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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 4 novembre 1999

• 0912

[Traduction]

Le président (l'honorable Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Comme nous avons le quorum, je déclare la séance ouverte.

[Français]

Bonjour, mesdames et messieurs. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions la gestion et l'utilisation des produits de lutte antiparasitaire au Canada.

[Traduction]

Nous souhaitons ce matin la bienvenue à trois témoins, M. Sankey, Mme McDonald et Mme Land. Commençons par le Groupe de travail sur les dangers que représente pour la santé l'utilisation de pesticides dans les milieux urbains.

Je cède la parole à Mme McDonald. Je suppose que vous voudrez nous présenter vos collègues, après quoi vous aurez 10 minutes pour nous faire votre exposé.

Mme Melissa McDonald (membre, Groupe de travail sur les dangers que représente pour la santé l'utilisation des pesticides dans les milieux urbains): Avec plaisir. Monsieur le président et mesdames et messieurs du comité, merci de nous avoir invités aujourd'hui à comparaître. Je m'appelle Melissa McDonald et je suis accompagnée ce matin de John Sankey. Nous représentons le Groupe de travail sur les dangers que représente pour la santé l'utilisation de pesticides dans les milieux urbains. Je sais que le titre est un peu longuet, et c'est pourquoi nous utilisons de préférence notre sigle en anglais.

Laissez-moi me présenter: je viens de terminer un baccalauréat en droit, et je suis actuellement stagiaire en droit dans une étude d'avocats du centre-ville d'Ottawa. Quant à John Sankey, il est naturaliste de terrain et scientifique à la retraite, et s'intéresse à la question des pesticides dans la région d'Ottawa depuis plus de 30 ans.

Notre groupe de travail est composé de bénévoles, de scientifiques à la retraite, de professionnels de la santé, de stagiaires en droit et d'autres citoyens intéressés à la question. Nous sommes tous préoccupés des effets que peuvent avoir les pesticides sur la population urbaine.

[Français]

Je vais vous faire ma présentation en anglais aujourd'hui, mais je pourrai par la suite répondre à vos questions en français s'il y a lieu.

[Traduction]

Laissez-moi vous expliquer qui nous sommes: nous avons un double mandat. D'abord, nous voulons sensibiliser la population aux dangers que peut représenter l'utilisation des pesticides en milieu urbain et promouvoir le recours à des produits non toxiques. En second lieu, notre but est de faire des démarches pour qu'un règlement municipal soit adopté pour contrôler l'utilisation de pesticides sur les propriétés privées. J'espère que vous entendrez beaucoup parler de cet aspect dans un avenir rapproché, puisque cela constitue un objectif d'un nombre croissant de groupes de citoyens d'un peu partout au Canada.

• 0915

Nous tenions à venir témoigner parce que nous croyons qu'il est important que vous sachiez ce qu'en pensent les citoyens qui sont préoccupés par ce problème à l'échelle urbaine. J'aimerais souligner que les décisions qui sont prises au palier fédéral ont un lien direct avec celles qui sont prises dans les milieux urbains. Nous allons donc vous faire des recommandations qui devraient être incluses, à notre avis, dans la loi fédérale.

Auparavant, j'aimerais toutefois vous expliquer pourquoi l'utilisation urbaine des pesticides fait problème. Et j'aimerais faire la distinction entre ce problème et l'utilisation agricole des pesticides, par exemple, ou leur utilisation en vue de protéger les ressources forestières.

Il faut d'abord savoir que l'on utilise beaucoup de pesticides dans les milieux urbains. Les chiffres que j'ai colligés démontrent que l'on utilise plus de pesticides dans les milieux urbains en livres par acre que dans les régions rurales à des fins agricoles. Voilà beaucoup de pesticides!

Il faut aussi comprendre que la plupart des pesticides utilisés dans les villes visent à répondre à des besoins strictement esthétiques, comme celui d'avoir, par exemple, une jolie pelouse. Les pesticides ne servent pas à protéger une culture ni à empêcher une poussée épidémique dans le milieu urbain. Il s'agit tout simplement d'obtenir une jolie pelouse.

Pour ce qui est de la densité de la population urbaine, j'ai lu que d'après Statistique Canada, la densité de la population urbaine dans le sud de l'Ontario est de 1 203 habitants par kilomètre carré. Cela représente énormément de gens exposés inutilement à une grande quantité de pesticides.

Prenons maintenant l'arrosage des pelouses, qui nous préoccupe particulièrement: quel que soit le soin avec lequel un préposé applique ces pesticides, on peut s'attendre à ce que les vents fassent dériver le produit. Ceux qui ne veulent pas être exposés aux pesticides le seront de toute façon.

Un autre problème qui surgit également dans les régions urbaines, c'est celui des résidus de pesticide qui se retrouvent dans les eaux souterraines. Or, cette eau souterraine finira par se retrouver dans les sources d'eau potable. Dans une étude que j'ai lue, on démontrait que les eaux souterraines analysées au Canada et aux États-Unis contenaient des résidus de 39 pesticides, que l'on finit un jour ou l'autre par boire.

Passons maintenant aux enfants, mais restons dans le domaine de l'arrosage des pelouses. Les enfants jouent sur des pelouses qui ont été aspergées de pesticides, s'y roulent, mettent les mains au sol, et portent ensuite les mains à leur bouche. On parle d'une exposition tout ce qu'il y a de plus direct, mais elle est parfaitement inutile, puisque l'arrosage ne vise qu'à embellir la pelouse.

Le milieu industriel vous dira que ces pesticides se dissipent assez rapidement à l'extérieur, mais ce qu'on omettra de vous dire, c'est qu'ils se dissipent aussi vers votre maison. Nombre d'études ont démontré que l'air intérieur contenait des pesticides en concentrations beaucoup plus élevées—de 5 à 10 fois—que l'air extérieur. Les rayons du soleil et les bactéries peuvent contribuer à décomposer rapidement les pesticides à l'extérieur. Malheureusement, ces facteurs n'agissent pas à l'intérieur. Une des études que j'ai lue démontrait que les pesticides peuvent demeurer très longtemps dans les tapis, ce qui contribue à augmenter la durée d'exposition aux pesticides.

Il y a aussi dans les milieux urbains le phénomène de la vaporisation des appartements et des maisons pour exterminer les coquerelles. C'est une activité particulièrement dangereuse, étant donné que le pesticide utilisé principalement à cette fin est un produit organophosphoré appelé chlorpyrifos. Or, les organophosphates sont neurotoxiques, et on a démontré qu'ils avaient des effets sur la mutagénicité, le système reproducteur et le système immunitaire. Les résidus de ces insecticides durent très longtemps, puisqu'ils restent à l'intérieur.

J'ai donc tenté de vous démontrer que la population urbaine est exposée à des quantités considérables de pesticides. N'oublions pas non plus pourquoi elle y est exposée: tout simplement pour des fins d'esthétique et pour obtenir une belle pelouse.

Je ne vous exposerai pas en détail les liens qui existent entre les pesticides et les effets néfastes sur la santé. J'ai annexé à mon mémoire une circulaire provenant du Comité de l'hygiène du milieu de l'Ontario College of Family Physicians qui a été publié il y a environ deux ans. Dans cette circulaire, vous trouverez en détail et avec toutes les références scientifiques ces liens entre les pesticides et la santé. Je vous laisse la lire.

• 0920

Je signale également qu'on publie continuellement des études qui démontrent qu'il existe des liens entre les pesticides et les maladies. Je crois que la Dre Nicole Bruinsma est censée comparaître sous peu. Elle pratique la médecine à Chelsea, au Québec, et vous parlera de cette question.

Passons maintenant à nos recommandations. D'abord, précisons que nous souscrivons sans réserve aux recommandations présentées par Julia Langer à votre comité au printemps dernier. Toutefois, nous voudrions vous faire part de certaines de nos recommandations.

D'abord, nous vous recommandons d'inclure une disposition dans la Loi sur les produits antiparasitaires qui stipulerait qu'une loi au niveau provincial ou municipal limitant davantage l'utilisation de ces produits ne va pas au-delà de ses compétences et n'est pas contraire à la Constitution. C'est une question qui est particulièrement importante pour le Québec, car vous savez peut-être que 35 municipalités québécoises ont pu mettre en vigueur des règlements municipaux qui limitent l'utilisation des pesticides sur la propriété privée.

Ainsi, Hudson, au Québec, a été la première municipalité à mettre en oeuvre un règlement municipal de ce genre. Ce règlement a été contesté en première instance et à la cour d'appel par les fabricants de produits chimiques d'arrosage pour les pelouses, mais le règlement municipal a été maintenu. Or, on a accordé à ces mêmes fabricants le droit d'interjeter appel auprès de la Cour suprême du Canada. Il est important que nous suivions de très près la question, car les règlements municipaux qui sont contestés devant un tribunal supérieur ont pourtant été entérinés par les municipalités. Il sera intéressant de voir ce qu'il en découlera.

Les fabricants allégeront certainement qu'un produit légalement approuvé au palier fédéral ne devrait pas pouvoir être banni, voire considéré comme illégal au palier municipal. Voilà pourquoi nous vous faisons notre première recommandation.

En deuxième lieu, nous vous demandons d'appliquer le «principe de remplacement», comme on l'a fait en Suède. Il s'agit de retirer l'agrément d'un produit toxique si un produit moins toxique remplit les mêmes fonctions. Autrement dit, il ne faudrait pas approuver un pesticide, dès lors qu'un produit moins toxique donne les mêmes résultats. Cela me semble plein de bon sens. Pourquoi répandre dans l'environnement un autre produit toxique alors qu'il existe déjà un produit qui a le même effet et qui est moins toxique?

Prenons, par exemple, la lutte contre les coquerelles. On a constaté que le borax, produit commun que l'on peut acheter à l'épicerie, est très efficace contre les coquerelles, et qu'il sert en plus de colmatage physique des points d'entrée des coquerelles. Voilà un produit éprouvé, non toxique et facilement disponible; pourquoi alors utilise-t-on de plus en plus le chlorpyrifos, qui est très toxique?

En troisième lieu, nous voudrions que l'on tienne compte dans les essais de produit des enfants et des autres populations sensibles. Que nous sachions, on utilise actuellement les données provenant des essais de produit sur les animaux et on les extrapole, pour les appliquer à l'adulte masculin moyen. Je vous ai déjà expliqué comment les enfants étaient exposés directement aux produits dont on a aspergé les pelouses et comment ils étaient donc plus susceptibles que les autres d'être directement touchés.

Après tout, les enfants ont une masse corporelle plus petite, mais une plus grande surface d'absorption, de même qu'un taux métabolique différent. Ils sont donc beaucoup plus susceptibles aux effets néfastes des pesticides, et si l'exposition se produit durant les périodes de développement critiques, les effets peuvent être beaucoup plus néfastes sur eux que sur les adultes.

Nous recommandons, en quatrième lieu, que les ingrédients inertes des pesticides soient indiqués au moment de la demande d'homologation des produits. Les ingrédients inertes sont ceux qui facilitent l'application des pesticides.

Dans une des études que j'ai consultée, j'ai lu que plus de 610 substances chimiques considérées comme dangereuses pouvaient être présentes dans les matières inertes trouvées dans les pesticides. Actuellement, rien n'oblige de divulguer les produits inertes au moment de l'homologation. En effet, ces renseignements sont considérés comme un secret de fabrication.

• 0925

Or, il y a des gens qui manipulent ces produits chimiques quotidiennement sans le savoir, et il y a des médecins qui sont parfois obligés de traiter des patients ayant ingéré un produit particulier, sans qu'ils sachent exactement ce que contient ce produit puisque sa fabrication est considérée comme secrète. Pourquoi les résultats financiers d'une entreprise seraient-ils plus importants que la santé humaine?

Je vous recommande ensuite d'inclure le principe de prudence dans la Loi sur les produits antiparasitaires. Je suis sûr que vous en avez déjà entendu parler, mais je vais tout de même vous l'expliquer à nouveau. Ce principe énonce que, s'il existe des menaces de dommage sérieux ou irréversible, le manque de certitude scientifique ne devrait pas être invoqué pour retarder la prise de mesures efficaces. De nombreux aspects nous sont inconnus chez les pesticides, tels que les effets à long terme, les effets biocumulatifs, les effets synergiques, les effets sur les enfants et les effets sur les foetus. Toutefois, nous savons que ces toxines ont des effets indésirables sur la matière organique, et nous sommes tous composés de matière organique!

L'Association canadienne des fabricants de produits chimiques a demandé au gouvernement fédéral de ne pas interdire un produit en l'absence de preuves scientifiques définitives. Cela ne me semble pas du tout logique, car le jour où nous aurons des preuves scientifiques définitives, dans la mesure où c'est possible, il sera alors trop tard. Voulons-nous vraiment attendre que les chiffres nous confirment que ces produits causent le cancer du sein? Non, c'est maintenant qu'il faut les interdire. Attendre, c'est agir trop tard. Voilà pourquoi nous pensons important que vous incluiez ce principe au cadre législatif s'appliquant à l'utilisation des pesticides.

Enfin, j'aimerais parler des solutions de rechange. Nous croyons savoir qu'il existe une division des nouvelles stratégies et des affaires réglementaires à l'ARLA. Malheureusement, notre expérience de travail en comité avec cette division ne s'est pas révélée bien fructueuse.

Il y a un an environ, nous voulions savoir ce qu'on faisait en matière d'entretien des pelouses et de solutions de rechange. À l'époque on nous a dit qu'une brochure serait publiée sur cette question. Un an plus tard, nous les avons contactés à nouveau, mais malheureusement on nous a redit la même chose, soit qu'une brochure allait bientôt être publiée, mais nous n'avons toujours rien. Nous aimerions donc savoir si c'est une question de ressources financières. Peut-on leur en accorder davantage. Si c'est autre chose, voyez un peu ce qui se passe car il faut absolument des solutions de rechange pour réduire les toxines dans l'environnement.

Pour conclure, j'aimerais dire que quand vous écoutez les représentants du secteur, vous devez songer à qui cela profite. Si l'on peut dire que je vise un but, alors mon seul but c'est de protéger la santé humaine et l'environnement. On ne me paye pas pour être ici. Je le fais spontanément parce que c'est une chose qui me tient beaucoup à coeur et il en est de même au sein de notre comité, et j'espère bien que le gouvernement canadien vise lui aussi à protéger la santé et l'environnement.

Je tiens à vous remercier de m'avoir accueillie aujourd'hui. John Sankey et moi répondrons volontiers à vos questions. Merci beaucoup.

Le président: Merci, madame McDonald.

Monsieur Sankey, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. John Sankey (ancien coprésident, Groupe de travail sur les dangers pour la santé de l'utilisation de pesticides en milieu urbain): J'aimerais dire tout d'abord que je ne suis pas médecin, mais ma famille en compte un ainsi que deux infirmières et j'ai donc entendu parler de questions de santé pendant toute ma vie professionnelle. Je me suis entièrement consacré aux effets directs sur la santé dans le milieu urbain de l'exposition occasionnelle aux pesticides—c'est-à-dire, chez des gens qui n'avaient pas décider de s'en servir.

J'ai de nombreux amis qui en ont gravement souffert. J'ai moi-même souffert d'asthme dans la trentaine et je n'ai compris qu'après un certain temps que je n'en avais jamais souffert auparavant et que je n'en souffrais plus après deux semaines de vacances loin de chez moi. J'ai finalement fait inspecter ma maison. On y a constaté un niveau très élevé de formaldéhyde. J'ai déménagé et je n'ai plus jamais souffert d'asthme depuis. Le formaldéhyde est un agent promoteur de l'asthme. Qui est très bien connu.

Dans les régions urbaines, actuellement, les restes d'insectes morts, et plus particulièrement des coquerelles, sont la principale cause des crises d'asthme. Selon des chercheurs en médecine, plus de la moitié des crises d'asthme seraient dues à cette cause, et pourtant le traitement approuvé par le gouvernement fédéral pour se débarrasser des coquerelles consiste à les rendre malades au moyen d'un neurotoxine. Elles rampent dans les murs, y meurent et continuent de causer des crises d'asthme tant que leurs corps subsistent.

• 0930

En revanche, si on se sert de borax, l'insecte cherche à boire, il sort de son trou et meurt à proximité de l'évier de cuisine, où on peut le ramasser et s'en débarrasser dans les toilettes. On s'en débarrasse ainsi vraiment, pour le plus grand bienfait des personnes souffrant de la présence de coquerelles.

Si j'ai un conseil à vous offrir, c'est que les premières substances chimiques auxquelles il faudrait appliquer le principe de remplacement, d'après mon expérience, sont celles qu'on utilise pour lutter contre les insectes à l'intérieur, et plus particulièrement les coquerelles. Il existe de nombreux produits approuvés contenant du borax qui répondent à tous les besoins. Toutefois, le diazinon et le chlorpyrifos sont toujours homologués parce qu'ils n'ont pas été retirés et cela même s'il existe des produits de remplacement moins toxiques.

C'est ce que je voulais ajouter, en m'appuyant sur mon expérience personnelle. Il y a tant de gens qui souffrent inutilement pour ces raisons. On connaît des produits qui font parfaitement l'affaire; c'est simplement qu'on n'a pas retiré l'agrément des autres produits chimiques.

Le président: Merci, monsieur Sankey.

Madame Land, vous avez la parole.

Mme Peggy Land (coprésidente, Campagne pour la réduction des pesticides): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs.

Essentiellement, je ne fais qu'acquiescer totalement à ce que Melissa et Julia Langer ont déjà dit. Ce n'est pas par hasard. Les dangers des pesticides pour la santé et l'environnement sont une source de vives inquiétudes et nous devons tous être au courant du problème.

J'aimerais souligner certains des grands points de mon mémoire, mais tout d'abord j'aimerais vous dire que la Campagne pour la réduction des pesticides est un réseau de militants répartis dans tout le pays—il s'agit en fait de bénévoles qui font du travail dans leur milieu. La campagne est dirigée par un comité comptant des représentants du Sierra Club du Canada, du Fonds mondial pour la nature Canada, de la Toronto Environmental Alliance, du Congrès du travail du Canada et des Citizens for Alternatives to Pesticides.

Je vais maintenant vous présenter mon point de vue en tant que coordonnatrice de cette campagne. J'aimerais faire valoir les points suivants.

D'abord, il y a aujourd'hui plus de 70 collectivités dans tout le Canada qui ont des règlements et des politiques pour protéger les gens contre l'exposition inutile à des pesticides d'usage domestique. C'est en grande partie grâce aux efforts de simples citoyens vraiment bouleversés. Plus ils en apprennent sur les pesticides, plus ils trouvent la situation troublante. La diffusion d'information crédible et fiable à la population se fait très difficilement. Les gens se tournent vers nous pour en obtenir et nous essayons de lui en fournir.

Deuxièmement, je pense vraiment que le rôle de Santé Canada en matière de réglementation des pesticides laisse beaucoup à désirer. Des gens qui utilisent encore des pesticides ont tendance à nous dire: «Le gouvernement ne nous laisserait pas utiliser ces produits s'il ne les estimait pas sans danger.»

Par ailleurs, le ministre de la Santé et le directeur de l'ARLA disent souvent qu'on évalue les pesticides alors qu'en réalité on ne fait qu'examiner l'information qui est fournie par les fabricants. Santé Canada, à ma connaissance, n'a plus de laboratoire d'évaluation des pesticides depuis 1993. Or, dans quelle mesure peut-on faire confiance à Santé Canada quand ce ministère donne à croire qu'il évalue les pesticides? Il ne se fait pour l'instant aucune évaluation indépendante qui donnerait aux gens l'assurance qu'il y a lieu effectivement de considérer ces produits comme légaux au Canada.

Troisièmement, les simples citoyens ne peuvent pas obtenir d'information de l'ARLA. J'ai fini par obtenir le dépliant dont Melissa a parlé. Je pense que c'est une innovation à l'ARLA et on donne un numéro 1-800 où l'on peut appeler pour obtenir de l'information. Toutefois, le numéro 1-800 ne figure pas dans l'annuaire téléphonique et on ne s'empresse certainement pas de le faire largement connaître. Si malgré tout vous le composez, vous devez savoir exactement ce que vous devez demander.

• 0935

Il est encore plus difficile d'essayer d'obtenir de l'information des fabricants de pesticides qui placent ces petites étiquettes portant un numéro de téléphone que l'on peut composer. Par exemple, un médecin m'a appelé de Goderich pour savoir ce qu'était le Par 3. Je n'avais pas de dossier sur ce produit et j'ai donc appelé la société Weed Man et d'autres encore mais je n'ai obtenu que des renseignements contradictoires et en plus parfaitement inutiles. Une réceptionniste m'a dit qu'elle devait s'informer puis m'a dit que c'était le nom du produit d'entretien des pelouses. Je lui ai demandé ce que c'était exactement, et elle m'a dit que c'était le nom du produit, tout comme du bicarbonate de soude, c'est du bicarbonate de soude. M'a-t-on éclairée? Allons!

Vers qui le citoyen peut-il se tourner après avoir obtenu de tels renseignements? C'est vraiment préoccupant.

Quatrièmement, les pesticides sont plus toxiques qu'on veut bien nous le laisser croire. Melissa a parlé des préoccupations que suscitent les produits dits inertes. J'ai ici une liste sur laquelle le Sierra Club a mis la main et qui provient de l'ARLA. Elle est très longue. Il y a là des milliers de produits chimiques dont on autorise l'utilisation dans différents produits, y compris des pesticides.

On y trouve des agents cancérigènes vraiment dangereux comme des solvants, des pesticides, du toluène, du xylène, du plomb, du naphtalène, de l'huile diesel, et d'autres encore. On trouve de ces produits dans les pesticides. Le pesticide même peut ne représenter que 1 p. 100 de l'ingrédient dit actif, pourtant tous ces autres ingrédients sont protégés par la loi du secret, sous prétexte qu'il s'agit d'information commerciale confidentielle. Cette liste doit être connue, et je me ferai un plaisir de vous en faire part si vous voulez en prendre connaissance.

Le président: Madame Land, avez-vous déjà remis cette liste au greffier?

Mme Peggy Land: Oui. Je l'ai fait analyser par un biochimiste et elle l'a annotée, précisant que seulement un très petit nombre de ces produits ne sont pas inquiétants au point de vue toxicologique. Je n'en ai qu'un exemplaire, et je vous demanderais de me le rendre par après.

Cinquièmement, les ouvriers qui appliquent les produits d'entretien pour pelouses risquent grandement d'être soumis à une surexposition. Voici une photographie que j'ai prise d'un ouvrier en train d'appliquer un traitement à une pelouse. Nous en avons tous déjà vu à l'oeuvre. Il ne porte aucune protection visible. Cet ouvrier porte une simple salopette en coton, les manches roulées jusqu'aux coudes. Je pense qu'il porte des bottes, mais il n'a ni gant, ni protection faciale. Il vaporise du Par 3. L'information sur l'étiquette, la seule qu'il peut consulter, indique qu'il faut éviter de respirer les émanations du produit—c'est assez vague—et qu'il faut porter des vêtements protecteurs.

Il y a une chose qui préoccupe grandement un bon nombre d'entre nous—et je pense que cela devrait préoccuper tout le monde—, c'est que sous le régime du SIMDUT, le système d'information sur les matières dangereuses utilisées au travail, l'information sur les pesticides fait l'objet d'une exemption. Ce qui veut dire que quelqu'un qui travaille pour ChemLawn n'a pas à être informé de la nature véritable de la protection qu'il ou elle devrait avoir ni des signes et des symptômes d'une surexposition. Il me semble tout à fait malveillant de faire en sorte que ces personnes qui sont exposées ne sachent pas ce qu'elles doivent faire pour se protéger et qu'elles ne connaissent ni les signes ni les symptômes d'une surexposition.

Je vais vous décrire certains des signes et des symptômes d'une surexposition au Par 3, par exemple. Cela se trouve sur les fiches signalétiques sur la sécurité du produit. Ces fiches, appelées MSDS, ne sont peut-être pas très connues. Elles sont fournies par les fabricants, et j'ai obtenu celle-ci par l'intermédiaire de l'ARLA parce que je savais quoi demander. Comme la plupart des gens n'ont jamais entendu parler de ces feuillets MSDS, comment voulez-vous que l'on sache les demander? Les symptômes d'une surexposition sont la perte d'appétit, la nausée, des vomissements, un état de tension généralisé, la faiblesse musculaire, des difficultés respiratoires, une forte irritation des yeux et des lésions à la cornée, mais un simple citoyen ou son médecin n'établit pas nécessairement un lien entre ces symptômes et l'utilisation de pesticides.

• 0940

Les symptômes et les signes de surexposition pour des pesticides d'usage courant comme le malathion et Dursban—Dursban c'est l'autre nom que l'on donne au chlorpyrifos—il s'agit là d'insecticides d'usage courant. Ces insecticides sont des neurotoxines; ils ralentissent la propagation de l'influx nerveux dans l'organisme. Ces signes et symptômes sont les étourdissements, les maux de tête, un manque de coordination, un état de faiblesse, des vomissements, la diarrhée, des secousses musculaires, des convulsions, un oedème pulmonaire, un arrêt cardiaque, et la mort.

Mais qui fait le rapprochement quand des maisons ont été traitées pour en faire disparaître les termites ou que des pelouses ont été traitées contre les pissenlits? Comment les médecins peuvent-ils savoir? Comment peuvent-ils faire ce rapprochement?

Ce ne sont là que quelques-unes des préoccupations que j'ai et qui m'ont été communiquées par des gens dans tout le Canada qui veulent savoir comment éviter ces expositions et que faire si cela se produit et comment le savoir.

Un autre fait inquiétant tient à l'absence de mesures législatives exigeant un préavis lorsqu'une propriété privée va être traitée, et de plus la réglementation concernant les avis à fournir après le traitement est tout à fait insuffisant. Je pense que cette information devrait être largement diffusée. Je m'inquiète qu'elle ne le soit pas.

Je suis prête à répondre à vos questions. Merci.

Le président: Vous voulez commencer, monsieur Chatters?

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Merci, monsieur le président.

Merci de comparaître devant le comité pour nous faire part de vos préoccupations. Certaines de vos déclarations sont pour le moins troublantes. Je pense que la plupart des Canadiens veulent avoir l'assurance que Santé Canada travaille dans leur intérêt et les préserve des dangers des pesticides et des autres toxines qui se trouvent dans l'environnement et je m'inquiète de vous entendre dire que Santé Canada ne fait pas son travail et que la protection de la santé humaine et de l'environnement n'est pas sa priorité.

Je vous demande donc simplement ceci: Si c'est votre avis, alors que doit-on changer à Santé Canada et à l'ARLA pour qu'ils travaillent pour les Canadiens et qu'ils donnent aux Canadiens l'assurance que Santé Canada les protège effectivement et n'a pas d'autres intérêts?

Dans le cas de ce que vous dites à propos des ouvriers qui assurent l'entretien des pelouses et des moyens de protection qu'ils utilisent, et tout le reste, je ne suis pas certain d'accepter entièrement votre vision des choses. Je ne pense pas que l'on puisse protéger les gens contre eux-mêmes. J'ai travaillé pendant des années dans le secteur agricole. Aujourd'hui, tout au moins dans le secteur agricole de ma province, on ne peut pas acheter de pesticides à vaporiser ni pour combattre les ravageurs sans détenir un permis d'opérateur antiparasitaire. Cela suppose beaucoup de temps consacré à se renseigner sur les symptômes d'une exposition aux pesticides et aux herbicides et à trouver l'information dont vous avez parlé au sujet de la composition du produit et de la façon de se protéger et de protéger les autres d'une exposition à la dérive et aux émanations de ces produits.

Je suis donc assez sceptique dans le cas des affirmations et de certaines des accusations que vous formulez. Pour ma part, ce qui me préoccupe c'est comment nous pouvons changer Santé Canada pour donner aux Canadiens, et à vous-mêmes, l'assurance que Santé Canada remplit le rôle que tout le monde s'attend à le voir remplir.

• 0945

Mme Peggy Land: À propos de ce que vous dites au sujet de mes affirmations, je lis ce qu'indiquent les fabricants sur les fiches signalétiques MSDS. Il est vrai qu'il revient aux producteurs agricoles et aux propriétaires et à quiconque se sert de ces produits de les appliquer selon les instructions fournies, mais je sais par expérience qu'on ne peut éviter de respirer leurs émanations.

Il y a deux semaines, je marchais le long d'une rue, une rue à quatre voies, où quelqu'un vaporisait de l'autre côté ce que je pense être du Dursban. L'odeur rappelait beaucoup celle des diluants à peinture, comme l'expliquait un type à la télévision, lorsque l'on a vaporisé dernièrement à Nepean un produit pour supprimer les coléoptères. J'étais à plus de cent pieds de distance et il ne ventait pas. Ces émanations se propagent dans l'air. Même s'il avait porté un masque ou un respirateur, comme on le prescrit clairement sur le feuillet de renseignements MSDS... Nous sommes tous exposés à ces produits.

M. David Chatters: Sans aucun doute. Je ne le nie pas. Je vis dans une région rurale, et en juin et au début de juillet presque tous les matins, très tôt, quand on est dehors, on peut sentir les odeurs de pesticides.

Mme Peggy Land: Oui, nous connaissons ces odeurs. Donc, nous inhalons ces produits, n'est-ce pas?

M. David Chatters: Je suppose que l'odeur ne me nuit pas beaucoup, puisque Santé Canada autorise la vaporisation de ce produit et que cela ne me nuit pas.

Mme Peggy Land: J'ai le regret de dire que je pense que vous êtes un peu naïf.

M. David Chatters: Très bien.

Mme Peggy Land: Je suis une professionnelle des soins de santé. Je suis physiothérapeute et j'ai bel et bien une formation en soins de santé et je sais qu'en toute logique à la suite d'expositions répétées de sources multiples... La dernière chose dont on a besoin c'est de respirer ou d'inhaler ces produits et d'être exposé à un plus grand nombre encore.

Je proposerais donc que l'on supprime tous les produits chimiques pour l'entretien des pelouses. Nous n'en avons aucun besoin. Ma pelouse est magnifique, et je n'emploie aucun produit chimique pour l'entretenir. Il n'y a pas de produit chimique toxique qui soit absolument essentiel aux pelouses pour leur donner belle apparence et je ne parle pas que d'apparence. Nous nous passons facilement de produits chimiques pour notre pelouse depuis des années.

M. David Chatters: Je veux bien, mais qu'il s'agisse de produits chimiques pour l'entretien des pelouses ou de borax contre les coquerelles, si ces substances inoffensives et inertes fonctionnent tout aussi bien que les produits toxiques, pourquoi tout le monde ne s'en sert-il pas? Bien franchement, je ne pense pas qu'ils donnent d'aussi bons résultats que les produits toxiques, ou alors comment se fait-il que l'on se serve d'un produit hautement toxique, de substances dangereuses quand le borax ferait tout aussi bien l'affaire.

Mme Peggy Land: D'accord. Je pense que John aimerait répondre. Il y a d'autres organismes utiles, les nématodes, qui peuvent s'en prendre aux insectes de façon très efficace. Mais John, je pense, pourrait peut-être vous répondre.

M. John Sankey: Certainement. J'aimerais simplement établir trois faits, dont deux que je présente en ma seule qualité de scientifique de très longue date.

Le domaine de l'évaluation des substances toxiques s'appelle la toxicologie, et on y traite exclusivement des organismes reproductibles, c'est-à-dire des organismes sains.

Quand on a une population de rats de laboratoire et qu'on procède à un test d'une substance toxique, et je ne parle pas que des pesticides, on rejette de cette population tout rat qui montre le moindre signe de maladie. On n'accepterait pas un rat auquel serait administré un immunodépresseur. Pas plus qu'un rat auquel on administrerait un médicament antidouleur. On écarterait les sujets atteints d'arthrite, d'asthme ou d'allergies, ou de toute maladie similaire. Le premier problème scientifique qui se pose, c'est que l'évaluation de l'innocuité des pesticides et de toute exposition à des toxines ne se fait que sur un sous-ensemble de la population, le sous-ensemble des sujets qui sont considérés comme étant en parfaite santé.

Or, je dirais que tout au mieux, dans la région relevant du service de santé d'Ottawa-Carleton, il y a en tout temps environ 15 p. 100 de la population urbaine qui ne correspond pas à la définition toxicologique uniformisée du sujet pouvant être soumis à une évaluation. Il s'agit de personnes qui ont un syndrome clinique identifiable et qui ne pourraient pas faire partie d'une population soumise à un test en laboratoire, et on n'inclut pas, soit dit en passant, les femmes enceintes; les femmes enceintes sont considérées comme étant en bonne santé. On n'inclut pas les enfants; ils sont censés être en bonne santé. Je parle de gens qui prennent des médicaments ou dont l'état de santé fait qu'ils réagissent aux toxines bien autrement que la population moyenne.

• 0950

J'espère ne pas avoir pris trop de temps, mais c'était mon premier point. Quand on dit que quelque chose est considéré comme respectant un niveau de sécurité acceptable, on considère seulement qu'il s'agit d'un niveau de sécurité acceptable pour un sous-ensemble d'humains, et il y a des milliers de personnes pour qui cette évaluation n'est pas appropriée et n'est pas exacte.

M. David Chatters: Je ne veux pas vous interrompre, mais je n'aurai bientôt plus de temps et je veux que quelqu'un réponde à ma question: comment pouvons-nous changer Santé Canada pour le rendre digne de la confiance qu'il inspire aux Canadiens et lui permettre de remplir le rôle que nous comptons tous le voir remplir? Y a-t-il moyen de le faire sans interdire totalement l'utilisation de toute substance toxique dans les pesticides ou quoi que ce soit?

M. John Sankey: Vous parlez là d'une question administrative, vraiment, et pour avoir passé ma vie dans l'administration... Je ne vois pas comment Santé Canada pourrait regagner la confiance du public. Il doit être plus ouvert.

J'ai participé à plusieurs conférences qui sont prétendument organisées pour obtenir de l'information de gens comme moi qui sommes au courant. Je lis les résumés qui sont faits des témoignages présentés, et dans tous les cas ils sont méticuleusement modifiés—juste un petit mot par ci ou par là—de sorte qu'ils finissent par dire que tout est sans danger. Je ne fais nullement confiance au moindre résumé d'aucun des témoignages que j'ai donnés à Santé Canada—parmi ceux que j'ai vus—et je sais que je ne suis pas le seul à le penser. Je ne sais pas comment vous, en tant que législateurs, pouvez remédier à cela.

Le président: Merci, monsieur Chatters.

La parole est à M. Lincoln, qui sera suivi par M. Herron, Mme Catterall et M. Reed.

Monsieur Lincoln, c'est à vous.

M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Diriez-vous que l'accès à toute l'information, y compris celle qui porte sur les produits inertes et sur la notification préalable, afin que le public ait entièrement accès à l'information sur les composantes des pesticides et sur leur homologation, constituerait l'élément principal ou l'un des éléments très importants de tout amendement?

Mme Peggy Land: Certainement. Mieux on est informé, mieux cela vaut. Je ne pense pas que nous puissions prétendre être des consommateurs informés, pas du tout. Même si l'on évite d'utiliser des pesticides, nous y sommes quand même exposés. Alors, plus on a d'information, meilleure est l'ouverture, mieux cela vaut.

M. Clifford Lincoln: J'aimerais poser une question à Mme McDonald.

Je m'intéresse à ce qui se passe dans les municipalités au Québec, à commencer par Hudson et ma municipalité ainsi que celle de ma circonscription qui borde cette région. Un bon nombre d'entre elles ont adopté le même type de règlement sur les pesticides, Hudson étant allée plus loin encore et ayant fait l'objet d'une contestation, comme vous le dites, en cour supérieure et en cour d'appel. Savez-vous si l'on constate la même tendance dans le reste du Canada? Est-ce que votre organisation ou une organisation environnementale sait combien de municipalités ont adopté des règlements interdisant l'utilisation de pesticides chimiques pour l'entretien des pelouses?

Mme Melissa McDonald: Je crois que Peggy pourrait vous fournir des données plus à jour, mais je crois savoir qu'aux dernières nouvelles 70 municipalités canadiennes appliquaient un règlement similaire. Le Québec en compte le plus grand nombre, avec, il me semble, 35 municipalités. En outre, la Nouvelle-Écosse vient d'emboîter le pas récemment, la province donnant aux municipalités le pouvoir de faire appliquer un règlement de ce genre. Peggy pourrait vous donner des renseignements plus récents.

Mme Peggy Land: Une précision d'abord, un règlement n'est pas nécessaire dans les provinces où l'on a estimé qu'on ne peut pas légiférer en matière de propriété privée. Je dirais qu'il s'agit tout simplement de politiques qui ont été adoptées par des conseils scolaires ou par des conseils municipaux, si bien que sur ma liste de 70, je crois que les règlements sont tous des règlements pris au Québec jusqu'à maintenant; il y a quelque 35 collectivités qui ont des règlements en place, si cela peut vous aider. Les autres se trouvent dans les neuf autres provinces du Canada.

M. Clifford Lincoln: Voici ce à quoi je veux en venir. Je sais qu'au Québec, quand la Loi sur les pesticides a été adoptée, l'intention du législateur était de faire en sorte qu'il existe un règlement provincial applicable à toute la province. Mais la réglementation se fait toujours attendre, comme vous le savez, depuis 1987. Elle n'a jamais été publiée, malheureusement. C'est pourquoi les municipalités devaient agir seules—et c'est un nombre infime à comparer aux quelque 1 500 municipalités qui existent au Québec.

• 0955

Je me demandais si, avec votre recommandation, nous devrions rendre la contestation anticonstitutionnelle; autrement dit, déclarer que toute contestation est anticonstitutionnelle. Mais si la Cour suprême maintient le règlement de Hudson, ce que je crois qu'elle fera probablement, pensez-vous que vos organisations pourraient avantageusement s'adresser à la Fédération des municipalités canadiennes, étant donné que la loi provinciale n'interdit pas l'utilisation de pesticides pour l'entretien des pelouses et qu'il revient aux municipalités—qui dans un grand nombre de cas le font—d'exercer des pressions pour en arriver à un règlement qui s'appliquerait à toutes les municipalités?

Mme Melissa McDonald: Certainement. Ce sera certainement une bonne façon de s'y prendre. Si j'hésite à porter l'affaire au niveau fédéral c'est qu'à la cour d'appel on a invoqué le fait que parce qu'il s'agit d'une loi municipale d'une part et d'un produit légalement approuvé au niveau fédéral, d'autre part, ce règlement serait essentiellement jugé anticonstitutionnel. C'est pourquoi je m'adresse à la présente instance—je lui demande d'examiner cet argument précis, qui va certainement être repris dans la contestation à la Cour suprême.

Mais c'est évidemment au niveau municipal que nous voulons concentrer nos efforts, et ce serait certainement une voie à envisager.

Mme Peggy Land: Si je comprends bien, le problème en Ontario, que Melissa connaît beaucoup mieux que moi, tient au fait que la Loi sur les pesticides a préséance sur la Loi sur les municipalités. Alors peu importe comment on peut essayer de protéger la santé des citoyens—et les citoyens mêmes peuvent vous demander d'interdire l'usage de produits chimiques sur les propriétés privées—, la Loi sur les pesticides a préséance. Ce qui revient à dire que tant qu'il s'agit d'un produit légal, on ne peut l'interdire.

M. Clifford Lincoln: Mais je pense vraiment que si la Fédération des municipalités canadiennes en arrivait à une résolution, cela exercerait une très forte pression sur les provinces. Les municipalités ont beaucoup de poids.

Mme Peggy Land: Oh, ce serait bon. C'est vraiment ce que nous essayons de faire. Nous essayons de rallier les municipalités, et en ce qui concerne les autres organisations qui pourraient partager cet avis, plus nous serons nombreuses, mieux cela vaudra.

M. Clifford Lincoln: Mais à la fédération il y a maintenant des gens qui militent fermement en faveur de l'environnement, comme Louise Comeau...

Mme Peggy Land: Oui.

M. Clifford Lincoln: ... et il me semble que ce serait peut-être quelqu'un à qui s'adresser.

Mme Peggy Land: Parfaitement.

Mme Melissa McDonald: Nous allons ajouter cette suggestion à notre liste.

Le président: Merci, monsieur Lincoln.

Madame Catterall, je vous en prie. Non—excusez-moi. C'est le tour de M. Herron.

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Est—Nepean, Lib.): Oui, c'est ce que je pensais.

Le président: Je m'excuse.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Vous m'avez presque froissé, monsieur le président.

J'aimerais revenir à ce que M. Lincoln a dit au sujet de la Fédération canadienne des municipalités, car je pense que c'est là un outil très utile que vous pourriez utiliser pour faire avancer la gestion des pesticides partout au pays.

Dans ma circonscription de Fundy—Royal, Quispamsis est la plus grande municipalité. La mairesse, Mme Leslie Hamilton-Brown, a fait preuve de beaucoup de dynamisme en ce qui concerne cette initiative particulière. Elle est surtout motivée par l'aspect de la santé humaine. Plusieurs citoyens dans ma circonscription manifestent une intolérance au milieu provoquée dans de nombreux cas par les pesticides et d'autres produits chimiques dans l'environnement—et je sais qu'il en va de même dans chacune des 301 circonscriptions du pays.

Nous avons ici... Je me demande parfois, lorsqu'on parle de Réformistes et de Conservateurs, où sont les différences, et c'est un très bon exemple de cela ici.

Voici ce que nous savons: les pesticides joueront fort probablement un rôle commercial au sein de l'économie, mais nous savons également que l'absence de pesticides jouera également un tel rôle puisque le consommateur exige des produits biologiques, sans pesticide, et il n'y a pas nécessairement, dans le domaine de l'agriculture, un conflit économique entre l'utilisation et la non-utilisation des pesticides.

En fait, la loi actuelle sur les pesticides a 30 ans; j'avais 5 ans à l'époque. Nous avons appris certaines choses ces dernières années; et par conséquent, nous aurions procédé très différemment. Nous sommes le seul pays de l'OCDE qui ne tient pas de données sur les quantités de pesticides vendus au pays. En fait, il y a aussi la République slovaque qui ne le fait pas, donc nous sommes en bonne compagnie.

• 1000

Il faut réduire au minimum notre empreinte environnementale dans l'entretien des pelouses—voilà le genre de choses auquel il faut sensibiliser le consommateur, l'incidence des pesticides servant à l'entretien des pelouses. Il peut y avoir des personnes, telles que les voisins, dont la vie peut être menacée par l'exposition à certains pesticides. Cela semble exagéré, mais c'est un fait.

Les pesticides sont probablement l'un des très rares produits chimiques que nous homologuons alors que nous savons qu'ils sont conçus pour détruire. Voilà leur raison d'être. J'ai été tout à fait étonné de vous entendre dire, il y a quelques instants, qu'il n'est pas nécessaire d'inclure les pesticides dans le SIMDUT. Vous avez dit qu'il n'était pas nécessaire d'avoir un feuillet de renseignements complets pour les pesticides que nous avons au pays.

Qui est responsable du SIMDUT? Qui légifère le règlement associé au SIMDUT? Est-ce le gouvernement fédéral, les provinces, ou...?

Mme Peggy Land: Je n'en suis pas certaine.

M. John Sankey: C'est Santé Canada.

M. John Herron: Afin d'augmenter la confiance des consommateurs canadiens, on pourrait peut-être exiger que soient inclus dans le SIMDUT, non seulement les ingrédients actifs, mais tous les ingrédients, afin d'obtenir l'homologation. Est-ce que ce serait là une mesure appropriée?

Mme Peggy Land: Je pense qu'il a été convenu dans l'entente sur Action 21 découlant de la conférence de Rio que le Canada participerait et que les normes seraient uniformisées à l'échelle mondiale, mais cela ne se fera pas avant plusieurs années. Entre-temps, ces types sont là qui à tous les jours, peut-être pendant six mois, arrosent. Cela ne saurait être qualifié que d'exposition excessive à ces produits, sans compter que certaines personnes sont particulièrement sensibles aux plus petites quantités. Donc je partage votre avis.

M. John Herron: Comment pouvons-nous exercer des pressions sur la communauté internationale si nous ne pouvons pas nous-mêmes montrer patte blanche, si nous ne pouvons pas dire que nous faisons cela chez nous? Je pense donc que ce serait un pas dans la bonne voie. C'est ce que nous avons fait dans le cas des pluies acides, lorsque nous avons présenté le protocole sur les pluies acides en 1987. Nous avons fait le ménage chez nous, dans une grande mesure, avant d'affronter les Américains à ce sujet. Je pense donc que c'est quelque chose que nous devons faire.

J'aimerais mentionner qu'à mon avis, la Fédération canadienne des municipalités constitue un allié utile, tout comme il faut demander que Santé Canada inclue les règlements nécessaires si nous décidons qu'il nous faut peut-être un projet de loi plus à jour.

On me dit que j'ai raté des effets de théâtre l'autre jour. Cela fait deux ou trois ans que nous avons un projet de loi...?

Le président: Il n'y a pas d'effets de théâtre dans ce comité.

M. John Herron: Non, non.

Le président: C'est très sérieux.

M. John Herron: Donc il y a un projet de loi qui représente une mise à jour à la Loi sur les pesticides mais nous ne l'avons tout simplement pas déposé. Pensez-vous qu'une façon de redonner confiance dans la gestion des pesticides au pays serait de préparer un projet de loi rédigé ce siècle-ci plutôt qu'il y a 30 ans?

Mme Peggy Land: Oui.

Le président: Avez-vous des commentaires?

Mme Peggy Land: Encore une fois, vous avez mentionné que la Fédération canadienne des municipalités manque de fonds, tout comme les organisations que j'aide dans le cadre de la Campagne pour la réduction des pesticides. C'est finalement une question de sous. Je sais que l'ARLA a le mandat de faire connaître les autres options et les pesticides en général, mais je pense que le financement a été jusqu'à présent un très grave problème. Voilà pourquoi c'est en veilleuse. On peut également dire je pense, que l'industrie domine.

Il y a donc de nombreux problèmes.

Le président: Merci.

Madame Catterall, je vous en prie.

Mme Marlene Catterall: En vous écoutant, ce qui me frappe, c'est que cela semble un méli-mélo, même pour les consommateurs qui veulent se protéger. Le fabricant donne certains renseignements. L'ARLA, vous me dites maintenant, a publié une brochure, mais qui la voit? Si je téléphone et je demande de l'information, je dois savoir exactement ce que je veux.

Permettez-moi de vous donner un exemple très concret et vous demandez comment, à votre avis, cela devrait fonctionner.

• 1005

La moitié des pelouses de l'ouest de la ville sont ravagées par un vers blanc. Pour ma part, j'aimerais savoir quoi faire pour éliminer ce problème sans avoir recours à des produits chimiques, car je ne l'ai pas fait jusqu'à présent. J'aimerais que tous aient l'information, s'il y a une autre façon de s'attaquer à ce problème.

Qui devrait assumer cette responsabilité? Lorsque l'on sait qu'il y a un problème comme celui-là, assez répandu—qui va sans doute s'aggraver encore l'an prochain—qui devrait faire savoir quelles sont les options?

M. John Sankey: Santé Canada, à mon avis, devrait être à l'avant-plan car ces vers blancs n'existent pas uniquement dans Ottawa-Carleton. Ils existent partout au pays. Santé Canada devrait jouer un rôle plus actif dans la promotion de la meilleure santé de tous les Canadiens.

En passant, c'est là la mission du service de santé d'Ottawa-Carleton pour lequel je travaille bénévolement. Je n'entends jamais Santé Canada dire qu'il lui faut «promouvoir la meilleure santé de tous les Canadiens». Ce serait un excellent début.

Mme Marlene Catterall: Comme propriétaire qui souhaite éviter les produits chimiques, je veux savoir à qui je peux téléphoner pour demander ce que je dois faire pour lutter contre les vers blancs. Est-ce que je devrais m'adresser à l'ARLA et non pas à ma municipalité, par exemple?

M. John Sankey: Dans Ottawa-Carleton, vous pouvez en fait téléphoner aux bureaux régionaux pour obtenir ce genre de renseignements. Je sais parce que j'en ai rédigé une bonne partie. Mais combien de personnes le savent?

Je sais que l'ARLA a un numéro 800 depuis au moins 20 ans. Je ne l'ai jamais vu publié. La plupart des gens ne connaissent pas son existence.

Il n'y a pas d'endroit unique où téléphoner pour obtenir des renseignements de ce genre. Dieu sait que l'on peut tenter sa chance sur l'Internet, mais on y trouve de tout, de tous les genres.

C'est un domaine où il n'y a pas de milieu. L'essentiel des renseignements sont fournis par les fabricants de produits chimiques ou par des gens qui, exaspérés de devoir s'en remettre aux fabricants de produits chimiques, tombent dans l'excès inverse. Pour le propriétaire ordinaire, il est très difficile d'obtenir une information digne de foi. Il faudrait que Santé Canada serve de centre d'échange d'information et devienne la source ultime de renseignements pour tout ce qui concerne la santé de tous les Canadiens.

Mme Marlene Catterall: Votre observation concernant la santé des travailleurs de cette industrie me semble très inquiétante. Quelle serait la meilleure chose à faire dans ce domaine?

Mme Melissa McDonald: Eh bien voici: s'il est impossible de modifier la loi de façon à permettre aux municipalités de réglementer l'utilisation des pesticides sur les terrains privés, ce qui ferait naturellement diminuer considérablement les applications de ces produits, il faut en revenir à la sensibilisation. À ce niveau, nous avons mis en évidence une nette insuffisance de l'information disponible. On en revient toujours à cet aspect-là. L'information n'est pas disponible.

Je peux peut-être répondre à votre question concernant l'information disponible sur les vers blancs. Ce qu'on veut, c'est de l'information de première main. Il existe une division des nouvelles stratégies. Elle devrait financer la recherche et diriger les forces motrices qui vont trouver les solutions disponibles, de façon que l'information soit acheminée et diffusée.

C'est donc un problème de manque d'information, mais par ailleurs, on ne connaît pas toujours toutes les solutions de remplacement, car il n'y a pas de force motrice pour les mettre en valeur. Voilà ce que je voulais dire à ce sujet.

Mme Marlene Catterall: Je sais qu'Agriculture Canada travaille beaucoup sur les solutions biologiques à ces problèmes, mais je ne sais pas à qui Agriculture Canada transmet l'information. À ma connaissance, cette information n'est pas transmise à l'ARLA, qui serait en mesure de la diffuser, si elle existait.

M. John Sankey: Agriculture Canada s'occupe d'agriculture. Il s'agit ici d'une question de santé en milieu urbain. Les deux sujets ont toujours été bien distincts.

Mme Marlene Catterall: Un vers est un vers, qu'il se trouve dans une zone agricole de Saskatchewan ou dans le centre-ville d'Ottawa.

• 1010

M. John Sankey: Pas tout à fait. Dans les deux cas, c'est un problème s'il se trouve dans une zone urbaine. Je veux dire par là qu'on ne trouve pas les mêmes infestations dans les cultures que dans les gazons privés, car les cultures ne sont pas soumises au même niveau très élevé de monoculture exclusive.

Parlez-en à un agriculteur qui sème de la fléole et dites-lui ce qu'on met sur un gazon ensemencé de pâturins; il va tomber sans connaissance. Les pratiques sont très différentes, de même que les cultures. Un champ de fléole n'est jamais piétiné comme un gazon.

Mme Marlene Catterall: Ce que je veux dire, monsieur Sankey, c'est que si Agriculture Canada fait de la recherche pour trouver des solutions biologiques au problème d'infestation, ces travaux intéressent autant les citadins que les ruraux, et cette recherche devrait être financée par l'intermédiaire de l'ARLA. Et à ma connaissance, il n'existe actuellement aucun mécanisme de cet ordre.

Je crois que j'ai utilisé mon temps de parole, monsieur Caccia.

Le président: Merci.

Monsieur Reed, s'il vous plaît.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je fais partie de ceux qui considèrent qu'on ne devrait jamais utiliser un pesticide à des fins cosmétiques. La formation en agronomie m'a appris que lorsqu'on applique un pesticide, on n'obtient pas uniquement une réaction immédiate; il se produit toutes sortes d'autres phénomènes par la suite. Et je suis bien convaincu qu'en milieu urbain, non seulement à cause de la densité de population, mais aussi à cause des quantités de produits chimiques qui sont employés, la situation est très préoccupante.

Je suis étonné d'entendre dire que cette information n'est pas diffusée comme elle devrait l'être et qu'elle n'est pas disponible partout. J'ai déjà été dans le secteur agricole, et j'ai donc un point de vue différent. Quand je veux me renseigner sur un produit chimique, je m'adresse au Collège ontarien d'agriculture et j'y trouve les renseignements nécessaires.

Si vous me permettez de remonter en arrière, il y avait autrefois un mécanisme qui permettait de se débarrasser des produits jugés inacceptables. Je ne sais pas si vous le savez, mais nous avons interdit l'utilisation du DDT dans ce pays à cause de ses effets secondaires. C'était très efficace pour éliminer les vers et les mouches, mais les abeilles mouraient elles aussi, et le produit est à l'origine de l'amincissement des coquilles d'oeuf qui a décimé les oiseaux rapaces, et ainsi de suite.

Au fil des années, nous avons connu différents produits. Lorsque j'étais enfant, j'ai fait de l'arrosage dans un verger commercial; je répandais de l'arséniate de plomb, c'est-à-dire de l'arsenic et du plomb, et j'en avalais un peu lorsque la tête du vaporisateur était enlevée. Ensuite, on a décidé qu'il ne fallait pas laisser des résidus de métaux lourds dans le sol et lorsque je suis arrivé au collège agricole de Guelph, on avait trouvé la solution. C'était le mercure, et on a vaporisé des produits au mercure... mais on ne le fait plus non plus.

Ce que je veux dire, c'est qu'on apprend avec le temps... On a fini par trouver des solutions satisfaisantes et on en trouvera encore d'autres, à mesure que les connaissances progresseront; on découvrira ce qu'il faut faire et ce qu'il ne faut pas faire. Je suis très impressionné par les stratégies de remplacement, en particulier si on peut les renforcer, et si on parvient à informer la population.

J'ai une propriété de 80 acres, traversée par deux cours d'eau, et je fais très attention aux conséquences de mes décisions. Je me demande s'il est opportun de légiférer sur les propriétés privées, car je suis déjà régi par toutes sortes de lois. Prenons le cas du zonage. Il me permet de faire certaines choses sur ma propriété, mais pas certaines autres. Je me demande pourquoi on tient tant à légiférer sur les propriétés privées.

• 1015

Mme Melissa McDonald: Le problème en Ontario—et je ne peux parler spécifiquement que de l'Ontario—c'est le régime législatif. La loi ontarienne sur les pesticides réglemente l'utilisation des produits et elle comporte une disposition selon laquelle toute mesure qui entre en conflit avec cette loi—et nous pensons que ce sera le cas d'un règlement municipal qui réglementerait l'utilisation des produits chimiques—est considérée comme nulle et non avenue. C'est là le principal problème en Ontario.

Ce qu'il faut, c'est trouver une municipalité qui soit prête à faire une tentative. On peut discuter de la question, mais de toute façon, il va falloir que nos municipalités soient prêtes à y consacrer des ressources et à relever le défi en adoptant un arrêté de ce genre, car il faudra certainement le défendre devant un tribunal, comme c'est le cas au Québec.

M. Julian Reed: Si on légifère dans ce domaine, on va avoir un problème, car dans l'éventualité où on trouverait une solution de remplacement satisfaisante, on risque de ne pas pouvoir l'appliquer à cause de la loi.

Mme Melissa McDonald: Au niveau municipal ou au niveau provincial?

M. Julian Reed: Au niveau municipal.

Mme Melissa McDonald: Encore une fois, si les autorités provinciales estiment que l'arrêté municipal entre en conflit avec la loi sur les pesticides, c'est là qu'il y aura un problème, puisqu'il est question d'utilisation d'un produit et que cela relève censément de la législation provinciale.

M. Julian Reed: Supposons que j'essaye d'utiliser un produit biodégradable. Si je dois utiliser un pesticide, j'utiliserais du roténone ou du pyrèthre, qui sont d'origine végétale et qui disparaissent progressivement. Je n'utilise pas ces produits sur mon gazon, mais je les utilise sur mes pommes de terre, etc.

Si on adopte ce genre d'arrêté municipal, je me demande quelles en seront les conséquences pour l'application de ces solutions de remplacement.

Mme Melissa McDonald: Tout dépend du contenu de l'arrêté, ce qu'il interdit, ce qu'il autorise, par exemple, l'utilisation de pesticides sur les mauvaises herbes nuisibles ou dans les situations d'urgence. Tout dépendra, à mon avis, des définitions figurant dans l'arrêté municipal en question.

M. Julian Reed: C'est très intéressant, car je suis sensible au fait que l'information n'est pas diffusée.

Le président: Merci, monsieur Reed.

Nous allons écouter Mme Torsney, puis la présidence, qui terminera le premier tour. Madame Torsney.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci.

Je pense moi aussi que les consommateurs doivent être informés, qu'ils doivent prendre leurs décisions en fonction de la meilleure information disponible et que toute l'information doit être disponible. J'étais un peu inquiète en écoutant votre exposé, madame McDonald, mais j'ai pu vérifier certains éléments dans le texte; vous avez dit, je crois, que le borax n'était pas un produit chimique, et dans votre document, on le présente comme une méthode moins toxique. Mais de toute évidence, si le borax tue les coquerelles, c'est un produit toxique.

Mme Melissa McDonald: John pourra sans doute répondre avec moi.

Je vais vous dire ce que c'est que le borax. C'est un produit minéral. Le borate de sodium est extrait du sol. Il n'y a jamais de solution facile. Il provient de mines à ciel ouvert, situées pour la plupart dans le sud-ouest des États-Unis et en Amérique du Sud. Je sais qu'il y a différentes explications sur la façon dont ce produit tue les coquerelles. Selon l'une de ces théories, le borax coupe leur carapace de chitine.

Une voix: Quoi?

Mme Melissa McDonald: C'est la carapace extérieure de la coquerelle. Ce n'est qu'une théorie, et John pourra peut-être vous expliquer les autres concernant l'action du borax.

M. John Sankey: La première question, c'est le mécanisme causal: pourquoi le produit est-il toxique?

Les organiphosphates sont toxiques pour l'humain et pour les insectes parce qu'ils agissent sur le système nerveux qui est commun aux deux espèces. Le borax est presque totalement inoffensif pour nous mais il est très toxique pour les coquerelles, car il agit sur un système présent chez les coquerelles et qui est totalement absent chez les mammifères.

• 1020

Le borax est très efficace sur tous les insectes dotés d'un exosquelette. En réalité, leur squelette et leur peau se confondent. Il s'agit d'une substance appelée la chitine, que l'on peut prononcer de façon différente selon que l'on parle en latin ou en grec. Au contact du borax, cette matière devient perméable à la vapeur d'eau, et la coquerelle se déshydrate. Elle a soif et meurt de déshydratation.

Ce mécanisme n'existe absolument pas en dehors des insectes dotés d'un exosquelette. Le borax est donc un exemple de produit qui peut être extrêmement toxique pour les coquerelles, tout en étant presque totalement inoffensif pour l'être humain. C'est pourquoi le borax est légalement enregistré en tant que pesticide. C'est obligatoire, puisqu'il a un effet sur les parasites.

Mme Paddy Torsney: Je n'ai pas tellement eu l'occasion de lire des étiquettes de borax ces derniers temps—Dieu soit loué, je n'ai pas de coquerelles—, mais on n'y trouve pas le symbole de la main de squelette, ni la moindre indication sur le danger d'absorption pour les enfants. Selon vous, il n'y a aucun danger à entrer en contact avec du borax, n'est-ce pas?

M. John Sankey: Le borax est un ingrédient important d'un grand nombre de savons à lessive. C'est pourquoi on ne lui applique pas le symbole de la tête d'un mort. Il faudrait qu'un enfant en absorbe une quantité importante pour que... Évidemment, un enfant peut toujours avaler n'importe quoi, mais il faut admettre que les enfants mangent rarement du savon. C'est assez désagréable.

Mme Paddy Torsney: On s'en servait autrefois comme d'une menace, n'est-ce pas?

M. John Sankey: Il faudrait en manger une quantité importante avant d'avoir des problèmes, et de toute façon, ça ne serait pas le genre de problème qui tue la coquerelle.

Mme Paddy Torsney: Il faudrait indiquer dans le compte rendu qu'on a menacé plusieurs attachés de recherche avec du savon.

Je suis heureuse de vous entendre dire que ce produit est moins toxique, car tout produit qui s'échappe dans notre écosystème peut devenir toxique—que ce soit de trop grandes quantités de vinaigre, d'acide ou d'autre chose—dès qu'on parle de produits de nettoyage. Tout produit en trop grande quantité peut être nocif, et je suis heureuse que vous ayez apporté cette précision. C'était ma question principale.

Le président: Merci, j'ai moi aussi quelques questions à poser.

Par l'intermédiaire de notre greffier, l'ARLA a fait parvenir aux membres du comité un document de plusieurs pages contenant des questions et des réponses, sous la forme d'une note du Dr Franklin en date du 24 août 1999. J'aimerais, en temps utile, avoir vos commentaires sur cette note. Aujourd'hui, j'aimerais aborder avec vous un certain nombre de questions, ainsi que deux autres qui dépassent la portée de cette note.

Pouvez-vous vous prononcer sur le point de vue de l'ARLA en matière diététique? Est-ce que vous connaissez la procédure suivie dans l'évaluation des régimes conçus en fonction de l'âge? Ils tiennent compte des habitudes alimentaires de la population. On y calcule l'absorption de certains résidus alimentaires. Est-ce que vous connaissez bien cette terminologie, et pouvez-vous nous donner quelques explications?

M. John Sankey: C'est tout à fait différent de ce dont nous parlons. Ici, il n'est pas du tout question de l'évaluation du danger de l'absorption de résidus mesurés en parties par million. Nous parlons de personnes exposées à des arrosages de solution à 10 p. 100. C'est tout à fait différent. En tant que scientifique, je n'ai aucune objection contre la teneur générale de ces évaluations diététiques. C'est dans le domaine de l'exposition directe à des produits d'arrosage que je m'interroge sur les méthodes de l'ARLA.

• 1025

Le président: Parfait, merci.

La question suivante concerne les fameuses fiches signalétiques du fournisseur. Madame Land, pouvez-vous expliquer à notre comité les raisons pour lesquelles, d'après votre mémoire, les travailleurs ne sont pas mis au courant de ces fiches? Je fais référence à la deuxième page de votre mémoire.

Mme Peggy Land: Je ne peux me l'expliquer, mais je sais que c'est vrai, et à mon avis, c'est inacceptable.

Le président: Mais s'agit-il d'un usage courant, ou d'un cas particulier?

Mme Peggy Land: Non, c'est un usage courant en vertu duquel les pesticides sont exclus du SIMDUT. Je ne connais pas les détails, mais je sais que c'est vrai.

Le président: Savez-vous depuis quand les pesticides sont exclus du SIMDUT?

M. John Sankey: Depuis le début du SIMDUT. Il s'agit d'une restriction initiale qui n'a jamais été levée.

Je signale que les fiches signalétiques connues dans l'administration désignent des documents régis par le SIMDUT. Comme les pesticides sont exclus du SIMDUT, leurs fiches signalétiques ne sont pas soumises aux mêmes règles. En réalité, elles sont fournies volontairement par les fabricants et ne sont pas soumises aux exigences du SIMDUT. On parle quand même de fiches signalétiques, mais elles sont fournies volontairement, et non obligatoirement, comme le prévoit la loi sur le SIMDUT.

Le président: Est-ce que vous savez pourquoi les pesticides ont été exemptés du SIMDUT?

M. John Sankey: C'est l'administration, monsieur. À l'époque, c'est Agriculture Canada qui contrôlait les pesticides, et rien d'autre ne pouvait pénétrer sur son territoire. Le SIMDUT a toujours relevé de Santé Canada. Je crois que c'est l'explication la plus simple et la plus authentique de ce qui s'est passé.

Le président: Finalement, êtes-vous en mesure de vous prononcer sur l'information du site Web de Santé Canada que l'on peut consulter pour se renseigner sur les produits conçus pour éliminer certains insectes?

Mme Melissa McDonald: Je sais que j'ai consulté les renseignements concernant la division des nouvelles stratégies, et j'ai été très déçue de voir les renseignements disponibles à l'époque. La dernière fois, c'était sans doute l'été dernier, et je ne sais pas s'il y a eu des améliorations depuis lors. Je n'y ai rien trouvé de nouveau.

Le président: Est-ce que vous pourriez faire part au comité, par écrit, de votre opinion sur le dernier site Web de Santé Canada?

Mme Melissa McDonald: Sur le site actuel? Vous voudriez que je le consulte de nouveau?

Le président: Oui.

Mme Melissa McDonald: Certainement.

Le président: Et n'hésitez pas à faire des suggestions.

Mme Melissa McDonald: Certainement.

Le président: Madame Catterall.

Mme Marlene Catterall: Les fiches signalétiques sont rédigées par les fabricants. À votre connaissance, est-ce que quelqu'un vérifie si une information correspond bien au produit?

M. John Sankey: Il y a des procédures prévues dans le cadre du SIMDUT. Je ne sais pas s'il y en a pour les pesticides.

Mme Marlene Catterall: Donc, personne ne vérifie si l'information fournie par le fabricant est pertinente du point de vue de la sécurité des travailleurs ou des utilisateurs.

M. John Sankey: Les avocats des fabricants le font sans doute, mais je ne pense pas que l'ARLA le fasse, du moins pas à ma connaissance.

Mme Marlene Catterall: Ne serait-il pas préférable que l'approbation des pesticides exige que l'équivalent d'une fiche signalétique soit fourni à chaque consommateur?

M. John Sankey: Si. Je ne vois pas pourquoi les pesticides ne sont pas assujettis au SIMDUT. L'obstacle administratif initial n'existe plus aujourd'hui.

Mme Marlene Catterall: Mais indépendamment du SIMDUT, si un consommateur veut acheter un produit pour l'utiliser sur son gazon, il devrait savoir, me semble-t-il, quelle est la nature de ce produit et quelles sont les mesures à prendre pour se protéger contre ses effets nocifs.

M. John Sankey: C'est certain.

• 1030

Mme Marlene Catterall: Il me semble également que toute entreprise qui utilise un tel produit devrait être obligée par la loi à fournir toute l'information aux employés qui la manipulent. Je ne sais pas si cela relève de la compétence fédérale ou provinciale. Je crains que ce soit de compétence strictement provinciale.

M. John Sankey: Je pense qu'on peut déjà prendre des mesures importantes dans le cadre des dispositions actuelles du SIMDUT. Si les pesticides y étaient assujettis—et je crois qu'ils relèvent intégralement de la compétence fédérale—, on aurait déjà fait un grand pas.

Le président: Monsieur Reed.

M. Julian Reed: Est-ce que les produits chimiques utilisés en milieu urbain sont du même genre que ceux qu'utilise un opérateur licencié dans un secteur rural? Dans les exploitations agricoles, l'application de certains pesticides est soumise à des exigences assez sévères. Pour exploiter un verger commercial, par exemple, l'utilisateur des produits doit avoir une licence. Il doit suivre un cours et savoir exactement ce qu'il fait. Est-ce la même chose en milieu urbain?

M. John Sankey: On a deux situations différentes. Tout d'abord, les pesticides enregistrés destinés à un usage agricole ont normalement des formulations et des noms totalement différents de ceux qui sont destinés à une utilisation urbaine, même lorsqu'il s'agit essentiellement du même produit chimique. C'est la différence de concentration qui justifie des régimes de licence différents au niveau provincial.

Il existe un certain nombre de pesticides utilisés en milieu urbain et qui ne peuvent être appliqués que par un utilisateur licencié pour des raisons qui ne concernent pas directement la santé humaine. Par exemple, il faut une licence pour appliquer ces produits dans un but lucratif. Mais celui qui en achète pour en mettre sur son propre terrain n'a pas besoin de licence, même s'il s'agit exactement du même produit. Autrement dit, la situation en milieu urbain est beaucoup plus floue qu'en milieu agricole.

Je m'occupe de ces produits depuis 30 ans, et moi aussi, j'ai été élevé à la campagne. J'ai très peu de préoccupations concernant la gestion actuelle des pesticides en milieu agricole ou forestier. Mes préoccupations concernent uniquement le domaine urbain, et l'exposition directe et accidentelle à des produits d'arrosage qui, à mon avis... Il ne s'agit pas de nourrir des affamés ni de protéger les forêts pour construire des maisons. Il ne s'agit même pas de protéger la santé humaine, comme on le fait avec certains pesticides utilisés dans l'eau potable. Ce à quoi je me consacre, c'est l'exposition directe aux pesticides en milieu urbain, et ce sujet n'a jamais été traité par Agriculture Canada, parce qu'il ne relève pas de son domaine. Santé Canada aurait dû s'en occuper lorsqu'on lui a confié les pesticides, mais il nous a laissé tomber. Sa réglementation visant à protéger la santé humaine de l'exposition directe aux pesticides est moins utile que celle d'Agriculture Canada du temps où les pesticides étaient sous sa responsabilité.

Merci, monsieur le président.

Le président: Monsieur Herron.

M. John Herron: Ce que nous voulons établir très clairement, c'est que si l'information n'est pas diffusée, c'est parce qu'elle n'existe pas. L'information n'est pas exigée.

J'ai une question très simple. Si l'on veut obtenir de l'information, disons, sur un pesticide pour gazon, faut-il s'adresser à Santé Canada, à la province ou à une ONG environnementale comme le Sierra Club pour obtenir une analyse?

Mme Peggy Land: Une analyse chimique?

M. John Herron: Oui. Qui est susceptible de fournir rapidement la meilleure information sur une gamme de pesticides? Faut-il s'adresser à la province? Faut-il s'adresser au gouvernement fédéral—à Santé Canada? Faut-il consulter une ONG environnementale comme le Sierra Club?

Mme Peggy Land: Je reçois plusieurs appels par jour de gens de toutes les régions du Canada qui veulent obtenir des renseignements de base, comme ce médecin de Goderich qui me demandait ce qu'est le Par 3. C'est un domaine très vaste, et il est bien difficile de savoir où s'adresser. Nous essayons d'obtenir des renseignements. Je lui ai envoyé par télécopieur les fiches signalétiques du produit. J'ai fait de mon mieux, mais c'est un travail considérable, et plus je donne de réponses, plus je reçois de questions. Je ne peux pas m'en sortir.

• 1035

M. John Herron: Je vous pose cette question parce que c'est une situation que nous avons connue dans mon propre bureau. Je connais une femme de Quispamsis, dans ma circonscription, qui s'appelle Patty Donovan, et qui obtient davantage de renseignements auprès des ONG environnementaux concernant les effets des pesticides sur la santé qu'on ne peut en obtenir auprès des organismes gouvernementaux.

Mme Peggy Land: Oui, Patty est l'une de nos militantes.

M. John Herron: L'application des pesticides est administrée par les provinces, et ce sont elles qui en ont défini les règles. Lorsqu'on fait de l'arrosage chimique dans différentes régions et que certains administrés essayent de contester l'administration provinciale en disant qu'ils ne veulent pas qu'on utilise tel ou tel pesticide, la province s'empresse de répliquer: «Le produit a été homologué par Santé Canada.» Ne voit-on pas là que Santé Canada empêche véritablement les gouvernements provinciaux d'intervenir pour faire en sorte que les pesticides soient appliqués d'une façon qui respecte la santé humaine?

Mme Melissa McDonald: Il faut considérer les essais auxquels les produits sont soumis. C'est là qu'on constate de graves insuffisances au niveau fédéral. Lorsque des gens disent qu'ils ne veulent pas d'un produit alors que les autorités provinciales affirment qu'il peut être utilisé, tout dépend des tests auxquels le produit a été soumis.

Dans l'état actuel des choses, c'est l'industrie qui présente à Santé Canada les mesures prises pour se conformer aux normes d'homologation. Santé Canada en prend connaissance et accepte ou rejette le produit. Mais je vous ai indiqué toutes les insuffisances du régime de tests. Bien souvent, les effets à long terme ne sont pas recherchés, pas plus que les effets des combinaisons de produits ni les changements chimiques observés lorsqu'un produit entre dans la chaîne alimentaire.

CBC a évoqué cette semaine une étude récente dans laquelle on disait que même si les pesticides sont testés en laboratoire, leur formule moléculaire change une fois qu'ils sont libérés dans l'environnement. Dans une revue scientifique bien connue, on parlait de molécules, droitières ou gauchères, et selon qu'elles tombent d'un côté ou de l'autre, les conséquences pouvaient différer considérablement. On ne fait aucun test à ce sujet. Les produits sont testés en laboratoire, mais ils ne sont pas testés dans la nature. Nous n'avons pas suffisamment d'information à ce sujet.

Et naturellement, il faut faire confiance aux résultats de tests annoncés par l'industrie. Je sais qu'il y a eu des incidents bien documentés où l'information avait été falsifiée. C'est donc une autre carence importante.

M. John Herron: Je voudrais poser deux brèves questions de la part de l'opposition officielle de fraîche date.

Une voix: Ça s'annonce mal!

M. John Herron: Je pense qu'en fait de cette façon nous sommes en train de préparer un meilleur avenir pour le Canada et de toute façon...

Des voix: Oh, oh!

M. John Herron: Que vous sachiez, se sert-on actuellement de pesticides contenant des ingrédients actifs ou autres, qui justifieraient qu'ils soient inclus dans la liste des toxines de l'annexe 1 de la LCPE mais qui ne le sont pas parce qu'ils n'ont pas été examinés depuis quelque 30 ans?

M. John Sankey: Cette question est d'ordre juridique et non pas scientifique. Excusez-moi mais je ne connais pas la liste dont vous parlez.

Mme Melissa McDonald: Je ne pense pas pouvoir répondre à cette question.

Mme Peggy Land: Assurément, le 2,4-D contient des dioxines forcément contaminantes. Ce ne sont pas les dioxines les plus toxiques et il est fort probable, à mon avis, que le 2,4-D a été dispensé de l'application des dispositions de la LCPE et est encore autorisé. La formule contenant de l'amine est utilisée en agriculture et celle qui contient de l'ester est d'usage courant—ou c'est peut-être le contraire, je ne me rappelle plus très bien.

Une voix: C'est le contraire.

Mme Peggy Land: D'accord. Il est donc important de savoir quelles dioxines se trouvent dans une formule ou l'autre.

Je m'empresse d'ajouter que des recherches récentes démontrent que l'effet de certains pesticides est bel et bien amplifié de façon inattendue par les nitrates que contiennent les engrais chimiques. C'est tout un aspect de la question qui n'a pas été examiné. Toutefois, des recherches sérieuses ont été effectuées là-dessus. Ainsi, la méthode de recherche, en plus d'être contestable, est inadaptée, sans compter l'absence d'exposition réelle. Il est donc très difficile de calculer une quantité exacte dans ces conditions.

• 1040

M. John Herron: Une dernière question, monsieur le président. Quand on fait l'analyse des effets d'un pesticide sur la santé humaine, on peut croire qu'il y a un niveau minimal de tolérance chez les plus vulnérables comme les enfants, les femmes enceintes...

Mme Peggy Land: Les personnes âgées.

M. John Herron: ... et que cela est pris en compte.

En outre, d'un point de vue scientifique, les pesticides étant biocumulatifs, il faut prévenir les gens qui s'en servent pour entretenir leur pelouse. Peut-on garantir que l'effet biocumulatif d'un pesticide sera pris en compte par Santé Canada dans tout régime éventuel concernant les pesticides?

M. John Sankey: Je pense que cela est déjà fait. Le problème est complexe. Par exemple, quand on administre du chlorpyrifos en laboratoire à un rat en parfaite santé, isolé de tout, on ne constate pas d'effets biocumulatifs, mais, jumelé à autre chose, cet agent chimique peut l'être. Nous en avons un exemple tout à fait manifeste, ce que l'on a appelé le syndrome de la guerre du Golfe, qui s'est révélé être le résultat de la combinaison tout à fait néfaste de trois agents chimiques apparemment sans aucun rapport entre eux. Ces trois agents ont eu une interaction telle qu'elle a causé des problèmes de santé catastrophiques à quelque 50 000 combattants qui se trouvaient sur ce théâtre de guerre. Voilà le problème. Le régime actuel d'analyse cherche à détecter la biocumulation simple mais on ne cherche pas celle qui est le résultat de la combinaison d'un agent avec d'autres substances.

M. John Herron: Merci, monsieur le président.

Le président: Le président aimerait aussi poser quelques questions si les membres du comité ont terminé. Madame Torsney.

Mme Paddy Torsney: Je me demandais si les centres antipoison faisaient face au problème des matières inertes. Il serait peut-être utile de leur demander si, en possession de ces renseignements, les médecins prodigueraient des soins différents en cas d'empoisonnement. Il serait peut-être bon d'approfondir cette question.

Le président: Merci.

Monsieur Reed, une brève question.

M. Julien Reed: Je serai bref, monsieur le président.

Madame Land, vous avez parlé de l'effet des nitrates conjugués à certaines pesticides. Vouliez-vous dire par là que les engrais sont plus efficaces dans ces conditions? Quel est le résultat de cette combinaison, d'après ce que vous en savez?

Mme Peggy Land: Je n'ai pas l'étude sous les yeux mais je pourrais vous la faire parvenir. Si je ne m'abuse, les effets sont amplifiés, et bien sûr les dangers aussi.

M. Julian Reed: Autrement dit, dans un contexte agricole, on peut en diminuer la quantité, n'est-ce pas?

Mme Peggy Land: Oui, je suppose.

M. Julian Reed: Merci.

Le président: Cela est tout à fait dans la même veine que les deux questions que je voulais poser à Mme Land. Que cherchez-vous à accomplir avec votre campagne de réduction des pesticides? Pourriez-vous nous citer des pourcentages? Par exemple, pourrait-on obtenir les mêmes résultats en employant moitié moins de pesticides?

Mme Peggy Land: L'objectif est essentiellement de supprimer toute utilisation injustifiée des pesticides en milieu urbain. Je songe ici à la campagne de réduction des pesticides, qui vise avant tout l'usage courant. À notre connaissance, dans la plupart des cas on peut trouver à coup sûr un produit de lutte antiparasitaire biologique et plus salubre. Donc, je vous répondrai que oui, notre but est que l'on cesse tout épandage de pesticides en milieu urbain à des fins d'embellissement.

• 1045

Le président: Vous vous limitez donc au milieu urbain, n'est-ce pas?

Mme Peggy Land: C'est l'objet de notre campagne, oui. Certains pesticides toutefois, comme le Roundup, sont utilisés intensément en milieu urbain et dans les fermes. Il est difficile de départager quand il s'agit du même pesticide.

Le président: Je voudrais parler maintenant du calcul de la toxicité des pesticides. Il semble que l'examen de ce calcul s'impose. Dois-je conclure que vous n'avez rien à dire sur le calcul de la toxicité? Si c'est le cas, à qui, outre l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, devrions-nous nous adresser pour obtenir des renseignements dans ce domaine?

M. John Sankey: Désolé, je ne peux pas vous aider. La question des pesticides est trop vaste et je ne me suis pas du tout intéressé à la question des résidus en quantité infime dans les aliments... Je ne sais pas et je ne peux pas vous conseiller.

Le président: Trouvez-vous qu'il est important de calculer la toxicité?

M. John Sankey: Cela suppose deux choses tout à fait différentes. Tout d'abord, il y a le calcul des résidus en quantité infime de pesticides que l'on peut tolérer dans les aliments. C'est un calcul que personnellement je ne conteste pas.

Deuxièmement, on procède aussi au calcul de la toxicité d'une exposition directe, c'est-à-dire un contact direct avec les humains, et dans ce cas-là, je pense que les calculs concernant le danger potentiel ou la vulnérabilité relative sont tout à fait inappropriés.

Le président: Qu'est-ce qui vous fait dire cela?

M. John Sankey: Tout d'abord, je dois vous dire que j'ai travaillé au Conseil national de recherches dans le service des mesures physiques et ma tâche était de relever les inaptitudes des mesures afin d'éviter de certifier par erreur qu'un instrument de mesure offrait une précision qu'en réalité il n'offrait pas.

C'est donc sans perdre cela de vue que je dis qu'il faut tout d'abord cerner la population visée. S'agit-il de toute la population du Canada? De 99 p. 100? Ou est-ce seulement 85 p. 100, comme c'est le cas actuellement? Cela devient une question politique. Dès lors, dans ces conditions, si la norme de toutes les mesures de Santé Canada visait à 99 p. 100 des Canadiens, on constaterait un changement énorme dans l'évaluation d'un grand nombre de nos pesticides.

Le président: Peut-on conclure d'après ce que vous dites qu'un des éléments capitaux dans ce cas-ci est la définition de la population visée?

M. John Sankey: C'est cela.

Le président: Et la définition que vous en donnez est différente de celle qui a cours actuellement, n'est-ce pas?

M. John Sankey: C'est cela, oui, elle est très différente.

Le président: Selon vous, il faudrait englober toute la population, dans un échantillon, plutôt que d'exclure certains segments, n'est-ce pas?

M. John Sankey: C'est cela. Quant à moi, j'inclurais tout le monde, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle.

Le président: Comme il n'y a pas d'autres questions, nous allons lever la séance. Nous vous remercions infiniment de votre aide. Rendez-vous mardi en huit.