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ENSU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 19 novembre 1997

• 1537

[Traduction]

Le président (M. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Bonjour.

[Français]

Bonjour, tout le monde.

[Traduction]

Pour reprendre nos travaux, je voudrais souhaiter la bienvenue, au nom du comité, à M. Slater, d'Environnement Canada, à M. Cleland, de Ressources naturelles Canada, et à M. Heinbecker, des Affaires étrangères.

Pour faciliter les échanges, je me demande si, cet après-midi, les trois témoins pourraient combiner leurs efforts de façon à présenter leurs trois exposés en une demi-heure en tout. Cela vous impose-t-il une discipline trop stricte ou est-ce possible?

M. Robert W. Slater (sous-ministre adjoint principal, ministère de l'Environnement): Je pense que nous pouvons nous plier à une discipline acceptable.

Dois-je commencer, monsieur le président?

Le président: Avant tout, permettez-moi de vous souhaiter à nouveau la bienvenue devant notre comité, monsieur Slater. Nous sommes heureux de vous revoir, ainsi que vos collègues.

Vous pouvez décider dans quel ordre et comment vous voulez procéder.

M. Robert Slater: Nous avons discuté entre nous de la meilleure façon de répondre aux questions posées par le comité qui, avons-nous pensé, porteront principalement sur la façon dont le gouvernement gère le dossier du changement climatique et sur ce dont s'occupe actuellement chaque organisation.

Au nom de nous tous, j'ai préparé un ensemble de transparents dont la version sur papier vous est actuellement distribuée. Il montre comment les choses sont organisées à Environnement Canada et au sein du gouvernement fédéral, ainsi que comment le processus fédéral-provincial et le processus international sont organisés. Ensuite, monsieur le président, chacun d'entre nous parlera du rôle particulier de chaque organisation.

• 1540

Au ministère de l'Environnement, nous avons mobilisé toute l'organisation pour soutenir les travaux que nous devons réaliser sur le changement climatique, ce qui représente pour nous une quantité extraordinaire de travail. Nous avons, en fait, quatre sous-ministres adjoints qui travaillent abondamment sur ce dossier. En tant que sous-ministre adjoint principal, je suis chargé de la coordination.

Les principales activités sont indiquées dans les cases que je vais vous indiquer; en bas à gauche, c'est le secteur scientifique, dirigé par Gordon McBean. Je pense que Gordon a déjà comparu devant votre comité et vous a expliqué ce travail. À droite, il y a le travail politique. C'est surtout les groupes des politiques et des communications qui s'en occupent, mais également le groupe de la protection de l'environnement. En bas à droite, il y a les négociations internationales. Le travail que nous faisons dans ce domaine est dirigé par le sous-ministre adjoint à la protection de l'environnement, Tony Clarke. En bas à gauche, vous voyez la stratégie de communication et les communications communautaires. Ce service est dirigé par notre directeur général des Communications, Anne Marie Smart. Relativement à ces questions, je relève, bien entendu, du sous-ministre et de notre conseil de gestion, parce que tout le ministère participe à cela d'un océan à l'autre.

Même si Environnement Canada a une forte présence dans ce domaine, cela ne constitue qu'une partie de l'effort fédéral. Il est clair qu'au niveau du gouvernement fédéral, la prise de décision est du ressort du Cabinet et des comités du Cabinet, qui sont indiqués dans ce tableau. Il y a un Comité des sous-ministres adjoints, le Comité de coordination du développement durable, qui examine le déroulement des activités et indique la marche à suivre. Ensuite, de façon permanente, nous avons à droite ce que nous appelons un comité principal des SMA. Il regroupe les ministères qui ont le rôle le plus important dans ce domaine: les ministères de l'Environnement, des Ressources naturelles, des Affaires étrangères, des Finances, de l'Industrie, des Transports ainsi que le Bureau du Conseil privé. Ils supervisent l'élaboration des politiques et des programmes ainsi que les communications. À gauche, pour les activités scientifiques, j'ai mentionné que Gordon McBean dirigeait ces initiatives au sein d'Environnement Canada, mais il collabore avec ses collègues des ministères des Ressources naturelles, de l'Agriculture et des Pêches et Océans pour mettre au point l'ensemble des activités scientifiques fédérales.

C'est donc ainsi qu'opère le gouvernement fédéral, mais il existe une structure très importante et très complexe destinée à assurer la participation des gouvernements provinciaux. Le groupe mixte des ministres de l'Environnement et de l'Énergie qui s'est réuni la semaine dernière à Regina représente le niveau politique le plus élevé. Il est assisté par un groupe de sous-ministres, assisté à son tour par un groupe de sous-ministres adjoints plus axé sur le travail pratique. À cela s'ajoute le travail lié aux activités internationales concernant le changement climatique, la CEE-ONU, le protocole de Montréal, l'Accord Canada-États-Unis sur la qualité de l'air et toutes sortes d'autres choses qui doivent toutes être intégrées et combinées très étroitement pour faire en sorte qu'il y ait, au niveau ministériel, une coordination entre le gouvernement fédéral et tous les gouvernements des provinces et des territoires.

• 1545

Mon dernier transparent a pour titre «le processus international». Il s'agit-là des activités scientifiques et de la façon dont elles sont coordonnées.

À gauche, il y a le groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat, le GIEEC et ses différents groupes de travail. Je pense que vous avez déjà entendu à plusieurs reprises Jim Bruce, le président du groupe de travail III—stratégies de parade. Le groupe de travail I sur les données scientifiques, dirigé par Gordon McBean, y est représenté. D'autres spécialistes canadiens fédéraux et provinciaux travaillent dans ce secteur.

En haut à droite, nous indiquons certains des principaux mécanismes informels de consultation existants dans lequel le Canada joue un rôle important. Paul Heinbecker, qui est négociateur en chef et chef de la délégation, nous parlera des processus formels concernés. Il y a un processus semi-formel auquel sont associés les pays suivants: le Japon, les États-Unis, le Canada, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Suisse, la Norvège, le Mexique, l'Islande et la Corée. On le désigne du sigle JUSCANZ. Il sert à tâter le terrain auprès des autres pays avant d'adopter une position officielle. C'est un mécanisme informel.

Les groupes qui figurent en bas, le groupe spécial sur le mandat de Berlin, l'organe subsidiaire pour la mise en oeuvre et l'organe subsidiaire pour la consultation scientifique et technique sont des mécanismes formels associés à toutes ces activités liées au changement climatique.

La case «Consultations internationales officieuses» indique les endroits où le Canada discute normalement avec d'autres pays et est informé par ceux-ci de leurs différentes positions au sujet du changement climatique. Bien entendu, vous savez certainement que, ces derniers temps, tous ces grands groupes internationaux—la Francophonie, le Commonwealth—se sont réunis au cours des dernières semaines, et l'APEC va en faire autant dans les jours qui viennent. Toutes ces tribunes offrent au Canada la possibilité de voir l'écho suscité par ses idées et permettent également de renforcer et d'élargir le consensus international.

C'est une organisation qui mobilise littéralement les talents de dizaines de milliers de gens dans le monde et d'un très grand nombre d'employés de nos organisations. Cela peut paraître impressionnant, mais je pense que l'on peut en tirer un enseignement, parce qu'en fait, ce processus est fondamentalement très semblable à celui que le Canada a utilisé pour les pluies acides aussi bien au sein du ministère de l'Environnement, qu'au niveau fédéral, fédéral-provincial et international. Les similitudes des rôles que nous avons joués, des dispositions de coordination et des activités relatives aux politiques et aux communications sont tout à fait frappantes.

Bien entendu, le changement climatique est un sujet beaucoup plus complexe—nous entendrons des explications à ce sujet, et vous connaissez très bien la question—, mais, fondamentalement, il présente de grandes similitudes avec les pluies acides. Ces dernières sont, bien entendu, une des questions environnementales que nous avons gérées avec le plus de succès depuis une dizaine d'années.

• 1550

Voilà donc le processus en place à l'heure actuelle. Quand un accord international sera conclu à Kyoto, beaucoup de gens diront que nous devons réexaminer ce processus. Nous devrons réexaminer ces dispositions institutionnelles et voir comment les adapter pour qu'elles répondent mieux aux besoins que Kyoto nous imposera.

Je voudrais prendre quelques minutes pour vous décrire le travail ou le rôle du ministère de l'Environnement dans les domaines généraux des sciences, des communications, de la politique et des opérations.

Dans le domaine des sciences, nous dépensons plus de 10 millions de dollars par an. Nous suivons l'évolution du changement climatique—le climat et sa variabilité. Nous observons les sources de gaz à effet de serre et nous faisons rapport à ce sujet. Nous essayons de comprendre les phénomènes écologiques et les répercussions que le changement climatique a sur eux. Nous avons une capacité très importante de modélisation qui nous permet de prévoir les tendances du changement climatique, et le plus gros superordinateur du Canada est utilisé à 40 p. 100 pour cela.

Nous faisons de la recherche sur l'adaptation, ce dont vous a parlé Roger Street. Nous faisons également des recherches générales d'impact sur les écosystèmes et leurs effets. À cet égard, nous participons très activement aux initiatives scientifiques internationales.

Pour les communications, nous essayons d'approfondir notre connaissance de cette question afin que les Canadiens sachent mieux ce qu'ils peuvent faire et puissent aussi appuyer les difficiles décisions politiques qui devront être prises à ce sujet.

C'est avec plaisir que je remettrai au comité la trousse d'information la plus récente, qui inclut des explications générales sur le changement climatique et des feuilles de renseignements et fait référence au site Web que nous venons de lancer.

Nous avons également des activités communautaires dans le cadre de notre programme Action 21, et nous faisons connaître systématiquement les succès obtenus par des gens qui ont fortement contribué à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Nous sommes évidemment aussi très actifs sur le plan politique.

Pour finir, je voudrais parler de ce que fait le ministère de l'Environnement. Nous avons un grand nombre d'édifices et d'activités. Je voudrais en citer simplement quelques exemples.

Nous avons récemment formé en Alberta un consortium sur l'énergie non polluante qui fournira de l'énergie éolienne à toutes nos installations de cette province. Grâce à cela, les émissions de gaz à effet de serre associées à nos activités y diminueront de 2 000 tonnes par an.

Dans une seule installation de l'Ontario, le Centre canadien des eaux intérieures, nous allons réduire les émissions de gaz à effet de serre de 1 700 tonnes par an environ en améliorant le rendement énergétique et en utilisant la cogénération.

D'ici à 2010, nous pensons que 15 à 20 p. 100 de l'énergie utilisée dans le ministère proviendra de sources d'énergie renouvelables.

Monsieur le président, mon intention était de vous présenter un tour d'horizon d'Environnement Canada et des organisations avec lesquelles nous collaborons.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Slater.

Voulez-vous prendre la parole maintenant, monsieur Cleland?

M. Mike Cleland (sous-ministre adjoint, secteur de l'énergie, Environnement Canada): Merci, monsieur le président.

J'ai remis des exemplaires d'un bref document au greffier. Je pense qu'ils ont été distribués aux membres du comité. Je ne vais donc pas le lire, mais simplement y faire référence.

• 1555

Mon exposé est, en fait, divisé en deux parties. Pour commencer, je voudrais simplement vous donner une idée générale des activités de RNCan concernant le changement climatique. Je prendrai ensuite un peu plus de temps pour vous donner un peu plus de détails au sujet de l'énergie.

L'énergie est, bien entendu, ce à quoi les gens pensent généralement quand on parle de RNCan, tout au moins en ce qui concerne le dossier du changement climatique. Je pense qu'il est très important de dire d'emblée que notre rôle est nettement plus général que cela.

Comme nous sommes un des principaux ministères scientifiques du gouvernement du Canada, nous traitons ce dossier de plusieurs façons différentes. Nous avons pour rôle de collaborer très étroitement avec Environnement Canada au sujet de la connaissance de la climatologie, des effets du changement climatique et des stratégies potentielles d'adaptation et, enfin, des stratégies d'atténuation et des technologies connexes.

Les premiers éléments relèvent de Marc Everell et d'Yvan Hardy, respectivement sous-ministres adjoints du secteur des Sciences de la terre et du Service canadien des forêts. M. Everell, conseiller scientifique principal, est responsable de la coordination générale à cet égard.

Monsieur le président, j'ai cité trois domaines qui sont simplement des exemples de ceux dans lesquels nos activités scientifiques soutiennent l'action d'ensemble du gouvernement fédéral. Je pense que ce qu'il est important de souligner ici est ce qu'a mentionné M. Slater dans son exposé, c'est-à-dire que ce travail est coordonné par le comité, au tout au moins par un protocole d'entente sur les activités scientifiques concernant les ressources naturelles. Dans ce contexte, le changement climatique représente un élément fortement prioritaire.

Pour finir, je parlerai très brièvement de ce que fait notre ministère dans le domaine des forêts. Le Service canadien des forêts apporte une contribution considérable à ce qu'on pourrait appeler la recherche scientifique en amont, l'étude des impacts et la question des stratégies d'adaptation. Bien entendu, la foresterie est aussi potentiellement un élément important de toute stratégie d'atténuation à cause du rôle potentiel des forêts comme puits d'ozone. La question de l'aménagement durable des forêts est donc nécessairement un élément important de la stratégie gouvernementale sur le changement climatique.

Je vais maintenant passer à l'énergie. Je n'ai certainement pas besoin de vous souligner l'importance du rôle que l'énergie joue à cet égard. La production et la consommation—et j'insiste sur la consommation—sont à l'origine d'environ 85 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre au Canada.

Face à cette question, le secteur de l'énergie entreprend un grand nombre d'activités, et il est impossible de toutes les énumérer. Pour vous donner une idée de leur ampleur, au cours du présent exercice, un peu plus de 60 p. 100—je dirais 63 p. 100—des dépenses non législatives prévues au budget du secteur de l'énergie sont consacrées totalement ou principalement à des mesures qui appuient la politique gouvernementale relative au changement climatique.

Le pourcentage correspondant au personnel est légèrement inférieur parce que les fonds consacrés aux subventions et aux contributions sont surtout destinés à l'atténuation du changement climatique.

En fait, ce pourcentage augmentera l'année prochaine. Vous savez tous sans aucun doute que, dans le budget de 1997, on a annoncé la création d'un fonds servant à prendre des mesures incitatives pour créer des conditions plus favorables aux investissements consacrés à l'efficacité énergétique et à l'énergie renouvelable. Quand ce fonds sera en place, environ 70 p. 100 de nos activités seront consacrées au changement climatique.

Comme Environnement Canada, nous employons plusieurs stratégies pour faire avancer ce dossier. Nous partageons avec Environnement Canada la responsabilité de l'élaboration des politiques et celle de la négociation des engagements internationaux avec Environnement Canada et le ministère des Affaires étrangères.

M. Slater a mentionné le comité principal des SMA. Il est inutile que je m'étende beaucoup plus sur cette question. De même, il a parlé de l'effort de coordination fédéral-provincial dont RNCan et Environnement Canada s'occupent conjointement pour soutenir le travail réalisé dans le cadre des réunions mixtes des ministres qui ont lieu chaque année, et vous êtes bien entendu au courant de celle qui s'est tenue la semaine dernière à Regina.

• 1600

RNCan assure la majeure partie de l'analyse économique du gouvernement du Canada dans ce dossier, mais je ne voudrais aucunement donner l'impression que nous sommes les seuls à nous en occuper. Beaucoup d'autres départements ont un rôle important à cet égard. Toutefois, RNCan fournit la modélisation et les prévisions économiques, de nombreuses études économiques approfondies et, ce qui est très important, étudie la consommation d'énergie dans l'économie. Une initiative que nous avons prise il y a quelques années a été la création d'une banque de données sur la consommation d'énergie grâce à laquelle le Canada est un des pays de l'OCDE les plus avancés dans sa connaissance de ce qui se passe dans l'économie et qui nous permet de concevoir de nouvelles mesures pour améliorer l'efficacité de la consommation d'énergie. Bien entendu, le travail d'analyse est coordonné par le Comité des SMA.

Notre principal domaine d'activités est l'efficacité énergétique; nous exécutons une vaste gamme de programmes qui couvrent tous les secteurs de l'économie, ce qui me paraît important parce que c'est une question qui touche véritablement tous ces secteurs. Nous utilisons également toute une gamme d'instruments tels que la persuasion, l'information, les engagements volontaires, la réglementation et les incitatifs financiers.

Ces activités sont coordonnées avec les provinces grâce à une série de lettres de collaboration que nous avons conclues avec la plupart d'entre elles. En outre, nous pratiquons une coordination internationale, surtout avec les États-Unis, mais également avec d'autres pays, par exemple par l'entremise de nos activités au sein de l'APEC et de notre coopération avec les pays d'Amérique latine et d'Amérique du Nord au titre de l'initiative hémisphérique sur l'énergie.

Les mesures volontaires... Sur le transparent que M. Slater vous a montré, le programme Défi-climat est indiqué comme relevant de la réunion mixte des ministres. C'est une chose importante que je n'ai pas signalée dans mon document. C'est un programme mixte fédéral-provincial, mais il est coordonné par RNCan qui en constitue l'élément le plus actif, y compris par l'entremise d'une série de ce qu'on pourrait appeler des programmes de soutien tel que le PEEIC, le Programme d'économies d'énergie dans l'industrie canadienne, le Programme des innovateurs énergétiques, et une série de protocoles d'entente et d'accords conclus avec diverses associations de l'industrie.

Nous sommes également actifs dans le domaine de l'énergie renouvelable: à cet égard, nous avons lancé en 1996 une stratégie aux termes de laquelle nous encourageons l'utilisation des énergies renouvelables en améliorant les conditions d'investissement—et je mentionne dans ce document certaines des récentes mesures fiscales visant à donner des chances égales à chacun grâce aux initiatives concernant le développement du marché. M. Slater a parlé de l'initiative relative à l'énergie verte qui est entreprise conjointement par RNCan et Environnement Canada et constitue, bien entendu, une activité importante dans le domaine du développement technologique.

De façon plus générale, en ce qui concerne le développement technologique, il est important de signaler que les activités technologiques sont très étroitement liées aux autres programmes. Elles appuient par exemple les programmes de réglementation. Elles aident les entreprises canadiennes à développer et à commercialiser de nouvelles technologies et elles préparent ou contribuent à préparer le terrain aux technologies futures. RNCan dispose de trois laboratoires s'occupant de technologie énergétique, dont deux se consacrent actuellement presque exclusivement aux activités soutenant les stratégies d'atténuation du changement climatique. Il s'agit de ceux de Varennes, au Sud de Montréal, et de Bells Corners, près d'Ottawa.

Là encore, la coordination s'effectue à plusieurs niveaux. Au plan interministériel, le Comité de recherche et de développement énergétique est un élément clé au sein du gouvernement fédéral. Au plan fédéral-provincial, les lettres de collaboration que nous utilisons pour l'efficacité énergétique servent également pour la technologie énergétique; et, au plan international, il existe plusieurs véhicules.

Enfin, monsieur le président, juste pour terminer, M. Slater a parlé du travail portant sur les activités du gouvernement. Là encore, c'est un dossier que se partagent plusieurs ministères. RNCan participe à la coordination d'une partie de ce travail en publiant un document intitulé Réduction des émissions causées par les activités du secteur public, que nous déposons chaque année en même temps que le rapport sur le programme Défi-climat. Plusieurs programmes que j'ai énumérés dans mon document appuient également ce travail.

Monsieur le président, je vais maintenant donner la parole à Paul.

Le président: Merci, monsieur Cleland. Monsieur Heinbecker, s'il vous plaît.

M. Paul Heinbecker (sous-ministre adjoint, Politiques mondiales et sécurité, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, monsieur le président.

Pour commencer, je devrais me présenter. Je suis sous-ministre adjoint au ministère des Affaires étrangères chargé de la sécurité internationale et des affaires mondiales, c'est-à-dire, en fait, la sécurité nationale et la sécurité humaine. Ce dernier élément inclut, entre autres choses, l'environnement, les mines terrestres, le terrorisme, la criminalité, les drogues, etc.

• 1605

Si vous me permettez de parler brièvement du rôle du ministère des Affaires étrangères, je dirai que nous avons fondamentalement pour mandat de mener les négociations internationales au nom du ministre. Pour citer la loi,

    c) mener et gérer les négociations internationales auxquelles le Canada participe;

    j) encourager le développement du droit international et son application dans les relations extérieures du Canada;

Nous formons donc une sorte de triumvirat avec Environnement Canada et RNCan, et nous collaborons aussi très étroitement avec tous les autres principaux ministères. Je fais partie du comité principal des sous-ministres adjoints depuis mon retour d'Allemagne où j'étais ambassadeur. Je suis revenu en septembre 1996.

J'ajouterai que le ministère des Affaires étrangères est associé aux activités environnementales presque depuis que celles-ci ont commencé. Nous avons une division des questions environnementales depuis approximativement 1972; c'était d'ailleurs là que je travaillais à ce moment-là. Depuis lors, Jim Bruce a été un des principaux animateurs de la Conférence de Stockholm elle-même, et nous avons joué un rôle clé dans la plupart des conférences importantes sur l'environnement qui ont eu lieu depuis, y compris celle de Rio.

Lorsque je suis revenu à Ottawa en 1996, je suis devenu membre du groupe central des SMA. Nous nous réunissons depuis lors de plus en plus souvent. En octobre dernier, j'ai commencé à être associé plus directement au processus de négociation. C'est Tony Clarke, d'Environnement Canada, et moi-même qui avons dirigé les négociations à Bonn en octobre.

Si vous voulez, je pourrai dire quelques mots au sujet de Bonn et de Tokyo.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Oui, je vous en prie.

M. Paul Heinbecker: Les discussions à Bonn ont été très difficiles. Mon impression personnelle est qu'en fait, à Bonn, nous sommes revenus en arrière. Ce qui s'est passé est que le président a commencé en présentant son propre texte, qui ne nous a pas paru mauvais mais qui nécessitait des améliorations. Je suppose que tout le monde était du même avis. Sa position initiale était qu'il ne fallait rien ajouter au texte à moins qu'il y ait un consensus, mais il a abandonné cette exigence presque immédiatement. Ensuite, pendant quelque temps, diverses personnes ont essayé d'ajouter des choses au texte, souvent quand il y avait eu un accord ou un consensus. De ce fait, il y a de plus en plus de passages entre crochets dans le document. En fait, une bonne partie du texte est maintenant placée entre crochets.

C'est en partie pour cette raison et en partie parce que c'est une négociation difficile et complexe que les Japonais, qui sont les hôtes à Kyoto, ont convoqué une réunion ministérielle à Tokyo—je ne me souviens plus quand, le week-end dernier je crois—pour essayer de préciser la nature des divergences et voir quel terrain d'entente on pourrait trouver. Cette réunion comportait deux parties.

La première partie réunissait ceux qu'on appelle les pays de l'Annexe I. Nous avons discuté plus ou moins de l'ensemble du texte, pas de façon détaillée, mais en abordant de façon générale les questions de souplesse, d'entrée en vigueur, de respect des dispositions, etc. Je pense qu'on peut dire que, même si chacun est plutôt resté sur ses positions, on a constaté une certaine évolution. Il reste à voir si c'est suffisant, mais une certaine évolution s'est manifestée.

• 1610

La deuxième partie de la discussion a eu lieu avec les pays en développement qui étaient venus. Là, je dois dire que les résultats ont été moins encourageants, parce que la Chine et l'Inde, deux des pays qui contribuent le plus aux émissions et deux des principaux membres du groupe des 77, ont boycotté la réunion de Tokyo. Il y a eu toutefois des contributions relativement positives de l'Indonésie, de la Corée et du Mexique. Les représentants du Brésil ont également dit des choses intéressantes. Je dirais donc que les chances de parvenir à une entente à Kyoto ont augmenté à Tokyo, mais il y a encore énormément de chemin à parcourir.

Je pense que vous vouliez que nous finissions maintenant nos exposés.

Le président: C'est très aimable de votre part, monsieur Heinbecker, et nous en apprendrons certainement plus suite aux questions que poseront les membres du comité.

Monsieur Gilmour.

M. Bill Gilmour (Nanaimo—Alberni, Réf.): Merci, monsieur le président; je vous souhaite la bienvenue, messieurs.

Monsieur Cleland, vous avez dit que le ministère des Ressources naturelles était chargé de l'analyse économique. Nous allons à Kyoto dans une quinzaine de jours. Il me semble que le gouvernement devrait avoir étudié les différents scénarios permettant de réduire les émissions au niveau de 1990 d'ici l'an 2000, 2005, 2008, 2010, 2012 et 2020 en utilisant divers procédés, qu'il s'agisse de mesures incitatives, fiscales, ou je ne sais quoi. Ces analyses économiques ont-elles été réalisées?

M. Mike Cleland: Plusieurs analyses économiques ont été réalisées depuis plusieurs années, et elles se sont multipliées ces derniers temps; je ne parle pas seulement du travail effectué aux fins de l'administration fédérale, mais, il me paraît important de le signaler, de travaux réalisés à l'extérieur et parrainés par d'autres organisations, qui sont maintenant pris en considération. Le Conference Board a tout récemment préparé un document très utile, une synthèse de nombreuses études économiques effectuées sur cette question. Nous avons également fait un travail interne suite à une coopération entre Industrie Canada, Environnement Canada, nous-mêmes, le ministère des Finances et d'autres ministères. Nous avons en effet évalué les répercussions potentielles sur plusieurs années ainsi que diverses stratégies permettant de régler ces problèmes.

M. Bill Gilmour: Pouvez-vous les remettre au comité—je ne m'attends pas à une montagne de documents, mais à de brefs résumés des différents scénarios?

M. Mike Cleland: Si vous le souhaitez, monsieur le président, je pourrai certainement déposer le document du Conference Board, que vous devriez trouver très utile. Certains de nos travaux n'ont pas encore été publiés, mais je ferai de mon mieux pour vous remettre tout ce qui est disponible, si cela vous convient.

M. Bill Gilmour: En fait, ce que nous voulons obtenir, c'est la position que le Canada présentera à Kyoto en se fondant sur les différents scénarios et les résultats prévus.

Y a-t-il déjà eu des études sur ce qui se passera après Tokyo, la mise en oeuvre de l'accord? Quel ministère s'en occupe?

M. Mike Cleland: Là encore, c'est un travail auquel ont collaboré plusieurs ministères. Il est clair que, quand les ministres en ont discuté ces dernières semaines et ces derniers mois, ils ont pu s'appuyer sur l'analyse et sur les réflexions concernant les types de mesures qui seraient nécessaires.

Rien de cela ne s'est encore concrétisé sous forme d'un programme ou d'un ensemble spécifique de propositions. Je pense que, quand nous avons examiné les sortes de mesures qu'il faudrait prendre, les ministres et les hauts fonctionnaires avaient, dans l'ensemble, l'impression que la seule chose sensée serait d'avoir un ensemble de mesures concernant à la fois les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral. Il n'existe donc rien qui corresponde à un plan ou à un ensemble spécifique de propositions, mais les ministères ont évidemment pu étudier différentes possibilités présentées à titre d'exemples.

M. Bill Gilmour: Je crois ce qui me gêne est que vous dites qu'il n'y a pas de plan. Dans 15 jours, nous allons signer un traité juridiquement contraignant et nous n'avons apparemment aucun plan. Le gouvernement se rendra-t-il là sans idée préconçue pour essayer de voir ce que pensent tous les autres pays avant de se décider? Il paraît plutôt bizarre que notre gouvernement n'ait pas un plan pour quelque chose d'aussi important pour les Canadiens.

• 1615

M. Mike Cleland: Peut-être me suis-je mal exprimé. Nous n'avons pas de plan consistant en un ensemble spécifique de mesures détaillées nous permettant à coup sûr d'atteindre notre objectif. La principale raison en est qu'il n'est absolument pas évident que la façon la plus raisonnable et la plus appropriée d'y parvenir serait que le gouvernement fédéral agisse unilatéralement. La grande majorité des mesures que l'on pourrait potentiellement utiliser dépend des autorités provinciales ou, parfois municipales, ou sont des choses que peut faire le secteur privé.

Nous avons une bonne idée de ce que devraient être les orientations générales, et c'est ce dont il a été question lors de la réunion mixte des ministres à Regina la semaine dernière. C'est, je pense, avec un certain soulagement que les ministres provinciaux ont compris que le gouvernement fédéral veut collaborer avec eux à l'avenir.

Nous irons à Tokyo avec une bonne idée de ce qui est en jeu. Il y a une série de mesures qui seront prises après Kyoto, avant la ratification de tout accord éventuel. Notre intention est de disposer d'ici là d'un plan satisfaisant auquel seront associés les provinces, les territoires, les autres paliers de gouvernement et le secteur privé.

Le président: Monsieur Knutson, puis monsieur Herron, monsieur Bigras, monsieur Pratt et, probablement, le président. Monsieur Knutson.

M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Vous parlez d'une augmentation d'environ 13 p. 100 des gaz à effet de serre. Est-ce la situation actuelle?

M. Mike Cleland: Les chiffres que nous avons maintenant sont ceux de 1995 et se situent plutôt autour de 10 p. 100. Nous en avons quelques-uns pour 1996, mais ils sont préliminaires et ne seront pas confirmés avant le printemps prochain. Je ne sais pas si cette augmentation atteint 13 p. 100, mais elle est presque certainement supérieure à 10 p. 100.

M. Gar Knutson: Quels chiffres prévoyez-vous pour 1998?

M. Mike Cleland: Je préfère ne pas émettre d'hypothèse. Je ne cherche pas à éviter de vous répondre, mais le problème est qu'il y a tant de facteurs qui ont une incidence sur cela. Par exemple, si notre croissance économique reste robuste en 1997 et que cette tendance se maintient en 1998, cela aura d'importantes répercussions sur les émissions.

M. Gar Knutson: Supposons pour les besoins de la discussion que ce sera le cas et dites-moi simplement à quoi vous vous attendez.

M. Mike Cleland: Je préfère m'en abstenir. Quand on voit ce qui s'est passé ces dernières années et qu'on remonte à 1990, on voit que l'augmentation a atteint ou dépassé 1,5 p. 100 chaque année.

M. Gar Knutson: J'ai lu qu'il était possible que l'énergie nucléaire soit en partie remplacée par le charbon en Ontario. Quand cela se fera, le niveau des émissions risque d'atteindre jusqu'à 18 p. 100 de plus qu'en 1990.

M. Mike Cleland: Je n'ai jamais vu de chiffres aussi élevés. Les changements intervenant à Ontario Hydro auront des effets importants, cela ne fait aucun doute. On ne sait cependant pas encore ce qu'il en sera exactement. Pour ce qui est de nos prévisions, cela aura pour effet d'entraîner une augmentation en l'an 2000. Mais si les plans actuels d'Ontario Hydro se confirment et que ces réacteurs sont remis en service, on reviendra à la situation antérieure en 2010.

M. Robert Slater: Si j'ai bonne mémoire, la projection jusqu'à l'an 2010 prévoit que, s'il n'y a aucun changement, les émissions de gaz carbonique seront de 18,6 p. 100 à 20 p. 100 supérieures à celles de 1990.

• 1620

M. Gar Knutson: Excusez-moi, cette augmentation est-elle de 18 p. 100 pour 2010?

M. Robert Slater: Une augmentation de 18 p. 100 à 20 p. 100. C'est dans le cas où il n'y aurait aucun changement.

M. Gar Knutson: Beaucoup de gens disent au comité qu'une coordination avec les municipalités et les provinces est nécessaire, et je suis tout à fait d'accord avec cela, mais il y a certaines choses que le gouvernement fédéral peut faire maintenant à peu de frais ou sans rien dépenser. Quand va-t-on commencer à discuter de certaines idées précises?

Je vais vous en citer simplement une. Hier, j'ai reçu la visite de lobbyistes des compagnies de chemin de fer. On célébrait la Journée du chemin de fer sur la Colline parlementaire. Ils ont dit qu'ils voulaient simplement qu'on accélère la déduction pour amortissement. Ils ne pensaient même pas à lier cela à la question des gaz à effet de serre. Ils veulent simplement que nos compagnies de chemin de fer soient plus concurrentielles par rapport aux entreprises américaines. C'est une question fédérale, qui concerne l'impôt sur le revenu fédéral.

Y a-t-il quelqu'un qui examine plus précisément ce que le gouvernement fédéral peut faire sans s'engager dans toute cette question des négociations avec les provinces ou les municipalités? Quand allons-nous commencer à parler de propositions précises?

M. Robert Slater: En ce qui concerne cet exemple précis, ces lobbyistes sont également venus nous voir. Ils demandaient qu'en ce qui les concerne, les règles du jeu soient les mêmes pour tout le monde et que le régime fiscal soit équivalent à celui des États-Unis alors que, si je me souviens bien, le régime actuel leur coûte environ 50 ou 60 millions de dollars par an.

M. Gar Knutson: Parlez-vous d'une taxe sur le carburant diesel ou simplement de leur déduction pour amortissement?

M. Robert Slater: Simplement du régime de déduction pour amortissement. À leur avis, cela présenterait de nombreux avantages non seulement pour les gaz à effet de serre, mais également pour le smog et les pluies acides. Ils n'avaient pas encore vraiment quantifié cela, mais c'est exactement le type de mesures qu'il faudrait envisager.

Je voudrais signaler que, quand ils ont fait leur comparaison avec les États-Unis... il y a d'autres types de taxes dans ce pays, et il y a des choses comme les avantages découlant des programmes médicaux qu'ils n'ont pas prises en considération dans leurs calculs alors qu'il faudrait le faire pour analyser ce qui permettrait de créer des conditions égales pour tout le monde.

M. Gar Knutson: Je pense qu'en ce qui concerne les gaz à effet de serre, si on abaissait les taux de dépréciation pour les chemins de fer ou si on accélérait le rythme de déduction, on pourrait se retrouver avec un plus grand nombre de petites compagnies ferroviaires locales, un meilleur réseau ferroviaire... L'assurance-maladie est une question un peu accessoire. Toutefois, je me demande surtout quand les ministères commenceront à nous donner des précisions au sujet de ce que le Canada devrait faire.

M. Robert Slater: Il y a beaucoup de précisions. Beaucoup de suggestions ont été faites. Une des choses que nous devons faire, et la faire collectivement, est de déterminer quel ensemble de mesures donne les meilleurs résultats pour une dépense donnée. Je ne peux pas vous dire pour le moment de combien de millions de tonnes on peut réduire les émissions de gaz carbonique avec le genre de dispositions fiscales dont vous parlez. Il faudrait examiner cela et demander aussi l'avis des autres personnes qui voudraient bénéficier d'avantages du même genre avant d'être en mesure de faire un investissement raisonnable.

M. Gar Knutson: J'ai lu dans le journal que les Américains ont annoncé un programme de 5 milliards de dollars. Allons-nous l'examiner pour voir quels enseignements nous pouvons en tirer? Peut-être devrions-nous présenter quelque chose de comparable, c'est-à-dire un programme de 500 millions de dollars. Avez-vous des détails à ce sujet?

M. Robert Slater: Oui, c'est un programme de développement technologique. Il part du principe que les nouvelles technologies permettront de trouver de nombreuses solutions à ce problème. Le gouvernement fédéral américain se propose de demander au début de l'année prochaine au Congrès d'approuver des demandes de 1 milliard de dollars par an pour couvrir la participation fédérale à ce qui serait un important programme de développement technologique. Nous aimerions beaucoup collaborer avec le gouvernement américain pour bénéficier de ses retombées.

• 1625

M. Gar Knutson: J'ai une dernière question pour le ministère des Affaires étrangères. Que signifie l'expression «juridiquement contraignant» dans ce contexte?

M. Paul Heinbecker: Tous les traités sont juridiquement contraignants. Ce sont les objectifs qui font la différence. Dans ce cas ci, il y aura des cibles quantifiées et des délais que nous serons juridiquement obligés de respecter. Il faudra réaliser certaines limitations ou réductions dans une période de temps déterminée.

Dans les accords précédents et dans la convention elle-même, on parle de viser l'atteinte de certains objectifs, ce qui n'est pas prévu ici. Cette souplesse sera éliminée.

M. Gar Knutson: On peut donc s'attendre à des pénalités. Comment fera-t-on respecter ses dispositions?

M. Paul Heinbecker: Il est très difficile de faire respecter les accords internationaux. Nous parlons de ce que pourraient être les pénalités. Différentes formules sont envisagées. Les Brésiliens ont proposé une pénalité financière qui est liée d'une façon ou d'une autre à une application conjointe. C'est plutôt complexe. D'autres possibilités pourraient inclure la perte de droits de vote ou de droits commerciaux, si c'est accepté. Plusieurs formules sont donc possibles.

Une des difficultés... Je ne veux pas citer une source anonyme de haut rang du ministère des Affaires étrangères, parce que ce n'était pas moi. Je ne sais pas qui c'était. Mais j'ai lu dans le journal de ce matin qu'en pratique, il n'y aurait pas de shérif. Pour ce qui est de faire respecter l'accord, le plus important est la pression exercée par les pairs. On ne peut pas s'adresser à un tribunal, il n'y a pas de police. Mais une fois que nous nous engageons tous officiellement à respecter ce genre d'obligation, nous sommes tenus de faire rapport de nos activités, via une procédure de contrôle, et, en fait, nous nous retrouverons tous face à face.

M. Gar Knutson: Y a-t-il une différence quelconque avec Rio? Il y avait des pressions exercées par les pairs à Rio, et nous sommes, quel...?

M. Paul Heinbecker: Il y a deux différences par rapport à Rio. J'étais à Rio, pas pendant toute la conférence, mais pendant une partie de celle-ci. Il est hors de doute que c'était un grand pas en avant, mais je ne pense pas que les gens aient vraiment compris combien il serait difficile de se conformer aux attentes. C'est donc une différence.

La deuxième différence est l'idée qu'après avoir vu que Rio ne suffira pas, on commence maintenant à prévoir des objectifs qu'il ne faut plus seulement chercher à atteindre mais qu'on doit atteindre. Cela va donc plus loin que Rio. Vos autres partenaires peuvent venir dire: «Vous avez dit que vous feriez ceci, et nous avons dit que nous ferions cela, et vous ne respectez pas vos obligations», alors qu'à Rio, nous avions tous plus de marge de manoeuvre.

M. Gar Knutson: C'est donc une question de formulation.

M. Paul Heinbecker: Je pense que c'est une question de degré. C'est une obligation plus stricte.

M. Gar Knutson: Mais pas au point où nous allons nous entendre sur l'imposition de pénalités, semble-t-il.

M. Paul Heinbecker: Il pourrait y avoir certaines sortes de pénalités.

M. Gar Knutson: Et la position du Canada à ce sujet est...?

M. Paul Heinbecker: La position du Canada est que, fondamentalement, l'objectif le plus important n'est pas de parler du respect des obligations mais de l'atteinte des objectifs et d'atteindre ces objectifs. S'il doit y avoir une disposition concernant les pénalités, nous préférerions qu'il ne s'agisse pas, par exemple, de sanctions commerciales ou de pénalités financières, mais qu'elles concernent plutôt les droits de vote, les droits d'échange d'émissions, etc.

M. Gar Knutson: Je crois qu'il ne me reste plus de temps.

Le président: C'est vrai, mais si vous voulez terminer en posant une question brève, je vous en prie.

M. Gar Knutson: D'accord.

Pourquoi en est-il ainsi? Il me semble que si nous prenions cela réellement au sérieux, nous accepterions d'être assujettis à un régime comportant des pénalités rigoureuses. C'est toutefois l'avis d'un profane. Je ne suis certainement pas un expert en affaires internationales.

M. Paul Heinbecker: La difficulté, par exemple en ce qui concerne les questions commerciales, est que nous préférerions que, dans la mesure du possible, on fasse une distinction entre ce qui concerne le commerce et l'environnement.

• 1630

En fin de compte, deux choses sont en jeu. Premièrement, dans ce protocole, quelques pays seulement accepteront des obligations contraignantes. C'est-à-dire environ une trentaine sur 160 ou quelque chose comme ça. Ce sont surtout les pays de l'Annexe I, c'est-à-dire les pays de l'OCDE plus ceux de l'ex-Union soviétique, et il y a une disposition spéciale qui s'applique à ces derniers. Cela veut dire qu'il y a environ 130 pays qui n'accepteront aucune obligation de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.

Pour ce qui est de l'aspect commercial—je ne parle pas des échanges d'émissions mais des échanges normaux de biens et de services—, le fait de pénaliser éventuellement les pays qui ont accepté des obligations contraignantes entraînerait une distorsion du commerce. Cela encouragerait les échanges commerciaux entre les pays qui ne sont pas assujettis à de telles obligations.

M. Gar Knutson: Je comprends cela. Du point de vue de la population, est-ce qu'à votre avis Environnement Canada va entreprendre une campagne massive de sensibilisation des Canadiens à la gravité du problème et de ses conséquences et à la nécessité de prendre d'urgence des mesures? Ensuite, en fin de compte, nous allons dire ce qui se passera si nous ne le faisons pas, c'est-à-dire que notre pays perdra peut-être son droit de vote ou devra subir des pressions de la part des autres pays. Il me semble qu'on fait deux poids deux mesures et que ce n'est pas cohérent. Si la question est importante, il me semble qu'il devrait y avoir certaines pénalités. Nous prenons au sérieux la question du commerce du lait, par exemple, et nous avons des pénalités en cas d'infraction aux dispositions régissant la gestion des approvisionnements de lait, pourtant...

Le président: Nous allons devoir avancer. C'est une question qui intrigue beaucoup de gens, mais il est évident que nous ne sommes pas en train de parler du lait.

[Français]

M. Herron, suivi par M. Bigras.

[Traduction]

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Il me semble que la discussion relative à la différence entre Rio et Kyoto porte en grande partie sur l'atteinte de nos objectifs. À ce sujet, je voudrais poser quelques questions sur le dialogue qui a peut-être eu lieu entre les provinces ou même avec la population ou le gouvernement fédéral lui-même au sujet de l'application. Pouvez-vous nous dire s'il y a quoi que ce soit de nouveau en matière de politique nationale des transports relativement aux préoccupations à ce sujet auxquelles M. Knutson a fait allusion?

M. Robert Slater: Je vous renverrai en fait au témoin que vous avez entendu hier, Ron Sully, qui est sous-ministre adjoint des Transports et est notre contact avec ce secteur. Comme vous le savez bien, ce secteur est la source la plus importante d'émissions de gaz à effet de serre, et il aura donc un très grand rôle à jouer si on veut résoudre ce problème. On est en train d'élaborer une politique des transports et, dans ce contexte, il faudra prendre cette question en considération.

M. John Herron: Toujours en ce qui concerne l'application, vous avez parlé de la nécessité de mettre au point de nouvelles technologies, peut-être en collaboration avec les Américains. Pour ce qui est plus particulièrement de l'efficacité énergétique, un autre témoin nous a dit, je pense, que le gouvernement fédéral consacre seulement 15,6 millions de dollars par an à cette initiative. À votre avis, ce chiffre est-il relativement faible?

• 1635

M. Mike Cleland: J'ai l'impression que le fait de le juger faible ou élevé est une question de point de vue. Je suppose qu'il est juste de dire que l'ampleur du défi auquel nous faisons face, comme le montre l'augmentation de nos émissions, est plus importante que l'effort que les gouvernements y ont consacré jusqu'à présent—je veux dire par là les gouvernements provinciaux et fédéral—et que c'est également vrai dans d'autres pays. Dans ce sens, je suppose qu'on pourrait conclure que nous ne sommes pas tout à fait à la hauteur.

En fait, vous ne vous trompez pas de beaucoup. Si on ajoute à nos programmes ce que nous faisons pour la R-D sur l'efficacité, on arrive à environ 44 millions de dollars par an. C'est une somme d'argent importante pour les programmes à notre époque. Après l'examen des programmes, il est, en fait, inhabituel pour les ministères fédéraux de consacrer autant de ressources à une seule question de ce genre.

Il y a donc des efforts réels et, je pense, tout à fait fructueux qui sont en cours, mais, comme je l'ai dit, les chiffres semblent indiquer qu'il faut faire plus.

M. John Herron: À mon avis, cela paraît un peu faible.

Il y a une chose qui m'a un peu gêné en ce qui concerne l'application des dispositions: si cela s'avérait être une entente commerciale, pour un pays comme le Canada, dont l'économie est principalement axée sur l'exportation, toute espèce de pénalité qui porterait sur une composante commerciale aurait des conséquences très graves pour l'ensemble de notre économie. Pour être précis, qui est le ministre responsable? Et, ce qui est plus important, quel est le ministère responsable à Kyoto? Est-ce une question environnementale?

M. Robert Slater: À Kyoto, pour la partie de la réunion où se rencontrent les ministres, ceux qui dirigeront la délégation seront Mme Stewart, du ministère de l'Environnement, et M. Goodale, des Ressources naturelles.

M. John Herron: Sous le signe de la coopération?

M. Robert Slater: Oui, sous le signe de la coopération.

Avant l'arrivée des ministres, la délégation sera dirigée par Paul Heinbecker, des Affaires extérieures. Comme Paul l'a indiqué, au sein du gouvernement, la politique étrangère—qui inclut les négociations qui se déroulent dans le cadre des réunions comme celle-ci—est la responsabilité de ce ministère.

M. John Herron: Ma dernière question concerne le rôle du gouvernement fédéral pour assurer la participation du secteur privé et trouver des solutions. Du point de vue fiscal, pouvez-vous me dire si on a commencé à préparer des instruments économiques afin, peut-être, de mettre en place des mesures incitatives équitables pour le développement de sources d'énergie de remplacement?

M. Mike Cleland: On a commencé. En fait, des mesures ont été introduites récemment. Le budget de 1996 incluait certains changements visant à créer des conditions plus favorables aux énergies renouvelables. De la même façon, les mesures annoncées dans le budget de 1997 couvraient l'efficacité énergétique ainsi que les énergies renouvelables. Ces mesures seront bientôt prêtes et nous espérons pouvoir les mettre en oeuvre très rapidement.

M. John Herron: Pouvez-vous nous donner un exemple?

M. Mike Cleland: Dans le budget de 1996, il s'agissait principalement d'essayer d'offrir aux énergies renouvelables les mêmes mesures incitatives dont bénéficie le secteur du gaz et du pétrole. Les activités analogues aux frais d'exploration au Canada se verraient accorder un traitement fiscal identique, et des dispositions ont été prises en outre pour que les entreprises du secteur des énergies renouvelables puissent profiter plus largement des avantages fiscaux.

• 1640

Certaines modifications ont donc été apportées simplement pour améliorer ces conditions, et les entreprises de ce secteur ont réagi de façon très positive. Nous espérons pouvoir aller un peu plus loin dans un avenir assez rapproché. Je suis désolé de ne pas être en mesure de vous donner plus de détails. Il y a eu des consultations assez abondantes à ce sujet l'automne dernier. Il y a un document sur ces consultations que je pourrais mettre à votre disposition, mais je ne suis pas en mesure de vous parler des mesures spécifiques.

Le président: Si vous pouviez mettre ce document à la disposition des membres du comité, cela nous serait utile.

[Français]

M. Bigras, suivi par Mme Kraft Sloan et par le président. Monsieur Bigras.

M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): J'ai deux préoccupations par rapport au document que vient de nous remettre le sous-ministre adjoint de Ressources naturelles Canada. J'ai une préoccupation qui est environnementale, et cela va de soi. Depuis un mois, je pense que force est de constater que nous n'atteindrons pas nos objectifs en matière de réduction de gaz à effet de serre.

Mais, ce qui est plus grave et ce que je constate cet après-midi, et je cite le document du sous-ministre adjoint: «85 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre provient de la production et de la consommation d'énergie». Et vous nous dites aussi que: «63 p. 100 du budget du secteur de l'énergie est attribué en appui total ou principalement à la politique du gouvernement en matière de changements climatiques». Je trouve que c'est plutôt pessimiste comme constat et cela me ramène à l'efficacité des dépenses gouvernementales en matière de changements climatiques.

Je voulais savoir si vous avez évalué l'inefficacité de vos mesures en la matière, parce que cela m'apparaît essentiel, à partir du moment où on s'en va à Kyoto et on s'en va là pour atteindre des objectifs et c'est bien clair que cela est l'objectif de la conférence de Kyoto. Il faut savoir exactement quelle est l'évaluation des mesures que vous avez prises et si vous avez pris des mesures de redressement afin d'atteindre les objectifs qui ont été fixés à Rio et qui seront fixés à Kyoto. C'est ma première question.

[Traduction]

M. Mike Cleland: Pour ce qui est de l'efficacité de ces mesures, je pense que vous en avez entendu parler la semaine dernière ou la semaine précédente par mon collègue Bill Jarvis, qui est directeur général de l'efficacité énergétique, ainsi que par le vérificateur général. Je pense que ce dernier a fait des commentaires, dont certains étaient critiques, sur la mesure dans laquelle nous avons évalué nos programmes jusqu'à présent. Mais je pense qu'ils ont également reconnu—et j'espère que M. Jarvis a pu vous l'expliquer—que nous avons fait des progrès considérables dans ce domaine.

J'ai parlé tout à l'heure du travail que nous avons fait pour créer une base de données nationale sur la consommation d'énergie. C'est l'élément le plus important pour comprendre l'efficacité des mesures, et il faut pour cela faire des recherches très poussées sur la façon dont les foyers et les entreprises utilisent l'énergie. Quels sont les facteurs qui ont une influence sur leur consommation d'énergie? Je dirai que nous avons fait des progrès considérables au cours des cinq dernières années et que nous avons une meilleure idée de la situation, mais je n'irais pas jusqu'à dire que nous avons définitivement réglé la question. Il est difficile de déterminer exactement ce qu'il en est.

Au fur et à mesure que les choses ont évolué ces dernières années, nous avons aussi modifié les programmes. Nous avons fait plusieurs choses pour essayer d'en améliorer l'efficacité, d'en accroître la pénétration et la visibilité aussi bien pour les consommateurs que pour les entreprises. C'est un élément tout à fait essentiel et, comme je l'ai dit, je ne voudrais pas prétendre que nous avons trouvé une solution parfaite. Je pense toutefois que nous avons fait des progrès considérables en utilisant les ressources dont nous disposons.

[Français]

M. Bernard Bigras: Quant aux recommandations de votre ministère, quant aux objectifs quantitatifs de la position canadienne à Kyoto, je voulais savoir quels éléments, quelles grilles d'analyse vous employez dans le cadre de vos recommandations, suite à la position qui sera prise par le Canada à Kyoto, parce que c'est plutôt dangereux. Si on utilise la grille de l'inefficacité des mesures, n'y a-t-il pas un danger de niveler par le bas plutôt que de niveler par le haut?

• 1645

[Traduction]

M. Mike Cleland: Je pourrais peut-être commencer à vous répondre et demander ensuite à un de mes collègues de continuer.

En nous basant simplement sur les mesures de l'efficacité énergétique que le gouvernement fédéral utilise actuellement, nous ne pourrions pas nécessairement définir les sortes de positions dont nous parlons au sujet du Kyoto ou dont parlent d'autres pays. Dans certains cas, l'ampleur du défi dépasse largement cela. C'est pour cette raison que j'ai dit tout à l'heure qu'il nous faut élaborer un plan national auquel seraient associés tous les secteurs de la société canadienne.

Bob ou Paul pourront peut-être continuer.

M. Robert Slater: Je pourrais peut-être le faire en disant que, vu la nature de cette question, telle que, je crois, votre comité l'a examinée, ce n'est pas un projet visant à éliminer la pollution en 13 ans. Ce n'est pas un projet; il s'agit fondamentalement de modifier la quantité de gaz carbonique produite par l'économie canadienne et d'essayer de trouver une façon d'assurer la croissance de notre économie tout en atteignant les objectifs et en respectant les obligations qui seront déterminés à Kyoto.

À Kyoto, le Canada ne sera pas seul à aller prendre des engagements. Tous les pays iront pour parvenir à s'entendre. Les obligations du Canada seront basées sur l'intérêt qu'il a à défendre sa position par rapport aux autres membres de la communauté internationale qui se trouvent dans une situation identique.

Pour ce qui est des obligations sur lesquelles on s'entendra à Kyoto, en se donnant pour objectif l'an 2010 et la période qui suivra, puisque ce n'est manifestement pas quelque chose de ponctuel mais un objectif à long terme, la question est la suivante: comment mobiliser les meilleurs talents de notre pays pour contribuer à l'atteinte de ce but?

Ce que je veux dire est que, même si le gouvernement fédéral a un rôle clé à jouer, il n'est en aucun cas le seul à être dans cette situation, et les ministres ont dit la semaine dernière à Regina que la solution ne serait pas uniquement définie à Ottawa. Il faudrait qu'elle soit efficace et d'un prix raisonnable. Il faudrait qu'y soient associés les Canadiens de tous les secteurs de la société, des simples particuliers aux grosses entreprises comme l'administration publique et les sociétés privées, et les ministres ont dit que nous devons prendre le temps de faire cela correctement.

En fait, il est très difficile de commencer à discuter de la façon de nous organiser pour y parvenir tant que nous ne disposons pas de l'accord conclu avec Kyoto.

[Français]

M. Bernard Bigras: Pour que le Canada puisse influencer les pays qui seront présents à Kyoto, il faut commencer par avoir une position, ce que le Canada n'a pas, et je ne pense pas que ce soit strictement le jour même ou dans la semaine de Kyoto qu'on va pouvoir influencer les autres pays. Mais peu importe.

Ma question va s'adresser à M. Heinbecker en ce qui a trait à la rencontre qui s'est tenue à Tokyo. On sait qu'il y a deux écoles de pensées, celle pour lesquelles on doit fixer un taux de réduction universel qui, entre autres, est supportée par les pays européens. Il y a aussi l'école de pensée japonaise, si je peux utiliser l'expression, qui favorise un taux variable. J'aimerais savoir quelles ont été les discussions à Tokyo sur cette question-là.

• 1650

[Traduction]

M. Paul Heinbecker: Vous avez tout à fait raison. Je vais dire quelques mots à propos de la formule européenne et ensuite à propos de la proposition japonaise et de la différence entre les deux.

La formule européenne demande des réductions de 15 p. 100 d'ici l'an 2010. Cela paraît très bien. C'est très bien, mais il faut tenir compte d'un certain nombre de choses.

D'un côté, cette formule tient moins compte des gaz que la proposition des Américains et la nôtre. Les Européens n'incluent que trois gaz, alors que les Américains, comme nous, en incluent six. Dans cette optique, les chiffres avancés par les Européens diminuent donc assez fortement.

La deuxième chose est que la formule européenne est en fait un système différencié. Les Allemands réduisent très fortement leurs émissions. Je pense que les Français arrivent à un solde nul et que les Néerlandais les réduisent d'environ 10 p. 100. Je pense que les Britanniques les réduisent de quelque chose comme 10 p. 100 ou 15 p. 100. Mais, avec ce système, elles augmentent, en fait, dans d'autres pays. Il s'agit principalement des pays les plus pauvres de l'Europe, c'est-à-dire l'Irlande, le Portugal, la Grèce et l'Espagne. En outre, il est intéressant de noter qu'il y a une augmentation en Suède. De tous les pays d'Europe, c'est la Suède qui a la structure économique et géographique la plus semblable à celle du Canada. Elle a une économie forestière; elle a une économie basée sur les ressources minières; elle a de grandes étendues; elle a un climat froid; et la raison pour laquelle ses émissions augmenteraient dans le cadre de la formule européenne est qu'elle élimine progressivement ses réacteurs nucléaires. C'est donc quelque chose qui nous est assez familier.

C'est là un aspect de la question. Les Européens ne proposent pas une réduction de 15 p. 100 pour l'ensemble des pays européens. C'est plutôt déjà un système différencié.

La proposition japonaise consiste essentiellement à dire qu'il faudrait faire des différenciations pour tout le monde, et elle prévoit trois critères. L'un d'entre eux est la quantité de gaz carbonique par rapport au PIB. Un autre critère intéressant, en particulier pour nous, concerne le taux de croissance démographique. La proposition japonaise est intéressante parce qu'elle permet de prendre explicitement en considération la situation particulière d'un pays.

Il y a une autre idée qui a été proposée et dont on a moins entendu parler parce qu'elle est plus nouvelle. Nous ne sommes pas tout à fait parvenus à en analyser les répercussions. C'est une proposition russe. Les Russes proposent de créer ce qu'ils appellent un groupe de l'Annexe I qui inclurait tous les pays participants, y compris la Russie. La Russie elle-même accepterait de stabiliser ses émissions d'ici l'an 2010, ce qui ne constitue pas un trop gros problème vu l'effondrement de son économie. En fait, cela aurait pour résultat que chaque pays présenterait sa position et que cela constituerait l'obligation qu'ils devraient respecter. Cette obligation ne serait pas la même pour tous, mais ils seraient censés faire ce qu'ils ont dit qu'ils allaient faire. C'est une autre forme de différenciation.

Vous avez mentionné une autre école de pensée dont il a été question à la réunion de Tokyo, et vous avez tout à fait raison. C'est l'idée de l'équivalence de l'effort qui a commencé à être discutée par les participants. Nous ne savons pas encore si cela s'avérera utile ou non.

Si on parle de ce que j'ai dit au début à propos des différentes sortes de gaz, en fait, l'effort européen donnerait un résultat nettement inférieur si un nombre plus élevé de gaz étaient inclus. Certains ont calculé que cela reviendrait à environ 25 p. 100 par rapport à la situation normale, ou peut-être un peu moins parce que certains pays diront que, dans l'intervalle, ils ont réalisé plus de progrès que d'autres.

La proposition américaine prévoit une réduction d'environ 25 p. 100 par rapport à la situation normale. Selon ce que cela donne pour le Canada, nous nous retrouverions de façon générale avec une réduction de 20 p. 100 à 25 p. 100 par rapport à la situation normale. Si on prend cela comme base, on pourrait, en fait, trouver un plus large terrain d'entente. C'est de cela que nous parlions à Tokyo quand nous avons mentionné l'équivalence de l'effort au lieu de chiffres ciblés qui pourraient être basés sur un assortiment différent de gaz et sur l'absence de puits d'ozone.

• 1655

Le président: Monsieur Pratt, puis Mme Kraft Sloan, M. Axworthy et le président.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): J'ai malheureusement dû participer à une autre réunion il y a quelques instants, et cette question a donc peut-être déjà été posée, mais j'aimerais avoir une idée de la façon dont le gouvernement procédera pour mettre au point sa réponse. Je pense principalement aux éléments qui peuvent être déterminés exclusivement par le gouvernement fédéral pour ce qui est des modifications fiscales et des subventions spécifiques, par exemple des subventions accordées à des organisations pour les mesures permettant d'accroître l'efficacité énergétique.

Ces modifications seront-elles mises en oeuvre par l'entremise du budget fédéral pour ce qui est des modifications fiscales, ou feront-elles partie d'un ensemble spécial de mesures pour Kyoto que le gouvernement soumettrait à la Chambre des communes? Une décision a-t-elle déjà été prise à ce sujet?

M. Robert Slater: Je ne pense pas. Une telle décision devrait relever du ministre des Finances.

M. David Pratt: Donc, à votre connaissance, aucune décision n'a été prise quant au genre de mesures que nous pourrions voir à la Chambre des communes.

M. Robert Slater: C'est exact.

M. David Pratt: Permettez-moi de poser une autre question. Vous avez mentionné que vous participiez à la discussion avec les provinces. J'ai remarqué, au moins depuis à peu près un an, des modifications apportées à la réglementation et aux politiques des provinces qui semblent exactement contraires à ce que nous aimerions voir pour réduire plutôt qu'augmenter la quantité de gaz à effet de serre.

Je pense surtout à l'Ontario et aux modifications relatives aux transports en commun. Auparavant, 75 p. 100 des dépenses consacrées aux transports en commun en Ontario étaient assumées par la province, le solde étant financé par la municipalité concernée. Ces modalités de financement ont été modifiées de fond en comble.

On peut également penser, bien entendu, aux normes d'isolation que prévoit la réglementation pour la construction des maisons et à l'assouplissement de ces normes.

Les provinces ont-elles fait savoir qu'elles étaient prêtes d'une façon ou d'une autre à repenser ou réexaminer certaines de ces mesures qui semblent être en contradiction avec les engagements que nous allons prendre à Kyoto?

M. Mike Cleland: Je pense que je dois vous dire que non, pas précisément.

Manifestement, ces dernières années—et je pense que vous avez raison—, dans l'ensemble, les provinces n'ont pas fait ce que nous aurions pu espérer en ce qui concerne leur programme d'efficacité énergétique et les sortes de mesures que vous avez citées pour l'Ontario.

Je pense toutefois qu'à l'issue de la réunion de la semaine dernière à Regina, nous avons certainement eu l'impression que nous avions tourné une page. On se rend bien compte que le Canada doit être crédible dans les négociations internationales et que nous ne pouvons nous permettre de rester à l'écart. Et, dans ce cas-ci, nous ne pouvons pas non plus nous permettre de ne rien faire. Je pense que nous avons manifestement tourné une page. Je pense qu'on ne pourra pas voir les résultats avant un certain temps, mais c'est exactement ce que nous espérons pouvoir mettre en train au cours de l'année qui vient.

M. David Pratt: Ai-je le temps de poser une autre question, monsieur le président?

Le président: Oui.

M. David Pratt: Je serai très bref. Une des choses dont il a été question dans le passé au sujet des modifications fiscales est, bien entendu, la question de la catégorie 43, celle de la déduction pour amortissement. Elle a été soulevée il y a deux ou trois jours devant notre comité au sujet des projets de cogénération, de l'utilisation des déchets pour la production d'énergie et des projets énergétiques de district. Pensez-vous qu'à l'avenir, les Canadiens seront plus au courant des projets de ce genre, qui pourraient être une des façons permettant au gouvernement de respecter ses engagements?

• 1700

M. Mike Cleland: Je dirais que je l'espère, en effet. Certains Canadiens sont au courant. Comme vous le savez probablement, il y a quelques localités où on a obtenu de bons résultats dans ce domaine.

Je pense que cette question se ramène à deux ou trois choses. Il s'agit notamment de savoir quels sont les meilleurs instruments pour progresser. Cela peut ou non dépendre du régime fiscal. Une des caractéristiques des systèmes énergétiques de district est que leur réussite ou leur échec dépend de nombreux facteurs. Par exemple, cela dépend de la structure réglementaire de la province pour l'électricité. Tant qu'elle est fournie par un monopole, la possibilité de réaliser des projets de cogénération est évidemment fortement réduite. Cela dépend de la réglementation municipale en matière de planification et de l'activité des municipalités. Cela dépend de nombreux facteurs très précis qui varient d'un endroit à l'autre.

Il me semble que si on voulait promouvoir plus activement les systèmes énergétiques de district—et, pour autant qu'on puisse en juger, il y a des possibilités de le faire—, cela se ferait probablement de façon ponctuelle. Il faudrait alors se demander quels instruments on devrait utiliser dans de tels cas. Mais c'est manifestement un très bon exemple d'une situation où la participation des provinces et des municipalités sera essentielle.

M. David Pratt: J'ai une question supplémentaire à ce sujet. Pensez-vous que le gouvernement pourrait jouer un rôle en donnant l'exemple avec ses propres édifices? Bien entendu, il n'est pas assujetti à la réglementation provinciale et municipale et il peut faire ce qu'il veut en ce qui concerne le chauffage et l'éclairage de ses propres installations. Pensez-vous que le gouvernement pourrait jouer un rôle plus actif à cet égard?

M. Mike Cleland: Je ne suis pas sûr de pouvoir vous donner une réponse très précise. Il me semble que lorsqu'il y a de bonnes possibilités... Le gouvernement fédéral est manifestement déterminé à réduire les émissions provenant de ses propres activités. Bob Slater a fait référence à plusieurs choses.

Là où il y a un ensemble d'édifices et où des possibilités de ce genre existent, je pense que oui. Ce sont les édifices isolés qui posent un problème. Cela dépend, en fait, de ce qui se passe dans l'ensemble de la collectivité. Mais cela doit faire partie des diverses mesures qu'il faut prendre.

Le président: Madame Kraft Sloan, je vous en prie.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci.

Je vous prie de m'excuser, parce qu'on a déjà répondu à cette question quand j'étais au téléphone et je n'ai pas entendu la réponse. J'aimerais en savoir plus sur les échanges d'émissions. Il en a été beaucoup question au niveau international. Je me demande quel tour a pris ce débat durant les réunions préalables à Kyoto.

J'essaie de comprendre ce que pourraient être les paramètres pour l'échange d'émissions, quels seraient les critères d'admissibilité. Les échanges se feraient-ils entre des pays différents ou à l'intérieur d'un même pays? Vous pourriez peut-être m'expliquer un peu quel tour prend le débat.

Le président: Peut-être d'ici quelques minutes, si vous voyez ce que je veux dire.

M. Paul Heinbecker: Comme le président et vous-même, je crois, l'avez laissé entendre, c'est une question complexe, mais importante.

Je pense que le principe fondamental est que plus la portée des échanges d'émissions est importante, plus ce système peut être efficace et donner des résultats. Je pense qu'il faudrait certainement que cela se fasse au niveau national. Il faudrait probablement que cela se fasse aussi entre des pays qui sont dans la même situation. Je pense par exemple au Canada et aux États-Unis, ou peut-être à l'ensemble de l'ALENA. Il serait encore mieux d'inclure les pays européens et le Japon, l'Australie, etc., et même les pays en voie de développement.

Cette proposition n'a pas encore été acceptée dans les négociations. C'est un des domaines à propos desquels je dirais que les pays en développement ont certaines réserves quant à la façon dont cela pourrait fonctionner et se demandent si cela ne constitue pas simplement une échappatoire.

Les Américains ont une certaine expérience de l'échange d'émissions en ce qui concerne les pluies acides et la Clean Air Act. Il est probablement juste de dire qu'il faudrait sans doute attendre dix ans après la signature de l'accord avant de pouvoir commencer des échanges d'émissions.

Je pourrais d'ailleurs corriger ce qu'a dit la première personne qui a posé une question au sujet du fait que nous allons signer un accord à Kyoto. Nous n'allons pas signer un accord à Kyoto. La signature de l'accord n'est pas prévue avant un certain temps. Ce que nous essayons de faire, cependant, est de nous entendre sur un texte à Kyoto.

• 1705

Cela soulève un grand nombre de questions: le champ d'application des systèmes, les gaz à effet de serre qui seraient couverts, les secteurs qui seraient couverts, l'inclusion éventuelle des sources mobiles, la façon de couvrir les puits d'ozone et, pour ce qui est des participants, si les sources qui ne produisent aucune émission pourraient acheter des permis. Il y aurait des questions relatives à la répartition initiale des actifs: qui établirait les règles pour les échanges, qui les gérerait, qui contrôlerait les permis, etc.

En fait, cela fait partie du travail qui devrait être réalisé après Kyoto dans le cadre de la procédure de mise en route accélérée que nous préconisons afin de se pencher plus sérieusement sur la façon dont un tel système pourrait fonctionner. C'est une des choses qui, en principe, pourraient permettre aux gens de respecter leurs obligations au coût le plus raisonnable.

Mme Karen Kraft Sloan: Ma deuxième question allait porter sur certains des avantages et des inconvénients des échanges d'émissions. Vous avez déjà apparemment donné quelques indications à ce sujet.

Il y a aussi l'application conjointe et les mécanismes de discussion. Je crois savoir que certains pays en voie de développement, comme le Mexique, sont en faveur de l'application conjointe. Il y a aussi d'autres pays et des ONG ou je ne sais qui, que cela préoccupe. Vous pourriez peut-être donner des renseignements au comité à ce sujet.

M. Paul Heinbecker: C'est un des problèmes les plus délicats auxquels nous faisons face dans ces négociations. C'est à cause de cela que l'idée de combiner des échanges d'émissions et des crédits semble susciter tant d'opposition. Je suppose que ce sont les crédits qui causent un problème.

En gros, c'est une autre chose à propos de quoi les G-77 ont des réserves. Ils ne sont probablement pas en faveur de l'inclusion, tout au moins pour le moment. C'est néanmoins un moyen d'effectuer un transfert technologique des pays riches vers les pays pauvres. À notre avis, la meilleure façon de les convaincre est probablement de continuer à travailler sur cette question et à trouver d'autres pays en voie de développement pouvant en bénéficier.

Le Costa Rica est, par exemple, en faveur de cela. Il semble que l'Argentine le soit aussi, et elle a, en fait, signé un accord avec les États-Unis en octobre. Le Mexique est apparemment en faveur de cela. Je crois que c'est également le cas de la Corée, mais la Chine n'y est guère favorable.

Je pense que le problème est double. Premièrement, si certains craignent que, pour respecter leurs propres cibles en matière d'émission, les riches pays du Nord ou les entreprises de ces pays pourraient, par exemple, acheter une partie de la forêt ombrophile et en rester propriétaires à perpétuité. Le pays hôte ne serait alors plus en mesure de décider s'il veut ou non développer ce territoire. C'est donc en partie la raison de leur attitude.

L'autre partie concerne les crédits. Le Canada propose que les crédits soient partagés. L'exemple cité dans les discussions est, je pense, qu'on en aurait beaucoup plus pour son argent en construisant une centrale non polluante en Chine, à Shanghaï, qu'en supprimant la dernière tonne de gaz carbonique produite par une centrale à Hamilton ou quelque chose comme ça. Il est donc plus sage d'utiliser l'argent là bas, mais cela devrait être porté à notre compte.

Le Canada ne propose pas que cela soit porté à 100 p. 100 à notre compte, mais qu'on en négocie; selon le sujet et les modalités de la négociation, on pourrait s'entendre sur une répartition 50-50, 60-40 ou 70-30. Nous espérons encore pouvoir convaincre assez de pays en voie de développement de changer d'avis au sujet de l'application conjointe avec les crédits, mais je dois dire que, pour le moment, ce n'est pas facile.

Mme Karen Kraft Sloan: Très bien. Je vous remercie.

Le président: Monsieur Axworthy, puis le président.

M. Chris Axworthy (Saskatoon—Rosetown—Biggar, NPD): Merci, monsieur le président. Je suis désolé d'avoir raté le début de la réunion.

• 1710

Aucune personne sensée ne supposerait que ces négociations internationales sont faciles à mener ou qu'il est facile de parvenir à des règlements acceptables, mais il semble qu'il serait juste de dire que, jusqu'à présent, le Canada n'a guère respecté ses obligations internationales à cet égard. Je dois reconnaître que, ces dernières semaines ou aujourd'hui au Parlement, je n'ai rien entendu qui me donne l'impression que nous prenons maintenant cela très au sérieux.

J'ai une question précise à ce sujet. Elle découle d'une chose qu'a dite M. Heinbecker et qui est, je suppose, la politique du gouvernement. Il a dit que nous allions traiter séparément le commerce et l'environnement et que nous ferions de notre mieux pour faire une distinction entre les deux. Il faut tenir compte des ramifications qui en découlent et voir quel sera vraisemblablement le ministère responsable, probablement un ministère secondaire, et quels intérêts vont vraisemblablement l'emporter. Comment pouvons-nous faire en sorte que l'environnement soit efficacement représenté à Tokyo avant l'arrivée des ministres pour les trois derniers jours?

Le président: Vous vous rendez compte que c'est une merveilleuse question pour la période des questions. N'oubliez pas que nous avons à faire ici à des hauts fonctionnaires, mais allez-y.

M. Chris Axworthy: J'en étais conscient, monsieur le président.

M. Paul Heinbecker: Nous aimerions pouvoir penser, monsieur le président, que nous formons un réseau continu. Comme je l'ai dit dans mon introduction, le ministère des Affaires étrangères joue un rôle déterminant dans les négociations environnementales depuis Stockholm. Cela fait partie de notre mandat. C'est ce que nous faisons.

Je dois ajouter qu'à mon avis, le ministère de l'Environnement, le ministère des Ressources naturelles et d'autres se félicitent de notre présence. Nous avons un rôle de coordination. Cela ne veut pas dire que c'est un intérêt ou un autre qui va l'emporter parce que c'est un ministère donné qui assume la présidence. Quand nous allons à ces négociations, nous avons des instructions très précises qui ont été rédigées à l'avance, même si elles n'ont pas toujours été entérinées par le Cabinet. Nous suivons ces instructions.

Le problème n'est pas de savoir si, au cas où je quitterais la salle pendant quelques minutes, les intérêts environnementaux seraient mieux défendus. Ce n'est pas le cas. Nous recevons des instructions et nous les suivons. Nous travaillons ensemble. Je rencontre plus souvent les représentants d'Environnement Canada et des Ressources naturelles que mes propres collègues du ministère. Il en est ainsi depuis des mois. Nous nous rencontrons certainement, en moyenne, une fois par semaine. Ces derniers temps, je dirais même que nous nous rencontrons trois ou quatre fois par semaine.

Le président: Est-ce la raison pour laquelle vous avez l'air si heureux?

M. Paul Heinbecker: Ai-je l'air heureux? Je devrais mieux soigner mon apparence.

M. Chris Axworthy: Merci, monsieur le président. Je vais essayer de mettre cette question de côté pour la période des questions. Je vais en poser quelques autres et je pense qu'il ne vous paraîtra pas déplacé de les poser aux sous-ministres adjoints.

Il a été question du niveau proposé par les États-Unis. Vu la difficulté de mesurer certains des six gaz que les Américains voudraient regrouper, est-ce qu'en fait, si nous adoptions la formule de l'Union européenne, nous n'adopterions pas un système qui pourrait donne de meilleurs résultats? Ce serait un engagement plus ferme en faveur de la réduction.

M. Robert Slater: Je pense que c'est juste, mais j'aimerais qu'un de mes collègues scientifiques le confirme.

Il faut que nous réduisions tous les gaz à effet de serre. Certains de ceux qui sont compris dans l'ensemble complet sont des gaz à effet de serre plus puissants que le gaz carbonique. Ils restent également moins longtemps dans l'atmosphère que ce dernier, et on obtiendrait donc un résultat proportionnellement meilleur si on les éliminait rapidement. Je crois qu'il en est ainsi, monsieur le président. Mais j'aimerais demander à un de ms collègues techniciens de le confirmer.

Je vous rappellerai également les travaux du groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat, d'après lequel il faut probablement réduire les émissions de gaz à effet de serre d'environ 60 p. 100 si on veut stabiliser leur niveau dans l'atmosphère.

• 1715

M. Chris Axworthy: Pour ce qui est du pourcentage ou du nombre de pays du monde qui considèrent que l'engagement du Canada est un peu anémique, combien d'entre eux seraient d'avis que des réductions de 20 p. 100 ou plus sont nécessaires comme nous en étions convenus la dernière fois? Où se situe le Canada dans la liste des pays qui veulent des réductions plus importantes?

M. Paul Heinbecker: Comme je le disais au début, il y a approximativement 130 pays qui ne vont s'engager à effectuer aucune sorte de réduction. Je pense que nous pouvons probablement les mettre de côté, parce que nous faisons certainement mieux qu'eux. Comme vous le savez, les États-Unis visent une stabilisation aux niveaux de 1990 pour l'an 2010, c'est-à-dire entre 2008 et 2012.

Les Japonais parlent d'une réduction d'environ 2,3 p. 100. Les Australiens n'ont pas encore fait connaître leur position, et la Nouvelle-Zélande non plus. Je pense que les Russes accepteraient probablement un retour au niveau de 1990 en 2010. Certains membres des G-77 veulent des réductions très importantes, ce qui n'est pas surprenant. C'est l'Association des petits États insulaires. Je vous ai déjà parlé des Européens.

Je pense que nous allons nous retrouver vers le milieu de tous ces groupes.

Le président: Merci, monsieur Axworthy.

Monsieur Cleland, je vous interrogerai d'abord au sujet de votre mémoire en continuant un peu dans le fil des questions de M. Bigras.

À la page 2, vous indiquez que 71 millions de dollars, soit 63 p. 100 de votre budget du secteur de l'énergie, sont consacrés à des mesures qui «appuient totalement ou principalement la politique du gouvernement en matière de changements climatiques». Depuis combien de temps est-ce le cas?

M. Mike Cleland: La réponse la plus directe, monsieur le président, est qu'il y a eu une évolution dans ce sens, surtout depuis trois ou quatre ans. Le changement le plus important est intervenu à la suite de l'examen des programmes; c'est le domaine que nous avons le plus protégé contre les compressions budgétaires.

Le président: Pourrait-on alors conclure qu'au cours de ces trois ou quatre années, vous avez eu suffisamment de temps et de ressources pour élaborer un plan sur les gaz à effet de serre pour le Canada?

M. Mike Cleland: Je ne ferais pas une telle conclusion.

Le président: Alors, qu'est-ce qui a été fait?

M. Mike Cleland: Je peux peut-être vous l'expliquer. Ces trois ou quatre dernières années, il y a certainement beaucoup de travail qui a été fait, comme je l'ai indiqué tout à l'heure en réponse à une autre question. Beaucoup de travail a été consacré à la mise au point de réponses plus efficaces, par exemple à l'élaboration de nouveaux règlements sur l'éclairage et les moteurs...

Le président: Sur les moteurs? Quelles sortes de moteurs?

M. Mike Cleland: Oui, les moteurs électriques. Il y a eu d'autres améliorations aux programmes d'efficacité énergétique, et on a élaboré de nouvelles approches dans le cadre de la stratégie sur les énergies renouvelables, mais non, nous n'avons pas établi un plan complet et exhaustif.

Le président: Pensez-vous qu'il aurait peut-être dû être élaboré, étant donné que nous devions aller à Kyoto et qu'auparavant il y avait eu Bonn et, auparavant, Berlin et Genève?

M. Mike Cleland: Je pense que, dans des conditions idéales, oui.

• 1720

Le président: Idéales. Dans des conditions idéales, il n'y a pas de date limite ou d'événements qui aient des conséquences irréversibles, en quelque sorte. Ces conférences sont des événements prévus à l'avance au cours desquels vous rencontrez la communauté internationale, vous n'êtes donc pas pris par surprise.

M. Mike Cleland: Non, en effet, mais nous devons également tenir compte de nos collègues des provinces et de nombreuses autres parties prenantes. Il y a trois ou quatre ans, de concert avec Environnement Canada, nous avons essayé d'élaborer un processus multipartite qui a consacré près d'une année entière à l'élaboration d'un plan et à présenter une très longue liste de mesures potentielles. Il a ensuite été décidé d'appliquer une petite partie de ces mesures. Pour diverses raisons, beaucoup d'entre elles étaient inapplicables ou ne pouvaient certainement pas être acceptées par les gouvernements, y compris—et je le souligne—les gouvernements provinciaux de l'époque. Une bonne partie du travail nécessaire a été faite, mais ce type de plan...

Le président: Puis-je vous interrompre, parce que nous avons peu de temps et vous m'avez donné une réponse.

Dans votre document d'aujourd'hui, vous présentez un aperçu général et, ensuite, une analyse de l'énergie et des politiques. Je suis très conscient des efforts que vous avez faits pour réaliser l'analyse des politiques. Pourquoi, dans celle-ci, ne mentionnez-vous pas du tout les avantages fiscaux et les subventions dont bénéficient actuellement les secteurs qui produisent des gaz à effet de serre? Ne pensez-vous pas que c'est un élément important sur lequel il faudrait insister dans un aperçu de la situation?

M. Mike Cleland: Le document que j'ai remis au comité ne met en relief aucun des détails importants de l'analyse que nous avons effectuée.

Le président: Je m'en rends compte. Pourquoi?

M. Mike Cleland: Ce document aurait été beaucoup plus long, et j'avais l'impression que vous souhaitiez avoir un aperçu très bref.

Le président: Bon, ce n'est pas la première fois que nous vous demandons de nous présenter un exposé. Vous vous rappelez qu'en décembre 1995, vous avez comparu devant notre comité et nous vous avons posé des questions identiques. Je dois reconnaître que vous n'y avez guère répondu.

Nous avons également fait une recommandation dont je vais vous donner lecture. C'est la recommandation 7:

    Le comité recommande que, conformément aux engagements internationaux pris par le Canada en vue de la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre, les subventions directes accordées à l'industrie du pétrole soient éliminées aussi rapidement que les contrats permettent de le faire.

Des mesures ont-elles été prises à cet effet depuis lors?

M. Mike Cleland: Il est évident que la réponse à cette recommandation relève de la politique du gouvernement, et je ne pense pas pouvoir me permettre de faire des commentaires à ce sujet.

Le président: Non, non. Un instant. C'était il y a deux ans, il y a donc eu une réponse. Ce n'est pas une chose dont il n'a pas été question. Je vous demande simplement si des mesures ont été prises conformément à l'orientation recommandée par notre comité—oui ou non.

M. Mike Cleland: Les changements du type de ce qu'avait recommandé le comité n'ont pas été mis en oeuvre. Comme vous l'avez dit, le régime fiscal concernant l'industrie du pétrole et du gaz est manifestement, dans son ensemble, semblable à ce qu'il était à l'époque.

Le président: Alors, pourquoi êtes-vous aujourd'hui réticent à aborder tout ce qui a trait aux questions financières et fiscales? Dans ces trois pages, vous avez certainement pu consacrer une demi-page aux mesures fiscales importantes que le ministère des Finances et vous-même avez mises en place au fil des ans et qui contribuent, en fait, activement à la production de gaz à effet de serre. Ne pensez-vous pas qu'il aurait fallu mentionner cela?

M. Mike Cleland: Monsieur le président, en toute déférence, j'aurais pu ajouter toutes sortes de choses à ce mémoire en ce qui concerne...

Le président: Je vous interroge au sujet de cette méthode. Ne pensez-vous pas qu'il aurait fallu mentionner cela?

M. Mike Cleland: Cela a été mentionné...

Le président: Où?

M. Mike Cleland: ... quand j'ai comparu devant vous...

Le président: Non, je veux dire aujourd'hui. Nous sommes à trois semaines de Kyoto.

M. Mike Cleland: On n'a pas demandé de me présenter devant votre comité pour aborder spécifiquement cette question. Si on me l'avait demandé, monsieur le président...

Le président: Enfin, il est évident qu'on vous l'a demandé.

M. Mike Cleland: ... je vous aurais remis un document rédigé en fonction de cela.

Le président: Vous avez peut-être choisi d'interpréter notre invitation d'une certaine façon.

• 1725

M. Mike Cleland: Eh bien, je vous présente mes excuses, monsieur.

Le président: Nous vous avons demandé de venir nous présenter un aperçu de la situation, et vous avez choisi vous-même quelle sorte d'aperçu présenter. Comment se fait-il qu'il ne contient aucune référence aux subventions et aux dépenses fiscales?

M. Mike Cleland: Si vous me le permettez, je vous présente mes excuses si j'ai mal compris ce que vous vouliez, mais lorsque M. Slater a commencé son intervention, il a d'abord dit qu'à sa connaissance, nous nous présentions devant vous pour parler des activités des trois ministères représentés ici et de la façon dont nous collaborions. C'est le thème principal de mon document.

Le président: Les activités de votre ministère couvrent également chaque année la question des dépenses fiscales.

M. Mike Cleland: En effet.

Le président: Et elles sont importantes. Pourriez-vous nous donner une idée du chiffre qu'elles atteignent?

M. Mike Cleland: Permettez-moi de vous dire clairement les choses. Le montant des dépenses fiscales relatives à une partie quelconque de l'économie ne fait pas partie du budget du ministère des Ressources naturelles. Je suis sûr que vous le comprenez. Je pense que les chiffres actuels ont été discutés lorsque certains de mes collègues du ministère des Finances ont comparu devant vous lundi, et je ne voudrais pas rentrer dans des détails à propos de choses qu'ils connaissent considérablement mieux que moi.

Il y a différents types de dépenses fiscales qui représentent des avantages fiscaux pour l'industrie canadienne du pétrole et du gaz. Les chiffres varient énormément d'une année à l'autre, selon la situation économique que connaît cette industrie et les investissements pratiqués dans divers secteurs de celle-ci.

Je sais que certains documents vous ont été remis, et je pourrais seulement vous conseiller de les consulter. Je ne pourrais pas vous donner de meilleurs renseignements que ceux qui y figurent.

Le président: Pour ce qui est des témoins qui ont comparu lundi—et je dis cela de mémoire—, votre collègue, M. Toms, nous a indiqué que, pour un projet d'exploitation de sable bitumineux de 15 milliards de dollars, les avantages fiscaux, les subventions, les dépenses fiscales ou tout ce que vous voulez se monteraient à environ 600 millions de dollars.

M. Mike Cleland: Si ma mémoire est bonne, le chiffre se situait entre environ 150 millions de dollars et 600 millions de dollars. C'est la valeur nette actuelle des dépenses fiscales pour la durée de vie du projet, je ne sais donc pas ce que cela donnerait en moyenne annuelle, mais ce serait évidemment beaucoup moins.

Le président: M. Toms a cité un chiffre de 600 millions de dollars. Il n'a pas dit que le chiffre serait compris entre telle et telle somme. Je vous indique seulement à combien se monte, en quelque sorte, le favoritisme fiscal pour un seul projet et quels sont les avantages qu'on accorde actuellement.

En d'autres termes, nous parlons ici de la réduction des gaz à effet de serre alors qu'en même temps, du fait des politiques existantes du ministère des Ressources naturelles et du ministère des Finances, on applique des mesures qui contrecarrent tous les efforts que nous essayons de mettre en oeuvre, et ce n'est même pas de cela que nous parlons. Voilà ce sur quoi j'insiste. Nous ne parlons même pas de la situation actuelle des mesures fiscales. Je trouve cela très particulier.

Vous avez fait la même chose que le ministère des Finances lundi. Vous avez exclu, laissé de côté cet aspect très important. Comment le représentant du ministère des Affaires étrangères, M. Heinbecker, peut-il être crédible à Tokyo si, dans notre pays, nous ne débattons pas du montant actuel des subventions accordées aux industries qui produisent des gaz à effet de serre? Dites-le-moi. Comment peut-il être crédible?

M. Mike Cleland: Monsieur le président, je pense que la crédibilité résulte de l'ensemble des mesures prises par un gouvernement, et cela s'applique à n'importe quel gouvernement national, à n'importe quel gouvernement national et à ses éléments constitutifs. Si vous examinez tout en détail, je suis sûr que vous constaterez que pratiquement tous les gouvernements représentés à cette conférence ont également pris des mesures qu'on pourrait critiquer.

Le président: Ce n'est pas cela qui m'intéresse. Je trouve très étonnant que ni votre ministère ni le ministère des Finances ne veuillent ouvrir une discussion sur ce sujet. Les subventions de ce genre sont peut-être tout à fait justifiées. On a peut-être l'intention de les éliminer progressivement. Il y a peut-être d'autres facteurs en jeu. Je n'en sais rien. Mais si nous n'en parlons pas, nous n'augmentons pas notre crédibilité. Êtes-vous d'accord avec cette conclusion?

M. Mike Cleland: Monsieur le président, je suis d'accord avec vous pour dire que nous devrions débattre de ces questions. C'est exact.

Le président: Merci.

• 1730

M. Mike Cleland: Et je vous prie de m'excuser si j'ai mal compris vos instructions.

Le président: Monsieur Heinbecker.

M. Paul Heinbecker: Monsieur le président, je voudrais simplement ajouter que nous ne sommes pas les seuls à accorder des subventions, bien entendu. Prenez l'exemple des Allemands...

Le président: Monsieur Heinbecker, je le sais très bien. C'est un autre débat.

M. Paul Heinbecker: Mais vous avez abordé la question de la crédibilité.

Le président: Nous parlons du Canada à Kyoto. Dans les autres pays du monde, il y a sans doute des débats analogues. Mais si nous ne commençons pas ces débats chacun de notre côté, nous ne pourrons pas progresser. Nous le savons, et nous savons quelle sorte de jeu ils jouent, mais la question ne sera pas réglée si nous disons que nous refusons de discuter de certains choses parce que certains autres n'en discutent pas non plus. Êtes-vous d'accord avec cette conclusion?

M. Paul Heinbecker: Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que... Vous avez demandé comment je pouvais être crédible. Je peux être crédible dans le sens où je sais que d'autres pays ont des problèmes identiques.

Le président: Bien entendu. Nous devons cependant nous y attaquer, n'est-ce pas?

M. Paul Heinbecker: Les pays concernés doivent certainement s'y attaquer.

Le président: Bien entendu. C'est ce que je dis. Nous sommes donc d'accord sur cette question, n'est-ce pas?

M. Paul Heinbecker: Oui.

Le président: Très bien.

Monsieur Heinbecker, je vous demanderais si, lors d'une tribune internationale de ce type, les débats ont généralement tendance à être polarisés entre la pauvreté, d'une part, et, d'autre part, la réduction de la pauvreté pour les pays en voie de développement, pendant que les pays développés incitent le reste de la communauté mondiale à réduire les gaz à effet de serre. Vous attendez-vous à voir un débat de ce genre à Kyoto? Dans l'affirmative, comment prévoyez-vous régler ce problème?

M. Paul Heinbecker: Si j'ai bien compris votre question, il s'agit de la juxtaposition, d'un côté, de la réduction de la pauvreté et, de l'autre, des répercussions sur l'environnement, et des fonds pour aider...

Le président: Ce n'est pas une juxtaposition; c'est une polarisation entre deux points de vue.

M. Paul Heinbecker: Eh bien, si vous me demandez s'il doit en être question à Kyoto, cela a déjà, en fait, eu lieu. Le débat a commencé au sujet de la convention elle-même, comme vous le savez probablement mieux que moi, et il continue. Je peux peut-être, d'une certaine façon, répondre en même temps à M. Knutson et à ce que vous m'avez dit, parce que je ne crois pas avoir donné une réponse satisfaisante à sa question.

L'une des difficultés que pose la question qu'il a posée au sujet du respect des obligations, est qu'en fin de compte, nous sommes coincés des deux côtés. Les pays en voie de développement ont inséré une disposition qui permettrait ou exigerait la création d'un fonds de compensation destiné aux pays en voie de développement qui pourraient subir un préjudice social, environnemental ou économique à la suite des mesures prises pour respecter les objectifs et les échéanciers.

Il y a une autre disposition de ce traité—et c'est à cet égard que se pose la question du respect des engagements et les Brésiliens veulent manifestement qu'il en soit question dans le traité—qui prévoirait une pénalité pour les pays ne respectant pas leurs obligations. Donc, dans un certain sens, on serait pénalisé si on le faisait et si on ne le faisait pas. Voilà pourquoi, dans ce sens, c'est une question très délicate pour nous, et nous devons être très prudents. Je m'attends à ce qu'on fasse beaucoup de travail après Kyoto dans le cadre de la mise en route rapide des activités que nous préconisons. Il y a toutes sortes de choses qui devront faire l'objet de négociation.

Le président: Merci.

Monsieur Slater, j'ai aussi quelques brèves questions à vous poser pour terminer ce tour de table. Il y en aura peut-être un deuxième que nous pourrons commencer dans un instant.

Dans votre chapitre intitulé «La famille fédérale», vous n'incluez apparemment pas dans ces cases le ministère des Travaux publics. Lundi, nous avons entendu un exposé du sous-ministre adjoint des Travaux publics qui a impressionné un grand nombre d'entre nous. Ce ministère est en train de mettre au point un modèle qui est certainement intéressant. Je me demandais si vous avez peut-être l'intention d'inclure un de ces jours le ministère des Travaux publics dans le comité principal des SMA. Cela pourrait être très salutaire.

M. Robert Slater: Pour ce qui est des questions opérationnelles, vous avez absolument raison.

• 1735

Le président: Ma question porte sur les émissions de gaz émanant des décharges publiques. Votre ministère a publié il y a un an et demi un gros rapport sur ces très importants gaz à effet de serre et sur le fait qu'ils sont produits quand on brûle les déchets jour et nuit, ce qui contribue au problème causé par les gaz à effet de serre. La situation a-t-elle évolué depuis la publication de ce rapport?

M. Robert Slater: Il faudra que je vous fasse parvenir ma réponse plus tard.

Le président: Pouvez-vous peut-être communiquer ces renseignements par écrit aux membres du comité?

M. Robert Slater: Avec plaisir.

Le président: Ma dernière question concerne la voie de l'innovation. Je vais vous remettre cette page à titre d'information, parce qu'elle porte là-dessus, ainsi qu'aux membres du comité. Je voudrais vous demander de bien vouloir, d'ici un jour ou deux, mais pas plus tard que lundi, nous indiquer si vous êtes d'accord avec ce qu'avance cet institut des États-Unis, qui a réalisé une étude sur les innovations énergétiques et qui présente une analyse des politiques qui, d'ici 2010, pourraient, premièrement, réduire les émissions de gaz carbonique aux États-Unis à un niveau inférieur de 10 p. 100 à celui de 1990—ce qui est stupéfiant en soi—et, deuxièmement, réduire les coûts énergétiques nationaux de 530 $ par foyer et, troisièmement, créer un total net de 800 000 nouveaux emplois. Sur la même page, il y a un tableau montrant les répercussions que ces innovations auraient si elles étaient adoptées. Pouvez-vous nous donner votre avis là-dessus d'ici vendredi ou, au plus tard, lundi de la semaine prochaine?

M. Robert Slater: C'est avec plaisir que nous vous ferons part de notre opinion. Ce sera peut-être une opinion préliminaire fondée sur les renseignements dont nous pouvons disposer actuellement.

Le président: Merci.

Nous sommes prêts à entamer un deuxième tour. Monsieur Knutson, voulez-vous commencer?

M. Gar Knutson: On reparle constamment du réacteur CANDU. Il y avait un article hier dans le Globe selon lequel il va nous sauver. Nous allons l'exporter, et il nous suffira d'en vendre un certain nombre chaque année, et cela aidera d'autres pays à adopter l'énergie nucléaire au lieu du charbon. D'après ce qu'on m'a dit, cela pourra diminuer les émissions de gaz carbonique, mais déverser une quantité énorme de chaleur dans l'eau et donc contribuer au réchauffement planétaire. Les rivières, devenues plus chaudes, réchaufferont à leur tour les océans. Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?

M. Mike Cleland: Je ferai peut-être simplement deux ou trois commentaires... Toutes les sources thermiques d'électricité ou d'énergie ont le même effet. Elles produisent une chaleur résiduelle. On peut faire face à ce problème de façon plus ou moins efficace, mais il y a toujours une production de chaleur résiduelle, et celle-ci est, en quelque sorte, déversée dans l'environnement. Il n'y aurait donc aucune différence avec une centrale utilisant le charbon ou le gaz, sinon que les centrales à gaz modernes ont un bien meilleur rendement énergétique.

Mon collègue me corrigera peut-être, mais je crois que la quantité de chaleur en question est très faible au niveau planétaire et que sa contribution à l'effet dont nous parlons ici est minime.

M. Gar Knutson: On va peut-être, d'un côté, prévoir des dispositions particulières pour la Suède parce qu'elle abandonne l'énergie nucléaire alors que, de l'autre, nous allons nous engager beaucoup plus fortement sur la voie de l'énergie nucléaire. Pour l'observateur profane que je suis, cela paraît étrange. Quand nous envisageons de préconiser dans le monde entier le choix du nucléaire, tenons-nous compte de tous les autres facteurs, de toutes les autres choses qu'on reproche de nos jours à l'énergie nucléaire? Prenons-nous cela en considération ou proposons-nous simplement comme solution de choisir le nucléaire?

M. Mike Cleland: Je ne sais pas exactement... Enfin, je pense que je comprends ce à quoi vous faites allusion quand vous parlez de ce qu'on lui reproche. Vous parlez des questions concernant la sécurité radiologique et le traitement des déchets nucléaires—les choses de ce genre, n'est-ce pas?

M. Gar Knutson: Oui.

• 1740

M. Mike Cleland: Je vous répondrai que oui. Quand nous vendons nos réacteurs CANDU à l'étranger, ces réacteurs peuvent faire l'objet d'un permis en vertu des règles de la Commission de contrôle de l'énergie atomique. Nous le faisons en conformité avec les normes de l'Agence internationale de l'énergie atomique et en nous conformant également à des normes raisonnables en matière de sécurité nucléaire, y compris pour la manutention du combustible irradié.

M. Gar Knutson: De façon plus générale, je ne sais pas si l'Ontario est le plus gros utilisateur du système CANDU, mais il me semble qu'il y a d'énormes dépassements de coûts dans tout ce secteur. Il semble y avoir un nombre infini de problèmes d'ordre technologique en plus des questions de sécurité, principalement pour les coûts. Prend-on cela en considération?

M. Mike Cleland: L'Ontario est en effet de loin le plus gros utilisateur de réacteurs CANDU dans le monde. Pour ce qui est des problèmes qu'Ontario Hydro a récemment connus et de la fermeture des réacteurs annoncée en août, une des choses qui ressortent clairement du rapport préparé par M. Andognini et ses collègues est que les problèmes concernaient la gestion d'Ontario Hydro et non pas la technologie.

Je ne voudrais pas laisser entendre qu'il n'y a eu aucun problème technologie. Le fait est, d'ailleurs, qu'avec toutes les technologies de production d'énergie et assurément toutes les technologies nucléaires, des problèmes se sont posés, et on y a fait face au fur et à mesure qu'on comprenait mieux à quoi ils étaient dus.

M. Gar Knutson: Ce qui coûte très cher. On a remplacé de grandes quantités de tuyauterie. Ce n'est pas une question de gestion. Quand on a construit ces réacteurs, on ne s'attendait pas à ce que leur durée de vie soit beaucoup plus courte qu'on ne l'avait prévu à l'origine. Nous avons dû remplacer des parties de ces installations. Il y a une liste apparemment infinie. Ce n'était pas seulement des problèmes de gestion. Si nous préconisons le choix du nucléaire, aurons-nous encouragé l'apparition de toute une série de nouveaux problèmes dans dix ans?

M. Mike Cleland: Il ne m'appartient pas de prédire ce qui va se produire dans dix ans.

Je préciserai un certain nombre de choses. Premièrement, vous avez raison de signaler qu'on n'avait pas prévu tous les problèmes potentiels. C'est absolument exact. Depuis lors, on a fait beaucoup de recherches à cet égard, et on a très fortement amélioré la conception du réacteur CANDU. Je suis sûr que mes collègues d'Énergie atomique du Canada Ltée pourraient vous donner de meilleurs renseignements à ce sujet, mais je pense qu'ils vous diraient qu'à leur avis, ces sortes de problèmes ont été réglés et que les futurs réacteurs ne connaîtront pas les mêmes sortes de difficultés.

Le président: Monsieur Herron.

M. John Herron: Il m'a paru intéressant d'entendre dire que nous ne pouvions pas prédire ce qui va se passer dans dix ans alors que nous sommes en train de prédire ce qui va se passer en 2010 ou 2015.

Dans toute négociation, il y a des choses qui sont négociables et d'autres qui ne le sont pas. Le Canada a-t-il la moindre intention d'accepter une pénalité d'ordre commercial si un pays ne respecte pas ses engagements? Est-ce totalement exclu?

M. Paul Heinbecker: Nous n'envisageons aucune sanction commerciale, et je dois dire que la plupart des autres pays développés sont du même avis.

M. John Herron: Nous avons mentionné tout à l'heure que l'Inde et la Chine n'avaient pas participé à la réunion qui s'est tenue au Japon il y a quelques semaines. Étant donné que, je crois, l'Inde est le cinquième plus gros producteurs de gaz carbonique et la Chine le deuxième, quelle position pensez-vous que l'Inde et la Chine vont adopter au cours de cette négociation?

M. Paul Heinbecker: Il est évidemment difficile de vous répondre puisque ces pays n'étaient pas là.

• 1745

Les négociations ont essayé de différentes façons de prendre en considération le fait que certains pays ont des émissions importantes et en augmentation. Le mandat fondamental de la négociation actuelle a été défini à Berlin. L'idée de base était que la plus grosse partie du gaz carbonique accumulé dans l'atmosphère avait été produite par des pays développés, et cette série de négociations concernaient donc les pays développés qui devaient chercher à régler le problème qu'ils ont créé.

Mais vous avez parfaitement raison. Dans l'avenir, et dans un avenir assez rapproché, les émissions de gaz carbonique proviendront environ pour moitié des pays en voie de développement. Que pouvons-nous faire à cet égard? Il existe diverses options, dont la plus brutale, en quelque sorte, est celle qu'a présentée la communauté européenne. On mettra à profit la procédure d'examen qui est déjà incluse dans la convention. Je pense que le prochain examen doit avoir lieu vers 1999. On s'attend à constater en 1999 qu'il faut aller plus loin, et on pourrait se servir de cette procédure pour essayer d'appliquer également la convention aux pays en développement, parce qu'il apparaîtra de façon encore plus convaincante en 1999 qu'ils doivent assumer une part de responsabilité pour trouver une solution définitive au problème.

Voilà une chose. Deuxièmement, on continue encore à parler de quelque chose qu'on appelle «le mandat de Kyoto». Le dernier était le mandat de Berlin, qui désigne maintenant la négociation du traité entre les pays de l'Annexe I, les pays développés. Le mandat de Kyoto commencerait à aborder la question des limitations concernant les pays en développement à un moment donné, et les négociations commenceraient à une certaine date et se termineraient à une certaine date.

Mais je dois ajouter que, pour le moment tout au moins, dans les négociations, personne ne parle de réduire les émissions de la Chine, de l'Inde ou de n'importe quel autre pays, mais de les limiter. Cela nous ramène à la question posée par le président. Elle porte sur l'opposition entre la pauvreté et l'environnement et peut susciter bien des controverses.

Ensuite, il y a une idée assez curieuse, en fait très intéressante, mais qui est peut-être difficile à faire accepter. La Nouvelle-Zélande a imposé une sorte de système prévoyant une double conditionnalité, c'est-à-dire qu'on conviendrait à Kyoto, dans le protocole que nous négocions ou dans un accord parallèle, que, pour la première période budgétaire, les pays développés devront prouver qu'ils respectent leurs obligations. Au cours de la deuxième période budgétaire, les pays en voie de développement, ayant constaté que les pays développés respectent leurs obligations, devront assumer eux-mêmes des obligations. S'ils ne le font pas—et c'est ce que signifie ce principe de double conditionnalité—, les pays développés ne seront aucunement obligés de prendre de nouveaux engagements pour la deuxième période budgétaire et les suivantes.

C'est évidemment un peu délicat. On essaie ainsi de prendre les pays en développement au mot, quand ils disent: «c'est vous qui êtes à l'origine du problème et il faut que vous le régliez.» On essaie également de tenir compte du fait que nous ne pouvons pas régler les problèmes du changement climatique s'ils ne participent pas d'une façon ou d'une autre à ce processus.

Donc, ils nous disent de régler le problème, et nous leur disons «Très bien, nous avons maintenant prouvé que nous faisons notre part, il faut donc maintenant que vous fassiez aussi quelque chose. Il est également dans votre intérêt que le climat soit protégé, vous avez donc l'obligation de participer vous aussi à cela.»

En bref, c'est un point de négociation extrêmement névralgique, et je ne sais pas à quoi cela va aboutir.

Mais je vais vous communiquer un autre renseignement: cet accord ne sera vraisemblablement pas ratifié avant, au plus tôt, l'an 2000. Il sera probablement paraphé à Kyoto et il pourra commencer à être signé après New York; au cours des mois suivants, il y aura une période de peut-être un an ou plus pour la signature.

En fait, il ne sera pas ratifié par assez de parties avant les alentours de l'an 2000 ou plus tard. Cela donne beaucoup de temps pour discuter avec les pays en voie de développement et trouver des systèmes pour essayer de définir une façon de faire avancer les choses avec la participation de tout le monde.

• 1750

M. John Herron: L'un des scénarios présentés lors de différents séminaires auxquels j'ai assisté est que Kyoto ne donnera lieu à aucun accord. Si c'était le cas—et cela serait dû au fait que les pays en voie de développement ne prendraient aucun engagement important—, les ministères peuvent-ils nous assurer que, s'il n'y avait aucun accord, ce qui est une possibilité, aussi minime soit-elle, le Canada n'abandonnera pas ses propres initiatives relatives à l'élaboration de son propre programme d'application? En fin de compte, s'il n'y a pas d'accord, on s'entendra tout au moins pour continuer d'en discuter.

M. Paul Heinbecker: J'aimerais répondre à cette dernière partie de votre question, et peut-être quelqu'un d'autre pourra-t-il répondre à la première partie, celle qui concerne la situation dans notre pays.

Je ne veux pas me risquer à évaluer les chances de conclure un accord à Kyoto, mais il y a un risque important qu'on n'y parvienne pas. De nombreuses questions restent à régler. Par exemple, la prochaine réunion des ministres de l'Environnement de la communauté européenne a lieu seulement le 7 décembre. Je pense donc que, d'ici là, les Européens ne seront pas prêts à faire beaucoup de concessions à propos de certaines questions cruciales.

En fait, on pourrait notamment dire que les vraies négociations vont commencer à Kyoto. Jusqu'à présent, beaucoup ont cherché à marquer leurs positions, mais c'est à Kyoto que les choses vont se jouer et que les véritables négociations vont avoir lieu. Je pense, d'ailleurs, que nous serons prêts à ce moment-là.

Si les négociations n'étaient pas couronnées de succès, il ne fait aucun doute qu'il y aura d'autres séries de négociations, parce que le problème restera entier. Il existe. Il est indéniable, et il est dans l'intérêt de tout le monde de le régler. Si les négociations échouaient à propos du genre de question dont vous parlez, j'ai l'impression qu'il n'y aurait pas d'autres possibilités que de prévoir des négociations ultérieures. Il faudrait revenir sur cette question.

Je sais qu'il existe un scénario alarmiste selon lequel tout va s'arrêter là; on est arrivé en haut de la vague et, maintenant, elle va refluer à nouveau. Je ne pense pas que ce soit le cas, certainement pas dans aucun des pays développés. L'opinion publique n'acceptera tout simplement pas qu'on ferme les yeux sur cette question.

Il y a une autre possibilité. Il y avait l'échec des négociations, il pourrait aussi y avoir une scission. C'est-à-dire qu'on pourrait imaginer que les pays développés concluent des ententes entre eux en se dissociant des pays en voie de développement.

La raison pour laquelle on ne considère pas cela comme la méthode la plus souhaitable est celle que nous avons indiquée, vous et moi, au début, c'est-à-dire que d'ici approximativement 2010, 50 p. 100 des émissions viendront des pays en voie de développement, et il faut trouver une façon de les faire participer si on veut qu'une solution soit possible.

M. John Herron: Pensez-vous qu'une telle scission pourrait se produire, étant donné que, pour ce qui est des pays en voie de développement, les Américains ont dit relativement ouvertement, je pense, que sans engagement de la part de ces pays, ils ne sont pas prêts à participer à une solution quelconque? Si c'était le cas, cela veut dire qu'on ne pourrait pas compter sur les États-Unis, le plus gros producteur de gaz carbonique. Il y a l'Inde, qui est le cinquième, la Chine, qui est le deuxième. Alors, relativement parlant, quelle serait la portée d'un accord de ce genre?

M. Paul Heinbecker: Il aurait une certaine portée, mais, pour les raisons que vous indiquez, je ne pense pas qu'il y ait de grandes chances d'y parvenir. Je pense qu'il y a eu quelque chose comme 95 voix contre une au Sénat des États-Unis en faveur de l'exigence d'une participation importante des pays en voie de développement. La formule utilisée par le gouvernement Clinton est qu'il faut une participation significative. Nous pensons qu'on peut obtenir une participation significative de différentes façons—par exemple au moyen d'engagements volontaires de la part des pays quasi industrialisés.

Je ne sais pas si la situation politique au congrès des États-Unis changera en 2000 ou en 2001, mais je pense que ce serait nécessaire pour qu'il y ait un accord distinct.

• 1755

M. John Herron: Ma dernière question concerne le fait qu'il me paraît très difficile—en fait, de toute évidence, tout ce sujet est plutôt troublant, ce qui est probablement un euphémisme—pour nous de nous pencher sur la situation ou d'en débattre étant donné qu'en peu de temps—il s'agit de ce que nous pouvons faire face à l'ampleur du problème—, la science, la technologie et les solutions potentielles pourraient évoluer considérablement en deux ou trois ans, peut-être de façon positive, mais peut-être aussi de façon négative. Pour ce qui est de l'atteinte de certains objectifs vers 2010, ou même 2012 et 2015—et certains proposent d'autres dates—, même s'il est bien d'en fixer, je ne sais pas dans quelle mesure ils seront encore pertinents d'ici trois ou quatre ans.

Même s'il y a un accord à Kyoto, comme vous l'avez dit, il faudrait encore peut-être deux ans avant qu'il soit ratifié; quel mécanisme existe-t-il pour que nous puissions réexaminer la question afin de pouvoir dire que, étant donné les renseignements dont nous disposons maintenant, selon les données scientifiques disponibles, il faudra que nous révisions...? De quel mécanisme de révision a-t-il été question?

M. Paul Heinbecker: La convention elle-même contient un mécanisme de révision dans un protocole qui lui est annexé. Elle a donc elle-même un tel mécanisme. La Conférence des parties va se réunir à Kyoto. Il y aura une autre session à Bonn l'année prochaine. Donc, une fois ou deux par an, la Conférence des parties se réunit et examine la situation.

Il ne fait guère de doute qu'au fur et à mesure de l'évolution des choses, la nature de l'engagement devra peut-être changer. Si nous constations que la situation est bien pire qu'on ne l'avait pensé, ce qui était le cas cette fois-ci, on réagirait d'une certaine façon. Mais s'il y avait une sorte de percée technologique magique, la réaction pourrait être différente. Il est prévu que toute cette question soit régulièrement examinée par la communauté internationale qui se réunirait périodiquement.

M. Robert Slater: J'ajouterai que, traditionnellement, pour les traités de ce type, la première version fait toujours l'objet d'améliorations, souvent étonnamment importantes et étonnamment rapides. Dans le cas du protocole de Montréal sur les CFC, nous pensions en 1987 que nous pourrions atteindre une réduction des CFC de 50 p. 100 en 1999. En fait, d'ici là, ils auront été éliminés des échanges commerciaux. Cela a été, en fait, moins coûteux et plus facile à réaliser que quiconque l'avait prévu à ce moment-là.

L'expérience montre qu'une fois que la première étape est franchie, c'est la plus importante. On peut ensuite en franchir d'autres au fur et à mesure qu'on connaît mieux la situation.

M. Paul Heinbecker: Les échéanciers à long terme sont acceptés. Plus on va loin dans l'avenir, plus c'est délicat, mais toutes les parties acceptent plus ou moins la notion de périodes commençant, disons, autour de 2010. Certains préconisent 2005, mais 2010 ne paraît pas être une date trop éloignée, en partie à cause du taux de renouvellement du capital et de l'introduction de technologies nouvelles; en fait, ce n'est pas une période très longue.

Cela ne suscite donc pas beaucoup de débats dans les négociations.

M. John Herron: Merci.

L'opposition a terminé.

[Français]

Le président: Monsieur Charbonneau.

M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Monsieur, dans le même ordre d'idées, j'aimerais poser des questions pour mieux comprendre exactement ce qui est attendu de la conférence de Kyoto.

Entre nous, ici, depuis qu'on en discute, je résume ce que j'entends dire la de la façon suivante: On cherche à s'entendre sur une date, mettons 2010 ou un peu avant ou un peu après, où l'on reviendrait au niveau de 1990.

Deuxièmement, on essaie de voir à quel rythme on pourrait réduire par la suite.

• 1800

S'agit-il de trouver, par exemple, un niveau mondial d'émission des gaz à effet de serre ou si cela doit s'appliquer à chacun des pays signant l'accord individuellement? Par exemple, si on dit qu'on doit revenir au niveau de 1990 en 2010, est-ce d'après un calcul qui fait la somme de tous les gaz à effet de serre qui sont émis ou si cela veut dire que, pour chacun des signataires, on doit atteindre cet objectif particulier?

[Traduction]

M. Paul Heinbecker: C'est une question d'ordre scientifique à laquelle M. Slater pourrait peut-être répondre.

En ce qui concerne les résultats éventuels, la discussion a en grande partie porté sur l'idée qu'il devrait y avoir un objectif unique accepté par tous. En même temps, il y a eu plusieurs propositions portant sur des objectifs différenciés; en d'autres termes, ils refléteraient d'une façon ou d'une autre la situation particulière de chaque pays participant et, dans une certaine mesure, la difficulté d'atteindre cet objectif, quel qu'il soit, d'ici à 2010.

Je ne pense pas que vous étiez ici quand je l'ai dit, mais la formule européenne représente une sorte de compromis, parce qu'elle prévoit une forte réduction pour certains et, en fait, une augmentation pour d'autres. C'est donc une sorte de système différencié à l'intérieur de l'Europe elle-même. La Commission européenne possède une certaine compétence constitutionnelle pour l'environnement et elle privilégie donc un engagement commun, ce qui, à notre avis, soulève des questions d'équité et aussi des questions concernant la possibilité pour les Européens de respecter juridiquement leurs obligations si un des pays ne se conforme pas à ses engagements.

Je pense qu'il est juste de dire que nous ne savons pas encore quel système sera adopté. Je dois dire que, pour le moment, on ne peut guère s'attendre à un taux unique, vu la divergence entre les États-Unis et les Européens.

Il y a quelques minutes, nous parlions des gaz; si on choisit un ensemble de gaz différents, les chiffres des uns et des autres ne seraient plus très éloignés, et il serait possible d'essayer de trouver un compromis entre eux sur lequel on pourrait s'entendre.

Mais je ne pense pas que qui que ce soit dise—et, à cet égard, je n'en remets à mes collègues assis à cette table—que, quel que soit le résultat atteint en 2010, il sera suffisant. On prévoit qu'il faudra aller plus loin. Personne n'a dit qu'il y a telle quantité de carbone dans l'atmosphère et telle quantité de carbone qui va dans l'atmosphère, ce qui veut dire que d'ici 2010, le pays X doit faire telle chose et le pays Y... etc. Il s'agit plutôt de savoir ce que les pays, compte tenu de toute façon de leur situation particulière, pensent qu'ils peuvent accomplir et aussi de ce qu'ils pensent et croient que les autres participants aux négociations devraient pouvoir accomplir. Voilà l'enjeu du débat.

Pour les questions scientifiques, je m'en remets à Bob.

M. Robert Slater: Je pense qu'il est juste de dire que, du point de vue scientifique, on pense qu'aucune des propositions actuelles prévoyant les réductions les plus rigoureuses avancées par un pays quelconque, si elles étaient appliquées à l'échelle de la planète, ne permettrait d'atteindre des émissions de gaz carbonique compatibles avec ce qu'on pourrait appeler la capacité limite de l'atmosphère. Le gaz carbonique continuerait de s'accumuler dans l'atmosphère, ce qui finirait par la modifier, et il faudra aller au-delà des objectifs prescrits pour 2010 pour la stabiliser.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Votre réponse est qu'on ne sait pas, à deux ou trois semaines de la Conférence de Kyoto, si on se dirige vers un flat rate ou à un differentiated rate. On ne le sait pas encore à trois semaines? C'est bien cela?

M. Paul Heinbecker: C'est bien cela.

[Traduction]

J'ai dit qu'à mon avis, les vraies négociations vont commencer à Kyoto. On a vu jusqu'à présent de nombreux pays marquer leurs positions. Par exemple, je ne voudrais pas trop médire d'eux, mais beaucoup sont sceptiques quant à la possibilité qu'ont les Européens de réaliser véritablement une réduction de 15 p. 100, même en appliquant leur propre définition.

• 1805

Je sais, par exemple, ou c'est tout au moins ce qu'on m'a dit—je ne cherche pas à le contester—qu'une des raisons pour lesquelles les Américains n'ont pas cité de chiffres pour leur deuxième période budgétaire est qu'ils veulent qu'il leur reste quelque chose à négocier avec les pays en voie de développement. Ils ne veulent pas présenter la totalité de leur position. Ils veulent que, pour essayer de pousser les États-Unis à aller plus loin au cours de la deuxième ou troisième période budgétaire, les pays en voie de développement soient incités à assumer eux-mêmes certaines obligations. Je sais que c'est une considération tactique. Il y a beaucoup de considérations tactiques dans ce qui se passe actuellement.

Mais, en fin de compte, les véritables négociations auront lieu à Kyoto, je pense. Il s'agit alors de savoir s'il y aura assez de temps et de bonne volonté pour conclure un accord satisfaisant au cours des 10 ou 12 jours dont nous disposons; je dois dire que je n'en suis pas sûr, même si nous ferons évidemment de notre mieux pour y parvenir.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Monsieur le président, je suis simplement étonné de voir qu'à l'approche d'une telle échéance, on soit encore aussi dans le vague quant à l'objectif final attendu.

On mobilise des dizaines et des dizaines de pays à travers des processus très complexes, mais on n'a pas une idée exacte du produit attendu.

J'ai l'habitude des longues négociations dans le secteur syndical. Par exemple, prenons le salaire des enseignants. Disons que je suis à l'échelle internationale et que nous considérons la masse salariale des enseignants de 150 pays à travers le monde. Au lieu de l'augmenter, on va parler de la réduire, si on parle des gaz à effet de serre.

Et là, on dit qu'on veut la réduire de 5 pour cent dans dix ans, et je ne peux dire si je veux que cela s'applique à chacun des pays ou si c'est à la masse totale que je veux appliquer ma réduction. Je ne sais même pas cela, à trois semaines de l'échéance. Je trouve que je serais dans une situation très périlleuse.

Pouvez-vous nous parler des étapes préparatoires qui ont mené à Kyoto? Il y a dû avoir un moment donné où ces questions majeures se sont posées. Ou, on n'a pu les résoudre ou on ne se les est pas posées. On est rendu à trois semaines. Ce n'est rien du tout, trois semaines, pour des raisons aussi complexes.

Je dis cela parce que je partage la crainte que de très grandes difficultés surgissent. Surtout que, là, vous me dites que l'Europe semble s'être donné un objectif global, mais différencié par pays, à l'intérieur de l'Europe, alors qu'aux États-Unis et au Japon, on entend parler d'un chiffre. Quand cela va arriver au Canada, va-t-on avoir un objectif différent par province, par secteur? Comment le problème va-t-il se poser?

[Traduction]

M. Paul Heinbecker: Nous arrivons là à un point où je dois dire que je ne peux pas émettre des hypothèses au sujet de ce que sera notre politique.

Vous avez raison de vous inquiéter. Je pense toutefois que, suite aux différentes réunions qui ont eu lieu, surtout la dernière à Tokyo, nous avons une assez bonne idée de ce que veulent les uns ou les autres, leurs raisons, et les domaines où on pourrait parvenir à s'entendre.

Je vais vous donner un petit exemple. Une partie du traité couvre ce qu'on appelle «les politiques et les mesures». Il y a des membres de la communauté européenne qui veulent que cela soit obligatoire. Il y en a d'autres, dont nous, qui ne veulent pas que ce soit obligatoire, mais nous pouvons imaginer bien des choses que nous serions heureux de faire de concert avec les Européens. Il y a toutes sortes d'activités possibles, de l'échange d'information à l'acceptation mutuelle des normes de recherche des autres pays. On pourrait faire toutes sortes de choses.

• 1810

Ce qui pose un problème est qu'en ce qui concerne les Européens, ils ont l'habitude que Bruxelles puisse intervenir dans leur propre procédure de réglementation. Il leur est donc facile d'imaginer un système de ce genre. Par contre, pour la Nouvelle-Zélande, l'Australie, les États-Unis, le Canada ou le Japon, si on commence à dire que quelqu'un va, par exemple, venir de Bruxelles pour vérifier si vous respectez vos obligations et qu'il va vous dicter la façon d'atteindre vos objectifs, vous aurez beaucoup de mal à l'accepter. Mais il y a un point intermédiaire entre ne rien faire et tout faire, et c'est comme cela que, je pense, nous pourrons probablement régler ce problème.

Nous pourrons probablement aller assez loin avec les Européens en ce qui concerne les échanges d'émissions, l'application conjointe et plusieurs autres questions. La situation n'est pas si désespérée que cela. Ce que j'ai du mal à prévoir, c'est comment réagiront les pays en voie de développement qui, pour le moment, adoptent une position très ferme au sujet de la différence entre les pays du Nord et ceux du Sud.

Je suis optimiste relativement à la possibilité d'un changement parce que de nombreux participants des pays en voie de développement sont ce qu'on pourrait appeler des diplomates professionnels des Nations Unies. Ils ont assisté à toutes les conférences dont on garde le souvenir. Ils connaissent tous les articles et tous les paragraphes et ils sont prêts à les citer longuement, mais ils ne sont pas vraiment habilités à conclure un accord. Une fois qu'on sera à Kyoto, je pense que le peu de temps disponible les forcera un peu à changer d'attitude. En outre, les ministres vont venir et ils sont habilités à faire des choses que les délégués n'ont pas pu faire.

Une autre chose que je devrais dire à propos de la préparation et du fait que tout est peut-être déjà déterminé et que les véritables négociations auront lieu à Kyoto est qu'il n'y a, en quelque sorte, pas d'autres possibilités. Cette question a été discutée assez longuement par la cinquantaine de membres du Commonwealth lors du Sommet d'Édimbourg en octobre. Elle a été discutée par la cinquantaine de membres de la Francophonie à Hanoï le week-end dernier. Je n'ai aucun doute quant au fait qu'elle sera à nouveau discutée sérieusement lors de la réunion de l'APEC, qui aura lieu ce week-end et les jours suivants à Vancouver. Pendant les réunions bilatérales et les discussions générales, on profitera de cette occasion d'essayer de faire avancer les choses. On prépare le terrain. La question est de savoir si on pourra trouver un terrain d'entente suffisant pour parvenir vraiment à un accord à Kyoto.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Je voudrais maintenant parler de la même discussion, mais à l'échelle canadienne. Quand il est question d'établir un objectif et un calendrier pour le Canada que ce soit stabilisation au niveau de 1990 pour 2010, etc., comment cela va-t-il se traduire après que le Canada aura souscrit, dans l'année ou les deux ans qui vont suivre Kyoto? Un jour va arriver où on va signer. Par hypothèse, nous signons quelque chose. La cible et le calendrier que nous allons nous donner vont-ils se calculer à l'échelle canadienne, en faisant la somme de toutes les émissions à l'échelle canadienne ou si on va mettre à contribution les provinces dans le calcul de leurs propres émissions?

La même question s'applique en ce qui a trait au secteur industriel. Je suppose que tous les secteurs industriels ne produisent pas exactement la même proportion de gaz à effet de serre. Il y en a qui ont déjà fait des efforts importants pour réduire les leurs et il y en a d'autres qui en ont peut-être moins fait. Si, par exemple, le Canada accepte l'objectif de revenir au niveau de 1990 en 2010, comment cela va-t-il s'organiser par la suite?

• 1815

Ici, j'ai des notes d'un document qui s'appelle Climate Change Cross-Canada Briefings Before Kyoto. À la page 57, sous le titre “Ensuring a Fair and Equitable Sharing of the Burden in Canada”, je vais vous lire une phrase ou deux. Notre premier ministre dit souvent que le premier principe est que nous allons être justes entre les provinces, les régions et les secteurs industriels. J'aimerais voir quelle mécanique on va mettre en place pour assurer cette justice ou cette équité.

[Traduction]

    S'il existe une entente politique suffisante pour que la question du changement climatique puisse être traitée sérieusement, un problème fondamental qui se posera sera de déterminer les responsabilités relatives de chacun des principaux secteurs économiques et de chaque province. Jusqu'à présent, les ministres de l'Énergie et de l'Environnement ont été incapables d'entamer une telle discussion ou réticents à le faire. L'engagement du Canada reste national sans objectifs régionaux ou sectoriels.

[Français]

Un peu plus loin, on dit

[Traduction]

    La détermination d'une entente sur le partage du fardeau doit fondamentalement être négociée entre le gouvernement fédéral et les provinces, ce que certains considèrent peut être actuellement comme une perspective politique trop inquiétante.

[Français]

J'aimerais entendre vos commentaires, ceux qui ont trait à ce paragraphe. Est-ce que vous avez été

[Traduction]

incapables d'entamer une telle discussion ou réticents à le faire?

[Français]

Comment cela se passe-t-il? Comment prévoyez-vous que cela va se passer? Ce sera par secteur, par province ou comment?

[Traduction]

M. Robert Slater: Je dirai pour commencer que le document que vous citez doit avoir été rédigé avant le 12 novembre, parce qu'à Regina, le communiqué des ministres de l'Environnement et de l'Énergie stipulait notamment:

    Sur la base de ce qu'on sait actuellement de la situation du Canada et de l'état des négociations internationales, les ministres sont convenus qu'il est raisonnable de chercher à réduire les émissions totales de gaz à effet de serre au Canada aux niveaux qui existaient en 1990 d'ici à l'an 2010 ou à une date voisine. Les ministres ont en outre déclaré qu'il était souhaitable de ne pas se limiter à cette stabilisation fondamentale des gaz à effet de serre et ils ont souligné l'importance des éléments de souplesse figurant dans l'accord, des progrès scientifiques et technologiques et d'une participation appropriée des pays en voie de développement.

Ils ont également commencé à parler de la façon d'y parvenir.

Je dois dire qu'avant le 12 novembre, il n'existait pas une telle entente politique entre les gouvernements du Canada. On a donc déjà beaucoup avancé, mais je pense que tout le monde convient que ce n'est pas suffisant.

J'ai dit au départ comment nous avions procédé au Canada pour arriver à la situation actuelle, et j'ai essayé d'expliquer que cela n'est pas encore suffisant pour parvenir à un accord—un accord juste, équitable, efficient et efficace—qui sera nécessaire pour que nous puissions respecter l'engagement que nous prendrons à Kyoto, quel qu'il soit. Cela exigera la participation d'un grand nombre de personnes. La mise au point de la procédure à suivre sera une des plus importantes choses à faire dans le proche avenir.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Le climat va continuer de se réchauffer après Kyoto et il y aura des discussions de plus en plus vigoureuses entre les partenaires, les provinces, le fédéral et les grands secteurs industriels de manière à trouver un consensus sur la mise en oeuvre de l'objectif auquel nous allons souscrire. Je crois que cela va devenir more hot, not only warmer.

Le président: Merci, monsieur Charbonneau.

[Traduction]

Je vais poser de brèves questions, et nous pourrons ensuite terminer la séance—il est déjà assez tard—; il y en a une pour M. Cleland et l'autre pour M. Heinbecker.

Monsieur Cleland, pour les énergies renouvelables, dans votre mémoire d'aujourd'hui, vous nous avez dit que l'amélioration des conditions d'investissement, par exemple les récentes mesures fiscales destinées à créer des conditions égales pour tout le monde pour le développement des marchés et le développement technologique, donne l'impression qu'on a mis sur un pied d'égalité les sources d'énergie renouvelables et les sources non renouvelables. Ai-je raison de dire que ce n'est pas encore le cas au Canada?

• 1820

M. Mike Cleland: Je crois pouvoir dire que je ne sais pas comment répondre à cette question. Comme vous le savez sans doute suite aux débats qui ont eu lieu il y a deux ou trois ans, c'est une question assez complexe. L'analyse qui a été effectuée et qui a été, je crois, discutée par votre comité a montré qu'il y avait, tout au moins d'après les normes utilisées dans cette analyse, des facteurs défavorables pour les énergies renouvelables et même l'efficacité énergétique.

Certaines mesures ont été prises. Il reste à voir si elles ont bien mis tout le monde sur un pied d'égalité et, en fait, si c'est vraiment nécessaire ou si certains devraient être favorisés. Tout ce que je peux dire est que certaines mesures ont été prises dans le bon sens, mais il est tout à fait évident que, vu leur situation économique, les énergies renouvelables ont encore du mal à se faire une place sur le marché.

Le président: D'après le peu que je sais, tout le monde n'est pas encore sur un pied d'égalité. Pourriez-vous remettre au comité d'ici lundi une brève analyse de la situation actuelle en comparant le traitement fiscal de ces deux secteurs?

M. Mike Cleland: Je crois que ce que nous pourrions faire serait une mise à jour de l'analyse que nous avons faite il y a deux ans. Je ne peux pas m'engager à le faire d'ici lundi, monsieur le président, mais nous la préparerons à votre intention le plus rapidement possible.

Le président: Merci.

Monsieur Heinbecker, l'expérience que nous avons acquise en Amérique du Nord au sujet des pluies acides nous a permis de tirer de nombreux enseignements. L'un d'entre eux est qu'à un moment donné, le Canada a dû en arriver à la conclusion qu'il devait faire cavalier seul au lieu d'attendre que les États-Unis se joignent à lui pour réduire les émissions d'anhydride sulfureux.

Or, cinq ou six ans plus tard, les Américains se sont manifestés et ont dit qu'ils étaient prêts à agir et ils ont lancé un programme qui, une fois qu'il sera terminé, correspondra au programme du Canada.

Bien sûr, il s'agit de deux pays développés, et on ne peut donc pas transférer cet exemple sur la scène mondiale. Néanmoins, pensez-vous qu'il serait possible que les pays développés fassent cavalier seul en prenant pour hypothèse que, suite aux pressions exercées par l'opinion publique et à d'autres facteurs, les pays en développement réticents finiraient par en faire autant une fois qu'ils auraient atteint un certain niveau de richesse?

M. Paul Heinbecker: Vous m'avez demandé si je...?

Le président: Pensez-vous qu'il serait réaliste que les pays développés, en particulier les membres de l'OCDE, fassent cavalier seul au cours des 10 ou 20 prochaines années en faisant peut-être une sorte de pari ou en supposant que, une fois qu'ils auront atteint un certain niveau de richesse, les pays en développement qui disent actuellement que le véritable problème est celui de la pauvreté finiront par se joindre aussi à cet effort?

M. Paul Heinbecker: J'ai participé aux guerres sur les pluies acides, comme vous vous en souvenez peut-être, et je pense pouvoir vous répondre que, dans un certain sens, c'est à cela que correspond le mandat de Berlin. Nous allons nous engager à pratiquer nos propres limitations ou réductions. Dans le mandat de Berlin et le protocole que nous négocions, rien ne garantit que les pays en voie de développement nous accompagneront sur cette voie.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, est-ce qu'un accord séparé serait nécessaire et serait-il réalisable... Je pense que c'est envisageable, mais je ne suis pas sûr que ce soit approprié. On m'a posé une question au sujet de la situation politique aux États-Unis. D'autres ont également des convictions très fermes à ce sujet, comme vous pouvez vous en douter. Les Japonais aussi, et il y a peut-être également des Européens qui ont un point de vue identique. Il y a certainement beaucoup de gens en faveur de la création d'une sorte de procédure ultérieure permettant la participation des pays en développement.

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J'ajouterai qu'une des difficultés est que, dans certains de ces pays, l'opinion publique n'influence pas les choix du gouvernement. Dans certains cas, rien n'est prévu pour la participation de la population, et, dans d'autres cas, elle se soucie beaucoup plus du développement économique que de l'environnement. Il est évident qu'au bout d'un certain temps, comme c'est actuellement le cas en Asie du Sud-Est, elle devra se soucier des deux. Mais pour le moment, il y a des pays qui s'intéressent plus à l'énergie à bon marché qu'à l'énergie non polluante. Notre tâche est de trouver une façon de concilier les deux.

Le président: Merci.

Ainsi se termine une réunion assez longue et extrêmement intéressante. Au nom des membres du comité qui sont encore ici, je voudrais vous remercier, monsieur Cleland, monsieur Heinbecker et monsieur Slater, pour vos idées, votre contribution, votre patience et les précieux renseignements que vous nous avez communiqués.

La séance est levée jusqu'à demain matin à 9 heures.