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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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42e LÉGISLATURE, 1re SESSION

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 062

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 31 mai 2016




Emblème de la Chambre des communes

Débats de la Chambre des communes

VOLUME 148
NUMÉRO 062
1re SESSION
42e LÉGISLATURE

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le mardi 31 mai 2016

Présidence de l'honorable Geoff Regan


    La séance est ouverte à 10 heures.

Prière



Affaires courantes

[Affaires courantes]

(1005)

[Français]

Le commissaire à l'environnement et au développement durable

    J'ai l'honneur de déposer sur le bureau, conformément au paragraphe 23(5) de la Loi sur le vérificateur général, les rapports printemps 2016 du commissaire à l'environnement et au développement durable à la Chambre des communes.
    Ces rapports sont renvoyés en permanence au Comité permanent de l'environnement et du développement durable.

Les délégations interparlementaires

    J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport d'une délégation parlementaire canadienne concernant sa visite au Royaume-Uni et en France du 25 au 27 avril 2016.

[Traduction]

Réponse du gouvernement à des pétitions

    Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 10 pétitions.

Les comités de la Chambre

Transport, infrastructure et collectivités

    J'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le quatrième rapport du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités, qui porte sur le Budget supplémentaire des dépenses de 2016-2017.
    Monsieur le Président, j'ai aussi l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le cinquième rapport du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités, qui porte sur la motion adoptée par le Comité au sujet de différentes mesures de la Loi sur le transport ferroviaire équitable pour les producteurs de grain.

La Loi électorale du Canada

    — Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour présenter un projet de loi qui vise à modifier la Loi électorale du Canada afin de limiter la durée de la période électorale.
    Dans le cadre de l'examen des changements à apporter au processus électoral, je pense qu'il ne suffit pas de modifier la façon dont nous élisons nos représentants; nous devons aussi veiller à ce que le système soit équitable et à ce que tous les partis soient assujettis aux mêmes règles du jeu.
    L'argent empêche les gens de s'exprimer sur un pied d'égalité pendant une campagne électorale. Mon projet de loi vise à corriger cette situation en imposant une durée maximale raisonnable aux campagnes électorales. À l'heure actuelle, la durée minimale d'une campagne est de 36 jours, mais il n'existe pas de durée maximale. Le gouvernement conservateur précédent a exploité cette lacune, qui lui a permis d'augmenter la limite de ses dépenses chaque jour de la campagne qui excédait 37 jours.
    Au cours de la dernière campagne marathon, qui a duré 78 jours, des concitoyens m'ont dit à maintes reprises ne pas avoir besoin d'une longue campagne électorale pour faire leur choix et ne pas en vouloir non plus. Le coût de cette campagne s'est élevé à 443 millions de dollars.
    J'invite tous les députés à se joindre à moi et à appuyer ce projet de loi.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

Pétitions

L'aide médicale à mourir

    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter des pétitions lancées par la Coalition de l'action pour la famille au Canada et portant la signature de plusieurs centaines de résidants de la Saskatchewan, qui demandent au gouvernement de laisser suffisamment de temps pour mener, avec plus de vigueur que jusqu'à maintenant, de vastes consultations sur les questions de l'euthanasie et du suicide assisté.
    Les pétitionnaires demandent également à la Chambre et aux députés de travailler avec rigueur à réduire au minimum les cas d'euthanasie et de suicide assisté au Canada, d'adopter des lois qui protègent les membres vulnérables de la société et de s'y mettre dès maintenant.

Les soins palliatifs

    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter cinq pétitions. Je serai brève pour chacune d'entre elles.
    La première vient de personnes de ma circonscription qui demandent au Parlement d'établir une stratégie nationale en matière de soins palliatifs.

L'aide médicale à mourir

    Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par des gens de ma circonscription qui demandent au Parlement de respecter la liberté de conscience des professionnels de la santé en ce qui a trait au suicide assisté.
 
    La troisième pétition vient également de résidants de ma circonscription qui demandent au Parlement d'invoquer l'article 33, la disposition de dérogation, à l'égard de la décision rendue dans l'affaire Canada c. Carter afin de se laisser plus de temps pour examiner la question du suicide assisté.

La justice

    Monsieur le Président, la quatrième pétition porte la signature de personnes de tous les coins du pays, dont un grand nombre de la localité de St. Denis, dans ma circonscription, qui demandent au Parlement de reconnaître les enfants à naître comme des victimes distinctes lorsqu'ils sont blessés ou tués dans la perpétration d'une infraction.

La liberté de religion

    Monsieur le Président, la cinquième pétition est signée par des résidants de ma circonscription et des gens qui vivent à Saskatoon. Ces personnes demandent au Parlement de veiller à ce que la liberté de religion demeure au coeur de la politique étrangère du Canada et à ce que le mandat du Bureau de la liberté de religion soit reconduit.

L'aide médicale à mourir

    Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition signée par des électeurs de la Colombie-Britannique. La Coalition de l'action pour la famille a fait circuler une pétition soulignant que toute mesure législative, comme le projet de loi C-14, doit comporter des mesures de protection appropriées et que les parlementaires devraient mener de vastes consultations auprès de la population en temps opportun et veiller à ce que le droit à la liberté de conscience soit protégé.

L'immigration

    Monsieur le Président, c'est un grand honneur pour moi de présenter aujourd'hui de nombreuses pétitions portant sur les petits immigrants.
    Les pétitionnaires demandent au Parlement de présenter des excuses publiques sincères et sans équivoque aux petits immigrants qui ont rendu l'âme dans la honte de leur passé et loin de leur famille.
    Il s'agit d'un enjeu majeur pour les petits immigrants qui sont encore en vie aujourd'hui, même s'ils sont âgés. Je présente donc diverses pétitions sur cette question.
(1010)

Le Falun Gong

    Monsieur le Président, je suis heureuse de présenter des pétitions qui sont signées par des milliers de personnes et qui portent sur les adeptes du Falun Gong. Au nom de ces adeptes, les pétitionnaires demandent au Parlement canadien et au gouvernement d'adopter une résolution visant à établir des mesures pour empêcher le régime communiste chinois d'assassiner de façon systématique des adeptes du Falun Gong afin de prélever leurs organes, de modifier les lois canadiennes en vue de lutter contre le prélèvement forcé d'organes et de réclamer publiquement que cesse la persécution des adeptes du Falun Gong en Chine.

La justice

    Monsieur le Président, je présente aujourd'hui trois pétitions, toutes sur le même sujet.
     Les pétitionnaires invitent la Chambre des communes à adopter un projet de loi qui reconnaîtrait l'enfant à naître en tant que victime distincte lorsque celui-ci est blessé ou tué lors de la perpétration d'un acte de violence contre sa mère, de sorte que des accusations puissent être portées à l'égard de deux crimes plutôt que d'un seul.

L'agriculture

    Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur d'intervenir ce matin pour présenter deux pétitions.
    La première provient d'habitants de l'ensemble de ma circonscription qui se préoccupent beaucoup du droit, plus particulièrement celui des exploitations agricoles familiales dans les pays en développement, de conserver leurs semences pour la récolte de l'année suivante. Il s'agit d'un droit consacré, mais il est maintenant menacé par les grandes multinationales.
    Les pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada de veiller à l'élaboration de programmes en consultation avec les petites exploitations agricoles familiales en vue de protéger ce droit.

Les insecticides

    Monsieur le Président, la deuxième pétition provient aussi de résidants d'un peu partout dans ma circonscription, mais également de Vancouver et même de Kirkland Lake, en Ontario. Les signataires réclament la prise de mesures afin d'éliminer la menace pour les pollinisateurs que représentent les pesticides de la catégorie des néonicotinoïdes.

La justice

    Monsieur le Président, j'interviens à la Chambre aujourd'hui pour présenter deux pétitions différentes.
    La première pétition a été signée par 81 électeurs de ma circonscription à l'appui de la loi de Molly, un projet de loi d'initiative parlementaire qui défend le droit d'une femme de donner naissance à son enfant et qui vise à garantir que le juge tient compte de son enfant à naître au moment de la détermination de la peine.

L'aide médicale à mourir

    Monsieur le Président, l'autre pétition que je présente à la Chambre aujourd'hui est une longue pétition provenant de citoyens de partout dans ma province, l'Alberta.
    Les pétitionnaires se joignent à la Coalition de l'action pour la famille pour s'exprimer au sujet du projet de loi C-14. Ils demandent que des sauvegardes rigoureuses soient mises en place au nom des personnes vulnérables et que soit protégée la liberté de conscience des médecins. Ils demandent également au gouvernement de faire de vastes consultations au sujet du projet de loi C-14.
    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, au nom de la Coalition de l'action pour la famille, une pétition signée par des citoyens de partout au Manitoba.
    Les pétitionnaires demandent que le gouvernement accorde suffisamment de temps pour que le projet de loi C-14 fasse l'objet d'une vaste consultation. Ils réclament en outre que celui-ci prévoie des mesures de protection suffisantes pour les personnes vulnérables ainsi que la protection du droit à la liberté de conscience des fournisseurs de soins de santé.
    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui une pétition signée par des centaines d'Ontariens concernant le projet de loi C-14. Les pétitionnaires demandent de tenir compte des médecins et de prévoir des accommodements pour eux. Ils réclament une loi rigoureuse ainsi qu'un délai suffisant pour permettre la consultation.

Questions au Feuilleton

    Monsieur le Président, on répondra aujourd'hui à la question no 105.

[Texte]

Question no 105 --
Mme Carol Hughes:
    En ce qui concerne les demandes de statut d’Indien présentées à Affaires autochtones et du Nord Canada, en particulier à la suite de l’adoption de la Loi sur l’équité entre les sexes relativement à l’inscription au registre des Indiens, le projet de loi C-3, à la 3e session de la 40e législature: a) combien de demandes ont été présentées; b) combien de demandes ont été approuvées; c) combien de demandes ont été refusées; d) combien de temps faut-il en moyenne pour traiter une demande; e) y a-t-il un arriéré dans le traitement des demandes; f) si la réponse à e) est affirmative, depuis combien de temps y a-t-il un arriéré dans le traitement des demandes; g) le Ministère a-t-il fixé une date à laquelle il prévoit avoir rattrapé un éventuel arriéré; h) le Ministère a-t-il trouvé les causes des retards de traitement des demandes et, le cas échéant, quelles sont ces causes; i) le Ministère a-t-il constaté une pénurie de personnel pour le traitement des demandes?
L'hon. Carolyn Bennett (ministre des Affaires autochtones et du Nord, Lib.):
     Monsieur le Président, pour répondre à la partie a) de la question qui porte sur la Loi sur l’équité entre les sexes relativement à l’inscription au registre des Indiens, le nombre de demandes présentées en vertu de la Loi au 14 avril 2016 s’élève à 50 530.
    En ce qui concerne la partie b) de la question, 36 969 demandes présentées en vertu de la Loi ont été approuvées au 14 avril 2016.
    Au sujet de la partie c) de la question, il y a eu 7 340 demandes présentées en vertu de la Loi ont été refusées au 14 avril 2016. De plus, 3 063 dossiers incomplets ont été fermés sans décision parce que les demandeurs n’ont pas donné suite aux demandes du ministère concernant des renseignements additionnels.
    En réponse à la partie d) de la question concernant le temps requis en moyenne pour traiter une demande, en 2014 2015, le ministère a complété le traitement de 74 % des demandes à l’intérieur de la norme de traitement de 26 semaines.
    Relativement à la partie e) de la question, au 14 avril 2016, 720 demandes étaient en attente de traitement depuis plus de 26 semaines, soit en arriéré, et 2 163 demandes étaient en attente de traitement depuis moins de 26 semaines, soit en inventaire. De plus, 275 dossiers étaient en suspens en attendant de recevoir des renseignements additionnels des demandeurs.
    En ce qui a trait à la partie f) de la question, le ministère a commencé à recevoir des demandes dès que le projet de loi C-3 a été présenté et il a décidé de les mettre en suspens en attendant l’entrée en vigueur de la Loi sur l’équité entre les sexes relativement à l’inscription au registre des Indiens le 31 janvier 2011. Par conséquent, dès cette date, il y avait un arriéré de 3 900 dossiers précédemment mis en suspens en attendant l’entrée en vigueur de la Loi. Le nombre de dossiers en attente de traitement est passé à 9 000 demandes en juillet 2011 et diminue depuis lors.
    Concernant la partie g) de la question, on prévoit avoir rattrapé l’arriéré en novembre 2016. Cette date est basée sur le taux de traitement actuel, y compris le nombre de dossiers à traiter, la durée moyenne du temps nécessaire pour traiter une demande et le nombre de ressources disponibles.
    Pour ce qui est de la partie h) de la question, les retards de traitement des demandes présentées en vertu de la Loi s’expliquent ainsi: les arriérés ont été en partie causés par le retard initial des demandes en attente de l’entrée en vigueur de la Loi le 31 janvier 2011 et l’afflux initial de demandes peu après. De plus, certains enjeux liés à la charge de travail ont été réglés au cours de la première année de fonctionnement du Centre de traitement des demandes présentées en vertu de la Loi. Plus précisément, le progrès fut d’abord lent puisqu’il a fallu embaucher et former de nouveaux agents. Une formation de 12 mois est requise pour permettre aux nouveaux agents de traiter les demandes complexes, pour lesquels il faut effectuer de la recherche et de l’analyse généalogique détaillée.
    À l’égard de la partie i) de la question sur la pénurie de personnel pour le traitement des demandes, le ministère résorbe l’arriéré avec les ressources disponibles en améliorant les outils de formation pour les agents de traitement des demandes et en modernisant les politiques, les procédures et les processus afin d’accroître l’efficacité opérationnelle.

[Traduction]

Questions transformées en ordres de dépôt de documents

    Monsieur le Président, si les questions nos 104 et 106 pouvaient être transformées en ordres de dépôt de documents, les documents seraient déposés immédiatement.
    Plaît-il à la Chambre que ces questions soient transformées en ordres de dépôt de documents et déposées immédiatement?
    Des voix: D'accord.

[Texte]

Question no 104 --
M. James Bezan:
     En ce qui concerne la réaffectation de 2015-2016 à 2020-2021 du fonds de 3,716 milliards de dollars destinés aux grands projets d’immobilisations: a) le gouvernement a-t-il réservé cet argent à des projets particuliers et, si oui, à quels projets cette réaffectation de fonds ira-t-elle; b) pour chaque projet dont les fonds ont été réaffectés à 2020-2021, quel est le coût moyen annuel d’inflation prévu pour chaque projet sur les cinq prochaines années; c) selon les calculs en b), quel sera l’impact prévu du coût d’inflation sur le pouvoir d’achat du gouvernement; d) y a-t-il d’autres fonds mis de côté dans le cadre financier pour tenir compte des retards d’exécution attribuables à la réaffectation du fonds de 3,716 milliards de dollars?
    (Le document est déposé)
Question no 106 --
M. Chris Warkentin:
     En ce qui concerne le prochain cadre stratégique pour l’agriculture qui remplacera l’actuel cadre Cultivons l'avenir 2, et les consultations tenues actuellement en prévision de l’entente: a) quels renseignements, y compris tous les détails des documents et de la correspondance, le ministre de l’Agriculture, son personnel ou le ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire du Canada ont-ils communiqués à leurs homologues provinciaux, ou reçus de leur part; b) quels renseignements, y compris tous les détails des documents et de la correspondance, ont été échangés entre le ministre de l’Agriculture et le ministre des Finances ou leurs bureaux ministériels, et entre le ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire du Canada et le ministère des Finances du Canada; c) quels renseignements, y compris tous les détails des documents et de la correspondance, ont été échangés entre le ministre de l’Agriculture et la ministre de l’Environnement et du Changement climatique ou leurs bureaux ministériels, et entre ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire du Canada et le ministère de l’Environnement et du Changement climatique du Canada?
    (Le document est déposé)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.
    D'accord?
    Des voix: D'accord.

Initiatives ministérielles

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

Le Code criminel

    — Monsieur le Président, je tiens tout d'abord à reconnaître les contributions de tous les députés de la Chambre, particulièrement les membres du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, pour la façon dont ils ont abordé le débat sur le projet de loi  C-14.
    Il est évident que les députés de tous les partis ont travaillé en étroite collaboration avec les électeurs de leur circonscription et les députés des autres partis, et qu'ils ont partagé leurs expériences personnelles pour contribuer de façon sensée et authentique au débat sur l'aide médicale à mourir. Il s'agit de l'une des plus importantes questions que le Parlement aura abordées.
    Le projet de loi C-14 représente le choix du gouvernement sur le plan de la politique à établir à l'égard de l'aide médicale à mourir, un choix guidé par des consultations avec les Canadiens et les experts; il tient compte de tous les intérêts et de toutes les valeurs associés à cette question.
    Lorsque l'arrêt Carter a été rendu en février 2015, un débat a pris fin et un autre a commencé. Il n'était plus question de savoir si le Canada allait permettre l'aide médicale à mourir, mais bien de déterminer la façon dont on procéderait au pays.
    Le projet de loi C-14 créera un cadre législatif en ce qui concerne l'aide médicale à mourir. Il permettra de prendre en considération le point de vue des personnes susceptibles de se prévaloir d'une telle aide; de celles qui sont préoccupées par ses conséquences, notamment les personnes vulnérables que la légalisation d'une telle pratique pourrait mettre en péril, et enfin, de celles qui pourraient être appelées à fournir une telle assistance.
    Dans l'arrêt Carter, la Cour a statué que l'interdiction absolue prévue dans l'ancienne loi allait trop loin, mais elle ne précise pas comment l'aide médicale à mourir devrait être prodiguée. La Cour suprême du Canada a reconnu que l’aide médicale à mourir « soulève des questions complexes de politique sociale et un certain nombre de valeurs sociales opposées ». La Cour a souligné:
[...] il peut y avoir plusieurs solutions à un problème social particulier et a indiqué qu’une « mesure réglementaire complexe » visant à remédier à un mal social commande une grande déférence.
    Le Parlement a maintenant comme défi d'établir de nouvelles limites. Il doit déterminer qui devrait être admissible à l'aide médicale à mourir; quelles mesures de sauvegarde s'imposent; comment cette pratique sera surveillée et quels aspects de la question nécessitent une étude plus poussée.
    Toute mesure législative dont l'objet consiste à répondre à ces questions doit respecter les principes de la Charte, sans pour autant correspondre en tous points à l'arrêt Carter. La Cour suprême du Canada a reconnu que la relation entre les tribunaux et le Parlement doit être fondée sur le dialogue. Si le Parlement est tenu de respecter la décision de la Cour, cette dernière doit également respecter le cadre législatif que le Parlement a élaboré en réponse au jugement de la Cour.
    Il vaut la peine de savoir comment s'est passé ce dialogue entre la Cour et le Parlement dans des cas précédents. Par exemple, dans l'affaire d'agression sexuelle R. c. O'Connor, une contestation en vertu de la Charte qui remonte à 1995, la Cour suprême a ordonné la divulgation des dossiers médicaux en possession de la Couronne et a établi en common law une procédure pour la production de ces dossiers.
    En réaction, le Parlement a adopté une mesure législative prévoyant un régime de divulgation obligatoire qui diffère de façon considérable de l'approche de la Cour. Cette dernière a néanmoins confirmé la constitutionnalité de ce régime et elle a précisé qu'on ne peut le considérer comme étant inconstitutionnel du simple fait qu'il ne correspond pas à ce qu'elle avait envisagé comme formule.
    De toute évidence, il y a un dialogue entre le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire. La Cour peut fournir des paramètres généraux, mais c'est au Parlement qu'il incombe d'élaborer le cadre législatif. Les détails de ce cadre sont importants parce qu'ils entraînent nécessairement des choix fondamentaux fondés sur nos droits et nos valeurs et qu'ils aplanissent les tensions qui existent parfois entre les deux.
     Dans ses efforts pour donner suite à l'arrêt Carter, le gouvernement devait simultanément défendre l'autonomie des gens, protéger les personnes vulnérables, respecter la dignité de la vie humaine, prévenir le suicide, soutenir les personnes handicapées, respecter la liberté de conscience et tenir pleinement compte de bien d'autres intérêts dignes de considération. Nous n'avons pas perdu de vue, non plus, le cadre constitutionnel et les diverses compétences propres au Parlement et aux provinces et territoires.
    Nous n'étions cependant pas seuls pour soupeser ces valeurs et prendre ces décisions. Le débat national des derniers mois sur l'aide médicale à mourir a été riche et profond, et je suis convaincue qu'il se poursuivra encore.
(1015)
    Après la présentation du projet de loi C-14, les comités permanents visés, dont le comité de la justice et des droits de la personne et le comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles — qui a procédé à une étude préliminaire —, ont entendu les différents points de vue des intervenants et des spécialistes sur tous les aspects de l'aide médicale à mourir. Le projet de loi C-14 établit l'équilibre entre l'admissibilité et les mesures de sauvegarde et précise ce qui relève, d'une part, de la législation fédérale et, d'autre part, des provinces et des territoires.
    Ce n'est pas tout le monde qui approuve les décisions qui ont été prises. Je suis tout de même convaincue qu'elles s'inscrivent dans la gamme de possibilités que le Parlement peut juridiquement faire siennes. Le gouvernement aurait pu tout simplement reprendre tels quels les termes de la décision de la Cour dans la nouvelle loi fédérale, mais il aurait ainsi fait fi de toutes les consultations et de tous les témoignages dont je viens de parler. De plus, il n'aurait pas du tout réussi à élaborer un régime réglementaire complexe conciliant des intérêts opposés. La Cour suprême a d'ailleurs dit que cette tâche n'incombait pas aux tribunaux, mais bel et bien au Parlement.
    Les témoignages recueillis au cours de la dernière année nous confirment que l'aide médicale à mourir présente des risques pour les personnes vulnérables, même dans les circonstances où l'admissibilité de la personne à cette aide fait l'objet d'un consensus. Voilà pourquoi le projet de loi prévoit d'importantes garanties procédurales, même lorsque tous les critères d'admissibilité sont remplis. Voilà pourquoi le projet de loi mettrait en oeuvre le cadre juridique nécessaire pour surveiller le recours à l'aide médicale à mourir au Canada.
    Le gouvernement a fait le choix, dans sa politique, de fixer des critères d'admissibilité faisant en sorte de limiter l'aide médicale à mourir aux personnes dont l'état de santé se caractérise par un déclin avancé et irréversible et dont la mort naturelle est devenue raisonnablement prévisible.
    Rappelons-nous que l'aide médicale à mourir est un cas exceptionnel parce que, sur le plan du droit pénal, il s'agit d'une situation où une personne participe activement et sciemment à la mort d'une autre personne. Nous considérons un tel comportement comme criminel et nous le condamnons fermement dans toutes les autres circonstances. Le seul cas où, en droit pénal, cette conduite est justifiée, est celui de la légitime défense, où une personne peut enlever la vie d'une autre personne, mais uniquement pour sauver la sienne ou celle d'une tierce personne. Bien que l'aide médicale à mourir ait une dimension médicale, nous ne pouvons pas perdre de vue la dimension légale, puisque c'est par le droit pénal que le Parlement peut intervenir sur cette question. C'est le droit pénal qui, avant l'arrêt Carter, empêchait les gens d'obtenir de l'aide médicale à mourir.
    Après avoir examiné attentivement les risques qui nous guettent lorsque nous permettons à quiconque, même à des médecins ou des infirmières, de mettre fin à la vie d'autres personnes, nous avons défini, dans le projet de loi C-14, un juste milieu qui donne aux Canadiens le choix d'obtenir de l'aide médicale à mourir pour pouvoir quitter ce monde paisiblement. Le projet de loi définit un cadre réglementaire complexe pour respecter ce choix et veiller à ce qu'il soit exercé volontairement et en pleine connaissance de cause. De plus, les critères nous garantissent que les Canadiens qui ne sont pas mourants feraient l'objet d'efforts médicaux visant à améliorer leur vie, et non à y mettre fin.
    Nous sommes aussi conscients que certains estiment que la loi devrait permettre le recours à l'aide médicale à mourir dans d'autres circonstances. Le gouvernement a très bien entendu les préoccupations à cet égard. Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a amendé le projet de loi pour qu'il prévoie qu'au plus tard six mois après la date de la sanction royale il y ait un ou des examens indépendants des questions portant sur les demandes d’aide médicale à mourir faites par les mineurs matures, les demandes anticipées et les demandes où la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée.
    Nous trouvons que c'est un bon amendement et tenons à souligner que nous aborderons, dans un esprit ouvert, l'information découlant de ces examens à mesure que des données canadiennes seront produites sur la façon dont le régime d'aide médicale à mourir fonctionne concrètement.
    La décision d'examiner plus à fond ces trois questions a l'assentiment des personnes qui travaillent auprès de ce type de patients jour après jour et qui comptent parmi celles qui ont le plus exhorté le Parlement à la prudence.
    Pour ce qui est des mineurs matures, la Société canadienne de pédiatrie, représentée par Dawn Davis, a dit, lors de son passage devant le comité sénatorial: « Nous ne disposons actuellement pas des connaissances permettant d’aboutir en ce domaine à une décision éclairée [...] », ajoutant « Il est donc bon que cette première version du projet de loi sur l’aide médicale à mourir ne prévoie pas de reconnaître ce droit aux mineurs. »
(1020)
    Elle a également déclaré qu'il n'y a pas eu suffisamment de consultations sur cette question. Les processus habituels d'évaluation de la capacité, que le projet de loi C-14 considère comme appropriés pour les adultes, ne constituent peut-être pas la bonne approche en ce qui concerne les mineurs matures. Nous devons nous pencher davantage sur cette question.
    Les demandes anticipées sont une autre question qui nécessite des données supplémentaires. Au cours de la dernière année, on nous a dit à maintes reprises que des demandes anticipées seront probablement présentées par des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ou de démence, par exemple. Or, même la Société Alzheimer du Canada a indiqué, dans l'exposé de position qu'elle a rendu public, que l'accès à l'aide médicale à mourir devrait être permis seulement aux personnes capables au moment où l'aide est administrée. Elle dit que les demandes anticipées non seulement présentent des risques pour les patients vulnérables, mais pourraient aussi contribuer à véhiculer de faux stéréotypes, ce qui nuirait au message qu'elle souhaite transmettre, soit qu'il est possible de bien vivre malgré cette maladie. Il faut étudier cette question plus en profondeur.
    Quant aux demandes d'aide médicale à mourir où la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée, il n'est pas étonnant que des personnes et des organisations réputées, comme le Centre de toxicomanie et de santé mentale et la Commission de la santé mentale du Canada, souhaitent que nous menions d'autres études avant de légiférer dans ce domaine. Emprunter cette voie, ce n'est pas faire fi de la souffrance que peuvent causer ces maladies; c'est plutôt s'assurer de bien faire les choses et de protéger les personnes les plus vulnérables et stigmatisées de la société. Pour ces raisons, je crois que le projet de loi C-14 représente les bons choix de politiques pour répondre aux questions difficiles que nous a laissées la Cour suprême du Canada pour 36 millions de Canadiens.
    Je vais maintenant parler des considérations juridiques, qui jouent un rôle crucial dans cette mesure législative majeure.
    La question de savoir si le projet de loi C-14 est constitutionnel revient constamment dans la discussion. En tant que ministre de la Justice et procureure générale du Canada, j'ai la ferme conviction que le projet de loi est conforme à la Charte et qu'il constitue une réponse justifiable à l'arrêt Carter.
    Les critères d'admissibilité du projet de loi C-14 correspondent tout à fait aux exigences de la décision Carter. Ils précisent le degré d'accessibilité voulu en tenant compte du mémoire de l'Association médicale canadienne, qui représente 83 000 médecins qui, avec le personnel infirmier, seront chargés de mettre en oeuvre et en application cette loi dans le cadre de leurs activités quotidiennes. Cette organisation a affirmé que le libellé du projet de loi représente une amélioration considérable par rapport au critère défini par la cour par les mots « problèmes de santé graves et irrémédiables », qu'elle perçoit comme inapplicable d'un point de vue médical.
    Quelle était la portée de la décision Carter? Je suis consciente qu'il y a de nombreuses interprétations différentes, et que la Cour d'appel de l'Alberta l'a récemment interprétée dans un sens large, tandis que certains juges de la Cour supérieure de l'Ontario en ont fait une interprétation plus limitée. Je crois que la décision Carter portait sur les circonstances propres au cas d'espèce. Au bout du compte, le projet de loi C-14 sera évalué de façon plus générale en fonction de la Charte plutôt que de l'affaire Carter. Comme la Cour d'appel de l'Alberta l'a reconnu, « il faudrait évidemment attendre l'éventuelle promulgation de la loi avant de l'interpréter et de se prononcer sur sa constitutionnalité ».
    Le projet de loi C-14 répond aux deux critères de l'article 7 de la Charte, soit le respect de l'autonomie et le respect de la vie. Le projet de loi assurerait un nouvel équilibre entre ces intérêts grâce à un régime de réglementation complet envers lequel les tribunaux feraient preuve de déférence. Le projet de loi respecterait l'autonomie de toute personne qui choisit de recourir à l'aide médicale à mourir tout en exigeant une certaine prudence qui répondrait aux autres objectifs fondamentaux: promouvoir la prévention du suicide, lutter contre les préjugés de la société envers le fait de vivre avec un handicap et protéger les personnes les plus vulnérables de la société contre le risque de mort prématurée involontaire.
    Bien que le projet de loi C-14 exige que la personne admissible soit sur le point de mourir, la marge de manoeuvre volontairement accordée dans les critères du projet de loi permettrait aux médecins de répondre à une foule de circonstances médicales et non seulement à des maladies aux conséquences prévisibles qui font l'objet d'un pronostic précis sur l'espérance de vie.
(1025)
    En effet, alors que, dans certains États américains, l'admissibilité dépend d'un pronostic spécifique, le projet de loi C-14 n'exige pas de lien précis entre un problème de santé et ce qui rend le décès d'une personne raisonnablement prévisible.
    Je ne suis pas d'accord avec ceux qui soutiennent qu'en raison de l'arrêt Carter, le Parlement se doit, pour respecter la Constitution, d'adopter un régime d'aide médicale à mourir qui soit le plus étendu sinon l'un des plus étendus du monde, et que le Parlement n'a à peu près pas de marge de manoeuvre pour tenir compte d'autres enjeux de société que l'autonomie. La Cour reconnaît que l'aide médicale à mourir se trouve au carrefour d'un ensemble d'intérêts divergents et d'enjeux sociaux complexes. Dans des dossiers de ce genre, l'analyse de la conformité à la Charte tient compte du fait qu'il n'existe pas de façon unique et évidente de trouver un juste équilibre parmi les intérêts divergents en cause. Si la solution proposée par le Parlement est raisonnable, elle devient gage de son respect.
    Le projet de loi C-14 est raisonnable. Il offrirait une option aux personnes en voie de mourir qui souhaitent mourir dans la dignité. Autre fait important, l'accès à l'aide médicale à mourir serait réservé aux patients dans cette situation, de manière à éviter une normalisation du suicide, à protéger les personnes vulnérables qui risquent particulièrement d'être encouragées au suicide, et à affirmer que toutes les vies humaines ont la même valeur.
    Concilier ainsi les intérêts permet de contrer les risques inhérents à l'autorisation de l'aide médicale à mourir et revient à ce que, dans l'affaire Carter, la juge de première instance avait décrit comme un « régime soigneusement conçu, qui impose des limites strictes scrupuleusement surveillées et appliquées. » Un tel régime est nécessaire parce que la souffrance qui peut amener quelqu'un à réclamer de l'aide à mourir n'est pas seulement liée à la maladie, mais aussi à la façon dont la société traite trop souvent les malades.
    Dans un régime où tout problème de santé grave est admissible, l'aide à mourir serait légalement acceptable pour un soldat souffrant d'un trouble de stress post-traumatique, un jeune ayant subi des lésions de la moelle épinière dans un accident ou une personne hantée par le souvenir d'un abus sexuel.
    De tels cas exigent des discussions difficiles, mais incontournables. En effet, ces situations surviennent inéluctablement lorsque la loi stipule que l'accès à l'aide à mourir dépend strictement de l'expérience subjective des souffrances vécues.
    Le comité de la justice et des droits de la personne de même que le comité sénatorial ont entendu de nombreux témoins rappeler les objectifs cruciaux que sont la prévention du suicide et la valorisation de la vie de tous les Canadiens, et affirmer que les risques que courent les personnes vulnérables s'aggraveront considérablement à moins que l'accès à l'aide à mourir ne soit limité aux personnes approchant la fin de leur vie.
(1030)
    Comme je l'ai dit lorsque le projet de loi C-14 a été présenté, l'aide médicale à mourir nous touche et nous interpelle tous autant que nous sommes. Même si les points de vue sur le texte législatif continuent de diverger, nous avons néanmoins une responsabilité envers les Canadiens, celle d'agir. Le processus provisoire d'autorisation judiciaire prendra fin le 6 juin. Si aucune loi n'est en vigueur à ce moment-là, l'aide médicale à mourir ne sera régie par aucun cadre juridique, sauf au Québec.
    On ne sait même pas encore avec certitude si, dans l'éventualité où c'est l'arrêt Carter qui devait s'appliquer à compter du 6 juin au lieu d'un régime législatif en bonne et due forme, les dispositions du Code criminel qui interdisent actuellement l'homicide par consentement et l'aide au suicide sauf dans le contexte de l'aide médicale à mourir deviendraient complètement inopérantes.
    Bien que la plupart des organismes de réglementation de la profession médicale aient publié des lignes directrices provisoires, il n'existerait pas de balises nationales obligatoires et uniformes. Il serait par exemple possible, selon la province, qu'un médecin accepte de mettre fin à la vie d'un mineur mature. Le nombre de témoins requis varie d'une province à l'autre, tout comme la durée de la période d'attente, qui est même nulle à certains endroits.
    Comme l'incertitude quant aux paramètres établis par l'arrêt Carter persisterait, cela pourrait créer certaines disparités quant à savoir qui est admissible ou non à l'aide médicale à mourir, même entre les médecins d'un même territoire ou d'une même province.
    Nous avons le choix: ou bien nous nous dotons d'un cadre législatif assorti de toutes les balises et mesures de sauvegarde nationales dont je parlais, ou bien c'est le néant. Le projet de loi C-14 est à l'image de la société à laquelle nous aspirons: une société qui respecte l'autonomie de chacun et qui affirme que la vie de tous les Canadiens a une valeur inhérente certaine et mérite d'être protégée par la loi au même titre que les autres.
    J'invite tous les députés à appuyer le projet de loi C-14.
(1035)
    Monsieur le Président, je reconnais l’équilibre très difficile que la ministre de la Justice a dû trouver en rédigeant ce projet de loi de nature très délicate. Mais ce qui m’inquiète beaucoup — et 100 % des gens de ma circonscription sont d’accord avec moi —, c’est l’absence de libellé clair et précis sur la protection du droit à la liberté de conscience des fournisseurs de soins de santé.
    On a rejeté hier soir un amendement que je trouvais très réfléchi. J’espère que la ministre expliquera très clairement aux Canadiens pourquoi les libéraux ont voté contre une mesure que la plupart des Canadiens et moi-même estimons absolument essentielle.
    Monsieur le Président, le droit à la liberté de conscience des médecins est on ne peut plus important et nous en avons tenu compte dans tous les aspects de ce projet de loi.
    Je reconnais le travail qu’a mené le comité de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes, qui a étudié des amendements de fond et a voté en faveur de 16 de ces amendements, dont celui permettant d'inclure la notion de liberté de conscience des médecins dans le préambule de la loi. Toutefois, par souci de précision, il a voté en faveur d’un amendement qui figure dans le corps même du texte législatif pour assurer ce droit à la liberté de conscience. Rien dans le projet de loi n’oblige donc un médecin à prodiguer l’aide médicale à mourir.
    Outre cela, la ministre de la Santé et moi-même collaborons de façon concertée avec les provinces et les territoires pour les aider à mettre sur pied le régime de réglementation complexe qui sera nécessaire. Ce travail est en cours et le dialogue se poursuit.

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai écouté le discours de la ministre avec intérêt.
    Depuis quelques semaines, chaque fois qu'on a la rare occasion de parler d'un projet de loi aussi important, le même argument revient toujours, soit cette échéance du 6 juin fixée par la Cour suprême. Or on commence à entendre, même de la part des députés du gouvernement, notamment de la ministre de la Santé, que l'objectif du 6 juin est loin d'être certain. Des personnages éminents du Sénat le disent également.
    D'ailleurs, je rappelle que nous sommes sous le coup d'une motion d'attribution de temps, ce qui signifie que seulement trois députés de ma formation politique auront la chance de prendre part à la discussion en troisième lecture.
    Qu'est-ce qui apparaît le plus important à la ministre, à ce moment-ci? Est-ce le respect de cette échéance du 6 juin, ce qui n'arrivera pas, de toute évidence, ou est-ce de dégager le plus large consensus des députés de la Chambre, ce qui faciliterait probablement une approbation au Sénat également?

[Traduction]

    Premièrement, monsieur le Président, la question a fait l'objet d'un débat approfondi. La conversation nationale en la matière dure depuis des mois.
    Le gouvernement et moi avons le plus grand respect pour la Cour suprême du Canada et pour le délai du 6 juin qu'elle a imposé. Nous faisons tout en notre pouvoir pour respecter ce délai. Il y aura toujours des risques, mais ils seront plus grands si nous n'adoptons pas de cadre juridique pour l'aide médicale à mourir d'ici la date limite imposée par la Cour suprême du Canada.
    En l'absence d'un cadre juridique, il ne sera pas possible de faire appel à une cour supérieure pour demander une exemption individuelle. Nous ne bénéficierons pas des mesures de protection musclées que la Cour suprême exige du Parlement dans la décision Carter. Les médecins praticiens ne bénéficieront d'aucune certitude et l'accès à l'aide médicale à mourir demeurera incertain. Il serait irresponsable de notre part, en tant que parlementaires, de ne pas faire tout en notre pouvoir pour respecter la date limite du 6 juin.

[Français]

    Monsieur le Président, la ministre n'a jamais répondu à ma question. Elle nous invitait à un débat, mais quand il y a un débat, on doit s'attendre à ce qu'un gouvernement majoritaire accepte certains amendements.
    La ministre cite la loi québécoise. Or elle sait sûrement que, telle qu'elle est écrite présentement, la loi québécoise exclut toute demande de suicide assisté et contraint des gens inadmissibles à faire une grève de la faim.
    Est-ce que le projet de loi de la ministre va dans le même sens? Trouve-t-elle acceptable et humain qu'une personne doive faire une grève de la faim pour avoir accès à l'aide médicale à mourir? En quoi ce projet de loi aurait-il rendu Kay Carter admissible à cette aide?
(1040)

[Traduction]

    À propos des amendements proposés au projet de loi C-14, monsieur le Président, 16 d'entre eux ont été retenus; ils viennent renforcer la mesure en établissant un équilibre entre l'autonomie personnelle et la protection des personnes vulnérables et en veillant à ce que toutes les dispositions possibles soient prises pour protéger la liberté de conscience des médecins praticiens.
    Je reconnais que le député est intervenu à maintes reprises à la Chambre au sujet du projet de loi. Je reconnais également la grande expérience qu'a acquise le Québec au terme des longues années de discussion qui ont mené à l'adoption de sa propre mesure.
    En ce qui concerne Kay Carter, je n'ai absolument aucun doute qu'elle aurait été admissible sous le régime proposé dans le projet de loi C-14. Nous nous sommes tout particulièrement assurés d'élargir la définition des termes « grave et irrémédiable » et de fixer des critères d'admissibilité qui confèrent au régime la flexibilité nécessaire et permettent aux médecins praticiens d'avoir un contact avec leur patient. Ce sont eux qui connaissent le mieux la situation de leurs patients et qui sont en mesure de déterminer s'ils répondent aux critères.
    Monsieur le Président, j’aimerais poser une question au nom de l’un des électeurs de ma circonscription, qui reconnaît les efforts qui sont déployés en vue de donner aux médecins la liberté de ne pas participer à ce processus. Cet électeur se demande si les médecins ont également le droit de ne pas aiguiller le patient vers une autre personne qui est prête à autoriser la procédure.
    Monsieur le Président, les droits relatifs à la liberté de conscience des médecins sont reconnus dans le préambule et dans le texte du projet de loi. J’ai déjà précisé que la ministre de la Santé allait collaborer avec les organisations professionnelles des provinces et des territoires en vue de remplacer le système qui obligerait les médecins à aiguiller les patients vers un autre médecin par un système dans le cadre duquel les provinces, les territoires et les organismes de réglementation de la profession médicale prendraient les mesures nécessaires pour que les choix individuels des médecins soient respectés. De plus, nous allons mettre en place un système qui permettra de fournir aux malades qui souhaitent recourir à l'aide médicale à mourir l'information dont ils ont besoin, au lieu d’imposer cette responsabilité aux médecins. C’est donc la relation que nous allons établir avec les organismes de réglementation provinciaux.
     Monsieur le Président, j’aimerais moi aussi souligner le travail accompli par la ministre de la Justice et par le comité dans ce dossier particulier. La tâche était particulièrement difficile, compte tenu des délais serrés. Je remercie les membres conservateurs de ce comité qui ont présenté des amendements en tenant compte de préoccupations dont leur ont fait part les Canadiens.
    Il y a toutefois une question qui a été mentionnée plusieurs fois dans les assemblées publiques et à propos de laquelle j’ai reçu des commentaires des électeurs de ma circonscription. Je veux parler de l’élaboration d’une stratégie sur les soins palliatifs, qui était l’une des recommandations de l’étude du comité mixte. Le budget de 2016 ne prévoit aucun financement pour les soins palliatifs. Nous avons essayé de faire adopter un amendement hier soir, mais il a été rejeté. Quel est le plan à long terme pour les soins palliatifs? Prévoit-on y consacrer des fonds? Les libéraux vont-ils prendre des engagements dans ce sens?
    Monsieur le Président, la ministre de la Santé serait mieux placée pour répondre à cette question très importante. Je sais toutefois, pour avoir travaillé avec elle pendant toute la préparation de ce projet de loi et pour avoir assisté à de nombreuses rencontres avec des organisations et des particuliers, que les soins palliatifs revêtent une très grande importance pour les Canadiens, comme l’ont d’ailleurs confirmé les recommandations de plusieurs groupes de travail. C’est aussi une question qui revêt la plus grande importance pour la ministre de la Santé, pour moi-même et pour le gouvernement.
    La ministre de la Santé a promis que, pendant les consultations provinciales et territoriales qui vont précéder le renouvellement de l’accord sur la santé, le gouvernement s’assurera que tous les Canadiens, où qu’ils vivent, auront accès à des soins palliatifs. La ministre de la Santé a pris cet engagement.
(1045)
    Monsieur le Président, j’aimerais demander le consentement de la Chambre pour partager mon temps de parole avec le député de Cariboo—Prince George.
    Le député de Langley—Aldergrove a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour partager son temps de parole?
    Des voix: D’accord.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier la ministre de la Justice d’être à la Chambre aujourd’hui pour nous présenter son point de vue et celui du gouvernement à propos du projet de loi C-14. J’ai remarqué qu’elle était toujours disponible et pondérée, et je la remercie de sa contribution dans ce dossier.
    J’ai eu l’honneur de faire partie du comité mixte qui a commencé à examiner le projet de loi au mois de janvier. Je faisais également partie du comité de la justice lorsqu’il a été saisi du projet de loi C-14. Comme l’a dit la ministre, les opinions en matière de suicide assisté sont très diverses, même au sein de chaque parti. Je tiens néanmoins à remercier tous les députés d’avoir fait preuve de respect et de collaboration dans l’examen de cette importante question.
    C’est à la suite de la décision de la Cour suprême, dans l’affaire Carter, que nous avons été amenés à examiner cette question. La Cour suprême a en effet statué que cette procédure doit être autorisée. Le Code criminel sera modifié, et il incombe au Parlement de définir des balises. Même si la procédure n'est pas encore permise, la Cour suprême a décidé que nous devions définir des balises.
    On nous a souvent dit que 84 % des Canadiens étaient favorables à cette mesure, mais ce pourcentage est un peu trompeur car, en vérité, 84 % des Canadiens appuient cette mesure à certaines conditions, à savoir que la maladie soit terminale, que le malade éprouve des souffrances terribles et qu’il demande à plusieurs reprises de l’aide pour mettre fin à ses jours et à ses souffrances. Il ne faut donc pas oublier que les Canadiens appuient cette mesure à certaines conditions.
    J’ai consulté les électeurs de ma circonscription sur cette question précise. Je leur ai envoyé un bulletin parlementaire dans lequel j’ai exposé la situation de façon très rigoureuse et non partisane. Ce bulletin replaçait la question dans son contexte et décrivait les différents éléments dont le Parlement doit tenir compte: la protection de la liberté de conscience, les soins palliatifs, les personnes qui peuvent fournir ce genre de service, la pertinence d'instituer un contrôle judiciaire, le fait de consigner ou non dans les registres la cause de la mort comme étant le suicide ou l'euthanasie, les mineurs matures, etc.
     J’ai reçu des réponses à ce bulletin parlementaire, et il y a une semaine, j’ai organisé une deuxième assemblée publique sur la question. Dans les deux cas, le taux de réponse a été phénoménal. Nous avons même reçu des réponses par courriel, par téléphone, par la poste, etc. En fait, je n’ai jamais reçu autant de réponses sur un sujet donné depuis douze ans et demi que je suis député. Les gens ont une opinion bien arrêtée, et ils comprennent les enjeux et les difficultés auxquels la Chambre est confrontée.
    Encore une fois, je remercie la ministre de la Justice, mais en tant que porte-parole, je crois que le gouvernement aurait pu aborder la question de façon un peu différente, au lieu de dominer les comités, d'imposer l'attribution de temps et de dire non à tous les amendements.
     La ministre a parlé de 16 amendements, qui, bien sûr, étaient des amendements libéraux. Mais au comité, il y en avait un sur lequel le Parti conservateur et le NPD étaient d'accord, celui sur la liberté de conscience. Nous avons demandé que tout médecin, infirmier praticien, pharmacien ou professionnel de la santé ne souhaitant pas participer ait le droit de dire non. Cependant, le gouvernement a rejeté cet amendement.
     Le fait est que les secrétaires parlementaires au sein du comité ont parlé à chacun des membres de ce comité et leur ont dit que les libéraux n'appuieraient pas cette demande. Puis, le secrétaire parlementaire de la justice est intervenu au comité pour dire que le gouvernement n’appuyait pas ce genre d'amendement.
    Comme vient de le dire la ministre de la Justice, le gouvernement s’en remettra aux négociations avec les provinces, et leur laissera assumer cette responsabilité. Cependant, avec le projet de loi C-14 nous modifions le Code criminel du Canada. Avant l’arrêt Carter, il était illégal d'aider quelqu'un à se suicider. Il était légal de se suicider, mais illégal d'aider quelqu'un. Le fait d'aider quelqu’un était considéré comme un homicide.
(1050)
    En vertu de l’arrêt Carter, un médecin peut, dans certaines conditions, fournir une aide au suicide et à l'euthanasie. On pourrait compléter cette modification au Code criminel en disant que ce serait un acte criminel de forcer un professionnel de la santé ou toute personne, par la coercition ou l'intimidation, à participer à la mort d'une autre personne contre son gré. Voilà ce que nous avons proposé.
     Lorsque le projet de loi C-14 sera renvoyé au Sénat, celui-ci devra l'étudier. Je crois que le Sénat renverra ce projet de loi à la Chambre. Il n'acceptera pas le projet de loi C-14 tel quel et veillera à ce que la liberté de conscience des médecins soit adéquatement protégée.
     L'Association médicale canadienne nous a dit que 70 % des médecins au Canada ne veulent pas participer. Ils ne veulent pas y être forcés, par la coercition, l'intimidation ou la menace de ne plus pouvoir exercer dans tel ou tel hôpital s’ils ne participent pas.
    Dans un article du National Post intitulé « Killing' patients vs. “doing their job”: Sharp division of opinion on whether doctors should be required to assist in suicide”, qui porte sur les divergences d'opinions profondes sur la question de savoir si les médecins devraient être tenus d'aider au suicide, une médecin dit qu'elle a exercé la médecine pendant 37 ans. Cette médecin de famille a décidé de ne pas renouveler son permis d’exercer en juin de cette année. La Dre Naylor n'a pas envie d’abandonner la médecine, mais elle dit qu'elle est consternée à l'idée d'être obligé de diriger un patient vers un autre médecin. Le Dr Burke, qui pratique la physiatrie et de réadaptation à Windsor en Ontario, a déclaré qu'il exercera à l’avenir au Michigan, où le suicide assisté est illégal.
    J'ai entendu cela à l’occasion de maintes réunions publiques aux quatre coins du pays et aux deux qui ont eu lieu dans ma propre collectivité. Un jeune étudiant en médecine m'a demandé si les médecins allaient être forcés à le faire et je lui ai dit que c’était fort possible parce que, dans le projet de loi C-14, le gouvernement laisse la décision aux provinces. Nous avons déjà entendu que l'Ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario exigera des médecins qu’ils dirigent le patient vers un autre médecin, ce qui signifie qu'un médecin doit suivre la personne tout au long du processus pour s’assurer qu’elle est euthanasiée si c’est ce qu’elle a demandé. Le médecin doit participer.
    Partout au pays, des médecins, comme ceux que je viens de mentionner, refuseront de participer, invoqueront leur âge pour prendre leur retraite ou s'établiront ailleurs afin d'éviter d'être contraints de prendre part à ce processus qui heurte leur conscience. Une pénurie de médecins et d'infirmières créerait une situation d'urgence médicale au Canada, et c'est ce qui se produira si nous obligeons ces professionnels de la santé à participer à quelque chose qui va à l'encontre de leur conscience.
    Le gouvernement a la possibilité de rectifier le tir. Il a refusé de le faire à la Chambre, alors c'est le Sénat qui devra s'en charger. C'est donc le Sénat qui décidera et qui modifiera le projet de loi C-14. Celui-ci nous reviendra dans sa forme modifiée. Nous ne savons pas combien de temps cela pourra prendre, mais il est évident que ce sera après la date butoir du 6 juin. J'espère qu'alors le gouvernement agira différemment, qu'il coopérera avec le Sénat et qu'il ne rejettera pas les amendements que celui-ci aura proposés.
     Il vaut mieux avoir le projet de loi C-14 que rien du tout, mais il doit être modifié. Le gouvernement doit se montrer plus ouvert d'esprit et réceptif, et accepter de travailler dans le contexte parlementaire tel qu'il est afin de produire un texte législatif qui représente la position des Canadiens sur cette question, plutôt que celle du gouvernement.
(1055)
    Monsieur le Président, nous savons d'emblée quelle est l'origine de ce texte législatif. Il résulte d'un arrêt de la Cour suprême du Canada, prononcé à l'unanimité des neuf juges qui y siègent. Cet arrêt établit le cadre juridique.
     Nous avons beaucoup parlé de l'importance des soins palliatifs, une question qui importe réellement à tous les Canadiens. Nous avons parlé de la nécessité d'investir dans les soins palliatifs.
    Je suis quelque peu préoccupé par certains des points soulevés par le député. Je suis parlementaire depuis de nombreuses années, et depuis cinq ans ici à Ottawa. Les députés auraient eu amplement l'occasion de débattre cette question, notamment en acceptant de siéger en soirée. Ainsi, plus d'intervenants auraient eu l'occasion de participer au débat. Il y a eu toutes sortes d'autres possibilités.
     Le député croit-il que les députés sont dans l'obligation de s'occuper de cette question, vu l'arrêt de la Cour suprême du Canada et la date butoir du 6 juin imposée par celle-ci?
    Monsieur le Président, je conviens avec le député que nous avons l’obligation de faire notre possible pour faire adopter ce projet de loi. J’aurais bien voulu que le gouvernement demande un délai d’un an, pas de six mois. Il a fallu au Québec six ans et trois premiers ministres pour faire adopter sa loi. Dans sa précipitation, le gouvernement a bâclé le sien.
     Le député a mentionné les motions d’attribution de temps pour mettre fin au débat sur la question. Au lieu de coopérer et de travailler au sein du Parlement comme il se doit, dans le respect de chacun et des diverses opinions exprimées sur le sujet, le gouvernement a essayé de forcer l’adoption, et cela s’est retourné contre lui. Il reste à espérer qu’il coopérera dorénavant avec le Parlement et travaillera en collégialité.
    Monsieur le Président, j’aimerais poser une question à mon collègue relativement à la réponse qu’il vient de donner au député d’en face. Ne reconnaît-il pas qu’en ce qui concerne le délai, il est plus logique de faire les choses correctement que de respecter le délai? Le projet de loi a été étudié dans la précipitation. Cela est une grave erreur. À la veille du vote, il reste encore tellement d’opinions à exprimer que cela pose problème. Ne reconnaît-il pas qu’il aurait été plus logique de renvoyer ce projet de loi à la Cour suprême afin d’obtenir plus de précisions sur sa constitutionnalité, que nous devons traiter ce sujet correctement, sans voir planer au-dessus de nos têtes la date du 6 juin non comme une menace, mais plutôt comme une cible, un but? Nous devons bien faire les choses. Ne reconnaît-il pas que la Cour suprême peut vraiment jouer un rôle pour nous permettre de faire des progrès significatifs sur ce projet de loi?
    Monsieur le Président, je conviens que la date butoir du 6 juin ne sera probablement pas respectée et je suis d’avis que le gouvernement devrait demander une prolongation. C’est ce que j’aurais fait dès le début.
     Nous devons bien faire les choses. Adopter à la hâte un projet de loi mal ficelé ne fait rien pour protéger les Canadiens vulnérables qui envisageraient le suicide assisté.
     Je pense qu’il y a un contexte et une volonté de notre part de travailler ensemble pour bien faire les choses. Si le gouvernement souhaite faire adopter ce projet de loi de force d’ici le 6 juin, quoi qu’il arrive, il frappera un mur.
    Monsieur le Président, je voudrais féliciter mon collègue pour son intervention pleine de bon sens.
     Nous avons entendu la réponse de la ministre concernant la date butoir du 6 juin. J’aimerais bien entendre d’autres réponses ou des arguments plus convaincants concernant cet échéancier. Je demanderais donc à l’honorable député ce qui se produira, à son avis, si le projet de loi n’est pas adopté d’ici le 6 juin.
    Monsieur le Président, la question fondamentale est la suivante: qu’est-ce qui va se passer le 6 juin? J’ai demandé un rapport de la Bibliothèque du Parlement. Il y est indiqué que c'est l’arrêt Carter qui s'appliquera et que celui-ci sera appliqué différemment d'un bout à l'autre du Canada. C’est l’ordre des médecins et des chirurgiens de chaque province qui déterminera les modalités d’exécution. En Ontario, les médecins seront tenus d'offrir ce service, alors que dans d’autres provinces, non. Le gouvernement provincial de certaines provinces interviendra, celui d’autres provinces, non. Ce sera un beau méli-mélo d’applications aussi différentes les unes que les autres selon les provinces. Et ça, ce n’est pas dans l’intérêt des Canadiens. Nous devons adopter ce projet de loi. Il est nécessaire d’avoir une loi. Le problème, c’est que le projet de loi C-14 doit être amendé. Il comporte d'importantes lacunes. J’espère que le gouvernement se montrera coopératif, qu’il saura écouter les députés de l’opposition et les Canadiens et qu'il corrigera le projet de loi C-14.
(1100)
    Monsieur le Président, j’invoque le Règlement. Plus tôt aujourd’hui, sous la rubrique « Dépôt de documents », j’ai indiqué que le gouvernement répondait à 10 pétitions. Il s’agit plutôt de 11 pétitions.
    Je suis certain que la Chambre apprécie cet éclaircissement de la part du secrétaire parlementaire, ainsi que le fait qu’il l’ait porté à son attention à la première occasion.
     Nous reprenons le débat. Le député de Cariboo—Prince George a la parole.
    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd’hui au sujet d’une question qui pourrait fort bien être l’un des enjeux sociaux les plus centraux et les plus importants auxquels le Parlement aura à faire face pendant le mandat du gouvernement actuel. La vie et la mort, ce n’est pas une question que je prends à la légère.
    Ces derniers mois, j’ai eu l’occasion de discuter avec des électeurs de ma circonscription. J’ai lu leurs lettres et leurs courriels. J’ai consulté les chefs spirituels des différentes confessions représentées par les communautés de ma circonscription. J’ai assisté à chaque minute de ce débat, parce que la portée du projet de loi dont nous sommes saisis mérite un examen attentif et approfondi. Cette mesure législative pèse lourd sur mes épaules, parce que, indépendamment de mes propres croyances, je représente les dizaines de milliers d'habitants de la belle circonscription de Cariboo—Prince George.
     J’ai travaillé pendant des années à la concrétisation de mon rêve de devenir député, sachant que c’était une occasion de changer les choses, de faire partie d’un important changement et de léguer un pays meilleur aux générations à venir, mais personne n’est jamais vraiment préparé à voter une mesure législative de cette importance.
    Au cours de ma vie, j'ai souvent été témoin de souffrances humaines. C'est toute une épreuve que de voir un proche, un ami ou même un étranger endurer des souffrances intolérables, sans espoir de guérison.
    C'est un fait, l'aide au suicide finira par devenir une loi. Nous savons que c'est inéluctable. En 2015, la Cour suprême du Canada a rendu une décision historique dans l'affaire Carter c. Canada. Elle a statué que les dispositions législatives empêchant Kay Carter de mettre un terme à ses jours au Canada étaient contraires à la Charte des droits et libertés.
    Kay Carter était une enseignante, une épouse et une mère. Elle était atteinte d'une forme grave de sténose du canal rachidien lombaire, une maladie qui l'empêchait de bouger son corps. À l'âge de 89 ans, comme l'aide médicale à mourir était illégale au Canada, Mme Carter et sa famille ont dû se rendre dans une clinique suisse, où Mme Carter a choisi de mettre un terme à sa vie en 2010.
    Personne ne doute que Mme Carter endurait des souffrances intolérables, mais sa famille et l'avocat de celle-ci ont déclaré publiquement que, selon eux, Kay Carter n'aurait pas été admissible à l'aide médicale à mourir en vertu du projet de loi C-14. Par conséquent, j'aimerais poser la question suivante aux députés d'en face. Si ce projet de loi visait vraiment à donner suite à l'arrêt Carter c. Canada, pourquoi exclurait-il vraisemblablement le cas qui a ouvert la porte au suicide assisté au pays?
    De nombreuses personnes ont dit craindre que ce projet de loi soit jugé inconstitutionnel. Benoît Pelletier, qui est professeur à l'Université d'Ottawa, a comparu devant le comité spécial chargé d'étudier l'aide au suicide. Il a déclaré que les personnes atteintes d'une maladie en phase terminale ou leur causant des souffrances intolérables pourraient être encouragées à demander l'aide médicale à mourir. Il a aussi déclaré ce qui suit:
[...] toutes les personnes sont potentiellement vulnérables. Le fait d’être vulnérable n’empêche pas une personne [...] de demander de l’aide pour mourir, mais elle risque d’être persuadée de demander la mort [...]
    Ce témoignage est profondément troublant. Outre les répercussions d’ordre juridique, on constate une opposition au projet de loi C-14 chez des membres de tous les partis politiques. Nous en avons entendu des membres du Parti conservateur, du Parti libéral et du Nouveau Parti démocratique ainsi que des sénateurs, de nombreux témoins et des représentants d’organismes tels que la B.C. Civil Liberties Association, la Cour d’appel de l’Alberta et l’Association du Barreau canadien exprimer leurs préoccupations à ce sujet. Notre démocratie repose sur la capacité de tenir un débat et des discussions approfondis sur un vaste éventail d’enjeux. Certaines questions sont plus faciles à aborder que d’autres. Parfois tout le monde s’entend, et parfois non.
    Dans les cas où nous n’atteignons pas de consensus, nous devons reconnaître que notre travail n’est pas terminé, que nous devons apporter des modifications. Le contrôle majoritaire de la Chambre ne devrait pas servir à écarter les opinions dissidentes, particulièrement sur un enjeu d’une telle portée et d’une telle importance.
(1105)
     En abordant le caractère sacré de la vie et de la mort, nous nous devons de mener plus de consultations, de tenir plus de discussions et de nous engager dans un débat beaucoup plus approfondi que pour la construction d’un oléoduc ou l’approbation d'un budget. Nous avons débattu de cette question pendant environ 20 heures. Plus de la moitié du caucus conservateur n’a pas eu l’occasion d’en parler. Un plus grand nombre encore de mes collègues libéraux n’ont pas eu l’occasion d’exprimer leur opinion. Je suis profondément troublé par le fait que mes collègues libéraux n’ont pas eu l’occasion de s’exprimer à ce sujet. Il semblerait presque que les députés libéraux d’arrière-ban aient été muselés à l’occasion des débats sur cet important projet de loi.
    Il a fallu au Québec six ans de débats dans des assemblées législatives successives pour rédiger sa loi sur l’aide médicale à mourir. Pendant six ans, le Québec a mené des consultations et s’est engagé à rédiger une mesure législative qui englobe sinon toutes, en tout cas la majeure partie des préoccupations, des garanties et des protections.
     On nous répète continuellement que ce projet de loi est assez bon pour le moment. À mon avis, assez bon n’est pas assez bon lorsqu’il s’agit de vie et de mort. Je suis profondément convaincu que nous avons intérêt à manquer une date butoir plutôt que d’approuver une mauvaise politique publique qui pourrait entraîner de très graves répercussions. Ce projet de loi est probablement la mesure législative la plus importante de notre génération.
    Le gouvernement libéral devrait permettre à tous les députés de s’exprimer au nom de leurs électeurs. Il devrait également mener d’autres consultations afin de rédiger un projet de loi efficace; autrement, nous risquons d’adopter une loi terriblement défaillante et même, selon moi, inconstitutionnelle. Si nous adoptons le projet de loi C-14 tel qu’il nous est présenté, nous nous exposons à des contestations judiciaires qui empêcheront les parlementaires de produire un document qui protégera les membres de notre société les plus vulnérables aux mauvais traitements.
    Le débat sur l’aide au suicide que nous tenons depuis quelques mois a dévoilé certaines options que nous devrions aussi examiner en discutant du projet de loi C-14. Les soins palliatifs constituent un élément crucial de cet enjeu. Nous devons en tout temps appliquer une stratégie efficace de prestation des soins palliatifs. Le gouvernement affirme souvent que cette stratégie importante est au cœur même de son budget pour l’avenir, et pourtant elle n’est pas mentionnée une seule fois dans le budget actuel.
     Pour que les personnes concernées soient bien au courant des choix de fin de vie qui leur sont offerts non seulement sur le plan physique, mais sur le plan émotionnel, la prestation des soins palliatifs doit être un choix de fin de vie tout à fait acceptable. Comme l’aide médicale à mourir est fortement contestée, il est important que nous discutions des soins palliatifs pour que les personnes concernées soient en mesure de prendre les meilleures décisions possible sur l’amélioration de leur qualité de vie. Nous nous devons de protéger nos citoyens les plus vulnérables.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt dans le débat, j'ai une enfant mature qui souffre de troubles cognitifs. Même si elle est en santé, qu'elle contribue activement à la vie de la collectivité et que j'en suis extrêmement fier, ma fille ne pourrait pas, aujourd'hui, prendre une décision éclairée, encore moins si elle était atteinte d'une maladie grave et incurable.
    Nous devons également penser aux professionnels de la santé, les médecins et le personnel infirmier, qui ont choisi leur domaine pour sauver et améliorer des vies et pour permettre à des gens de continuer à vivre en santé. Nous devons veiller à ce que ces personnes soient protégées, elles aussi, et ne pas nous décharger de cette responsabilité sur les provinces. Nous devons nous assurer que la mesure législative ne deviendra pas, pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale, un moyen de mettre fin à leur souffrance et que le suicide assisté ne sera ni imposé ni choisi par des personnes qui y sont contraintes ou ont l'impression d'être un fardeau.
    Comme l'a si bien dit Catherine Frazee, professeure émérite à l'Institut pour la recherche et l'éducation sur l'invalidité de l'Université Ryerson:
     Au coeur de ce débat se trouve l'obligation de choisir entre des visions opposées de notre tissu social. Allons-nous nous soumettre sans broncher aux diktats de la liberté individuelle, quel qu'en soit le prix social, ou allons-nous plutôt reconnaître que la liberté individuelle a des limites qui nous servent tous quand nous sommes vulnérables et sur notre déclin?
    Quand nous commençons à défaire le tissu social, l'assise de la société, nous devons nous assurer que des mesures de protection appropriées sont en place et qu'il existe un système de freins et de contrepoids. Un tel système ne se construit pas du jour au lendemain au moyen d'un débat limité où l'on impose l'attribution de temps. Il requiert l'écoute, l'apprentissage et la prise en compte d'une grande variété de points de vue, de témoignages et d'opinions; il suppose la collaboration, une analyse approfondie et l'acceptation d'amendements dont aucun ne semble concorder avec les priorités du gouvernement libéral.
(1110)
    J’aimerais remercier nos collègues de tous les partis, qui nous ont fait part de leurs expériences au cours de ce débat. Je les remercie toutes et tous d’avoir exprimé leurs points de vue et d’avoir partagé les expériences personnelles qu'ils ont vécues, et je remercie également tous les habitants de ma circonscription, Cariboo—Prince George, et ils sont nombreux, de m'avoir fait part de leurs opinions et de leurs expériences.
    Je tiens également à remercier les membres du comité, qui ont travaillé sans relâche pour trouver une solution. Je remercie chacun d'eux d’avoir pris le temps d'exprimer leurs sentiments sur cette importante mesure législative.
    Pour les raisons que j’ai évoquées dans mon discours, je ne peux pas appuyer le projet de loi C-14 dans son libellé actuel.
    Monsieur le Président, si vous le permettez, j’aimerais également exprimer notre gratitude et notre reconnaissance aux nombreuses personnes qui nous ont permis d’en arriver là où nous sommes aujourd'hui, y compris les membres du comité mixte permanent du Sénat et de la Chambre et les membres du comité qui ont étudié le texte après la deuxième lecture.
     Nous sommes conscients du fait que le projet de loi a donné lieu à de nombreuses heures de discussion et de débat et à des exposés de personnes de différentes régions du pays. Au cours de la dernière année, les Canadiens ont eu la possibilité, par le biais de leurs élus, d'entrer en contact et de parler avec des personnes, des députés et d'autres intervenants qui ont déployé de grands efforts.
     Je crois que le député ne sera pas déçu au bout du compte et qu'il constatera que le texte de loi est tout à fait conforme à la Charte. Le texte fixera le cadre juridique et sera en fin de compte un atout puisqu’il garantira la bonne marche à suivre dans ce dossier très important.
    Le député ne pourrait-il pas à tout le moins reconnaître l'énorme travail accompli en vue de la rédaction du projet de loi? Le député le sait certainement puisque, depuis janvier de l'an dernier, le projet de loi a suscité de nombreux débats.
    Monsieur le Président, mes commentaires ne visent pas à diminuer le travail effectué par le comité pour en arriver où nous en sommes aujourd'hui. Il est évident que c’est un sujet très controversé.
    Ce qui me préoccupe, c’est que 338 députés ont été élus pour être les voix de leurs électeurs, les voix des Canadiens d'un océan à l'autre. Nous avons eu une vingtaine d’heures de débats. On a eu recours à l'attribution de temps. Nous sommes à nouveau en train de débattre et de discuter d’un projet de loi, le plus important de notre génération, et l’on n'entend que des opinions dissidentes et des inquiétudes.
     Plus de la moitié des membres du caucus de ce côté-ci n'a pas eu l'occasion d’intervenir à cet égard. Je ne serais pas étonné d'entendre qu'un nombre encore plus grand de députés du gouvernement n'ont pas non plus eu l'occasion d'exprimer leurs véritables préoccupations sur cette importante mesure législative.
    Monsieur le Président, j'aimerais poser une question à mon collègue, étant donné que nous n'avons pas du tout eu l'occasion de débattre de cette question comme il se doit et d'élaborer une mesure législative sensée, alors que nous aurions tous pu donner notre point de vue sur le sujet.
    J'aimerais vraiment qu'il nous parle davantage de l'importance d'adopter une stratégie de soins palliatifs. J'ai été consternée de constater que cette mesure législative a été présentée alors que nous disposions de très peu de renseignements. On fait pour ainsi dire preuve d'indifférence lorsqu'on discute d'une mesure comme le projet de loi C-14 sans disposer de renseignements concrets et utiles, non seulement sur les soins palliatifs, mais aussi sur l'application de la Loi canadienne sur la santé pour ce qui est des soins à domicile.
    Je me demande si le député pourrait nous en dire plus sur certaines mesures concrètes qui pourraient être prises dans le cadre d'une stratégie de soins palliatifs dans ce contexte.
(1115)
    Monsieur le Président, le gouvernement a parlé de sa stratégie de soins palliatifs et a mentionné qu'il s'agit d'un aspect clé du projet de loi. En réalité, dans le budget de 2016, le gouvernement n'a pas abordé la question des soins palliatifs ni indiqué qu'il accroîtrait le financement destiné à ces soins. Cet aspect a été soulevé à d'innombrables reprises.
    Je crois fermement que nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour atténuer les souffrances des gens et répondre aux besoins essentiels des personnes qui mourront bientôt en nous assurant qu'elles souffrent le moins possible.
    Ce que je reproche au gouvernement, c'est qu'il n'accorde aucun financement à cette fin. C'est un aspect qui est relégué au second plan. De plus, il refile certaines responsabilités aux gouvernements provinciaux. Ainsi, ce sont eux qui devront déterminer l'admissibilité et protéger le droit à la liberté de conscience des professionnels de la santé. Ce n'est pas tout; nous savons aussi que ce sont les entités provinciales qui devront se charger des soins palliatifs.
    Monsieur le Président, j’ai l’honneur de parler du projet de loi C-14, qui en est à l'étape de la troisième lecture.
     Il y a quatre mois, j’ai participé à la première réunion d’un comité spécial de la Chambre et du Sénat qui a été créé pour conseiller le gouvernement sur sa réponse à la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Carter. Nous avons travaillé de longues heures jusque tard dans la nuit et avons collaboré de façon respectueuse et constructive avec tous les partis et avec des parlementaires des deux Chambres. Nous avons entendu des témoins et des experts de tous les horizons et provenant de partout au Canada.
     Pendant nos travaux, je sais que beaucoup d’entre nous ont pensé aux personnes qui ont lutté et qui ont souffert pour obtenir le droit de décider de la fin de leur vie: des gens comme Sue Rodriguez, décédée en 1994 après avoir perdu son combat contre la SLA et après avoir perdu sa bataille à la Cour suprême du Canada un an auparavant. J’ai souligné l’importante contribution de gens comme le député Svend Robinson dans cette lutte précédente. Je pense aux gens comme Kay et Lee Carter, Hollis Johnson, William Shoichet et Gloria Taylor, qui ont lutté d’arrache-pied et qui ont obtenu gain de cause à la Cour l’an dernier.
     Les travaux du Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir ont prouvé qu’il était possible d’avoir un débat réfléchi et respectueux, mais surtout, qu’un projet de loi bien formulé pourrait obtenir l’appui de tous les partis et des membres des deux Chambres. Je dis cela parce que la grande majorité des sénateurs et députés de tous les partis étaient d’accord sur 21 recommandations à présenter au gouvernement actuel. Je n’aurais jamais pensé que je me trouverais ici aujourd’hui pour m’opposer à ce projet de loi.
     Ce projet de loi rejette la plupart des recommandations du comité mixte de la Chambre et du Sénat, ou n'en tient pas compte. Je suis fier de ces recommandations. Il est vrai que plusieurs d’entre elles auraient nécessité un énorme courage politique, mais elles étaient toutes fondées sur les données probantes que nous avaient fournies la plupart des experts qui ont témoigné devant nous. Par exemple, j’ai cherché à faire accepter les demandes préalables par des personnes susceptibles de perdre la capacité de fournir un consentement compétent plus tard. La grande majorité des Canadiens nous ont dit que c’est ce qu’ils voulaient. Toutefois, non seulement ce projet de loi rejette ces recommandations, il irait aussi à l’encontre de la décision de la Cour suprême. Il ne répondrait pas aux exigences de cette dernière et contreviendrait donc à la Charte des droits et libertés pour les Canadiens qui souffrent.
     C’est l’opinion de l’Association du Barreau canadien, du Barreau du Québec et de nombreuses autres instances. La Cour d’appel de l’Alberta a pris la même décision il y a deux semaines, et il y a à peine quelques jours, le juge Paul Perell de la Cour supérieure de justice de l’Ontario a statué que la Cour suprême autorisait une aide médicale à mourir si « l’affection médicale en question représente une menace pour la vie de la personne et a une incidence négative sur sa qualité de vie ». Il a ensuite ajouté: « Il n’y a aucune exigence voulant que l’affection soit mortelle ou que le patient soit en phase terminale. »
     Malgré cela, le gouvernement actuel a limité les débats et a essayé d’imposer un projet de loi boiteux à la Chambre.
     Il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’un dossier complexe et controversé, mais ce n’est pas une question partisane. La Cour suprême a donné au législateur une occasion — et non un ultimatum — d’élaborer un projet de loi conforme à l’arrêt Carter. Comme c’est souvent le cas dans ce débat, nous devrions examiner les propos exacts de la Cour. Voici ce qu’elle a dit au paragraphe 126 de l’arrêt en question: « Il appartient au Parlement et aux législatures provinciales de répondre, si elles choisissent de le faire, en adoptant une loi compatible avec les paramètres constitutionnels énoncés dans les motifs du jugement. »
    Aujourd'hui, la ministre de la Justice a de nouveau laissé entendre que la Cour suprême nous a ordonné d'adopter un projet de loi d'ici une date précise, alors que la Cour a dit le contraire. Le vote étant libre, chacun d'entre nous, parlementaires, doit répondre à une simple question: est-ce que le projet de loi respecte les paramètres constitutionnels énoncés par la Cour suprême dans l'arrêt Carter? À mon avis, c'est là l'unique question. Si la réponse est négative, c'est-à-dire que le projet de loi ne respecte pas ces paramètres, cela signifie que le gouvernement demande à la Chambre de porter atteinte sciemment aux droits que la Charte garantit aux Canadiens qui souffrent et de consacrer cette violation dans la loi.
(1120)
    La Cour suprême du Canada a établi que tous les adultes canadiens capables atteints de problèmes de santé graves et irrémédiables leur causant des souffrances intolérables ont le droit de recourir à l'aide médicale à mourir. Or, le gouvernement voudrait que nous accordions ce droit seulement aux patients en fin de vie.
    L'Association du Barreau canadien a affirmé qu'une telle restriction ne respecte pas le socle de droits établi par la Cour. Le Barreau du Québec a dit la même chose, tout comme le Conseil canadien des avocats de la défense, l'association des libertés civiles de la Colombie-Britannique et bien d'autres organismes juridiques respectés.
    J'ai suggéré de supprimer cette ligne pour permettre au projet de loi de se conformer à la décision de la Cour suprême et à la Charte, mais la majorité libérale a rejeté cette idée. La Cour d'appel de l'Alberta a jugé à l'unanimité que l'interprétation par le gouvernement de l'arrêt Carter était erronée. Dans une décision cruciale qu'elle a rendue il y a quelques semaines, elle a dit ceci:
    La décision dans la cause Carter, rendue en 2015, n'exige pas que le requérant soit en phase terminale. [...] La décision est claire. [...] L'interprétation qu'en fait [le ministère de la Justice] ne respecte pas la prémisse fondamentale de l'arrêt Carter [...]
    Il s’agit d’une mise en accusation dévastatrice de l’argument même sur lequel le gouvernement s’est appuyé pour défendre le projet de loi C-14 contre ce chœur de critiques de plus en plus grand. Cette décision devrait assurément nous faire hésiter. Pourtant, certains persistent à dire qu'on ne peut obéir les yeux fermés à la Cour suprême, que la réalité médicale dicte une approche équilibrée.
    Les restrictions du gouvernement ont également fait froncer des sourcils dans la communauté médicale. La fédération représentant chaque ordre des médecins du Canada a dit de cette exigence du projet de loi relative à la fin de la vie qu’elle était « trop vague pour être comprise ou appliquée par le corps médical et trop ambiguë pour être efficacement réglementée ».
     L’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario l’a qualifiée de non conforme dans le contexte de la décision Carter et susceptible de créer des malentendus chez les médecins. L’Association des infirmières et infirmiers du Canada a proposé un retour à la formulation de la Cour suprême, ce que j’ai fait ici. Si c’était le cas, ce passage controversé pourrait simplement être supprimé. C’est justement ce que j’ai proposé de faire et mes amendements ont été rejetés par la majorité libérale du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
     Non seulement les groupes médicaux sont préoccupés par le projet de loi, mais plusieurs n’ont même pas été consultés. Selon un témoignage livré au Sénat, ni la Fédération des ordres des médecins du Canada ni aucun des ordres provinciaux ou territoriaux n’a été consulté durant la rédaction du projet de loi.
    Nous sommes en présence d’un projet de loi dont certains passages clés se sont attiré les foudres des communautés juridiques et médicales. Ces passages pourraient être écrits sur une serviette de table. Ils pourraient aisément être supprimés, comme mes amendements le proposaient, et remplacés par la formulation exacte de la Cour suprême. Qui pourrait résister et s’opposer à cela de bonne foi? C’est pourtant ce que le gouvernement a précisément refusé de faire.
     Dès le premier jour des audiences du Comité, un député libéral a posé une question bien simple à la ministre de la Justice: « Avons-nous sollicité des conseils extérieurs pour nous assurer que ce projet de loi est conforme à la Charte? » La ministre a choisi d’ignorer la question, ne parlant que de sa confiance personnelle envers ledit projet de loi. Il est clair qu'aucune source indépendante n'a confirmé sa conformité à la Charte.
     Je comprends ce que la ministre a dit récemment à la Chambre, soit que nul ne détient le monopole de l’interprétation de la Charte. La ministre a raison, bien entendu, mais j’ai peur que l’aberration dans le présent cas ne soit pas commise par les critiques, mais bien par le gouvernement. Les associations des Barreaux du Canada et du Québec, des experts juridiques et médicaux et l’avocat principal de l’affaire Carter s’accordent pour dire que le projet de loi ne répond pas à la décision de la Cour suprême du Canada.
     Le gouvernement se dresse pratiquement seul devant cette garde, brandissant une étude générale du ministère de la Justice et refusant de transmettre la question à la Cour suprême, voire d’obtenir un avis juridique indépendant.
     La Cour d’appel de l’Alberta a unanimement rejeté l’argument du gouvernement voulant que la Cour suprême limitait sa décision aux patients en fin de vie. Permettez-moi de répéter: une cour d’appel provinciale a déjà statué que l’interprétation étroite et sélective de la décision Carter faite par le gouvernement, l’argument juridique appuyant ce projet de loi, n’est pas dans l'esprit de la décision de la Cour suprême et viole conséquemment les droits d’un patient conformément à la Charte.
(1125)
     On nous demande maintenant d’inscrire cette violation dans la loi, et avec quelle justification? Aucun argument confirmant la conformité du projet de loi avec Carter et la Charte n’a été avancé. La ministre a raison de dire que les nombreux détracteurs du projet de loi C-14 ne peuvent pas se contenter d’affirmer que celui-ci n’est pas constitutionnel, mais le gouvernement ne peut pas non plus se contenter d’affirmer le contraire. Nul ne peut prétendre savoir ce que pensent intimement les juges de notre Cour suprême, mais le gouvernement ne peut pas non plus continuer de laisser entendre que l’intention de leur décision est quelque peu opaque ou impossible à connaître. La décision ne tient pas du test de Rorschach, elle est tout à fait claire. La Cour analyse le droit avec le même objectif que le projet de loi, à savoir de protéger certaines personnes vulnérables qui souffrent pendant des moments de faiblesse. La Cour a conclu que l’interdiction antérieure était trop large parce qu’elle visait des personnes en dehors de cette catégorie, des personnes compétentes qui n’étaient pas vulnérables et qui méritaient donc de voir leur autonomie respectée.
    Il continuerait d’en être ainsi dans le cadre du projet de loi C-14. Toute une catégorie d’adultes canadiens compétents serait condamnée à des souffrances intolérables et se verrait refuser le recours à une aide à mourir. Ces gens peuvent être forcés de mettre fin à leurs jours prématurément ou violemment. Ce sont les mêmes violations des droits énoncés à l’article 7 dont parle déjà la Cour dans Carter. La Cour n’a pas choisi dans cette décision de procéder à une analyse de la violation de l’article 15, c’est-à-dire de la disposition relative aux droits à l’égalité, mais la juge de première instance a procédé à cette analyse et elle a conclu que l’interdiction imposait « un fardeau disproportionné aux personnes handicapées physiquement, car pour s’enlever la vie, elles seules sont limitées au refus de s’alimenter et de s’hydrater ».
     Comme nous l’a fait remarquer le ministre de la Santé du Québec lorsqu’il s’est prononcé contre le projet de loi, c’est précisément à la même option cruelle que seront bientôt confrontés les patients si la disposition du projet de loi C-14 relative à la fin de vie n’est pas supprimée. Il est honteux que le projet de loi laisse dans cette situation cruelle des Canadiens qui souffrent.
    Au comité, j’ai insisté sur ce point auprès des représentants du ministère de la Justice. Je leur ai raconté l’histoire de Tony Nicklinson, qui fait l’objet d’un affidavit déposé dans l’affaire Carter. Au cours d’un voyage d’affaires à Athènes, M. Nicklinson a été victime d’un grave accident vasculaire cérébral qui a provoqué chez lui un syndrome de verrouillage. Dans cet état, il était incapable de bouger un seul muscle, à l’exception des paupières. Son esprit sain et actif était prisonnier d’un corps qui ne réagissait plus. Son état était irrémédiable, sans espoir et pouvait durer peut-être des décennies. Il déclarait qu’il ne pouvait même pas boire ou fumer dans l’espoir d’abréger son existence. C’est ce que M. Nicklinson écrivait dans un affidavit dicté en clignant des paupières. Voici ce qu’il déclarait à la Cour:
     Le problème avec leur argument est la supposition que nous voulons tous vivre, quel qu'en soit le coût sur le plan de la qualité de vie. Or, ce n'est clairement pas le cas. Je veux faire ce choix moi-même. Ce qui m'en empêche, c'est le fait que je suis trop handicapé pour m'enlever la vie et que, contrairement à une personne non handicapée, j'ai besoin d'aide pour mourir.
    Protégez les personnes vulnérables si vous le voulez (et par personnes vulnérables, je veux dire celles qui ne peuvent pas prendre de décision pour elles-mêmes), mais ne m'incluez pas. Je ne suis pas vulnérable. Je n'ai pas besoin qu'on m'aide ou qu'on me protège de la mort ou de ceux qui m'aideraient, si les conséquences juridiques n'étaient pas si lourdes [...]
    Je demande qu'on respecte mon droit de choisir quand et comment mourir. Je sais que de nombreuses personnes estiment qu'elles auront manqué à leur devoir si une personne comme moi s'enlève la vie et que la vie est sacrée, coûte que coûte. Je ne suis pas d'accord avec ce point de vue. Nul doute que la bonne chose décente à faire serait de donner aux gens le pouvoir de faire le choix pour eux-mêmes.
    M. Nicklinson ne vivait pas dans un lieu qui lui accordait le pouvoir de faire ce choix. Il n'a pas eu l'option de recourir à l'aide médicale pour mourir paisiblement. Alors, il a cessé de se nourrir et est mort de faim. S'il était en vie aujourd'hui, le projet de loi C-14 ne lui offrirait aucun espoir, aucun respect de son autonomie.
(1130)
     Voilà l’argument que j’ai présenté au ministère de la Justice. On m’a répondu que j’avais tort. On m’a dit que M. Nicklinson n’aurait pas à se laisser mourir de faim au Canada. Il devrait juste ne plus s’alimenter jusqu’à ce qu’un médecin déclare sa vie « raisonnablement prévisible ». Tels sont les mots utilisés dans le projet de loi C-14.
    C’est de cela que nous parlons quand nous disons que le projet de loi porte atteinte à la Charte canadienne des droits et libertés. Le ministre de la Santé du Québec a mis en garde le gouvernement en lui expliquant que le projet de loi obligerait des patients compétents et consentants à se laisser mourir de faim pour obtenir du gouvernement actuel les droits que leur confère déjà l'arrêt Carter.
    La Cour a jugé l’interdiction antérieure inconstitutionnelle, non seulement parce qu’elle portait atteinte aux droits des patients compétents, mais aussi parce qu’elle était inutile, un meilleur régime étant possible. La vulnérabilité, explique-t-elle, peut-être évaluée au cas par cas, et des garanties adéquatement conçues peuvent protéger les personnes vulnérables. Devant ces faits, la Cour n’a pu voir aucune justification pour continuer de refuser leur autonomie à des catégories entières de patients compétents, comme M. Nicklinson.
    Il n’y a toujours pas de justification. En fait, il ne reste plus au gouvernement qu’à se rendre à l’évidence, à savoir que le projet de loi C-14 ne satisfait pas au critère de la Cour suprême, et à dire qu’il est d’une certaine façon nécessaire, voire sage, d’enfreindre la Charte, car les mesures de sauvegarde élaborées par les libéraux sont trop faibles pour des cas plus complexes. Le projet de loi laisse à désirer et je ne peux accepter cet argument.
    Je suis fier d’avoir siégé au comité mixte de la Chambre et du Sénat qui a formulé des recommandations à l’intention du gouvernement avant la rédaction du projet de loi C-14. Nous avons étudié des pratiques exemplaires du monde entier et recommandé bon nombre des garanties solides proposées dans le projet de loi. Surtout, j’ai toute confiance dans les soins et le professionnalisme des médecins canadiens et je ne peux donc accepter que la Cour suprême ait eu tort de dire que des mesures de sauvegarde adéquatement conçues peuvent protéger les personnes vulnérables. Je ne puis accepter l’idée que ce régime est si faible — ou les médecins canadiens si négligents — qu’on ne peut croire qu’il fasse respecter fidèlement tous les droits des patients garantis par la Charte et qu’il écarte ceux qui ne sont pas en mesure de faire ce choix.
     J’en arrive donc à la seule conclusion possible. L’adoption du projet de loi annulerait les droits établis par la Cour suprême pour toute une catégorie d’adultes canadiens compétents qui souffrent, et ces droits seraient annulés sans que ce soit nécessaire d’un point de vue médical ou justifié d’un point de vue juridique.
    J'ai proposé des amendements au projet de loi, qui ont été rejetés. J'ai demandé une analyse constitutionnelle indépendante, qui n'a pas été réalisée. J'ai demandé au gouvernement de renvoyer la question à la Cour suprême du Canada, mais il ne l'a pas fait. Je ne peux donc pas, en tant qu'avocat et parlementaire, appuyer l'adoption d'une loi qui, à mon avis, serait inconstitutionnelle dès le départ. Je ne peux pas voter pour le projet de loi C-14 et aller à l'encontre des droits garantis par la Charte aux patients qui souffrent, et j'en connais quelques-uns.
    Le gouvernement tentera d'excuser les imperfections du projet de loi en les qualifiant de circonstances inévitables, et je sais que certains députés reconnaissent que le projet de loi comporte des failles, mais ils se sont fait dire de l'adopter pour le 6 juin tout simplement.
    Il faut bien comprendre ce qui se passera le 6 juin. L'interdiction absolue de l'aide médicale à mourir ne sera pas rétablie et les infractions qui l'empêchent, comme l'aide au suicide, ne disparaîtront pas du Code. En d'autres termes, le crime ne deviendra pas légal et l'aide médicale à mourir ne deviendra pas illégale. Il y aura plutôt une exception pour les patients et les médecins qui agissent selon les paramètres de l'arrêt Carter. Bien sûr, les organismes de réglementation provinciaux ont établi des règles en matière de protection au cours de la dernière année de toute façon. Les provinces sont prêtes à aller de l'avant. La loi fédérale n'est pas nécessaire pour assurer un accès de base et une protection.
    Je demande à mes collègues d'en face, avec qui j'ai travaillé de manière constructive et collaborative, de donner tout son sens à ce vote libre, de montrer par l'exemple ce que les Canadiens savent être la vérité: que c'est la Cour suprême du Canada et non le Cabinet du premier ministre qui a le dernier mot au sujet de nos droits constitutionnels.
(1135)
    Je propose:
    Que la motion soit modifiée par substitution, aux mots suivant le mot « Que », de ce qui suit:
    « le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir) ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit renvoyé de nouveau au Comité permanent de la justice et des droits de la personne pour que ce dernier réexamine l'article 3 de manière à s'assurer ce que les critères d'admissibilité qu'il contient respectent les paramètres constitutionnels établis par la Cour suprême dans sa décision sur l'affaire Carter c. Canada. »
    L’amendement est recevable.
    Nous passons aux questions et observations. Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre a la parole.
    Monsieur le Président, je suis déçu que le député ait choisi de proposer encore un autre amendement. Il est maintenant clair qu’un grand nombre de députés préféreraient ne pas avoir de mesure ou de cadre législatif. Mais si nous nous plions à la volonté de ces gens-là, nous allons créer un vide juridique au Canada, où les personnes les plus vulnérables se retrouveront dans des situations extrêmement difficiles. Ce serait tout à fait regrettable.
    J’ai écouté attentivement ce que le député vient de dire, et je ne suis pas d’accord avec lui. Suite à la décision de la Cour suprême, Ottawa et les provinces ont un rôle à jouer.
     Ma question est la suivante. Pourquoi le député préfère-t-il créer un vide juridique au lieu de mettre en place un cadre législatif? Ne reconnaît-il pas qu’à cause de ce vide juridique, un plus grand nombre de personnes vont se retrouver dans des situations difficiles?
(1140)
    Monsieur le Président, je remercie le secrétaire parlementaire de m’avoir donné son point de vue, et je regrette de l’avoir déçu. Nous essayons de défendre du mieux que nous pouvons les intérêts des Canadiens en adoptant un projet de loi qui n’obligera pas des Canadiens dans la souffrance à s’adresser à la Cour suprême dès son adoption. C’est la raison pour laquelle nous agissons ainsi, et nous espérons que la population appuiera cette initiative.
    Il est trompeur de parler de vide juridique, et je dis cela avec respect. Tous les collèges de médecins et de chirurgiens du pays s’emploient déjà à définir des balises. C’est vrai qu’il serait préférable d’adopter le projet de loi C-14 d’ici au 6 juin plutôt que de ne pas avoir de projet de loi du tout, mais il serait bien pire d’adopter un projet de loi qu’on sait être inconstitutionnel. Prenons donc le temps de bien faire les choses, plutôt que de vouloir les faire trop vite.
    Monsieur le Président, je remercie le député de Victoria de son intervention fort bien documentée. Même si nous aimons tous prendre la parole, il est rare, à la Chambre des communes, d’entendre un député démonter littéralement les arguments du gouvernement en matière d'aide à mourir et exposer les vraies raisons pour lesquelles le gouvernement a finalement bousillé ce qui aurait dû être une approche non partisane pour l’examen de ce projet de loi. Au lieu de faire participer tous les députés, le gouvernement s’est montré tellement partisan qu’il a compromis l’objectif du projet de loi, à savoir la mise en place d’un cadre législatif, si bien qu’il risque aujourd’hui de ne rien avoir du tout.
     J’aimerais poser une question au député de Victoria. Il a parlé avec beaucoup d’éloquence de l’incertitude que crée l’adoption à la va-vite de ce projet de loi. Pourrait-il nous donner plus de détails sur les conséquences potentielles de l’adoption à la va-vite, par la Chambre des communes, d’un projet de loi qui n’est pas conforme à nos obligations constitutionnelles ou aux obligations énoncées dans la décision de la Cour suprême?
    Monsieur le Président, je remercie moi aussi mon estimé collègue de Burnaby—New Westminster de son intervention.
    Nous discutons d'une question essentiellement non partisane. Il ne s'agit pas d'une initiative libérale, conservatrice ou néo-démocrate. La Chambre est saisie de cette question parce que la Cour suprême a statué que si le Parlement le souhaitait, il pourrait adopter une mesure législative pour faire suite à l'arrêt Carter. Le Parlement a décidé d'aller de l'avant. L'aide médicale à mourir n'est pas un enjeu partisan. Je me suis employé — et je crois que le compte rendu des délibérations en fera foi — à être aussi constructif et non partisan que possible et à collaborer avec mes collègues conservateurs et libéraux, notamment pour présenter des amendements lors de l'étude en comité.
    Je suis renversé de voir ce que le gouvernement s'apprête à faire alors qu'il se présente comme le grand défenseur de la Charte des droits et libertés. Je n'arrive pas à comprendre. Nous serons confrontés à une grande incertitude sur les plans médical et juridique, comme je me suis employé à le souligner dans mon intervention. Vous n'avez pas à me croire sur parole, mais les organismes de réglementation du monde médical et juridique abondent dans le même sens. De toute évidence, nous devons faire mieux.
    Monsieur le Président, il est passablement préoccupant d'entendre les députés d'en face avancer certains avis juridiques ou certaines positions comme argument.
    Je suis convaincu que l'opposition sait pertinemment que nombre d'avocats ont émis des avis juridiques fouillés sur la question et que ces experts ont clairement indiqué que la mesure législative que nous débattons aujourd'hui s'inscrit dans le droit fil des principes de la Constitution canadienne et que notre proposition résistera à toute contestation en vertu de la Charte.
    Le député ne reconnaîtra-t-il pas à tout le moins qu'une portion considérable du milieu juridique appuie ce projet de loi?
    Monsieur le Président, je ne suis pas prêt à admettre qu'un nombre considérable d'avis juridiques abondent dans ce sens.
    Je dirai plutôt que le ministère de la Justice est de cet avis, mais que les juges de la Cour suprême du Canada ont unanimement refusé de lui donner raison. Je dirai que la Cour d'appel de l'Alberta l'a débouté de son appel. Je dirai également qu'il y a environ une semaine, le juge Perell, de la Cour supérieure de l'Ontario, a aussi rejeté le point de vue du ministère de la Justice.
    Je dirai que l'Association du Barreau canadien, le Barreau du Québec, M. Ménard, Joseph Arvay et d'éminents constitutionnalistes des quatre coins du Canada ne partagent pas non plus la position du ministère.
    Je ne peux pas prévoir avec certitude ce que la Cour suprême décidera, mais je garantis que je ne voudrais pas être à la place du gouvernement, dont la position ne semble pas étayée par le moindre avis juridique indépendant.
(1145)
    Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député de Victoria pour ses allocutions et ses analyses, qui sont toujours mûrement réfléchies, et pour ses interventions dans de nombreux dossiers dont la Chambre est saisie.
    Le gouvernement a rejeté hier certains amendements judicieux. Comment cela se fait-il? J'aimerais avoir l'opinion du député. Je ne peux imaginer que des raisons politiques.
    Qu'en pense le député?
    Monsieur le Président, je ne sais pas très bien pourquoi le gouvernement tient tellement à adopter une loi que tant de gens jugent inconstitutionnelle.
    À vrai dire, je ne sais pas pourquoi de très bons amendements ont été rejetés hier. Ce devait être un vote libre, mais à peine une poignée de députés libéraux se sont opposés au projet de loi.
    Je crois comprendre que nous nous prononcerons ce soir à l'étape de la troisième lecture. Les députés — surtout ceux qui se soucient de la primauté du droit — auront alors l'occasion de voter contre un projet de loi qui est manifestement inconstitutionnel, afin de pouvoir plutôt faire les choses de la bonne façon, dans l'intérêt des Canadiens, et de protéger les gens dont la décision Carter a, de toute évidence, confirmé les droits, mais à qui le projet de loi C-14 les retirerait.
    Monsieur le Président, le député pourrait-il nous résumer un peu le traitement de la question des soins palliatifs dans ce dossier?
    L'ancien député de Windsor—Tecumseh, M. Joe Comartin, avait soulevé de très importantes questions dans cette enceinte, et sa successeure, la députée actuelle de Windsor—Tecumseh, a repris le flambeau.
    Les prochaines étapes de l'étude de ce projet de loi permettront éventuellement à tous les sénateurs de prendre la parole à ce sujet, ce qui n'a pas été le cas pour tous les députés. Mon collègue pourrait-il nous dire ce qu'il en pense, car, à mes yeux, c'est honteux et c'est un affront à la démocratie?
    Monsieur le Président, le dossier des soins palliatifs a été défendu avec passion par les députés de Windsor—Tecumseh, l'ancien et l'actuelle, à la Chambre, au comité de la justice et au sein des comités mixtes des Communes et du Sénat.
    Nous voulions que des dispositions garantissant les soins palliatifs soient incluses dans le projet de loi. Nous sommes déçus que pas un sou n'ait été prévu dans le budget fédéral pour les soins palliatifs, malgré les promesses électorales. Nous avons toutefois pu faire amender le préambule du projet de loi C-14 pour qu'au moins l'on se penche sur la question urgente des soins palliatifs.
    La ministre de la Santé a souligné elle-même que moins de 30 % des gens ont accès à des soins palliatifs au Canada. Il y a un lien avec le projet de loi et ce lien doit être manifeste, car nous avons beaucoup de progrès à faire sur ce plan.
    J'espère simplement que le gouvernement ne s'en tiendra pas qu'aux belles paroles et que, dans les accords sur la santé, il prévoira des sommes importantes pour les soins palliatifs et pour les établissements où l'on offre de tels soins, dans l'ensemble du pays. On a un besoin urgent de cet argent.
    Monsieur le Président, c'est avec humilité que je prends la parole à la Chambre aujourd'hui au sujet du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir).
    Je vais partager mon temps de parole avec le député de Kenora.
    Je sais que cet enjeu touche de très près les Canadiens. C'est une question de qualité de vie, de dignité, d'autonomie et, surtout, de compassion.
    Dans ma circonscription, Brampton-Sud, beaucoup de gens m'ont fait part de leur opinion sur cette question. La plupart appuient le projet de loi. Certaines personnes ont aussi exprimé des préoccupations sincères, en particulier dans les communautés orthodoxes. Je comprends leur conviction et je les remercie d'avoir exprimé leur point de vue au sujet de cet enjeu important.
    Je vais utiliser le temps dont je dispose pour expliquer la raison pour laquelle je vais voter en faveur de cette mesure législative importante.
    Je suis de tout coeur avec toutes les personnes souffrantes et les membres de leur famille, qui sont confrontés à des situations que j'ai peine à imaginer. Je pense que nous pouvons convenir que le débat devrait porter sur les personnes qui souffrent et leur famille. J'espère que les députés s'en souviendront. Nous devons tendre vers une approche compatissante pour les personnes touchées. C'est une question sérieuse et complexe. Nous devons donc trouver le juste équilibre.
    Le gouvernement doit y voir maintenant. La Cour suprême a pris une décision unanime et, bientôt, il y aura un vide juridique.
    Je pense que nous pouvons convenir qu'une approche provinciale fragmentée n'est pas indiquée. Nous ne remplirions pas notre responsabilité, qui consiste à exercer un leadership national sur cette question.
    Le cadre qui est décrit dans le projet de loi C-14 prévoit un plan solide, précis et détaillé qui respectera la date butoir du 6 juin fixée par la Cour. Je m'explique.
    Permettre l'aide médicale à mourir donnera aux malades en phase terminale qui y sont admissibles un plus grand contrôle sur la façon de vivre leurs derniers jours. Cette mesure législative comporte également d'importantes mesures de sauvegarde et limitations. Elle requiert que le ministre de la Santé et le ministre de la Justice, en consultation avec les provinces, créent des règlements qui protégeront toutes les parties en cause.
     En permettant le recours à l’aide médicale à mourir aux adultes capables dont la mort est raisonnablement prévisible, je pense que nous établissons l’équilibre le plus approprié entre, d’une part, l’autonomie des personnes qui demandent cette aide et, d’autre part, les intérêts des patients qui ont besoin de protection.
    Il importe de mentionner que ce projet de loi n'est pas la seule mesure qui est prise. Je signale qu'il se fait un important travail d'amélioration des soins palliatifs au pays. L'idée d'autoriser l'aide médicale à mourir et celle d'offrir un bon système de soins palliatifs ne s'excluent pas l'une l'autre. Les deux sont plutôt complémentaires. Ce sont deux volets importants à prendre en considération. C'est la raison pour laquelle je suis fière que la ministre de la Santé ait réitéré son engagement à améliorer les soins à domicile et les soins palliatifs en réponse à une question que j'ai posée durant la période des questions du 2 mai dernier. Dans sa réponse, la ministre a cité le Dr Atul Gawande, qui a dit que les gens voulaient non seulement une belle mort, mais aussi une belle vie jusqu'à la toute fin. La ministre a confirmé son engagement à améliorer les soins palliatifs et à assurer la dignité des Canadiens qui souffrent. Elle a annoncé qu'elle travaillerait avec les provinces pour que tous les Canadiens puissent recevoir des soins de qualité. Elle a aussi mentionné que le gouvernement fédéral comptait injecter 3 milliards de dollars en quatre ans dans l'amélioration des soins palliatifs et des soins à domicile. Je salue cette initiative.
    Quand on examine un projet de loi sur l'aide médicale à mourir, il faut aussi penser aux investissements consacrés au système de soins de santé. L'accès à des soins palliatifs de qualité figure parmi les priorités du gouvernement. Pendant la renégociation de l'accord sur la santé avec les provinces, il sera sûrement question de soins palliatifs. Il est essentiel de collaborer avec les provinces, les territoires et les intervenants pour pouvoir offrir des options en matière de soins de fin de vie.
     J'ai déjà travaillé comme coordonnatrice de la recherche et éducatrice en diabète. Je sais à quel point le rôle et le point de vue des médecins et du personnel infirmier sont essentiels dans ce dossier. À titre de membre du comité de la santé, et grâce à quelque 20 ans d'expérience dans le secteur de la santé, je sais qu'il faut absolument consulter les professionnels de première ligne. Les médecins et le personnel infirmier sont au coeur du processus de fin de vie. Le projet de loi à l'étude respecte leur liberté de conscience. Nous cherchons à déterminer comment procéder pour que leur point de vue soit toujours pris en compte.
(1150)
    Le projet de loi contient des règles claires et définit les critères d'admissibilité avec soin. Je tiens à dire clairement que rien, dans le projet de loi, n'oblige un médecin ou un membre du personnel infirmier à fournir une aide médicale à mourir. Cette mesure vise à trouver un juste équilibre entre l'accès à l'aide médicale à mourir et le respect des convictions personnelles des professionnels de la santé. Elle vise à trouver un juste équilibre.
    Les Canadiens se tournent vers leurs médecins et vers le personnel infirmier pour obtenir des soins de santé et un soutien qui les aidera à conserver leur qualité de vie. Ils veulent aussi savoir que, si toute qualité de vie devient impossible et qu'ils choisissent de mourir dans la dignité, leurs fournisseurs de soins de santé pourront les aider.
    Les garanties procédurales nous permettent d'obtenir un juste équilibre, selon moi. L'accès à l'aide médicale à mourir sera réservé aux personnes répondant aux critères suivants: être un adulte mentalement capable dont la situation médicale se caractérise par un déclin avancé et irréversible de ses capacités, qui est atteint d'une maladie, d'une affection ou d'un handicap graves et irrémédiables, qui endure des souffrances intolérables et prolongées et dont la mort est raisonnablement prévisible.
    De plus, le fait d'aider une personne à mourir ou à causer la mort d'une personne sera encore considéré comme un crime dans tout autre contexte que l'aide médicale à mourir légitime. Les mesures de protection sont une composante essentielle du projet de loi qui permet de voir à ce que les patients admissibles aient accordé leur consentement de manière éclairée. Les patients doivent présenter une demande d'aide médicale à mourir par écrit et la faire signer par deux témoins indépendants. Il faut deux avis médicaux indépendants pour confirmer que le patient répond à tous les critères. Ces deux premiers critères visent à s'assurer que la demande d'aide médicale à mourir est vraiment volontaire, qu'elle reflète le souhait du patient, et qu'elle ne découle pas de pressions externes exercées sur le patient.
    Notre approche fondée sur des données probantes s'appuiera sur un cadre de réglementation, de surveillance et de reddition de comptes. Ce régime de surveillance et de reddition de comptes permettra également de signaler tous les problèmes et les effets imprévus. Nous voulons que les Canadiens aient la conviction que le régime fonctionne et qu'il prévient les abus et les erreurs. Cela renforcera la confiance et permettra aux Canadiens de prendre des décisions éclairées en fonction des modalités du régime.
    Je sais que d'autres députés ont fait allusion à la possibilité de s'appuyer sur des modèles étrangers afin de trouver des façons de collaborer avec les provinces et les territoires. Ce régime de coordination des soins de fin de vie respectera le rôle des provinces tout en facilitant l'accès et en respectant les droits de la personne.
    Je tiens à souligner le travail des comités et des sénateurs qui ont étudié la question et formulé des recommandations en la matière. Il faut tenir compte de ces recommandations ainsi que des témoignages venant de tous les côtés. Je tiens également à féliciter les députés des discours informatifs qu'ils ont prononcés du fond du coeur. Je remercie aussi la ministre de la Justice et la ministre de la Santé des efforts qu'elles ont consentis pour présenter la mesure.
    Le projet de loi C-14 établit l'équilibre demandé dans la décision de la Cour suprême du Canada et propose le cadre juridique nécessaire. En tant que parlementaires, c'est à nous de prendre la décision finale au nom des personnes que nous servons et qui nous ont élus pour les représenter. Le débat fait intervenir notre sens de la moralité et de la justice ainsi que notre compassion. Il nous amène à nous poser des questions délicates au sujet de nos systèmes juridique et médical.
    Nous avons échangé et nous avons entendu des histoires touchantes. Nous avons réfléchi à la façon dont la question nous affecte tous. Elle nous a amenés à découvrir l'histoire des gens qui souffrent au Canada et qui seraient d'éventuels candidats à l'aide médicale à mourir. Il est bien trop facile de ne pas songer à ce que nous ferions à leur place. Il nous arrive souvent de ne pas entièrement comprendre la perspective de ceux qui sont atteints d'une maladie terminale. Leur dignité est de plus en plus mise à l'épreuve à mesure qu'approche la fin.
    Il faut que nous adoptions la mesure le plus rapidement possible. J'espère que tous les députés l'appuieront avec moi.
(1155)
    Monsieur le Président, il y a un des arguments libéraux qui ne tient absolument pas la route à mes yeux, et c'est celui des 3 milliards de dollars qu'ils se sont fermement engagés à consacrer aux soins palliatifs. À les entendre, il faut d'abord négocier l'accord sur la santé, puis faire encore ceci et cela. Ce dossier est trop important pour qu'on tergiverse ainsi.
    Les libéraux ont dit que l'éducation des Autochtones était importante et ils en ont fait mention dans le budget. Ils en sont maintenant à définir le processus de négociation. Je me demande si les soins palliatifs et les 3 milliards de dollars qui devaient y être assortis ne sont pas absents du budget simplement parce que les libéraux veulent maintenir le déficit prévu quelque part sous la barre des 30 milliards de dollars. L'argent destiné aux soins palliatifs ne figure nulle part dans le budget, mais les libéraux ont commencé à discuter de la manière dont il sera dépensé avec les provinces: où est la logique?
    Monsieur le Président, nous avons entendu toutes sortes de points de vue au sujet du projet de loi, et c'est quelque chose que je respecte. Les soins palliatifs permettent aux patients de mourir de cause naturelle dans la dignité. Les Canadiens nous ont clairement fait savoir qu'ils veulent garder leur indépendance et être soignés chez eux, y compris à la fin de leur vie. Dernièrement, les ministres de la Santé du fédéral, des provinces et des territoires ont convenu de travailler individuellement et collectivement à l'amélioration des soins à domicile afin de mieux répondre aux besoins des patients près de chez eux, y compris ceux qui ont besoin de soins palliatifs. Notre plan comporte davantage d'options, et c'est ce qu'il nous faut.
(1200)
    Monsieur le Président, j'aimerais que ma collègue nous explique mieux certains concepts. Je suis loin d'être convaincue que l'approche qu'on nous présente est équilibrée; selon moi, ce raisonnement repose sur une logique fallacieuse, puisque, jusqu'ici, une approche reposant sur des données probantes a déjà été ignorée. Je ne vois pas comment, dans la situation actuelle, alors qu'il est question d'une chose aussi grave que l'aide médicale à mourir, nous pourrions transiger là-dessus.
    La députée ne s'étonne-t-elle pas que le texte législatif n'ait fait l'objet d'aucune analyse juridique indépendante afin de savoir s'il respectait la Charte? Il n'y en a eu aucune. Ce facteur entre-t-il le moindrement en ligne de compte dans la pseudo-approche équilibrée que nous vante son parti?
    Monsieur le Président, je remercie la députée de son excellente question. Oui, le comité a fait du bon travail. Sans une loi fédérale en place, la situation sera incertaine pour les Canadiens. Je respecte les différents points de vue, mais il demeure que les députés sont chargés d'appliquer la Constitution, de représenter les Canadiens à la Chambre et d'adopter des politiques qui sont dans l'intérêt des Canadiens et fondées sur des faits probants. Les gens de Brampton-Sud m'ont élue pour être leur porte-parole à la Chambre, pour instaurer une nouvelle approche et pour mettre en oeuvre les améliorations proposées par le gouvernement. Le projet de loi C-14 est le projet de loi qui convient à ce moment-ci, car il constitue la meilleure approche. Il nous faut des mécanismes de contrôle. Voilà pourquoi je dis que le comité a fait du bon travail. L'Association médicale canadienne a dit la même chose. En effet, l'AMC a souligné que, dans l'arrêt Carter, « les paramètres sont extrêmement vagues et n'orientent d'aucune façon les actes médicaux ».
    Les termes « grave » et « irrémédiable » employés par la Cour suprême ne sont pas des termes médicaux; il faut donc en préciser la signification. C'est pourquoi le comité a fait du bon travail. Nous avons pris en considération le fruit de toutes les consultations. Il s'agit du bon projet de loi. Nous avons été à l'écoute de tous les Canadiens, et le projet de loi est celui qu'il faut adopter.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier la députée de Brampton-Sud de son allocution et de sa contribution au débat.
    L'équilibre est au coeur du débat en cours. Il s'agit d'un principe sur lequel on ne saurait trop insister. Tous les partis en ont parlé. La députée pourrait-elle en dire un peu plus à propos des investissements du gouvernement dans les soins palliatifs? Pourrait-elle aussi en dire davantage sur les efforts déployés afin de mener des consultations dans toutes les circonscriptions?
    Monsieur le Président, la ministre de la Santé a été très claire. En réponse à la question que je lui ai posée le 2 mai, elle s’est engagée devant la Chambre à investir dans les soins palliatifs. Dans le cadre d’un accord pluriannuel sur la santé, le gouvernement fédéral a promis d'investir 3 milliards de dollars sur quatre ans pour améliorer les soins à domicile, y compris les soins palliatifs. La ministre collabore avec les provinces et les territoires. Les soins palliatifs relèvent plutôt de la dignité humaine des gens qui meurent de causes naturelles. C'est le bon plan. La ministre de la Santé est tout à fait disposée à le mettre en œuvre, et c’est ce que nous faisons.
    Monsieur le Président, c’est pour moi un honneur de parler de ce projet de loi et de prendre part au débat. Je tiens tout d’abord à remercier les dirigeants de tous les partis d'avoir accepté que le vote soit libre. Il s’agit en effet d’un débat hautement émotif, délicat et personnel. Siégeant en cette Chambre depuis les années 1980, j’ai eu l’occasion de participer à de nombreux débats et je peux dire que celui-ci est l’un des plus délicats auxquels j’ai pris part à titre de parlementaire.
    Je tiens à dire d’emblée que j’appuie ce projet de loi et je vais m’en expliquer. La décision qui est la nôtre doit être fondée sur nos propres expériences et — diraient d’aucuns — sur nos propres valeurs. Cependant, il n’en reste pas moins que nous venons tous de régions différentes du Canada, que nos expériences ne sont pas les mêmes et que nous comprenons différemment ce dont il s’agit.
     Nous devons tous garder cela à l’esprit. C’est là un changement sociétal majeur. Il est majeur parce que nous manifestons l’intention de permettre à chaque Canadien, aux personnes que nous chérissons, à des proches, à nos voisins, à nos amis, d’obtenir une aide médicale à mourir. Ce débat ne devrait pas s’engager à la légère. Il ne devrait pas non plus aborder expressément les propos des avocats ou des tribunaux. Oui, le débat découle d'une affaire judiciaire et la Cour suprême a exprimé son propre sentiment à ce sujet, soit que les personnes ont effectivement droit à l’aide à mourir. Cependant, il ne faut pas minimiser les répercussions de l’octroi de ce droit sur notre pays à long terme.
     Je vais faire appel à mon expérience de député pour expliquer les raisons pour lesquelles nous devons faire preuve d’une extrême prudence et de diligence dans nos prises de décision au cours des prochaines années.
    Je représente une circonscription qui affiche probablement le plus grand nombre de suicides au Canada. Au cours de la dernière décennie, j’ai été témoin de centaines de jeunes gens qui se sont donné la mort, des jeunes dont je connais la famille, le père et la mère, et je les ai regardés avec horreur prendre ce genre de décision. C’est peut-être un peu différent de ce dont nous discutons aujourd’hui, mais cela définit bien notre sentiment envers l’objectif de permettre à des personnes de décider ultimement de s’enlever la vie avec l’aide médicale d’autrui.
    Sous ce rapport, nous devrions éviter d’endosser ce que d’autres disent à la Chambre. Par exemple, certains affirment que la loi ne va pas assez loin, qu’elle ne respecte peut-être pas la Charte en raison de son caractère trop restrictif. D'autres, qui ont soutenu des arguments tout aussi empreints de compassion, trouvent qu’elle va trop loin. Notre décision doit s’appuyer sur ce que nous pensons que nous souhaitons pour notre société. Ce n’est pas aux tribunaux qu’il incombe de déterminer et de suggérer, contrairement à ce que certains ont laissé entendre aujourd’hui même, que nous ne sommes pas allés assez loin et que, par conséquent, nous devons franchir le pas et adopter une position particulière parce qu’il se pourrait que la mesure ne soit pas conforme à la Charte.
     J’ai siégé au Cabinet pendant plusieurs années et j’ai assisté à la présentation de beaucoup d’arguments de droit par des avocats, et ce, à de nombreuses occasions. À de nombreuses occasions, j’ai pu entendre la décision qualifiée de bonne ou de mauvaise ou un conseil peu ressemblant à ce qu’on avait prévu. Pour cette raison, nous ne pouvons prendre la parole dans cette enceinte et affirmer à la population canadienne que cette loi est absolument parfaite, à peu de chose près.
(1205)
    C'est pour cette raison que j'aime l'approche que le gouvernement a adoptée. Elle est très restrictive et donne à la société le temps d'examiner d'autres aspects que nous, les parlementaires, devrons prendre en compte, comme donner la possibilité à certaines personnes de mettre fin à leurs jours. Je pense par exemple aux mineurs.
    Comme je l'ai mentionné, j'ai déjà vu de nombreux jeunes enfants s'enlever la vie. Je ne suis pas tout à fait d'accord pour qu'on autorise des mineurs qui veulent s'enlever la vie à le faire en rendant la chose légale et plus simple. C'est un aspect qui me préoccupe énormément.
    Je m'inquiète aussi au sujet des demandes anticipées. Il est difficile de prévoir ce qui pourrait arriver à une personne, et donc, nous devons étudier davantage la question des demandes anticipées et réfléchir davantage à la situation des mineurs et des personnes ayant une maladie mentale.
    J'appuie la mesure législative, mais ce n'est pas parce que la direction de mon parti me l'a demandé. Ce n'est pas ainsi que je travaille, et je n'ai jamais fonctionné de cette façon. Je l'appuie parce que je pense que c'est la meilleure approche à suivre en ce qui concerne cet enjeu, qui changera fondamentalement notre société, à tout jamais.
    Nous ne devons pas oublier, lorsque nous voterons ici, ce soir, que très bientôt, un de nos proches pourra se prévaloir des mesures prévues dans ce projet de loi. Ce n'est pas aussi facile et simple que certaines personnes le prétendent. Nous avons discuté de cet aspect aujourd'hui.
    Le cadre législatif est crucial. Il ne faut pas que le Sénat commence à discuter de la question de savoir si le projet de loi va ou non assez loin. En vérité, si le cadre nous permet d’être conformes à la Charte, alors il faut le mettre en oeuvre. Je tiens à le dire clairement. Peu importe le projet de loi que nous adopterons — que ce soit celui que semble préférer le NPD ou celui que semblent préférer les conservateurs —, tôt ou tard, il sera soumis à la Cour suprême, qui devra en attester la légalité. Le projet de loi qui sera retenu, quel qu'il soit, représentera un tel changement pour notre société qu’il est inévitable que, un jour ou l’autre, des gens s’adresseront à la Cour suprême pour en contester la légalité.
    Soyons réalistes. Le projet de loi permet aux adultes mentalement capables qui sont dans un état avancé de déclin irréversible de leurs capacités, qui souffrent d’une maladie ou d'un handicap grave et incurable, qui éprouvent des souffrances constantes et intolérables à cause de leur état de santé et dont la mort naturelle est raisonnablement imminente, compte tenu de l’ensemble de leur situation médicale, de demander une aide médicale à mourir. C’est déjà beaucoup pour commencer.
    Je sais que la mesure législative transformera le système de santé pour les prochaines générations. Je recommande vivement aux députés de ne pas préjuger de ce que les autres générations voudront dans 50 ou 100 ans. Il faut faire très attention.
    Je crois fermement, comme la plupart des libéraux, aux droits individuels. Je ne propose pas de les restreindre, mais il est juste de donner aux gens capables le droit de choisir. Personnellement, en ma qualité de député, j’estime essentiel de garder un certain contrôle et, bien sûr, un maximum de dignité dans la mort.
     Je suis heureux d’avoir l’occasion, aujourd’hui, de faire ces commentaires. Il ne s'agit certainement pas d'un enjeu partisan. Ce n’est pas ce dossier qui va donner plus de voix ou moins de voix à un député. Il est question d'un changement fondamental qui va s’opérer dans mes rapports quotidiens avec mes proches. Je tiens à ce que nous fassions les choses correctement. Je préfère pêcher par prudence plutôt que par excès.
(1210)
    Madame la Présidente, j’ai mené un sondage auprès des électeurs de ma circonscription et j’ai constaté que la plupart d’entre eux s'opposent au suicide assisté par un médecin parce qu’ils avaient entendu parler de ce qui s’était passé en Belgique et aux Pays-Bas et qu’ils voient bien que le terrain est très glissant. La plupart d’entre eux estiment cependant que, avec des balises suffisantes, la procédure pourrait être autorisée dans des cas précis. Cependant, comment faire pour ne pas se retrouver sur ce terrain glissant? C’est la question que je pose au député.
    La plupart des Canadiens veulent avoir l’assurance que l’aide médicale à mourir ne sera accordée qu’à des adultes capables. Le député en a parlé. Les Canadiens ne veulent pas que les jeunes de moins de 18 ans puissent y avoir accès lorsqu’ils se sentent déprimés ou qu’ils ont des problèmes de santé mentale. Quant aux personnes vulnérables, il faut pouvoir vérifier qu’elles sont aptes à donner leur consentement; c’est un autre problème.
     Dans la dernière partie de son intervention, le député a dit qu’il est un libéral et qu'il croit aux droits individuels. Pourquoi alors le projet de loi ne protège-t-il pas la liberté de conscience des médecins et des autres professionnels de la santé qui s’opposent à l’aide médicale à mourir? À l’heure actuelle, en Ontario, c’est une obligation...
(1215)
    À l'ordre, s'il vous plaît. D'autres députés veulent aussi poser des questions, mais nous ne disposons que de cinq minutes. J'accorderai donc un peu de temps au député pour qu'il puisse répondre à la question.
    Le député de Kenora a la parole.
    Madame la Présidente, mon collègue a posé une bonne question. Je reviens à ce que je disais au début: nous devrions prendre notre temps. Nous ne devrions pas simplement laisser la Cour suprême ou les tribunaux prendre des décisions à la place du Parlement. Dans cette enceinte, nous devons prendre des décisions en fonction de ce qui est bon pour les Canadiens et en conformité avec leurs croyances et leurs valeurs. Nos décisions, tout comme le projet de loi à l'étude aujourd'hui, seront interprétées par les tribunaux. Si, comme le député l'a laissé entendre, nous ne respectons pas la liberté de conscience des professionnels de la santé qui ne souhaitent pas participer à l'aide à mourir et que les tribunaux jugent cela inacceptable, nous en serons informés et nous tiendrons d'autres débats à ce sujet.
    Je siège ici depuis 17 ans, et mon collègue est aussi député depuis un bon bout de temps. Nous allons continuer de débattre de cet enjeu, car il s'agit d'un changement fondamental pour notre société. Nous ne pouvons pas nous comparer à d'autres pays et nous devrions aborder cet enjeu avec beaucoup de prudence.

[Français]

    Madame la Présidente, j'ai écouté avec attention les propos de mon collègue.
    Deux moments ont particulièrement retenu mon attention. Le premier a été au tout début de son intervention, quand il a salué le fait qu'il allait y avoir, de la part de tous les partis, un vote libre sur ce projet de loi. Évidemment, je salue cela également. Toutefois, il me semble qu'en plus d'un vote libre, il devrait y avoir des efforts manifestes pour rechercher le plus large consensus à la Chambre. C'est là où je pense que nos routes se séparent un peu.
    De plus, à la fin de son intervention, l'autre point qui m'a interpellé est lorsqu'il a dit que, peu importe le projet de loi qui sera voté — cela aurait pu être un projet de loi néo-démocrate, conservateur ou libéral —, il sera confronté à un nouveau débat à la cour.
    Ma question est toute simple: pourquoi avoir refusé un renvoi à la Cour suprême qui nous aurait assuré de l'acceptabilité du projet de loi?

[Traduction]

    Madame la Présidente, les renvois à la Cour suprême devraient être très rares. Je sais que l'opposition aime bien l'idée de soumettre le projet de loi à la Cour suprême. Je suis convaincu qu'elle sera un jour saisie de ce dossier, mais elle devra se pencher sur des questions précises et non déterminer si l'ensemble du projet de loi respecte la Charte.
     Je suis convaincu que le projet de loi respecte la Charte. Je suis d'accord avec la ministre: il résistera à l'examen des tribunaux, qui n'auront pas à se prononcer sur le principe même du projet de loi C-14, mais plutôt sur des questions précises, comme la question de savoir s'il va assez loin. D'autres que nous contesteront cet aspect.
    Je sais que vous me pressez d'en finir, madame la Présidente. J'allais répondre à l'autre question, mais j'aurai peut-être l'occasion de le faire à la prochaine étape.
    Je rappelle aux députés que la période des questions et des réponses ne dure que cinq minutes, ce qui est très court. Je leur demanderais donc d'être aussi brefs que possible pour qu'un plus grand nombre de questions puissent être posées.
    Le député de Provencher a la parole.
    Madame la Présidente, tout d'abord, je signale que je partagerai mon temps de parole avec le député de Selkirk—Interlake.
    D'entrée de jeu, je tiens à faire savoir que je suis contre le principe même du projet de loi C-14. Je crois dans le caractère sacré de la vie et, à mes yeux, toute vie humaine, de la conception jusqu'à la mort naturelle, a une valeur et un but.
    À titre de membre du comité de la justice et des droits de la personne, j'ai participé pendant plusieurs semaines à de longues et importantes réunions consacrées à l'étude du projet de loi C-14. Avant d'effectuer l'examen article par article du projet de loi, le comité a consacré de longues séances à entendre le témoignage d'experts et de diverses organisations de partout au Canada. En dépit des préoccupations nombreuses et répétées exprimées par les témoins, le projet de loi n'a fait l'objet d'aucun amendement substantiel.
    Le titre du projet de loi C-14 fait mention de l'aide médicale à mourir, mais il ne faut pas s'y tromper, il s'agit plutôt d'une mesure législative sur le suicide assisté par un médecin. Il est important de faire cette distinction. La gravité de cette mesure ne devrait pas être amoindrie par un libellé édulcoré. Ce projet de loi changerait le Canada à tout jamais et il serait naïf de penser que, dans sa forme actuelle, il ne mettrait pas en péril les personnes les plus vulnérables de la société canadienne. Il s'agit de la mesure législative de réingénierie sociale la plus importante des 25 dernières années, parce qu'elle modifie notre perception à l'égard du caractère sacré de la vie.
    La Cour suprême a bien précisé que le suicide assisté n'est pas un droit garanti par la Charte, mais une exemption qui pourrait être accordée exceptionnellement si certains critères sont remplis. La personne concernée doit être un adulte capable, qui consent clairement à mettre fin à sa vie et qui est aux prises avec des problèmes de santé graves et irrémédiables, y compris une affection, une maladie ou un handicap, lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition.
    Le projet de loi C-14 va manifestement au-delà de la décision de la Cour suprême puisqu'il permet d'étudier la possibilité de rendre le suicide assisté accessible aux mineurs matures, d'examiner la question des demandes anticipées et d'envisager d'offrir l'aide médicale à mourir aux personnes souffrant de maladie mentale. C'est tout simplement inacceptable.
    Le comité a entendu les témoignages d'environ 42 personnes ou groupes tous directement concernés par la question. Plus de 100 amendements ont été présentés au comité à la lumière de ces témoignages. Malheureusement, les libéraux n'ont présenté aucun amendement de fond et ont, en fait, voté contre tout amendement constructif proposé par un parti de l'opposition. Les conservateurs ont présenté de nombreux amendements fort intéressants qui auraient renforcé le projet de loi et y auraient ajouté des mesures de protection importantes, comme ils l'ont fait hier soir, à l'étape du rapport. Ce fut une occasion ratée.
    Je me permets d'attirer l'attention sur quelques-uns de ces amendements laissés de côté, qui sont de parfaits exemples d'occasions ratées.
    Ces amendements proposaient, notamment, de veiller à ce que seuls des professionnels qualifiés et formés, autrement dit, des médecins, évaluent la personne et administrent le cocktail mortel qui entraînerait la mort. De la façon dont la mesure législative est actuellement rédigée, une personne pourrait se procurer le médicament mortel auprès d'un pharmacien, le rapporter à la maison, se l'administrer et se donner elle-même la mort. Cela m'inquiète et devrait inquiéter tous les Canadiens. Des témoins ont dit que, dans les pays où cette pratique est permise, 30 % à 40 % des ordonnances pour se donner la mort ne sont pas utilisées.
    Qu'advient-il des médicaments non utilisés? Et si ces médicaments se retrouvaient entre de mauvaises mains? Qu'arriverait-il s'ils n'étaient pas administrés correctement? Si la personne ne les prenait pas au complet et qu'il en résultait des complications? Comment pouvons-nous être certains que les personnes n'ont pas subi de pressions? Il y a simplement trop de questions auxquelles ce projet de loi ne répond pas.
    En vertu de ce projet de loi, il serait presque impossible pour les médecins de faire un suivi et de signaler les incidents. Le patient s'est-il administré le médicament ou est-il mort d'une maladie? Comment nous assurer que nous avons les bonnes données pour faire un suivi de l'euthanasie au Canada? Ce sont là des préoccupations légitimes exprimées par les Canadiens et on aurait pu y répondre en adoptant les amendements que nous avons proposés à l'étape de l'étude du comité.
(1220)
    Les libéraux refusent d'envisager un amendement visant à assurer la supervision d'un médecin durant la procédure.
    De plus, le projet de loi C-14 permet aux infirmiers praticiens de fournir l'aide médicale à mourir. Il y a des différences considérables entre un médecin et un infirmier praticien, notamment la durée de la formation et le pouvoir de prescrire divers narcotiques, et pourtant, dans le projet de loi, nous donnons à l'infirmier praticien le pouvoir d'évaluer l'admissibilité d'une personne à l'aide médicale à mourir et de prescrire des cocktails de médicaments destinés à mettre fin à la vie, ce qui va nettement à l'encontre de ce à quoi nous nous attendons de la part des infirmiers.
    Cela va trop loin, et c'est un autre problème que nous avons tenté de régler dans le projet de loi. Encore une fois, c'est une occasion ratée.
    Nous avons aussi présenté un amendement qui aurait supprimé le critère de souffrance psychologique pour l'admissibilité à l'aide au suicide. Cela laisse tout simplement trop de place à l'interprétation. Permettre que la souffrance psychologique soit un facteur à prendre en considération pour déterminer l'admissibilité, c'est s'engager sur une pente très glissante quant à savoir qui peut avoir accès à l'aide médicale à mourir et à quelles fins.
    Nous avons également proposé que l'on remplace « mort raisonnablement prévisible », dans le projet de loi, par mort imminente ou, du moins, mort prévisible dans les 30 jours. Ce libellé soulevait diverses préoccupations chez des témoins provenant des deux extrémités du spectre. La signification de « raisonnablement prévisible » aux yeux d'un médecin peut être tout à fait différente aux yeux d'un autre. Ce problème ouvrira la porte à l'incertitude chez les patients et les médecins et il donnera certainement lieu à des poursuites judiciaires ultérieures.
    Pour renforcer davantage les mesures de sauvegarde, nous avons proposé un amendement pour exigeant qu'un contrôle judiciaire ait lieu avant qu'on procède à l'aide médicale à mourir afin de voir à ce que tous les critères d'admissibilité aient été respectés.
    Le Dr Will Johnston, président de la coalition pour la prévention de l'euthanasie de la Colombie-Britannique, est venu témoigner devant le comité. Voici ce qu'il a dit:
[...] bien qu’on puisse le supposer, [le projet de loi] ne dit nulle part que les médecins doivent effectivement examiner le patient ni ne précise l’ampleur de cet examen pas plus que la mesure dans laquelle les médecins doivent prendre en considération les facteurs internes et externes qui rendent le patient vulnérable.
    Le Dr Johnston soulève une préoccupation importante. Le projet de loi C-14 ne précise pas dans quelle mesure un patient devrait être examiné, pas plus qu'il n'exige l'évaluation des facteurs de vulnérabilité chez ce dernier.
    Par ailleurs, nous savons que c'est une question complexe et difficile à résoudre par voie législative. Chaque personne et chaque maladie présentent des difficultés particulières. Le contrôle judiciaire permettrait de voir à ce que le patient réponde à tous les critères compte tenu des circonstances qui lui sont propres, et il protégerait davantage les personnes les plus vulnérables de la société canadienne. Encore une fois, cet amendement très raisonnable a été rejeté.
    Nous avons aussi demandé que la tenue d'une consultation sur les soins palliatifs soit incluse dans les critères d'admissibilité à l'aide médicale à mourir. Le patient devrait être informé de toutes les options à sa disposition, et il faudrait s'assurer que toutes les possibilités de soins palliatifs lui ont été offertes et expliquées.
    Le comité a entendu des témoins lui dire à maintes reprises que l'accès aux soins palliatifs posait problème au pays. Les témoins nous ont aussi dit que les soins palliatifs, en particulier les traitements contre la douleur chronique et les services d'aide psychologique, étaient très efficaces pour atténuer la douleur, la dépression et l'anxiété, des problèmes qui amènent les gens à vouloir mourir plus rapidement.
    La ministre a parlé des soins palliatifs et a insisté sur le fait qu'ils vont de pair avec l'aide médicale à mourir, pourtant le comité a refusé d'adopter une disposition du projet de loi prévoyant, comme exigence préalable, des consultations sur les soins palliatifs.
    La Société canadienne des médecins de soins palliatifs a bien présenté la question au comité. Voici ce qu'elle écrit:
    Pour que l'aide médicale à mourir ne soit pas notre seule solution aux souffrances humaines, nous devons prévoir une obligation légale de détecter, d'approfondir et de décrire les causes des souffrances de la personne afin de tenter de cerner les raisons qui l'amènent à vouloir mourir. Cette obligation ne devrait pas servir à déterminer l'admissibilité, mais plutôt être un moyen de veiller à ce que la personne qui demande de l'aide médicale à mourir soit pleinement informée des traitements qui existent [...] Le projet de loi devrait être amendé pour protéger concrètement le droit du patient d'être informé de toute la gamme des traitements, des technologies et des autres formes d'aide qui pourraient atténuer ses souffrances, quelles qu'en soient les causes.
    Les consultations sur les soins palliatifs protégeraient les patients et nous garantiraient que l'aide médicale à mourir ne devient pas la première solution aux souffrances humaines. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement ne voudrait pas s'assurer que les patients envisagent toutes les autres solutions avant de demander de l'aide médicale à mourir.
    Nous avons toujours dit très clairement, à l'instar de nombreux témoins entendus par le comité, qu'il fallait protéger la liberté de conscience non seulement des personnes, mais aussi des établissements. Le comité a pu constater qu'il s'agissait d'une préoccupation majeure. Nous avons présenté au comité plusieurs amendements qui auraient pu répondre aux objections de nombreux établissements et de nombreuses personnes susceptibles de se voir demander ces services. Ces amendements ont tous été rejetés, non seulement lors de l'étude par le comité, mais également ici, hier soir, lors de l'étude du projet de loi à l'étape du rapport. Nous considérons que c'est inacceptable.
(1225)
    Madame la Présidente, je félicite mon collègue de l'excellent travail qu'il accomplit à titre de vice-président du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Bien que nous ne voyions pas du même oeil les conséquences et les résultats des audiences du comité, je lui sais gré du rôle qu'il a joué dans ce processus. C'est toujours un plaisir de travailler avec lui.
    Je ne suis pas d'accord avec l'affirmation selon laquelle le comité n'a fait aucun amendement important. Il a adopté 16 amendements, notamment à propos de la liberté de conscience et des soins palliatifs. Il est faux de dire que les libéraux ont rejeté les propositions: en réalité, les libéraux n'ont ni rejeté les amendements proposés par l'opposition, ni voté contre eux. Il n'y a eu, à ma connaissance, aucune situation dans laquelle le NPD, le Bloc et le Parti vert étaient d'accord avec les conservateurs. Chaque fois, des points de vue divergents étaient exprimés, et le Parti libéral se trouvait quelque part au milieu, d'accord avec certains aspects mais pas avec d'autres. Il m'apparaît donc injuste de dire que le gouvernement ou les libéraux ont rejeté les amendements.
    Voici un exemple, que le député pourrait peut-être commenter. Le député a parlé d'un amendement qui portait sur...
(1230)
    Comme je l'ai déjà dit, les députés doivent s'en tenir à des questions courtes afin que d'autres personnes puissent aussi poser des questions. J'inviterais maintenant le député à répondre.
    Le député de Provencher a la parole.
    Madame la Présidente, je ne saurais trop dire à quoi je réponds au juste, alors j'en profite pour saluer le travail remarquable que fait mon collègue de Mont-Royal à la tête du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Il sert les intérêts de ses concitoyens et de son pays de façon admirable. Toujours soucieux de demeurer neutre et impartial, il sait donner à chacun l'occasion de faire valoir son point de vue.
    Il ne dit toutefois pas l'exacte vérité quand il affirme que les amendements ont été étudiés, parce que les conservateurs demandaient que la liberté de conscience soit intégrée au texte même du projet de loi, et pas seulement à son préambule. Ce dernier précise que la loi n'a pas pour effet d'obliger quiconque à fournir l'aide médicale à mourir, mais le texte en tant que tel ne protège pas, que ce soit de manière explicite ou implicite, la liberté de conscience des professionnels de la santé.
    Madame la Présidente, j'aimerais que mon collègue nous en dise plus sur le fait que les amendements auraient prétendument été étudiés. Convient-il que les seuls amendements de l'opposition qui ont été acceptés étaient surtout des amendements de forme ou de portée restreinte et qu'aucun de nos amendements touchant au coeur même du projet de loi n'a été accepté?
    Madame la Présidente, je remercie la députée de sa question, parce qu'elle a tout à fait raison. Aucun amendement substantiel touchant au coeur même du projet de loi n'a été accepté. Ceux qui l'ont été étaient des amendements de forme ou de portée restreinte. Le seul amendement de fond dont on puisse vraiment parler — et encore — est celui prévoyant qu'un examen de la loi sur l'aide médicale à mourir et de la situation des soins palliatifs soit réalisé tous les cinq ans. Autrement, le gouvernement libéral n'a accepté aucun des amendements portant à conséquence qui ont été proposés par le NPD, le Bloc, le Parti vert ou le Parti conservateur.
    Madame la Présidente, je vais de nouveau me servir d'un exemple. Les libéraux ont promis 3 milliards de dollars pour les soins palliatifs. Ils disent qu'ils ne peuvent pas inclure cette somme dans le budget parce qu'ils doivent négocier avec les provinces. Je constate toutefois qu'ils n'ont certainement pas mené à terme leurs négociations avec les provinces sur la façon dont les fonds d'infrastructure seront dépensés.
    Les libéraux ont fait une promesse sur un dossier aussi sensible que les soins palliatifs. Je veux demander à mon collègue si leur excuse de devoir d'abord parvenir à une entente avec les provinces tient vraiment debout parce que je n'ai pas reçu de bonne réponse à ce sujet de la part des libéraux.
    Madame la Présidente, il s'agit d'une excellente question parce que les libéraux se sont effectivement engagés à fournir des fonds pour les soins palliatifs. Les médecins et les infirmiers auxquels j'ai parlé m'ont dit que, lorsque des soins palliatifs adéquats sont disponibles, le besoin de se tourner vers le suicide assisté est réduit presque à néant. Si le gouvernement libéral avait inclus dans le budget l'argent qu'il avait promis durant la campagne, cela aurait permis de répondre à cette préoccupation.
    Si nous pouvions offrir des soins palliatifs adéquats aux gens, cela dissiperait les deux craintes principales que les gens — d'après ce qu'ils m'ont dit — éprouvent à la fin de leur vie, à savoir si leur douleur peut être maîtrisée et si leur peur peut être apaisée. Des soins palliatifs adéquats peuvent permettre de calmer ces deux craintes.
    Madame la Présidente, ce n'est que maintenant que j'interviens pour la première fois au sujet du projet de loi C-14, et celui-ci est rendu à l'étape de la troisième lecture. Le processus d'adoption du projet de loi s'est déroulé à toute vapeur. Les libéraux ont imposé la clôture à maintes reprises durant ce processus. Chaque fois qu'on en a débattu, que ce soit à l'étape de la deuxième lecture ou à celle du rapport, je n'étais pas disponible ou je n'ai pas pu me faire inscrire sur la liste des intervenants, celle-ci étant trop longue et le temps alloué, trop court. Toujours est-il que je suis enfin en mesure d'exprimer mes préoccupations et celles des habitants de ma circonscription au sujet du projet de loi C-14.
    Lorsqu'on a recours à la clôture dans des débats sur une question de conscience, notamment sur l'aide médicale à mourir ou le suicide commis avec l'aide d'un médecin, peu importe comment on veut l'appeler, il faut tout de même prendre le temps de débattre de la question. Pour bien faire les choses, les députés doivent discuter de la question et consulter les spécialistes. Si les libéraux précipitent le processus législatif entourant ce projet de loi, tant à la Chambre qu'au Sénat, je prédis que des erreurs seront commises à coup sûr et que la loi sera contestée en cour dans un avenir relativement proche.
    Je dois également commenter ce qu'a dit le député de Provencher aujourd'hui. Il est très décevant de constater qu'un si grand nombre d'amendements raisonnables a été présenté par les députés des partis de l'opposition et qu'aucun de ces amendements n'a été pris en compte lors de l'étude à l'étape du rapport hier soir. C'est très décevant.
    Dans ma circonscription, Selkirk—Interlake—Eastman, le sujet du suicide assisté sème la division, tout comme partout au pays. La majorité des électeurs qui ont communiqué avec mon bureau s'opposent à cette politique, pour deux raisons: d'abord, de nombreuses personnes ont de profondes croyances morales, éthiques et religieuses qui s'opposent fermement au suicide assisté; ensuite, de nombreuses personnes croient qu'on aura recours à la politique de façon prématurée pour mettre fin à la vie de personnes qui sont devenues un fardeau pour leur famille, la société ou le système de santé.
    Il est important de souligner que les libéraux ont brisé une promesse électorale clé, celle d'investir 3 milliards de dollars dans les soins de longue durée, y compris les soins palliatifs. L'accès aux soins palliatifs fait partie intégrante du processus décisionnel associé à la fin de vie. Le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir et les intervenants, notamment l'Association médicale canadienne, étaient tous d'avis qu'il fallait établir une stratégie pancanadienne en matière de soins palliatifs, associée à un financement réservé. Il s'agirait d'un important pas dans la bonne direction pour le Canada, mais les libéraux ont choisi de l'escamoter pour présenter cette mesure législative de façon expéditive et négligente.
    De nombreux médecins, infirmiers et professionnels des soins de santé se heurtent au problème éthique et moral que présente l’aide au suicide, qui va à l’encontre de la version moderne du serment d’Hippocrate. L’Université d’Ottawa décrit d'ailleurs très bien le défi que présente ce principe en affirmant:
    Un serment datant des temps anciens ne peut vraisemblablement pas tenir compte des valeurs prônées de nos jours, dans le contexte de la médecine telle qu’elle se pratique au 21e siècle, avec sa complexité. Par conséquent, l’importance du serment d’Hippocrate réside non pas dans les lignes directrices précises qui en ressortent, mais dans le symbole d’un idéal qu’il représente: le dévouement inconditionnel de la personne qui prête serment à l’égard de la préservation de la vie humaine.
    Et je souligne « la préservation de la vie humaine ».
    Bien que l’Association médicale canadienne soit revenue l’an dernier sur sa position concernant l’aide médicale au suicide, la Cour suprême du Canada s’est donné beaucoup de mal pour revenir sur sa position par rapport à ses jugements antérieurs, à savoir si des dispenses devraient être prévues en ce qui concerne l’aide médicale au suicide.
    L’Association médicale canadienne est membre de l’Assemblée médicale mondiale, qui avait adopté une résolution à ce sujet en 1992. La résolution a été légèrement modifiée en 2005, puis réaffirmée en avril 2015 à Oslo. Elle se lit comme suit:
    Le suicide médicalement assisté est, comme l'euthanasie, contraire à l'éthique et doit être condamné par la profession médicale. Le médecin qui, de manière intentionnelle et délibérée, aide un individu à mettre fin à sa propre vie, agit contrairement à l'éthique. Cependant, le droit de rejeter un traitement médical est un droit fondamental pour le patient et le médecin n'agit pas contrairement à l'éthique même si le respect de ce souhait entraîne la mort du patient.
(1240)
    Manifestement, l'Association médicale mondiale, qui représente les médecins et les chirurgiens du monde entier, affirme que c'est contraire à l'éthique.
    Comme on l'a fait remarquer, de ce côté-ci, nous nous soucions des dispositions de la Charte sur la liberté de conscience; je m'en soucie d'ailleurs tout particulièrement. Comme on l'a fait remarquer, un léger amendement a été apporté au préambule du projet de loi C-14 de manière à protéger les particuliers, mais pas les institutions. Si l'article 2 est défini dans le préambule, mais qu'il ne figure pas dans le projet de loi lui-même, aura-t-il la force juridique nécessaire en cas de contestation devant les tribunaux, la Commission canadienne des droits de la personne ou l'une des commissions provinciales des droits de la personne?
    Les institutions sont exemptées aux termes de la mesure, et je sais que certains députés se sont entretenus avec des membres de certaines institutions qui se disent très inquiets. J'ai communiqué avec l'hôpital général de Saint-Boniface, un hôpital catholique à Vancouver. Les employés de l'hôpital craignent qu'en tant qu'institution, ils aient à renier leurs croyances religieuses et morales afin d'offrir une aide au suicide. Ils croient, tout comme les députés de ce côté-ci, au caractère sacré de la vie.
    Comme la plupart des Canadiens, j'ai vu des êtres chers succomber à de longues maladies chroniques et débilitantes. Tous les Canadiens souhaitent mourir dans la dignité. Malheureusement, seule une poignée d'entre nous mourra dans son sommeil avec peu d'inconfort ou de douleur. Je ne crois pas que nous devrions instaurer une politique qui fournira l'aide médicale à mourir à tous les Canadiens lorsqu'ils approcheront la fin de leur vie. Mourir dans la dignité ne s'applique pas seulement à l'aide médicale à mourir. Accroître et améliorer les services de soins palliatifs est de loin la meilleure politique publique et devrait être une priorité pour tous les fournisseurs de soins de santé au pays. Je me réengage à travailler avec les Canadiens, les décideurs et les parlementaires qui, comme moi, souhaitent améliorer les soins palliatifs au Manitoba et partout au pays. Mon épouse Kelly est infirmière dans un établissement de soins pour personnes âgées infirmes et est constamment appelée à prodiguer des soins palliatifs. Elle convient que le renforcement des services de soins palliatifs permettra à plus de Canadiens de mourir dans la dignité.
    J'ai rencontré la Manitoba League of Persons with Disabilities et je me suis entretenu avec Carlos Sosa, représentant du Manitoba au sein du Conseil des Canadiens avec déficiences. L'organisme est très préoccupé par le projet de loi C-14 dans sa forme actuelle, car il fait peu pour remédier aux préoccupations des personnes vulnérables. En outre, l'organisme est préoccupé par la façon dont le projet de loi traite la communauté des personnes handicapées. En particulier, celui-ci ne prévoit pas d'évaluation des vulnérabilités qui pourraient mener une personne à assister au suicide d'une autre personne ou à recourir au suicide assisté. Il ne prévoit pas non plus d'examen préalable accéléré et d'autorisation par un juge ou une entité indépendante ayant de l'expertise dans les domaines des soins de santé, de l'éthique et du droit. C'était l'objet de l'un des amendements que nous avons proposés hier soir, et il a été rejeté.
     Rhonda Wiebe, qui est coprésidente du Comité d'éthique en fin de vie du Conseil des Canadiens avec déficiences, a déclaré ce qui suit:
    Dans le jugement Carter, la Cour suprême du Canada avait donné deux affectations au gouvernement du Canada: (1) instaurer un régime pour permettre aux personnes en fin de vie d’accéder à l’aide médicale à mourir et (2) protéger les Canadiens vulnérables qui, dans un moment de faiblesse, pourraient être incités à accepter l’aide médicale à mourir. Malheureusement, en matière de protection des personnes vulnérables, le projet de loi C-14 comporte de sérieuses lacunes [...] Le Canada doit être plus vigilant pour protéger les personnes comme moi et les autres Canadiens en situation de handicap, pouvant être vulnérabilisés par des problèmes de santé ou par leur condition sociale ou économique.
    J'ai le privilège d'être membre d'un parti politique qui autorise la tenue de votes libres sur des enjeux de nature morale et religieuse. Pour ce qui est de politiques comme celle ayant trait au suicide assisté, les députés conservateurs peuvent décider de refléter la volonté des résidants de leur circonscription ou de voter en fonction de leurs croyances personnelles. Comme j'ai des valeurs chrétiennes très solides, je ne peux pas appuyer le projet de loi C-14. Cette mesure législative doit inclure de meilleures mesures de protection pour les jeunes de moins de 18 ans et les personnes vulnérables, dont celles qui ont des problèmes de santé mentale.
    Madame la Présidente, je suis sûr que c'est par inadvertance que mon collègue a fait une affirmation erronée, à savoir que des amendements portant sur la liberté de conscience n'avaient pas été apportés au projet de loi. De fait, un tel amendement, rédigé conjointement par les députés de St. Albert—Edmonton, de Victoria, de Nova-Centre et moi-même, a été adopté. Le préambule a été modifié, ainsi que le texte même du projet de loi. Je voulais simplement apporter une correction sur ce point.
     Hier, un tribunal albertain a statué qu'une personne n'ayant pas la citoyenneté canadienne, n'étant pas couverte par l'assurance-maladie, était admissible à l'aide médicale à mourir. Nous avons un arrêt de la Cour d'appel de l'Alberta qui affirme qu'une patiente de 58 ans souffrant de troubles psychiatriques qui n'est pas mourante — non seulement sa mort n'était pas imminente, mais elle n'était même pas prévisible — y est admissible.
     Le député n'est-il pas d'accord pour dire que, si ce texte de loi n'est pas adopté d'ici le 6 juin et en l'absence des mesures de sauvegarde qu'il prévoit — deux opinions, une période d'attente et toutes les autres précautions de ce genre —, nous serons engagés sur une pente très glissante?
(1245)
    Je suis d'accord, madame la Présidente, pour dire que nous voulons éviter cette pente glissante. Nous ne voulons pas que ce soit des juges, sans aucune formation en éthique ou en médecine, qui décident du sort des personnes dans des cas comme celui que le député de Mont-Royal vient d'évoquer.
     Nous savons également que l'amendement qui a été accepté était passablement dilué. Je le redis, il figure dans le préambule et non dans le texte du projet de loi.
     Quelques options s'offrent à nous. Le gouvernement a des options. Il peut demander une prolongation de délai à la Cour suprême du Canada afin de nous éviter la date butoir du 6 juin. Nous pouvons travailler avec les députés de l'opposition en vue d'en arriver à un texte qui se tienne et accepter certains de ces amendements que nous avons proposés et qui sont des plus raisonnables. Ou encore, nous pouvons recourir à la disposition de dérogation. Il existe donc des options, mais, en définitive, je demande aux gens de rejeter le projet de loi.
    Madame la Présidente, nous sommes aujourd'hui sous le coup d'une motion de clôture qui fait en sorte que très peu de députés ont la possibilité de prendre la parole. Il y a quelques semaines, nous avons vu le gouvernement retirer le projet de loi C-14 de l'ordre du jour à plusieurs reprises alors même que des députés voulaient intervenir à ce sujet.
     Nous avons également vu le gouvernement, après avoir imposé le bâillon, refuser hier aux députés la possibilité de prendre la parole durant la journée au sujet du projet de loi, en sachant que nous avions un vote lundi soir. On cherche en vain par quelle logique le gouvernement pense pouvoir, avec des moyens si répréhensibles, promouvoir un projet de loi non partisan de cette nature.
     Étant donné toutes les préoccupations exprimées par les juristes et les professionnels de la santé et par leurs milieux respectifs, ainsi que les doutes quant à la constitutionnalité du projet de loi, que viennent de mettre en lumière deux décisions judiciaires, pourquoi le député pense-t-il que le gouvernement cherche à faire adopter ce projet de loi à toute vapeur, d'une manière si partisane et si contre-indiquée?
    Madame la Présidente, il ne fait aucun doute que cette question mérite qu’on y consacre le temps voulu dans les débats du Parlement. Au lieu de faire ce qu’il faut et de demander une autre prolongation pour que nous puissions bien faire les choses, le gouvernement, pour une raison quelconque, autre que l’échéance du 6 juin, recourt à une motion de clôture, à des mesures très autocratiques pour limiter le débat, et ne permet pas aux parlementaires d’exprimer la volonté de leurs électeurs ou leurs propres convictions personnelles.
    Nous savons que nous devrions avoir le temps de bien faire les choses. Chaque fois que nous voyons ce type de motion, en particulier à propos de mesures législatives qui marqueront l’histoire du Canada — il y a peu de chance que le texte soit modifié ou changé —, nous devons bien faire les choses. Ce n’est pas en recourant à une motion de clôture et à des mesures draconiennes que les libéraux nous imposent que nous y parviendrons.
    Madame la Présidente, je dirai respectueusement que, dans son intervention, le député a fait allusion aux raisons du gouvernement. À certains égards, on peut parler de compétence ou d’incompétence. Les libéraux ont repoussé la question aussi longtemps qu’ils ont pu en s’attendant à pouvoir faire adopter le projet de loi envers et contre tous, et maintenant, ils annoncent qu’ils ne seront pas en mesure de respecter l’échéance du 6 juin. Que vont-ils faire? Il se pourrait fort bien qu’on en reste là.
     Je remercie le député d’avoir parlé des soins palliatifs. Pourquoi mon collègue qui est intervenu croit-il que le gouvernement n’a d’abord pas fait de place aux soins palliatifs dans le budget, en disant qu’il savait ce qui allait arriver et qu’il prenait un engagement par rapport ce type de soins?
    Pendant tout ce débat...
(1250)
    Je veux laisser au député la possibilité de répliquer. Je demanderai donc au député de Selkirk—Interlake—Eastman de répondre brièvement.
    Madame la Présidente, je suis d’accord avec mon collègue de Battle River—Crowfoot. Il est évident qu’on fait adopter de force ce projet de loi sans qu’il ait été examiné comme il se doit. Il est évident qu’il n’est même pas question des soins palliatifs dans le budget ou dans ce projet de politique sur lequel nous travaillons en ce moment. Si nous voulons régler convenablement les questions liées à la fin de vie, nous devons avoir des soins palliatifs.
    Tout ce que veulent faire les libéraux, c’est parler de ces questions sans investir les fonds qu’ils ont promis qu’ils investiraient.

[Français]

    Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec mon honorable collègue de Pierrefonds—Dollard.

[Traduction]

    Dans notre monde postmoderne, avec sa tendance parfois à un certain type de ce que d’aucuns qualifieraient de relativisme libertaire, nous devons continuer de croire et d’affirmer qu’il existe des valeurs dont nous pouvons tous dire objectivement qu’elles sont bonnes et qu’elles méritent d’être protégées et encouragées, des valeurs qui devraient nous éclairer, nous motiver et nous guider tant à titre individuel que collectivement. Nous devons souscrire à l’impératif suivant: nous avons le devoir, en tant qu’êtres humains, de nous soutenir les uns les autres dans ce combat pour la vie, comme certains collègues l’ont dit, dans cette lutte contre la réalité indéniable de notre existence limitée qu'est notre mortalité. Chaque instant de la vie est important. Cette vérité doit être affirmée et respectée. Tel est le consensus qui prévaut, qui s’est profondément enraciné dans la société au fil de l’histoire. Tel est aussi notre instinct premier. Beaucoup de mes électeurs craignent que le projet de loi C-14 ne mine ce consensus, cet instinct. Je comprends cette crainte.
     Nous ne pouvons nous permettre de sombrer dans l’indifférence, de nous laisser tranquillement séduire par la notion facile véhiculée par l’expression éculée « à chacun sa vérité » qui revient à dire que nous acceptons le droit de chacun de choisir, mais que nous ne pensons pas au-delà qu’il nous appartienne de renforcer le bon choix, le choix souhaitable. Lorsqu’il me semble entendre quelqu’un ramener le débat sur l’aide médicale à mourir à un débat sur un pur choix libertaire, j’avoue que j’en ai quelques frissons.
    Après mûre réflexion, je ne crois pas que le projet de loi C-14 engendrerait nécessairement une attitude de plus en plus permissive à l'égard de la mort autogérée et qu'il aurait en outre un effet d'entraînement.
    J'aimerais citer la bioéthicienne et philosophe Margaret Somerville, généralement considérée comme de tendance conservatrice à l'égard des questions de bioéthique. Dans ses écrits, Mme Somerville parle notamment des dangers de la légalisation de l'aide médicale à mourir:
     Le projet de loi ferait en sorte que l'aide médicale à mourir figure dans les cas d'exemption — ou d'exception — alors que normalement ce genre de pratique donnerait lieu à des poursuites en vertu du Code criminel pour homicide coupable ou suicide assisté. Le fait de traiter l'aide médicale à mourir comme une exception permettrait d'assurer, ce qui est essentiel, que les Canadiens ne considèrent pas que c'est la façon normale de mourir;
    Autrement dit, le projet de loi C-14 ne normaliserait pas l'aide médicale à mourir comme c'est peut-être le cas en Belgique ou aux Pays-Bas, les deux pays les plus souvent cités par ceux qui craignent qu'on ne s'engage sur une pente glissante.
    Mme Somerville ajoute également:
     Le fait de reconnaître l'aide médicale à mourir comme une exception contribue également à établir que le recours à cette pratique n'est pas un droit, mais offre plutôt, moyennant certaines conditions, une immunité contre toute poursuite pour infraction criminelle...
    Par surcroît, cette bioéthicienne de renom soutient que l'approche retenue est porteuse d'un important message de santé publique contre le suicide.
    J'ajoute que, dans le préambule du projet de loi, le gouvernement a pris soin de mettre l'accent sur ce message puisqu'il reconnaît « que le suicide constitue un important enjeu de santé publique qui peut avoir des conséquences néfastes et durables sur les personnes, les familles et les collectivités ».
    Comme je ne suis pas médecin, je ne suis pas confronté à la mort au quotidien et, de plus, je n'ai jamais été à l'article de la mort.

[Français]

    Comme nous tous ici, je suis un élu qui tente de prendre la meilleure décision possible dans le contexte de la réalité indéniable d'une décision unanime de la Cour suprême dans une cause déchirante, la cause Carter.
    Cette décision de la Cour exige que le Parlement crée un nouveau cadre juridique visant à réglementer un aspect particulier de la fin de vie. Si nous n'assumons pas notre responsabilité dès maintenant, nous entrerons dans un vide juridique et réglementaire partiel. Pour citer l'Ontario Hospital Association, si le projet de loi n'est pas adopté d'ici le 6 juin, « l'aide à mourir sera légitime là où elle est prévue conformément aux paramètres établis par les tribunaux et les organismes de réglementation des provinces. »
(1255)

[Traduction]

    Les paramètres établis par la Cour sont de nature assez générale. La Cour n'a pas précisé ce que devrait être le cadre opérationnel de l’aide médicale à mourir. Ce n’est pas aux tribunaux d’être si normatifs.
     Cela ne veut pas dire que je n'ai pas de crainte à adopter cette loi. En l'absence d'une décision de la Cour suprême et si la question avait été soulevée une nouvelle fois par le biais du projet de loi d'initiative parlementaire, je n’aurais probablement pas voté pour l'aide médicale à mourir. J'ai déjà voté contre un projet de loi d'initiative parlementaire sur le suicide médicalement assisté.
    Mais nous avons une décision de la Cour suprême qui nous oblige à agir. Je pense que le premier ministre, ainsi que la ministre de la Justice et la ministre de la Santé ont agi sagement en faisant preuve de prudence, malgré l'excellent travail du comité mixte spécial sous la direction compétente et intelligente de mon ami et collègue le député de Don Valley-Ouest.
    Le projet de loi n’est peut-être pas parfait, mais je crois que ce serait une erreur de penser qu'il laisse un vaste champ ouvert à l'aide médicale à mourir, une crainte exprimée par de nombreuses personnes sérieuses et soucieuses au plus haut point de la protection de la vie humaine
    Le projet de loi C-14 établit de nombreux critères à remplir avant que l’aide médicale à mourir ne soit autorisée. La personne doit être âgée de 18 ans et doit souffrir de problèmes de santé graves et irrémédiables qui répondent à quatre critères: sa maladie, son affection ou son handicap doivent être graves et incurables; sa situation médicale se caractérise par un état de déclin avancé et irréversible de ses capacités; en outre, sa maladie doit lui causer des souffrances physiques ou psychologiques persistantes et intolérables; et sa mort naturelle doit être considérée comme raisonnablement prévisible. De plus, la personne doit faire une demande de manière volontaire, sans pressions extérieures, qui est le résultat d’un consentement éclairé.
     Le projet de loi comprend également un certain nombre de mesures de sauvegarde: la personne doit faire une demande par écrit ou par un autre moyen fiable. Si la demande est signée par un mandataire, celui-ci doit avoir au moins 18 ans et comprendre la nature de la demande. La demande ne doit être faite qu’après que la personne a été informée que sa mort naturelle est devenue raisonnablement prévisible.
    La demande doit être signée et datée devant deux témoins indépendants et ces témoins ne doivent pas être des bénéficiaires de la succession ou de tout autre avantage matériel de la personne qui fait la demande. Ils ne doivent pas participer directement à la prestation des services de soins de santé de la personne.
     Deux médecins doivent donner un avis écrit confirmant que la personne répond aux critères d'admissibilité et ces médecins doivent être indépendants. Par exemple, l’un ne peut pas être le supérieur ou le mentor de l'autre.
    Surtout, la personne doit être informée qu’elle a la possibilité de retirer sa demande à tout moment.
    Cela dit, je ne suis pas du tout convaincu que l'aide médicale à mourir est un acte serein et digne, même s’il est souvent présenté comme tel. Je soupçonne que des complications peuvent surgir. Voilà pourquoi il est crucial que, grâce au gouvernement, le projet de loi permette le suivi de l'aide médicale à mourir au moyen de rapports détaillés.

[Français]

    Il y a quelques années, une poignée de parlementaires, dont faisaient partie les députés de Kitchener—Conestoga et de Carlton Trail—Eagle Creek, les anciens députés de Newmarket—Aurora, de Guelph et de Windsor—Tecumseh, ainsi que moi-même, nous sommes demandés s'il ne fallait pas augmenter et améliorer les soins palliatifs au Canada.

[Traduction]

    Nous avons fondé le comité qui s'est penché sur les soins de compassion et les soins palliatifs et nous avons produit un rapport. L'un des aspects positifs du débat sur cette question est le fait qu'on accorde une attention sans précédent aux soins palliatifs ici, à la Chambre, et sur la scène nationale en général.
    Lorsque des soins palliatifs de qualité semblables à ceux prodigués par la Résidence de soins palliatifs de l'Ouest-de-l'Île pourront être offerts à tous les Canadiens qui approchent de la mort parce que les gouvernements fédéral et provinciaux auront accordé les fonds nécessaires, j'espère sincèrement que cette mesure législative deviendra en quelque sorte un vestige et que l'aide médicale à mourir ne sera plus considérée comme la seule option pour soulager une personne de ses souffrances à la fin de sa vie.
    Par conséquent, puisque le gouvernement s'est déjà engagé à en faire plus pour financer les soins palliatifs, je suis encouragé de voir que le projet de loi mentionne expressément cet engagement. J'espère qu'un jour, lorsqu'on offrira des soins palliatifs de qualité à tous, on atteindra un point culminant et que c'est en fonction de celui-ci qu'on mesurera la valeur d'une société véritablement juste.

[Français]

    Madame la Présidente, mes collègues libéraux ne tarissent pas d'éloges pour la ministre. Ils considèrent que le projet de loi est parfait et qu'il va très bien passer le test de la Charte et des tribunaux.
    Ma question est simple. En quoi le projet de loi C-14 garantit-il une atteinte raisonnable du droit à la vie, à la liberté — en l'occurrence, on parle ici de liberté de conscience au sens du respect de l'autonomie — et du droit à la sécurité de la personne, dans le cas d'une personne souffrant d'une maladie grave et irrémédiable, si elle doit faire une grève de la faim pour être admissible à l'aide médicale à mourir et respecter le critère de mort naturelle vraisemblablement prévisible?
(1300)
    Madame la Présidente, j'ignore le cas précis soulevé par mon collègue.
    M. Luc Thériault: L'affaire Carter.
    M. Francis Scarpaleggia: On me dit qu'on parle de l'affaire Carter. Nous croyons, et la ministre de la Justice l'a dit à plusieurs occasions, que Mme Carter aurait été admissible dans le cadre des paramètres établis dans le projet de loi. C'est une opinion avec laquelle je suis d'accord et que je respecte.
    Évidemment, il y aura des différends d'opinion autour de cette loi. Je suis certain qu'on n'a pas fini d'avoir des recours aux tribunaux.
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de Lac-Saint-Louis de son bon discours.
    Est-il satisfait du processus qui a eu lieu et est-il content du résultat?
    Madame la Présidente, je suis content du résultat du débat. Je pense que nous avons eu un débat très large sur la question. J'ai moi-même siégé jusqu'à minuit au moins une fois pour écouter d'excellents discours de tous les côtés de la Chambre portant sur la question.
     Il ne faut pas oublier que, contrairement à certaines législations débattues à la Chambre, ce sujet est aussi débattu en pleine société, à l'heure actuelle. Ce débat n'a pas lieu en vase clos. Non seulement les députés ont l'occasion de s'exprimer — la grande majorité d'entre eux l'ont fait, à ce que je sache —, mais ce débat a aussi lieu dans les médias, dans les cuisines et dans les centres communautaires.
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de ses propos.
    Je voudrais revenir sur la question du critère de mort naturelle raisonnablement prévisible, parce que chez nous aussi, au Québec, il y a eu des cas où des gens se sont laissé mourir de faim pour tenter de se rapprocher de ce critère.
    Le député ne croit-il pas que ce critère va totalement à l'encontre des balises qui ont été fixées par l'arrêt dans l'affaire Carter?
    Madame la Présidente, nous nous fions beaucoup à l'opinion de la Cour suprême, comme il se doit.
    À l'heure actuelle, on ne peut prévoir comment la Cour suprême va trancher si ce projet de loi se rend devant elle. Il est fort probable que la Cour respecte la volonté de la Chambre telle qu'elle sera exprimée à l'étape de la troisième lecture, ce soir.
    Nous croyons que le projet de loi est conforme aux paramètres établis par la Cour dans sa décision concernant l'affaire Carter. Nous croyons aussi que la Cour va respecter, dans une grande mesure, la volonté de la Chambre, qui tente sincèrement d'agir conformément à la décision de la Cour dans l'affaire Carter.

[Traduction]

     Madame la Présidente, un grand poète gallois, Dylan Thomas, a rédigé un poème intitulé Do Not Go Gentle Into That Good Night, en français, N'entre pas sans violence dans cette bonne nuit. Ce poème raconte l'histoire d'un fils qui invite son père à lutter contre sa mort imminente, et il se termine ainsi:
    

Et toi, mon père, ici sur la triste élévation,
Maudis, bénis-moi à présent avec tes larmes violentes, je t’en prie.
N’entre pas sans violence dans cette bonne nuit.
Rage, enrage contre la mort de la lumière.

    Le fils implore son père de lutter jusqu'à la fin et de rager contre la mort de la lumière. Je crois que cela décrit bien l'essence même de la philosophie occidentale lorsqu'il s'agit de la mort. En termes simples, cela veut dire que nous ne devrions pas accepter la mort.
    Cela dit, la vie doit se terminer un jour. Tout ce qui vit va mourir. Une roche ne vit pas, car elle ne meurt pas. Un arbre vit, car il meurt. Une personne vit, car elle meurt. Donc, vais-je mourir?
     C’est le sujet d’une excellente conférence TED donnée par un premier intervenant. Il y est question d’un ambulancier paramédical qui arrivait souvent sur les lieux d’un accident et y trouvait une victime dont les blessures étaient si graves qu’il était impossible d’y survivre. Chaque fois, la victime regardait l’ambulancier et lui demandait: « Est-ce que je vais mourir? » Dans ces situations, il répondait toujours non. Il le faisait parce qu’il jugeait que c’était la réponse la plus humaine, la plus compatissante. Puis, il y a quelques années, il est arrivé sur les lieux d’un très grave accident de motocyclette, et la victime lui a posé la même question. Pour une raison quelconque, il a dit la vérité, il a dit que oui, elle allait mourir. La réaction de la victime l’a étonné. Elle était calme et elle a manifesté une grande paix intérieure, de la sagesse et de l’acceptation. Depuis ce temps, il dit toujours la vérité.
    Dans un de ses poèmes, Dylan Thomas nous dit que « [...] les hommes sages à leur fin [savent] que l'obscur est mérité ». Par conséquent, à la question, est-ce que je vais mourir, il faut répondre oui. Nous allons tous mourir.
    Aujourd’hui, nous discutons d’un sujet qui, dans bien des cas, nous est étranger. Le projet de loi C-14 représente notre effort en vue de déterminer à quel moment il est sage d’accepter de mourir, c’est-à-dire à quel moment il est acceptable d'« entrer sans violence dans cette bonne nuit ». C’est essentiellement ce dont il est question dans le projet de loi.
     Certains soutiennent que le projet de loi devrait suivre à la lettre l’arrêt de la Cour suprême. D’autres considèrent qu’il devrait être de grande portée et englober tous les scénarios possibles. D’autres encore croient qu’il devrait avoir une portée limitée, afin de protéger les personnes vulnérables. Et d’autres maintiennent qu’il ne devrait y avoir aucun projet de loi de cette nature, qu’il ne faut pas s’engager sur cette voie, quoi qu’en ait dit la Cour suprême.
    Ici, à la Chambre des communes, nous avons tenu un vaste débat sur la question. Ce débat a été passionné, intelligent et respectueux. Les parlementaires se sont comportés de façon exemplaire. Le député de St. Albert—Edmonton, par exemple, qui siégeait au comité mixte spécial chargé de produire le rapport en vue de l’examen du projet de loi, a exposé avec éloquence les raisons pour lesquelles il croit que le projet de loi omet certaines mesures de protection essentielles. Et le député de Victoria, qui siégeait lui aussi au comité mixte spécial, a exprimé de façon réfléchie et intelligente sa conviction profonde que le projet de loi est trop restrictif à certains égards.
     J’ai reçu de nombreuses lettres personnelles exposant des opinions très variées, des lettres de personnes qui vivent de grandes souffrances et qui craignent ne pas pouvoir se prévaloir, le moment venu, de cette voie plus sereine. D’autres lettres provenaient de personnes qui prennent soin de grands malades, de personnes âgées et de personnes frappées d’incapacité mentale. Elles craignent que ces personnes vulnérables ne soient pas bien protégées. Même mon propre père a écrit au sujet du projet de loi.
    Je rencontrais des électeurs, il y a quelques semaines, quand une dame s’est approchée de moi. Elle m’a dit qu’elle avait beaucoup aimé ce que mon père avait écrit dans le journal. Il arrive que les gens confondent un peu les choses, et je ne savais vraiment pas de quoi elle parlait, alors je l’ai simplement remerciée. Une fois rentré à la maison, j’ai appelé mon père pour lui demander s’il avait écrit quelque chose dans le journal. Il m’a répondu que oui, alors je lui ai demandé de m’envoyer cela par courriel pour que je puisse le lire, mais il l’avait déjà effacé parce qu’il ne veut pas encombrer son ordinateur.
     Je lui ai demandé de m’expliquer ce qu’il avait écrit, et il m’a répondu que l’expression « mort naturelle raisonnablement prévisible » était difficile à comprendre, même pour un médecin. Mon père a été victime de graves infarctus il y a 25 ans, et son médecin lui avait conseillé de mettre ses affaires en ordre.
(1305)
     Il me citait son propre exemple, me disant: « Je suis encore vivant 25 ans plus tard. » Et il est encore vivant parce qu’au cours d’une nuit sombre, il y a 25 ans, il a choisi de « rager contre la mort de la lumière ».
    Personne n’a tort dans ce débat. Chacun a son opinion, et chaque opinion est valable. Pour chacun, cette destination, ce moment où il devient acceptable d’accueillir la mort est différent, et c’est bien ainsi.
     Si la destination est incertaine, comment y arrivons-nous? Avec prudence. En génie, on applique le concept de « dépassement ». En gros, plus on arrive rapidement à destination, et plus on risque de la dépasser. Par exemple, au volant d’une voiture, si l’on arrive très rapidement à un panneau indicateur d’arrêt et qu’on applique brutalement les freins, on risque de dépasser le panneau. Par contre, si l’on s’en approche très lentement, il faudra beaucoup de temps pour y arriver, et l’on risque même de s’arrêter trop tôt.
     Nous avons une destination incertaine qui est différente pour chacun d’entre nous. Comment allons-nous y arriver? Prudemment. Nous devons nous diriger lentement vers cette destination. C’est précisément cette approche que la ministre de la Santé et la ministre de la Justice ont choisi d’adopter.
    Avec le projet de loi C-14, nous nous dirigeons lentement vers notre destination, et nous acceptons que nous nous arrêtions peut-être un peu avant d’y être. Le projet de loi reconnaît cet état de choses. Il est expressément inscrit dans la loi qu’une révision sera menée dans quelques années, précisément pour apporter des ajustements.
    C’est une approche d’une grande sagesse, et je félicite la ministre de la Santé et la ministre de la Justice des efforts qu’elles ont déployés pour nous mener jusqu’à ce point.
    Bref, nous allons tous mourir. À ce moment, certains d’entre nous décideront de se battre jusqu’à la toute fin. Notre société appuie déjà cette décision et nous utilisons toutes les ressources de notre système médical pour aider les personnes qui choisissent de « rager contre la mort de la lumière ».
     Par contre, certains choisiront d’accepter la mort avec calme, dans la paix intérieure. Notre société doit maintenant reconnaître sa décision et permettre à notre système médical d’aider ces personnes. Grâce à ce projet de loi, nous aiderons ces personnes à « entrer sans violence dans cette bonne nuit ».
(1310)

[Français]

    Madame la Présidente, il me fait plaisir de participer à ce débat. C'est vraiment une discussion qui est très importante pour tous les citoyens de la région de Drummond. Dans ma région, les gens sont très préoccupés par les soins palliatifs. Nous avons des gens qui travaillent très fort dans le domaine des soins palliatifs dans la grande région de Drummond. Il y a, entre autres, la Maison René-Verrier qui fait un travail remarquable en matière de soins palliatifs. Je sais que, pour les libéraux, les soins palliatifs sont importants, mais malheureusement il n'y a rien dans le dernier budget à cet égard. Dans ce projet de loi, rien n'indique non plus que nous allons vraiment mettre l'accent sur les soins palliatifs. C'est sur cette question que j'aimerais entendre mon collègue.
    Madame la Présidente, c'est une excellente question. Les soins palliatifs jouent un rôle essentiel dans la décision de choisir l'aide médicale à mourir ou non. Nous sommes chanceux, dans l'Ouest de l'île de Montréal, d'avoir la Résidence des soins palliatifs de l'Ouest-de-l'Île. C'est un centre dont l'expertise en soins palliatifs est reconnue partout au Canada. Je sais que nous avons déjà entrepris des démarches pour leur parler et pour comprendre leur méthode exemplaire afin de l'étendre et de l'appliquer dans le reste du pays.

[Traduction]

    Madame la Présidente, le député de Drummond a mentionné les soins palliatifs. Il ignore peut-être qu’en comité, nous avons inscrit les soins palliatifs à deux endroits dans le projet de loi, une fois dans le préambule et une fois dans le texte proprement dit. Dans le préambule, nous avons indiqué que les soins palliatifs, et l’obligation du ministre de la Santé de collaborer avec ses homologues provinciaux et territoriaux dans le dossier des soins palliatifs, étaient des éléments essentiels. Dans le texte du projet de loi, nous avons indiqué que, cinq ans après l’entrée en vigueur de la loi, le comité chargé de produire un rapport sur l’aide médicale à mourir devait aussi faire le point sur la situation des soins palliatifs, parce que personne dans notre pays ne devrait demander une aide médicale à mourir en raison d’un manque de soins palliatifs de qualité.
     Le député de Pierrefonds—Dollard est-il au courant de ces amendements et pourrait-il nous en dire un peu plus sur l’engagement du gouvernement en matière de soins palliatifs?
    Madame la Présidente, je le répète, les soins palliatifs sont d’une importance vitale dans la décision que nous devrons tous prendre un jour. Il faut espérer qu’ils seront disponibles pour chacun de nous.
     Comme l’a dit le député, cela est inscrit dans le préambule et constitue un élément essentiel du processus que nous menons. Certaines personnes sont frustrées de voir que la question n’est pas réglée dans tous ses détails, que certains aspects sont reportés à plus tard. C'est ainsi dans la vraie vie. C’est pourquoi je suis convaincu qu’il nous faut avancer lentement, apprendre à mesure que nous progressons et, parallèlement, renforcer les soins palliatifs si importants pour les personnes qui doivent prendre ces décisions très difficiles.
(1315)
    Madame la Présidente, mon collègue de Pierrefonds—Dollard a parlé d’une démarche équilibrée. Je suis certain qu’il a eu vent de la décision prise par un tribunal hier, concernant le droit d’un ressortissant étranger de demander une aide médicale à mourir en l’absence d’une loi qui énonce clairement les intentions du Parlement en matière d’aide médicale à mourir.
     Le député pourrait-il nous exposer en quelques mots ses préoccupations, dans l’hypothèse où le Parlement ne pourrait pas respecter l’échéance du 6 juin?
    Madame la Présidente, je pense que l’ensemble de notre pays se préoccupe de cette question, et il nous incombe à nous, législateurs, d’instaurer un régime. Contrairement à certains, je ne crois pas qu’il vaille mieux se passer de loi plutôt que d’adopter celle qui nous est proposée. Je pense qu’aucune loi n’est parfaite, et que toute loi est appelée à être modifiée et améliorée en fonction de nos expériences et de notre évolution.
    J’encourage fortement ceux qui s’opposent au projet de loi et disent préférer s’abstenir de voter à faire leur travail de législateur, à mettre un système en place, puis à travailler pour l’améliorer.
    Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Bruce—Grey—Owen Sound.
    À titre de députée de Renfrew—Nipissing—Pembroke, je prends bien humblement la parole pour faire valoir le point de vue des honnêtes citoyens de ma circonscription sur le dossier complexe dont le Parlement est saisi aujourd'hui, soit l'aide médicale à mourir.
    Le débat touche à l'essence même de l'identité canadienne, et je prie pour que nous puissions faire les choses correctement, le plus humainement possible.
    Je remercie tous les gens qui ont répondu à mon appel et qui m'ont fait part de leurs réflexions sur le projet de loi. Je suis fière de dire que j'ai consulté le plus de gens possible afin d'avoir les meilleurs repères possibles lorsque viendra le moment d'appuyer le gouvernement ou la Cour suprême, qui pilotent ce dossier, ou de m'y opposer.
    J'ai écouté attentivement mes collègues, qui ont bien exprimé différents points de vue. Afin de respecter les principes qui m'animent et qui animent les gens qui m'ont élue et réélue, j'estime qu'il faut permettre aux gens qui n'ont pas eu l'occasion de s'exprimer au Parlement de se faire entendre.
    Je suis heureuse de contribuer au débat sur l'aide médicale à mourir en m'appuyant pour me guider sur un échantillon de lettres et d'observations reçues par mon bureau. Même si je n'ai pas le temps de lire dans cette enceinte toutes les lettres reçues, je tiens à assurer aux personnes qui les ont écrites que tous les points de vue comptent et seront pris en compte.
    Voici une lettre de Carmel, qui habite à Pembroke: « Madame la députée, je crois savoir que le gouvernement a l'intention de présenter une mesure législative concernant l'aide médicale à mourir. Je suis totalement en désaccord avec un grand nombre des recommandations présentées par le comité mixte spécial chargé d'étudier la question. En légalisant l'euthanasie et le suicide assisté, nous nous engageons sur une pente dangereuse. Les limites continueront d'être contestées. Je vous demande instamment de rédiger une mesure législative aussi restrictive que possible ainsi que de respecter et de prendre en considération les droits des nombreux Canadiens qui considèrent comme un meurtre la légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté. J'ai travaillé longtemps dans le domaine de la santé et, à ce titre, j'exhorte le gouvernement à investir davantage dans les soins palliatifs. Je sais d'expérience qu'il est possible de contrôler la douleur. Avec des soins attentifs et affectueux, la mort viendra naturellement. J'ose espérer que le bon sens guidera votre jugement. »
    Voici un courriel de David, un résidant d'Arnprior:
    « Madame la députée, Je ne suis pas favorable à ce projet de loi, non pas parce que je ne crois pas fermement au droit d'un citoyen apte à prendre cette décision de mettre fin à ses jours à la fin de sa vie, pourvu que la décision ne vienne que de lui, mais parce que le projet de loi C-14 ne va pas assez loin. Il est certain qu'un tel projet de loi doit être adopté à l'échelle fédérale afin d'éviter la mise en place de cadres de réglementation provinciaux disparates. Par ailleurs, la portée du projet de loi C-14 doit être élargie à au moins quatre égards. Le projet de loi doit protéger mon droit de déterminer au préalable, par l'entremise d'une procuration relative au soin de la personne établie d'avance, que je souhaite mettre fin à mes jours si je deviens plus tard inapte à prendre cette décision; autrement dit, c'est un droit similaire à mon droit actuel de refuser un traitement avant même d'en avoir besoin. Le projet de loi doit protéger mon droit de mettre fin à mes jours moi-même, sans l'aide directe d'un médecin. Ce changement permettra aux médecins de simplement prescrire les médicaments requis et appropriés pour cet acte très personnel afin d'éviter qu'ils soient obligés de mettre fin à mes jours dans des conditions que je n'aurai peut-être pas choisies. Pour donner suite à ce deuxième critère, outre les médecins, il faut qu'une foule de professionnels de la santé bien formés soient à ma disposition pour répondre à tous mes éventuels besoins, selon le modèle des soins d'accompagnement offerts aux mourants. Il faudrait voir à ce que les personnes que l'on dit atteintes d'une maladie mentale puissent bénéficier des mesures prévues dans le projet de loi si elles sont jugées aptes à le faire selon la procédure établie, car une personne ne devrait pas être jugée mentalement irrationnelle ou inapte dans tous les aspects de sa vie simplement parce qu'elle est étiquetée comme étant atteinte d'une maladie mentale. Il n'est cependant pas du tout question des enfants de moins de 18 ans ou des personnes ayant un retard de développement, qui doivent être à tout le moins protégés de façon étroite par une procédure clairement établie. Par ailleurs, il faut évidemment que les professionnels de la santé et les établissements de santé qui, sur le plan de l'éthique, s'opposent à cette procédure puissent refuser de l'appliquer en raison de leurs croyances, mais seulement à condition qu'ils soient obligés d'aiguiller le patient vers ceux qui ne sont pas opposés à la procédure. En passant, cette approche devrait également s'appliquer à l'avortement, à la légalisation de la marijuana et aux autres questions de cette nature. De plus, il faut évidemment élargir l'accès à des services de soins palliatifs publics pour ceux qui souhaitent en bénéficier. Les décisions en fin de vie doivent toujours être prises de façon éclairée par une personne apte à exercer sa liberté de choix, quelle que soit l'option choisie. Ce principe est d'ailleurs à la base de la qualité de vie — et de mort — garantie par la Charte canadienne, comme l'a statué la Cour suprême. La tenue d'un référendum national sur la question serait malavisée et inutile. À cet égard, je vous rappelle que la deuxième élection générale qui a reporté au pouvoir le premier ministre conservateur Mulroney, dans les années 1980, était essentiellement un référendum ou un vote sur le libre-échange. La victoire de M. Mulroney était aussi celle de l'ALENA. Par conséquent, je suis généralement d'accord avec la déclaration faite dans les années 1960 par Pierre Trudeau: « L'État n'a pas sa place dans les chambres à coucher de la nation. » Je crois cependant que cela va un peu trop loin. L'État a bel et bien sa place, mais son rôle doit se limiter à veiller à ce que les personnes vulnérables et celles qui risquent de le devenir ne soient pas exploitées et à ce qu'elles soient plutôt toujours traitées avec dignité et respect. Les régimes adoptés par les Pays-Bas, la Suisse et l'Oregon sont de bons modèles de réussite à cet égard. Je vous remercie. Je vous saurais gré d'accuser réception de ce courriel et je vous invite à faire connaître votre point de vue. »
(1320)
    La note suivante a été envoyée par David, de Combermere. Elle dit: « Notre quotidien local ici, à Barry's Bay, contenait votre appel à témoignages sur le projet de loi C-14. Merci de nous consulter. Personnellement, je vois ce projet de loi comme une boîte de Pandore et il est formulé d'une manière assez ambigüe pour que le gouvernement libéral permette presque n'importe quoi pour tuer des Canadiens. Je ne sais pas si vous lisez les bulletins d'information très fouillés de la coalition pour la prévention de l'euthanasie et son rédacteur en chef, Alex Schadenberg, mais je joins le dernier numéro, dans lequel il est question du projet de loi C-14. C'est un énorme mensonge. La coalition présente d'une manière plus étudiée que je pourrais le faire les idées que j'endosse. Veuillez considérer que c'est mon opinion sur cette question de vie et de mort que vous voulez présenter au Parlement. Je vous remercie de faire tout votre possible sur cette question. Que Dieu vous bénisse. »
    La lettre suivante a été envoyée par Betty, de Killaloe: « Chère députée, je m'oppose fermement au suicide assisté. Je crois que la vie nous est donnée par Dieu et que Lui seul devrait la reprendre. Nous ne savons pas ce qu'Il a prévu pour nous et nous devons Lui confier notre vie. Une fois qu'on aura commencé à prendre la vie de patients en phase terminale, combien de temps faudra-t-il avant qu'on le fasse aussi pour ceux qui se trouvent dans des établissements de soins de longue durée et qui coûtent beaucoup d'argent au système de santé? Qu'en est-il notamment des personnes handicapées ou atteintes de maladie mentale, que beaucoup de gens considèrent comme un fardeau pour la société? Investissons dans les soins palliatifs et les centres de soins où les gens peuvent mourir de façon naturelle. L'histoire nous a appris que lorsque les gens interviennent dans l'ordre naturel des choses et qu'ils entravent le plan de Dieu, le mal et les catastrophes s'ensuivent. La loi de Dieu dit: “Tu ne tueras point.” Ce principe devrait transcender toutes les lois du pays. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion d'exprimer mon point de vue. »
    Un couple d'Arnprior m'a envoyé le courriel suivant: « Chère députée, ma femme et moi préconisons l'aide médicale à mourir. Nous voudrions que puissent obtenir l'aide médicale à mourir non seulement les personnes qui en ont besoin et qui sont en pleine possession de leurs moyens, mais aussi les milliers d'infortunés qui sont atteints de la maladie d'Alzheimer et qui ne peuvent prendre une décision éclairée. Nous proposons qu'il soit légal de retenir cette option lorsqu'on prépare son testament, un membre de la famille ou un médecin pouvant servir de témoin. Une de nos mères est en établissement de soins de longue durée à Almonte; les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer y sont bien plus nombreuses que celles qui sont lucides. Je n'ai aucun doute que si elles avaient le choix, elles préféreraient mettre fin à leur vie plutôt que de la passer en fauteuil roulant à se faire traiter comme des enfants pour des raisons indépendantes de leur volonté. Nous sommes de tout coeur avec le personnel infirmier qui s'occupe de ceux qui ont besoin d'aide; nous leur vouons une grande admiration. Nous ne saurons jamais assez le remercier. »
    Nancy, de Deep River, a écrit ceci: « Madame la députée, Je réponds à votre demande de rétroaction sur le projet de loi relatif à l’euthanasie. D’abord, j’ai quelques observations de nature générale à faire. Toute cette dynamique s’inscrit dans un contexte de culture de la mort, d’une part, et de culture de la vie, d’autre part. La culture de la mort se caractérise par le secret et la manipulation. Le documentaire intitulé Agenda, qui a fait l’objet de recherches fouillées, en est la preuve. Certaines élites veulent réduire la population mondiale par tous les moyens ou presque. Certains veulent mettre à mal le système capitaliste pour que les idéaux socialistes en sortent gagnants. Le fait que ces élites soient socialistes est paradoxal. J’ai lu que la CIA appuyait le mouvement féministe radical, dont on se sert pour abattre les structures familiales et saper ainsi la stabilité économique. Hilary Clinton a dit très clairement, même si je ne la cite pas textuellement, qu'il y a dans notre société des valeurs judéo-chrétiennes dont “nous” devons nous débarrasser. »
    « On en a des exemples précis. Ils rallient des libéraux bien intentionnés, qu'ils mettent à leur service. Venons-en maintenant au coeur du sujet. L’aspect le plus dangereux du projet de loi est qu’il ne contient aucune disposition pour protéger la liberté de conscience du personnel médical. Autrement dit, si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle, c’est l’immoralité qui sera érigée en loi, une loi qui corromprait un segment important de la population. La corruption ne fait pas bon ménage avec une saine démocratie. Si la protection du droit à la liberté de conscience n’est pas consacrée dans la loi, il est presque certain que la bureaucratie se débarrassera de l'inconvénient que constituent les médecins réticents. C'est ce que l'on constate aujourd’hui au Québec. Le projet de loi prévoit certaines restrictions. Je peux comprendre qu’il vise à satisfaire, de façon prudente, aux instructions de la Cour suprême. Deux faits nous empêchent de voir ces restrictions d’un bon œil. Remarquez bien le langage qu’utilisent les médias, qui parlent de commencer doucement à pratiquer l’euthanasie. On laisse ainsi entendre qu’au fil du temps l'euthanasie deviendrait permise dans d’autres situations. Ne vous laissez pas tromper par ces restrictions. Elles s’évanouiront comme la rosée du matin. C’est ce que l’on a constaté en Europe. »
(1325)
    Madame la Présidente, ma question à la députée a trait à l’ensemble du dossier qui fait l’objet de notre débat aujourd’hui. Ce projet de loi fournira le cadre juridique pour s’assurer que l’on tienne compte des personnes vulnérables partout au Canada et qu’on prenne soin d’elles.
     À l’étape du comité, nous avons vu des députés de tous les partis proposer des amendements et en faire accepter quelques-uns, ce qui est merveilleux. La députée croit-elle qu’il est mieux d’avoir un projet de loi ou une loi en place que de n’avoir aucune loi en place? Parce que dans le dernier cas, beaucoup de Canadiens se retrouveront très vulnérables à cette situation.
    Madame la Présidente, je communique les opinions des gens de ma circonscription qui sont d’avis que ce projet de loi n’a pas fait l’objet d’un débat adéquat et qui aimeraient qu’on en discute plus longtemps. Comme le disait Nancy de Deep River, on signale maintenant aux Pays-Bas un nombre important de morts données par des médecins sans que le patient ou sa famille n’en ait fait la demande. Le nombre réel de ces décès est sans doute plus élevé que le nombre de cas où les médecins sont assez téméraires pour admettre leur geste, qui constitue un meurtre et donc un acte illégal.
    D’un point de vue pratique, il est presque impossible d’appliquer les restrictions de façon rigoureuse sur une longue période. Selon le Conseil des Canadiens avec déficiences, le projet de loi ne fournit pas les protections qu’il a demandées dans sa norme sur les personnes vulnérables. Ces protections, qui ne figurent pas dans le projet de loi, ont trait à l’évaluation des vulnérabilités qui peuvent pousser quelqu’un à rechercher une aide médicale à mourir, et à un examen effectué de concert avec les autorités compétentes en la matière. Somme toute, le projet de loi comporte trois grands inconvénients.

[Français]

    Madame la Présidente, j'ai écouté avec attention les propos de ma collègue, et je la félicite d'avoir utilisé son temps de parole pour donner la parole à ses concitoyens.
    Dans chacune de nos circonscriptions, on a entendu, tant de la part de ceux qui sont en faveur de l'aide médicale à mourir que de ceux qui ne le sont pas, des opinions totalement divergentes. Cependant, un point semble rallier la grande majorité des gens, soit celui concernant les soins palliatifs.
    Ma question est simple. N'y aurait-il pas une façon de s'exprimer auprès des gens pour faire la jonction entre ceux qui sont en faveur et ceux qui ne le sont pas? On sait en effet que, dans les soins palliatifs, en augmentant les doses de médicaments qui soulagent la douleur, très souvent on provoque la mort. Ce faisant, souvent les patients deviennent inconscients, alors que, dans l'aide médicale à mourir, un patient choisit consciemment de quitter les siens, pour la même raison et avec la même médication.
(1330)

[Traduction]

    Madame la Présidente, en fait, un préposé aux soins palliatifs m’a expliqué que les Canadiens sont très confus au sujet du projet de loi parce que la définition de soins palliatifs est l’aide médicale à mourir. Ce projet de loi est la même chose. Ils se demandent si le gouvernement pense que les soins palliatifs et l’aide médicale à mourir telle que définie dans le projet de loi sont une seule et même chose.
     Comme l’a si bien dit Janet de Cobden, la médecine véritable ne tue pas. La médecine véritable soulage la douleur sans éliminer la personne qui souffre. Elle demande si je n’ai aucun scrupule à corrompre la médecine véritable et à permettre un tel abus. La cour a commis une erreur fondamentale en prenant cette décision.
    Madame la Présidente, la question que j’ai entendue deux fois aujourd’hui des députés d’en face est celle-ci: est-il mieux d’avoir une loi aujourd’hui que de ne pas en avoir du tout? Sommes-nous en train de dire à la population que nous allons adopter le projet de loi sur l’aide médicale à mourir aujourd’hui parce que ce sera moins cher que si nous remettons cela à demain? Pourquoi ne pas demander un délai supplémentaire pour nous assurer d’avoir le meilleur projet de loi possible? J’aimerais savoir ce que ma collègue a à dire là-dessus.
    Madame la Présidente, à en juger par les nombreuses lettres que j’ai reçues de résidants de l’Ontario, je peux vous dire qu’ils craignent que le projet de loi vise plutôt à permettre au gouvernement provincial de faire des économies en santé.
    Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi dont la Chambre des communes est saisie et de partager mon temps de parole avec la députée de Renfrew—Nipissing—Pembroke.
    Comme je viens de le dire, je suis heureux de prendre la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi dont la Chambre des communes est saisie. J’ai l’honneur d’être député depuis 2004 et je peux dire en toute franchise que c’est l’un des projets de loi les plus délicats et les plus controversés dont j’ai eu à débattre dans cette Chambre. C’est un sujet à propos duquel les Canadiens ont des opinions très arrêtées, et il est par conséquent capital que, tout au long du processus, nous respections tous les points de vue et nous nous efforcions d’en arriver au meilleur projet de loi possible, celui qui répond à un maximum de préoccupations.
    Aujourd’hui, j'entends vous dire ce que je pense personnellement du projet de loi et vous faire part des opinions que m’ont exprimées de nombreux électeurs de ma circonscription. Mon vote sera influencé à la fois par les souhaits des personnes que je représente et par ce que ma propre conscience me dicte.
    J’ai récemment écrit une lettre ouverte aux journaux de ma région et je l’ai fait distribuer à tous les médias de ma circonscription dans le but de consulter l'électorat et de connaître leurs points de vue sur le projet de loi. Je leur ai demandé de faire parvenir leurs commentaires à mon bureau pour que, au moment du vote, je sois en mesure de bien représenter l’opinion des électeurs de ma circonscription. À l’heure actuelle, la majorité d’entre eux, soit près de 80 %, me disent de voter contre le projet de loi. Je me dois de préciser que certains d’entre eux sont radicalement opposés au projet de loi, mais que d’autres seraient prêts à l’appuyer s’il était légèrement modifié, mais, pour le moment, ils sont contre.
    En ce moment, les courriels et les lettres continuent d’arriver à mon bureau. Les personnes qui sont contre le projet de loi invoquent surtout la nécessité de mieux protéger les personnes vulnérables, de mieux protéger la liberté de conscience des travailleurs de la santé et de mettre en place une meilleure stratégie nationale sur les soins palliatifs.
    Je partage bon nombre des préoccupations des électeurs de ma circonscription. Il est absolument crucial d’assurer la protection des personnes vulnérables, qui comprennent à mon avis trois groupes différents. Il y a d’abord les enfants. Il faut examiner plus en profondeur la question de savoir, d'une part, si les enfants de moins de 18 ans devraient pouvoir demander l’aide médicale à mourir et, d'autre part, qui devrait être habilité à prendre cette décision.
    Ensuite, il est essentiel que des mesures de sauvegarde protègent les personnes souffrant de maladies débilitantes, comme la maladie d'Alzheimer, de telle sorte que l'on s'assure d'avoir obtenu d'elles, à un moment où elles étaient parfaitement saines d'esprit, un consentement plein et entier à l'aide médicale à mourir. Tel qu'il est rédigé actuellement, le projet de loi prévoit d'importantes étapes préalables, mais je pense qu'il pourrait aller beaucoup plus loin sur ce plan. La question est simple: les mesures de sauvegarde sont-elles suffisantes? Sommes-nous certains d'avoir pris toutes les précautions?
    J'apprécie le travail fait par le comité spécial qui a été formé pour tenir des consultations avant la rédaction du projet de loi. J'apprécie également le travail fait par le comité de la justice. Le travail fut toutefois effectué à la hâte, avec une approche partiale. Lorsqu'il s'agit de protéger les personnes vulnérables, je tiens à ne ménager aucun effort. Un sujet comme celui-là mérite une étude intensive et exhaustive de la part de tous les parlementaires. Il est profondément troublant de savoir qu'à ce stade-ci, le gouvernement refuse de débattre pleinement de la question.
    En outre, le gouvernement nous a montré très clairement dans cette enceinte, hier soir, qu'il n'avait pas du tout l'intention d'envisager quelque amendement que ce soit, et c'est une erreur. Sur une question aussi sensible, j'aurais espéré qu'il adopte plus sincèrement une approche de collaboration avec les autres partis en vue d'optimiser le projet de loi.
    D'importants amendements qui auraient pu répondre à des objections très sérieuses ont été rejetés par le gouvernement hier soir. J'ai été profondément déçu de voir la partisanerie prendre le dessus sur le bon sens. Heureusement, cela fait du bien de voir que des députés de tous les partis ont voté selon leur conscience et leurs convictions. Nous n'assistons pas assez souvent à ce genre de chose dans cette enceinte, et je remercie ces députés.
    Enfin, il reste à savoir si le projet de loi permettrait aux personnes atteintes d'une maladie mentale d'avoir accès à l'aide médicale à mourir, comme l'ont indiqué certains de mes collègues. Je serais profondément troublé si c'était le cas. Je crois fermement que les maladies mentales sont bel et bien des maladies.
(1335)
    Cela dit, je trouverais très inquiétant qu’une personne souffrant d’une maladie mentale ait accès à l’aide médicale à mourir. Qui dit maladie mentale dit qu’une personne psychiquement très mal en point, si je puis m’exprimer ainsi, pourrait demander une aide au suicide, alors qu’elle ne ferait très probablement pas ce choix si elle était saine d’esprit. Je pense que ce serait envoyer un mauvais message aux autres personnes souffrant de maladie mentale. J’ai bien peur que cela encouragerait plus de suicides, avec ou sans aide.
     Beaucoup de groupes dans ma circonscription consacrent énormément d’efforts à la lutte contre les maladies mentales et à l’information de ceux et celles qui en sont atteints pour qu’ils sachent qu’ils peuvent toujours trouver de l’aide. Nous devons faire savoir qu’on peut toujours trouver de l’aide. Pouvoir demander à bénéficier d’une aide médicale à mourir quand on est atteint d’une maladie mentale irait, à mon sens, à l’encontre de ces efforts. Voilà un autre domaine qui mérite d’être étudié de bien plus près pour que les députés soient convaincus que le projet de loi ne permettra pas ce type de situation.
    En outre, la Semaine nationale des soins infirmiers remonte à quelques semaines à peine. Il est donc très important de répéter qu’il nous faut protéger solidement la liberté de conscience des professionnels de la santé. Hier soir, le gouvernement avait l’occasion de reconnaître cette liberté, mais il a choisi de ne pas la saisir. Un amendement proposé par mon collègue, le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan, visait à reconnaître que les médecins et les professionnels de la santé sont libres de refuser d’apporter une aide directe ou indirecte à mourir. Malheureusement, le gouvernement a voté contre cet amendement.
    La Charte des droits et libertés déclare: « Chacun a les libertés fondamentales suivantes. » Quelle est la première de la liste? La liberté de conscience et de religion. J’invite instamment le gouvernement à mettre tout clivage partisan de côté et à reconnaître les droits garantis aux professionnels de la santé par la Charte. Nul ne devrait être obligé d’accomplir une tâche qui va à l’encontre de sa liberté de conscience ou de ses convictions.
     Je n’essaie pas de rouvrir un débat qui a déjà eu lieu à la Chambre, mais je dois utiliser un exemple qui illustre très bien ce que j’essaie d’expliquer. Je comparerai donc la situation à celle de ministres du culte ou de membres du clergé qui refusent de célébrer des mariages entre personnes de même sexe. La liberté de conscience et de religion est fondamentale pour protéger des personnes qui ne souhaitent pas participer à quelque chose qui va à l’encontre de leurs croyances ou de leurs convictions. Or, cette liberté n’est pas prévue par le projet de loi. Autrement dit, nul ne devrait être obligé de participer à quelque chose ou de fournir un service auquel il ne croit pas. Ce doit être une considération importante dans la conception du cadre de réglementation. Là encore, je souhaiterais que nous ayons plus de temps pour entendre des professionnels de la santé inquiets à ce sujet.
     J’aimerais conclure par une remarque sur l’évolution de cette question et exprimer ma préoccupation devant la précipitation dans laquelle ce projet de loi est présenté.
    Comme je l'ai dit plus tôt, je suis député depuis 2004. La question à l'étude est décidément l'une des plus délicates, sinon la plus délicate, sur laquelle il m'ait été donné de me prononcer pendant ces 12 ans à la Chambre.
    Je suis pleinement conscient, comme tous les députés, des limites associées aux ordres provenant de la Cour suprême. Cela dit, il vaut mieux prendre le temps qu'il faut, donc quelques jours ou quelques semaines de plus, au lieu d'aller trop vite et d'arriver à un projet de loi inadéquat. J'encourage vivement les députés à y réfléchir sérieusement. Nous avons tous à l'esprit la date du 6 juin, mais je suis certain que la Cour nous accorderait une certaine souplesse.
    Prenons le temps de faire les choses correctement. Puisqu'il s'agit d'un sujet très délicat, qui préoccupe la population, il m'apparaît inapproprié et imprudent de hâter le processus. Je suis conscient de la date pour laquelle la Cour a demandé au Parlement de régler ce dossier. Cela dit, je trouve préoccupant que les exigences de la Cour suprême restreignent le temps alloué aux députés pour débattre en profondeur de cet enjeu crucial et l'examiner avec soin.
(1340)
    J'ai entendu trop de députés déclarer qu'il faudrait revenir sur tel point à l'avenir, qu'ils y reviendraient plus tard, autant de remarques qui révèlent les lacunes du projet de loi. Il comporte des lacunes, effectivement. À titre de députés, je ne crois pas que nous puissions...
    Je suis désolée. Le temps est écoulé.
    Nous passons aux questions et observations. Le député de Fleetwood—Port Kells a la parole.
    Madame la Présidente, je remercie les deux derniers intervenants d'avoir si bien décrit l'essentiel du défi posé à la Chambre, qui consiste à prendre une décision judicieuse quant à la question qui nous occupe.
    Dans un dossier aussi complexe, il est extrêmement ardu d'arriver d'emblée à la bonne solution. Je peux comprendre pourquoi le gouvernement précédent s'est essentiellement défilé devant la tâche, lui qui avait pourtant la plus grande partie de l'année pour faire face aux conséquences de la décision de la Cour suprême.
    J'aimerais poser au député une question sur le préambule du projet de loi, où on peut lire ceci:
[Attendu] que chacun jouit de la liberté de conscience et de religion au titre de l’article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés;

[attendu] que la présente loi n’a pas pour effet de porter atteinte à la garantie dont fait l’objet cette liberté [...]
    Ce matin, j'ai eu l'occasion de demander à la ministre de la Santé si cette liberté comprend le droit de ne pas recommander un patient. Quelles autres dispositions le député propose-t-il afin de rassurer les médecins comme il le réclame?
    Madame la Présidente, manifestement, le gouvernement et la ministre tentent de faire croire que le projet de loi prévoit et garantit des mesures de sauvegarde pour les professionnels de la santé, les médecins, etc. Or, la plupart des Canadiens, y compris de nombreux électeurs qui ont élu l'actuel gouvernement, voient bien que ces mesures n'existent pas.
    Quel paradoxe: il y a quelques semaines, nous étions tous attristés par l'épidémie de suicides qui afflige Attawapiskat et voilà que, soudainement, nous retournons notre veste en appuyant un projet de loi qui propose ni plus ni moins le suicide sous une autre forme.
(1345)
    Madame la Présidente, mon collègue de Bruce—Grey—Owen Sound a parlé avec beaucoup de passion de la santé mentale.
     Il a aussi parlé des amendements qui ont été proposés. Par exemple, il me semblait très logique de proposer qu’une personne atteinte de cancer et souffrant de problèmes de santé mentale soit soumise à une évaluation psychiatrique dans le cadre de son processus décisionnel. J’ai été très étonnée qu’une mesure aussi importante et logique qu’une évaluation psychiatrique soit rejetée par la Chambre. Je me demande si mon collègue pourrait dire quelques mots à ce sujet.
    Madame la Présidente, ma collègue et amie soulève un point important.
     Une autre mesure de sauvegarde — j’en ai d'ailleurs parlé dans mon allocution — consiste à s’assurer que ceux qui prennent cette décision, ceux qui en arrivent au point où ils veulent recourir au suicide assisté, ont les idées claires.
     Il aurait été possible d’ajouter cette mesure au projet de loi grâce à un amendement qui a été présenté à la Chambre hier soir et qui a été rejeté par le gouvernement. Pourquoi? Il semble s’agir simplement de partisanerie. Les libéraux pensent qu’ils ont bien fait les choses du premier coup et ils n’écouteront personne qui leur dit le contraire. Il était évident hier qu’ils n’étaient disposés à écouter aucun conseil au sujet du projet de loi, et cela est très décevant.
    Madame la Présidente, je vais partager mon temps avec le député de Surrey Centre.
    La question dont nous traitons aujourd’hui est infiniment grave. Les dernières semaines ont donc été chargées d’émotions pour tous les parlementaires, moi y compris, car nous avons été confrontés à la question de l’aide à mourir.
     Le gouvernement est tenu de donner suite à la décision que la Cour suprême a prise en février 2015. Je me suis jointe à mes collègues pour assumer cette responsabilité après notre arrivée au pouvoir, en novembre 2015. Par conséquent, pendant la courte période qui s'est écoulée depuis, les fonctionnaires et les parlementaires ont accompli un immense travail, avec la contribution de Canadiens qui nous ont exposé divers points de vue.
     Nous avons devant nous aujourd’hui un cadre législatif qui, selon nous, représente l’approche qui convient au Canada. C’est un projet porteur, qui modifierait pour toujours la gamme d’options qui s’offrent aux Canadiens en fin de vie. J’aimerais examiner les principes sous-jacents à l’approche législative adoptée par le gouvernement pour élaborer le projet de loi que la Chambre étudie aujourd’hui.
     En premier lieu, c’est une question d’autonomie personnelle. Il faut que les gens puissent décider eux-mêmes de leur destin, d’une certaine façon, il faut donner aux Canadiens l’accès à l’aide médicale à mourir, car la Cour suprême nous a clairement signifié que les Canadiens doivent avoir cet accès.
    Nous devons nous conformer à la Charte canadienne des droits et libertés et présenter un projet de loi qui respecte les décisions de la Cour suprême du Canada. C’est exactement ce que nous ferions en adoptant le projet de loi dont la Chambre est saisie aujourd’hui.
    Ce projet de loi respecte également le principe de la valeur inhérente de la vie. Il contient donc les mesures de sauvegarde qui protégeraient efficacement les personnes vulnérables. Il protégerait aussi solidement la liberté de conscience des fournisseurs de soins de santé.
    Ces dernières semaines et ces derniers mois, j’ai discuté avec des députés de tous les partis de la Chambre. La ministre de la Justice et moi-même avons comparu devant des comités de la Chambre et du Sénat. J’ai discuté en personne et par téléphone avec de nombreux intervenants ainsi qu’avec des personnes venues témoigner devant l'un ou l'autre des comités au sujet de ce projet de loi.
    Soulignons que les ordres professionnels qui représentent les fournisseurs de soins de santé appuient cette approche législative. Il s'agit notamment de l’Association médicale canadienne, de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada, de l’Association des pharmaciens du Canada ainsi que de SoinsSantéCAN, qui représente les hôpitaux et les centres universitaires des sciences de la santé de notre pays.
    Aujourd’hui même, les parlementaires ont reçu une lettre ouverte de 36 organismes représentant les personnes vulnérables, dont l’Association canadienne pour l’intégration communautaire, dans laquelle ils déclarent qu’ils appuient ce projet de loi. Chacun de ces organismes oeuvre dans un domaine pour lequel il désire obtenir des précisions et collaborer avec mon ministère ou les provinces et les territoires afin d’aider leurs membres à appliquer correctement l’aide médicale à mourir.
     Comme je l’ai souvent dit, il s’agit d’un processus itératif. C’est pourquoi, si ce projet de loi est adopté, nous nous pencherons rapidement sur d’autres domaines potentiels d’aide médicale à mourir, et le Parlement entamera un examen de cette importante mesure législative.
     Parlons un peu des échéances. La Cour suprême du Canada a repoussé la date butoir de présentation d’un cadre législatif au 6 juin. Avant de poursuivre, permettez-moi de vous dire que je respecte les rôles et les responsabilités que nous assumons tous ici à titre de parlementaires, ainsi que ceux que les sénateurs assument à la Chambre haute.
    Nous avons tous une bonne raison de vouloir poursuivre nos réflexions et notre examen de ce projet de loi au nom des Canadiens. Mais en réalité, dans très, très peu de temps, nous nous trouverons devant un vide juridique parce que nous n’aurons aucune loi régissant ce dossier.
    Malgré ce qu’en disent certains, l’absence d’un cadre législatif causera des difficultés très réelles et très graves. Comme je l’ai dit hier, il y a de fortes chances pour que le 6 juin, nous n’ayons pas adopté de loi sur cette question. Soulignons donc les répercussions que cela entraînerait.
    Premièrement, certains organismes comme l’Association médicale canadienne et l’Association canadienne de protection médicale ont affirmé clairement que la vaste majorité des médecins ne participeraient pas à l’aide médicale à mourir sans le soutien d’un cadre législatif et malgré les protections que, selon certains, l’arrêt Carter leur procure.
(1350)
    Les associations conseillent aux médecins d’obtenir un avis juridique avant de procéder à toute forme d’aide à mourir, y compris de consulter les patients, ce qui risque de compliquer l’accès et de conduire au non respect de la décision de la Cour suprême.
    Deuxièmement, il serait illégal pour tout autre fournisseur de soins de santé d’aider une personne à mourir. Cela signifie que le personnel infirmier, les pharmaciens, les travailleurs sociaux et d’autres fournisseurs de soins mentionnés dans les amendements adoptés à l’étape du comité se retrouveraient sans protection juridique. Il est particulièrement important de clarifier la situation des pharmaciens qui doivent fournir le médicament létal.
    Enfin, il existe la possibilité que des personnes reçoivent une aide à mourir en dehors de tout cadre législatif, des personnes qui n’auraient pas été admissibles en vertu de l’approche proposée par le gouvernement. Cela veut dire, par exemple, qu’il existe un risque qu’une personne souffrant d’une grave dépression demande une aide à mourir alors que les mesures de sauvegarde visant à protéger cette personne soient inadéquates ou inexistantes.
    Je veux également rappeler aux députés que la vaste majorité des personnes en fin de vie ne choisira pas de recourir à l’aide médicale à mourir et que le but premier de notre système de santé est de garder les Canadiens en santé. Les Canadiens devraient avoir accès à des soins palliatifs de grande qualité. C’est un dossier que je me suis engagée à régler avec nos collègues provinciaux et territoriaux, en plus de l’engagement que nous avons pris dans notre plateforme d’investir 3 milliards de dollars dans les soins à domicile.
     Notre gouvernement a proposé ce projet de loi qui transformera les options de soins de fin de vie offertes aux Canadiens. Cette approche respecte les droits que leur confère la Charte, protège les personnes les plus vulnérables et répond aux besoins des fournisseurs de soins de santé.
    Je veux remercier mes collègues parlementaires de l’attention qu’ils portent à ce projet de loi. Bon nombre d’entre nous sommes nouveaux dans nos fonctions et ce n’est pas une mince affaire qui nous a été confiée au nom des 36 millions de Canadiens que nous représentons. Je les remercie d’avoir participé au débat avec respect et dignité. Je les remercie d’avoir fait l’impossible pour respecter l’opinion des autres, même si elle diverge de la leur. Je les remercie pour le sérieux dont ils ont fait preuve dans un contexte où il est virtuellement impossible de rédiger une loi en accord avec toute la diversité des points de vue exprimés.
     Comme nous avons la responsabilité de mettre en oeuvre une loi, j’exhorte les députés à appuyer le projet de loi C-14 lors du vote définitif de ce soir. Il me tarde de travailler avec le Sénat, si la Chambre décide de passer à la prochaine étape de notre processus législatif.
    Madame la Présidente, je veux souligner le travail colossal que la ministre de la Santé a dû accomplir pour élaborer cette mesure législative.
     Le seul élément du projet de loi que je trouve très préoccupant est l’engagement à investir 3 milliards de dollars dans les soins palliatifs. Je sais que les Libéraux font valoir qu’ils doivent s’entendre avec les provinces au sujet des accords en matière de santé.
     Il y a beaucoup d’engagements dans le budget et je pourrais en nommer cinq ou six au hasard dont on ne connaît pas les menus détails. Pourquoi les fonds destinés aux soins palliatifs ne figurent-ils pas dans le budget de cette année? La ministre croit-elle que le gouvernement ne pourra s'entendre rapidement avec les provinces et les territoires sur une question aussi importante?
(1355)
    Madame la Présidente, les députés ont très souvent insisté sur le fait qu'il fallait absolument que les Canadiens aient accès à des soins palliatifs de qualité.
    Comme le sait ma collègue, la prestation des soins de santé est principalement du ressort des provinces et des territoires. J'ai été impressionnée par le travail de mes homologues, les ministres provinciaux et territoriaux de la Santé, et je continuerai de collaborer avec eux. Le futur accord sur la santé prévoira d'autres investissements visant à bonifier ce qui se fait déjà dans le domaine des soins palliatifs.

[Français]

    Madame la Présidente, lorsque nous avons demandé aux représentants du ministère de la Justice et du ministère de la Santé quelles étaient les bases juridiques ou législatives concernant l'article sur la mort naturelle raisonnablement prévisible, ils nous ont orientés vers le ministre. Je n'ai donc pas encore été convaincue de la nécessité de cet article que nous n'arrivons pas à interpréter.
    La ministre peut-elle nous dire pourquoi un article aussi flou a été inséré dans un projet de loi aussi important?

[Traduction]

    Madame la Présidente, ce n'est pas la première fois qu'on nous pose cette question, et j'y répondrai avec plaisir aujourd'hui.
    Comme le sait la députée, nous avions pour tâche d'encadrer l'aide médicale à mourir par une loi. L'arrêt Carter parlait de problèmes de santé graves et irrémédiables. Lorsque nous avons rédigé le texte du projet de loi, nous avons senti que nous devions y aller avec un libellé plus clair, une position qu'appuyaient les travailleurs de la santé qui, en un sens, ne veulent pas être limités par un délai préétabli qui dirait par exemple que le patient doit mourir d'ici six mois.
    L'expression dont parle la députée a été choisie afin de respecter l'opinion professionnelle des fournisseurs de soins de santé, car ce sont eux qui savent quand des problèmes de santé graves et irrémédiables franchissent le point où la mort est raisonnablement prévisible.
    Madame la Présidente, j’ai deux petites questions à poser.
    Si nous n’avons pas adopté de projet de loi d’ici au 6 juin, ou s’il y a un vide, quels recours s’offrent actuellement aux malades qui veulent obtenir une aide médicale à mourir?
    Deuxièmement, si nous n’avons pas adopté de projet de loi d’ici le 6 juin, ou s’il y a un vide après cette date, l’aide médicale à mourir sera-t-elle accessible aux personnes qui n’ont pas de carte de santé et qui ne sont pas couvertes par l’assurance-maladie?
    Madame la Présidente, j’exhorte les députés à bien comprendre les risques que poserait un vide juridique. Je sais que, pour certains, ce n’est pas un point important, mais je voudrais que les députés comprennent bien que, si leur objectif est de permettre aux Canadiens d’avoir accès à l’aide médicale à mourir, la meilleure façon de le faire est d’appuyer ce projet de loi. Sans ce projet de loi, les fournisseurs de soins de santé vont avoir besoin de plus d’informations. Ils vont demander des avis juridiques. Il sera donc très difficile d’obtenir une aide médicale à mourir.
     D’un autre côté, des malades risquent d’avoir accès à l’aide médicale à mourir sans que les balises adéquates soient en place.
     Mon collègue a également fait remarquer que le projet de loi énonce clairement que l’aide médicale à mourir est accessible aux Canadiens qui sont couverts par notre régime d’assurance-maladie universel. Il serait préoccupant que les personnes qui n’appartiennent pas aux catégories admissibles ne puissent pas avoir accès à l’aide médicale à mourir.
    Madame la Présidente, j’aimerais dire à la ministre de la Santé et à la ministre de la Justice, en toute sincérité, que je comprends combien tout cela a été difficile. Je pense que tous les Canadiens apprécient les précautions qui ont été prises dans l’approche qui a été choisie. Mais cela ne change rien à la situation aujourd’hui, à savoir que je ne pense pas pouvoir voter en faveur du projet de loi C-14.
    Je suis peinée de le dire, mais je ne pense pas que le projet de loi C-14 soit conforme à la décision Carter. La situation me donne l’impression d'un conflit étrange entre deux professions au Canada : les juristes et les médecins. Je sais ce que les médecins veulent obtenir du Parlement, et je sais ce que les juristes nous ont dit. Mais en tant qu’avocate, je ne vois pas comment le projet de loi C-14 peut être conforme avec l'arrêt Carter.
    Les juges de demain vont se reporter à nos débats pour savoir quelles étaient véritablement nos intentions, mais j’aimerais bien savoir comment Kay Carter aurait pu avoir accès à l’aide médicale à mourir en vertu du projet de loi C-14.
(1400)
    Madame la Présidente, à titre de fournisseuse de soins de santé, je crois comprendre que des personnes comme Kay Carter pourraient avoir accès à l'aide médicale à mourir aux termes du projet de loi
    De plus, j'invite la députée à consulter les documents présentés à la Chambre par la ministre de la Justice, qui affirment que le projet de loi répond aux exigences de la Charte des droits et libertés. J'espère pouvoir avoir d'autres discussions à l'appui de ce fait.

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Déclarations de députés]

[Français]

Le lait diafiltré

    Madame la Présidente, le modèle agricole québécois que nous avons choisi chez nous est à l'image du Québec: équitable, juste et diversifié. Nous sommes fiers de notre agriculture.
    Toutefois, si elle est soutenue et valorisée chez nous, elle est totalement oubliée par le gouvernement fédéral. Quelle ironie, quelle tristesse de voir ceux qui remplissent notre garde-manger ne recevoir que des assiettes vides du fédéral!
    Les producteurs laitiers ont donc amorcé, hier, un périple de trois jours en tracteur, de Québec à Ottawa, pour dénoncer l'indifférence de ce gouvernement. On retrouve dans leurs sillons des femmes et des hommes de tous les milieux qui soutiennent leur initiative.
    Ils espèrent et on attend toujours qu'Ottawa bloque l'importation de lait diafiltré, qui étouffe nos producteurs laitiers. Ils espèrent et on attend toujours les indemnités promises aux agriculteurs lors de la signature des traités internationaux.
    Les agriculteurs ont assez attendu. Il est temps que le gouvernement agisse.

[Traduction]

Le Mois de sensibilisation à l'hémochromatose

    Monsieur le Président, je veux parler aujourd'hui d'une maladie qui touche environ 80 000 Canadiens, sans que bon nombre d'entre eux en soient même conscients. Je parle d'hémochromatose héréditaire. L'hémochromatose nuit à la capacité du corps d'éliminer l'excès de fer, ce qui peut causer des problèmes de santé très graves et parfois mortels, comme des maladies du foie, des maladies du coeur, le diabète, l'arthrite, des maladies mentales et le cancer.

[Français]

    La bonne nouvelle, c'est que l'hémochromatose se soigne facilement sans thérapie pharmacologique, à condition d'être diagnostiquée à temps.

[Traduction]

    La Société canadienne de l'hémochromatose a un excellent site Web à l'adresse www.toomuchiron.ca, où l'on peut trouver un test d’autoévaluation très utile qui permet aux gens de déterminer s'ils sont à risque.
    En cette dernière journée du Mois de sensibilisation à l'hémochromatose, j'invite tout le monde à une réception organisée ce soir par la Société et le sénateur Wells qui, depuis qu'il a appris qu'il était atteint de cette maladie, milite sans relâche en faveur d'une sensibilisation accrue et d'un dépistage précoce.
    Je demande à chaque député de sensibiliser les gens à cette maladie. Leurs efforts pourraient permettre de sauver des vies.

Les réussites militaires

    Monsieur le Président, le mardi 24 mai, j'ai eu le privilège d'assister à une cérémonie au manège militaire de Chatham, avec l'Essex and Kent Regiment, lors de laquelle le colonel Ralph West a reçu le prestigieux prix de l'International Armed Forces Council pour souligner sa contribution aux forces armées, à la cause des anciens combattants et à la bonne entente à l'échelle internationale entre les communautés militaires américaines et canadiennes.
    Le colonel West s'est enrôlé dans le Kent Regiment en 1948, a été promu au grade de caporal, a été nommé officier, puis a pris sa retraite alors qu'il avait le grade de major. Il s'est par la suite réenrôlé et a pris sa retraite alors qu'il était colonel. Ce n'est pas mal pour quelqu'un qui n'était au début qu'un simple soldat.
    Il me faudrait beaucoup plus de temps pour énumérer ses nombreuses réalisations et les prix qu'il a récoltés. Mentionnons seulement que tout cela ne peut se comparer avec son dévouement à l'égard de son épouse Norma, qui l'a suivi partout et qui partage sa vie depuis 1955.
    Je tiens à féliciter et à remercier le colonel West et son épouse Norma pour leur amour et leur dévouement à l'égard de leur pays et de leur communauté pendant toutes ces années.

Le bois d'oeuvre

    Monsieur le Président, depuis plus de 25 ans, les gouvernements du Canada et des États-Unis reconnaissent que l'industrie du bois d'oeuvre du Canada atlantique est unique au Canada. La plupart des terrains forestiers de l'Atlantique appartiennent à des intérêts privés, et les pratiques d'exploitation forestière y sont exactement les mêmes qu'aux États-Unis. Voilà pourquoi, dans tous les accords sur le bois d'oeuvre conclus entre les États-Unis et le Canada, le bois du Canada atlantique a été exempté de droits de douane.
    Vu l'expiration du dernier accord sur le bois d'oeuvre, les propriétaires de boisés, les scieries et les bûcherons du Canada atlantique réclament la certitude que leurs entreprises continueront de recevoir un traitement juste. Des centaines de millions de dollars et des milliers d'emplois dans le Canada atlantique dépendent de cette industrie.
    J'exhorte la ministre du Commerce international à faire en sorte que tout éventuel accord sur le bois d'oeuvre continue d'exempter des droits de douane les produits du Canada atlantique.

[Français]

Le premier sentier comestible public

    Monsieur le Président, le 28 mai dernier, une cinquantaine de bénévoles de tous les âges sont allés planter des dizaines d'arbres, d'arbustes et de plantes comestibles, notamment des camérisiers, des noyers du Japon, de la menthe et de la coriandre, pour créer le premier sentier comestible, près du Centre sportif et culturel de Saint-Timothée, à Salaberry-de-Valleyfield.
    Cette initiative citoyenne a été lancée par le groupe les Incroyables comestibles du Suroît. Leur but est de transformer des espaces verts ou des espaces négligés en potagers libre-service.
    Je tiens d'ailleurs à souligner la participation cruciale des membres du comité de ce projet: Jasmine Kabuya Racine, Annie Vallières, Martine Chouinard, Audrée Bourdeau, Maggy Hinse, Isabelle Pépin et Alexandra Verner. Mille mercis pour votre contribution.
    Le sentier comestible fait partie des 20 projets qui ont été sélectionnés dans tout le pays par Arbres Canada. C'est une allocation de près de 3 000 $ qui a servi à acheter une quarantaine d'arbres. Plusieurs citoyens ont aussi contribué par des dons de plantes.
    Enfin, j'invite tous mes collègues, le 23 juin prochain, à l'inauguration de ce premier sentier comestible public.
(1405)

Jean-Yves Phaneuf

    Monsieur le Président, c'est avec un immense plaisir que je souhaite rendre hommage à M. Jean-Yves Phaneuf.
    Affectueusement surnommé Johnny, il est littéralement M. Soccer de ma circonscription. Il a d'ailleurs été nommé bénévole de l'année au Québec, tous sports confondus, lors du gala annuel Sports Québec la semaine dernière. M. Phaneuf a consacré plus de 40 ans de sa vie au soccer, une passion qui l'habite encore aujourd'hui, à 77 ans.
    Le père du soccer à Granby a été intronisé au Temple de la renommée du soccer québécois en 1999. Il est membre fondateur du club de soccer les Cosmos de Granby et initiateur du plus grand tournoi de soccer d'envergure internationale au Québec, événement d'ailleurs nommé l'International de soccer Jean-Yves Phaneuf en son honneur.
    M. Phaneuf mérite pleinement ces reconnaissances pour sa contribution à notre jeunesse, ainsi que pour la promotion des saines habitudes de vie.
    Johnny, nous sommes tous très fiers de toi.

[Traduction]

Les réfugiés nord-coréens

    Monsieur le Président, hier, j'ai eu le privilège d'assister à une réunion concernant le triste sort que connaissent certains réfugiés nord-coréens en Chine. Plusieurs collègues députés et moi avons appris que ces réfugiés sont victimes d'abus, que des Nord-Coréennes sont enlevées et contraintes de se marier en Chine, qu'elles sont enlevées de nouveau plusieurs années plus tard pour être renvoyées en Corée du Nord et qu'elles laissent forcément leurs enfants derrière elles.
    On nous a expliqué comment ces transfuges sont forcés de vivre, sans jamais être certains de pouvoir satisfaire leurs besoins essentiels et dans la crainte constante que des agents de la Corée du Nord viennent les chercher.
    Dans le passé, tous les partis à la Chambre ont parlé d'aider les transfuges nord-coréens. Par conséquent, on ne peut pas dire que la question soit passée inaperçue. Par contre, elle exige des mesures concrètes. Le gouvernement, avec l'appui des partis de l'opposition, doit mettre en oeuvre les motions qui ont été adoptées à la Chambre. Le Canada doit agir concrètement pour aider les réfugiés qui fuient la Corée du Nord. Il doit également appuyer les ONG dont l'aide permet de sauver des vies.
    La Chambre est divisée à l'égard de nombre d'enjeux. Cependant, la question que je soulève aujourd'hui est totalement dénuée de caractère partisan. Le Canada doit dès maintenant offrir son soutien aux transfuges nord-coréens.

La chorale des jeunes Shallaway

    Monsieur le Président, je souhaite attirer l'attention de la Chambre sur une organisation communautaire exceptionnelle de ma circonscription, qui vise à favoriser le développement des talents et du mentorat grâce à la musique. La chorale des jeunes Shallaway a présenté son premier spectacle il y a 25 ans en mars dernier. La chorale s'appelait alors la Newfoundland Symphony Orchestra Treble Chorus et était dirigée par Susan Knight, qui a d'ailleurs été décorée de l'Ordre du Canada en reconnaissance de son travail au sein de cette chorale.
    La chorale a remporté de nombreux prix nationaux et internationaux. L'an dernier, sous la direction de Kellie Walsh, elle a raflé les grands honneurs à l'occasion de l'un des concours de chant choral les plus importants et les plus anciens au monde, soit le prestigieux festival de musique Llangollen, qui s'est tenu au pays de Galles. Toutefois, la plus grande réalisation de la chorale n'est pas sa prestation sur scène; il s'agit plutôt du mentorat des jeunes par leurs camarades choristes, qui les aident à développer leurs talents tant en musique qu'en leadership.
    Je vous prie de vous joindre à moi pour souhaiter beaucoup de succès à la chorale Shallaway, qui s'apprête à partir en tournée à Cuba cet été et qui prépare son programme en vue des célébrations du 150e anniversaire du Canada.

Le Championnat international de sauvetage minier

    Monsieur le Président, en 1928, un incendie s'étant déclaré dans une mine d'or de Timmins a causé la mort de 39 mineurs. Cette catastrophe, l'une des pires de l'histoire du Canada, a mené à la création des services de sauvetage minier, qui sont bien connus sur la scène internationale.
    Chaque année, des milliers de décès se produisent dans des mines du monde entier et 100 000 sauveteurs miniers répondent à des centaines d'urgences.
    J'ai l'immense honneur d'annoncer que le Championnat international de sauvetage minier de 2016 aura lieu au Canada et il se tiendra pour la première fois dans la belle région du Grand Sudbury, du 19 au 26 août. Cette compétition, à laquelle 20 pays participent, est considérée comme les Jeux olympiques du secteur minier.
    J'invite tous les députés à exprimer leur gratitude aux courageux travailleurs qui risquent leur vie pour que les mineurs puissent rentrer chaque jour chez eux sains et saufs, et à remercier l'organisme Workplace Safety North de son hospitalité.
(1410)

La Coupe Memorial

    Monsieur le Président, la semaine dernière, les Rebels de Red Deer ont été les hôtes du tournoi de la Coupe Memorial MasterCard, qui a eu lieu dans la magnifique ville de Red Deer, en Alberta.
    Je remercie les participants, les organisateurs et les bénévoles dévoués de leur engagement indéfectible envers ce tournoi historique. La famille Sutter et son équipe d'organisateurs ont fait notre fierté.
    Chaque année, la Coupe Memorial réunit les étoiles montantes du hockey: les équipes championnes des trois ligues membres de la LCH de même que l'équipe de la ville hôte s'affrontent pour obtenir la plus haute récompense du hockey junior. Je suis fier de dire que les extraordinaires Rebels ont prouvé encore une fois leur ténacité et leur talent en livrant un combat acharné. Je félicite les Wheat Kings de Brandon, les Huskies de Rouyn-Noranda et surtout les Knights de London, qui ont remporté la 98e Coupe Memorial.
    Ce fut un honneur pour les membres de notre collectivité de conjuguer leurs efforts pour maintenir vivants l'esprit et la tradition de la Coupe Memorial et faire de l'événement un succès retentissant.

Le patrimoine irlandais à Miramichi

    Monsieur le Président, l'histoire irlandaise est riche et vivante dans la municipalité de Miramichi. Les immigrants irlandais ont commencé à arriver dans la région autour de 1815 et ont continué d'y venir même après la grande tragédie de 1847, où des centaines d'immigrants irlandais ont péri à l'île Middle, après avoir fui la famine dans leur pays. Beaucoup de survivants ont néanmoins réussi à prospérer. Ils ont refait leur vie sur les rives de la rivière Miramichi.
    Grâce à des gens comme Farrell McCarthy, qui est l'un des fondateurs de l'association culturelle irlandaise du Canada et du festival annuel irlandais, l'histoire irlandaise est bien vivante et est célébrée chaque année dans la région. Farrell a en outre eu l'honneur bien mérité de recevoir le prix Douglas Hyde le mois dernier, des mains de l'ambassadeur d'Irlande au Canada.
     J'invite tout le monde à venir au Festival irlandais de la Miramichi, du 14 au 17 juillet, dans la capitale irlandaise du Canada, où les visiteurs découvrent l'Irlande pratiquement comme s'ils y étaient.

La Journée du bénévolat de Telus

    Monsieur le Président, je tiens à remercier les députés qui ont participé à la Journée du bénévolat de Telus. Dans le cadre de cet événement annuel organisé par Telus, cette société de premier plan encourage ses employés à se dévouer corps et âme au service de la collectivité où ils vivent, travaillent et offrent leurs services.
    Depuis qu'elle a lancé cette initiative, la société Telus a amené plus de 112 000 Canadiens à participer à plus de 3 100 activités bénévoles. Telus sait que son équipe contribue à améliorer les collectivités partout au pays. Aujourd'hui, notre équipe parlementaire a eu l'occasion de participer à cette formidable activité de bienfaisance. En tant que députés, nous sommes très fiers de savoir que les trousses de fournitures scolaires que nous avons préparées aujourd'hui seront distribuées à des jeunes qui, sans cela, seraient désavantagés au début de l'année scolaire, en particulier les élèves de Fort McMurray qui profiteront de notre appui et de nos encouragements grâce à nos efforts collectifs.
    Je tiens à remercier Telus ainsi que tous mes collègues qui ont apporté leur contribution aujourd'hui.

Les soins palliatifs

    Monsieur le Président, hier, j'ai eu le plaisir de présenter mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-277, Loi visant l’élaboration d’un cadre sur les soins palliatifs au Canada.
    À l'heure actuelle, seulement 30 % des Canadiens ont accès à de bons soins palliatifs. Les soins prodigués à l'hôpital coûtent quatre fois plus cher que les soins prodigués à domicile, et les soins palliatifs ne sont pas entièrement financés. Le projet de loi favoriserait la mise en oeuvre d'un cadre sur les soins palliatifs au Canada, qui comprendrait une définition des services inclus et de la formation nécessaire, mais surtout, il prévoit des mesures visant à offrir un accès uniforme aux soins palliatifs partout au pays.
    Le comité parlementaire représentant tous les partis avait déjà formulé des recommandations à ce sujet, qui font maintenant partie du projet de loi. Le NPD et les libéraux sont d'accord: il est nécessaire d'offrir des soins palliatifs. Les parlementaires doivent maintenant unir leurs efforts pour que les Canadiens puissent choisir de vivre aussi longtemps que possible, sans souffrir indûment.

La journée «Jeunes sur la Colline»

    Monsieur le Président, bon nombre de mes collègues et moi accueillons aujourd'hui des membres des Clubs garçons et filles du Canada et des Grands Frères Grandes Soeurs du Canada, qui observent leur travail à l'occasion de la journée « Jeunes sur la Colline ».
    Ces organismes fantastiques aident les jeunes à découvrir et à réaliser tout leur potentiel, et à devenir les leaders canadiens de demain.

[Français]

    La démocratie a besoin des jeunes. Aujourd'hui, les jeunes profitent d'une expérience de travail en politique.

[Traduction]

    Il est crucial que les jeunes aient accès à des milieux accueillants et sécuritaires où ils peuvent explorer de nouvelles possibilités, surmonter des obstacles et établir des relations constructives.
    Aujourd'hui, j'ai l'honneur d'accueillir Riley Patterson, de Caledonia. J'invite les députés à se joindre à moi pour souhaiter la bienvenue à tous nos jeunes invités. Je les exhorte aussi, tous sans exception, à prendre part à cette magnifique initiative l'an prochain.
(1415)

Le festival Hi Neighbour

     Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour dire « Hi Neighbour ».
    Le festival Hi Neighbour est un incontournable de la culture de Transcona depuis sa création, en 1964. Une statue de 11 pieds et demi de Hi Neighbour Sam, la mascotte du festival, se dresse dans l'avenue Regent, juste à l'ouest du chemin Plessis. D'abord érigée au centre commercial Crossroads, en 1968, elle a passé des années au Canadian Tire local avant d'être déplacée là où elle se trouve en ce moment.
    Durant le festival Hi Neighbour, les habitants et les visiteurs de Transcona sont invités à venir au centre-ville de Transcona pour profiter de ses restaurants, de ses spectacles et de la vie du quartier. Bien que le festival offre une foule d'activités, je m'en voudrais de ne pas mentionner quelques activités familiales parmi les plus populaires: le déjeuner aux crêpes de la légion de Transcona, le défilé Hi Neighbour et — la dernière, mais non la moindre — le dîner de la cuisine, de Baba dans la paroisse catholique ukrainienne St. Michael, ou St. Mike's, comme on l'appelle communément, où on peut se régaler de pérogies uniques au monde.
    J'ai hâte d'être chez moi, à Transcona, en fin de semaine pour participer au festival Hi Neighbour.

La Semaine du tourisme

    Monsieur le Président, je souhaite profiter de la Semaine du tourisme pour saluer le dynamisme du secteur touristique canadien.

[Français]

    Cette semaine, j'invite mes honorables collègues et tous les Canadiens à célébrer la contribution du tourisme à l'économie canadienne.

[Traduction]

    Le tourisme, dont la valeur annuelle s'élève à 90 milliards de dollars, constitue le principal produit d'exportation du secteur des services du pays. Reposant sur une multitude de petites et moyennes entreprises partout au pays, il fournit du travail à plus de 600 000 Canadiens. À Canmore et à Banff par exemple, dans ma circonscription, ce sont plus de 16 000 emplois et de 1 000 entreprises qui existent grâce au tourisme.
    Même si ce secteur se porte bien, nous devons continuer notre bon travail. Ce ne sont d'ailleurs pas les objectifs qui manquent: amélioration de la compétitivité, augmentation des visites de l'étranger, élaboration de politiques publiques aptes à réaliser le plein potentiel touristique du Canada et à en faire une destination de choix. En ma qualité de porte-parole de l'opposition officielle en matière de tourisme, j'entends, avec la collaboration des intervenants du milieu touristique, donner suite à ces principes, soutenir l'innovation et stimuler la création d'emplois partout au pays.

La journée «Jeunes sur la Colline»

    Monsieur le Président, nous avons le bonheur d'accueillir aujourd'hui plus d'une centaine de jeunes Canadiens à Ottawa pour la troisième journée « Jeunes sur la Colline ». Cette initiative incroyable, qui est chapeautée par les Clubs garçons et filles du Canada et par Grands Frères Grandes Soeurs du Canada, offre aux jeunes Canadiens l'occasion rêvée de se familiariser avec les rouages de la démocratie en observant un parlementaire pendant toute une journée.

[Français]

    Je veux d'abord souligner l'incroyable travail accompli par chacune de ces organisations. Elles servent notre pays depuis des décennies. Je suis également fier qu'une centaine de mes collègues aient décidé de s'associer à elles pour l'événement d'aujourd'hui.

[Traduction]

    Au nom de mes collègues, je transmets mes meilleurs voeux aux jeunes présents à Ottawa aujourd'hui et j'en profite pour féliciter ceux qui obtiendront leur diplôme cet été et qui entameront ainsi un nouveau chapitre palpitant de leur vie.

QUESTIONS ORALES

[Questions orales]

[Traduction]

La Chambre des communes

    Monsieur le Président, les Canadiens commencent à comprendre que le premier réflexe du premier ministre est de clore le débat.
    Celui-ci a tenté de prendre le plein contrôle du Parlement avec la motion no 6 et a clos à maintes reprises le débat à la Chambre des communes. Pas plus tard qu'hier soir, le premier ministre a accéléré l'adoption éventuelle du projet de loi sur l'aide au suicide en refusant tous les amendements proposés par les partis de l'opposition.
    Le premier ministre reconnaît-il que tous les députés ont une tâche à faire ici et que le Parlement appartient aux Canadiens et non au Parti libéral?
    Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole afin de remettre les pendules à l'heure. En vérité, 16 amendements proposés par différents partis ont été acceptés à l'étape de l'étude en comité. Il demeure que nous nous efforçons de respecter l'échéance du 6 juin fixée par la Cour suprême.
    Il est important de mettre en place un cadre qui protège les personnes vulnérables et respecte à la fois les droits et les libertés des Canadiens. C'est exactement ce que nous faisons. Par ailleurs, je signale que le vote tenu hier soir était un vote libre pour tous les partis, ce qui est une réussite pour le Parlement.

[Français]

La réforme démocratique

    Monsieur le Président, les libéraux insistent sur le fait qu'ils vont changer le mode de scrutin, et ce, peu importe la volonté des Canadiens.
    Cette approche est une insulte à l'intelligence de tous les Canadiens. Un comité truqué et Twitter ne sont pas des substituts qui permettent aux Canadiens de dire ce qu'ils pensent.
    Le premier ministre va-t-il faire confiance aux Canadiens et leur permettre de s'exprimer lors d'un référendum?
    Monsieur le Président, les Canadiens ont pu s'exprimer lors du dernier scrutin, le 19 octobre, en votant pour un parti qui s'était engagé à changer notre système de scrutin. C'est ce que nous avions dit très clairement.
     Nous allons travailler pour consulter les Canadiens, pour écouter leurs préoccupations et pour bâtir un système électoral qui sera un meilleur reflet de la démocratie qu'ils veulent.
(1420)

[Traduction]

    Monsieur le Président, il y a de plus en plus d'éléments qui prouvent que le projet libéral visant à modifier la façon dont votent les Canadiens est complètement truqué.
    Nous savons maintenant que le premier ministre a embauché un ancien militant pour le système de scrutin préférentiel. C'est ce système que le premier ministre dit préférer et qui, selon les experts, serait truqué en sa faveur. Cependant, les Canadiens ne sont pas dupes. Ils savent que le processus libéral n'est que de la frime.
    Quand le premier ministre admettra-t-il qu'il ne peut modifier un système aussi fondamental que le système électoral sans tenir un référendum?
    Monsieur le Président, je trouve toujours cela un peu amusant quand l'opposition parle de modifier le système électoral sans consultation, car c'est précisément ce qu'on fait les conservateurs au moyen de la loi sur le manque d'intégrité des élections: ils ont fait en sorte qu'il soit plus difficile pour les minorités et les populations vulnérables de voter aux dernières élections.
    Nous avons dit très clairement que nous remplacerions le système électoral actuel. Nous consulterons également les Canadiens de diverses façons pour nous assurer de créer pour eux un meilleur système électoral, qui tiendra davantage compte de leurs préoccupations.

[Français]

    Monsieur le Président, on a vu en fin de semaine les libéraux museler leurs propres militants. Lors du congrès, ils n'ont pas voulu parler de l'aide médicale à mourir. Nous avons tous été témoins du refus des libéraux de débattre de cette importante question. En voyant la façon dont ils traitent leurs militants, on ne peut qu'imaginer ce qu'ils feront avec la population.
    Le premier ministre peut-il s'engager à écouter la population et à tenir un référendum pour changer le système électoral?
    Monsieur le Président, au contraire, lors de notre congrès à Winnipeg, la fin de semaine passée, la ministre de la Santé et la ministre de la Justice ont répondu à énormément de questions. Une conversation a été initiée avec les militants, de façon formelle et informelle. Ce sont des sujets dont nous avons discuté.
    Comme chacun le sait, le Parti libéral est toujours prêt à discuter de différents enjeux avec tous les Canadiens, et c'est ce que nous continuerons de faire.

L'aide médicale à mourir

    Monsieur le Président, nous avons un vote important ce soir. On a toujours parlé de collaboration et du respect des provinces. Le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec dit que le projet de loi fédéral est inapplicable.
    J'aimerais savoir ce que répond le premier ministre cet après-midi au ministre de la Santé et des Services sociaux du gouvernement du Québec, qui prétend, lui, ce que je viens de dire.
    Monsieur le Président, nous avons toujours démontré le désir de travailler avec les provinces, tout en respectant les champs de compétence. C'est exactement ce que nous allons faire.
    La vérité, c'est que nous nous sommes énormément inspirés des réflexions de l'Assemblée nationale du Québec et de l'approche qu'elle préconise en ce qui a trait à l'aide médicale à mourir.
    Nous sommes fiers de la proposition que nous soumettons aux Canadiens. Il s'agit d'une proposition responsable qui permettra de faire les choses de la bonne façon.

[Traduction]

La santé

    Monsieur le Président, la commissaire à l’environnement rapporte aujourd’hui que Santé Canada manque à ses obligations envers les Canadiens en ne publiant pas d’informations fondamentales sur les substances dangereuses que peuvent contenir les produits de consommation, qui vont du plomb dans les sucettes jusqu’au cadmium dans les bijoux pour enfants. Les Canadiens sont exposés à des substances toxiques qui peuvent causer des allergies, de l’asthme et même le cancer, mais le gouvernement fait preuve de négligence en refusant de nous protéger.

[Français]

    Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de protéger le public de ces produits toxiques?

[Traduction]

    Au contraire, monsieur le Président, c’est avec grand plaisir que nous acceptons les recommandations de la commissaire à l’environnement. La ministre de la Santé s’est engagée à faire un suivi de certains de ces dossiers troublants.

[Français]

    C'est important de protéger la santé et la sécurité des Canadiens. C'est une responsabilité que tout gouvernement a, et c'est exactement ce que nous allons faire.

L'aide médicale à mourir

    Monsieur le Président, le gouvernement a encore une fois refusé de travailler avec l'opposition pour rendre le projet de loi C-14 conforme à la décision de la Cour suprême et à la Charte canadienne des droits de la personne. La réalité, c'est que, actuellement, l'aide médicale à mourir est permise selon les critères de la Cour suprême.
    Hier, une femme du Manitoba a reçu le droit de recourir à l'aide médicale à mourir par un tribunal. Or le gouvernement s'entête à en réduire l'accès.
    Pourquoi le gouvernement insiste-t-il pour aller de l'avant avec un projet de loi, sachant qu'il ne respecte pas la Charte des droits de la personne?
(1425)
    Monsieur le Président, d'abord, le projet de loi C-14 respecte la Charte des droits de la personne et les jugements de la Cour suprême. C'est exactement ce que nous défendons depuis longtemps.
    Deuxièmement, à partir du 6 juin, les Canadiens n'auront pas l'encadrement offert par la Cour suprême pendant que nous travaillons à ce projet de loi. C'est pour cela qu'il est si important de nous assurer qu'à partir du 6 juin nous aurons un encadrement qui va protéger les gens vulnérables tout en défendant les droits et libertés des Canadiens.
    Monsieur le Président, ils ont attendu jusqu'au moins d'avril avant de présenter leur projet de loi, on s'entend là-dessus.

[Traduction]

    Après que les libéraux ont refusé de répondre aux demandes du NPD, qui voulait que le projet de loi C-14 soit soumis à la Cour suprême, la Cour d’appel de l’Alberta a reproché aux libéraux de vouloir faire adopter un projet de loi qui va à l’encontre de l’arrêt Carter. Aujourd’hui, les tribunaux ontariens se demandent si le projet de loi respecte la Charte des droits et libertés.
    Combien faudra-t-il de décisions des tribunaux pour que les libéraux admettent finalement qu’ils se sont trompés? Pourquoi le premier ministre préfère-t-il que des Canadiens qui souffrent passent des années à faire valoir leurs droits devant les tribunaux plutôt que d’avoir d’emblée une bonne loi?
    Monsieur le Président, les Canadiens comprennent que nous franchissons une étape importante dans la société. Il faut donc le faire de façon responsable en étant bien conscients des inquiétudes que suscite la vulnérabilité des gens et de la nécessité de défendre les droits, les libertés et les choix des Canadiens. C’est exactement ce que nous nous proposons de faire.
    Nous comprenons qu’il s’agit du début d’un dialogue qui se poursuivra au gré de l’évolution des verdicts des tribunaux, des inquiétudes et des points de vue des médecins.
    Il s’agit toutefois d’une étape importante, qu'il faut franchir correctement, et c'est exactement ce que nous permet de faire le projet de loi C-14.

La marijuana

    Monsieur le Président, c'est le début d'un dialogue. Le projet de loi retournera immédiatement devant la Cour suprême. Il s'agit là d'une perte de temps qui nuit à la vie des gens.
    Passons maintenant à la façon dont le gouvernement libéral gère le dossier de la marijuana. Après avoir promis de légaliser la marijuana sur-le-champ, il continue de donner des casiers judiciaires à des milliers de personnes. Les libéraux ont confié ce dossier à un ancien chef de police qui encourage les policiers à sévir contre la consommation personnelle de marijuana. Le conseil de la santé de Toronto vient de joindre sa voix à celles de tous ceux qui supplient le premier ministre de faire preuve de lucidité sur ce sujet.
    Pourquoi le premier ministre fait-il de la politique aux dépens de l'avenir de nos jeunes? Pourquoi n'agit-il pas clairement en décriminalisant immédiatement la marijuana?
    Premièrement, monsieur le Président, il est navrant d'entendre le député d'en face décrire le processus parlementaire comme une « perte de temps ».
    Deuxièmement, en ce qui concerne la légalisation de la marijuana, nous avons toujours précisé clairement que notre objectif était d'empêcher les jeunes d'avoir accès facilement à la marijuana, comme c'est le cas actuellement. Nous voulons empêcher les organisations criminelles, les gangs de rue et les trafiquants d'armes d'obtenir des sources importantes de financement en vendant de la marijuana. C'est ce que nous cherchons à faire. C'est pour cette raison que, tant que la loi ne sera pas changée, le système actuel continuera de s'appliquer.

La réforme démocratique

    Monsieur le Président, il semble que les libéraux aient besoin d'aide avec leurs calculs. D'abord, la ministre des Institutions démocratiques a annoncé que la réforme démocratique s'alignerait sur huit principes, mais voilà que, deux semaines plus tard, trois d'entre eux se sont volatilisés comme par magie. La ministre pense que de noyauter le comité en y nommant six membres libéraux équivaut à obtenir la vaste adhésion de la population canadienne.
    Les libéraux vont-ils enfin mettre fin à cette mascarade et donner une voix aux 30 millions de Canadiens en soumettant la question à un référendum?
    Voici ma réponse pour le député, monsieur le Président.
    La conversation que nous avons au sujet de l'éventuelle solution finale que serait un référendum coupe court à la conversation à laquelle nous devrions plutôt prendre part au sujet des moyens de faire participer les Canadiens au processus, afin que nous puissions leur proposer une solution qui est attrayante et qui répond à leurs besoins.
    Si les députés d'en face souhaitent vraiment dialoguer avec les Canadiens, qu'ils nous fassent part de leurs idées sur les façons dont ils comptent inviter leurs électeurs à participer à cette importante conversation.
    Monsieur le Président, voici mon idée quant à la façon d'inviter les Canadiens à participer. Tenons un référendum.
    En 1992, il y a eu un référendum sur l'accord de Charlottetown auquel près de 75 % des Canadiens admissibles ont participé, pour un total de 13 736 634 Canadiens. Pour qu'un nombre égal de personnes participent en l'occurrence, il faudrait que 40 000 Canadiens se présentent à une assemblée publique dans chacune des circonscriptions du pays.
    Les libéraux écouteront-ils enfin les Canadiens et tiendront-ils un référendum, oui ou non?
(1430)
    Monsieur le Président, pourquoi le député d'en face cherche-t-il à induire les Canadiens en erreur? Le référendum sur l'accord de Charlottetown...
    Des voix: Oh, oh!
    À l'ordre, s'il vous plaît. Nous savons qu'aucun député ne cherche à induire délibérément les Canadiens ou la Chambre en erreur. Nous ne disons pas cela ici. Il ne faut pas non plus oublier que la plupart des gens ici sont capables d'entendre des choses qu'elles désapprouvent sans pour autant réagir. Essayons donc de faire cela.
     La ministre des Institutions démocratiques a la parole.
    Monsieur le Président, le député d'en face sait que le référendum sur l'Accord de Charlottetown ne portait pas sur la manière dont nous votons. Il portait sur l'avenir du pays dans son ensemble.
    Le député d'en face sait que la moitié de la population n'était guère intéressée par les référendums tenus dans le passé sur la réforme électorale.
    Utilisons les outils dont nous disposons au XXIe siècle pour attirer l'intérêt et obtenir l'opinion d'autant de Canadiens que possible. Le député n'est pas prêt à relever le défi, mais nous le sommes.

[Français]

    Monsieur le Président, on sait que le gouvernement libéral aime faire des consultations, et même beaucoup de consultations. Cependant, une consultation est synonyme d'écoute. Dans le cas du dossier de la réforme du mode de scrutin, on a l'impression que la ministre n'écoute pas. Bien que 73 % de la population soit en faveur d'un référendum, la ministre refuse catégoriquement cette option.
    La ministre peut-elle nous dire pourquoi elle n'écoute pas les Canadiens et les Canadiennes et refuse de tenir un référendum après ses soi-disant consultations?

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'ai dit et je continue de dire qu'il s'agit d'une occasion importante pour nous tous de participer à un exercice d'écoute inclusif auprès des citoyens de nos circonscriptions.
    Je comprends que les députés d'en face ont du mal à saisir le concept d'écoute, mais mon travail en tant que ministre est d'écouter et de réfléchir aux points de vue que j'entends. Je continuerai d'écouter les Canadiens. Je continuerai...
    Des voix: Oh, oh!

[Français]

    À l'ordre. Je signale au député de Lac-Saint-Jean et aux autres que, quand on est accusé de ne pas écouter, c'est le temps de s'écouter les uns les autres.
    Il semble que la ministre ait fini sa réponse, alors la parole est à l'honorable député de Richmond—Arthabaska.
    Monsieur le Président, les Canadiens et les Canadiennes sont très intelligents. C'est pourquoi une grande majorité demande un référendum. On sait aussi qu'on n'a pas beaucoup d'informations sur les moyens de consultation qu'utilisera le comité pour sonder la population. Cependant, ce qu'on sait, c'est que les libéraux auront le plein contrôle.
    Pourquoi la ministre n'accepte-t-elle pas de se rendre compte que la consultation est légitime, en confirmant que tous les Canadiens et Canadiennes pourront se prononcer par voie de référendum, après ses soi-disant consultations?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le débat concernant la motion portant la formation d'un comité multipartite, conformément à notre promesse électorale, n'a pas encore eu lieu à la Chambre.
    Il revient aux députés de déterminer la composition et le mandat du comité ainsi que les moyens dont celui-ci alimentera le dialogue. J'espère que les députés d'en face participeront à un dialogue respectueux, productif et constructif sur la manière dont le comité pourrait agir comme tribune productive pour mobiliser les Canadiens.
    Monsieur le Président, nonobstant sa prétendue ouverture à tous les nouveaux systèmes électoraux, le gouvernement a déjà engagé un conseiller en communications qui défend le modèle privilégié depuis le début par le premier ministre. Il semble que la question soit déjà réglée. Il est impossible que les Canadiens votent pour un système conçu dans le seul but de manipuler les prochaines élections en faveur du Parti libéral. Est-ce la raison pour laquelle les libéraux refusent de tenir un référendum?
    Monsieur le Président, permettez-moi de rétablir les faits. Cette personne a été engagée par le Bureau du Conseil privé à titre de conseiller en communications. Il est membre de la fonction publique non partisane du Canada, et j'ai confiance en son jugement et en sa décision. J'espère que l'opposition aura elle aussi confiance.
    Monsieur le Président, je suis entouré d'anciens ministres, alors je vais leur demander de confirmer que nous n'avons jamais embauché qui que ce soit pour aucune autre raison que des considérations partisanes. Il me semble que...
    Des voix: Oh, oh!
(1435)
    À l'ordre, s'il vous plaît. Qu'est-ce que j'ai dit au sujet de l'écoute? Le député de Lanark—Frontenac—Kingston a la parole.
    Monsieur le Président, dans le National Post d'aujourd'hui, on peut lire que le mode de scrutin préférentiel entraînerait une majorité libérale jusqu'à ce que le premier ministre atteigne l'âge de la retraite. Le National Post dit vrai. Selon le scrutin préférentiel, les libéraux pourraient obtenir 50 % des sièges à la Chambre avec moins de 35 % des votes. Est-ce la raison pour laquelle les libéraux ne veulent pas tenir de référendum sur...
    À l'ordre, s'il vous plaît. La ministre des Institutions démocratiques a la parole.
    Monsieur le Président, après un tel lapsus, prenons un moment pour examiner comment nous en sommes arrivés à ce point. Nous avons pris l'engagement de renforcer la confiance des Canadiens dans les institutions démocratiques parce que le parti d'en face a bafoué les institutions démocratiques pendant 10 ans. Les Canadiens ont demandé à notre gouvernement d'examiner les options qui s'offrent au Canada. Ils ne veulent pas que nous nous contentions de modifier le système électoral ou d'étudier la possibilité d'offrir le vote en ligne ou d'imposer le vote obligatoire; ils veulent exclure la partisanerie et le favoritisme des institutions démocratiques canadiennes. Or, c'est précisément ce que nous nous employons à faire. Il est temps que les partis de l'opposition se rallient à nous et prêtent main-forte.

[Français]

L'éthique

    Monsieur le Président, le gouvernement libéral avait dit que le voyage à Washington, avec l'ensemble de la cour du premier ministre, avait coûté 25 000 $.
    Or on apprend aujourd'hui que cela a coûté 257 000 $, soit 10 fois plus. Le premier ministre est probablement un expert en ordinateur quantique, mais il est beaucoup moins fort quand cela vient aux mathématiques. S'il veut, on peut lui prêter une calculatrice.
    La question est fort simple: pourquoi le gouvernement libéral n'a-t-il pas dit toute la vérité aux contribuables?
    Monsieur le Président, mon collègue d'en face sait fort bien que le gouvernement dit toujours la vérité quand il s'agit de la divulgation proactive des dépenses.
    D'ailleurs, je dois rappeler à mon collègue que c'est quelque chose que le NPD a énormément hésité à faire dans l'ancien Parlement. Nous avons été des leaders dans la divulgation proactive des dépenses et les dépenses sont là.
    Cependant, le voyage à Washington était un voyage historique. Comme je l'ai dit à plusieurs reprises, beaucoup a été accompli à Washington pour les Canadiens, et nous sommes fiers de la visite de notre premier ministre et de son équipe à Washington.

[Traduction]

La réforme démocratique

    Monsieur le Président, après avoir perdu plus de sept mois en vains efforts, les libéraux parlent maintenant d'échec en ce qui concerne la réforme démocratique. La ministre a réitéré à maintes reprises son désir de collaborer avec les autres partis. Voici donc une idée plutôt radicale dans le contexte actuel: pourquoi les libéraux ne collaborent-ils pas avec les partis de l'opposition pour mener cette réforme à bien?
    Les Canadiens ont vu comment les libéraux, forts de leur fausse majorité, ont pipé les dés et fourni des réponses évasives à des questions simples et directes. Voici d'ailleurs une autre question simple à l'intention de la ministre. Les libéraux sont-ils vraiment disposés à changer unilatéralement la façon dont les Canadiens votent?
    Monsieur le Président, je suis impatiente de rencontrer le député d'en face après la période des questions.
    Les Canadiens nous ont demandé d'adapter le système électoral à la réalité du XXIe siècle. C'est ce que nous ferons après avoir entendu le son de cloche des Canadiens, particulièrement ceux qui jusqu'ici ont été marginalisés. Nous ne procéderons à aucune réforme sans l'adhésion et l'appui de la majorité de la population. J'espère collaborer avec mon collègue pour atteindre cet objectif.

Les finances

    Monsieur le Président, hier soir, le ministre des Finances a eu quatre heures pour répondre à des questions assez simples. On lui a demandé notamment quand il prévoyait rétablir l'équilibre budgétaire. Malheureusement, il n'a pas répondu à cette question. Toutefois, après quatre heures de travaux, il a été très heureux de parler de la façon dont il dépenserait l'argent des contribuables. Il a répondu à une question à ce sujet aussi rapidement qu'il pourrait mettre la main sur cet argent. Nous savons où cela va nous mener.
    Le ministre des Finances pourrait-il jouer franc jeu et dire aux Canadiens à quel moment il va hausser les taxes et les impôts pour rembourser ses dépenses effrénées?
    Monsieur le Président, je suis heureux de m'adresser aux Canadiens par l'entremise de la Chambre pour leur parler de ce que nous prévoyons faire.
    Nous avons dit clairement que nous souhaitions améliorer le niveau de vie des Canadiens de la classe moyenne et de ceux qui s'efforcent d'en faire partie. Nous avons donc prévu des mesures en ce sens dans notre budget, dont l'allégement du fardeau fiscal et l'instauration de l'Allocation canadienne pour enfants, qui vise les familles qui en ont vraiment besoin. Nous les aidons dès maintenant.
    Hier soir, nous avons parlé d'investissements à long terme, qui permettront d'améliorer notre taux de croissance, un changement qui profitera aux générations futures.
    Nous devons faire face au défi que représente la faible croissance, problème que nous a légué le gouvernement précédent.
(1440)
    Monsieur le Président, le ministre a parlé hier des 6 milliards de dollars qu'il a mis de côté pour pouvoir parer à toute éventualité. Lorsqu'on lui a demandé s'il allait rendre ces fonds aux Canadiens, il a répondu qu'il allait plutôt les dépenser. C'est tout simplement irresponsable. Comme il était tard, je veux lui donner aujourd'hui l'occasion de préciser sa réponse.
    Le ministre des Finances rendra-t-il aux Canadiens les 6 milliards de dollars qui se trouvent dans le fonds de réserve?
    Monsieur le Président, lorsqu'on arrive au pouvoir et que l'économie tourne au ralenti à cause de l'ancien gouvernement, il faut dépenser avec prudence. Nous nous sommes penchés sur l'état des finances publiques et sur les difficultés que nous connaissons. Il s'agit effectivement de difficultés parce que le taux de croissance de la dernière décennie est le plus faible depuis huit décennies. Nous avons d'ailleurs dit qu'il fallait être prudent. Nous avons donc fait ce que nous dictait le bon sens et prévu une marge de prudence.
    Nous allons maintenant faire des investissements qui permettront de changer les choses et de mettre fin à la période de faible croissance que nous avons connue. Ces investissements permettront d'améliorer notre situation et celle de nos enfants.

L'immigration, les réfugiés et la citoyenneté

    Monsieur le Président, il y a quelques mois, le gouvernement libéral avait placé 8 000 personnes dans le cadre du Programme des aides familiaux. Un grand nombre de familles canadiennes font appel à ce programme pour s'occuper d'un parent malade ou pour leurs enfants. Le premier ministre a lui-même recouru à ce programme pour embaucher des nounous pour sa famille.
    Pourquoi les libéraux sabrent-ils aussi radicalement dans ce programme, alors que le premier ministre en a profité?
    Monsieur le Président, loin de sabrer dans ce programme, nous y sommes très attachés. Les délais de traitement des demandes ont d'ailleurs raccourci au fil du temps.
    Alors que la population vieillit, les personnes âgées, comme ma mère, qui bénéficie des services d'une aide familiale des Philippines, profiteront de plus en plus du système. La population se faisant vieille, ce programme sera encore plus utile aux jeunes et aux moins jeunes.
    C'est un programme que nous chérissons.
    Monsieur le Président, on dirait bien que le premier ministre chérit aussi ce programme.
    Le premier ministre a fait une demande pour obtenir les services d'une deuxième nounou dans le cadre du Programme des aides familiaux après la fin de l'affectation de la première. On pourrait dire que le fait de critiquer ce programme, que des milliers de Canadiens utilisaient, pendant que cette demande était traitée correspond à la définition d'hypocrite.
    Pourquoi le premier ministre, en faisant cette coupe radicale dans le Programme des aides familiaux, demande-t-il aux Canadiens de renoncer à des avantages dont d'autres Canadiens ont besoin?
    Monsieur le Président, comme j'essayais d'expliquer, c'est un excellent programme qui sert bien les Canadiens, tant les parents de jeunes enfants qui ont besoin de soins que les Canadiens âgés qui ont aussi besoin de soins.
    À mesure que la population vieillit, le besoin de soins augmentera de sorte que plus de Canadiens bénéficieront d'un programme de garde d'enfants et d'un programme d'aides familiaux offert à la grandeur du pays.

L'industrie forestière

    Monsieur le Président, 100 jours se sont écoulés et nous n'avons toujours pas d'entente sur le bois d'oeuvre. L'industrie américaine prétend que les producteurs canadiens sont injustement subventionnés. Nous avons mené quatre batailles commerciales coûteuses au cours des 35 dernières années.
    Malgré ce qu'assure la ministre du Commerce, bien peu a été fait pour régler le problème, et les producteurs canadiens, notamment ceux de la Colombie-Britannique, doivent lutter pour survivre.
    Pourquoi le gouvernement met-il l'industrie forestière en danger?
    Monsieur le Président, je suis pleinement consciente de l'importance de l'industrie forestière pour le Canada et la Colombie-Britannique et je travaille sérieusement à ce dossier. La semaine dernière, des représentants du département du Commerce américain sont venus à Ottawa pour discuter de la question. Il y a deux semaines, je me suis entretenue avec le délégué commercial général des États-Unis, Michael Froman, à la réunion de l'APEC, au Pérou. Notre ambassadeur à Washington l'a rencontré.
    Je cite la première ministre de la Colombie-Britannique, Christy Clark, que j'ai rencontrée il y a 10 jours et qui a déclaré que le gouvernement fédéral défendait haut et fort les intérêts du Canada dans la négociation d'une nouvelle entente sur le bois d'oeuvre.

[Français]

    Monsieur le Président, le rapport que le gouvernement nous a promis dans 19 jours sur la prochaine entente sur le bois d'oeuvre risque de tenir sur une napkin.
    Les négociateurs canadiens ont rencontré les Américains la semaine dernière. Cependant, on nous dit qu'on n'a rien; on n'a pas avancé et aucune autre date n'est fixée. Avec les élections américaines qui approchent, les analystes ne sont pas optimistes de voir une entente conclue dans les prochains jours.
    Pourquoi le gouvernement se traîne-t-il les pieds? Pourquoi met-il en péril le gagne-pain de 60 000 travailleurs au Québec, dont 5 000 au Saguenay—Lac-Saint-Jean?
(1445)
    Monsieur le Président, je remercie la députée de sa question.
    Notre gouvernement reconnaît très bien l'importance de l'industrie forestière pour le Québec et pour le Canada. Les représentants de la United States Trade Representative ont rencontré nos équipes la semaine passée, et ils se rencontreront encore bientôt. Je rencontre d'ailleurs les représentants de l'industrie québécoise lundi prochain à Montréal. Nous travaillons dans le but d'obtenir une bonne entente pour le Canada.

Le développement international

    Monsieur le Président, le nombre de personnes touchées par des crises humanitaires a explosé au cours de la dernière décennie.
    Les conflits au Moyen-Orient ont entraîné le plus important déplacement de population depuis la Seconde Guerre mondiale. Les changements climatiques génèrent des phénomènes tels que des sécheresses et des températures records.
    La ministre du Développement international peut-elle informer la Chambre des mesures récentes prises par le gouvernement du Canada pour répondre aux besoins urgents?
    Effectivement, les besoins en aide humanitaire ont explosé au cours des dernières années, et c'est dans ce contexte que j'ai participé au Sommet humanitaire mondial, en Turquie, la semaine dernière. J'ai profité de l'occasion pour annoncer du financement pour 171 projets d'aide humanitaire dans 32 pays, pour un total de 331 millions de dollars, ainsi que notre contribution au Fonds central d'intervention d'urgence, pour un montant de 274 millions de dollars.
    Nous procédons actuellement à une consultation dans le pays tout entier. Toutefois, l'aide humanitaire ne peut pas attendre.

[Traduction]

Les dépenses ministérielles

    Monsieur le Président, nous savons que les libéraux ne peuvent tout simplement pas s'empêcher de dépenser. Immédiatement après avoir reçu les clés de leur nouveau bureau, la ministre de l'Environnement et du Changement climatique a dépensé 20 000 $ pour des meubles et des télévisions, le  ministre de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique a dépensé 60 000 $ pour des rénovations et la ministre de la Santé a même dépensé 27 $ pour un porte-serviettes alors que Walmart offre des dizaines de modèles à moins de 10 $. La palme revient cependant au ministre de l'Infrastructure et des Collectivités, qui a dépensé 835 000 $ pour des rénovations et des peintures.
    Les libéraux pensent-ils vraiment qu'il est acceptable de dépenser 1 million de dollars pour des télévisions et des porte-serviettes?
    Monsieur le Président, le gouvernement s'est engagé à doubler les investissements dans les infrastructures au cours des 10 prochaines années. Cela nécessite...
    Des voix: Oh, oh!
    À l'ordre, s'il vous plaît. Le ministre de l'Infrastructure et des Collectivités a la parole.
    Monsieur le Président, nos engagements nécessitent la collaboration d'un ministre, d'un ministère et d'un sous-ministre afin de répondre aux attentes des Canadiens. Nous avions besoin de nouveaux locaux pour notre personnel et notre sous-ministre, et c'est pour cela que ces investissements ont été effectués.
    Monsieur le Président, Alison Redford vient de téléphoner, et elle se réjouit que les projecteurs soient maintenant braqués sur lui au lieu d'elle.
    Les libéraux adorent les voyages. La ministre du Commerce international s'envole pour des virées à Hollywood, tandis que le ministre des Finances se balade autour du monde. Ils préfèrent les voyages aux frais du public. Hier, le ministre des Finances a refusé de répondre aux questions sur ses séjours cinq étoiles. Un voyage à New York avec trois de ses employés a coûté 4 000 $ par personne, y compris le billet d'avion aller-retour.
    Quand le ministre se rendra-t-il compte que l'argent qu'il dépense ne vient pas de son compte bancaire personnel? Quand mettra-t-il un frein à ses dépenses extravagantes?
    Monsieur le Président, à l'instar des ministres des Finances qui m'ont précédé, je crois qu'il est important que je me rende à divers endroits au pays pour parler aux gens de notre budget. Je crois qu'il est important que j'aille à l'étranger parler aux investisseurs susceptibles d'investir leur argent dans notre pays, pour les mettre au courant de ce que nous sommes en train de faire ici. Toutefois, contrairement à certains ministres des Finances précédents, nous avons été extrêmement bien accueillis à l'étranger, où les gens nous ont écoutés leur parler de nos activités actuelles. Ils savent maintenant que le Canada est un bon endroit pour investir. Le Canada qu'ils aimaient est de retour. Nous voulons aider les Canadiens grâce aux investissements étrangers.

[Français]

    Monsieur le Président, on ne peut pas se surprendre de voir ce gouvernement dépenser plus de 9 milliards de dollars en un seul mois quand on s'attarde aux détails.
    Pour un seul voyage aller-retour à New York en mars dernier avec le ministre des Finances, trois membres de son personnel ont dépensé plus de 12 000 $ en frais de transport. On est loin d'un voyage en classe économique qui coûte 10 fois moins cher.
    Le gouvernement peut-il nous dire pourquoi un aller-retour Canada-New York, pour trois personnes, a coûté plus de 12 000 $?
(1450)
    Monsieur le Président, comme les ministres des Finances avant moi, je sais que c'est très important de faire des voyages pour expliquer aux Canadiennes, aux Canadiens et aux investisseurs internationaux ce qu'est le Canada, notre budget et pourquoi ils peuvent investir au Canada.
    Je l'ai fait et je vais le faire prochainement dans le cadre des prochains budgets, parce que je sais que c'est très important pour le Canada.
    Monsieur le Président, ce ne sont pas les exemples qui manquent avec ce gouvernement dépensier.
    On apprenait aussi que les rénovations des bureaux du ministre et du sous-ministre de l'Infrastructure ont coûté près de 1 million de dollars.
    Comment ce gouvernement peut-il justifier de couper des crédits d'impôt aux familles et aux petites entreprises, alors qu'il dépense sans compter pour rénover ses propres bureaux?

[Traduction]

    Monsieur le Président, avant le 4 novembre 2015, il n'y avait ni ministre, ni ministère, ni sous-ministre se consacrant exclusivement aux infrastructures. Donc, il nous fallait des locaux pour y mettre les bureaux du ministre, du sous-ministre et de leur personnel, et c'est ce que nous avons fait. Les dépenses découlent de l'aménagement des nouveaux bureaux et de l'arrivée de nouveaux employés.

[Français]

La garde d'enfants

    Monsieur le Président, le premier ministre prône l'importance de la conciliation travail-famille. Il faut donc être cohérent.
    À la suite d'une décision de 2014, qui entrera en vigueur le 1er juillet, les garderies à but non lucratif dans des édifices fédéraux, qui bénéficiaient d'un loyer gratuit, vont devoir maintenant assumer un loyer au coût du marché. La conséquence est que la garderie dans l'édifice de Statistique Canada, à Ottawa, risque de fermer ses portes. C'est la même chose pour celle du complexe Guy-Favreau, à Montréal.
    Qu'attendent les libéraux pour renverser cette mauvaise décision des conservateurs?
    Monsieur le Président, le gouvernement du Canada reconnaît que les familles canadiennes ont besoin de soutien et que tous les enfants canadiens ont droit à une chance égale de réussir.
    Services publics et Approvisionnement Canada collabore actuellement avec Statistique Canada et la garderie pour trouver des moyens de faciliter la transition.

L'emploi

    Monsieur le Président, depuis vendredi, les 300 employés du Vieux-Port de Montréal sont en grève, et on peut les comprendre. Ces employés fédéraux sont les moins bien payés au pays. L'échelle salariale commence à 10,67 $ l'heure. Cela n'a aucun bon sens, c'est au-dessous du seuil de la pauvreté.
    Avec la proposition du NPD, ces employés pourraient bénéficier d'un salaire minimum fédéral de 15 $ l'heure.
    Comment ce gouvernement, qui dit vouloir aider les gens à accéder à la classe moyenne, peut-il justifier que des employés fédéraux soient aussi mal payés?

[Traduction]

    Monsieur le Président, comme les députés le savent, les salaires des employés fédéraux dépendent de l'endroit au pays où ils travaillent. C'est une pratique normale de la Chambre, et elle n'a pas changé.

Les relations intergouvernementales

     Monsieur le Président, hier, les conservateurs ont annoncé qu'ils veulent qu'on libère la bière. Ils ont demandé au gouvernement de renvoyer l'arrêt Comeau à la Cour suprême pour obtenir des éclaircissements. Depuis, cette initiative a reçu l'appui massif de la population canadienne. Les gens veulent acheter des produits canadiens. Pour ce faire, ils doivent pouvoir acheter ce que les Canadiens vendent dans toutes les provinces et dans tous les territoires du pays, sans devoir composer avec des obstacles interprovinciaux.
    Pourquoi les libéraux ne renvoient-ils pas la question à la Cour suprême?
    Monsieur le Président, encore une fois, je partage l'enthousiasme et la fébrilité du député. C'est un enjeu que j'ai bien entendu soulevé lorsque j'ai discuté de l'accord sur le commerce intérieur avec mes homologues provinciaux et territoriaux. Nous avons discuté de ce sujet et de beaucoup d'autres, car nous voulons créer un contexte qui favorise la circulation des biens et des services de part et d'autre des frontières intérieures, rapidement et sans tracasseries administratives. C'est pour cette raison que nous sommes résolus à éliminer les obstacles. C'est aussi pour cette raison que nous sommes déterminés à harmoniser les règlements.
    Nous allons créer le contexte nécessaire à la vente de tels produits de façon à ce que les petites entreprises puissent prospérer, en offrant plus de choix et de possibilités et de meilleurs prix aux consommateurs canadiens.
    Monsieur le Président, une chose est claire: les libéraux ne sont pas prêts à donner aux Canadiens la latitude nécessaire. Même si les libéraux concluent un nouvel accord sur le commerce intérieur, ils ont indiqué clairement qu'il y aurait des exemptions, notamment pour la bière.
    En définitive, la décision de libérer la bière ne devrait pas être une question politique; aux termes de l'article 121 de la Constitution, il s'agit clairement d'une question juridique qui doit être clarifiée par la Cour suprême.
    Pourquoi les libéraux font-ils fi de la Constitution au profit d'un accord parallèle qui n'apportera rien aux Canadiens?
(1455)
    Monsieur le Président, comme le député d'en face le sait, au cours des 10 dernières années, les conservateurs ont très rarement rencontré leurs homologues des provinces et des territoires. Voilà pourquoi ils ont été incapables d'obtenir des résultats dans ce dossier et dans bien d'autres.
    Nous sommes toutefois déterminés à travailler en collaboration avec nos homologues pour trouver des solutions et créer un environnement propice au commerce des boissons alcoolisées entre les provinces et les territoires. La question est cependant beaucoup plus vaste que cela. Il s'agit d'un accord qui sera plus complet, qui créera un milieu propice à la croissance des entreprises et profitable aux consommateurs. Nous sommes déterminés à le concrétiser.

[Français]

    Monsieur le Président, après avoir renié sa promesse de réduire l'impôt des entreprises et après avoir refusé l'agrandissement de l'aéroport Billy Bishop, est-ce que ce gouvernement sait faire du développement économique?
    Peut-il faire confiance aux entrepreneurs canadiens et ouvrir les marchés intérieurs afin d'entraîner une plus forte croissance économique? On estime que 14 milliards de dollars seraient injectés dans l'économie grâce à cette mesure. On perd du temps, et du temps, c'est de l'argent.
    Le ministre du Développement économique peut-il s'engager à agir et renvoyer l'arrêt dans la cause Comeau en Cour suprême?

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous avons dit très clairement que le développement économique est une priorité pour le gouvernement actuel.
    C'est pourquoi, par exemple, dans le budget, nous investissons plus de 4,5 milliards de dollars dans l'innovation, ce qui améliorera la croissance des grandes entreprises, des petites entreprises et de l'économie.
    Nous investissons 500 millions de dollars dans les réseaux à large bande. Nous investissons 2 milliards de dollars dans le financement des infrastructures stratégiques pour les universités et les collèges. Nous investissons 800 millions de dollars dans les accélérateurs et les incubateurs pour les entreprises.
    Nous investissons 100 millions de dollars dans les programmes d'aide à la recherche industrielle. En fin de compte, nous effectuons des investissements pour faire croître l'économie, et j'espère que le député appuie ces initiatives.

Les anciens combattants

    Monsieur le Président, les gens de ma circonscription, Cambridge, et de North Dumfries, à l'instar de toute la population de notre grande nation, sont fiers des militaires des Forces armées canadiennes, qui servent leur pays avec fierté et distinction, et de leur longue tradition de valeur, ici et à l’étranger.
    Étant donné leur service et les sacrifices qu’ils ont consentis, il incombe au gouvernement de faire en sorte qu’ils soient inhumés dignement.
    Le ministre des Anciens Combattants peut-il expliquer le plan qu’il a prévu pour faire en sorte que les anciens combattants et tous les membres des Forces armées canadiennes reçoivent les indemnités qu’ils méritent pour les frais funéraires?
    Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de Cambridge de son dévouement envers les anciens combattants.
    Le gouvernement reconnaît le service et le sacrifice des anciens combattants du Canada en facilitant l’accès, pour leurs familles, au Programme de frais de funérailles et d’inhumation afin que leurs funérailles se fassent dans la dignité. Afin d’étendre l’accessibilité au programme à un plus grand nombre de familles d'anciens combattants à faible revenu, l’exemption des avoirs de succession de 12 000 $ passera à 35 000 $, et un ajustement annuel sera appliqué en fonction du coût de la vie.
    Nous sommes résolus à offrir aux anciens combattants les services dont ils ont besoin, et notamment des funérailles dignes d’eux.

La petite entreprise

    Monsieur le Président, hier, le World Competitiveness Center a déclaré que le Canada avait chuté au 10e rang au chapitre de la compétitivité des entreprises. Aujourd'hui, Statistique Canada indique que l'économie s'est contractée pour le deuxième mois d'affilée et ramène les prévisions économiques de l'année à 2,4 %. Cela n'a rien d'étonnant, puisque les libéraux n'ont pas allégé le fardeau fiscal des petites entreprises comme ils l'avaient promis.
    Quand les libéraux se décideront-ils enfin à écouter les entreprises, à réduire leur fardeau fiscal et à rétablir l'avantage concurrentiel du Canada sur le marché international?
    Monsieur le Président, le ministre des Finances a eu des conversations sans précédent avec des entreprises de partout au pays. Quel a été le message des propriétaires d'entreprise? Ils souhaitent que le gouvernement investisse. C'est aussi le message que nous avons entendu pendant la campagne.
    C'est pourquoi nous faisons des investissements historiques dans l'innovation, de façon à accroître la productivité et la compétitivité du Canada. C'est ce que souhaitent les petites entreprises. Elles s'attendent à ce que le gouvernement crée un environnement propice à leur réussite. C'est pourquoi nous investissons non seulement dans les petites entreprises, mais aussi dans le programme des accélérateurs et des incubateurs, l'établissement d'une nouvelle connectivité à large bande et la recherche et le développement, autant d'éléments qui renforceront notre position pour les années à venir.

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, le cauchemar de Salim Alaradi se poursuit. En 2014, il a été injustement emprisonné aux Émirats arabes unis à la suite de fausses accusations. Les accusations ont été retirées en mars et, après presque deux ans d'emprisonnement, il a finalement été acquitté hier. Malgré cela, il est toujours détenu sans raison.
    La famille de M. Alaradi attend impatiemment son retour. Que fait le gouvernement pour obtenir la libération immédiate de Salim Alaradi?
(1500)
    Monsieur le Président, il faut d'abord souligner le courage dont la famille de M. Alaradi a fait preuve pendant cette période difficile. Je tiens aussi à remercier tous les députés, des deux côtés de la Chambre, qui ont travaillé d'arrache-pied pour faire libérer M. Alaradi et qui poursuivront leur travail acharné jusqu'à ce qu'il soit bel et bien libéré.

Les sciences

    Monsieur le Président, la réunion du G7 consacrée aux sciences a eu lieu cette année à Tsukuba, au Japon, et c'était la première fois depuis trois ans que le Canada y assistait. Comme le gouvernement l'a prouvé à maintes reprises, le Canada peut jouer un rôle important sur la scène internationale en acceptant de s'intégrer aux autres.
    La ministre des Sciences pourrait-elle indiquer à la Chambre ce qui est ressorti de la rencontre des ministres des Sciences et de la Technologie du G7?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Cloverdale—Langley City.
    Le Sommet du G7 est une tribune de choix pour le Canada, et ce fut pour moi un honneur d'y assister à titre de ministre des Sciences. Pendant leur passage au Japon, les ministres se sont engagés à collaborer dans toutes sortes de domaines, comme la santé mondiale, les océans, les sciences ouvertes, la place des femmes en sciences et l'inscription des jeunes aux programmes d'études en sciences, en technologie, en génie et en mathématiques. Ces rencontres font ressortir l'importance de la collaboration internationale ainsi que la manière dont la recherche peut aider le monde à surmonter les obstacles qu'il rencontre.

L'infrastructure

    Monsieur le Président, l'hôpital d'Ottawa a 92 ans et il a désespérément besoin de nouveaux locaux. En 2007, un groupe de spécialistes a commencé à étudier 12 emplacements possibles, et le terrain de propriété fédérale de l'autre côté de la rue est arrivé en tête de liste. Le ministre d'alors, John Baird, avait donné son aval, mais voilà que, six mois plus tard, la nouvelle ministre responsable de la région d'Ottawa applique soudainement les freins. Qui plus est, nous venons d'apprendre qu'elle a décidé de renvoyer la question à la Commission de la capitale nationale, ce qui veut dire que nous devrons attendre encore deux ans au total.
    Quand la ministre responsable de la région d'Ottawa arrêtera-t-elle de bloquer la construction de l'hôpital dont ses concitoyens et sa ville ont tant besoin?
    Monsieur le Président, le gouvernement sait qu'Ottawa doit pouvoir compter sur un hôpital ultramoderne dans son centre-ville, et c'est justement pour cette raison que j'ai demandé à la Commission de la capitale nationale de soumettre les divers endroits où pourrait s'installer le campus Civic de l'hôpital d'Ottawa à une étude rigoureuse et transparente et de faire connaître ses recommandations au gouvernement.
    L'expérience de première ligne de la Commission de la capitale nationale dans les relations avec le public et l'aménagement du territoire en fait l'instance toute désignée pour étudier les emplacements possibles. Avec son aide, le gouvernement saura trouver l’emplacement du nouvel hôpital.

[Français]

La protection des consommateurs

    Monsieur le Président, alors que l'Australie et 28 pays de la zone européenne ont des taux de transaction de carte de crédit aussi bas que 0,3 % et 0,5 %, les commerçants du Québec doivent payer entre 1,5 % et 4 % de frais de transaction lorsque leurs clients utilisent des cartes de crédit. Ce sont des frais annuels moyens de 36 000 $ par année que doivent débourser les 6 400 membres de l'Association québécoise des dépanneurs en alimentation.
    Quand le ministre imposera-t-il un plafond aux frais de transaction faramineux des cartes de crédit imposés aux commerçants?

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous demeurons résolus à assurer la protection des consommateurs et la compétitivité de tous les marchés au Canada. Pour répondre à la question, je dirai qu'il existe une obligation pour les compagnies de carte de crédit de procéder à un examen volontaire des frais de transaction. Nous attendons les résultats de cet examen afin de savoir quel est le meilleur moyen de maintenir la compétitivité de ce marché, dans l'intérêt des marchands et celui des consommateurs.

[Français]

L'industrie aérospatiale

    Monsieur le Président, « le secteur aéronautique du Québec est aussi important pour le Québec que le secteur de l'automobile pour l'Ontario. Alors, je m'attends à rien de moins que la même intensité de soutien au Québec pour le secteur aéronautique que ce à quoi on a assisté pour le secteur automobile en Ontario ».
    Je viens de citer le premier ministre du Québec. Ses propos à ce sujet font consensus chez nous.
    Pourquoi donc est-ce que le gouvernement abandonne l'aéronautique et choisit de ne pas agir dans le dossier de Bombardier? Est-ce parce que les consensus du Québec pèsent moins lourd ici que ce que dit Bay Street? C'est vraiment malheureux.
    Monsieur le Président, je ne suis pas d'accord avec mon collègue.

[Traduction]

    Nous accordons beaucoup d'importance à ce secteur.
    Pour preuve, pensons à l'important investissement que nous avons consenti, conjointement avec le gouvernement du Québec, dans la société Bell Helicopter, grâce auquel 900 seront maintenus à Mirabel et 100 emplois seront créés.
    Pour ce qui est de Bombardier, le député d'en face sait pertinemment que nous croyons en cette société. Nous voulons faire partie de la solution. Nous comprenons l'importance du secteur de l'aérospatiale, non seulement pour le Québec, mais aussi pour le Canada.
    Nous allons nous assurer de créer un environnement propice à la production de résultats favorables à tous les Canadiens, y compris les Québécois.
(1505)
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il y a eu des discussions entre les partis de la Chambre et je demande le consentement unanime pour que, relativement à la Conférence annuelle du Conseil canadien des comités des comptes publics et du Conseil canadien des vérificateurs législatifs, 10 membres du Comité permanent des comptes publics soient autorisés à se rendre à Yellowknife, dans les Territoires du Nord-Ouest, en août 2016, et que le personnel nécessaire accompagne le Comité.
    J'ai deux autres demandes à présenter.
    Commençons par celle-ci.
    Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer cette motion?
    Des voix: D'accord.
    Le Président: La Chambre a entendu la motion. Y a-t-il consentement?
    Des voix: Non.
    Le Président: Il n'y a pas consentement. Peut-être faudra-t-il poursuivre les discussions.
    Je tiens à rappeler aux députés que nous sommes sur le point de reprendre le débat. Je demande donc aux gens qui veulent discuter entre eux de bien vouloir le faire dans l'antichambre ou le couloir. Je vois que tout le monde est en grande conversation.
    À l'ordre, s'il vous plaît. Je constate qu'il y a des députés en pleine conversation, mais le débat est sur le point de commencer. Je demande donc aux députés d'aller discuter ailleurs. Ils peuvent continuer à parler, mais ils pourraient peut-être chuchoter lorsqu'ils sortiront de la Chambre et revenir ici quand ils auront terminé leurs discussions.

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Initiatives ministérielles]

(1510)

[Traduction]

Le Code criminel

    La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), soit lu pour la troisième fois et adopté, ainsi que de l'amendement.
    Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-14, qui mettrait en place un cadre fédéral sur l'aide médicale à mourir. Comme bon nombre de députés l'ont reconnu au cours des dernières semaines, l'aide médicale à mourir est une question complexe, délicate et extrêmement personnelle pour nous tous.
    Depuis que la Cour suprême du Canada a rendu sa décision unanime dans l'arrêt Carter l'année dernière, bon nombre de Canadiens de milieux différents et provenant d'un peu partout au pays en ont discuté. Cette question continue d'être débattue et de faire l'objet de discussions sérieuses partout dans le monde, des États-Unis à l'Europe, et de l'Australie à la Nouvelle-Zélande. Presque partout dans le monde, on impose des peines sévères aux gens qui mettent intentionnellement fin à la vie d'une personne ou qui l'aident à mettre fin à sa vie. Ces gestes sont considérés comme des crimes graves.
    Néanmoins, le Canada n'est pas le seul à créer un régime législatif pour permettre l'aide médicale à mourir. En effet, quatre États américains, soit l'Oregon, Washington, le Vermont et la Californie, ainsi que la Colombie et trois pays européens — la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg — disposent actuellement d'un régime législatif autorisant une forme ou une autre d'aide médicale à mourir.
    Ces différents régimes étrangers ont des similarités, en particulier en ce qui a trait aux mesures de sauvegarde, à la surveillance et à la reddition de comptes, la plupart étant incluses dans le projet de loi C-14. Ces similarités sont les suivantes: la demande d'aide médicale à mourir doit être formulée par écrit, être présentée volontairement par le patient et, dans bien des cas, en présence de témoins indépendants; une deuxième opinion d'un médecin indépendant doit être obtenue; et il faut observer un délai ou une période de réflexion entre la demande et l'administration de l'aide médicale à mourir.
    La Colombie a un processus d'approbation unique de l'aide médicale à mourir. Dans chaque hôpital se trouve un comité interdisciplinaire qui évalue les demandes et appuie les patients et leur famille tout au long du processus.
    En outre, presque tous les régimes à l'étranger comportent un système de surveillance obligatoire faisant intervenir des comités régionaux ou nationaux indépendants ainsi que des organismes gouvernementaux ou des ministères, lesquels recueillent et traitent les données afin de surveiller adéquatement l'aide médicale à mourir, puis publient des rapports annuels ou bisannuels sur l'aide médicale à mourir dans leur territoire respectif. Ces données probantes ont été cruciales dans l'analyse de l'affaire Carter par la Cour suprême du Canada.
    Contrairement aux approches assez uniformes, aux mesures de sauvegarde et à la surveillance que nous observons dans les autres pays, les diverses lois adoptent deux approches distinctes en ce qui a trait, premièrement, à la forme d'aide médicale à mourir autorisée et, deuxièmement, aux circonstances médicales dans lesquelles celle-ci peut être fournie légalement.
    On peut éventuellement parler de spectre pour décrire les différentes approches à l'égard de l'admissibilité et de la forme d'aide autorisée. À un bout du spectre, nous avons les quatre États américains qui ont adopté une loi en la matière, à commencer par l'Oregon en 1997, suivi par l'État de Washington en 2008, le Vermont en 2013 et, enfin, la Californie, l'année dernière.
    Dans ces États, un adulte de 18 ans et plus ayant toutes ses facultés mentales peut obtenir l'aide d'un médecin pour mourir seulement si la demande est faite volontairement et si la personne est atteinte d'une maladie mortelle, définie comme étant une maladie incurable et irréversible ayant été confirmée par un médecin et qui, selon un jugement médical raisonnable, mènera à la mort dans les six mois suivants.
    Dans ces États américains, un médecin a seulement le droit de délivrer une ordonnance pour une substance que le patient devra lui-même s'administrer au moment de son choix. C'est ce qu'on appelle communément le suicide assisté par un médecin.
    Ce qu'on appelle communément l'euthanasie, soit l'administration d'une injection au patient par le médecin, est expressément interdite. Les demandes anticipées sont elles aussi interdites.
    Bien que les mesures législatives adoptées aux États-Unis satisfassent aux besoins des personnes atteintes de maladies qui entraînent un déclin soutenu, rapide et prévisible vers la mort, comme certaines formes de cancer, elles ne satisfont aux besoins ni des personnes atteintes d'autres troubles de la santé comme certaines maladies dégénératives qui sont persistantes et prévisibles, ni de celles qui sont inadmissibles à l'aide médicale à mourir de par leur incapacité physique à s'administrer elles-mêmes une substance devant entraîner la mort.
(1515)
    Le régime colombien, mis sur pied en réponse à deux décisions de la Cour constitutionnelle, a établi des critères d'admissibilité similaires à ceux des États américains. Il restreint l'admissibilité aux adultes atteints d'une maladie en phase terminale, définie comme une condition ou pathologie grave, progressive et irréversible qui entraînera la mort dans un délai relativement court. Il n'exige pas un pronostic de six mois, mais il faut que la mort soit prévue à court terme. Contrairement aux États américains, la Colombie permet seulement au médecin d'administrer une substance qui entraînera la mort d'une personne. Toutefois, le régime colombien permet à un patient de préparer une demande anticipée d'aide médicale à mourir, ce qui n'est pas permis aux États-Unis.
    À l'autre bout du spectre, il y a la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg, qui forment les pays du Benelux. Dans ces trois pays d'Europe du Nord, les patients sont admissibles à l'aide médicale à mourir s'ils vivent des souffrances physiques ou psychologiques intolérables ou insupportables en raison d'une condition médicale grave et incurable pour laquelle il n'y a pas de perspectives d'amélioration. Les personnes admissibles n'ont pas besoin d'être mourantes ou atteintes d'une maladie mortelle. Le suicide assisté et ce qu'on appelle communément l'euthanasie volontaire sont permis dans ces pays.
    Bien que les demandes anticipées soient permises, il y a des différences entre les États du Benelux. En Belgique et au Luxembourg, pour être en droit de donner suite à une demande anticipée, il faut que le patient soit dans un état d’inconscience irréversible, alors qu’aux Pays-Bas, les demandes anticipées sont également permises lorsque le patient n’est pas en mesure d’exprimer ses volontés même s’il est conscient, par exemple en cas de démence ou de maladie d’Alzheimer.
    Alors que l’aide médicale à mourir ne soit possible que pour les adultes au Luxembourg, les enfants âgés d’à peine 12 ans peuvent demander l’aide médicale à mourir aux Pays-Bas. En Belgique, les adultes et les mineurs émancipés peuvent demander l’aide médicale à mourir dans les mêmes conditions quant à leur état de santé. En 2014, la Belgique a étendu l’admissibilité aux mineurs de tout âge, mais seulement si leur décès se produira à court terme et que leurs souffrances sont d’ordre physique. D’autres conditions doivent également être respectées.
     L’expérience et les leçons des pays du Benelux ont fait l’objet d’un examen approfondi. Ainsi, aux Pays-Bas, bien que la loi permette les demandes anticipées pour les patients qui ont perdu la capacité d’exprimer leurs volontés, la recherche laisse entendre que les médecins sont en général réticents à fournir une aide médicale à mourir en raison de l’incapacité des patients de comprendre leur état de santé et leur incapacité à exprimer un consentement en connaissance de cause.
    Le gouvernement a cherché à tirer les leçons de l’expérience d’autres gouvernements. Le projet de loi a une portée plus grande que l’approche adoptée par les États américains, qui permet uniquement aux personnes atteintes d’une maladie mortelle d’obtenir une assistance. Le projet de loi C-14 donne plutôt l’option d’une mort paisible à quiconque dont la santé décline se dirige vers une fin de vie naturelle, et pas seulement aux personnes atteintes d’une maladie mortelle ou en phase terminale. Parallèlement, il évite certains risques que les régimes du genre du Benelux peuvent présenter, même si des questions aussi vastes et l’expérience d’autres régimes offerts dans le monde continueront d’être étudiées.
     Je conseille vivement aux députés de voter en faveur de ce projet de loi extrêmement important afin d’obtempérer à l’exigence de la Cour suprême de légiférer en la matière.
    Monsieur le Président, je respecte énormément mon collègue de Surrey-Centre et son étude plutôt vaste des pays dans le monde qui ont adopté l’aide médicale à mourir. J’ai particulièrement apprécié son analyse détaillée visant à nous donner un cadre dans lequel nous pourrions définir la loi présentement soumise à l’approbation de la Chambre.
    Voici la question que j’adresse à mon collègue. Nous avons bien sûr entendu les remarques du gouvernement, et en particulier celles du premier ministre, qui laissent entendre que cette loi tout particulièrement est simplement une première étape. Y a-t-il des aspects des recherches qu’il a effectuées concernant les autres gouvernements qu’il pense pouvoir être utiles à la discussion qui s’engage?
(1520)
    Monsieur le Président, oui, il y a certains aspects dont on doit tenir compte. Je pense qu’il faudra en fin de compte déterminer l’ouverture ou l'étroitesse du processus. On craint toujours qu’il soit trop vaste ou encore qu’il restreigne trop les individus qui veulent se prévaloir de ce droit et conséquemment y accéder.
    Il sera également important de déterminer quelles sont les lacunes du système. Certains troubles ou certaines maladies pourraient ne pas être adéquatement abordés dans le cadre du projet de loi. Nous surveillerons de près la Californie, le Vermont et de nombreux autres États américains, en plus des pays du Benelux, soit la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas, et nous pourrons ainsi déterminer dans quels domaines des lacunes ont été comblées et quelles lacunes ont été abordées par les tribunaux. J’espère que la Chambre et la ministre de la Justice pourront y remédier au fur et à mesure qu'elles seront relevées.
    Monsieur le Président, nous avons été hier soir témoins, à la Chambre, de la réticence de la majorité du Parti libéral à l’idée d’inclure des mesures visant à protéger efficacement la liberté de conscience des professionnels des établissements qui offrent des soins de santé aux Canadiens. Nous savons que deux ordres ont déjà affirmé qu’ils s’attendent à ce que leurs médecins, même si ceux-ci s'opposent à l'aide médicale à mourir, dirigent les patients par une recommandation efficace vers les personnes qui leur offriront les services qu'ils demandent.
     J'aimerais que mon collègue dise pourquoi son parti et lui-même ne se rendent pas compte de l’importance d’accorder la liberté de conscience à un professionnel de la santé qui compte des années et des années de formation et qui s’oppose à l’idée d’aider quelqu’un à mourir prématurément. Pourquoi s’opposerait-il à ce que les travailleurs de la santé profitent de la liberté de conscience, tout comme les établissements qui procurent d’excellents soins de santé à notre population canadienne?
    Monsieur le Président, je remercie le député de sa question et suis heureux que les deux côtés de la Chambre aient cet enjeu à cœur.
    Selon ce que j’en sais, le projet de loi et le préambule ont déjà été amendés à l'étape de l'étude en comité. La personne est protégée, mais pas l'établissement. Je pense que la question a déjà été abordée, et c'est la raison pour laquelle plusieurs députés n’ont pas appuyé l’amendement. La question a déjà été réglée dans le préambule, ainsi que dans le projet de loi en tant que tel.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Surrey Centre de son excellente intervention et je souhaite réitérer son message. Le projet de loi et le préambule contiennent tous deux des exceptions en matière de liberté de conscience pour les professionnels, et ces exceptions ont été acceptées par tous les membres du comité.
     Plusieurs députés s’inquiètent toutefois des directives anticipées. Le Comité a expliqué que des études seraient amorcées dans les six mois à venir. Il est toutefois très important de noter que les directives anticipées, même dans le seul pays qui les autorise pour les personnes atteintes de démence et d’autres maladies dégénératives, ne sont pas réellement mises en œuvre. Très peu de gestes concrets sont posés aux Pays-Bas en raison des préoccupations concernant les souhaits véritables d'une personne atteinte de démence au moment de sa mort.
     Je me demande si mon collègue est lui aussi d'avis que cette question doit être étudiée de façon plus exhaustive avant la mise en oeuvre, le cas échéant.
    Monsieur le Président, je suis d’accord avec le député. Une directive anticipée est une question que nous devons étudier, et même six mois ne seraient pas suffisants pour une telle étude. Je pense qu’une période plus longue serait nécessaire pour aborder ces préoccupations.
     Il faudrait voir comment cela sera effectué. Ce n’est qu’après avoir examiné cet aspect que nous pourrons réfléchir aux directives anticipées. C’est un sujet qui exige une grande compréhension. Je pense qu’il serait difficile d’élaborer une telle directive initialement, sans avoir des lignes directrices ou des mesures de sauvegarde en place.
(1525)

[Français]

    Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec ma collègue la députée de Carlton Trail—Eagle Creek.
    Il s'agit d'un moment très difficile dans ma petite carrière politique, car c'est un sujet délicat qui n'appelle aucune partisanerie. Toutes les opinions sont bonnes et personne n'a tort. Nous sommes tous de bons et bonnes Canadiens et Canadiennes animés de bons sentiments, et nous cherchons la meilleure solution concernant ce sujet si délicat.
    Sur un tel sujet, nous ne sommes pas ici pour convaincre qui que ce soit, nous sommes ici pour expliquer notre point de vue. Selon l'arrêt de la Cour suprême dans la cause Carter, il ne s'agit pas de déterminer si nous sommes pour ou contre l'aide médicale à mourir, mais de déterminer comment l'appliquer.
    Nous voici donc rendus à l'étape finale du projet de loi C-14. Grâce à l'invitation de ma chef, j'ai eu le privilège de participer au comité parlementaire qui a étudié la question et qui a produit un rapport principal et un rapport dissident. Avec mes collègues de l'opposition officielle, nous avons signé le rapport dissident, alors que mes collègues conservateurs du Sénat ont signé le rapport principal. Cela démontre qu'il n'y avait aucune partisanerie dans notre approche.
    Dans notre rapport dissident, nous avions soulevé cinq préoccupations majeures. La plupart ont été entendues par le gouvernement et sont reflétées dans le projet de loi C-14. Nous étions contre le fait que la loi sur l'aide médicale à mourir s'applique dans le cas de mineurs; le gouvernement nous a entendus. Nous étions contre le fait qu'elle s'applique dans le cas de maladies mentales; le gouvernement nous a écoutés. Nous souhaitions une ouverture totale concernant la protection de la conscience des médecins et des institutions; le gouvernement nous a écoutés partiellement. Nous voulions également un engagement clair du gouvernement concernant les soins palliatifs; le gouvernement nous a écoutés partiellement.
    Par ailleurs, je salue ma collègue de Sarnia—Lambton, qui a déposé à la Chambre, il y a presque exactement 24 heures, le projet de loi C-277. Ce projet de loi d'initiative parlementaire vise à obliger le gouvernement à s'engager fermement à offrir au plus grand nombre possible de Canadiens les soins palliatifs nécessaires. Rappelons qu'à peine un tiers des Canadiens ont accès à ce type de soins. Avec le projet de loi C-277, nous souhaitons que cela soit appliqué.
    Voilà les éléments du projet de loi C-14 que nous estimons positifs ou semi-positifs. Maintenant, voici ce qui nous inquiète énormément.
    Tout d'abord, il y a la fameuse définition de la mort raisonnablement prévisible. Pour nous, cela n'a strictement aucun bon sens. En effet, « raisonnablement prévisible », cela veut dire tout et rien à la fois. Un jour, je vais mourir. C'est raisonnablement prévisible, en effet, mais cela ne dit strictement rien. Dans la sage expérience québécoise, on précisait « en fin de vie ». Au moins, c'est plus clair.
    Il y a aussi la question des infirmières praticiennes qui, selon la loi, ont les mêmes pouvoirs décisionnels qu'un médecin. J'ai énormément de respect pour les infirmières, et je sais de quoi je parle, puisque ce sont souvent les premières et parfois même les seules à nous voir, lorsque l'on va à l'hôpital. Toutefois, quand il s'agit de vie ou de mort — c'est littéralement ce dont il est question ici —, je préfère que la responsabilité ultime appartienne aux médecins plutôt qu'aux super infirmières.
    Les éléments dont je viens de parler sont basés sur l'expérience québécoise. Je sais de quoi je parle, puisque j'ai été député à l'Assemblée nationale du Québec. Pendant six ans, nous avons travaillé et étudié sérieusement les enjeux entourant l'aide médicale à mourir, alors que nous avons eu à peine quelques mois ici, à la Chambre, pour faire le même travail.
     D'ailleurs, je reviendrai plus tard sur une déclaration malheureuse qu'on a entendue pendant la période des questions orales.
    En nous basant sur l'expérience québécoise, nous avions bâti notre argumentaire pour le rapport dissident. Notre projet de loi actuel fait en sorte que certains éléments soient adoptés, d'autres plus ou moins et d'autres pas du tout. Cela équilibre relativement bien les éléments positifs et négatifs.
    Ensuite, il reste à considérer la fameuse question de la constitutionnalité. En effet, chaque loi que l'on propose peut faire l'objet d'une contestation. D'ailleurs, peu importe la loi qui aurait été déposée, elle aurait été contestée par un groupe ou par un autre. Depuis des semaines, certains disent que c'est constitutionnel et d'autres disent que ce ne l'est pas. La plupart des gens que nous avons entendus disaient que cela n'avait pas de bon sens et que cela ne respectait pas la Constitution ni l'arrêt dans la cause Carter. Or, ce matin, dans La Presse, si je me souviens bien, trois experts constitutionnels de trois universités différentes, l'Université Laval, l'Université de Montréal et l'UQAM, disaient que c'était constitutionnel.
(1530)

[Traduction]

    Si nous déposons un projet de loi, beaucoup d’avocats diront qu’il est bon et beaucoup d’autres diront qu’il est mauvais. C’est là que le bât blesse, et c’est une chose avec laquelle nous devons composer. C’est la démocratie, et c’est ainsi qu’elle fonctionne dans notre système judiciaire.

[Français]

    Je le dis avec grand respect pour les disciples de Thémis. Je sais qu'il y en a certains ici, prestigieux d'ailleurs, que je salue, dont le député de Mont-Royal.
    La question de la Charte est un autre élément intéressant. Certains disent que cela respecte la Charte alors que d'autres disent que cela ne la respecte pas.
    Essayons de ne pas être trop partisan. Si on ne peut pas se fier au gouvernement libéral pour rédiger une loi qui respecte la Charte, à qui se fiera-t-on? Dois-je rappeler que c'est le Parti libéral, sous l'égide du très honorable Pierre Elliott Trudeau, père de l'actuel premier ministre, qui a enchâssé la Charte canadienne des droits et libertés à l'intérieur de la Constitution de 1982, signée à environ 300 pieds d'ici par Sa Majesté la reine, le 17 avril 1982? On s'en souvient tous. Le ciel était couvert, et au moment même de la signature, le tonnerre a grondé. Voilà pour la petite histoire.
    Sérieusement, je ne suis pas le plus grand défenseur de la Charte, et encore moins du Parti libéral, surtout pas, mais bon Dieu, si on ne peut pas se fier au gouvernement libéral pour rédiger une loi qui respecte la Charte, je me demande bien à qui se fier.
     Les événements sont très équilibrés; ce projet de loi a du bon et du mauvais. Au cours des 24 dernières heures sont survenus trois événements qui méritent réflexion. Tout d'abord, hier, nous avons voté sur 10 amendements potentiels; ils ont tous été rejetés, et tous ont été rejetés par la majorité libérale. Je salue le courage, l'honneur et la dignité des députés ministériels qui se sont levés contre la position de leur parti. Bravo!
    Cependant, parmi ces amendements, deux étaient essentiels à mon avis, tous deux présentés par le député de St. Albert—Edmonton.
    Le premier protégeait les plus vulnérables en proposant de faire des évaluations psychiatriques avant de donner son accord. Pour nous, c'est essentiel, parce que la protection des plus vulnérables est un élément fondamental. Or le gouvernement a voté contre.
    Le deuxième amendement concernait la protection de la conscience des institutions. Je vais parler au nom de mes amis du Québec. Au Québec, les institutions telles que les hôpitaux sont laïques. Toutefois, à l'extérieur du Québec, certaines institutions sont religieuses et agissent donc en fonction de ce que leur dicte leur conscience. Il faut protéger leur conscience, mais ce projet de loi ne le fait pas. Nous avions proposé cet amendement. Or le gouvernement l'a refusé. C'est dommage. Il y a donc eu un refus des amendements.
    De plus, ce matin, le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, l'honorable Dr Gaétan Barrette, a fait une déclaration. C'est un type que je connais, un homme honnête, intègre, travaillant et travailleur, mais surtout, c'est un médecin spécialiste qui a été administrateur et qui est aujourd'hui ministre. Il parle donc au nom du gouvernement du Québec, et nous dit ceci:
    Je ne suis pas enclin personnellement, pour des raisons gouvernementales et professionnelles, à prendre le chemin de C-14 sur la base de l'élément qui est le pire de tout C-14, qui est la mort naturelle raisonnablement prévisible. Ça, ça ne se peut pas. C'est quelque chose qui est inapplicable. Moi, aller vers C-14 dans le contexte actuel, je serais très prudent [...]
    Il ajoute que le projet de loi est « profondément rébarbatif », que c'est un « mauvais paragraphe » et « qu'on entre dans un terrain qui est [beaucoup trop] miné à mon goût. »
    Enfin, le troisième élément s'applique aux déclarations du premier ministre à la période des questions orales d'aujourd'hui. Quand il a dit qu'il travaillait avec les provinces dans ce dossier, cela ne correspondait pas du tout à la réalité. Pire encore, il a dit: « nous nous sommes énormément inspirés des réflexions de l'Assemblée nationale du Québec ».
    Je peux dire une chose. J'ai siégé à l'Assemblée nationale. J'ai assisté aux six années qu'a duré cette étude, et ce qu'on a vu ici au cours des six derniers mois, c'est tout sauf ce qui s'est fait à l'Assemblée nationale.
    Je ne reviendrai pas sur les événements malheureux d'il y a deux semaines, lorsqu'il était justement question du vote pour restreindre notre droit de parole. Je vais revenir sur l'ensemble de l'oeuvre où, malheureusement, le gouvernement ne s'est inspiré ni du fond ni de la forme du travail de l'Assemblée nationale.
    En conséquence, eu égard aux éléments positifs et négatifs de la loi, eu égard au fait qu'au cours de 24 dernières heures, trois événements sont survenus, dont le vote contre les amendements qui ont été complètement refusés, la déclaration du ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec et la déclaration trompeuse du premier ministre du Canada, je voterai contre ce projet de loi.
(1535)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je vais être honnête. Je suis d’accord avec la majeure partie des propos du député aujourd’hui. J’étais l'un des députés du gouvernement qui ont voté comme l’opposition sur certains des amendements qui ont été proposés, y compris celui sur les protections visant à s’assurer qu’on obtiendrait une opinion médicale appropriée s’il y a des doutes sur l’aptitude dans le cas d’une personne qui souffre d’une maladie mentale préexistante.
     J’aimerais aborder l’autre question qui a été soulevée, soit celle qui porte sur l’interaction avec les établissements. Je n’ai pas appuyé l’amendement et j’aimerais expliquer officiellement pourquoi. Selon moi, la disposition ne devrait pas figurer dans le Code criminel, et je crois qu’en fait il aurait été plus approprié de passer par nos ordres professionnels provinciaux. Je pense que c’est la raison pour laquelle les députés du gouvernement ont rejeté en bloc cette disposition.
     Je veux revenir à la question dont mon collègue a parlé, soit la prévisibilité raisonnable. Je partage certaines craintes évoquées par des députés en face à ce sujet. Que suggérerait le député pour rendre cette disposition plus claire, d'autant plus qu'il s'agit ici de fixer une norme juridique claire pour guider les médecins, qui seraient tenus de se conformer à cette disposition?
    Monsieur le Président, comme le ministre de la Santé du Québec l'a dit, c'est inapplicable. Nous ne pouvons rien faire avec cela. Je vais le dire en français, car il est très difficile pour moi de le dire en anglais. C'est raisonnablement prévisible. Cela veut dire à la fois tout et rien. C'est pourquoi nous devons être clairs.
     Au Québec, on a décidé de parler de fin de vie. C'est clair comme de l'eau de roche. C'est la raison pour laquelle nous suggérons ce libellé. En passant, si toutes nos propositions d'amendements s'inspirent de l'expérience du Québec, c'est parce que, au Québec, il y a eu une étude qui a duré six ans, ce qui n'est pas le cas ici. C'est la raison pour laquelle le gouvernement aurait dû suivre l'exemple de l'Assemblée nationale du Québec, ce qu'il n'a pas fait. Ce n'est pas ce que le premier ministre a dit.
    Qu'on me comprenne bien. Le projet de loi n'est pas parfait, mais nous sommes tous conscients que le 7 juin, il n'y aura pas de loi parce que le Sénat n'aura pas eu le temps d'adopter le projet de loi. Par conséquent, je pense que les conservateurs s'y opposeront.
    Monsieur le Président, je me demande si le député pourrait parler du dossier des infirmiers praticiens. Je ne sais pas s'il a pu bénéficier des mêmes occasions que celles qui m'ont été offertes. À titre d'exemple, j'ai déjà travaillé au Yukon. L'une de mes amies est infirmière praticienne dans une petite ville du Yukon. Au fil des ans, de plus grands pouvoirs ont été confiés aux infirmières pour accomplir diverses tâches, notamment faire des points de suture.
     Qui aura la responsabilité de faire en sorte que le patient demandant l'aide à mourir puisse voir un médecin? Qui paiera pour qu'il puisse se rendre là où il y a un médecin ou pour que le médecin puisse se rendre dans la localité isolée où réside le patient?
    Monsieur le Président, c'est une question très importante. Je tiens d'abord à répéter que j'ai beaucoup de respect pour les infirmières. Quoi qu'il en soit, mon argument se fondait sur ce qui se passe au Québec.
    Le même problème se posait là aussi. On ne parle pas du Yukon, mais du Nouveau-Québec. En effet, le Grand Nord connaît exactement le même problème et les mêmes difficultés que le Yukon. Il n'est pas question d'une personne qui a eu un accident de voiture et dont l'état demande de prendre une décision sur-le-champ. On parle plutôt de gens qui souffrent et qui ont beaucoup de temps — peut-être trop — pour penser à leur situation. Ce n'est pas une question d'heures ou de jours, mais de mois.
    Nous préférerions que l'analyse se fasse par des médecins plutôt que par des infirmières. Je répète que j'ai beaucoup de respect pour les infirmières du Yukon, de Montréal, de Québec, d'Ottawa et des quatre coins du Canada.
(1540)
    Monsieur le Président, c'est pour moi un privilège de prendre la parole aujourd'hui au nom des gens de ma circonscription afin de participer au débat sur le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois, qui porte sur l'aide médicale à mourir.
    Je tiens d'abord à dire que, pendant le temps que j'ai passé à la Chambre, soit presque neuf ans, je n'ai jamais reçu autant de questions et de correspondance au sujet de l'aide médicale à mourir. Il est clair que, dans ce dossier, les Canadiens et les députés défendent une foule de croyances et de convictions qui s'appuient sur leur expérience personnelle. En tant que députés, nous avons aussi la responsabilité de tenir compte à la fois de nos convictions personnelles et de celles des gens de notre circonscription qui apportent au débat une foule de contributions extraordinaires. La réaction considérable que suscite ce court débat au Parlement confirme ma conviction — qui, à mon sens, est aussi celle de mes collègues — que l'aide médicale à mourir est le dossier le plus important de la législature actuelle.
    Le projet de loi C-14 est la mesure qui aurait l'effet le plus marquant sur les Canadiens et la société canadienne, car chacun d'entre nous pourrait un jour connaître une personne ayant à prendre ce genre de décision. Les avis dont les gens de ma circonscription m'ont fait part sont sincères, réfléchis et éclairants, et la vaste majorité d'entre eux s'opposent à l'aide médicale à mourir. Je suis ravie de leur dire que je partage leur avis. Je crois à l'inaliénable droit à la dignité pour toutes les vies humaines, et j'estime que la loi doit protéger ce droit à toutes les étapes de la vie, de la conception à la mort naturelle. Par conséquent, je me suis opposée et je continuerai de m'opposer à toute tentative de légaliser l'euthanasie ou l'aide médicale au suicide.
     Je suis vivement préoccupée par les circonstances entourant la présentation et l'adoption de ce projet de loi. Je suis consciente que le projet de loi C-14 est maintenant à l'étape de la troisième lecture, et que de nombreux députés se demandent encore comment ils voteront plus tard aujourd'hui. J'espère que tous les députés pourront voter librement comme les députés conservateurs.
    Ce projet de loi a été présenté à la Chambre le 14 avril, il y a moins de deux mois. C'est toujours un défi d'adopter une mesure législative en un mois et demi, mais, lorsqu'il s'agit d'un sujet aussi crucial, un délai aussi serré est irresponsable et signale qu'on fait peu de cas de toute l'importance que les Canadiens attachent à cet enjeu. Comme ma collègue de Lethbridge l'a souligné plus tôt, la Cour suprême du Canada a projeté le Parlement dans une vaste mare grise. Les parlementaires doivent chaque jour tenter de cerner les limites de cette mesure législative alors qu'une supposition en entraîne une autre. Je doute qu'il soit possible d'évaluer toutes les conséquences de cette mesure en aussi peu de temps, puisqu'il s'agit d'un nouvel enjeu moral pour les Canadiens.
    Comme de nombreux députés, je crains que des mineurs puissent un jour avoir accès à l'aide médicale à mourir. Je m'inquiète aussi du bien-être des personnes aux prises avec des troubles de santé mentale, des troubles dont, franchement, nous commençons à peine, au Canada, à découvrir la portée et à saisir les conséquences pour toutes les personnes atteintes. Je crains également que des médecins qui s'opposent à l'aide médicale à mourir, pour des raisons légitimes liées à leur foi ou à leur conscience, puissent être obligés de prendre part à un processus contraire à leur sens de l'éthique.
    Le gouvernement a présenté un projet de loi dont la portée est beaucoup plus étroite que ce qu'avait recommandé le comité spécial, mais des intervenants des deux côtés du débat ont soulevé de nombreuses questions sur la suite des choses. Comme on n'a pas encore répondu à ces questions, je suis déçue de constater que les consultations et le débat sur le projet de loi C-14 vont se terminer prématurément.
    De nombreux résidants de ma circonscription sont d'avis que le gouvernement devrait envisager d'avoir recours à l'article 33 de la Charte des droits et libertés — la disposition de dérogation — afin d'empêcher le suicide assisté, au lieu de faire adopter à la hâte un projet de loi qui, semble-t-il, ne satisfait pleinement personne. Je tiens à faire savoir au gouvernement et aux résidants de ma circonscription que j'appuierais le recours à la disposition de dérogation pour prévenir tout effet de la décision de la Cour suprême dans l'affaire Carter c. Canada. Je ne suis pas constitutionnaliste, mais je présume que l'article 33 figure dans la Charte parce que, à l'époque, le premier ministre du Canada et les premiers ministres des provinces souhaitaient affirmer que les députés fédéraux et provinciaux démocratiquement élus, plutôt que le pouvoir judiciaire, seraient chargés d'adopter des lois sur des politiques publiques.
(1545)
    En refusant d'invoquer la disposition de dérogation, le gouvernement met fin prématurément à nos délibérations sur le projet de loi et empêche de nombreuses personnes de prendre part à la discussion.
    Le Parlement devrait adopter des lois que les tribunaux interprètent par la suite en fonction de la Charte. Les tribunaux ne devraient pas dicter au Parlement les lois à adopter ni les délais à respecter à cette fin.
    Je ne crois pas que l'ancien premier ministre de la Saskatchewan, Allan Blakeney, aurait signé la Charte sans la présence de la disposition de dérogation, puisqu'elle protège les droits de l'Assemblée législative de la Saskatchewan d'annuler la décision d'un tribunal si elle n'est pas d'accord avec celle-ci.
    Le premier ministre Pierre Elliott Trudeau était du même avis lorsqu'il a dit:
    C’est un moyen pour les assemblées législatives fédérale et provinciales de garantir que ce sont les représentants élus du peuple plutôt que les tribunaux qui ont le dernier mot.
    L'ancien premier ministre Jean Chrétien, qui était ministre de la Justice à l'époque, avait fait un commentaire similaire:
    La clause dérogatoire a pour but d’assurer suffisamment de souplesse pour que les assemblées législatives, plutôt que les juges, aient le dernier mot en ce qui a trait aux grandes questions d’intérêt public.
    Si le suicide assisté n'est pas une bonne raison pour invoquer l'article 33, alors quelle serait une bonne raison?
    Les députés libéraux n'ont pas cessé d'utiliser la date butoir du 6 juin pour justifier la nécessité d'adopter le projet de loi rapidement. Or, je soutiens que la disposition de dérogation existe précisément pour permettre au Parlement, et non aux tribunaux, de fixer des délais à l'égard d'importants enjeux de politique publique. Le gouvernement aurait à tout le moins pu recourir à cette disposition pour se donner davantage de temps pour consulter les Canadiens et élaborer une mesure législative qui respecte la décision de la Cour et protège la vie humaine.
    Alors que l'Assemblée nationale du Québec a mis six ans pour élaborer une mesure législative sur le suicide assisté par un médecin, la Cour suprême n'a jugé bon d'accorder au gouvernement fédéral que 16 mois pour mettre en place une nouvelle loi. Malheureusement, il est clair que le gouvernement actuel n'envisage même pas le recours à la disposition de dérogation.
    Je prends le reste de mon temps de parole pour me pencher sur la liberté de conscience dont doivent disposer les professionnels du milieu médical.
    À mon avis, le fait d'ouvrir la porte au suicide assisté par un médecin engage la société canadienne sur une pente glissante. Néanmoins, j'estime encore plus irresponsable que le projet de loi fasse abstraction de la liberté de conscience.
    En omettant de protéger de façon adéquate la liberté de conscience des professionnels de la santé, le Parlement, et plus précisément le parti actuellement au pouvoir, fait preuve de mépris à l'égard de ce droit. Or, si le Parlement ne respecte pas ce droit, il crée un dangereux précédent.
    Les précédents ont une importance. Les députés pourraient ne plus siéger aux Communes et même ne plus être de ce monde lorsque les effets des précédents établis par l'adoption du projet de loi C-14 se feront sentir, et c'est la raison pour laquelle il est si important de veiller à protéger la liberté de conscience dès aujourd'hui.
    Je croyais que la plupart des députés seraient pour la liberté de conscience des professionnels de la santé. Je me disais que, si le gouvernement avait mentionné la liberté de conscience dans le préambule du projet de loi, c'est qu'il adhérait au principe, mais les résultats du vote d'hier soir nous démontrent que ce n'était pas le cas.
    Personne ne restera en permanence ou éternellement dans cette enceinte. À l'instar des députés des législatures précédentes, nous devons être clairs dans nos intentions lorsque nous adoptons des lois aujourd'hui si nous voulons que notre travail ait des effets durables qui seront visibles à l'avenir. Par conséquent, il nous incombe à nous, les députés de la 42e législature, d'être très précis concernant ce qui est permis et ce qui doit être protégé dans ce projet de loi.
    Pour terminer, je dirais que les lois que nous adoptons seront le seul legs de notre législature. Nous avons la responsabilité de corriger ce projet de loi et de trouver une solution pour tous les problèmes soulevés.
    Monsieur le Président, je veux préciser qu'au comité, nous avons adopté deux amendements liés à la liberté de conscience, un dans le préambule et un dans le corps du texte. En fait, l'amendement présenté hier a été rejeté par le comité parce que ses membres n'étaient pas d'accord pour dire que les établissements devraient jouir de ces mesures de protection, estimant que seules les personnes devraient pouvoir le faire.
    Je veux revenir aux commentaires sur la disposition de dérogation.
    Le gouvernement fédéral n'a jamais recouru à la disposition de dérogation. Elle a été utilisée deux fois par des provinces, une fois par l'Alberta pour le mariage de conjoints du même sexe, au sujet duquel même mes collègues conservateurs ont changé d'idée en fin de semaine. Plus important, elle a été utilisée au Québec, ce dont j'ai été moi-même témoin, pour la langue d'affichage. Le gouvernement du Québec a promis aux Québécois anglophones que les affiches bilingues seraient permises, puis il a changé d'idée et il a utilisé la disposition de dérogation pour dire à notre communauté que nous n'avions pas le droit d'être visibles dans notre propre province.
    Je demande à la députée, à la lumière de l'expérience canadienne du recours à cette disposition — qui a fait que toute une communauté a eu l'impression que ses droits avaient été reconnus en cour, puis annulés par son propre gouvernement — comment elle peut croire que nous devrions utiliser une disposition de dérogation dans un cas comme celui-ci.
(1550)
    Monsieur le Président, le Parlement fédéral ou une assemblée législative provinciale ou territoriale peut déclarer qu'une de ses lois ou une partie d'une loi s'applique temporairement, indépendamment des articles contraires de la Charte, annulant ainsi tout examen judiciaire en passant outre temporairement aux dispositions de protection de la Charte.
    La disposition découle d'un compromis qui a été fait durant le débat sur la nouvelle Constitution au début des années 1980. Parmi les principales plaintes formulées par les provinces au sujet de la Charte, il y avait le fait qu'elle transférait le pouvoir des élus aux instances judiciaires, donnant le dernier mot aux tribunaux. Comme je l'ai dit dans mes commentaires, les premiers ministres provinciaux du pays, surtout ceux de l'Alberta et de la Saskatchewan, croyaient qu'il fallait s'opposer fermement, dans la Charte, à ce qu'un tribunal ne tienne pas compte des lois adoptées par les élus.
    Monsieur le Président, en ce qui concerne la protection pour les établissements, vous avez représenté la circonscription de Saskatoon-Ouest durant de nombreuses années, et dans cette circonscription, il y a un hôpital catholique, l'hôpital St. Paul. La députée pourrait-elle me dire comment cet hôpital catholique traitera cette question, alors qu'il n'existe aucune protection pour de tels établissements au pays?
    Je suis sûr que le député faisait allusion à la députée de Carlton Trail—Eagle Creek et non pas à la présidence. Je lui rappelle qu'il doit employer la troisième personne. Merci.
    La députée de Carlton Trail—Eagle Creek a la parole.
    Monsieur le Président, nous avons ce que nous considérons comme un établissement de santé confessionnel à Saskatoon. C'est l'hôpital St. Paul. On y fournit des soins aux gens de la Saskatchewan depuis des décennies. Au début, les Soeurs grises dispensaient les soins; maintenant, l'établissement est affilié à la région sanitaire de Saskatoon.
    Je dirais que les professionnels de la santé qui travaillent dans un établissement confessionnel souhaiteraient que l'on protège leur liberté de conscience, et que les croyances qu'ils expriment en dispensant des soins devraient également être protégées. Il serait très préoccupant que la liberté de conscience des personnes ainsi que celle des établissements confessionnels ne soit pas protégée dans le projet de loi.
    Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Montcalm.
    Je suis honoré de pouvoir parler du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir) à l'étape de la troisième lecture. Cette question importante touche tous les Canadiens.
    Chaque fois que je viens à la Chambre, je joue trois rôles. Le premier, c'est celui de député, qui doit défendre les intérêts des gens de Richmond Hill. Le deuxième, c'est celui de législateur, qui cherche à prendre les meilleures décisions possible dans l'intérêt de l'ensemble des Canadiens. Le troisième, c'est celui d'un particulier ayant ses propres convictions et ses propres croyances.
    Aujourd'hui, je vais me confier aux Canadiens et leur faire part de mes réflexions dans l'espoir de les toucher.
    Je dois d'abord admettre que cette question est très épineuse. Il est difficile de parler de la mort, mais le gouvernement assume honorablement cette responsabilité.
    Le 30 avril, j'ai participé, dans la région d'York, à une assemblée publique où une bonne partie des participants venaient de Richmond Hill. Qu'ils soient pour ou contre, ils ont parlé de cette question avec authenticité. L'authenticité des gens de ma circonscription m'inspire beaucoup, et je tiens à leur dire, à eux ainsi qu'à l'ensemble des Canadiens, que nous sommes là pour eux.
    Je vais raconter mon histoire aux députés, car elle va de pair avec le point de vue exprimé par les électeurs de ma circonscription et le travail que nous accomplissons ici, à la Chambre.
    Je vais raconter l'histoire de mon père et le désarroi qu'il a vécu à cause du cancer. C'est précisément pour cette raison que je m'intéresse d'aussi près au projet de loi. J'ai dû réfléchir longuement à la question, car tant comme particulier que comme député et législateur, je suis touché de près par ce débat et par la décision qui sera prise au bout du compte.
    Beaucoup de personnes savent à quel point il est difficile de lutter contre un cancer. Cela dit, même si les chances étaient minces, mon père a réussi à vaincre cette maladie. Il a lutté de toutes ses forces et il a remporté la bataille. Malheureusement, sa victoire fut de courte durée. Le cancer est revenu très rapidement.
    Notre famille, qui est composée de gens qui s'aiment et s'appuient mutuellement, a tout fait pour que mon père soit heureux et ne souffre pas trop à la fin de sa vie. Cela dit, peu importe ce que nous faisions, nous ne réussissions pas à éliminer ses souffrances. Même si nous lui avons offert un soutien moral et social extraordinaire, il éprouvait quand même un grand désarroi. Nous lui avons offert des soins palliatifs, mais ce n'était pas suffisant. J'ai été profondément attristé de voir mon père s'oublier dans tout ce processus. À la fin, il était plus inquiet des répercussions que ses souffrances avaient sur nous que sur lui. Après tout, de fortes doses de morphine l'empêchaient de trop souffrir. Cela dit, rien ne pouvait soulager ses douleurs psychologiques et changer quoi que ce soit au fait que son orgueil en avait pris un coup.
    D'aucuns craignent que le fait d'offrir l'aide médicale à mourir ait une incidence négative sur les personnes vulnérables. Pourtant, comme je l'ai dit plus tôt, ce qui a rendu mon père vulnérable, c'était de ne pas avoir la possibilité de mettre fin à son séjour sur terre.
    Mon père a fini par être aux prises avec deux maladies, l'une physique et l'autre mentale. Sa douleur physique était telle qu'elle a commencé à attaquer son moral. Il s'est mis à s'isoler et, à la fin, il souffrait seul.
    Je suis d'accord avec la volonté du gouvernement de promouvoir des services de fin de vie de qualité et de continuer à travailler avec les provinces et les territoires à l'amélioration des soins palliatifs. La population canadienne et les habitants de Richmond Hill ont clairement fait savoir que c'est ce qu'ils veulent. À cette fin, le gouvernement s'est engagé à affecter 3 milliards de dollars sur quatre ans aux soins palliatifs. Cependant, aucun investissement dans les soins palliatifs n'aurait atténué les souffrances indicibles de mon père.
    L'expérience de mon père n'a rien d'unique. Je suis convaincu que d'autres députés connaissent quelqu'un qui a éprouvé une souffrance pareille.
    Nous avons une grave responsabilité envers les Canadiens. Nous devons faire du Canada un endroit exceptionnel, donner aux gens les moyens d'avoir une vie meilleure, leur faciliter la réalisation de leur vision et les aider à concrétiser leurs rêves et leurs aspirations. Nous avons été élus pour représenter leur volonté, leur fournir des services et élaborer des lois à cette fin.
(1555)
    Regardons quelques données sur ce que pensent les Canadiens. D'après les sondages, la majorité des Canadiens acceptent le principe de l'aide médicale à mourir et demanderaient même d'y avoir accès s'ils en avaient la possibilité. Les sondages montrent également que, depuis quelques années, la population se montre de plus en plus favorable à l'aide médicale à mourir. À mesure que les Canadiens sont sensibilisés à cet enjeu, ils ressentent plus d'empathie pour les personnes souffrantes. Seulement à Richmond Hill, le projet Parlement local montre que plus de 70 % des résidants de ma circonscription croient que les malades en phase terminale devraient avoir le droit de mettre fin à leurs jours avec l'aide d'un professionnel de la santé.
    D'après une analyse démographique réalisée par Statistique Canada en février 2016, les gens de 65 ans et plus représentent maintenant un segment record de la population. Ce groupe d'âge a gagné en importance depuis 50 ans, et sa croissance se poursuit. Comment faut-il en tenir compte dans notre travail de législateurs et de députés? Il faut, lorsque nous adoptons des mesures législatives, penser à l'avenir et prévoir des mécanismes destinés à régler les problèmes futurs.
    L'affaire Carter nous a déjà montré que les dispositions législatives actuelles sont désuètes, et la Cour suprême nous a demandé de les mettre à jour. Nous sommes confrontés à la date butoir du 6 juin. Assurons-nous d'être prêts à répondre à ce bouleversement démographique et aux besoins potentiels comme ceux qui font l'objet du projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui. Pour nous préparer à ce bouleversement, nous devons résoudre des problèmes importants dans le régime actuel.
    Selon des résultats de recherche présentés dans un article de la revue Palliative Medicine, le Canada doit moderniser son cadre législatif, financier et réglementaire en matière de services de soins palliatifs. Cela signifie que, une fois le projet de loi adopté, il faut continuer de mener des études et de rattraper le retard dans les services de soins palliatifs.
    L'assemblée publique à Richmond Hill m'a permis d'entendre l'avis de mes concitoyens à ce sujet. Ils se sont vidé le coeur en se confiant à moi. L'histoire la plus touchante provenait de personnes qui souffrent d'une maladie en phase terminale comme celle dont mon père était atteint. Elles ont parlé de l'importance de pouvoir présenter des demandes anticipées et de se pencher sur les problèmes de santé mentale et l'accès pour les mineurs matures. Je suis heureux d'apprendre que le gouvernement confiera à des organismes indépendants l'étude de ces questions. J'ai vu les membres des comités concernés travailler sans relâche afin que le projet de loi propose une approche raisonnable.
    C'est après avoir mûrement réfléchi à toutes ces questions que j'ai décidé d'appuyer le projet de loi C-14.
    Je reconnais que le gouvernement a déployé des efforts sincères relativement à ce projet de loi. À l'heure actuelle, les Canadiens ne peuvent pas choisir les conditions dans lesquelles ils quittent ce monde. Mon père s'est éteint dans mes bras. Il est mort en tentant de me dire quelque chose — je ne saurai jamais quoi. Il n'a pas choisi le moment où il m'a quitté ni les conditions de son départ.
    Ma déclaration d'appui envers le projet de loi C-14 envoie quatre messages. Dans mon âme et conscience, je sais qu'en prenant cette décision, j'ai fait de mon mieux pour prendre en considération les responsabilités inhérentes aux trois rôles que j'ai évoqués plus tôt. À mon père, je dirais que j'ai mis 10 ans à comprendre ce qu'il voulait me dire avant de mourir. Papa, je suis heureux d'accomplir ta volonté en appuyant ce projet de loi. Aux habitants de Richmond Hill, je peux assurer qu'ils ont été consultés et entendus et qu'ils sont bien représentés.
    À tous les Canadiens, je déclare que ce fut un parcours long et ardu. Un périple de mille milles commence par un premier pas. Pour entamer ce périple, il faut toutefois adopter le projet de loi. Unissons nos efforts pour faire ce premier pas.
(1600)
    Monsieur le Président, je félicite mon collègue de ce qui fut une intervention sentie. Je l'assure également de toute ma sympathie pour la perte de ses proches.
    Il y a un argument extrêmement trompeur qu'on a très souvent entendu des députés brandir, et c'est celui sur la proportion de Canadiens en faveur de l'euthanasie et du suicide assisté. Invariablement, les statistiques que nous assènent les libéraux portent sur les maladies en phase terminale. Or, le projet de loi n'a rien à voir avec les maladies en phase terminale.
    J'en reviens à la question de la liberté de conscience. Bon nombre de mes collègues libéraux se sont reportés au préambule du projet de loi, qui dit:
    [Attendu] que la présente loi n’a pas pour effet de porter atteinte à la garantie dont fait l’objet [la] liberté [de conscience et de religion];
    Voici maintenant ce que dit le nouveau paragraphe 241.2(9), qui se trouve à la page 8:
    Il est entendu que le présent article n’a pas pour effet d’obliger quiconque à fournir ou à aider à fournir l’aide médicale à mourir.
    Ces énoncés ont beau sonner joliment, ils ne garantissent en rien aux professionnels de la santé le droit de ne pas participer à un suicide assisté ou à l'euthanasie. Rien ne leur garantit le droit de ne pas diriger leurs patients vers un autre professionnel, mais surtout, absolument rien ne protège les établissements qui ont été mis sur pied par des bénévoles, où travaillent ces mêmes bénévoles et qui survivent grâce aux dons que leur font les Canadiens. Rien ne protège les maisons de soins palliatifs dont la raison d'être même consiste à aider les gens à vivre leurs derniers jours dans la sérénité.
    Pourquoi mon collègue refuse-t-il de faire le nécessaire pour qu'à tout le moins les médecins, les travailleurs et les professionnels de la santé ainsi que les établissements puissent objecter leur liberté de conscience pour refuser de prendre part à un acte qu'ils estiment moralement répréhensible?
(1605)
    Monsieur le Président, je rappelle que les mesures de sauvegarde prévues dans le projet de loi s'articulent autour de trois axes: les patients et les citoyens; les médecins et les infirmiers praticiens; et les associations médicales et les autres professionnels de la santé.
    Je rappelle en outre que nous collaborerons de près avec les provinces et les territoires afin que toutes les mesures de sauvegarde nécessaires soient en place et que les gens qui ont besoin d'aide soient protégés.
    Monsieur le Président, je remercie le député de son discours bien senti et de l'histoire très personnelle et émouvante qu'il a racontée à la Chambre. Je suis d'accord: son père aurait moins souffert si une telle mesure avait été en vigueur.
    Selon son expérience personnelle, le député pense-t-il que les Canadiens devraient avoir l'option de donner des directives anticipées?
    Monsieur le Président, j'estime que les Canadiens devraient pouvoir décider comment leur vie prendra fin. Mon père n'a malheureusement pas eu cette option. Lorsqu'il a appris qu'il en était à un stade avancé du cancer, nous avons consulté un médecin pour connaître nos options. Les options qu'on nous a données étaient vraiment très intéressantes. On nous a dit de prier si nous avions la foi ou bien, si nous avions l'esprit scientifique, d'espérer que mon père ferait partie des 5 % des cas semblables qui finissent par mourir d'une crise cardiaque. Quant aux 95 % restants, ils souffrent affreusement de défaillances d'organes. Quelles que soient nos croyances, nous nous estimons heureux que ce fût une crise cardiaque qui l'emporta.
    Un couple de Richmond Hill m'a abordé pour me raconter une histoire durant l'assemblée publique dans la région d'York. Le mari en était exactement au même stade du même cancer que mon père; nos histoires avaient une grande résonance mutuelle.
    Je crois que les Canadiens devraient avoir cette option. Mon père aurait beaucoup moins souffert s'il ne s'était pas retrouvé dans un état de détresse psychologique prolongée. Le gouvernement a annoncé qu'il nommera au moins un organisme indépendant pour étudier les demandes anticipées d'aide médicale à mourir. J'ai hâte de participer à ce processus de consultation, et j'invite tous les députés à y participer eux aussi. Comme je l'ai dit, il s'agit là d'un périple de mille milles, et ceci est le premier pas. Nous devons prendre ce premier pas, tout en maintenant notre engagement.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de partager son temps de parole avec moi. C'est une mince consolation, compte tenu de l'exclusion des membres de ma formation politique à ce comité qui avait été créé pour accoucher d'un projet de loi.
    Aujourd'hui, je suis obligé de dire qu'on assiste à une triste page de l'histoire de la démocratie « parlementaire » à Ottawa et à la Chambre des communes. Je dirais même que c'est le fruit d'un processus lamentable, tant sur le plan de la forme que du fond.
    On a souvent cité le Québec en exemple. J'ai suivi ce processus et j'y ai participé. C'était un processus visant la transpartisanerie, pas seulement dans les mots, pas seulement en spin de communication, mais dans les faits. Cette transpartisanerie avait pour but de créer le plus large consensus possible.
    Évidemment, il n'y avait pas l'arrêt Carter. Par conséquent, le gouvernement du Québec et les partis de l'opposition ont inscrit ce qui était une avancée par rapport au problème des soins de fin de vie. Ils ont donc inscrit l'aide médicale à mourir dans un continuum de soins de fin de vie, qui est d'ailleurs la responsabilité des provinces. Ils ont résolu ce qu'on mettait toujours dos à dos, à savoir, les soins palliatifs par rapport à l'euthanasie; et on a dit que maintenant, au Québec,on offrirait des soins de fin de vie. Évidemment, cela se passerait dans un encadrement de soins palliatifs, parce que les soins curatifs n'auraient plus leur raison d'être. Quand on est rendu en soins palliatifs, il n'y a plus de guérison possible.
    À ce moment-là, on a dit qu'il y aurait des soins palliatifs où, volontairement, quelqu'un peut mourir au bout de son processus de fin de vie, irrémédiable et déjà installé. Il est en phase terminale de vie. Ou encore, si un matin, parce que bien accompagné dans ses soins palliatifs, la personne est totalement sereine et prête à lâcher prise, ce n'est pas un échec des soins palliatifs. Cela pourrait être considéré comme ce qu'on peut souhaiter à tous les gens qui sont ici, à savoir, être sur son lit de mort, pleinement serein, prêt à lâcher prise et en paix avec soi-même. Les soins palliatifs peuvent aussi conduire là.
    C'est ce que le Québec a décidé de faire, mais il ne l'a pas fait comme le Parti libéral a choisi de le faire. En effet, les libéraux ont « bulldozé » les législateurs, et ce projet de loi a été contrôlé par l'exécutif de A à Z , avec l'alibi du 6 juin comme date butoir qu'on ne pouvait pas du tout contourner. Or présentement, on sait très bien qu'avec tous les écueils et les problèmes inhérents à ce projet de loi, il était impossible de respecter cette échéance.
    On aurait dû, avec l'assentiment de l'ensemble des parlementaires, se donner les moyens d'agir et trouver les moyens de faire les choses correctement plutôt que d'imposer des bâillons, alors qu'on sait très bien qu'on ne respectera pas le délai. Quand on nous dit que c'est très grave, je ferai remarquer que cela fait depuis 1988 que l'arrêt dans la cause Morgentaler a été invalidé et considéré inconstitutionnel, et à ce que sache, il apparaît encore au Code criminel, et ce n'est pas le désordre total en la matière.
    Alors, on pousse, mais on pousse égal. Sur le plan de la forme et du contenu, la question à laquelle on doit répondre à cette étape, c'est la prétention sans démonstration qu'à la ministre de prétendre que son projet de loi passe le test de la Charte.
     Quand il s'est agi de l'arrêt dans la cause Morgentaler, les juges ont invalidé la loi sur l'avortement à partir d'un seul des principes, un seul des droits affirmés à l'article 7 de la Charte: « Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne ».
(1610)
    Puisque les juges, dans l'arrêt dans l'affaire Carter, ont déterminé que trois droits ont été violés de manière déraisonnable, soit le droit à la liberté, le droit à la vie et le droit à la sécurité de sa personne, il suffirait qu'un seul de ces droits soit enfreint pour qu'il le soit de manière déraisonnable et pour que l'article 1 ne sauvegarde pas la loi de la ministre.
    Or j'ai posé la question à celle-ci à plusieurs reprises. Je lui ai demandé de me démontrer, par exemple, dans le cas d'un patient atteint d'une maladie ou d'un handicap grave et irrémédiable qui le fait souffrir de façon intolérable, en quoi le droit de ce dernier à la sécurité de sa personne n'est pas atteint, puisque selon le projet de loi du gouvernement, pour avoir accès à l'aide médicale à mourir, celui-ci devra soit aller devant les tribunaux, soit faire une grève de la faim pour se rapprocher du critère totalement lamentable, inhumain, flou et inconstitutionnel de la mort naturelle raisonnablement prévisible.
     Le gouvernement n'a jamais voulu accepter un seul des amendements un tant soit peu importants de la part de l'opposition. Il a amendé lui-même son projet de loi. Je n'ai jamais vu une attitude aussi méprisante à l'endroit du pouvoir législatif. Si c'est cela, la démocratie législative et les pouvoirs législatifs de la Chambre des communes, ça fait dur, surtout lorsqu'il s'agit d'un sujet aussi délicat que celui-ci.
     On a beau se vanter, mais si on était si sûr de notre coup, on avait encore le choix de renvoyer cela à la Cour suprême. C'est vrai que ce ne sont pas les juges de la Cour suprême qui doivent faire les lois. Toutefois, le Parlement n'a rien fait depuis 40 ans. À un moment donné, certains citoyens ont obtenu un jugement. La seule solution que l'on a préconisée, au cours des 40 dernières années, c'était celle des soins palliatifs, comme si cela répondait à tous les problèmes.
    Or l'arrêt dans l'affaire Carter ne doit pas seulement résoudre la question de la fin de vie, mais aussi celle du suicide assisté. Il y a des gens de l'autre côté de la Chambre qui ne font même pas la différence entre le suicide et le suicide assisté, qui est d'ailleurs décriminalisé. Ce ne sont pas les mêmes réalités. Le suicide, ce n'est pas irrémédiable, tant que la personne n'est pas passée à l'acte. Un état suicidaire, cela se corrige. Il y a des gens pour aider ces personnes, il y a la thérapie et la médication.
     Par contre, quand une personne est atteinte de la maladie d'Alzheimer, c'est irréversible. Si le gouvernement avait accepté de retirer ce critère, il aurait ainsi corrigé plusieurs lacunes de ce projet de loi. Notamment, cela aurait permis que toute demande soit préalable, c'est-à-dire de faire une demande avant d'en devenir incapable. Toutefois, le gouvernement n'en fait qu'à sa tête et s'en lave les mains.
     Le gouvernement démontre une lâcheté politique à l'endroit du rôle qu'il doit jouer à la Chambre. Ce n'est pas la démocratie des juges que l'on demande, mais plutôt une démocratie qui respecte le pouvoir législatif et la capacité des législateurs à définir les lois.
    Par ailleurs, arrêtons de banaliser les choses. Nous avons le devoir de faire des lois qui ont de l'allure. Les juges, en tant que gardiens des droits et libertés, ont le devoir de déterminer si elles sont conformes à la Charte et à la Constitution.
    Alors, arrêtons de prétendre que toute loi qui sortira d'ici sera nécessairement contestée et que les juges devront se prononcer. Ce qui est absolument inhumain, c'est que le fardeau de la contestation reposera sur les épaules des personnes vulnérables et des personnes qui souffrent.
(1615)
    C'est précisément ce que prétendait vouloir protéger la ministre, soit les personnes vulnérables et souffrantes.
    Monsieur le Président, franchement, c'est un peu décevant d'entendre un discours aussi partisan sur un enjeu comme celui-là. J'ai deux questions pour le député.
    Il a indiqué que le comité a rejeté tous les amendements sérieux et importants. Il sait bien que le comité a accepté l'un de ses amendements. N'était-ce pas un amendement sérieux ou important?
    Voici la deuxième question que je veux poser. Selon lui, le projet de loi est inconstitutionnel. Aujourd'hui, il y avait un article dans La Presse, qui a consulté quatre experts constitutionnels au Québec. Parmi ceux-ci, trois provenaient d'universités différentes et étaient d'avis que le projet de loi est constitutionnel.
    Reconnaît-il qu'il y a une diversité d'opinions parmi les experts constitutionnels? Accepte-t-il cela? Accepte-t-il que la Cour suprême a dit que c'est le Parlement qui doit agir et qui est le mieux placé pour le faire?
(1620)
    Monsieur le Président, si j'ai 10 minutes pour répondre, je vais répondre à chacune des questions.
    Le collègue confond la passion et la partisanerie. Mes propos vont bien au-delà de la partisanerie et, à cette étape-ci, je viens d'indiquer que ma formation politique ne donnera jamais son aval à un aussi mauvais projet de loi.
    Par ailleurs, il y a des constitutionnalistes qui, du haut de leur bureau, ne connaissent peut-être pas justement le terrain et la réalité pratico-pratique. À partir du moment où l'on a un critère aussi flou que la mort naturelle vraisemblablement prévisible, il faut savoir ce que cela veut dire dans l'opérationnalisation du terrain. Déjà au Québec, on disait que la loi était consensuelle et ne posait pas de problème. On commence à voir qu'il y a des disparités régionales et selon les institutions. Alors, je me méfie beaucoup des gens qui n'ont pas la connaissance du terrain pour une question aussi sérieuse et délicate.
     Cela dit, l'amendement dont vous parlez était accessoire, eu égard à celui qui consistait à biffer et à supprimer cette notion totalement toute croche, inadmissible et inconstitutionnelle de la mort naturelle vraisemblablement prévisible.
    J'aimerais rappeler au député de parler à la troisième personne par l'entremise du Président.
    L'honorable député de Kitchener—Conestoga a la parole pour des questions et commentaires.

[Traduction]