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42e LÉGISLATURE, 1re SESSION

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 046

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 2 mai 2016




Emblème de la Chambre des communes

Débats de la Chambre des communes

VOLUME 148
NUMÉRO 046
1re SESSION
42e LÉGISLATURE

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le lundi 2 mai 2016

Présidence de l'honorable Geoff Regan


    La séance est ouverte à 11 heures.

Prière



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Initiatives parlementaires]

(1105)

[Traduction]

Loi visant à protéger les femmes enceintes et leur enfant à naître (loi de Cassie et Molly)

    — Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi d'intervenir aujourd'hui en faveur de mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-225, Loi visant à protéger les femmes enceintes et leur enfant à naître, que j'appelle loi de Cassie et Molly.
    Ce qui m'a incitée à présenter ce projet de loi, c'est d'apprendre l'histoire très tragique de Cassie et Molly Kaake, de Windsor, en Ontario. Cassie était enceinte de sept mois de Molly lorsque, en décembre 2014, elle a été attaquée et tuée brutalement chez elle. Le père de Molly, Jeff Durham, travaille sans relâche pour qu'un peu de bien puisse ressortir de cette horrible tragédie.
    J'aimerais citer un extrait de la déclaration faite par Jeff Durham le jour où j'ai présenté ce projet de loi à la Chambre. Voici ce qu'il a dit:
    Il ne fait aucun doute dans mon esprit que ni Cassie ni une autre femme enceinte victime d'homicide ou de violence ne souhaiteraient qu'on ne tienne pas compte de leur choix, de leur bébé. Elles ne sont plus ici pour affirmer que cette mesure législative est nécessaire; toutefois, je me fais leur porte-parole pour dire à tous ceux qui ont une conscience et le pouvoir de faire quelque chose que ce projet de loi est bel et bien nécessaire.
    J'aimerais maintenant expliquer ce que le projet de loi C-225 permettrait de faire et, chose tout aussi importante, ce qu'il interdirait.
    Le projet de loi érigerait en infraction le fait de blesser un enfant à naître ou de causer sa mort en perpétrant ou en tentant de perpétrer une infraction criminelle contre une femme en sachant qu'elle est enceinte — par exemple, en agressant ou en tuant une femme enceinte. Ces infractions ne seraient pas des infractions indépendantes, en ce sens qu'elles ne s'appliqueraient, je le souligne, que lorsqu'une personne commettrait ou tenterait de commettre une infraction criminelle contre une femme enceinte. Il faudrait en outre que le délinquant sache que la femme contre laquelle il commet l'infraction est enceinte. Les nouvelles infractions sont désignées comme suit: « causer la mort d’un enfant à naître lors de la perpétration d'une infraction » et « blesser un enfant à naître lors de la perpétration d'une infraction ». 
    Cette mesure législative permettrait de porter deux accusations lorsqu'une attaque contre une femme enceinte entraîne la mort de son enfant à naître ou lui cause des lésions. La première accusation serait liée à l'infraction criminelle contre la femme et la seconde se rapporterait à l'une des deux nouvelles infractions créées par le projet de loi, soit causer la mort de l'enfant à naître ou lui infliger des blessures.
    Le projet de loi ajouterait aussi la grossesse à la liste des facteurs aggravants qui sont pris en compte pour la détermination de la peine. Même si les juges peuvent déjà considérer la grossesse comme un facteur aggravant, en inscrivant celle-ci dans les lois pénales, nous dénoncerions clairement et fermement la violence faite aux femmes enceintes. Nous avons consulté la jurisprudence en la matière, ce qui nous a permis de constater que, bien souvent, nous ne savons pas exactement dans quelle mesure la grossesse est prise en compte pour la détermination de la peine. Cette mesure législative enverrait un message fort aux tribunaux: la grossesse doit maintenant être prise en compte au moment de la détermination de la peine.
    La grossesse devrait être une période heureuse et excitante et l'occasion de bâtir une famille et une nouvelle génération. Malheureusement, la triste histoire de Cassie et Molly ainsi que le sort tragique que connaissent beaucoup trop de femmes canadiennes, simplement parce qu'elles ont fait le choix de mener leur grossesse à terme, nous rappellent que la sécurité des femmes est encore menacée.
    Selon le Système canadien de surveillance périnatale, les femmes violentées pendant leur grossesse sont quatre fois plus susceptibles que les autres femmes violentées d'être victimes d'actes de violence graves; par exemple, elles peuvent être battues, étranglées, menacées avec une arme à feu ou un couteau ou agressées sexuellement. La loi de Cassie et Molly aurait un fort effet dissuasif sur tous ceux qui seraient tentés de commettre un acte de violence envers une femme enceinte, car les peines imposées aux personnes qui causeraient intentionnellement la mort d'un enfant à naître seraient très sévères.
    Selon le droit pénal actuel, si une femme enceinte survit à une agression, mais que son enfant meurt, l'agresseur est seulement accusé de voies de fait graves envers la femme, une infraction passible d'une peine d'emprisonnement maximale de 14 ans. Conformément à la loi de Cassie et Molly, l'agresseur serait accusé non seulement d'avoir agressé la femme, mais aussi d'avoir causé la mort de son enfant à naître. Si l'intention de l'agresseur était de tuer l'enfant à naître, il serait passible d'une peine d'emprisonnement à perpétuité, et la peine minimale prévue serait de 10 ans. Il s'agit d'une peine beaucoup plus sévère que ce que l'agresseur recevrait s'il était accusé uniquement de voies de fait à l'égard de la femme.
    En outre, le juge disposerait du pouvoir discrétionnaire d'imposer des peines consécutives ou concurrentes. Par conséquent, dans les cas où la nouvelle loi serait appliquée, le juge pourrait imposer à l'agresseur de purger de façon consécutive une peine pour chaque infraction commise. Dans les cas les plus tragiques, la femme et son enfant à naître meurent, comme ce fut le cas de Cassie et Molly. Ce fut également le cas d'Olivia et de Lane fils. Dans ce dernier cas, l'agresseur a avoué que son intention avait été de tuer l'enfant et il a donc tiré trois balles dans l'abdomen d'Olivia, puis deux balles dans sa tête. Dans de tels cas, le juge pourra imposer deux peines d'emprisonnement à perpétuité et il pourra exiger que ces peines soient purgées de façon consécutive.
    Je tiens à être très claire quant à l'intention de ce projet de loi. Je veux éviter tout malentendu. La loi de Cassie et Molly vise à protéger les femmes enceintes et leur enfant à naître contre les actes de tierces parties pouvant leur vouloir du tort. Elle protégerait les femmes enceintes qui décident de mener leur grossesse à terme en toute sécurité.
(1110)
    Les juristes m'ont assuré que ce projet de loi ne peut, d'aucune façon, être utilisé pour influer sur le choix d'une femme de mettre fin à sa grossesse. L'avortement est, par définition, exclu du projet de loi parce qu'il est précisé clairement dans celui-ci que le fait de blesser un enfant à naître ou de causer sa mort constituera une infraction seulement si la personne le fait, et je cite le projet de loi, « en perpétrant ou en tentant de perpétrer une infraction prévue par la présente loi contre une personne du sexe féminin qu’elle sait enceinte ».
    Je veux insister sur le fait que ces nouvelles infractions, prévues dans la loi de Cassie et Molly, ne sont pas des infractions indépendantes. Elles s'appliquent uniquement à des situations où un tiers blesse ou tue l'enfant à naître d'une femme en perpétrant ou en tentant de perpétrer une infraction criminelle contre elle, évidemment sans son consentement.
    La mesure législative respecte et protège le droit d'une femme de choisir de donner naissance à son enfant sans risquer de se faire blesser par des tiers, contre son gré.
    Cassie avait choisi d'avoir Molly et se réjouissait tellement à l'idée de devenir sa mère. Comme le père de Molly, Jeff, l'a affirmé:
    Avant qu'elles soient tuées, Cassie était plus heureuse qu'elle ne l'avait jamais été. Elle était heureuse d'avoir choisi de donner naissance à sa fille. Tous les gens qui la connaissaient ne pouvaient s'empêcher de constater à quel point elle débordait d'enthousiasme et d'impatience.
    Comme l'indique clairement son titre, le projet de loi C-225 protégerait les femmes enceintes et leur enfant à naître. Notre système de santé offre déjà des protections considérables aux enfants à naître, alors pourquoi notre système de justice pénale ne ferait-il pas de même? Dans le domaine de la foetologie, les chirurgiens sont en mesure d'exécuter des opérations délicates tandis que le bébé est encore dans l'utérus, notamment pour traiter le spina bifida ou pour faire une intervention cardiaque qui sauve la vie de l'enfant à naître.
    Quand une femme enceinte est acheminée rapidement à l'hôpital après avoir subi des blessures graves dans un accident de la route, les médecins font tout en leur pouvoir pour sauver tant la vie de la mère que celle de l'enfant à naître. Même si la mère meurt tragiquement, les médecins n'abandonnent pas espoir de sauver la vie de son bébé. Personne ne remet en doute ces décisions stratégiques parce qu'elles sont logiques. Il est parfaitement sensé de sauver le bébé in utero qui tente de survivre après que sa mère a été blessée ou tuée dans un accident de la route.
    Toutefois, dans la maison d'en face, une autre femme enceinte se fait battre et reçoit des coups de pieds dans l'abdomen, ce qui entraîne la perte de son bébé. Ce qui n'a pas de sens, c'est que l'enfant de cette femme n'a aucune importance dans notre système judiciaire, comme ce fut le cas pour Molly et pour Lane fils. Notre système judiciaire dit que cela n'a pas d'importance que la vie de l'enfant à naître soit brutalement enlevée lorsque la mère est brutalement attaquée.
    Pourquoi, au moment où elles sont le plus vulnérables, les femmes ne bénéficient-elles pas de l'appui du système de justice pénale pour protéger ce qui leur est le plus précieux? Cette situation est tout simplement inadmissible et absolument illogique lorsqu'on la compare aux efforts et ressources que le système de soins de santé consent pour améliorer et sauver des vies avant la naissance.
    Personne ne soutient que pour protéger le droit à l'avortement, il ne faudrait pas faire de chirurgies pour sauver des enfants à naître. Les deux types d'intervention sont permis dans nos hôpitaux, à la demande de la femme qui porte l'enfant.
    Le système de justice pénale devrait aborder la question sous le même angle. Si le système de soins de santé permet que la pratique de l'avortement coexiste avec des chirurgies pour sauver la vie d'enfants non encore nés, on devrait également permettre que l'avortement légal coexiste avec une loi qui érige en acte criminel le fait de blesser ou de tuer un enfant à naître, contre le gré de la femme qui le porte. Ce serait faire preuve d'incohérence et de manque de compassion que d'agir autrement.
    J'aborde maintenant certaines préoccupations qu'ont exprimées les professionnels de la santé dans le passé. Si j'ai bien compris, plusieurs groupes de médecins ont dit craindre qu'une mesure législative similaire, en l'occurrence le projet de loi C-484, qui a été débattu au Parlement en 2008, criminalise les médecins qui pratiquent des avortements. Je tiens à assurer les médecins du Canada que j'ai attentivement examiné ces préoccupations lors de la rédaction de la loi de Cassie et Molly. Le projet de loi C-484 comportait une clause précisant explicitement qu'il était entendu que l'avortement consensuel était exclu de l'application de la loi. Quoi qu'il en soit, cette disposition préoccupait certains médecins qui craignaient d'être poursuivis en justice pour avoir pratiqué des avortements. La disposition dont je viens de parler n'était pas absolument nécessaire et n'a été incluse dans la loi que pour en préciser la portée.
    Comme la disposition en question n'a pas eu l'effet recherché, soit de préciser que la pratique de l'avortement ne serait pas criminalisée, et compte tenu de l'avis de mon rédacteur juridique, j'ai décidé de ne pas inclure cette disposition dans le projet de loi que je présente. Des experts juristes m'ont assurée que cette mesure législative ne peut servir à criminaliser des médecins qui effectuent des avortements. J'ai bon espoir que cette nouvelle approche dissipera les préoccupations que le projet de loi précédent a suscitées chez les médecins canadiens.
(1115)
    Le projet de loi ne nuit pas au travail des médecins parce qu'une personne pourrait être accusée de l'une des nouvelles infractions prévues dans le projet de loi seulement si elle perpètre ou tente de perpétrer une infraction contre une femme enceinte. Un médecin qui pratique un avortement sur une femme consentante ne perpètre pas d'infraction contre elle étant donné que l'avortement n'est plus une infraction au Code criminel canadien depuis 1988.
    Par conséquent, les nouvelles infractions ne s'appliqueraient pas dans un tel cas. Ce ne sont pas des infractions distinctes étant donné qu'une personne peut seulement les commettre en perpétrant ou en tentant de perpétrer une infraction contre une femme.
    Des juristes m'ont également assuré que l'on ne peut pas invoquer la loi de Cassie et Molly pour poursuivre en justice au Canada une femme enceinte qui cause un préjudice à son enfant à naître parce que, par définition, les nouvelles infractions s'appliquent seulement lorsqu'une personne pose sciemment un geste criminel contre une femme enceinte et blesse ou tue de ce fait l'enfant à naître. Autrement dit, le projet de loi vise exclusivement les tiers qui commettent volontairement un acte criminel à l'encontre d'une femme enceinte et qui, ce faisant, blessent ou tuent l'enfant à naître.
    Il faut surtout retenir que les tribunaux ne pourraient jamais invoquer le projet de loi C-225 comme précédent pour criminaliser le comportement d'une femme enceinte parce que le système canadien de justice pénale ne permet pas aux tribunaux de créer des infractions criminelles. C'est un pouvoir exclusif du Parlement. La loi de Cassie et Molly ne pourra absolument jamais être utilisée, ni aujourd'hui ni plus tard, pour criminaliser un comportement ou un manquement de la part d'une femme enceinte à l'égard de sa grossesse.
    Il faut aussi dissiper toute confusion en ce qui concerne le projet de loi et la manière dont le Code criminel définit l'« être humain ». Le projet de loi ne modifie pas la définition juridique d'« être humain » ni n'accorde le statut de personne au foetus, comme certains détracteurs le prétendent. Comme la définition inscrite dans le Code criminel exclut les enfants à naître, les infractions criminelles portant atteinte aux êtres humains, notamment le meurtre, l'homicide involontaire et les voies de fait, ne s'appliquent pas si l'enfant à naître est blessé ou tué lorsqu'une femme enceinte se fait agresser. Le projet de loi crée plutôt deux toutes nouvelles infractions qui s'appliqueraient dans des circonstances très précises, c'est-à-dire lorsqu'un enfant à naître est blessé ou tué pendant la perpétration d'une infraction contre sa mère, et ce, bien que les enfants à naître ne soient pas considérés comme des êtres humains en droit criminel canadien.
    Le droit criminel peut servir à protéger d'autres êtres que ceux qu'englobe la définition d'« être humain » du Code criminel. Par exemple, l'article 238 du Code criminel protège déjà l'enfant pendant sa « mise au monde ». Est ainsi coupable d’un acte criminel toute personne qui, au cours de la mise au monde, cause la mort d’un enfant qui n’est pas devenu un être humain selon la définition du Code criminel, de telle manière que, si l’enfant était un être humain, cette personne serait coupable de meurtre.
    Des lois pénales protègent les animaux contre la cruauté et interdisent de les tuer ou de les blesser de façon illicite. Le droit pénal contient également des mesures de protection contre la destruction de la propriété privée.
    Les familles sont le fondement de notre pays. Il manque au Code criminel un élément crucial pour protéger les Canadiennes et leur famille. Le renforcement des sanctions prévues dans la loi de Cassie et Molly crée un mécanisme juridique qui améliorera la sécurité des Canadiennes en tenant compte de l'importance de la sécurité de leur famille. Il s'agit d'une approche ciblée, robuste et sensée qui vise à combler une lacune dans le Code criminel, lacune qui rend vulnérables les femmes et leur enfant à naître.
    Je suis sincèrement convaincue que mes collègues veulent faire ce qui leur apparaît juste et compatissant. Ne fermons pas les yeux sur cette violation brutale du choix de Cassie de poursuivre sa grossesse. Ne fermons pas les yeux sur la mort de Molly.
    En tant que parlementaires, nous avons enfin l'occasion de faire quelque chose de bon à partir d'une horrible tragédie, qui n'est qu'un des multiples cas de ce genre.
    J'espère sincèrement que nous pourrons mettre la partisanerie de côté. Je demande à tous mes collègues d'écouter leur conscience. Je leur demande de tenir compte de ce que les Canadiens ordinaires savent instinctivement, à savoir qu'il est répréhensible de porter atteinte à la grossesse d'une femme et de causer contre son gré la mort de son enfant à être.
    À titre de législateurs, nous devons assumer notre responsabilité de protéger les innocents en nous appuyant sur un raisonnement solide, mais empreint de compassion et de bienveillance.
    Protégeons les femmes enceintes. Unissons nos efforts pour augmenter les chances qu'une femme enceinte puisse poursuivre sa grossesse, à l'abri de la violence. Protégeons l'enfant qu'il lui tarde d'accueillir au sein de sa famille.
    Le Code criminel est l'un des outils mis à la disposition des parlementaires fédéraux pour offrir cette protection des plus nécessaire. Nous sommes au XXIe siècle; il est temps d'agir.
     Protégeons les femmes enceintes et leur enfant à naître. Votons pour la loi de Cassie et Molly.
(1120)

[Français]

    Monsieur le Président, je félicite la députée pour son travail dans ce dossier, qui lui tient clairement à coeur. Elle ne trouvera personne ici qui ne pense pas que la vie est importante. Toutefois, il s'agit clairement d'un projet de loi qui vise à rouvrir le débat sur l'avortement. Des protections pour les mères existent déjà dans la loi. La grossesse est déjà une considération de notre système de justice dans le cadre de la détermination de la peine.
    Effectivement, ce projet de loi risque de réduire la totalité des peines, puisque celles-ci seraient simultanées au lieu de consécutives.
    Selon ma collègue, comment ce projet de loi changerait-il concrètement le comportement de ceux qui posent des gestes violents contre les femmes?

[Traduction]

    Manifestement, monsieur le Président, le député a préparé sa question avant mon allocution ou, possiblement, il ne m'a pas écoutée.
    La mesure législative est très claire. Elle ne modifierait d'aucune façon la définition d'« être humain ». Il n'est pas question de circonstances où une femme risquerait le moindrement d'être mise en accusation. On parle d'un tiers qui commettrait un acte criminel contre une femme, sachant qu'elle est enceinte, et qui blesserait ou tuerait l'enfant à naître.
    Il y a des femmes dans tout le pays à qui cette mesure législative s'appliquerait. Une femme, c'est une femme. Nous voulons mener nos grossesses à terme. Nous voulons avoir le droit de choisir d'avoir un enfant; nous voulons que cette mesure législative soit adoptée.
    Une jeune femme m'a écrit. Elle a fait une fausse couche, ce qui l'a profondément bouleversée. Elle est tombée de nouveau enceinte, mais elle n'était pas prête à fonder une famille; elle a donc choisi de se faire avorter. Maintenant qu'elle a des enfants, elle réclame cette mesure législative.
    Aujourd'hui, je ne parle pas seulement en mon nom, mais au nom des femmes de tout le pays. Nous devrions avoir depuis longtemps une telle mesure législative pour les protéger, de même que leurs enfants à naître.
    Monsieur le Président, au Canada, nous savons que la vaste majorité des femmes qui sont assassinées le sont par quelqu'un qu'elles connaissent. Neuf femmes sur dix sont tuées par une connaissance ou, pire encore, par leur mari ou leur partenaire intime.
    J'aimerais savoir ce que la députée pense de la nécessité pour le Canada de se doter d'une stratégie nationale sur la violence conjugale pour lutter contre la violence faite aux femmes. J'espère que l'on accordera une plus grande priorité à cette stratégie, puisqu'elle concerne la plupart des femmes et qu'elle aura une incidence considérable sur les femmes et leurs familles.
    Monsieur le Président, nous nous soucions de toute forme de violence contre les femmes, les hommes et les enfants, quelles qu'en soient les circonstances.
    La vérité, c'est que cela doit faire l'objet d'une loi particulière en raison de la vulnérabilité exacerbée des femmes qui veulent mener leur grossesse à terme et qui se retrouvent dans une situation comme celle de Cassie. Quelqu'un est entré chez elle alors qu'elle en était à son 7e mois et qu'elle était prête à accoucher. Elle a été attaquée d'une façon dont je ne veux même pas parler, mais l'agression était manifestement dirigée aussi vers l'enfant qui s'apprêtait à naître.
    Partout, il y a des situations où nous devons prendre position en tant que Canadiens et agir au nom des plus vulnérables. Dans le cas qui nous occupe, les femmes qui sont attaquées sont des femmes vulnérables qui veulent mener leur grossesse à terme. Cette loi doit être mise en place.
(1125)
    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour participer au débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-225, Loi modifiant le Code criminel pour ce qui est de blesser un enfant à naître ou causer sa mort lors de la perpétration d'une infraction.
    Je tiens d'abord à remercier la députée de Yorkton—Melville de la compassion et de la sincérité dont elle fait preuve en présentant le projet de loi. Je tiens également à lui faire savoir que j'ai écouté avec beaucoup d'attention son discours et que j'ai lu très minutieusement le projet de loi. J'ai aussi examiné des cas de jurisprudence et certaines questions dont a déjà été saisie la Chambre.
    Le projet de loi C-225 érigerait en une infraction distincte le fait de blesser un enfant à naître ou de causer sa mort lors de la perpétration d'une infraction contre la mère. Des réformes semblables, mais non identiques ont été présentées à la Chambre dans deux anciens projets de loi d'initiative parlementaire: le projet de loi C-484, Loi modifiant le Code criminel (blesser ou causer la mort d’un enfant non encore né au cours de la perpétration d’une infraction), et le projet de loi C-291, Loi modifiant le Code criminel (blesser un enfant avant ou pendant sa naissance ou causer sa mort au cours de la perpétration d'une infraction). Le projet de loi C-484 est mort au Feuilleton en 2008, et le projet de loi C-291 a été reconnu comme ne pouvant pas faire l'objet d'un vote, en 2006, parce qu'on a jugé qu'il ne respectait pas l'esprit de la Charte.
    Contrairement à ces projets de loi antérieurs, le projet de loi C-225 vise à inclure, dans les facteurs aggravants servant à déterminer la peine, la grossesse d'une femme contre laquelle une infraction est commise. Nous pouvons tous convenir qu'il est urgent de protéger les femmes contre la violence, notamment les femmes enceintes. D'ailleurs, j'ai passé une bonne partie de ma vie adulte à lutter contre les problèmes de violence conjugale et à m'efforcer de protéger nos concitoyens les plus vulnérables, en particulier les femmes et les femmes enceintes.
    Cependant, je crains que la plupart des dispositions du projet de loi C-225 ne nous soient pas utiles en fin de compte pour protéger les femmes contre la violence. Si nous voulons atteindre cet objectif, il nous faut protéger les femmes avant tout, et non le foetus. Mettre l'accent sur la protection du foetus risque d'avoir des conséquences néfastes et inattendues sur les femmes, en particulier sur leur droit à l'avortement. Je m'explique.
    Premièrement, si l'on veut protéger les femmes contre la violence, il faudrait probablement infliger des peines d'emprisonnement plus longues aux personnes coupables de cette violence. Or, imposer à un délinquant des peines distinctes pour deux infractions contre une femme enceinte, la première pour le mal fait au foetus et la deuxième pour le mal fait à sa mère n'aura vraisemblablement pas pour effet d'allonger la durée de l'emprisonnement. En effet, dans le cas où deux chefs d'accusation sont issus des mêmes faits ou des mêmes événements, le délinquant déclaré coupable purge généralement les deux peines simultanément. Autrement dit, il est peu probable qu'après l'ajout de ces circonstances aggravantes dans le Code criminel, le délinquant déclaré coupable de deux infractions purge une peine plus longue que s'il était coupable d'une seule.
    Deuxièmement, la loi protège déjà les femmes enceintes contre la violence. La jurisprudence fait de la grossesse un facteur aggravant lorsqu'une infraction est commise contre une femme enceinte, et le délinquant est alors sévèrement puni. Par exemple, en 2015, dans l'affaire R. c. Grandine, la Cour supérieure de justice de l'Ontario a imposé une peine de 15 ans d'emprisonnement à un délinquant ayant commis un homicide involontaire coupable sur la personne de sa femme, qui était enceinte de 20 semaines. Le juge s'est exprimé très précisément sur ce point: « [...] Je considère la grossesse de la défunte comme un facteur aggravant. »
    Le droit pénal contient déjà plusieurs dispositions sur les actes de violence contre les femmes enceintes.
    Le paragraphe 223(2) et l'article 238 du Code criminel prévoient une peine maximale d'emprisonnement à perpétuité pour toute personne qui, au cours de la mise au monde, cause la mort d’un enfant qui n’est pas devenu un être humain dans certaines circonstances. Le paragraphe 223(1) précise qu'un enfant devient un être humain lorsqu’il est complètement sorti, vivant, du sein de sa mère.
    Le Code criminel contient des dispositions détaillées sur les agressions et les homicides qui s'appliquent aux actes de violence envers les femmes enceintes, et la jurisprudence démontre que le fait de commettre une agression envers une femme enceinte constitue une circonstance aggravante aux fins de la détermination de la peine, et que cette infraction est sévèrement punie.
    Je sais que le projet de loi C-225 ne toucherait pas directement le droit des femmes au libre choix. Cependant, étant donné que les infractions proposées s'appliquent à un foetus, peu importe son stade de développement avant la naissance, elles pourraient s'appliquer à partir du moment de la conception et accorderaient ainsi au foetus un statut qui n'est pas actuellement reconnu dans la loi.
(1130)
    De plus, comme l'a souligné la députée de Yorkton—Melville, contrairement au projet de loi C-484, le projet de loi C-225 ne précise pas que les infractions proposées ne ciblent pas l'interruption légale de la grossesse, les personnes agissant de bonne foi qui prennent des mesures pour préserver la vie de la mère ou de l'enfant, ou un acte ou une omission de la part de la mère.
    Je crois que les réformes proposées dans le projet de loi posent un grave problème dans la mesure où elles touchent indirectement les droits des femmes. Les circonstances permettant de limiter le droit des femmes au libre choix ont été établies en 1988, dans l'arrêt Morgentaler de la Cour suprême du Canada, et nous savons depuis longtemps que toute forme de limite à l'accès à l'avortement doit respecter les droits de la femme garantis par l'article 7 de la Charte.
    La femme et son foetus sont indivisibles. Protéger la femme implique nécessairement de protéger son foetus. Il faut donc se concentrer sur la protection des femmes enceintes contre la violence qu'elles subissent. Or, ce n'est pas en apportant des modifications législatives qui pourraient limiter les droits de la femme garantis par l'article 7 de la Charte qu'on réglera le grave problème de la violence envers les femmes enceintes. La violence fondée sur le sexe est tout simplement inacceptable dans notre société.
    Le gouvernement libéral s'est engagé à mettre fin à toutes les formes de violence contre les femmes. Une stratégie fédérale et un plan d'action sur la violence basée sur le genre sont en cours d'élaboration. Ces mesures viseront, entre autres, à protéger davantage les victimes de violence familiale grâce à l'amélioration de la prévention, du soutien aux victimes et des interventions appropriées du système de justice. La meilleure façon de protéger les femmes enceintes, c'est d'aborder le problème sous l'angle de la violence faite aux femmes.
    Le système criminel prend déjà très au sérieux les sévices à l'endroit d'une femme enceinte. Les juges considèrent généralement qu'il s'agit d'un facteur aggravant pour la détermination de la peine. Peut-être aurait-il lieu de traiter ces cas plus clairement dans le Code criminel, mais je ne suis pas convaincu que le projet de loi C-225 soit la meilleure façon de procéder. En effet, il vise principalement à protéger le foetus en créant une infraction distincte pour ceux qui cherchent à lui faire du mal, et non à protéger les femmes enceintes en enchâssant dans la loi un principe souvent utilisé par les juges chargés de prononcer la peine.
    Le projet de loi C-225 poursuit des intentions louables. La compassion et la sincérité de la députée ne font aucun doute. Je doute toutefois, très respectueusement, que cette mesure puisse atteindre cet objectif crucial qu'est la protection des femmes enceintes. Je m'y opposerai donc, pour les raisons que voici.
     La loi criminelle accorde déjà beaucoup d'importance à la violence contre les femmes, y compris les femmes enceintes. De plus, le projet de loi ne fait rien pour régler, de façon plus générale, le problème de la violence contre les femmes. Je crois également qu'il risque d'être contesté en vertu de la Charte.
    Je remercie la marraine de cette mesure de l'avoir soumise à la Chambre. La violence contre les femmes est un crime terrible qui touche chacun d'entre nous et doit disparaître de notre société. Je joins ma voix à celle de la députée pour la condamner.
    Monsieur le Président, j'aimerais d'abord dire quelques mots aux personnes qui, j'en suis persuadé, suivent ce débat de près.
    À Jeff Durham, à ses amis, à sa famille et aux gens de Windsor, en Ontario, qui sont à ses côtés depuis décembre 2014, et à tous ceux qui ont perdu des êtres chers par suite d'actes de violence, j'aimerais dire que tous les parlementaires sont avec eux. Je ne peux imaginer l'intensité de leur douleur. Cependant, nous pouvons tous voir leur force et leur détermination à lutter pour faire en sorte que d'autres Canadiens n'aient pas à vivre la même chose.
    Je tiens à souligner l'allocution passionnée qu'a prononcée ma collègue de Yorkton—Melville. J'espère que tous les députés, quelle que soit leur position sur la mesure à l'étude, en profiteront pour se consacrer à nouveau à l'objectif, non seulement de réduire la violence à l'égard des femmes, mais aussi de l'enrayer.
    Permettez-moi de dire d'emblée que, bien que je comprenne l'important objectif du projet de loi et que j'y sois sensible, j'ai de sérieuses réserves quant aux répercussions juridiques de certaines des dispositions qu'il contient. Qu'elles soient intentionnelles ou fortuites, certaines des dispositions auraient des conséquences qui iraient bien au-delà du principe et de la portée du projet de loi. Après avoir examiné le document avec soin, nous avons décidé que ses lacunes sont si fondamentales et si potentiellement nuisibles qu'elles mineraient l'objectif même de la mesure législative. En conséquence, nous n'appuierons pas le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture.
    Pour la première fois, et en dépit des nombreux arrêts prononcés par la Cour suprême du Canada, le projet de loi viendrait distinguer le foetus de sa mère sur le plan juridique. Cette distinction raviverait immanquablement le débat sur les droits des femmes en matière de procréation, que les Canadiens ont clos de façon juste et définitive. Rappelons que depuis 1987, la question a fait l'objet de plus de 40 projets de loi ou motions à la Chambre.
    La députée de Yorkton—Melville affirme que le projet de loi ne rouvrirait pas le débat sur les droits génésiques des femmes et qu'il exclut explicitement l'avortement. Cependant, même si le projet de loi ne vise pas cet objectif, il reste que celui-ci préparerait le terrain pour une reprise du débat controversé sur les droits des femmes en matière de procréation.
    Si les députés ont l'impression de reconnaître les dispositions, c'est parce qu'elles correspondent presque mot pour mot à une mesure proposée dans le projet de loi C-484, la Loi sur les enfants non encore nés victimes d'actes criminels. La députée ne semble pas saisir que le fait d'inscrire le terme « enfant à naître » dans la loi aura des répercussions sur l'application de celle-ci. En voici la définition: « l’enfant — peu importe son stade de développement — qui n’est pas encore un être humain. »
    Premièrement, je fais remarquer qu'en vertu des dispositions actuelles les juges considèrent déjà comme un facteur aggravant le fait que la victime soit enceinte, et ce, malgré l'absence dans le Code criminel d'une obligation légale de le faire. Deuxièmement, je signale que l'assassin de Cassandra est passible de la peine la plus sévère au Canada depuis l'abolition de la peine capitale, nommément, une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle pendant au moins 25 ans. Troisièmement, les membres de la famille de la victime auront l'occasion de s'exprimer devant la cour au moyen d'une déclaration de la victime. Quatrièmement, même si une accusation supplémentaire était portée pour la mort du foetus, la peine encourue serait vraisemblablement purgée concurremment, en même temps que la peine à perpétuité pour le meurtre au premier degré de la mère, ce qui n'aurait pas pour effet de prolonger la peine totale à purger.
    Le projet de loi dont j'ai parlé plus tôt a été débattu en 2007. S'il n'a pas été adopté à l'époque, c'est en partie en réponse à l'opposition de plus de 100 organisations canadiennes dont beaucoup se consacrent entièrement à la lutte contre la violence à l'endroit des femmes et à la défense des droits de tous. Nous ne pouvons adopter un projet de loi vicié qui n'offre aucune aide aux personnes qu'il est censé protéger et qui risque même de nuire aux droits constitutionnels des femmes canadiennes.
(1135)
    En effet, selon l'expérience des administrations qui ont adopté de telles lois, notamment de nombreux États américains, ces lois n'ont pas réussi à réduire la violence contre les femmes et, malgré les bonnes intentions de leurs parrains, elles ont servi à poursuivre certaines mères.
    Que faut-il faire?
    La meilleure façon de protéger les foetus consiste bien sûr à protéger les mères, ce qui signifie protéger directement les femmes enceintes en leur offrant toutes les ressources nécessaires pour qu'elles mènent à bien leur grossesse et en assurant le respect de leurs droits constitutionnels. Ensuite, il faut adopter une approche holistique pour mettre fin à la violence contre les femmes en protégeant leurs droits constitutionnels et en prévenant la violence, notamment la violence entre partenaires intimes.
    Le gouvernement actuel a fait des promesses sur ce sujet pendant la dernière campagne électorale, notamment la modification du Code criminel pour s'attaquer à la violence entre partenaires intimes, celle-ci étant ajoutée à la liste des circonstances aggravantes pour la détermination de la peine; un investissement accru dans les refuges et les maisons de transition; une stratégie et un plan d'action fédéraux pour la lutte contre la violence fondée sur le sexe.
    Le NPD appuie ces objectifs et d'autres mesures, comme le rétablissement du Fonds de recrutement de policiers pour veiller à ce que les collectivités aient suffisamment d'agents de police pour protéger toutes les familles, mais aucune mesure n'a été prise pour mettre à jour le Code criminel. Les ressources des refuges et maisons de transition sont toujours nettement insuffisantes. De plus, il n'y a eu aucun progrès visible en ce qui a trait à l'élaboration et à la mise en oeuvre d'une stratégie et d'un plan d'action fédéraux exhaustifs en matière de violence fondée sur le sexe.
    Encore la semaine dernière, le Globe and Mail nous apprenait que la majorité des femmes et des enfants fuyant la violence et ayant besoin de trouver abri dans un refuge — 73 % pour être exact — devaient rebrousser chemin, faute de ressources, et que près de la moitié des refuges interrogés avaient accueilli des clients provenant d'autres provinces. Il s'agit d'un problème d'envergure nationale. Nous avons affaire à une crise qui s'étend de Victoria, d'où je viens, sur la côte Ouest, à l'ensemble du Canada et touche autant les petites villes que les grandes cités et les localités éloignées. Le gouvernement doit en faire plus afin que plus une seule Canadienne ne se fasse refuser l'aide dont elle a besoin pour échapper à la violence et aux mauvais traitements.
    Lors d'une précédente session, la députée de Churchill—Keewatinook Aski a proposé une motion tendant à la création d'un plan d'action visant à mettre un terme à la violence contre les femmes. Je salue d'ailleurs le travail de la députée de Nanaimo—Ladysmith, qui a repris le flambeau. C'est ce genre d'approche holistique qui nous permettra d'éradiquer la violence, y compris entre partenaires intimes, et de se rapprocher, socialement et économiquement, de l'égalité hommes-femmes.
    Le temps n'est pas au rapiéçage; il est plutôt à l'action et à l'audace, partout au pays. Hélas, le projet de loi dont la Chambre est présentement saisie n'est pas la solution que nous cherchons, sans compter qu'il n'est lui-même pas exempt de problèmes. Voilà pourquoi nous sommes incapables de recommander qu'il soit étudié plus avant.
    J'espère que tous les députés se joindront à nous et talonneront le gouvernement afin qu'il tienne ses promesses électorales, s'attaque à la violence entre partenaires intimes, finance les refuges du pays, voie à la sécurité publique et propose lui aussi des moyens de tout faire pour débarrasser le Canada de la violence contre les femmes.
(1140)
    Monsieur le Président, c’est un privilège de prendre la parole aujourd’hui à l’appui du projet de loi C-225. D’entrée de jeu, j’aimerais féliciter ma collègue, la députée de Yorkton—Melville, d’avoir présenté cet important et fort nécessaire projet de loi qui vise à protéger les femmes et à combler un vide juridique flagrant dans le Code criminel.
    Cette loi est judicieusement nommée à la mémoire de Cassie Durham et de sa fille à naître Molly. Dix semaines avant de donner naissance à Molly, Cassie a été sordidement assassinée. Son meurtrier a évidemment été inculpé de meurtre au premier degré. En revanche, quelles accusations auraient pu être portées contre lui pour avoir ciblé une femme enceinte et interrompu une grossesse qui se déroulait parfaitement, contre la volonté de Cassie? La réponse est qu’aucune accusation n’a été portée, parce qu’aucune accusation ne peut être portée en vertu du Code criminel dans ces circonstances.
     En 2005, Olivia Talbot était enceinte de son fils, Lane Jr. À l’instar de Cassie Durham, Olivia Talbot a été violemment assassinée. Son meurtrier lui a tiré trois balles et, de son propre aveu, il visait surtout Lane Jr. Pourtant, aucune accusation n’a pu être portée contre lui pour ces crimes.
    Les familles des victimes, celle d’Olivia Talbot, celle de Cassie Durham et bien d’autres, se demandent où est la justice. Où est la justice, si le Code criminel ne contient aucune disposition permettant de tenir les criminels qui ciblent des femmes enceintes responsables de leurs actes? Où est la justice, si le Code criminel ne contient aucune disposition permettant de tenir les criminels qui mettent violemment fin à la grossesse d’une femme contre sa volonté responsables de leurs actes? La réponse à donner à ces familles qui se demandent « Où est la justice? », c’est qu’il n’y a pas de justice.
     Les histoires de Cassie Durham et d’Olivia Talbot ne sont pas des exceptions. Au cours des 15 dernières années, quelque 24 cas d’agression ou de meurtre contre des femmes enceintes ont été signalés.
    Certains prétendent que cette loi est inutile. Pour eux, il suffirait de disposer que le fait de cibler une femme enceinte peut être un facteur aggravant aux fins de détermination de la peine. La common law considère déjà la grossesse comme un facteur aggravant. Le projet de loi C-225 codifierait la common law, ce qui est un pas dans la bonne direction. Par ailleurs, pour que justice soit réellement rendue, il n’est pas suffisant d’ajouter la grossesse à la liste des facteurs aggravants aux fins de détermination de la peine.
     Un élément important de notre système de justice pénale veut que les criminels soient tenus responsables de tous les crimes qu’ils commettent contre leurs victimes et non seulement d’une partie des crimes. Dans les cas de Cassie Durham et d’Olivia Talbot, il est clair que les meurtriers ont été accusés et tenus responsables de certains de leurs crimes, mais pas de tous. C’est une injustice.
(1145)
     En ce qui concerne la détermination de la peine, prenons l’exemple d’un individu qui cible sciemment une femme enceinte, l’agresse et, dans le cours de cette agression, met fin à la grossesse de cette femme. Qu’arriverait-il à cet individu si le fait de cibler une femme enceinte constituait seulement un facteur aggravant? Il serait probablement accusé de voies de fait graves. La peine maximale pour voies de fait grave étant de 14 ans, il est fort probable qu’en présence d’un facteur aggravant, l’auteur de cette agression serait condamné à purger une peine se rapprochant davantage de 14 ans que plus courte, ce qui est une bonne chose.
    Regardons la réalité en face: ce qui se serait réellement passé dans cette situation, c’est bien plus que des voies de fait graves. La grossesse de cette femme aurait été interrompue contre son gré, son intégrité physique aurait été bafouée et son libre choix en tant que femme, violé.
     Le projet de loi C-225 reconnaît cette réalité et veut donner aux juges les outils nécessaires pour sanctionner fermement ceux qui commettent ce genre de crime, en leur donnant la possibilité de retirer ce type de criminel de la circulation pendant beaucoup plus que 14 ans.
    Certains voient dans ce projet de loi — et nous avons entendu aujourd’hui plusieurs députés l’affirmer — une relance du débat sur l’avortement. Le fait est qu’au Canada, l’avortement est possible et légal pendant les neuf mois de la grossesse et que le projet de loi C-225 ne cherche absolument pas à changer ce fait.
     Non seulement le projet de loi C-225 ne fait rien pour changer l’état des choses en matière d’avortement, il prévoit expressément qu’un enfant à naître n’est pas un être humain selon la loi, et cela afin de ne laisser planer aucune confusion ou ambiguïté. Le projet de loi C-225 n’a absolument rien à voir avec l’avortement.
    Ce avec quoi le projet de loi C-225 a beaucoup à voir, cependant, c’est la justice. La justice pour les femmes ciblées parce qu’elles sont enceintes, la justice pour les femmes blessées parce qu’elles sont enceintes, la justice pour les femmes dont les droits sont violés. Cette justice réclame que les responsables de ces viols des droits des femmes soient tenus responsables dans la pleine mesure où la loi le permet.
     En tant que Chambre des communes, faisons ce qui est bon, équitable et juste. Éliminons cette échappatoire, cette lacune flagrante du Code criminel, par l’adoption du projet de loi C-225.
(1150)
    Monsieur le Président, je tiens beaucoup à parler de ce projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-225 modifiant le Code criminel à l’égard des blessures ou de la mort infligées à un enfant à naître pendant la commission d’une infraction, à l’étape de la deuxième lecture.
    La marraine du projet de loi l’a présenté à la suite du meurtre de Cassandra Kaake, enceinte de sept mois d’une fillette qu’elle souhaitait appeler Molly.
     Premièrement, je voudrais offrir mes plus sincères condoléances à la famille de Mme Kaake. Une perte aussi tragique doit causer la plus profonde des souffrances.
     Malheureusement, les statistiques révèlent que les femmes enceintes sont souvent victimes d’actes de violence. Selon l’Enquête sociale générale de 2009 de Statistique Canada, 11 % des femmes victimes de violence conjugale étaient enceintes lors de la perpétration de l’acte de violence, ce qui revient à dire qu’environ 63 000 femmes enceintes ont été victimes de crimes violents commis par leur conjoint entre 2003 et 2008.
     Les données des rapports de police tirées de l’Enquête sur les homicides indiquent également que la grossesse n’est pas un facteur protecteur dans les cas d’homicides commis par un partenaire intime. Entre 2005 — année pour laquelle nous disposons des premières données sur les victimes d’homicide et la grossesse — et 2010, 12 victimes d’homicide commis par leur partenaire étaient enceintes au moment du décès.
     Toutefois, comme le montre le cas de Mme Kaake, les auteurs d’homicides pendant une grossesse ne sont pas uniquement des partenaires intimes, car huit femmes enceintes ont été tuées par quelqu’un d’autre que leur partenaire intime — une donnée tirée du rapport intitulé « La violence familiale au Canada: Un profil statistique, 2010 », publié dans la revue Juristat de Statistique Canada. Ces chiffres ne manquent pas de nous inquiéter.
    Le projet de loi C-225 a pour objet de protéger les femmes enceintes et leurs fœtus en érigeant en infraction le fait de blesser un fœtus ou de causer sa mort. Les peines varient selon l’état de santé mentale de l’accusé, mais vont de 18 mois d’emprisonnement à la prison à perpétuité; et si l’accusé avait l’intention de causer des blessures ou de commettre un meurtre, une peine obligatoire minimale de 10 ans serait imposée.
     Parmi les autres éléments du projet de loi, je mentionne la non-application de la peine minimale si l’accusé a été provoqué, au sens de la défense de provocation prévue à l’article 232 du Code criminel, et la codification de la violence faite à une femme enceinte comme circonstance aggravante au moment de la détermination de la peine.
     Bien que j’appuie les objectifs du projet de loi, j’ai quelques réserves face aux réformes proposées.
     Premièrement, il me semble illogique que le même geste constitue à la fois une circonstance aggravante aux fins de la détermination de la peine et l’objet d’une peine distincte. C’est soit l’un, soit l’autre. Les juges chargés de déterminer la peine tiennent déjà compte de la violence faite à une femme enceinte comme facteur aggravant, ce qui entraîne des peines plus lourdes pour les délinquants.
     Je crains en particulier que si le préjudice causé au fœtus devient une infraction distincte, cela ne résulte en une peine d’emprisonnement plus courte. En effet, les peines pour le préjudice causé à la mère et celui causé au fœtus seront sans doute purgées concurremment, car elles découlent nécessairement du même incident.
     À l’opposé, si un délinquant est accusé d’une infraction contre la mère et que la grossesse de celle-ci est considérée comme une circonstance aggravante, la peine sera probablement plus longue que les peines purgées concurremment pour deux infractions distinctes. L’imposition de peines plus brèves que ce que la loi prévoit actuellement n’est certainement pas le but visé par le projet de loi, puisque les femmes enceintes seraient alors moins bien protégées.
     Je m’interroge aussi sur les peines minimales obligatoires prévues dans le projet de loi. À l’exception de la peine minimale pour meurtre, une peine de 10 ans serait la plus longue peine minimale obligatoire inscrite au Code criminel.
     Nous connaissons tous l’arrêt Nur, que la Cour suprême du Canada a prononcé en 2015 et qui invalidait la peine minimale obligatoire de trois ans pour la criminalité mettant en jeu des armes à feu. Récemment, la Cour suprême du Canada, dans l’affaire Lloyd, a invalidé la peine minimale obligatoire d'un an pour trafic de stupéfiants faisant intervenir des récidivistes.
     De fait, nous avons assisté à une prolifération des causes remettant en question les peines minimales plus longues et les peines minimales obligatoires applicables à tout un éventail de gestes nécessitant un examen plus approfondi.
     Je me demande si une peine minimale obligatoire constitue la meilleure façon de lutter contre le problème grave de préjudice à une femme enceinte, surtout quand les juges tiennent déjà compte de la gravité du geste au moment de déterminer la peine du délinquant.
     Par ailleurs, le projet de loi fait mention de la défense de provocation. En temps normal, cette défense ramène l’accusation de meurtre à une accusation d’homicide involontaire coupable lorsque la victime a provoqué l’accusé et l’a incité à la tuer, afin que le juge ait plus de latitude pour déterminer la peine. Le projet de loi propose toutefois d’accepter cette défense pour une infraction qui ne constitue pas un meurtre.
     De toute évidence, un fœtus — la victime de l’infraction proposée — ne peut pas provoquer quelqu’un; la réforme proposée doit donc viser à éliminer l’application de la peine minimale obligatoire de 10 ans lorsque la mère du fœtus a provoqué le geste de l’accusé.
     Parce qu’il érige en nouvelle infraction le fait de blesser le fœtus, le projet de loi traite le fœtus comme une victime distincte de la mère. Toutefois, en évoquant la défense de provocation, il se trouve à restreindre la protection accordée au fœtus en raison de la conduite de sa mère. Une telle approche paraît contradictoire.
     En outre, la défense de provocation ne s’est toujours appliquée qu’aux affaires de meurtre. En l’élargissant à d’autres infractions, on risque de créer un malheureux précédent, surtout lorsque cette défense est utilisée par des hommes qui ont tué leur conjointe actuelle ou ancienne, après avoir allégué qu’elle les avait provoqués par une conduite qui leur a semblé insultante. Même si la portée de cette défense a été récemment limitée, elle pourrait encore soulever certains de ces problèmes.
(1155)
     Ma principale objection vient toutefois de ce que le projet de loi traite le fœtus comme une entité distincte de la mère, alors qu’en fait les deux sont indissociables. Cela soulève de multiples problèmes juridiques, dont celui que j’ai décrit précédemment au sujet de la défense de provocation. De plus, le fait de créer une infraction distincte pour le tort causé au fœtus donne à celui-ci un statut que ne reconnaît pas la loi actuelle et nous distrait du véritable problème: la violence envers les femmes enceintes.
     Le principe juridique bien établi voulant que le fœtus ne possède pas de droits indépendants de ceux de la mère avant d’être né vivant exige de la loi qu’elle mette l’accent sur ce problème bien réel et urgent. Ce principe est également la base du droit des femmes de choisir.
    Depuis que la Cour suprême du Canada a invalidé la disposition du Code criminel concernant l’avortement, en 1988, les services d’interruption de grossesse relèvent du secteur de la santé, parce que la Cour suprême du Canada a conclu que de restreindre le choix des femmes violait les droits consacrés par l’article 7 de la Charte. Je ne voudrais pas que nous adoptions des lois ou des politiques susceptibles d’éroder ces droits de quelque manière que ce soit.
    Même si le projet de loi C-225 ne porte pas directement sur le droit des femmes de choisir, ses dispositions donneraient au fœtus un statut juridique distinct de celui de la mère, malgré le fait qu’en réalité, les deux sont indissociables. Selon moi, le meilleur moyen de protéger le fœtus est de protéger la mère, et c’est ce que fait déjà la loi actuelle.
     Je me réjouis que le gouvernement se soit engagé à renforcer l’approche du Canada relativement à la question principale qui nous occupe ici, soit la violence envers les femmes, y compris les femmes enceintes. J’attends avec impatience les résultats de l’examen du système de justice pénale que mènera le gouvernement ainsi que la mise en œuvre de la stratégie et du plan d’action fédéral sur la violence basée sur le genre, qui devraient mieux appuyer et protéger les femmes victimes de violence.
    Le projet de loi C-225 fait état de nombreuses préoccupations, mais je ne puis l’appuyer en raison de ses effets concrets au-delà de son objet immédiat. Je tiens à remercier la députée qui parraine ce projet de loi de m’avoir donné l’occasion d'intervenir aujourd’hui et de discuter de l’importante question de la sécurité et du bien-être des femmes. Ce sont de graves questions que nous devons examiner et analyser en permanence.
    Monsieur le Président, je voudrais pour commencer évoquer le drame qui est à l’origine du projet de loi proposé ici. Nous sommes de tout cœur avec Jeff Durham, sa famille et sa collectivité qui ont été frappés par une terrible épreuve.
    Malgré les bonnes intentions qui sont à son origine, le projet de loi a pour conséquence non recherchée de rouvrir le débat sur l’avortement au Canada, et les néo-démocrates refusent de courir le risque de remettre en cause les droits des femmes au libre choix. Il y a au Canada 36 groupes pro-choix — si j’avais le temps, j'en lirais la très longue liste — qui s’opposent à l’adoption du projet de loi, le décrivant comme un empiétement sur le droit constitutionnel des femmes au libre choix.
     Je dirai que, pour assurer la sécurité du plus grand nombre de femmes et d’enfants, le Canada a besoin d’une loi de portée beaucoup plus large. La meilleure façon de les protéger est d’agir contre violence conjugale. Cassie a été tuée par un parfait étranger, ce qui constitue une exception. En effet, neuf femmes victimes sur dix sont tuées par une personne qu’elles connaissent. Par conséquent, pour avoir le plus d’impact, efforçons-nous de prévenir le meurtre de femmes par leurs partenaires ou une autre personne qu’elles connaissent.
     Premièrement, le Canada a besoin d’un plan national visant à mettre un terme à la violence envers les femmes. La plupart des autres pays occidentaux sont dotés d’un plan de cette nature. Le Canada prend du retard. Au cours des dernières sessions du Parlement, les néo-démocrates se sont faits les champions de cette cause. Les ONG et les organisations syndicales ont élaboré un plan très solide qui indique la voie à suivre. Nous exhortons le gouvernement à agir rapidement dans ce dossier, et nous l’appuierons.
     Deuxièmement, le Canada doit injecter davantage de fonds dans les refuges pour les victimes de violence conjugale. Imaginez qu’une femme décide de partir avec ses enfants, de quitter un mariage ou une relation marqués par la violence et qu’elle se fasse répondre, lorsqu’elle arrive au refuge, qu’il n’y a pas de place pour elle. Voilà ce que révèle le sondage « Les maisons s’expriment » publié la semaine dernière. Près du trois quarts des femmes essuient un refus parce que la capacité de ces établissements est insuffisante. S’il existait un financement stable, prévisible et pluriannuel tant pour la construction que pour le fonctionnement de ces maisons, nous pourrions éviter que des femmes ne se résignent à rester dans un foyer où sévit la violence.
     Étant donné les mesures énergiques que le Parlement peut prendre pour assurer vraiment la sécurité des femmes et de leurs enfants sans menacer par mégarde le droit constitutionnel de la liberté de choix pour les femmes, je n'appuierai pas le projet de loi, et j’exhorte les parlementaires à travailler de concert à des mesures qui seront vraiment déterminantes au quotidien pour la sécurité des femmes.
(1200)
    Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir parler de la question très importante qui est à l’étude et de pouvoir dissiper une certaine confusion qui existe de l’autre côté de la Chambre. Les députés d’en face s’efforcent constamment d’associer un très important enjeu de justice pénale — comme le député de St. Albert—Edmonton et la députée qui a parrainé le projet de loi l’ont fort bien dit — avec toute autre chose, c’est-à-dire la question de l’avortement, laquelle, nous le savons, est un enjeu très litigieux et difficile dans notre pays.
    Nous devrions pouvoir tenir un débat rationnel sur des questions qui sont différentes, sans lien avec l’avortement, et qui concernent tout de même la justice et la prévention de la violence envers les femmes. Il importe que nous fassions ces distinctions, car sur ce plan, il y a deux questions bien séparées dont nous pouvons discuter. Il y a la question des droits fondamentaux des personnes, dans ce cas-ci les enfants à naître, et celle de savoir si les droits de la mère l’emportent sur ceux de l’enfant à naître. Ce qui échappe peut-être à d’autres députés, c’est le fait qu’il s’agit là de questions très clairement distinctes.
    On peut conclure que les enfants à naître ne devraient avoir aucun droit, qu’ils ne devraient pas être reconnus comme des personnes, mais on peut aussi conclure qu’ils ont une authentique humanité, même si on conclut par ailleurs que les droits de la mère doivent l’emporter ceux de l’enfant à naître, dans ce cas-ci.
     Les députés d’en face n’ont pas saisi l’importance du fait qu’il s’agit vraiment de deux questions distinctes. Ils ont plutôt déduit du fait qu’une conclusion de principe peut être tirée dans le cas des enfants à naître que nous ne pouvons pas nous engager dans cette voie parce que cela pourrait avoir des conséquences pour quelque chose d’autre par la suite.
     Les députés de ce côté-ci qui se sont exprimés ont été très clairs sur ce point, car ils ont insisté sur le fait que nous débattons ici d’une question particulière, celle de la lutte contre la violence faite aux femmes, et ils ont aussi reconnu qu’il y avait une perte de vie en cause, et qu’il y a également une perte de choix pour la femme.
     Il est un peu décevant que des députés d’autres partis veuillent ranimer des débats sur des questions délicates, alors qu’il devrait s’agir ici d’une question qui suscite le consensus. Je ne crois pas que quelque député que ce soit rejette le principe fondamental voulant qu’un enfant à naître soit en un certain sens un être humain et qu’il puisse être reconnu comme tel sans qu’il soit nécessaire d'aborder une question relative aux droits des femmes bien séparée, distincte sur le plan des principes.
     Le fait qu’on ne reconnaisse pas qu’il y a là deux questions distinctes pose problème. Et soyons clairs: c’est un problème qui a de vraies conséquences d’ordre pratique, des conséquences très réelles. Ces conséquences ont été bien décrites non seulement par mes collègues, mais aussi par des députés d’autres partis qui comprennent le problème de la violence faite aux femmes, qui comprennent qu’il est urgent de la combattre, de surmonter des idées bien ancrées, peut-être à caractère culturel, qui n’ont pas permis d’aborder cette réalité correctement par le passé. Il devrait y avoir consensus. Je ne demande pas mieux que de travailler à ce dossier avec des députés de tous les partis.
     Avant de me faire élire, j’ai siégé au conseil de Saffron, une organisation de ma circonscription qui lutte contre l’intimidation et la violence dont les femmes sont victimes et contre la violence sexuelle. Il est très réconfortant de constater que, dans ma ville et dans d’autres collectivités, il émerge à cet égard un consensus qui transcende les partis et les idéologies politiques diverses.
     Les propos de certains autres députés sont décevants parce que, si nous n’adoptons pas le projet de loi, nous aurons laissé passer une excellente occasion d’agir, de faire quelque chose de bien, de prendre une mesure déterminante pour les familles victimisées et celles qui risquent de l’être un jour. Nous aurons laissé passer cette occasion parce que, au lieu de nous attaquer directement à un enjeu important de manière concrète et efficace… Les députés ont toute liberté de proposer des amendements sur des détails précis qui ont été relevés à l’étape du comité. Mais si nous rejetons carrément le projet de loi, nous aurons renoncé à la possibilité d’exercer une action déterminante et constructive au sujet d’un enjeu dont nous devrions tous reconnaître la grande importance.
(1205)
    L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée, et l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

Le Code criminel

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 22 avril, de la motion portant que le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Monsieur le Président, ce projet de loi ne contient aucune mesure de protection concrète. Même les exemptions qu'il prévoit sont pleines de failles. La disposition relative au consentement écrit exclut les personnes qui ne peuvent pas signer. Il serait possible de renoncer régulièrement à la période d'attente. La maladie mentale ne serait pas exclue. L'exigence voulant que la mort soit raisonnablement prévisible n'exclurait personne, et le critère exigeant la signature de deux médecins inviterait simplement à choisir soigneusement son médecin. Même si elle ne se conformait pas aux critères déjà ambigus, une personne qui tuerait un patient contre son gré pourrait s'en tirer en prétendant qu'elle croyait raisonnablement, mais à tort, que les critères s'appliquaient.
    De toute évidence, les critères sont totalement ambigus et, compte tenu de la disposition relative à la croyance raisonnable mais erronée, il serait pratiquement impossible de poursuivre une personne qui tue un patient, et ce, même sans le consentement de ce dernier.
    Aujourd'hui, j'aimerais faire valoir trois points supplémentaires, soit l'altération du langage moral, la nécessité de procéder à un examen préalable et le fait que l'absence de mesures de protection pour les cas de conscience nuit encore plus à un système déjà inadéquat de soins palliatifs.
    Le débat sur cette question est marqué par une altération du langage. Des termes comme « suicide », « euthanasie » et « meurtre » sont rejetés et remplacés par des expressions fondamentalement inexactes comme « aide médicale à mourir ». Tous les jours, des médecins aident des patients à mourir sans les tuer.
    Par surcroît, l'utilisation des termes « dignité » et « compassion » comme euphémismes montre que le projet de loi vide la langue de son sens. Qui plus est, l'expression « mourir dans la dignité » laisse entendre que les personnes qui souffrent ou qui sont handicapées n'ont pas de dignité. Voilà qui reflète une perception fort inquiétante du monde. Il est établi depuis longtemps que la notion de dignité est immuable et qu'il s'agit d'une caractéristique intrinsèque de l'être humain. C'est la dignité humaine immuable qui incite à abattre un chien qui souffre mais non un être humain qui souffre.
    C'est la dignité universelle et immuable unique à l'homme qui sous-tend notre conception des droits de la personne. Or, cette caractéristique unique à l'homme, qui est un droit universel et immuable, constitue ostensiblement le fondement moral du projet de loi dont nous sommes saisis. Ceux qui souhaitent redéfinir si radicalement la notion de dignité devraient au moins nous donner leur définition.
    J'ai suggéré au gouvernement d'amender le projet de loi pour y inclure un système d'examen préalable par les autorités juridiques compétentes. Cet examen pourrait prendre diverses formes. La loi pourrait prévoir un examen par un comité provincial de vérification et d'évaluation de la capacité des patients ou exiger un examen obligatoire par un juge. Elle pourrait simplement exiger que les provinces mettent sur pied leur propre système d'examen juridique préalable ou qu'on retienne les services d'un avocat indépendant à titre de témoin.
    Les options sont multiples; certaines sont meilleures que d'autres. Les critères n'ont pas grande valeur si une autorité juridique compétente ne s'assure pas à l'avance que les critères d'ordre juridique sont respectés.
    Or, le gouvernement veut forcer les médecins à assumer ce rôle, mais les médecins ne sont pas une autorité juridique compétente. Ils ne prennent pas ce type de décisions dans d'autres sphères de leur travail, d'autant plus que donner la mort va à l'opposé de l'objectif des procédures médicales normales, qui visent à protéger la vie. Par ailleurs, le projet de loi permet aux gens de choisir leur médecin, mais cela ne signifie pas que le médecin traitant précédent réaliserait un examen préalable, étant donné que le patient ou, pire encore, une autre personne pourrait tout simplement faire une recherche en ligne pour trouver un médecin qui a une interprétation plus libérale des critères.
    Un simple système d'examen juridique préalable par une autorité compétente éliminerait la recherche d'un médecin et permettrait d'atteindre l'objectif central. Cela permettrait de nous assurer que les gens qui n'y ont pas consenti ou qui ne répondent pas aux critères ne sont pas tués, sans avoir des moyens efficaces d'enquêter sur ces cas après les faits. Des données des pays du Benelux montrent des taux élevés et alarmants d'euthanasie de patients qui n'y avaient pas consenti. Toutefois, les poursuites contre ceux qui tuent des patients sans leur consentement dans un cadre médical sont pratiquement inexistantes.
    Enfin, l'absence de disposition protégeant la liberté de conscience fait en sorte que les gens seront écartés des soins palliatifs, auxquels ils sont déjà trop peu nombreux à avoir accès. La Dre Nancy Naylor, médecin de famille et en soins palliatifs depuis 40 ans, abandonne la profession, expliquant que ce n'est pas parce qu'elle ne désire plus l'exercer, mais parce qu'elle ne veut pas qu'on l'oblige à agir contre sa conscience. Elle prend la parole parce que ses patients, qui n'auront plus accès aux soins palliatifs, ne le peuvent pas. À quoi bon une mesure législative qui ne protège pas la liberté de conscience si elle a pour effet de faire quitter la profession à des médecins en soins palliatifs fidèles à leurs principes au moment où on a le plus besoin d'eux?
    De nombreux médecins affirment que l'aide médicale à mourir n'a rien à voir avec les soins médicaux et qu'on devrait les laisser se concentrer sur ce qu'ils font le mieux.
    La décision de la Cour suprême a ouvert une brèche dans la loi existante, et la présente législature ne peut rien y changer, mais le gouvernement semble profiter de ces circonstances pour élargir encore le trou. L'absence de loi constituerait une situation qui ne serait pas souhaitable, mais la présente mesure législative empirerait la situation. Sans limites strictes, elle mettrait en danger les malades, les handicapés et les aînés vulnérables.
    Mettons un terme à la folie et corrigeons le projet de loi.
(1210)
    Monsieur le Président, je vais poser une question très simple et directe au député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan.
    Le député est-il d'accord avec la décision unanime des juges de la Cour suprême d'accéder à la demande de Mmes Taylor et Carter d'obtenir de l'aide pour mourir?
    Monsieur le Président, j’ai en fait répondu très clairement à cette question dans mon discours.
    Indépendamment de l’opinion personnelle des députés sur le problème, en général, nous savons que le gouvernement ne s’est pas du tout acquitté de la tâche dont la Cour suprême l’a chargé. Cette tâche consistait à concevoir un système permettant d’atteindre l’objectif visé tout en protégeant les personnes vulnérables. Le gouvernement a remplacé certains critères qui figuraient dans la décision de la Cour par des critères tout aussi ambigus, sinon plus. Pour nous, le gouvernement n’a rien fait du tout de ce côté.
    Je dois mettre en évidence le langage euphémique utilisé, qui se reflète dans la question que le député a posée. Les médecins offrent tous les jours une aide médicale à mourir sans pour autant tuer leurs patients. Si les députés veulent défendre ce principe, grand bien leur fasse, mais ils devraient être assez honnêtes pour décrire adéquatement la question, car l’expression « aide médicale à mourir » est clairement trompeuse. Elle nous détourne de la question centrale que nous sommes censés débattre.
    Monsieur le Président, j’ai écouté avec beaucoup d’intérêt mon honorable collègue.
     La raison pour laquelle la Cour suprême a acculé le Parlement à cette position, c’est l’inaction complète des conservateurs dans ce dossier pendant 10 ans. Les conservateurs ont mis fin aux initiatives de soins palliatifs qui étaient en place, n’ont rien fait dans ce domaine et ont refusé d’agir tout en sachant qu’ils devaient s’attendre à une décision de la Cour suprême.
    La Cour suprême est maintenant intervenue pour combler le vide qui existait et, ce faisant, a placé le Parlement et, à mon avis, tous les Canadiens dans une position très difficile. En effet, si nous n’avons pas une loi d’ici le mois de juin, nous aurons un autre vide juridique qui pourrait permettre d’ouvrir la porte beaucoup plus grand.
     La question qui se pose est la suivante: est-ce le rôle du Parlement de faire quelque chose de positif, de s’assurer que ceux qui sont malades ou à l’article de la mort puissent avoir accès à des soins palliatifs de qualité? Nous avions fait adopter une motion à la Chambre des communes au cours de la dernière session, mais il n’y avait pas d’argent. Les conservateurs et l’ancien premier ministre n’ont pris aucune mesure pour mettre en œuvre les mesures préconisées.
     Nous avons maintenant la motion M-46, qui parle de la nécessité d’établir des normes en matière de soins palliatifs, de collaborer avec les provinces et d’oeuvrer en vue de modifier des dispositions de l’assurance-emploi pour que les familles puissent obtenir le soutien dont elles ont besoin.
     Est-ce que mon collègue est disposé à accepter un vide juridique en juin si la Chambre n’agit pas? Est-il disposé à collaborer d’une manière proactive avec notre parti pour assurer l’accès aux soins palliatifs, afin que les Canadiens aient un choix autre que la loi sur l’euthanasie?
    Monsieur le Président, je remercie le député pour le travail qu’il a fait dans ce domaine. Je vais aborder quelques-uns des points qu’il a soulevés.
     Je trouve étrange qu’il parle d’inaction pour décrire la volonté exprimée à maintes reprises par la Chambre à l’égard de l’euthanasie. Bien sûr, nous avions été saisis de propositions avant que la Cour suprême ne rende sa décision. Elles avaient été rejetées par une majorité écrasante de la Chambre, y compris une majorité de députés libéraux et, je crois, un certain nombre de députés néo-démocrates.
     Pour ce qui est du vide juridique, j’aimerais voir une meilleure mesure législative qui préciserait mieux la situation. J’appuierais le projet de loi s’il était possible d’y apporter des modifications dans un certain nombre de domaines clés. Toutefois, dans sa forme actuelle, il ne remplit pas du tout la tâche dont la Cour nous a chargés, qui est de décrire et de définir la situation en ce qui concerne l’euthanasie et l’aide au suicide au Canada.
     Le gouvernement a remplacé des aspects ambigus de la décision de la Cour par des dispositions législatives encore plus ambiguës. Il ne vaut la peine de proposer des mesures législatives que si elles peuvent vraiment améliorer la situation par rapport à l’absence d’une loi.
     Pour ce qui est de l’investissement dans les soins palliatifs, je conviens qu’il reste encore du travail à faire. Je n’accepte pas l'affirmation du député selon laquelle le gouvernement précédent n’a rien fait à cet égard, mais je conviens qu’il serait nécessaire de faire plus d’investissements.
     Le problème de ce projet de loi, c’est qu’il va dans la direction opposée. Permettre l’euthanasie et le suicide assisté sans protection de l’objection de conscience a pour effet de forcer des médecins qui auraient autrement oeuvré dans le domaine des soins palliatifs à s’en écarter s’ils ne veulent pas participer à l’euthanasie. La protection de l’objection de conscience devrait pour le moins être ajoutée. Cela préserverait le système de soins palliatifs que nous avons, et nous permettrait de travailler ensuite pour le renforcer.
(1215)
    Monsieur le Président, j’ai eu l’honneur de servir la population de Kitchener—Conestoga et de participer à de nombreux débats importants à la Chambre au cours des 10 dernières années. Comme députés, nous avons l’obligation solennelle de tracer la voie future de notre grand pays. Les motions que nous déposons, les amendements que nous examinons, les projets de loi que nous adoptons auront toujours des incidences positives ou négatives sur les gens qui nous ont élus pour les représenter à Ottawa. Ils auront aussi des incidences sur les générations futures de Canadiens.
     Les conséquences de nos délibérations et des décisions que nous prenons sur cette question critique de vie ou de mort toucheront la trame même de notre pays. Si je peux m’exprimer ainsi, elles exerceront une influence durable – bonne ou mauvaise – sur ce que signifie notre appartenance à la famille humaine.
     À cause de la nature très sérieuse du sujet que nous examinons aujourd’hui, nous — et je pense ici à chaque député qui siège à la Chambre — devons prendre un certain recul pour nous interroger sur quelques questions très fondamentales. Chacun d’entre nous doit se poser ces questions difficiles. La façon dont les députés perçoivent ces questions fondamentales joue un rôle absolument essentiel dans la recherche de la solution à retenir dans ce domaine extrêmement délicat.
    Réfléchissons pendant quelques instants à ces questions. Qu'est-ce que cela signifie que d'être humain? Qu'est-ce qui donne un sens et une valeur à la vie humaine? Est-ce que toute vie humaine possède une valeur et une dignité intrinsèques, peu importe les malformations et les déficiences perçues, et même si la personne se considère comme un fardeau ou qu'elle croit que ses meilleurs jours sont derrière elle?
    Pour moi, la réponse à toutes ces questions est un « oui » retentissant. Toute vie humaine mérite d'être respectée et protégée. Chaque vie humaine compte. Par conséquent, il va sans dire que je n'appuie pas le suicide assisté, l'euthanasie volontaire ou toute mesure législative qui dévaloriserait encore davantage la vie humaine.
    Ma vision du monde est influencée par mes expériences personnelles, et elle a surtout été façonnée par ma foi. Je crois que toute vie humaine possède une valeur et une dignité intrinsèques et qu'elle doit être tenue en très haute estime, à savoir être considérée comme digne d'être vécue.
    Dans le Talmud, on dit que: « Celui qui détruit une âme, c'est comme s'il avait détruit un monde entier. Et celui qui sauve une vie, c'est comme s'il avait sauvé tout un monde. »
    Les mots suivants sont gravés dans la pierre, au-dessus du vitrail ouest de la tour de la Paix du Parlement: « Un peuple sans idéal est voué à mourir ». Ils sont extraits d'anciens écrits hébreux, dans le livre des Proverbes.
    Quelle est notre vision pour le Canada? Je pose aujourd'hui la question à chacun de mes collègues. Je veux savoir quelle est leur vision pour le Canada.
    La mienne est la suivante: je veux qu'au Canada, chaque vie humaine soit valorisée et chérie, dès la conception et jusqu'à ce que la mort naturelle survienne. Je crois fermement que la vie est un cadeau de Dieu et qu'il s'agit d'un cadeau beaucoup trop important pour qu'on le détruise ou qu'on l'anéantisse. Chaque vie humaine a une valeur extraordinaire, et oui, toutes les personnes, qu'elles aient un handicap ou une malformation, qu'elles souffrent d'une dépression ou soient diminuées parce qu'on juge qu'elles ne sont pas utiles, ont quelque chose à nous enseigner sur le sens de la vie humaine.
    Nous avons le privilège de pouvoir offrir un soutien et accorder une grande importance aux personnes qui souffrent. Nous soulageons adéquatement leurs souffrances et nous leur offrons des soins palliatifs, un contact humain et de l'amour; bref, nous faisons preuve de compassion à leur égard.
    L'un des aspects de la définition du mot « compassion » est « partager les maux d'autrui ». Lorsque nous faisons preuve de compassion, nous plaignons ceux qui souffrent et nous partageons leurs maux, avec sincérité et sollicitude. Nous leur offrons un soutien. Si nous autorisons le suicide assisté, nous ne tiendrons pas compte du fait que la compassion et les relations humaines vont de pair. En effet, nous ne pouvons pas faire preuve de compassion si nous mettons intentionnellement fin aux relations qui unissent deux personnes.
    Cela dit, la Cour suprême du Canada a prévu des motifs d'exemption pour les médecins qui aideraient une personne à mettre fin à ses jours en lui administrant un médicament ou qui pratiqueraient l'euthanasie. C'est ce que la Cour suprême a décidé; elle n'a pas du tout tenu compte du fait que depuis 1991, les députés élus à la Chambre des communes ont rejeté à au moins 15 reprises les initiatives visant à légaliser le suicide assisté. Plus récemment, c'est-à-dire en 2010, un projet de loi visant à autoriser le suicide assisté a été rejeté par un vote de 226 voix contre 59. À mon avis, la Cour suprême ne doit pas créer des lois; elle doit plutôt interpréter les lois existantes.
    J'étais l'un des membres du comité mixte qui a été créé pour étudier l'aide médicale à mourir. Le comité a entendu de nombreux témoins, qui ont présenté des visions différentes de la situation. Nous avons entendu les témoignages de professionnels de la santé, de spécialistes des soins palliatifs, de professionnels de la santé mentale, de personnes handicapées, d'Autochtones, de représentants de divers groupes confessionnels, de spécialistes des questions juridiques et constitutionnelles, de même que d'éthiciens. Comme les députés peuvent l'imaginer, ces gens ont exprimé des points de vue très différents.
(1220)
    La triste réalité est que le délai accordé au comité pour rédiger le rapport et formuler ses recommandations a fait en sorte qu'un grand nombre de groupes qui souhaitaient comparaître devant le comité n'ont pas pu le faire. Des groupes tels que la coalition pour la prévention de l'euthanasie, L'Arche Canada, Vivre dans la dignité, de même que le Dr Balfour Mount, considéré comme étant le père des soins palliatifs au Canada et, d'ailleurs, en Amérique du Nord, n'ont pas pu comparaître.
    Le rapport du comité mixte n'a pas de mordant lorsqu'il est question d'insister sur le fait que, avant même que ne soit offert ou considéré le suicide assisté au Canada, il doit à tout le moins y avoir une offre crédible de soins palliatifs abordables et accessibles pour ceux qui songent à une solution aussi définitive que la mort précipitée. Tout comme le rapport du comité, le projet de loi C-14 échoue lamentablement pour ce qui est d'apporter un véritable changement dans ce dossier fondamental.
    Selon le Dr Harvey Chochinov, président du panel externe, professeur de psychiatrie à l'Université du Manitoba, et titulaire de la Chaire de recherche du Canada pour les soins palliatifs, tous les patients demandant l'aide médicale à mourir devraient faire l'objet d'une consultation en soins palliatifs pour être pleinement informés de toutes les options de soins palliatifs qui pourraient être entrepris pour atténuer leurs souffrances. Ne pas tenir compte de la véritable absence de choix sans offrir en contrepartie de véritables soins palliatifs revient à n'offrir aucun choix, seulement la mort précipitée.
     Je me réjouis que le projet de loi C-14 tienne compte des nombreux points de vue présentés dans le rapport dissident. J’estime en revanche qu’il utilise une terminologie vague et subjective, et qu’il laisse sans réponses de nombreuses questions de fond soulevées par des témoins qui ont comparu devant notre comité.
    L’une des choses qui m’a déplu pendant toutes nos discussions a été la volonté manifeste d’édulcorer les mots. Plutôt que de parler de suicide assisté par un médecin ou d’euthanasie volontaire, on a décidé d’utiliser l’expression « aide médicale à mourir ». Même des médecins se sont opposés avec véhémence à l’expression « aide médicale à mourir », surtout ceux qui travaillent dans les soins palliatifs et qui, depuis des décennies, aident les malades à finir leurs jours de façon naturelle.
     On dit que toute restructuration sociale est précédée d’une restructuration sémantique. Nous en avons un parfait exemple avec le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui. La question est bien trop grave pour qu’on laisse passer une terminologie aussi vague et aussi euphémisée. Comme l’a fait remarquer le Dr Chochinov, le projet de loi C-14 ne fait pas la distinction entre le suicide assisté par un médecin et l’euthanasie, et il les inclut tous les deux dans ce qu’il appelle « l’aide médicale à mourir ». Il est pourtant extrêmement important de faire cette distinction, car l’expérience d’autres pays nous enseigne que le taux d’utilisation et le taux de létalité de ces deux gestes médicaux sont très différents. Dans les juridictions qui n’autorisent que le suicide assisté par un médecin, comme l’Oregon, les décès provoqués par ce geste médical représentent environ 0,3 % de tous les décès. Dans celles qui autorisent l’euthanasie, le nombre de décès accélérés en représente environ 3 %, soit 10 fois plus.
     Si l’on extrapole ces chiffres à la situation du Canada, où nous dénombrons environ 260 000 décès par an, un régime de suicide assisté par un médecin donnerait lieu à environ 780 décès par an. En revanche, pour ce qui est de l’euthanasie, le nombre de décès passe alors à 7 800 par an, soit 10 fois plus. S’il y a moins de décès avec un régime de suicide assisté par un médecin qu’avec l’euthanasie, c’est à cause de l’ambivalence. Il est donc crucial que le gouvernement, s’il veut faire adopter ce projet de loi, demande que, pour ceux qui veulent mourir avec l’aide d’un médecin, on suive vraiment une procédure de suicide assisté par un médecin, et non une procédure d’euthanasie volontaire, car les chiffres sont très différents.
    Un autre élément important dont il n’est pas tenu compte dans le projet de loi est la question de la protection de la liberté de conscience des médecins et des travailleurs de la santé. S’il est possible de garantir « une approche cohérente dans tout le pays en matière d’aide médicale à mourir », comme l’affirme le préambule, il n’y a aucune raison pour qu’on ne garantisse pas en même temps, dans le projet de loi, le respect de la liberté de conscience.
    Enfin, le projet de loi C-14 devrait prévoir un mécanisme de surveillance judiciaire, afin de protéger les personnes vulnérables. Même s’il peut paraître bien, sur le papier, d’avoir deux témoins indépendants et deux médecins indépendants, les risques de contrainte manifeste ou sournoise sont trop grands et les possibilités d’abus, trop réelles. Ces affirmations doivent être vérifiées dans le cadre d’un mécanisme de surveillance judiciaire.
    En résumé, c’est de l’espoir que nous devrions offrir à tous les Canadiens. En tant que législateurs, nous devrions faire tout ce qui est en notre pouvoir pour nous assurer que personne ne meurt inutilement. C’est dans cet esprit que je me permets de rappeler les trois grands amendements qu’il faut à mon avis apporter au projet de loi C-14: premièrement, les Canadiens vulnérables ont besoin d’être protégés par un mécanisme de surveillance judiciaire; deuxièmement, il faut protéger la liberté de conscience des médecins, des travailleurs de la santé et des établissements de soins; troisièmement, il faut offrir aux Canadiens qui souffrent une possibilité réelle d'avoir des soins palliatifs, plutôt qu’une mort accélérée.
(1225)
    Monsieur le Président, il est évident que le député est un ardent défenseur de la vie humaine, son discours le montre clairement.
    J’aimerais lui poser une question au sujet de ce qu’il a dit à propos de la Cour suprême. Il semble croire que la Cour suprême doit se plier à la volonté du Parlement. Mais ce n’est pas ce que prévoit la Charte des droits que nous avons adoptée au Canada. Et nous l’avons adoptée précisément parce qu’elle garantit la protection des libertés individuelles, quelle que soit l’opinion de la majorité. Dans le cas qui nous intéresse, que cela plaise ou non au député ou à certains de ses collègues, la Cour suprême a statué, dans l’affaire Carter, que l’aide médicale à mourir était accessible à une certaine partie de la population canadienne.
     Si j’ai bien compris, le député estime que la seule chose à faire serait d'utiliser la disposition de dérogation pour annuler la décision de la cour. Est-ce bien ce que le député nous demande de faire?
    Monsieur le Président, mon collègue est lui aussi un ardent défenseur de la vie humaine.
     Il est évident que le comité a disposé de très peu de temps pour entendre des témoins, rassembler tous les témoignages et préparer un rapport au gouvernement, pour que celui-ci élabore un projet de loi. Maintenant, on nous impose un échéancier très serré pour en discuter à la Chambre. Le comité de la justice va lui aussi être soumis à un échéancier extrêmement serré. Il me paraît donc évident que nous n’avons pas assez de temps pour accorder à cette question extrêmement sérieuse toute la considération qu’elle mérite.
    Que le gouvernement veuille invoquer la disposition de dérogation ou non, ce n’est pas moi qui vais le proposer. C’est certainement une option. Il me semble toutefois qu’en nous précipitant de cette façon nous n’allons pas donner aux Canadiens le projet de loi qu’ils méritent.
    Monsieur le Président, j’ai beaucoup de respect pour tout ce qu’a fait mon collègue au sein du comité parlementaire, sur la question des soins palliatifs.
     Nous nous entendons sur bien des choses, mais parfois ce n’est pas le cas, comme le veut la coutume à la Chambre. Je comprends sa frustration à l'égard de l’échéancier imposé par la Cour suprême. Je respecte le droit et le pouvoir de la Cour suprême d’établir des règles et des lois lorsqu’elle estime que le Parlement a laissé un vide juridique. Toutefois, elle aurait dû avoir la bienveillance de donner au nouveau gouvernement la possibilité de consulter la population canadienne sur un sujet très important qui concerne tout un chacun et qui transcende les politiques de partis. Elle aurait dû donner au nouveau gouvernement la possibilité de consulter les Canadiens. Je suis d’accord avec le député. Maintenant, nous sommes obligés de respecter un échéancier très strict que les Canadiens surveillent mais auquel ils ne sont pas parties prenantes.
    Étant donné que ce sont des limites qui nous ont été imposées par la Cour suprême, je me demande ce qui se passerait si la Chambre ne prenait pas les mesures nécessaires pour combler ce vide juridique, car des individus et des organisations risqueraient alors de s’adresser à la Cour suprême.
    Par conséquent, mon collègue a-t-il songé aux risques associés à un tel vide juridique si nous ne mettons pas en place une loi d'ici la fin de juin?
    Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue de son travail dans le dossier des soins palliatifs. J'ai eu le privilège d'appuyer la motion qu'il a présentée à la Chambre l'année dernière. C'était un honneur de travailler avec les députés de tous les partis pour préparer le rapport intitulé Avec dignité et compassion, qui contient de nombreuses recommandations. Je suis d'ailleurs fier de dire que plusieurs d'entre elles ont été mises en oeuvre, en tout ou en partie, mais nous avons encore beaucoup de chemin à faire.
    Je suis, moi aussi, préoccupé par le vide juridique qui risque d'exister si nous n'agissons pas. Cependant, comme je l'ai souligné dans mes observations, au moins trois amendements importants s'imposent pour que le projet de loi puisse offrir, me semble-t-il, des garanties suffisantes aux Canadiens vulnérables. Ces derniers ont notamment besoin d'une meilleure protection grâce à un système de surveillance judiciaire. C'est bien beau dire qu'on fera appel à deux médecins et à deux témoins indépendants, mais encore faut-il qu'il y ait un moyen d'attester qu'ils sont bel et bien indépendants.
    L'autre modification vise à protéger la liberté de conscience des travailleurs de la santé. Il serait tout à fait déplacé qu'une institution établie pour améliorer les soins de fin de vie et accompagner les patients tout au long du processus naturel de fin de vie exige des professionnels de la santé qu'ils participent désormais à l'accélération médicale de la mort, car cela va complètement à l'encontre des principes mêmes de leur profession.
(1230)
    Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec la députée d'Oakville-Nord—Burlington.
    Je tiens d'abord à prendre le temps de rendre hommage à deux femmes canadiennes que je n'ai pas connues, mais que j'ai appris à connaître après leur mort, et je pense qu'elles sont parmi les femmes les plus courageuses. Je parle de Gloria Taylor et Kay Carter. Ces deux femmes ont vécu des épreuves qu'elles n'avaient pas choisies, et elles en sont venues au point où elles souhaitaient avoir de l'aide pendant leurs derniers jours, à la dernière étape de leur vie.
    En tant que pasteur de l'Église Unie, j'ai accompagné de nombreuses personnes — même des centaines — à cette étape de leur vie, et il m'est arrivé encore bien plus souvent que cela de célébrer les funérailles de gens que je n'ai appris à connaître qu'à travers les récits de leur famille et ce qu'elles ont laissé en héritage. Kay Carter et Gloria Taylor en sont des exemples. Ces femmes courageuses, tenaces, pleines d'espoir et aimant la vie ont ouvert la voie que nous empruntons aujourd'hui avec l'étude d'un projet de loi sur l'aide médicale à mourir.
    En leur rendant hommage, je veux aussi les remercier de nous avoir donné l'occasion de suivre une des meilleures leçons sur les droits civiques dont nous puissions bénéficier comme parlementaires. Chaque organe du gouvernement a l'occasion de se prononcer sur la question: l'organe législatif, l'organe judiciaire et l'organe exécutif.
    Dans les faits, nous avons entamé cette discussion en 1982 lorsque nous avons invoqué la Chartre qui fait maintenant partie intégrante de la culture canadienne des droits et libertés. Depuis son adoption, la Charte a guidé tous les Canadiens ainsi que les tribunaux et les juristes d'ici. En réalité, lorsque Kay Carter et Gloria Taylor ont interjeté appel auprès de la Cour suprême de la Colombie-Britannique et que leur appel s'est rendu à la Cour d'appel de cette province avant de se retrouver devant la Cour suprême du Canada, nous avons eu l'occasion de demander à notre organe judiciaire de se renseigner sur leurs droits et la possibilité qu'elles puissent bénéficier d'une aide médicale à mourir. Les tribunaux ont tranché et donné à l'organe parlementaire et à l'organe exécutif un an pour produire une loi.
    L'organe parlementaire s'est ensuite prononcé par le truchement d'un comité mixte de la Chambre et du Sénat. Je tiens à dire à mes collègues que ce fut probablement mon expérience parlementaire la plus enrichissante. J'ai été profondément transformé par la discussion à laquelle ont participé les sénateurs et députés des deux sexes, de même que par les récits que j'ai entendus sur la vie, la mort, la guérison et l'espoir. L'expérience m'a permis de constater que notre système parlementaire donne aux Canadiens la possibilité extraordinaire de se faire entendre en comité et, maintenant, à la Chambre.
    L'organe exécutif a ensuite repris le flambeau après la publication du rapport et a présenté le projet de loi C-14. Je tiens à remercier la ministre pour le travail qu'elle a accompli dans ce dossier, ainsi que pour le travail de son cabinet et du ministère de la Justice, qui ont pris notre rapport au sérieux, l'ont poussé plus loin et ont produit une mesure législative que je suis persuadé d'appuyer à la deuxième lecture.
    Cela ne signifie pas que je pense que nous en avons terminé avec cette mesure législative, car elle est maintenant de retour dans le système parlementaire, où nous allons engager un dialogue avec l'exécutif en vue d'améliorer une mesure législative qui est actuellement acceptable. Lorsque nous traitons de questions de vie ou de mort, je ne pense pas qu'il suffise que la mesure soit acceptable. Nous pouvons honorer la quête dans laquelle Gloria Taylor et Kay Carter se sont engagées, sur laquelle la Cour suprême du Canada s'est prononcée et au sujet de laquelle l'exécutif a présenté une mesure législative. Comme parlementaires, nous pouvons prendre au sérieux la Charte des droits et libertés, la prendre à coeur et nous rappeler ce à quoi les députés s'engagent lorsqu'ils prêtent serment. Au-delà de l'allégeance à Sa Majesté, il s'agit de faire respecter la Constitution du pays et d'y adhérer avec amour, détermination, passion et espoir et de voir comment la décision de la Cour suprême peut être mise en pratique au Canada.
    Nous sommes aujourd'hui saisis d'une mesure législative. Il a été déterminé que l'article 7 de la Charte ne pouvait servir à nier les droits de deux femmes demandant de l'aide à mourir. Le gouvernement de l'époque avait tenté de contrer la déclaration des droits à l'article 7 en invoquant l'article 1 de la Charte, affirmant qu'il existait des motifs raisonnables de refuser ces droits. Toutefois, la Cour suprême du Canada ne l'a pas permis, disant qu'il serait déraisonnable de nier ces droits à ces femmes. La Cour s'est prononcée de façon très précise sur une affaire très précise à un moment précis.
(1235)
    Au paragraphe 127 de la décision, la Cour suprême a aussi signalé qu'elle ne se prononçait pas sur des choses qui ne lui sont pas présentées. C'était une exigence pour le Parlement, mais aussi pour ce projet de loi, qui plonge tous les Canadiens dans une discussion au sujet de ce que nous pouvons nous donner comme soins continus, soins qui se poursuivront jusqu'à l'étape où l'on aide les gens à passer leurs derniers jours.
    Notre approche est différente. Je respecte tout à fait le député de Kitchener—Conestoga. Il s'est investi sérieusement dans cette cause et j'ai tenu compte du fait qu'il est un passionné. Nos approches diffèrent, mais je suis convaincu que les députés des deux côtés de la Chambre se préoccupent du bien-être des Canadiens. Je crois cependant que le projet de loi doit aller encore plus loin si nous voulons qu'il soit fidèle à la Constitution.
    Je me préoccupe du fait que le projet de loi pourrait entraîner d'autres contestations devant les tribunaux, et je suis d'avis que les Canadiens ne devraient pas avoir à endurer cela. J'ai deux préoccupations très précises dont j'aimerais faire part à la Chambre, et la première concerne l'utilisation du mot « incurable ».
    Il est très clair que la Cour suprême a préféré « irrémédiable » à « incurable ». Le qualificatif « incurable » se rattache habituellement à la maladie, et non à la personne. Je veux dire par là qu'une maladie peut être incurable ou curable, mais la personne a le droit, selon la Cour suprême, de ne pas se soumettre aux traitements qui lui sont inacceptables. Un traitement peut être cruel ou très pénible, et les juges sont d'avis qu'une personne n'a pas l'obligation de s'y soumettre. Il peut exister un traitement contre une maladie, mais la personne a le droit de choisir une autre issue, et c'est l'article 7 qui lui garantit ce droit. Voilà le problème que pose à mes yeux l'emploi du mot « incurable ».
    Le concept de mort raisonnablement prévisible ou de mort dans un avenir prévisible me pose problème, lui aussi. Nous sommes tous soumis aux caprices du destin. La vie est fragile et précieuse. La vie nous est chère, mais pour certains, la vie peut devenir intolérable. Certaines maladies ne sont pas nécessairement mortelles dans le sens où la personne qui en est atteinte meurt automatiquement, mais elles peuvent causer une douleur intolérable. Dans l'arrêt Carter, la Cour suprême dit que le malade a alors le droit d'obtenir une aide médicale à mourir.
    Le concept de mort dans un avenir prévisible a embrouillé les choses. Les médecins se demandent ce qu'il signifie. Est-il question de « phase terminale »? Car la définition de « phase terminale » varie selon les hôpitaux et les médecins. Il faut donc être très prudent.
    Par ailleurs, je veux parler d'une des mesures de sauvegarde. Il s'agit somme toute d'une mesure législative solide, et la plupart des mesures de sauvegarde qu'il renferme ne sont pas très préoccupantes, selon moi, sauf l'une d'elles, c'est-à-dire la dernière du troisième paragraphe portant là-dessus, l'alinéa 241.2(3)h), qui dit que, immédiatement avant que les substances causant la mort lui soient administrées, la personne doit exprimer de nouveau son consentement exprès.
    J'ai été trop souvent dans des chambres d'hôpital. J'ai accompagné beaucoup trop de personnes mourantes. La plupart des gens qui reçoivent cet ensemble de soins sont mourants, et on leur donne probablement de la morphine. Il serait cruel de cesser de leur en donner pour s'assurer qu'ils sont aptes à donner leur consentement. En fait, pendant une période de 15 jours, la personne devrait pouvoir partir dans la dignité, et il faudrait faire preuve de compassion à son égard en ne l'obligeant pas à recouvrer ses facultés parce que la morphine l'aide justement à tolérer d'atroces souffrances. Nous savons déjà qu'elle est en proie à des souffrances intolérables.
    Hormis ces exceptions, j'appuie le projet de loi. Le comité de la justice doit faire son travail. Je suis convaincu que les députés qui en font partie feront preuve de la plus grande rigueur. Je leur fais pleinement confiance. J'attends avec intérêt le retour du projet de loi à la Chambre et son renvoi au Sénat. La loi qui sera adoptée aidera les Canadiens et fera du Canada un endroit meilleur, j'en suis convaincu.
(1240)
    Monsieur le Président, je tiens à remercier le député du travail qu'il a accompli à titre de coprésident du comité et pour l'esprit de collaboration qui régnait là-bas.
    Un point me préoccupe. On a souvent constaté pendant les audiences que deux questions tendent à être amalgamées. C'est selon moi involontaire, mais ce n'est peut-être pas le cas. Ces deux questions sont, d'une part, l'aide médicale à mourir, ou suicide assisté, et, d'autre part, l'interruption pure et simple des traitements.
    Les patients ont toujours eu le droit de refuser des traitements que le député qualifie de très pénibles et qui pourraient prolonger leur vie. Le député pourrait-il confirmer qu'il ne souhaitait pas affirmer le contraire et que les patients ont depuis toujours le droit de refuser un traitement qui prolongerait indûment leur vie, de « tirer la plogue », comme on dit?
    Nous devons composer avec ces enjeux depuis plusieurs années. Ce n'est toutefois pas ce dont il est question actuellement. Je crains que les propos du député puissent porter à confusion et amener certaines personnes à penser qu'on cherche à prolonger la vie d'un patient coûte que coûte en utilisant tous les médicaments possibles ou en pratiquant des interventions plus poussées qu'il ne le demande.
    Monsieur le Président, je pense que le député de Kitchener—Conestoga a raison. Il y a toutes sortes de façons de mourir, et certaines personnes disent très clairement ne pas vouloir que des manoeuvres de réanimation soient effectuées ni que des mesures extraordinaires soient prises à leur égard.
    Or, lorsqu'une personne arrive à la fin de sa vie et que son médecin l'accompagne, il existe un pacte sacré, je crois, qui lie le médecin et le patient et qui leur permet de comprendre que le rôle du médecin consiste à mettre fin aux souffrances. Il ne consiste pas nécessairement à prolonger la vie. Il y a des moments où le cours naturel de la vie est trop long pour les gens qui souffrent.
    Il y a eu un cas au Québec, récemment, où une personne n'était pas admissible parce que sa mort n'aurait pas lieu dans un avenir prévisible. Cette personne a dû cesser de s'alimenter, se priver de nourriture et d'eau pendant 53 jours, jusqu'à ce qu'on la laisse enfin mourir. Je pense que c'est injuste, et c'est ce que la Cour suprême a conclu.
    D'ailleurs, la Cour suprême dit qu'elle permet à la fois aux médecins d'aider les personnes à mourir, et à ces personnes d'en prendre l'initiative avec l'aide des médecins. Je suis fier de vivre dans un pays d'une telle compassion.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de Don Valley-Ouest ainsi que le député de Kitchener—Conestoga. Je ne me rappelle pas avoir entendu, depuis cinq ans que je siège dans cette enceinte, un débat sur une question aussi difficile au cours duquel les partis et les députés ont fait preuve d'un si grand respect mutuel. Nous reconnaissons tous qu'il s'agit d'une question très sensible. C'est une question d'éthique, de droits et de moralité individuelle. C'est une question pour le moins épineuse.
    Toutefois, je suis préoccupée par une partie du projet de loi dont a parlé le député de Don Valley-Ouest: le fait qu'une personne doit être capable de réaffirmer une fois de plus sa décision de demander l'aide d'un médecin pour mourir, même après qu'elle a perdu la capacité mentale de le faire.
    Une fois de plus, sur la question des directives anticipées, cette partie du projet de loi va à l'encontre de l'essence même du jugement de la Cour suprême, c'est-à-dire qu'il ne faut pas mettre les gens dans une position où ils estiment devoir s'ôter la vie prématurément. Ceux-ci veulent avoir l'assurance que leurs décisions relatives aux soins de fin de vie seront respectées.
    Voici la question que je pose à mon collègue le député de Don Valley-Ouest: le fait de demander à une personne ne possédant plus les capacités mentales nécessaires de réaffirmer une décision très claire qu'elle a prise lorsqu'elle les possédait encore ne revient-il pas en quelque sorte à demander l'impossible?
    Monsieur le Président, je tiens à remercier la députée de son ardeur, mais aussi de sa compassion.
    Il s'agit de l'enjeu le plus important à avoir été abordé dans ma circonscription depuis plusieurs semaines. Le député de Don Valley-Est et moi avons organisé une assemblée publique, à laquelle environ 200 personnes ont assisté. Du nombre, 90 % ont dit souhaiter qu'on permette une forme ou une autre de directive anticipée. Les gens ont très peur de devoir mourir prématurément si jamais une maladie comme la démence ou l'Alzheimer devait les priver de leurs facultés. C'est un sujet qui les inquiète beaucoup.
    J'ai organisé une autre séance du même type à Leaside, la semaine dernière, et là aussi, le sujet est revenu sur le tapis.
    En fait, je crois que c'est avec le temps que nous comprendrons la portée réelle de cet enjeu. Il faut donc, selon moi, étudier attentivement la mesure législative dont nous sommes saisis. Nous prendrons le temps qu'il faudra pour que la société soit prête. Je suis toutefois persuadé qu'il s'agit d'une réalité inévitable.
    Je tiens à saluer la mémoire d'une ex-députée du Bloc québécois, la regrettée Francine Lalonde. C'est elle qui avait abordé ce sujet la première. J'ai aussi oublié...
(1245)
    Nous reprenons le débat. La députée d'Oakville-Nord—Burlington a la parole.
    Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre part au débat sur le projet de loi C-14 sur l'aide médicale à mourir.
    Le mot « mort » suscite des émotions intenses. Nous jouissons de la vie et nous la célébrons. Nous parlons de vivre, mais évitons le sujet de la mort. Nous nous dérobons à ces conversations parce qu'elles nous mettent mal à l'aise.
    J'espère sincèrement que le projet de loi engendrera des conversations sur la fin de vie, les soins palliatifs, la mort et le fait de mourir dans la dignité.
    Je veux tout d'abord remercier tous les Canadiens qui ont participé aux consultations sur la question avec le gouvernement de leur province et le fédéral. Je tiens à reconnaître le travail des membres du Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir, qui a remis son rapport au Parlement à la fin février. Je salue en particulier le député de Don Valley-Ouest, la ministre de la Justice ainsi que la ministre de la Santé. Personnellement, j'ai été touchée par leurs propos sensibles et réfléchis.
    J'ai entendu les interventions de la ministre de la Justice et de la ministre de la Santé durant le débat à la Chambre sur le projet de loi. J'ai pleinement confiance en leur capacité de guider nos travaux durant le processus législatif touchant le projet de loi C-14 ainsi que le débat sur la mort et son approche.
    C'est une question qui nous préoccupe depuis longtemps. Je me souviens de la compassion dont l'ancien député Svend Robinson avait fait preuve au début des années 1990 lorsqu'il tenait la main de Sue Rodriguez, alors atteinte de SLA, au moment où la Cour suprême lui a refusé le droit de mettre un terme à sa vie.
    Il est clair pourquoi un tel projet de loi s'impose. Dans l'arrêt Carter, la Cour suprême a décidé à l'unanimité que les Canadiens qui endurent des souffrances intolérables ont le droit de demander de l'aide afin d'y mettre un terme.
    La mesure proposée par le gouvernement tente de trouver un équilibre, mais ce faisant, elle déplaira sans doute à certains. Peut-on dire que certaines de ses dispositions ne vont pas assez loin? À mon avis, la réponse est oui. Les personnes atteintes de démence se voient refuser un choix important en fin de vie.
    Le projet de loi ne s'attaque pas à toutes les questions auxquelles sont confrontées les personnes atteintes d'une maladie incurable. Je n'ai aucun doute qu'il fera l'objet d'une discussion approfondie au comité. Des gens m'ont écrit pour me faire connaître leur inquiétude au sujet de l'application du projet de loi par les provinces et les territoires. Je suis heureuse que l'on approfondisse l'étude. Ce n'est que le début de la conversation en la matière, et c'est normal.
    Je sais que pour certaines personnes, cette mesure législative va trop loin. De façon générale, je crois que ces personnes s'opposent fondamentalement à l'arrêt Carter. Toutefois, sans égard à l'opinion des gens au sujet du projet de loi, je crois que nous pouvons tous convenir qu'il faut améliorer notre façon de gérer la mort.
    Qu'un patient gravement malade choisisse de mourir à la maison, dans un établissement de soins palliatifs, ou choisisse l'aide médicale à mourir, il faut avoir ces conversations plus tôt et aider les personnes en fin de vie avec sensibilité. Ce ne sont pas des décisions à prendre pendant une crise de santé, ce qui est souvent le cas. Nous devrions plutôt tous planifier nos soins au préalable.
    Je me rappelle être assise dans la chambre d'hôpital de mon père, peu de temps avant sa mort, alors qu'il luttait contre une pneumonie. Ma soeur et moi avons dû lui demander ce qu'il souhaitait si son coeur arrêtait de battre. Comme les députés peuvent le comprendre, cela a été l'une des conversations les plus difficiles que nous ayons eues. C'était une conversation pénible et bouleversante, certes, mais elle était aussi nécessaire.
    Bien que je reconnaisse la différence entre cette mesure législative et une ordonnance de non-réanimation, je veux dire qu'il est difficile de parler de la mort. C'est très difficile de parler de la mort d'un proche. Toutefois, ce n'est pas parce que c'est difficile qu'il ne faut pas en parler. En fait, je crois que c'est justement parce que c'est un sujet difficile qu'il faut l'aborder.
    Nous renseignons mal les gens au sujet de leurs choix en fin de fin. Ces choix existent. Nous avons aussi du mal à offrir ces choix en fin de vie. Il n'y a pas assez de ressources pour aider les gens qui souhaitent mourir à la maison. Les options pour les gens qui souhaitent obtenir des soins palliatifs sont limitées.
(1250)
    Je crois que le gouvernement fédéral doit collaborer avec les provinces et les territoires pour élaborer un meilleur cadre pour les soins en fin de vie. Notre programme prévoit des investissements grandement nécessaires de 3 milliards de dollars sur 4 ans dans les soins à domicile et les soins palliatifs.
    Nous soulignons aujourd'hui le début de la Semaine nationale des soins palliatifs. Peu de temps après mon élection, j'ai eu l'occasion de visiter le centre de soins palliatifs Carpenter de Burlington, soit l'une des seules options en matière de soins palliatifs offertes à Oakville et à Burlington pour les personnes à qui il ne reste que quelques jours ou quelques mois à vivre. Lors de ma visite, nous vous avons parlé non seulement de cet établissement impressionnant, mais aussi de la manière dont nous, en tant que société, devons avoir des conversations plus ouvertes au sujet de la mort.
    J'ai été grandement touchée par l'histoire de Bonnie Tompkin. Elle est coordonnatrice en santé communautaire au centre de soins palliatifs Carpenter, mais son expérience est très personnelle. Lorsque son fiancé Ian a reçu un diagnostic de cancer terminal, il tenait mordicus à avoir droit à l'aide médicale à mourir. Comme bien d'autres, il s'inquiétait grandement du fardeau qu'il deviendrait pour ses proches au fil de l'évolution de sa maladie. Après avoir visité le centre de soins palliatifs Carpenter et avoir été informé des options qui s'offraient à lui, il a pris la décision de passer ses derniers jours au centre de soins palliatifs.
    Le centre de soins palliatifs Carpenter collabore activement avec la Ville de Burlington en vue d'adopter une charte pour une ville de compassion. De telles chartes sont répandues au Royaume-Uni. Les citoyens de collectivités animées par la compassion sont informés, sensibilisés et éduqués au sujet de la mort, de la mortalité, du décès et du deuil.
    La santé et le bien-être sont des principes qui vont au-delà de notre système de santé et qui s'appliquent aussi à nos amis et à nos proches, ainsi qu'aux liens que nous entretenons avec les espaces publics et les membres de la collectivité. La charte pour des villes de compassion repose sur la notion que la collectivité joue un rôle semblable dans le cas des personnes en fin de vie. Voici un extrait de cette charte:
    Les villes de compassion sont des collectivités qui reconnaissent que tous les cycles naturels de la maladie et de la santé, de la naissance et de la mort, ainsi que de l'amour et de la perte se produisent tous les jours, dans le cadre de leurs institutions et de leurs activités régulières. Une ville de compassion est une collectivité qui reconnaît que les soins prodigués aux autres en périodes de crise et de perte ne constituent pas une tâche qui incombe exclusivement aux services de santé et aux services sociaux, mais bien à tout un chacun.
    Les villes de compassion appuient les diverses croyances religieuses et culturelles. Dans ma circonscription, j'ai rencontré un couple qui craignait que ce projet de loi normalise le suicide. Toutefois, si nous réussissons à bâtir des collectivités animées par la compassion et parlons de la vie et de la mort, nous pouvons donner aux gens les outils dont ils ont besoin et des options pour la vie.
    À une certaine époque, personne ne parlait du cancer. Tout cela a changé lorsque, le 12 avril 1980, un jeune homme muni d'une jambe artificielle a amorcé son Marathon de l'espoir qui devait le mener d'un bout à l'autre du pays. Il nous a obligés à admettre non seulement l'existence de son cancer, mais aussi le fait qu'il faut éviter de cacher les personnes handicapées.
    Nous commençons seulement à engager une conversation sur la santé mentale, autre sujet dont on parlait tout bas jusqu'à tout récemment. D'ailleurs, aujourd'hui, sur la Colline du Parlement, il y a eu une marche pour la sensibilisation à la santé mentale.
    La mort est un autre sujet tabou, dont nous ne voulons pas parler. Mais ce faisant, nous rendons un bien mauvais service à nos amis et à nos proches lorsque ceux-ci se retrouvent face à leur propre mortalité.
    J'ai récemment eu une conversation avec une de mes meilleures amies sur le sujet de la mort, sur ce projet de loi, sur la forme que devraient prendre les soins en fin de vie et sur ce qui fait défaut. Son mari, un bon ami à moi, vit avec une maladie terminale, la SLA. Un autre de mes bons amis est en train d'accompagner son père en fin de vie. Ces conversations sont très difficiles, mais en les ayant, nous pourrons peut-être faciliter la tâche pour tout le monde quant aux choix sur la façon de mourir dans la dignité.
    Il ne sera jamais facile de parler de la mort, ce qui est normal, mais ce sujet devrait faire partie de nos conversations autant que les questions touchant la vie. Nous devons parler des options de vie et de la mort dans la dignité. Il est plus que temps de le faire.
    Nous devrions peut-être nous inspirer de la charte pour des villes de compassion et reconnaître que la façon dont nous traitons la mort, la perte et le deuil mérite d'être communiquée à toute la collectivité, dans chaque vile, d'un bout à l'autre du pays.
(1255)
    Monsieur le Président, je remercie la députée d'avoir exprimé ses sentiments profonds à l'égard de cette question.
    Je suis nouveau venu au Parlement, mais je suis conscient qu'il s'agit d'une question qui revêt une grande importance aux yeux des Canadiens d'un océan à l'autre. J'aurais souhaité que nous disposions de plus de temps pour en discuter.
    Le député de Don Valley-Ouest a fait mention du Québec dans son intervention. Je souligne que le Québec a mis six ans avant de faire ses recommandations. Le gouvernement du Québec a pris le temps de consulter des groupes de partout dans la province, notamment les familles de même que les partisans et les opposants à l'aide médicale à mourir. Je répète encore une fois que j'aurais souhaité que nous consacrions davantage de temps à cette question. De toute évidence, ce ne sera pas le cas.
    J'ai rencontré un groupe d'étudiants en sciences infirmières, la semaine dernière. Mon fils étudie en sciences et souhaite devenir médecin. Tous ces jeunes se posent la même question. Dans la carrière qu'ils ont choisie, ils seront confrontés à cette réalité et devront prendre des décisions difficiles. Les jeunes choisissent le domaine de la santé dans le but d'aider et de protéger les gens et d'améliorer leur état de santé mais, un jour ou l'autre, ils devront décider d'administrer ou non un médicament pour aider un patient à mourir. Les étudiants en sciences infirmières étaient renversés d'apprendre qu'une telle responsabilité pourrait leur incomber. Certains ont dit « Je ne sais pas si je peux faire une telle chose », et d'autres, « Je ne sais pas si j'ai choisi la bonne profession ».
    Que sommes-nous censés leur dire? Il devrait y avoir de plus amples discussions sur la protection de la liberté de conscience. Je comprends tous les points de vue, notamment pour avoir vu des membres de ma famille vivre des moments terribles à la fin de leur vie. Par surcroît, comme j'ai un enfant adulte qui a des besoins spéciaux, cette question me préoccupe.
    Que devons-nous dire à la prochaine génération de médecins et d'infirmières? Faut-il leur dire que le projet de loi dont nous sommes saisis ne prévoit aucune mesure de protection?
    Monsieur le Président, les gens se demandent toujours comment ils vont pouvoir faire toutes sortes de choses lorsqu’ils embrassent une profession médicale. Les médecins et les infirmiers font face à ce genre de difficultés tout au long de leur carrière. Si cet acte heurte vraiment les convictions d'un travailleur de la santé, celui-ci peut demander à être remplacé, mais je pense que cela fera partie des discussions que nous aurons avec les provinces et avec les associations d’infirmiers et de médecins. C’est vrai que c’est une question importante, mais le personnel soignant doit composer quotidiennement avec ce genre de décision très difficile.
    Nous leur faisons confiance. Je crois que c’est le député de Don Valley Ouest qui a dit que nous confions notre vie à la profession médicale, et que nous devons donc pouvoir lui confier notre mort.
    Comme je l’ai dit, ce n’est que le début de la discussion, et pas la fin. Et c’est une discussion que nous aurons avec les étudiants en médecine ou en sciences infirmières.
    Monsieur le Président, j’ai écouté ma collègue avec beaucoup d’intérêt, et elle a beaucoup parlé de « compassion » et d’« options », mais le problème c’est que bon nombre de Canadiens n’ont pas accès à ces options parce qu’ils n’ont pas accès à des soins palliatifs de qualité.
    Ma collègue a parlé d’une promesse électorale, mais pour la respecter, il faut prévoir les crédits nécessaires dans le budget. Or, le budget ne prévoit rien pour les soins palliatifs. Il est important que nous en discutions à la Chambre, sinon, on parle dans le vide.
    S’agissant des secteurs sous compétence fédérale, le terme « compassion » me surprend à cause du paragraphe 12.1 des services de santé non assurés pour les Autochtones. Lorsqu’ils doivent prendre l’avion pour se rendre à l’hôpital où ils vont mourir, le règlement dit qu’en aucune circonstance un proche ne peut les accompagner. Le règlement du gouvernement fédéral qui empêche les proches d’accompagner un être cher qui va mourir parle alors d'« événement malheureux ». Les lignes directrices fédérales établissent que l’être cher doit mourir seul.
    Mais nous pouvons changer cela. C’est un secteur qui relève de la compétence fédérale. Les libéraux vont-ils s’intéresser à la question sans tarder, afin que nous puissions être crédibles quand nous parlons de compassion en fin de vie?
(1300)
    Monsieur le Président, je remercie le député de manifester autant de passion sur cette question, car elle est importante. Je sais qu’il a beaucoup travaillé là-dessus avec notre ministre des Affaires autochtones et du Nord.
    Nous devons faire preuve de plus de compassion. Aux Autochtones aussi bien qu’à tous les Canadiens, nous devons offrir de meilleurs soins palliatifs.
    Pour répondre à votre question, c’est précisément la raison pour laquelle nous devons commencer à en discuter afin d'investir et de voir comment nous pouvons organiser les services.
    J’aimerais rappeler aux députés qu’ils doivent s’adresser au Président.
    Je sais que c’est un sujet particulièrement difficile, aussi je tiens à souligner le niveau de respect qui règne à la Chambre ce matin. C’est tout à l’honneur des députés qui participent à la discussion aujourd’hui.
    Nous reprenons le débat. Le député de Louis-Saint-Laurent.

[Français]

    Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de sérieux et d'émotion que je prends la parole aujourd'hui. Ce n'est pas la première fois; il y a deux ans, alors que j'étais député à 'Assemblée nationale du Québec, j'ai eu également à me lever pour discuter de cette question extrêmement délicate qu'est l'aide médicale à mourir. Au provincial, il était question des soins de fin de vie.
    C'est donc la deuxième fois que je suis confronté à ce vote et à ce débat concernant cette question extrêmement délicate et j'entends me gouverner avec diligence, sérieux, mais surtout avec beaucoup de compassion.

[Traduction]

    D'habitude, quand je prends la parole, c'est pour convaincre. Convaincre, c'est ce que doivent faire tous les élus. Dans ce cas-ci, je ne veux pas convaincre, je veux simplement exposer mon point de vue. Dans les débats politiques, il y a des bons et des méchants. Dans ce cas-ci, il n'y a ni bons, ni méchants; il n'y a que d'honnêtes citoyens qui veulent ce qu'il y a de mieux pour l'avenir du pays et de la population, même si ce débat est très difficile et porte sur une question fort délicate.
    Pourquoi sommes-nous ici aujourd'hui?

[Français]

    Nous sommes ici parce que, il y a un an, en février 2015, la Cour suprême rendait une décision qui avait des conséquences très graves et très importantes. C'était l'arrêt dans l'affaire Carter qui faisait état de l'aide médicale à mourir.
    Essentiellement, la Cour suprême ne demandait pas à la Chambre des communes et au Parlement canadien d'être pour ou contre l'aide médicale à mourir, mais bien de savoir comment l'appliquer. C'est sur ce principe que repose tout notre débat. Nous ne sommes pas ici pour débattre du fait que l'aide médicale à mourir est bonne ou mauvaise, mais plutôt pour savoir comment l'appliquer pour nos citoyens.
    Par contre — j'ai eu l'occasion de le dire souvent, mais je tiens à le répéter ici, à la Chambre, depuis mon siège de député —, je trouve très malheureux que la Cour suprême ait ordonné au Parlement canadien d'agir en l'espace d'à peine un an. C'est tout à fait non responsable. Je sais de quoi je parle. J'ai siégé à l'Assemblée nationale du Québec pendant près de sept ans. J'ai été témoin des six ans de travaux studieux et rigoureux qui ont conduit à l'adoption du projet de loi no 52. Cela a duré six ans, sous trois gouvernements différents, avec trois premiers ministres différents, les honorables Jean Charest, Pauline Maurois et Philippe Couillard. Nous avons travaillé pendant six ans. Il y a eu deux années complètes de consultations directes, et plus de 275 citoyens québécois ont pu s'exprimer sur ce sujet. Cependant la Cour suprême a ordonné au Parlement canadien d'agir en dedans d'un an.
    Pourquoi est-ce que je trouve que ce n'était pas responsable? C'est parce qu'on savait que nous étions dans une année électorale et que ce sujet-là ne tolère pas les discussions politiques partisanes. Malgré cela, la Cour suprême nous a ordonné de faire cela en à peine un an. Or on savait qu'à partir du mois de février, le décompte était commenté jusqu'au mois de juin et qu'après cela, nous arrêtions tout parce que l'élection avait lieu à l'automne et donc qu'un nouveau gouvernement arriverait. Donc rien ne pouvait se faire, théoriquement parlant, pour les parlementaires, avant les mois de décembre ou janvier. Cela a d'ailleurs été le cas. Bref, nous avons perdu six mois pour ce débat extrêmement important.
    Toutefois, tout n'a pas été perdu. En effet, le gouvernement précédent, sous l'égide du très honorable député de Calgary Heritage, a mis sur pied un comité de trois experts, dont un ancien ministre québécois, que je salue. Ce comité a évalué toutes les possibilités légales et parlementaires possible pour cette délicate question et a produit un document de plus de 400 pages. Je suis bien fier de savoir que ce travail a été fait, malgré le fait que nous étions en année électorale. J'aurais l'occasion d'y revenir un peu plus tard, au cours de mon allocution.
    Donc, le rapport est conçu. Il y a eu une élection et le nouveau gouvernement a créé un comité parlementaire que nous pourrions qualifier de bicéphale puisqu'il y avait à la fois des députés et des sénateurs. Le comité était coprésidé par un député libéral et un sénateur conservateur. Bref, la base de la non-partisanerie était établie, et c'est tant mieux.
    Malgré le fait que nos travaux étaient très circonscrits dans le temps — à peine cinq à six semaines —, nous avons tenu 13 rencontres, nous avons entendu 61 témoins et 132 mémoires ont été déposés. C'est bien, eu égard au temps imparti. Je tiens à saluer chacun et chacune de mes collègues qui sont ici présents. Je vois le coprésident de la Chambre, je vois également ma collègue de Toronto. On m'excusera, je ne connais pas par coeur tous les noms de comté. D'ailleurs les noms sont très longs et il faudra peut-être changer cela un jour; mais cela est une autre affaire.
    Donc je tiens à saluer tous mes collègues d'avoir travaillé dans un esprit positif, constructif, non partisan. C'était un sujet affreusement délicat et très difficile, mais nous l'avons fait de façon sérieuse et rigoureuse.
(1305)
    Après tous ces travaux, deux rapports ont été publiés: un rapport principal et un rapport dissident signé par les députés de Langley—Aldergrove, de Kitchener—Conestoga, de St. Albert—Edmonton, et moi-même.
    Avant d'entrer dans le coeur du rapport dissident, dont j'étais cosignataire, je tiens à préciser qu'il est vrai que les députés conservateurs membres du comité l'ont signé. Toutefois, ce n'était pas un rapport dissident conservateur. Les sénateurs conservateurs, eux, ont signé le rapport principal.

[Traduction]

    Ne nous y trompons pas: le rapport dissident n'est pas un rapport du Parti conservateur, c'est un rapport de députés, car les sénateurs conservateurs ont signé le rapport principal.
    C'est très clair, et il faut bien se garder d'y chercher des visées politiques.

[Français]

    Dans le rapport dissident, mes trois collègues et moi avons été animés par le besoin de protéger les plus vulnérables, mais également par l'affaire Carter et, surtout, par ce que nous avons appelé dans notre rapport « l'expérience québécoise ».
    Je suis fier de dire que j'ai été témoin de l'expérience québécoise. Ensemble, nous l'avons appliquée dans le rapport dissident et nous nous sommes basés sur elle pour déterminer ce qui devait être fait. Nous l'avons fait ainsi parce qu'au Québec, on avait pris le temps de le faire correctement.
    Au Québec, après six ans de débats, de travaux, de rigueur intellectuelle et de précautions mises à gauche et à droite, on a abouti à certaines conclusions. Le projet de loi 52 est devenu une loi afin que tout se fasse correctement, avec un certain consensus social.

[Traduction]

    Il est très difficile d'arriver à un consensus sur cette question délicate.

[Français]

    Notre rapport dissident contenait cinq éléments. Je vais en faire la lecture, puis je les reprendrai un par un.
    D'abord, nous estimions que les soins de fin de vie ne devaient pas être destinés aux mineurs. Ensuite, nous avons établi que les gens souffrant de maladie mentale ne devaient pas recevoir l'aide médicale à mourir. Puis, nous avons soulevé la nécessité de protéger la conscience des médecins et des professionnels de la santé. L'aide médicale à mourir ne devrait s'adresser qu'aux gens en fin de vie. Finalement, nous avions une préoccupation majeure concernant les soins palliatifs. Voilà les cinq éléments de notre rapport dissident. Reprenons-les un par un.
    Tout d'abord, il ne fallait pas que cela s'adresse aux mineurs. C'est un sujet très délicat. La Cour suprême parlait d'adultes et non de mineurs. Au-delà de cela, l'expérience québécoise s'adressait uniquement aux adultes. Autrement, cela pose des problèmes quasiment insolubles.
    Imaginons que les parents d'un jeune homme ou d'une jeune femme de 16 ans refusent que leur enfant reçoive des soins de fin de vie. Que peut-on faire? Qui a raison, l'enfant ou les parents?

[Traduction]

    Dans le pire des scénarios, si un jeune de 17 ans réclame des soins de fin de vie et que son père y consent, mais que sa mère ne le veut pas, qui a raison? Faut-il essayer de convaincre la mère? C'est extrêmement difficile et délicat.
    C'est pourquoi, à la lumière de l'expérience du Québec, le rapport dissident recommande l'exclusion des mineurs.
(1310)

[Français]

    Par ailleurs, nous ne souhaitons pas que ce projet de loi sur l'aide médicale à mourir s'adresse aux gens souffrant de maladie mentale, car il est presque impossible de déterminer à quel moment ces gens sont aptes à donner leur plein et entier consentement. C'est le propre des gens qui souffrent de maladie mentale de ne pas être conscients de ce qui se passe. Je sais que c'est terrible de dire de telles choses, mais c'est la vérité.

[Traduction]

    C'est la vérité. Pour les personnes souffrant d'une maladie mentale, il est extrêmement difficile d'exprimer clairement ce qu'elles veulent. Si on les place dans une situation de ce genre, on verra le pire. C'est pourquoi, encore une fois à la lumière de l'expérience du Québec, nous les excluons.

[Français]

    Parlons maintenant de la protection de la conscience des médecins et des gens qui pratiquent dans le domaine médical. C'est un sujet délicat, mais très important. Au Québec, on a trouvé une solution un peu particulière, mais qui devrait servir d'inspiration au gouvernement.
    On doit respecter le patient qui veut, en son âme et conscience, recevoir les soins de fin de vie, mais on doit aussi respecter le médecin qui doit donner ces soins. Si le médecin ne veut pas procéder, il faut le respecter. Au Québec, voici ce qu'on a fait: le médecin qui ne veut pas prodiguer ces soins doit référer son patient à un tiers, c'est-à-dire au directeur de l'hôpital ou du CLSC, et ce tiers va référer le patient à un autre médecin. Un médecin ne réfère donc pas son patient à autre médecin, car il y a un tiers. Par conséquent, un médecin, mal à l'aise de traiter un tel cas, ne se trouve pas dans une situation où il réfère son patient à un autre médecin. On doit respecter sa décision. C'est de la dentelle, mais tout est dentelle dans ce projet de loi et dans cette situation de l'aide médicale à mourir. Il faut protéger la conscience.
    Nous estimons aussi — c'est encore une fois basé sur l'expérience québécoise — que c'est la même chose sur la question de la fin de vie. À quel moment le patient peut-il donner son consentement pour l'aide médicale à mourir?
    Au Québec, après y avoir travaillé pendant six ans, on est arrivé à la conclusion que c'était à la fin de la vie et pas avant. Il est bien facile pour un gars comme moi, de 51 ans en bonne santé et qui va bien, de dire qu'à un moment donné, si je suis malade, il n'y aura pas de trouble, les médecins passeront et on n'en parlera plus. C'est facile pour moi de dire cela à 51 ans, quand je suis en bonne santé. Toutefois, aurais-je cette même perception quand je serai dans l'extrême hiver de ma vie? Pas nécessairement, et c'est pourquoi il faut protéger cet aspect. Encore une fois, il y a cinq éléments basés sur l'expérience du Québec, et voici le quatrième: c'est précisément dit que ce sont les patients en soins de fin de vie qui doivent recevoir ce genre d'aide médicale.
    Finalement, il est question des soins palliatifs. Mon collègue du deuxième groupe de l'opposition en a parlé tout à l'heure. Pour nous, c'est extrêmement important d'avoir des soins palliatifs pleins et entiers pour l'ensemble des Canadiens, et non pas uniquement pour le tiers des Canadiens, comme c'est le cas actuellement. Il faut donc mettre beaucoup l'accent sur cela.
    Il y a eu le rapport principal, le rapport dissident et les cinq éléments dont j'ai parlé qui sont basés sur la protection des plus vulnérables, sur l'arrêt dans la cause Carter et sur l'expérience québécoise. Voici donc qu'après avoir déposé notre rapport, il fallait maintenant que le gouvernement procède et dépose son projet de loi.

[Traduction]

    Nous voilà donc saisis du projet de loi C-14. Ce que nous aimons de cette mesure législative, c'est ce qu'elle ne contient pas. Cela peut sembler curieux, mais c'est vrai, car le projet de loi fait abstraction de certains des éléments les plus épineux abordés dans le rapport dissident.

[Français]

    Dans notre rapport dissident, nous ne voulions pas que l'aide médicale à mourir soit accessible aux mineurs ni aux gens souffrant d'une maladie mentale. Le gouvernement a épousé notre position. C'est tant mieux. Nous l'en remercions. Félicitations.
    Toutefois, nous avons quand même d'autres préoccupations concernant ce projet de loi, notamment sur le plan de la protection de la conscience. Dans ce projet de loi, il n'y a aucune disposition concernant la protection de la conscience des médecins et de ceux qui auront à pratiquer la médecine, que ce soit les infirmiers ou les pharmaciens, dans le cadre de l'aide médicale à mourir.
    J'ai posé la question à la ministre de la Santé lors du débat, il y a deux semaines. Elle m'a dit que ce n'est pas mentionné parce que cela relève des provinces. Techniquement, c'est vrai, mais nous sommes ici dans un Parlement fédéral. Dans le préambule même du projet de loi, il est écrit qu'il faut que la loi s'adapte et s'applique d'un océan à l'autre. Il nous faut avoir une politique nationale pour éviter des fluctuations provinciales. Là encore, j'invite le gouvernement à s'inspirer de l'expérience québécoise qui permet la protection de la conscience des médecins.
    Que va-t-il arriver si jamais il n'y a pas cette protection? Cela va se passer selon le bon vouloir des provinces qui diront si oui ou non, ils encadrent cela de telle ou telle façon. Je comprends la bonne volonté de la ministre de la Santé, mais il y a place à trop de flou. Dans cette situation, il n'est pas question de choisir entre une pomme et une orange, il s'agit de choisir entre la vie ou la mort. Le flou n'est pas tolérable dans cette situation. Il faut donner des lignes directrices claires, particulièrement en ce qui concerne la protection de la conscience, parce qu'il n'y a rien de plus fragile et de plus précieux que la conscience de quelqu'un qui est là pour sauver des vies ou mettre un terme à la vie, selon le désir du patient.
    J'invite le gouvernement à observer l'expérience québécoise, de prendre acte de cette expérience, ainsi que de ce que nous avons dit.
(1315)
    Aussi, j'en ai parlé tout à l'heure, au Québec, c'est clair: c'est à la fin de la vie que les soins sont prodigués. Dans la loi, on retrouve — je le lis parce qu'on m'a interpellé à quelques reprises à cet égard et j'ai toujours du mal parce que c'est un peu flou — le concept de « raisonnablement prévisible ».
    Je peux assurer une chose à la Chambre: je vais mourir. C'est prévisible. C'est clair. J'ai 51 ans et je pense que j'en ai fait plus qu'il ne m'en reste à faire. Raisonnablement, je pourrais mourir dans quelques dizaines d'années. Je ne suis pas pressé, soit dit en passant.
    Ce que je veux dire par là, c'est que ce n'est pas clair. Raisonnablement prévisible. Dans une entrevue à RDI, Mme Julie Drolet, une ancienne collègue que je salue, m'a demandé dans sa première question si j'avais compris quelque chose de ce « raisonnablement prévisible ». Eh bien, la réponse est non, pas vraiment. Cela dit, ce n'est pas moi qui ai écrit la loi. Il aurait peut-être fallu poser la question au ministre.
     Tout cela pour dire qu'il faut que ce soit précis, au même titre que ce qui concerne la « protection de la conscience » doit être précis. C'est la même chose pour la question de la fin de vie et de ce qui est raisonnablement prévisible. Or c'est beaucoup trop flou.
    D'ailleurs, le ministre de la Santé du Québec, le Dr Gaétan Barrette, en entrevue à Radio-Canada en fin de semaine, aux Coulisses du pouvoir, s'est dit convaincu qu'on pouvait certainement débattre de ce projet de loi sur le plan juridique concernant la mort raisonnablement prévisible. Il a ajouté que celle-ci devait être raisonnablement prévisible sans égard au pronostic sur l'évolution de la maladie. Or, si la mort est raisonnablement prévisible, cela signifie qu'un pronostic a été établi raisonnablement.
    Cela n'en finit plus, dans une telle situation. J'invite donc raisonnablement, sans jeu de mot, le gouvernement à préciser sa pensée dans cette affaire.
    C'est la même chose quand il est question des infirmières et des médecins. On dit que les soins peuvent être prodigués par les infirmières. Je vais être bien clair. J'ai énormément de respect pour les infirmières qui, selon mon expérience au Québec, tiennent le réseau de la santé à bout de bras — je les en remercie d'ailleurs —, mais quand vient le temps déposer un diagnostic de cette importance, nous croyons que cela relève du médecin. On trouvera que je suis redondant et que je répète toujours la même chose, mais c'est ce qu'a conclu l'expérience québécoise après six ans de travaux sérieux et rigoureux.
    Enfin, pour ce qui est des soins palliatifs, nous sommes tous d'accord pour qu'on y alloue des sommes plus importantes. Or je tiens à rappeler que le dernier budget n'accordait pas de sommes à la situation extrêmement importante et délicate qui est celle des soins palliatifs. Nous avons entendu le leader du gouvernement à la Chambre des communes en conférence de presse qui envisageait d'allouer des sommes de 3 milliards de dollars. Ce sont de beaux mots mais nous souhaitons que ces paroles soient inscrites dans le budget. Le gouvernement peut être assuré que, à cet égard, nous allons l'applaudir à deux mains et l'appuyer.

[Traduction]

     Il n’y a rien de parfait, surtout pas ce projet de loi, mais cela devrait nous préoccuper profondément. Nous devrions être très inquiets, parce que si nous n’adoptons pas une loi, bonne ou mauvaise, nous devrons traiter de l’arrêt Carter. Certaines personnes considéreront cela comme la pire des situations possibles parce qu’alors les associations professionnelles médicales de certaines provinces diront une chose, et celles d’autres provinces en diront une autre; la législature de certaines provinces adoptera certains projets de loi et d’autres législatures adopteront d’autres projets de loi. Il y aura alors beaucoup de remue-ménage au Canada, et la dernière chose que nous voulons est du remue-ménage. Il nous faut un projet de loi qui traite clairement de ces questions.

[Français]

    Je tiens à dire que c'est évidemment avec beaucoup d'émotion que nous prenons part à ce débat. Tous ceux qui vont s'exprimer — non seulement ils ont le droit de le faire mais nous souhaitons qu'ils le feront — auront raison. Personne ici n'a tort, personne ici n'a raison. Nous sommes tous d'honnêtes Canadiens et nous souhaitons le meilleur pour l'avenir de ce pays et pour l'avenir de nos concitoyens.
(1320)
    Monsieur le Président, je remercie mon honorable collègue de ses commentaires très judicieux.
    J'imagine que, à la suite de sa participation au rapport dissident, il doit être content en général. En effet, le gouvernement, dans le projet de loi, a vraiment révisé ce rapport dissident.
    Il y a une question que j'aimerais poser et c'est celle de la conscience. Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut protéger la conscience des médecins et des infirmières praticiennes, mais en fait, cela regarde le droit criminel. Il y a une prohibition criminelle, et il y a maintenant une exclusion à cette prohibition criminelle.
    Où, dans le projet de loi, allons-nous inclure la protection de la liberté de conscience de l'infirmière et du médecin? Je comprends que c'est bien d'avoir un projet qui va inclure tous les Canadiens et que cela va être le même d'un océan à l'autre, mais comme vous le savez et l'avez dit dans votre discours, c'est une question de compétence provinciale.
    Avez-vous d'autres exemples? En tant que président du comité, cela m'intéresse parce que je veux déterminer s'il y a une manière d'accepter un amendement sur cette question ou si une telle protection existe déjà dans le Code criminel.
    Avant que le député réponde à la question, j'aimerais rappeler qu'il est important de s'adresser au Président, et non directement aux autres députés.
    Monsieur le Président, par votre entremise, je vais répondre à la question de mon éminent collègue. Puisqu'il est juriste, il sait de quoi il parle, lorsqu'il est question de droit.
    En effet, cet enjeu relève de la compétence des provinces. Toutefois, l'enjeu est tellement important qu'on ne peut souffrir d'une fluctuation d'une province à l'autre.
    Si on ne protège pas la conscience des médecins dans la loi, il y aura des fluctuations d'une province à l'autre, car certaines associations médicales risquent de la contester. Cela entraînera des retards et amènera des gens à faire du tourisme médical, un terme dont j'ai horreur. Par exemple, des gens de l'Alberta insatisfaits voudront peut-être aller au Québec, et des gens insatisfaits du Québec voudront peut-être aller à Terre-Neuve.
    Dans le cas présent, cela pourrait très bien s'appliquer, puisque, comme le député l'a très bien dit, nous sommes réunis ici parce que cet enjeu relève du Code criminel. C'est la jonction très périlleuse qu'il y a entre le Code criminel et la prestation des soins de santé, qui relève des provinces.
    Je m'imagine mal une province contester une telle loi parce que cela relève de sa compétence. Si, par malheur, un ministre de la Santé de quelque législature que ce soit ose porter un tel verdict, il en subira les foudres de sa propre population.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Louis-Saint-Laurent de son précieux discours, que j'ai écouté attentivement. Je ne vais pas me priver de l'expertise qui est la sienne en ce qui concerne tout ce débat qui a été fait au Québec, comme il nous le rappelait si justement.
    Au Québec, on a bien vu qu'il fallait encadrer cette loi dans les champs de compétence du Québec, ce qui nous a amenés très rapidement à parler de soins de fin de vie, afin de s'assurer de demeurer dans le domaine des soins de santé.
    La décision que nous avons à prendre à Ottawa va-t-elle permettre d'éviter des dérives qui n'avaient peut-être même pas été prévues dans le cas du Québec? Par exemple, des gens se laissent carrément mourir de faim pour avoir accès à des soins de fin de vie.
    En légiférant comme il faut à Ottawa, nous pourrions permettre à des gens qui ont une considération médicale importante de prendre cette décision. Cela nous ramène toujours à la condition de la mort naturelle raisonnablement prévisible. C'est un concept assez flou, je suis d'accord avec mon collègue. Néanmoins, il faudrait éviter que des gens se laissent mourir de faim pour accéder à un service auquel ils ont droit.
    Monsieur le Président, aucune loi ne pourrait empêcher ce genre de dérive, malheureusement. Il faut en être conscient.
    On ne peut pas contrôler les gens qui sont complètement désespérés. On aura beau adopter une loi pour leur demander de ne pas se laisser mourir pour avoir accès à ces soins. Cela va de soi, mais cela n'arrêtera pas ceux qui sont dans l'extrême hiver de leur vie et qui sont si dépourvus et démunis qu'ils en sont rendus là. Doit-on adopter une telle loi? C'est trop difficile.
    Cela nous interpelle tous, en tant que parlementaires. Nous avons certaines responsabilités, mais nous devons également composer avec certaines frontières, notamment notre conscience, qui est propre à tous les humains. C'est pourquoi il faut protéger les plus vulnérables d'entre nous. C'est pourquoi on a mis de côté les mineurs et particulièrement ceux qui souffrent de maladie mentale. Ces gens-là sont beaucoup trop fragiles.
    Si je disais que cela pouvait empêcher ce type de dérive, je serais un fieffé menteur, malheureusement, car on ne peut pas empêcher la dérive humaine. On peut tenter de la réduire, mais l'empêcher complètement est un voeu pieux.
(1325)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je voudrais reprendre la question du député de Mont-Royal au sujet du champ de compétence et de la conscience, parce que cette question est très importante. En fait, l’arrêt Carter reconnaît que la prestation des soins de santé est un champ de compétence partagée, donc il est très clair qu’elle relève aussi du gouvernement fédéral. Il est également important de reconnaître la similarité avec le débat sur le mariage entre personnes de même sexe et de considérer ce qu’a fait le gouvernement libéral de l’époque avec la Loi sur le mariage civil pour protéger la conscience des représentants religieux qui refusaient d’officier à des mariages entre personnes de même sexe. Il était important, dans le cadre de ce débat, de veiller à ce que les représentants religieux qui refusaient de célébrer cette union ne soient pas forcés de le faire. Le gouvernement a inséré cela dans la loi même si la célébration solennelle du mariage était de compétence provinciale.
     Nous voyons ici une similarité très évidente, et si un gouvernement a pu faire cela à l’époque, je ne vois pas pourquoi nous n’inclurions pas la protection de la conscience dans cette loi aussi. En fait, on pourrait insérer un libellé très similaire en présentant un amendement. C’est une question importante. Nous nous devons d’en tenir compte en effectuant un tel changement dans la société. Certaines personnes voudront adopter ce changement, mais d’autres refuseront de le faire, et nous devrions respecter ceux qui ne veulent pas participer à cela.
     Je me demande si ce député voit la similarité entre ces deux débats et s’il est d’accord à ce qu’on inclue une disposition similaire dans cette loi, comme l’ancien gouvernement libéral l’a fait dans la Loi sur le mariage civil.

[Français]

    Monsieur le Président, je vais parler de ce que je connais. Je connais très bien la question de l'aide médicale à mourir et des soins de fin de vie, étant donné que j'ai participé à l'élaboration des deux lois conséquentes. Je peux dire que, dans des cas extrêmement délicats et fragiles, il faut respecter le médecin. J'ai personnellement reçu des appels de médecins québécois qui interviennent. Ils m'ont dit qu'ils étaient là pour sauver des vies et que ce que l'on leur demande actuellement va à l'encontre de ce qu'ils ont toujours pensé. Ils sont d'accord pour le faire, mais il faut être tout à fait conscients qu'ultimement le médecin est là pour sauver des vies.

[Traduction]

    Monsieur le Président, mon collègue aborde cette question d’une manière excellente. Elle touche chacun de nous très profondément. Je le sais d’expérience, car avant le décès de ma mère, nous avons tenu des conversations très délicates à ce sujet.
    Cette question outrepasse les limites de nos tâches parlementaires. Toutefois, nous sommes responsables d’offrir des lignes directrices pour ces conversations.
     Examinons le rôle que jouent les provinces dans cette conversation. J’ai eu personnellement beaucoup de difficulté à appuyer la recommandation 11 du comité, car je suis membre d’une congrégation catholique dans ma circonscription, et un grand nombre de catholiques m’ont dit qu’ils seraient très inquiets si l’on obligeait les églises catholiques à célébrer des services qui vont à l’encontre de leur conscience.
    La loi actuelle renvoie des détails très importants aux organismes de réglementation des provinces et à ceux qui rendent des comptes aux provinces. Notre délai est très serré. Nous devons fournir des lignes directrices que certains ne trouveront pas assez restrictives, et d’autres trop restrictives.
     Mon collègue pourrait-il nous dire ce qu’il pense de la nécessité d’exercer un peu de souplesse en renvoyant cette question aux provinces pour qu’elles en discutent plus en profondeur?
    Monsieur le Président, à en juger par l’expérience du Québec, nous devons tenir ces conversations les uns avec les autres. Il nous faut discuter à fond avec les provinces. C’est ce qui a été fait au Québec.
     Le député a mentionné son expérience personnelle, tout comme notre collègue il y a quelques instants. Je tiens à dire que chacun a le droit d’agir selon sa conscience.
     Au Québec, j’ai appuyé le projet de loi. J’ai voté en faveur de la loi. Toutefois, 22 députés à l’Assemblée nationale s’y sont opposés. Ils étaient tous députés du Parti libéral au pouvoir, et parmi eux il y avait 11 ministres, près de la moitié du Cabinet.
     Je ne veux pas discuter des intentions de chacun.
(1330)

[Français]

    Toutefois, chaque député doit être sûr et certain qu'il a le droit de voter selon sa conscience et que chaque vote est important, chaque vote est bon parce que c'est le vote de chacun des députés.
    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour parler du projet de loi C-14 relatif à l'aide médicale à mourir. Ce n'est pas la première fois que j'ai l'honneur de participer à la discussion sur cette question en tant que députée. J'étais également membre du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir. En tant que membre de ce comité, je suis en mesure d'écouter les pensées de beaucoup de gens, à la fois dans la circonscription Toronto—Danforth et partout au pays, sur cette question très importante qui nous touche tous et qui concerne les soins de fin de vie.

[Traduction]

     J’aurais préféré un projet de loi d’application plus vaste, mais j’appuie le document qui nous est présenté parce qu’il constitue un premier pas dans la bonne direction et qu’il respecte l’engagement d’examiner les importantes questions que sont le vieillissement, la santé mentale et les directives anticipées, comme on le verra dans la suite de mon discours. Il nous faut prendre cette première mesure parce que le dossier traîne depuis trop longtemps déjà. J’aurais appuyé des dispositions plus décisives, mais je suis disposé à m’engager sur cette voie de changement progressif.
     Monsieur le Président, je vais partager mon temps avec la députée d’Hamilton-Ouest—Ancaster—Dundas.

[Français]

    Jusqu'à maintenant, la question était de savoir si on allait permettre ou non le droit à l'aide médicale à mourir. Cependant, aujourd'hui, nous sommes confrontés à une autre question, celle de savoir comment nous allons gérer cette aide. Ce changement dans notre débat est important car, par suite de l'arrêt de la Cour suprême dans l'affaire Carter, l'aide médicale à mourir sera légale dès le 6 juin. L'importance de ce projet de loi est que nous avons l'occasion de créer un système fédéral pour gérer l'aide médicale à mourir.

[Traduction]

     En 1983, la Commission de la réforme du droit du Canada a présenté un rapport intitulé « Euthanasie, aide au suicide et interruption de traitement ». Elle concluait que la loi reflétait trois principes fondamentaux, et je crois que ces principes offrent une base adéquate pour notre débat. Le premier est la protection de la vie humaine comme valeur fondamentale. Le second est le droit des patients à l’autonomie et à l’auto-détermination, ils peuvent prendre leurs propres décisions relativement à leurs traitements médicaux. Le troisième est que la vie humaine doit être considérée d’un point de vue quantitatif et qualitatif.
     Il me paraît particulièrement éclairant que le deuxième principe crée la base d’une approche d’aide médicale à mourir centrée sur le patient. C’est l’approche qu’a adoptée le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir, dont je faisais partie.
     Pour retracer l’historique de ce dossier, j’ai relevé une longue succession de projets de loi d’initiative parlementaire, de projets de loi du Sénat et de motions d’initiative parlementaire à la Chambre. La question nous a été présentée à quelque 11 reprises depuis 1991. La liste des efforts passés dans ce dossier est incroyable et montre bien que nous tentons depuis trop longtemps déjà de comprendre le dossier. C’est pourquoi il me semble si important que la Chambre franchisse cet obstacle et pose un premier geste pour établir un cadre législatif.
     La question n’a pas été débattue seulement ici. D’autres instances l’ont considérée, des comités et des sous-comités par exemple, et divers projets de loi ont été déposés. Il y a un peu plus de 20 ans, le Comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide publiait un rapport intitulé « De la vie et de la mort ».

[Français]

    L'objectif de ce comité était de mettre en scène le débat national qui suivrait dans les années subséquentes. La majorité des sénateurs du comité n'étaient pas prêts à appuyer l'aide médicale à mourir. La minorité du comité a fait des recommandations pour appuyer l'aide médicale à mourir pour une personne capable de prendre des décisions et souffrant d'une maladie irrémédiable, avec des conséquences intolérables certifiées par des médecins.

[Traduction]

    Durant la fin de semaine, j'ai terminé la lecture du livre de l'honorable Steven Fletcher intitulé Master of My Fate, dans lequel il décrit de façon générale son expérience de parlementaire. Le livre porte plus particulièrement sur les projets de loi d'initiative parlementaire qu'il a soumis concernant l'aide médicale à mourir. On y découvre un compte rendu particulier de ce qu'il a vécu à cet égard. M. Fletcher y fait aussi état du très grave accident qui l'a rendu quadriplégique, de son élection au Parlement et de son expérience à titre de ministre.
    Notre plus récente initiative à la Chambre en ce qui concerne l'aide médicale à mourir a un lien avec les deux projets de loi d'origine parlementaire que M. Fletcher a présentés. Le premier, le projet de loi C-581, proposait de modifier le Code criminel pour permettre à un médecin d'aider une personne à s'enlever la vie. Le libellé des critères d'admissibilité consignés dans le projet de loi reprenait de près celui de la décision Carter. À titre d'information pour l'ensemble des députés, j'aimerais lire le critère d'admissibilité le plus important qui se trouvait dans ce projet de loi.
     Seule la personne qui satisfait aux conditions ci-après peut faire une demande d’aide médicale à mourir: [...] elle a reçu d’un médecin un diagnostic de maladie ou d’incapacité graves (notamment une incapacité découlant d’une blessure traumatique) causant des souffrances physiques ou psychologiques qui lui sont insupportables et qui ne peuvent être soulagées par aucun traitement médical qui lui soit acceptable, ou elle se trouve dans un état d’affaiblissement avancé de ses capacités sans aucune chance d’amélioration [...]
    Son autre projet de loi, le projet de loi C-582, proposait d'établir une commission canadienne sur l'aide médicale à mourir, laquelle aurait eu pour fonction de recueillir des données auprès des médecins qui auraient procuré cette aide à mourir. Le projet de loi reconnaissait la possibilité de procéder par étapes.
    Les deux projets de loi ont fait l'objet d'une première lecture, mais on les a laissés mourir au Feuilleton. Toutefois, le 2 décembre 2014, un projet de loi semblable a été proposé à l'autre endroit et débattu à sept reprises. Le dernier débat a eu lieu aussi tard que le 2 juin 2015.
    Or, comme nous le savons tous, la décision Carter est tombée durant cette période s'étendant du 2 décembre 2014 au 2 juin 2015.
(1335)

[Français]

    Il est également intéressant de remarquer que les provinces et les territoires ont débattu activement l'aide médicale à mourir. L'exemple le plus remarquable est celui du Québec, qui a mis en place un comité en 2009, et ce, afin de créer un projet de loi sur l'aide médicale à mourir. La loi est entrée en vigueur en décembre 2015. Comme on a beaucoup parlé de cette loi, je ne vais pas le refaire. Toutefois, je remarque qu'elle comprend une disposition liée à la phase terminale d'une maladie.
    Ce que j'ai trouvé intéressant, c'est le témoignage, devant notre comité, de Me Jean-Pierre Ménard, du Barreau du Québec. Au cours de son témoignage, il a mentionné que, à la suite de l'arrêt Carter, la disposition touchant la phase terminale devrait peut-être être supprimée de la loi québécoise, ce qui démontre que ce type de législation va se développer progressivement.
    Travailler à comité mixte a été une expérience formidable. C'était le premier comité mixte spécial depuis 20 ans. Je pense que c'est une bonne idée d'avoir ce genre de collaboration sur des questions importantes. Nous avons eu une base solide pour formuler nos recommandations grâce aux témoignages et aux observations écrites. Je crois encore aux recommandations du comité. Ces décisions n'ont pas été faciles à rendre. Nous avons perdu des heures de sommeil, nous avons beaucoup discuté et nous avons travaillé ensemble pour rendre nos recommandations.

[Traduction]

     Comment mes antécédents à cet égard orientent-ils mes opinions sur le projet de loi à l’étude aujourd’hui? J’aurais préféré des perspectives plus larges. La plupart des opinions que j’ai recueillies auprès de mes électeurs vont d’ailleurs dans le même sens. Néanmoins, le projet de loi demeure une première étape dans notre approche d’une question complexe.
    Nous devons permettre à la personne de choisir comment gérer la fin de sa vie et reconnaître la valeur de l’idée de la Commission de réforme du droit voulant que le patient soit au centre de la démarche. Nous devons aussi prendre en considération non seulement la durée de la vie, mais aussi sa qualité. Nous devons respecter l’autonomie de chacun et son droit d’échapper à la souffrance sans que, pour autant, des personnes vulnérables soient exposées à des risques. Le projet de loi C-14 nous rapproche beaucoup plus de cet objectif que ne le fait le statu quo.
     J’aurais préféré que nous retirions la notion de mort naturelle et raisonnablement prévisible, qui se rapporte à la prévisibilité d’une mort naturelle. C’est en somme une disposition qui évoque la phase terminale. Elle est vague et elle pourrait imposer une restriction trop large au droit d’un malade d’échapper à la douleur et à la souffrance. Ce que cette terminologie a de préoccupant, c’est qu’elle tend à déprécier la vie des plus âgés d’entre nous. Aux termes du projet de loi, les personnes âgées auront plus de chance d’obtenir la permission de recevoir une aide médicale à mourir.
    Les malades qui sont jeunes souffrent tout autant que les aînés. Je reprends les propos de Steven Fletcher: « Si la personne est un adulte capable, pourquoi donc lui imposer notre façon de voir sa qualité de vie? »
     Le manque de lignes directrices poussées dans le projet de loi a également un caractère trop restrictif. Voici un élément fondamental de l’arrêt Carter: la Cour suprême du Canada a conclu qu’il y a violation du « droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne » si des gens ont l’impression de devoir abréger leurs jours par crainte de ne pouvoir le faire plus tard, le moment venu. Voilà une épineuse question, et je suis heureuse de constater qu’on s’engage à l’étudier plus avant.
    Selon moi, les éléments positifs du projet de loi l’emportent sur ceux qui sont plus négatifs. Je l’appuierai donc. J’estime cependant qu’il s’agit seulement d’une première étape dans une longue démarche.
(1340)
    Monsieur le Président, je remercie ma collègue du travail qu’elle a accompli au comité parlementaire mixte qui étudié l’aide médicale à mourir.
    Ma collègue s’est maintes fois reportée aux propos de mon ancien collègue, Steven Fletcher, qui a comparu au comité. J’ai eu bien des conversations avec lui, et je comprends sa position. Ce qui m’inquiète, c’est que, si M. Fletcher avait eu accès à l’aide au suicide tout de suite après son accident, il aurait fort bien pu s’en prévaloir. Il y aurait eu là une perte énorme pour le Canada et pour sa famille.
    Ma préoccupation, c’est que, lorsque nous donnons suite à ce genre de décision, il y a toujours un risque que la personne mette fin à sa vie sans vraiment le vouloir, ce qui serait une énorme perte. La peine capitale n’a plus cours au Canada. L’une des raisons, c’est qu’il y a un trop grand risque de faire mourir un innocent.
     Comment ma collègue s’assurerait-elle qu’une personne comme M. Fletcher, dans un moment de profonde dépression et d’atroces souffrances physiques, ne fait pas un choix fatal pour lui et préjudiciable pour le Canada, puisqu’elle perdrait la vie et que le Canada perdrait tout ce qu’elle peut lui apporter?
    Monsieur le Président, pour répondre au député, j'aimerais mieux ne pas parler d'une personne en particulier parce que je ne peux pas savoir quelles décisions elle aurait prises si la mesure législative avait alors été en vigueur.
    Je comprends globalement l'argument du député. C'était une question préoccupante pour les autres membres du comité et moi-même lorsque nous avons réfléchi au cas des gens qui ont subi un traumatisme et dont les conditions de vie ont été bouleversées. Quelle décision auraient-ils prise? Certaines personnes qui ont comparu devant le comité en ont parlé. Je pense notamment à Mme Jocelyn Downie.
     D'un point de vue médical, la personne qui vient de subir un traumatisme ne sera pas nécessairement jugée capable de prendre des décisions concernant sa santé en raison de son état psychologique à ce moment-là. De plus, ses problèmes de santé ne seront pas non plus nécessairement jugés irrémédiables.
    Il faut étudier la question plus en profondeur. Il s'agit de l'un des points de vue défendus dans le cadre des témoignages. Je suis donc ravie que nous ayons décidé d'étudier cette importante question plus en détail et d'en débattre.
    Monsieur le Président, cette question nous touche tous, et nous respectons les opinions très personnelles qui sont exprimées.
    Ce qui me préoccupe, dans le projet de loi dont nous sommes saisis, c'est que nous ne parlons pas d'assurer un équilibre dans l'ensemble des choix de fin de vie offerts. Nous parlons des réponses très précises à l'arrêt Carter. Quatre-vingts pour cent des Canadiens n'ont pas accès à des soins palliatifs de qualité. Par conséquent, 80 % des Canadiens en fin de vie, ainsi que leur famille, ne sont pas en mesure de choisir des soins de fin de vie de qualité. Le gouvernement fédéral doit s'engager à corriger cette lacune, mais cela ne s'est pas encore produit. Il n'y a pas un sou dans le budget pour les soins palliatifs.
    Les néo-démocrates ont présenté à la Chambre la motion M-46, qui vise à inciter le gouvernement non seulement à mettre en place une stratégie en matière de soins palliatifs, mais aussi à assumer la responsabilité des domaines de compétence fédérale. Le gouvernement fédéral à un énorme rôle à jouer dans la prestation des services de santé, et il refuse souvent de s'occuper des services de soins palliatifs. Il y a aussi la question liée à la modification des dispositions visant l'assurance-emploi afin d'aider les familles.
    Où est donc l'engagement du gouvernement à entamer une discussion plus vaste sur les soins de fin de vie, à laquelle doivent participer les Canadiens?
    Monsieur le Président, les soins palliatifs sont un élément important de la discussion sur les soins de fin de vie. Cette question a été soulevée à plusieurs reprises à la Chambre et elle est importante.
    J'hésite un peu à lancer des chiffres et des pourcentages. Au comité, nous avons entendu beaucoup de pourcentages différents. Peut-être que nous ne comprenons pas totalement, en ce moment, dans quelle mesure on a réellement accès aux soins palliatifs. Cela nécessite également un examen plus approfondi. Je suis un peu préoccupée par les pourcentages.
    D'après ce que nous avons entendu et lu au comité, les autorités ayant légalisé l'aide médicale à mourir ont accru l'accès aux soins palliatifs de même que la qualité de ces soins.
(1345)
    Monsieur le Président, je suis honorée de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui au sujet du projet de loi C-14, qui fait suite à la décision unanime de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Carter c. Canada. La Cour suprême a donné un an au gouvernement du Canada pour créer un cadre pour la prestation de l'aide médicale à mourir. Ce délai, qui devait prendre fin le 6 février 2016, a été prolongé jusqu'au 6 juin 2016.
    La Cour suprême a donné au gouvernement un court délai pour étudier cette question épineuse qui fera date. J'ai écouté des électeurs qui défendent farouchement l'un ou l'autre des points de vue sur cette question. J'ai beaucoup réfléchi aux implications morales et éthiques de cette mesure législative. Je comprends que c'est un sujet difficile qui suscite beaucoup d'émotions.
    Les sociétés civilisées ont toujours reconnu le caractère sacré de la vie. Partout dans le monde, des pays ont légiféré contre le fait d'enlever la vie à quelqu'un, ce qui a toujours été considéré comme le pire des crimes. La question de l'aide médicale à mourir pose un problème complexe à tous les Canadiens, car elle touche à plusieurs enjeux délicats, notamment les droits et les libertés personnelles prévus par la Charte, la protection des personnes vulnérables et les droits des personnes aux prises avec des douleurs insupportables. Il y a aussi des considérations théologiques, morales et éthiques.
    De plus, il s'agit d'une question chargée d'émotion, tant pour ceux qui adoptent une position ferme d'un côté ou de l'autre du débat que pour ceux qui sont aux prises avec de telles souffrances qu'ils ne souhaitent plus vivre.
    Un autre élément est purement d'ordre économique, qu'il s'agisse de pressions liées à un héritage, d'instabilité financière ou du coût exorbitant des soins médicaux de fin de vie. Nous n'aimons pas mentionner ces facteurs utilitaires, mais on ne saurait nier qu'ils existent.
    En outre, le débat porte également sur notre vision d'une société juste, que l'on estime que la justice soit mieux servie par un libre choix complet ou en limitant parfois le nombre de recours possibles, afin de laisser la porte ouverte à un avenir meilleur, un avenir que l'on attendrait avec impatience plutôt que d'appréhender. J'estime que le projet de loi établit un équilibre entre ces deux points de vue, soit de donner le choix à ceux qui mourront bientôt et qui veulent mettre fin à leurs terribles souffrances, ainsi que de protéger les personnes qui pourraient être vulnérables.
    L'arrêt Carter c. Canada se limite à une personne adulte capable qui consent clairement à mettre fin à sa vie. En outre, la Cour suprême du Canada a précisé que les mineurs et les personnes affectées de troubles psychiatriques n'ont pas droit à l'aide médicale à mourir. J'ai été très soulagée d'apprendre que ces dispositions ne seraient pas incluses dans le projet de loi.
    Pour que la voie vers la fin soit la plus équitable et sécuritaire possible, il est essentiel que toute mesure législative en vue d'une aide médicale soit accompagnée d'un soutien accru en matière de soins palliatifs. Tous les parlementaires ont des histoires à raconter en ce qui concerne leur engagement à l'égard des gens. Nous avons des interactions qui ont sur nous de profondes répercussions et que l'on n'oublie jamais.
    Pendant la campagne, je me suis rendue dans un certain nombre d'établissements de soins de longue durée. Une fois, les candidats présents ont pu se mêler aux gens après leurs discours. Je suis allée à la rencontre d'un homme, qui m'a remis un papier. Il s'agissait d'une pétition demandant plus de travailleurs de soutien personnel. Les larmes lui ont monté aux yeux lorsqu'il m'a demandé de la signer. Je me suis alors assise avec lui, et il m'a expliqué sa situation. Sa femme, qui avait subi un grave accident vasculaire cérébral, habitait au centre et il en prenait soin. Elle était juste là, à côté de nous, dans son fauteuil roulant. Or, ce n'est pas pour sa femme que cet homme faisait toutes ces démarches, parce qu'il était là pour prendre soin de sa femme et qu'il y consacrait toutes ses journées, mais pour les autres patients qu'il voyait manquer de soins au quotidien. Il voulait dénoncer une situation inéquitable, inacceptable et très certainement injuste.
    Il y a beaucoup à faire dans le domaine des soins palliatifs, qui sont indissociables des soins à domicile. Le gouvernement a annoncé qu'il consacrerait 3 milliards de dollars aux soins à domicile, et j'ai été encouragée d'entendre la ministre de la Santé dire qu'elle verrait à ce que tous les Canadiens aient accès à des soins à domicile de qualité. Je suis impatiente d'échanger avec mes collègues pendant les débats qui porteront là-dessus, car j'ai l'intention de lutter bec et ongles pour qu'on améliore — et pas qu'un peu — les soins palliatifs offerts aux Canadiens.
    De par mes fonctions d'aumônière dans diverses écoles secondaires d'Hamilton et d'Ancaster, en Ontario, j'ai passé les 20 dernières années à travailler avec les jeunes. Au fil des ans, j'ai aidé des milliers d'élèves à traverser cette période difficile qu'est l'adolescence et le début de la vie adulte. Leurs tiraillements sont bien réels, tout comme le fardeau que peuvent leur imposer les difficultés familiales, la quête d'identité personnelle, la douleur émotionnelle, la solitude, le rejet ou l'hostilité.
(1350)
    Les jeunes doivent affronter un monde complexe et souvent hostile dans le milieu physique où ils vivent, dans leurs relations avec les autres et dans les univers virtuels où ils sont jetés tête première, souvent sans préparation adéquate. Qu'il suffise de voir les terribles affaires d'intimidation en ligne qui privent des jeunes de joie de vivre, qui les confinent à la tristesse et à la dépression et qui les poussent même au suicide dans certains cas. J'ai foi en nos jeunes. J'ai passé ma vie à croire en eux même lorsqu'ils cessent d'avoir confiance en eux-mêmes. C'est l'oeuvre de ma vie. Dans les moments les plus sombres, alors qu'ils avaient perdu tout espoir, nous avons réussi l'incroyable ensemble. Nous avons trouvé une lueur d'espoir que nous avons nourrie d'amour et qui, avec l'intégration, l'acceptation et la sécurité, est devenue une flamme, puis un feu ardent qui génère l'espoir, le désir de changer le monde et le goût d'aider les autres qui souffrent et qui sont rejetés. Les adolescents de naguère ont accédé au rang de chefs de file mus par la conviction de pouvoir changer le monde. Si l'aide à mourir leur avait été offerte au moment où ils traversaient les affres de leur dépression, ils ne seraient peut-être pas parmi nous aujourd'hui.
    Je suis heureuse de voir que le projet de loi exclut les jeunes de 16 à 18 ans et je voudrais que l'on concentre de nouveau les efforts sur la création d'un monde meilleur, plus joyeux, plus sûr et plus stable pour les jeunes, que ce soit en ligne ou dans l'univers concret.
    J'ai réfléchi aux principes moraux entourant l'aide médicale à mourir. Nombreux sont ceux qui croient ne pas pouvoir appuyer, en leur âme et conscience, l'aide médicale à mourir. J'aimerais maintenant m'adresser à ces personnes et aborder la question de la conscience.
     Souvent, les gens font un parallèle entre leur conscience, leurs valeurs et leurs croyances. Oui, les valeurs et les croyances sont un aspect clé de la conscience d'une personne, mais il y a bien plus. La conscience nous définit en tant qu'êtres humains. Elle nous permet de faire face à la réalité et de tenir compte des faits qui nous sont présentés. Les faits sont les suivants: la Cour suprême du Canada a déterminé que l'aide médicale à mourir est un droit garanti par la Charte. Nous ne devons donc pas déterminer si, oui ou non, nous autoriserons l'aide médicale à mourir; nous devons plutôt décider dans quelles circonstances nous l'autoriserons.
    À mon avis, le projet de loi dont nous sommes saisis a une portée limitée et il est conforme à la Charte, telle qu'elle a été interprétée dans l'arrêt Carter c. Canada. Le projet de loi C-14 correspond au mandat législatif que la Cour suprême a confié au Parlement; il respecte la Charte, mais il tente aussi de protéger les personnes vulnérables et sans défense. Même si nous ne pourrons jamais protéger entièrement les personnes vulnérables, nous pouvons faire de notre mieux. C'est ce que fait le projet de loi C-14.
    Enfin, je tiens à souligner que je suis d'accord pour qu'on respecte les valeurs et les croyances personnelles des médecins et des infirmiers ainsi que les énoncés de mission à l'origine de la création de certains établissements.
     Comme la ministre de la Justice l'a déclaré:
    C'est pourquoi, comme je l'ai déjà mentionné, ma collègue, la ministre de la Santé, travaillera de concert avec ses homologues afin de mettre au point un système coordonné, qui servira à lier les patients aux professionnels consentants.
    Comme l'indique le préambule du projet de loi d'initiative ministérielle, le gouvernement du Canada s’est engagé à élaborer des mesures non législatives visant « à respecter les convictions personnelles des fournisseurs de soins de santé. » Comme la ministre de la Santé l'a indiqué, « les professionnels de la santé auront le droit d'agir comme le leur dicte leur conscience. »
    Je vais continuer à défendre les droits des médecins et des établissements à l'objection de conscience, tout en protégeant les droits des patients à l'accessibilité conférés par la Charte.
    À la lumière de ces arguments, je déclare devant la Chambre mon appui envers le projet de loi à l'étude, lequel est juste et bien conçu.

[Français]

    Monsieur le Président, avec ce projet de loi, une personne peut aller chez un médecin pour de l'aide au suicide. Si le médecin refuse, parce que la personne ne remplit pas les conditions, celle-ci peut aller chez beaucoup d'autres médecins pour obtenir cette aide.
    La députée est-elle d'accord qu'il est nécessaire d'encadrer la pratique d'aller de médecin en médecin?
(1355)

[Traduction]

    Monsieur le Président, comme je l'ai dit, je vais toujours respecter la liberté de conscience des médecins. Comme la ministre de la Santé et la ministre de la Justice l'ont toutes deux confirmé, la question en est une d'accessibilité. Le projet de loi et les deux ministres reconnaissent clairement l'importance de l'accessibilité. Dans nos consultations avec les partenaires provinciaux et territoriaux, nous veillerons à ce que l'accessibilité soit assurée et que l'aide à mourir puisse être obtenue par tous les Canadiens qui la souhaitent.
    Le Canada compte environ 77 000 médecins et plus de 360 000 infirmiers autorisés. Selon moi, on n'aura pas à passer d'un médecin à un autre. Je suis d'avis que, grâce à l'excellent travail de la ministre de la Santé, l'aide sera rendue accessible et il n'y aura pas de conflit entre les questions de conscience et d'accessibilité.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de son discours.
    Je me demandais si, comme sa collègue, elle pense que le projet de loi ne va pas assez loin. A-t-elle des inquiétudes par rapport au respect de la décision de la Cour suprême, à laquelle le projet de loi est une réponse? À son avis, le projet de loi va-t-il suffisamment loin? A-t-elle les mêmes préoccupations que sa collègue qui a fait un discours tout à l'heure? Peut-être que ce n'est pas assez. Peut-être que le projet de loi est trop restreint. Il pourrait ne pas respecter complètement la décision de la Cour suprême.

[Traduction]

    Monsieur le Président, comme je l'ai indiqué clairement dans mon discours, j'estime que le projet de loi en fait assez pour respecter la décision dans l'affaire Carter c. Canada.
    J'ai exprimé des préoccupations à un seul égard, soit les mineurs et les soins psychiatriques, et je suis contente de voir que le projet de loi n'inclut pas les mineurs et les personnes ayant des troubles psychiatriques. Je dis cela en me fondant sur mon travail auprès des jeunes.
    Voilà 20 ans que je travaille auprès des jeunes et je les vois traverser des périodes très difficiles. Je suis auprès d'eux lorsque ça ne va vraiment pas. J'emmène ces mêmes jeunes en République dominicaine pour une mission, et je constate comme l'expérience de travailler auprès des pauvres change leur vie.
    Ma priorité serait de m'assurer que les jeunes reçoivent le soutien qu'ils souhaitent et que ceux qui sont à la fin de leur vie reçoivent également, au moyen de soins palliatifs, l'appui qu'ils méritent et dont ils ont besoin.
    Monsieur le Président, je tiens à féliciter ma collègue d'Hamilton-Ouest—Ancaster—Dundas pour son excellent discours. Je lui suis très reconnaissant des conversations qu'elle et moi avons tenues sur le sujet, et je la remercie de ce qu'elle m'a appris de par son expérience de travail auprès des adolescents.
    Parlons du droit à la liberté de conscience. Déjà, beaucoup de députés d'en face ont mentionné qu'ils estiment que le droit à la liberté de conscience doit être inclus dans le projet de loi et qu'il nous faut trouver un moyen de l'inclure dans le Code criminel. Quelle est la position de la députée à cet égard?
    Monsieur le Président, comme je l'ai indiqué, je crois que la liberté de conscience des médecins et des professionnels de la santé sera protégée, grâce aux assurances qui nous été données par la ministre de la Justice et la ministre de la Santé.
    J'hésite à inclure dans le projet de loi des restrictions concernant la liberté de conscience ou à lui donner préséance parce que je crois que cela créerait un très dangereux précédent.

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Déclarations de députés]

[Traduction]

Gaetano Gagliano

    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour honorer la vie et le legs d'un grand Canadien, M. Gaetano Gagliano.
    M. Gagliano était un entrepreneur, un visionnaire, et un homme très croyant. Il a été marié pendant 70 ans avec Giuseppina, et leur union a engendré 10 enfants, ainsi que 51 petits-enfants et arrière-petits-enfants. Membre de l'Ordre du Canada dans son pays adoptif, il avait aussi reçu la plus haute distinction offerte à un citoyen en Italie, sa mère patrie.
    Après la Seconde Guerre mondiale, le jeune Gaetano a émigré de l'Italie. En 1956, il a installé un atelier d'imprimerie, nommé en l'honneur du saint patron du Canada, dans le sous-sol de la résidence qu'il avait louée. De nos jours, Saint-Joseph Communications est devenue la plus grande société privée de communication du Canada.
    À l'âge remarquable de 86 ans, Gaetano a fondé Sel + Lumière, le premier réseau de télévision catholique du pays, qui jouit maintenant de l'appui du pape François.
    Gaetano a toujours mis Dieu au centre de sa vie, et il servait de modèle à bien des gens.
(1400)

La sclérose en plaques

    Monsieur le Président, bon nombre d'entre nous savent que des marches ont été organisées dans toutes les régions du pays afin de sensibiliser la population et de recueillir des fonds pour la lutte contre la sclérose en plaques.
    J'ai eu l'occasion de participer à la marche de l'espoir organisée dans ma ville, Lindsay, où plus de 10 000 $ ont été amassés.
    Je tiens à féliciter les bénévoles et les participants non seulement de ma circonscription, mais de l'ensemble de notre grand pays, y compris Rheanon Antoniak, de Fenelon Falls. Non seulement cette femme est atteinte de sclérose en plaques, mais elle a aussi été, pendant trois années de suite, la présidente d'honneur de la marche de Lindsay et la personne qui a recueilli le plus d'argent lors de cet événement.
    Selon la Société canadienne de la sclérose en plaques, environ 100 000 Canadiens, surtout âgés entre 15 et 40 ans, sont atteints de sclérose en plaques. Hélas, le Canada est particulièrement touché par la maladie. C'est ici que l'on compte le plus grand nombre de personnes atteintes.
    Je peux personnellement témoigner des effets que cette maladie peut avoir sur une famille. Ma mère est décédée en 2013 après avoir lutté pendant une décennie contre une forme évolutive de la sclérose en plaques.
    Il n'y a malheureusement aucun remède contre la sclérose en plaques. Cependant, tous les jours, les chercheurs en apprennent davantage sur les causes de cette terrible maladie et...
    Le député de Mission—Matsqui—Fraser Canyon a la parole.

Le Temple de la renommée des sports d'Abbotsford

    Monsieur le Président, j'aimerais aujourd'hui féliciter Dean Arsene et Courtney Inman, qui ont été intronisés au Temple de la renommée des sports d'Abbotsford. Je félicite du même coup les 5 équipes et 13 athlètes dont le nom a aussi été inscrit sur le Mur de la renommée.
    Le Mur de la renommée rend hommage aux athlètes prometteurs de 14 à 25 ans qui se sont démarqués dans leur discipline. Leur nom figurera toute l'année sur une plaque installée dans le centre sportif Legacy.
    C'est grâce à leur persévérance et à leur fougue que ces athlètes ont pu accomplir tous ces exploits.
    Félicitations, donc, aux athlètes qui étaient à l'honneur samedi dernier. Ils sont un exemple pour les jeunes, à qui ils enseignent qu'il faut demeurer actif au quotidien et que, lorsqu'on aime ce qu'on fait, il suffit de pratique pour atteindre ses objectifs.

Le Mois du patrimoine asiatique

    Monsieur le Président, depuis plus d'un siècle, des gens venus d'Asie s'établissent au Canada et contribuent à la mosaïque multiculturelle de notre pays.
    Ce mois-ci, les Canadiens auront l'occasion d'explorer les cultures asiatiques pendant les célébrations du Mois du patrimoine asiatique.
    Le festival ExplorAsian et les organismes participants offriront, pendant tout le mois de mai, un programme exceptionnel qui va de la musique aux expositions d'art, en passant par les documentaires percutants et les festivals de films, autant de façons de faire connaître les obstacles auxquels les Canadiens d'origine asiatique se sont butés, de même que leurs nombreuses réalisations.
    Pour commencer le mois en beauté, j'ai participé, la fin de semaine dernière, au vernissage de l'exposition d'un maître primé de la calligraphie chinoise, Wai Yin Lau. Ce résidant de Vancouver-Est présente six formes de calligraphie chinoise au Centre culturel chinois.
    Toujours au Centre culturel chinois, on pourra admirer, le 28 mai, des performances de la Corée, du Japon, de la Chine et de la Polynésie à l'occasion du festival d'art Together.
     J'encourage les Canadiens à profiter des activités offertes dans leur localité pour explorer et célébrer la culture et le patrimoine asiatiques au Canada.

La bataille de l'Atlantique

    Monsieur le Président, hier, j'ai eu l'honneur de déposer une couronne devant la Flamme du centenaire au nom des anciens combattants de Surrey pour commémorer la bataille de l'Atlantique.
    Pendant la Seconde Guerre mondiale, les convois ont affronté des tempêtes, des sous-marins et des raids aériens afin de préserver la ligne vitale de communication de la Grande-Bretagne. De courageux Canadiens de notre force navale, de notre marine marchande et de notre force aérienne ont aidé la Grande-Bretagne à tenir le coup et à préparer la libération de l'Europe.
    Ce fut la guerre de mon père. À titre d'opérateur d'ASDIC, il attendait impatiemment d'entendre le « ping » des sous-marins allemands sur le NCSM Kincardine et le NCSM Galt, deux petites corvettes dures à cuire et capables, selon lui, de « rouler sur du gazon mouillé » alors qu'elles assuraient la correspondance entre Halifax et Sidney.
    C'était une tâche malaisée et dangereuse. Plus de 1 600 marins marchands canadiens, soit un sur sept, ont été tués ou blessés, à l'instar de plus de 2 000 membres de notre marine et de notre force aérienne. Comme nous le savons, nombreux sont ceux qui n'étaient que des enfants.
    J'espère que mes collègues de la Chambre se joindront à moi pour rendre hommage à ces Canadiens qui ont mené la bataille la plus longue de la guerre; ils se sont bien battus et ont gagné.

Les Wranglers de 100 Mile House

    Monsieur le Président, c'est un grand plaisir pour moi de féliciter les Wranglers de 100 Mile House pour leur saison exceptionnelle. Non seulement sont-ils les champions de la ligue de hockey junior Kootenay International et de la division junior B de la Colombie-Britannique, les gars de 100 Mile House ont également remporté la coupe Keystone, le championnat de l'Ouest du Canada.
    Le chemin de la victoire était semé d'embûches; c'est grâce à l'appui indéfectible de leurs proches qu'ils l'ont suivi jusqu'au bout. Même à Esquimalt, 40 % des billets avaient été achetés par des supporters des Wranglers. Ils ont fini par battre les Dynamiters de Kimberley en cinq matchs pour remporter la victoire à Regina.
    Comme l'a rapporté un journaliste local, « De Thunder Bay, en Ontario, jusque dans l'Ouest canadien, tout le monde sait que ces 22 gaillards, qui représentent si bien 100 Mile House par le respect et l'esprit de communauté dont ils font preuve, n'ont jamais abandonné et qu'ils ne ménagent aucun effort lorsqu'ils sont sur la glace. »
    La parade et la fête en plein air étaient dignes des joueurs des Wranglers et de l'organisation au complet. Bravo, Wranglers! Ce sont les champions de l'Ouest.
(1405)

Le bénévolat

    Monsieur le Président, j'ai récemment rencontré deux bénévoles extraordinaires à Langley.
    La première bénévole est Pauline Knight, qui a eu 100 ans en février. Depuis 24 ans, Pauline est bénévole à la Langley Senior Resources Society.
    Le deuxième bénévole que j'ai rencontré est Rob Ross, qui a toujours eu à coeur les enfants. Enseignant et directeur à la retraite ainsi que père de famille, M. Ross travaille bénévolement à l'Association des Grands Frères et Grandes Soeurs de Langley depuis 40 ans. Depuis ses débuts à titre de bénévole, Rob a accompagné 14 « petits », et nombre d'entre eux occupent toujours une place importante dans sa vie.
    En parlant de bénévoles, monsieur le Président, je vous invite, j'invite mes collègues et j'invite tous les Canadiens à célébrer Cloverdale à la mode de chez nous. Le 70e rodéo de Cloverdale, deuxième rodéo communautaire en importance au Canada, et la 128e foire agricole se tiendront du 20 au 23 mai prochains. Tous les éléments d'une grande célébration communautaire y sont réunis grâce aux innombrables bénévoles qui y participent. Il y aura des activités pour tous les âges et pour tous les goûts.

Le Championnat de hockey midget

    Monsieur le Président, Quispamsis, au Nouveau-Brunswick, a été l'hôte la semaine dernière de la Coupe TELUS, et nous avons eu droit à toute une semaine. La Coupe marquait la fin d'une saison qui avait débuté, l'automne dernier, avec 152 équipes avides de décrocher le titre de championne canadienne de hockey midget.
    C'était digne des plus belles histoires. Le Canada s'est réuni pour regarder les héros locaux, les Vito's de Saint John, livrer bataille en finale à la fierté de l'Ontario, les Rangers de North York. C'était la première fois qu'une équipe du Nouveau-Brunswick se rendait en finale. J'étais parmi les milliers de spectateurs réunis au qplex dimanche dernier et j'ai été émue de voir la foule se lever pour applaudir durant la dernière minute de jeu les Vito's, qui ont gagné la médaille d'argent.
    Je tiens à féliciter tous les joueurs, tous les organisateurs, tous les commanditaires et tout spécialement le président de l'événement, Aaron Kennedy, pour le succès retentissant du tournoi.
    Je remercie les Vito's de Saint John de nous rappeler que le hockey est vraiment notre sport national et que ce sport forge le caractère, promeut l'esprit d'équipe, donne naissance à des amitiés durables et rassemble les gens.

Le Forum parlementaire sur la liberté de culte

    Monsieur le Président, d'éminents universitaires, chefs religieux et diplomates ainsi que des citoyens participeront aujourd'hui à la cinquième édition annuelle du Forum parlementaire sur la liberté de culte, qui se tient sur la Colline du Parlement.
    Les quatre éditions précédentes ont été l'occasion d'aborder des questions particulières liées au droit à la liberté de pensée et de croyance. Chacune de ces questions a donné matière à réflexion et a amené les participants à revoir leurs engagements à l'égard de ce droit fondamental de la personne et, au besoin, à modifier leur approche.
    Le forum de cette année ne devrait pas être différent. Il se déroulera sous le thème « Liberté religieuse ou laïcité? Un monde sûr pour la diversité: Vivre avec nos différences les plus profondes ». Nous nous demanderons si la laïcisation croissante du monde peut demeurer compatible avec le principe selon lequel tous les gens doivent être libres de choisir leurs croyances et de les modifier, ainsi que de s'adonner à une pratique spirituelle quotidienne. Cette année, l'apologiste, auteur et critique social de renom Os Guinness sera le principal conférencier. Il va sans dire que sa solide expertise et sa grande sagesse, acquises au fil de plusieurs décennies, enrichiront ce débat permanent.
    Le Canada considère ces libertés comme essentielles. Cependant, la voie à suivre pour l'avenir n'est pas toujours claire. Voilà pourquoi la discussion de ce soir est si importante.

[Français]

Le Nouvel An bouddhique

    Monsieur le Président, samedi dernier, j'ai pris part à une soirée organisée par la communauté laotienne de ma circonscription, Rivière-des-Mille-Îles, où il y avait plus de 400 personnes. J'ai pu célébrer le Nouvel An bouddhique. Sourires, bonne nourriture et danses culturelles étaient au menu pour ce Nouvel An bouddhique. Savait-on que nous sommes en 2559? Cette communauté laotienne, basée à Boisbriand, s'aligne parfaitement avec les valeurs canadiennes d'inclusion, d'ouverture et d'accueil que nous chérissons tous.
    D'ailleurs, j'aimerais lever mon chapeau et souligner le leadership de la présidente de cette communauté, Mme Manivanh Dougmala qui, depuis plus de 35 ans, s'occupe de l'intégration des immigrants laotiens dans la région de Montréal. C'est grâce à des leaders comme Mme Dougmala que nous travaillons à créer un environnement et un Canada des plus accueillants et chaleureux pour nos nouveaux arrivants.
    Madame Dougmala, continuez votre beau travail et surtout, bonne nouvelle année laotienne 2559!
(1410)

La condition féminine

    Monsieur le Président, étant fière membre du Barreau du Québec, j'ai le plaisir de souligner que cette année marque le 75e anniversaire de l'accession des femmes à la pratique du droit au Québec en 1941.
     Ce succès n'est pas survenu du jour au lendemain. En 1915, Annie Langstaff a été la première Québécoise à obtenir un diplôme en droit de l'Université McGill. Toutefois, malgré tous ses efforts, elle n'a jamais pu pratiquer officiellement son métier. Le 29 avril 1941, la loi sur le Barreau de la province a finalement été modifiée, et c'est en janvier 1942 que les quatre premières femmes étaient admises au Barreau du Québec.

[Traduction]

    Les femmes ont fait bien des avancées depuis lors et elles comptent maintenant pour approximativement la moitié des avocats de la province. Ce progrès constitue un véritable hommage aux pionnières qui ont réclamé un changement il y a 75 ans et qui ont gagné la bataille.

William H. Jarvis

    Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour rendre hommage à William H. Jarvis, qui est décédé la semaine dernière à l'âge de 85 ans.
    Bill a été élu pour la première fois à la Chambre des communes en 1972 en tant que député de Perth—Wilmot. Il a ensuite siégé pendant 12 ans à la Chambre, où il a toujours tenté de répondre aux besoins de sa circonscription et de ses concitoyens. En 1979, il a été nommé au Cabinet comme ministre d'État aux Relations fédérales-provinciales.
    Après avoir quitté la politique active, en 1984, Bill a continué de servir son pays et il a agi à titre de président du Parti progressiste-conservateur du Canada de 1986 à 1989.
    Tous les députés se joindront sûrement à moi pour rendre hommage à Bill et pour transmettre nos condoléances à sa famille, dont sa femme, Louisette, ses enfants, Richard et Elizabeth, et leur mère, Vivian.
    Nous pleurons la perte de Bill, mais nous lui rendons aussi hommage en soulignant tout ce qu'il a accompli, avec dévouement, pour la Chambre, son pays et ses concitoyens.

Le Mois de la santé visuelle

    Monsieur le Président, le mois de mai est le Mois de la santé visuelle. C'est l'occasion de souligner l'apport des Canadiens aveugles ou atteints de cécité partielle et de remercier les personnes qui abattent les obstacles, améliorent l'accessibilité, fournissent des soins de santé oculaire et effectuent ou appuient des travaux de recherche novateurs dans le domaine de la perte de vision.
    Près d'un demi-million de Canadiens vivent avec une grave perte de vision. Avec le vieillissement de la population, on s'attend à ce que la perte de vision augmente de près de 30 % au pays au cours des 10 prochaines années. Plus de cinq millions et demi de Canadiens souffrent de l'une des quatre principales maladies de l'oeil, soit la dégénérescence maculaire liée à l'âge, la rétinopathie diabétique, le glaucome et les cataractes.
    La cécité ou la perte de vision ne devraient cependant limiter personne au Canada. Ce mois-ci, l'INCA, dont le siège social se trouve dans Don Valley-Ouest, demande à la population de s'ouvrir les yeux à la cécité. L'organisme relatera l'histoire inspirante de Canadiens qui vivent avec une perte de vision afin d'éclairer les gens sur la cécité.
    Je vous demande de vous joindre à moi pour souligner le Mois de la santé visuelle.

Les prix littéraires de la Saskatchewan

    Monsieur le Président, avant-hier soir, j'ai assisté à la 23e cérémonie annuelle de remise des prix littéraires de la Saskatchewan, où l'on récompense les auteurs et les éditeurs de notre province.
    Mon ancien professeur, Raymond Blake, était en nomination pour son ouvrage intitulé Lions or Jellyfish: Newfoundland-Ottawa Relations since 1957. Je crois que s'il y avait eu un prix pour le meilleur titre, il l'aurait remporté.
    Je suis très fier que mon collègue de Timmins—Baie James ait remporté deux prix pour son livre Children of the Broken Treaty, publié par les presses de l'Université de Regina. Cet ouvrage donne un aperçu terrifiant de la façon dont le Canada, par des violations de traités, des promesses brisées et une cruelle négligence, a privé les enfants des Premières Nations de leurs droits fondamentaux de la personne.
    Les tragédies comme celles d'Attawapiskat, dans sa circonscription, et de La Loche, dans ma province, sont la preuve que nous devons faire mieux.

L'Iran

    Monsieur le Président, nous entamons aujourd'hui, sur la Colline du Parlement, la Semaine de la responsabilisation de l'Iran, que je suis fier de coparrainer avec la sénatrice Linda Frum.
    Cet événement a pour objectif de sensibiliser davantage la population aux transgressions du régime iranien, notamment à son statut de principal État promoteur d'activités terroristes, à ses ambitions nucléaires, à l'emprisonnement brutal de ses opposants politiques et à son bilan accablant dans le dossier des droits de la personne.

[Français]

    Nous allons donner une voix aux victimes du régime iranien, tout en informant les parlementaires, les médias et les Canadiens des atrocités commises en Iran. Le Hamas et le Hezbollah, deux entités terroristes inscrites au Canada, ont tous deux reçu un soutien essentiel de l'Iran.
(1415)

[Traduction]

    La menace constante de l'Iran à la paix et à la sécurité de l'État d'Israël est un sujet qui devrait préoccuper tous les députés et tous les Canadiens, car l'ayatollah Khamenei réclame sans cesse la destruction d'Israël.
    Nous organiserons de nombreuses activités tout au long de la semaine, comme une soirée de discussion avec des experts sur l'Iran et les transgressions de son régime. Tous sont les bienvenus.

[Français]

Yvon Charbonneau

    Monsieur le Président, je souhaite rendre hommage à un grand homme qui vient de nous quitter, mon ami et l'ami de plusieurs députés de la Chambre, M. Yvon Charbonneau.
    Yvon était grand, c'était un géant. Homme généreux, homme de principe, il était animé par des valeurs nobles, et surtout, il avait le courage de défendre ces valeurs. Tout au cours de sa carrière, Yvon a su faire avancer des causes d'une grande importance, que ce soit à titre de syndicaliste, de député provincial, de député fédéral ou d'ambassadeur. À chaque fois, Yvon a su changer les choses.
    Lorsque j'ai succédé à Yvon en tant que député d'Honoré-Mercier, je savais que les souliers à chausser seraient énormes. J'insiste sur le mot « succédé », car on peut succéder à Yvon, mais on ne peut jamais le remplacer. Il était irremplaçable.
    Je le remercie de son amitié et de ses précieux conseils. Il y aura toujours un peu de lui dans mes actions à titre de député.
    Adieu, Yvon, repose en paix.

QUESTIONS ORALES

[Questions orales]

[Traduction]

Les finances

    Monsieur le Président, encore une fois, le ministère des Finances du premier ministre a confirmé —  roulement de tambour, s'il vous plaît — que les conservateurs ont laissé un excédent considérable aux Canadiens. C'est un fait indéniable, mais hélas, au lieu de suivre notre exemple et de chercher à réduire les impôts, à rétablir l'équilibre budgétaire et à créer des emplois, le premier ministre s'affaire à augmenter les impôts et à dépenser imprudemment, d'autant plus qu'il n'a pas de plan pour créer des emplois.
    Si le premier ministre n'est pas disposé à admettre les faits, comment pouvons-nous compter sur lui pour diriger notre économie?
    Monsieur le Président, le ministère des Finances m'a informé que nous serons en situation déficitaire au cours de l'année 2015-2016. Le rapport financier annuel sera rendu public en septembre.
    Nous nous concentrons sur des dossiers que les Canadiens ont à coeur. Au lieu de chercher à équilibrer le budget à tout prix, nous investissons dans l'avenir du Canada; nous investissons dans les Canadiens. Nous avons commencé par accorder une baisse d'impôt, et nous poursuivrons sur cet élan grâce à un budget qui aidera les Canadiens à améliorer leur qualité de vie, comme ils nous l'ont demandé le 19 octobre.
    Monsieur le Président, lorsqu'on lui a posé une question sur l'excédent budgétaire que les conservateurs avaient visiblement laissé au gouvernement, le ministre des Finances a dit que les libéraux ne voulaient pas insister là-dessus. On peut tout à fait le comprendre parce que son ministère, le directeur parlementaire du budget et les économistes lui disent tous qu'il est le seul responsable des déficits que le Canada pourrait accuser et que les Canadiens devront rembourser.
    Comment les Canadiens peuvent-ils compter sur le gouvernement pour diriger l'économie quand le ministre des Finances refuse même d'admettre les faits?
    Monsieur le Président, nous mettons en oeuvre un plan qui améliorera concrètement la situation des Canadiens. Nous commençons par aider les gens de la classe moyenne à améliorer leur sort. Nous avons accordé des allégements fiscaux et instauré l'Allocation canadienne pour enfants, qui améliorera vraiment la situation des Canadiens. Les premiers chèques seront émis en juillet prochain. Nous allons ensuite faire des investissements qui amélioreront beaucoup, et pendant longtemps, la productivité et la vigueur de l'économie canadienne. Le Canada se portera donc beaucoup mieux que pendant la dernière décennie, lorsque le gouvernement précédent était au pouvoir.

[Français]

    Monsieur le Président, les libéraux ignorent les faits et la vérité. Nous avons maintenant la confirmation que les conservateurs ont laissé un surplus important.
    Le premier ministre va-t-il maintenant admettre que nous avons laissé un surplus et qu'il est le seul responsable du gâchis financier actuel?
    Monsieur le Président, les professionnels du ministère des Finances m'ont dit que nous serions dans une situation de déficit pour l'année 2015-2016. Le rapport annuel financier sera prêt au mois de septembre.
    Cela veut dire que nous allons maintenant prendre des mesures pour faire croître l'économie. C'est ce que nous comptons faire maintenant pour nous assurer d'améliorer la situation des Canadiens de la classe moyenne.
(1420)
    Monsieur le Président, je suis très rarement d'accord avec le ministre des Finances, mais là, il a raison. Ils auront un déficit; nous avions un surplus. Je suis d'accord avec lui.
     La revue financière du ministère des Finances déclarait un surplus de 7,5 milliards de dollars à la fin février. Malgré tout, on nous annonce un déficit important.
    Est-ce qu'ils vont accuser un déficit de 13 milliards de dollars seulement pendant le mois de mars? J'aimerais entendre le ministre des Finances là-dessus.
    Monsieur le Président, ce que je veux dire, c'est que nous savons maintenant que nous serons dans une situation de déficit pour l'année 2015-2016. Le rapport sera prêt au mois de septembre. Maintenant, nous avons un plan pour faire croître l'économie, parce que c'est ce qu'on doit faire lorsque le niveau de croissance a été très bas au cours de la dernière décennie.

L'industrie forestière

    Monsieur le Président, j'aimerais aborder un autre sujet très important. Comme 4 000 personnes, hier, j'ai participé à une marche à Saint-Félicien pour soutenir l'industrie forestière.
     Cette industrie, qui est partout au pays, reçoit depuis plusieurs années des attaques vicieuses de la part de plusieurs groupes environnementaux qui sèment de la désinformation quant à nos pratiques forestières au pays.
    Peut-on nous confirmer, aujourd'hui, que ce gouvernement va soutenir l'industrie forestière du pays, parce qu'il y a des emplois partout, d'un océan à l'autre?

[Traduction]

    Monsieur le Président, l'industrie forestière du Canada joue un rôle économique important et contribue à la survie de nombreuses localités du pays. Le gouvernement du Canada s'est engagé à soutenir l'innovation et, dans le budget de 2016, il affecte 1 milliard de dollars sur quatre ans, à compter de 2017-2018, aux technologies vertes des secteurs forestier, minier, agricole, halieutique et énergétique.

[Français]

Air Canada

    Monsieur le Président, en fin de semaine, le premier ministre était très fier de dire que le Québec était entendu à Ottawa. Pourtant, dans le dossier de l'aide à Bombardier, cela fait des mois qu'il nous sert la même cassette.
     Que ce soit en campagne électorale ou depuis qu'ils forment le gouvernement, les libéraux n'ont présenté aucun plan pour soutenir l'aérospatiale. On parle d'une industrie qui emploie directement 76 000 Canadiens, dont plus de la moitié au Québec.
    Le premier ministre va-t-il enfin comprendre l'importance de ce secteur pour notre économie et présenter un plan clair pour l'aérospatiale?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le gouvernement comprend l'importance du secteur aérospatial. Nous savons qu'il crée 180 000 emplois d'un océan à l'autre. Nous savons qu'il apporte 29 milliards de dollars à notre économie.
    Il soutient aussi tout un noyau de fournisseurs. C'est la raison pour laquelle nous discutons avec l'entreprise. Nous avons entamé un véritable dialogue avec elle pour nous assurer de la mettre sur la voie de la réussite à long terme, car nous voulons un secteur aérospatial prospère et dynamique dans notre pays.

[Français]

    Monsieur le Président, cette réponse n'était ni claire ni précise.
    Ce gouvernement ne démontre aucun intérêt à soutenir les travailleurs de l'aérospatiale et leur famille. Il préfère donner un chèque en blanc à Air Canada avec son projet de loi C-10 qui sacrifie le travail et la qualité de vie de 2 600 familles. Il n'a même pas le courage qu'on en débatte à fond au Parlement.
    Le premier ministre n'a-t-il pas honte d'abandonner ainsi les travailleurs, après avoir manifesté à leurs côtés?
    Monsieur le Président, comme on le sait, le gouvernement du Québec et le gouvernement du Manitoba ont indiqué leur intention d'abandonner leur litige avec Air Canada. Cela nous permet de clarifier la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada. C'est ce que nous sommes en train de faire, afin de s'assurer qu'il n'y aura pas de litige à l'avenir.
    Toutefois, je rappelle à ma collègue qu'il y aura des emplois au Québec, en Ontario et au Manitoba.

[Traduction]

L'environnement

    Monsieur le Président, la côte Nord de la Colombie-Britannique est d'une beauté à couper le souffle et est connue pour la force de ses habitants.
    Par deux fois, le premier ministre et son ministre des Transports se sont joints à nous et à la population de la Colombie-Britannique pour interdire tous les superpétroliers au large de la côte. Interrogé au sujet de la menace que représente le projet Northern Gateway d'Enbridge, il a dit : « Je n'approuverai pas ce pipeline. ».
    Va-t-il maintenant prendre la parole et dire aux Britanno-Colombiens quand il va enfin présenter une mesure législative interdisant les pétroliers au large de notre magnifique côte?
    Monsieur le Président, comme tout le monde le sait, j'ai été mandaté pour instaurer un moratoire officiel sur la circulation des pétroliers de brut sur la côte Nord de la Colombie-Britannique. C'est ce que je fais, de concert avec mes collègues, le ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, la ministre de l'Environnement et le ministre des Ressources naturelles. Nous procédons en ce moment à des consultations avec les Premières Nations, avec des groupes environnementaux et avec l'industrie du transport maritime. Nous faisons nos devoirs.
    Lorsque nous aurons quelque chose à déclarer, nous le ferons.
(1425)
    Monsieur le Président, combien de temps faut-il, au juste, pour dire « non »?
    Encore une fois, le gouvernement refuse de nous donner un échéancier précis et ne fait qu'embrouiller les cartes.
    Il y a quelques jours, je me suis rendu sur la côte centrale de la Colombie-Britannique et dans l'archipel Haida Gwaii. Les gens qui y vivent, les Premières Nations, trouvent consternant et bouleversant que le gouvernement refuse d'être clair et semble prêt à renier une promesse sacrée.
    Le premier ministre s'est déjà rendu à Haida Gwaii, où il a promis aux habitants, aux Haïdas, aux Britanno-Colombiens, d'être leur allié et d'interdire la circulation des pétroliers.
    Quand tiendra-t-il sa promesse?

[Français]

    Monsieur le Président, comme je l'ai mentionné, ma lettre de mandat m'oblige à créer un moratoire formel sur le transport du pétrole brut sur la côte Nord de la Colombie-Britannique. C'est ce que je suis en train de faire, en travaillant avec mes collègues, le ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, la ministre de l'Environnement et le ministre des Ressources naturelles. Ce travail est en cours en ce moment.
    Nous consultons également les Premières Nations, les groupes environnementaux et l'industrie du transport maritime. Aussitôt que nous aurons des nouvelles à annoncer, je les annoncerai.

[Traduction]

Les finances

    Monsieur le Président, voici un petit résumé de ce qui s'est passé pendant la semaine de relâche parlementaire.
    La semaine dernière, Finances Canada a annoncé que le gouvernement fédéral avait un excédent de 7,5 milliards de dollars. C'est la quatrième fois que des fonctionnaires de Finances Canada confirment que le gouvernement conservateur a laissé un excédent budgétaire, et ce, grâce à sa saine gestion économique et à sa prudence en matière d'équilibre budgétaire.
    Quand on lui a posé des questions au sujet du rapport, le ministre des Finances les a balayées du revers de la main en déclarant qu'en toute honnêteté, son attention était ailleurs.
    Les Canadiens tiennent pourtant à le voir porter attention aux chiffres. Voici donc ma question à l'intention du ministre des Finances: quand cesserez-vous d'induire les Canadiens en erreur au sujet de la situation financière du gouvernement?
    Je crois que la députée souhaitait demander « quand cessera-t-il » et non « quand cesserez-vous ». J'espère que sa question ne s'adressait pas à moi.
    Le ministre des Finances a la parole.
    Monsieur le Président, Dieu merci, les Canadiens ont fait le bon choix le 19 octobre.
    De toute évidence, les députés d'en face sont encore obsédés par cette histoire d'équilibre budgétaire. Vraiment, ils...
    Des voix: Oh, oh!
    À l'ordre, s'il vous plaît. Je sais que les députés sont impatients d'applaudir la réponse du ministre, mais ils doivent lui laisser le temps de finir.
    Le ministre des Finances a la parole.
    Monsieur le Président, il y a deux choses.
    Premièrement, un exercice financier dure 12 mois. Deuxièmement, les Canadiens nous ont élus pour que nous investissions dans l'économie. Ils nous ont chargés d'investir dans la croissance à long terme du pays, et c'est exactement ce que nous avons l'intention de faire.
    Monsieur le Président, les libéraux ont bel et bien hérité d'un surplus de 7,5 milliards de dollars. Néanmoins, leur plan est de nous endetter de milliards de dollars. Il est intéressant de noter que le ministre des Finances a écrit un livre dans lequel il écrit que l'endettement empêche de faire des choses, comme de dormir sur ses deux oreilles.
    Ma question au ministre des Finances est la suivante: comment dort-il?
    Monsieur le Président, je suis on ne peut plus ravi d'informer la députée que je dors très bien, car je sais que ce que nous sommes en train de faire assurera un meilleur avenir à mes enfants et à mes petits-enfants. Nous sommes en train d'améliorer leur sort en investissant dans l'économie. Nous investissons dans les infrastructures pour améliorer leur vie, pour qu'ils aient un avenir meilleur. Nous investissons dans une économie novatrice qui permettra d'augmenter véritablement la productivité de notre pays.
    Le 19 octobre, les Canadiens ont fait le bon choix. Ils ont choisi d'investir.
    Monsieur le Président, le ministre des Finances doit être frustré de voir les faits interférer avec ses beaux discours. Encore une fois, il a été complètement contredit par son propre ministère, qui a rapporté que les conservateurs lui avaient légué un excédent budgétaire de 7,5 milliards de dollars.
    Le ministre des Finances essaiera-t-il au moins de garder un peu de crédibilité en admettant enfin que les conservateurs lui ont laissé un excédent, qu'il a gaspillé avec ses propres dépenses déraisonnables?
(1430)
    Monsieur le Président, je ne peux que le répéter.
    Les professionnels du ministère des Finances nous disent que nous aurons un déficit pendant l'exercice 2015-2016, qui n'est pas encore terminé. Lorsque les rapports paraîtront en septembre, nous verrons les résultats. D'ici là, nous nous concentrons sur ce qui importe vraiment aux Canadiens: que nous fassions des investissements pour améliorer leur vie. C'est exactement ce que nous faisons.
    Monsieur le Président, c'est déjà assez regrettable que le ministre des Finances ait dilapidé l'excédent sans qu'il continue en plus à détruire sa crédibilité.
    Pendant des mois, le ministre des Finances a fait fi de l'analyse indépendante du directeur parlementaire du budget, des économistes du secteur privé et de son propre ministère des Finances. Il a préféré s'en remettre à ses propres tours de magie pour échafauder un budget déraisonnable.
    Pourquoi le ministre des Finances pense-t-il que sa mauvaise gestion des deniers publics est avantageuse?
    Monsieur le Président, j'aimerais clarifier la déclaration récente du directeur parlementaire du budget. Il a dit que, dans les faits, le budget de 2016 contribuerait à stimuler l'économie, ce qui est exactement ce que nous avons proposé aux Canadiens.
    Nous nous attendons à ce que les mesures que nous avons énoncées dans le budget de 2016 feront croître l'économie d'environ 0,5 % cette année et d'approximativement 1 % l'année suivante, créant ainsi 43 000 emplois cette année et 100 000 l'an prochain. Nous sommes ravis du plan que nous avons présenté et savons qu'il sera bien meilleur pour les Canadiens à l'avenir.

[Français]

    Monsieur le Président, le journal La Presse nous apprend ce matin que, encore une fois, le gouvernement libéral cache des informations importantes aux Canadiens, et cela vient encore une fois du ministère des Finances.
    Le ministère des Finances a analysé le coût des promesses libérales. Or voilà que le document rendu public est complètement censuré par le ministre, et cela, c'est clair, parce que le ministre sait très bien que ses promesses coûtent une fortune aux Canadiens.
    Pourquoi le ministre cache-t-il des informations si importantes pour le porte-monnaie de tous les Canadiens?
    Monsieur le Président, l'ouverture et la transparence du ministère des Finances sont très importantes pour moi et pour notre ministère.
    Dans ce cas, le ministère a répondu à une question en conformité avec toutes les règles nécessaires. C'était indépendant de moi, et c'est bien.
    Maintenant, ce que je tiens à dire, c'est qu'avec notre budget de 2016, les chiffres sont là, et on peut voir exactement ce que nous avons fait.
    Monsieur le Président, sauf le respect que j'ai pour le ministre des Finances, le moins qu'on puisse dire, c'est que, depuis le début, il ne nous a pas habitués à beaucoup de transparence.
    Les changements à l'impôt ne devaient rien coûter. Pourtant, il y a là un déficit de 1,4 milliard de dollars. Les changements à la Prestation fiscale canadienne pour enfants ne devaient rien coûter, mais il y a là un déficit de 1,4 milliard de dollars.
    La question que j'aimerais poser au ministre est claire. S'engage-t-il à rendre publique l'étude faite par son ministère sur le coût des promesses libérales, oui ou non?
    Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit, les chiffres sont dans le budget. On peut y voir les mesures exactes et le coût de ces mesures. C'est ouvert et transparent pour tous les Canadiens et les Canadiennes.

Les affaires autochtones

    Monsieur le Président, après avoir appris que l'Église n'a pas respecté son obligation de verser 25 millions de dollars pour financer les programmes pour les victimes des pensionnats autochtones, la ministre dit qu'elle est impuissante et qu'elle ne peut rien faire. Pourtant, ce montant est dans le règlement approuvé par les tribunaux. De plus, c'est son ministère qui a autorisé l'entente permettant à l'Église d'éviter de payer.
    Quand la ministre des Affaires autochtones et du Nord va-t-elle obliger l'Église à remplir ses obligations envers les victimes des pensionnats autochtones?
    Monsieur le Président, bien que le gouvernement précédent n'ait laissé aucun recours légal, le gouvernement continue de travailler avec les entités catholiques. C'est très important que ces dernières jouent leur rôle dans la réconciliation et qu'elles respectent les engagements qu'elles ont pris à l'égard de la réconciliation, peu importe leurs obligations aux termes de la loi.

[Traduction]

    Monsieur le Président, le Tribunal des droits de la personne a indiqué clairement qu'il en a assez de l'inaction du gouvernement face au problème de la discrimination raciale contre les enfants autochtones. Selon lui, le gouvernement libéral néglige les enfants dans son budget et ne prévoit pas l'argent nécessaire pour la protection de l'enfance. Il continue de leur refuser des services médicaux et se bat contre leurs familles devant la justice.
    Le tribunal ne faisant pas confiance au gouvernement, il a décidé de le mettre en tutelle concernant sa gestion des affaires autochtones. Le premier ministre et ministre de la Jeunesse respectera-t-il cette décision? Dans l'affirmative, quelles mesures le gouvernement prendra-t-il pour mettre fin à la discrimination systémique contre les enfants autochtones du pays?
    Monsieur le Président, nous nous acquittons totalement des obligations que nous impose le tribunal dans sa décision, y compris la nouvelle interprétation, plus large, du principe de Jordan. C'est extraordinaire. J'ai eu une très bonne réunion ce matin avec Mme Blackstock et l'Assemblée des Premières Nations. Nous allons collaborer avec les provinces et les territoires pour nous acquitter de nos obligations.
(1435)

Le commerce international

    Monsieur le Président, il est temps plus que jamais de ratifier le Partenariat transpacifique avant l'élection du prochain président des États-Unis. L'ancien secrétaire à la Défense de M. Obama, Leon Panetta, affirme qu'il est peu probable qu'il soit ratifié si le Congrès ne l'adopte pas avant la fin du mandat de l'actuel président. Or les libéraux sont engagés dans un processus de consultation interminable, et la ministre affirme que ce n'est pas à elle de promouvoir le Partenariat transpacifique.
    Quand la ministre passera-t-elle plus de temps à promouvoir le commerce et moins de temps à satisfaire sa vanité personnelle à Los Angeles?
    Monsieur le Président, le gouvernement du Canada s'est engagé à consulter les Canadiens avant de décider s'il va ratifier l'accord. C'est exactement ce que nous faisons depuis notre arrivée au pouvoir. Le gouvernement a consulté la population au sujet de cet accord à plus de 250 occasions. Je suis d'ailleurs très heureux que le comité du commerce de la Chambre des communes ait invité les Canadiens à lui faire part de leur opinion dans le cadre de ses audiences publiques. Peut-être que c'est un processus auquel le gouvernement précédent n'était pas habitué, mais cela fait partie de nos engagements envers les Canadiens, et nous remplissons cette promesse.
    Monsieur le Président, au printemps dernier, lorsque nous formions encore le gouvernement, nous avons organisé de vastes consultations avant de conclure le Partenariat transpacifique. Le 20 avril, le Hill Times a cité les propos de la principale négociatrice du Partenariat transpacifique; on peut donc penser que ce qu'elle a dit est vrai. Ainsi, elle a déclaré que l'année qui vient s'annonce excitante. Elle aidera la ministre du Commerce international à ratifier le Partenariat transpacifique, un projet sur lequel elle a travaillé d'arrache-pied. Nous sommes d'accord.
    Puisqu'il est maintenant établi que les libéraux ont déjà pris une décision à cet égard, la ministre va-t-elle présenter le Partenariat transpacifique à la Chambre pour qu'elle le ratifie et consacrer plus de temps à faire la promotion du commerce, au lieu de faire de l'autopromotion à grands frais?
    Monsieur le Président, je ne vois pas pourquoi le député n'appuie pas les consultations. Je ne vois pas non plus pourquoi il n'appuie pas l'excellent travail qui été accompli par le Comité permanent du commerce international. La ministre, le secrétaire parlementaire et le gouvernement sont déterminés à tenir la promesse que nous avons faite et à consulter les Canadiens. Nous consacrons beaucoup d'efforts à ces consultations, et j'invite le député et ses collègues à y participer.

Les dépenses ministérielles

    Monsieur le Président, des documents obtenus en réponse à une demande d'accès à l'information révèlent que la ministre du Commerce international a laissé ses fonctionnaires dans l'ombre au sujet de son voyage autopromotionnel en Californie; qui plus est, certaines de ses réponses aux questions au sujet de son voyage de rêve en Californie s'écartent considérablement des faits. Elle a organisé son petit voyage à Los Angeles financé par les contribuables autour de son passage à une émission télévisée de fin de soirée.
    La ministre voit-elle son ministère simplement comme moyen de mousser sa carrière de journaliste soi-disant vedette?
    Monsieur le Président, la ministre s'est rendue à Los Angeles pour renforcer les liens économiques importants qui existent entre la Californie et le Canada, dont les échanges bilatéraux annuels dépassent 40 milliards de dollars.
    La ministre a clairement affirmé avoir respecté toutes les règles applicables en l'occurrence. En plus d'avoir assisté à des tables rondes avec le milieu des affaires et des industries de la création durant sa mission commerciale à Los Angeles, la ministre a fièrement fait la promotion du Canada auprès d'un public américain, notamment en soulignant son leadership dans le dossier des réfugiés syriens.
    Monsieur le Président, nous savons que la ministre a repoussé d'octobre à novembre, soit après sa nomination au Cabinet, le voyage qu'elle prévoyait faire en Californie pour satisfaire à sa vanité. Selon des courriels obtenus en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, son personnel a seulement été mis au courant de son départ à la dernière minute. Apparemment, personne à part la ministre ne savait qu'elle devait se rendre à Los Angeles pour rencontrer Bill Maher.
    Quand est-ce que la ministre fera preuve d'honnêteté et admettra aux Canadiens que c'était un voyage personnel qui n'avait rien à voir avec ses fonctions en tant que ministre du Commerce?
    Monsieur le Président, je fais remarquer au député que les gens d'affaires, les universitaires et les dirigeants gouvernementaux que la ministre a rencontrés lorsqu'elle défendait les intérêts commerciaux du Canada en Californie étaient tous au courant de son voyage.
    Quarante milliards de dollars par année en échanges bilatéraux, ce n'est pas négligeable. Si le député n'est pas d'accord, c'est qu'il ne partage pas la position de notre parti.

La protection de la vie privée

    Monsieur le Président, loin de faire comme il en a la responsabilité et de signaler au commissaire comme il en a la responsabilité, les atteintes graves à la vie privée, le Centre de la sécurité des télécommunications Canada, qui surveille le SCRS, soit dit en passant, les tient au contraire secrètes.
    Le commissaire à la protection de la vie privée a déclaré que le Centre « ne fournit pas suffisamment d'information au Commissariat à la protection de la vie privée ». Le gouvernement est-il du même avis que le NPD et croit-il lui aussi qu'il est tout simplement inacceptable de retenir de l'information sur les atteintes graves à la vie privée?
    Monsieur le Président, je tiens à rappeler à la députée que le Centre de la sécurité des télécommunications Canada ne surveille aucunement le SCRS.
    Pour ce qui est de sa question, le commissariat a pu compter sur la collaboration proactive du Centre à tous les égards. Les deux organismes entretiennent une bonne relation de travail, parce que le Centre respecte toutes les lois du Canada, y compris la Loi sur la protection des renseignements personnels.
(1440)

[Français]

    C'est étrange, monsieur le Président, parce que ce n'est pas ce que le commissaire dit. Clairement, le gouvernement ne prend pas la protection de la vie privée au sérieux. On apprend aujourd'hui que le Centre de la sécurité et des télécommunications refuse de rapporter au commissaire à la protection de la vie privée les violations à la loi sur la protection de la vie privée dont il a connaissance. Par contre, il partage avec ses partenaires étrangers des données sur les Canadiens.
    Le gouvernement va-t-il enfin respecter ses promesses de transparence et exiger que le centre coopère?

[Traduction]

    Monsieur le Président, dans son dernier rapport, le commissariat affirmait qu'un employé du Centre de la sécurité des télécommunications Canada lui avait volontairement remis l'information nécessaire et qu'il avait pu faire son enquête avec toute la rigueur voulue.
    Je rappelle en outre à la députée que le Centre de la sécurité des télécommunications Canada contribue directement à nous protéger contre les cybermenaces, l'espionnage étranger et les menaces terroristes provenant de l'extérieur de nos frontières.

Le recensement

    Monsieur le Président, les données scientifiques constituent la pierre angulaire d'une bonne politique publique. Les Canadiens s'attendent à ce que nous prenions des décisions éclairées fondées sur des données fiables. C'est le rôle que remplit Statistique Canada depuis de nombreuses années au moyen du programme de recensement. Les données recueillies dans le cadre du recensement aident les décisionnaires et les planificateurs à prendre des décisions dans divers domaines, dont la santé publique, le transport en commun ou le logement.
    Le gouvernement peut-il dire à la Chambre à quoi l'on pourra s'attendre lorsque le programme de recensement obligatoire reprendra cette année?
    Monsieur le Président, je remercie le député de Richmond Hill de ses efforts pour ce qui est d'appuyer une bonne collecte de données.
    Je suis fier de déclarer que ma première décision officielle a été de rétablir le questionnaire détaillé obligatoire du recensement. On envoie actuellement à tous les Canadiens au pays des lettres et des trousses relatives au recensement. Les Canadiens auront accès à des données de qualité qui reflètent réellement les besoins des collectivités et des entreprises. Après 10 ans, la prise de décisions fondées sur des données probantes est de retour.

[Français]

Les dépenses ministérielles

    Monsieur le Président, nous savions que la ministre du Commerce international aimait dépenser les deniers publics à l'étranger afin de court-circuiter ses obligations ministérielles au profit d'une apparition dans un talk show hollywoodien.
    La ministre peut-elle nous expliquer comment elle défend l'intérêt commercial du pays alors qu'elle se précipite à Los Angeles pour accorder une entrevue à Bill Maher et refiler une facture de 20 000 $ aux contribuables canadiens?
    Monsieur le Président, comme je l'ai mentionné plus tôt, la ministre a défendu l'intérêt économique du Canada quand elle a rencontré des leaders de la communauté d'affaires ainsi que des fonctionnaires et des élus du gouvernement de la Californie.
    Nous croyons qu'une relation commerciale de 40 milliards de dollars par année est importante. La ministre a conclu des ententes importantes lors de son séjour là-bas.
    Monsieur le Président, en observant les agissements de la ministre du Commerce international, on comprend bien qu'elle n'était pas à Los Angeles pour négocier des ententes commerciales, et ce, dans l'intérêt de la population canadienne.
    Cela dit, est-ce que son gouvernement peut confirmer à la Chambre qu'il appuiera le Partenariat transpacifique, qui, rappelons-le, est bénéfique pour les producteurs de boeuf, de porc, de sirop d'érable et de bleuets?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je répète que le gouvernement est résolu à consulter les Canadiens sur le Partenariat transpacifique. Le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes a entamé une étude sur le PTP. J'invite par conséquent tous les députés à participer au processus de consultation. Nous sommes impatients d'amorcer une discussion constructive à cet égard.
    Monsieur le Président, les propres fonctionnaires de la ministre du Commerce international n'ont été informés de son voyage à Los Angeles que le 17 novembre, deux jours avant son arrivée là-bas. Le directeur des communications du ministère ne savait même pas ce que la ministre faisait dans la ville, à l'exception de sa participation à l'émission télévisée de Bill Maher. Son ministère s'est démené pour trouver des événements auxquels la faire participer afin qu'elle puisse refiler aux contribuables canadiens la facture de ce voyage qui ne servait qu'à satisfaire sa vanité personnelle.
    Quand la ministre du Commerce international payera-t-elle ce voyage personnel afin que les contribuables canadiens n'aient pas à le faire?
(1445)
    Monsieur le Président, le gouvernement libéral n'a pas à s'excuser de faire la promotion des entreprises canadiennes à l'étranger. Quand la ministre du Commerce international était en Californie, comme elle et moi l'avons déjà mentionné, elle a eu une série d'entretiens avec des chefs d'entreprise et des fonctionnaires de l'État de la Californie.
    Nous pensons que faire la promotion de ce qu'accomplit le Canada dans des dossiers cruciaux, comme le soutien à l'endroit des réfugiés syriens, représente une partie importante du travail de chaque député. Nous sommes fiers de la ministre du Commerce international.
    Monsieur le Président, les directives du Conseil du Trésor obligent les ministres à divulguer, une fois par trimestre, leurs frais de déplacement et d'accueil.
    Depuis huit mois, le ministre des Finances voyage partout en Europe, en Asie et au Canada, mais il a divulgué les coûts d'un seul voyage. Il est chargé des finances du pays, mais il refuse d'obéir à la loi pour ce qui est de ses propres déplacements.
    Pourquoi le ministre des Finances cache-t-il ses dépenses aux Canadiens?
    Monsieur le Président, le gouvernement est déterminé à assurer la divulgation proactive des dépenses ministérielles. En fait, c'était un ancien gouvernement libéral, dirigé par le premier ministre Martin, qui a introduit la notion de divulgation proactive des dépenses ministérielles. C'était sous le premier ministre actuel, lorsqu'il était dans l'opposition, que des députés ont, pour la première fois, divulgué proactivement leurs dépenses. Nous demeurons déterminés à assurer la divulgation proactive.

La recherche et le sauvetage

    Monsieur le Président, dans quelques jours, le gouvernement libéral fermera les portes du centre des Services de communication et de trafic maritimes de Comox. Le ministre persiste à affirmer que cela n'entraîne aucun risque.
    Toutefois, pas plus tard qu'en fin de semaine, une panne majeure des systèmes de communication à Prince-Rupert a privé toute la côte ouest de l'île de Vancouver de communications relatives à la sécurité maritime, ce qui a mis la vie de marins en danger.
    Le ministre acceptera-t-il enfin d'annuler la décision des conservateurs concernant la fermeture du centre de Comox?
    Je suis au courant de la panne temporaire qui a eu lieu à Prince-Rupert. Que la Chambre et la députée se rassurent: la panne n'avait rien à voir avec la modernisation des systèmes des Services de communication et de trafic maritimes. C'est la ligne terrestre d'un tiers qui est à l'origine de la panne. En passant, le centre de Comox ne couvre à peu près pas le secteur concerné; il n'avait donc rien à voir avec la situation.
    Monsieur le Président, manifestement, les libéraux choisissent d'ignorer les faits. Durant la campagne, le premier ministre a promis aux Canadiens qu'une fois au pouvoir, il rouvrirait le poste de la Garde côtière de Kitsilano et que celui-ci serait en activité jour et nuit, à longueur d'année. Apparemment, ce n'est pas le cas. Le poste ne rouvrira qu'à temps partiel. Pourquoi le ministre a-t-il trompé les Canadiens à propos de cette promesse?
    Monsieur le Président, en décembre dernier, j'ai annoncé que le poste de Kitsilano rouvrirait ses portes. Je suis fier d'annoncer que nous avons tenu promesse et que le poste a repris ses activités hier.
    Les ressources du poste seront remises en place progressivement. D'ici au long weekend de mai, l'équipe de recherche et de sauvetage comptera le même nombre de membres qu'auparavant.

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, les conservateurs organisent les activités de la Semaine de la responsabilisation de l'Iran sur la Colline du Parlement et ils sont bien conscients que l'Iran est largement considéré comme l'État le plus impliqué dans le terrorisme. Il commandite des groupes comme le Hezbollah et le Hamas. Le Canada a eu raison d'inclure le régime iranien dans sa liste des États qui soutiennent le terrorisme. Les victimes du terrorisme peuvent ainsi poursuivre l'Iran devant les tribunaux canadiens pour que le régime soit tenu responsable.
    Les libéraux prendront-ils la bonne décision et s'engageront-ils à maintenir l'Iran dans la liste des États qui soutiennent le terrorisme?
     Monsieur le Président, nous ne prévoyons pas retirer l'Iran de la liste des États qui soutiennent le terrorisme incluse dans la Loi sur l'immunité des États. Toute décision visant à inclure l'Iran dans la liste ou à l'en exclure sera prise en tenant compte des gestes du gouvernement iranien. Je suis certain que l'on avait comme but d'améliorer le respect des droits de la personne pour protéger le peuple iranien, et il est très clair que l'Iran doit faire beaucoup de progrès à cet égard. Son bilan en matière de respect des droits de la personne et l'état de ses relations avec nos alliés, notamment Israël, posent problème.

[Français]

    Monsieur le Président, le ministre des Affaires étrangères a indiqué au Comité permanent des affaires étrangères et du développement international que le Canada prenait les mesures nécessaires pour renouer le dialogue avec l'Iran, en vue d'ouvrir ultimement une ambassade à Téhéran.
    Le ministre s'engage-t-il aujourd'hui à consulter les Irano-Canadiens avant que toute décision finale ne soit prise et à fournir aux critiques de l'opposition, en toute transparence, les évaluations des menaces pour une délégation canadienne à Téhéran?
(1450)
    Monsieur le Président, mon collègue sait très bien que je lui offre toujours ma pleine collaboration.
    Toutefois, c'est bien connu que nous croyons que l'engagement est préférable au retrait ou au repli. Cela a été une erreur que de retirer le Canada de l'Iran. La situation n'est pas meilleure pour cela sur le plan des droits de la personne en Iran. La situation pour Israël n'est pas meilleure non plus. Nous ne sommes pas en position d'aider nos alliés ni d'aider les intérêts canadiens, les familles canadiennes et les Irano-Canadiens, à cause de la politique de chaise vide et de retrait qu'a suivi l'ancien gouvernement.

[Traduction]

    Monsieur le Président, il suffit de regarder le chef suprême de l'Iran et les médias officiels de l'État pour constater les desseins terroristes évidents de l'Iran. Le régime se targue d'avoir des mercenaires terroristes à sa solde, il se vante de son programme de missiles non autorisé et il proclame régulièrement que la destruction d'Israël est l'une de ses priorités. Ce mois-ci, la télévision d'État incite les jeunes hommes à se porter volontaires pour combattre en Syrie de manière à positionner l'Iran pour envahir Israël.
    Comment les libéraux peuvent-ils envisager, ne serait-ce qu'un instant, de retirer l'Iran de la liste des États qui parrainent le terrorisme?
    Monsieur le Président, je le répète volontiers, nous ne prévoyons pas retirer l'Iran de la liste des États qui soutiennent le terrorisme incluse dans la Loi sur l'immunité des États. Toute décision visant à inclure l'Iran dans la liste ou à l'en exclure sera prise en tenant compte des gestes du gouvernement iranien. Je crois que c'était le but de la motion, et c'est pourquoi nous la respecterons. Nous voulons voir une amélioration en Iran. Voilà pourquoi nous entretenons des rapports avec le pays: pour aider tous les Iraniens qui réclament un plus grand respect des droits de la personne.

[Français]

L'industrie laitière

    Monsieur le Président, l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne est une importante priorité pour notre gouvernement, car les compagnies et les entrepreneurs canadiens pourront tirer profit des énormes avantages qu'offre cette occasion.
    Nous voulons que tous les secteurs de notre économie puissent aller de l'avant une fois que cet accord sera ratifié.
    Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire peut-il nous informer des initiatives qu'il entreprend afin que l'industrie laitière canadienne puisse continuer à croître au sein d'un marché global toujours en mouvement?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je peux assurer à mon collègue et à la Chambre que le gouvernement a tout à fait à coeur l'industrie laitière canadienne et le secteur de la gestion de l'offre. Voilà pourquoi nous avons annoncé aujourd'hui que le gouvernement consultera l'industrie laitière dans les semaines qui viennent pour obtenir son point de vue sur l'ensemble de mesures d'atténuation des répercussions dans le cadre de l'Accord économique et commercial global.
    Le gouvernement collaborera avec l'industrie laitière pour l'aider à s'adapter. Nous obtiendrons les meilleurs résultats possible pour l'industrie laitière et nous veillerons à ce que l'agriculture canadienne soit plus protégée, renforcée et novatrice que jamais.

La santé

    Monsieur le Président, les libéraux ont abandonné la réglementation qui exigerait que les médicaments génériques aient des propriétés de résistance à l'altération. Cette décision met la santé et la sécurité des Canadiens en danger.
    Non seulement cette décision permet l'altération et le mauvais usage des médicaments, mais les médecins hésitent maintenant à prescrire ces médicaments aux personnes qui en ont besoin, de peur qu'ils se retrouvent sur le marché noir.
    Est-ce que la ministre de la Santé va écouter les médecins sur le terrain et rétablir la réglementation sur la résistance à l'altération?
    Monsieur le Président, la réponse au problème du mauvais usage des médicaments et de l'abus des médicaments d'ordonnance doit être exhaustive. Une stratégie unique ne réglera pas le problème et il faut tenir compte de nombreux médicaments.
    Si l'on s'attaque à un seul médicament, on ne réglera pas le problème des opioïdes résistants à l’altération. Les gens se tourneront tout simplement vers un autre médicament. Nous allons poursuivre notre approche exhaustive qui visera notamment à accroître la sensibilisation et à réduire les méfaits.

La petite entreprise

    Monsieur le Président, ce sont les petites entreprises qui créent des emplois au pays. Nous pensions que les libéraux étaient conscients de cela lorsque, pendant la campagne électorale, ils ont promis d'abaisser les impôts des petites entreprises. Toutefois, les libéraux ont clairement rompu leur promesse.
    De nouveaux documents obtenus par le directeur parlementaire du budget révèlent que le plan libéral va aller chercher 2,1 milliards de dollars dans les poches des petites entreprises. Pourquoi les libéraux souhaitent-ils soutirer des milliards de dollars aux petites entreprises et pourquoi cachent-ils cette ponction fiscale dans un projet de loi omnibus d'exécution du budget?
(1455)
    Monsieur le Président, de ce côté-ci de la Chambre, nous comprenons bien la situation des petites entreprises.
    J'aimerais que tous mes collègues comprennent l'importance du programme PerLE. Les entrepreneurs nous ont dit clairement que les démarches pour obtenir des permis et des licences auprès des différents ordres de gouvernement peuvent porter à confusion, créer du mécontentement et, pire encore, exiger beaucoup de temps.
    Nous sommes fiers du programme PerLE. C'est l'une des nombreuses façons par lesquelles nous conjuguons nos efforts avec ceux des provinces, des territoires et des administrations municipales pour appuyer l'ensemble des entrepreneurs et des petites entreprises et pour répondre à leurs demandes.
    Ils souhaitent connaître du succès. Ils souhaitent créer des emplois et stimuler...
    La députée de Brampton-Sud a la parole.

La santé

    Monsieur le Président, des aînés de Brampton-Sud m'ont posé des questions au sujet de l'accès à de meilleures options en matière de soins palliatifs et de soins à domicile.
    Le gouvernement a été élu avec le mandat d'offrir plus de soins à domicile et de meilleurs soins, y compris des soins palliatifs.
    En cette Semaine nationale des soins palliatifs, la ministre de la Santé pourrait-elle informer la Chambre de ses travaux en vue d'améliorer les soins à domicile et les soins palliatifs pour tous les Canadiens?
    Monsieur le Président, j'ai déjà cité à la Chambre le Dr Atul Gawande, qui mentionne que les gens veulent non seulement une mort douce, mais aussi une vie agréable jusqu'à la fin. Voilà pourquoi j'ai tant à coeur les soins palliatifs, mais il reste encore beaucoup de travail à faire.
    Lorsque des Canadiens arrivent à la fin de leur vie et qu'ils souffrent, ils recherchent la dignité et l'indépendance et préfèrent, lorsque c'est possible, mourir à domicile. Voilà pourquoi le gouvernement investira 3 milliards de dollars pour améliorer l'accès aux soins à domicile.
    Je travaillerai de concert avec les provinces et les territoires pour m'assurer d'accroître l'accès aux soins palliatifs de grande qualité pour tous les Canadiens.

[Français]

L'Agence des services frontaliers du Canada

    Monsieur le Président, au cours des prochains jours, le controversé humoriste français Dieudonné doit amorcer une tournée au Québec. Plusieurs politiciens, dont le maire de Montréal, ne souhaitent pas sa venue et, en fin de semaine, la ministre du Patrimoine canadien laissait sous-entendre que c'est l'agent frontalier en poste qui allait décider du sort de Dieudonné.
    Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile peut-il nous dire sur quels critères les agents frontaliers vont se baser pour accepter ou non cet humoriste au pays?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le gouvernement considère la diversité canadienne comme une source d'énergie considérable, et la communauté juive canadienne en fait partie intégrante. Nous nous opposerons toujours fermement à l'intolérance et à la haine, tandis que nous continuons de bâtir une société ouverte et inclusive.
    En ce qui a trait à l'admissibilité d'une personne donnée, les agents des services frontaliers prennent ces décisions en se fondant sur les faits aux bureaux d'entrée, et ce, conformément au droit canadien.
    Je souligne que les antécédents criminels sont certainement un facteur dont les autorités tiennent compte.

[Français]

La fiscalité

    Monsieur le Président, tout comme Christian Tremblay de ma circonscription, plus de 26 000 Québécois seront pénalisés en vendant leur entreprise à leur famille parce qu'Ottawa ne leur accorde pas la déduction pour gain en capital. Pourtant, Québec le fait.
    Plutôt que de s'en inspirer, le gouvernement prétend que le système fonctionne comme il est et que, en fait, la situation est équitable. C'est ce qu'en dit le député de Saint-Maurice—Champlain.
    Quand verra-t-on enfin un libéral du Québec se lever pour défendre les entreprises du Québec?
    Monsieur le Président, nous comprenons qu'il s'agit d'un enjeu important pour certaines familles.
    Nous croyons que le système actuel fonctionne comme il le doit et qu'il est équitable pour l'ensemble des contribuables. Nous demeurons à l'écoute. Notre objectif de favoriser la croissance économique se poursuit, et nous allons écouter les gens pour être certains que cela fonctionne.

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, la vente de blindés à l'Arabie saoudite est immorale et contraire à l'éthique de la responsabilité; le ministre des Affaires étrangères le sait très bien.
    L'Organisation des Nations unies a confirmé que l'armée saoudienne ciblait des écoles et des civils au Yémen. La PBS a démontré que l'Arabie saoudite utilisait ses blindés contre les dissidents politiques. Pourtant, le ministre persiste à honorer les contrats, et il est prêt à toutes les contorsions intellectuelles pour se justifier, même si ces blindés sont utilisés à mauvais escient. Il appelle cela « la conviction responsable ».
    Plutôt que se faire complice, quand le ministre mettra-t-il fin à la vente d'armes à l'Arabie saoudite?
(1500)
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de me permettre de répéter encore une fois ma réponse.
    Le contrat a été signé par le gouvernement précédent, et il n'a pas été signé à moitié; il a été signé complètement. Durant la campagne électorale, le Parti libéral, comme le NPD d'ailleurs, s'était engagé à respecter ce contrat. Cela voulait donc dire que les licences d'exportation arriveraient sur le bureau du ministre des Affaires étrangères.
    Je les bloquerai si jamais l'équipement militaire devait être utilisé à mal escient contre les droits de la personne ou contre l'intérêt du Canada et de ses alliés.

[Traduction]

Les comités de la Chambre

    Monsieur le Président, ma question s'adresse au leader du gouvernement à la Chambre.
    En théorie, comme on le sait, tous les députés sont égaux, mais les partis fortement majoritaires se servent parfois de leur pouvoir — abusivement, selon moi — pour limiter les droits des députés des petits partis. C'est notamment ce qui s'est produit à l'automne 2013 lorsqu'on a demandé à tous les comités d'adopter une motion visant à priver les députés des petits partis de leurs droits à l'étape du rapport.
    Je suis très déçue que la majorité libérale demande actuellement à tous les comités d'adopter la même motion.
    Le leader du gouvernement à la Chambre pourrait-il réfléchir à ce que disait sa lettre de mandat et revenir sur cette décision?
    Monsieur le Président, nous suivons la décision de votre prédécesseur. Comme vous le savez, avant cette décision, les députés indépendants ne pouvaient pas proposer d'amendements aux comités.
    Nous voulons que les députés des partis non reconnus puissent participer activement au processus législatif à l'étape de l'étude en comité; nous leur donnons donc un rôle plus important au sein des comités.

Présence à la tribune

    Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de Son Excellence Tadamori Oshima, président de la Chambre des représentants du Japon.
    L'hon. Lisa Raitt: Monsieur le Président, je suis désolée de donner l'impression de faire une fixation sur l'équilibre budgétaire, mais j'ai devant moi La revue financière, publiée par le ministère des Finances, qui fait état des résultats financiers de l'exercice jusqu'en en mars 2016.
    Je me demandais s'il serait possible de déposer ce document à la Chambre.
    Le Président: Y a-t-il consentement unanime pour déposer ce document?
    Des voix: Non.

AFFAIRES COURANTES

[Affaires courantes]

(1505)

[Traduction]

Les comités de la Chambre

Finances

     Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le troisième rapport du Comité permanent des finances, qui porte sur le projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu.
    Le comité a étudié le projet de loi et a décidé d'en faire rapport à la Chambre sans proposition d'amendement.

Les travaux de la Chambre

    Monsieur le Président, il y a eu des discussions entre les partis et je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour adopter la motion suivante:
    Que, nonobstant tout article du Règlement ou usage habituel de la Chambre, le lundi 2 mai 2016, la Chambre continue de siéger au-delà de l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien pour étudier le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d’autres lois (aide médicale à mourir), à l’étape de la deuxième lecture, et que, lorsque plus aucun député ne se lèvera pour prendre la parole ou que à minuit le même jour, selon la première éventualité, le débat soit réputé ajourné, et la Chambre soit réputée ajournée jusqu’au prochain jour de séance.
    Le secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion?
    Des voix: D'accord.
    Le Président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre de l'adopter?
    Des voix: D'accord.

    (La motion est adoptée.)

Pétitions

La sélection en fonction du sexe

    Monsieur le Président, je suis heureux de présenter aujourd'hui des pétitions sur trois questions distinctes, au nom des habitants de ma circonscription, Red Deer—Mountain View.
    Dans la première, les pétitionnaires demandent au Parlement de condamner la discrimination que constituent les avortements sexo-sélectifs.

L'avortement

    Monsieur le Président, les signataires de la deuxième pétition demandent au Parlement d'adopter une mesure législative visant à restreindre les avortements.

La justice

    Monsieur le Président, dans la troisième et dernière pétition, les signataires prient la Chambre des communes d'adopter un projet de loi pour reconnaître que les enfants à naître sont des victimes distinctes.
    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui deux pétitions.
    Dans la première, les pétitionnaires invitent la Chambre des communes à adopter un projet de loi qui reconnaîtrait l'enfant à naître en tant que victime distincte lorsque celui-ci est blessé ou tué lors de la perpétration d'un acte de violence contre sa mère, de sorte que des accusations puissent être portées à l'égard de deux crimes plutôt que d'un seul.

L'aide médicale à mourir

    Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par plus de 200 personnes qui demandent au gouvernement du Canada d'adopter une disposition protégeant la liberté de conscience des travailleurs de la santé et des établissements de soins de santé au regard du projet de loi sur l'aide médicale à mourir, dont la Chambre est saisie.

La justice

     Monsieur le Président, les Canadiens veulent que le Parlement soit informé de l'histoire tragique de Cassandra Kaake, qui était enceinte de 31 semaines lorsqu'elle a été tuée à Windsor, en Ontario. Malheureusement, il n'y aura pas de justice pour Molly, la petite fille à naître de Cassandra, qui a également été tuée lors de cette attaque violente. C'est parce que, en droit criminel, les enfants à naître ne sont pas reconnus comme des victimes distinctes lorsque des attaques sont commises contre leur mère.
    La pétition demande au Parlement d'adopter une loi qui permettrait de porter une accusation distincte lorsqu'un enfant à naître est tué ou blessé au moment de la perpétration d'un crime contre sa mère.
    Les Canadiens veulent que justice soit faite pour les victimes comme Molly.

Les insecticides

    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour présenter deux pétitions.
    La première a été signée par des résidants de Pender, Salt Spring, Saturna, Victoria et Saanich, dans Saanich—Gulf Islands, qui demandent au gouvernement de prendre exemple sur l'Europe et d'adopter des mesures visant à protéger la santé et les insectes pollinisateurs au Canada en interdisant les pesticides de la catégorie des néonicotinoïdes.
(1510)

Les aliments génétiquement modifiés

    Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par des résidants de tous les coins de l'Ontario, mais plus particulièrement de la région de Thunder Bay, qui demandent au gouvernement de rendre obligatoire l'étiquetage de tous les produits contenant des organismes génétiquement modifiés.

Les soins palliatifs

    Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter une pétition sur les soins palliatifs. Les pétitionnaires font remarquer que, dans l'arrêt Carter c. Canada, la Cour suprême a statué que des adultes capables et consentants peuvent demander l'euthanasie ou l'aide au suicide. Ils soulignent ensuite qu'il est impossible de donner un consentement éclairé quand on n'a pas accès à des soins palliatifs qui apaisent la souffrance. Ils demandent par conséquent au Parlement de mettre sur pied une stratégie nationale des soins palliatifs.

Questions au Feuilleton

    Monsieur le Président, on répondra aujourd'hui à la question no 72.

[Texte]

Question no 72 --
M. Dan Albas:
     En ce qui concerne le partage de renseignements sur les entrées et les sorties aux postes frontaliers terrestres avec les États-Unis: a) le gouvernement a-t-il informé le gouvernement des États-Unis que certains Canadiens qui passent la frontière à un poste frontalier terrestre pour se rendre aux États-Unis quittent généralement les États-Unis quelques jours plus tard, par voie terrestre pour le Mexique, ou par voie aérienne pour une autre destination; b) le gouvernement des États-Unis a-t-il indiqué comment il prévoit éviter d’identifier à tort ces Canadiens comme ayant dépassé la durée de séjour autorisée par leur visa; c) quels documents et renseignements les Canadiens qui passent l’hiver au Mexique doivent-ils conserver après s’y être rendus par voie terrestre afin de démontrer aux représentants des États-Unis qu’ils n’ont pas passé les mois d’hiver aux États-Unis; d) est-il prévu par les États-Unis ou le Canada d’instaurer un partage de renseignements sur les entrées et les sorties transfrontalières avec le Mexique qui permettrait aux États-Unis d’être informés lorsqu’un Canadien quitte les États-Unis pour le Mexique?
L'hon. Ralph Goodale (ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.):
     Monsieur le Président, en réponse aux parties a) et b) de la question, le gouvernement n’a pas envisagé ce scénario particulier avec le gouvernement des États-Unis et ne lui a pas demandé ces informations. Dans le rapport Entry/Exit Overstay Fiscal Year 2015, le département de la Sécurité intérieure des États-Unis indique qu’il recueille des données sur les sorties des voyageurs qui quittent les États-Unis par voie aérienne ou maritime.
    Le Canada et les États-Unis se serviront des données sur les sorties des voyageurs pour appuyer la détection des présumés séjours prolongés sans autorisation. D’autres mesures seront prises pour confirmer davantage l’exactitude de l’information et empêcher l’identification erronée de voyageurs. À cet égard, le Canada et les États-Unis collaboreront pour établir et évaluer les scénarios possibles pouvant découler de l’échange d’information, notamment les conséquences pour les Canadiens visitant temporairement les États-Unis, lesquels peuvent quitter les États-Unis par la frontière terrestre sud et entrer au Mexique.
    En ce qui concerne la partie c) de la question, toute question sur les documents requis par les États-Unis devrait être adressée au Service des douanes et de la protection des frontières des États-Unis.
    En ce qui a trait à la partie d) de la question, le Canada n'a aucun plan pour une telle initiative en ce moment. L'Agence des services frontaliers du Canada ne peut pas faire de commentaires sur les arrangements, actuels ou potentiels, entre les États-Unis et le Mexique.

[Traduction]

Questions transformées en ordre de dépôt de documents

    En outre, monsieur le Président, si une réponse complémentaire à la question no 53, initialement déposée le 11 avril 2016, et les questions nos 71 et 73 pouvaient être transformées en ordres de dépôt de documents, les documents seraient déposés immédiatement.
    D'accord?
    Des voix: D'accord.

[Texte]

Question no 53 --
M. François Choquette:
     En ce qui concerne le Bureau de la traduction (BT) qui est sous la responsabilité de Travaux publics et services gouvernementaux Canada: a) depuis 2013-2014, ventilé par année, (i) combien existe-t-il de postes de traducteurs, d'interprètes, de terminologues et de réviseurs au sein du BT, (ii) quel est le nombre total d'institutions clientes du BT; b) quel est le montant total facturé aux institutions clientes du BT pour des services (i) de traduction ou de révision, (ii) d'interprétation; c) quels sont les coûts estimés de la mise en oeuvre d’un outil de traduction automatique à partir du 1er avril 2016; d) quelles études ont été menées sur (i) la justification de la mise en oeuvre d’un outil de traduction automatique, (ii) les répercussions d’un outil de traduction automatique sur le bilinguisme dans la fonction publique, (iii) la qualité des textes traduits par un outil de traduction automatique, (iv) les coûts reliés à la mise en place d’un outil de traduction automatique; e) depuis 2005-2006, ventilé par année et par ministère, quelle est la valeur totale des contrats qui ont été envoyés à des fournisseurs externes plutôt qu’au BT, ventilé par contrat (i) de traduction, (ii) d’interprétation, (iii) de révision; f) quelles sont les ressources financières et humaines, en termes de personnel travaillant à des postes d'équivalant temps plein (ETP), consacrées par le BT au développement de son outil de traduction automatique; g) depuis 2011-2012, ventilé par année et par ministère, quelles ont été les ressources financières et humaines, en termes de personnel ETP, consacrées à des fournisseurs externes et allouées à (i) la passation de marchés de traduction et de révision avec des fournisseurs, (ii) la gestion des marchés identifiés en (i), (iii) l'assurance de qualité de ces marchés; h) depuis 2005-2006, ventilé par année et par ministère, quel est le nombre de mots dont la traduction a été confiée à des fournisseurs externes plutôt qu’au BT; i) depuis 2005-2006, ventilé par année, quelle est la somme versée par le BT aux fournisseurs de services de traduction avec lesquels il a passé un marché; j) depuis 2005-2006, ventilé par année, quelles ont été les ressources financières et humaines, en termes de personnel ETP, consacrées par le BT à (i) la passation de marchés de traduction avec des fournisseurs, (ii) la gestion de ces marchés, (iii) l'assurance de qualité de ces marchés; k) depuis 2013-2014, ventilé par mois, combien de mots ont été confiés au BT par les institutions clientes et (i) traduits par des traducteurs employés par le BT pour une période indéterminée, (ii) traduits par des fournisseurs du BT; l) est-ce que le gouvernement a entrepris des démarches pour embaucher de nouveaux employés d'ici 2019-2020 et si oui, combien de traducteurs seront embauchés à l'interne, ventilé par année, (i) pour des postes à durée indéterminée, (ii) pour des postes temporaires; m) quelle est la structure actuelle d'établissement des prix du BT?
    (Le document est déposé)
Question no 71 --
Mme Christine Moore:
     En ce qui concerne les budgets du gouvernement, engagés ou non par l’ensemble des ministères, liés à l’agence de Développement économique du Canada pour les régions du Québec: a) quel est le montant dépensé, et non dépensé, pour ces activités, ventilés par (i) exercice, (ii) programme, (iii) régions, de 2002-2003 à 2014-2015; b) quel est le montant dépensé, et non dépensé, à ce jour pour ces activités pendant l’exercice actuel; c) quel était le montant qui avait été prévu pour ces activités, ventilé par exercice de 2002-2003 à 2014-2015; d) quel est le montant qui a été prévu pour ces activités pendant l’exercice actuel?
    (Le document est déposé)
Question no 73 --
M. Peter Julian:
     En ce qui concerne l’appui du gouvernement à l’Institut canadien international des ressources et du développement (ICIRD): a) quelle est la ventilation des dépenses à ce jour par (i) projet, (ii) pays ciblé, (iii) personne s’étant rendue à chaque événement, (iv) personne des pays hôtes ayant participé à chaque événement; b) quelles sont les sources précises des fonds engagés et versés par (i) le gouvernement, (ii) les gouvernements étrangers, (iii) les sociétés du secteur de l’extraction, les associations d’entreprises ou d’autres entités du secteur privé, (iv) les établissements d’enseignement, (v) les organismes de la société civile; c) quels sont les détails de tous les documents que l’ICIRD a présentés au gouvernement, y compris les plans de mise en œuvre de projets, le cadre de mesure du rendement, les rapports d’études de base, les plans de travail annuels, les états financiers vérifiés, les prévisions budgétaires initiales, les prévisions budgétaires ultérieures, les rapports financiers trimestriels ou semestriels, les rapports narratifs trimestriels, semestriels et annuels, et les rapports des risques, conformément à l’accord de contribution entre le gouvernement et l’ICIRD, ainsi que les détails de tout autre document connexe; d) est-ce que l’ICIRD satisfait ou non aux trois conditions prévues au paragraphe 4(1) de la Loi sur la responsabilité en matière d’aide au développement officielle et de quelle manière le gouvernement actuel s’en est-il assuré; e) quelle politique de diligence voulue applique-t-on pour s’assurer de la légitimité d’une demande d’assistance reçue d’un responsable d’un pays étranger, selon des principes de démocratie, d’intérêt public et d’autres principes; f) quel est le rôle de l’ICIRD dans la « diplomatie économique » du Canada, une notion annoncée dans le cadre du « Plan d’action sur les marchés mondiaux » de 2013; g) quelle diligence voulue le gouvernement actuel a-t-il exercée avant d’accorder et de renouveler son appui au mandat de l’ICIRD et au maintien de son financement, pour s’assurer que ce mandat et la justification de l’appui financier (i) sont fondés sur des preuves provenant de sources fiables et impartiales, (ii) cadrent avec les recommandations des tables rondes nationales et font en sorte que le Canada remplisse, à titre de signataire de sept traités sur les droits de la personne, ses obligations internationales concernant la promotion du respect universel des droits de la personne, (iii) tiennent compte comme il se doit des réponses sollicitées à la note de consultation de 2012 de l’Agence canadienne de développement international en vue de l’élaboration de la demande de proposition relative à l’Institut canadien international pour les industries extractives et le développement, (iv) correspondent aux demandes des peuples autochtones, des groupes de citoyens et des organismes populaires de la société civile dans les pays hôtes; h) quels sont les responsables gouvernementaux qui font partie, et ont fait partie dans le passé, du comité consultatif de l’ICIRD, et qui sont ceux qui font partie du comité consultatif de l’ICIRD; i) quels sont les activités, projets et initiatives de l’ICIRD (i) au Pérou, (ii) en Équateur, (iii) en Colombie, (iv) en Mongolie, (v) en Éthiopie, (vi) en Afrique de l’Ouest; j) en ce qui a trait aux activités, projets et initiatives mentionnés en i), quels sont les détails de toute la documentation précisant (i) la justification de chaque projet, (ii) la définition et la conception des buts du projet, des méthodologies et des profils des participants, (iii) l’identité des participants au projet, leur affiliation et la justification de leur participation, (iv) l’identité de tous les promoteurs du projet et tout conflit d’intérêts, (v) un compte rendu du projet, y compris les commentaires, les critiques et les plaintes; k) de quelle façon les activités, projets et initiatives de l’ICIRD énumérés en i) favorisent-ils les intérêts des sociétés minières ou d’autres intérêts économiques canadiens; l) pour chacun des projets proposés, actuels ou achevés de l’ICIRD, de quelle manière l’incidence à long terme sur la réduction de la pauvreté et la souveraineté a-t-elle été ou est-elle (i) évaluée, (ii) vérifiée; m) où en est le projet de 15,3 millions de dollars avec le ministère des Mines de l’Éthiopie, et quels sont (i) la description officielle complète du projet, (ii) la portée intégrale du projet, (iii) les détails de la documentation de la demande originale reçue de l’Éthiopie, (iv) les analyses et rapports de diligence voulue réalisés pour démontrer que ce projet cadre à la fois avec la Loi sur la responsabilité en matière d’aide au développement officielle et ce que demande la population éthiopienne, surtout les collectivités touchées par les activités minières et les organismes qui travaillent avec elles; n) en date du 8 mai 2016, quels sont la directive et le mandat du gouvernement pour l’ICIRD; o) quelles sont les intentions du gouvernement quant au renouvellement ou à la cessation du mandat de l’ICIRD à l’expiration de son mandat et de son financement de cinq ans en 2018?
    (Le document est déposé)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.
    D'accord?
    Des voix: D'accord.

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

Le Code criminel

    La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de pouvoir représenter aux Communes ma circonscription, Langley—Aldergrove. Le débat d'aujourd'hui est très important.
    Je voudrais simplement rappeler sommairement ce qui nous a amenés à tenir le présent débat. Il y a environ un an, en février 2015, la Cour suprême a rendu sa décision donnant aux Canadiens qui souffrent le droit à l'aide au suicide ou à l'euthanasie. Je vais employer ces termes parce que ce sont ceux du Code criminel du Canada.
    On emploie les expressions du genre de « mourir dans la dignité » et de « l'aide médicale à mourir » lorsqu'on parle d'un médecin qui aide une personne dans les derniers jours de sa vie. Les soins palliatifs n'accélèrent pas le décès. Ils constituent une forme d'aide que l'on accorde aux gens dans les derniers jours de leur vie. Par conséquent, les qualifier d'aide médicale à mourir trahit le sens de ce dont nous parlons.
    Au cours de nos assemblées publiques, j'ai entendu quelqu'un parler d'une « accélération médicale de la mort », un terme qui illustre plus fidèlement ce dont il est présentement question. Cependant, je vais emprunter le vocabulaire du Code criminel, que la Cour suprême nous dit de modifier. Je dirai « aide au suicide » et « euthanasie volontaire ».
    Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec l’incroyable député d’Abbotsford, la localité qui se trouve juste à l’est de Langley. Il est incroyable parce qu’il a sans doute été le plus grand ministre du Commerce international que le Canada a connu et qu’il a tant fait pour notre pays. Je tiens à le remercier pour tout son travail.
     Quand la Cour suprême a rendu sa décision au mois de février de l’an dernier, qu’a fait le gouvernement précédent? Il savait que des élections allaient avoir lieu au mois d’octobre suivant, alors il a nommé un groupe externe d’experts. Il lui a confié un mandat clair, soit consulter les Canadiens et proposer un projet de réponse législative.
    Après les élections, le nouveau gouvernement a pris contact avec le groupe externe d’experts qui venait tout juste de terminer ses consultations et qui commençait à élaborer la réponse législative. La nouvelle législature aurait pu commencer immédiatement, puisque nous avions jusqu’au 6 février pour traiter de la question.
     Qu’a fait le nouveau gouvernement? Il a contacté le groupe externe d’experts pour lui dire qu’il avait changé son mandat. Il n’attendait plus de lui qu’il présente un texte législatif. Il allait élaborer sa propre mesure législative. Au lieu que le Parlement soit convoqué et qu’un comité spécial soit créé pour travailler sur cette mesure — nous avions jusqu’au 6 février de cette année, ce qui nous aurait donné plusieurs mois pour débattre de la question et plancher là-dessus —, le gouvernement a modifié le mandat en disant qu’il allait élaborer sa propre loi, puis il a tergiversé. Il a tergiversé des mois durant, puis il a créé le comité spécial. Le comité spécial a présenté des recommandations, puis, qu’a fait le gouvernement? Il a tergiversé et atermoyé, à tel point que nous avons maintenant quatre semaines de séance pour, en gros, faire ce qui aurait normalement dû s’étaler sur deux ans.
     Il a fallu au Québec six ans et trois premiers ministres dans un contexte non partisan pour produire le projet de loi 52 qui traite de l'aide au suicide et de l’euthanasie. Il a traité la question d’une façon beaucoup plus responsable.
    Certains diront que le gouvernement préférerait ne pas tenir ce débat. J’ai entendu ce commentaire lors d'assemblées publiques. Toutefois, la Cour suprême, dans l’arrêt Carter, a décidé pour le Canada. Elle a dit que cela devait être permis et elle compte sur le Parlement pour que soient prises les mesures de sauvegarde propres à assurer la protection des Canadiens vulnérables.
     Qu’a fait le nouveau gouvernement? Il a changé le mandat du groupe externe d’experts, puis il a tergiversé. Il a créé un comité spécial à caractère partisan. Puis il a tergiversé après la présentation du rapport de ce comité. Maintenant il nous reste quatre semaines de séance.
    La façon dont le nouveau gouvernement a géré ce dossier est vraiment décevante. Le sujet est trop important pour qu’il soit traité à la hâte, mais c’est ce que fait le gouvernement.
(1515)
     Il reste quatre semaines de séances, et les libéraux ne consultent pas comme ils le devraient. Ils ne donnent pas au Parlement suffisamment de temps pour faire les choses correctement et ils bousculent la procédure. Au fond, nous sommes obligés de légiférer par épuisement.
    Au comité mixte spécial, nous avons entendu deux témoins représentant des communautés autochtones qui n'avaient pas été consultées. Or, une des exigences posées par la Cour suprême du Canada était que nous consultions de manière appropriée, mais ce n'est pas ce qui se passe avec le gouvernement actuel, qui n'est ni transparent, ni responsable.
     Je recommande aux libéraux de songer sérieusement à ce qui se passera le 6 juin si le projet de loi n'est pas adopté. Qu'est-ce qui se passera au Canada si leur mauvaise gestion devait aboutir à l'absence de loi dans ce domaine au pays, à un vide juridique et, conséquemment, à l'application de l'arrêt Carter? Nous serions ainsi en train de prôner le transfert de notre responsabilité de protéger les personnes vulnérables à chacun des collèges de médecins et chirurgiens, avec le résultat que nous aurions différentes politiques appliquées dans différentes régions du pays. La situation serait alors très grave.
     J'espère que nous travaillerons ensemble. Je suggère au gouvernement d'envisager sérieusement de demander un autre délai à la Cour suprême, parce que les libéraux ont mal géré ce dossier, si bien qu'il ne nous reste que quatre semaines à siéger pour accomplir un travail qui prendrait normalement deux années.
     Je voudrais parler de quelques modifications qu'il est nécessaire, à mon sens, d'apporter au projet de loi C-14.
    La première chose que j'ai entendue dans des réunions publiques, partout où je suis allé, que ce soit en Colombie-Britannique, en Saskatchewan ou chez moi, c'est à quel point il est important de protéger la liberté de conscience.
    Une jeune étudiante en sciences infirmières m'a abordé pour me dire qu'elle ne voulait pas en faire partie et me demander si elle serait obligée d'y participer. Je lui ai répondu que, pour le moment, le comité spécial a recommandé qu’elle n’ait d’autre choix que d’y participer. De plus, les médecins réfractaires auraient à aiguiller correctement les patients. Or, le projet de loi C-14 ne touche à peu près pas à cette question et laisserait aux provinces le soin d'adopter leur propre politique à cet égard.
     L'Association médicale canadienne affirme que 70 % des médecins au Canada ne veulent pas participer au suicide assisté, et que 30 % y participeront. Ce n'est donc pas un problème d'accès, mais que ferons-nous pour protéger les objecteurs de conscience?
    Manifestement, le projet de loi C-14 doit être modifié de manière à rendre criminelle toute tentative d'obliger un médecin, par intimidation ou coercition sous quelque forme que ce soit, ou par la menace de lui retirer son droit de pratiquer, ou de contraindre une infirmière, un pharmacien ou tout professionnel de la santé à participer contre leur volonté à un suicide assisté. Voilà la toute première chose que nous avons entendue maintes et maintes fois: il faut protéger le droit à l'objection de conscience.
     Comme on est en train de modifier le Code criminel, il faut réviser le projet de loi C-14 pour y inclure ce type de protection de la liberté de conscience, sans quoi le régime ne sera pas véritablement pancanadien. On risque en effet de se retrouver avec des politiques provinciales et territoriales différentes. Certaines provinces ont indiqué que certains médecins seront tenus de participer au régime.
    Pour ce qui est de la protection octroyée par la Charte des droits, la Cour suprême a déclaré que l’on doit protéger les droits dont jouissent les médecins en vertu de la Charte. Cependant, si l’on procède sans inscrire cette protection dans un texte de loi, si l’on ne protège convenablement pas la liberté de conscience, je crains que des médecins abandonnent leur pratique et prennent leur retraite.
     Récemment, j’ai rencontré un médecin de 71 ans, qui continue à pratiquer la médecine parce qu’il aime aider les gens. La jeune étudiante en science infirmière dont j’ai parlé envisage d’abandonner ses études. Je lui ai demandé d’attendre un peu. Voyons si nous pouvons trouver une solution qui protégera sa liberté de conscience.
    Si nous ne protégeons pas la liberté de conscience des habitants de notre pays, celle des médecins, des infirmières et des pharmaciens, il y a des gens qui vont quitter leur profession. Ils vont prendre leur retraite ou bien déménager à un endroit où l’on garantit la liberté de conscience.
    Nous souffrons déjà d’une pénurie de médecins, d’infirmières et de docteurs au Canada. Le système de santé se retrouvera en crise si nous ne protégeons pas la liberté de conscience de nos concitoyens. C’est un droit inscrit dans la Charte. C’est à nous qu’il incombe de protéger les gens vulnérables et de garantir la liberté de conscience.
(1520)
    Il y a un trou béant dans le projet de loi C-14. Il faut le combler. Je vois ici plusieurs collègues qui vont siéger au comité de la justice, et la Chambre devra se prononcer. J’espère que nous allons régler ce problème.
    Monsieur le Président, je trouve intéressant que le député ait consacré une aussi grande partie de son intervention à faire la genèse du projet de loi. Il vaut la peine de rappeler qu’il fait suite au jugement rendu par la Cour suprême en février. Je suis en désaccord avec pratiquement tout le reste de ce qu’a dit le député, par rapport à sa participation. L’immobilisme a débuté au moment où la Cour suprême a rendu son jugement, et s’est poursuivi jusqu’au 19 octobre, quand le pays s’est finalement doté d’un premier ministre qui comprend qu’il s’agit d’un problème important et que le gouvernement a un rôle de premier plan à jouer pour le résoudre. Je crois que le député pourrait le reconnaître; c’est la moindre des choses.
    Après avoir entendu de nombreux orateurs, et en particulier les ministres responsables de cette mesure législative, je peux assurer au député que l’on s’occupe de la question entourant l’objection de conscience des professionnels de la santé. Peut-être que le député pourrait commenter l’importance d’adopter le projet de loi sans délai, pour mettre fin au vide juridique actuel et pour mettre en place des règles uniformes d’un océan à l’autre.
    Monsieur le Président, j’aurais aimé que le député réponde à certaines des questions que j’ai posées, dont une portait sur ce qui va se produire le 6 juin, dans quatre semaines de séances, si les libéraux ne réussissent pas à faire adopter ce texte. Après le 19 octobre, les libéraux se sont empressés de modifier le mandat du comité externe. Ils n’auraient pas dû le faire, mais ils l’ont fait. Et puis, ils ont tergiversé et n’ont rien fait. Ils sont à l'origine du problème. Il y avait un comité externe composé de personnes éminentes du Canada qui avaient tenu des consultations pendant les élections pour que nous ayons une loi non partisane.
    Qu’ont fait les libéraux? Ils ont modifié le mandat, créé un comité partisan avec les recommandations du rapport, dont bon nombre ne sont pas bonnes, et c’est pourquoi nous avons eu des rapports dissidents. Ce comité nous a fait de mauvaises recommandations. Nous devons corriger le texte de loi et j’espère que nous pourrons travailler de façon constructive.
(1525)
    Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue pour son travail au comité et pour le travail qu’il fait pour les soins aux personnes âgées.
    Pour faire suite à ce qu’a dit mon collègue d'en face à propos du comité composé d'experts, j’ai eu, à un moment donné, le rapport de ce comité. Malheureusement, les libéraux ont rejeté ses recommandations. Ils ont dit qu'il pouvait remettre le rapport, mais qu’ils ne voulaient pas de recommandations. C’est vraiment très dommage, compte tenu du travail qui avait été accompli.
     Ma question porte sur les définitions. À l'heure actuelle, le projet de loi C-14 est appelé aide médicale à mourir. J’ai déjà fait remarquer à de nombreuses reprises que, bien souvent, l'ingénierie verbale précède les projets d’ingénierie sociale, et je pense que c’est ce qui se passe ici.
     J’aimerais que mon collègue nous parle de la différence entre l’aide médicale au suicide et l'euthanasie volontaire, parce que nous savons que les résultats de ces deux méthodes sont radicalement différents. En réalité, on constate que l’euthanasie volontaire est dix fois plus élevée que l’aide au suicide en raison de l'ambivalence dans les termes.
    Monsieur le Président, il y a une grande différence entre les deux définitions. Dans l’aide médicale au suicide, le médecin remet la dose létale, mais c’est la personne qui doit se l’administrer. Avec l'euthanasie volontaire, le médecin ou le professionnel de la santé l'administre. La grande question est donc de savoir si, dans le cas de l'euthanasie, la personne a été suffisamment consultée. Est-ce qu'elle le veut vraiment ou ne fait-elle que fermer les yeux? Peut-elle s’administrer le produit elle-même et devrait-elle le faire? Il y a donc deux définitions très différentes.
     Dans l'arrêt Carter, la Cour suprême a décidé que c’est un adulte capable qui donne son consentement, la capacité étant établie, s’il s’agit d’un problème psychiatrique, par une évaluation préalable pour s’assurer que la personne est capable. On doit reconnaître que le projet de loi C-14 exige qu’on demande à la dernière minute si la personne veut vraiment mettre fin à sa vie. C’est très important. Le comité mixte spécial ne voulait pas de cette question préalable. La mort est permanente. Le projet de loi C-14 a ce droit, mais nous avons besoin d’être certains que la personne est capable et donne son consentement au tout dernier moment.
    Monsieur le Président, j'apprécie l'occasion qui m'est donnée d'ajouter ma voix à celles des députés qui ont exprimé de vives inquiétudes au sujet de cette mesure législative. Le projet de loi C-14 donnerait à l'échelle nationale et pour la toute première fois au Canada le droit de mourir et le droit de demander de l'aide pour se suicider.
    Je reconnais que la question de l'aide au suicide est très complexe et, bien entendu, très délicate. Que cela nous plaise ou non, la Cour suprême du Canada nous a renvoyé cette question et nous avons tous été élus pour nous débattre avec cette question très difficile. J'espère que, à tout le moins, nous aurons le courage de rejeter les solutions qui, à première vue, pourraient être qualifiées, par certains, de progrès, mais qui, en réalité diminueraient, plutôt qu'elles n'élèveraient, la valeur intrinsèque de chaque vie humaine.
    J'estime que toute vie humaine est un don de Dieu et qu'elle mérite dignité, estime et protection. En effet, depuis mes premières années au service de la collectivité d'Abbotsford, j'ai toujours dit clairement que les gens que je représente peuvent et doivent toujours attendre de moi que je défende la vie humaine contre toute menace. C'est pareil aujourd'hui. La mesure législative que nous débattons aujourd'hui représente un moment décisif dans l'évolution de notre pays, un moment où nos valeurs fondamentales sont réexaminées et mises à l'épreuve.
    Je crois que c'est Bruce Clemenger qui a su le mieux l'exprimer lorsqu'il a dit:
    Avec la présentation du projet de loi C-14, le Canada a franchi un seuil important [...] La décriminalisation de l'euthanasie et de l'aide au suicide constitue un virage majeur en ce qui a trait à la valeur que nous accordons, en tant que société, à la vie et à notre devoir de veiller les uns sur les autres, ainsi qu'en ce qui concerne la compréhension que nous avons à cet égard. Jamais auparavant la nation n'a affirmé qu'une mise à mort intentionnelle était une solution appropriée à la souffrance ou que nous devrions enlever la vie à quelqu'un qui souffre plutôt que de chercher à alléger ses souffrances.
    J'aimerais faire part à la Chambre de mes observations sur le rôle que la Cour suprême devrait ou ne devrait pas jouer quant à la définition du droit à mourir. En tant qu'avocat et législateur, j'ai le plus grand respect pour la primauté du droit, pour les tribunaux qui la soutiennent et pour les personnes qui siègent à ces tribunaux. C'est la primauté du droit et notre système judiciaire qui sont censés agir comme rempart contre l'oppression et la discrimination, et défendre nos grandes valeurs nationales, y compris notre liberté individuelle et nos institutions démocratiques.
    Cela dit, en tant que députés, il est dans notre prérogative la plus fondamentale de s'interroger sur les décisions que rendent nos tribunaux, de les remettre en question et de faire valoir que les décisions sur certains enjeux devraient être laissées au Parlement. Selon moi, les questions relatives à la protection de la vie et à l'interruption de la vie devraient être la prérogative exclusive des représentants dûment élus du peuple canadien, c'est-à-dire les députés de la Chambre des communes.
     Plus précisément, nombre de Canadiens ont énormément de difficulté à accepter que la Cour ait jugé approprié d’ordonner directement au Parlement de mettre en oeuvre une loi qui crée effectivement le droit de mourir et définit un rôle entériné par l’État pour mettre fin à une vie, à défaut de quoi elle prendrait elle-même des mesures si le gouvernement n’agissait pas. Je n’irai pas par quatre chemins. J’ai la plus grande sympathie pour les souffrances de toutes ces personnes en phase terminale, qui ont conclu que la médecine ne pouvait plus les aider à guérir, qui éprouvent des douleurs intolérables, dont la qualité de vie s’est appauvrie au-delà de toute mesure ou qui considèrent qu’elles sont un fardeau indu pour leur famille, leurs amis et leurs fournisseurs de soin. C’est précisément la raison pour laquelle notre principal objectif devrait être d’améliorer les soins palliatifs modernes et d’en élargir l’accès à tous les Canadiens dont la vie pourrait ainsi être sensiblement améliorée.
     Il n’est pas sans ironie qu’alors même que nous discutons de la possibilité que l’État autorise le fait d'enlever la vie à quelqu'un pour des raisons de compassion, le gouvernement libéral néglige de donner suite à sa promesse solennelle d’accroître la disponibilité des soins palliatifs. Les 3 milliards de dollars promis auraient énormément aidé à faire des soins palliatifs un élément essentiel du processus décisionnel de fin de vie.
     Plutôt que de se précipiter pour adopter un projet de loi sur l’euthanasie active, ne nous revient-il pas à nous, législateurs, d’examiner d’abord toutes les possibilités d’assurer des soins palliatifs efficaces, prodigués avec compassion à ceux dont la maladie est en phase terminale et dont la vie s’achève? Nous nous devons d’offrir aux Canadiens beaucoup plus qu’un projet de loi mal ficelé qui vise à mettre en oeuvre une directive de la Cour suprême du Canada.
(1530)
     Un rapide examen des régimes de suicide assisté dans le monde révèle immédiatement que même les mesures de protection les plus rigoureuses et les mieux intentionnées ne peuvent jamais tout à fait prévenir les décès injustifiés. Des pays comme la Belgique ont reconnu que, parmi les milliers de suicides assistés qui ont eu lieu, certains ont coûté la vie à des personnes qui ne pouvaient pas ou n’avaient pas donné de consentement éclairé ou qui n’auraient pas dû mourir.
     Dans notre pays, au Canada, nous avons aboli la peine de mort exactement parce que nous ne pouvions pas garantir que la vie ne serait pas enlevée à un innocent. Mais voilà qu’aujourd’hui, on nous demande d’adopter une position tout à fait contraire et de dire que, même si certaines personnes vulnérables ou non consentantes pourraient perdre la vie, nous sommes disposés à courir ce risque. Une telle hypocrisie me renverse.
    Je constate en outre que le projet de loi C-14 ne traite pas adéquatement du droit des médecins, du personnel infirmier et des établissements de santé de refuser d’intervenir pour mettre fin à une vie humaine. La solution ne saurait être de laisser aux provinces, territoires et associations professionnelles le soin de réglementer cette pratique, car cela donnera lieu à toute une panoplie de directives qui, en bout de ligne, compromettra la capacité des médecins et du personnel infirmier de refuser d’aider directement ou indirectement un suicide assisté.
     Il se peut fort bien que la liberté de conscience d’un médecin soit protégée dans une province et qu’un de ses collègues d’une autre province ne jouisse pas de ce même droit fondamental. C’est inacceptable car cela révèle une abdication totale du gouvernement face à son obligation de protéger les droits de tous les Canadiens, quelle que soit la province dans laquelle ils exercent la médecine.
    Le droit des médecins de refuser une participation directe ou indirecte au suicide assisté ne devrait jamais, au grand jamais, faire l’objet de négociations ou de compromis. Rien que pour cette raison, le projet de loi C-14 est tout à fait insuffisant.
    Un grand nombre de Canadiens ont dit redouter que le projet de loi C-14 ne soit le précurseur de mesures encore plus radicales en faveur du droit de mourir. Ils ont raison. Je suis convaincu que le projet de loi dont nous sommes saisis deviendra rapidement, s’il est adopté, un moyen d’obtenir la libéralisation du suicide assisté pour les enfants, pour ceux qui souffrent de handicap mental ou physique, pour les malades chroniques, pour les personnes âgées, et pour tous ceux qui ne sont plus considérés comme des éléments productifs de la société canadienne. Est-ce vraiment là le Canada que nous avons pour mission de construire?
     Ironie du sort, ce débat se déroule au moment même où, à notre grande honte, un nombre sans précédent de jeunes Autochtones se suicident dans les réserves des Premières Nations. Le gouvernement fédéral a déployé des efforts extraordinaires pour répondre à cette crise et empêcher d’autres suicides.
    En même temps, nous discutons à la Chambre d’un projet de loi sur le suicide assisté que le comité parlementaire spécial a recommandé d’élargir, à l’avenir, aux enfants vulnérables, c’est-à-dire précisément le groupe que nous essayons par tous les moyens de sauver dans les communautés des Premières Nations. Chers collègues, avons-nous perdu la tête?
    Au fil des ans, j’ai eu l’occasion de rencontrer beaucoup de médecins et d’infirmiers, et de discuter avec eux de la question de l’euthanasie. Nos professionnels de la santé sont des gens pleins de compassion, qui ne ménagent pas leur peine pour s’assurer que leurs patients en phase terminale ne souffrent pas indûment. Ils ont toute latitude pour administrer des médicaments qui atténuent la souffrance, même si ces médicaments, à l’occasion, accélèrent la mort du patient. Le projet de loi C-14 ne tient pas compte de cette réalité-là.
     Pour terminer, je dirai que le Parlement a examiné, dans le passé, une dizaine de projets de loi sur le suicide assisté, mais qu’il a toujours rejeté ce genre de mesure. Pour quelque raison que ce soit, la Cour suprême a jugé bon d’intervenir dans le débat en revenant sur sa propre décision dans l’affaire Rodriguez. L’injonction qu’elle a adressée au Parlement de mettre en œuvre une loi sur le suicide assisté devrait être contrée par un refus courageux.
     Résistons à l’invitation d’adopter une politique très dangereuse, dont les implications ne sont pas claires et dont la trajectoire représente une grave érosion de nos valeurs fondamentales.
(1535)
    Nous sommes confrontés à une décision d’une extrême importance, qui nous met au défi de réaffirmer la primauté et l’inviolabilité de la vie humaine. J’espère que nous saurons faire preuve de sagesse en rejetant ce projet de loi tout à fait inacceptable.
    Monsieur le Président, la ministre de la Justice et la ministre de la Santé ont pris bien soin de s'assurer que le projet de loi prévoie un équilibre entre les éléments complexes de l'aide médicale à mourir. La ministre de la Santé a souvent parlé à la Chambre du fait que nous devons améliorer le système de soins palliatifs ainsi que le système de soins à domicile afin que les gens aient la meilleure qualité de vie possible jusqu'à la fin.
    Nous en sommes maintenant au point où nous devons adopter le projet de loi, et je me demande si le député pourrait me dire pourquoi le gouvernement précédent ne s'est pas occupé de ce dossier lorsqu'il était au pouvoir, et pourquoi lui et ses collègues nous font maintenant un procès d'intention.
    Monsieur le Président, je peux assurer à la députée que nous avons joué un rôle actif pour donner suite à l'arrêt Carter. Toutefois, nous voulions prendre le temps de bien faire les choses. Pour une question aussi importante, aussi essentielle au maintien de nos valeurs fondamentales, nous nous devions au moins de mener de vastes consultations dans l'ensemble du pays.
    Depuis quand le fait de mettre fin à la vie de quelqu'un est-il considéré comme des soins de santé? C'est ce que j'ai du mal à comprendre. Notre pays a été fondé sur des valeurs telles que le respect et la protection de la vie humaine. C'est un grand pas dans la mauvaise direction, et je suis déterminé à m'y opposer, en tant que parlementaire qui aime profondément son pays.
    Le projet de loi est un dérapage très dangereux qui nous mènera je ne sais où, mais il est très clair qu'il entraînera une plus grande libéralisation et qu'il ratissera beaucoup plus large à l'avenir.
(1540)
    Monsieur le Président, j'ai écouté mon collègue avec beaucoup d'intérêt, mais je trouve très dommage qu'on se serve de la souffrance des enfants d'Attawapiskat dans ce débat.
    J'ai entendu ce genre d'argument de la part de la communauté religieuse. Je trouve que cela rabaisse vraiment le débat, compte tenu de ce que les enfants subissent là-bas, y compris le manque de services de base en santé mentale de la part du gouvernement fédéral, le traumatisme intergénérationnel causé par les pensionnats indiens et le fait que les Églises se dégagent tout simplement de leurs obligations juridiques.
    Une des victimes du pensionnat St. Anne, Edmund Metatawabin, qui connaît bien ces familles, affirme que ces enfants vivent avec les conséquences directes de l'injustice commise par le gouvernement fédéral. Je peux dire à mon collègue que c'est ce que j'entends dans la collectivité. Je respecte son avis sur bien des sujets, mais je demande seulement que nous fassions preuve de prudence lorsque nous abordons des sujets liés à cette question.
    Ce qui me préoccupe, lorsque j'écoute mon collègue, c'est que je crois que c'est le rôle du Parlement de légiférer sur le droit de vie ou de mort au pays, mais la Cour suprême s'est prononcée à ce sujet.
    Nous devons être honnêtes envers les Canadiens. Si le Parlement ne répond pas à cette décision par voie législative, cela créera un vide juridique qui permettra à toutes sortes d'intervenants de se faire entendre et reconnaître par la Cour suprême. Il ne suffit pas de dire que nous pouvons résister devant la Cour suprême. Si nous ne respectons pas ce délai, il y aura un vide juridique qui pourra donner lieu à des interprétations beaucoup plus larges.
    Monsieur le Président, je comprends très bien ce que le député fait valoir. Il a dit que nous ne devons pas évoquer inutilement la situation des enfants d'Attawapiskat dans le cadre du débat. Cela dit, je pense qu'il convient de souligner que la vague de suicides chez les Premières Nations du Canada représente un problème grave. J'ai étudié le projet de loi en toute bonne foi, mais je dois dire qu'il va à l'encontre de ce que nous essayons de faire, c'est-à-dire protéger et défendre la vie humaine et créer ici, au Canada, un contexte qui permet aux gens de vivre une vie heureuse et productive et de contribuer à bâtir un monde meilleur.
    Le député a posé une question bien précise. Sous quel angle devons-nous aborder le jugement de la Cour suprême du Canada? Le gouvernement sait très bien qu'il existe des solutions lui permettant de donner suite à la décision de la Cour. La Charte lui offre les outils nécessaires pour y donner suite.
    Lorsqu'une mesure législative comporte des lacunes aussi fondamentales — c'est le cas du projet de loi C-14 —, je me dois de m'y opposer, non seulement pour des raisons liées à ma conscience, mais aussi parce que je suis une personne croyante qui aime énormément son pays. Je dois m'y opposer, car il y a de meilleures façons d'aborder cet enjeu.
     Je suis très heureux que mon collègue ait parlé à maintes reprises des soins palliatifs ici, à la Chambre. C'est le premier aspect sur lequel nous devrions mettre l'accent pour aider les personnes qui se trouvent dans cette situation.
    Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Parkdale—High Park.
    Je suis fière d'intervenir à la Chambre aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-14 présenté par la ministre de la Justice.
    Ce projet de loi reconnaît l'autonomie des Canadiens au sujet de leur vie, de même que l'expertise des professionnels de la santé et la décision de la Cour suprême du Canada. Après de vastes consultations, nous proposons une solution équilibrée porteuse de dignité, qui protégera les personnes vulnérables et permettra aux professionnels de la santé de respecter les souhaits de leurs patients.
    À l'heure actuelle, des Canadiens doivent composer avec des souffrances terribles à la fin de leur vie sans que la loi ne leur permette de décider de leur sort. Poussés par le désespoir, certains s'adressent aux tribunaux pour obtenir ce pouvoir. Il s'agit toutefois d'un processus difficile, qui vient alourdir le fardeau physique et émotif des patients et de leur famille.
    Les médecins, le personnel infirmier et les proches des patients se sentent tous démunis, incapables d'aider les gens dont ils prennent soin, car ils ne disposent d'aucun moyen légal pour respecter les souhaits des personnes souffrantes. Ils sont confrontés à un stress émotionnel et à des dilemmes moraux difficiles, car la loi leur interdit de respecter la dignité des patients et de les mener médicalement, en toute compassion, à une mort douce.
    Nombre d'entre nous dans cette enceinte et partout au pays ont des histoires personnelles à raconter au sujet d'êtres chers qui ont vécu des souffrances comme celles que j'ai mentionnées. J'ai moi-même de telles histoires à raconter. J'ai un souvenir impérissable d'un ami de longue date auquel j'ai rendu visite dans des hôpitaux. Une maladie incurable a détruit son corps petit à petit. Cet ami a souffert des douleurs atroces pendant des semaines. Il a à un moment donné déclaré qu'il ne mangerait plus et qu'il n'accepterait plus aucun liquide. Il est finalement décédé après six autres jours de souffrances horribles.
    Nous sommes ici aujourd'hui pour discuter d'un projet de loi qui vise à offrir un nouveau service médical au Canada, c'est-à-dire l'aide médicale à mourir. Au moyen de ce projet de loi, nous reconnaissons que c'est à la personne visée et non au gouvernement de prendre les décisions relatives à sa propre personne, y compris celle de mettre fin à sa vie avec dignité.
    Après des consultations et un examen approfondi, le projet de loi C-14 comprend maintenant les mesures de protection suivantes: l'avis d'un deuxième médecin extérieur à la relation thérapeutique; une période de réflexion de 15 jours; la capacité d'un patient de retirer en tout temps son consentement; des exigences rigoureuses en matière de documentation à chaque étape, ainsi que de nouvelles infractions criminelles pour éviter tout abus possible.
    Le gouvernement reconnaît qu'il doit tenir compte de la conscience morale des professionnels de la santé. Bien que tout patient répondant aux critères médicaux aura accès aux services d'aide médicale à mourir, aucun fournisseur de soins de santé ne sera tenu de participer si l'acte est incompatible avec ses valeurs ou ses croyances.
(1545)

[Français]

    Certains fournisseurs ont exprimé leurs réticences à aiguiller un patient demandant une aide médicale à mourir vers un fournisseur qui accepte d'offrir cette aide, car ils sont d'avis que l'aiguillage les rendra complices du décès éventuel d'un patient.

[Traduction]

    Toutefois, bien qu'il soit essentiel d'inclure des mesures de protection, nous devons également faire en sorte que les personnes souhaitant recourir à ce service puissent bénéficier d'un accès raisonnable.
    Dans l'affaire Carter, la Cour suprême du Canada a reconnu qu'il faut concilier les droits garantis par la Chambre aux médecins et aux patients qui demandent une aide médicale à mourir. Bien que cette question doive être principalement réglée par les provinces et les territoires, le gouvernement s'est engagé à collaborer avec les provinces et les territoires afin de faciliter l'accès à l'aide médicale à mourir tout en respectant les convictions personnelles des fournisseurs de soins de santé.
    Le gouvernement fédéral offrira un soutien pour faire en sorte que tous les Canadiens puissent avoir accès à l'aide médicale dont ils ont besoin. L'une des approches envisagées est la création d'un système pancanadien de coordination pour l'aide médicale à mourir. On pourra commencer en examinant les régimes en vigueur dans d'autres pays pour voir quelles mesures ont été prises et déterminer l'applicabilité de ces régimes au Canada.

[Français]

    Plus près de nous, au Québec, la Loi concernant les soins de fin de vie offre d'autres exemples. Elle comprend un éventail de soins de fin de vie, comme les soins palliatifs, la sédation palliative ainsi que l'aide médicale à mourir. La législation rend le service largement accessible dans les établissements et à domicile.

[Traduction]

    Au Québec, les médecins ne sont pas tenus d'offrir cette option, mais ils sont tenus d'informer l'institution ou l'administration locale de toute demande et de transmettre le formulaire de demande du patient. L'institution prendra ensuite les mesures nécessaires pour trouver un autre médecin dès que possible afin de répondre à la demande.
    Bien des gens de Vancouver—Quadra qui ont communiqué avec moi concernant le projet de loi se sont dits favorables à l'aide médicale à mourir. Étant leur représentante, je suis ravie d'appuyer le travail de mes collègues, la ministre de la Santé et la ministre de la Justice.
    Conformément au projet de loi, une aide médicale à mourir ne serait offerte qu'aux adultes mentalement capables qui sont admissibles à recevoir des services de santé subventionnés par l'État au Canada, atteints d'une maladie, d'une affection ou d'un handicap incurables, et dont la souffrance est intolérable, la situation médicale se caractérise par un déclin avancé et irréversible de ses capacités et la mort est raisonnablement prévisible.
    Certains de mes électeurs se sont aussi dits préoccupés par la question de l'accès.

[Français]

    Nos critères permettent à certaines personnes qui en font la demande, mais pas à tout le monde, d'accéder à l'aide médicale à mourir. Certains Canadiens et certains experts se sont dit préoccupés par la possibilité d'élargir les critères d'admissibilité aux mineurs matures, de présenter les demandes à l'avance et d'inclure la maladie psychologique comme seule affection sous-jacente.
(1550)

[Traduction]

    Je veux dire aux Canadiens que notre gouvernement est conscient de leurs préoccupations.

[Français]

    Pour le moment, la quantité limitée de renseignements sur le sujet demande l'adoption d'une approche prudente, comme nous le verrons dans l'ébauche de la loi devant nous.
    Le gouvernement s'est toutefois engagé à réaliser des études indépendantes, afin de mieux comprendre les risques associés à ce dossier. Les résultats de ces rapports contribueront à l'examen législatif quinquennal prévu dans le projet de loi.

[Traduction]

    D'autres facteurs font en sorte qu'il puisse être difficile d'accéder à l'aide médicale à mourir. Comme nous le savons tous, notre pays compte de nombreuses collectivités rurales et éloignées qui ont de la difficulté à recevoir des soins de santé, y compris à consulter un médecin ou un autre fournisseur de soins de santé. Bien que la prestation des soins de santé soit une responsabilité provinciale et territoriale, l'accessibilité est un des cinq principes clés de la Loi canadienne sur la santé.

[Français]

    Je suis ravie de signaler que, en plus de la protection des populations vulnérables, nous avons tenu compte des questions concernant l'accès et en avons traité tout au long du projet de loi et dans le cadre des projets complémentaires.

[Traduction]

    Je vais vous donner un exemple. L'expression générique « aide médicale à mourir » englobe tant la situation où un fournisseur doit être présent physiquement pour administrer une substance qui provoque la mort que la situation où le fournisseur prescrit un médicament que la personne peut prendre elle-même. Le fait de prévoir des exceptions au Code criminel pour les deux procédures contribuerait à accroître l'accès des personnes admissibles et offrirait des choix dans les situations où on offre l'aide médicale à mourir.
    En outre, le projet de loi prévoit des exceptions pour permettre aux médecins et aux infirmiers praticiens d'offrir cette aide. Les infirmiers praticiens, ou ceux qui ont une désignation équivalente, sont autorisés dans bien des provinces à assumer des fonctions médicales nécessaires pour offrir une aide médicale à mourir.

[Français]

    Exclure les infirmiers praticiens de la responsabilité pénale donnerait aux provinces et aux territoires une autre option pour faciliter l'accès à l'aide médicale à mourir dans les régions mal desservies.

[Traduction]

    Voici un autre exemple des efforts que nous déployons pour assurer l'accès au système de soins de santé. Parallèlement à notre travail sur la mise en oeuvre de l'aide médicale à mourir, les Canadiens, les experts et les intervenants se sont penchés sur la nécessité d'améliorer l'accès à des soins palliatifs de qualité au Canada. Nous les avons écoutés. En collaboration avec les provinces et les territoires, le gouvernement s'engage à élaborer des mesures pour contribuer à l'amélioration d'une gamme complète de soins en fin de vie, y compris les soins palliatifs.

[Français]

    Dans le contexte d'un nouvel accord sur la santé, notre gouvernement s'est engagé à verser à 3 milliards de dollars sur quatre ans pour améliorer les soins à domicile, y compris les soins palliatifs. Des discussions avec les provinces et les territoires sont déjà en cours.

[Traduction]

    Entretemps, il est essentiel de rétablir la dignité des Canadiens affligés par des problèmes de santé irrémédiables et de mettre fin le plus tôt possible à leurs souffrances.
    Le projet de loi à l'étude reconnaît à la fois la nécessité de rendre l'aide à mourir accessible et le besoin d'instaurer des précautions et des protections. Le projet de loi permet au gouvernement d'atteindre ces objectifs tout en respectant les échéances imposées par la Cour suprême du Canada.
    J'ai bon espoir que nous serons en mesure de mettre en oeuvre un système qui répond aux besoins des Canadiens en matière de soins, de soutien et de compassion en fin de vie.
    J'invite les députés et tous les Canadiens à faire part de leur point de vue dans l'actuel débat tandis que nous poursuivons l'adaptation des lois canadiennes aux réalités du XXIe siècle. Notre porte est ouverte et le gouvernement est à l'écoute. Nous promettons de soutenir les professionnels de la médecine, de protéger les plus vulnérables et de restaurer la dignité des Canadiens qui vivent les moments les plus difficiles de leur vie.
    Monsieur le Président, la députée a conclu son intervention en demandant que nous adaptions nos lois aux réalités du XXIe siècle. D'après mes calculs, c'est la troisième fois que le gouvernement se sert de la date pour démontrer la nécessité d'une de leurs mesures législatives. Nous avons besoin d'autres arguments.
    Je recommande deux changements au projet de loi dont nous sommes saisis.
    Premièrement, il faudrait prévoir un examen préalable par une autorité juridique compétente afin de s'assurer que les personnes recevant ce service — ou peu importe le nom qu'on veut lui donner — remplissent vraiment les critères. Sans un examen juridique préalable, il est impossible de savoir si les critères sont respectés. Une personne pourrait aller de médecin en médecin, ou quelqu'un d'autre pourrait le faire pour elle. Je veux savoir ce que la députée pense de la recommandation d'un examen préalable par une autorité juridique compétente.
    Je veux aussi savoir ce qu'elle pense de la suppression de la disposition sur la « croyance raisonnable mais erronée », qui permettrait à une personne d'enlever la vie à une autre personne n'ayant pas donné son consentement et d'éviter d'être poursuivie si elle croyait raisonnablement, mais à tort, que la personne avait donné son consentement?
    La députée accepterait-elle ces deux changements? Je pense que s'ils étaient apportés, bon nombre d'entre nous auraient beaucoup plus de facilité à appuyer la mesure législative pour que nous respections la date butoir.
(1555)
    Monsieur le Président, je remercie le député de ces propositions réfléchies.
    De telles idées pourront être présentées lors de l'étude au comité et des experts pourront être entendus sur le sujet. Ce que nous voulons éviter, c'est de dresser des obstacles inutiles pour les gens qui sont admissibles à recevoir ce genre d'aide pour mettre fin à leur vie.
    Je tiens à faire remarquer qu'il aurait été utile que le Parti conservateur examine comment donner suite à l'arrêt de la Cour suprême du Canada sur l'aide médicale à mourir lorsqu'il a été prononcé. Le Parlement aurait pu débattre de la question beaucoup plus longuement il y a un an. C'est ce que notre parti réclamait, mais les conservateurs ont refusé de s'atteler à la tâche.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de son discours.
    D'entrée de jeu, j'aimerais dire que, aujourd'hui, j'apprécie particulièrement le ton de nos échanges, qui ont pour résultat de nous nourrir les uns et les autres. Cela nous change des débats.
    Ma question est toute simple, et elle porte sur l'exemple que ma collègue donnait dans son discours au sujet d'une de ses connaissances qui, pendant six jours, a cessé de manger et de boire pour arriver à terme. Si les critères donnés par la Cour suprême sont relativement clairs dans la loi, le quatrième élément est pas mal plus flou, à mon avis.
    On parle d'une mort naturelle devenue raisonnablement prévisible. Est-ce que je pourrais avoir l'éclairage de ma collègue sur ce quatrième critère? Si quelqu'un répond aux trois premiers critères, ne serait-il pas obligé, encore une fois, de cesser de s'hydrater et de manger, et ce, afin de satisfaire aux quatre critères qui lui permettraient d'obtenir le service qu'il souhaite?
    Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.
    Je suis sûre et certaine que l'état de mon ami était conforme aux critères de notre projet de loi.

[Traduction]

    Comme je l'ai dit dans mes observations, compte tenu du court délai que nous avons pour nous acquitter du mandat que nous a donné la Cour suprême, il est important d'user de prudence dans la manière dont nous encadrons le tout. C'est ce que le projet de loi ferait. Il trouve le bon équilibre entre les mesures de protection pour les personnes vulnérables, les droits des médecins et des infirmières, et les droits personnels de ceux qui souhaitent recourir à l'aide médicale à mourir.
    Nous aurons le temps de continuer d'examiner des situations comme celle dont parle le député pour confirmer que nous avons le bon équilibre, et nous pourrons apporter des rajustements lorsque le projet de loi sera réexaminé dans cinq ans.
    Monsieur le Président, je parlerai aujourd'hui du projet de loi C-14, et je débuterai en citant un extrait de la décision Carter de la Cour suprême du Canada, dont nous avons tous abondamment entendu parler.
    Au premier paragraphe de sa décision unanime, la Cour dit ceci:
    Au Canada, le fait d'aider une personne à mettre fin à ses jours constitue un crime. Par conséquent, les personnes gravement et irrémédiablement malades ne peuvent demander l'aide d'un médecin pour mourir et peuvent être condamnées à une vie de souffrances aiguës et intolérables. Devant une telle perspective, deux solutions s'offrent à elles: soit mettre fin prématurément à leurs jours, souvent par des moyens violents ou dangereux, soit souffrir jusqu'à ce qu'elles meurent de causes naturelles. Le choix est cruel.
    Je suis d'accord avec la Cour suprême: le choix est cruel.
    La Cour a conclu que, dans sa forme actuelle, le droit criminel est non seulement cruel, mais inconstitutionnel. Elle a conclu qu'en vertu de l'article 7 de la Charte, les Canadiens doivent avoir accès à l'aide médicale à mourir, à l'intérieur d'un cadre assorti de mesures de sauvegarde bien définies. Voilà la situation dans laquelle la Chambre se trouve aujourd'hui.
    Qu'on se comprenne bien: les parlementaires ne doivent pas décider si l'on permettra aux Canadiens d'obtenir de l'aide médicale pour mourir. Ce droit doit leur être conféré si on veut respecter la Charte. Les parlementaires sont plutôt appelés à définir les modalités entourant l'accès à l'aide médicale à mourir. À ce chapitre, je crois que le projet de loi C-14 réussit à trouver le juste équilibre. Il réussit à concilier, d'une part, le droit qu'a une personne capable de requérir qu'on l'aide à mourir parce qu'elle souffre d'un problème de santé grave et irrémédiable et, d'autre part, l'obligation que nous avons d'éviter que les personnes vulnérables ne soient tentées de s'enlever la vie parce qu'elles traversent une période de faiblesse.
    Cet équilibre n'est pas facile à atteindre. Il n'est pas non plus immuable, et il s'agit d'un point très important. Encore et toujours, nous devrons voir et revoir notre position à la lumière des plus récentes données scientifiques et selon la manière dont évolueront nos valeurs sociales. Quand on y pense, la décision rendue par la Cour suprême en 2015 illustre parfaitement cette évolution, puisqu'elle renverse une autre décision de la Cour suprême, celle qu'elle avait rendue en 1993 dans l'affaire Rodriguez. Mais pour le moment, nous sommes en 2016, et je suis fermement convaincu que, dans le contexte actuel, le projet de loi est parfaitement équilibré.
    Il y a une autre raison pour laquelle je prends la parole aujourd'hui pour exprimer mon appui au projet de loi. En tant qu'avocat de droit constitutionnel, j'ai passé ma carrière à lutter pour les droits des personnes, leurs droits garantis par la Charte, leur droit à l'égalité. Le traitement équitable de tous signifie traiter les personnes avec respect et dignité et leur permettre l'autonomie. C'est ce que ferait le projet de loi. Il donnerait aux gens le contrôle sur leur vie, y compris sur la fin de leur vie. Il permettrait aux personnes qui s'approchent de la mort de mourir selon leur choix et de moins souffrir.
    En permettant le choix, le projet de loi habiliterait les Canadiens. Il nous rendrait plus forts parce qu'il donnerait plus d'autonomie aux Canadiens et, donc, plus de dignité.
(1600)

[Français]

    Au cours du temps de parole qu'il me reste, je voudrais aborder deux grandes catégories de préoccupations que soulève ce projet de loi: d'une part, les critiques qui disent que le projet de loi C-14 ne va pas assez loin pour rendre l'aide médicale à mourir disponible; d'autre part, les critiques contraires, qui disent que le projet de loi va trop loin et rend l'aide médicale à mourir trop accessible.

[Traduction]

    Les critiques de la première catégorie sont d'avis que le projet de loi C-14 n'est pas assez large. Elles se concentrent sur trois volets principaux, et nous les avons entendues cet après-midi et lors des autres jours de débat. Pour l'instant, on propose que l'aide médicale à mourir ne soit permise qu'aux adultes qui ne souffrent pas uniquement de maladie mentale. De plus, pour l'instant, le projet de loi C-14 ne prévoit pas de directives préalables relatives à l'aide médicale à mourir.
    Les mots « pour l'instant » sont importants. Le gouvernement s'est engagé à commander une étude indépendante sur les questions juridiques, éthiques et médicales soulevées par chacune de ces trois catégories. C'est important. Si l'aide médicale à mourir doit s'appliquer à l'un de ces trois domaines de façon élargie, il faut d'abord réaliser une étude exhaustive sur les avantages et les risques associés à une telle pratique dans ces circonstances.
    J'étais résolu à consulter directement les électeurs de ma circonscription au sujet de ce projet de loi important. J'ai donc organisé une assemblée publique dans ma circonscription, Parkdale—High Park, sur la question de l'aide médicale à mourir. Les électeurs très investis dans la question étaient bien préparés; ils m'ont fait part de certaines réflexions personnelles très pertinentes, exprimé leurs préoccupations et posé des questions, donc beaucoup portaient sur les trois choses dont je viens de parler.
    Bien que, comme moi, les résidants de ma circonscription tiennent à défendre l'autonomie et la dignité de tous les Canadiens, y compris les jeunes et les personnes atteintes de maladies mentales, ils nous ont également mis en garde contre la tentation de trop nous hâter compte tenu du caractère irréversible des décisions prises en la matière. Par exemple, ils ont fait remarquer qu'en Belgique, l'aide médicale à mourir avait été légalisée et étudiée pendant 12 ans avant que les mineurs obtiennent le droit d'y recourir. Ils ont également souligné le fait que, en vertu des dispositions du projet de loi, un patient atteint de maladie mentale ne peut demander l'aide médicale à mourir que si la maladie en question s'inscrit dans sa situation médicale globale et qu'il répond à tous les critères d'admissibilité généraux.
    À titre de défenseur des droits des personnes ayant survécu à divers drames et des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale de ma collectivité, je sais qu’une réflexion approfondie est essentielle avant d’ouvrir l’accès à l’aide médicale à mourir à ceux dont la condition médicale se limite à la maladie mentale.
    Comme je l’ai déjà dit et répété, le gouvernement croit qu’il est important d’adopter des mesures législatives bien conçues, soigneusement analysées et fondées par-dessus tout sur des faits probants. Les études indépendantes proposées sur des sujets tels que l’accès des mineurs produiront des données qui contribueront au processus d’analyse et de recherche de preuves. Fait encore plus important, le projet de loi C-14 prévoit un examen quinquennal obligatoire de toute la loi.
     Comme je l’ai déjà dit, le fait de parvenir à un certain équilibre dans un projet de loi de cette nature n’est pas permanent. C’est un équilibre dynamique qui doit s’adapter à l’évolution de nos connaissances et des normes sociétales.
    Dans la catégorie de préoccupations selon lesquelles le projet de loi C-14 ne va pas assez loin, il y a un argument lié à la prévisibilité raisonnable. Nous avons entendu cet après-midi des questions à ce sujet. Certains soutiennent que l’exigence relative à une mort raisonnablement prévisible constitue un obstacle inutile. De telles préoccupations ne sont pas fondées. Le projet de loi C-14 est en fait plus permissif que n’importe quelle autre loi nord-américaine sur l’aide à mourir. Au Québec, le demandeur doit être atteint d’une maladie terminale. Le projet de loi C-14 prévoit un accès plus large. Il permettrait l’aide médicale à mourir si la mort est raisonnablement prévisible, compte tenu de l’ensemble des circonstances médicales.
    De plus, dans chacun des quatre des États américains qui a une loi sur l’aide médicale à mourir, il est nécessaire de prouver que la personne en cause a moins de six mois à vivre. Aucun délai de ce genre n’est prescrit dans le projet de loi C-14.
    Enfin, dans cette même catégorie de préoccupations, certains affirment que le projet de loi devrait — comme nous l’avons entendu cet après-midi — imposer aux professionnels de la santé l’obligation d’offrir ce service. Cette critique se base sur une mauvaise compréhension de la nature du projet de loi. Il s’agit d’une modification du Code criminel fédéral. La critique est également déplacée du point de vue des compétences respectives.
     Dans une optique constitutionnelle, il est clair que le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer dans le maintien de l’accès universel aux services de santé assurés, mais la prestation des services médicaux à proprement parler relève essentiellement des provinces. Comme l’a mentionné ma collègue, le gouvernement est déterminé à collaborer avec les provinces et les territoires pour assurer l’accès à l’aide médicale à mourir, tout en respectant les convictions personnelles des fournisseurs de soins de santé. Cette approche reflète la recherche de l’équilibre qui doit être faite en présence d’exigences contradictoires relevant de la Charte.
     D’une part, les revendications fondées sur l’article 7 de ceux qui veulent accéder à l’aide médicale à mourir doivent respecter la liberté de conscience garantie par l’alinéa 2a) de la Charte. Il s’agit de la liberté de conscience des fournisseurs de soins de santé. La Cour suprême a reconnu leurs droits au paragraphe 132 de la décision Carter. Le projet de loi à l’étude les reconnaît aussi dans son préambule.
     La seconde grande catégorie de critiques a trait à la trop grande permissivité du projet de loi.
(1605)

[Français]

    D'autre part, ce sont ceux qui soutiennent que le projet de loi C-14 est trop permissif qui échouent dans le devoir fondamental de protéger les personnes susceptibles de se suicider dans un moment de faiblesse.

[Traduction]

    Il n’est pas facile de solliciter une aide médicale à mourir, ce qui est parfaitement justifié. Les demandes doivent être présentées par écrit. Cela a des effets sensibles. Elles doivent aussi porter la signature de deux témoins indépendants, qui ne peuvent pas être bénéficiaires d’un testament ou responsables des soins à donner à la personne malade. La demande doit ensuite être approuvée par écrit non pas par un, mais par deux médecins différents. Enfin, le projet de loi impose une période d’attente obligatoire de 15 jours pour permettre aux intéressés de réfléchir au caractère sérieux de leur choix.
     Le projet de loi va encore plus loin. Il impose un important régime de surveillance, qui permettra au gouvernement d’obtenir et d’analyser les données et les tendances relatives à l’aide médicale à mourir. Ce genre de surveillance garantira la transparence et, surtout, facilitera le renforcement des mesures de sauvegarde.
    Enfin, je suis encouragé par le fait que le projet de loi C-14 reflète non seulement l’importance du choix à faire, mais aussi l’importance de faire un choix éclairé. Je veux parler ici du besoin urgent de renforcer les soins palliatifs au Canada. C’est un besoin que m’ont communiqué à maintes reprises les habitants de Parkdale—High Park. Pour nous assurer que ceux qui sollicitent l’aide médicale à mourir le font en toute connaissance de cause, il est critique de travailler collectivement, d’une manière impartiale et non partisane, afin d’assurer un accès facile à des soins palliatifs améliorés.
     En conclusion, je répète que le projet de loi n’est ni trop restrictif ni trop permissif. Il se situe au juste milieu, tout en reconnaissant qu’avec une étude complémentaire et un examen quinquennal obligatoire, l’équilibre réalisé devra constamment être vérifié pour tenir compte des nouvelles preuves recueillies et de l’évolution des valeurs sociétales liées à l’aide médicale à mourir.
     Fait extrêmement important, le projet de loi éliminerait le choix cruel mentionné par la Cour suprême dans le premier paragraphe de la décision Carter. Les Canadiens gravement malades n’auraient plus à choisir entre un suicide prématuré et des souffrances prolongées. Le projet de loi C-14 donnerait à ces Canadiens l’autonomie que garantit la Charte. Il leur donnerait le droit de mourir d’une façon digne. Pour cette raison, j’ai l’intention d’appuyer le projet de loi.
    Monsieur le Président, il y a deux choses au sujet desquelles je voudrais obtenir des clarifications. Le député et sa collègue qui a parlé avant lui ont dit, sans équivoque, qu’aucun médecin ne sera tenu de participer à ce régime. Je ne vois dans le projet de loi C-14 aucune disposition qui garantisse aux médecins qu’ils ne seront pas tenus de participer. Il n’y a qu’un vague énoncé évoquant cette possibilité dans le préambule. Il est certain que cet énoncé ne donne aucune garantie ferme.
     L'autre question que j'aimerais soulever est celle des soins palliatifs. Les députés de l'autre côté de la Chambre ne cessent de clamer qu'ils accordent une grande importance à ce genre de soins, ce dont je me réjouis. Nous avons besoin de meilleurs soins palliatifs. Je travaille à ce dossier depuis des années. Or, ils en parlent beaucoup, mais je ne vois dans le budget aucune mention des 3 milliards de dollars qu’ils avaient promis d’investir dès leur arrivée au pouvoir. Je suis très inquiet. Nous devons commencer à apporter des changements dans ce domaine. J’aimerais voir un engagement ferme dans le budget pour que nous puissions dire aux Canadiens qu’ils vont recevoir de l’aide sous peu.
    Autrement, offrir une aide médicale à mourir sans…
(1610)
    Le secrétaire parlementaire du ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté a la parole.
    Monsieur le Président, en ce qui concerne les deux questions soulevées par mon collègue, notamment la participation des médecins, il faut dire que cela ne concerne pas seulement les médecins, mais aussi les infirmiers praticiens. La Cour suprême dit clairement, au paragraphe 132 de l'arrêt Carter, que rien dans sa décision ne contraindrait les médecins à dispenser une aide médicale à mourir.
    Le préambule, comme mon collègue l’a mentionné, se situe dans le prolongement de cette décision. Notre parti et notre gouvernement sont profondément attachés au respect de la Charte et à toutes ses composantes, y compris l’alinéa 2a) qui garantit la liberté de conscience.
     Quant aux soins palliatifs, le député a raison de dire qu’il serait inapproprié d’en parler dans ce projet de loi, qui vise à modifier le Code criminel. Mon collègue était présent quand la ministre a annoncé aujourd’hui, pendant la période des questions, quels crédits seraient alloués aux soins palliatifs. Je lui demande de faire confiance à la ministre, qui est elle-même médecin et qui a dispensé ce genre de service. Elle est tout à fait consciente de la nécessité de fournir des soins palliatifs adéquats de façon à ce que les gens soient en mesure de faire un choix averti lorsqu’ils prennent une décision aussi importante.
    Monsieur le Président, j’ai écouté avec intérêt mon distingué collègue.
    Ce qui me préoccupe, au sujet des soins palliatifs, c’est que le budget ne prévoit rien à cet égard. Le gouvernement a fait une promesse, mais on vient de perdre une année. Je trouve incroyable qu’on parle du droit de mourir, mais pas du droit à des soins palliatifs de qualité et du rôle que le gouvernement fédéral doit jouer.
    L’autre question qui m’intéresse est la responsabilité importante du gouvernement fédéral dans la prestation des services de santé aux militaires, aux détenus des pénitenciers fédéraux et aux Autochtones. En vertu du paragraphe 12.1 du Programme des services de santé non assurés pour les Premières Nations, lorsqu’une personne doit quitter la réserve pour se rendre à un hôpital pour y recevoir des soins palliatifs, aucun proche n’est autorisé à l’accompagner.
    Le règlement fédéral stipule que c’est par compassion que le conjoint n’est pas autorisé à accompagner le malade en fin de vie. C’est ce que dit le règlement. La compassion est le prétexte numéro un pour empêcher un proche d’avoir accès à des soins palliatifs. Si les libéraux veulent vraiment en finir avec ces choix cruels, ils doivent dire à la ministre de la Santé qu’il faut modifier le libellé des directives sans tarder, afin que les proches ne soient pas séparés du malade au moment de sa mort.
    Monsieur le Président, comme nous l’avons indiqué, les affectations financières accordées aux soins palliatifs n’apparaissent pas dans ce projet de loi. Le député aurait peut-être préféré qu’elles apparaissent dans le budget, mais je peux lui assurer que nous sommes en train de reconduire une entente qui avait expiré et qui s’appelle l’accord canadien sur la santé, que le député de Timmins—Baie James connaît fort bien.
     Le gouvernement précédent avait tout simplement laissé l’entente expirer. Ce n’est pas ainsi que nous entendons gouverner. Nous croyons qu’il est nécessaire de faire participer les provinces et de discuter fermement avec elles de leurs besoins, de façon consensuelle et bilatérale, pour qu’elles aient, ainsi que les territoires, les aides financières dont elles ont besoin.
     En ce qui concerne les soins palliatifs offerts aux Premières Nations et du problème très particulier que le député de Timmins—Baie James a soulevé, je reconnais que c’est un problème important. Mais ce qui est plus important encore, c’est de redresser les torts honteux que nous avons causés aux Premières Nations pendant des générations.
     C’est un sujet que le premier ministre a fait figurer dans la lettre de mandat de chacun des ministres, et auquel nous accordons toute l’attention voulue. Nous avons eu des débats animés au sujet de la santé mentale dans certaines communautés, y compris celle que le député représente. Mais ce n’est qu’une partie d’un problème plus global que nous devons régler.
     J’espère avoir l’occasion de collaborer étroitement avec le député pour trouver des solutions en ce qui concerne les soins de compassion et les soins palliatifs, en particulier pour les Premières Nations, puisque cela fait partie de l’obligation que nous avons à leur égard.
    Avant de reprendre le débat, je comprends, étant donné la nature du sujet, que les députés ont besoin de temps pour poser leurs questions à la personne qui vient d’intervenir. Nous essayons tous de faire de notre mieux. Il est très difficile, en l’espace de cinq minutes, de poser plus de deux questions et d’avoir les réponses. Lorsque les députés sont plus concis, il est évident que cela permet à leurs collègues de participer en plus grand nombre. En toute franchise, la présidence ne tient vraiment pas à couper la parole aux députés.
    Nous allons essayer de faire preuve du maximum de bon sens, mais je rappelle quand même aux députés que, s’ils savent se montrer concis dans leurs interventions, leurs collègues auront plus d'occasions de poser des questions pendant les cinq minutes qui leur sont allouées.
    Nous reprenons le débat. La députée de Saint-Hyacinthe—Bagot a la parole.
(1615)

[Français]

    Monsieur le Président, d'entrée de jeu, je tiens à dire que je partagerai mon temps de parole avec mon collègue de Kootenay—Columbia.
    L'aide médicale à mourir est sûrement l'un des plus importants enjeux sociaux auxquels notre pays et notre Parlement sera confronté et a été confronté depuis fort longtemps. Pour moi, il ne fait aucun doute que dans notre législature, il s'agira de la plus délicate question sur laquelle nous aurons à nous prononcer.
    Je tiens à dire que j'appuierai ce projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, bien que je considère que nous devons y apporter des amendements.
    On le sait depuis le début, les néo-démocrates voteront librement sur cette question personnelle et délicate. Donc, il ne s'agit pas ici de rechercher un consensus, mais plutôt de continuer à consulter nos concitoyens et les nombreux experts qui se penchent sur cette question pour voir quel peut être le meilleur projet de loi pour répondre aux droits de nos concitoyens.
    Il est important de clarifier le projet de loi à l'étude, car il laisse place à des interprétations, et il vient surtout en contradiction avec la décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire Carter.
    Nous allons débattre de manière non partisane des amendements nécessaires, mais il est d'abord important de se rappeler, à la Chambre, pourquoi nous devons nous prononcer sur cet enjeu. Ici, la question n'est pas de dire si nous sommes pour ou contre l'aide médicale à mourir. La Cour suprême du Canada a déjà statué de façon très claire que l'aide médicale à mourir est un droit garanti par la Charte. Nous sommes ici pour débattre du projet de loi et faire en sorte qu'il réponde à l'arrêt dans la cause Carter et qu'il n'y ait aucune place à l'interprétation.
    Comme je viens de le dire, dans une décision unanime, la Cour suprême a déterminé que les Canadiens adultes capables vivant des souffrances persistantes et intolérables au regard de problèmes de santé, graves et irrémédiables, avaient le droit, protégé par la Charte, d'obtenir une aide médicale à mourir.
    La Cour suprême donne comme mandat, à notre Parlement, mais aussi aux législatures provinciales, d'adopter des lois compatibles avec la décision de la Cour suprême. Cette décision a lancé un message très fort et dit de mettre à jour nos lois, que nos lois doivent s'assurer de protéger les personnes vulnérables, mais aussi les professionnels de la santé qui sont appelés à les aider.
    Il est important de ne pas politiser cet enjeu ni de le traiter de façon partisane. Il est aussi important de ne pas résumer cette importante question à un débat pro-vie ou pro-choix. Nous savons que ces débats peuvent être interminables.
    Je suis très fière d'avoir siégé au Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir. J'ai travaillé dans ce comité avec mon collègue de Victoria que je tiens à remercier sincèrement pour son expertise, son expérience et sa connaissance enrichie de cet enjeu. Il s'agissait de ma toute première expérience de travail en comité. Je le remercie encore sincèrement, ainsi que l'ensemble des membres du comité et du personnel qui nous a assistés. Ce fut pour moi un privilège de faire partie de ce comité parce que j'ai eu la chance d'étudier à fond le jugement de la Cour suprême à cet effet, ainsi que la décision du tribunal provincial qui l'a précédé. Nous avons aussi examiné attentivement la loi du Québec. Je suis très fière du rôle du Québec qui a été un précurseur sur cette délicate question. Nous avons aussi examiné les lois de partout dans le monde.
    Notre comité a examiné deux grandes études qui se basaient sur le témoignage de plus de 13 000 personnes et de plus de 100 organismes. Nous avons tenu 11 audiences.
(1620)
    Soixante-et-un témoins experts nous ont fait part de leur travail. Depuis le 6 février 2015, jour de la décision de la Cour suprême, toutes les organisations médicales du pays et tous les organismes qui représentent tant des personnes malades que des professionnels de la santé se sont penchés avec beaucoup de sérieux sur cette délicate question. Les représentants des médecins nous ont dit comment ils avaient été formés, avant le 6 février 2015. Toute leur carrière était basée sur le devoir de guérir. Depuis le 6 février 2015, ils sont bien conscients que leur rôle est maintenant aussi d'accompagner les personnes dans leur droit de demander l'aide médicale à mourir.
    Lors des travaux du comité, j'ai trouvé important de rencontrer toutes les organisations de Saint-Hyacinthe—Bagot concernées par le sujet. J'ai rencontré des représentants d'organismes pour personnes vivant avec une déficience, des comités d'usagers, des institutions, des représentants des institutions médicales et un organisme qui travaille avec les familles endeuillées et qui accompagne les gens en fin de vie. Je leur ai fait part des réflexions de notre comité. J'ai eu aussi, avec l'ensemble de ces intervenants, une rencontre pour discuter du rapport de notre comité. Tous les gens directement concernés par la question et qui y oeuvrent jour après jour se sentaient très à l'aise avec l'ensemble de nos recommandations.
    Le rôle du comité était de saisir cette occasion unique de réfléchir à l'aide médicale à mourir, et de réfléchir à tous ses aspects. Bien sûr, nous savions que le gouvernement ne tiendrait pas compte de l'ensemble de nos 21 recommandations dans l'élaboration de son projet de loi. Comme le disait la secrétaire parlementaire, le temps est court. Par contre, nous devions tenir compte de tous les aspects. Nous avons, entre autres, formulé une recommandation qui suscitait beaucoup de questions, soit celle sur les mineurs matures.
    Des témoins nous ont dit que, depuis des années, ils accompagnaient des jeunes de 16 ou 17 ans qui souffraient d'une maladie incurable depuis longtemps et que ces jeunes avaient acquis un degré de maturité que peu d'adultes atteignent au cours de leur vie.
    Bien sûr, après avoir entendu de tels témoignages, nous ne pouvions pas fermer la porte. Nous ne pouvons pas aller de l'avant maintenant, car il faut faire des études. Une de nos recommandations visait d'ailleurs à ce que l'on fasse les études nécessaires, en suivant un échéancier. Il ne faut pas attendre que ces jeunes se présentent devant la Cour suprême.
    Comme je l'ai dit, la loi laisse place à trop d'interprétations. À mon avis, en tant que parlementaires, nous avons le devoir de nous assurer de ne pas faire en sorte que des citoyens malades aient à faire encore des représentations devant la cour pour défendre leur droit à l'aide médicale à mourir.
    Des juristes nous ont dit que nous pouvions considérer l'arrêt dans la cause Carter comme un plancher. C'est d'ailleurs ce que nous avons choisi en tant que députés. Les conservateurs disent qu'il faut considérer l'affaire Carter comme un plafond. Les libéraux, en allant en deçà de l'affaire Carter, au moyen de leur article sur la mort naturelle raisonnablement prévisible, décident d'aller au sous-sol, et c'est ce qu'il faut changer.
    On nous répète que 3 milliards de dollars ont été promis pour les soins palliatifs. Ce n'est qu'une promesse. Il n'y avait rien de tel dans le budget. Or tous les témoins ont parlé des soins palliatifs. Tous les gens de mon comté m'en ont aussi parlé. Ce qui est important, c'est travailler pour le bien de tous les Canadiens et de toutes les Canadiennes, et leur permettre de mourir dans la dignité.
(1625)

[Traduction]

    Monsieur le Président, la députée a fait allusion à l'engagement du gouvernement à l'égard des soins palliatifs non seulement ces dernières semaines, mais depuis plusieurs mois. Il est certain que cette question constitue une part fort importante du débat que nous tenons sur une mesure législative qui suscite de vives émotions et sur laquelle nous avons tous une opinion bien arrêtée. Il nous faut toutefois reconnaître qu'en matière de soins palliatifs, de nombreuses parties  — en particulier, les provinces et les Premières Nations — ont un rôle primordial à jouer dans l'élaboration d'une politique.
    La députée nous dirait-elle dans quelle mesure, selon elle, il importe qu'Ottawa travaille avec les parties concernées pour fournir aux Canadiens de tous les coins du pays les soins palliatifs qu'ils souhaitent?

[Français]

    Monsieur le Président, il faut aller beaucoup plus loin. Le gouvernement fédéral doit faire preuve de leadership dans le dossier des soins palliatifs. Il a beau promettre 3 milliards de dollars et promettre d'en discuter, mais dans le dernier budget, il n'y avait pas un sou pour entamer ces discussions avec les provinces et faire les études nécessaires.
    J'ai mené des consultations dans mon comté, où se trouve l'un des plus grands établissements de soins de longue durée, ou CHSLD, du Québec. Pour plusieurs centaines de personnes âgées, il n'y a que 12 lits réservés aux soins palliatifs dans cet établissement. C'est nettement insuffisant. Il ne suffit pas de promettre 3 milliards de dollars. Il faut mettre de l'argent dans le budget et se mettre à la tâche dès maintenant.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je remercie la députée de ses observations.
    Le député de Parkdale—High Park — du moins, je crois que c'est lui — a dit avec raison que ce projet de loi créerait un des régimes d'euthanasie les plus permissifs au monde. C'est ce que j'ai cru l'entendre dire, et je pense qu'il a tout à fait raison.
    Il va sans dire que le contexte juridique actuel nous impose certaines restrictions. Toutefois, je crains que le projet de loi ne prévoie pas les mesures de protection nécessaires pour faire en sorte qu'une personne qui enlève la vie d'une autre personne sans son consentement puisse être poursuivie de manière efficace.
    J'aimerais demander à la députée si elle est prête à appuyer ma proposition visant à abroger les dispositions du projet de loi relatives à la croyance raisonnable mais erronée. Je pense que cela permettrait d'améliorer considérablement la mesure législative.
    Dans sa version actuelle, le projet de loi dit qu'une personne pourrait éviter d'être poursuivie si elle a une croyance raisonnable, mais erronée, que le consentement a été donné. Ainsi, une personne pourrait enlever la vie à une autre personne n'ayant pas donné sans consentement et éviter d'être poursuivie si elle réussit tout au moins à prouver, hors de tout doute raisonnable, qu'elle avait une croyance raisonnable, mais erronée.
    La députée serait-elle d'accord pour qu'on abroge ces dispositions très préoccupantes afin de protéger les personnes vulnérables?

[Français]

    Monsieur le Président, l'article qui parle de mort naturelle raisonnablement prévisible est effectivement l'article le plus contestable de cette loi.
     D'ailleurs, hier, le ministre de la Santé du gouvernement du Québec, Gaétan Barrette, disait que cet article ne ferait pas long feu devant les tribunaux. Il invitait même les médecins à se fier à la loi du Québec plutôt qu'à la loi fédérale telle que rédigée. Nous avons le devoir de nous assurer que la loi est claire.
    Au Québec, au cours des dernières semaines, des personnes se sont fait mourir de faim en tentant de devenir admissibles à l'aide médicale à mourir. Il faut que cela cesse. Il faut permettre aux gens de faire le choix de mourir dans la dignité. Notre loi doit le permettre.
(1630)
    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de son travail dans ce dossier.
    Peut-elle parler de l'accessibilité à l'aide médicale à mourir pour tous les Canadiens, peu importe où ils se trouvent au Canada, puisqu'il s'agit maintenant d'un droit protégé par la Charte, en vertu de la décision qui a été rendue?
    Monsieur le Président, effectivement, la question de l'accessibilité à l'aide médicale à mourir est fondamentale. Comme il s'agit d'un droit, cela doit bien sûr être accessible. C'est pourquoi il est intéressant d'élargir cela pour les différents professionnels de la santé.
     Au moment de juger de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir, ce sont des médecins qui s'en occupent. Je représente un comté qui est à 50 kilomètres d'une métropole et où il y a des citoyens qui n'ont pas accès à un médecin. Alors, il est important de permettre aux différents professionnels de la santé d'aider les personnes à se prévaloir de leur droit.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui au sujet du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d’autres lois (aide médicale à mourir).
    J'appuie l'adoption de ce projet de loi à l'étape de la deuxième lecture. Toutefois, il devra être amendé.
    Je vais commencer en vous racontant une histoire. Il y a un certain nombre d'années, ma femme, Audrey, et moi avons adopté une magnifique chienne shetland fauve que nous avons baptisée Princess Diana of Cornwall. Nous avions choisi ce nom parce que, à l'époque, nous habitions sur Cornwall Drive, à Port Coquitlam, et le monde n'en avait que pour le mariage royal de deux personnes nommées Charles et Diana.
    Princess était une merveilleuse petite chienne. Malheureusement, lorsqu'elle avait environ 11 ans, elle a eu le cancer. Nous vivions déjà dans notre maison actuelle, à Cranbrook, en Colombie-Britannique, dans les Rocheuses. À mesure que le cancer se développait, Princess ressentait de plus en plus de douleur et d'inconfort. Nous consultions régulièrement notre vétérinaire local, qui nous a un jour annoncé que Princess était en phase terminale et qu'elle souffrait énormément. Il nous a dit que la meilleure chose à faire pour elle était de mettre fin à ses souffrances. Il nous a demandé de la ramener le lendemain. Nous avons ramené Princess à la maison pour lui faire nos adieux, et j'ai amené Princess le lendemain chez le vétérinaire. Il m'a demandé si je préférais la lui laisser ou si je voulais rester. Je lui ai répondu que je préférais rester. Je tenais Princess dans mes bras et j'ai regardé l'aiguille rentrer dans sa patte. Elle s'est couchée et est morte dans mes bras. Les yeux pleins d'eau, je me rappelle m'être dit que, si jamais je vivais des souffrances intolérables des suites d'une maladie incurable, c'est ainsi que j'aimerais quitter ce monde: dans les bras d'une personne que j'aime avec une aiguille dans la patte. Je suis personnellement devenu un ardent défenseur de l'aide médicale à mourir ce jour-là, il y a 20 ans.
    Je ne dis pas que la mort d'un animal de compagnie et celle d'un être humain sont équivalentes, même si elles suscitent des sentiments comparables, comme le savent fort bien les gens qui ont perdu un compagnon animal. Nous devons nous employer à faire encore davantage pour prendre les bonnes décisions lorsqu'on envisage l'euthanasie pour les humains.
    Comme les députés le savent, en février 2015, la Cour suprême du Canada a rendu une décision unanime établissant que la Charte garantit le droit de demander l'aide d'un médecin pour mourir à tout Canadien adulte capable affecté de problèmes de santé graves et irrémédiables lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition, y compris une affection, une maladie ou un handicap. Le NPD est déterminé à mettre en oeuvre l'arrêt de la Cour suprême de façon équilibrée et judicieuse tout en respectant l'autonomie des patients, les droits des professionnels de la santé et des personnes vulnérables, et la nature fondamentalement personnelle de la question pour chaque Canadien. Autrement dit, nous devons nous employer à ce que cette mesure législative soit la meilleure qui soit.
    La semaine dernière, à mon retour dans ma circonscription, Kootenay—Columbia, j'ai rencontré Bendina Miller, l'ancienne présidente de l'Association canadienne pour l’intégration communautaire, ou ACIC. Cette association a été l'un des principaux partisans de la norme de personne vulnérable qui vise à protéger les Canadiens vulnérables dans le cadre de l'étude par le Parlement du projet de loi C-14, qui porte sur l'aide médicale à mourir. L'ACIC estime que, dans sa forme actuelle, le projet de loi prévoit des mesures appropriées pour tenir compte de la vulnérabilité des personnes handicapées, mais elle estime que certaines améliorations s'imposent pour respecter l'objectif énoncé dans l'arrêt de la Cour suprême, qui exige que la loi donne un accès juste à l'aide médicale à mourir mais qu'elle protège également les personnes vulnérables susceptibles d'être influencées ou incitées à faire appel au système pour mourir.
    L'Association canadienne pour l’intégration communautaire recommande cinq amendements de fond à ce projet de loi. En voici un aperçu.
    Premièrement, le projet de loi C-14 devrait être amendé pour que l'exigence actuelle de contrôle judiciaire soit maintenue jusqu'à ce qu'une étude permette de comprendre clairement les mérites et les répercussions de cette mesure législative.
    Deuxièmement, il faudrait inclure dans le projet de loi une exigence juridique explicite visant à cerner, analyser et consigner les sources de la souffrance d'une personne et à comprendre les motifs qui sous-tendent sa demande d'aide à mourir.
    Troisièmement, le projet de loi C-14 devrait être amendé pour répondre aux exigences de l'arrêt Carter et devrait préciser qu'une demande volontaire d'aide médicale à mourir ne peut être le résultat de pressions externes ou d'encouragements à agir de la sorte.
    Quatrièmement, le projet de loi C-14 devrait être amendé pour préciser que le ministre prend des règlements, et non qu'il peut en prendre, concernant la collecte obligatoire de renseignements sur les demandes d'aide médicale à mourir ou la prestation de celle-ci.
    Cinquièmement, le projet de loi devrait préciser qu'un spécialiste des soins palliatifs ou un autre professionnel compétent doit procéder à une évaluation pour que le droit du patient de fournir un consentement éclairé soit respecté, ce qui veut dire que le patient doit être informé de tous les traitements et de toutes les formes d'aide dont il peut bénéficier pour atténuer ses souffrances.
(1635)
    Le projet de loi ne devrait pas entrer en vigueur sans être accompagné d'une stratégie nationale améliorée sur les soins palliatifs, qui n'est manifestement pas prévue dans le budget de 2016-2017 du gouvernement libéral.
    En novembre, j'ai eu le plaisir de rencontrer les députés fédéraux nouvellement élus de tous les partis, à l'exception du Parti vert. J'ai été frappé de voir que tous mes collègues tenaient à peu près le même propos. Ils étaient tous au Parlement pour oeuvrer dans un esprit de collaboration afin de bâtir un Canada meilleur. Ce fut très encourageant pour moi, qui venais d'être élu député pour la première fois, car c'est également la raison pour laquelle je suis ici.
    Lorsque je discute avec les gens de ma circonscription des travaux de la Chambre des communes, je leur dis que trois projets de loi pourraient avoir des incidences particulièrement importantes au Canada: premièrement, le système de représentation proportionnelle; deuxièmement, la légalisation de la marijuana; troisièmement, l'aide médicale à mourir.
    Nous en sommes à débattre et à étudier le premier de ces trois projets de loi et nous devons collaborer afin de bâtir un avenir meilleur pour les Canadiens. Le projet de loi poursuit trois objectifs: maximiser la volonté de vivre des gens grâce à de meilleurs soins palliatifs; protéger les personnes vulnérables; permettre à nos concitoyens d'exercer le droit confirmé par la Cour suprême de choisir de mourir dans les bras d'une personne qui les aime, s'ils subissent des souffrances persistantes et intolérables en raison d'un problème de santé grave et irrémédiable.
    Tâchons de collaborer pour amender le projet de loi et donner aux Canadiens le meilleur cadre législatif qui soit dans ce dossier très important qui soulève les passions.
    Monsieur le Président, je remercie le député de ses paroles réfléchies, mais il n'a rien dit au sujet du consentement préalable. Je serais curieux de savoir ce qu'il en pense. Comment cet aspect pourrait-il être abordé dans le processus parlementaire, notamment lorsque le projet de loi sera renvoyé au comité?
    De toute évidence, certains aspects doivent être abordés et décortiqués par le comité. Nous en convenons; à nos yeux, cela fait partie d'un bon processus législatif. Le député n'a cependant pas parlé du consentement préalable, et j'aimerais savoir ce qu'il en pense.
    Effectivement, monsieur le Président, selon moi, cet aspect fait défaut dans la version actuelle du projet de loi. Il faut absolument donner aux gens la possibilité d'exprimer leur volonté et de donner leur consentement préalable, surtout lorsqu'ils savent que leur maladie les empêchera plus tard de prendre cette décision. Cet aspect devrait donc faire partie du projet de loi.
    Monsieur le Président, j'aimerais revenir sur la question du consentement préalable, parce qu'on l'a évoquée à plusieurs reprises aujourd'hui.
    D'après les témoignages que nous avons entendus au comité spécial, du moins de la part des intervenants du milieu de la santé ou de leurs représentants, il est très difficile d'obtenir une directive préalable sur une situation très hypothétique, parce que les gens ne savent pas comment ils subiront l'épreuve. Si nous ajoutons une disposition sur le consentement préalable, il se pourrait qu'un patient se retrouve dans une situation où on lui enlèverait la vie, même s'il ne souhaite pas mourir à ce moment-là, du seul fait qu'il a fourni son consentement écrit au préalable. Autrement dit, son vécu pourrait être différent de ce qu'il avait prévu.
    Je voudrais interroger le député justement sur le consentement aux relations sexuelles. Il est clairement entendu qu'une personne ne peut pas donner son consentement au préalable. Dans ce contexte, il faut que le consentement soit donné au moment même de l'acte. Par conséquent, pourquoi devrions-nous imposer une norme différente et inférieure dans le cas du consentement à mourir?
(1640)
    Monsieur le Président, je ne crois vraiment pas qu'il s'agit d'une norme inférieure. Si nous avons l'occasion de déclarer notre consentement à l'avance et de le mettre par écrit, cela nous permet au moins d'avoir notre mot à dire sur notre sort dans le futur. Si nous en arrivons au point où nous ne pouvons pas donner ou refuser notre consentement, alors nous n'avons pas de choix. Donc, avoir au moins l'occasion de déclarer ses souhaits à l'avance constitue une amélioration par rapport au fait de n'avoir aucun choix.
    Monsieur le Président, j'ai beaucoup hésité avant de prendre la parole pour poser cette question, mais mon collègue — que je respecte et dont je respecte le travail — a laissé entendre qu'il y avait des similitudes entre la perte d'un animal de compagnie et la perte d'un être cher, un être humain. J'ai perdu un grand nombre d'animaux de compagnie au cours des 60 dernières années et, oui, j'ai versé des larmes, et je sais ce que c'est. Toutefois, d'insinuer qu'il y a ne serait-ce que 1 % de similitude entre la perte d'un animal de compagnie et la perte d'un membre de la famille est à côté de la question.
    J'ai vu ma mère et mon père à l'approche de la mort. J'ai vu mon frère, maintenu artificiellement en vie pendant un mois à l'hôpital, vivre ses derniers moments et mourir. Il y a cinq ans aujourd'hui, mon épouse a souffert d'une hémorragie intracrânienne et est morte deux jours plus tard. Toutefois, dans aucune de ces situations, dans aucune, j'aurais voulu mettre fin à leur vie un seul jour plus tôt.
    Nous devons réaliser ce que la souffrance peut nous enseigner lorsque nous accompagnons ceux qui souffrent et que nous partageons cette souffrance. C'est cela être humain. Je crains que, si nous perdons la volonté d'accompagner ceux qui souffrent et de faire quelque chose pour améliorer les soins palliatifs et bien les soigner, nous manquions le bateau.
    J'aimerais que mon collègue commente l'absence, dans le budget, d'un engagement ferme à vraiment faire quelque chose dans le domaine des soins palliatifs.
    Monsieur le Président, permettez-moi de répéter ce que j'ai dit dans mon discours. Je n'essaie pas d'insinuer que la mort d'un animal de compagnie a le même poids que celle d'un humain.
     Lorsqu'il est question d'examiner l'euthanasie avec nos yeux d'humains, il faut être particulièrement prudent. Je suis on ne peut plus d'accord pour dire que les soins palliatifs sont essentiels. Nous devons nous assurer d'avoir une stratégie nationale sur les soins palliatifs pour accompagner cela, mais la stratégie et la loi devront se compléter l'une l'autre si nous voulons faire quelque progrès que ce soit en la matière.
    L'histoire que j'ai racontée est ce qui m'a convaincu: si j'avais le choix, je choisirais de mourir dans la dignité.
    Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur de prendre la parole pour appuyer le projet de loi C-14, cette importante mesure législative qui autorisera pour la première fois de notre histoire l'aide médicale à mourir dans tout le pays.
     Je crois que le projet de loi C-14 répond directement et de façon réfléchie à la décision de la Cour suprême concernant l'affaire Carter. Cette mesure législative établit un juste équilibre entre, d'une part, l'autonomie accordée à un adulte capable dont la mort est raisonnablement prévisible de demander une aide médicale à mourir, et d'autre part, la protection des personnes vulnérables, grâce à l'adaptation prudente des critères d'admissibilité et à de rigoureux mécanismes de protection qui seront essentiels pour prévenir les dérapages et les abus.

[Français]

    Comme l'a reconnu l'Association médicale canadienne devant le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir, on ne peut souligner suffisamment l'importance de ce changement dans la pratique médicale canadienne et la société canadienne dans son ensemble.
    À l'heure actuelle, il y a huit juridictions dans le monde, en plus du Québec, qui ont adopté des règles juridiques précises relatives à l'aide médicale à mourir: quatre États américains, la Colombie et les pays européens de la Belgique, des Pays-Bas et du Luxembourg.
    La communauté internationale porte attention au leadership du Canada sur cet enjeu en ce moment, et je tiens à féliciter les députés des deux côtés de la Chambre pour leur précieuse contribution à ce débat complexe et délicat.
(1645)

[Traduction]

    Le projet de loi C-14 établirait les règles de droit pénal relatives à l'aide médicale à mourir, notamment en ce qui concerne les critères d'admissibilité, les mesures de sauvegarde et le cadre régissant le système de surveillance pancanadien. En plus de la réponse législative exhaustive proposée dans le projet de loi C-14, le gouvernement entreprendrait des études indépendantes sur trois questions clés au sujet desquelles la Cour suprême ne s'est pas prononcée dans l'arrêt Carter: l'admissibilité des personnes de moins de 18 ans, les demandes faites à l'avance, et les demandes d'aide médicale à mourir faites strictement pour cause de maladie mentale.
    Je me permets aujourd'hui de fournir aux députés davantage de précisions au sujet des critères d'admissibilité prévus dans le projet de loi C-14 et de leur expliquer comment ces critères donnent suite à l'arrêt Carter. Cette question a été posée à maintes reprises depuis que le projet de loi a été présenté.
    En vertu du projet de loi C-14, seuls les adultes mentalement capables auraient accès à l'aide médicale à mourir, soit les personnes, premièrement, qui sont atteintes d'une maladie, d'une affection ou d'un handicap graves et incurables; deuxièmement, dont la situation médicale se caractérise par un déclin avancé et irréversible de leurs capacités; troisièmement, dont la situation médicale leur cause des souffrances physiques ou psychologiques persistantes qui leur sont intolérables; quatrièmement, dont la mort naturelle est devenue raisonnablement prévisible compte tenu de l'ensemble de leur situation médicale, sans pour autant qu'un pronostic ait été établi quant à leur espérance de vie.
     Je souligne qu'il s'agit là du libellé exact du projet de loi, car il y a eu des affirmations erronées sur ce qui est réellement exigé. Il est aussi important de rappeler que les critères ne doivent pas être considérés de façon isolée. Chaque critère contribue à définir le sens et la portée de ceux qui l'accompagnent. Ils contribuent à donner une meilleure vue d'ensemble de la situation.
    Certains se demandent ce qu'on entend par une mort raisonnablement prévisible, puisque, dans tous les cas, la mort est raisonnablement prévisible dans la mesure où elle est, à l'instar des impôts, inévitable pour chacun d'entre nous. Le projet de loi C-14 dit expressément qu'il faut que la mort naturelle soit devenue raisonnablement prévisible, ce qui indique clairement que la situation médicale du patient doit avoir changé. Le patient doit être sur le point de mourir, alors qu'il ne l'était pas auparavant. La mort d'une personne en bonne santé n'est pas raisonnablement prévisible à moins que la personne ait subi un changement dans sa situation médicale.
    Monsieur le Président, j'ai omis de le faire au début de mon intervention, mais je vous informe maintenant que je vais partager mon temps de parole avec le député de Fredericton.
     Le concept de prévisibilité raisonnable est un concept de droit reconnu, et l'évaluation qui est faite dépend du contexte. Ainsi, dans le contexte de l'aide médicale à mourir, il faut que la mort du patient puisse fort probablement se produire dans une période de temps relativement courte par rapport aux circonstances que l'on peut prévoir de façon raisonnable. Encore une fois, le projet de loi indique expressément qu'il n'est pas nécessaire de faire un pronostic précis en ce qui concerne l'espérance de vie du patient. Étant donné que la situation de chaque personne en fin de vie est unique, ce critère a été rédigé avec soin afin de donner toute la souplesse nécessaire aux professionnels de la santé, qui peuvent ainsi évaluer individuellement la situation médicale globale d'un patient. Ce qui importe d'abord et avant tout, c'est la situation médicale globale de la personne, et non un problème de santé particulier; c'est ce qui nous permet de donner aux Canadiens la possibilité de choisir de mourir paisiblement, en ayant recours à l'aide médicale à mourir, au lieu de mourir à petit feu ou dans la douleur.
    Comme l'indiquent les normes et les lignes directrices du milieu médical sur les indicateurs de pronostic, de nombreux facteurs peuvent servir à déterminer si la fin de la vie d'un patient approche, comme une maladie incurable progressive et incurable à un stade avancé. D'autres facteurs complètement différents peuvent aussi entrer en jeu, comme l'âge du patient, le fait qu'il a une santé très précaire en général, et les risques de décès découlant de complications associées à d'autres maladies qui ne sont pas nécessairement mortelles, mais qui peuvent mettre en péril la vie d'une personne qui est déjà faible.
    Comme l'a récemment reconnu l'Association médicale canadienne, exiger que la mort naturelle soit devenue raisonnablement prévisible constituerait une directive plus claire que le terme « problèmes de santé graves et irrémédiables » utilisé par la cour. Cela signifierait, selon le représentant de l'Association médicale canadienne, que la maladie devrait se situer à l'extrémité du spectre, mais qu'il ne serait pas nécessaire qu'elle soit incurable ou que la mort soit imminente.
    Dans l'affaire Carter, la Cour suprême a expressément affirmé que sa déclaration était censée s’appliquer aux situations de fait de l'espèce et qu'elle ne se prononçait pas sur d’autres situations où l’aide médicale à mourir pouvait être demandée. Le projet de loi C-14 répondrait directement aux situations de fait de Kay Carter et de Gloria Taylor. L'état de santé de celles-ci s'aggravait et elles souffraient vers la fin de leur vie, mais elles ne pouvaient pas être certaines du moment exact où elles mourraient.
     La Cour suprême n'a pas défini le terme « problèmes de santé graves et irrémédiables ». Elle a plutôt reconnu qu'il incombait au Parlement de soupeser et de pondérer le point de vue des personnes qu’un régime permissif pourrait mettre en danger et le point de vue de celles qui demandent de l’aide pour mourir. C'est exactement ce que fait le projet de loi C-14. Il définit l'admissibilité d'une façon qui est conforme à l'arrêt Carter dans son intégralité et il apporte les éclaircissements nécessaires quant à l'évaluation de l'admissibilité.
    Certains ont dit trouver préoccupant que le projet de loi ne protège pas expressément la liberté de conscience des fournisseurs de soins de santé. On peut lire, parmi les objectifs législatifs clairement exposés dans le préambule du projet de loi C-14, que cette mesure cherche notamment à respecter les convictions personnelles des fournisseurs de soins de santé tout en reconnaissant la compétence des provinces en ce qui a trait à différentes questions liées à l'aide médicale à mourir. L'une de ces questions concerne la recherche d'un juste équilibre entre les intérêts patients et ceux des professionnels de la santé. Il importe de souligner qu'aucune disposition du projet de loi C-14 n'obligerait des fournisseurs de soins de santé à fournir une aide qui irait à l'encontre de leurs convictions personnelles. Plus important encore, nous posons des gestes concrets afin de protéger le droit à la liberté de conscience des professionnels. Dans cette optique, la ministre de la Santé a offert de collaborer avec les provinces et les territoires à l'élaboration d'un système de coordination des soins de fin de vie qui permettra de respecter la liberté de conscience des fournisseurs de soins tout en offrant aux patients un meilleur accès aux soins, y compris à l'aide médicale à mourir.
    Par ailleurs, certaines personnes jugent insuffisantes les mesures de sauvegarde prévues par le projet de loi. Or, dans l'ensemble, ces mesures sont comparables ou même un tout petit peu supérieures à celles de régimes d'aide médicale à mourir en vigueur ailleurs dans le monde.
(1650)
    Dans l'affaire Carter, la juge de première instance a examiné de nombreux éléments de preuve concernant l'efficacité de ces régimes. Elle a conclu qu'il est possible, dans de tels systèmes, de gérer convenablement les risques que pourraient courir les personnes vulnérables. Nous sommes tout aussi convaincus que les mesures de sauvegarde prévues préviendraient les abus et les erreurs.
    Je pense que la mesure législative proposée constitue la bonne façon d'aborder l'aide médicale à mourir au Canada à l'heure actuelle. C'est une réponse raisonnée à l'arrêt Carter. J'encourage vivement tous les députés à appuyer le projet de loi C-14 à l'étape de la deuxième lecture.
    Monsieur le Président, les discours du débat d'aujourd'hui sont intéressants. Ce qui m'inquiète au sujet du projet de loi, c'est qu'il peut être difficile, dans les régions rurales du Canada, de trouver deux médecins ou deux infirmiers praticiens. À l'extérieur des grandes régions urbaines, il y a moins de médecins et souvent même pas d'infirmier praticien. Même si l'on arrivait à trouver ces quatre personnes, elles seraient facilement identifiables, ce qui risque de représenter un problème épineux dans les collectivités rurales. La seule autre solution serait l'aiguillage. Encore une fois, ce sera vers ces gens que l'on finira par se faire aiguiller.
    C'est une question que je me pose au sujet de cette mesure législative. Je m'inquiète beaucoup du nombre restreint de professionnels de la santé qui devraient prendre part au processus à l'extérieur des grands centres urbains.
(1655)
    Monsieur le Président, c'est cette préoccupation même qui a motivé la décision d'élargir l'exemption pour permettre aux infirmiers praticiens de fournir l'aide médicale à mourir. La tendance se répand au pays: comme les médecins sont nombreux dans les grands centres et beaucoup moins à l'extérieur de ceux-ci, les infirmiers praticiens prennent de plus en plus le relais. C'est justement pourquoi ils ont été inclus dans le projet de loi.
    La notion d'accès est essentielle lorsqu'il est question d'un droit garanti par la Charte. Le député soulève une préoccupation tout à fait valable, et on tente d'y répondre en incluant les infirmiers praticiens.
    Monsieur le Président, j'ai une question au sujet de l'accès à des services médicaux adéquats et de l'accès aux infirmiers praticiens ou aux médecins. Dans ma circonscription, la plupart des réserves et des localités n'ont pas ce privilège lorsqu'on parle de la stratégie nationale de soins palliatifs. Je suis très inquiète parce que d'où je viens, on n'a même pas accès à un infirmier. Comment le gouvernement peut-il inscrire cette discussion dans un contexte plus large pour aider les gens à mourir dans la dignité?
    Monsieur le Président, les deux dernières questions montrent bien à quel point l'accès aux services médicaux est inégal selon l'endroit du pays où on se trouve.
    Aujourd'hui, le Parlement débat d'une loi modifiant le Code criminel. La réponse du gouvernement à l'arrêt Carter est législative en même temps qu'elle ne l'est pas. L'aspect législatif correspond aux mesures dont nous sommes actuellement saisis, mais pour ce qui est du non-législatif, le gouvernement s'est aussi engagé à consacrer 3 milliards de dollars aux soins à domicile, dont une bonne part ira aux soins palliatifs.
    Cette loi ne résoudra jamais à elle seule les inégalités observables au pays en ce qui concerne l'accès aux services médicaux. Nous en sommes conscients. C'est impossible. Quoi qu'il en soit, le gouvernement devra garder cet objectif en tête lorsqu'il négociera l'accord sur la santé, qu'il élaborera, en collaboration avec les provinces, une stratégie de soins palliatifs ou qu'il fera le nécessaire, toujours avec la collaboration des provinces, pour que les régions rurales et éloignées du pays aient accès à des services médicaux.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de ses observations réfléchies.
    La semaine dernière, j'ai organisé une table ronde avec la coalition des associations de retraités et d'aînés de Terre-Neuve-et-Labrador. Absolument toutes les personnes présentes se sont dites favorables à l'approche adoptée par le gouvernement avec cette mesure législative. Il n'y a qu'un seul sujet qui leur faisait dire soit que la loi était bien pondérée, soit qu'elle allait trop loin, celui des directives médicales anticipées. Elles avaient également du mal à concevoir qu'on puisse déterminer d'avance si l'état de santé d'une personne deviendra intolérable ou non. Elles se sont aussi demandé si les provinces seraient en mesure de se doter des registres appropriés pour ce type de soins médicaux.
    J'aimerais savoir si le député est lui aussi d'avis que l'approche graduelle préconisée par le gouvernement demeure le meilleur moyen d'aborder l'aide médicale à mourir ou s'il estime que nous devrions aller plus loin dès maintenant.
    Monsieur le Président, je remercie le député de St. John's-Est de sa question et du fait qu'il ait consacré une partie de la semaine de relâche à consulter les habitants de sa circonscription. Voilà qui est extrêmement important. J'ai fait la même chose.
    De toute évidence, le gouvernement a procédé avec prudence. Étant donné les échéanciers serrés qui nous étaient imposés en raison de l'inaction du gouvernement avant les élections et la date butoir établie par la Cour suprême, il s'agit de la voie la plus sage. Dans le préambule du projet de loi, il est question de mesures non législatives, ce qui indique qu'on examinera plus longuement et de manière plus exhaustive les questions les plus délicates. Selon moi, c'est la solution qui convient le mieux au Canada à l'heure actuelle.
(1700)
    Monsieur le Président, l'arrêt Carter de la Cour suprême a indiqué aux Canadiens que l'aide médicale à mourir deviendrait légale au Canada. C'est au gouvernement qu'il revenait de proposer des règles claires établissant l'admissibilité à l'aide médicale à mourir et des mesures de précautions visant à protéger les plus vulnérables, et de créer un régime de surveillance pour assurer la responsabilité, la transparence et la confiance du public dans le système. Il était également important de créer une loi fédérale pour assurer l'uniformité de l'aide médicale à mourir au Canada.
    Le projet de loi C-14 est l'aboutissement d'un vaste processus de consultation tenu l'an dernier auprès de particuliers, de groupes et d'experts canadiens et étrangers. Il prend en considération tout un éventail d'intérêts, dont l'autonomie personnelle et la protection des personnes vulnérables. Il reconnaît également que la question de l'aide médicale à mourir se pose aux Canadiens de façons diverses et bien personnelles. Il tient compte, d'une part, des droits et de la conscience éclairée des patients et, d'autre part, du respect de l'éthique professionnelle et de la liberté de conscience des médecins.
    Ce projet de loi propose aussi la prise de mesures générales sur un aspect des soins de fin de vie pour lequel les Canadiens, quel que soit leur point de vue sur l'aide médicale à mourir, ont clairement montré qu'ils voulaient que le gouvernement intervienne, c'est-à-dire les soins palliatifs et de fin de vie. J'ai eu le plaisir hier de passer une journée ensoleillée à Fredericton pour participer à l'activité « Hike for Hospice » et je suis fier du soutien extraordinaire qu'ont témoigné les membres de la collectivité à l'égard d'une cause aussi valable et importante.
    Pour gérer une question aussi délicate que l'aide médicale à mourir, il nous est impossible d'agir sans accroître pleinement et intentionnellement nos options en matière de soins de fin de vie. Le gouvernement a clairement indiqué que, dans le cadre d'un accord pluriannuel sur la santé, les ressources financières pour améliorer les soins de santé, y compris les soins palliatifs, seront de la plus haute importance. En outre, en ce début de la Semaine de la santé mentale au Canada, nous devons nous engager à nouveau à offrir des soins et un soutien accrus aux personnes souffrant de problèmes de santé mentale et privilégier des approches cliniques et communautaires qui donneront aux Canadiens souffrant de santé mentale un meilleur accès aux services dont ils ont besoin pour assurer leur bien-être.

[Français]

    Le 11 décembre dernier, un comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir a été chargé d'examiner les activités récentes de consultation. Le comité a également consulté les Canadiens et les intervenants et a formulé des recommandations sur le cadre d'une réponse fédérale à l'arrêt dans l'affaire Carter. Le comité a tenu 16 réunions, a entendu 61 témoins, a reçu plus de 100 mémoires et a déposé son rapport final au Parlement le 25 février.

[Traduction]

    J'aimerais remercier le comité de son travail ainsi que chacun de ses membres de son engagement dans le dossier.
    Dans ma circonscription aussi, des centaines d'électeurs se sont fait entendre et, de mon côté, j'ai fait appel à la sagesse et aux conseils de représentants du milieu des personnes handicapées, qui nous demandent de veiller à ce qu'aucune influence externe ne puisse agir sur les décisions des personnes vulnérables; de membres de la communauté religieuse, dont des amis et mentors de confiance, qui m'encouragent à m'en remettre à ma propre conscience éclairée au moment de voter sur cette importante mesure; de représentants du milieu médical, dont certaines sommités, qui nous demandent de privilégier une approche judicieuse et pondérée à l'élaboration d'un cadre entourant l'aide médicale à mourir; et de certaines parties qui préconisent une approche plus libérale et qui seront peut-être déçues par le cadre proposé.
    J'ai écouté et je compte bien continuer d'écouter les gens de la circonscription que je représente. J'ai réfléchi et je compte bien continuer de réfléchir à cette décision importante qui changera la façon dont les Canadiens envisagent la fin de la vie.
    Comme beaucoup d'autres, j'ai abordé la question avec grande humilité, car je comprends que, dans une société pluraliste aussi riche et diversifiée que le Canada, il faut s'attendre à ce que le projet de loi ne cadre pas avec la conception du monde de tous. J'ai de l'empathie pour ceux qui ne se sentent pas représentés, je les comprends et je tiens à leur faire savoir qu'à l'instar de tous mes collègues, je continuerai de veiller à leurs intérêts au meilleur de ma capacité.
    J'estime que les ministres chargés de la rédaction du projet de loi, comme l'ensemble du gouvernement, ont abordé la question avec grande délicatesse. L'approche retenue est caractéristique d'un gouvernement qui est à l'écoute des citoyens et qui restera réceptif à toute la gamme de points de vue dans ce dossier des plus personnels et difficiles.
    C'est dans cet esprit que j'affirme être à l'aise avec le projet de loi dont nous sommes saisis. J'aimerais prendre le temps d'en expliquer les éléments en plus grand détail ainsi que leur signification pour les Canadiens.
(1705)

[Français]

    Premièrement, pour permettre l'accès à l'aide médicale à mourir au Canada, il faudrait modifier le Code criminel pour que les médecins, les infirmiers praticiens et ceux qui les aident puissent aider les patients admissibles à mourir sans s'exposer à des accusations d'aide au suicide ou d'homicide. Il y aura aussi des mécanismes de sauvegarde pour faire en sorte que ceux qui recevront de l'aide médicale à mourir y seront admissibles, pourront donner leur consentement éclairé et feront volontairement la demande d'aide à mourir.

[Traduction]

    Une demande volontaire et éclairée doit être faite sous forme écrite par la personne en présence de deux témoins indépendants, et un deuxième avis médical est requis. La seule personne qui peut faire cette demande est celle qui souhaite recevoir de l'aide médicale à mourir. Le droit d'opter pour l'aide médicale à mourir n'appartient qu'aux adultes capables qui veulent l'obtenir. C'est nécessaire pour protéger les gens vulnérables.
    Une personne qui veut obtenir l'aide médicale à mourir doit remplir certains critères. Elle devrait être une adulte mentalement capable d'au moins 18 ans. Elle devrait être atteinte d’une maladie, d’une affection ou d’un handicap graves et incurables. Sa situation médicale devrait se caractériser par un déclin avancé et irréversible de ses capacités, et elle devrait avoir des problèmes de santé lui causant des souffrances persistantes et intolérables. Elle devrait approcher de la fin de sa vie, et sa mort devrait être raisonnablement prévisible.
    La mesure législative prévoit que les mineurs matures, de même que les personnes souffrant uniquement d'une maladie mentale, ne seraient pas admissibles. Toutefois, le gouvernement propose une étude indépendante sur les questions juridiques, éthiques et médicales liées à l'aide médicale à mourir pour les mineurs matures et les personnes souffrant d'une maladie mentale, ainsi que sur la possibilité de donner des directives préalables.

[Français]

    Encore une fois, le projet de loi propose des mesures de protection pour s'assurer que les patients sont admissibles et qu'ils ont donné leur consentement éclairé. Il y aurait une période obligatoire d'au moins 15 jours de réflexion et les patients pourraient retirer leur consentement à tout moment.

[Traduction]

    En outre, rien dans le projet de loi proposé n'obligerait un fournisseur de soins de santé à offrir de l'aide médicale à mourir ou à aiguiller le patient vers un autre professionnel de la santé.
    L'approche proposée pour cette question des plus délicates fait de son mieux pour reconnaître le choix individuel des adultes qui ont des souffrances intolérables et dont la mort est raisonnablement prévisible. Elle cherche à affirmer la valeur inhérente et égale de la vie de chaque personne. Elle vise à protéger les personnes vulnérables et réaffirme le but de la société pour ce qui est de prévenir le suicide. C'est une approche qui reconnaît où nous en sommes en tant que société et en tant que peuple en évolution dans le monde. Elle respecte les voix divergentes des Canadiens et fait preuve de souplesse en prévoyant la réévaluation et l'examen de la question de l'aide médicale à mourir dans les semaines, les mois et les années à venir.
    Je tiens à remercier les citoyens de ma circonscription qui ont communiqué avec moi sur cet important sujet ainsi que les nombreux autres qui, je le sais, se débattent avec cette question intérieurement.
     Je veux que les Canadiens sachent que le Parlement et moi ferons collectivement de notre mieux pour servir les intérêts de chacun ainsi que ceux de leurs voisins, dans ce dossier comme dans tout dossier important.
(1710)
    Monsieur le Président, le député et celui qui a pris la parole avant lui ont parlé de la souplesse de ce projet de loi. La souplesse est peut-être quelque chose de souhaitable pour un dîner entre amis, mais ce n’est guère utile dans le contexte d’une loi. La souplesse n’aidera pas les médecins qui vont devoir examiner le projet de loi et décider si une mesure est légale ou pas. Je ne parlerais pas tant de souplesse que d’ambiguïté.
    Je me demande si le député serait au moins en faveur de préciser les critères ambigus, parce que plus il parlait et moins je comprenais.
     Il a parlé d’un décès raisonnablement prévisible et il a dit que la personne devait approcher de la fin de sa vie. À bien y penser, nous sommes tous en train d’approcher de la fin de notre vie.
     Qu’est-ce qui empêche le gouvernement d’amender le projet de loi pour définir de façon élémentaire et sensée ce dont nous parlons? En principe, il faudrait utiliser le mot « terminal », parce que c’est la réalité que nous sous-entendons sans la nommer. Si nous ne la nommons pas, elle ne figure pas dans la loi.
    Pourrions-nous préciser un peu ce que tout cela signifie, concrètement?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue d’en face de cette question, mais je lui demanderais toutefois de choisir ses mots avec un peu plus de tact quand il discute d’une question aussi délicate.
    Comme je l’ai expliqué, j’ai eu l’occasion de consulter des médecins praticiens, des médecins influents, pour savoir s’ils considéraient que le projet de loi aiderait le gouvernement à agir en réponse à l’arrêt Carter.
     Mon sentiment global, à la suite de ces discussions, c’est que le corps médical accueille plutôt bien notre projet de loi. Bien sûr, certains n’y reconnaissent pas leur vision du monde, et c’est là qu’intervient la souplesse du projet de loi: nous voulons veiller à ce que les adultes qui endurent des souffrances intolérables aient accès à l’aide médicale à mourir, comme ils y ont droit, tout en reconnaissant aussi que les praticiens qui fourniront le service ont le droit d’agir selon leur conscience.
    Monsieur le Président, j’ai écouté avec beaucoup d’intérêt mon honorable collègue. Je pense que ce qui me trouble, dans le ton du débat, aujourd’hui, c’est que les conservateurs veulent donner l’impression que la grande croisade à entreprendre ici est de s’opposer à l’arrêt de la Cour suprême. L’arrêt de la Cour suprême est une décision qui constitue une obligation pour le Parlement. Je ne suis pas nécessairement heureux de la façon dont cette décision a été prise ou du fait qu’elle limite notre capacité de consulter les Canadiens, mais je suis parfaitement conscient que ce droit existe déjà. Il est déjà consacré par les tribunaux, et si le Parlement n’adopte pas de dispositions législatives claires pour fixer des limites précises, il y aura un vide juridique dès cet été, et les craintes que soulèvent mes collègues conservateurs pourraient devenir beaucoup plus réelles quand d’autres parties s’adresseront à la Cour suprême pour déplorer que le Parlement ne se soit pas acquitté de son devoir d’agir.
     Vu les contraintes que nous impose la Cour suprême, j’aimerais demander à mon collègue ce que sera, selon lui, la situation si le Parlement n’adopte pas ce projet de loi pour respecter l’échéance fixée par la Cour suprême et laisse ce vide juridique s’installer dans l’ensemble du pays.
    Monsieur le Président, la meilleure réponse que je puisse faire à mon collègue est d’expliquer les avis que m’ont donnés des gens des milieux médicaux, des gens qui s’occupent de personnes vulnérables et de tous ceux qui ont été eux-mêmes en contact avec des personnes en fin de vie.
     Tous m’ont fait comprendre que le Parlement devait adopter une loi caractérisée par la sollicitude et la compassion, qui soit intelligente et tienne compte du fait que la Cour suprême a déjà tranché la question, alors qu’il nous reste, à nous, à titre de législateurs, de parlementaires et de chefs de file dans nos milieux, à concevoir une loi qui réponde au mieux aux intérêts collectifs des Canadiens.
     Je ne peux pas préciser dans les détails ce qui risque de se passer, mais je sais, après avoir consulté ceux qui savent ce qui se passe lorsqu’il y a un vide juridique ou une lacune dans le domaine médical, que c’est une chose peu souhaitable au Canada.
    Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député de Durham.
     Il est important que les Canadiens comprennent que le projet de loi à l’étude n’est ni l’alpha, ni l’oméga des débats des Canadiens sur l’aide médicale à mourir. La Cour suprême a imposé ce travail législatif, par l’arrêt Carter, à des hommes et femmes politiques peu empressés, mais le débat couve, avec d’occasionnelles flambées, depuis des dizaines d’années dans les services de soins intensifs des hôpitaux, dans les cabinets de médecin, autour de la table familiale, au chevet d’êtres chers, et la question est abordée dans la chaire des prédicateurs et les retraites des congrès, et dans les facultés de médecine et de droit, et les philosophes théistes ou athées en parlent. Au plan tout à fait personnel, le débat se déroule aussi à l’intérieur de nous, dans notre esprit, que nous soyons malades ou en bonne santé.
    Si le projet de loi proposé n’est ni le début ni la fin de ce débat qui se poursuit sur l’aide médicale à mourir, où se situe-t-il? Où en sommes-nous au juste?
    D’abord, il crève les yeux que nous ne sommes pas rendus là où la Cour suprême voudrait que nous soyons. Le projet de loi à l’étude, qui sera facilement adopté à la Chambre et devrait l’être au Sénat également, n’est qu’une étape dans une démarche qui nous ramènera presque certainement très vite devant la Cour suprême.
     L’opposition officielle a choisi comme grande priorité d’obtenir des garanties propres à protéger les éléments les plus vulnérables de la société ainsi que la protection du droit des médecins et d’autres professionnels de la santé à agir ou à refuser d’agir selon leur conscience. Nous sommes heureux que le gouvernement ait accepté des recommandations formulées dans le rapport minoritaire des membres conservateurs du comité mixte spécial, qui demandaient l’exclusion des mineurs, des garanties rigoureuses pour protéger les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et la reconnaissance des risques que présentent les directives préalables. J’y reviens dans un moment. Malgré tout, le projet de loi suscite toujours des préoccupations.
     D’abord, un point qui a été et sera maintes fois soulevé par des collègues des deux côtés de la Chambre: l’absence de protection expresse pour la liberté de conscience, l’absence d’assurance que médecins et établissements pourront refuser d’accorder l’aide médicale à mourir. Ce refus ne devrait pas faire problème, car je ne crois pas qu’il risque d’y avoir pénurie de médecins disposés à aider les patients qui répondent aux critères pour obtenir cette aide.
     Il y a aussi des préoccupations, elles aussi exprimées par de nombreux collègues, au sujet de la nécessité de dispositions plus solides à l’égard de l’examen préalable, de la prise en compte des problèmes de santé sous-jacents et de l’effet de possibles troubles psychologiques sur la prise de décision du patient. J’estime que ces questions devraient être de nouveau étudiées à fond au comité.
    En outre, nombre de mes collègues ont exprimé l’inquiétude que leur inspire l’élargissement des instructions précises de la Cour suprême pour que l'aide médicale à mourir soit confiée à des médecins, mais aussi à des infirmières ou infirmiers praticiens. Nous savons que le gouvernement veut élargir la responsabilité pour couvrir les régions éloignées où des infirmiers praticiens qualifiés assurent maintenant de nombreux services qui étaient autrefois fournis par les médecins. Ici encore, je crois que le projet de loi doit être plus précis. Je crois fermement que de nombreuses infirmières et infirmiers praticiens sont qualifiés et compétents et disposés à intervenir, mais la loi devrait peut-être établir explicitement que les infirmières et infirmiers praticiens ne pourront intervenir qu’en dernier recours lorsqu’aucun médecin ne sera disponible.
    Je reconnais aussi les préoccupations et la résistance qu’éveille le caractère imprécis de certaines expressions utilisées dans le projet de loi C-14, par exemple « raisonnablement prévisible ». Personnellement, j’accepte cette imprécision parce que je sais que malgré tous ses progrès la médecine moderne n’est toujours pas en mesure de prédire avec exactitude le moment du dernier soupir ou du dernier battement de cœur. Cet aspect mérite certainement d’être examiné plus à fond en comité.
    Enfin, l’un des plus sérieux obstacles à l’acceptation du projet de loi C-14 par les Canadiens est le fait que le gouvernement n’a pas tenu sa promesse en matière de soins palliatifs — et j’irais même jusqu’à dire qu’il l’a brisée.
     Pendant la campagne électorale, les libéraux s’étaient engagés à investir 3 milliards de dollars dans le secteur des soins de longue durée, ce qui comprend les soins palliatifs. L’importance de l’accès aux soins palliatifs dans la prise de décisions concernant la fin de vie était l’un des rares points qui faisaient l’unanimité dans le rapport du comité spécial mixte.
(1715)
     Nous, les députés, nous pouvons bien nous empresser de respecter l’échéance du 6 juin fixée par la Cour suprême, mais le gouvernement a aussi un le devoir évident, l’obligation morale de déployer des efforts supplémentaires afin de remplir sans délai cette promesse et d’élargir l’accès à des soins palliatifs abordables et acceptables pour tous ceux qui, suivant leur conscience ou leur foi ou pour d’autres raisons décident de ne pas se prévaloir de leur droit au suicide assisté.
     Je crois fermement qu’il faut élargir le choix, tout comme le voulait, je crois, la Cour suprême dans l’arrêt Carter, pour les patients atteints des maladies spécifiques à l’origine de l’arrêt Carter: l'emprisonnement brutal causé par le stade final de la sténose du canal rachidien lombaire; l’étouffement caractéristique des derniers stades de la sclérose latérale amyotrophique; la douleur irrépressible du long stade final de la sclérose en plaques progressive.
    Pendant que j’y suis, je rappellerai ce que j’ai dit précédemment concernant la nécessité de reconnaître les risques liés aux directives préalables pour des maladies comme la maladie d’Alzheimer, la démence, et cetera. Cela dit, je crois que les directives préalables devront tôt ou tard être autorisées pour l'aide médicale à mourir.
     J’ai consulté de nombreuses personnes et de nombreux groupes dans ma circonscription, Thornhill , ces derniers mois et même auparavant. J’ai beaucoup de respect — le plus grand respect — pour les conseils et les interventions de divers groupes religieux, agences sociales et organisations médicales et pour leur souci de resserrer la protection des personnes les plus vulnérables.
     Ma décision personnelle, dont dépendra mon vote sur le projet de loi, est l’aboutissement de mes observations sur trois personnes et leur expérience. Lorsque j’étais journaliste, j’ai suivi de près la croisade judiciaire infructueuse de Sue Rodriguez, pendant que la sclérose latérale amyotrophique resserrait sur elle son emprise mortelle, et j’ai entendu la grande question qu’elle a adressée aux Canadiens: « Si je ne peux pas consentir à ma propre mort, à qui ce corps appartient-il? Qui possède ma vie? »
     Au cours des deux dernières législatures, je me suis beaucoup rapproché d’un autre Canadien sérieux et courageux, un collègue député, l’honorable Steven Fletcher, premier député quadriplégique au Canada, réélu trois fois et, le mois dernier, élu à l’assemblée législative du Manitoba. Après un accident qui a bouleversé sa vie, il y a 20 ans, il a refusé d’abandonner. Il a relevé avec succès des défis énormes.
     Pourtant, dans deux projets de loi d’initiative parlementaire présentés il y a deux ans, projets de loi que j’ai appuyés, ainsi que dans son témoignage au comité parlementaire, en janvier dernier, Steven a présenté un argumentaire puissant et convaincant en faveur d’une autodétermination qui permet à chacun, un jour, de prendre une décision finale. Selon lui, toute loi sur cette question doit se fonder sur la morale et l’éthique de la personne et il a insisté sur le fait que la personne ne doit faire l’objet d’aucune pression de la part de la société, de sa famille, de ses amis ou de l’établissement où elle se trouve.
     J’ai été aussi profondément influencé et convaincu par le décès terriblement difficile de mon beau-frère, Rik Davidson, un universitaire brillant atteint par la maladie d’Alzheimer. Si je devais recevoir un diagnostic semblable, je puis garantir à la Chambre que je rédigerais des directives préalables et que, dans la légalité ou non, elles seraient respectées.
    Enfin, moi qui ai survécu à un cancer, j’ai passé de longues heures à réfléchir, pendant les traitements et depuis, aux enjeux de ce débat sur le plan personnel. J’ai la chance d’avoir pu compter sur la médecine moderne, la foi et une femme et une famille qui m’ont admirablement soutenu, si bien que, pour l’instant, il n’y a plus de trace de la maladie, et je peux poursuivre avec bonheur mon aventure en politique à ce stade tardif de ma vie.
     Je suis honoré de pouvoir participer à ce débat pour appuyer l’adoption du projet de loi C-14, un élargissement éventuel de la portée de ses dispositions et une intervention gouvernementale immédiate visant à étendre les installations et services de soins palliatifs, car je suis farouchement convaincu que l’enjeu à l’étude se résume en fin de compte à ceci: le libre choix d’un adulte capable qui peut opter pour des soins palliatifs accessibles et abordables ou pour son droit constitutionnel à l’aide médicale à mourir.
(1720)
    Monsieur le Président, le député a parlé pendant son exposé du consentement anticipé ou des directives préalables en matière de soins. Je voudrais savoir comment, selon lui, les amendements au projet de loi pourraient tenir compte du décalage à ménager entre les directives et leur exécution.
    Comment le député considérerait-il des directives préalables établies à 20 ans, alors que la personne n’éprouvera des difficultés que 30, 40 ou 50 ans plus tard? À l’inverse, les directives peuvent être établies immédiatement après l’annonce d’un diagnostic. Comment le député envisage-t-il le décalage dans le temps, de façon qu’on puisse revoir la décision de la personne avant de passer à l’acte ultime?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de cette question très mûrement réfléchie, qui a du reste été maintes fois posée ces derniers mois, tandis qu’approchait la date butoir fixée par la Cour suprême. Il existe un grand nombre de comptes rendus rédigés par des malades atteints de la maladie d’Alzheimer, dotés de bonnes connaissances médicales et universitaires. Ils ont tenu un journal à partir du moment du diagnostic, décrivant la diminution constante de leurs capacités.
    Il existe un certain point, confirmé par un patient atteint de la maladie d’Alzheimer aux derniers stades, et je serais étonné s’il permettrait lui-même, bien qu’inconscient peut-être, d’aller jusqu’à la dernière étape. Le fardea