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ENSU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 1er juin 1999

• 0808

[Français]

Le président (l'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs.

Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous procédons à une étude de l'utilisation et de la gestion des produits de lutte antiparasitaire au Canada,

[Traduction]

y compris une évaluation de la performance de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire en matière de prévention de la pollution et de protection de l'environnement et de la santé humaine.

Nous voudrions examiner diverses questions, dont celle des mandats mixtes attribués aux agences. Nous voudrions aussi voir si ces mandats sont efficaces et s'ils servent l'intérêt public.

• 0810

L'ARLA n'est pas le seul organisme doté d'un mandat mixte. Il y en a d'autres. Il est par conséquent très probable que les constatations que nous ferons au cours de cet examen fournissent des renseignements utiles sur les mandats mixtes en général et sur leur efficacité.

Nous n'avons pas l'habitude de prendre des initiatives en réaction aux médias mais je tiens à attirer votre attention sur un article d'Andrew Duffy, paru hier (le 31 mai) dans l'Ottawa Citizen. Cet article tombe à point nommé et il peut nous être utile.

L'auteur y cite de nombreux passages du dernier rapport du Commissaire à l'environnement, M. Emmett.

Il cite notamment le passage suivant:

    «Le besoin de réévaluer les pesticides est officiellement reconnu par le gouvernement fédéral depuis plus de 13 ans et nous nous attendions à ce qu'il élabore un programme à cet effet, de dire M. Emmett. Nous avons constaté que le gouvernement n'a pas agi et qu'il n'a pas rempli ses engagements.»

Nous n'en étions pas conscients au moment où nous avons décidé de commencer à examiner la question, c'est-à-dire vers la fin-avril ou le début-mai.

L'auteur ajoute que:

    [Le ministre de la Santé] a admis [...] que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire a traversé des «crises de croissance» depuis qu'elle est sous la responsabilité de son ministère, soit au cours des quatre dernières années.

Il dit plus loin:

    «Je crois que la critique de M. Emmett est assez juste: aucune stratégie globale et soigneusement coordonnée n'a été mise en place en ce qui concerne les pesticides», a déclaré M. Rock aux journalistes.

Dans un autre passage, l'auteur écrit:

    M. Emmett a lancé l'avertissement suivant: «Sans un programme de réévaluation efficace, nous n'avons aucune garantie que les Canadiens ne soient pas exposés à des risques inacceptables.»

C'est assez catégorique.

L'article mentionne également, comme il se doit, l'opinion des entreprises concernées:

    Dans une lettre envoyée dernièrement à M. Rock, les représentants des principales entreprises de ce secteur affirment que l'agence met en péril la compétitivité des entreprises canadiennes.

    Ils veulent que l'agence accepte les réévaluations faites par d'autres pays, comme les États-Unis, tout en axant ses efforts sur une rentabilisation accrue de ses activités.

L'auteur de l'article cite également l'opinion des ONG. Voici celle de Mme Julia Langer, de Toronto:

    Les écologistes comme Mme Langer [...] affirment qu'«un système d'homologation des pesticides plus rapide et moins coûteux est incompatible avec la recherche d'une solution aux problèmes causés par l'utilisation de pesticides au Canada».

    D'après Mme Langer, la loi comporte de nombreuses lacunes, dont le fait que:

    Les pesticides sont évalués d'après le degré d'exposition et de sensibilité à un produit de l'homme adulte moyen. Cette façon de procéder ne tient pas compte du tout de la vulnérabilité particulière des enfants et des femmes ni de l'exposition totale d'un individu.

• 0815

Enfin, l'article de M. Duffy nous apprend que:

    On promet des changements depuis une dizaine d'années et M. Rock est, paraît-il, en train d'examiner les premières modifications importantes que le gouvernement se propose d'apporter à la Loi sur les produits antiparasitaires depuis 1969.

Je recommande cet article à ceux et à celles qui ne l'ont pas lu parce qu'il constitue en quelque sorte une entrée en matière intéressante pour la séance d'aujourd'hui et pour les séances ultérieures.

Nous accueillons aujourd'hui Mme Claire Franklin, directrice exécutive de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, Mme Charalyn Kriz, directrice de la Division de l'évaluation de l'impact sur l'environnement et M. John Smith, gestionnaire de projets principal.

Je vois deux autres personnes à la table, madame Franklin. Vous pourriez peut-être nous les présenter. Vous pourriez ensuite faire un exposé assez court pour nous laisser le temps de poser des questions.

Au nom de mes collègues, je vous souhaite à tous la bienvenue.

Mme Claire Franklin (directrice exécutive, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire): Merci beaucoup, monsieur Caccia.

Je vous présente Rod Raphael et Steven Clarkson. Ils travaillent tous les deux à la Direction générale de la protection de la santé. Le greffier avait demandé que Santé Canada envoie des représentants de l'ARLA ainsi que d'autres secteurs du ministère, pour avoir des renseignements plus complets sur le rôle qu'il joue dans ce domaine.

Le président: Pourriez-vous ne pas prendre plus de 10 minutes pour faire votre déclaration?

Mme Claire Franklin: Très bien. Nous essayerons, mais nous avions cru comprendre que nous aurions un peu plus de temps que cela.

Le président: Êtes-vous la seule de tout le groupe à prendre la parole?

Mme Claire Franklin: Oui.

Le président: Alors, allez-y.

Mme Claire Franklin: Très bien.

Vous entamez une étude générale sur la lutte antiparasitaire. Étant donné que je suis le tout premier témoin, je vous donnerai quelques renseignements qui vous permettront de situer le sujet dans son contexte. Je crois savoir que vous comptez accueillir également des représentants d'autres ministères au cours de la prochaine semaine.

Les pesticides jouent un rôle crucial dans la société actuelle. Ils permettent aux agriculteurs de protéger leurs cultures contre les parasites et les maladies. Ils permettent d'éviter que les produits alimentaires que nous mangeons soient attaqués par les insectes ou les microbes et protègent nos forêts des pertes catastrophiques que les parasites peuvent y causer. Ils nous permettent également de désinfecter les piscines et de tenir les insectes à l'écart lorsque nous sommes à l'extérieur. L'utilisation de pesticides non toxiques et efficaces est également nécessaire dans de nombreux secteurs industriels.

Les pesticides jouent un rôle important dans notre société en raison de leurs effets biologiques mais ces effets peuvent également poser des risques pour la santé humaine et la salubrité de l'environnement. Par conséquent, les pesticides sont réglementés de façon très stricte aux termes de la Loi sur les produits antiparasitaires. Ils sont longuement mis à l'essai et soigneusement évalués avant que leur utilisation ne soit approuvée. En outre, leur mode d'utilisation est soumis à des conditions particulières.

Avant la création de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, l'administration de la Loi sur les produits antiparasitaires relevait du ministre de l'Agriculture. D'autres ministères fédéraux, à savoir Santé Canada, Environnement Canada et le ministère des Pêches et des Océans, jouaient un rôle consultatif. Aux termes de la Loi sur les aliments et drogues, Santé Canada a imposé des limites sur les quantités de résidus de pesticides acceptables dans les produits alimentaires.

En 1990, un comité multipartite, appelé Comité d'examen du processus d'homologation des pesticides, a examiné le système fédéral d'homologation des pesticides et recommandé d'y apporter des changements importants.

En 1995, l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) a été créée pour donner suite à une recommandation clé du comité en question, portant sur le regroupement des compétences et des pouvoirs en matière d'homologation des pesticides.

Je précise que l'ARLA est, à certains égards, très différente de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. C'est une agence qui fait partie du ministère. Je relève du sous-ministre de la Santé et, par conséquent, du ministre.

L'ARLA s'acquitte de ses responsabilités par le biais de l'administration de la Loi sur les produits antiparasitaires qui demeure le texte législatif le plus important en la matière et lui confère le droit d'interdire la mise en marché de produits réglementés, ou d'ordonner leur retrait, s'ils sont inacceptables en raison des risques qu'ils présentent ou de leur inutilité.

Nous sommes responsables de l'administration de la loi, c'est-à-dire de son exécution et de son observation. La Loi sur les aliments et drogues nous confère également le pouvoir d'établir et d'imposer des limites pour les résidus de pesticides dans les produits alimentaires.

• 0820

Nous assumons nos responsabilités dans le contexte d'une sphère d'activité gouvernementale qui a des incidences sur l'utilisation des pesticides. Des représentants d'autres ministères viendront vous parler de leurs activités dans d'autres domaines que celui de l'homologation des produits antiparasitaires.

Divers ministères, dont Agriculture et Agroalimentaire Canada, Ressources naturelles Canada, Environnement Canada, Pêches et Océans, Santé Canada ainsi que l'ACIA, effectuent des recherches qui portent notamment sur les substances toxiques, l'innocuité des produits alimentaires et l'élaboration de stratégies durables de lutte antiparasitaire.

Environnement Canada, Santé Canada et l'ACIA sont chargés en outre d'établir des règlements relatifs aux substances toxiques et à l'innocuité des produits alimentaires.

Nos activités dans le domaine des pesticides et des substances toxiques en général sont coordonnées avec celles de ces ministères grâce à divers mécanismes. Des protocoles d'entente ont également été mis en place et d'autres sont en voie d'élaboration.

Les gouvernements provinciaux et territoriaux ont également pris certaines initiatives au sujet des pesticides. Les provinces ont depuis longtemps adopté des dispositions législatives et réglementaires en ce qui concerne la vente, l'utilisation et la distribution des pesticides; en outre, elles collaborent avec le gouvernement fédéral.

En 1995, le gouvernement a non seulement créé l'ARLA mais il a également entrepris une ambitieuse réforme du système de réglementation des pesticides s'inspirant des recommandations du comité d'examen qui lui avait notamment recommandé de mettre en oeuvre diverses initiatives stratégiques.

Comme l'a si bien dit le ministre, la réforme d'un système établi est un tour de force du fait qu'il faut non seulement avoir une vision et une stratégie solides pour déclencher le processus mais qu'il faut aussi faire preuve de patience et de persistance pour mener l'entreprise à bien.

La création de l'agence n'a pas été une tâche facile du fait qu'elle nécessitait un regroupement de divers services de trois ministères. Nous avons dû en outre prendre de nombreuses initiatives pour régler des problèmes de nature extrêmement variée. Il n'était pas possible de tout entreprendre en même temps.

Afin de pouvoir surmonter ces difficultés, l'ARLA a élaboré un plan stratégique qui expose l'orientation qu'elle compte prendre pour remplir les engagements du gouvernement. Nous sommes en bonne voie d'atteindre les objectifs qui y sont énoncés.

Les recommandations du comité ainsi que la réponse du gouvernement sont analysées en détail dans le plan stratégique en question. Nous avons évalué les progrès réalisés en ce qui concerne les recommandations que le gouvernement a décidé de mettre en oeuvre.

Une liste des initiatives clés vous a été remise. Je n'en mentionnerai que quelques-unes.

Je tiens par ailleurs à vous signaler que l'agence a fait d'importants progrès depuis sa création, c'est-à-dire depuis quatre ans. Ces progrès sont également décrits dans le plan stratégique.

En ce qui concerne la gestion des risques, l'agence a pris et continue de prendre, en matière d'homologation, des décisions fondées sur des principes solides. Tous les pesticides font l'objet d'une évaluation poussée avant de pouvoir être mis en vente et utilisés au Canada. Toutes les décisions en la matière sont précédées d'une évaluation des risques et de l'utilité du produit, puis un programme spécial de surveillance permet de s'assurer que la loi et les règlements sont observés.

Nous avons mis en oeuvre la politique fédérale de gestion des substances toxiques qui s'applique aux pesticides nouveaux et existants ainsi qu'aux formulants et produits dérivés entrant dans la composition des produits antiparasitaires.

Nous avons considérablement amélioré le processus décisionnel interne en matière d'évaluation des pesticides nouveaux depuis la création de l'agence. Nous sommes en train de mettre en oeuvre un nouveau programme de réévaluation des pesticides existants qui consiste à faire une réévaluation systématique globale de l'innocuité et de l'utilité des produits anciens.

L'ancien système de réévaluation présentait de graves lacunes. Le processus était très long et ne permettait pas de s'assurer rapidement que tous les pesticides étaient conformes aux normes récentes.

Nous avons élaboré une nouvelle approche en matière de réévaluation qui a déjà été soumise à notre Conseil consultatif sur la lutte antiparasitaire, au Comité consultatif de gestion économique et à d'autres ministères pour qu'ils en examinent la structure et le contenu. Les commentaires que nous avons reçus jusqu'à présent seront incorporés à un document appelé «projet de réglementation» sur lequel les intervenants auront le temps de faire d'autres commentaires.

Tel qu'il a été recommandé par l'équipe multipartite en 1990 et approuvé par le Cabinet, le nouveau programme de réévaluation sera fondé sur les examens effectués par la Environmental Protection Agency américaine. Nous nous inspirerons également des examens faits dans d'autres pays si nous estimons qu'ils répondent aux normes que nous comptons appliquer au Canada.

Nos réévaluations seront basées notamment sur des dispositions de la Food Quality Protection Act américaine; elles seront faites en fonction du risque global associé à l'exposition, du risque cumulatif posé par les pesticides ayant un mode d'action analogue et des risques accrus que courent les enfants, et plus particulièrement les tout jeunes enfants.

Nous estimons que, d'ici 2006-2007, tous les pesticides qui avaient été homologués avant 1995 auront été réévalués. L'échéancier correspond à celui de l'EPA.

• 0825

En ce qui concerne l'ouverture et la transparence, domaine dans lequel on nous a demandé également d'apporter des améliorations par rapport au système précédent, nous avons créé plusieurs organismes consultatifs dont le Comité fédéral, provincial et territorial sur la lutte antiparasitaire et les pesticides, le Conseil consultatif sur la lutte antiparasitaire, chargé de faire des recommandations au ministre sur les divers aspects de la réglementation des pesticides et le Comité consultatif de gestion économique. Nous avons en outre des contacts avec d'autres ministères par l'intermédiaire de sous-ministres adjoints spécialement désignés.

Nous avons instauré un processus de consultation sur les modifications à apporter aux lignes directrices, qui permet aux autres ministères et aux Canadiens de donner leur avis.

Nous publions actuellement des notes réglementaires et des projets de décisions réglementaires pour montrer sur quels critères l'agence a fondé les projets de décisions en matière d'homologation de pesticides nouveaux et les changements majeurs qui ont été adoptés au sujet de ceux qui sont déjà homologués. Les autres ministères sont informés de ces décisions par le biais des documents d'information que nous leur faisons parvenir régulièrement.

En outre, l'agence s'est activée également à élaborer une politique sur la réduction des risques. Dans ce contexte, nous avons pris plusieurs initiatives dont nous tirerons les conclusions nécessaires pour rédiger une politique plus générale.

Nous avons déjà instauré plusieurs projets conjoints qui font de la lutte antiparasitaire intégrée la considération majeure sur laquelle les décisions des utilisateurs sont fondées. Il s'agit de déterminer dans quelles circonstances et comment il convient d'utiliser des pesticides ou si d'autres options sont possibles.

Nous avons instauré en outre un programme d'examen conjoint avec l'EPA (agence de protection de l'environnement américaine) qui accélère l'étude des demandes d'homologation pour de nouveaux pesticides qui devraient poser moins de risques que ceux qui sont déjà sur le marché.

Nous avons tenu à instaurer également un programme conjoint d'examen des biopesticides afin d'encourager l'utilisation de produits à base d'agents microbiens et de phérormones qui peuvent remplacer les produits chimiques classiques.

Avec le concours des provinces, nous avons amélioré la formation des applicateurs de pesticides et nous nous efforçons d'intégrer les connaissances pratiques ainsi acquises à une politique de l'agence.

À noter que l'agence a élaboré une stratégie de développement durable avec des échéances précises. Cette stratégie s'inscrit dans le cadre de la stratégie générale de Santé Canada.

En ce qui concerne la base de données nationale sur les ventes de pesticides, plusieurs enquêtes ont déjà été effectuées. Par ailleurs, les provinces recueillent déjà des données et nous possédons en outre des données globales sur les ventes. Nous estimons toutefois que la qualité de ces renseignements peut encore être améliorée. Il serait important d'instaurer une collecte cohérente et systématique des données sur les ventes de pesticides à l'échelle nationale. Nous avons créé un groupe de travail composé de représentants de l'industrie, des ONG, des provinces et d'autres ministères dans le but d'élaborer cette base de données nationale.

J'ai le plaisir de vous annoncer que d'ici deux ou trois semaines, nous serons en possession des résultats du projet pilote de collecte de données qui s'est étalé sur une période assez longue. La base de données sera fonctionnelle vers la fin de l'an 2000 et nous pensons que 2001 sera la première année où l'on fera une collecte systématique des données nationales sur les ventes.

En résumé, l'ARLA a un mandat fort et les compétences voulues pour protéger la santé humaine et l'environnement. Elle est en voie de remplir les engagements du gouvernement en ce qui concerne une réforme du système de réglementation des pesticides. Nous estimons avoir réalisé des progrès rapides dans toutes les initiatives clés que l'on nous avait recommandé de prendre.

Merci beaucoup.

Le président: Merci, madame Franklin. Vous nous avez donné beaucoup de renseignements en 14 minutes seulement.

Vos collègues souhaitent-ils faire des commentaires?

Mme Claire Franklin: Afin de gagner du temps, nous comptions passer directement aux questions, si cela vous convient, monsieur le président.

[Français]

Le président: Thank you. Aucun député de l'opposition officielle n'est présent. Madame Girard-Bujold, je vous invite à poser les premières questions.

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Bonjour, mesdames et messieurs.

Madame Franklin, dans le sommaire de votre exposé, on lit ceci:

    L'ARLA a un mandat fort et les compétences voulues pour protéger la santé humaine et l'environnement.

    L'ARLA est en voie de remplir les engagements du gouvernement pour une réforme du système de réglementation de la lutte antiparasitaire.

Afin de vous acquitter de ces engagements, vous devez sûrement compter sur certains partenaires. Qui sont-ils? De quelle façon ces partenaires interviennent-ils en matière de lutte antiparasitaire durable et comment les rôles sont-ils répartis entre les gouvernements fédéral et provinciaux?

• 0830

[Traduction]

Mme Claire Franklin: Merci beaucoup.

J'aurais peut-être dû insister un peu plus sur le fait que, lorsque l'agence a été créée, tous les employés des ministères faisant partie des services de réglementation des pesticides y ont été mutés. Autrement dit, les fonctionnaires d'Environnement Canada, d'Agriculture Canada et de Santé Canada qui s'occupaient déjà de la réglementation des pesticides ainsi que ceux qui travaillaient dans les services de laboratoires ont été mutés. Par conséquent, notre personnel est très compétent.

Par contre, les activités de recherche ont été maintenues dans les divers ministères concernés. Par conséquent, nous avons passé des protocoles d'entente avec d'autres ministères afin d'instaurer un mécanisme permettant de délimiter très clairement les tâches. Nous essayons d'éviter tout chevauchement et d'utiliser les renseignements produits par d'autres ministères pour prendre des décisions en matière de réglementation.

Les autres ministères en question sont Agriculture et Agroalimentaire Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments, Santé Canada, Ressources nationales Canada et principalement le Service des forêts, Environnement Canada et le ministère des Pêches et des Océans.

En ai-je oublié un?

Ces ministères ont conservé certaines activités qui vous seront décrites au cours des prochains jours par leurs représentants.

Vous savez peut-être déjà que l'homologation ne représente qu'un aspect de l'utilisation des pesticides. Pour obtenir des renseignements sur les modes d'utilisation conformes aux exigences de la lutte antiparasitaire, Agriculture Canada collabore avec les producteurs agricoles. Par contre, les responsabilités en matière d'homologation relèvent uniquement de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire.

Par ailleurs, les provinces sont dotées de dispositions législatives et réglementaires dans ce domaine depuis des années. La réglementation relève du ministère fédéral ou du ministère provincial de l'Environnement, selon les cas. Dans certaines provinces, la responsabilité est mixte et le ministère provincial de l'Agriculture intervient également.

La collaboration avec les provinces est très bonne. Celles-ci ont des responsabilités bien délimitées depuis longtemps. Le Comité fédéral, provincial et territorial nous permet de se réunir une fois par an et nous avons d'autres contacts réguliers avec les provinces.

Sur le plan international, nous sommes surtout actifs dans deux tribunes. L'une est l'ALENA. Comme je l'ai déjà mentionné, nous avons instauré un système d'examen conjoint des demandes d'homologation avec la Environmental Protection Agency. Nous sommes également très actifs au sein de l'OCDE et essayons de faire en sorte que les données soient produites selon des normes internationales acceptables.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Merci, madame.

Le président: Merci, madame Girard-Bujold.

[Traduction]

Je donne la parole à M. Laliberte puis à Mme Kraft Sloan et à M. Lincoln.

M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Merci, monsieur le président.

D'après votre déclaration préliminaire et les autres documents qui nous ont été remis, votre agence comprend quatre principales divisions: celle de la coordination des produits et de la pérennité, celle de l'évaluation de l'impact environnemental, celle de l'évaluation sanitaire et celle des nouvelles méthodes et stratégies réglementaires.

Est-ce exact?

Mme Claire Franklin: Nous avons une autre division qui comprend les services de laboratoires et les services de conformité. Il y en a d'autres également mais ce sont les principales divisions qui interviennent directement dans les décisions en matière d'homologation.

M. Rick Laliberte: Nous n'avons aucun renseignement sur les obligations financières liées aux recettes et aux dépenses de votre agence. Est-il possible d'en obtenir pour savoir comment elles sont réparties entre les diverses divisions et quelles sont vos priorités quant aux activités des diverses divisions?

• 0835

Mme Claire Franklin: Bien sûr. Nous avons délimité les obligations financières des diverses divisions. Chacune de celles que vous avez mentionnées intervient dans les décisions en matière d'homologation et par conséquent, nous avons déterminé l'affectation des ressources en ce qui concerne l'examen des nouvelles demandes, l'évaluation des produits homologués, les nouvelles méthodes et stratégies et la conformité à la loi. Par conséquent, les ressources sont établies de façon à ce que leur répartition entre les divers secteurs soit claire.

M. Rick Laliberte: Imposez-vous des droits d'utilisation en ce qui concerne les services d'homologation?

Comment acquérez-vous les connaissances nécessaires sur les pesticides homologués? Y a-t-il des pesticides non homologués au Canada? Avez-vous des moyens de le vérifier ou des renseignements à ce sujet?

En ce qui concerne la lutte antiparasitaire à l'échelle internationale, d'après le rapport, je crois que le Canada et la République de Slovaquie sont les seuls pays qui ne possèdent pas de base de données. Le projet pilote qui est en cours depuis 1995 est-il un projet régional ou national? Avez-vous ciblé certaines exploitations agricoles dans le cadre de ce projet pour savoir quelle quantité de pesticides on y utilise à l'acre?

Somme toute, nous ne savons pas en quoi consiste ce projet. Pourriez-vous nous donner des renseignements plus précis à ce sujet?

Mme Claire Franklin: En ce qui concerne les questions de droits d'utilisation, nous appliquons le principe du recouvrement des coûts, conformément à la politique gouvernementale. Nous faisons payer deux types de frais, notamment des frais de demande d'homologation. Quand un demandeur désire faire examiner son produit pour savoir s'il peut être homologué, il doit payer des droits. Nous faisons également payer des frais de maintien d'homologation pour tous les produits concernés.

Par conséquent, nous générons des recettes qui couvrent environ 25 ou 30 p. 100 de notre budget total par le biais de ces deux mécanismes de recouvrement des frais.

En ce qui concerne la question des pesticides non homologués, je vous signale que leur vente ou leur utilisation est illégale. C'est pourquoi nous avons un système de conformité qui nous permet de vérifier si l'usage de certains produits n'est pas illégal. Nous avons des inspecteurs dans toutes les régions du pays ainsi que des bureaux régionaux dont le rôle est de nous aider à détecter d'éventuels usages illégaux.

En ce qui concerne les données sur les ventes, comme je l'ai mentionné, nous n'avons effectivement pas de programme élaboré en la matière. Nous sommes en train d'en instaurer un. Nous possédons des renseignements recueillis grâce à quelques sondages et qui donnent des indications sur la quantité de produit utilisé. Les provinces recueillent des informations plus ou moins précises selon les cas sur les ventes de pesticides. Nous supposons toutefois que nous retrouverons le même type de renseignements parmi ceux que nous recueillerons.

Je tiens à signaler que ce ne sont pas tous les pays qui recueillent ce genre de renseignements depuis longtemps. Il est exact que nous ne sommes pas parmi ceux qui possèdent des données exhaustives mais je ne pense pas que nous soyons très en retard sur les autres. Par conséquent, nous sommes impatients de posséder ces renseignements.

M. Rick Laliberte: En ce qui concerne l'harmonisation, je crois que l'on nous a parlé des querelles entre agences et ministères qui revendiquent, je présume, la compétence sur certains produits. Je crois que le différend en question portait sur les canaux d'irrigation utilisés dans certaines provinces des Prairies. Certains produits déversés dans ces canaux sont des produits réglementés par le ministère des Pêches et des Océans, Agriculture Canada, votre agence, les gouvernements provinciaux et fédéral ou par quelque autre organisme.

Pourriez-vous nous donner des renseignements plus précis à ce sujet et nous exposer la nature du problème? Vous devez avoir quelque difficulté à coordonner la mise en oeuvre de toute cette réglementation.

Enfin, pour ce qui est de l'observation de la loi dans le cas des produits non homologués, avez-vous un document indiquant le nombre d'amendes que vous avez imposées ou de sanctions que vous avez prises contre l'utilisation de pesticides non homologués dans ce pays? Avez-vous une liste indiquant le nombre d'interventions?

• 0840

Mme Claire Franklin: Une liste des sanctions?

M. Rick Laliberte: Oui.

Mme Claire Franklin: En ce qui concerne votre commentaire sur l'harmonisation, le produit en question est l'acroléine. Il s'agit d'un herbicide qui est homologué pour l'utilisation dans les canaux d'irrigation.

Je dois dire que ce qui est difficile, c'est que si un produit est appliqué ou se déverse dans un habitat de poisson, le problème relève de la Loi sur les pêches.

Dans ce cas-ci, il s'agissait de déterminer—et il est indéniable que ce fut difficile—si un canal d'irrigation est censé être un habitat de poisson. Certaines provinces le considèrent comme tel alors que d'autres pas.

Par conséquent, nous avons eu beaucoup de difficulté à trancher la question. Pour notre part, nous ne tenons pas à usurper les pouvoirs prévus dans la Loi sur les pêches mais si une province désire utiliser le produit et ne considère pas un canal d'irrigation comme un habitat de poisson, l'usage en est légal.

En ce qui concerne les infractions à la loi, nous ne possédons pas de renseignements à diffusion publique sur les cas qui donnent lieu à des poursuites devant les tribunaux et sur lesquels un jugement final est rendu. En cas d'enquête, et si le ministère de la Justice estime que nous ne possédons pas suffisamment de renseignements ou que l'affaire ne peut être portée devant les tribunaux, je ne pense pas que ces renseignements soient accessibles au public. Je peux toutefois le vérifier et m'assurer que nous fournissons les renseignements qui peuvent être divulgués.

Je vous signale que nous avons adopté une nouvelle tactique qui nous permettra, à mon avis, d'être un peu plus efficaces en matière de répression, à savoir l'instauration imminente d'amendes administratives pécuniaires. Je crois que ce serait pour nous un excellent moyen de répression envers les contrevenants qui n'appliquent pas les produits de la façon recommandée ou qui utilisent des produits illégaux.

Le président: Merci, monsieur Laliberte. Vous pourrez peut-être poser une autre question pendant le deuxième tour.

Je donnerai d'abord la parole à Mme Kraft Sloan, puis à M. Lincoln, M. Gilmour, M. Charbonneau, M. Pratt, Mme Torsney et je poserai enfin des questions à mon tour.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

Dans le document aide-mémoire que vous nous avez remis, sur la page intitulée «Responsabilités de l'ARLA», je vois un point qui dit: «établit des limites pour les résidus de pesticides en vertu de la Loi sur les aliments et drogues».

Je me demande comment ces limites sont établies.

Mme Claire Franklin: Les limites maximales de résidus sont établies en fonction des innombrables renseignements scientifiques que nous avons examinés au sujet des autres aspects toxicologiques. Nous examinons des études sur la toxicité aiguë, la toxicité à court terme ou la toxicité à long terme, des études sur la reproduction, des études de tératologie, des études sur l'action neurotoxique, bref toutes les études toxicologiques accessibles.

Nous avons également des renseignements sur le niveau d'exposition aux résidus qui resteraient sur un produit utilisé selon les instructions et sur l'exposition de diverses couches de la population, à savoir les enfants, les travailleurs et les personnes exposées de façon indirecte.

Par conséquent, nous tenons compte de tous les renseignements que nous avons lorsqu'il s'agit de prendre une décision.

Monsieur le président, je tiens à signaler par ailleurs qu'il est inexact que nous axons nos observations uniquement sur des hommes adultes. Nous possédons des renseignements précis et nous faisons la ventilation. Ce sont surtout les enfants qui nous intéressent parce que les habitudes alimentaires et le type ou le genre d'aliments qu'ils mangent varient au cours des diverses étapes de l'enfance. Nous tenons compte de tous ces renseignements lorsque nous fixons une limite maximale de résidus.

Par conséquent, nous possédons de très nombreux renseignements et prenons très au sérieux les décisions qui autoriseraient la présence de résidus sur les produits alimentaires de consommation.

Mme Karen Kraft Sloan: Pourriez-vous nous remettre certains de ces documents pour que nous puissions y jeter un coup d'oeil?

• 0845

Mme Claire Franklin: Nous pouvons vous fournir ces informations.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci.

Que se passe-t-il lorsque la quantité de résidus est supérieure à la limite?

Mme Claire Franklin: L'Agence d'inspection des aliments prélève des échantillons et examine si les limites maximales de résidus sont dépassées. Elle le fait depuis des années. Ce n'est pas une initiative récente.

Je crois que des représentants de cette agence viendront témoigner. Je peux faire des commentaires généraux mais je suis sûre qu'ils se feront un plaisir de vous expliquer en détail comment ils choisissent leur méthode d'échantillonnage et de vous parler de leurs activités.

Si la quantité de résidus dépassait les limites acceptables, on prendrait des décisions en fonction de la toxicité des résidus ou de leur quantité. Il est possible que l'excédent soit très faible.

Mme Karen Kraft Sloan: Et que se passerait-il s'il s'agissait d'aliments traditionnels dans l'Arctique?

Mme Claire Franklin: Les aliments traditionnels dans l'Arctique ne seraient certainement pas inspectés de façon particulière mais si l'on y décelait des quantités de résidus susceptibles de causer des problèmes importants, je suis convaincue que l'on ferait le nécessaire pour voir quelles mesures il convient de prendre.

Mme Karen Kraft Sloan: Quelles mesures prendrait-on...?

Mme Claire Franklin: M. Raphael pourrait peut-être vous donner des renseignements plus précis à ce sujet.

M. Roderick A. Raphael (directeur général adjoint, Direction de l'hygiène du milieu, Direction générale de la protection de la santé, ministère de la Santé): Merci, madame Franklin.

En ce qui concerne les aliments traditionnels, Santé Canada travaille en collaboration étroite avec le ministère des Affaires indiennes et du Nord ainsi qu'avec les collectivités autochtones concernées. Comme l'a dit Mme Franklin, nous faisons des évaluations des risques ainsi que des recherches pour déterminer les niveaux d'exposition et faire participer les collectivités à des projets visant à examiner les mesures à prendre dans ces circonstances particulières.

Ce que je veux dire, c'est que nous savons que les aliments traditionnels présentent des avantages pour la santé de la collectivité et nous essayons par conséquent d'éviter qu'ils soient remplacés par un régime alimentaire inadéquat.

Nous participons à un effort collectif international, à savoir à des négociations sur la réduction et l'élimination des polluants organiques persistants qui sont en grande partie responsables des problèmes liés au régime alimentaire traditionnel des collectivités autochtones ou des familles vivant de la pêche ou de la chasse de subsistance.

Nous examinons les niveaux d'exposition et les risques avec le concours du ministère des Affaires indiennes et du Nord et des collectivités autochtones. Nous avons une décision très difficile à prendre avec ces collectivités en ce qui concerne une changement de régime alimentaire. Depuis quelques années, on en est arrivé à la conclusion que ce ne serait pas une solution appropriée.

Nous connaissons les avantages que présentent les aliments traditionnels et par conséquent, nous avons participé à des initiatives visant à réduire la quantité de polluants organiques persistants de façon à éviter qu'ils polluent ces aliments.

Le président: Merci, madame Kraft Sloan. Je dois vous demander d'attendre le deuxième tour.

Monsieur Lincoln.

M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Madame Franklin, les dispositions de la nouvelle Food Quality Protection Act américaine obligent à divulguer au public tous les renseignements que l'on possède avant d'homologuer un pesticide—teneur en produits chimiques, toxicité, utilisations et résidus possibles—alors qu'au Canada, ces renseignements sont confidentiels. Ils ne sont pas accessibles au public.

Estimez-vous qu'ils devraient être rendus publics et, si vous n'êtes pas d'accord, pourriez-vous nous expliquer pourquoi?

• 0850

Mme Claire Franklin: Merci, monsieur Lincoln.

En ce qui concerne la situation au Canada, nous essayons précisément de rendre accessibles les renseignements concernant les nouveaux ingrédients actifs et les principales utilisations nouvelles des produits en cours d'homologation.

Pour répondre directement à votre question, je suis pour ma part convaincue que ces renseignements devraient être rendus accessibles. J'estime qu'il est important que les Canadiens possèdent les renseignements nécessaires pour pouvoir prendre une décision en toute connaissance de cause. Bien entendu, les fabricants craignent que l'on divulgue les quelques renseignements qui dévoileraient leurs méthodes de fabrication. Nous essayerons de les maintenir secrets. La situation est analogue aux États-Unis.

Vous n'ignorez certainement pas que les dispositions actuelles font l'objet d'un examen sérieux. Nous y avons proposé plusieurs amendements qui permettront de rendre ces renseignements accessibles au public. Nous espérons que ce sera bientôt possible et que nous pourrons mieux informer le public.

M. Clifford Lincoln: Certaines dispositions de la nouvelle loi américaine portent sur l'exposition globale et sur les effets cumulatifs. Je n'arrive pas à comprendre qu'en 1999, on évalue toujours les pesticides séparément sans tenir compte de leurs effets cumulatifs alors que, d'après plusieurs études, on utilise environ 16 pesticides rien que pour les pommes. Pourtant, les pesticides utilisés ont bel et bien des effets cumulatifs.

N'estimez-vous pas qu'il faudrait tenir compte de l'exposition globale dans les modifications qui devraient être apportées incessamment aux textes législatifs?

Mme Claire Franklin: Les facteurs prévus dans la Food Quality Protection Act, à savoir l'exposition globale, l'exposition cumulative ainsi que d'autres facteurs de risque concernant en particulier les enfants, feront tous l'objet d'une surveillance très étroite. Nous avons participé aux discussions de divers groupes scientifiques américains qui ont examiné ces questions.

Je suis entièrement en faveur de la collecte de ce genre de renseignements. En fait, nous avons déjà instauré, avec le concours des Américains, un système qui permettrait de tenir compte des effets cumulatifs, ce qui pose de nombreux défis sur le plan scientifique. Les Américains mettent actuellement au point la méthode qui nous permettra d'y arriver. C'est une question que nous suivons de près et nous intégrerons cette approche à notre processus décisionnel.

Je vous signale toutefois que les Américains ne tiennent pas encore compte de l'exposition cumulative. Ils essaient de trouver un moyen de le faire. Ils attendent les conclusions finales de plusieurs études scientifiques dont les résultats seront publiés incessamment. Nous nous y intéressons de près et nous utiliserons cette approche également.

M. Clifford Lincoln: Enfin, Eli Neidert et Glenn Havelock, de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, disent notamment ceci dans un rapport publié en novembre 1998:

    Les analyses indiquent clairement qu'il n'y a pratiquement plus de différence entre les produits maraîchers canadiens et les produits importés aussi bien en ce qui concerne les taux de contamination que la proportion d'infractions.

Il s'agit des résidus de pesticides. Dans certains cas—en ce qui concerne le céleri, par exemple—le taux de résidus dans les produits maraîchers mexicains et dans les produits canadiens est maintenant égal, et la proportion d'infractions est la même.

Les auteurs de ce rapport disent que le taux de résidus a doublé entre 1989 et 1994. Ils ont détecté la présence de résidus de 16 types de pesticides différents dans les pommes.

Je dois reconnaître que cela m'inquiète au plus haut point, malgré tous les rapports brillants qui affirment que c'est une question d'équilibre. Je trouve que cette utilisation à outrance de pesticides est extrêmement inquiétante. Les fabricants de produits chimiques semblent contrôler le marché et nous imposer tous ces produits. Je me demande ce que l'on peut faire pour s'assurer que nos aliments ne contiennent aucun résidu.

Même si le représentant de l'Agence canadienne d'inspection des aliments a affirmé que si la quantité de résidus était inférieure aux limites prévues par Santé Canada, c'est qu'il n'y a aucun danger, la population n'est pas de cet avis. Les gens sont inquiets étant donné que le taux de cancer augmente considérablement.

• 0855

Que fait-on pour essayer de régler ce problème?

Mme Claire Franklin: Je comprends vos inquiétudes et vos commentaires. Je voudrais toutefois situer le problème dans son contexte et vous parler des efforts collectifs que nous croyons pouvoir faire pour nous rapprocher de l'objectif que vous visez, à savoir s'assurer que les produits alimentaires ne contiennent aucun résidu.

Je tiens à signaler que le nombre d'infractions est en fait minime. Il n'a pas beaucoup changé.

En ce qui concerne l'augmentation des quantités de résidus depuis une dizaine d'années, je vous recommande de poser des questions à l'ACIA. Je crois qu'elle a admis que, d'une façon générale, les quantités de résidus augmentent mais je pense qu'elle pourrait vous donner des renseignements plus précis à ce sujet.

Pour ce qui est de votre question, je pense que la tendance générale actuelle est d'essayer de réduire l'utilisation de pesticides ou d'utiliser davantage de méthodes de rechange. J'estime que c'est très important. C'est un défi de taille et nous nous efforçons de trouver des solutions. Nous collaborons avec d'autres ministères, avec les provinces, avec les producteurs et avec l'industrie pour essayer de promouvoir le concept de lutte antiparasitaire intégrée.

Encourager les utilisateurs à adopter de nouvelles méthodes est à mon avis une bonne façon de réduire, voire d'éliminer, le recours aux pesticides. C'est un domaine où nous avons commencé très tôt à faire des efforts.

Nous pouvons vous fournir des renseignements plus précis sur les projets que nous avons mis en place dans ce but.

Le président: Merci, monsieur Lincoln.

Monsieur Gilmour, puis M. Charbonneau.

M. Bill Gilmour (Nanaimo—Alberni, Réf.): Merci, monsieur le président.

Madame Franklin, avant de devenir député, j'étais exploitant forestier. J'étais applicateur de pesticides agréé, pour les herbicides. Les cours de formation étaient très bien faits en ce qui concerne les taux d'application, l'entreposage, les vêtements protecteurs entre autres choses. Par contre, un problème se posait en ce qui concerne les types de produits chimiques utilisés.

Je suis certain que vous êtes au courant du débat dont a fait l'objet l'utilisation du 2,4-D il y a une dizaine d'années, en Colombie-Britannique. De nombreux rapports d'étude très sérieux établissaient sa toxicité, alors que d'autres, tout aussi nombreux et tout aussi sérieux, tendaient à prouver son innocuité.

Quand on homologue un pesticide, le problème est de savoir comment déterminer et qui détermine son innocuité, qui fait la recherche. S'agit-il de recherche interne? Peut-on faire confiance aux fabricants de produits chimiques? La recherche est-elle confiée à des universités? Comment déterminer quelles données expérimentales sont fiables?

Mme Claire Franklin: C'est effectivement très difficile. On possède de nombreuses données sur les produits qui sont sur le marché depuis plusieurs années. Il s'agit de données établies par le fabricant ainsi que par des universités et des organismes de recherche de divers pays. Les études scientifiques produisent souvent des données contradictoires et, par conséquent, il est très difficile de faire la part des choses.

Nous avons des experts parmi notre personnel et nous avons souvent recours à l'avis d'experts indépendants pour nous aider à prendre une décision judicieuse lorsque les renseignements que nous possédons semblent être contradictoires.

M. Bill Gilmour: Le Commissaire à l'environnement a présenté son rapport la semaine dernière. Il a fait des commentaires plutôt acerbes au sujet des pesticides. En ce qui concerne ceux qui sont sur le marché depuis 10 ou 20 ans, on se base notamment sur des renseignements vieux d'environ deux décennies. Les Américains, quant à eux, font de nouveaux essais. Ils analysent des produits chimiques différents.

Le Commissaire à l'environnement a amèrement critiqué notre façon de procéder; il nous a reproché de ne pas réévaluer les produits chimiques qui sont homologués depuis longtemps.

Comptez-vous réévaluer ces produits chimiques?

Mme Claire Franklin: Certainement. Je crois que le Commissaire à l'environnement a signalé qu'aucune stratégie globale précise n'était en place en ce qui concerne une réévaluation de tous les pesticides homologués depuis un certain temps.

• 0900

Vous n'étiez peut-être pas là lorsque j'ai dit, dans ma déclaration préliminaire, que nous avions mis sur pied une stratégie qui a été soumise au Conseil consultatif sur la lutte antiparasitaire et aux groupes multidisciplinaires, pour s'assurer de leur appui. Nous voulons nous assurer que tous approuvent encore, au moment où nous les mettons en oeuvre, les recommandations du Livre bleu fondées sur l'examen fait par les intervenants.

Je vous signale que nous nous proposons précisément de mettre cette stratégie globale en oeuvre. Nous avons la capacité de faire une réévaluation. On nous a reproché notre lenteur. On nous a reproché de ne pas encore avoir pris de décision finale mais plusieurs produits sont déjà en cours de réévaluation et nous avons déjà pris de nombreuses initiatives en attendant d'arrêter une décision à ce sujet.

En outre, nous suivons de très près les résultats des examens faits à l'étranger, surtout aux États-Unis, particulièrement s'ils sont négatifs. Par conséquent, nous serons en mesure d'en tenir compte.

Je ne voudrais pas que vous ayez l'impression que nous ne faisons rien. Nous essayons d'améliorer le processus et nous avons établi un programme très élaboré de réévaluation de tous les produits anciens.

Le président: Merci, monsieur Gilmour.

M. Charbonneau, puis M. Pratt, Mme Torsney, M. Jordan puis le président.

[Français]

Monsieur Charbonneau.

M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Je voudrais demander à Mme Franklin de faire le point sur le fonctionnement du comité fédéral-provincial-territorial sur les pesticides et la lutte antiparasitaire. Ce comité, qui a tenu sa première réunion en novembre 1997, a pour mandat de renforcer les relations fédérales-provinciales-territoriales en mettant l'accent sur l'amélioration des pratiques de lutte antiparasitaire durable. J'aimerais savoir quel est le niveau de coopération qui existe au sein de ce comité entre le fédéral et les provinces, et avec le Québec en particulier. Est-ce un domaine où la coopération fonctionne ou non?

[Traduction]

Mme Claire Franklin: Merci beaucoup.

Je vous signale que le comité en tant que tel a été créé en 1997. Avant cela, il y avait en fait deux comités: celui de l'Association canadienne des responsables du contrôle des pesticides et le comité fédéral-provincial-territorial. Ils étaient déjà en place lorsque l'agence a été créée. En fait, nous les avons regroupés pour former un comité plus robuste.

Je suis très heureuse de pouvoir dire que les relations qu'entretiennent le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux dans le contexte de la réglementation des pesticides, par l'intermédiaire de ce comité, sont excellentes. Comme je l'ai déjà signalé, les provinces sont très actives dans ce domaine. Elles sont responsables de la vente des pesticides et de leur distribution et nous sommes, quant à nous, responsables de leur homologation. Nous collaborons, par l'intermédiaire de ce comité.

Pour répondre de façon plus précise à votre question, le Québec est un partenaire actif, ce dont nous sommes très heureux.

En outre, un des membres de ce comité est également membre du Conseil consultatif sur la lutte antiparasitaire.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Monsieur le président, puis-je poser une deuxième question?

Le président: Oui.

M. Yvon Charbonneau: Dans votre exposé et vos documents, il est souvent question d'un travail d'harmonisation entre le Canada, les États-Unis, les pays membres de l'ALENA et d'autres pays.

Je voudrais poser une question en ce qui a trait à la comparaison entre le Canada et les États-Unis. Est-ce que, de manière générale, nous avons des normes plus exigeantes ou moins exigeantes? De quel côté doit se faire le rattrapage quand il s'agit d'harmonisation? Est-ce que nous devons réduire nos normes pour les adapter aux normes américaines, ou est-ce qu'au contraire, nous devons renforcer nos normes pour atteindre le niveau américain?

[Traduction]

Mme Claire Franklin: Les initiatives que nous avons prises viennent d'une recommandation du comité d'examen multipartite portant sur une harmonisation accrue. Par conséquent, c'est une suggestion que l'on nous a faite.

• 0905

Au tout début, pour savoir si nos normes étaient plus strictes ou moins strictes que les normes américaines, nous avons comparé les résultats d'un examen de demande d'homologation effectué dans les deux pays, sans qu'il y ait eu consultation. Nous avons ensuite méticuleusement comparé la façon de procéder dans les deux cas parce que nous voulions nous assurer que non seulement les exigences étaient identiques mais que les procédés d'évaluation des risques étaient semblables. Voilà ce que nous avons fait en tout premier lieu.

J'ai le plaisir de vous apprendre que notre approche était en fait légèrement différente mais que la façon de procéder était semblable. Les conclusions étaient semblables. Nous en avons conclu que ce genre de relations ne risqueraient pas de faire baisser les normes canadiennes en matière de protection de la santé et de l'environnement.

Étant donné que l'on nous avait recommandé de se baser sur les examens faits aux États-Unis pour le programme de réévaluation, il était absolument essentiel d'établir de telles relations et de s'assurer que les systèmes étaient semblables. Nous avons également appliqué le même principe à l'examen des nouvelles demandes, de façon à faciliter l'homologation des produits à risques limités en leur accordant la priorité. Nous l'avons fait avec le concours des États-Unis.

Par conséquent, nous estimons que les normes des deux pays ne sont pas différentes. Nous avons harmonisé les systèmes si bien que nous ne faisons pas une deuxième fois l'examen; nous avons des approches légèrement différentes mais en fait, les deux systèmes sont semblables. Je pense que l'on s'est efforcé de part et d'autre de tirer le meilleur parti possible des activités communes.

Comme je l'ai signalé, nous avons utilisé le nouveau processus qui a été instauré aux États-Unis aux termes de la Food Quality Protection Act. J'estime que les normes n'ont pas été assouplies de quelque façon que ce soit et qu'elles répondent à nos attentes.

Le président: M. Charbonneau et M. Pratt, puis Mme Torsney.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Pour en revenir à la Food Quality Protection Act, cette loi donne, bien entendu, au gouvernement américain le pouvoir d'interdire l'importation de produits traités avec des pesticides qui sont interdits aux États-Unis. Je pense notamment au lindane.

En ce qui concerne d'autres catégories de pesticides, est-il possible que le processus d'harmonisation rende le régime réglementaire beaucoup plus restrictif?

Mme Claire Franklin: Pas nécessairement. Il est possible que, lorsque nous aurons recours à des méthodes scientifiques nouvelles solides, la réglementation en ce qui concerne l'application de certains produits devienne plus stricte mais je n'irais pas jusqu'à en conclure que le régime serait automatiquement plus restrictif.

M. David Pratt: Monsieur le président, j'ai une deuxième question à poser.

Dans le numéro d'avril 1999 du Bulletin des agriculteurs, on dit que plusieurs agriculteurs cultivant de grandes surfaces ont réduit la quantité de produits de lutte antiparasitaire utilisés de 15 p. 100. Il paraît que les résultats sont satisfaisants à cet égard.

On se demande si les quantités recommandées par les fabricants ne sont pas un peu trop élevées pour leur permettre de réaliser de plus gros profits.

Je me demande si, suite aux réactions des utilisateurs, les quantités recommandées par les fabricants ont été réexaminées et si on leur a demandé de recommander des doses moins élevées.

Mme Claire Franklin: Si les agriculteurs nous transmettaient ce type de données, cela nous encouragerait certainement à étudier les doses utilisées.

• 0910

Je vous fais remarquer qu'au Canada, nous analysons les données sur l'efficacité qui nous sont fournies au moment de l'évaluation du produit. À ce stade, nous travaillons en très étroite collaboration avec les fabricants pour nous assurer que la dose est la plus faible possible. Nous tenons absolument à avoir les doses les plus faibles possible; c'est pourquoi, à nos yeux, c'est une étape importante du processus d'évaluation si l'on veut arriver à ce résultat.

Lorsque la loi sera modifiée, nous nous pencherons sur la possibilité d'utiliser des doses encore plus faibles, surtout là où il y a des programmes de lutte antiparasitaire intégrée. Nous nous sommes occupés d'établir des projets de lutte afin de réunir tous les partenaires dans le secteur, parce qu'il est certainement possible de réduire les doses quand il y a un programme de lutte intégrée.

M. David Pratt: Une question supplémentaire. Vous est-il déjà arrivé, après avoir réexaminé un produit du point de vue de l'utilisateur, de signaler à un fabricant qu'il pourrait être opportun de réduire les doses recommandées?

Mme Claire Franklin: Aucun exemple précis ne me vient à l'esprit, mais je sais que nous envisagerions certainement de le faire si l'on nous présentait des données pertinentes.

Le président: Merci, monsieur Pratt.

Mme Torsney, ensuite M. Jordan, puis le président.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci.

Madame Franklin, on a pu lire hier dans le Ottawa Citizen que la moitié des poteaux de téléphone au Canada avaient été traités au pentachlorophénol, un produit de préservation du bois et un pesticide que le gouvernement fédéral étudie depuis 20 ans.

Prévoit-on rendre une décision bientôt sur ce produit? À quand une décision? L'utilisation du produit sur nos poteaux de téléphone est-elle sans danger pour tous ceux qui vivent dans des localités où on trouve ces poteaux?

Mme Claire Franklin: Je vous fais remarquer que la réévaluation dure depuis assez longtemps, c'est vrai, mais on a pris plusieurs mesures très importantes à divers moments pendant ce temps.

Le pentachlorophénol est un composé qui était utilisé beaucoup plus couramment à l'époque et qui renfermait aussi des concentrations plus élevées de contaminants. En 1981, on a réduit sensiblement son utilisation. En 1990, on l'a de nouveau réduite. Au moment où on se parle, le pentachlorophénol ne sert plus que pour les poteaux de téléphone.

Je ne veux donc pas vous donner l'impression que c'est une étude qui a commencé il y a longtemps et qui n'a jamais abouti, parce qu'en fait, des mesures très importantes ont été prises. Aujourd'hui, nous travaillons en collaboration avec les États-Unis pour ce produit et une décision devrait être prise avant la fin de 1999 au sujet de cette ultime utilisation du pentachlorophénol. Je veux néanmoins souligner que c'est un sujet très difficile et une décision aussi très difficile, parce qu'il n'existe aucun autre traitement de préservation connu en ce moment pour les poteaux téléphoniques.

J'ajouterais que la quantité de pentachlorophénol utilisée de nos jours correspond à 20 p. 100 de celle utilisée il n'y a pas si longtemps encore. Nous avons donc vraiment cherché à en diminuer l'utilisation le plus possible.

Mme Paddy Torsney: Mais si j'ai bien compris l'article, on trouve des dioxines et des furannes dans le pentachlorophénol...

Votre prononciation est meilleure que la mienne.

Mme Claire Franklin: Moi, je m'exerce depuis 20 ans.

Mme Paddy Torsney: Ce sont des produits déclarés toxiques par Environnement Canada. Ce seront des substances de la voie 1. Je crois comprendre—corrigez-moi si je me trompe—que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire autorise l'utilisation de substances qu'un autre ministère déclare nocives et dont il décide l'élimination virtuelle. Donc, un autre ministère déclare qu'il est possible d'utiliser des produits renfermant ces éléments.

Mme Claire Franklin: C'est un microcontaminant qui se trouve dans le produit, à un degré qui a été réduit sensiblement depuis la mise du produit sur le marché.

Nous admettons aussi que les dioxines et les furannes dans l'ensemble sont des substances de la voie 1. Nous voulons nous aussi les réglementer. Il n'y a donc pas de contradiction.

Ce qu'il faut se demander c'est si un niveau très faible est assez problématique pour nous obliger à prendre des mesures immédiates et précipitées, ou s'il faut établir un autre mode de contrôle.

• 0915

Nous allons donc lire très attentivement le document qui a résulté de l'étude menée en vertu de la LCPE pour déterminer l'incidence des recommandations sur la décision finale que nous aurons à prendre au sujet du pentachlorophénol.

Mme Paddy Torsney: Bon, en ce qui concerne les évaluations effectuées par le Canada et les États-Unis, on sait bien que les produits utilisés dans le sud des États-Unis se retrouvent dans nos climats nordiques. Le temps froid provoque la concentration des éléments qui retombent... et on a entendu parler du problème des aliments traditionnels et de tout le reste.

Si vous tenez à une certaine harmonisation de la procédure, allez-vous faire en sorte que les résultats d'une analyse effectuée aux États-Unis soient recalculés en fonction d'un climat plus froid? Allez-vous donner l'exemple en disant aux États-Unis que c'est peut-être très bien dans un climat chaud, mais que ça fait des ravages dans le Nord? Comment faites-vous l'harmonisation et la réévaluation? Aussi, prenez-vous l'initiative de vous opposer à l'utilisation de ces produits dans un climat chaud parce que les résidus retombent chez nous?

Mme Claire Franklin: C'est tout un défi, non seulement pour nous qui devons nous harmoniser avec les États-Unis, mais aussi pour l'harmonisation à l'intérieur des États-Unis mêmes. C'est un pays immense et certains produits y sont utilisés à la fois dans le sud et dans le nord.

En ce qui concerne les informations sur les résidus, il faudrait recueillir des données pertinentes pour nos conditions climatiques. Pas besoin que les données proviennent du Canada plutôt que des États-Unis; il suffit qu'elles proviennent de régions où les conditions sont très semblables aux nôtres. Donc, nous avons convenu que, pour être acceptables, les données sur les résidus devaient être produites dans une région comparable au Canada et au nord des États-Unis.

Le président: Madame Torsney, vous aurez droit à un second tour.

M. Jordan, M. Casson, M. Herron.

M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je voudrais aborder brièvement la question du recouvrement des coûts. Dans votre plan stratégique, vous aviez prévu pour 1997-1998, un manque à gagner de quatre millions de dollars. Je me demande si le manque à gagner a effectivement atteint cette somme et quel a été son montant l'année suivante.

Voici ma deuxième question: est-ce que le régime de recouvrement des coûts a été choisi après l'évaluation faite par le groupe des divers intervenants à l'occasion d'une tournée pancanadienne. À votre avis, quelle est la cause de ce manque à gagner? Qu'est-il arrivé? Quel le régime de recouvrement des coûts appliquez-vous maintenant à cause de ce manque à gagner?

Mme Claire Franklin: Le manque à gagner prévu a bel et bien été de quatre millions de dollars et, la seconde année du programme de recouvrement des coûts, il a aussi été de quatre millions de dollars.

Selon notre analyse, il y a eu un manque à gagner parce que le montant des frais de maintien d'homologation avait été calculé en supposant qu'un certain pourcentage des produits paierait le plein montant tandis qu'un autre pourcentage paierait un montant moindre. En réalité, un plus grand nombre de produits se vendent moins et paient donc des frais réduits.

C'est donc arrivé à cause des renseignements dont nous disposions au moment de prendre la décision.

M. Joe Jordan: Quelle sera votre stratégie pour rattraper le manque à gagner? Allez-vous chercher une autre façon de faire vos frais ou est-ce que ça va marcher dorénavant parce que l'industrie s'est adaptée? Quels sont vos projets?

Mme Claire Franklin: Il y a plusieurs possibilités dont on discute en ce moment. D'ailleurs, ces deux dernières années, nous avons obtenu du gouvernement des ressources supplémentaires, si bien que le manque à gagner du programme n'est plus que de deux millions de dollars.

Nous envisageons actuellement plusieurs méthodes. Faudrait-il modifier le barème non pas pour augmenter les frais comme tels ou pour étendre l'assiette, mais simplement pour nous permettre de réaliser nos prévisions? Une autre solution consisterait à modifier tout le programme pour que son fonctionnement coûte deux millions de dollars de moins. On se demande aussi s'il ne serait pas possible de trouver au sein du gouvernement des ressources supplémentaires pour le programme.

Voilà en gros les trois solutions qui sont à l'étude au ministère.

M. Joe Jordan: Quels sont vos délais?

• 0920

Mme Claire Franklin: On veut une décision le plus tôt possible, mais il n'y a pas d'échéance précise pour la prise d'une décision finale. Comme vous pouvez l'imaginer, les discussions sont très actives.

M. Joe Jordan: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci.

Monsieur Casson, s'il vous plaît.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Merci, monsieur le président.

Madame Franklin, je veux revenir sur un sujet abordé par M. Pratt et peut-être aussi par M. Gilmour: les doses.

Les produits qui sont utilisés en agriculture, en aquiculture, en sylviculture ou ailleurs coûtent très cher et leurs utilisateurs préfèrent certainement en utiliser le moins possible pour obtenir un résultat. Vous avez dit que si les utilisateurs vous transmettaient des informations sur les doses utilisées, vous les diffuseriez.

N'est-ce pas plutôt à vous d'analyser ces pesticides et de faire des essais pour déterminer, pour le compte de l'utilisateur ultime, quelles sont les doses optimales pour réduire les résidus dans l'environnement?

Il me semble que les fabricants ont certainement la prérogative d'indiquer la dose à utiliser, mais il devrait incomber à un organisme indépendant, peut-être même au vôtre, de déterminer quelles sont les doses efficaces. Ne croyez-vous pas que ça fait partie de vos fonctions?

Mme Claire Franklin: Oui, et d'ailleurs nous le faisons. Des renseignements nous sont transmis au moment de décider s'il y a lieu ou non d'homologuer un produit et ces renseignements nous permettent de déterminer franchement si la dose recommandée sur l'étiquette est effectivement la plus faible dose efficace. Ça nous permet de déterminer si un produit donné assure vraiment l'extermination de tous les insectes et mauvaises herbes énumérés sur son étiquette.

Nous analysons en profondeur cette dimension. D'ailleurs, pour nombre de produits, la dose recommandée sur l'étiquette après l'homologation est différente de celle suggérée au départ. Nous nous occupons donc vraiment de cette question.

M. Rick Casson: Alors vous faites vraiment des essais en nature? Comment déterminez-vous les doses? Expliquez-moi un peu comment vous procédez, si c'est possible.

Mme Claire Franklin: Oui, il y a des essais en nature. On ait des essais de pesticides pour deux raisons. Comme j'en ai parlé tout à l'heure, une série d'essais en nature vise à déterminer la nature des résidus, en particulier dans les conditions climatiques qui prévalent au Canada. L'autre série d'essais en nature vise à déterminer si le produit est efficace et à quelle dose il l'est afin de pouvoir établir la plus faible dose efficace possible à recommander sur l'étiquette.

M. Rick Casson: Donc, ce sont des essais que votre organisme fait lui-même.

Mme Claire Franklin: L'agence ne les fait pas elle-même. C'est le fabricant qui fait les essais. Certaines stations de recherche d'Agriculture Canada dans diverses régions s'occupent aussi d'effectuer certains essais en nature de ces produits.

M. Rick Casson: Alors êtes-vous en mesure de dire que chacun des pesticides approuvés a subi des essais indépendants ou est-ce que vous vous servez des essais des fabricants?

Mme Claire Franklin: Nous nous servons des essais des fabricants. C'est à eux qu'il incombe de produire les données confirmant l'innocuité et l'efficacité d'un produit.

M. Rick Casson: Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Casson.

Ça fait du bien d'entendre un député réformiste préconiser une intervention accrue du gouvernement.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Monsieur Herron.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Merci, monsieur le président.

Je crois que je vais poursuivre dans le même ordre d'idées que mon collègue écologiste du Parti réformiste et aussi que M. Lincoln.

Je m'intéresse entre autres à la question de l'hypersensibilité environnementale reliée aux produits chimiques et aux pesticides. Dans ses questions, monsieur Lincoln a parlé des doses de pesticides jugées sans danger en ce moment et du fait que c'était une science naissante.

• 0925

Personnellement, je m'inquiète plus des effets cumulatifs que des effets d'une seule dose. Quand vous analysez les doses d'un pesticide donné, est-ce que vous tenez compte de l'hypersensibilité aux produits chimiques et aux pesticides?

Mme Claire Franklin: La question de l'hypersensibilité fait partie de l'étude servant à déterminer les doses acceptables. D'ailleurs, on applique de nombreux facteurs de sécurité. Nous déterminons, à partir des résultats des tests toxicologiques, les doses auxquelles aucun effet n'est observé. Les facteurs de sécurité sont ensuite appliqués à ces doses pour abaisser encore plus le seuil acceptable pour les humains.

La question de l'hypersensibilité environnementale en soi n'entre pas en ligne de compte dans la prise de décision, mais nous sommes au courant. Santé Canada a un programme qui vise à rassembler plus de données pour essayer de délimiter toute cette question de l'hypersensibilité.

Donc, nous sommes au courant. En général, étant donné les facteurs de sécurité généraux qui sont appliqués, nous croyons que l'exposition est certainement réduite.

M. John Herron: C'est ça qui me préoccupe. Vous avez dit que vous essayez de diffuser dans toute la mesure du possible les résultats de certaines analyses qui sont effectuées chez nos cousins américains. Est-ce que les Américains étudient beaucoup cette question? Est-ce que Santé Canada ou vous-même pourriez me donner des détails?

Ensuite, j'aurai une troisième question brève, monsieur le président, si vous permettez.

M. Roderick Raphael: Nous avons deux projets différents reliés à l'hypersensibilité environnementale. Santé Canada, en coopération avec le ministère de la Santé de la Nouvelle-Écosse et l'université Dalhousie, finance un centre à l'université qui étudie expressément l'hypersensibilité environnementale comme état pathologique en vue de recueillir des données qui aideront les médecins et les professionnels de la santé à traiter ce problème, et en vue aussi de trouver des mécanismes de recherche qui faciliteraient l'évaluation des pesticides et autres substances toxiques.

De plus, dans le cadre de l'Initiative de recherche sur les substances toxiques annoncée dernièrement par les ministres Rock et Stewart, on a entrepris une série de projets sur les effets cumulatifs des substances toxiques. Plusieurs de ces projets portent sur les pesticides et la sensibilité, du point de vue de l'hypersensibilité environnementale.

Il y a une autre série de projets sur les polluants organiques persistants dont bon nombre sont des pesticides aujourd'hui interdits au Canada.

En ce qui concerne les États-Unis, tout notre travail se fait sous le régime d'un accord de coopération entre le Laboratoire de lutte contre la maladie, le Centre for Disease Control d'Atlanta, en Géorgie, et le gouvernement américain. Il y a là un projet intéressant et nous nous ferons un plaisir de fournir au comité plus d'informations sur ces travaux.

M. John Herron: Puis-je conclure de votre dernière réponse...

Le président: Très rapidement, s'il vous plaît.

M. John Herron: ...que Santé Canada est sur le point de reconnaître l'hypersensibilité environnementale comme un état pathologique?

M. Roderick Raphael: Je ne suis pas prêt à affirmer que c'est un état pathologique reconnu en soit. Nous sommes en train de faire énormément de recherches avec le milieu médical pour déterminer la nature de ce trouble, dans l'espoir de réunir toute la documentation nécessaire pour qu'il soit reconnu comme un état pathologique.

M. John Herron: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci.

On a le temps de faire un second tour si vos questions sont brèves et les réponses tout autant, mais permettez d'abord à votre président de poser lui-même deux brèves questions.

• 0930

Madame Franklin, j'ai lu votre protocole d'entente qui date de 1996. Je présume qu'il y en a aussi une copie en français.

Le premier paragraphe se lit comme suit:

    Mission de l'ARLA: protéger la santé humaine et l'environnement en réduisant au minimum les risques liés aux produits antiparasitaires, tout en rendant accessibles les moyens de lutte contre les ravageurs, soit ces mêmes produits et les stratégies de lutte durable.

C'est manifestement une double mission et je voudrais savoir laquelle prévaudra en définitive, si l'on peut dire?

Mme Claire Franklin: Le mandat a été rédigé comme ça pour reconnaître qu'en ce moment, dans le monde entier, on tend à minimiser les risques, à favoriser la mise au point de produits moins risqués et aussi à encourager une gestion intégrée des parasites qui fait partie de la stratégie de lutte antiparasitaire durable. C'est donc comme si l'on reconnaissait que des produits sont utilisés actuellement et continueront de l'être pendant qu'on essaie d'atteindre cet objectif.

Je reconnais que ça peut paraître contradictoire, mais je pense que c'est plutôt un constat de la situation actuelle.

Le président: Qu'entendez-vous par «réduire au minimum»?

Mme Claire Franklin: Dans notre cas, on réduirait les risques au minimum en analysant les risques effectifs et en tentant de les minimiser au moyen de diverses techniques de gestion du risque. Pour les zones d'environnement, on pourrait établir des zones tampons. Pour les travailleurs, on pourrait rendre obligatoire de l'équipement protecteur, par exemple.

Il y a plusieurs façons pour nous de minimiser les risques.

Le président: À votre avis, y a-t-il minimisation des risques si, comme nous en informe le Commissaire à l'environnement à la page 324, Pêches et Océans Canada et vous autres n'êtes pas arrivés à conclure un protocole d'entente sur l'utilisation des pesticides dans l'aquiculture?

Mme Claire Franklin: J'en profite, monsieur le président, pour demander à John Smith de vous donner des explications. Il s'est occupé de l'aquiculture pour le compte de l'Agence et il a aussi participé au programme de lutte antiparasitaire intégrée pour l'aquiculture.

M. John Smith (gestionnaire de projet principal, Division des nouvelles stratégies et affaires réglementaires, Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire): Nous sommes heureux que le commissaire ait recommandé au ministère des Pêches et des Océans d'élaborer une politique sur l'aquiculture durable. Nous allons coopérer.

Nous avons travaillé en étroite collaboration avec le ministère des Pêches et des Océans et Environnement Canada sur les produits utilisés en aquiculture. Même s'il n'y a pas eu signature d'un protocole d'entente en bonne et due forme, il y a une étroite coopération.

Le président: Quand le protocole sera-t-il signé?

Mme Claire Franklin: Nous espérons qu'il sera signé d'ici l'automne. Nous travaillons assidûment avec le ministère pour que les choses aboutissent.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a certaines questions intéressantes sur lesquelles il faut sérieusement se pencher, mais nous croyons que les choses progressent bien.

Le président: Enfin, madame Franklin, est-ce que le manque de coopération effective entre l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire et les ministères qui entreprennent des recherches scientifiques vous inquiète autant que le commissaire?

Mme Claire Franklin: Oui, bien sûr, une telle observation m'inquiète toujours. Je me permets toutefois de préciser que la coopération n'est pas aussi déficiente qu'on le laisse entendre. Les études de cas qui ont été faites ont pu donner cette impression, mais nous travaillons en réalité avec divers ministères et nous avons établi des mécanismes pour leur transmettre des renseignements et pour leur demander ce qu'ils pensent des lignes directrices que nous sommes en train d'établir.

Quand le programme de réévaluation sera bien lancé, nous pourrons utiliser la recherche effectuée par les ministères sectoriels.

Le président: Pouvez-vous dire au comité dans quels secteurs la coopération n'est pas encore bien établie?

• 0935

Mme Claire Franklin: Il y a effectivement des secteurs dans lesquels notre participation n'a pas été aussi marquée, comme l'a souligné le commissaire, alors qu'elle pourrait l'être. Je pense notamment à l'établissement de projets de recherche qui pourraient permettre d'améliorer les décisions concernant la réglementation; il y a aussi l'utilisation des renseignements pour le programme de réévaluation.

Le président: De quels ministères s'agit-il?

Mme Claire Franklin: À ma connaissance, les ministères avec lesquels nous menons des projets de recherche sont Santé Canada, Environnement Canada, Agriculture Canada, Pêches et Océans Canada, qui fait de la recherche sur l'habitat des poissons, certainement le service des forêts et RNCan qui fait aussi de la recherche. Nous allons nous servir de toutes ces informations au besoin.

Le président: Alors où percevez-vous ce manque de coopération que souligne le commissaire?

Mme Claire Franklin: Je pense que le commissaire est arrivé à cette conclusion à partir de ses études de cas. Cela reflète sans doute des problèmes qui existaient longtemps avant...

Le président: Pourriez-vous être un peu plus précise au lieu de rester dans le vague?

Mme Claire Franklin: Eh bien, les études de cas dont a parlé le commissaire portaient sur le carbofuranne, l'acroléine...

Le président: Pourriez-vous fournir par écrit au comité une liste de ces sujets? Ainsi, vous aurez le temps de les préparer comme il faut.

Mme Claire Franklin: Oui, certainement.

Le président: Merci beaucoup.

Nous passons maintenant au second tour.

[Français]

Madame Girard-Bujold, je vous invite à poser une très brève question.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Madame Franklin, ma question porte sur la participation du public. Vous savez que le public est de plus en plus sensibilisé à la présence des pesticides. De quelle façon votre agence renseigne-t-elle le public au sujet des effets des pesticides sur la santé?

Est-ce que vous songez à augmenter la participation du public à votre agence?

Parmi les questions suggérées qu'on retrouve dans les notes d'information qu'a préparées la Bibliothèque du Parlement, on lit:

    15. Est-ce que Santé Canada est au courant des modifications proposées par le Fonds mondial pour la nature à l'actuelle Loi sur le contrôle des produits antiparasitaires? Si oui, qu'en pense-t-il?

[Traduction]

Le président: Une réponse brève serait appréciée.

Mme Claire Franklin: Au sujet de la sensibilisation du public, à notre point de vue, il y a certainement une relation avec les provinces en ce qui concerne la diffusion d'informations. Nous avons aussi un programme conjoint avec les provinces pour la formation des opérateurs antiparasitaires et la délivrance de permis à ces personnes. Je trouve donc que nous avons pris plusieurs mesures afin de pouvoir fournir des renseignements supplémentaires dans ce domaine.

En ce qui concerne la participation du public, nous espérons certainement arriver à fournir au public les motifs de nos décisions avant qu'une décision définitive soit prise au sujet de l'homologation d'un produit.

Voilà des domaines dans lesquels nous faisons activement des efforts pour être mieux en mesure de fournir au public les renseignements dont il a besoin.

Le président: Merci, madame Girard-Bujold.

Monsieur Laliberte, puis Mme Kraft Sloan.

M. Rick Laliberte: Je veux souligner certains de vos objectifs qui, comme l'a fait remarquer le président, sont indiqués dans l'énoncé de votre mandat et qui sont contradictoires.

Vous énoncez donc comme objectif précis: «protéger la santé, la sécurité et l'environnement», mais il y a aussi «contribuer à la compétitivité de [l'industrie] et du secteur de la fabrication», et enfin «assurer une réglementation transparente et ouverte et en tenant compte du rapport qualité-coûts».

Si une bonne partie de tout ça a à voir avec le recouvrement des coûts et la rentabilité, l'industrie n'a qu'à diminuer vos revenus et prétendre que vous ne la soutenez pas. Que reste-t-il aux Canadiens du point de vue de la santé et de l'environnement? Si vous relevez du ministère de la Santé, vous devriez être libres d'effectuer votre recherche et vos analyses sur la santé et la sécurité de tout l'environnement et de la population.

De plus, en ce qui concerne les tests, il faut aussi penser aux espèces migratrices. Pour ce qui est de certains de vos bureaux et laboratoires régionaux, au Québec, vous n'en avez qu'un dans une grande ville. Dans certaines autres provinces, vous vous situez plutôt en zone rurale. Qui choisit les emplacements?

Le continent ressemble un peu à une tortue. Le dos de la tortue se situe vers le 49e parallèle et s'étend dans l'autre direction. Il y a tout le réseau hydrographique de la rivière Churchill dans le nord de la Saskatchewan qui n'est pas lourdement contaminé par des résidus d'origine agricole, mais votre agence est absente de ce bassin. Comment a-t-on accès à Santé Canada?

• 0940

Vous avez parlé de contaminants dans l'Arctique, mais la partie septentrionale des provinces est densément peuplée et tributaire des aliments traditionnels. Or, ces résidus proviennent de l'agriculture. Comme toutes les rivières coulent vers le nord, ces résidus viennent des exploitations agricoles dans le sud.

Personne ne semble au courant de ces inquiétudes. A-t-il jamais été question du risque que ces rivières soient dangereuses à cause des pesticides?

Mme Claire Franklin: Les endroits où nous sommes établis sont ceux où l'utilisation des pesticides est probablement plus fréquente, mais notre rayon d'action est sans doute plus étendu qu'on ne pourrait le penser. Nous avons à notre disposition des inspecteurs qui se trouvent éparpillés dans les provinces et qu'on retrouve donc à divers endroits. Nous pouvons faire appel à eux.

Je pense donc que l'emplacement du bureau même ne reflète pas fidèlement la situation.

Quand des renseignements dérivés de la surveillance effectuée par d'autres ministères, ou même par le gouvernement provincial, indiquent des niveaux inquiétants, nous sommes mis au courant.

Il y a donc un très vaste réseau fédéral-provincial et aussi un réseau entre ministères fédéraux pour transmettre ce genre de renseignements. Si l'on relevait des taux inacceptables dans les bassins hydrographiques, nous serions prévenus.

M. Rick Laliberte: Le public peut-il demander...

Le président: Il y en a d'autres qui attendent, monsieur Laliberte, alors je vous demanderais d'être bref, s'il vous plaît.

M. Rick Laliberte: Comme je le disais, dans le nord du Canada, il n'y a pas une pléthore d'agences, qu'elles soient provinciales ou autres. Est-ce que le public peut demander que votre agence effectue certaines études en particulier?

Mme Claire Franklin: Oui, on peut le demander quand on croit qu'il faut faire quelque chose. Il reviendrait aux organismes fédéraux de décider quel est le meilleur moyen d'obtenir les renseignements nécessaires.

Le président: Merci.

Madame Kraft Sloan, une seule question, s'il vous plaît.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci.

Tout à l'heure, on a parlé des résidus dépassant les limites fixées et du fait que vous pouvez agir en coopération avec les localités nordiques. Le Programme de surveillance et d'évaluation de l'Arctique a qualifié le lindane de neurotoxine. Les taux de concentration dans l'organisme des résidents du Nord sont plus élevés que ceux autorisés par vos lignes directrices; pourtant, les gens du Nord n'arrivent pas à obtenir d'informations sur l'évaluation de la santé publique et sur les données pertinentes utilisées par votre agence pour gérer le pesticide lindane.

Je me demande si vous allez fournir ces renseignements au Comité de l'environnement et du développement durable et si vous allez nous expliquer pourquoi, même si vous parlez de travailler en coopération avec le MAIN, vous n'êtes pas disposés à lui fournir des renseignements sur le lindane, sur le TGDPA, c'est-à-dire le transport à grande distance, et le protocole sur les POP.

Je me demande donc premièrement si vous allez fournir ces informations au Comité de l'environnement et du développement durable et, deuxièmement, si vous pouvez nous expliquer pourquoi vous avez refusé de communiquer ces renseignements au MAIN.

Mme Claire Franklin: Les informations demandées pour ce comité avaient été fournies à l'agence par le fabricant en vue de l'homologation du produit. En vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires en vigueur, il nous est interdit de communiquer ces informations à d'autres organismes. C'est à cause des dispositions de la Loi sur l'accès à l'information et de la protection accordée aux renseignements commerciaux confidentiels.

Voilà les contraintes que nous impose la loi actuelle. Lorsqu'elle aura été modifiée, la situation sera fort différente puisque nous n'aurons plus à nous plier à ces contraintes.

Mme Karen Kraft Sloan: Donc la loi va être modifiée?

Mme Claire Franklin: Oui.

Mme Karen Kraft Sloan: Parce que le ministre, si j'ai bien compris, a dit qu'il allait faciliter la communication de renseignements techniques aux personnes concernées.

Mme Claire Franklin: Oui.

Mme Karen Kraft Sloan: C'est pour quand?

Mme Claire Franklin: Le ministre a demandé à l'agence de présenter le dossier et d'en discuter avec le Comité consultatif sur la lutte antiparasitaire, ce que nous avons fait.

• 0945

Je sais que le ministre devrait recevoir très bientôt les observations du comité sur les projets de modification de la loi.

Mme Karen Kraft Sloan: Quand?

Mme Claire Franklin: Je ne sais pas quand au juste, mais je sais que le ministre va rencontrer les membres du comité très bientôt.

Mme Karen Kraft Sloan: C'est quand ça, très bientôt?

Mme Claire Franklin: Je crois qu'il est censé les rencontrer au cours des prochaines semaines.

Le président: Merci.

Monsieur Lincoln, puis M. Gilmour.

M. Clifford Lincoln: En passant, j'espère que la nouvelle loi, qui s'est déjà fait assez attendre, prévoira un examen quinquennal. Il est tout à fait inacceptable qu'une loi sur les pesticides soit en vigueur 30 ans sans être modifiée.

Pour faire suite aux commentaires du président, je viens de lire dans le rapport du commissaire que l'acroléine sert dans des canaux d'irrigation. Le gouvernement de l'Alberta a demandé une précision parce que, en vertu de la Loi sur les pêches qui prévoit une tolérance zéro, il est interdit d'utiliser l'acroléine parce qu'elle tue le poisson. Pourtant, l'ARLA estime qu'on peut utiliser l'acroléine parce que, d'après ses normes, c'est un produit sans danger.

Apparemment, le MPO et l'ARLA ne s'entendent pas et on semble continuer d'utiliser l'acroléine qui tue le poisson.

Je voulais vous poser des questions sur l'atrazine qui est utilisée au Canada. Selon l'EPA aux États-Unis, ce pourrait être un carcinogène pour les êtres humains. De plus, des fongicides EBDC sont utilisés au Canada, alors que, selon l'EPA, ce sont des carcinogènes confirmés pour les animaux et probables pour les êtres humains.

Après avoir découvert que ces pesticides tuaient le poisson ou qu'ils étaient considérés par l'EPA américaine comme des carcinogènes pour l'humain ou les animaux, pourquoi ne peut-on pas appliquer le principe de prudence et les interdire au Canada? Quel est notre problème? Pourquoi permettons-nous l'utilisation de ces produits en sachant que d'autres ressorts et d'autres ministères affirment qu'ils sont dangereux? Au lieu d'être prudent, on continue de faire comme si de rien n'était et on laisse les fabricants utiliser ces produits.

Mme Claire Franklin: Au sujet de l'acroléine, la question est de savoir si les canaux d'irrigation sont considérés ou non comme un habitat du poisson. Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est la clé du problème.

On n'a pas dit que l'acroléine ne pouvait pas tuer le poisson—c'est indubitable—mais il faut déterminer si un canal d'irrigation ne sert qu'à ça ou s'il est considéré comme un habitat du poisson.

Je le répète, certaines provinces définissent les canaux d'irrigation comme un habitat du poisson, d'autres non. Il est donc très clair que...

On est aussi très conscient, comme on l'a indiqué sur l'étiquette, de la nécessité de faire preuve d'une extrême prudence lorsque le produit est utilisé dans un canal d'irrigation et de s'assurer qu'il n'y aura pas d'effets sur des eaux considérées comme un habitat du poisson.

La question est sans doute un peu plus compliquée qu'elle ne le semble à première vue puisque ça dépend vraiment de la définition de l'habitat du poisson.

En ce qui concerne les autres produits que vous avez mentionnés, cette possibilité fait partie des éléments dont nous devons tenir compte pour prendre une décision sur ces produits. Je vous fais remarquer qu'à ma connaissance, ces produits, même s'ils ont reçu cette qualification aux États-Unis, continuent d'y être utilisés et ils y sont même homologués.

On estime qu'il y a une marge de sécurité acceptable selon les degrés d'exposition possibles et du type de point final. Mais ces produits sont homologués aux États-Unis et dans le monde entier.

M. Clifford Lincoln: J'avoue que je serais vraiment effrayé si j'apprenais que des récoltes sont irriguées avec du produit qui tue le poisson. Si ça tue le poisson, ça ne doit pas être idéal pour arroser des produits alimentaires.

Mme Claire Franklin: Ce lien serait aussi pris en considération relativement aux niveaux de résidus et aux autres effets sur les espèces animales autres que le poisson. Ça ferait donc partie de l'évaluation.

• 0950

Le président: Eh bien, vous nous avez certes donné une réponse stupéfiante, madame Franklin. Nous allons relire les bleus et nous verrons. Nous n'avons pas assez de temps aujourd'hui.

Monsieur Gilmour, puis M. Charbonneau.

M. Bill Gilmour: Merci, monsieur le président.

Madame Franklin, nous connaissons tous des pesticides qui ont été homologués avant qu'on découvre leur nocivité et qui ont ensuite été retirés des tablettes. L'exemple le mieux connu est sans doute le DDT. Nous supposons qu'il y a d'autres pesticides actuellement homologués qui sont aussi nocifs.

Quoi qu'il en soit, vous avez dit, en réponse à M. Pratt, que quand vous recevez des informations, vous les analysez pour étudier un produit. Malheureusement, je n'arrive pas à imaginer comment vous faites. Ce n'est pas vous qui faites la recherche. La compagnie elle-même ne va certainement pas vous remettre des données de recherche qui vous amèneront à interdire la vente du produit. Comment en pratique une telle chose pourrait-elle arriver?

Mme Claire Franklin: Votre question soulève un point extrêmement intéressant. Les compagnies demeurent responsables des produits qu'elles mettent sur le marché. Si elles disposent de renseignements montrant l'existence de certains problèmes, il n'est pas du tout dans leur intérêt de les cacher. Il y a une foule d'exemples où des informations de ce type ont été fournies aux organismes de réglementation.

Ces renseignements peuvent même être communiqués après l'homologation du produit. Il n'y a pas que les fabricants qui font des recherches sur des produits.

Il y a donc plusieurs sources aptes à nous indiquer qu'un produit doit faire l'objet d'une recherche approfondie.

M. Bill Gilmour: Pourtant, comme vous l'avez dit à M. Pratt, ce n'est jamais arrivé à votre connaissance.

Mme Claire Franklin: Non. Je crois que M. Pratt avait demandé si nous avions des informations sur un produit montrant qu'en fait une dose inférieure pouvait être utilisée ou que des agriculteurs avaient constaté qu'une dose inférieure suffisait. C'était plutôt un cas d'efficacité.

Je ne veux pas laisser croire que nous n'avions pas d'informations ayant donné lieu à un examen particulier ou à certaines décisions après l'homologation d'un produit.

Le président: Je vous remercie.

Monsieur Charbonneau, suivi de M. Pratt.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Madame Franklin, ma question se rapporte à l'objectif stratégique no 2 de votre cadre de gestion stratégique:

    Satisfaire aux besoins des Canadiens qui désirent un processus réglementaire ouvert, transparent et participatif et favoriser l'accès, en temps opportun, à de nouveaux produits antiparasitaires plus sécuritaires.

Ma question se rapporte surtout à la deuxième partie de cet énoncé où vous parlez de favoriser l'accès, en temps opportun, à de nouveaux produits. Je suis un peu curieux d'entendre votre explication de l'expression «en temps opportun». Il me semble que j'aurais mieux apprécié entendre dire: «le plus tôt possible et le plus largement possible». Quelle est la raison de cette nuance? Est-ce qu'il y a des problèmes majeurs à ce que nous nous dirigions vers cet objectif? Est-ce qu'il faut mettre des nuances dans cette recherche? Est-ce qu'on ne devrait pas se diriger dans cette direction le plus rapidement et le plus largement possible? On dirait qu'on met un peu le pied sur la pédale du frein.

[Traduction]

Mme Claire Franklin: Je pense que c'est seulement parce que nous avons l'habitude d'utiliser l'expression «en temps opportun» pour indiquer que nous tendons vers quelque chose. Nous croyons aussi qu'il faudrait y parvenir «le plus tôt possible».

Ce n'est donc pas que nous cherchons délibérément à jouer sur les mots. C'est simplement que c'est la façon courante pour nous de...

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Est-ce que vous auriez voulu traduire des difficultés que nous ne connaissons pas? C'est pourquoi je vous demande de nous expliquer pourquoi vous avez choisi cette expression. Il y a peut-être des difficultés à se diriger vers cet objectif qu'il ne faut pas minimiser. Lorsqu'on dit «en temps opportun», cela signifie qu'il faut agir avec précaution. Est-ce qu'il y a de la recherche en cours? Encouragez-vous cette recherche?

Un peu plus loin dans votre document, vous faites état d'un arriéré. Il me semble qu'il y a du travail à reprendre, un backlog comme on dit. Est-ce que vous êtes submergés de demandes? Est-ce que cela vous pose des problèmes?

• 0955

[Traduction]

Mme Claire Franklin: Nous avons dit que l'innocuité des produits était une priorité. Si un fabricant présente une demande et que le produit est jugé plus sûr qu'un autre, la demande est étudiée le plus rapidement possible dès sa présentation. D'ailleurs, pour l'étude des produits moins risqués dont l'homologation est demandée conjointement, la norme de rendement est inférieure à celle établie pour les produits chimiques traditionnels. Nous faisons donc tout en notre possible pour permettre l'accès à ces produits sans délai.

Vous savez bien qu'il faut étudier cela aussi. Nous devons nous assurer que le produit est sans danger ou qu'il est conforme aux normes rigoureuses. Donc, non seulement nous nous en occupons plus rapidement, mais nous faisons en sorte qu'il subisse le degré d'analyse requis.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Charbonneau.

[Traduction]

Monsieur Pratt, d'autres questions?

M. David Pratt: Pas d'autres questions, monsieur le président.

Le président: Madame Torsney, voulez-vous poser une question? Et vous, monsieur Jordan ou monsieur Casson?

Il ne reste plus que le président.

Comme il va y avoir un débat à la Chambre à 10 heures sur les modifications à la LCPE, je vais me contenter de poser des questions, madame Franklin, auxquelles vous pourrez répondre par écrit afin que nous ayons la possibilité d'étudier les réponses et d'y réfléchir.

Ce serait très utile au comité que vous expliquiez ce que vous entendez par «gestion du risque». Ce serait très utile aussi d'avoir une définition du terme «résidus». Qu'est-ce que ça veut dire au juste?

Une autre chose qui serait utile, c'est de savoir ce que vous voulez dire par «lutte antiparasitaire durable», que l'on trouve dans l'énoncé de votre premier objectif stratégique à la page 3 du document exposant votre mission, votre vision et vos objectifs stratégiques. Dans le second objectif stratégique, il est question d'un «processus réglementaire ouvert, transparent et participatif».

En répondant aux questions de Mme Kraft Sloan, vous avez dit être en train de modifier votre loi afin d'atteindre un but précis. Je me demande si vous aviez énoncé cet objectif dans votre document en prévision d'une modification ou si vous avez énoncé cet objectif parce que vous croyez proposer déjà un processus réglementaire ouvert, transparent et participatif. Nous aimerions connaître la différence entre les deux modes de gestion.

Parmi vos principes directeurs, il y a «favoriser l'utilisation de pratiques durables». Il serait utile de savoir ce que vous entendez par là et ce qu'a donné la mise en oeuvre du principe.

Pourriez-vous aussi nous dire ce que vous avez fait en ce qui concerne le dernier principe directeur, à la page 4, qui se lit comme suit: «promouvoir des stratégies de réduction des risques».

Nous avons besoin de connaître les réponses à ces questions, y compris à la dernière que j'ai déjà soulevée avant: pouvez-vous nous donner des exemples de la façon dont ça se règle lorsqu'il y a un conflit entre deux éléments de votre mandat, et préciser en faveur de qui? Nous voudrions—ou du moins je voudrais beaucoup—comprendre mieux comment cette double mission s'exécute en pratique.

Pouvez-vous répondre à ces questions?

Mme Claire Franklin: Nous ferons tout en notre possible pour vous communiquer ces renseignements, monsieur le président.

Le président: Merci.

Madame Kraft Sloan.

Mme Karen Kraft Sloan: Monsieur le président, vous dites dans une de vos questions que vous aimeriez avoir des exemples.

Je pense qu'il serait intéressant d'avoir non seulement une explication de vos définitions, etc., mais aussi des exemples de ce que ça donne en pratique.

• 1000

Le président: Nous vous inviterons peut-être de nouveau, probablement à la fin de cette série d'audiences, quand nous connaîtrons les autres dimensions de la question. En attendant, nous vous remercions, vos collègues et vous, d'avoir comparu devant nous ce matin.

Mme Claire Franklin: Merci beaucoup, monsieur le président.

Le président: Nous nous retrouverons demain après-midi. La séance est levée.