De toute façon, vous savez que le tabagisme cause le cancer du poumon chez les fumeurs. Vous savez sans doute également que l'exposition au tabac entraîne le cancer du poumon chez les personnes qui vivent avec des fumeurs. Je ne m'attarderai pas vraiment là-dessus, mais si vous allez à la diapositive intitulée « Cancer du poumon chez ceux qui n'ont jamais fumé », vous verrez qu'une nouvelle notion fait l'objet d'études depuis seulement une dizaine d'années, à savoir la prévalence du cancer du poumon chez les non-fumeurs permanents. J'avoue qu'avant d'être invité à témoigner devant le comité, je ne savais pas grand-chose à ce sujet. Il se trouve que c'est là une tout autre maladie. Elle comporte des similitudes avec le cancer du poumon chez les fumeurs, mais il y a quelques différences très importantes.
D'abord, le facteur géographique est différent. C'est très prévalent en Asie et chez les Asiatiques au Canada. Il y a aussi une prédominance féminine, ce qui signifie que le cancer du poumon est beaucoup plus prévalent chez les non-fumeuses que chez les non-fumeurs. Autre différence: la répartition selon l'âge. Les non-fumeurs semblent développer le cancer du poumon à un âge beaucoup plus jeune que les fumeurs. Ensuite, les types de cellules ou les types de cancer sont différents. Les non-fumeurs n'ont pas de cancer du poumon épidermoïde à petites cellules, qui est caractéristique des fumeurs. C'est un type et une forme de cellules complètement différents. La génétique diffère aussi, car il y a un certain lien familial. Ce n'est pas très marqué, mais il y a une très forte relation génétique, selon les analyses génétiques. On peut presque prédire qui sera susceptible d'avoir cette maladie, ce qui est vraiment important. De plus, il y a généralement plus de symptômes au moment du diagnostic que dans le cas du cancer du poumon chez les fumeurs. Assez étrangement, les chances de survie après cinq ans sont meilleures pour les non-fumeurs que les fumeurs, même si cela se présente plus tard. À bien des égards, il s'agit d'une autre maladie.
Le cancer du poumon lié au radon se trouve quelque peu entre les deux, car, comme je vais l'expliquer, la plupart des cancers du poumon liés au radon surviennent chez les fumeurs. La question de savoir s'il est plus rentable d'arrêter de fumer n'aurait pu être plus juste.
La diapositive suivante s'intitule « Principaux facteurs de risque (exposition professionnelle exclue) », et je l'ai ajoutée uniquement parce que vous en aviez fait la demande. Il y a un certain nombre de conditions qui sont associées au cancer du poumon chez les non-fumeurs, comme l'exposition au radon, les antécédents familiaux, l'utilisation d'hormones chez les femmes, l'exposition à la fumée de tabac ambiante et, dans une certaine mesure, la pollution atmosphérique. À cela s'ajoute la fumée d'huiles à friture, c'est-à-dire la cuisson d'aliments à l'intérieur sur une longue période. Il y a aussi le chauffage domestique par bois ou par produits de bois en Asie et en Afrique. Voilà autant de facteurs qui sont associés au cancer du poumon. Il y a aussi un lien avec les infections pulmonaires comme la tuberculose à long terme, chose que je connaissais peu. Comme pour bien d'autres mauvaises choses dans la vie, la pauvreté entre aussi en ligne de compte. Le cancer du poumon est associé à la pauvreté, même si on exclut tous les autres facteurs. Dans une certaine mesure, un régime alimentaire riche en fruits et légumes peut atténuer ou prévenir cette maladie. Donc, mangez vos fruits et vos légumes verts, et vous serez moins susceptibles d'avoir le cancer du poumon, indépendamment des autres facteurs.
Passons maintenant à la diapositive suivante, qui porte sur les États-Unis, comme en témoigne le drapeau américain. Ce graphique présente le pourcentage de cas de cancer du poumon selon la cause. Le tabagisme actif compte pour 90 % des cas. L'exposition au radon représente entre 9 et 15 % des cas aux États-Unis et environ 15 % au Canada. En ce qui concerne l'exposition aux substances cancérogènes en milieu de travail, le pourcentage est de 10 %. Quant à la pollution atmosphérique, c'est de 1 à 2 %. Le total dépasse 100 % parce que, comme vous le verrez, certaines de ces causes interagissent ou créent ensemble un effet multiplicateur. Si vous êtes exposés au radon, ne fumez pas. Si vous fumez, ne vous exposez pas au radon.
Le cancer du poumon chez les non-fumeurs est une cause très importante, plus précisément la sixième en importance parmi toutes les causes. Pour ce qui est du cancer du poumon lié au radon — n'oubliez pas qu'on parle ici des États-Unis, mais le résultat serait le même pour le Canada —, c'est la huitième cause en importance. Comment est-ce possible? C'est peut-être parce que le tabagisme et l'exposition au radon sont interactifs, c'est-à-dire que l'un multiplie l'effet de l'autre. Dans tous les cas, cela signifie que le cancer du poumon chez les non-fumeurs est un problème très grave.
Peu importe la concentration, le radon est mauvais pour la santé, et ce, pas seulement au-dessus du seuil de 200. Une limite artificielle, quelle qu'elle soit, n'est pas très utile pour réduire l'exposition de l'ensemble de la population. Il serait préférable que nous soyons tous exposés à moins de radon, au lieu de sélectionner une zone, peut-être par souci de commodité, ou un niveau. C'est peut-être pratique, mais ce n'est pas vraiment utile comme mesure de santé publique. Il vaudrait mieux que l'ensemble de la population soit exposé à moins de radon. C'est une relation linéaire. Plus vous êtes exposés à une grande quantité de radon sur une longue période, plus vous êtes susceptibles de développer le cancer du poumon.
Par ailleurs, comme je le disais, plus on fume, plus il y a interaction. Sur la dernière diapositive, que j'ai préparée en utilisant des données canadiennes, on voit que la plupart des cancers du poumon liés au radon surviennent chez les fumeurs. Si 1 000 personnes qui n'ont pas jamais fumé étaient exposées à des concentrations élevées de radon, comme les niveaux enregistrés dans la partie intérieure de la Colombie-Britannique, environ 36 d'entre elles développeraient un cancer du poumon. En revanche, si les personnes qui fument étaient exposées au radon, environ 100 d'entre elles développeraient un cancer du poumon. Si on ajoute les deux facteurs, c'est-à-dire si les personnes étaient exposées à la fois au tabagisme et à une concentration élevée de radon, 270 d'entre elles développeraient un cancer. On parle là de 270 sur 1 000 personnes; c'est énorme.
Comment réduire les risques? Premièrement, il faut arrêter de fumer, voire ne jamais fumer. Deuxièmement, il faut réduire l'exposition au radon, et cela vaut pour l'ensemble de la population. Moins il y a de tabagisme, moins il y a de radon et, par ricochet, moins il y aura de cancer du poumon. En fait, si nous réduisons le niveau d'exposition au tabagisme, le radon deviendra une cause plus importante du cancer du poumon. Mais il y aura beaucoup moins de cas de cancer du poumon. Si nous éliminons le tabagisme, le nombre de cas de cancer du poumon diminuera en général, et ce, de façon considérable, mais toutes les autres causes gagneront en importance. Le noeud du problème, c'est l'interaction entre le tabagisme et le radon, qui peut aggraver les effets de deux, trois, quatre ou même huit fois; bref, cette interaction sera ainsi éliminée.
Quel a été le point de vue du secteur canadien de la santé publique sur le radon? Avant 2007, on avait adopté une approche plutôt passive, car c'était considéré, en grande partie, comme un dossier d'intérêt privé. Santé Canada a été d'un grand secours. Le ministère a fourni des conseils aux gens qui en demandaient. À cette époque, la directive était fixée à 800 becquerels par mètre cube, c'est-à-dire 800 désintégrations par seconde par mètre cube. Par la suite, lorsque la concentration prescrite a été révisée à la baisse, le secteur public a pris une position plus active. Santé Canada a participé à des tests à grande échelle partout au pays afin d'établir un profil du radon à l'échelle nationale, de sorte que nous ayons une idée de nos concentrations. Santé Canada a joué un rôle beaucoup plus actif sur le plan des conseils et, grâce à cette ligne directrice préconisant un niveau inférieur, le ministère a encouragé la détection et les mesures correctives. Mais, selon moi, ce n'est pas la voie à suivre. La solution consiste, dès le départ, à éliminer la présence de radon dans les bâtiments.
Examinons cette diapositive compliquée, qui présente des données sur l'Ontario. La province a examiné les concentrations de radon partout sur son territoire afin de déterminer combien de cas de cancer du poumon pourraient être évités grâce à des mesures pour les concentrations supérieures à 200 becquerels par mètre cube, notamment en adoptant une ligne directrice préconisant 100 ou 50 becquerels par mètre cube — ce qui est faisable — ou en réduisant les concentrations le plus possible pour les amener aux niveaux de radon à l'extérieur, qui sont relativement bénins. À 200 becquerels par mètre cube, si toutes les résidences en Ontario étaient rénovées pour atteindre les niveaux de radon à l'extérieur, on éviterait 2 % de tous les cas de cancer du poumon en Ontario. Autrement dit, par rapport à la ligne directrice actuelle fixée à 200 becquerels par mètre cube, si tout le monde mesurait les concentrations de radon dans sa maison et prenait des mesures correctives pour les amener au niveau de radon à l'extérieur ou même pour éliminer complètement le radon, on éviterait 2 % de tous les cas de cancer du poumon. Si toutes les résidences en Ontario, peu importe les niveaux de radon détectés, étaient rénovées de sorte que les concentrations de radon dans l'air intérieur soit égale aux niveaux de radon à l'extérieur, nous éviterions 13 % de tous les décès causés par le cancer du poumon en Ontario. S'il y a moyen d'y arriver, pourquoi ne pas le faire? Pourquoi ne pas réduire davantage ces taux?
La diapositive suivante porte sur la modification des concentrations de radon au fil du temps. Ces données proviennent des Pays-Bas. Les résultats pour le Canada seraient les mêmes. Oui, les concentrations de radon ont augmenté à mesure qu'on a construit des immeubles plus étanches. Raison de plus d'examiner les effets combinés des rénovations sur le radon.