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ENSU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 21 octobre 1998

• 1537

[Français]

Le président (M. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. Nous recevons cet après-midi des témoins de l'Association du Barreau canadien. Ils sont ici aujourd'hui pour nous aider dans notre étude du projet de loi 132, Loi visant la prévention de la pollution et la protection de l'environnement et de la santé humaine en vue de contribuer au développement durable. Les participantes sont Mme Thomson, Mme Muir et Mme Houlihan.

[Traduction]

Si j'ai bien compris, vous voudriez intervenir dans le même ordre. Vous avez la parole.

Madame Thomson, voulez-vous être la première? Bienvenue au comité.

Mme Tamra L. Thomson (directrice, Législation et réforme du droit, Association du Barreau canadien): Je vous remercie, monsieur le président.

L'Association du Barreau canadien est un organisme national qui représente plus de 34 000 juristes partout au Canada. Nous comparaissons aujourd'hui au nom de la Section nationale du droit de l'environnement de notre association.

L'un des objectifs principaux de l'Association consiste à améliorer la législation et l'administration de la justice, ce qui comprend améliorer les lois dans l'intérêt public. C'est dans ce contexte que nous comparaissons aujourd'hui devant vous.

La Section nationale du droit de l'environnement a depuis longtemps coutume de commenter la législation sur la protection de l'environnement. Ce que nous venons vous dire aujourd'hui ne représente pas seulement le travail des membres de la Section concernant ce projet de loi en particulier, mais notre intervention découle également de ce que nous avons faisons depuis la fin des années 80 pour donner suite aux nombreuses résolutions adoptées par le conseil de l'association.

Je vais maintenant demander à Mme Muir, puis à Mme Houlihan, de vous exposer notre argumentation de fond.

Mme Magdalena A. Muir (présidente sortante, Section nationale du droit de l'environnement, Association du Barreau canadien): Bonjour, mesdames et messieurs.

L'Association du Barreau canadien vous a fait tenir un mémoire qui contenait nos commentaires détaillés sur le projet de loi C-32, et je vais maintenant vous parler de trois éléments de ce mémoire, en l'occurrence les relations intergouvernementales, les initiatives d'exécution et d'application et le développement durable dans la perspective de l'écosystème. Ma collègue, quant à elle, vous parlera de la participation du public.

• 1540

S'agissant des relations intergouvernementales, le projet de loi C-32 met davantage l'accent sur les partenariats avec les autres paliers de gouvernement ainsi que sur l'harmonisation des normes environnementales et des mécanismes d'application. La Section nationale du droit de l'environnement de l'Association souscrit à cette démarche, pourvu toutefois qu'elle ne porte pas préjudice à l'environnement et à la protection de celui-ci.

Plusieurs choses sont survenues dans le cadre des relations intergouvernementales à l'extérieur du contexte de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, mais qui servent néanmoins à mettre les choses en contexte. Il s'agit par exemple du jugement de la Cour suprême au sujet d'Hydro-Québec, jugement qui a précisé les pouvoirs qu'a le gouvernement fédéral de réglementer les substances toxiques en vertu de la loi, ainsi que l'Accord pancanadien sur l'harmonisation environnementale, relevant du Conseil canadien des ministres de l'Environnement. Certains volets du projet de loi C-32 vont poursuivre la démarche, et cela vaut donc pour les relations intergouvernementales.

Pour ce qui est des Premières nations, la Section nationale du droit de l'environnement prend acte de la reconnaissance des Premières nations en tant qu'intervenants dans ces relations intergouvernementales par le biais notamment de la reconnaissance des droits ancestraux et des droits issus de traités, des dispositions concernant la négociation d'ententes avec les gouvernements autochtones pour assurer l'application de la loi, ainsi que la participation de représentants des gouvernements autochtones aux travaux du Comité consultatif national.

Dans son exégèse du projet de loi, la Section nationale évoque également les municipalités et leur rôle, ainsi que le fait que le gouvernement du Canada envisage également la possibilité de conclure si nécessaire des ententes intergouvernementales avec certaines municipalités.

Je répète donc que la Section nationale souscrit aux changements comme celui-là, de même qu'à l'élargissement des relations intergouvernementales, dans la mesure où ces changements ne portent pas atteinte à la protection de l'environnement, à la mise à exécution de la législation sur la protection de l'environnement ou encore à la participation du public.

Notre mémoire détaille par ailleurs certaines dispositions du projet de loi dans ces trois différents domaines.

En ce qui concerne maintenant l'exécution et le respect de la loi, l'Association du Barreau canadien souscrit en tant qu'organisme à l'idée d'un rôle important et durable du gouvernement fédéral pour ce qui est de l'exécution et du respect de la législation sur l'environnement. En août 1997, l'Association a ainsi adopté une résolution qui exhortait le gouvernement fédéral à réaffirmer son engagement à l'endroit de l'exécution et du respect de la législation environnementale selon trois pistes différentes: en conservant ou en renforçant l'effectif actuel d'Environnement Canada dans le domaine des enquêtes et des inspections; en intensifiant les activités de contrôle dans les domaines de compétence fédérale; et en utilisant une gamme très souple d'outils destinés à favoriser l'environnement et le respect de la législation, par exemple des lettres d'avertissement et des billets d'infraction.

La Section nationale du droit de l'environnement réitère dans son mémoire la position de l'Association au sujet de l'exécution et du respect de la législation, et elle reconnaît que les initiatives volontaires et les instruments économiques sont de précieux instruments qui viennent compléter les activités d'exécution et de contrôle. En revanche, ces initiatives volontaires ne sauraient en aucun cas remplacer les mesures actives de contrôle.

S'agissant des initiatives volontaires et des instruments économiques, la Section nationale du droit de l'environnement craint que l'article 322 du projet de loi ne soit trop limitatif et ne permette pas d'utiliser toute la gamme des instruments économiques et des outils offerts par le système de marché. L'article 322 ne parle en effet que de consignation et de permis échangeables.

La Section nationale soutient que pour pouvoir réaliser des progrès à long terme, il faut évaluer et ajuster régulièrement les incitatifs économiques à l'appui de la protection de l'environnement, et qu'il faut ainsi des dispositions législatives suffisamment souples. Dans le même ordre d'idées, le système qui sera offert, quel qu'il soit, doit également respecter les engagements d'ordre commercial.

Par exemple, l'article 326 annonce des règlements concernant les systèmes relatifs aux permis échangeables. Cette disposition poserait problème si elle permettait au gouvernement canadien d'inverser ces échanges et de remettre en cause l'utilité ou la pérennité de tel ou tel système d'échanges des émissions qui aurait été mis en place.

Je vais également brièvement évoquer une autre résolution de l'Association, celle qui porte sur les informations sur les poursuites en matière environnementale. Il s'agit de la résolution 95-03-A qui exhortait le gouvernement à donner au public des informations concernant les procédures de poursuite en matière d'infractions contre le gouvernement. C'est ce que prévoit d'ailleurs dans une certaine mesure le projet de loi avec le registre environnemental.

• 1545

Mon dernier propos au sujet du projet de loi C-32 portera sur le développement durable et le contexte de l'écosystème. La résolution 91-05-M de l'Association du Barreau canadien parlait précisément de l'intervention fédérale en faveur de la protection de l'environnement et du développement durable. Vous en trouverez le texte à l'annexe B du mémoire.

Cette résolution appelait l'adoption de plusieurs mesures, et notamment le fait que le gouvernement canadien devrait intervenir vigoureusement pour promouvoir le développement durable. Le mémoire précédent de la Section nationale, qui avait été présenté en 1994, parlait lui aussi d'abondance du développement durable.

La Section nationale tient par ailleurs à reconnaître les progrès importants réalisés par le gouvernement fédéral grâce au projet de loi C-32, et même certaines initiatives autonomes prises par plusieurs ministères et organismes fédéraux.

Pour revenir au projet de loi, nous prenons acte de ce que la définition du développement durable est le reflet de celle qui avait été endossée par la Commission Brundtland.

Notre section souscrit également à la notion de la protection de l'environnement dans le contexte de l'écosystème qui se retrouve précisément dans le projet de loi, notamment dans le préambule, dans la définition de l'écosystème et dans les renvois systématiques à l'écosystème d'un bout à l'autre du projet de loi. La chose est d'autant plus évidente que le projet de loi favorise également, dans le cas de la pollution, des solutions préventives par opposition aux solutions plus classiques d'intervention et de contrôle.

Mme Patricia L. Houlihan (présidente, Section nationale du droit de l'environnement, Association du Barreau canadien): Bonjour, mesdames et messieurs.

Je vais axer mon propos sur la question de la participation du public. Après avoir lu les comptes rendus des travaux du comité, je dois constater que la question a déjà été abondamment discutée. J'essaierai d'être aussi brève que possible, mais je voudrais néanmoins expliquer en quoi notre section a certaines réserves en ce qui concerne les articles du projet de loi portant sur la participation du public.

Nous souscrivons aux dispositions du projet de loi qui tentent de faciliter la participation du public, mais nous craignons que, selon le texte actuel du projet de loi, les résultats ne soient pas à la hauteur des intentions.

J'aimerais simplement répéter, toujours au sujet de la participation du public, que notre section représente des avocats qui interviennent pour le compte de clients de tous les secteurs—industrie, gouvernement et ONG. Malgré ces intérêts très divers, nous avons toujours pu souscrire aux résolutions et aux mémoires qui préconisent un rôle de premier plan pour le public, et nous ne faisons pas exception à la règle dans le cas du projet de loi sur la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

Certaines de nos réserves reprennent sans doute la grave préoccupation que nous formulons à l'endroit de la mise à exécution, ou plutôt de la non-mise à exécution, par le gouvernement fédéral. Mme Muir vous a déjà parlé de la résolution que nous avons adoptée au sujet d'un renforcement des mesures d'exécution et de contrôle de la part du fédéral. Si le gouvernement fédéral ne fait pas respecter la loi, il faut alors davantage faire en sorte que les représentants du public puissent eux-mêmes intervenir pour assurer la protection de l'environnement. Je pense que cela résume bien l'essentiel de notre préoccupation.

Ainsi, je voudrais dire quelques mots sur certaines problématiques que pose le projet de loi. D'abord, nous voudrions recommander que les lois provinciales dont il est fait mention dans les ententes administratives et autres ententes d'équivalence, donnent aux citoyens les mêmes droits que ceux que lui donne le projet de loi. Il s'agirait ainsi, bien sûr, du droit d'intenter des poursuites, de la protection des dénonciateurs, ainsi que du droit d'intervention.

Je ne vais pas aborder en détail les problèmes que posent les dispositions permettant aux citoyens d'intenter des poursuites, parce que je constate que vous avez déjà reçu de très nombreux mémoires à ce sujet.

J'aimerais toutefois vous renvoyer aux pages 11 et suivantes de notre mémoire et vous dire qu'à ce sujet, la Section nationale aimerait toutefois recommander l'élimination de certaines des nombreuses conditions préalables au droit d'intenter des poursuites. Selon nous, la structuration actuelle du processus risque en effet de limiter l'intérêt qu'il y a de permettre aux citoyens de poursuivre en justice.

Enfin, je voudrais vous renvoyer à l'une des annexes de notre mémoire, en l'occurrence la résolution 91-05-M de l'Association qui constitue l'annexe B et dont Mme Muir a déjà parlé.

Cette résolution a été adoptée non seulement par la Section nationale du droit de l'environnement, mais également sous forme d'énoncé de principe par l'Association du Barreau canadien qui, comme le disait Mme Thomson, représente 35 000 membres de la profession juridique au Canada. Je le répète, cette résolution souligne l'importance que nous accordons à la mise en place de mécanismes idoines pour la participation du public.

Permettez-moi de passer brièvement en revue quelques-uns des alinéas de cette résolution.

• 1550

Nous recommandons, au paragraphe 3 de la page 35:

    que le gouvernement du Canada démontre son engagement envers l'amélioration de l'accès du public à la justice environnementale en modifiant les lois fédérales pertinentes de façon à:

      a) élargir les règles relatives à la qualité pour agir en matière d'environnement, y compris en ce qui a trait à la responsabilité civile, les recours en injonction et en déclaration et au contrôle judiciaire;

      b) faciliter les poursuites intentées par des citoyens et les recours civils se rapportant à la violation de lois et de règlements à caractère environnemental;

      c) abroger les limites légales concernant le quantum des dommages-intérêts en matière de préjudices causés à l'environnement lorsqu'il y a lieu; et

      d) adopter, par voie législative, un processus décisionnel pour l'élaboration de règlements sur l'environnement afin de faciliter la participation du public.

Vous trouverez la version anglaise de cette résolution à la page 32.

Encore une fois, notre organisme reconnaît de longue date l'importance de la participation du public en droit environnemental. Nous avons toujours fait valoir qu'il fallait multiplier les ouvertures et simplifier les mécanismes pour que le public puisse plus facilement jouer un rôle dans le droit environnemental et le respect de celui-ci.

À cet égard, la loi est insuffisante sous sa forme actuelle, et nous exhortons le gouvernement à profiter de l'occasion pour améliorer les droits du citoyen grâce à ce projet de loi.

Le président: Merci beaucoup.

Nous sommes maintenant prêts à passer aux questions.

[Français]

Monsieur Casson, suivi de Mme Girard-Bujold

[Traduction]

et de M. Knutson.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Merci, monsieur le président.

Vous avez parlé des administrations municipales et c'est précisément ma spécialité. Je pense que les administrations municipales ont énormément de ressources que nous pourrions exploiter, et cela à bien des paliers un peu partout au Canada. Mais pour ce qui est de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, à votre avis, quel rôle les administrations municipales pourraient-elles jouer au niveau de l'élaboration des lois, de leur mise en oeuvre ou de leur application? À quoi pensiez-vous lorsque vous parliez de cela?

Mme Magdalena Muir: Je répondrai à cette question si vous voulez bien. Nous avons regardé la chose dans le cadre des relations intergouvernementales, c'est-à-dire les différents types d'arrangements administratifs qui pourraient en découler.

Nous n'avons pas entièrement précisé la façon dont les choses pourraient se passer, mais nous avons par contre pensé que dans le cas des principales municipalités comme Toronto ou Vancouver, et ce n'est qu'un exemple, qui couvrent un assez vaste territoire, celles-ci pourraient fort bien travailler avec le gouvernement fédéral de façon concertée dans les dossiers environnementaux, mais nous n'avons, comme je le disais, pas vraiment détaillé la façon dont les choses pourraient se passer.

Mme Patricia Houlihan: Je pense que nous partons surtout du principe que pour autant que les ententes administratives fonctionnent et que la coopération entre paliers de gouvernement fonctionne également, dans la mesure où cela permettrait de protéger l'environnement et non pas le contraire, à ce moment-là, c'est quelque chose à quoi nous pourrions souscrire.

M. Rick Casson: Vous pourriez donc concevoir que l'accord d'harmonisation entre le gouvernement fédéral et les provinces soit élargi de manière à englober également les administrations municipales?

D'aucuns craignent que l'harmonisation ne nuise à la protection de l'environnement, mais si nous voulons mobiliser la participation de tous les paliers, il faut bien qu'il y ait un mécanisme qui le permette.

Était-ce là un peu le contexte de votre suggestion?

Mme Magdalena Muir: Je ne pense pas que nous ayons entièrement pensé à la façon dont cela fonctionnerait dans le cadre des différents accords environnementaux qui existent déjà. Les accords sont une chose sur laquelle nous nous sommes penchés, mais davantage sous l'angle d'une position de quasi-neutralité faisant que nous ne serions pas nécessairement pour ou contre, pourvu toutefois que la protection de l'environnement n'en souffre pas.

Je pense que vous avez suggéré une option possible, mais je dirais qu'il faut alors se demander comment identifier la chose et comment empêcher une prolifération excessive des intervenants.

M. Rick Casson: En effet. Si vous voulez faire intervenir les administrations municipales dans la recherche des solutions, si à ce moment-là elles interviennent... Vous savez bien que les municipalités s'occupent déjà du transport urbain, de leurs propres bâtiments, et que sais-je encore. Cela, c'est une chose, mais les faire intervenir dans le processus législatif, c'est une tout autre chose.

Mme Magdalena Muir: Je pourrais me borner à répéter que nous parlions des ententes qui s'inscrivent dans le cadre de la loi et qui sont évidemment beaucoup plus étroites que celles dont vous parlez vous-même, et qui valent essentiellement pour toute la palette des dossiers de compétence fédérale-provinciale.

M. Rick Casson: Monsieur le président, M. Gilmour aimerait poser une question complémentaire.

Le président: Fort bien.

• 1555

M. Bill Gilmour (Nanaimo—Alberni, Réf.): Je vous remercie.

J'aimerais m'étendre un peu sur la question du droit d'intenter des poursuites. Vous avez tout à fait raison de dire que nous avions déjà reçu de nombreux mémoires à ce sujet, mais ces mémoires représentaient tout le spectre, depuis les groupes de défense de l'environnement disant que cela ne suffisait pas jusqu'au ministère pour qui la formule proposée était un juste milieu en passant par les entreprises qui affirmaient que ces solutions étaient beaucoup trop onéreuses.

À votre avis, selon le libellé actuel, est-ce réalisable? Vous dites à la page 13 de notre mémoire qu'il y a effectivement certains éléments valables, mais pourriez-vous aller un peu plus loin et nous dire s'il faut repenser tout cela ou s'il faut changer d'orientation?

Vous avez parlé, je crois, d'éliminer certaines dispositions.

Mme Patricia Houlihan: Non, ce n'est pas le terme que j'ai utilisé...

M. Bill Gilmour: Mettons.

Mme Patricia Houlihan: ...et notre mémoire ne dit pas cela du tout.

Par contre, ce que nous constatons, c'est qu'il existe plusieurs conditions préalables qui doivent être respectées avant d'en arriver au point où le citoyen aurait effectivement le droit d'intenter des poursuites. Nous signalons certains des problèmes que poseraient certaines de ces conditions préalables et exprimons notre crainte que ces problèmes risquent de décourager le citoyen qui souhaiterait sinon prendre l'initiative dans une situation qui l'exigerait.

Encore une fois, tout cela revient à ce que nous disions au sujet des ressources insuffisantes, voire, dans certains cas, du manque de volonté de la part du fédéral—et j'en ignore les raisons—lorsqu'il s'agit d'intervenir pour faire respecter la loi. Il est indispensable d'avoir un mécanisme qui permette alors au citoyen de prendre les devants.

De sorte que non, nous ne préconisons pas du tout l'élimination de cela. Nous pensons simplement que la formule est un peu lourde sous sa forme actuelle.

M. Bill Gilmour: Fort bien, mais les obstacles sont bien là, comme vous le dites, et ils sont insurmontables pour l'homme de la rue qui souhaiterait intenter des poursuites.

Mme Patricia Houlihan: C'est bien cela. Il y a énormément d'éléments qui décourageraient les interventions de ce genre.

M. Bill Gilmour: Si nous éliminions donc ces obstacles, cela n'aurait-il pas pour effet de rendre possibles des poursuites futiles? Pensez-vous que le juste milieu existerait toujours même s'il faut un peu arrondir les angles?

Mme Patricia Houlihan: Il est peu vraisemblable à mon avis que cela ouvrirait les portes à toutes sortes de poursuites frivoles, étant donné que notre système judiciaire a déjà érigé des obstacles à ce genre de chose, que les tribunaux ont des mécanismes qui leur permettent de les rejeter. Beaucoup de gens ont exprimé des réserves à ce sujet, c'est vrai, pas seulement dans ce cas-ci, mais également dans le cas d'autres mesures législatives canadiennes. Je persiste toutefois à penser que ces réserves s'inspirent surtout de l'expérience d'autres pays.

M. Bill Gilmour: Parfait.

Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Merci.

[Français]

Madame Girard-Bujold, s'il vous plaît.

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): À la page 5, vous faites allusion à la participation du public. Vous dites:

    La SNDE appuie les dispositions qui, dans le projet de loi, cherchent à favoriser la participation du public.

Selon vous, quels sont les éléments clés de votre mémoire, les incontournables, que l'on doit retenir pour faire de la participation du public une réussite dans le projet de loi? À titre d'exemple, dans votre mémoire, vous faites allusion à un ajout au préambule. Est-ce que cet aspect vous paraît crucial? C'est à la page 11.

[Traduction]

Mme Patricia Houlihan: De quel alinéa du préambule s'agirait- il?

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: À la page 11, à la fin du premier paragraphe, vous dites:

    Le Préambule devrait comprendre un énoncé sur le caractère opportun de la diffusion de l'information et de la participation du public.

Est-ce que cet aspect-là est crucial pour vous? Dites-vous qu'on devrait l'inclure dans le préambule? Pourquoi voudriez-vous l'inclure dans le préambule et sur quels critères vous basez-vous?

[Traduction]

Mme Patricia Houlihan: En fait, je n'ai pas retrouvé l'article dont vous parlez parce que la numérotation des pages est différente, mais le préambule ne...

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Je m'excuse. J'ai la version française. C'est dans la section intitulée «Paragraphes 13(1) et 13(2)».

[Traduction]

Mme Patricia Houlihan: Je ne suis pas sûre que ce soit essentiel parce que le préambule n'entraîne pas en lui-même d'obligations juridiques, quoiqu'il puisse servir à orienter l'interprétation du reste de la loi s'il y a des domaines qui ne sont pas clairs. Donc, en ajoutant au préambule une déclaration relativement à l'application de la loi et à la participation publique, les tribunaux auraient en main un instrument qui leur permettrait d'interpréter les articles qui ne sont pas clairs.

Dans ces cas-là, grâce à un tel préambule, il est permis d'imaginer que la loi serait probablement interprétée dans le sens d'une application plus vigoureuse et d'une participation du public.

• 1600

Donc, même si ce n'est pas légalement nécessaire, si la loi est rédigée en termes suffisamment clairs, l'interprétation s'en trouverait facilitée.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Vous dites que les tribunaux s'appuient sur le préambule pour faire appliquer la loi. Non? Ce n'est pas sur cela que les tribunaux s'assoient pour appliquer la loi?

[Traduction]

Mme Patricia Houlihan: Les tribunaux ne s'appuient pas sur le préambule. Le préambule n'entraîne pas d'obligations juridiques. On s'en sert comme d'un guide. Si l'article est suffisamment clair, on ne se reportera probablement pas au préambule. On ne fait cela que si l'article n'est pas clair.

Mme Magdalena Muir: Permettez-moi d'intervenir brièvement.

Nos observations sur le préambule ont trait au Registre de la protection de l'environnement, et nous voulons que ce registre favorise aussi bien l'application de la loi que la participation du public.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Donc, selon vous, il n'est pas essentiel que ce soit inscrit dans le préambule. Ce n'est pas un élément incontournable. Vous en avez simplement fait mention comme ça. C'est ce que vous venez de me dire.

[Traduction]

Mme Magdalena Muir: Nous avons fait toutes ces observations parce que les parties les jugeaient importantes. Tout particulièrement, la diffusion de l'information peut être très importante pour ce qui est d'une application efficace de la loi ou de la participation du public.

Patricia a déjà dit que si les parties s'inquiètent de l'application que les divers paliers de gouvernement feront de la loi, la participation du public peut jouer un rôle très important. Des informations exactes pourraient donc être utiles si vous voulez que les gens fassent des choix informés et judicieux. Ce qui nous préoccupe ici, c'est que les informations et la description des informations que doit contenir le Registre de la protection de l'environnement sont très peu détaillées, et voilà pourquoi nous pensons que la loi ne pourra pas tenir ses promesses, ou ne pourra pas être aussi efficace qu'elle pourrait l'être.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Je voudrais vous parler du paragraphe 22(1), dont vous parlez à la page 13 de la version française de votre mémoire.

Vous dites:

    Ce qui laisse évidemment en suspens la question de savoir en quoi consiste exactement un délai raisonnable.

Vous dites aussi:

    Au cours d'une enquête prolongée, les dommages causés à l'environnement peuvent poursuivre leur néfaste progression.

Que voulez-vous dire par «délai raisonnable»? Comment, selon vous, devrait-on inclure dans le projet de loi la notion de «délai raisonnable»?

[Traduction]

Mme Patricia Houlihan: Oui, c'est ce que nous disons, nous disons que cela pourrait être utile. Étant donné que le caractère raisonnable d'une chose est toujours matière à interprétation, il serait utile d'avoir un délai précis, un calendrier clair.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Mais que nous suggérez-vous d'inclure dans le projet de loi? Qu'est-ce qu'un délai raisonnable pour vous?

[Traduction]

Mme Patricia Houlihan: Excusez-moi, mais je n'ai pas songé à ce que pourrait être un délai raisonnable relativement à cet article.

Mme Magdalena Muir: Tout dépendrait de la longueur et de l'ampleur de l'enquête en question.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: C'est très vague. Je pensais que vous aviez des réponses plus précises. Vous dites que «les dommages causés à l'environnement peuvent poursuivre leur néfaste progression». C'est inscrit dans le projet de loi également. J'aurais aimé que vous nous disiez ce qu'est un délai raisonnable. C'est important, parce que si des mesures ne sont pas prises immédiatement, si le processus d'analyse et de vérification se prolonge, les problèmes que l'on craignait risquent de se concrétiser. Vous parlez de gros désastres. Le processus d'enquête est parfois long. J'aurais donc aimé que vous nous précisiez ce qu'est un délai raisonnable. Je vous remercie beaucoup.

Le président: Merci, madame.

[Traduction]

Monsieur Knutson, suivi de Mme Carroll.

M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Si je vous comprends bien—et je veux m'assurer de bien vous comprendre—vous dites que dans l'esprit de l'harmonisation des lois, pour ce qui concerne la participation du public ou les poursuites intentées par les citoyens, la loi du gouvernement fédéral ne devrait pas être plus faible que les lois provinciales qui existent déjà.

• 1605

À l'heure où nous nous parlons, quelles provinces ont des lois plus sévères ou mieux faites?

Mme Patricia Houlihan: Il se peut que je n'aie pas compris votre question, mais ce que nous disons, c'est que s'il doit y avoir une équivalence ou des accords administratifs conclus par les gouvernements fédéral et provinciaux...

M. Gar Knutson: Et il y en a.

Mme Patricia Houlihan: C'est exact.

M. Gar Knutson: L'accord d'harmonisation fait justement état des équivalences, d'une harmonisation qui permettrait d'éviter les doubles emplois.

Mme Patricia Houlihan: À notre avis, il faut au minimum que les mesures de protection que prévoit la loi existent dans la loi provinciale qui est mentionnée dans l'accord.

M. Gar Knutson: Vous ne dites donc pas que, dans l'esprit de l'harmonisation des lois, la loi fédérale devrait, si l'Ontario par exemple a une Déclaration des droits de l'environnement, à tout le moins respecter cette norme?

Mme Patricia Houlihan: Non, nous ne disons pas que la loi fédérale doit respecter toutes les exigences des provinces. Nous disons le contraire, à savoir que les provinces ne devraient pas être en mesure d'adopter des normes inférieures.

M. Gar Knutson: Les normes de la Déclaration des droits de l'environnement de l'Ontario sont supérieures.

Mme Patricia Houlihan: Oui, c'est vrai.

M. Gar Knutson: Est-ce qu'on ne devrait pas respecter ces normes?

Mme Patricia Houlihan: Nous disons, je crois, quelque part dans notre mémoire, que l'Ontario... ou peut-être que cela ne figure pas dans notre mémoire. Nous avons analysé les normes ontariennes, mais ce n'est pas ce que nous disons à ce sujet-ci. Nous disons que la norme fédérale doit être le minimum essentiel, et que les provinces ne devraient pas pouvoir adopter des normes inférieures.

M. Gar Knutson: À part l'Ontario, est-ce qu'il y a d'autres provinces qui ont aujourd'hui des normes supérieures, ou meilleures?

Mme Patricia Houlihan: À quel sujet?

M. Gar Knutson: La participation du public et les poursuites des citoyens.

Mme Magdalena Muir: Je dois dire que cela varie d'un bout à l'autre du pays, et nous n'avons pas fait ce genre de comparaison; nous n'avons pas comparé les lois provinciales et fédérales.

Ce qu'on veut éviter absolument, c'est que ces accords permettent à tout le moins aux parties de ne pas respecter la norme fédérale. Maintenant, si la norme provinciale est supérieure, le gouvernement provincial doit bien sûr faire respecter cette norme aussi.

M. Gar Knutson: Peut-être. Qui sait?

Mme Magdalena Muir: Auquel cas s'appliqueraient les droits des citoyens ou les droits relatifs à la participation du public en vertu de la loi provinciale. Tout ce que nous disons, c'est que la norme fédérale doit rester la norme minimale.

M. Gar Knutson: Je vois.

Deux organisations environnementales nous ont dit en termes clairs—il s'agit de l'Association canadienne du droit de l'environnement et de... je ne me rappelle pas l'autre; je ne sais pas si vous connaissez Mark Winfield ou Paul Muldoon—que cette loi, telle qu'elle est rédigée maintenant, donne un droit vide de sens, un faux droit, et ils ont dit, comme le Caucus sur les produits toxiques du Réseau canadien de l'environnement, que si on ne peut pas bonifier ce droit et le rendre plus semblable à celui que prévoit la Déclaration ontarienne des droits, on devrait s'en défaire complètement parce que ce serait un mauvais précédent pour les autres lois à venir, par exemple la Loi sur les espèces en péril, ou ce serait une norme dangereuse pour les provinces ou d'autres. Ils ont été très clairs à ce sujet, ils ont dit que si on ne peut pas bonifier ce droit, autant l'éliminer de la loi.

Avez-vous une opinion à ce sujet?

Mme Magdalena Muir: À titre de précision, vous faites état des accords administratifs ou des ententes d'équivalence?

M. Gar Knutson: Non, je parle des poursuites que les citoyens peuvent intenter.

Mme Patricia Houlihan: Nous ne sommes pas d'accord.

M. Gar Knutson: Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous pensez que cette disposition, telle qu'elle est rédigée, vaut mieux que rien? Ils disent que si la barre est trop élevée...

Mme Patricia Houlihan: On donne à tout le moins au citoyen le droit d'intenter des poursuites. Nous sommes d'accord pour dire qu'il existe trop d'obstacles pour y arriver, mais notre organisation ne réclame pas le retrait complet de cette disposition. Nous pensons qu'il y a moyen de l'améliorer, mais nous ne disons pas que ce doit être tout ou rien, et que si ce n'est pas amélioré, il faut la retrancher.

M. Gar Knutson: D'accord.

Au bas de la page 7, vous dites qu'il faut retrancher le mot «efficientes» à l'alinéa 2(1)a). On pourrait peut-être dans la version anglaise retrancher le mot anglais «cost» et laisser le mot «effective»?

Mme Magdalena Muir: Ce qui nous préoccupe essentiellement, c'est que l'on assortit les mesures préventives et correctives d'un coût, et si ce projet de loi veut vraiment mettre de l'avant des mesures préventives et correctives pour protéger, valoriser et rétablir l'environnement, la notion d'efficience ne devrait pas y figurer parce que cela impose une limite.

• 1610

M. Gar Knutson: Qu'entendez-vous lorsque vous dites que cela «pourrait miner la portée du reste de la disposition»?

Mme Magdalena Muir: Eh bien, ce que nous proposons, c'est ceci:

    2.(1) Pour l'exécution de la présente loi, le gouvernement fédéral doit, compte tenu de la Constitution et des lois du Canada:

      a) prendre des mesures préventives et correctives pour protéger, valoriser et rétablir l'environnement;

Si on ajoute ici une notion d'efficience, les mesures préventives et correctives visant à protéger, valoriser et rétablir l'environnement seront modifiées du fait qu'elles doivent être efficientes. Si un vrai problème existe, le coût doit-il jouer un rôle déterminant dans les mesures préventives ou correctives que l'on décide de prendre?

M. Gar Knutson: D'accord.

Mme Magdalena Muir: Nous nous préoccupons vraiment du fait que l'on impose une limite inhérente à ce qui est un principe général de la loi.

M. Gar Knutson: Quelqu'un d'autre veut intervenir? Non?

Je n'ai plus de questions.

Le président: Mme Carroll suivie par moi-même, à moins que quelqu'un d'autre ne soit prêt.

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Merci, monsieur le président.

Comme d'habitude, M. Knutson m'a coupé l'herbe sous le pied. J'avais moi aussi des réserves quant à la page 5, et je me demande comment vous pouvez admettre le fait qu'aucune loi provinciale ne peut être inférieure à la LCPE pour ce qui est des accords d'harmonisation. Je ne crois pas que la situation du Barreau canadien ait examiné le dernier accord d'harmonisation qui a été signé. Ou en avez-vous parlé dans vos délibérations?

Mme Patricia Houlihan: Non, nous n'en avons pas parlé.

Mme Magdalena Muir: Nous n'en avons pas parlé dans ce contexte-ci. Nous y avons jeté un bref coup d'oeil et fait des observations sur les versions antérieures, mais non sur le plus récent des trois sous-accords.

Mme Aileen Carroll: Vous m'obligeriez beaucoup, si vous pouvez le faire, si vous nous disiez ce que vous pensez à ce sujet.

Je remarque moi aussi qu'à la page 6—et je sais qu'on en a parlé—au troisième paragraphe, vous dites: «Les droits dont le (la) citoyen(ne) dispose pour intenter une action ne devraient pas être restreints aux termes de la LCPE.»

À votre avis, est-ce que le texte actuel du projet de loi restreint grandement ce droit?

Mme Patricia Houlihan: Nous ne nous souvenons pas du libellé exact ni l'une ni l'autre.

Mme Aileen Carroll: Votre observation a donc trait au texte de loi que nous avions auparavant.

Mme Patricia Houlihan: Non. Dans notre examen, nous avons examiné les différences qu'il y a entre les deux textes de loi, mais pour le moment, je ne peux pas me souvenir de ce que nous avons dit. Il m'est donc difficile de me prononcer sur le libellé.

Mme Aileen Carroll: D'accord.

L'autre partie sur laquelle je veux attirer votre attention—avant qu'on me coupe la parole—est celle que M. Knutson a mentionnée aussi, lorsque vous dites qu'il faut retrancher le mot «efficientes», «parce que ce mot pourrait miner la portée du reste de cette disposition». Je pense que vous avez fort bien répondu à cette question, quand vous avez dit que l'efficience pourrait jouer un rôle dominant dans la décision de remédier ou de corriger une situation.

Mme Magdalena Muir: Je pense que cela rejoint aussi ce que nous avons dit dans notre mémoire au sujet de l'approche à la prévention de la pollution. Pour la pollution, il y a des coûts qui rejoignent plus l'aspect correctif que préventif.

Mme Aileen Carroll: Donc, votre recommandation s'inspire de l'esprit de la loi ainsi que de la mention expresse qui est faite dans le préambule.

Mme Magdalena Muir: Oui.

Mme Aileen Carroll: Je pense qu'il est important que nous le sachions.

Me permettez-vous de passer tout de suite à la page 35 et à votre résolution 91-05-M, paragraphe 3:

    a) élargir les règles relatives à la qualité pour agir en matière d'environnement, y compris en ce qui a trait à la responsabilité civile, les recours en injonction et en déclaration et au contrôle judiciaire;

Auriez-vous l'obligeance de «traduire» cela pour le comité?

Mme Patricia Houlihan: La «qualité pour agir» est le droit d'intenter des poursuites dans une affaire environnementale. Par le passé, des problèmes se sont posés parce que les tribunaux ont souvent dit que si vous n'aviez pas d'intérêt direct ou si vous n'étiez pas directement touché et cela visait souvent un intérêt foncier ou un dommage direct à une personne—vous n'aviez pas alors qualité pour contester.

Ce qu'on dit ici, c'est qu'à notre avis les règles régissant la qualité pour agir doivent être élargies et clarifiées en matière environnementale de telle sorte que des poursuites puissent être intentées par ceux qui ne pourraient pas nécessairement prouver qu'ils ont un intérêt foncier ou que des dommages individuels leur ont été causés.

Mme Aileen Carroll: Merci.

Est-ce qu'il y aura un deuxième tour, monsieur le président, ou dois-je continuer jusqu'à ce que vous me coupiez la parole?

Le président: Non, vos cinq minutes ne sont pas écoulées.

Mme Aileen Carroll: Merci.

• 1615

Vous écrivez dans votre mémoire, page 2:

    En août 1997, l'ABC adoptait une résolution sur l'exécution fédérale des lois environnementales. Cette résolution énonce les principes fondamentaux de la position de l'ABC sur la question.

Vous mentionnez plus loin les besoins directement liés à l'application des lois environnementales.

J'imagine que cela demeure votre principale recommandation.

Mme Magdalena Muir: Oui, et c'est une chose à laquelle la Section et l'ABC ont donné suite, par des lettres qui ont été échangées avec Environnement Canada, divers ministères, et où nous avons maintenu et fait valoir cette position.

Mme Aileen Carroll: J'imagine que vous avez lu le rapport de notre comité au sujet de l'application des lois environnementales.

Mme Magdalena Muir: J'ai reçu divers documents du comité, mais je ne les ai pas ici. J'ai constaté que l'on continuait d'attacher de l'importance à l'application des lois environnementales.

Mme Aileen Carroll: Vous confirmez donc que cette résolution date d'août 1997. Pour en revenir donc à la résolution 91-05-M, lorsque vous mentionnez l'assemblée de l'Association du Barreau canadien de Vancouver en août 1989, ce n'est pas une erreur. C'est la bonne date, n'est-ce pas?

Mme Magdalena Muir: Ce que ces résolutions montrent—et il y en a une autre que j'ai citée aussi—, c'est que l'ABC, de manière générale, s'intéresse vivement à la protection de l'environnement et au rôle fédéral en matière environnementale. Ce sont comme qui dirait des résolutions évolutives qui ont été adoptées par l'ensemble du Barreau.

Mme Patricia Houlihan: C'est un thème constant, qui a l'aval de toute l'organisation. C'est donc un thème qui revient dans toutes les politiques de notre organisation.

Mme Aileen Carroll: Cette résolution exprime donc l'appui de l'ensemble du Barreau. Le Barreau y met tout son poids dans la balance.

Mme Patricia Houlihan: Oui.

Mme Aileen Carroll: En outre, on fait état de la perspective historique et d'un intérêt suivi.

Mme Magdalena Muir: Tamra peut peut-être vous dire comment l'on adopte ces résolutions.

Mme Tamra Thomson: Il y a plusieurs résolutions qui ont été adoptées par le conseil de l'ABC qui s'appuient sur des résolutions antérieures. Nous ne les avons pas toutes communiquées au comité, pour économiser le papier, mais elles s'appuient en fait sur des résolutions antérieures.

Le conseil de l'ABC est comme le Parlement de l'ABC; donc, même si ces résolutions ont été proposées par la Section nationale du droit de l'environnement ou par ses prédécesseurs, elles ont en fait été adoptées par l'ensemble du Parlement de l'ABC.

Mme Aileen Carroll: On peut donc penser qu'elles expriment les priorités des chapitres provinciaux de l'ABC?

Mme Tamra Thomson: C'est exact.

Mme Aileen Carroll: Merci.

J'ai terminé, monsieur le président.

Le président: Merci.

S'il n'y a pas d'autres questions dans ce premier tour, j'aimerais maintenant en poser quelques-unes.

Monsieur Herron? Non? D'accord.

J'aimerais que vous nous reparliez de votre réponse de 1996 à l'initiative gouvernementale, annexe C, et j'aimerais savoir si vous maintenez ces positions. Parce qu'elles sont exprimées avec force et qu'elles sont utiles.

Pour ce qui est du principe de la prudence et de la preuve scientifique, qui est le premier élément de cette réponse, que vous mentionnez déjà à la page 6 de votre mémoire, lorsque vous proposez le retrait de la notion d'efficience, vous dites que l'inclusion de cette notion annulerait totalement ce principe directeur fondamental qu'est le principe de la prudence.

C'est là une déclaration très importante. Maintenez-vous cette position?

Mme Patricia Houlihan: Oui, et je crois que nous l'avons exprimé dans le mémoire que nous vous avons remis.

Le président: Et c'est ce que vous vouliez dire lorsque vous avez répondu à M. Knutson plus tôt?

Mme Patricia Houlihan: Oui.

Le président: Bien.

Passons maintenant à la reddition de comptes; croyez-vous toujours que l'examen doit avoir lieu au bout de cinq ans au lieu de sept?

Mme Magdalena Muir: Étant donné la durée de cet examen-ci au bout de cinq ans, je serais certainement en faveur.

Le président: Réponse diplomatique.

Passons maintenant au droit d'intenter des poursuites, maintenez-vous votre position?

Mme Magdalena Muir: Patricia peut vous faire une réponse détaillée ici, mais je vous dirai à titre indicatif que nous avons délibérément limité l'ampleur de cette suggestion comparativement à la précédente étant donné que nous maintenons la proposition que nous avons faite plus tôt en 1994. Il s'agit ici de compléter cette suggestion ou de rappeler les mesures qui n'ont pas été mises en oeuvre.

Mme Patricia Houlihan: Lorsque nous nous sommes réunis pour rédiger notre mémoire, c'est sur quoi nous nous sommes basés, à savoir que nous avions présenté des mémoires par le passé et que ces derniers feraient partie de notre présent mémoire.

• 1620

Le président: C'est très utile. Quant au droit de poursuivre, par exemple, vous recommandez que le droit d'un citoyen d'entamer des poursuites privées ne soit pas assujetti à l'assentiment du procureur général.

Mme Patricia Houlihan: Oui.

Le président: À la page suivante, lorsqu'il est question des déversements, des fuites et d'autres incidents, vous dites que le gouvernement fédéral doit adopter un règlement pour combler le vide actuel.

Mme Magdalena Muir: Je dois dire qu'il s'agit d'un commentaire assez détaillé, et que nous ne nous sommes pas penchés précisément sur cette question au moment de rédiger le mémoire. Mais il n'y a aucune raison pour que cette position ne soit pas maintenue. Je veux simplement vous informer que nous n'avons pas examiné précisément cette question au moment de rédiger le mémoire.

Le président: C'est noté.

Passons maintenant à la biotechnologie, qui demeure un dossier aussi épineux qu'à l'époque. Lorsque Marshall Burgess, votre distingué prédécesseur, était président, vous étiez d'avis que le gouvernement devrait accepter la recommandation du comité permanent qui consistait à élaborer des normes nationales pour réglementer les répercussions de la biotechnologie sur l'environnement.

Diriez-vous que ces normes n'ont toujours pas été établies?

Mme Magdalena Muir: Je peux répondre brièvement à cette question. Je crois que nous serions favorables à l'idée que la LCPE tente de réglementer la biotechnologie et les organismes modifiés génétiquement. Comme vous pouvez le constater d'après les commentaires détaillés que nous avons présentés dans notre mémoire, nous sommes quelque peu préoccupés par l'efficacité des mesures prévues dans le projet de loi, le libellé des dispositions et leur application dans ce secteur scientifique. Cependant, on a l'impression, surtout chez les intervenants qui travaillent dans ce secteur, qu'il y a des lacunes réelles sur le plan des lois et des politiques, surtout à l'échelle internationale.

Le président: Dois-je donc comprendre que vous jugez souhaitable un cadre réglementaire en vertu de la LCPE?

Mme Magdalena Muir: Nous avons besoin d'un régime réglementaire qui soit à jour et à propos, et qui reflète l'évolution de la situation à l'échelle nationale et internationale.

Mme Patricia Houlihan: Un régime exhaustif; comme nous le disons dans cette recommandation, nous estimons qu'il devrait y avoir un régime exhaustif.

Le président: Au sujet des substances toxiques et des mesures de contrôle connexes, vous dites que le public devrait avoir le droit de déposer des avis d'opposition lorsque de nouvelles substances sont homologuées. Le gouvernement, dans sa réponse, a dit qu'il rejetait cette idée parce que cela entraverait le processus décisionnel rapide dans ce domaine. Vous dites ensuite que le gouvernement n'a homologué jusqu'à présent que 44 substances en cinq ans.

À l'heure actuelle, le projet de loi vise à accélérer le processus d'inscription des substances sur la liste. Êtes-vous d'avis que le processus est suffisamment rapide et que cette recommandation n'est plus nécessaire ou croyez-vous qu'elle demeure pertinente?

Mme Magdalena Muir: Je dois dire qu'historiquement il y avait de vrais problèmes en ce qui concerne la classification des substances toxiques en vertu de la LCPE. Je sais que cette question préoccupe beaucoup d'autres intervenants, y compris l'Association canadienne du droit de l'environnement. Cependant, je ne sais pas si nous pouvons dire avec beaucoup de certitude si le processus qui est envisagé maintenant sera plus efficace.

Le président: Très bien.

Enfin, à la page 8, peut-être pouvez-vous expliquer ce que vous voulez dire à l'avant-dernier paragraphe lorsque vous écrivez:

    La définition de la prévention de la pollution semble exiger que les «polluants comme les déchets» doivent être évités ou à tout le moins réduits au minimum. Ce qui soulève la question de la signification exacte de «polluants» et en quoi ils se distinguent des «déchets».

Peut-être pouvez-vous préciser davantage votre pensée?

• 1625

Mme Magdalena Muir: Si vous pouvez patienter encore quelques secondes, je vais me référer à la disposition législative pertinente.

Le président: Oui.

Mme Magdalena Muir: Je peux vous dire que nous nous sommes basés en partie sur la définition même de «polluant» et de «déchet». De toute évidence, un déchet n'est pas nécessairement toxique—comme le sable et le bois, par exemple. Nous avons simplement cru qu'il pourrait être utile, vu l'utilisation qui est faite de l'expression, d'avoir une définition claire.

Le président: Est-ce que vous recommandez que l'on définisse le terme «déchet» dans la loi? Est-ce bien ce que vous dites?

Mme Magdalena Muir: Dans la mesure où le terme est employé et qu'il a un sens important, oui.

Le président: Et quelle est la définition que vous proposez?

Mme Magdalena Muir: Je ne pense pas que je pourrais vous la donner maintenant.

Le président: Pensez-vous que vous pourriez le faire à une date ultérieure? Dans une semaine?

En d'autres mots, avez-vous les ressources nécessaires pour vous pencher sur la question, qui trouble certainement ce comité? Je dois vous dire que nous cherchons nous-mêmes à définir ce terme.

Mme Magdalena Muir: Ce n'est pas le terme qui pose problème; nous discutons seulement de l'engagement que nous pouvons prendre dans un délai donné, entre autres parce que de nombreux intervenants de la Section nationale du droit de l'environnement doivent assister à des réunions à Ottawa d'ici la fin de la semaine. C'est donc une question de temps.

Le président: Vous pouvez leur dire que s'ils ont un peu de temps à nous consacrer, et qu'ils ont une définition à nous proposer d'ici deux semaines, nous leur en saurions gré.

Mme Magdalena Muir: Je me réjouis que vous vous intéressiez à cette question. Peut-être que nous pourrions nous entendre pour étudier ce paragraphe et le préciser, et vous transmettre une lettre d'ici deux semaines. Est-ce que cela vous conviendrait dans le cadre de vos délibérations?

Le président: Oui, cela serait très utile. Merci.

Voilà qui met fin à la première ronde.

Qui est prêt à amorcer la deuxième ronde? Monsieur Knutson.

M. Gar Knutson: Le fait que cette loi soit subordonnée à d'autres lois fédérales constitue une pomme de discorde. Le paragraphe 2(2) fait qu'elle est subordonnée. Certaines personnes disent que c'est un recul par rapport à la LCPE de 1988. Je me demande si vous partagez cet avis.

Mme Magdalena Muir: Pouvez-vous répéter votre question, s'il vous plaît?

M. Gar Knutson: Bien sûr.

Mme Patricia Houlihan: Je ne pense pas que nous ayons adopté une position à ce sujet.

M. Gar Knutson: Avez-vous une opinion sur la question?

Mme Patricia Houlihan: Personnellement, oui, mais...

M. Gar Knutson: Pourquoi ne pas nous en faire part?

Mme Patricia Houlihan: Nous représentons ici l'Association du Barreau canadien.

Je pense qu'il faut le préciser, et c'est ce que ce paragraphe vise à faire. Si la LCPE est censée être une loi secondaire, cela doit être clair. Nous n'étions pas convaincus que le projet de loi était clair à ce sujet, et qu'un tribunal ne dirait pas plus tard, eh bien, c'est en fait...

M. Gar Knutson: Si cette loi est subordonnée à d'autres lois, n'est-ce pas une mauvaise nouvelle pour l'environnement?

Mme Patricia Houlihan: C'est notre thème principal, en tout cas, que les changements relatifs à l'application de la loi et à la participation du public ne devraient pas entraîner de conséquences néfastes pour l'environnement. C'est un peu comme dans le cas de l'accord d'harmonisation. Nous appuyons ces changements dans la mesure où l'environnement n'en souffrira pas.

M. Gar Knutson: Mais c'est facile; tout le monde en conviendra. L'industrie des pâtes et papier en conviendra. Tout le monde en conviendra. David Pratt en conviendra. On entre dans les détails... et je suis bien conscient que votre organisation n'est pas ici au grand complet.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): C'est une flèche à l'endroit de David Pratt.

M. Gar Knutson: Non, je...

Mme Magdalena Muir: Je pense que l'une des questions ici, c'est qu'il s'agit de la loi que nous examinons en ce moment, et dans la mesure où elle ne va pas s'appliquer, ou les parties conviennent qu'elle ne s'appliquera pas, ou la situation est telle qu'elle ne s'appliquera pas, il faudrait préciser clairement que cela ne devrait pas être laissé à la discrétion du ministre ou à la discrétion des différents ministères.

• 1630

Je pense que nous avons pris une position assez claire en ce qui concerne les aspects administratifs et les droits prescrits dans la loi. C'est comme harmoniser des ministères qui souvent n'ont pas les mêmes positions ou qui ne collaborent pas nécessairement dans tous les dossiers.

M. Gar Knutson: C'est juste. Et vous croyez que cet article... si vous avez un problème environnemental et qu'Environnement Canada déclare que ça relève plutôt d'Agriculture Canada en vertu de telle et telle loi. La personne s'adresse alors à Agriculture Canada, qui lui répond qu'elle doit retourner à Environnement Canada, que cela relève de la LCPE.

Mme Magdalena Muir: Il y a bien cet aspect, mais je pense qu'il y a aussi un autre aspect, par exemple lorsqu'il y a une participation du public en vertu de la LCPE et que les deux ministres se réunissent et décident qu'une autre loi est suffisante pour régler le problème et que la LCPE n'est pas nécessaire—mais l'autre ne prévoit aucune participation du public. La Loi canadienne sur la protection de l'environnement prévoit une vaste participation du public, du moins si on la compare à d'autres lois fédérales.

M. Gar Knutson: La loi de 1988? Est-ce de celle-là dont vous parlez?

Mme Magdalena Muir: Oui, parce que je fais allusion aux droits de participation du public par comparaison, disons, avec une autre loi qui réglemente l'agriculture ou le transport.

M. Gar Knutson: D'accord.

À la page 37 de votre mémoire, vous parlez du droit d'entamer des poursuites. Il s'agit de la réponse à l'examen quinquennal de la LCPE qui figure à l'annexe C.

Vous dites que selon la SNDE, le droit d'un citoyen d'entreprendre des poursuites privées ne devrait pas être subordonné à l'assentiment du procureur général. C'est la première fois qu'on en parle, à ma connaissance; peut-être a-t-on soulevé ce point en mon absence.

Pouvez-vous m'éclairer au sujet de ce que la loi prévoit en ce qui concerne les poursuites privées en vertu d'une loi fédérale?

Mme Patricia Houlihan: Vous avez le droit d'entamer des poursuites en tant que citoyen, d'entamer une poursuite privée. Il y a toutefois des problèmes, en ce sens qu'en Colombie-Britannique, par exemple, le procureur général peut intervenir dans toutes les causes et décider de prendre ces dossiers en main ou de suspendre ces causes. En fait, vous n'avez pas le droit à titre individuel d'entamer des poursuites lorsque le gouvernement ne le fait pas.

C'est l'une des préoccupations soulevées par la SNDE. Si une loi, comme la Loi sur les pêches, accorde à un particulier le droit d'entamer des poursuites, ce droit devrait être garanti au lieu d'être laissé à la discrétion du procureur général.

M. Gar Knutson: Où est-ce écrit? Je ne mets pas votre parole en doute, mais quelle loi faudrait-il changer? En vertu de quel pouvoir le procureur général peut-il suspendre des poursuites entamées par un particulier?

Mme Patricia Houlihan: On peut prétendre que le procureur général n'a pas le pouvoir de le faire, et c'est l'un des problèmes que l'on observe en Colombie-Britannique.

M. Gar Knutson: Vous dites «peut»? Est-ce que cela a été tiré au clair par les tribunaux?

Mme Patricia Houlihan: Non, c'est l'une des positions que nous pourrions prendre.

Mme Magdalena Muir: En fait, j'ai eu à me pencher sur cette question dans une autre cause, et c'est pourquoi je peux faire quelques commentaires à ce sujet. C'est en partie parce qu'il est responsable des tribunaux que le procureur général, que ce soit au niveau de la province ou au niveau du gouvernement fédéral, a le droit en vertu de la common law, d'intervenir pendant les travaux de l'appareil judiciaire pour suspendre des poursuites en cours. C'est tout simplement de la compétence générale des tribunaux.

Toutefois, si la loi de fait précisait que le procureur général, du chef de la province ou du gouvernement fédéral, n'avait pas le droit d'interrompre une poursuite, et qu'il suffisait peut- être que le tribunal estime que la poursuite n'est ni frivole, ni sans fondement, alors dans ce cas, ce droit n'existerait pas.

Il semble donc que c'est un droit qui existe uniquement pour l'administration de la justice, pour la pratique des rouages de la justice, et si on voulait le supprimer, il suffirait d'en nier l'existence. En fait, il faudrait une disposition négative pour supprimer ce droit.

M. Gar Knutson: Quelqu'un peut-il proposer le libellé, nous dire où nous devrions inclure cela?

Mme Magdalena Muir: Nous n'avons pas préparé de libellé à cet effet. Étant donné que nous nous sommes engagés à vous donner une réponse dans le cas de l'autre question, nous pourrions peut-être vous faire une première proposition en même temps, si c'est ce que vous souhaitez.

M. Gar Knutson: Il ne faudrait pas perdre trop de temps là- dessus car je pense que nous pouvons nous attendre au pire si nous nous lançons là-dedans. Les procureurs généraux des provinces vont certainement nous le reprocher.

Mme Patricia Houlihan: Heureusement, il n'y a que la Colombie- Britannique qui ait adopté comme politique d'intervenir dans tous les cas, mais c'est une chose qui pourrait susciter des problèmes.

M. Gar Knutson: Ça pourrait valoir la peine de nous pencher là-dessus.

C'est tout ce que je voulais dire.

• 1635

[Français]

Le président: Merci.

Madame Girard-Bujold, s'il vous plaît.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: À la page 11 de la version française de votre mémoire, vous dites au sujet de l'article 14:

    L'immunité prévue en matière civile ou pénale pour la communication faite de bonne foi par la voie du Registre est susceptible d'engendrer des abus en raison de l'absence de critères pour régir la conservation des renseignements au Registre.

Pourriez-vous élaborer sur ces critères? C'est à la page 10 en anglais.

[Traduction]

Mme Magdalena Muir: C'est le paragraphe 13(2) du projet de loi qui définit les critères d'établissement du Registre de la protection de l'environnement, et je cite:

    (2) Le ministre peut fixer les modalités de forme, de tenue et d'accès du Registre.

Ainsi, on constate que le projet de loi ne contient pas beaucoup de détails quant à ces critères.

Mme Patricia Houlihan: C'est là le problème—l'absence de critères. C'est ce que nous disions, il n'y a pas de critères.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Vous devriez nous dire quels critères devraient être pris en considération.

[Traduction]

Mme Patricia Houlihan: Pas pour l'instant, non. Nous n'avons pas étudié cela en détail.

Mme Magdalena Muir: Je m'abstiendrai de vous donner des détails précis dans ma réponse, mais cet article porte sur les renseignements disponibles. En l'absence de critères détaillés, il ne faudrait pas créer une situation telle que si quelqu'un communique un avis ou autre document, il bénéficie de l'immunité en matière civile ou pénale du fait même de cette communication parce que, essentiellement, cela reviendrait à protéger des parties en leur permettant de communiquer ces avis ou documents.

C'est donc l'inquiétude qui a été soulevée, et l'on souhaiterait que si l'on accorde une certaine protection pour la communication d'un avis ou d'un autre document de bonne foi, par la voie du registre, on définisse strictement le genre d'avis ou de document visé car cela ne devrait pas entraîner l'immunité.

Je me reporte à l'article 14 dans son ensemble. Je cite:

    14.(1) Malgré toute autre loi fédérale, les personnes visées au paragraphe (2) bénéficient de l'immunité en matière civile ou pénale pour la communication totale ou partielle d'un avis ou autre document faite de bonne foi par la voie du registre ainsi que pour les conséquences qui en découlent.

Nous voulons signaler, si l'on offre une certaine protection, qu'il est important de veiller à définir les circonstances.

Un pouvoir dont il n'est pas vraiment question dans les dispositions de la loi, mais dont on discute abondamment quand il s'agit de loi environnementale, est celui de la nature des vérifications environnementales. Des poursuites peuvent-elles être intentées du fait que quelqu'un communique l'existence d'une violation?

Je ne dis pas que nous sommes en présence d'un cas identique ici mais voilà un exemple de situation où ce genre de questions se posent.

Le président: Merci, madame.

Monsieur Gilmour, allez-y.

M. Bill Gilmour: Merci, monsieur le président.

Je poursuis dans la même veine que M. Knutson à propos du procureur général. Quand nous discutions de l'exécution, nous avons entendu un des agents d'exécution de Colombie-Britannique exprimer son mécontentement du fait qu'en possession d'un chef d'accusation très précis, le procureur général n'en a pas moins suspendu les procédures.

Dites-moi si, avec ces dispositions législatives-ci, étant donné le droit conféré au procureur général, nous innovons? Est-il courant dans les lois fédérales que le procureur général ait le droit de suspendre une instance?

Mme Patricia Houlihan: Cela n'a rien de nouveau.

Mme Magdalena Muir: Cela a une incidence sur l'administration des tribunaux, sur la gestion des affaires. Par exemple, en matière pénale, je peux intenter une poursuite privée devant un tribunal pénal, mais le procureur général a toujours le droit—et cela serait du chef de la province, parce que ce sont les procureurs généraux qui administrent les lois pénales dans les provinces—d'intervenir et de refuser que je poursuive l'affaire, ou il peut encore me damer le pion et intenter sa propre poursuite, de telle sorte que dès qu'il intente sa propre poursuite, en tant que citoyen privé, je perds tout droit d'intenter mon action privée, et le procureur général, qui agit au nom du public, a le champ libre. Cela peut causer des problèmes si, par exemple, le ministère public ne poursuit pas l'affaire de façon aussi énergique qu'un particulier. Je vous donne donc cet exemple.

Mme Patricia Houlihan: Cela pose des problèmes également quand les gens ont l'impression que cela est fait pour des motifs politiques plutôt que pour faire respecter les critères normalement appliqués.

M. Bill Gilmour: Merci de cette précision.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Gilmour.

• 1640

À la page 6, à l'annexe B, il y a un paragraphe de votre résolution qui remonte sans doute à plusieurs années, à en juger d'après le préambule. La résolution 5, qui est tout autant d'actualité aujourd'hui qu'elle l'était autrefois, dit ceci et je cite:

    que le gouvernement du Canada adopte une stratégie nationale visant à remédier au problème de la contamination toxique et

—voici donc les éléments clés—

    fixe un objectif national de réglementation de rejet nul des substances toxiques persistantes.

Avez-vous des suggestions à faire quant à la façon dont cet objectif pourrait être mis en oeuvre? Il y a longtemps qu'on réclame des mesures à cet égard et cela semble peine perdue.

Mme Magdalena Muir: Notre suggestion—et Patricia voudra sans doute apporter un complément d'information—serait d'ordre général puisque, comme vous le savez, nous avons adhéré au principe de la prudence, que nous voulons aborder la lutte contre la pollution grâce à la prévention, car nous estimons qu'il existe un éventail de solutions, et qu'il ne faut pas se limiter uniquement à un contrôle musclé mais envisager également l'utilisation de toute une gamme d'instruments économiques ou de mesures axées sur le marché.

Malheureusement, nous ne pouvions pas en dire davantage pour réclamer que l'on songe à tout un éventail de mesures, que la loi elle-même qui est l'instrument d'exécution contienne tout un éventail de solutions et qu'elle ne se limite pas exclusivement à énoncer des interdictions.

Mme Patricia Houlihan: Je pense que le problème est dû en partie au fait qu'à ma connaissance, il n'existe pas pour l'instant d'objectif national de réglementation de rejet nul, en tout cas rien d'assez musclé. Ainsi, quelles que soient les mesures prises pour apporter des améliorations, l'objectif, en particulier quand il n'est pas défini, ne peut pas être atteint. Quand on ne sait pas où l'on s'en va, on ne peut pas y arriver—c'est ni plus ni moins cela.

Le président: Merci.

Monsieur Pratt.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Merci, monsieur le président.

À la page 1 de votre mémoire, vous abordez la question de l'alinéa 16(4)d). Plutôt que de reprendre tout l'article, je vais laisser aux membres du comité le soin de le lire en privé, mais je voudrais signaler ce que vous dites à la dernière ligne de votre mémoire: «L'intention et la portée de cette disposition sont vagues et devraient être réexaminées avec soin.»

À mon avis, à première vue, il ne serait pas souhaitable que la portée de l'article soit élargie en ce qui concerne les rapports volontaires. Quelle suggestion en particulier avez-vous à faire à cet égard?

Mme Patricia Houlihan: L'essentiel dans le cas de cet article est que l'on ne peut pas réglementer de cette façon. Cela met en cause les rapports employeurs-employés pour ce qui est des rapports volontaires, mais cela n'est pas dit très clairement dans le libellé de l'article. Nous signalons tout simplement des lacunes du côté de la forme plutôt que du côté du fond.

Mme Magdalena Muir: En général, nous serions en faveur d'une protection très large des employés-dénonciateurs. C'est le libellé de l'article qui nous inquiète un peu, et nous nous demandons à quoi il fait référence. Par exemple, qu'est-ce qu'on veut dire par «renvoyer ou harceler»?

Nous nous demandons également qui est réputé être un employé, et quelles sont les parties qui seraient touchées par cette disposition.

M. David Pratt: Avez-vous des recommandations précises quant à cet article?

Mme Magdalena Muir: Si vous me demandez si nous avons envisagé de refaire cet article, la réponse est non. Nous n'avons pas envisagé un autre libellé pour cet article.

Mme Patricia Houlihan: Il faut tout simplement une précision, que les rédacteurs de lois peuvent apporter très facilement. Il faut tout simplement préciser à qui cet article s'applique et qu'il veut dire exactement.

Nous sommes en faveur de la protection des employés qui dénoncent les problèmes qui se posent; il s'agit tout simplement de vous assurer que le sens est clair. Le but est de faire en sorte que ces articles ne fassent pas l'objet d'une contestation devant les tribunaux pour déterminer le sens de l'article.

Mme Magdalena Muir: Nous avons fait quelques observations dans notre mémoire. D'une certaine façon—et je pense que l'intention de la loi est de couvrir toute la portée de l'autorité fédérale—il y a parfois des préoccupations sur la définition de cette portée dans la loi. C'est la définition d'une «entreprise fédérale» qui nous inquiète principalement.

Je crois que nous avons fait une observation sur cette définition dans notre mémoire, si vous me permettez de faire référence à ce paragraphe.

M. David Pratt: Oui, la définition d'une entreprise. Je la lisais il y a quelques instants.

• 1645

Mme Magdalena Muir: Si vous lisez la définition d'une «entreprise fédérale», vous constaterez que le problème le plus important est qu'il y a une liste de toutes sortes de domaines qui sont de juridiction fédérale en vertu de la Loi constitutionnelle.

La définition finale d'une entreprise fédérale se trouve à l'alinéa 3(1)i), et cette définition pose vraiment problème. Car elle dit:

    (i) les installations, ouvrages et entreprises ne ressortissant pas au pouvoir législatif exclusif des législatures provinciales.

Eh bien, dans notre régime constitutionnel, rien n'est vraiment un domaine de juridiction exclusive peu importe le palier de gouvernement.

M. David Pratt: Pardonnez-moi; pourriez-vous répéter cette remarque?

Mme Magdalena Muir: Je parle de la phrase suivante:

    les installations, ouvrages et entreprises ne ressortissant pas au pouvoir législatif exclusif des législatures provinciales.

M. David Pratt: Désolé, où est-ce que cela se trouve?

Mme Magdalena Muir: Je m'excuse. C'est dans la définition d'une «entreprise fédérale», qui fait partie de ces discussions. Voilà pourquoi nous sommes inquiets de l'autre aspect—c'est-à-dire, quel est le lien entre cette définition et l'alinéa 3(1)i) sous la définition d'une «entreprise fédérale» dans la LCPE?

Je m'excuse de ne pas avoir cité l'alinéa comme il faut.

M. David Pratt: Très bien, je me retrouve maintenant.

Mme Magdalena Muir: Nos observations sur l'article 3 disent la même chose aussi. On dit:

    Cette définition des «entreprises fédérales» semble beaucoup trop large et ce, inutilement. Les éléments énumérés aux alinéas a) à h) sont suffisants et complets et, par ailleurs, il est peu de questions ou installations qui appartiennent à un champ de compétence exclusif aux provinces ou au gouvernement fédéral. La SNDE recommande de supprimer l'alinéa i).

M. David Pratt: D'accord.

Merci, monsieur le président.

Le président: Très bien.

Pour terminer, madame Torsney, allez-y, s'il vous plaît.

Mme Paddy Torsney: Merci.

Je voudrais reprendre une question. À la page 17 de votre mémoire, article 64, et dans l'annexe, à la page 36, paragraphe 5, vous parlez d'une «stratégie nationale visant à remédier au problème de la contamination toxique et que le gouvernement fixe un objectif national de réglementation de rejet nul des substances toxiques persistantes».

Certains scientifiques m'ont dit—et je pense que leurs remarques sont basées sur une interprétation juridique—qu'il n'est pas possible de définir «nul». Je suis un peu étonnée de voir ce mot dans votre mémoire. Je crois comprendre que la phrase «jusqu'à un niveau inférieur au niveau mesurable» est basée sur un précédent juridique quelconque.

J'essaie donc de déterminer si c'est l'élimination totale que vous préconisez, peut-être sous forme d'objectif énoncé dans la politique? Dans votre mémoire à la page 17, vous ne parlez pas spécifiquement d'un objectif de rejet «nul».

Mme Magdalena Muir: Vous faites une observation valable. On peut dire que c'est là où le langage a commencé à évoluer un peu. On a voulu partir du principe d'un rejet nul en évitant d'aborder la question de la certitude scientifique.

L'utilisation du mot «quasi-élimination» au lieu de «rejet nul» ne nous pose pas de problème puisqu'on sait que l'élimination totale est impossible. Ce n'est donc pas le mot «quasi-élimination» qui nous inquiète, mais plutôt sa définition au paragraphe 64(1).

Mme Paddy Torsney: C'est-à-dire?

Mme Magdalena Muir: Nous l'expliquons dans notre texte:

    La notion de quasi-élimination devrait comprendre l'entreposage ou le traitement des substances dangereuses visées pour limiter efficacement dans le futur leur intégration à l'environnement.

C'est un des aspects qui a été soulevé.

Mme Paddy Torsney: J'essaie de comprendre à quoi cela devrait s'appliquer. S'agira-t-il du paragraphe 1 ou 2?

Je saisis très mal le problème, c'est pour cela que je n'arrive pas vraiment à formuler la question.

Mme Magdalena Muir: Vous demandez si la deuxième phrase dans notre commentaire à la page 17 devrait s'appliquer à l'article 64.

Mme Paddy Torsney: C'est exact.

Mme Magdalena Muir: Parce que nous n'avons pas indiqué le numéro de l'article.

Un instant, je vous prie.

Mme Paddy Torsney: Certainement, si le président est d'accord.

• 1650

Mme Magdalena Muir: Je pourrais vous donner quelques précisions. Comme nous disons, il s'agit de «l'entreposage ou le traitement des substances dangereuses visées pour limiter efficacement dans le futur leur intégration à l'environnement». Cela rejoint, même si ce n'est pas dans les termes exacts, le sujet du paragraphe 64(1), c'est-à-dire tout ce qui précède l'expression «égal à la limite de dosage définie par règlement ou s'en rapprochant».

Un autre mot qui se trouve dans ce texte et qui nous paraît un peu trop vague c'est le mot définitif, c'est-à-dire la réduction définitive qui semble laisser entendre que cela serait possible dans un avenir lointain et tout cela reste très général.

Je fais donc deux commentaires. D'abord, l'entreposage ou le traitement afin de limiter dans le futur l'intégration de ces substances à l'environnement pourrait s'ajouter après les mots «la quantité ou concentration de cette substance» au paragraphe 64(1), en tenant compte de la proposition que nous faisons ici. Nous nous inquiétons un peu aussi de l'utilisation du mot «définitif», qui nous paraît très vague sans préciser la notion de temps.

Mme Paddy Torsney: Très bien. J'ai l'impression ici que vous cherchez, au moyen des définitions, à influer sur des questions de politique et que ce n'est peut-être pas l'article 64 qui est en jeu mais plutôt les substances toxiques. Il me semblait que cela risquait de compliquer davantage le texte plutôt que d'apporter un éclaircissement dans le sens que vous faites une sorte d'amalgame. Mais on pourra peut-être y réfléchir.

Le président: Cela démontre bien le danger que représente la rédaction juridique pour les politiciens. Malgré tout...

Mme Paddy Torsney: Exactement.

Mme Magdalena Muir: C'est un peu risqué pour nous aussi de décider au pied levé que c'est à ce paragraphe que s'applique notre recommandation. Le problème général concernait la définition; quant à savoir s'il nous faut une définition ou bien une définition aussi complexe, c'est une autre paire de manches. Ils veulent soulever ici le problème de l'avenir même si...

Mme Paddy Torsney: C'est ça. Quant à cette réduction «définitive», je pense qu'il faut revoir le choix du mot.

Le président: Merci.

Madame Carroll, une dernière intervention.

Mme Aileen Carroll: Merci, monsieur le président.

Même si je suis d'accord avec Mme Torsney sur les difficultés qu'elle a fait ressortir, je vous remercie de la précision que vous avez faite à la page 12 concernant l'article 22, soit que le mot «important» est redondant en fait. Je crois que d'autres l'ont déjà mentionné, mais peut-être pas aussi clairement que vous l'avez fait; en effet, quand le Parlement crée une infraction, affirmant ainsi qu'une action donnée porte atteinte, vous êtes d'accord avec d'autres, y compris moi-même, pour dire que l'emploi du mot «important» n'éclaircit rien mais constitue plutôt une redondance juridique.

Mme Patricia Houlihan: Cela crée aussi un autre obstacle, puisqu'on peut se retrouver devant les tribunaux à débattre de l'importance de l'atteinte.

Mme Aileen Carroll: L'Association du Barreau canadien proposerait donc de tout simplement omettre le mot «important» de l'article?

Mme Patricia Houlihan: Oui. Notre deuxième phrase se lit ainsi: «La seule exigence de la loi devrait viser toute atteinte à l'environnement.»

Mme Aileen Carroll: D'accord. Ce point est donc clair.

Merci.

Le président: Votre mémoire nous a beaucoup aidés, et nous vous remercions d'avoir comparu aujourd'hui devant le comité et de nous avoir donné des réponses à tant de questions. Nous allons tenir compte de vos conseils. Nous serons heureux de recevoir votre lettre, si vous décidez de nous en envoyer une, possiblement dans les deux semaines à venir.

La séance est levée.