvent en danger et abandonnées à leur propre sort, pour protéger d'autres Canadiens et éviter qu'ils ne soient blessés.

[Traduction]

Pourquoi le gouvernement agit-il de la sorte? Parce qu'il sait que les Forces canadiennes répondront à l'appel sans hésitation. Parce que personne ne va rouspéter et que l'enthousiasme sera au rendez-vous.

De tout temps, nos militaires ont répondu «oui mon commandant/mon lieutenant/mon capitaine» et ont donné le meilleur d'eux-mêmes dans l'exécution de leur mission. Au sein des Forces canadiennes, le gouvernement peut compter sur un groupe d'hommes et femmes dévoués, qui sont membres de la Force régulière ou de la Réserve, et qui ont décidé de s'enrôler parce que leur attachement à leur pays est plus grand que tout autre.

Nous avons besoin d'un rapport musclé et complet qui nous aidera à mener notre mission à terme. L'étude a fait naître des espoirs au sein des Forces canadiennes, l'espoir qu'il en sortira quelque chose de bon et de concret. Je propose, monsieur le président, qu'une bonne partie de ce quelque chose de concret serve à cimenter davantage notre fondation et nos piliers.

Je suis conscient que c'est au gouvernement de déterminer la suite à donner à vos recommandations. Je respecte ce processus parce qu'il s'agit de notre système de gouvernement, et qu'il est le gage d'une conduite éclairée des affaires publiques.

Toutefois, j'aurais une proposition à vous faire. En tant que comité permanent de la Chambre des communes, vous avez l'occasion de devenir les intendants de la confiance publique et les gardiens d'un engagement visant à assurer des fondements solides pour la qualité de vie des militaires.

Vous parlez au nom des Canadiens d'un océan à l'autre et, en cette qualité, vous pouvez exprimer dans votre rapport toute la gratitude qu'ils éprouvent pour le travail accompli par les Forces canadiennes et la fierté que suscite en eux cette institution.

Dans vos circonscriptions électorales d'un bout à l'autre du pays, vous pouvez crier sur tous les toits que tous nos soldats, matelots, aviateurs et aviatrices abattent de la belle besogne et que vous avez été témoins d'un engagement exemplaire de leur part. Vous avez une voix au Parlement et vous pouvez parler au nom des Forces canadiennes qui ne sont pas en mesure de le faire pour elles-mêmes.

Il n'y a rien qui vous empêche à titre de comité de défendre les principes d'une rémunération équitable, d'une reconnaissance adéquate, de logements convenables à prix abordable, d'un soutien approprié pour les familles des militaires et d'une attente raisonnable en matière de travail. Vos efforts à cet égard peuvent être amorcés dans votre rapport final si vous y mentionnez formellement votre engagement vis-à-vis des hommes et des femmes des Forces canadiennes au nom du peuple canadien.

En agissant de la sorte, vous amènerez le Parlement à reconnaître et à récompenser l'engagement et les sacrifices de tous nos militaires, hommes et femmes.

• 0940

[Français]

Vous n'êtes qu'au tout début de votre mandat. Je vous demande instamment de ne pas oublier, au cours des quatre prochaines années, les histoires qui vous ont été racontées et les expériences que vous avez vécues. Je vous exhorte, en tant que citoyens canadiens qui ont vu les Forces canadiennes à l'oeuvre ici et à l'étranger, à ne jamais oublier les personnes qui se sont présentées devant vous. Enfin, je vous invite à réexaminer ces questions l'an prochain afin de faire le point sur le progrès accompli. Ayant lu les transcriptions des audiences publiques, je sais que chacun de vous s'est déjà engagé à assurer le suivi des recommandations du comité.

Les Forces canadiennes sont une institution nationale qui ne passe pas inaperçue. À titre de chef de la Défense, je veux faire en sorte que les Canadiens soient fiers de cette institution, de ses membres et du rôle qu'ils sont appelés à jouer au pays et à l'étranger. J'espère que votre rapport facilitera l'atteinte de cet objectif.

[Traduction]

Avant de conclure cet exposé, il est de mon devoir de vous entretenir brièvement de la question des ressources. Comme je l'ai mentionné à ma dernière comparution, toute force armée en état de fonctionner, peu importe le pays d'appartenance, ne peut se passer de l'instruction, de l'équipement, du leadership et des conditions de service adéquates. Ces quatre éléments forment un tout. Chacun d'eux a des exigences bien particulières à différentes époques, et dans toute la mesure du possible, l'équilibre doit être maintenu.

Toutefois, aucun élément ne peut être soutiré de l'ensemble sans nuire à l'efficacité opérationnelle des forces armées. Chaque élément doit répondre à une norme minimale. Et je dois admettre aujourd'hui que s'il me fallait emprunter des ressources à l'un ou l'autre des trois autres secteurs pour être en mesure de respecter la norme minimale en matière de conditions de service, c'est tout l'ensemble qui en souffrirait.

Aucune feuille de calcul n'a été négligée dans notre quête de ressources monétaires pour les initiatives déjà amorcées en matière de qualité de vie. Il n'y a plus grand-chose à faire sans fonds additionnels, et je ferais preuve d'insouciance vis-à-vis de mes responsabilités si je prétendais le contraire. Du reste, les hommes et femmes de nos forces armées s'attendent à ce que leur gouvernement fasse une démonstration tangible de son engagement à leur égard parce que, somme toute, peut-il y avoir engagement sans ressources?

Enfin, monsieur le président et distingués membres du comité, permettez-moi de vous remercier du travail colossal que vous avez accompli pour soutenir les Forces canadiennes. Vous avez su respecter un calendrier très chargé. Vous vous êtes pliés à d'innombrables exposés. Vous avez écouté patiemment pendant des heures successives les témoignages de personnes qui attendaient depuis longtemps cette occasion de s'exprimer. Je vous exprime toute ma reconnaissance au nom des 90 000 militaires sous mon commandement.

[Français]

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, général. Nous passons maintenant à la période de questions.

[Traduction]

Nous passons à un tour de questions de 10 minutes. Nous commencerons par M. Hanger.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Merci, monsieur le président.

Général, je tiens à remercier vos collaborateurs et vous-même de votre présence ici ce matin. Je veux revenir sur certaines des choses que vous avez dites dans votre rapport. Je crois que vous y parlez de beaucoup des problèmes que nous avons certainement été à même de constater.

La tournée que nous avons faite a été très instructive en ce sens qu'elle m'a donné une vue d'ensemble de beaucoup des aspects du fonctionnement des Forces canadiennes, de voir notamment ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Elle a en tout cas permis l'expression de beaucoup de préoccupations qui n'avaient sans doute jamais été exprimées ouvertement auparavant. J'apprécie donc l'occasion que j'ai eue de voyager avec le comité.

Il y a une question que vous n'avez fait qu'effleurer dans votre exposé, général. Même si, tout compte fait, il ne s'agit pas d'une préoccupation majeure chez les militaires, je crois qu'elle a néanmoins des répercussions considérables quand on tient compte des questions relatives à la qualité de vie passée, actuelle et future. C'est une question qui fait les manchettes ces derniers temps. Il y a, bien sûr, ces allégations d'agressions sexuelles à Edmonton qui viennent tout juste d'émerger.

Il ne semble pas que la structure d'enquête des Forces canadiennes ait toujours traité les plaintes de façon très efficace par le passé. Je ne sais pas ce qu'il en est à l'heure actuelle. Pour ma part, je ne suis pas persuadé que le fait de faire appel à un organisme de l'extérieur pour enquêter sur ces plaintes permettrait de les traiter de façon bien plus efficace.

• 0945

J'ignore ce que vous en pensez, mais je n'ai pas la certitude pour ma part que le SNE a les moyens voulus pour faire enquête sur les grandes infractions criminelles de tout genre. Étant donné la structure qu'avait le SNE et la police militaire, étant donné qu'ils faisaient et font toujours partie de la chaîne de commandement, l'ingérence est toujours possible. Ces services ne sont pas aussi indépendants qu'on le voudrait, et chose certaine, leurs membres, comme je l'ai signalé, n'ont pas nécessairement la formation voulue dans tous les domaines. C'est ce que j'ai constaté quand le personnel du prévôt m'a expliqué la forme qu'allait prendre cette structure: car étant donné, si vous voulez, la petite taille des Forces canadiennes, ce service ne peut pas vraiment devenir un service d'enquête de taille.

Donc, pour ce qui concerne les agressions sexuelles et le harcèlement, si vous voulez appeler ça aussi du harcèlement criminel, il ne fait aucun doute que cela doit cesser. Depuis l'exemple d'Edmonton, même si l'on a agi rapidement, je crois que l'on a agi rapidement uniquement parce qu'on avait porté plainte à l'extérieur de la structure militaire. Si c'est le cas—et j'aimerais sûrement avoir votre avis... Si vous voyez les choses de cette façon, j'aimerais certainement savoir ce que vous en pensez.

De même, vous engagez-vous à créer un service d'enquête indépendant, qui ressemblerait davantage au bureau de l'inspecteur général, pour examiner ces allégations, passées et présentes? Je crois qu'il y a un besoin de ce côté.

Gén Maurice Baril: Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, je ne peux pas et je ne veux pas discuter de l'enquête d'Edmonton, et vous savez parfaitement bien que ce que l'on peut mentionner a déjà été rendu public et l'enquête est entre les mains du service de police d'Edmonton et celui du prévôt des Forces canadiennes.

Pour ce qui est de l'essentiel de votre commentaire et de votre question, à savoir si j'ai la conviction que nous avons des moyens d'enquête suffisants, ma réponse est oui, depuis le changement qui s'est opéré au cours de l'année dernière, également étant donné le fait que le Parlement est maintenant saisi du projet de loi C-25, et étant donné le mécanisme que nous avons aujourd'hui en place pour les enquêtes. Et le prévôt l'a certainement confirmé. C'est comme tout service de police que nous avons dans notre pays: quand un service de police ne peut pas faire enquête parce que l'ampleur de l'affaire le dépasse, il s'adresse à des organismes extérieurs pour obtenir de l'aide, qu'il s'agisse d'effectifs ou de compétences particulières.

La police militaire et le Service national des enquêtes ont été considérablement remaniés. Vous dites qu'ils font encore partie de la chaîne de commandement. Eh bien, ils font encore partie des Forces canadiennes. Leurs membres sont rémunérés par les Forces canadiennes, et comme n'importe quelle police municipale, ils relèvent de l'autorité municipale, j'imagine. Vous avez donc raison de dire que ces services font encore partie de la chaîne de commandement, oui, il s'agit encore de personnel militaire, mais ces enquêteurs ne rendent pas de comptes à la chaîne de commandement. Le Service national des enquêtes ne rend pas de comptes à la chaîne de commandement. Il ne me rend pas de comptes à moi non plus. Il ne rend aucun compte à quiconque commande les Forces canadiennes. Le prévôt adresse ses rapports—il ne rend pas de comptes, mais il adresse ses rapports—au sous-chef d'état-major de la défense, qui ne commande pas aux Forces canadiennes. C'est moi qui commande.

Donc, de ce point de vue, j'ai la conviction que le Service national des enquêtes est exempt de toute ingérence.

De même, dans le projet de loi C-25, comme vous le savez probablement, on prévoit la création de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire. Les militaires qui font objet d'une enquête pourront porter plainte contre la police militaire, et inversement—si la police militaire est témoin d'une ingérence de la part de la chaîne de commandement, elle peut aussi se plaindre à la Commission, qui se situera à l'extérieur des Forces canadiennes.

M. Art Hanger: Eh bien, j'imagine que si vous voyez là une véritable indépendance, pour ma part, je ne vois rien de la sorte, et je crois que les autres sont d'accord avec moi.

Mais étant donné que le service est établi de cette façon, vous avez sûrement droit au bénéfice du doute, mon général, vous et le prévôt qui avez l'obligation de mener tout cela à bien. Quand un général ou un officier aura des ennuis, on verra dans quelle mesure ce service sera vraiment efficace, et alors non seulement notre comité mais d'autres verront aussi si le service a mené enquête d'une façon raisonnable et si les personnes accusées sont traduites en justice comme il convient. Les faits démontrent que ce n'était pas le cas par le passé.

• 0950

Gén Maurice Baril: Comme vous le savez probablement, des accusations sont maintenant portées par l'enquêteur qui est membre du SNE, le Service national des enquêtes, ce qui était limité auparavant, et cela a changé à compter du premier nombre de l'an dernier. Donc l'enquêteur, comme tout policier civil ou gendarme, portera accusation, c'est comme ça maintenant et c'est ce qui se fait aujourd'hui.

M. Art Hanger: Il y a autre chose qui m'intrigue—il s'agit d'une autre instance, mais il s'agit encore de justice pénale, de la justice militaire—et cela concerne les services médicaux.

Je suis au courant d'une allégation de viol, viol qui aurait eu lieu dans les forces armées. Il s'agit à mon avis d'un viol très violent. On a porté plainte. La plainte a été écartée. La plaignante a voulu subir un examen médical à l'hôpital militaire—c'est-à-dire qu'elle voulait que l'examen se fasse avec un trousse d'examen pour le viol. On a refusé. Et bien sûr la plaignante—et j'ajoute qu'elle était dans les forces armées, elle était militaire—lorsqu'elle a voulu se faire entendre, y compris de ses officiers supérieurs, s'est butée à des portes closes jusqu'au moment où on l'a littéralement chassée des forces armées. Et tout cela s'est produit très peu de temps, je l'ajoute, après son enrôlement.

Le chef des Services de santé a ici la responsabilité de donner des instructions à son personnel médical. Je sais que dans les hôpitaux militaires, le personnel a à sa disposition des trousses d'examen pour le viol. J'ai beaucoup de mal à comprendre ce qui s'est passé ici. Peut-être que le chef des Services de santé n'a pas donné d'instructions claires à son personnel quant à l'utilisation de ces trousses, mais j'ai beaucoup de mal à comprendre pourquoi cela ne fait pas partie des procédures normales dans vos hôpitaux militaires.

Gén Maurice Baril: Il m'est difficile de me prononcer sur un cas très précis dont vous êtes au courant et moi non, à moins que vous nous en parliez ou à moins qu'il ne s'agisse du cas que mentionnait la revue Maclean's. Est-ce que c'était dans la revue Maclean's?

M. Art Hanger: Je n'en suis pas sûr.

Gén Maurice Baril: Nous examinons toutes ces allégations, et le prévôt rouvre toutes ses enquêtes, y compris celles dont faisait état la revue Maclean's et toutes celles qui sont signalées à mon bureau, par l'entremise de la ligne sans frais que nous avons, ou par tout autre moyen. Chaque allégation fera l'objet d'un examen méticuleux.

Dans ce cas-ci, où vous parlez de procédures, si ces trousses se trouvent entre les mains des médecins, c'est bien sûr la procédure à suivre. S'il est vrai que quelqu'un dans l'une des cliniques que nous avons au Canada a décidé de se conduire de la manière que vous dites, c'est bien sûr totalement inacceptable. J'ignore à quand remonte cet incident, mais ça demeure inexcusable. Si nous avons des motifs de faire enquête, nous ferons enquête. Quelle que soit l'enquête que nous fassions, nous irons du haut en bas de la chaîne de commandement pour savoir ce qui s'est passé.

Le président: Vous n'avez plus que quelques instants, monsieur Hanger.

M. Art Hanger: Oui, merci, monsieur le président.

Je dois signaler que ce genre d'incident n'est pas rare même au sein des Services de santé. Quand on y songe, tout d'abord, il s'agit d'une victime traumatisée dans ces circonstances qui entre à l'hôpital et qui voit des officiers supérieurs, des officiers, qu'ils l'empêchent même de porter plainte, comment allez-vous réunir la preuve qu'il faut? Pour moi, il y a quelqu'un au sein des Services de santé qui doit rendre des comptes sur cette question en particulier et toutes les autres qui feront surface.

• 0955

Gén Maurice Baril: Ce sera certainement le cas, si les enquêtes voulues sont faites et si l'on détermine que ces allégations sont fondées. Comme vous savez, on ne peut pas tout simplement aligner des gens contre le mur et les fusiller sur la foi d'allégations. Il faut avoir des preuves.

M. Art Hanger: Il ne s'agit pas de savoir si ces allégations sont fondées ou non. Le fait est qu'on a porté plainte, il y a donc une procédure à suivre... il appartient ensuite au tribunal de prendre les décisions voulues.

Le président: Merci, monsieur Hanger.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Bonjour, général. Je vous remercie de votre présentation. C'est sûr qu'elle recoupe plusieurs de mes propres préoccupations. Dans bien des cas, vous êtes tombé en plein dans le mille.

Il y a cependant des choses dont vous ne traitez pas directement, mais dont je sais qu'elles vous préoccupent, parce qu'on les aborde indirectement lorsqu'on parle de la progression latérale, par exemple, et de la rémunération en conséquence.

Je voudrais vous parler des fameux gérants de carrière. Il semble qu'il y ait dans les Forces armées des gens qui supervisent le cheminement de la carrière d'autres gens. Plusieurs militaires sont venus nous voir lors des différentes audiences qu'on a tenues un peu partout et se sont plaints de leur gérant de carrière, de leur imprésario comme je l'appelle. Ces militaires nous ont souvent dit qu'ils ne connaissaient pas leur gérant de carrière, qu'ils ne l'avaient jamais vu. Curieusement, ils n'avaient jamais vu celui qui était chargé de voir à leur cheminement et de les conseiller sur leur carrière. Tout ce qu'ils avaient entendu de leur gérant de carrière, c'était en fonction de son rôle quasi judiciaire, dirais-je. Ils se faisaient répondre des non à répétition.

Je voudrais que vous nous expliquiez le rôle du gérant de carrière dans les Forces armées et son mandat. Qui représente-t-il? Le soldat ou la direction générale de l'armée? De qui est-il le mandataire? A-t-il des budgets et est-il imputable de façon comptable à quelque service que ce soit? Il y a des aberrations qui se produisent, semble-t-il, et on nous dit: «On n'a pas d'argent pour muter Untel ou Untel de tel endroit à tel endroit.» J'aimerais vous entendre là-dessus parce que c'est une chose qui me préoccupe beaucoup. J'aimerais pouvoir présenter quelque chose là-dessus lorsqu'on va travailler en comité.

Gén Maurice Baril: Je voudrais mentionner que M. le président et plusieurs des membres du comité ont passé hier quelques heures dans les bureaux ou les labyrinthes de nos gérants de carrière.

Le gérant de carrière fait partie de l'organisme du chef du personnel des Forces canadiennes. Malheureusement, quand vous entendez quelqu'un se plaindre de son gérant de carrière, c'est parce qu'il n'est pas très heureux de la mutation qu'il a eue ou de la façon dont il a été traité. On les appelle les gérants de carrière, mais ce sont les exécuteurs des décisions qui ont été prises pour chacun des membres du personnel concernant son engagement ou le développement de sa carrière. Ce que vous avez surtout entendu, c'est à propos des mutations. Quand quelqu'un veut aller à Vancouver, on l'envoie à un autre endroit. Je pense avoir dit que, comme militaires, nous devons tous accepter que le bien et les exigences des Forces canadiennes passent devant nos besoins personnels et très souvent devant nos familles. Lorsqu'il y a des cas exceptionnels, on a des procédures pour les régler.

Vous parliez des gérants de carrière qui n'ont pas d'argent pour muter des gens. Muter des gens coûte cher. On ne peut pas commencer à muter les gens parce que leur désir est d'aller à tel ou tel endroit. C'est toujours basé sur les exigences du service.

C'est très difficile pour celui qui doit annoncer la mauvaise nouvelle. Vous n'avez jamais entendu parler des gérants de carrière qui téléphonaient un peu partout au Canada pour informer les gens qui sont promus, qui s'en vont au collège d'état-major, qui s'en vont exactement là où ils veulent aller. Vous avez seulement entendu les mauvaises histoires. Malheureusement, c'est toujours le gérant de carrière qui annonce les mauvaises nouvelles. C'est lui qui doit faire des recommandations à ceux qui ont le droit de prendre la décision. Ce sont des décisions difficiles pour les familles et pour les individus.

Les gérants de carrière ne sont pas des loose cannons qu'on a quelque part dans un édifice ici; ce sont des gens qui sont sous la chaîne de commandement, et les carrières sont gérées par la chaîne de commandement. Mais l'exécuteur à la fin, malheureusement...

M. Ghislain Lebel: Cela m'amène à vous poser une question que vous avez abordée indirectement dans votre réponse, quand vous avez dit que les mutations coûtaient cher.

• 1000

Nous avons eu des suggestions à plusieurs endroits. On nous a dit qu'au lieu de donner une affectation de trois ans, il serait peut-être préférable d'en donner une de cinq ou sept ans de façon à diminuer les coûts et à atténuer le jeu des chaises musicales. Vous en avez peut-être parlé, mais quand on parle en anglais, j'ai parfois un peu de difficulté à suivre. Je pense que vous n'en parlez pas là-dedans.

Gén Maurice Baril: On ne l'a pas mentionné parce que c'est un programme qui est en place pour stabiliser la communauté militaire et réduire les coûts. On ne peut pas commencer à faire le tour du Canada quand un déménagement coûte en moyenne 18 000 $. Cependant, comme vous pouvez le voir, la stabilisation ou les longues mutations ont leurs bons et leurs mauvais côtés. Quand un individu choisit de demeurer à un endroit ou n'aime pas un endroit, cela peut avoir un impact sur le développement de sa carrière. Mais les longues mutations deviennent longues, parce qu'il ne doit pas rester là.

Il est très difficile de plaire à tout le monde. On ne peut pas plaire à tout le monde. On en a 90 000, dont 60 000 réguliers. On est passés d'à peu près 12 000 ou 13 000 mutations par année, incluant les libérations, à environ 4 000 actuellement. Les chiffres nous disent qu'on a réduit considérablement le nombre de mutations ainsi que le montant d'argent dépensé.

M. Ghislain Lebel: Vous nous faites une suggestion à la page 7 de la version française. Vous parlez de la résidence des militaires. Je me souviens d'en avoir entendu parler. Cela me préoccupe beaucoup. Les notions de résidence et de domicile me touchent personnellement parce que je suis notaire de formation. C'est important au droit québécois.

Vous proposez ici qu'on reconnaisse dans la Loi sur la défense nationale ou dans un document juridique quelconque que le militaire québécois qui est affecté en Colombie-Britannique, par exemple, conserve sa résidence québécoise aux fins de permis de conduire ou de permis de chasse. C'est bien ce que vous suggérez?

Gén Maurice Baril: C'est exactement ce que je suggère. Dans les forces américaines, les militaires ont leur État déclaré. Le militaire, je crois, va jusqu'à payer ses taxes dans l'État qu'il déclare. C'est certainement le cas pour son permis de conduire, sa voiture et peut-être certaines autres choses.

Ici, lorsqu'on quitte le Canada pour aller en Europe, pour obtenir un permis de conduire dans un pays de l'OTAN, on doit avoir un permis de conduire canadien valable. On nous donne alors un permis de l'OTAN. Cependant, quand le permis n'est plus valable et que l'homme et la femme et même les enfants adultes veulent renouveler leur permis, ils ne sont plus résidants du Canada. Donc, on commence à tourner en rond. On ne sait plus où on va. C'est extrêmement difficile de déménager d'une province à l'autre.

Je suis revenu des États-Unis en 1995. Il fallait que je rentre dans mon pays. Je suis rentré au Québec à ce moment-là et cela a été pas mal compliqué: les permis de conduire, de chasse, de pêche, l'assurance-maladie, etc. Moins d'un an plus tard, je déménageais en Ontario. Je me disais que ce serait facile de déménager en Ontario. Mais c'est la même histoire qui recommence. C'est probablement aussi compliqué. Quand on fait cela tous les deux ou trois ans, cela coûte cher. Faire inspecter ma voiture au Québec, la faire inspecter en Ontario, changer la plaque d'immatriculation, changer les assurances, tout cela est très compliqué. Cette proposition, je pense, sera également compliquée parce qu'on devra probablement négocier avec dix provinces et deux territoires.

M. Ghislain Lebel: Il y a loin du désir au plaisir, comme vous le savez. Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Lebel.

[Traduction]

Monsieur Proud.

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): Merci, monsieur le président. Merci, mon général, d'avoir accepté de témoigner devant notre comité aujourd'hui. Il est toujours bon d'entendre le chef d'état-major.

Vous avez dit dans votre exposé que vous avez examiné tous les domaines qui ont été portés à notre attention—la qualité du logement, l'insuffisance de la solde et des avantages sociaux, l'absence de services de soutien, et même la qualité du commandement et du système de justice militaire. J'ignore comment les choses ont pu s'aggraver à ce point. Mais j'ai la certitude que c'est le cas, tout comme vous. J'ai la certitude que notre comité, et vous en votre qualité de chef d'état-major, et vos administrateurs, tous nous devrons nous assurer qu'on retourne à la normale et que tout cela ne se reproduise plus jamais. À mon avis, nous devons nous assurer d'améliorer tous les services, tant pour les forces régulières que pour les forces de réserve. C'est un élément très important.

• 1005

Depuis que nous avons entrepris notre étude, bien sûr, de nombreux changements ont été apportés. J'ignore si c'est parce que vous êtes le nouveau chef d'état-major, si c'est parce que nous avons un nouveau ministre, ou si c'est à cause de la publicité que notre comité a suscitée, mais je sais de source sûre qu'on a commencé à apporter des changements. J'espère seulement que lorsque nous soumettrons nos recommandations, celles-ci seront approuvées, comme vous dites, par le gouvernement, que vous et vos administrateurs aller prendre les moyens voulus pour les mettre oeuvre, et j'ai la certitude que vous aurez les crédits qu'il vous faut pour intervenir dans les domaines les plus criants parce que, comme le comité l'a vu au cours de ses voyages, on se trouve dans un état de détérioration avancé.

J'exigerai toujours plus d'argent pour les forces armées. J'y crois. J'ai perdu cette bataille en 1994, mais je ne lâche pas et je ne lâcherai pas tant et aussi longtemps que je siégerai à ce comité. J'ai la conviction qu'il nous faut plus de personnel, plus d'équipement et de meilleures installations, et voilà pourquoi il nous faut plus d'argent.

J'ai la conviction que nous devons avoir une armée forte et présente dans toutes les régions de notre pays. Par exemple, lorsqu'il s'agit de la restructuration des réserves, l'important, c'est le lien communautaire qu'elles ont. Je pense que cela s'applique aussi aux forces régulières. Quand les gens les voient au travail, comme ce fut le cas récemment avec les inondations, la tempête de verglas et tout le reste, ils reconnaissent la vraie valeur de notre armée.

Chez nous, à l'Île-du-Prince-Édouard, nous n'avons pas de forces régulières sur place, mais nous avons des forces de réserve. Chez nous, on connaît l'importance de l'armée. Au cours de ce siècle-ci, l'île-du-Prince-Édouard a fait plus que sa part pour l'armée.

Je ne suis pas sûr qu'elles figureront dans notre rapport, mais j'ai une très bonne idée des suggestions que je vais faire. Je veux seulement m'assurer qu'il y a en place un processus quelconque, qu'il s'agisse de notre comité ou d'un sous-comité de notre comité ou peu importe, pour vous aider à mettre en oeuvre ces recommandations. Je crois très fermement qu'il nous faut intervenir... et le gouvernement va prendre aujourd'hui un engagement concernant notre armée—un engagement positif et fort.

Tout d'abord, il me tarde de prendre connaissance des recommandations du rapport et de leur mise en oeuvre. Merci beaucoup.

Gén Maurice Baril: Je ne peux que vous dire merci, monsieur.

Le président: Merci.

Monsieur Pratt.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Merci, monsieur le président.

Mon général, je tiens à réitérer ce qu'on dit certains de mes collègues relativement à votre excellent exposé. Il est évident que vous écoutez et que vous observez ce qui se passe au comité. Comme l'a dit M. Pratt, nous sommes tous acquis à l'idée d'un accroissement des crédits pour les Forces canadiennes. Je dirai à titre personnel que les cinq derniers mois m'ont appris énormément, ayant visité des bases et parlé au personnel des Forces canadiennes.

Ayant causé avec des militaires, ce qui me préoccupe entre autres, ce sont les attentes que notre comité a suscitées. Chose certaine, vous êtes dans l'armée et à Ottawa depuis assez longtemps pour savoir comment le système marche. Je me demande seulement si, aux termes des audiences du comité, nous n'aurons pas suscité des attentes que nous ne pourrons pas combler.

Puis-je savoir ce que vous en pensez? Il se peut que l'on se retrouve dans une situation pire, en ce qui concerne le moral, que celle que nous avions avant d'entreprendre ce processus si le gouvernement n'a pas les crédits voulus pour mettre en oeuvre les recommandations du comité.

Gén Maurice Baril: Il est sûr que le risque est là, mais je crois beaucoup dans mon pays, dans mon gouvernement et dans vous tous. J'ai la conviction qu'on fera ce qu'il faut faire. C'est comme ça qu'on a fait par le passé pour obtenir des crédits et le personnel supplémentaires, l'argent vient du centre. Je pense que je peux dire ça.

• 1010

Si l'on nous demandait de hausser la qualité de la vie des militaires au niveau que nous tous et mon état-major jugeons approprié, en nous contentant des crédits que nous trouverions à l'intérieur du ministère de la Défense, il nous faudrait songer sérieusement à ce que nous pouvons faire, et avec quoi, à l'intérieur des Forces canadiennes.

Mais oui, il y a plus d'un an qu'on suscite des attentes à l'intérieur des Forces canadiennes, et on a offert aux militaires une tribune pour dire ce qu'ils pensaient. Ce que vous avez entendu, c'était la vérité. Il s'agissait dans certains cas d'une vérité améliorée, à ce moment-là, si l'on en croit des témoignages très personnels, mais cela importe peu; je pense qu'on a pu faire état de faits essentiels avec beaucoup d'émotion. Les hommes et les femmes des Forces canadiennes nous observent et attendent de voir ce qui va se passer. Leurs regards sont fixés sur nous et le gouvernement.

M. David Pratt: Dans la même veine, monsieur le président, le personnel d'état-major a-t-il pu, à l'heure où nous nous parlons, établir le coût de la mise en oeuvre de certaines de nos recommandations?

Je sais qu'une foule d'hypothèses interviennent ici parce que vous ne savez pas exactement ce que nous allons recommander, mais vous nous avez écoutés avec suffisamment d'attention pour savoir quels sont les problèmes. Est-ce qu'on a essayé de mettre un prix à tout cela, et pouvez-vous dire au comité s'il y a eu des discussions à ce sujet au niveau ministériel, ou même au niveau des ministres, quant à cela, responsables de la Défense nationale et du Conseil du Trésor?

Gén Maurice Baril: Nous avons en place aujourd'hui une équipe de projets pas mal solide—et c'est une équipe de projets dont la tâche est à peu près équivalente au processus des grands projets d'acquisition de l'État—pour nous préparer en vue de la publication de votre rapport, pour collaborer avec votre équipe de recherche chaque fois que c'est nécessaire, et aussi pour mettre en place les éléments du projet de qualité de la vie qui relèveront de notre compétence et qui répondront à nos ressources. Je peux mettre un prix à cela; on a estimé qu'il fallait environ 57 millions de dollars, à l'intérieur de nos ressources, et ça, c'est après qu'on a fouillé dans tous les tiroirs pour trouver de l'argent, comme je l'ai dit. Pour ça, nous avons établi un prix.

En réponse à votre question, tout ce que je peux vous dire, c'est que notre équipe et nos experts sont sûrement aptes et disposés à travailler avec votre équipe de recherche pour mettre un prix à tout cela dès que possible. Mais oui, nous sommes en contact avec le Conseil du Trésor. Nous avons même détaché un membre de notre personnel au Conseil du Trésor parce qu'il s'agit d'un projet de grande envergure pour nous.

M. David Pratt: C'est le cas, mais puis-je vous demander—pour employer une expression militaire—si vous avez réussi à «faciliter le débarquement» au Conseil du Trésor?

Gén Maurice Baril: Je ne sais pas.

M. David Pratt: Monsieur le président, ai-je le temps de poser une autre question?

Le président: Vous avez 40 secondes.

M. David Pratt: Il se peut que la réponse prenne plus de temps que la question.

Mon général, vous avez parlé de la couverture que les médias donnent des Forces canadiennes, et j'ai cru entendre une sorte de cri du coeur pour les Forces canadiennes étant donné la manière dont les médias les traitent. Je sais que c'est un sujet délicat même dans les meilleurs moments, mais voulez-vous nous en parler un peu plus?

Gén Maurice Baril: Non, mais je vais le faire.

Personne n'aime être malmené sur la page couverture d'une grande revue ou dans les manchettes d'un grand journal de notre pays, mais c'est comme ça aujourd'hui. Il y a une bonne part de tout cela qui est de notre faute, il faut donc en prendre notre parti.

Chose certaine, comme toute autre organisation, nous aimerions que le pays ait une vue équilibrée de ce que nous faisons, mais malheureusement, ce n'est pas comme ça que les médias fonctionnent. Mais nous devons vivre avec cela; nous devons vivre dans une transparence absolue, qu'on soit à l'étranger ou chez nous.

Chose certaine, dans le bon vieux temps, lorsque nous allions à l'étranger, nous revenions et c'était terminé. Mais maintenant, quoi que nous fassions, et quoi que fassent mes soldats, cela passe toujours au petit écran, dans le salon de ma belle-mère, instantanément, et dans le salon des femmes, des maris et des enfants. Ils savent exactement ce que nous faisons.

• 1015

Donc toute cette attention médiatique a une incidence sur la famille et le niveau de stress de la famille, ce qui est très difficile. Comme je l'ai dit plus tôt, les bons éléments sont en grand nombre dans l'armée, et quand on lit en manchette: «Le viol est répandu dans les Forces canadiennes», il y a beaucoup de gens qui n'aiment pas être mis dans le même sac que les autres.

Mais c'est comme ça que ça marche aujourd'hui, et je pense que nous avons le mécanisme voulu, non pas pour contrer cela, mais pour nous assurer que notre image est aussi nette que possible. C'est ce que le pays exige de nous, et c'est ce que nous allons faire.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Axworthy.

M. Chris Axworthy (Saskatoon—Rosetown—Biggar, NPD): Merci beaucoup.

Toutes mes excuses pour mon retard, mais j'ai pu lire ce qu'il fallait pour me rattraper.

Je tiens à vous remercier pour votre franchise et pour votre rapport exhaustif. Vous avez plaidé en faveur de l'accroissement des ressources de votre personnel. Je pense que les Canadiens et tous les députés fédéraux seront d'accord avec cela à la condition, à mon avis, que vous puissiez nous convaincre, nous et les Canadiens, que ces crédits seront bien dépensés et que les problèmes importants qui ont été dégagés au sein des forces armées seront réglés. Je pense que vous pouvez compter sur notre soutien au cours de ce processus.

Vous dites qu'on examine toutes vos actions à la loupe, et que vous vous retrouvez même dans le salon de votre belle-mère—elles sont généralement nos juges les plus impitoyables, j'imagine—et vous préféreriez probablement qu'elle ne regarde pas la télévision quand on y discute de certaines choses.

Je veux reprendre une question précise qu'on a posée au sujet d'un examen indépendant de la conduite des forces armées, et j'aimerais ensuite passer à une question plus générale.

Vous dites que vous êtes heureux des mesures que prévoit le projet de loi C-25, qui rendront le processus un peu plus indépendant. Permettez-moi de vous poser une question précise au sujet du sergent Nela Odarijew, une des personnes mentionnées dans l'article du Maclean's. Comme vous le savez, elle allègue, entre autres choses, qu'elle a été harcelée. La Commission canadienne des droits de la personne lui a donné gain de cause et a demandé que la question soit résolue plus concrètement qu'elle ne l'a été par le passé.

N'est-il pas vrai que votre hésitation à montrer plus d'ouverture, à tenir davantage d'enquêtes indépendantes sur ce qui va mal, tient au fait que les gens de l'extérieur ont tendance à être plus critiques, comme le montre ici l'exemple de la Commission canadienne des droits de la personne, plus critiques que vos intervenants à l'interne?

Gén Maurice Baril: Non. Je pense qu'on nous a donné les outils et les moyens qu'il faut pour procéder aux enquêtes internes. Comme je l'ai dit auparavant, chose certaine, comme tout autre service ou toute grande organisation ou tout autre service de police, lorsque l'ampleur de l'enquête—sa taille, sa complexité ou le nombre d'enquêtes—dépasse nos moyens, nous, comme tout le monde, nous nous tournons vers l'extérieur et nous demandons de l'aide. Nous sommes parfaitement disposés à le faire.

Vous mentionnez un cas qui, je le crois, a été soulevé dans la revue Maclean's. Il a été soulevé à quelques reprises. Permettez-moi de faire le point sur tout cela parce que le prévôt et le ministre ont déclaré qu'on examinerait toutes ces allégations. Nous prenons au sérieux les informations que l'on retrouve dans les deux numéros de Maclean's.

Un examen minutieux de ces enquêtes et de ces informations a été mené par le prévôt des Forces canadiennes, et on a identifié 26 cas. Pour ces 26 cas, on a pris les mesures que voici.

Deux enquêtes seront réouvertes. Deux enquêtes nécessiteront un plus ample examen des mesures prises par le passé. Quinze cas sont considérés comme de nouvelles allégations et feront l'objet d'une enquête qui sera menée par le service national d'enquête. On a déterminé qu'un examen complet avait été effectué dans trois cas, et par conséquent, aucune mesure nouvelle ne sera prise. Il n'y a donc que trois affaires sur 26 que le prévôt des Forces canadiennes a jugé classées. Toutes les autres font l'objet d'un examen.

M. Chris Axworthy: Le fait est que la Commission canadienne des droits de la personne a proposé des mesures; vous n'étiez pas d'accord avec la Commission, et en conséquence, aucune mesure n'a été prise. Je crois que c'est ce genre de choses qui soulèvent de sérieux doutes parmi les Canadiens. Chose certaine, vous avez entendu ces doutes s'exprimer à la Chambre. Les rapports de presse d'hier soir faisant état d'un viol plus récent révèlent à mon avis l'existence de problèmes de taille.

• 1020

Gén Maurice Baril: Vous venez de mentionner «un viol plus récent». Avez-vous fait enquête sur ce cas-là? Est-ce que quelqu'un a dit quelque chose du genre? On a parlé d'agression sexuelle, et je ne crois pas qu'il convienne de préjuger de l'issue de l'enquête à ce moment-ci.

M. Chris Axworthy: J'ai dit qu'on avait fait des allégations dans les médias hier soir.

Gén Maurice Baril: Je pense qu'on a parlé d'agression sexuelle, et non de viol.

M. Chris Axworthy: J'aimerais poser une question plus générale. Jouissez-vous du soutien entier du personnel des forces armées?

Gén Maurice Baril: Oui.

M. Chris Axworthy: Comment le savez-vous?

Gén Maurice Baril: Vous me demandez ce que je pense, et je vous donne la réponse, aussi froidement que je peux. Il est d'ailleurs très difficile de répondre à une telle question. J'ai 90 000 personnes sous mes ordres dans les trois armes. Quant à savoir si toutes ces personnes ici présentes me soutiennent—et je crois que c'est le cas...

M. Chris Axworthy: Eux, oui.

Gén Maurice Baril: Je pense que tous ceux qui relèvent de leur commandement les soutiennent. Si on va jusqu'au bas de la chaîne, alors...

J'ignore quelle est ma cote de popularité. Je n'ai pas la moindre idée de ce qu'elle peut être aujourd'hui. Ce n'est pas comme cela que ça marche dans les forces armées.

M. Chris Axworthy: Je sais que ce n'est pas comme cela que ça marche dans les forces armées, mais nous avons entendu, et nous continuons d'entendre, de sérieuses préoccupations exprimées par les simples militaires. Si vous n'êtes pas sûr—et peut-être n'avez-vous aucun mécanisme qui vous permette de vous en assurer, de jouir du soutien entier de votre personnel, je vais vous faire une suggestion. Seriez-vous disposer à tenir un plébiscite au sein des forces armées pour voir si on vous appuie?

Gén Maurice Baril: Vous plaisantez?

M. Chris Axworthy: Non, je ne plaisante pas.

Gén Maurice Baril: Je suis soldat, j'ai été nommé chef de l'armée par le gouvernement du Canada. Vous voulez que je me conduise comme un politicien alors que je suis à la tête des Forces canadiennes?

M. Chris Axworthy: Je veux m'assurer que vous avez le soutien de vos forces armées, et je doute fort que ce soit le cas dans un grand nombre de ces dossiers.

Gén Maurice Baril: C'est votre opinion. Merci beaucoup.

L'adjudant-chef Guy Parent (ministère de la Défense nationale): J'aimerais ajouter un mot à ce sujet.

Gén Maurice Baril: Oui, demandons à l'adjudant-chef des Forces canadiennes d'ajouter un mot.

Adjuc Guy Parent: En fait, je représente 47 000 militaires du rang et je suis le conseiller principal du général Baril. Je suis en contact par le biais d'un réseau de communication avec tous les adjudants-chefs. Je peux vous confirmer que tout l'état-major, y compris le général Baril, jouit du soutien de la majorité des militaires, certainement des militaires du rang.

Il est évident qu'il y a toujours des mécontents. C'est comme ça dans toutes les organisations. Il reste que rien ne nous indique que l'état-major actuel est contesté par les militaires du rang.

M. Chris Axworthy: Mais vous ne pouvez pas en être certain.

Adjuc Guy Parent: J'en ai la certitude tous les jours. L'année dernière j'ai dû probablement parler à 20 000 militaires pendant mes tournées. Je suis constamment sur la route.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, j'ai pour principale fonction de conseiller l'état-major tout comme c'est la responsabilité de mes collègues dans mon équipe de réseau. Nous sommes constamment sur la route pour enquêter sur le moral, discuter des politiques, du commandement, de l'instruction, pour informer les militaires. C'est notre tâche quotidienne.

Il y a toujours des gens qui n'aiment pas le changement, mais c'est une minorité. Nous avons entièrement confiance dans nos chefs actuels.

M. Chris Axworthy: Si je demandais à mon personnel s'il m'aime, il me répondrait aussi oui.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Axworthy.

Monsieur Benoit.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Merci, monsieur le président. Bonjour, messieurs.

Général, je vous remercie de votre exposé. Il est excellent. Vous avez vraiment bien résumé la situation.

Le président: Monsieur Benoit, je me permets de vous rappeler que désormais les tours sont de cinq minutes.

M. Leon Benoit: Oui. Je sais. Il est évident que vous avez bien compris la situation.

Or, je vous avais déjà fait ce compliment lors de votre dernière comparution. Je vous avais félicité de l'excellence de votre rapport. Cette fois-là je vous avais parlé du cas particulier du caporal-chef Dolhan qui s'était blessé lors d'un saut en parachute. Vous m'aviez assuré de vous occuper personnellement de son cas.

Je suis resté en contact avec M. et Mme Dolhan, et lors de notre dernier échange téléphonique—en fait, avant-hier—ils m'ont indiqué que la situation n'évoluait pas bien du tout. En fait, rien n'est réglé. Tout ce qu'ils demandent, comme je l'ai dit l'autre fois, c'est une petite assistance au niveau du remboursement des déplacements, demande qui a fini par être acceptée, et une petite aide au niveau de la garde de leur enfant pendant que Mme Dolhan accompagne son mari à l'hôpital.

• 1025

Ils m'ont dit qu'au moins à trois reprises, je crois, M. Dolhan a été fortement «encouragé»—et c'est un euphémisme—à signer une déclaration sur les circonstances de sa blessure. La première fois c'était à l'hôpital. Il était à l'hôpital, gravement blessé, sur le dos et soumis à de fortes pressions pour signer. La dernière fois c'était au début de cette semaine et il est toujours sous forte médication.

Je m'inquiète. C'est bien joli de nous présenter un beau rapport, comme vous venez de le faire, mais lors de notre dernière réunion—je ne me souviens pas à quand elle remonte exactement, il y a peut-être un mois et demi, je suppose—vous nous aviez assurés que ce cas serait réglé. Il ne l'a pas été. Il y a une énorme différence entre vos promesses et la réalité et je trouve cela fort inquiétant.

Général, j'aimerais simplement vous demander si vous avez suivi ce dossier et si vous estimez qu'il a évolué normalement. Dans ce cas particulier, vous vous êtes engagé publiquement devant notre comité à vous occuper de ce dossier et pourtant les résultats se font toujours attendre. Qu'est-ce que ce doit être lorsqu'il s'agit d'autres cas de militaires blessés qui ne bénéficient pas de ce genre d'attention?

Gén Maurice Baril: J'ai suivi ce dossier et je ne suis pas du tout content de son traitement.

Monsieur Benoit, je tiens pour acquis que vous et moi avons à coeur le bien-être de cette famille. Nous pourrions discuter de cette question, ici, en public, avec les notes que j'ai en ma possession et je pourrais vous rapporter les discussions que j'ai eues avec le commandant de la base et le commandant de l'unité, mais je suggérerais, si vous et moi avons à coeur le bien-être de cette famille, que nous prenions cinq minutes après cette réunion publique pour essayer d'y voir un peu plus clair.

Monsieur Benoit, cette famille se trouve dans des circonstances très difficiles. Elle est prise entre le feu des médias, sur le plan politique et celui des militaires. Je crois que nous voulons tous aider cette famille mais les circonstances sont extrêmement complexes. Il est impossible de régler correctement la question ici maintenant.

Je préférerais donc que nous procédions différemment mais pour répondre à votre question, je vous assure que j'ai suivi personnellement ce dossier.

M. Leon Benoit: Je vous remercie de votre offre. J'en prends acte. Je vous en sais vraiment gré, général.

À propos de ma deuxième question, je trouve intéressant que deux libéraux aient exprimé la nécessité d'augmenter le budget des militaires. Cependant, je trouve gênant que nous ne sachions pas exactement comment le budget actuel est dépensé. Il n'y a pas de comptes rendus. Il est beaucoup trop difficile de déterminer exactement comment ce budget est dépensé. Je ne crois pas qu'on ait encore identifié le gaspillage.

Je conviens que, tout compte fait, il faudra accroître ce budget, pour augmenter en particulier la solde et acheter certains équipements, mais il nous faut commencer par déterminer où se situe le gaspillage. C'est un problème qu'il faut absolument régler.

Pour ce qui est de la question fondamentale des uniformes, le ministre m'a assuré lors de la période des questions—j'évoquais le problème des uniformes de combat et de leur distribution pour que le groupe suivant soit correctement vêtu—que nos soldats ne retourneraient jamais outre-mer sans avoir au minimum des uniformes de combat dignes de ce nom et l'équipement personnel de base indispensable.

Pensez-vous que c'est le cas actuellement, que les hommes et les femmes de nos forces armées qui se trouvent en Bosnie sont correctement vêtus et ont le bon équipement personnel, qu'ils ont enfin ce minimum indispensable?

Gén Maurice Baril: Je vous répondrai que oui—et vous me citerez probablement quatre ou cinq exemples que vous avez entendus il y a deux semaines qui semblent vous indiquer le contraire dans le cas du soldat Tremblay ou du soldat Jones, qu'il n'a pas ses cinq tenues de combat ou qu'il lui manque autre chose. Il reste que oui, c'est l'équipement qui a la priorité, non seulement les vêtements mais tout ce qui va avec... Bien entendu, c'est la priorité de ceux qui préparent ces équipements et de ceux qui s'en servent.

M. Leon Benoit: Il ne s'agit pas seulement de cinq cas isolés.

Lorsque nous nous sommes rendus en Bosnie, nous avons tenu une audience publique à Velika Kladusa. Il y avait peut-être 200 personnes. Je ne connais pas le chiffre exact, mais l'audience était assez importante. Deux ou trois personnes s'étaient déjà plaintes quand j'ai demandé au groupe d'indiquer en levant la main combien d'entre eux avaient vraiment un problème avec leurs uniformes de combat. L'une se plaignait que le sien était usé. D'autres se plaignaient de ne pas pouvoir trouver d'uniformes à leur taille. Ensuite ils nous ont parlé des sacs à dos qui sont un tout autre problème.

J'ai demandé à ces hommes et ces femmes d'indiquer à main levée combien d'entre eux avaient reçu des uniformes inacceptables ou avaient entendu parler de cas semblables. Une majorité des personnes présentes a levé la main. J'en ai été très impressionné. Ce sont là des hommes et des femmes qu'on envoie à l'étranger pour servir le Canada, ils le servent bien et ils ne devraient pas se retrouver dans ce genre de situation.

• 1030

Il y a d'autres sujets du même genre que j'aimerais aborder plus tard, mais je voudrais vous demander de répondre à cette première question si vous le pouvez.

Gén Maurice Baril: Il est très difficile de répondre à une telle question si vous vous êtes contenté de compter le nombre de mains levées et si celui qui aurait dû recevoir une tenue de combat de taille 36 en a reçu une de taille 34 ou 37, ou s'il est mécontent du pli parce que le vêtement est trop vieux...

M. Leon Benoit: Non. Ces militaires ne se plaignaient pas pour rien. Sauf votre respect, ces hommes et ces femmes ne se plaignaient pas pour des vétilles. Je n'ai pas eu l'impression d'avoir affaire à une bande de rouspéteurs. Loin d'eux le plaisir de se plaindre à qui que ce soit et ils ont pourtant été amenés à se plaindre malgré eux. Ils trouvaient la situation suffisamment urgente pour se sentir obligés de lever la main et dénoncer un problème sérieux posé par les uniformes de combat.

Gén Maurice Baril: Je ne suis pas d'accord avec vous lorsque vous dites qu'il s'agit là d'un sérieux problème. Nous avons un problème de distribution et de remplacement. Nous sommes en train de consacrer 170 millions de dollars aux vêtements, à l'équipement, au système de transport, aux gilets pare-éclats et aux articles de ce genre pour nous doter d'un matériel à la fine pointe... Nous avons actuellement un matériel assez désuet, que nous avons acquis vers 1965. Mais...

M. Leon Benoit: Mais les vêtements du soldat...

Le président: Monsieur Benoit...

M. Leon Benoit: ... le programme des uniformes est en place depuis deux ans. L'annonce de programme remonte à deux ans. Il a accaparé beaucoup d'argent. Est-ce qu'il faut deux ans pour doter nos militaires, hommes et femmes, envoyés à l'étranger, de l'équipement personnel de base? Ce n'est pas acceptable.

Gén Maurice Baril: Je suis d'accord, c'est trop long.

Le président: Merci, monsieur Benoit.

Monsieur Richardson.

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Merci, monsieur le président.

À ce sujet, je voudrais inviter M. Benoit à une rencontre jeudi prochain où il pourra examiner l'équipement envisagé pour les militaires des Forces armées canadiennes. La réunion est prévue pour jeudi prochain et vous en serez avertis en temps utile.

Cela étant dit, général Baril, je voudrais, par votre intermédiaire, remercier tous les membres des Forces armées canadiennes qui ont préparé les rencontres avec le comité dans tout le Canada ainsi qu'en Bosnie, de même que les réunions organisées à Ottawa avec le personnel du quartier général de la Défense nationale. Nous avons été magnifiquement reçus et logés dans les meilleures conditions. Je vous en remercie.

J'ai été très impressionné lorsque j'ai eu hier l'occasion de m'entretenir avec des gestionnaires de carrière. Nous étions tous invités à assister à cette réunion, mais tout le monde n'est pas venu.

J'ai été très heureux de voir les réactions rapides des responsables, en particulier du côté médical, lorsque dans l'ensemble du pays, les militaires se sont plaints des retards et de la qualité des soins. Je pense que les responsables méritent des félicitations pour la rapidité de leur réaction; ils ont pu régler les problèmes en quelques jours ou quelques semaines, et non pas en plusieurs mois. Cela m'a semblé très révélateur de la souplesse et de la capacité de réaction de l'équipe des gestionnaires de carrière.

Ce comité a suscité énormément d'attentes parmi les militaires et tous les membres du comité, même ceux qui expriment certaines préoccupations au cours de la présente séance, savent que nous devons absolument répondre à ces attentes.

Ils savent que nous avons besoin de l'appui de tous les parlementaires et en particulier des membres du cabinet, pour présenter un plan bien agencé qui réponde aux besoins définis par ce comité et par vous-même, de façon que nous puissions aborder le prochain millénaire avec une armée qui soit non seulement préparée mentalement mais qui dispose aussi du matériel indispensable.

• 1035

Voilà le résultat que j'espère, mais il va falloir encore y travailler, notamment au niveau du ministre, pour obtenir certains appuis décisifs. J'apprécie beaucoup le travail de nos amis de l'opposition, qui ont manifesté un véritable intérêt pour la question et qui ont voulu agir positivement en faveur des forces armées, comme nous l'avons fait du côté gouvernemental.

En fait, je n'ai pas posé de question. Je voulais simplement rendre hommage à vous-même et aux membres des forces armées. Merci.

Le président: Merci, monsieur Richardson.

Chers collègues, je voudrais vous signaler qu'il y a un vote, qu'on entend ici la sonnerie des 30 minutes, ce qui devrait signifier que le vote aura lieu à 11 h 05; nous pouvons donc poursuivre la séance jusqu'à 10 h 50.

Monsieur Hanger, vous avez cinq minutes.

M. Art Hanger: Merci, monsieur le président.

Général, je suis heureux de voir que vous abordez certains sujets concernant le logement dans votre rapport sur la rémunération, les avantages sociaux et le logement. Évidemment, il semble que tous les logements militaires aient besoin de... Je ne sais pas s'il s'agit d'un problème de remplacement, de surveillance ou d'autre chose, mais de toute évidence, il va falloir reconstruire dans certains secteurs où l'on trouve des maisons qui sont considérées comme condamnées ou bien inférieures à la norme.

Le comité a eu la chance de recevoir des témoins qui représentent l'armée des États-Unis et qui étaient spécialistes du domaine social. Nous avons remarqué avec intérêt que leur allocation de logement, dans le cadre de la formule des services accordés au personnel habitant dans les bases, est de zéro, mais qu'il en va de même du loyer. Ils ne paient pas de loyer. Ils reçoivent une solde de base, mais ils n'ont aucun déboursé en matière de loyer. Tant qu'ils occupent un logement militaire, ils peuvent y vivre gratuitement.

La grande différence entre le Canada et les États-Unis, c'est que le commandant de la base américaine a les pleins pouvoirs en ce qui concerne les réparations, l'entretien et tout le reste, par opposition à une agence comme celle que nous avons dans notre pays. Les problèmes se posent dès que le commandant de la base n'a pas les pleins pouvoirs.

Plusieurs commandants de base nous ont dit avoir l'impression de perdre leur autorité sur tout ce qui se passe dans leur base. En un sens, une base ressemble à une petite ville, mais les commandants n'ont pas les pouvoirs qu'il faudrait pour résoudre les problèmes immédiats qui donnent des exemples très irritants dont nous avons entendu parler à propos de l'agence de logement.

J'aimerais avoir votre opinion sincère concernant cette agence. Est-ce qu'il en faut vraiment une? Est-ce qu'il ne faudrait pas redonner au commandant de la base les pouvoirs en matière de logement?

La deuxième chose que je voudrais signaler, c'est que les militaires américains reçoivent, en plus de leur solde de base, une allocation de logement qu'ils peuvent consacrer à un loyer ou à l'achat d'une maison et qui se monte à 700 $; il s'agit d'une allocation variable en fonction de leur grade, de leur région d'origine ou de la région d'affectation. Ce montant variable est indexé sur le coût de la vie dans la région d'affectation et s'ajoute à la solde de base; il n'est pas imposable.

C'est là un avantage important. Ici, nous avons des logements de qualité inférieure, dont le loyer est fixé selon les critères de la SCHL et qui ne tient pas compte du coût de la vie dans la région. Les militaires reçoivent une allocation de logement appelée triple A qui peut varier selon différents éléments, mais qui est récupérée par l'impôt. En un sens, les militaires n'en profitent pas vraiment. C'est de l'argent qui ressort de leurs poches plutôt que d'y entrer.

Je voudrais donc vous demander ce que vous pensez de la formule à l'américaine pour nos militaires. Pensez-vous qu'elle soit applicable ici? Sinon, quelle serait la meilleure formule?

• 1040

Gén Maurice Baril: Je vais d'abord répondre à la deuxième question.

Je suis très heureux que vous ayez reçu des militaires américains de haut rang. Évidemment, nous nous sommes entretenus avec eux avant et après leur comparution; ils ont passé toute la journée avec des militaires canadiens et ont envisagé les options que vous avez mentionnées. Leur formule de rémunération et d'avantages sociaux est très différente de la nôtre. À certains égards, elle est plus généreuse, mais à d'autres, elle l'est moins. Dans l'ensemble, les militaires américains sont mieux lotis que les militaires canadiens, mais je ne sais pas si c'était vrai il y a 15 ans.

Pour en revenir à la première question, vous proposez un retour à une formule antérieure. À l'époque, le logement était confié aux différents commandements de la base et si les maisons ont actuellement des cuisines vieilles de 30 ans, c'est à cause de la façon dont les choses se passaient à l'époque. Nous n'avons pas pu consacrer de crédits au poste du logement. Nous avons consacré tout notre budget aux navires, aux avions et aux blindés. Nous n'avons pas réparé les logements familiaux. À l'époque, c'est nous qui nous occupions du logement et le haut commandement de l'armée a choisi de consacrer tout son budget à la formation, aux bottes de combat et à tout le reste, les logements familiaux devant être entretenus d'une façon qui, à l'époque, il y a 8, 10 ou 15 ans, a été jugée acceptable.

Sur les indications du Conseil du Trésor, on nous a conseillés de céder le domaine du logement à une agence. Comme l'a dit ici même le PDG de l'agence de logement, il n'a pas ses coudées franches. Nous lui avons confié un grand nombre de maisons, environ 20 000, et nous avons limité sa liberté d'action. Il doit gérer le projet grâce aux revenus locatifs, qui ne sont pas suffisants.

Nous avons résolument opté pour la formule de l'agence de location, mais il faudrait la rendre beaucoup plus efficace et adapter les lignes directrices du Conseil du Trésor à ses exigences.

M. Art Hanger: On ne pourra pas résoudre le problème de l'entretien...

Le président: Excusez-moi, je dois vous couper la parole. Nous avons deux autres députés qui veulent poser des questions, M. Clouthier et M. Lebel.

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): Bonjour, général Baril.

La première fois que vous avez comparu devant nous, j'ai été impressionné par votre franchise et votre dévouement. Plus encore, j'ai été impressionné par votre conception de l'armée canadienne. Laissez-moi vous dire d'emblée que jusqu'à maintenant, vous ne m'avez pas déçu. Vous avez dit que vous étiez impatient et je vous ai dit que ce poste exigeait effectivement un homme impatient.

Pour reprendre certaines remarques de mes collègues, je dirais que mon collègue, M. Axworthy, considère qu'il faudrait organiser un plébiscite sur votre leadership et sur celui de l'armée canadienne. Je dois vous dire, général, et dire publiquement, qu'il ne me plairait pas que tout le monde soit de votre côté. Il y aura toujours, parmi vos subordonnés, des gens qui ne seront pas d'accord avec vous. Je trouverais très inquiétant que tout le monde soit d'accord avec vous. Vous avez une mission à remplir et vous la remplissez parfaitement, quitte à faire parfois quelques étincelles.

En ce qui concerne la remarque de mon collègue M. Benoit concernant l'équipement que touche chaque militaire, je ne voudrais pas passer pour l'écolier qui raconte des histoires d'école, mais lorsque nous étions à Velika Kladusa, nous avons touché un équipement et, croyez-le ou non, mais pour un beau spécimen comme M. Benoit, il a été très difficile de trouver un équipement à sa taille, en particulier pour le casque. Et j'ai des photos pour le prouver.

Des voix: Oh, oh!

M. Hec Clouthier: Nous avons des photos de ce casque. Ce fut toute une histoire.

Mes questions sont doubles, en fait,

[Français]

parce que que mon ami M. Lebel s'intéresse beaucoup au

[Traduction]

cours de formation linguistique. Nous avons entendu dire que les cours de formation linguistique en anglais et en français suscitent des difficultés dans certaines bases, en particulier celles de l'armée de terre, et que la situation est un peu meilleure dans l'armée de l'air. J'aimerais avoir votre avis à ce sujet.

Deuxièmement, si vous avez le temps, à propos des promotions, j'ai été très surpris l'autre jour d'entendre une jeune femme prendre la parole à l'édifice Lorne et dire que les promotions des militaires dans l'armée dépendaient des gestionnaires de carrière.

Pourriez-vous répondre brièvement à ces deux questions, s'il vous plaît?

Gén Maurice Baril: Chez nous, la formation linguistique ressemble à ce qu'elle est dans la fonction publique du Canada; elle n'est pas parfaite. C'est un programme très vaste couvrant l'ensemble du pays. Il est exécuté au niveau national, au niveau des commandements et au niveau des bases. J'ai dû beaucoup m'y intéresser pendant toute ma carrière, et je reconnais qu'il n'est pas parfait. On rencontre des difficultés ici ou là et certaines personnes sont mutées, mais je pense que le programme est satisfaisant à l'heure actuelle.

Ce n'est pas simplement une question de formation; c'est tout un état d'esprit qu'il faut mettre en place pour obtenir une armée bilingue dès qu'on dépasse un certain niveau dans la hiérarchie. C'est aussi un élément pris en compte dans la progression de carrière. Certains militaires estiment que si leur formation linguistique n'est pas suffisamment bonne, elle va nuire à leurs perspectives de promotion. C'est donc un sujet controversé, mais je pense que nous avons la situation bien en main.

• 1045

En ce qui concerne la question sur les promotions, comme je l'ai dit à ce député, les gestionnaires de carrière exécutent les décisions et n'ordonnent pas de promotions eux-mêmes. Les militaires sont promus par un conseil de promotion qui se tient chaque année en septembre et octobre, et tous les militaires promus, du simple soldat au caporal—en fait, le simple soldat accède automatiquement au rang de caporal au bout de quatre ans—mais il existe un conseil spécial de promotion pour les promotions accélérées jusqu'au rang de général à trois étoiles. C'est le conseil qui décide des promotions, et les gestionnaires de carrière ne font qu'exécuter les décisions.

M. Hec Clouthier: De qui se compose ce conseil, général? Est-ce que vous le savez?

Gén Maurice Baril: Cela dépend du grade envisagé par le conseil de promotion. S'il s'agit de passer de caporal-chef à sergent, par exemple, le conseil se compose d'officiers et de sous-officiers, et si c'est une promotion d'une étoile à deux étoiles, le conseil se compose de tous les généraux à trois étoiles et est présidé par moi-même.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Lebel.

[Français]

M. Ghislain Lebel: Général, ce n'était pas le sens de mon intervention et je ne voudrais pas que vous partiez d'ici en ayant des doutes sur votre leadership. Je vous dis qu'on a patrouillé le Canada presque entier. On a entendu des plaintes sur l'équipement, notamment sur les camions Western Star de la part de vos mécaniciens, mais pas sur votre leadership et sur le fait qu'on vous accepte ou pas au sein des Forces armées. Pour rassurer mon collègue, je dirai que vous êtes bien en place. Je tenais à vous le dire.

Vous faisiez état de la bonne foi de nos militaires. Vous disiez que le travail militaire était une vocation. Je voudrais vous dire et dire aussi aux membres de mon comité qu'en me déplaçant, j'interrogeais des militaires. Je me souviens qu'à Trenton, pour tester un peu l'attitude de chacun, je disais: J'ai une masse salariale, une masse monétaire; ou bien je l'applique à l'équipement, ou bien je vous la donne en salaire; qu'est-ce que vous préférez? Je m'attendais à ce qu'on on me dise: «Eh bien, nous préférons que vous nous la donniez.» Ayant travaillé dans l'industrie, je peux vous dire que si la compagnie minière pour laquelle je travaillais nous avait fait une proposition semblable, on aurait dit: «Au diable les tracteurs, au diable l'équipement. Donne-nous cela en salaire.» La réponse des membres des Forces armées m'a surpris. On m'a dit: «On tient à travailler avec de l'équipement sécuritaire, de l'équipement qui soit de la meilleure qualité possible. Bien sûr, on revendique un salaire un peu plus élevé, mais on ne veut pas la part du loup. On reconnaît qu'on a un travail professionnel à faire et que l'équipement doit être professionnel aussi.» Je peux vous dire que la réponse a été professionnelle.

Donc, je souscris à ce que vous avez écrit là. Soyez assuré que moi et les autres membres de ce comité allons essayer de pousser dans le même sens que vous. Je n'en dirai pas davantage parce qu'on doit aller voter. Merci.

[Traduction]

Le président: Monsieur Benoit, vous avez droit à une très courte question.

M. Leon Benoit: Merci, monsieur le président. Il s'agit encore une fois des soins aux blessés.

On trouve une excellente affirmation à la page 7 de votre document; vous dites qu'il faut un appui législatif pour étendre aux membres de la réserve l'aide accordée notamment aux victimes du syndrome de stress post-traumatique. Vous dites aussi que la Loi sur les pensions s'étendra à tous les membres des forces armées, qu'ils soient blessés au Canada ou à l'étranger. Je trouve ces propositions excellentes. Vous demandez l'appui de la classe politique, et nous vous l'accorderons.

J'ai une question particulière. Les militaires blessés disent très souvent qu'il leur est difficile de consulter leurs dossiers lorsque leur plainte est transmise du ministère de la Défense à celui des Anciens combattants. Ils doivent invoquer la Loi sur l'accès à l'information pour consulter leurs propres dossiers. Je vous demande donc de façon très directe si vous avez l'intention de changer tout cela.

Gén Maurice Baril: Je le ferai sous réserve des règles, des règlements et des lois de notre pays. Je me demande si nous ne subissons pas certaines contraintes à cause de la Loi sur la protection des renseignements personnels, mais s'il ne s'agit que d'un problème administratif, faites-moi confiance, je veillerai à le régler.

M. Leon Benoit: Ces militaires demandent simplement de pouvoir consulter leur dossier médical personnel.

Gén Maurice Baril: C'est leur dossier, mais... Je ne pense pas qu'on leur fasse des difficultés à ce point. C'était peut-être le cas autrefois, mais je vais intervenir personnellement pour faire les vérifications nécessaires pour voir si nous sommes assujettis à certaines règles précises non seulement au ministère—auquel cas nous pourrons les modifier—mais également à l'extérieur, car, après tout, ce sont des documents des Forces armées canadiennes, et nous ne pouvons les divulguer à personne.

Le président: Merci beaucoup.

Avant de vous laisser partir, je voudrais dire quelques mots. La session tire à sa fin, et en tant que président je voudrais remercier chacun d'entre vous, chers collègues, pour le temps et l'aide que vous m'avez consacrés.

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J'aimerais également remercier le greffier, les attachés de recherche et le personnel de soutien. Je sais que lorsque j'ai vu pour la première fois l'horaire des voyages, j'ai pensé que nous n'allions jamais nous en sortir, mais, comme vous le savez, nous nous en sommes sortis, et je dois dire que nous avons fait un excellent travail. Nous devons maintenant aborder l'étape du rapport. Comme je l'ai dit, j'avais certaines réserves au début, mais je sais que grâce à notre expérience et aux connaissances que nous avons acquises nous sommes en mesure de relever le défi.

Merci beaucoup. Merci beaucoup, général, et merci à tous ceux qui vous accompagnent.

La séance est levée.