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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 060 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 9 mai 2023

[Enregistrement électronique]

  (1615)  

[Traduction]

    Le début de cette réunion a été quelque peu perturbé; je ne vous apprends rien.
    J'ai dû demander à deux de nos témoins de bien vouloir comparaître à une date ultérieure, si bien que nous nous retrouvons maintenant avec un seul groupe constitué de trois témoins. Je tiens d'ailleurs à remercier Mme Tam‑Seto, le colonel Pucci et Mme Lafond de leur patience.
    Comme vous le savez tous, chers collègues, si la sonnerie se fait entendre, je devrai interrompre la séance, à moins que j'aie le consentement unanime pour que nous continuions. Je ne vais pas vous demander maintenant votre consentement. Je le ferai au moment venu. J'ose espérer que nous pourrons tout au moins entendre les déclarations de nos témoins, après quoi nous verrons ce qu'il est possible de faire.
    Cela dit, je vais maintenant céder la parole à Mme Linna Tam‑Seto qui dispose de cinq minutes pour nous présenter ses observations préliminaires. Elle sera suivie de Mme Myriam Lafond, puis du colonel Richard Pucci.
    Merci encore de votre patience. Nous avons grand-hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire.
    Bonjour, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du Comité. Merci de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui pour vous parler d'une partie du travail auquel je contribue pour en arriver à une meilleure compréhension des expériences vécues par les anciens combattants canadiens et leurs familles, surtout pendant les périodes de changement et de transition.
    Je suis chercheure en santé à l'Université McMaster et à l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans. Je suis une civile qui ne possède aucune expérience militaire et qui n'a aucun lien familial avec ce milieu. J'ai cependant une vingtaine d'années d'expérience clinique et de recherche à titre d'ergothérapeute agréée.
    Je suis ici pour vous faire part des connaissances actuelles quant à la situation des militaires qui sont libérés et doivent faire la transition vers d'autres services de santé. Dans le cadre de mon travail, j'entends souvent des gens demander pourquoi les vétérans et leurs familles sont si spéciaux. Les gens veulent savoir pourquoi notre système de santé devrait leur offrir un traitement différent de celui auquel eux-mêmes et leur famille ont droit.
    La réponse est pourtant bien simple. Les vétérans et leurs familles se distinguent en raison des sacrifices personnels qu'ils ont consentis pour se mettre au service de notre pays. Ils ne devraient pas être désavantagés en raison de ces services rendus au Canada. C'est la raison pour laquelle mes collègues et moi-même accomplissons ce travail et allons continuer de le faire.
    Je veux surtout vous parler aujourd'hui de deux phénomènes bien précis expérimentés par les anciens combattants des Forces canadiennes lors de leur transition vers la vie civile, peu importe le type de libération.
    Premièrement, il n'existe pas de mécanisme cohérent permettant le transfert du dossier d'un militaire des services de santé des Forces canadiennes vers le système civil de soins de santé. La plupart des Canadiens ignorent qu'il n'y a pas de système de santé expressément pour les anciens combattants. Au moment de leur libération, les vétérans se retrouvent sous le régime du même système que tous les autres Canadiens, et doivent donc composer avec les mêmes difficultés, les mêmes obstacles et les mêmes délais.
    Certains vétérans planifient leur inévitable transition vers le système civil en se tournant vers un prestataire de soins primaires qu'ils connaissent parfois déjà par l'intermédiaire de leurs proches ou de leurs amis, ce qui facilite d'autant le processus. Cet arrêt brusque des services risque toutefois d'en priver plusieurs de soins pendant une certaine période. Pour ceux qui sont aux prises avec des problèmes de santé complexes ou chroniques, une telle interruption peut être encore plus grave. Nous entendons parler de vétérans qui en sont réduits à inscrire leur nom sur d'innombrables listes d'attente, à visiter les cliniques sans rendez-vous ou à se rendre aux urgences pour recevoir des soins de routine. De nombreux anciens combattants nous ont dit que lorsqu'il leur était effectivement possible de voir quelqu'un, ils devaient choisir lequel de leurs problèmes de santé allait être pris en charge ce jour‑là. C'est une décision qui peut être extrêmement difficile pour un vétéran aux prises avec de multiples problèmes de santé.
    Deuxièmement, il faut considérer ce qui se passe lorsqu'un ancien combattant finit par avoir accès au système de santé civil. Comme je le disais tout à l'heure, la plupart des Canadiens ne savent pas que les vétérans doivent s'en remettre aux services de santé offerts à tous par les provinces et les territoires. Dans un tel contexte, il y a peu de chance que les professionnels et les établissements en question soient au fait de la réalité d'un ancien combattant et des répercussions directes que peuvent avoir ses expériences militaires, non seulement sur le risque qu'il éprouve certains problèmes de santé, mais aussi sur la façon dont il interagit avec les pourvoyeurs de soins.
    Autrement dit, le système de santé canadien, avec ses professionnels, ses établissements, ses politiques et ses processus, souffre, dans une large mesure, d'un manque de sensibilisation à la réalité militaire. Il est en effet essentiel d'offrir aux anciens combattants ainsi qu'à leurs familles des soins de qualité répondant aux besoins particuliers en matière de santé qui découlent de leur service militaire.
    Il s'agit de pouvoir bien saisir ce qui distingue les gens les uns des autres. Chaque personne est le produit unique de ses expériences ainsi que des croyances et des normes propres à sa culture. Grâce à la sensibilisation à la réalité militaire, des professionnels de la santé comme moi qui travaillons auprès des anciens combattants et de leurs familles pouvons prendre bien conscience des besoins particuliers de ces gens‑là et des enjeux avec lesquels ils doivent composer. D'abord et avant tout, cela passe par les mesures que je dois prendre pour adapter ma pratique d'ergothérapeute à partir du moment où je suis informée du lien d'un patient avec le monde militaire.
    Les ordres professionnels canadiens du secteur de la santé, comme le Collège des médecins de famille du Canada et l'Association canadienne des ergothérapeutes, en font davantage pour produire de la documentation afin que leurs membres respectifs soient mieux au fait de cette réalité militaire. C'est un excellent point de départ qui est tout à fait louable. Il y a encore toutefois beaucoup à faire pour la formation et l'accréditation des professionnels de la santé.
     Je suis à l'avant-garde d'une grande partie des travaux menés au Canada en vue de mieux comprendre la situation des vétérans et de leurs proches qui doivent recevoir des soins dans la collectivité. Parallèlement à cela, je m'intéresse aux expériences des professionnels de la santé pour déterminer quelles mesures de sensibilisation et de formation pourraient les aider à intervenir auprès des anciens combattants en pouvant s'appuyer sur une meilleure compréhension de leur situation particulière.
    Je vous remercie encore une fois, et je me réjouis à la perspective de pouvoir discuter de ces questions avec vous.

  (1620)  

    Merci, madame Tam‑Seto.
    J'ai manqué à mon devoir en ne soulignant pas la présence parmi nous de Karen McCrimmon, qui a déjà été présidente de ce comité.
    Madame McCrimmon, vous êtes toujours la bienvenue.

[Français]

     Je cède maintenant la parole à Mme Lafond pour cinq minutes.
    Je remercie également les membres du Comité de me recevoir.
    Je m'appelle Myriam Lafond et je suis directrice générale du Centre de crise et de prévention du suicide du Haut‑Richelieu‑Rouville.
    Le Centre est situé à Saint‑Jean‑sur‑Richelieu, ville où se trouve la base militaire, l'École de leadership et de recrues des Forces canadiennes et le Collège militaire royal de Saint‑Jean.
    Le Centre existe depuis 1993 et offre un service d'intervention téléphonique et de suivi en personne pour les gens ayant des idées suicidaires ou ayant perdu quelqu'un par suicide.
    De 2010 à 2015, le Centre a développé son centre d'hébergement de crise. Il offre deux lits aux personnes en situation de crise.
    Pendant la période où les lits de crise ont été déployés, la base militaire a communiqué avec le Centre pour obtenir de la formation. Des policiers militaires et des aumôniers ont donc reçu une formation sur la prévention du suicide, et ils ont découvert toute la gamme des services que nous offrions, dont les lits d'hébergement. Ils nous ont ensuite demandé de mettre en place une trajectoire de services.
    Depuis 2015, nous hébergeons donc des recrues militaires ainsi que des militaires en service qui ont besoin d'une pause, le temps de reprendre pied et de désamorcer la crise qu'ils traversent, qu'elle soit suicidaire ou psychosociale. Ces derniers sont accueillis par notre équipe, formée d'intervenants ayant tous obtenu un diplôme universitaire en relation d'aide. Nos intervenants sont parfaitement bilingues, vu la proportion de militaires anglophones que nous hébergeons. Nous avons réservé un lit pour les militaires qui nous sont envoyés.
    La trajectoire de services a été mise en place en collaboration avec le 41e Centre de services de soins de santé des Forces canadiennes. Tous les militaires hébergés dans notre centre de crise doivent passer par ce service médical, qui, après les avoir évalués, entre en communication avec nous pour les diriger vers nos services.
    Plutôt que d'envoyer ces militaires à l'hôpital, il est beaucoup plus pertinent de les diriger vers un centre de crise en mesure de leur offrir un vrai soutien psychologique, des interventions précises pour désamorcer la crise suicidaire et leur permettre de retrouver une certaine maîtrise de la situation et de la souffrance qu'ils endurent.
    Le fait que nous ne soyons pas des militaires nous-mêmes permet vraiment aux militaires de prendre du recul et de s'exprimer ouvertement sur ce qu'ils sont en train de vivre. Par expérience, je vous dirais que ce sont des gens très déracinés. En général, ils quittent leur chez-soi pour venir passer 12, 13 ou 14 semaines à Saint‑Jean‑sur‑Richelieu dans un milieu complètement différent de celui qu'ils connaissent. Souvent, cela génère des crises, et le fait d'être accueillis dans un centre de crise qui n'est pas militaire leur permet de retrouver une certaine maîtrise de leur situation.
    Les liens que nous entretenons avec la base militaire sont fluides, nécessaires et importants. Ils sont efficaces. Au cours des dernières années, nous avons accueilli plusieurs militaires. Nous en hébergeons toutes les semaines et leur séjour peut durer de trois à dix jours, le temps que la crise se résorbe et que les personnes puissent réintégrer la base ou en soient libérées, lorsque faire partie des Forces armées ne leur convient tout simplement pas. Le temps passé au Centre leur permet donc de vraiment prendre du recul pour voir ce qui est le mieux pour eux et faire le meilleur choix possible de façon consciente.
    Voilà ce que j'avais à vous dire. Je serai très à l'aise de répondre à vos questions, si vous en avez.

  (1625)  

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Colonel Pucci, vous avez cinq minutes.
    Certains collègues se demandaient à quelle heure nous allions terminer. Je peux vous dire que nous ne dépasserons pas 18 heures.
    À vous la parole, colonel Pucci.
    Mes salutations à vous, monsieur le président, ainsi qu'à vos distingués collègues.
    Je suis le colonel à la retraite Richard Pucci. J'ai travaillé comme cadre dans le secteur de la santé. J'ai eu l'honneur de servir en uniforme pendant plus de 30 ans. J'ai pris ma retraite en 2016 alors que j'occupais le poste de commandant adjoint du Groupe des services de santé des Forces canadiennes. Auparavant, j'ai été chef d'état-major du Médecin-chef des Forces canadiennes.
    Depuis ma retraite, j'ai le plaisir de travailler avec une multitude d'anciens combattants et de groupes qui les représentent d'un océan à l'autre.
    Le manque d'accès aux soins est l'une des principales difficultés auxquelles se heurtent les vétérans qui en ont besoin. Dans bien des cas, ils doivent parcourir de longues distances pour se rendre dans les établissements de santé, ce qui peut être fatigant, dispendieux et, bien sûr, chronophage. En outre, il faut parfois attendre très longtemps pour obtenir un rendez-vous, ce qui a pour effet de retarder le traitement et d'accroître les risques de complications.
    Pour régler cette problématique, il faudra changer radicalement l'offre de soins primaires à nos anciens combattants qui doivent y avoir accès dès leur retraite. C'est tout ce qu'ils demandent. Nous devrons pour ce faire mettre en place un organisme indépendant qui contribuera à assurer une transition en douceur vers le système de santé civil.
    En collaboration avec des partenaires stratégiques, je suis prêt à lancer ici même dans la région d'Ottawa un test de validation de principe. J'ai ainsi pu mettre en réseau deux établissements de santé qui sont disposés à participer à cet essai révolutionnaire pour les soins de santé offerts aux anciens combattants.
    Il y a d'abord Beechwood Physical Medicine, une clinique multidisciplinaire où l'on mise sur des pratiques ayant fait leurs preuves, des données probantes et des solutions novatrices pour aider nos vétérans aux prises avec une détresse et des douleurs physiques et psychologiques.
    Le deuxième site prend la forme d'une clinique de soins primaires pour les anciens combattants dans les locaux de Tay River Reflections à Perth, en Ontario. Dans un cas comme dans l'autre, on est prêt à contribuer à cette transformation novatrice de la prestation des soins de santé à nos vétérans. Les deux cliniques ont d'ailleurs offert généreusement leurs infrastructures aux fins de cet important projet. L'essai de validation se déroulera sur une période de six mois, avec comme objectif d'étendre par la suite l'expérience à d'autres sites sélectionnés dans les différentes régions du pays.
    J'ai quatre recommandations à vous soumettre.
    Premièrement, il convient d'établir un groupe de travail sur les services de santé pour les vétérans. Au départ, ce groupe de travail sera indépendant et n'aura aucune affiliation avec Anciens Combattants Canada ou le Groupe de transition des Forces armées canadiennes. Cependant, une certaine synergie pourra émerger du déploiement de nouveaux sites par le groupe de travail à la suite de l'essai de validation. Le groupe de travail relèvera directement de ce comité ou d'une autre entité, selon ce que la présidence jugera approprié. Le groupe de travail serait formé d'anciens combattants possédant une expertise du secteur de la santé ainsi que de représentants des autres gouvernements et autorités sanitaires.
    Deuxièmement, ce groupe de travail sur les services de santé pour les vétérans devra mettre en place une structure de gouvernance afin d'appuyer le déploiement du modèle dans l'ensemble du pays.
    Troisièmement, des fonds doivent être attribués pour que l'un des sites de notre programme puisse être ouvert immédiatement. Je ne vous apprends sans doute rien en vous disant que c'est un programme conçu pour répondre aux besoins des anciens combattants. Nous avons fait le nécessaire pour bien planifier le tout en jetant les bases d'un programme efficace. Le financement servirait surtout à éponger les frais à engager pour le lancement, y compris au chapitre de la logistique, de l'équipement médical, de la sous-traitance et de la dotation.
    Quatrièmement, le groupe de travail sur les services de santé pour les vétérans devra mener un examen détaillé des modèles de soins primaires pour les anciens combattants mis en place dans nos pays alliés.
    En conclusion, je souhaite exprimer ma gratitude aux membres du Comité permanent de la défense nationale pour leur étude des services de santé et de transition ainsi que pour le leadership et la détermination dont ils font montre dans la défense des intérêts de nos militaires et, bien sûr, aussi de nos anciens combattants.
    Travaillons tous ensemble en vue d'améliorer ces services essentiels et de faire en sorte que nos hommes et nos femmes en uniforme, ou maintenant en civil, obtiennent les soins qu'ils méritent et dont ils ont besoin.
    Merci.

  (1630)  

    Merci, colonel Pucci.
    Nous n'entendons pas encore la sonnerie, mais je pense que cela ne saurait tarder.
    Je proposerais donc que nous entamions le premier tour où chacun aura droit à six minutes. Je demanderai s'il y a consentement unanime le moment venu.
    J'ose espérer que vous consentirez effectivement à ce que nous poursuivions nos travaux. Il restera alors à déterminer combien de temps nous devons prévoir exactement pour aller voter.
    Cela dit, madame Kramp‑Neuman, vous avez six minutes.
    Ma première question sera pour vous, madame Tam‑Seto.
    On a beaucoup étudié les impacts du service militaire sur la santé mentale des membres des Forces armées canadiennes. Pouvez-vous nous dire dans quelle mesure on s'est intéressé également aux répercussions pour les enfants et les familles de ces militaires?
    Il y a de plus en plus de travaux de recherche au Canada, particulièrement au sein même du ministère de la Défense nationale, concernant les impacts sur les enfants. Il n'en demeure pas moins que nous continuons à suivre de près ce qui se fait à ce chapitre du côté des États‑Unis et sur la scène internationale. Nous savons qu'il y a des différences quant à l'accès aux soins en santé mentale au Canada, car nous n'avons pas ici un système de santé expressément consacré aux proches des militaires, comme c'est le cas aux États‑Unis. Nous commençons à peine à nous intéresser à cet enjeu au Canada.
     Nous avons une certaine idée de la situation et des travaux préliminaires ont été effectués, mais il faut assurément investir davantage de ressources dans la recherche sur ces questions.
    Merci.
    Estimez-vous qu'il y a suffisamment de mesures de soutien spécialisé en santé mentale pour les enfants et les familles des membres des Forces armées canadiennes?
    Absolument pas. Je peux vous répondre très franchement à ce sujet, du simple fait que j'ai travaillé en santé mentale auprès des enfants et des adolescents avant de faire de la recherche. Je sais donc pertinemment ce qui peut nous manquer en matière de formation. Je pourrais vous parler pendant des heures de l'importance de la sensibilisation à la réalité militaire et du travail que nous accomplissons en ce sens.
    Nous savons qu'il existe des facteurs de stress qui touchent tout particulièrement les familles et les enfants des militaires. Nous ne savons toutefois pas dans quelle mesure il leur est possible d'obtenir des soins de qualité dans la collectivité.
    Pour répondre à votre question, ces mesures de soutien ne sont pas suffisantes. Même dans les meilleures conditions, les soins en santé mentale offerts à l'ensemble des enfants canadiens laissent à désirer. Pour les clientèles spécialisées, ce déficit est encore plus marqué.
    Merci.
    Croyez-vous que les difficultés d'accès aux soins de santé et à d'autres services de base pour les membres des Forces armées canadiennes et leurs proches peuvent faire obstacle au recrutement?
    Je pense que les militaires ne sont pas conscients de ces choses‑là lorsqu'ils s'engagent.
    Lorsqu'on recrute des gens, il faut leur faire comprendre que c'est une carrière qu'ils pourraient poursuivre jusqu'à leur retraite. Très souvent, les nouvelles recrues qui arrivent ne se voient pas arriver à l'âge de la retraite ou fonder une famille. Je pense que les Forces armées canadiennes se doivent de sensibiliser les militaires à ces questions au fur et à mesure qu'ils gravissent les échelons et suivent leur formation.
    Merci.
    Colonel Pucci, pouvez-vous nous dire dans quelle mesure vous estimez que les anciens membres des Forces armées canadiennes peuvent avoir facilement accès aux traitements en santé mentale dont ils ont besoin?
    Précisons d'abord et avant tout que je ne suis ni un clinicien ni un prestataire de soins en santé mentale. Je suis cadre et planificateur opérationnel dans le secteur de la santé.
    À la lumière de mes rencontres avec nos anciens combattants, je peux vous confirmer que les problèmes sont nombreux. Il y a un large fossé à combler entre le moment où un militaire est libéré des Forces armées canadiennes et celui où il amorce son cheminement dans le système de santé civil. C'est un fossé qui est très difficile à traverser. Comme c'est le cas pour tous les Canadiens, l'offre de services en santé mentale est déficiente. J'ai parlé à de nombreux vétérans à ce sujet, et j'ai collaboré avec plusieurs entreprises qui s'efforcent de déployer les moyens nécessaires pour aider les vétérans à composer avec leurs problèmes de santé mentale.

  (1635)  

    Merci.
    Étant donné les facteurs de stress et les défis particuliers auxquels sont exposées les personnes occupant des postes de commandement au sein des forces militaires, existe‑t‑il à votre connaissance des ressources spécialisées pour voir à leur bonne santé mentale?
    Dans le secteur civil, il y a un grand nombre de nouvelles entreprises émergentes qui s'efforcent de mettre de l'avant des capacités cliniques novatrices pour le traitement des problèmes de santé mentale. Malheureusement, Anciens Combattants Canada ne permet pas pour l'instant que les vétérans aient accès à ces technologies avant-gardistes.
    Comment pouvons-nous les aider? Comment pouvons-nous appuyer nos vétérans qui sont au bord de l'épuisement? Que fait‑on actuellement pour leur porter assistance?
    Chaque vétéran a un gestionnaire de cas qui lui est assigné par Anciens Combattants Canada. J'en avais moi-même un pendant les deux années qui ont suivi ma retraite. Je n'en ai plus aujourd'hui alors que je suis un peu laissé à moi-même. Il n'en demeure pas moins que j'avais bel et bien accès à un psychologue clinicien lorsque j'ai pris ma retraite. J'avais aussi accès à toute une équipe de soins avant de quitter les forces. Je peux vraiment m'estimer heureux.
    Bon nombre des militaires qui prennent leur retraite aujourd'hui ne peuvent pas se faire traiter aussi facilement que moi. Il y a d'importantes lacunes. Certains s'emploient cependant à mettre au point des moyens qui permettront de mieux soutenir ces hommes et ces femmes qui se retirent.
    Excellent. Merci.
    Madame Lafond, j'aimerais parler de votre expérience avec la ligne d'intervention téléphonique. Pourriez-vous nous dire s'il est fréquent que des membres des Forces armées canadiennes communiquent avec vous via cette ligne pour obtenir du soutien?

[Français]

     Malheureusement, ce n'est pas le cas. Nous recevons beaucoup d'appels de la clinique, qui souhaite nous envoyer des gens, mais les militaires ne font pas directement appel à nos services.

[Traduction]

    D'accord.
    Dans quelle mesure la formation des préposés de cette ligne d'intervention leur permet-elle d'être bien au fait des ressources particulières aux Forces armées canadiennes?

[Français]

    Tous nos intervenants reçoivent une formation accréditée de trois jours. Une partie a trait à l'intervention auprès de personnes suicidaires et une autre porte sur la gestion de crise. Ces formations sont reconnues par le ministère. En plus du bagage universitaire...

[Traduction]

    Je suis désolé, mais je vais devoir vous interrompre, car la sonnerie se fait entendre.
    Est‑ce la sonnerie de 15 minutes ou de 30 minutes? C'est celle de 30 minutes.
    Pouvons-nous continuer pendant 15 ou 20 minutes?
    Pourriez-vous répéter ce que vous venez de dire, monsieur le président?
    J'allais proposer que nous poursuivions pendant encore 15 minutes avant de nous interrompre pour aller voter. Est‑ce que cela convient à tout le monde?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Voilà qui est très impressionnant.
    Il vous reste une quinzaine de secondes.
    J'aurais juste une question rapide. Est‑ce qu'une intervention de crise est possible pour les membres des Forces armées canadiennes en dehors des heures normales par le truchement de cette ligne téléphonique?

[Français]

    Nos services sont offerts 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Peu importe le moment, ils sont toujours accessibles.

[Traduction]

    Madame Lambropoulos, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais tout d'abord remercier les témoins qui sont ici avec nous aujourd'hui.
    Je vais commencer par Mme Tam-Seto. Vous avez mentionné qu'il n'existe aucune procédure uniforme pour le transfert au système civil des dossiers des militaires libérés de leur service.
    Selon ce que vous avez observé au sein du système, quelles seraient vos recommandations afin d'améliorer la transition? Comment faciliter cette transition et s'assurer que le tout se fait sans heurt, afin que tout le monde ait droit aux mêmes conditions de transition?
    Je ne crois pas que nous ayons suffisamment de temps aujourd'hui pour en discuter.
    J'ai quelques idées. À l'heure actuelle, c'est le militaire qui doit en assumer la responsabilité, et je ne crois pas que ce soit juste. Bon nombre de gens à qui j'ai parlé font eux-mêmes toutes les démarches.
    On devrait insister beaucoup plus sur les stratégies lors des séminaires offerts par le SPSC, afin d'aider les gens à faire les démarches nécessaires pour leur transition. Je pense que tous les médecins du Canada, mais surtout ceux qui sont établis dans des collectivités qui ont une présence militaire, devraient examiner la façon dont les priorités sont fixées pour leurs listes d'attente. Je sais que c'est beaucoup demander.
    Déjà, avant que les militaires ne participent aux séminaires organisés par le SPSC, il faudrait les prévenir qu'il y a tout un processus de transition avant leur libération.
    Le gouvernement fédéral doit communiquer avec les provinces afin de trouver une façon pour que les militaires libérés puissent beaucoup plus facilement accéder à des soins de santé provinciaux. On pourrait aussi songer à continuer de fournir des soins de santé bien au‑delà de la date de libération du militaire jusqu'à ce que celui‑ci trouve un médecin dans le système provincial.
    Ce sont quelques stratégies qui me viennent comme ça, spontanément.

  (1640)  

    Auriez-vous la gentillesse de consigner vos recommandations dans un document et de les envoyer au Comité, afin que nous puissions les utiliser?
    Je le ferai.
    Merci.
    Colonel Pucci, je vous remercie d'être des nôtres et d'avoir parlé de votre expérience.
    Vous avez indiqué qu'à votre libération, vous avez eu droit à certains services pendant quelques années et que vous avez pu consulter un psychologue clinicien. Cependant, ce n'est pas tout le monde qui a droit à ces services.
    Je me demandais, tout d'abord, quels étaient les facteurs qui ont fait que vous avez eu droit à ses services. Ensuite, pourquoi tous les militaires n'y ont-ils pas droit?
    Je crois que tous les militaires y ont droit. Lorsqu'un militaire est libéré, son dossier est préparé et il sait exactement quelles informations paraissent dans son dossier de libération pour raisons médicales. C'est une libération en vertu de la clause 3B, que ce soit pour des troubles psychologiques ou physiques.
    J'ai été libéré il y a exactement 7 ans aujourd'hui. À la fin de leur service, les militaires ont l'occasion de rencontrer un médecin militaire qui leur donne tous les renseignements nécessaires pour la libération des Forces armées canadiennes. Il revient ensuite au militaire qui devient ancien combattant de chercher les soins nécessaires.
    Le problème, comme je l'ai dit, c'est qu'il est très difficile de quitter le service militaire et d'aller cogner à la porte d'une clinique, parce qu'il y a très peu de fournisseurs de soins primaires. Si quelqu'un a besoin de soins pour un trouble psychologique, il ou elle doit néanmoins faire appel à un fournisseur de soins primaires. D'où mon argument sur la nécessité de créer un centre de soins primaires pour nos anciens combattants.
    Message reçu. Nous allons certainement examiner la question et voir si nous pouvons inclure votre recommandation dans celles que nous soumettrons.
    S'il existait un groupe de travail sur les services de santé, quelle serait sa recommandation principale, à votre avis, d'après votre expérience?
    Ma recommandation serait d'examiner le système de gouvernance pancanadien afin de trouver des façons de faciliter la transition en douceur du militaire qui devient civil. Le groupe de travail des anciens combattants examinerait également chaque système de soins de santé provincial du pays pour voir comment la transition pourrait être facilitée. Je crois qu'il faudrait prévoir une structure de gouvernance qui répond aux besoins des anciens combattants et des militaires ayant été libérés récemment. Le groupe de travail devrait aussi communiquer avec les dirigeants des systèmes de santé provinciaux afin qu'ils soient au courant de notre travail.
    Ma prochaine question sera un peu plus générale.
    Madame Tam-Seto, pouvez-vous nous indiquer ce que vous observez comme tendance en matière de santé mentale au sein de la population canadienne générale et comment cette tendance se compare à ce que vous voyez au sein de la population militaire?
    Malheureusement, je ne pourrais pas vous dire grand-chose. Ma recherche a surtout porté sur les populations militaires.
    D'après ce que je comprends, les taux sont comparables; toutefois, ce qui me frappe, c'est que chez les anciens combattants, les troubles de santé mentale sont habituellement liés au service militaire, tandis que pour la population civile canadienne, il n'y a aucun lien direct avec le choix de carrière.
    Avez-vous remarqué que les choses se sont aggravées dernièrement? Quelles tendances avez-vous observées depuis que vous êtes en poste?
    De façon générale, je pense qu'on hésite de moins en moins à en parler depuis quelques années, car il y a moins de stigmatisation et plus de sensibilité à l'égard du problème. Je m'arrêterai là.

[Français]

    Madame Normandin, vous avez la parole pour six minutes.
    Je remercie l'ensemble des témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    Madame Lafond, j'aimerais que vous nous parliez de la gestion de crise avant que les Forces canadiennes ne fassent appel à votre centre. Comment, à votre connaissance, la base militaire gérait-elle la situation lorsqu'un militaire ou une recrue se retrouvait en situation de crise?
    Merci de la question.
    Avant notre entente avec les Forces armées canadiennes, les militaires de la base géraient les situations de crise avec le bureau vert. Ce bureau est un peu le centre administratif de la base de St‑Jean‑sur‑Richelieu, que nous avons d'ailleurs visité. Dans ce bureau, il y avait quelqu'un 24 heures sur 24. Le militaire en situation de crise y était installé sur un lit de camp, et on le surveillait en tout temps.
    C'est ainsi que les crises étaient gérées. On voulait éviter l'envoi à l'hôpital, si cela n'était pas urgent. On préférait plutôt attendre que le 41e Centre de services de santé soit ouvert. Ce centre est accessible de 7 h 30 à 16 h 30, du lundi au vendredi. En dehors de ces heures, c'était le bureau vert qui gérait les situations de crise.

  (1645)  

    Merci beaucoup.
    Au début de votre partenariat, de quelle façon les personnes en situation de crise vous étaient-elles envoyées? Cela passait-il par le bureau vert ou par la clinique?
    Au début de l'entente, les personnes nous étaient directement envoyées depuis le bureau vert. C'était vraiment les militaires qui les dirigeaient vers le Centre; ils évitaient de passer par la clinique. Malheureusement, un suicide est survenu. Après avoir été hébergé chez nous, le militaire voulait retourner à la base. Cependant, nous avions recommandé qu'il soit envoyé à l'hôpital et qu'il soit vu par un médecin. C'était un samedi, et il n'y avait pas de médecin à la base. Le suicide est survenu à ce moment.
    Selon l'entente que nous avons conclue à la suite de cet épisode, toutes les recrues et tous les militaires qui sont hébergés dans notre centre doivent, avant de venir au Centre, avoir été vus par un médecin de la base ou encore par un médecin de l'hôpital. Avant de venir à notre centre pour y être hébergé, le militaire doit être pris en charge soit par la clinique de la base, soit par l'hôpital de notre ville. Ce processus a été mis en place à la suite du suicide malheureux qui s'est produit.
    Ce que je comprends, c'est que maintenant, dans le cadre de votre partenariat, il y a un meilleur encadrement médical des militaires en situation de crise.
    N'est-ce pas?
     Oui, c'est cela. Le suivi médical est automatique dans ces situations. Il y a donc une meilleure prise en charge et une meilleure continuité des soins après que la crise est passée.
    Pouvez-vous décrire la collaboration qui s'est établie avec la clinique de la base militaire, par exemple en ce qui concerne la communication d'information lorsqu'un militaire ou une recrue est dans une situation de crise?
    La communication est fluide. La confidentialité des renseignements personnels est respectée, mais, en même temps, nous la levons quand la vie d'un militaire est en jeu. À notre centre, c'est parfois une question de vie ou de mort, et lorsque la confidentialité des renseignements est levée, leur transmission est fluide. Nous avons un partenariat extraordinaire avec la clinique médicale, parce que nous lui communiquons les renseignements nécessaires tout en informant le militaire ou la recrue de toute l'information qui sera transmise.
    J'aimerais avoir vos observations sur la formule qui est utilisée pour financer vos services. Quelle forme votre partenariat avec la base militaire prend-il?
    Nous sommes un organisme communautaire financé par le gouvernement provincial. Les Forces armées canadiennes, elles, ont une assurance auprès de la Croix bleue, je crois. Celle-ci nous paie le même montant qu'elle paie lorsqu'un militaire est hospitalisé au Québec. Nos services d'hébergement sont facturés à la nuitée, et c'est la compagnie d'assurance qui assume les frais associés au lit offert à la personne en crise. Il est certain que c'est un apport financier pour notre organisme.
    À ce moment-là, pour le même prix, je peux comprendre que les Forces canadiennes ont accès à un service beaucoup plus spécialisé pour gérer les problèmes de santé mentale de militaires.
    N'est-ce pas?
    Oui, c'est effectivement cela.
    À Saint‑Jean‑sur‑Richelieu, nous sommes dans un milieu francophone, et les militaires et les recrues sont généralement anglophones. Les services que nous offrons sont totalement bilingues, tandis qu'à l'hôpital, selon les militaires et les recrues, il arrive souvent que personne ne parle anglais. Il est donc difficile pour eux de recevoir des soins et des services adéquats. Ils sont isolés. Ils reçoivent de bons soins physiques, mais de moins bons sur le plan psychologique.
    Le centre de crise est donc un milieu plus sécuritaire et plus sain pour les recrues et les militaires en situation de crise.

  (1650)  

    Merci.

[Traduction]

    Merci, madame Normandin.
    Chers collègues, si nous continuons, nous devrons suspendre la séance pile-poil au milieu du temps de parole de Mme Mathyssen. Il faudra donc ou bien s'arrêter maintenant, ou bien lui accorder six minutes entières.
    J'aimerais me rendre à la Chambre.
    Le président: Sommes-nous tous d'accord?
    Des députés: Oui.
    Le président: La séance est suspendue jusqu'à notre retour.

  (1650)  


  (1725)  

    Je vois que nous avons le quorum. La séance reprend.
    Mme Mathyssen aura droit à six minutes. Ensuite, une fois que ses six minutes seront écoulées, il nous restera 25 minutes environ. Il faudra probablement que je raccourcisse la deuxième série de questions pour respecter l'horaire.
    Madame Mathyssen, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie les témoins de leur patience aujourd'hui.
    Je vais commencer par Mme Tam-Seto.
    Vous avez effectué beaucoup de recherches, si j'ai bien compris, sur l'incidence des blessures de stress opérationnel et du TSPT sur les femmes ayant servi au sein des FAC. Je me demandais si vous pouviez nous parler des différences que vous observez dans votre recherche, à savoir les séquelles chez les femmes, les lacunes en matière de services de soutien pour les anciennes combattantes, et les tendances relatives aux OSI et au TSPT.
    La majorité de mon travail porte sur les blessures de stress opérationnel liées au travail et découlant d'un traumatisme sexuel militaire. Je n'ai pas beaucoup fait à l'extérieur de ce domaine. Ma recherche a surtout visé les conséquences des traumatismes sexuels militaires.
    De façon générale, nous ne comprenons pas comment les problèmes de santé mentale subis par les femmes militaires influent sur les objectifs et l'identité, notamment lors de la transition. Je connais beaucoup de personnes qui s'identifient comme femmes et qui peinent à accepter l'identité d'ancienne combattante en raison des stéréotypes de la société à l'égard des anciens combattants. Voilà certains des facteurs de stress chez les femmes lors de leur transition.
    Je sais que je n'ai pas tout à fait répondu à votre question, mais mon travail ne porte pas précisément sur les blessures de stress opérationnel.

  (1730)  

    D'accord.
    Les séquelles du TSPT sont lourdes. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous avez dit que ces femmes ont de la difficulté à se percevoir en tant qu'anciennes combattantes? Existe‑t‑il des soutiens ou des programmes? Est‑ce un phénomène que vous observez de plus en plus? Les FAC, la Défense nationale et ACC ont-ils tenté d'y remédier? Y a‑t‑il d'autres intervenants qui se penchent sur le problème?
    Je travaille beaucoup sur la question de l'identité et du changement des rôles et des identités lorsque les gens passent par la transition. Mon travail porte sur les diverses étapes du changement. Lorsque les gens sont libérés du service militaire, ils passent de l'état de militaire à celui d'ancien combattant et, essentiellement, de civil. Pour bon nombre de femmes, cette transition est différente parce que la société a une certaine perception de l'ancien combattant qui ne cadre pas souvent avec le rôle de la femme dans notre monde. On ne retrouve pas non plus la même acceptabilité. J'entends souvent parler de cas d'anciennes combattantes qui ont des plaques d'immatriculation indiquant leur statut, et les gens leur demandent: « Votre mari était‑il militaire? Votre père était‑il militaire? » Le problème est ensuite aggravé par l'expérience des traumatismes sexuels militaires, que l'on ressent comme une trahison institutionnelle. Les femmes ont aussi du mal à s'identifier à une institution qui les a trahies, que ce soit en raison d'un traumatisme sexuel ou d'un autre type de blessure ou de maladie dont elles ont souffert pendant leur carrière.
    On a beaucoup parlé des anciens combattants en général dans le cadre du travail formidable qui se fait dans les rues de ma ville natale de London, en Ontario, auprès des anciens combattants aux prises avec l'itinérance. C'étaient surtout des hommes, ce qui est intéressant, mais il était question de leur identité et de leur service, et de l'institution qui les a encadrés pendant le service. Une fois que ces gens avaient quitté le service, ils avaient perdu une partie de leur identité ainsi que le cadre.
    L'expérience des femmes est-elle la même?
    C'est le fait que l'on passe d'une culture à une autre. Je sais qu'à London, il y a une clinique formidable spécialisée pour les blessures de stress opérationnel. J'ai des collègues qui y travaillent et nous essayons d'aider les fournisseurs de soins de santé pour qu'ils puissent reconnaître les changements d'identité chez les anciens combattants, notamment ceux qui arrivent à la clinique souffrant de traumatismes et de maladies liés au travail, et le sens qui y est attribué par les anciens combattants. Nous sommes en train de bâtir ces structures. Mon domaine est les compétences culturelles militaires dans le cadre du travail des fournisseurs de soins de santé, notamment mes collègues qui travaillent à la clinique spécialisée pour les blessures de stress opérationnel.
    Notre comité a également entendu des représentants des FAC et il y a eu un peu de confusion, parce qu'ils nous ont indiqué que les militaires voudraient bénéficier de systèmes de soutien social pour les blessures de stress opérationnel qui sont offerts par le SSBSO, mais ces services ne sont pas couverts. Il n'y a aucun service pour les personnes souffrant de séquelles d'inconduites sexuelles et de traumatismes. C'est bien vrai?
    Les personnes se rendent aux cliniques du SSBSO à cause d'un traumatisme sexuel militaire. C'est un traumatisme particulier, et l'expérience des personnes est particulière. Nous commençons tout juste à comprendre à quel point ce traumatisme est différent des autres TSPT liés au service militaire.
    Nous devons concerter nos efforts et c'est ce que nous faisons. Là encore, j'ai communiqué avec la clinique spécialisée en blessures de stress opérationnel à London, qui a remarqué qu'il existe une certaine cohorte souffrant de traumatismes sexuels militaires, afin de renseigner les fournisseurs de services de santé sur les soutiens et la formation que nous pouvons offrir pour les aider. Les fournisseurs doivent impérativement comprendre les contextes nuancés des personnes souffrant de traumatismes sexuels militaires, car ils sont très différents des traumatismes subis en tant que civil.

  (1735)  

    Je dois vous arrêter là. Merci.
    Chers collègues, si je réduis le temps de parole de chacun d'une minute, nous avons de bonnes chances de pouvoir faire une sixième série de questions d'ici 18 heures.
    Ce qui fait que vous, monsieur Kelly, avez quatre minutes.
    Je pense que Mme Gallant prendra la parole.
    Colonel Pucci, vous avez parlé de certaines technologies qui n'étaient pas financées. À quelles technologies faisiez-vous allusion?
    Je parlais des modalités de traitement qui existent actuellement. Comme je l'ai dit plus tôt, je ne suis pas clinicien et je ne suis donc pas du tout à l'aise de parler des modalités de traitement, car elles sortent du cadre de mon domaine d'expertise. Cependant, de nombreuses entreprises ont approché le ministère des Anciens Combattants avec de nouvelles technologies et de nouvelles modalités de traitement. Elles font actuellement l'objet d'un examen, mais ce processus est extrêmement lent.
    Qu'en est‑il de l'EMDR, c'est‑à‑dire l'intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires? Est‑ce qu'on utilise toujours cette méthode?
    Encore une fois, il s'agit d'une question clinique très pointue, et je suis ici pour parler des capacités fonctionnelles des soins primaires. Par conséquent, je ne me sentirais pas à l'aise de répondre à une question sur l'EMDR.
    Les ombudsmans nous ont dit à maintes reprises que nous devions mettre en place une transition harmonieuse entre le service militaire et la libération pour raisons médicales. Votre groupe de travail semble être une bonne chose, mais en réalité, les gens sont dispersés à l'échelle du pays, et ils ne travaillent donc pas nécessairement, après leur libération, avec les mêmes personnes ou ils n'ont même aucun lien avec les personnes qui s'occupaient d'eux pendant la phase de crise à la suite de leur libération des forces. En fait, ils n'ont personne.
    Oui, c'est bien cela. C'est l'idée de la période de six mois pour la validation de principe. Pendant cette période, le groupe de travail considèrera des centres partout au pays, par exemple à Edmonton, à Valcartier, à Québec et à Fredericton, où il pourrait créer un réseau, un centre de bien-être pour les anciens combattants, de sorte que…
    L'un des assureurs — je ne sais pas si c'était le ministère des Anciens Combattants ou une société en particulier — s'occupait certainement de tous les anciens combattants. Ces anciens combattants recevaient des traitements d'EMDR qui étaient prodigués par des personnes qualifiées, mais tout d'un coup, on a commencé à exiger une certification, de sorte que ces hommes et ces femmes ont perdu leurs fournisseurs de soins, car ces derniers ne satisfaisaient pas aux nouvelles exigences en matière de certification. En effet, ces gens avaient des familles et ils ne pouvaient pas arrêter de travailler pour retourner à l'école.
    N'y a‑t‑il pas moyen d'harmoniser la transition au traitement sans avoir à s'adresser à un profane, car lorsqu'ils doivent expliquer ce qui s'est passé en utilisant le jargon militaire habituel… S'ils doivent raconter toute leur histoire à nouveau, ils peuvent devenir frustrés et trouver une solution rapide et définitive.
    C'est exact. Cette année, j'ai entendu cette histoire une centaine de fois de la part d'autres anciens combattants et de leurs familles. C'est la Croix bleue et le ministère des Anciens Combattants qui ont décidé de mettre fin à cette modalité de traitement. C'est à ces organismes qu'il faut poser ces questions, et non à des gens de mon niveau qui s'occupent de mettre sur pied des centres de mieux-être.
    Pourriez-vous nous décrire les étapes à suivre, selon le groupe de travail, lorsqu'une personne est libérée pour raisons médicales? À quoi ressemblerait une telle démarche? Dans le meilleur des cas, quelles étapes devraient franchir un militaire à la retraite ou un militaire libéré pour raisons médicales, en particulier lorsqu'il a subi un traumatisme?
    Il s'agirait d'une transition en douceur, de sorte qu'à leur sortie des Forces canadiennes, au cours de leur séminaire du Service de préparation à la seconde carrière, dont ma collègue a parlé plus tôt, on les informerait qu'ils peuvent avoir accès à ces centres. Le militaire commencerait donc par communiquer avec un centre pour annoncer qu'il prendra sa retraite, par exemple, le 15 juin 2023 et qu'il cherche un fournisseur de soins primaires, qu'il déménage à St. Albert, dans la région d'Edmonton, et qu'il aimerait recevoir de l'aide.
    Le groupe de travail pourrait alors consulter sa base de données pour déterminer, grâce à son réseau de centres dans la région d'Edmonton, quels médecins s'occupent des anciens combattants, et s'il y a une clinique expressément pour les anciens combattants où un médecin de famille et un auxiliaire médical pour les anciens combattants sont prêts à recevoir ce patient.
    Les cliniques de Beechwood et de Tay River sont les seules pour le moment. De toute façon, elles sont situées dans la région d'Ottawa. Les gens d'Ottawa ont donc déjà accès à des fournisseurs.
    Ce sont les gens de Petawawa et du Sud de l'Ontario — loin de Toronto — qui n'ont pas accès…

  (1740)  

    C'est vrai, mais les gens de Petawawa sont tout à fait disposés à prendre leur voiture et à se rendre à Tay River pour recevoir des soins. Des anciens combattants qui vivent actuellement à Petawawa se rendent à Orléans, à Ottawa, pour voir le Dr Hans Jung, un ancien médecin-chef qui s'occupe maintenant de 1 500 patients.
    Je vous remercie, madame Gallant.
    Monsieur Sousa, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leurs déclarations préliminaires.
    J'ai une question, mais je ne sais pas trop à qui la poser. Madame Lafond, je vais d'abord vous poser ma question, et Mme Tam-Seto pourrait peut-être y répondre aussi.
    On assiste à l'émergence d'un débat sur le trouble de stress post-traumatique et les blessures morales. Comment ces troubles sont-ils des conséquences distinctes, mais étroitement liées, de traumatismes subis au cours d'opérations militaires?
    Pouvez-vous nous expliquer la différence entre ces deux troubles et les raisons pour lesquelles il faut avoir recours à des traitements différents pour chacun?

[Français]

     Je vous remercie de la question.
    Notre centre vient en aide aux recrues qui vivent des crises suicidaires, et non aux personnes aux prises avec un trouble de stress post-traumatique.
    Je vais donc laisser un ou une spécialiste y répondre. Peut-être que Mme Tam‑Seto pourra le faire.

[Traduction]

    Je suis désolée, monsieur, mais je ne pose pas de diagnostic. Je ne pourrais pas, dans le cadre de ma pratique, faire la différence entre un trouble de stress post-traumatique et une blessure morale.
    Colonel, pouvez-vous répondre à la question?
    C'est certainement tout à fait en dehors de mon champ de compétences. Je ne suis pas clinicien, monsieur.
    Monsieur le président, pouvez-vous répondre à cette question?
    Je peux répondre à peu près à toutes les questions, mais il serait peut-être préférable que vous obteniez des renseignements liés aux anciens combattants.
    Je vais donc passer à autre chose.
    Je vais revenir à un sujet plus général, à savoir la façon dont on soutient la recherche en matière de défense et le Groupe des Services de santé des Forces canadiennes.
    Comment cette recherche peut-elle contribuer à améliorer l'expérience des militaires, des anciens combattants et de leurs familles? Le Comité peut‑il connaître les mesures prises pour améliorer ce type de recherche dans la vie des militaires et de leurs familles? Pouvez-vous répondre à cette question plus générale?
    Des recherches sont menées à l'interne. Au sein du ministère de la Défense nationale et du DGRAPM, j'ai travaillé avec de nombreux collègues formidables qui mènent des recherches extraordinaires. Malheureusement, ils n'ont pas la capacité de répondre à toutes les questions auxquelles nous aimerions avoir des réponses.
    Il existe de nombreuses excellentes recherches qui sont utilisées par un grand nombre d'associations de santé pour tenter de transmettre des compétences culturelles militaires à leurs membres — les médecins et les ergothérapeutes. Cependant, ces recherches ont tendance à s'inscrire dans des contextes internationaux, et elles ne se traduisent donc pas toujours bien ici, au Canada. Malgré toutes les recherches menées à l'interne, il existe tout un réseau qui, par l'entremise de l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans, tente de répondre à la demande.
    Il s'agit là d'une déclaration très générale sur la recherche.
    Colonel, si le temps imparti le permet, aimeriez-vous faire un commentaire?
    Non, je m'en remettrai simplement à ma collègue. Cela relève davantage de son domaine d'expertise et de recherche.
    Nous parlons beaucoup de santé mentale. Nous pouvons observer une différence dans la tendance dans la population militaire. D'où vient cette différence? Pourquoi le problème est‑il plus répandu dans l'armée?
    Vous voulez savoir pourquoi la santé mentale…?
    Pourquoi les tendances dans la population…? Nous observons des troubles de santé mentale dans l'ensemble de la population canadienne. C'est plus évident, et cela semble être encore plus évident chez les militaires.
    Je tiens à rappeler que mes recherches ne portent pas précisément sur la santé mentale et le bien-être des militaires, et je ne peux donc pas aborder cette question. Je ne peux parler que de ce que j'ai dit précédemment, à savoir qu'il faut accroître la sensibilisation et réduire la stigmatisation à l'égard des signalements. Il existe des recherches dans ce domaine qui se consacrent expressément au domaine militaire.
    Encore une fois, mes recherches portent principalement sur les anciens combattants et les services de santé.
    Je vous remercie, monsieur Sousa.

[Français]

    Monsieur Brunelle‑Duceppe, je vous souhaite la bienvenue au Comité. Vous avez la parole pour une minute et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vais essayer d'être aussi bon que Mme Normandin. Je n'y arriverai sans doute pas, malheureusement, mais je vais faire de mon mieux.
    Madame Lafond, avez-vous l'impression que les militaires s'ouvrent davantage au personnel de votre centre qu'aux employés de la clinique de la base militaire?
    Dans l'affirmative, j'aimerais que vous me disiez pourquoi en me fournissant quelques explications.
    Je vous remercie de la question.
    Effectivement, nous avons remarqué une différence notable quand les militaires sont hébergés chez nous.
    Notre centre n'est pas un milieu militaire et il n'est pas non plus encadré par des militaires. La relation s'établit donc d'égal à égal avec la personne hébergée. De plus, comme cette dernière est sortie du milieu qui l'a menée à cette situation de crise, il est facile pour elle de se confier à nous sur les événements liés à cette crise. Elle ne craint pas les répercussions sur sa carrière ou son avancement. Elle se donne le droit d'être fâchée, d'être déstabilisée et de mal aller pour pouvoir rebondir et aller mieux par la suite.
    Nous permettons donc aux personnes en crise de s'ouvrir à nous sans qu'elles se sentent jugées et qu'elles craignent des répercussions pour la suite des choses. Lorsque les militaires hébergés chez nous retournent à leur base, ils savent que l'information que nous transmettons à la clinique de la base ne concerne que ce qui a trait à leur sécurité. Cela n'a donc aucune incidence sur tout ce qu'ils peuvent avoir déclaré ou dit pendant leur crise.
    Lorsqu'on est en crise, on ne maîtrise pas ce qu'on dit. Or, il est certain que le fait que nous ne soyons pas des militaires a une incidence sur les confidences qui sont faites.

  (1745)  

    Les personnes que vous accueillez se sentent plus en confiance avec vous.
    C'est cela?
    Oui, et la confiance s'établit rapidement.
    Je vous remercie, monsieur Brunelle‑Duceppe.

[Traduction]

    Madame Mathyssen, vous avez la parole. Vous avez une minute et demie.
    Je vous remercie.
    Madame Tam-Seto, j'aimerais seulement terminer la discussion en cours. Pouvez-vous parler au Comité de vos recherches et des données manquantes dans les rapports des Forces armées canadiennes et nous parler des rapports qui, selon vous, devraient être produits? Par exemple, l’ombudsman des vétérans a fait un commentaire sur des discussions stratégiques au sujet d'une analyse comparative entre les sexes plus qui auraient eu lieu, apparemment, et sur une analyse qui a été menée, mais qui n'a pas été publiée ou rendue publique.
    Est‑ce que cela se produit avec le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes? S'agit‑il de certains des points qui, selon vous, ne sont pas inclus? Veuillez nous donner une idée des points de données qui devraient être inclus, selon vous.
    Je ne sais pas si le Comité peut nous aider à cet égard, mais l'Université McMaster tente de collaborer plus étroitement avec le ministère de la Défense nationale pour effectuer des recherches auprès des militaires en service actif.
    Les questions que nous posons sont légèrement différentes de celles qui sont posées par les services de recherche du ministère. Toutefois, à titre de chercheurs civils, nous faisons face à des obstacles systémiques lorsque nous tentons d'avoir accès aux militaires. Je pense qu'il est très important que nous ayons accès aux militaires en service actif pour pouvoir réaliser des études longitudinales, suivre l'évolution de leur situation et établir le portrait de leur transition.
    Dans un contexte de recherche, il serait formidable que nous puissions accéder librement à l'excellent travail réalisé par les services de recherche du ministère de la Défense nationale. Nous serions ravis d'obtenir des renseignements du ministère des Anciens Combattants pour nous aider à éclaircir certaines questions. Je pense que le message que j'aimerais envoyer à tous les intervenants du milieu de la recherche, c'est que s'ils pouvaient collaborer plus étroitement — par l'entremise d'un partage de renseignements et d'une transparence accrus — avec les chercheurs civils, nous pourrions être en mesure de faire un meilleur travail ensemble, et ce travail nous permettrait de poser les bonnes questions.
    Je vous remercie, madame Mathyssen.
    Dois‑je présumer que M. Kelly a maintenant la parole pour quatre minutes?
    Je vous remercie.
    Il ne nous reste que quelques minutes, madame Tam-Seto. Après votre déclaration préliminaire, la première question qui vous a été posée portait sur le caractère adéquat des soutiens médicaux fournis aux membres des Forces armées canadiennes. Dans vos réponses, vous avez insisté sur le fait que ces soutiens n'étaient pas adéquats.
    Souhaitez-vous profiter du temps qu'il nous reste pour donner au Comité des exemples concrets ou précis du caractère inadéquat de ces soutiens médicaux?
    Le soutien médical offert aux anciens combattants suite à leur libération est sans aucun doute un défi que nous devons relever. Avant d'aborder l'enjeu des compétences culturelles et de l'aide aux prestataires dans le monde civil, nous devons faciliter la transition des anciens combattants vers leur nouvelle vie. À l'heure actuelle, les anciens combattants sont laissés dans l'isolement. Comme je le disais, des militaires quittent les Forces armées canadiennes par la porte de derrière et se retrouvent livrés à eux-mêmes.
    Nous devons faire venir davantage d'intervenants à la table pour discuter de cette problématique. J'ai parlé avec le président pendant la pause et je lui ai dit qu'il ne s'agit pas d'un enjeu qui concerne uniquement le MDN; il s'agit également d'une question qui relève du ministère des Anciens combattants, et qui concerne les gouvernements provinciaux et fédéral. Nous devons réunir tout le monde autour de la table afin d'assurer une transition harmonieuse pour nos anciens combattants.
    Il est injuste que les anciens combattants soient obligés d'aller chercher eux-mêmes des soins de santé, notamment en raison de problèmes de santé qu'ils ont contractés dans le cadre de leur travail. Par ailleurs, il est injuste qu'il incombe à leur famille de défendre leurs intérêts, car ce n'est pas leur choix. Nous devons au moins mettre à la disposition des anciens combattants un système de soutien qui leur permette d'effectuer une transition en douceur vers la vie civile.
    Je comprends. Dans le cadre de vos recherches, avez-vous réussi à déterminer le nombre de membres actifs des FAC qui sont libérés de leur service en raison de différents types de problèmes de santé pouvant être traités avec les ressources adéquates? Abordons tout d'abord la question des personnes qui sont libérées en raison de problèmes de santé mentale qui pourraient être traités.

  (1750)  

    J'ose croire que chaque problème de santé peut être traité. L'ampleur du traitement demeure très subjective. Je pense que nous devons d'abord être en mesure de cerner combien d'anciens combattants sont libérés, à quel moment survient leur libération, et de quelle manière elle s'effectue. À mon avis, il nous manque plusieurs données de base...
    D'accord, donc j'en comprends que vous ne disposez pas de données à ce sujet. Qu'en est‑il des données sur les conditions de santé physique?
    Pour faire court, je ne dispose pas de données précises.
    Monsieur le colonel, avez-vous des observations à ce sujet?
    Oui, je peux répondre à la question. Je fais actuellement partie du Groupe de travail pour les anciens combattants de la ville d'Ottawa. À l'heure actuelle, l'enquête la plus récente qui nous a été communiquée par le MDN indique qu'environ 800 anciens combattants de la région d'Ottawa n'ont toujours pas accès à un médecin de première ligne.
    Je vous remercie. Je pense que vous avez surtout répondu à la première question.
    C'est exact. Je ne voulais pas vous interrompre sur le moment.
    N'hésitez pas à intervenir, il s'agit de renseignements importants pour le Comité.
    Revenons maintenant à la deuxième question. Dans le contexte de la crise du personnel que vivent les FAC, j'essaie de déterminer si certains militaires libérés auraient pu bénéficier d'un traitement pour une condition physique ou psychologique qui les aurait rendus aptes à continuer de servir leur pays.
     Des militaires sont-ils contraints de quitter les FAC parce qu'ils n'ont pas accès à des soins de santé adéquats?
    Lorsque j'étais commandant adjoint des services de santé, j'étais tout à fait conscient des ressources mises à notre disposition, et nous avons fait de notre mieux. Je pense que chaque homme et chaque femme qui s'est présenté à une clinique partout au pays a pu recevoir les meilleurs soins médicaux qui étaient offerts à l'époque.
    Lorsque j'étais en service, je me rappelle avoir reçu des soins médicaux exceptionnels qui répondaient à toutes mes exigences. Les hommes et les femmes qui relevaient de mon commandement ont eux aussi reçu des soins tout à fait adéquats.
    Comme il m'est impossible de poser une question et d'obtenir une réponse en 15 secondes, je vais céder la parole au prochain intervenant.
    Allez‑y, monsieur Fisher.
    Merci, monsieur le président. Je souhaite également remercier tous nos témoins de s'être joints à nous aujourd'hui.
    Colonel Pucci, je tiens à vous remercier pour les services que vous avez rendus à notre pays.
    Je vais probablement donner l'impression d'aller un peu dans tous les sens, parce que vous avez tous fait des commentaires qui se sont entrecoupés.
    Colonel, vous avez parlé de votre expérience lorsque vous avez réintégré la vie civile. Je crois que vous avez dit que vous aviez eu accès à une équipe de soins pendant deux ans.
     Y a‑t‑il un niveau de service que chaque membre des FAC qui prend sa retraite ou qui réintègre la vie civile est en droit de recevoir? Je ne sous-entends pas que certains anciens combattants profitent de ce qui leur est offert, mais je souhaite simplement comprendre si tout le monde reçoit le même genre de services.
    Cela dépend des conditions de libération de chaque membre des FAC. Un militaire libéré pour raisons médicales a accès à Anciens combattants Canada, qui lui assigne un gestionnaire de cas dont le rôle est de l'aider à manœuvrer dans le système de soins de santé.
    Par contre, dans le cas d'une libération normale... Je crois qu'on parle d'une libération 5A... Un ancien combattant qui n'a pas de problèmes de santé physique ou mentale est simplement livré complètement à lui-même.
    Madame Tam-Seto, vous avez parlé d'un type de relation entre les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral. Je suppose que vous voulez parler d'une sorte d'entente bilatérale en vertu de laquelle un membre des FAC pourrait réintégrer la vie civile et recevoir des services dans sa province.
    Nous avons discuté de vos projets pilotes à Beechwood et à Tay River. Mme Gallant nous a également parlé d'autres exemples du Sud de l'Ontario.
    Toutefois, je note que jusqu'à maintenant, il a surtout été question de projets menés dans des villes et des villages partout au pays. Je tiens d'ailleurs à vous féliciter pour la conduite de vos deux projets pilotes, qui était d'excellentes idées. Mais qu'en est‑il des militaires qui habitent dans des régions rurales, par exemple en Nouvelle-Écosse ou dans le nord de la Colombie-Britannique?
    Dans de tels cas, l'accès à un médecin se ferait au moyen de la télémédecine. C'est une possibilité. Nous pourrions mettre en place des centres régionaux dans chaque province, à partir desquels les anciens combattants seraient en mesure d'utiliser la télémédecine pour entrer en contact avec un médecin.
    Que pensez-vous de...? Envisagiez-vous un accord bilatéral de province à province et de territoire à territoire?
    Nous devons mettre en place un mécanisme qui permette d'obtenir une entente entre les différents ordres de gouvernement et les différents ministères pour que le processus s'effectue de manière harmonieuse. À l'heure actuelle, le système est fragmentaire et la responsabilité de trouver des soins incombe aux anciens combattants eux-mêmes.
    Y a‑t‑il actuellement des provinces en mesure d'offrir un accès rapide ou un accès de première ligne aux membres des FAC en processus de réintégrer la vie civile dans les provinces? Quelle province réussit à obtenir de bons résultats?
     Je n'ai pas de réponse à cette question.
    Vous n'avez pas de réponse, très bien.
     Tout à l'heure, dans votre déclaration d'ouverture, vous avez mentionné des défis, des obstacles et des délais, mais le temps qui vous était imparti s'est écoulé.
    Pouvez-vous à présent parler plus en détail de ces défis, de ces obstacles et de ces délais, puisque nous n'avons pas encore abordé ce type de sujets aujourd'hui?

  (1755)  

    J'ai l'impression d'avoir abordé un peu ces sujets, et oui, je vais vous faire parvenir un dossier dans lequel mes idées seront un peu plus clairement articulées. Il faudrait que je puisse avoir le temps de présenter mes idées de manière structurée.
    Le colonel Pucci nous a fourni quatre recommandations. Avez-vous des recommandations à formuler vous aussi? Seriez-vous en mesure de nous en faire part dès maintenant, ou préférez-vous les ajouter dans votre déclaration écrite?
    Je vais les formuler dans ma déclaration écrite. Je pense que nous devons réaliser que le système de santé militaire est en crise présentement. C'est le premier élément important. Nous devons réunir les bonnes personnes autour de la table et avoir une première conversation sur la meilleure manière de réintégrer nos militaires à la vie civile. Une fois cette transition effectuée de manière harmonieuse, nous devrons nous assurer que les différents groupes de soutien sont en place pour garantir la qualité des soins.
    Je vais vous demander à tous les trois si vous souhaitez intervenir pour faire un dernier commentaire.
    J'ai entendu certaines personnes dire qu'il serait préférable que les membres des FAC demeurent en permanence au sein des forces armées en tant qu'anciens combattants. Autrement dit, un militaire ne serait jamais transféré sous la responsabilité du ministère des Anciens combattants.
    Je n'ai pas d'opinion sur la manière dont les anciens combattants devraient continuer à bénéficier des services de soins. Je pense simplement qu'ils ne devraient plus être laissés à eux-mêmes comme c'est le cas actuellement.
    Monsieur le colonel Pucci, qu'en pensez-vous?
    Je ne pense pas que nous disposons en ce moment des ressources nécessaires. Tout est une question d'augmentation des ressources. À l'époque où j'étais commandant adjoint, les FAC n'avaient pas les ressources suffisantes pour aider les anciens combattants à réintégrer la vie civile.
    Les États-Unis ont mis en place le programme de soins TRICARE, qui permet à un ancien combattant de se présenter à la même clinique qu'un membre actif des FAC. Le problème, c'est que les forces armées ne comptent même pas 300 médecins en uniforme. Comme je l'ai dit, et je ne le répéterai jamais assez, le plus grand défi est celui du manque de ressources.
    Madame Lafond, je ne sais pas si vous pouviez nous parler davantage des lits de crise du centre que vous dirigez.
    Les lits de crise de votre centre sont-ils occupés uniquement par des militaires? Arrive‑t‑il qu'un lit de crise soit attribué à un ancien combattant ou à un militaire en voie de retourner à la vie civile?

[Français]

    Dans notre cas, il s'agit majoritairement de la population du Haut‑Richelieu‑Rouville. Les militaires ne représentent qu'une infime partie de notre clientèle. Nous hébergeons surtout des recrues, mais nous avons aussi parfois hébergé des vétérans ou des militaires qui étaient en vacances ou en congé — ce sont les mots qui ont malheureusement été utilisés. Ils entraînaient les recrues sur la base militaire.
    Le militaire était un professeur ou un entraîneur qui travaillait avec les recrues à la base. Il avait des problèmes de santé mentale et de santé physique, et il avait besoin de certains services. Il a consulté notre centre pour avoir accès à de l'accompagnement.
    C'est très rare que des vétérans ou des militaires actifs utilisent nos services; il s'agit surtout de recrues.

[Traduction]

     Je vous remercie, monsieur Fisher.
    Avant de remercier les témoins, on m'a suggéré de lire la déclaration suivante, étant donné la nature délicate du sujet que nous avons abordé aujourd'hui.
    Étant donné que le sujet de la séance d'aujourd'hui portait sur des enjeux relatifs au suicide et aux blessures auto-infligées, je souhaite prendre un moment pour rappeler à toutes les personnes qui nous écoutent que des ressources sont disponibles si vous ou un membre de votre entourage pensez au suicide ou à l'automutilation.
    Les membres du personnel peuvent accéder au Programme d'aide aux employés. Des ressources sont également disponibles en ligne sur le site Web parlonssuicide.ca. Enfin, vous pouvez contacter l'organisme Parlons suicide Canada en composant le 1‑833‑456‑4566, ou l'organisme Jeunesse, j'écoute en composant le 1‑800‑668‑6868.
    Au nom du Comité, je tiens à vous remercier. La gestion du temps est toujours un défi pour la présidence, mais vous vous êtes très gracieusement accommodé des joies de la démocratie. Je vous remercie pour votre contribution très utile à notre étude.
    Sur ce, chers collègues, la séance est levée.
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