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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 25 novembre 1999

• 0851

[Français]

Le président (l'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Bonjour, mesdames et messieurs.

[Traduction]

J'aimerais remercier les membres du comité, ceux qui se trouvent dans cette pièce, d'être arrivés à temps, ce qui nous permet de commencer. Je constate que nous avons le quorum.

Je suis très heureux que le député du Parti progressiste conservateur soit présent, ce qui nous donne le minimum requis.

Les témoins que nous recevons aujourd'hui représentent la Fédération canadienne de l'agriculture, l'Institut pour la protection des cultures, le Conseil canadien de l'horticulture et AGCare.

Bienvenue au comité, madame et messieurs. Nous sommes heureux que vous soyez parmi nous. Vous savez ce qui est au programme, par conséquent, je vais vous demander de nous faire part de vos vues, dans le cadre d'exposés de dix minutes si possible.

La question est de savoir qui va commencer.

Monsieur Friesen, si vous voulez commencer, allez-y.

M. Bob Friesen (président, Fédération canadienne de l'agriculture): Merci beaucoup, monsieur le président, de nous avoir invités à comparaître devant vous pour vous entretenir de nos sujets de nos préoccupations ainsi que des points positifs de l'industrie.

Permettez-moi de citer le recueil des politiques de la FCA 1997:

    Les terres agricoles occupent une partie importante du paysage canadien. La collectivité agricole est la principale gardienne et gestionnaire d'abondantes ressources naturelles, minérales et biologiques, la propriétaire et l'architecte d'une grande partie du territoire et la protectrice d'une précieuse ressource, le sol. Soucieuse de protéger l'environnement du Canada, la Fédération est d'avis qu'il faut faire une grande place aux mesures de gestion de l'environnement afin que l'on puisse continuer à exploiter les ressources en terres qui permettent de nourrir la population du Canada et une grande partie de celle d'autres pays.

Au Canada, on est de plus en plus conscient des rapports qui existent entre la production agricole et les problèmes environnementaux. En tant que gardiens de la terre, les agriculteurs canadiens connaissent leurs responsabilités à l'égard de l'environnement et prennent des mesures concrètes pour assurer sa viabilité et en conséquence, celle de l'industrie.

Les agriculteurs canadiens sont à l'avant-garde en ce qui touche les pratiques culturales durables. Bien avant que la population soit au courant des problèmes environnementaux, les agriculteurs canadiens mettaient au point des méthodes pour améliorer l'élément le plus important en agriculture, le sol.

L'augmentation des matières organiques et la diminution de l'érosion améliorent la structure des sols. Les pratiques aratoires antiérosives, la gestion des résidus et la rotation extensive des cultures au moyen de fourrages et de la lutte contre l'érosion sont au nombre des pratiques agricoles largement utilisées au Canada qui contribuent à bonifier les sols.

Je dois ajouter que dans le contexte d'aujourd'hui où les agriculteurs sont confrontés à des problèmes de revenu, très souvent, le fait d'avoir un peu plus d'argent leur permet d'améliorer leurs pratiques de gestion des sols.

• 0855

Les agriculteurs canadiens sont des pionniers en matière de pratiques aratoires antiérosives, notamment les semis sans labour et ceux comportant peu de travail du sol. Ces pratiques, rares il y a 30 ans, étaient utilisées sur 16 à 31 p. 100 respectivement des terres cultivables ensemencées au Canada en 1996. Les résultats d'études ont montré que ces méthodes comportent des avantages énormes pour les agriculteurs, entre autres une réduction de la consommation de carburant, de l'érosion et du compactage des sols, ainsi qu'une augmentation du rendement des cultures et des matières organiques dans le sol.

Les agriculteurs canadiens n'utilisent actuellement que les quantités minimales de pesticides nécessaires pour la production agricole. Les agriculteurs canadiens se comparent très bien à leurs homologues européens et américains en ce qui concerne la quantité de pesticides utilisés. Grâce à de meilleures pratiques de gestion comme la lutte intégrée et d'autres mesures, les agriculteurs canadiens utilisent actuellement des quantités minimales de pesticides. Une saison de croissance plus courte et des gelées meurtrières permettant de limiter les populations de ravageurs sont parmi les autres facteurs qui contribuent à la réduction de l'utilisation des pesticides au Canada.

Le fumier est un produit naturel de l'exploitation des élevages et joue un rôle important dans la viabilité de l'agriculture, car il constitue une source économique de nutriments pour les cultures et la matière organique du sol, qu'il protège de l'érosion. Les agriculteurs canadiens sont bien conscients que la qualité de l'eau qui entre en contact avec le fumier et l'odeur de celui-ci sont les deux principaux problèmes environnementaux en cause. Ils prennent donc des mesures pour mettre au point de nouvelles méthodes et adoptent les meilleures pratiques de traitement des déjections pour assurer la protection des sols et des ressources en eau. L'adoption de telles méthodes prouve que les agriculteurs prennent très au sérieux leurs obligations d'accroître la viabilité de l'environnement.

La capacité des agriculteurs de se procurer rapidement de nouveaux produits pour la lutte antiparasitaire revêt une très grande importance pour la Fédération. Les agriculteurs canadiens sont souvent frustrés de voir le nombre de nouveaux produits qu'on envisage d'homologuer aux États-Unis par rapport au nombre envisagé au Canada. Lorsqu'on s'enquiert auprès des fabricants au sujet de cette disparité, ils répondent souvent que le système de réglementation canadien est trop strict et qui leur en coûterait trop cher pour mettre le produit sur le marché canadien.

Nous trouvons encourageant de savoir que le régime de réglementation canadien est rigoureux, mais nous en avons contre le fait qu'il ne permet pas l'homologation de produits nouveaux qui, dans la plupart des cas, sont plus écologiques.

Il importe de se rappeler que les agriculteurs et leurs familles vivent dans bien des cas sur les terres qu'ils cultivent. Lorsqu'ils choisissent des produits pour lutter contre les parasites, ils sont très conscients des effets de ceux-ci non seulement sur l'environnement, mais aussi sur la santé humaine et celle de leurs familles.

Nous avons à de nombreuses reprises entendu des agriculteurs dire qu'à leur avis, le principal avantage de l'utilisation des biotechnologies est la réduction du nombre de produits qu'ils doivent utiliser pour limiter les ravageurs qui s'attaquent à leurs cultures. Partout au Canada, des groupements de producteurs spécialisés ont commencé à évaluer leurs besoins futurs, en étroite collaboration avec leurs vis-à-vis américains. Comme les agriculteurs n'ont plus accès aux produits plus anciens en raison du processus de réévaluation, il est indispensable qu'ils puissent se procurer d'autres produits.

C'est pourquoi, la Fédération a participé à plusieurs réunions du groupe de travail technique de l'ALÉNA chargé de favoriser l'homologation simultanée et collective de produits aux États-Unis et au Canada. Pour que les agriculteurs canadiens puissent continuer de soutenir la concurrence sur le marché mondial, nous devons voir à ce qu'ils aient accès aux produits utilisés dans les autres pays industrialisés. Nous reconnaissons que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire—ARLA—est à l'avant-garde par ses efforts pour mettre en place un système d'homologation harmonisée par l'entremise de l'ALÉNA et de l'OCDE.

Depuis quelques années, les agriculteurs sont aux prises avec un grave problème de revenu, et certains connaissent la pire situation depuis 1933. Comme ils exploitent une entreprise, ils ont été obligés de réduire leurs coûts de production, notamment celui des fertilisants et des produits antiparasitaires. Ils ont toujours assuré la gestion des terres et la récente crise du revenu a accru la nécessité de gérer leur exploitation de façon rationnelle.

De plus en plus d'agriculteurs et de groupements de producteurs spécialisés participent à des programmes de lutte intégrée qui recourent à un ensemble de moyens pour limiter les insectes et les animaux nuisibles. On utilise par exemple des moyens biologiques, culturaux, physiques et chimiques combinés afin d'optimiser les avantages de la lutte antiparasitaire et de réduire au minimum les risques pour la santé et l'environnement.

Je vais parler brièvement de la participation de la Fédération aux activités de l'ARLA. En plus de participer à plusieurs programmes de lutte intégrée mis en place par l'ARLA et l'ALÉNA, comme je l'ai dit plus tôt, la Fédération a abordé de nombreuses questions avec l'agence. La Fédération siège d'ailleurs au sein du Comité consultatif de gestion économique et au Comité consultatif sur la lutte antiparasitaire. Nous trouvons encourageantes ces améliorations apportées au régime de réglementation grâce au travail fait par le CCGE.

• 0900

Nous avions quelques réserves à l'égard de la réévaluation, notamment parce qu'il était prévu de prendre les ressources nécessaires pour terminer le processus dans le budget d'homologation des nouveaux produits. Or, à la dernière réunion du CCGE, nous avons appris que telle n'est pas l'intention de l'ARLA. L'agence a en effet reconnu qu'il est important pour les agriculteurs que les nouveaux produits soient étudiés rapidement. Comme nous l'avons mentionné précédemment, pour la collectivité agricole il est indispensable que lorsque des produits plus anciens sont retirés du marché pour des raisons de santé ou de sécurité, les agriculteurs puissent se procurer d'autres produits.

Sur le marché mondial, où la concurrence est vive, nous continuons d'encourager les détenteurs d'homologation à envisager l'homologation collective pour que les agriculteurs canadiens aient accès aux produits offerts dans les autres pays de l'OCDE, et plus particulièrement aux États-Unis.

La Fédération participe également aux activités du CCLA. Bien que ce comité offre d'excellentes possibilités de régler des problèmes, il faut se rappeler que le nombre d'intervenants de l'industrie qui y siègent est très limité. Les groupes environnementaux y sont mieux représentés, et les positions mises de l'avant par le président reflètent souvent cette répartition au sein du comité.

En conclusion, je dirais que par le passé la Fédération a exprimé des réserves à l'égard du système de gestion de l'ARLA. Nous avons cependant constaté, en collaborant étroitement avec l'agence aux réunions du CCGE, du CCLA et de l'ALÉNA, qu'après la phase initiale de transition, on reconnaît beaucoup mieux les besoins de la collectivité agricole.

L'objectif prioritaire des organismes membres de la Fédération est d'offrir aux consommateurs des aliments les plus sécuritaires et qualitatifs possible en améliorant les moyens de réduire les impacts environnementaux. Afin de poursuivre cet objectif, il faut cependant que le régime de réglementation repose sur des données scientifiques et que le gouvernement soit disposé à fournir aux producteurs les moyens nécessaires pour exercer leurs activités de façon à la fois efficiente et efficace.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Friesen.

Voulez-vous maintenant prendre la parole, monsieur Hepworth?

M. Lorne Hepworth (président, Institut pour la protection des cultures): Oui, merci, monsieur le président.

J'aimerais tout d'abord présenter les collègues qui m'accompagnent aujourd'hui—M. Charlie Milne, vice-président des affaires gouvernementales, et Mme Denise Dewar, gestionnaire des affaires scientifiques.

J'aimerais également remercier la présidence et les membres du comité de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd'hui.

L'Institut canadien pour la protection des cultures représente les fabricants, les concepteurs et les distributeurs de moyens scientifiques de protection végétale—c'est-à-dire les pesticides et les plantes et semences génétiquement modifiées—s'appliquant à l'agriculture, à la foresterie et au contrôle des parasites au Canada. Il s'occupe de tous les aspects concernant la diffusion d'information parmi l'industrie, les communications et l'adoption de lois en vue de protéger les cultures canadiennes. L'Institut a pour mission d'assurer des méthodes de fabrication, de transport, d'entreposage et d'utilisation sécuritaire des produits fournis par ses membres.

Nous sommes heureux d'être avec vous aujourd'hui et de vous donner notre perspective sur la réglementation des pesticides; nous nous proposons également de vous indiquer les mesures prises par notre industrie pour que nos produits offrent aux Canadiens les meilleurs avantages possibles et le moins de risques possible.

Nous savons que votre étude porte essentiellement sur la réglementation canadienne régissant les pesticides. C'est parce que l'industrie relative à la protection des cultures joue un rôle crucial pour ce qui est de garantir la sécurité des approvisionnements au Canada que l'Institut demande un régime de réglementation qui soit à la fois efficient et efficace.

Dans notre mémoire écrit, nous faisons une série de recommandations en réponse au rapport déposé par le commissaire à l'environnement en mai 1999. En tant qu'industrie, nous appuyons le rôle que joue le gouvernement dans la réglementation des produits antiparasitaires. Ceci étant dit, nous tenons à vous faire comprendre que les fabricants de pesticides se sentent responsables et cherchent à éviter que leurs produits présentent des risques inacceptables. Nous collaborons tous ensemble, dans notre industrie, pour faire en sorte que nos produits soient à la fois sûrs et profitables pour les utilisateurs, la population en général et l'environnement.

La gestion des parasites a beaucoup évolué, même au cours de la dernière décennie. Normalement, les quantités appliquées se mesurent en grammes plutôt qu'en kilogrammes par hectare. Pourtant, malgré leur efficacité accrue, ces produits sont devenus moins toxiques pour les humains, s'attaquent plus spécifiquement aux parasites visés et causent moins de tort à l'environnement.

• 0905

En fait, plusieurs des nouveaux produits pour la protection des cultures sont entièrement biodégradables et se dissipent en l'espace de deux semaines après leur application. Ce résultat s'explique par le fait que dans la conception des nouveaux pesticides, les scientifiques étudient les modes de fonctionnement puis mettent au point une molécule néfaste pour les parasites, qu'il s'agisse de mauvaises herbes, d'insectes ou de champignons, sans que cela ne provoque des effets nuisibles pour les autres espèces.

Les modes de gestion intégrée des parasites représentent un autre facteur important de l'évolution des moyens de lutte antiparasitaire. Les formules des modes de gestion intégrée des parasites consistent essentiellement à éliminer les parasites en combinant diverses techniques comme l'application de produits chimiques, le recours à des espèces antagonistes et des méthodes agronomiques saines.

Il nous est facile de déclarer devant vous aujourd'hui que nous appuyons le concept de protection de l'environnement; toutefois, nous voulons vous faire prendre conscience que notre industrie ne se contente pas uniquement de parler de l'environnement. Nous prenons des mesures concrètes qui correspondent à nos propos. Au cours des prochaines minutes, j'aimerais vous parler de notre programme Stewardship First, programme de surveillance complet que respectent les fabricants de pesticides pour assurer la protection de l'environnement au cours du cycle d'existence de nos produits. Je vous renvoie au schéma représentatif de ces programmes, annexé à mes notes, et qui figure également à la page 11 de notre mémoire.

Ce programme représente les trois quarts des dépenses annuelles de l'Institut—il ne s'agit pas de dépenses consacrées au lobbying, aux relations publiques, mais aux mesures d'intendance environnementale.

L'argent est perçu auprès de nos fabricants sous forme de taxe pour chaque paquet ou contenant vendu au Canada. Depuis le milieu des années 80, l'Institut a mis en oeuvre une série d'initiatives englobant l'ensemble du programme Stewardship First. Il s'agit de la fabrication, de l'entreposage et des normes de commercialisation; de la formation et de la certification; de la sécurité des cultivateurs; et de la gestion des contenants et des produits devenus inutiles.

Vous trouverez en annexe de notre mémoire écrit un bref aperçu de chacun des ces éléments du programme. Le plus passionnant au sujet de Stewardship First, c'est que plusieurs des initiatives sont appuyées non pas seulement par les fabricants, mais aussi par les cultivateurs, les détaillants, les établissements universitaires et les gouvernements.

Le programme Stewardship First témoigne du pouvoir que peuvent capter des initiatives de volontariat. Il ne s'agit pas de programmes autosatisfaisants, mais plutôt de programmes qui donnent des résultats mesurables.

Par exemple, depuis le lancement de notre programme de normes d'entreposage, les primes d'assurance antipollution dans le cas des entrepôts ont dégringolé de 4 500 $ à 800 $ par an en moyenne, ce qui indique clairement que les compagnies d'assurances se rendent compte que les risques liés à l'entreposage des produits chimiques agricoles ont diminué considérablement. Aucun incendie ou déversement ne s'est produit depuis la mise en place du programme. Tous les entrepôts de pesticides, 1 800 au total au Canada, doivent être certifiés par un vérificateur. Si l'entrepôt n'est pas certifié, il ne peut plus fonctionner et aucun pesticide n'y est expédié.

Parmi les autres résultats mesurables, citons l'accréditation de 300 consultants en protection des cultures depuis 1997, à la suite d'une formation à l'Université de la Saskatchewan et à l'Université de Guelph. Trois cent personnes de plus sont inscrites à ce cours. Le programme d'accréditation de consultant en protection des cultures permet de former des employés compétents qui peuvent ainsi appuyer les fabricants et les agriculteurs en matière de gestion des pesticides. Ce qui est remarquable à cet égard, c'est que pratiquement tous les candidats ont déjà fait des études postsecondaires et sont souvent titulaires d'un baccalauréat en sciences et en agriculture.

La distribution de plus de 16 000 exemplaires de notre guide sur la sécurité des pesticides aux agriculteurs depuis 1996 est une autre étape importante du programme Stewardship First. Ce guide expose la fonction des pesticides, des pratiques respectueuses de l'environnement, les raisons du port d'un équipement protecteur, les méthodes d'entreposage et les réactions en cas d'urgence. Ce que nous visons, c'est que ce guide soit lu et compris par tous les agriculteurs du Canada. Des exemplaires sont distribués gratuitement aux organisations de sécurité agricole ainsi qu'aux groupes ruraux locaux.

Je dirais simplement, monsieur le président et membres du comité, que nous sommes des chefs de file mondiaux en ce qui concerne les mesures d'intendance environnementale. Ainsi en témoigne le taux de récupération réalisé par notre initiative de gestion des contenants, programme visant à faire en sorte que les contenants de pesticides vides soient retirés de l'environnement et recyclés ou éliminés.

• 0910

Au cours de la saison 1998, plus de 4,5 millions de contenants ont été récupérés dans des exploitations agricoles canadiennes et, avec un taux de récupération de 62 p. 100, nous restons en tête des pays du monde dans ce domaine. En Allemagne, le programme, obligatoire en vertu de la loi, permet d'arriver à un taux de 50 p. 100, tandis que le programme des États-Unis atteint un taux d'environ 25 p. 100. Plus de 40 millions de contenants vides de pesticides ont été retirés de l'environnement depuis l'instauration du programme de gestion des contenants en 1989. Les contenants de plastique sont actuellement recyclés en poteaux de clôture et en rampes de route ou servent à fournir de l'énergie.

Enfin, le programme de gestion des contenants de pesticides devenus inutiles est rendu possible par la collaboration des gouvernements du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse, de l'Île-du-Prince-Édouard et de la Saskatchewan, ainsi que par le Fonds canadien d'adaptation et de développement rural du gouvernement fédéral. Jusqu'ici, des dizaines de milliers de kilogrammes de pesticides périmés ont été ainsi récupérés et éliminés sans danger.

J'espère avoir réussi à vous donner une idée de ce que nous avons accompli jusqu'ici, et nous savons que nous ne pouvons pas nous arrêter là. L'industrie de la protection des cultures doit continuer d'assurer une gestion responsable du cycle de vie des produits et de démontrer aux autres qu'elle assume cette responsabilité.

Pour nous, le programme Stewardship First est plus qu'une série de normes et de codes. C'est un code d'éthique qui régit tous nos actes.

Si vous voulez connaître les recommandations précises que nous faisons sur les moyens d'améliorer le mécanisme de réglementation de la gestion des pesticides au Canada, je vous invite à lire notre mémoire. Cependant, il y a une recommandation qui les touche toutes que j'aimerais faire, c'est qu'en réfléchissant aux moyens d'améliorer la protection de l'environnement, vous encouragiez le maintien et l'élaboration d'initiatives volontaires de reddition des comptes, comme le programme Stewardship First.

Monsieur le président, mesdames et messieurs, ceci conclut mon exposé. Nous serons heureux de répondre à vos questions au moment opportun.

Merci beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Hepworth.

Vous voulez-vous être le suivant? Monsieur Cameron, la parole est à vous.

M. Ron Cameron (président, Comité pour la protection des cultures, Conseil canadien de l'horticulture): Merci, monsieur le président et merci au comité d'offrir cette occasion au Conseil canadien de l'horticulture d'exposer certains de ses points de vue sur la question de la sécurité des pesticides.

Je tiens d'abord à dire que je suis tout à fait d'accord avec la déclaration de la Fédération canadienne de l'agriculture en ce sens que leur approche est globale et touche aussi certainement tout commentaire que nous pourrions faire dans le même sens.

Je préciserai tout d'abord que je suis un agriculteur du sud-ouest de l'Ontario. Je cultive des légumes industriels et des céréales, et j'élève des animaux sur une ferme qui est dans ma famille depuis cinq générations. Pour autre occupation, je travaille pour le Conseil canadien de l'horticulture, je suis président de notre comité pour la protection des cultures dont l'objet est de parvenir, pour le compte des producteurs de cultures horticoles, à mettre en oeuvre une technologie qui puisse leur permettre de demeurer concurrentiels dans notre économie mondiale.

L'industrie horticole du Canada englobe environ 20 000 producteurs horticoles des dix provinces. Plus de 150 espèces de fruits et de légumes sont cultivées au Canada et fournis aux consommateurs canadiens de la manière la plus sécuritaire et la plus économique dont sont capables les industries dérivées, comme les fournisseurs de technologie de l'Institut canadien pour la protection des cultures.

Nous représentons une grande partie des producteurs canadiens de certaines provinces qui produisent les cultures principales comme les pommes, les pommes de terre et les légumes industriels jusqu'aux radis, aux rutabagas, ou les navets, si vous préférez.

L'un des facteurs de production les plus coûteux est, bien évidemment, la technologie qui nous permet de protéger ces cultures contre les parasites, les insectes, les mauvaises herbes et les maladies qui peuvent les toucher. Nous collaborons continuellement avec certains groupes pour fournir la meilleure protection possible de l'environnement et de la santé par certains moyens, comme le programme de Gestion intégrée des parasites, afin d'atteindre ces objectifs tout en veillant à protéger la rentabilité des activités des agriculteurs.

• 0915

La production de fruits et de légumes destinés au marché canadien représente environ 840 millions de dollars. Par contre, les importations de produits semblables au Canada représentent environ 3,34 milliards de dollars. Autrement dit, près des trois-quarts des dépenses des consommateurs canadiens sur des fruits et des légumes sont investis dans les produits importés.

Il est très important que l'industrie horticole du Canada demeure concurrentielle sur le plan technologique si elle veut pouvoir fournir ces cultures aux consommateurs canadiens de manière compétitive. Nous avons besoin de tout l'appui que peuvent nous donner les fournisseurs des outils technologiques de fine pointe pour pouvoir répondre à ce besoin, et nous devons admettre qu'en ce moment, nous ne recevons pas un appui suffisant pour y parvenir.

Ce problème est encore exacerbé par l'adoption de la Food Quality Protection Act aux États-Unis. Cette loi oblige à la réévaluation, en fonction d'importants nouveaux critères d'évaluation des risques, de près de 10 000 différents résidus d'antiparisitaires dans les aliments. Cette évaluation tient compte de nouveaux facteurs comme le risque global, le risque cumulatif et le nouveau facteur de sécurité décuplé dans le cas des enfants et des nourrissons, et recherche l'évidence d'un risque de bouleversement du système endocrinien. Ces réévaluations ont été entreprises depuis 1996 et un tiers d'entre elles sont maintenant terminées.

Cela aura sur les producteurs canadiens l'effet de réduire de manière importante la disponibilité des moyens qui leur permettent de demeurer concurrentiels. Tandis que ces produits sont retirés du marché, des décisions sont prises aux États-Unis d'éliminer ces pesticides du marché ou de réduire leur utilisation et d'offrir d'autres produits pour les remplacer. Ces produits de remplacement ont peu de chance d'être offerts sur le marché canadien parce qu'il faut, pour que ce soit rentable, avoir une certaine vigueur économique.

Pour réussir à faire certaines de ces choses, l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire a amorcé une réévaluation des antiparasitaires utilisés dans les cultures vivrières et les cultures non vivrières. L'exercice pourrait mener à l'abandon de certains des mécanismes en usage à l'heure actuelle dans certaines cultures de fruits et de légumes. Si l'on veut répondre aux besoins des producteurs et veiller à ce que l'industrie canadienne demeure compétitive, il nous faudra avoir accès aux nouvelles technologies, grâce auxquelles on concevra de nouveaux pesticides à risque réduit pour utilisation dans les cultures sur surfaces réduites et des modèles d'utilisation à risque réduit pour les pesticides déjà homologués, et il faudra homologuer les pesticides indispensables aux systèmes de gestion intégrée des parasites et de produits antiparasitaires biologiques destinés aux cultures sur surfaces réduites.

L'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, par l'entremise de sa «division des stratégies de rechange», met de l'avant une telle approche en participant aux travaux du groupe de travail technique de l'ALENA, en encourageant les fabricants à soumettre des réexamens conjoints et en établissant des procédures et des règlements en vue de faciliter la conception d'un mécanisme plus sécuritaire de protection des cultures tout en réduisant, pour ainsi dire, le besoin de ressources pour calquer les évaluations effectuées dans d'autres pays du globe.

Les producteurs horticoles se rendent compte qu'il y a lieu d'adopter une stratégie de réduction du risque si l'on veut limiter au minimum les effets de l'utilisation des antiparasitaires. La recherche est fondamentale au recensement des produits à plus faible risque et substituables aux produits homologués, à l'étude des méthodes d'atténuation du risque dans le cas de produits homologués jugés essentiels par les producteurs et de la conception de pesticides microbiens et biochimiques.

• 0920

Si on veut que les producteurs canadiens demeurent concurrentiels sur le marché, il est impératif que nous évitions les causes de friction en commerce international et que nous trouvions des produits de rechange, dans le cas où l'exercice de réévaluation en cours entraîne le rejet de certains produits. Il importe donc, pour l'atteinte de cet objectif, que nous concevions et mettions en oeuvre des stratégies de transition afin de pouvoir homologuer de nouveaux pesticides à risque réduit qui seront plus sûrs pour la santé humaine et l'environnement.

En tant qu'industrie, nous vous faisons les recommandations suivantes: les gouvernements du Canada et des États-Unis devraient intensifier leurs efforts en vue d'harmoniser et de synchroniser leur processus d'homologation des antiparasitaires. Les pesticides jugés assez sûrs pour être utilisés dans un pays devraient l'être aussi dans l'autre, les données étant les même. Étant donné les répercussions éventuelles de réexamens de produits, à la lumière des modifications apportées aux lois américaines comme la U.S. Federal Food, la Drug and Cosmetic Act et la Food Quality Protection Act de 1996, y compris le réexamen des limites maximales des résidus, il est plus que jamais urgent d'harmoniser nos deux systèmes.

Nous recommandons aussi que les gouvernements du Canada et des États-Unis cherchent à adopter des limites maximales des résidus qui soient communes aux deux pays dans le cas de produits précis; lorsque les circonstances le permettent, que les étiquettes des produits américains et canadiens soient harmonisées; et que l'on cherche à s'entendre sur l'homologation des produits antiparasitaires utilisés au Canada et aux États-Unis. Les recommandations qui précèdent devraient être l'objet d'une mise en oeuvre et d'un suivi sérieux afin que l'on puisse éviter des obstacles au commerce ou des causes de frictions commerciales entre le Canada et les États-Unis.

Je vous remercie beaucoup de m'avoir donné cette occasion de m'adresser à vous.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Cameron.

Monsieur Wilson, vous avez la parole.

M. Jeff Wilson (membre du conseil de direction de AGCare (Toronto)): Je m'appelle Jeff Wilson. Je suis un petit producteur de fraises, de framboises et de légumes au nord de Toronto.

Je suis ici pour exposer le point de vue d'AGCare sur plusieurs de ces enjeux. AGCare, c'est pour Agricultural Groups Concerned About Resources in the Environment. C'est un regroupement de 16 associations professionnelles agricoles, qui représente 45 000 exploitants de grandes cultures et de cultures horticoles de l'Ontario. Vous pouvez voir la liste de ses membres dans le mémoire qui vous a été remis.

Notre organisation a été constituée en vue de fournir un véhicule grâce auquel les producteurs de cultures de l'Ontario pourraient s'exprimer d'une seule voix sur la protection des cultures et les problèmes environnementaux connexes. Nos activités sont axées sur les initiatives de sensibilisation du public—et j'insiste sur la sensibilisation plutôt que sur l'éducation—et sur la communication et les initiatives stratégiques, dans l'intérêt des agriculteurs que nous représentons. Nous intervenons au niveau provincial. À l'échelle nationale, nous agissons par l'entremise de la Fédération canadienne de l'agriculture et le Conseil canadien de l'horticulture.

Au nombre des activités auxquelles AGCare a participé ou dont elle a été l'instigatrice dans la province de l'Ontario au nom des agriculteurs, je citerai l'une des plus notables probablement, soit le cours sur l'emploi sécuritaire des pesticides par l'agriculteur de l'Ontario, qui est un cours obligatoire dispensé aux agriculteurs pour les munir de connaissances et d'une formation suffisantes sur l'utilisation des pesticides agricoles sur leurs fermes pour la prise de décisions connexes.

AGCare a participé en tant que groupe homogène à l'examen du processus fédéral d'homologation des pesticides. Nos exploitants de cultures ont fourni de l'information dans le cadre d'initiatives comme le programme Waste Agricultural Collection amorcé en 1992, alors que ce problème ne faisait que commencer à poindre. Nous avons cerné le besoin d'autres initiatives semblables.

Actuellement, des échos nous proviennent des fonds de nos rangs selon lesquels des besoins sont ressentis. Les agriculteurs de l'Ontario ont cerné ce qu'ils estiment être les besoins environnementaux et ont pris des mesures en conséquence par le truchement du Plan agro-environnemental de l'Ontario; des travaux de gestion des nutriants, d'initiatives relatives à la qualité de l'eau et, comme l'ont mentionné des témoins avant moi, du Programme de récipients à pesticide. En Ontario, environ 80 p. 100 des récipients sont maintenant retournés. Nous jugeons que c'est un bon programme. Nous les recyclons en poteaux de barrières qui servent en agriculture, ce qui constitue un cycle complet de l'intendance, en un sens.

Nous continuons d'être attentifs aux problèmes causés par les pesticides pour le compte de nos membres, et de fournir aux médias, au gouvernement et aux citoyens intéressés de l'information sur l'utilisation des pesticides dans le secteur agricole. Les agriculteurs de l'Ontario, et aussi d'ailleurs en fait, se sont engagés à réduire l'emploi de pesticides, et cela porte fruits. D'après les données recueillies par des sondages qu'a effectués le ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Affaires rurales de l'Ontario sur l'utilisation des pesticides dans le secteur agricole, l'emploi de pesticides a chuté de 40,7 p. 100. L'objectif visant une réduction de 50 p. 100, qui avait été fixé en 1989 dans le programme Production alimentaire 2002, est donc à portée de la main.

• 0925

L'accès des utilisateurs de pesticides agricoles à de nouveaux antiparasitaires plus sécuritaires, à une formation et à des cours d'accréditation obligatoires nous a aidés à atteindre les niveaux de réduction actuelle. La biotechnologie laisse entrevoir de grands espoirs de nouvelles réductions des pesticides. Et aussi, nous continuons de faire pression pour que le Canada accepte d'homologuer des produits antiparasitaires plus récents et sécuritaires, qui sont déjà disponibles dans d'autres pays développés comme les États-Unis.

Parlons des faits saillants du sondage de 1998 sur l'emploi des pesticides. Comme je le disais, l'utilisation des pesticides dans le secteur agricole a chuté de 40,7 p. 100. Mais si nous devons nous concentrer sur les domaines où il faut encore intervenir, la recherche, des analyses plus poussées, je proposerais de mettre le point de mire, comme le suggérait le témoin précédent, Ron Cameron, sur les cultures dans les régions à usage limité.

L'épandage de pesticides sur certaines cultures et les cultures de pommes de terre était en baisse en 1998, en particulier dans le cas des insecticides. Pourquoi? Cela reflète en partie le succès remporté avec le produit homologué Admire dans la lutte contre les parasites comme le doryphore de la pomme de terre et contre les ravageurs comme la tordeuse orientale du pêcher, avec un produit homologué temporairement, le chlopyrifos. Nous soulignons ces deux faits tout simplement parce qu'il y a eu une réduction importante de l'utilisation des insecticides dans ces deux cultures.

Ces deux nouveaux produits ont aidé à mettre sous contrôle la population des parasites, mais il convient de mentionner que nous adhérons également de façon active à une approche intégrée à la lutte contre les organismes nuisibles, surtout en ce qui concerne ces deux cultures.

Ces difficultés font ressortir le besoin d'une nouvelle technologie, qu'il faudrait approuver dans les plus brefs délais, pour réduire la dépendance à l'endroit de produits antiparasitaires plus anciens, et c'est particulièrement important dans le domaine des cultures à usage limité. Pour ces cultures, les outils de lutte antiparasitaire qui sont disponibles relèvent parfois d'une technologie vieille de 40 ans. Cependant, il nous faut avoir accès à des produits plus modernes avant de pouvoir nous débarrasser des plus anciens. Il se pourrait que nous devions nous engager dans une discussion pour déterminer où sont utilisés ces produits plus anciens et quel est leur avenir.

Nous avons aussi remis au comité une analyse que nous avons faite du rapport du Fonds mondial de la nature, intitulé Problems With Pesticides in Canada, que les parlementaires ont reçu l'été dernier. Nous avons ressenti le besoin de communiquer la réaction des agriculteurs à ce rapport, tout simplement parce qu'il relevait du domaine public. Il y a des éléments de ce document avec lesquels nous sommes d'accord, et d'autres avec lesquels nous sommes fortement en désaccord, et il y a aussi des questions sur lesquelles, à notre avis, ils ont tout simplement fait fausse route, sur le plan de l'exactitude de leurs affirmations.

Dans un certain sens, et à l'instar de certains de mes collègues qui sont ici, au sujet du rôle des compagnies dans l'examen de notre avenir et la proposition de solutions à nos besoins, je crois que l'on peut dire qu'il y a eu amélioration dans nos rapports. J'aimerais qu'il y en ait plus. Peut-être pourrions-nous en discuter avec nos collègues qui représentent les compagnies.

En ce qui concerne le rôle de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, est-ce que tout est parfait? Non, pas encore. Avons-nous constaté des progrès? En tant qu'agriculteurs, je crois que nous devons reconnaître qu'il y en a eu. Nous sommes surtout ici pour discuter de la rapidité avec laquelle nous souhaitons que soit adopté un cadre réglementaire sur l'utilisation des pesticides au Canada.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Wilson. Vos commentaires sur le rapport du Fonds mondial de la nature nous sont utiles, et nous l'examinerons sans aucun doute avec beaucoup d'intérêt.

Il y a plusieurs personnes qui ont des questions à poser. Nous commencerons avec M. Herron, ensuite ce sera le tour de M. Jordan, puis de M. Reed et enfin de M. Lincoln.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier les participants pour leurs exposés. Ceux-ci étaient très exhaustifs en présentant plusieurs points de vue sur le cadre agricole, et particulièrement le dernier exposé, puisqu'il était centré sur le fait que ce cadre, en ce qui concerne les produits que nous utilisons la plupart du temps, repose sur des lois qui ont une trentaine d'années. À mon avis, c'est le facteur qui fait que, quelles que soient les perspectives différentes exposées dans ce débat, nous devons absolument voir s'il n'y a pas de loi plus récente.

Ma première question, c'est que souvent, dans tous les témoignages que nous entendons, il est question du fait que l'approbation des substances visant le contrôle des parasites prend beaucoup de temps ici, au Canada. Le nouveau produit proposé pourrait pourtant être plus «écologique», moins nocif pour la santé humaine et l'environnement.

• 0930

Pourriez-vous donner des exemples d'autres substances particulières du même genre, auxquelles les agriculteurs sont impatients d'avoir accès et que nous prenons trop de temps à approuver? Est-ce qu'il y a des exemples spécifiques?

M. Ron Cameron: Monsieur le président, dans les divers domaines de production agricole que notre conseil représente, il y a certainement des besoins très particuliers. Comme je l'ai dit, ces besoins ne sont pas uniquement attribuables, actuellement, à l'incapacité de nos producteurs d'accéder à ces produits. Il est coûteux de faire évaluer un produit par le mécanisme d'évaluation des risques du Canada par l'entremise de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire. En plus, il n'est pas rentable d'amener ces produits sur le marché canadien et, par conséquent, il est impossible d'y avoir accès.

M. John Herron: Mais il y a certains produits particuliers que nous...

M. Ron Cameron: Je pourrais certainement vous en dresser une très longue liste. Je ne les ai pas à l'esprit. Par exemple, il apparaît constamment de nouveaux parasites dans nos cultures. En fait, cet été seulement, j'ai moi-même constaté des dommages causés par des insectes sur mes carottes. Nous n'utilisons généralement pas d'insecticide sur nos carottes industrielles, mais personnellement, ces parasites m'ont coûté très cher cet été.

Nous avons besoin d'un nouvel insecticide pour remplacer un produit qui s'appelait auparavant le carbofuran, ou le Furadan, pour pouvoir nous protéger contre ces parasites. Nous ne pouvons plus utiliser ce produit. Il nous faut un nouveau produit pour tenter de réduire les dommages, parce qu'à cause d'eux, les transformateurs ne veulent pas de nos cultures parce qu'ils ne peuvent pas les classer pour le traitement qu'ils en font. C'est donc un besoin que je ressens personnellement. Je pourrais probablement citer un besoin semblable pour chaque domaine de production de chaque culture.

M. John Herron: Je viens du secteur privé et je tiens absolument à ce que les entreprises qui parviennent à s'en sortir soient celles qui ont constamment accès aux meilleures techniques. Or, je peux voir qu'un régime de réglementation rigoureux pourrait les en empêcher. Mais il y a ici un corollaire, parce que si nous disons que nous aimerions avoir accès à des produits plus écologiques, cela revient à dire que nous en avons qui le sont moins.

Voici donc mon autre question: utilisons-nous à l'heure actuelle des substances que, dès que nous mettons la main sur un nouveau produit, nous aimerions voir retirer du marché?

M. Jeff Wilson: Je pourrais vous donner un exemple.

J'ai entendu quelqu'un prononcer le mot à l'arrière et je n'ai même pas encore lu l'article, mais je crois comprendre qu'il est question aujourd'hui dans le Ottawa Citizen du Lindane qu'on utilise exclusivement en très petites quantités pour traiter les semences. Les agriculteurs l'abandonneraient sur-le-champ si on mettait à leur disposition un nouveau produit pour protéger les semences. Mais les recherches se poursuivent. Je crois que nous devons reconnaître qu'il ne s'agit pas d'une exclusion, mais que nous devons nous assurer de protéger nos semences heureusement, et il s'agit d'un produit très ancien. Sa très grande efficacité a été démontrée, mais il n'y a pas de doute qu'on s'interroge au sujet du produit, surtout en ce qui a trait à son effet sur l'environnement.

Le président: Merci.

Monsieur Jordan, vous avez la parole.

M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Merci, monsieur le président. J'ai une ou deux questions et quelques observations, si vous le permettez.

Monsieur Friesen, vous avez dit quelque chose dans votre exposé qui a attiré mon attention et, après avoir vérifié, je me suis rendu compte que vous aviez improvisé. Mais je crois qu'en ce qui concerne la crise du revenu, vous avez dit... que dans le contexte d'aujourd'hui où les agriculteurs sont confrontés à des problèmes de revenu le fait d'avoir un peu plus d'argent leur permet d'améliorer leurs pratiques de gestion des sols. Je veux continuer là-dessus.

Il y a dans ma circonscription un jeune couple qui a repris l'exploitation agricole des parents. Il s'agissait d'une ferme laitière. Un cours d'eau assez important traversait leur propriété. Ils ont participé avec une école secondaire locale à un projet de reboisement du conseil local d'intendance, le long du cours d'eau.

• 0935

Pendant la réalisation de ce projet, nos deux agriculteurs ont décidé d'installer une fosse à fumier étant donné qu'une partie des problèmes étaient causés par les déjections: ils empilaient ce fumier et l'eau de ruissellement occasionnait des problèmes. Ils ont installé la fosse de fumier et ont procédé à au reboisement. Ils ont aussi construit une clôture pour éloigner le bétail du cours d'eau. Les choses se sont très bien passées. Ils se sont aussi rendu compte que l'amélioration des eaux souterraines—ils utilisaient un puits—avait augmenté la production laitière de leur troupeau.

Mais, après avoir fait tous les calculs, ils ont constaté que cela leur avait tout de même coûté de l'argent—et ils avaient installé eux-mêmes la fosse à fumier, à raison de 40 000 $, parce qu'ils avaient un peu d'argile. Il leur en coûtait plus cher chaque année pour extraire le fumier que pour acheter des engrais.

Je crois donc que vous faites valoir ici un très bon point: les décisions dépendent parfois de l'aspect économique. Je sais qu'il existe au Québec des programmes à l'intention des agriculteurs pour l'installation de fosses à fumier. Je ne sais pas s'il en existe ailleurs au Canada.

Voilà un très bon exemple pour illustrer ce que vous avez dit. Il est facile de pointer du doigt mais lorsque nous nous y réfléchissons, nous demandons aux gens de faire des choses qui ne sont pas rentables pour eux mais qui profitent à la société dans son ensemble. C'est une discussion que nous aurons peut-être un jour, mais le point n'en reste pas moins important.

Maintenant, monsieur Hepworth, vous parlez dans votre exposé du programme de normes d'entreposage et de la capacité de fermer un entrepôt qui ne respecte pas les lignes directrices. Avez-vous des chiffres à l'appui? Est-ce que cela s'est déjà produit? Avez-vous déjà fermé des entrepôts parce qu'ils ne se conformaient pas à vos lignes directrices?

M. Lorne Hepworth: Oui. L'an dernier nous avons retiré l'homologation à un entrepôt. Bob an mal an, nous recevons probablement entre 15 à 20 rapports précisant que les entrepôts ne respectent peut-être pas les normes. Notre équipe d'intervention réagit assez rapidement et dépêche du personnel sur place afin de vérifier si c'est bien le cas. Nous sommes tout de même assez justes et leur laissons quand même 24 heures pour corriger...

M. Joe Jordan: Ainsi, quelles sont les options que vous leur offrez? Vous leur dites ce qui ne va pas et vous leur demandez de corriger la situation?

M. Lorne Hepworth: Oui. Nous ne sommes pas très indulgents au sujet du délai.

M. Joe Jordan: Lorsque vous retirez une homologation, quelles en sont les conséquences?

M. Lorne Hepworth: Ils doivent alors revenir eux-mêmes dans le circuit, faire l'objet d'une nouvelle évaluation, obtenir une nouvelle homologation, sinon...

M. Joe Jordan: Sinon ils ne peuvent entreposer de produits?

M. Lorne Hepworth: Oui.

M. Joe Jordan: D'accord.

M. Lorne Hepworth: C'est simplement que les fabricants ne sont pas à l'aise pour stocker des pesticides dans des locaux, c'est-à-dire un entrepôt, où ils ont l'impression que les produits ne sont pas assujettis à de bonnes mesures d'intendance.

M. Joe Jordan: D'accord. Y a-t-il des distributeurs de pesticides qui ne sont pas membres de votre organisation? Est-ce que tous les distributeurs suivent ce programme?

M. Lorne Hepworth: Oui et je dirais que c'est fondamentalement le cas—pour ce qui est des exploitations agricoles.

M. Joe Jordan: D'accord. Par conséquent, s'ils sont membres de votre institut, ils suivent les règles.

M. Lorne Hepworth: Les personnes qui possèdent et gèrent les 1 800 entrepôts pourraient ne pas être toutes membres de l'institut. Certaines d'entre elles le seraient. D'autres seraient membres d'autres associations mais collaboraient avec nous. Bien sûr, si ce sont nos fabricants qui lest approvisionnent—et nous les représentants pour ainsi dire presque tous, ils doivent se conformer à ces normes.

M. Joe Jordan: L'idée c'est que personne ne voudra leur vendre de produits s'ils ne se conforment pas aux normes?

M. Lorne Hepworth: Oui.

M. Joe Jordan: D'accord.

J'ai un tout dernier point, monsieur Wilson. Vous avez parlé du lindane, un produit chimique. Avec ces anciens produits chimiques, si nous commençons à accélérer les homologations... J'ai lu quelque part, il n'y a pas si longtemps, que les agriculteurs de l'ouest de l'Ontario disposent d'un programme leur permettant de se débarrasser de tous ces vieux produits. Je ne sais pas si AGCare y a participé, mais j'estime que le besoin existe vraiment. Cela ressemble beaucoup au programme d'élimination des produits chimiques mis à la disposition des consommateurs dans les centres urbains. Toute aide que nous pourrions obtenir—à coup sûr dans ma région—pour les agriculteurs qui gardent de vieux produits dangereux dans leurs granges, des produits qui datent peut-être de 30 40 ou 50 ans dans certains cas—des programmes qui leur permettent de se départir de ces produits—serait, je crois utile.

M. Jeff Wilson: Oui, j'ai dit qu'en 1992, en Ontario, nous avions mis de l'avant un programme précisément à cet effet. Il a fait l'objet d'une bonne promotion et d'une très grande publicité. Même à l'heure actuelle, en 1999, nous entendons dire qu'il faudrait le reprendre. Cependant, ce que nous ignorons, parce que nous ne l'avons pas encore fait—il faut passablement de ressources pour administrer un programme de ce genre, que ce soit au niveau provincial ou national.

Nous ne sommes pas sûrs lorsque nous entendons le mot «besoin» s'il s'agit toujours du produit vraiment ancien ou en fait de produits antérieurs à 1992 que les agriculteurs viennent juste de délaisser ou n'utilisent plus ou que sais-je encore. Nous ne savons pas, mais nous entendons dire que le besoin existe et nous nous nous penchons là-dessus.

M. Lorne Hepworth: Monsieur le président, pourrais-je apporter des explications à ce sujet?

Le président: Très brièvement.

• 0940

M. Lorne Hepworth: Vous parlez bien du programme de ramassage des résidus de pesticides en question. Comme je le disais dans mon exposé, c'est ce que nous avons accompli jusqu'à maintenant. Nous avons lancé un programme national. Jusqu'ici, le programme existe dans le Canada atlantique et il va commencer à s'appliquer en Saskatchewan cet automne. Nous voulons l'implanter en Colombie-Britannique. D'ici deux ou trois ans, nous espérons qu'il aura été mis en oeuvre dans le tout le pays, évidement par étapes dans certaines provinces. Pour nous, il est financé par la redevance dont j'ai parlé, qui est perçue auprès des fabricants.

Le président: Monsieur Reed, c'est à vous.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président.

D'abord, j'aimerais remercier tous les témoins de nous avoir présenté des exposés très complets et instructifs.

Monsieur le président, j'aimerais tout particulièrement remercier M. Wilson d'avoir fourni une réponse au document du FMN que nous avions. Je pense que c'est important, surtout pour ceux d'entre nous qui sont profanes en la matière.

Comme nous accueillons une scientifique ce matin, je dois profiter de l'occasion pour vous demander, madame Dewar, si vous pouvez nous expliquer—en des termes que nous pouvons comprendre—le processus de biodégradation. Que se passe-t-il au cours du processus? Que reste-t-il une fois qu'un produit est biodégradé?

Mme Denise Dewar (gestionnaire, Affaires scientifiques, Institut pour la protection des cultures): J'imagine que vous voulez parlez des produits qui sont plus biodégradables aujourd'hui... Auparavant, les produits étaient plus persistants, et restaient donc dans l'environnement plus longtemps. Aujourd'hui, les substances sont décomposées très rapidement dans le sol par des micro-organismes ou par l'air. Elles sont décomposées et recyclées dans l'environnement. C'est plus ou moins ce qu'on veut dire quand on parle de la dégradation des composés chimiques.

M. Julian Reed: Pouvez-vous nous indiquer dans quel pourcentage les produits chimiques ou les pesticides sont biodégradables aujourd'hui? Combien y en a-t-il? Je sais qu'il n'y en avait aucun il y a 40 ans.

Mme Denise Dewar: Je ne peux pas vous donner de chiffres exacts, mais c'est aujourd'hui une exigence de l'ARLA. Quand on évalue un nouveau produit chimique, on examine sa capacité de biodégradation. Les composés qui persistent dans l'environnement ne sont tout simplement pas homologués. Aujourd'hui, tous les produits chimiques sont homologués en fonction de ce critère.

M. Julian Reed: Peut-on dire que la durée de la décomposition varie?

Mme Denise Dewar: Oui, tout dépend du produit chimique; mais certains nouveaux produits chimiques qu'on connaît bien, comme le Roundup... sont des produits facilement biodégradables.

M. Julian Reed: D'après la façon dont l'industrie des pesticides évolue, on dirait que l'évaluation des risques est assumée par celui qui manipule les produits. On pourrait peut-être nous expliquer le genre de formation dont les manipulateurs de pesticides ont besoin aujourd'hui.

Mme Denise Dewar: Je pense que M. Wilson a parlé du cours sur l'emploi sécuritaire des pesticides par l'agriculteur qui existe en Ontario.

M. Julian Reed: Oui.

Mme Denise Dewar: Il y a des cours semblables dans toutes les provinces, sur l'emploi des pesticides. Je vais peut-être laisser M. Wilson vous en parler.

M. Jeff Wilson: Le programme qui existe en Ontario, et qui a été adopté par la plupart des provinces de l'Est, est un cours très intensif d'une journée. Nous conseillons aux agriculteurs de se procurer l'information à l'avance pour pouvoir en prendre connaissance. Le cours dure toute une journée. On projette des vidéos, et on procède par étapes pour favoriser la participation des gens.

Le cours se termine, à la fin de la journée, par un examen. Maintenant, en Ontario, l'accréditation est obligatoire pour toutes les exploitations qui achètent des pesticides agricoles. Le 1er janvier 2000, tous ceux qui épandent des pesticides devront être accrédités dans la province de l'Ontario. C'est aussi la tendance dans d'autres provinces. Ce n'est pas une mesure imposée d'en haut; elle a été prise sur l'initiative du milieu agricole lui-même.

• 0945

M. Julian Reed: Ce qui est aussi très prudent de sa part, parce que si ceux qui manipulent ces produits courent des risques plus grands, ils seront plus en sécurité s'ils savent comment procéder.

M. Jeff Wilson: J'aimerais ajouter qu'il faut aussi parler... et je pense, monsieur Reed, que vous le faites, des risques assumés par celui qui applique les produits.

M. Julian Reed: Oui.

M. Jeff Wilson: Mais le cours vise entre autres à sensibiliser les gens aux dangers que peuvent avoir ces produits à l'extérieur de l'exploitation agricole, dans l'écosystème et pour la santé humaine, quand ils sont entraînés par les eaux ou autrement. C'est un aspect du cours qui est aussi important que l'étude des dangers que courent ceux qui mélangent, manipulent et appliquent les produits.

M. Julian Reed: Merci. Merci, monsieur le président.

Le président: Avant de donner la parole à M. Lincoln, je veux m'excuser de ne pas avoir signalé la présence parmi nous d'un agriculteur du centre-ville de Toronto, Bill Graham, qui est député de Rosedale. Bienvenue parmi nous.

M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.): Monsieur le président, puisque vous en parlez, j'aimerais vous rappeler que la ferme Riverdale se trouve dans ma circonscription, et que c'est un attrait très important du quartier Rosedale. Si vous voulez venir la visiter, vous pourrez voir les animaux qui s'y trouvent et y passer de bons moments.

Merci, monsieur le président.

Une voix: Est-ce vous qui vous occupez des travaux d'entretien?

M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Monsieur le président, j'aime bien entendre MM. Friesen, Hepworth et d'autres parler des améliorations apportées à la manipulation des pesticides et des préoccupations environnementales. Je pense qu'il faut le souligner.

J'aimerais parler des résidus, dont il a été question à plusieurs reprises au cours de notre étude. Le rapport de novembre 1998 de l'Agence canadienne d'inspection des aliments indique que les infractions dans le cas des produits canadiens ont augmenté, même si elles restent assez limitées, passant de 0,4 p. 100 en 1991 à 0,55 p. 100 en 1994 et à 1,2 p. 100 en 1998, alors que les infractions dans le cas des produits importés ont diminué de 2,4 p. 100 à 1,94 p. 100 aujourd'hui. Selon le rapport, la réduction de l'écart entre les deux types d'infraction est attribuable au fait que, dans un cas, le taux d'infraction s'est amélioré et que, dans l'autre, il s'est détérioré.

Comme l'indiquaient les rapports précédents, environ la moitié des infractions au Canada, c'est-à-dire 41 sur 84, ont été commises par des producteurs qui ont utilisé un pesticide non homologué au Canada, et on donne quatre exemples: l'usage extensif et approuvé de la perméthrine sur les champignons, l'usage abusif de l'endosulfan sur les poivrons; l'usage abusif de la cyperméthrine sur différentes cultures; et l'usage du chlorpyrifos sur des cultures pour lesquelles il n'était pas approuvé. On signale aussi avoir trouvé des échantillons contenant cinq pesticides à neuf reprises.

Dans la conclusion du rapport, on indique que l'écart entre les infractions pour les produits canadiens et les infractions pour les produits importés continuent de diminuer. Ce serait probablement attribuable au fait que l'accès aux pesticides est plus facile pour les producteurs canadiens. Trois usages abusifs sont ainsi possibles: l'application de quantités plus grandes de pesticides que celles qui sont recommandées; l'application à une distance trop rapprochée de la culture; et l'application d'un pesticide sur une culture pour laquelle il n'est pas approuvé.

Malheureusement, ces trois types d'infraction ont augmenté à peu près dans la même proportion. Pour réduire les infractions, il faut évidemment sensibiliser davantage ceux qui appliquent ces pesticides.

Votre programme d'intendance environnementale et les différentes mesures que vous prenez... il est vrai qu'il s'agit d'une minorité de cas, et je ne prétends pas que ce soit la norme. Pas du tout. Mais le fait qu'il y ait des abus est très inquiétant, étant donné que ces infractions continuent d'augmenter contrairement à celles sur les produits importés.

• 0950

Pouvez-vous nous dire ce que vous faites à ce sujet?

M. Lorne Hepworth: Monsieur le président, je suis d'accord avec vous pour dire qu'il faut qu'il y ait le moins possible d'infractions, et nous devrions être rassurés qu'il n'y en a pas plus, même si les observations indiquent qu'elles ont tendance à augmenter. Nous ne sommes tout simplement pas d'accord pour qu'on utilise des produits non homologués. C'est illégal de le faire, un point c'est tout.

Pour régler ce problème, il y a d'abord la sensibilisation et, ensuite, pour revenir à ce dont nous avons déjà discuté, il faut offrir aux gens des programmes de formation et d'information pour bien les renseigner sur le sujet. Cela dit, on peut se demander si des producteurs ne sont pas poussés à faire certaines choses par frustration. C'est peut-être aussi une explication dans le cas de l'accès aux produits. Je ne dis pas qu'ils ont raison, mais...

M. Clifford Lincoln: Pourriez-vous nous dire si...

Le président: Rapidement, je vous prie.

M. Ron Cameron: Je pense qu'il y a sûrement des divergences, et c'est ce que nous avons essayé de souligner dans notre exposé sur les aspects commerciaux, surtout dans le cas des fruits et des légumes, où certaines infractions ont été commises. Je ne cherche pas d'excuse parce que ce genre de chose ne devrait pas se produire.

Mais il faut dire qu'il y a des divergences dans le traitement des produits qui sont importés au Canada et ceux que nous expédions aux États-Unis. Par exemple, des pesticides non homologués au Canada peuvent être utilisés sur des produits qui ne sont pas cultivés au Canada, parce qu'une marge d'erreur de 0,1 est tolérée sur les produits importés. Par contre, la tolérance est de zéro pour les produits que nous exportons aux États-Unis et sur lesquels on peut trouver des pesticides disponibles au Canada mais non homologués aux États-Unis. Autrement dit, des pesticides peuvent être utilisés sur des produits importés au Canada sans qu'il y ait d'infraction, mais ils ne peuvent pas être utilisés sur des produits que nous exportons aux États-Unis.

M. Clifford Lincoln: Je comprends, monsieur Wilson, mais je vous dirais que le rapport compare la situation en 1991, en 1994 et en 1998, à partir des mêmes critères.

J'aimerais vous poser une dernière question. Comme vous le savez, l'ARLA travaille à la rédaction d'une nouvelle mesure législative. Ceux qui font partie du CCLA sont au courant. Seriez-vous d'accord pour dire que, quand on cherche à déterminer ce qui est acceptable et non acceptable en matière de risque, il faut tenir compte des personnes les plus vulnérables dans la société, c'est-à-dire les nourrissons ou les enfants à naître, les foetus? Ne devrions-nous pas avoir une façon de déterminer que ce sont les personnes les plus vulnérables, les plus susceptibles de souffrir de la contamination des pesticides qui constituent la norme entre ce qui est acceptable et ce qui n'est pas acceptable?

Le président: M. Wilson ou M. Hepworth.

M. Chuck Wilson: Je fais partie du CCLA et, à notre dernière réunion, on nous a longuement parlé de cela. Je peux répondre seulement en tant qu'exploitant agricole. Je ne suis pas un scientifique ni un responsable de la réglementation. Mais on nous a longuement expliqué que ce dont vous parlez est pris en considération dans le processus. C'est ce qu'on nous a dit à la réunion. Je ne peux toutefois pas vous en dire davantage.

Le président: Merci.

Monsieur Hepworth.

M. Lorne Hepworth: La réglementation actuelle tient compte des personnes de tous les âges et je pense même qu'on fait des essais, dont je ne peux vous parler d'un point de vue technique. Mais on fait des essais sur les animaux à toutes les étapes de la croissance des mammifères, depuis le stade embryonnaire, pour évaluer les risques sur les humains et déterminer des normes de sécurité. Je n'ai aucune raison de croire qu'on ne tient pas compte de cela actuellement.

• 0955

Le président: Merci.

Monsieur Friesen.

M. Friesen: Je vais répondre rapidement aux questions que vous avez posées. Pour ce qui est de votre dernière question, on évalue les risques en raison d'une exposition prolongée à différents produits chimiques et il est clair que les membres ne veulent mettre personne en danger.

Pour ce qui est de votre première question sur les infractions, nous pensons que c'est en harmonisant le plus rapidement possible notre système avec celui des États-Unis, pour ce qui est de l'évaluation des risques et des niveaux de tolérance, que nous allons régler le problème dans nos rapports avec les producteurs américains. Si la réglementation est la même et que nous avons accès aux mêmes produits chimiques, nos producteurs ne seront pas contraints de commettre des infractions. Il reste que nous n'approuvons aucune infraction quelle qu'elle soit.

Le président: Merci, monsieur Lincoln.

Madame Kraft Sloan, vous avez cinq minutes.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib): Merci.

À la page 5 du mémoire de l'Institut pour la protection des cultures, on peut lire au paragraphe e), le troisième point:

    Les initiatives visant à signaler les effets nocifs des produits devraient être chapeautées par l'ALENA, et être appliquées en collaboration avec l'agence américaine de protection environnementale (EPA), dans le but de mettre au point un programme concerté de déclaration et d'évaluation.

Est-ce seulement au sujet des décisions concernant l'évaluation des risques? Pourriez-vous nous expliquer ce que vous voulez dire à ce sujet?

Mme Denise Dewar: Pour ce qui est des effets nocifs, on parle d'un produit probablement déjà homologué et pour lequel de nouvelles informations ont été obtenues. La loi américaine permet de signaler les effets nocifs à l'agence de protection environnementale. Le même système existe au Canada en vertu de l'article 17 de la LCPE. Nous demandons dans ce paragraphe que le signalement des effets nocifs soit harmonisé dans le cadre de l'ALENA.

Mme Karen Kraft Sloan: Bien.

Je crois comprendre que les données sur les effets dangereux ne sont pas mises à la disposition du grand public au Canada. Je sais que la Conférence circumpolaire inuit n'a pas réussi à obtenir d'informations sur l'insecticide Lindane, parce qu'il est breveté. Je me demande si vous voulez aussi harmoniser la question du signalement des effets dangereux.

Vous avez également indiqué que vous vouliez que le processus d'évaluation des risques soit conforme à celui des Américains et que les décisions à ce sujet soient mises à la disposition du grand public. Je pense que les informations sur les effets nocifs sont disponibles aux États-Unis pour le grand public. Je me demande si vous allez également harmoniser cela avec le système américain.

Mme Denise Dewar: Je ne savais pas que ces données étaient disponibles aux États-Unis. La plupart de nos compagnies membres sont des multinationales, et les données qui sont disponibles aux États-Unis le sont aussi au Canada. Si les données sont disponibles aux États-Unis, je ne vois pas pourquoi elles ne pourraient pas l'être au Canada, sauf si nos lois ne le permettent pas, je présume. Mais, si nous voulons harmoniser les deux régimes, j'imagine que notre organisation serait favorable à cela.

Mme Karen Kraft Sloan: Donc, dans une Loi sur les produits antiparasitaires renouvelée, vous n'auriez pas d'objection à ce qu'une disposition prévoit que les informations sur les effets dangereux devraient être mises à la disposition du grand public.

M. Lorne Hepworth: Monsieur le président, mesdames et messieurs du comité, ce qui est important pour nous—et je dois être prudent ici parce que nous ne voulons pas non plus compromettre la propriété intellectuelle et le caractère confidentiel des informations sur les tests et les travaux menés par les entreprises. Pour nous, il est important, pour le public et le comité d'homologation, que toutes les étapes du processus de gestion des risques soient clairement énoncées pour que tout le monde sache qu'on en tient bien compte. Les informations sont importantes, mais il faut aussi connaître les étapes que les entreprises doivent suivre et ce qui sert à l'évaluation des risques.

• 1000

Cela dit, comme Denise l'a indiqué, compte tenu de la nature des entreprises, je ne pense pas qu'il y ait une différence entre ce qui est considéré comme un renseignement confidentiel au Canada et ce qui l'est aux États-Unis.

Mme Karen Kraft Sloan: Mais il y a des informations qui sont mises à la disposition du grand public aux États-Unis mais pas au Canada. Donc, vous n'auriez pas d'objection à ce que cela soit harmonisé?

M. Lorne Hepworth: Je ne peux vous répondre par oui ou non, parce que je n'en sais pas assez long sur ce qui est disponible aux États-Unis et ce qui ne l'est pas ici.

Mme Karen Kraft Sloan: Mais il semble que vous voulez harmoniser d'autres aspects, donc...

M. Lorne Hepworth: De façon générale.

Mme Karen Kraft Sloan: De façon générale...

M. Lorne Hepworth: Oui, de façon générale, ce ne serait pas incompatible avec ce principe.

Mme Karen Kraft Sloan: Mais j'aimerais qu'on applique aussi la règle générale à l'intérêt public.

Par exemple, hier, nous recevions un représentant du Conseil canadien de la lutte antiparasitaire en milieu urbain et d'autres témoins qui nous ont dit—ce n'est pas le représentant du conseil qui l'a dit mais un autre—qu'il y avait un numéro 1-800 qu'on pouvait composer pour se renseigner sur les pesticides et les produits homologués par l'ARLA, que les consommateurs pouvaient téléphoner à ce numéro s'ils avaient des questions à poser sur les dangers d'un produit ou sur la façon de l'appliquer.

Un de mes employés a acheté un fongicide appelé No-Damp. Ce produit est homologué par l'ARLA, mais aucune information ni ce numéro de téléphone ne figurait sur le produit. Il a acheté un autre produit, appelé BugGone, qui est lui aussi homologué par l'ARLA et fabriqué par Monsanto. Le numéro 1-800 figurait sur le produit. Il a téléphoné à 20 h 30 pour se faire répondre qu'il devait attendre qu'un des conseillers le rappelle durant les heures normales de bureau.

Il semble que, dans ces deux cas, les renseignements n'étaient pas facilement accessibles. Je me demande comment les utilisateurs, le grand public, ainsi que les gens du milieu agricole, peuvent se renseigner sur les produits qui relèvent de l'Institut pour la protection des cultures.

Le président: Pourriez-vous répondre brièvement, je vous prie, monsieur Wilson?

M. Jeff Wilson: Je vais vous donner un exemple personnel. Dans le courant de l'année, nous avons été accrédités pour utiliser un ingrédient actif, le rimsulfuron, sur les pommes de terre. Ce produit s'attaque à l'amarante réfléchie qui nous envahissait. Il y avait un numéro 1-800. J'ai téléphoné à la compagnie DuPont un samedi, et on m'a répondu qu'on me rappellerait pendant les heures normales de bureau. En fait, quelqu'un m'a rappelé le samedi après-midi. Il y a donc du service.

En tant qu'agriculteur, j'aurais trouvé acceptable qu'on me rappelle le lundi matin. Dans un cas pareil, c'est un temps de réponse raisonnable. C'est une façon satisfaisante, à mon avis, de répondre aux questions que je me posais sur ce pesticide, et on a très bien répondu à mes questions.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci.

M. Lorne Hepworth: Monsieur le président, j'aimerais ajouter que le premier moyen de défense, si vous voulez, ou la première information dont le consommateur ou le producteur agricole dispose est d'abord et avant tout l'étiquette.

Ensuite, les besoins peuvent varier, si je comprends bien. J'aimerais demander à Denise d'expliquer sur quels produits il faut indiquer le numéro 1-800. Laissons Denise l'expliquer.

Le président: Merci madame Kraft Sloan. Nous sommes sur le point d'entreprendre un deuxième tour, et nous entendrons des questions venant de l'autre bout de la table.

• 1005

Madame Dewar, voudriez-vous répondre à la question?

Mme Denise Dewar: Les produits d'usage industriel, dont les producteurs agricoles se servent, doivent indiquer le numéro 1-800. Pour ce qui est des produits d'usage domestique, je ne suis pas certaine. Il serait utile que le numéro 1-800 figure sur ces produits, mais il faudrait vérifier dans la réglementation. Je sais, toutefois, que les produits d'usage industriel, les produits utilisés en agriculture, doivent indiquer le numéro 1-800.

Le président: Merci madame Dewar.

Madame Dewar, pour revenir un instant au Roundup et au caractère biodégradable des produits, nous avons appris qu'en 1997 Monsanto, en réponse au procureur général de l'État de New York, a retiré des avis qui indiquaient que cet herbicide est biodégradable et écologique, et la compagnie a payé des frais juridiques à l'État. D'après nos dernières informations du moins, le Roundup n'est donc pas légalement biodégradable. Avez-vous un commentaire à faire à ce sujet?

Mme Denise Dewar: Il s'agit des règles juridiques en vigueur aux États-Unis sur les informations à fournir sur un produit. Je dois admettre que c'est un domaine du droit que je ne connais pas bien. Mais je peux vous dire que ces produits sont plus biodégradables que par le passé. D'après les évaluations de l'ARLA, les données montrent clairement que ces produits se dégradent plus facilement que les anciens produits.

Le président: Merci.

Peut-être pas aujourd'hui, mais quand cela vous conviendra, auriez-vous l'obligeance de nous donner votre avis sur les observations suivantes?

Premièrement, le Roundup comporte des risques de toxicité pour les mammifères et n'est pas entièrement écologique. D'après des études européennes que nous aurons bientôt, des produits chimiques hautement cancérigènes ont été détectés après une demi-vie d'élimination du Roundup.

Deuxièmement, à poids égal, le polyoxyéthylénéamine, ou POEA, qui est un surfactant inerte, serait à peu près trois fois plus toxique que le Roundup.

Troisièmement, le Rodeo, qui sert au désherbage des plantes aquatiques, peut causer des dommages génétiques aux têtards qui y sont exposés à des niveaux permis pendant plus de 24 heures.

Et, enfin, certaines espèces fongiques qui sont importantes pour le cycle des nutriments ont augmenté après l'application de Roundup tandis qu'une espèce, le penicillum funiculosum, a complètement disparu.

Je ne sais pas si c'est trop vous demander, mais vous pourriez peut-être, quand cela vous conviendra, nous faire part de vos commentaires à ce sujet.

Mme Denise Dewar: Je vais devoir consulter la compagnie pour connaître ses données, mais l'ARLA évalue toutes ces données ainsi que les risques de ces produits. Elle en tient compte dans son évaluation scientifique. Mais je vais communiquer avec la compagnie pour obtenir les renseignements pour vous.

Le président: Merci.

Monsieur Friesen, je me demande si vous ne pourriez pas fournir au comité les données que vous avez utilisées pour déterminer que les producteurs canadiens se comparent favorablement à ceux de l'Europe et des États-Unis pour ce qui est des quantités de pesticides utilisées par kilomètre carré de terres cultivées. Quand vous le pourrez, pourriez-vous nous les fournir?

M. Bob Friesen: Certainement.

Le président: Merci. Monsieur Friesen, vous pourriez peut-être nous dire combien de produits ont été retirés du marché l'an dernier à la suite du processus de réévaluation, comme vous l'avez dit dans votre exposé.

M. Bob Friesen: Je ne le sais pas.

Le président: Bien, vous avez dit que les fermiers n'avaient plus accès à tous les produits qu'ils utilisaient en raison du processus de réévaluation, c'est ce que vous avez dit. Vous devez avoir des données à ce sujet.

M. Bob Friesen: Je m'excuse, mais je n'ai pas ce chiffre avec moi.

Le président: Savez-vous si de nouveaux produits ont été homologués pour remplacer les anciens?

M. Bob Friesen: Il y a de nouveaux produits qui sont sur le point d'être approuvés, et je peux vous fournir ces chiffres à partir des données que l'ARLA nous a communiquées à la dernière réunion du CCGE.

Le président: Enfin, monsieur Wilson, pourriez-vous nous dire si vous êtes satisfaits du processus d'approbation des nouveaux produits de biotechnologie?

• 1010

M. Jeff Wilson: Encore une fois, nous parlons d'un cadre de réglementation. En tant qu'utilisateur, je suis satisfait de la façon dont le système fonctionne. Je pense qu'il est équitable. Je suis un peu déçu que les responsables du cadre de réglementation des produits de biotechnologie, c'est-à-dire, à toutes fins utiles, l'Agence canadienne d'inspection des aliments et Santé Canada... J'aimerais qu'ils défendent un peu plus le processus de réglementation. Cela ne veut pas dire qu'ils doivent défendre les technologies, mais il faut bâtir quelque chose.

En tant que consommateur, je veux un cadre de réglementation solide et transparent. Je pense que c'est ce que nous voulons tous. Mais il faut un défenseur et ce ne peut être moi. Je suis directement intéressé en tant qu'agriculteur et utilisateur.

Le président: Monsieur Wilson, je vous pose cette question parce qu'il y a quelques semaines vous avez eu la gentillesse—en fait, ce n'est pas vous, mais le président de votre organisme, James Fischer—de m'envoyer copie d'une lettre adressée à Ray Mowling, président de Monsanto. Dans cette lettre, James Fischer demande instamment de libérer l'environnement commercial des formalités juridiques. Je me demandais si vous pourriez...

M. Jeff Wilson: Oui, je peux vous en parler. Nous avons envoyé cette lettre et le communiqué de presse parce que nous pensons que la technologie de base doit être du domaine public. Ainsi, les universités ou les petites entreprises pourraient en faire un usage limité mais prendre une part importante au développement de la biotechnologie.

Et nous ne voulons pas que ce soit fait gratuitement. On peut prévoir un niveau d'indemnisation adapté au produit développé par la recherche. Nous pensons que c'est un moyen d'améliorer la technologie.

Je n'ai pas accès à un insecticide Bt, un bacillus thuringiensis pour le chou, le brocoli, le chou-fleur ou le maïs sucré, parce que la technologie, d'après ce que je comprends, se développe, mais n'est pas encore prête. Une des raisons pour lesquelles la technologie n'avance pas, c'est parce que les grandes entreprises n'offrent pas l'indemnisation voulue. Il faut communiquer la technologie aux petites entreprises, sous licence ou aux termes d'une entente officielle, pour que la technologie soit développée dans l'intérêt de tous.

C'était l'objet de la lettre. Dans ce contexte, nous avons envoyé une lettre à un certain nombre de compagnies. Monsanto détient une part importante de la technologie de base et Ray Mowling est le vice-président responsable de toute cette question; c'est pourquoi la lettre lui a été adressée.

Le président: Dans cette lettre, il y a un paragraphe très intéressant dans lequel on demande de prendre un engagement. Je vais lire ce deuxième paragraphe:

    ...l'assurance que les agriculteurs ne sont pas obligés de signer des dérogations ou des documents juridiques quand ils achètent des semences modifiées génétiquement. Au plus, on devrait demander aux agriculteurs de signer une simple déclaration indiquant qu'ils ne vont pas utiliser de semences récoltées pour produire une future récolte.

Pourriez-vous nous expliquer la situation?

M. Jeff Wilson: Actuellement, si vous signez un document, vous autorisez la compagnie, pour un ou même deux ans à venir, à aller vérifier sur votre terrain, ce qui peut entraîner des violations du droit de la propriété, si vous ne plantez pas des semences récoltées ou n'utilisez pas autrement ses technologies.

Comme je l'ai déjà dit, nous ne disons pas que les agriculteurs ont le droit d'utiliser la technologie gratuitement. Ce que nous ne voulons pas, c'est qu'il y ait toutes sortes de formalités juridiques, que le producteur qui trouve la technologie intéressante et y voit des avantages sur le plan de l'environnement, de la santé humaine et de l'économie se demande quel genre de document il signe, s'il doit faire appel à son avocat pour examiner le document, parce qu'il est évident qu'il a été rédigé par un avocat de la compagnie. Nous voulons qu'on simplifie le processus.

Il faut s'assurer que les gens n'utilisent pas la technologie sans en payer un juste prix. C'est l'objectif visé. Mais simplifions le processus, au lieu de le compliquer de sorte qu'on négocie à ce moment-ci de l'année pour une technologie qu'on va utiliser l'an prochain. Nous ne trouvons pas cela raisonnable.

Le président: Il y a une cause qui a été portée devant les tribunaux, par un producteur de la Saskatchewan.

M. Jeff Wilson: Nous en avons entendu vaguement parler. La cause est devant le tribunal. Personne n'en parle vraiment, nous non plus. J'imagine qu'il faudra attendre de voir ce qu'il en ressort.

Le président: Merci monsieur Wilson.

Pour le deuxième tour, les questions seront posées par MM. Herron, Jordan, Reed et Lincoln ainsi que par Mme Kraft Sloan.

Monsieur Herron.

• 1015

M. John Herron: Je suis favorablement surpris d'apprendre que l'emploi de pesticides par les agriculteurs a chuté de 40,7 p. 100 malgré le fait que nous étudions une mesure législative vieille de 30 ans à ce sujet.

Je n'ai pas vraiment de chiffres là-dessus, mais je crois que l'emploi des pesticides en milieu urbain n'a pas diminué autant. Je pense qu'il faut en féliciter les agriculteurs.

Je constate aussi que nous mesurons aujourd'hui la consommation de pesticides en grammes et non plus en kilogrammes. Cela montre qu'on en utilise moins. D'après ce qu'on nous a dit, on en utilise le moins possible. Auriez-vous dit cela il y a 10 ans?

M. Jeff Wilson: Je pense que l'aspect économique entre aussi en ligne de compte pour l'utilisateur. On nous critique de penser à cela, mais c'est une réalité. Je cultive la terre pour assurer ma subsistance.

M. John Herron: Non, les considérations économiques sont valables.

M. Jeff Wilson: Cela dit, je pense que nous devons être clairs. Nous avons recours à diverses méthodes et techniques de lutte antiparasitaire, dont les produits chimiques. D'autres moyens, selon l'endroit où l'on se trouve, peuvent être très efficaces. Mais, d'une façon ou d'un autre, tous ces moyens entraînent des coûts.

Je pense qu'aujourd'hui aucun agriculteur ne peut se permettre d'ignorer les répercussions, sur son exploitation, des facteurs de production quels qu'ils soient, qu'il s'agisse de technologies, de méthodes ou de produits. Les facteurs de production sont importants. Nous savons ce que cela a donné à la communauté agricole de s'occuper des prix du produit de notre travail.

M. John Herron: Oui, monsieur Friesen.

M. Bob Friesen: Je vous dirais que le coût des facteurs de production est très important. Les agriculteurs sont les gardiens de la terre. Ils sont beaucoup plus conscients des questions de santé qu'avant. Ils sont aussi beaucoup plus rigoureux. S'ils peuvent se passer d'un pesticide, ils vont le faire.

M. John Herron: Justement, je pense qu'il n'y a pas meilleurs gardiens de la terre que les agriculteurs; les agriculteurs ont commencé à prendre soin de la terre bien avant que ce soit la mode.

Pour ce qui est de la santé, j'ai dit hier que je venais de l'industrie de l'acier. Si je vous vendais de l'acier inoxydable contenant du nickel, je devrais vous fournir une fiche signalétique en vertu du SIMDUT, parce que le produit n'est pas toxique comme tel mais, si l'on s'en sert pour faire de la soudure, les fumées qui s'en dégagent... Donc, je devrais fournir une fiche toxicologique.

Étant donné que les producteurs agricoles se préoccupent davantage de la santé et que, bien souvent, ils vivent sur la terre qu'ils cultivent et sur laquelle ils épandent des insecticides... Mme Kraft Sloan a parlé de l'accès à l'information. Si je dois fournir une fiche signalétique dans le cadre du SIMDUT pour un produit qui n'est même pas toxique, mais qui pourrait l'être si on l'utilise pour faire de la soudure, il faut dire que les pesticides sont des produits chimiques qui servent à éliminer de façon contrôlée des parasites. Pourquoi ne pourrions-nous pas nous assurer que des fiches signalétiques sont produites pour tous ces pesticides? Actuellement ce n'est pas le cas.

Certains fabricants fournissent ces informations, pas seulement pour les ingrédients actifs mais aussi pour tous les ingrédients. De plus, il y a 30 ans, les magnétoscopes, les numéros 1-800 ou Internet n'existaient pas. Pour réduire au minimum les problèmes d'accès à l'information, pourquoi ne pourrait-on pas avoir accès en tout temps sur Internet aux fiches signalétiques de tous les pesticides?

M. Lorne Hepworth: Monsieur le président, je vais fournir des premiers éléments de réponse et, si vous n'avez pas d'objection, je vais demander à Mme Dewar de formuler un ou deux commentaires.

Je pense que nous avons les mêmes objectifs. D'abord, les normes pour l'entreposage des produits antiparasitaires, dont j'ai déjà parlé, exigent qu'il y ait une fiche signalétique pour tous les produits à un certain endroit. Cette fiche ne se trouve pas nécessairement dans l'entrepôt, au cas où il y aurait un incendie, mais elle devrait être facile d'accès. Donc, toutes les fiches signalétiques doivent être accessibles.

• 1020

Ensuite, l'an prochain, un programme devrait permettre de rendre ces données disponibles sous forme électronique et sur disquette. Les fabricants se sont engagés à assurer la mise à jour des données, ce qui vise, je pense, les données fournies de façon électronique.

Mais, avant tout, je pense qu'il y a des mesures de réglementation prévues dans la loi au sujet des fiches signalétiques, et je vais demander à Denise de vous en parler.

Mme Denise Dewar: Nos compagnies membres doivent fournir des fiches signalétiques à l'ARLA avec leur demande d'homologation. Si elles ne le font pas, leur demande est rejetée. Les fiches signalétiques des ingrédients doivent aussi être présentées avec la demande d'homologation des produits.

M. Jeff Wilson: Je peux ajouter que tous les cours sur l'usage des pesticides recommandent de bien lire les étiquettes. La fiche signalétique est disponible auprès du fournisseur et nous encourageons les producteurs à se les procurer quand ils achètent le produit. Dans bien des cas, la fiche fournit des informations utiles sur l'utilisation du produit, qui ne se trouvent pas nécessairement sur l'étiquette.

M. John Herron: Enfin, pour ce qui est de l'harmonisation, nous faisons partie de l'économie nord-américaine. Nos échanges commerciaux avec les Américains sont de 260 milliards de dollars chaque année. Il est nécessaire que nos deux économies soient aussi intégrées que possible.

En principe, la collaboration sur le plan de la réglementation s'oriente en général dans la bonne direction. Cependant, pour les pesticides, la fiche signalétique n'est pas exigée par la loi. Elle est fournie en grande partie de façon facultative. Que ferions-nous si les Américains exigeaient une fiche signalétique seulement pour les ingrédients actifs et que nous, au Canada, nous la voulions pour tous les ingrédients? Comment réussir à concilier ce que veut le Canada avec ce que veulent les États-Unis?

M. Jeff Wilson: Soit dit en passant, pendant l'examen réglementaire fédéral des pesticides, je siégeais au Sous-comité du SIMDUT, tandis que Ron Cameron participait au processus principal.

Dans un certain sens, on en est arrivé à un point où les représentants des agriculteurs exigeaient que les sociétés communiquent des renseignements commerciaux confidentiels, en fonction de leurs besoins, ce que les sociétés ne voulaient pas faire. On s'est donc heurté à un mur en quelque sorte, mais la question ne portait pas nécessairement sur les ingrédients entrant dans la composition de la formule, mais sur l'accès aux éléments confidentiels de la formule.

Nous ne sommes pas intervenus, au cours de ce débat, et les intéressés ne sont jamais arrivés à régler la question.

Au bout du compte, je ne suis pas sûr de bien comprendre ce que vous voulez dire.

M. John Herron: Je m'inquiète au sujet de la santé des agriculteurs. À mon avis, les agriculteurs devraient savoir exactement ce qu'ils utilisent.

M. Jeff Wilson: Comme je l'ai dit un peu plus tôt, au niveau de notre organisation ainsi qu'au niveau national, nous encourageons les agriculteurs ainsi que n'importe qui d'autre à obtenir autant de renseignements que possible avant de prendre une décision. Nous englobons les renseignements relatifs à l'impact au lieu de nous contenter simplement de renseignements agronomiques du genre: «ce produit est utile pour la culture de...»

Selon nous, les agriculteurs doivent avoir accès à ces renseignements, à cause des répercussions de tels produits sur leur santé; en effet, dans la plupart des cas, ce sont les agriculteurs eux-mêmes qui sont aux premières loges.

M. John Herron: Merci.

Le président: Monsieur Jordan, s'il vous plaît.

M. Joe Jordan: Merci, monsieur le président.

Pour reprendre la question de M. Herron, j'imagine qu'il n'est peut-être pas nécessaire de communiquer des renseignements de fabrication au sujet d'une formule sur la fiche signalétique du produit. Il s'agit de dire en fait ce qui peut se produire en cas de contact avec la peau ou en cas d'inhalation du produit. Par conséquent, les renseignements relatifs à la sécurité des produits n'ont rien à voir—à tort ou à raison—avec l'obligation des sociétés de breveter leurs produits.

J'aimerais revenir à un point particulier et potentiellement hypothétique à propos de l'impact de l'ARLA. J'aimerais parler de la nouvelle homologation des pesticides—le président a abordé cette question, et si je comprends bien, peu de produits ont fait l'objet d'une nouvelle homologation, mais il y en a 400 en attente et si tout se passe bien, on va y arriver. On procède donc à une nouvelle homologation ou une nouvelle évaluation d'anciens produits par rapport à une norme plus élevée. Il se peut que tel ou tel produit soit rejeté, compte tenu des nouvelles connaissances scientifiques.

• 1025

Pour illustrer cet exemple, disons qu'un produit est appliqué sur une tomate—ce n'est pas ma spécialité, bien sûr. Ce produit était auparavant autorisé, mais ne l'est plus maintenant, car tout le monde convient que les risques l'emportent sur les avantages.

Les sociétés—et comme vous l'avez dit, beaucoup sont des multinationales—mettent au point un produit de remplacement. Peut-être en existe-t-il déjà un, mais il n'est pas disponible au Canada, car le processus d'homologation prend deux, voire trois ans dans notre pays. Il est peut-être aussi trop coûteux d'homologuer le produit au Canada, en raison de la petite taille du marché national de notre pays et du fait que nous sommes essentiellement en concurrence avec les États-Unis; il se peut donc que des questions commerciales entrent en jeu.

Au bout du compte, le producteur canadien ne peut pas utiliser ce produit, car tout le monde convient qu'il est dangereux, mais il n'a pas non plus accès à un produit de remplacement. En attendant, nos supermarchés regorgent de ce genre de tomates traitées aux Etats-Unis par le produit en question. Nous importons des tomates des États-Unis, mais nous ne pouvons pas exporter nos tomates aux États-Unis, à cause de ce produit. C'est le dilemme. A première vue, c'est ridicule et dans le fond, c'est bien ridicule.

J'ai demandé à Barbara McElgunn, qui connaît bien l'EPA et l'ARLA, quel était le meilleur système, l'EPA ou le nôtre. Bien sûr, elle a répondu que les deux se valent, l'EPA étant meilleur dans certains cas, l'ARLA, dans d'autres.

Pour reprendre donc ce que disait M. Herron, il semble nécessaire de parvenir à un genre d'harmonisation, faute de quoi, on sait très bien comment cela va finir.

Est-il possible que des produits disponibles aux États-Unis ne soient jamais approuvés au Canada? Le problème provient-il du fait que le Canada n'analyse pas ces produits au moment voulu ou bien la barre est-elle placée à des niveaux entièrement différents au Canada et aux États-Unis? Le risque—je vais terminer et vous pourrez répondre à cette question—comme l'a dit M. Herron et d'après mon expérience personnelle, c'est que nous n'allons jamais réussir à convaincre les Américains de relever la barre.

Par conséquent, lorsque nous parlons d'harmonisation, s'agit-il en fait d'abaisser nos normes?

M. Ron Cameron: Nous sommes effectivement devant un dilemme qui s'explique par le fait que des produits sont homologués aux États-Unis avant qu'ils ne soient soumis à une évaluation des risques au Canada. Souvent, le produit vise une culture non canadienne; il peut s'agir d'un produit utilisé aux États-Unis pour les agrumes, le coton ou une autre culture que nous n'avons pas au Canada. Par conséquent, utiliser ce produit ou le suggérer à une société qui le mettrait sur le marché pour les radis, par exemple, ne serait pas très intéressant vu l'utilisation limitée qui en serait faite. C'est un exemple extrême.

Étant donné le décalage entre l'homologation du produit aux États-Unis et les exigences actuelles en matière d'homologation au Canada et aussi aux États-Unis, il est trop coûteux d'avoir les données nécessaires et donc de procéder à l'évaluation. Par conséquent, certains de ces produits ne sont pas disponibles. Tout en recherchant maintenant l'harmonisation—ce qui n'est pas la même chose que le double emploi, nous nous réservons toujours le droit de prendre certaines des mesures suggérées par M. Herron. Nous ne contestons absolument pas le droit du Canada à la prise de décision.

Toutefois, lorsqu'une société fait une demande d'homologation d'un produit aux États-Unis et a toutes les données disponibles, nous savons maintenant que ces mêmes données seront présentées au Canada à des fins d'homologation. Si la demande se fait simultanément au Canada et aux États-Unis, les États-Unis adoptent ce que l'on appelle une procédure d'homologation plus sûre. En pareil cas, l'ARLA s'engage à examiner simultanément cette demande, si bien qu'une décision serait prise en l'espace d'une année.

• 1030

M. Joe Jordan: Comme vous le dites, le Canada se réserve toujours le droit de décider. Si les données présentées permettent l'harmonisation des processus, le Canada peut toujours, au bout du compte, rejeter le produit, contrairement aux États-Unis; par ailleurs, le coût moins élevé de ce processus se répercuterait sur les titulaires d'homologation—serait-ce un grand pas en avant? Ce ne serait pas automatique, mais il n'y aurait pas deux procédures distinctes.

Mme Denise Dewar: Je crois que nos agences de réglementation ont bien progressé sur le chemin de l'harmonisation. Toutefois, les exigences en matière de données sont toujours différentes entre les deux pays. Le Canada exige plus de données, sur l'efficacité en particulier. Les divergences s'expliquent essentiellement en raison des études environnementales exigées au Canada. Notre pays est très strict à ce sujet. En fait, dans le domaine de l'harmonisation internationale, on se rend compte qu'en matière d'exigences, la barre est relevée et non abaissée.

On peut donc dire que le Canada exige des données supplémentaires et que c'est souvent un élément dissuasif pour les sociétés qui veulent faire des demandes d'homologation.

M. Jeff Wilson: Finalement, il vaut la peine de porter attention à ce que disait Ron Cameron un peu plus tôt au sujet de la Food Quality Protection Act et de son impact. On n'a pas parlé des efforts qui sont faits au niveau de l'affectation des ressources chargées de trouver des solutions dans le cas de produits signalés dangereux. De nombreuses ressources et des milliards sont prévus à cet égard; on pourrait donc se demander où se situe le Canada dans ce contexte vu que notre pays s'apparente aux États-Unis, en ce qui concerne la topographie, le climat et les cultures, à l'exception de celles indiquées par Ron.

M. Bob Friesen: J'aimerais revenir rapidement sur un des points que vous avez soulevés à propos du dilemme; il ne peut disparaître, vu les seuils de tolérance au Canada; certaines matières actives ne sont pas autorisées au Canada et pourtant nous autorisons l'importation de ces produits. Si nous ne voulons pas ramener l'harmonisation au plus petit dénominateur commun, si nous avons la garantie d'une évaluation scientifique des risques et si nous ne voulons toujours pas de ce produit au Canada, il peut être renvoyé à la DGSIM... c'est la raison pour laquelle nous encourageons les diverses agences gouvernementales—l'ACIAA, l'ARLA et la DGSIM—à créer beaucoup plus de liens entre elles pour arriver à une certaine harmonisation afin de ne pas marginaliser nos producteurs, mais de les rendre compétitifs.

Le président: Cela répond-t-il à votre question, monsieur Jordan?

M. Joe Jordan: Oui.

Le président: Merci.

Monsieur Reed.

M. Julian Reed: Certains témoins qui ont comparu devant notre comité ont indiqué que l'agriculture biologique pourrait offrir une solution à ce dilemme que l'utilisation des pesticides semble présenter. Quelqu'un a-t-il quelque chose à dire au sujet de cette option biologique et de ses applications? J'ai l'impression que souvent, on pense qu'aucun produit chimique n'est utilisé dans l'agriculture biologique et que la production de produits de qualité s'explique par une bonne gestion, etc. Quelqu'un voudrait-il aborder ce sujet?

M. Jeff Wilson: J'aimerais parler d'un problème auquel nous avons tous été confrontés l'été dernier. Je cultive du maïs sucré, c'est l'une de mes cultures. Certains de mes amis sont des agriculteurs biologiques et cultivent également le maïs sucré. Nous sommes tous d'accord sur une chose: le consommateur n'achètera pas de maïs s'il y trouve un ver. Je pense que si nous sommes tous d'accord sur ce point, nous pouvons peut-être aller plus loin.

M. Julian Reed: Ce serait encore pire si le consommateur tombait sur la moitié d'un ver.

M. Jeff Wilson: Effectivement. L'été dernier, les conditions atmosphériques ont été plutôt anormales. Il faisait 25 ou 28 degrés à 20 h 30 et 25 degrés si pas plus à 7 h 00 du matin pendant la période d'incubation du ver de l'épi du maïs et de la pyrale du maïs.

• 1035

Je crois qu'il est probablement juste de dire que la plupart des agriculteurs commencent par utiliser le produit le moins nocif. Dans ce cas précis, il s'agit du Bt, le bacillus thuringiensis. Avec de telles températures, il ne donnait pas les résultats escomptés, et c'est sur ce produit que s'appuie le secteur biologique. Ce produit n'a tout simplement pas fonctionné l'été dernier. Dans notre cas particulier, nous sommes alors passé au niveau supérieur, celui des pyrétroides. Nous avons eu le même problème. Ces produits ne donnent rien lorsqu'il fait plus de 22 degrés, et le Bt ne donne pas grand chose lorsqu'il fait plus de 18 degrés centigrades.

Nous avons fini par opter pour le carbofuran liquide, ce qui, franchement, me fait très peur. C'est un produit homologué, légal. Je n'aime pas utiliser cette technologie. Pourquoi? Son niveau de toxicité est très élevé pour moi, pour l'environnement, ainsi que pour les insectes qui se trouvent autour de mes champs de maïs.

Quelle aurait dû être la solution, selon moi? Le maïs sucré Bt, génétiquement modifié.

Compte tenu des conditions atmosphériques anormales de cette année, je crois qu'il aurait été avantageux d'atténuer les effets d'un pesticide plus fort en le remplaçant par quelque chose qui, je pense que tout le monde est d'accord à ce sujet, est moins fort. Il se peut que nous n'aimions pas avoir recours aux pesticides pour commencer; à ce moment-là, utilisons les produits qui ont le moins d'impact, lorsque c'est possible.

Nous ne pouvons pas prévoir les conditions atmosphériques comme celles que nous avons connues l'été dernier. J'ai entendu les agriculteurs dire que la lutte antiparasitaire avait été très difficile pour toutes les cultures à cause du temps chaud. Était-ce exceptionnel au Canada? Certainement, mais d'après les cultivateurs de maïs sucré de Floride auxquels nous avons parlé, c'est la norme: 30 applications de pesticide d'organophosphate est en quelque sorte la norme en Floride à cause des températures élevées. Dans un certain sens, je ne pense pas que nous cherchons à rejeter du revers de la main toute technologie dans ce domaine. J'ai beaucoup discuté avec mes amis biologiques et nous nous demandons ce que nous pourrons faire si nous connaissons une autre année comme celle-ci.

Quelqu'un d'autre veut-il intervenir?

M. Ron Cameron: Oui. Je crois que tous les agriculteurs au Canada sont aussi biologiques que possible dans la mesure où ils peuvent produire une récolte rentable. Pour commencer, nous avons recours à d'autres méthodes comme l'assainissement, la rotation des cultures, le semis direct—divers moyens qui permettent d'éviter le plus possible le recours aux pesticides. Par contre, si nous voulons soutenir la concurrence à l'échelle mondiale, si nous voulons offrir des produits de qualité à un prix acceptable aux yeux du consommateur, il faut être en mesure de réagir aux urgences que Jeff vient de décrire.

Il est indispensable d'avoir accès à tout l'arsenal de produits, mais je crois que les agriculteurs font tout ce qu'ils peuvent pour éviter le plus possible le recours aux pesticides et qu'ils optent pour d'autres moyens très compétitifs, lorsqu'ils existent.

Dans le cas des agriculteurs biologiques... il se peut qu'ils soient allés plus loin que moi, mais ils offrent leurs produits à un prix supérieur sur le marché. Une couche de la société est prête à payer ce prix, mais ces produits ne sont pas à la portée de tous les consommateurs.

Le président: Merci, monsieur Graham.

Monsieur Lincoln, s'il vous plaît.

M. Clifford Lincoln: J'aimerais revenir à la nouvelle loi qui est en cours de préparation, car j'ai l'impression que bien de nos discussions relatives au risque, à ce qui est acceptable et à ce qui ne l'est pas, montrent qu'il n'y a pas de définition claire et nette du mot risque.

D'après ce que vous avez dit plus tôt, autant que vous le sachiez, c'est le risque couru par les individus les plus fragiles de la société—les bébés—que l'on considère. Vous ne vous opposeriez donc pas à ce que la définition en tienne compte...? En d'autres termes, la définition du mot risque serait axée sur les individus les plus vulnérables de la population.

• 1040

M. Lorne Hepworth: Pour ce qui est de la nouvelle loi qui doit être présentée, nous pensons que le risque et le cadre de gestion du risque doivent être précisés pour que nous comprenions tous exactement ce dont nous parlons et ce que l'ARLA veut dire en matière de cadre de gestion du risque. Je m'attendrais à une explication très claire, précise, progressive. C'est tout ce que j'ai à dire à ce sujet.

Le président: Monsieur Wilson.

M. Jeff Wilson: Je répondrais en demandant une précision: la définition du mot risque doit-elle se trouver dans la loi et non dans les règlements, en d'autres termes, doit-elle se trouver dans l'essentiel? Est-ce la question posée? Je ne suis pas sûr de comprendre la question au sujet du mot risque.

M. Clifford Lincoln: Non, la question est de savoir si cette définition devrait se trouver dans les règlements ou... je préférerais qu'elle se trouve dans la loi elle-même, car la loi prévoit beaucoup de définitions et ce serait certainement beaucoup plus clair. Les règlements sont publiés bien après.

Peu importe que la définition se trouve dans les règlements ou dans la loi, il s'agit de savoir s'il faut que l'expression risque acceptable soit définie en fonction des individus les plus vulnérables de la société? En d'autres termes, non pas en fonction d'un homme de 165 ou de 200 livres et de six pieds, mais en fonction d'un bébé; il faudrait faire preuve de beaucoup plus de prudence... il faudrait se fonder sur le principe de précaution à l'égard des individus les plus fragiles de la société.

M. Jeff Wilson: Je répondrais en disant que je ne sais pas si l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire a témoigné devant votre comité ou non. Elle a présenté des arguments probants au conseil sur la façon dont elle analyse, détermine et envisage la question de risque pour tous, y compris pour ceux qui seraient en quelque sorte défavorisés.

En tant que non scientifique, j'ai trouvé que ces arguments étaient fort probants. L'agence a satisfait ma curiosité—en tant que témoin ici—c'est prévu. Veut-on quelque chose de plus? Je crois que le conseil lui-même s'est également posé la question.

Le président: Monsieur Wilson, que voulez-vous dire par c'est prévu?

M. Jeff Wilson: Les représentants de l'ARLA responsables en la matière, qui doivent s'occuper de la définition et analyser la question de risque, ont passé probablement deux heures à nous expliquer ligne par ligne, point par point, la façon dont ils font leur travail. Ils semblent avoir prévu toutes les catégories dont parle M. Lincoln: les personnes âgées, les jeunes et certaines espèces qu'il va falloir identifier au cours du processus. Je ne pense pas pouvoir en dire plus, si ce n'est que si le comité n'est pas satisfait, il devrait peut-être rencontrer le conseil lui-même ou les représentants de l'ARLA pour avoir une explication précise de la façon dont ils analysent la question du risque.

M. Clifford Lincoln: Monsieur Wilson, je crois que vous n'avez absolument pas compris ma question. Je ne pose pas la question à l'ARLA ni au conseil, mais à vous, parce que vous êtes le témoin.

M. Jeff Wilson: Oui.

M. Clifford Lincoln: Si vous êtes satisfait des explications de l'ARLA, je vous demande si vous vous opposeriez à ce que cela fasse partie de la définition de la nouvelle loi? C'est ma question. La question n'est pas de savoir si on est d'accord avec l'ARLA ou non. Je dis simplement que si vous êtes satisfait de la réponse de l'ARLA selon laquelle l'évaluation du risque est faite en fonction des individus les plus vulnérables de la société, vous n'auriez alors aucune objection, si je comprends bien, à ce que cela fasse partie de la définition dans la loi.

M. Jeff Wilson: Au sujet de la question du risque, je suis d'accord avec vous mais je crois également, si nous revenons à la discussion au niveau du conseil—je représente l'horticulture au conseil—que ce qui nous inquiète, c'est le fait que le projet de loi ne reconnaisse pas l'emploi limité; d'autres personnes en ont également parlé.

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En général, la loi proposée qui nous a été présentée et qui comporte tout ce dont vous parlez tend à être acceptée. Ce qui nous inquiète, c'est le fait que certains éléments n'y figurent pas encore.

M. Clifford Lincoln: La loi—et c'est assurément le cas en ce qui a trait à la législation américaine—inclut l'utilisation globale des pesticides, leur utilisation cumulative et la réévaluation. La loi américaine contient depuis 12 ans maintenant, des exigences en matière de réévaluation, depuis 1988. Est-ce que je dois comprendre que vous accepteriez la législation, y compris une exigence en ce qui a trait à la réévaluation et les risques globaux et cumulatifs. Enfin, auriez-vous une objection à inscrire dans la loi un principe de prudence?

M. Charles D. Milne (vice-président, Affaires gouvernementales, Institut canadien pour la protection des cultures): Je suppose que je répondrais à cela en disant que nous sommes en faveur de la réévaluation. Nous reconnaissons aussi qu'aux États-Unis le nombre de produits disponibles est de loin plus grand.

Je crois que quelqu'un a fait valoir aujourd'hui la nécessité de stratégies de transition et de solutions de rechange. L'inquiétude au Canada c'est que, au fur et à mesure que nous introduirons la réévaluation, nous ne disposerons pas de la stratégie de transition pour ce qui est de la disponibilité des produits qui viendront remplacer ceux que nous pourrions risquer de perdre.

Nous appuyons l'idée de la réévaluation. J'ajouterais qu'il nous faut la rattacher à l'homologation. Au fur et à mesure que davantage de technologies de pointe seront homologuées, il y aura une substitution naturelle de ceux qui doivent être réévalués, il y a donc un rapport entre les deux. Je dirais qu'il faut se tourner vers l'avenir, mais ne pas perdre de vue le passé.

M. Clifford Lincoln: Je m'y perds un peu parce que certains témoins que nous avons entendus ont dit que nous voulions harmoniser nos règlements et nos méthodes avec ceux des États-Unis. La loi américaine prévoit, depuis 1988, une réévaluation obligatoire. Qu'il s'agisse d'une grande ou d'une petite quantité de produits, nous parlons de principes.

Il est maintenant question dans la loi américaine de risque global—de l'exposition cumulative. Dans la nouvelle loi, devrions-nous aussi prévoir une exigence en matière de réévaluation, qui englobe le risque global et l'exposition cumulative?

M. Bob Friesen: Je souscris à ce que Charles a dit au sujet de la réévaluation. Nous croyons comprendre qu'à l'heure actuelle, l'ARLA, lorsqu'elle évalue les risques tient compte de l'exposition cumulative et des groupes de population. Quant à savoir s'il convient de l'intégrer ou non à la loi, c'est probablement une question dont nous discuterons à un autre moment. Mais c'est ce que fait l'ARLA à l'heure actuelle, à ce que nous croyons comprendre.

Je ne sais pas si nous avons le temps de discuter du concept d'un principe de prudence. Notre position où que nous allions, peu importe que nous parlions de biotechnologie ou d'accord sur l'application des mesures SPS à l'OMS, c'est qu'il faut que le fondement soit scientifique. Votre principe de prudence, selon nous, risquerait de lieu à des décisions politiques et subjectives; ainsi tant que cela fait partie de la définition du principe de prudence, nous nous y opposerions. Nous sommes en faveur d'évaluations scientifiques.

M. Clifford Lincoln: Devrons-nous attendre que la science découvre que le DDT est nocif, après tous les dommages que ce produit a causés? Par exemple, selon un rapport du commissaire sur le carbofuran, selon un rapport de l'ARLA sur les effets secondaires, le carbofuran a eu des effets nocifs. Entre 109 000 et 958 000 oiseaux au Canada meurent à cause de ce produit chaque année.

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Nous attendons donc que la science démontre que le dommage a été causé.

Le Canada a adopté le principe de la prudence à Rio en 1992. Il ne faut pas attendre les preuves qu'un dommage a été causé; si nous croyons que le produit risque d'être nocif, abstenons-nous de l'utiliser.

Le président: Monsieur Cameron.

M. Ron Cameron: J'aimerais simplement répondre à la question, monsieur Lincoln. Bien sûr, nos voisins du Sud étudient les effets globaux et cumulatifs et un facteur de dix pour les enfants en bas âge et les enfants. Nous croyons que c'est très louable.

En même temps, pour déterminer l'importance du risque, ils passent de ce que nous appelons une évaluation théorique à une évaluation plus probabiliste, qui tienne compte de facteurs connus au sujet d'une matière en particulier. Ils procèdent à une évaluation beaucoup plus exacte pour déterminer le risque réel. Je pense donc que nous serions à l'aise d'harmoniser notre processus à un processus de ce genre.

Le président: Madame Kraft Sloan.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci, je me demande si l'une des activités de l'Institut canadien pour la protection des cultures comprend l'éducation. Je me demande également si vous faites de la recherche sur l'utilisation multiple ou les effets cumulatifs des différents pesticides ou si vous sensibilisez la population à cet égard. Disposez-vous de matériel promotionnel à l'intention des usagers et des consommateurs?

Mme Denise Dewar: En ce qui concerne les effets cumulatifs, il s'agit d'un domaine scientifique qui en est encore à ses premiers balbutiements. C'est un domaine où il faudra pousser davantage les recherches. Notre industrie participe activement aux recherches sur les effets cumulatifs et les appuie.

Mme Karen Kraft Sloan: Pouvez-vous fournir au comité des documents en ce qui a trait à vos activités dans ce domaine?

Mme Denise Dewar: Oui. Nous en parlons justement dans notre mémoire. Nous y avons inclus l'étude du docteur Kelly Munkittrick portant sur les perturbateurs endocriniens dans la rivière Saint-Jean. Mais nous vous fournirons des précisions.

Mme Karen Kraft Sloan: Je suis simplement curieuse de savoir pourquoi entre huit et onze pesticides seraient utilisés sur les pommes ou les poires. Je ne comprends pas pourquoi il faut utiliser autant de pesticides différents.

M. Jeff Wilson: En un mot, vous devez revenir en arrière et analyser les ravageurs qui attaquent les poires. Différents produits ont été mis au point pour attaquer différents insectes de sorte que même si l'agriculteur peut utiliser jusqu'à onze pesticides différents, il déterminera en fait s'il a affaire à la mineuse des feuilles ou à la cochenille et agira en conséquence. Il n'utilise pas les onze pesticides au cours d'une année donnée. En fait, dans l'ensemble, l'utilisation des pesticides a régressé.

Écologique parlant en ce qui a trait à la gestion intégrée des parasites, on commence maintenant à quantifier les produits les moins nuisibles et à les doser pour chaque parasite spécifique donné.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci.

Le président: J'ai une dernière question pour M. Hepworth et nous allons ensuite suspendre nos travaux.

Monsieur Hepworth, on m'a dit que l'Institut canadien pour la protection des cultures a sa page Web.

M. Lorne Hepworth: Oui.

Le président: Selon l'information disponible sur cette page Web, les produits antiparasitaires ne contribuent pas à la contamination des eaux souterraines et de surface du Canada et des États-Unis. Ce constat découlerait selon l'organisme d'une étude de l'EPA et aurait été confirmé par le gouvernement canadien. Selon l'étude, 99 p. 100 des analyses respecteraient les normes gouvernementales. Le Comité de l'environnement a rencontré tous les ministères concernés par le dossier des pesticides, mais aucun d'eux ne semblait au courant de cette étude dont il est question dans votre page Web. Pouvez-vous nous donner des précisions à ce sujet, s'il vous plaît?

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M. Lorne Hepworth: Je vais devoir obtenir l'information concernant l'étude précise dont vous parlez et vous la communiquer. En ce qui a trait à la contamination des eaux souterraines et de surface par les pesticides, je sais qu'il y a un rapport provenant de Lethbridge—Denise est peut-être en mesure de vous éclairer là-dessus—où nous travaillons avec des fonctionnaires, je crois que c'est par l'entremise de l'ARLA, qui ont entrepris cette étude. Nous cherchons à mieux comprendre nous-mêmes en quelque sorte. Je devrai obtenir plus de précisions sur l'étude dont vous parlez.

Le président: Vous engageriez-vous à examiner votre page Web et à informer le comité de ce que vous prévoyez faire pour la corriger?

M. Lorne Hepworth: Oui.

Le président: Y a-t-il d'autres questions? Nous vous remercions de votre participation ce matin. Vos exposés nous ont été très utiles et nous espérons que nous reverrons

La séance est levée.