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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 023 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 18 mai 2022

[Enregistrement électronique]

  (1720)  

[Traduction]

    Chers collègues, ce que je comprends de cette journée de grande confusion, c'est que nous pouvons poursuivre jusqu'à 18 h 17, alors que la sonnerie d'appel nous convoquera à une mise aux voix pour 18 h 47. Voilà la vérité, dont la durée d'existence est peut-être d'encore 30 secondes.
    Je tiens à remercier les témoins, qui se sont montrés si généreux de leur temps. C'est très agaçant, toutes ces mises aux voix, ces retards et ces annulations, etc. C'est la période simplement difficile de l'année. Merci encore de nous aider dans notre étude.
    Nous accueillons d'abord, sous la gouverne de MM. Goodyear et Saugh, le Consortium canadien des ONG de sécurité civile.
    Nous attendons M. Damien Burns, qui, à l'origine, devait faire partie du deuxième groupe de témoins.
    Nous n'avons pas réussi à établir le contact avec M. Leuprecht, qui se trouve en Europe. Je suppose que nous n'aurons plus de ses nouvelles, ce qui ajoute à mon agacement, parce que c'est la troisième fois que nous l'invitons et que, les autres fois, nous avons dû annuler l'invitation à la dernière minute, ce qui ne présage rien de bon.
    Merci encore de votre patience. Je vous invite à faire votre déclaration préliminaire, après quoi nous entamerons la période de questions.
    Chers collègues, comme nous serons convoqués à une mise aux voix à 18 h 17, quelle latitude m'accordez-vous? Je suppose que nous pouvons poursuivre jusque là. De toute manière, nous disposerons de quelques minutes de plus.
    Entendons d'abord M. Goodyear, du Consortium canadien des ONG de sécurité civile.
     Merci beaucoup. Je suis flatté de votre invitation.
    Tout d'abord, je tiens à souligner que j'ai le privilège de vivre et de travailler sur un territoire sacré. Je reconnais le lien profond et la relation de longue date entre les peuples autochtones et le territoire de London, en Ontario. Cette région fait partie du territoire traditionnel des Anishinabés, des Iroquois, des Lenapes et des Neutres et elle accueille encore aujourd'hui divers peuples autochtones que nous reconnaissons comme les gardiens contemporains de la terre et des acteurs essentiels de notre société.
    Aujourd'hui, je m'exprime en ma qualité de président du Consortium canadien des ONG de sécurité civile.
    La mission du Consortium consiste à optimiser la contribution des organisations non gouvernementales afin d'accroître la résilience des collectivités du Canada aux catastrophes. Le Consortium cherche à faciliter la coordination, la collaboration, la coopération, la communication et la prise en compte de tous les partenaires de la gestion des urgences, y compris les peuples autochtones et les municipalités ou collectivités. Le Consortium fait valoir les capacités de ses organisations membres qui œuvrent dans le domaine de la gestion des urgences et il favorise une approche globale à l'échelle de la société pour servir les collectivités du Canada.
    En sont membres les organisations suivantes: l'Agence de développement et de secours adventiste ou ADRA, l'Équipe d'intervention rapide Billy Graham, la Croix-Rouge canadienne, CanOps, l'Association civile de recherche et de sauvetage aériens du Canada, la Garde côtière auxiliaire canadienne, Banques alimentaires Canada, Humane Canada, le Mennonite Disaster Service, Radio Amateurs du Canada, Samaritan's Purse Canada, l'Association canadienne des volontaires en recherche et sauvetage, l'Ambulance Saint-Jean, Team Rubicon, l'Armée du salut, World Renew.
    La force du Consortium réside dans sa capacité à fournir un appui coordonné aux instances gouvernementales et aux autorités locales. Notre influence découle de notre capacité collective à appuyer les organisations de gestion des urgences en fournissant aux ONG une base simple, fiable et unifiée. Le Consortium s'efforce également de réduire la complexité du cycle décision-action pendant une catastrophe nationale.
    En plus de nos services d'urgence coordonnés, l'une des composantes essentielles de notre travail consiste à reconnaître les graves conséquences qu'une urgence risque d'avoir sur la santé et le mieux-être émotionnel et psychologique des individus. Le Consortium dispose également de la capacité et de l'expertise nécessaires pour fournir de l'aide psychosociale en cas d'urgence, de crise ou de catastrophe, afin d'aider les personnes à surmonter le choc initial causé par les grands bouleversements vécus dans une telle situation.
    Récemment, pendant la Semaine de la sécurité civile, le gouvernement du Canada a annoncé le versement de 150 millions de dollars pour appuyer les organisations non gouvernementales dans leur réponse humanitaire à la pandémie de COVID‑19 et à d'autres urgences majeures. Ces fonds permettront de renforcer les capacités et de fournir des ressources d'intervention nationale à quatre des ONG membres du Consortium: l'Armée du salut, la Croix-Rouge canadienne, l'Ambulance Saint-Jean et l'Association canadienne des volontaires en recherche et sauvetage.
    Plus précisément, ce financement servira à fournir des services essentiels sur le terrain dans plusieurs provinces et les trois territoires qui ont demandé l'aide fédérale, notamment pour obtenir davantage d'infirmières de soins intensifs dans les hôpitaux, de l'aide dans les établissements de soins de longue durée et les maisons de retraite ainsi qu'une assistance en matière de vaccination, de prévention et de contrôle des épidémies. Cette somme financera aussi des interventions lors d'épidémies dans des communautés autochtones isolées. Grâce à ce financement, les organisations pourront conserver un groupe hautement qualifié et compétent d'intervenants en cas d'urgence et de professionnels de la gestion des urgences, contribuer à la création de systèmes de gestion des urgences, offrir une formation de haut niveau et acquérir certains équipements nécessaires à une mobilisation rapide.
    Enfin, les autres organisations membres du Consortium que les quatre susmentionnés seront en mesure d'apporter une expertise importante aux interventions nationales, ce qui permettra aux Forces armées canadiennes de se concentrer sur d'autres activités. Ces organisations pourront aussi appuyer les Forces armées canadiennes dans le cadre de leurs opérations nationales.
    Merci.

  (1725)  

    Merci.
    Je vois que M. Burns est en ligne.
    Monsieur Burns, avez-vous une déclaration préliminaire, d'une durée de cinq minutes?
    Je me nomme Damien Burns, sous-ministre adjoint aux Services de protection du gouvernement du Yukon.
    En guise d'introduction, je voudrais simplement dire que, chaque été, dans tout l'Ouest de l'Amérique du Nord et dans le monde, des feux de forêt menacent des collectivités et des infrastructures. Des populations sont obligées de se déplacer chaque fois pendant plusieurs semaines. La qualité de l'air se dégrade au point de présenter un danger, tandis que les moyens de subsistance souffrent de la fermeture de certaines régions, de la baisse du tourisme et des dégâts subis par des infrastructures essentielles.
    Le changement climatique prolonge la durée de la saison des incendies. Le temps le plus propice à ce fléau à l'intérieur de cette saison devient plus long, et les probabilités d'inflammation augmentent. Plus important encore, nos quartiers et nos communautés du Yukon entrent de plus en plus en contact avec les espaces naturels, devenant davantage exposés au mélange de divers matériaux combustibles accumulés, alors que le climat devient de plus en plus propice aux incendies. Dans le monde entier, on constate que les périodes propices aux incendies de plus en plus intenses deviennent plus longues, ce qui a conduit notre capacité d'intervention contre le feu au bord du gouffre.
    Cette aggravation perçue du comportement extrême du feu et les problèmes des saisons antérieures ont vraiment fait prendre conscience, à l'échelle nationale, de l'importance du problème, mais on prévoit que, dans les prochaines décennies, le changement climatique continuera d'avoir d'importantes conséquences sur la vie sauvage, la lutte contre les incendies et la gestion des situations d'urgence au Canada. Nous nous attendons à des saisons propices à des incendies plus intenses qui seront plus longues et à des paroxysmes météorologiques plus nombreux, notamment des sécheresses et des inondations. Nous nous attendons à ce que ces catastrophes naturelles soient plus difficiles à maîtriser. Bien sûr, c'est un problème à la fois yukonais et national.
    Visiblement, le problème s'est aggravé l'été dernier, alors que le Yukon a dû combattre ses pires inondations de mémoire d'homme. Plus de 400 habitations et infrastructures essentielles ont été menacées par la montée des eaux dans nos lacs du Sud. Les défis posés par la montée de ces eaux de même que ceux d'une saison des incendies d'une gravité moyenne dans notre territoire et les difficultés permanentes de la lutte contre la pandémie, à l'époque, ont mis à rude épreuve les équipes d'intervention d'urgence du Yukon. Nous avons été obligés de faire appel aux forces armées canadiennes qui ont eu l'amabilité et la générosité de nous prêter 200 hommes pour venir protéger ces habitations et infrastructures. Pour ces habitations, leur appui a été précieux, puisqu'elles constituaient la deuxième communauté en importance du Yukon.
    Cet appui a été sans prix, mais nous constatons que les situations d'urgence s'aggravent et sollicitent de plus en plus nos ressources. Nous considérons que cette urgence climatique est une menace immédiate et accablante et nous voyons bien les effets du changement climatique sur notre environnement et dans l'ensemble des communautés yukonaises.
    Pour le moment, je m'arrête ici. Merci.

  (1730)  

    Merci.
    Je tiens également à vous remercier de votre patience et de votre souplesse, pour avoir accepté de faire partie du premier groupe de témoins plutôt que du deuxième.
    Sur ce, chers collègues, entamons la période de questions. Il nous reste encore 50 minutes. Pour commencer, faisons un premier tour normal.
    Madame Gallant, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Burns, pourriez-vous exposer sommairement ce qui se produit quand vous prévoyez une catastrophe naturelle? Par exemple, quand vous savez que la fonte est suffisante et que toutes les conditions sont réunies pour des crues importantes, créez-vous un centre de commandement? Qui en fait partie? Quand songez-vous à vous adresser à des ordres supérieurs de gouvernement pour obtenir de l'aide? Dans quelles circonstances demanderiez-vous l'aide fédérale?
    Le Yukon dispose de plusieurs dispositifs permanents d'intervention, notamment un programme très au point, arrivé à maturité, de lutte contre les feux de végétation. Il nous fait profiter d'un programme très robuste d'échange de ressources à l'échelle nationale. Nous sommes habitués à certains degrés de préparation en fonction desquels des plans sont établis pour le Yukon. Nous nous sommes dotés des ressources nécessaires pour affronter une saison des incendies que nous prévoyons moyenne. Nous examinons les conditions météorologiques et nous prenons en compte le comportement prévu du feu. Nous gérons nos ressources, que nous avons estimées, dans une sorte de centre de coordination, que nous appelons le « poste de contrôle du Yukon », qui s'occupe de gérer les ressources internes du territoire.
    Nous réglons les degrés de préparation, c'est‑à‑dire le nombre d'équipes déployées dans certaines régions du Yukon, le nombre d'avions, d'hélicoptères et d'avions-citernes, en fonction de la météo et du degré de préparation nécessaire.
    Pendant la saison des incendies, nous communiquons quotidiennement avec d'autres organismes homologues du pays pour appréhender le degré national de préparation. Nous pouvons alors profiter des ententes parvenues à maturité avec le Centre interservices des feux de forêt du Canada, pour l'échange de ressources selon les besoins.
    Pour d'autres situations d'urgence, la gestion des ressources se ferait par l'entremise de notre organisme chargé des mesures d'urgence et de notre centre de coordination des interventions d'urgence. De même, nous évaluons notre degré de préparation nécessaire d'après les facteurs donnés d'incendie ou d'inondation. Par exemple, l'année dernière, les inondations ont été un phénomène lent sur lequel nous comprenions l'importance des conditions auxquelles étaient soumises les eaux d'amont des lacs du Sud, et nous disposions de suffisamment de données historiques pour comprendre que nous y étions exposés. Nous avons été en mesure d'obtenir les ressources, comme nous le faisons en prévision des feux de végétation, de comprendre le risque ainsi que les ressources qui seraient nécessaires et nous avons mobilisé ces ressources.
    Bien sûr, nous ne sommes pas habitués à affronter en même temps diverses urgences climatiques comme les incendies et les inondations. Au début, nous avons opposé à l'inondation toutes nos ressources internes, mais à mesure que les incendies gagnaient en importance et que la fatigue s'installait dans nos équipes d'intervention, il est devenu évident que nous aurions besoin d'aide extérieure, quantitativement et qualitativement pour les interventions et la construction des infrastructures temporaires nécessaires. Nous avons érigé une levée de terre de 5 kilomètres de longueur, et il est devenu évident que nous ne pourrions mobiliser au Yukon les ressources nécessaires.
    Nous avons d'abord jaugé nos ressources internes, pompiers et professionnels des interventions d'urgence. Ensuite, nous nous sommes adressés au secteur privé du Yukon, les entreprises susceptibles de nous appuyer, et nous avons fait appel à de nouveaux employés. Pour de meilleurs résultats, nous avons également coordonné un mouvement important de bénévolat. En fait, par ces divers moyens, nous n'avons pas été en mesure de recruter 200 personnes de plus au Yukon pour venir nous appuyer. Il nous a donc fallu faire appel aux Forces armées canadiennes.

  (1735)  

    Monsieur Saugh, pendant les inondations de 1997, à Winnipeg, nous avons travaillé avec l'équipe mennonite. Elle est arrivée après la baisse des eaux et le départ des militaires. Vous coordonnez un groupe de ce type d'ONG. Dans votre logistique, destinez-vous les groupes à certains endroits, selon un ordre chronologique, en fonction des besoins ou est‑ce géographique, en fonction des régions le plus durement touchées? Comment décidez-vous du moment et du lieu d'intervention de certains groupes?
    L'intervention est un effort coordonné. Nous prenons en considération les atouts et les effectifs qu'apporte chaque ONG. Nous créons un centre des opérations d'urgence et nous désignons notre commandant.
    Nous tenons compte de l'apport de chacun. Les besoins peuvent concerner le soutien psychosocial, la satisfaction des besoins urgents essentiels, la gestion des dons et des entrepôts ou les dons en nature. Nous sommes ensuite en mesure d'exploiter les compétences particulières de chaque ONG et de coordonner collectivement dans la coopération et les efforts de chacun.
    Voilà notre point de départ, puis, bien sûr, ils sont en mesure de le fournir. Grâce à des réunions-bilans périodiques, nous pouvons faire le point sur la réponse aux besoins et aux lacunes. Il s'agit vraiment d'aider les sinistrés et les déplacés en répondant à ces besoins, puis en les évaluant périodiquement et…
    Malheureusement, nous devons nous arrêter ici. J'en suis désolé.
    Monsieur May, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'interroge M. Goodyear.
    Jusqu'ici, nous avons entendu des témoignages qui préconisaient plus d'investissements dans la capacité d'intervention d'urgence civile à l'échelle de la province et du territoire. Certains ont également fait appel à l'affectation de ressources supplémentaires et à une capacité spécialisée des forces armées, que ce soit les forces régulières ou la réserve.
    Quelle est, d'après vous, la division convenable des responsabilités entre le militaire et le civil? Quels en sont les avantages et les inconvénients? Pouvez-vous peut-être décrire les limites de chacun?
    Je vous remercie pour votre très bonne question, monsieur May.
    Nous, les ONG, disons souvent que si l'on n'a pas besoin de nous, tant mieux, mais ce serait terrible d'apprendre après coup que nous aurions pu prêter main-forte dans une situation où les gens ne savaient tout simplement pas qu'ils pouvaient faire appel à nous.
    Les ONG qui participent au Programme d'aide humanitaire financé par le gouvernement examinent les demandes d'aide fédérale et les appuis demandés. Ces appuis sont-ils hautement spécialisés et le personnel militaire est‑il le seul à pouvoir les fournir, ou les ONG disposent-elles des ressources nécessaires pour répondre aux besoins?
    Dans la majorité des cas, les forces armées ne sont pas nécessairement les seules à pouvoir intervenir. Si l'on fait appel à elles, c'est surtout parce qu'elles peuvent être déployées rapidement. Comme il s'agit d'une ressource fédérale, ce sont elles qu'on appelle en premier. Or, l'objectif global du Programme d'aide humanitaire, c'est de faire en sorte que les forces armées ne soient pas les premières à être appelées en cas de demande d'aide fédérale.
    Bon nombre, sinon la totalité des ONG appartenant à notre consortium a une présence sur le terrain. Ce ne sont pas seulement des ONG nationales, mais elles ont une présence dans des collectivités partout au pays. Elles sont peut-être déjà actives sur le terrain, et elles peuvent obtenir des ressources internes d'autres provinces ou territoires, ce qui renforce leur capacité d'intervention. En réalité, les ONG sont déjà très actives, mais elles pourraient en faire plus.
    À mon avis, investir dans les ONG plutôt que dans la spécialisation des forces armées serait une très bonne façon de réaliser des progrès, car les forces armées peuvent servir à autre chose. Comme je l'ai dit durant ma déclaration préliminaire, les ONG peuvent jouer certains rôles seules; dans d'autres cas, elles peuvent renforcer les efforts déployés par les forces armées.

  (1740)  

    Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Quels rôles essentiels peuvent être joués par les ONG et un bassin de bénévoles, et lesquels dépassent possiblement les capacités des organismes principalement bénévoles?
    Vous avez parlé de l'opportunité des interventions et vous avez dit que la capacité de déployer des gens rapidement pouvait être un obstacle. Cela dit, les ONG ont-elles des capacités particulières? Pouvez-vous nous expliquer dans quelles situations les ONG et les organismes bénévoles sont aptes à intervenir?
    C'est une question intéressante. La majorité des ONG avec lesquelles nous travaillons et qui appartiennent au consortium peuvent fournir les services qu'elles offrent au quotidien, que ce soit la gestion des dons, l'offre de soutien psychosocial, la distribution de nourriture et d'eau, etc., mais elles peuvent aussi combler les lacunes.
    Durant mes plus de 15 ans de carrière dans le domaine de la gestion des catastrophes et des urgences, je ne suis jamais intervenu dans deux situations dans lesquelles les circonstances et les besoins étaient exactement les mêmes. L'avantage d'être un regroupement d'ONG, c'est que nous sommes en mesure de cerner les lacunes, de déterminer si la situation présente des circonstances uniques, puis d'établir quelle ONG est la mieux placée pour répondre aux besoins particuliers. Parfois, c'est en offrant les services ordinaires; d'autres fois... Un des exemples récents se rapportant au Programme d'aide humanitaire concerne l'Association canadienne des volontaires en recherche et sauvetage. Bien entendu, ses activités quotidiennes sont centrées sur la recherche et le sauvetage. Toutefois, comme elle est très autonome, elle a été en mesure de se rendre auprès d'une communauté autochtone éloignée et de lui fournir du bois de chauffage, de la nourriture et autres.
    L'avantage, c'est que nous pouvons apporter une expertise additionnelle, car nous avons l'habitude de combler les lacunes, et même si les besoins ne correspondent pas à nos activités de tous les jours, nous avons les moyens d'élargir rapidement nos services.
    Il va sans dire que la pandémie a érodé les ressources de tous les ordres de gouvernement. En ce qui concerne la réponse des ONG aux situations d'urgence, de quelles façons les ONG ont-elles intensifié leurs activités ces deux dernières années?
    C'est une très bonne question.
    Elles font différentes choses. Elles prêtent main-forte dans les établissements de soins de longue durée, par exemple en accomplissant des tâches non spécialisées. Elles ne fournissent pas nécessairement du personnel infirmier ou des professionnels de la santé, mais elles nourrissent les résidents. Elles aident à fournir des soins aux aînés et elles soutiennent les programmes scolaires. Je sais que quand les écoles étaient fermées, l'Armée du Salut a fourni de la nourriture au moyen de ses cantines mobiles et de sa flotte de camions d'urgence parce que les familles n'avaient pas accès aux programmes d'alimentation scolaire. Il y avait même des camionneurs qui apportaient des fournitures essentielles...
    Malheureusement, nous allons devoir nous arrêter là, monsieur May.
    Je vois que le professeur Leuprecht est en ligne. Merci encore une fois, monsieur, pour votre souplesse et votre amabilité. Si j'ai bien compris, vous vous joignez à nous depuis l'Europe.
    Je vais interrompre la série de questions pour permettre à M. Leuprecht de faire sa déclaration préliminaire.
    La parole est à vous, professeur Leuprecht. Vous disposez de cinq minutes.

  (1745)  

    Pouvez-vous confirmer que vous m'entendez, monsieur le président?
    Nous vous entendons très bien.
    Parfait.

[Français]

     Je vous remercie de l'invitation.
    Comme toujours, je vais intervenir en anglais, mais je me ferai un plaisir de répondre à vos questions dans les deux langues officielles.

[Traduction]

    Je vous ai fourni un mémoire détaillé, mais je vais vous présenter quelques renseignements de base.
    Les Forces canadiennes ont huit missions. Ses cinq missions liées à la défense continentale et ayant une portée internationale sont dotées d'une structure de forces. Ses trois autres missions ne sont pas assorties d'une structure de forces ou de capacités de base. La seule mission à portée nationale dotée d'une structure de forces notable est celle qui concerne la recherche et le sauvetage. Les deux missions sans structure de forces sont l'assistance aux autorités civiles aux fins de l'application de la loi, ainsi que l'assistance aux autorités civiles et aux organismes non gouvernementaux en cas de catastrophe ou d'urgence majeure survenant au pays ou à l'étranger.
    Je pense que vous pouvez conclure de ces faits que les Forces armées canadiennes ont, disons, une attitude très ambiguë à l'égard de leurs opérations au pays. Très peu de forces y sont affectées spécifiquement, à l'exception de l'équipe d'intervention en cas de catastrophe. Il y a aussi les Forces de réserve, qui comptent 10 compagnies d'intervention nationale et 4 groupes-compagnies d'intervention dans l'Arctique. Or, les Forces de réserve sont aux prises avec un taux de roulement très élevé. Ainsi, l'attitude générale, c'est que les missions de secours en cas de catastrophe ou d'urgence peuvent être accomplies par des troupes ayant reçu une formation en guerre conventionnelle.
    Vous avez beaucoup entendu dire que les Forces armées canadiennes étaient surchargées ou que leurs ressources étaient utilisées au maximum par les opérations au pays. J'avancerais que les données que je fournis depuis environ 30 ans montrent que la majorité des opérations sont de courte durée et qu'elles emploient des effectifs limités; elles font surtout appel à la capacité d'appoint des forces générales et à la capacité de transport de l'Aviation royale du Canada. Durant la pandémie, certaines ressources ont tourné à plein régime, comme les services de santé, mais somme toute, je dirais que les Forces armées canadiennes se débrouillent avec les capacités dont elles disposent.
    La question est de savoir si cette situation nuit à leur état de préparation au combat. Ne serait‑il pas préférable de mettre sur pied un organisme civil? Si les FAC conservent la mission, elles devraient créer une structure de forces spéciales.
    D'un point de vue général, la question ne concerne pas uniquement les interventions en cas de catastrophe, mais aussi la défense civile. Comme nous vivons dans un monde dangereux, nous devons disposer de capacités de dissuasion et de résilience pouvant aussi signifier à nos adversaires qu'il ne vaut pas la peine d'attaquer le Canada puisque nous avons des capacités de défense civile. Plusieurs pays européens ont renforcé considérablement leurs capacités.
    Comment les Forces armées canadiennes en sont-elles venues à être investies d'une mission de défense civile au pays?
    À la fin des années 1940, la question de savoir si les Forces armées canadiennes devraient avoir le droit de mener des missions à l'échelle nationale a fait l'objet d'un grand débat. Au début des années 1950, les Forces armées canadiennes ont décidé d'assumer ces missions afin de pouvoir se doter d'une plus grande structure de forces en temps de paix qu'elles ne le pourraient autrement.
    Cette approche permet d'importantes économies d'échelle. Par exemple, il faut beaucoup de temps et d'argent pour former un pilote. Ainsi, en ajoutant la capacité de recherche et de sauvetage au mandat ordinaire de l'Aviation royale du Canada, l'organisation réalise des économies importantes, tant sur le plan de l'équipement — c'est‑à‑dire les aéronefs à voilure fixe et à voilure tournante — que de la formation des pilotes, de leurs heures de vol et tout le reste. Les économies d'échelle sont considérables.
    À mon avis, il faut vraiment affecter une structure de forces spécifiquement à cette mission. J'ai déjà proposé que ces forces soient formées de quelque 2 000 personnes provenant principalement de l'Aviation royale du Canada puisque c'est elle qui dispose de la plus grande capacité de transport. Des forces de réserve d'environ 1 000 personnes pouvant intervenir en cas de catastrophe pourraient y être ajoutées. Le reste du temps, elles pourraient appuyer le développement, en particulier dans les collectivités autochtones du Grand Nord. D'après moi, il y aurait lieu d'investir l'organisation d'une mission nationale permanente.
    J'ai deux observations à faire en guise de conclusion.
    D'abord, quant à moi, l'une des leçons que nous pouvons tirer de la réponse à la pandémie, c'est que les forces armées doivent réfléchir à l'envergure du rôle qu'elles peuvent confier à la Première réserve, sans que le gouvernement règle d'abord certains problèmes relatifs à cette réserve. Comme les Forces de réserve ne disposent pas d'une compagnie permanente ou d'une structure professionnelle, les forces armées doivent se demander quel devrait être leur rôle principal.

  (1750)  

    Par ailleurs, les forces armées doivent trouver une façon de résoudre les problèmes majeurs relatifs au renseignement et de répondre au besoin de longue date de mettre en place une politique nationale en matière de renseignement. D'après moi, les Forces armées canadiennes devraient considérer la pandémie comme un exercice de simulation conçu pour les préparer pour le cataclysme à venir, la situation qui fera subir aux forces armées une pression beaucoup plus grande que ce nous avons vu jusqu'à maintenant. Ce cataclysme pourrait prendre la forme d'une urgence nationale de plus vaste envergure ou d'une urgence régionale et nationale combinée à une urgence continentale et internationale.
    Ma préoccupation — et je vais conclure là‑dessus — concerne l'aléa moral que nous connaissons actuellement. Tous les Canadiens doivent prendre conscience du rôle qu'ils ont à jouer dans la défense et la résilience du Canada. Nous ne pouvons pas simplement confier ce mandat à une organisation, puis faire semblant que cela n'a plus rien à voir avec nous. C'est l'attitude que nous prenons à l'égard des Forces armées canadiennes — qu'il s'agit d'un emploi que les gens choisissent et pour lequel ils reçoivent une formation —, au lieu de reconnaître que la résilience et les interventions nationales sont des enjeux qui requièrent la participation de l'ensemble de la société.
    Mon autre préoccupation concerne un problème de longue date: il faut veiller à ce que les provinces investissent adéquatement dans les infrastructures essentielles. Les provinces se disent qu'elles peuvent compter sur les Forces armées canadiennes, car en vertu de la prérogative de la Couronne, c'est l'exécutif en poste qui prend les décisions relatives au déploiement des Forces armées canadiennes. Il y a très peu de contraintes. Le Canada est peut-être le pays démocratique qui a le moins de contraintes à respecter en ce qui concerne le déploiement des forces armées. Nous devons signifier clairement aux provinces que la possibilité d'avoir recours aux forces armées n'est pas un prétexte pour ne pas investir adéquatement dans les infrastructures essentielles.
    Le précédent a été créé au début du 20e siècle, quand les Forces armées canadiennes et la milice ont été appelées à remplir des fonctions d'application de la loi. En un mot, la milice s'est défaite de ce mandat en mettant en place un mécanisme de recouvrement des coûts qui a fait en sorte qu'il était moins coûteux pour les provinces d'avoir leurs propres services de police. Nous devons créer un modèle de recouvrement systématique des coûts en cas de déploiement.
    Je vous remercie, professeur Leuprecht.
    Chers collègues, pour ajouter à la confusion, le vote de ce soir semble avoir été reporté, ce qui veut dire que nous avons plus de temps que prévu. Poursuivons nos séries de questions de six minutes.
    Comme si la confusion n'était pas encore assez grande, l'examen de mon projet de loi d'initiative parlementaire commencera dans quelques minutes. Je vais donc céder le fauteuil à mon éminente et émérite vice-présidente.

[Français]

     Madame Normandin, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leur disponibilité et de leur patience.
    Professeur Leuprecht, je suis contente que vous ayez pu vous joindre à nous.
    J'aimerais avoir vos commentaires et ceux des deux autres témoins sur ce qui suit.
    J'ai parlé à un précédent groupe de témoins de la proposition de M. Leuprecht selon laquelle une partie des Forces de réserve pourrait être formée expressément pour répondre à des situations d'urgence climatique. Entre ces situations d'urgence, cette unité pourrait aider à améliorer les infrastructures dans les communautés éloignées et faire du travail de préparation, d'atténuation des impacts ou de prévention.
    Un des témoins m'a répondu ceci:
    
    Les Forces canadiennes ont pour politique absolue de ne pas rivaliser avec les entreprises et les économies nationales. Le fait de faire appel à l'armée pour mener des activités de routine de « développement économique », à défaut d'un meilleur terme, ne serait probablement pas bien accueilli au pays.
     J'aimerais connaître l'opinion des trois témoins, soit celle d'un représentant du gouvernement du Yukon, d'un représentant d'une ONG et de M. Leuprecht.
    Cette idée est-elle bien perçue de votre côté?
     À moyen terme, il doit assurément y avoir plus de capacités au sein du secteur privé et de la société civile pour répondre à ces exigences. Actuellement, elles n'existent pas au sein des Forces armées canadiennes.
    Présentement, il y a deux problèmes.
    Premièrement, cela prendra du temps avant que la société civile et le secteur privé bâtissent cette capacité. On veut bâtir une unité qui pourra répondre aux situations d'urgence. C'est le cas en Australie, par exemple, où on peut faire appel à des milliers de bénévoles ayant les compétences requises. L'Allemagne a le même genre de capacité. C'est quelque chose que le Canada pourrait faire, mais il ne pourra pas le faire dans un avenir proche; cela prendra une dizaine d'années, à mon avis. Le fédéral devrait fournir un certain montant d'argent pour encourager les provinces à le faire.
    Deuxièmement, il y a un problème légal. Le gouvernement fédéral préfère répondre à certaines exigences en utilisant les Forces armées canadiennes au lieu de collaborer avec les organisations provinciales ou privées. Certaines obligations légales existent. Si le gouvernement répond avec ses ressources et ses capacités, cela signifie qu'il peut assumer ces obligations. Il faut donc considérer le contexte légal et déterminer la façon de le changer, puisque la situation actuelle n'encourage pas ce genre de collaboration.

  (1755)  

    J'aimerais qu'un représentant du gouvernement du Yukon me donne son avis quant à l'idée que les Forces pourraient rivaliser avec les gens sur le terrain, chez vous. Je suis curieuse d'entendre votre opinion à cet égard.
    Au contraire, est-ce une bonne idée qu'une équipe de réservistes soit toujours prête à participer au développement économique et au développement des infrastructures dans les régions éloignées?

[Traduction]

    Je peux répondre, si vous me le permettez, ou la question s'adresse‑t‑elle au professeur?

[Français]

    Ma question s'adresserait à M. Burns, du gouvernement du Yukon.
    Monsieur Burns, avez-vous bien entendu la question?
    Je l'ai bien entendue, mais je vais y répondre en anglais.

[Traduction]

    Si je comprends bien, vous voulez savoir si nous voyons d'un bon œil la possibilité qu'une équipe de réservistes formés vienne prêter main-forte et bonifier les ressources dans les régions éloignées comme le Yukon. Je pense que la réponse courte est oui. Je crois certainement que le besoin en ressources de ce genre est énorme dans des endroits comme le Yukon. Cela ne diminue en rien nos ressources internes ni le travail capital que nous faisons avec les organismes bénévoles et le secteur privé pour renforcer nos capacités. La réalité, c'est que le bassin d'intervenants au Yukon est si petit qu'il y a des situations d'envergure dans lesquelles il serait utile de pouvoir faire appel à une force comme celle que vous avez décrite, une force de réserve ayant reçu une formation spéciale en intervention d'urgence qui pourrait se rendre sur place et mener une intervention globale.
    Quand les 200 membres des forces armées sont venus prêter assistance au Yukon l'an dernier, je pense que pour nous, la grande valeur ajoutée, c'est qu'ils étaient complètement autonomes sur le plan logistique. Nous n'avons eu ni à les héberger ni à les nourrir, et ils n'avaient besoin que de très peu de soutien de la part de nos intervenants et du système que nous avions mis en place pour alimenter et déplacer nos propres ressources. Le fait qu'ils formaient un groupe complet, qu'ils étaient formés et qu'ils avaient leurs propres ingénieurs, leurs propres superviseurs et leur propre structure, et le fait qu'ils pouvaient travailler en respectant notre structure de commandement des interventions étaient d'une importance capitale. Nous verrions vraiment d'un bon œil la bonification...

  (1800)  

    Merci, monsieur Burns. Le temps est écoulé.
    Merci, madame Normandin.
    Monsieur Desjarlais, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie les honorables membres du Comité de me donner l'occasion de parler de cette question très importante. Je tiens aussi à remercier les témoins de leur présence. Je vous félicite tous de votre travail dans ce domaine.
    J'ai moi-même de l'expérience en gestion des urgences dans le Nord de l'Alberta.
    Je salue M. Burns. Je suis certain que vous êtes au courant de ce qui s'est passé dans le Nord de l'Alberta en 2019. Je parle du feu de forêt de Chuckegg, un énorme incendie de forêt qui menaçait les collectivités de High Level et Paddle Prairie. J'étais alors directeur national des Métis du Nord de l'Alberta. Donc, nous avons eu un énorme incendie qu'on appelait l'incendie de forêt de Chuckegg, qui a fini par détruire 15 maisons. Aujourd'hui, malheureusement, cette même communauté est actuellement inondée. Les habitants ont été évacués. Les évacuations se poursuivent en ce moment même.
    J'aimerais simplement revenir à 2019. J'ai pu constater, selon mon expérience à ce moment‑là, que les Autochtones sont confrontés à une multitude d'obstacles pour avoir accès aux services d'urgence. En fin de compte, il a fallu que les Forces armées canadiennes envoient deux avions pour nous aider à évacuer la communauté. Nous avons dû surmonter d'importantes difficultés de logistique et de capacité pour faire ce travail. Évidemment, comme beaucoup d'entre vous le savent, nous nous sommes d'abord organisés à l'échelle provinciale. Nous avons fait appel à un conseil d'organisation provincial qui nous a invités à examiner les moyens d'appuyer nos collectivités autochtones dans le Nord de l'Alberta.
    J'ai constaté une série de problèmes uniques. Si je ne me trompe pas, un collègue a parlé, en fait, de la nécessité de veiller à ce que les communautés autochtones du Nord aient accès au soutien. Je pense que c'est M. Leuprecht qui a parlé du rôle que peuvent jouer les Forces armées canadiennes pour appuyer en particulier les communautés autochtones qui, encore aujourd'hui, n'ont pas les infrastructures, les systèmes de soutien et les centres logistiques essentiels, pour faire face à la crise que nous traversons.
    J'entends par là que nous sommes maintenant à l'ère des conséquences climatiques. Chacun des témoins en a parlé. Nous savons, en raison des tendances, que ces crises, ces catastrophes naturelles, ne feront qu'empirer, en plus d'avoir des répercussions de plus en plus dévastatrices sur nos infrastructures.
    J'ai une série de questions à poser. J'y reviendrai lors de mes prochaines interventions, mais je m'adresse à tous les témoins. Vous avez tous — ou du moins certains d'entre vous — la même expérience que moi, j'en suis certain, dans l'organisation du soutien pour les collectivités nordiques. Quelles mesures pouvons-nous prendre pour limiter le nombre d'obstacles et offrir une aide directe aux communautés autochtones, peut-être par l'intermédiaire d'un programme fédéral, sans nécessairement avoir à obtenir le consentement de la province, ce qui était un obstacle pour ces communautés autochtones à l'époque?
    Nous pouvons commencer par M. Burns.
    La fin de votre déclaration me laisse quelque peu perplexe, car vous parlez d'offrir ce soutien sans l'accord de la province. D'après mon expérience, il est vraiment essentiel que tous les ordres de gouvernement travaillent en étroite collaboration. Je ne vois pas la pertinence, du moins au Yukon, d'avoir des interventions distinctes pour les collectivités autochtones et des Premières Nations. Donc, j'espère toujours que les autorités provinciales participent aux décisions liées aux ressources.
    Je ne pense pas avoir beaucoup plus à dire à ce sujet. Je pense que c'est important.
    D'accord. Merci beaucoup, monsieur Burns.
    Étant donné le temps dont nous disposons, nous pourrions passer directement à M. Leuprecht.
    Je pense que c'est un excellent point, pour plusieurs raisons. Une des choses que les gens oublient, c'est que ce genre de travaux de développement coûte environ 10 fois plus cher dans le Nord que dans le Sud. Je pense que les gens oublient aussi qu'une bonne partie de l'infrastructure qu'on trouve dans le Sud n'existe évidemment pas dans le Nord. En fin de compte, c'est l'État qui doit fournir, grâce aux mécanismes dont il dispose, certaines des ressources que nous tendons à tenir pour acquises dans le Sud, et ce, à un coût très inférieur.
    Voilà pourquoi j'estime que l'État doit jouer un rôle actif, et pourquoi je pense à une unité qui pourrait, d'une part, contribuer au développement des communautés nordiques — sachant bien sûr qu'aider les communautés du Nord représente un gain sur les plans de la prospérité et de l'égalité des chances pour tous les Canadiens — et, d'autre part, avoir une capacité d'intervention. En temps normal, cette unité pourrait s'occuper de questions de développement dans le Nord avec certaines collectivités, puis intervenir au besoin en cas de catastrophe.
    En réponse à votre commentaire et à la question précédente, je tiens simplement à souligner que le recours aux forces de réserve à cette fin présente des défis particuliers en raison de leur taux de roulement élevé et leur incapacité à atteindre certaines normes de formation. En outre, elles ne sont disponibles qu'au cas par cas, sur une base volontaire. Voilà pourquoi il faut une structure de force permanente, car on peut alors déployer les réservistes [difficultés techniques] sous contrat, qui seront là pour vous, en permanence, pour travailler sur ces problèmes particuliers, au lieu de recourir de façon ponctuelle à des équipes mises sur pied au besoin.

  (1805)  

    Madame la présidente, combien de temps me reste‑t‑il?
    Votre temps est tout juste écoulé.
    Monsieur Leuprecht, nous y reviendrons, car j'ai vraiment trouvé cela fort intéressant.
    Merci, madame la présidente.
    Vous aurez une autre occasion. Merci.
    Nous passons maintenant à M. Motz pour cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur Leuprecht, je pense déjà connaître la réponse, mais devrait‑il y avoir une branche civile du gouvernement formée pour les interventions d'urgence en cas de catastrophe naturelle, comme la FEMA aux États-Unis? Qu'en pensez-vous?
    Monsieur Motz, si vous examinez mon rapport, j'y présente essentiellement quatre modèles. Le modèle de la FEMA est probablement le modèle le plus coûteux et le moins efficace auquel vous pouvez penser. Aucun autre pays démocratique n'a suivi le modèle de la FEMA. Je pense que s'il fonctionne pour les États-Unis, c'est simplement en raison des structures institutionnelles et des défis importants auxquels les États-Unis sont confrontés à de nombreux endroits. Cela ne fonctionnerait pas ici.
    Quelles sont les autres options? Il y a par exemple, le modèle suivi par l'Australie, l'Allemagne et la plupart des pays européens, qui consiste à avoir une composante civile beaucoup plus organisée. Par exemple, le State Emergency Service de l'Australie ne compte que quelques dizaines d'employés à temps plein, mais peut faire appel à des milliers de bénévoles et d'experts capables d'intervenir, notamment des ingénieurs. Au besoin, ils peuvent intervenir en quelques heures...
    Monsieur Leuprecht, je me permets de vous interrompre, car vous avez répondu à ma question. Je souhaiterais obtenir des réponses à d'autres questions, étant donné le temps limité qui m'est imparti.
    Monsieur Goodyear et monsieur Burns, lors d'urgences nationales, dans quelle mesure y a‑t‑il un dédoublement des activités entre les ONG, les organisations gouvernementales et les autres entités qui participent aux interventions d'urgence en cas de catastrophe naturelle? Comment pourrait‑on éviter ce dédoublement et optimiser l'efficacité?
    C'est une excellente question, monsieur Motz.
    Je dirai simplement, du point de vue des ONG, que le Consortium canadien des ONG de sécurité civile a justement été créé pour éviter le dédoublement des services et travailler en collaboration, en fait.
    Prenez à titre d'exemple la tornade qui a frappé Ottawa et Gatineau. Une de nos ONG était chargée de la gestion des dons. Une autre ONG avait aussi de l'expertise dans ce domaine. Elles ont donc simplement décidé de travailler en partenariat sur le terrain au lieu de se faire concurrence. Donc, nous sommes axés sur la collaboration pour veiller à éviter les dédoublements et à nous assurer que nos interventions, quelles qu'elles soient, ne comportent pas de lacunes.
    Monsieur Burns, la parole est à vous.
    C'est une partie de la coordination provinciale ou de l'organisme principal de coordination qui joue un rôle si important, à mon avis, avec le centre provincial de coordination des urgences ou tout autre organisme chargé de la gestion des ressources lors de ces diverses urgences. Voilà comment on évite les chevauchements. C'est ce qui nous permet de répartir les ressources correctement pour les différentes urgences, s'il y a concurrence pour les ressources.
    Cette coordination a un rôle extrêmement important pour éviter les dédoublements. C'est ainsi qu'on y arrive.
    Je vous remercie de la réponse.
    Comment la coopération et la collaboration s'instaurent-elles entre les organisations de gestion des urgences, les ONG et, en de rares occasions, les Forces armées canadiennes ou toute autre entité fédérale? Cela se passe‑t‑il bien? Quelles leçons a‑t‑on tirées des interactions entre les divers organismes lors de catastrophes naturelles afin d'améliorer la coopération et la collaboration?
    Je suis heureux de répondre à cette question, monsieur Motz.
    D'après mon expérience, je peux vous dire que la plupart des ONG et d'autres organismes d'intervention en cas de catastrophes travaillent dans le cadre du système de commandement des interventions. Nous mettons en place cette structure avec des officiers de liaison qui assurent une coordination continue sur le terrain. Nous nous assurons d'échanger des renseignements les uns avec les autres pour éviter ces lacunes.
    Je pense qu'un problème qu'on observe depuis la fermeture de l'ancien Collège canadien de gestion des urgences est l'absence de modèle national pour la formation du personnel. Il y a de la formation à l'échelle provinciale, qui est offerte par beaucoup d'organismes de gestion des urgences. Par conséquent, le personnel des organismes nationaux est formé à l'échelle provinciale, pas nécessairement au niveau national. Il faut donc une formation pour différents modèles, même le système de commandement des interventions...

  (1810)  

    Je m'excuse de vous interrompre, monsieur Goodyear. Je suis désolé.
    Très rapidement, puisqu'il ne me reste que quelques secondes... Je suis diplômé du Collège de gestion des urgences, ici à Ottawa. Cela remonte à plusieurs années. Notre gouvernement devrait‑il chercher à uniformiser la formation des bénévoles et des forces spéciales, comme M. Leuprecht les appelle, pour que tous soient sur la même longueur d'onde?
    Répondez très brièvement, s'il vous plaît, car le temps est écoulé.
    J'ai aussi fréquenté le Collège canadien de gestion des urgences, et c'est là l'avantage, car cela permet d'offrir en même temps une formation aux militaires et au personnel des ONG et des municipalités, et tous reçoivent la même formation.
    Monsieur Fisher, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, madame la présidente. C'est un plaisir de vous voir dans le grand fauteuil.
    Merci beaucoup à nos témoins, non seulement pour leur expertise, mais aussi pour leur incroyable patience face à ce qui se passe à la Chambre entre 15 h 30 et 17 h 30. Merci beaucoup à vous tous pour votre patience.
    Ce que nous étudions, c'est l'incidence de cette demande intérieure croissante sur l'état de préparation des Forces armées canadiennes et leur capacité de répondre aux futures demandes d'aide.
    Messieurs Goodyear et Burns, vous avez tous deux exposé les problèmes. Vous avez parlé des choses incroyables que vous avez réussi à accomplir dans vos groupes respectifs, et vous avez même parlé de renforcer les capacités afin de mieux intervenir à l'avenir. Vous avez parlé de l'important financement fédéral, que vous considérez comme un aspect positif.
    J'essayais de saisir la voie à suivre que vous préconisez, le genre de modèle à adopter. Selon vous, quel type d'organisme pourrait alléger la pression qui pèse sur les Forces armées canadiennes? Est-ce la Croix-Rouge, une force de réserve spéciale, une entité privée?
    J'aimerais avoir une recommandation sur la voie à suivre, en commençant par M. Goodyear, suivi de M. Burns, peut-être. Je n'aurai probablement pas le temps de donner la parole à M. Leuprecht, qui aura sans doute un point de vue différent du vôtre par rapport aux ONG.
    Selon vous, comment pourra‑t‑on régler ce problème à l'avenir, étant donné que nous savons que les demandes sur les Forces armées canadiennes ne feront que croître?
    Je dirais qu'il faut sans doute un investissement continu dans les ONG. Comme je l'ai indiqué dans ma déclaration préliminaire, certaines de nos ONG ont reçu un financement dans le cadre du Programme de main-d'œuvre humanitaire. Cela n'est garanti que jusqu'au 31 mars 2023. Donc, pour le maintenir, il faut... Je pense qu'il faut continuer de travailler avec les militaires et les FAC, qu'il s'agisse d'un groupe de réserve ou d'autres, et s'assurer que ces groupes soient formés ensemble, comme je l'ai mentionné, dans un centre comme le Collège canadien de gestion des urgences, afin de cerner les lacunes. Ainsi, lorsque ces demandes arriveront, il sera beaucoup plus facile de déterminer quel organisme sera mieux placé pour intervenir, au lieu de s'en remettre systématiquement aux Forces canadiennes.
    La parole est à vous, monsieur Burns.
    Je ferai écho aux propos de M. Goodyear. Je pense qu'il est extrêmement important d'investir dans le secteur, notamment dans les ONG, mais aussi dans les organismes provinciaux et municipaux, et dans toute force fédérale qui pourrait être créée. Je pense que cet investissement sera d'une importance capitale. Il n'y a pas que les Forces armées canadiennes qu'il faut protéger de ce fardeau accru, car cela aura des répercussions sur l'ensemble du secteur.
    Je pense que la coordination entre ces agences sera incroyablement importante, car elle nous permettrait d'avoir une vue d'ensemble de la nature de nos activités et de nos rôles respectifs dans ces diverses situations d'urgence. J'aimerais juste revenir à la discussion précédente sur le système de commandement des interventions. Je considère qu'il est absolument essentiel d'avoir une formation et des méthodes d'organisation uniformisées au pays. Cela revêtira de plus en plus d'importance à mesure que le nombre d'urgences augmentera et que les divers organismes seront appelés à intervenir.
    J'aimerais simplement souligner qu'il existe, à mon avis, un modèle très efficace duquel nous inspirer. Il s'agit du Centre interservices des feux de forêt du Canada, qui est probablement des décennies en avance sur son temps sur le plan de la coordination entre les administrations pour ce qui est des interventions en cas de feux de végétation. Je pense que nous pouvons apprendre beaucoup de cet organisme.

  (1815)  

    Il vous reste encore une minute.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur Leuprecht, vous avez indiqué que d'autres renforcent leurs capacités en ce qui concerne — si j'ai bien compris vos propos — les demandes d'aide et les demandes d'intervention au pays. Qui accomplit des choses incroyables dans ce monde, et à quoi cela ressemble-t-il?
    Toutes mes excuses. Je sais que vous avez présenté un mémoire il y a quelques semaines, mais je ne l'ai pas sous la main.
    Un bon point de départ serait le Plan fédéral d'intervention d'urgence, ce qui, je crois, reprend les commentaires prédécents. Nous avons inéluctablement du mal à lancer le Plan fédéral d'intervention d'urgence parce que les gens ne le comprennent pas et les organismes et les intervenants impliqués ne le connaissent pas bien.
    Le Collège de gestion des urgences et une coopération accrue pourraient entre autres offrir l'occasion de s'exercer beaucoup plus régulièrement, lors d'exercices sur maquette, à réviser les plans afin que tous sachent en quoi ils consistent et que tous les participants connaissent leurs rôles et tâches. Ce genre de pratique n'existe pas présentement, et le gouvernement fédéral devra contraindre les parties prenantes à s'y soumettre. Nous devons être en mesure de bien nous coordonner entre ministères, et tout le monde doit connaître son rôle avant d'ajouter la participation des ONG, du secteur privé et d'autres organes à la coordination. Je crois que nous avons du pain sur la planche à cet égard.
    L'autre souci a bien entendu trait aux provinces et aux territoires. En janvier 2021, lorsque les Forces armées canadiennes ont été envoyées à Terre-Neuve et ont essayé de faire la coordination, elles ont découvert que la province a mis fin aux activités de son organisation responsable des mesures d'urgence parce qu'elle était incapable de la financer. Il y a des différences marquées d'une administration à l'autre, et il est impératif que le gouvernement fédéral s'assure que toutes les provinces maintiennent une certaine capacité à agir. C'est probablement d'autant plus vrai pour les petites provinces — par exemple toutes les provinces de l'Atlantique — dont la capacité à intervenir est déjà moindre, et c'est sans compter les défis démesurés auxquels elles font face.
    Madame Normandin, c'est votre tour, pendant deux minutes et demie.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente. Je suis contente de vous voir.
    J'aimerais revenir sur la question posée par mon collègue M. Motz et sur la réponse qui a été donnée à mon collègue M. Fisher, dans lesquelles on parlait de formation.
    Étant donné que les Forces armées canadiennes risquent d'être de plus en plus appelées à répondre à des situations d'urgence nationale et, surtout, à des situations d'urgence climatique, quelles sont formations les plus importantes à leur donner?
    Les membres des forces ont-ils accès à des formations qui leur permettent de répondre adéquatement à ces urgences?
    Quelles formations devrait-on créer en priorité pour les forces qui seront vraisemblablement appelées à intervenir?
    Les Forces armées canadiennes tiennent pour acquis que l'expérience acquise et la formation reçue lors de l'opération Kinetic, tenue à l'international et sur le continent, suffisent pour répondre aux demandes sur le territoire canadien.
    Comme je l'ai mentionné lors de ma dernière comparution devant le Comité, le plus grand défi relativement à la formation, c'est que les Forces armées canadiennes ont seulement atteint 85 % de leur capacité opérationnelle en ressources humaines. Cela résulte des impasses du système de formation.
    De prime abord, il faut s'assurer qu'assez de gens se présentent pour faire partie des Forces armées canadiennes. Puis, il faut qu'il y ait suffisamment de ressources pour assurer la formation générale des membres et des officiers des Forces armées canadiennes. S'il y a déjà des problèmes de formation générale, cela veut certainement dire qu'il y a aussi des manques dans les formations particulières et dans l'expérience nécessaire pour assurer les déploiements au pays.
    Dans la même veine, si on doit donner de la formation supplémentaire pour mieux répondre aux crises climatiques, devrait-on donner plus de formation individuelle aux militaires qui seront déployés ou à ceux qui se chargeront de la partie opérationnelle de ces événements?
    Si j'ai bien compris, vous me demandez s'il faut une expertise particulière plutôt qu'une expertise générale.
    Les opérations deviennent certainement plus complexes, tant sur le plan de la quantité que de la qualité. Il s'agit effectivement d'opérations de sécurité humaine.
    Les Forces armées canadiennes doivent répondre à plus d'exigences en matière de sécurité humaine à l'international. Il y a donc des complémentarités importantes quant à la formation, afin de s'assurer que les Forces ont les capacités nécessaires pour répondre aux besoins de sécurité humaine à l'échelle nationale et internationale.

  (1820)  

[Traduction]

    Monsieur Desjarlais, nous vous écoutons pendant deux minutes et demie. Veuillez commencer.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci encore une fois aux témoins pour leurs réponses.
    J'aimerais vous redonner la parole, monsieur Leuprecht, pour poursuivre notre discussion sur certains éléments que vous avez mentionnés dans votre déclaration préliminaire par rapport aux façons de renforcer la résilience étant donné ce qui est exigé des Forces armées canadiennes et par rapport aux programmes existants pour pallier cette crise. Il va de soi que beaucoup plus d'outils doivent être mis en œuvre.
    Selon vous, serait‑il pertinent de nous doter d'une force distincte, comme celle que vous décrivez, qui serait chargée d'intervenir directement suite aux catastrophes naturelles, de renforcer la résilience climatique et de veiller à la sécurité et la réinstallation des réfugiés internationaux et des réfugiés climatiques ici au Canada? Les Forces armées canadiennes se sont déjà engagées à s'acquitter d'une partie de ce mandat dans le cadre du programme de l'EICC. Je suis persuadé que vous êtes très au fait de ce programme. De quels types de capacités une telle force aurait-elle besoin pour offrir une aide constructive à nos alliés en temps de crise, particulièrement lors de crises et de catastrophes environnementales à l'étranger?
    Les données indiquent qu'on fait le plus appel aux Forces armées canadiennes pour leurs manœuvres, leur capacité de transport et leur expertise spécialisée. La capacité des Forces armées canadiennes d'offrir du transport adéquat en temps voulu... En règle générale, les ONG ne pourront probablement pas fournir de transport, et la capacité du secteur privé sera limitée à cet égard. Ce sera toujours une fonction dont une institution de l'État, soit l'Aviation royale canadienne ou d'autres entités, devra s'acquitter.
    Il faut sérieusement réfléchir à certaines capacités spécialisées parce que, à titre d'exemple, les Forces armées canadiennes n'ont pas de ressources supplémentaires en santé qu'elles peuvent simplement déployer dans les provinces. On n'est pas très avancés lorsqu'on retire du personnel d'opérations en cours pour les envoyer dans les provinces. Nous devons examiner minutieusement le transfert de capacités spécialisées qui donnent en fait lieu à des jeux à somme nulle et nous assurer que les ONG et les secteurs civils détiennent ces capacités afin de ne pas retirer le personnel des Forces armées canadiennes d'opérations en cours, au pays ou à l'étranger. Nous pourrons ainsi immédiatement intervenir aux urgences nationales et répondre aux besoins.
    J'ajouterai un élément. Vous venez de l'Alberta, alors vous êtes au courant des défis qu'ont posés les inondations de Fort McMurray. C'est un exemple éloquent d'une infrastructure essentielle qui ne reçoit pas l'attention nécessaire. Le projet accuse des années de retard. La catastrophe aurait pu être évitée si les échéanciers avaient été respectés et si on s'était engagé à bâtir l'infrastructure pour protéger la municipalité. Or, ce n'était pas une priorité politique.
    Il vous reste 15 secondes.
    J'aimerais vous remercier, monsieur Leuprecht, d'avoir mentionné Fort McMurray. Il est évident qu'il y a là un gigantesque déficit en infrastructures, mais je vais faire un autre suivi.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur Tolmie, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie de me permettre d'être ici aujourd'hui. Comme je suis nouveau à ce comité, j'aimerais qu'on m'éclaire quant à certains concepts qui ont été expliqués pour déterminer si je suis sur la même longueur d'onde que mes collègues sur le plan philosophique. Certains d'entre eux ont posé des questions que j'ai du mal à accepter.
    Selon ma vision, à moi qui ai servi dans les Forces canadiennes, le militaire a une mission, soit de défendre notre pays. Les ONG, pour leur part, ont une mission distincte, c'est‑à‑dire d'offrir de l'aide et de porter secours en cas de catastrophe. Le flou réside dans le fait que le militaire est en mesure, en raison de ses effectifs, de son équipement et de sa souplesse, de prêter main-forte aux ONG.
    Êtes-vous d'accord, monsieur Goodyear, en vous appuyant sur certains de vos propos?
    Je suis d'accord, monsieur Tolmie. C'est la raison pour laquelle je dis souvent que le militaire semble être la première ligne de défense parce qu'il est composé d'hommes et de femmes sur le terrain.
    Comme certains de mes collègues l'ont mentionné, il est possible qu'il faille avoir recours au militaire pour certaines compétences spécialisées, mais, en règle générale, l'aide des Forces armées canadiennes n'est pas nécessairement indispensable lorsqu'on fait appel au palier fédéral: il faut avoir des effectifs sur le terrain. Selon moi, les ONG peuvent souvent répondre à la demande, et il n'est pas nécessaire de s'adresser d'abord au militaire.
    Pour reprendre vos propos, le mandat du militaire est d'abord de défendre notre pays. Un grand nombre d'ONG interviennent suite à des catastrophes depuis plus de 100 ans et sont déjà présentes dans de nombreuses communautés d'un océan à l'autre.

  (1825)  

    On emploie l'expression « changement d'orientation de mission » pour désigner l'élargissement du mandat d'une organisation. Il en résulte une mission édulcorée. La mission des Forces armées canadiennes est de défendre notre pays, et je le crois ardemment.
    Je vais changer de sujet. Monsieur Burns, vous êtes dans une position unique. Diriez-vous que les catastrophes avec lesquelles vous composez sont propres à certaines régions?
    Non. Il est certain que le Yukon a un contexte particulier en raison de la distance qui le sépare des autres régions du pays, mais, à l'instar des autres zones canadiennes, nous sommes affligés par des feux de végétation et des inondations majeures. Le nombre de phénomènes comme des glissements de terrain et des tremblements de terre augmentent et ravagent les infrastructures essentielles.
    Non, je ne pense pas que notre situation est unique. Ces problèmes ne se limitent pas au Yukon.
    Je pourrais peut-être reformuler la question. Diriez-vous que les problèmes que vous voyez se répètent?
    Oui, je dirais qu'ils se répètent. Plus tôt dans la réunion, j'ai fait allusion au programme rigoureux pour les feux de végétation. Il existe parce que ces catastrophes se produisent naturellement dans notre environnement.
    Ce qu'il faut faire, et ce que nous faisons très vigoureusement au Yukon, est d'adopter une approche de prévention et d'atténuation. Nous savons que des incendies se déclareront dans nos communautés. Nous pouvons bâtir des infrastructures pour nous protéger de ces incendies, par exemple des sphères de protection et des zones de réduction du risque de feu qui forment une infrastructure autour de nos communautés pour réduire le risque. De même, lorsque je pense aux inondations qui nous ont affligés l'an dernier et cette année ainsi qu'à l'histoire du Yukon, je vois que certaines de nos communautés se sont entourées d'infrastructures pour se protéger.
    Nous allons miser sur cette solution, tout en reconnaissant que ces problèmes ne devraient pas nous surprendre. Nous devons nous rendre à l'évidence: ces inondations seront plus fréquentes, et il faut nous armer d'une approche pour intervenir à l'avance, ce qui est possible avec des infrastructures appropriées et une bonne dose de coordination bien calibrée dans nos interventions.
    Il vous reste 30 secondes, monsieur Tolmie.
    D'accord, merci.
    J'ai une dernière question pour M. Leuprecht. Selon la perspective que le militaire a un mandat et que notre nation connaît des difficultés, diriez-vous qu'il serait acceptable de nous doter d'une organisation distincte du militaire pour les interventions d'urgence plutôt que de mêler les mandats et de créer des zones d'ombre?
    Je vais vous permettre de répondre, monsieur Leuprecht, mais nous n'avons pas beaucoup de temps.
    Il serait certainement avantageux de créer une telle organisation. Je crois que ce devrait être un objectif à moyen terme. La plupart des pays démocratiques ont une organisation de la sorte — et le Canada est un immense pays peu peuplé qui connaît beaucoup de difficultés liées, entre autres, aux changements climatiques, — mais je ne pense pas que l'organisation peut être créée à court terme.
    L'approche doit avoir deux volets: d'une part, il faut déterminer ce que nous voulons que les Forces armées canadiennes fassent à court terme et comment elles doivent intervenir dans le contexte. D'autre part, il faut définir ce que le gouvernement doit accomplir à moyen terme. À moyen terme, je pense notamment à la prévention et à des investissements beaucoup plus costauds en infrastructures essentielles et en coordination avec les ONG — le centre des feux de forêt est un exemple. Ce sont là de bons modèles à suivre, plutôt que de simplement affirmer que les Forces armées canadiennes ne devraient pas être impliquées: nous pouvons affirmer qu'elles ne devraient pas l'être, mais le fait est que quelqu'un doit être en mesure d'intervenir lorsque la population est en détresse.

  (1830)  

    C'est maintenant le tour de Mme Lambropoulos pendant cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui pour répondre à nos questions et d'avoir fait preuve de souplesse quant à l'heure.
    Ma première question s'adresse à vous, monsieur Goodyear, et je suis désolée si vous y avez déjà répondu. De nombreuses régions de notre pays sont affligées par une pénurie de main-d'oeuvre. J'aimerais que vous nous indiquiez si les ONG ont eu du mal à trouver des volontaires et du personnel, et si c'est un de vos principaux défis à l'heure actuelle.
    C'est une excellente question. Je pense que les ONG vivent différents scénarios. Pendant la pandémie notamment, nous avons été confrontés à des défis en raison de la capacité des gens à se rendre sur le terrain, des taux de vaccination et de tous les problèmes qui se sont manifestés au début de la crise sanitaire. Dans bien des cas, les gens veulent aider leur prochain, et les ONG constatent que nombreux sont ceux qui tentent d'être utiles et veulent porter secours lorsqu'une crise survient. On voit aussi des séances de préparation de dernière minute pour former les volontaires et ainsi augmenter l'effectif. Je crois que c'est formidable de pouvoir compter sur des volontaires. Nombre d'entre eux ont suivi des formations plus poussées et sont clairement prêts à donner de leur temps.
    Je dirais que notre réseau d'ONG compte des milliers et des milliers de volontaires formés d'un océan à l'autre.
    C'est merveilleux. Je suis contente de l'entendre.
    Ma prochaine question s'adresse elle aussi à vous. Quel lien devrait unir les forces armées et les ONG? Je sais que vous avez déjà répondu à cette question à maintes reprises, mais je m'intéresse davantage à l'angle de la formation. Selon vous, les ONG et la population canadienne tireraient-elles profit d'ONG formées par les forces armées dans certains domaines, ou les ONG sont-elles en fait mieux outillées que le militaire à cet égard?
    Je crois que la réponse dépend du rôle et qu'il faut miser sur le transfert d'apprentissage. Il ne faut pas mettre tous nos oeufs dans le même panier: il nous faut les deux réseaux, qui doivent s'entraîner ensemble dans des scénarios précis.
    Bon nombre de nos ONG qui ne datent pas d'hier ont des liens avec le militaire qui remontent à la Première et à la Deuxième Guerre mondiale: elles ont appuyé nos soldats sur le terrain, alors un grand nombre de relations perdurent. Je crois qu'il faut mettre les formations en commun pour déterminer quelles compétences le militaire peut inculquer aux ONG pouvant aider et déterminer si celles‑ci peuvent contribuer à une formation commune et définir les rôles de chacun afin d'établir un peu plus clairement les capacités qui sont disponibles.
    Merci beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Burns. En tant que membre du gouvernement d'un territoire, vous avez affirmé souvent devoir vous fier à des ressources externes afin de remédier aux catastrophes naturelles qui frappent le Yukon. Vous avez mentionné que les forces armées sont actuellement votre ressource de prédilection lorsque vous avez épuisé toutes les autres. Si ce n'était plus possible parce que le militaire ne s'acquittait plus de ce rôle ou se concentrait davantage sur son rôle de combat pour se détourner des besoins au pays, que devrait fournir le gouvernement fédéral pour appuyer les provinces et les territoires, en plus de ce que vous avez déjà mentionné jusqu'à présent?
    Merci de la question, qui est intéressante.
    Pour y répondre, je ferai référence au modèle du Centre interservices des feux de forêt du Canada qui offre une méthode rigoureuse de partage des ressources entre provinces impliquant de comprendre les besoins de chacune en matière d'état de préparation et d'intervention suite aux feux de végétation. Le Centre permet aussi de savoir quelles ressources peuvent être acheminées d'une région à l'autre du pays en vertu d'ententes déjà conclues afin de nous organiser de façon structurée et de déterminer comment se rembourser. Ce serait une approche à privilégier à mon avis.
    Une autre approche en serait une qui s'apparenterait à ce que nous avons au Yukon. Je ne sais pas exactement s'ils sont aussi présents dans les autres administrations, mais nous avons des Rangers canadiens dans notre territoire. C'est un groupe de réservistes. Un type de groupe de réservistes en partenariat avec des ONG pourrait peut-être être formé pour offrir cette aide.
    il vous reste 20 secondes, madame Lambropoulos.
    Je cède mon temps de parole.
    À nouveau, j'aimerais remercier chaleureusement tous nos témoins.

  (1835)  

    Nous allons maintenant passer aux tours de deux minutes et demie avec Mme Normandin, puis M. Desjarlais.
    Nous allons débuter avec vous, madame Normandin.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Ma question s'adresse surtout à MM. Burns et Goodyear.
    Compte tenu de l'augmentation de la demande, plusieurs témoins nous ont rappelé qu'utiliser les forces est une option de dernier recours.
    Dans des cas de crises liées aux changements climatiques, si on faisait de plus en plus appel aux Forces armées canadiennes à la dernière minute, alors qu'aucune autre voie n'était possible, qu'est-ce que cela impliquerait pour vous?

[Traduction]

    À qui la question s'adresse‑t‑elle?
    Je crois qu'elle m'était adressée. Je vous remercie de la question.
    J'espère ne pas avoir été trop ambitieux dans mon désir d'écouter et de comprendre la question en français. Si je ne m'abuse, vous m'avez demandé ce que je ferais si nous devions nous assurer que les Forces armées canadiennes sont une option de dernier recours. C'est un point important. C'est ainsi que je vois les choses au Yukon.
    Je pense qu'il est nécessaire d'investir dans notre territoire et dans notre province, de disposer de nos propres ressources suffisantes et bien établies, et d'avoir une bonne intégration de nos ONG dans notre structure d'intervention d'urgence. De plus, d'un point de vue économique, j'estime qu'il est très important de réfléchir à la participation du secteur privé aux interventions. Beaucoup d'argent peut être dépensé et il existe une grande expertise sur laquelle nous aimerions nous appuyer et que nous aimerions aussi développer. Je crois que cela a déjà été dit, mais ce ne sont pas l'énergie et les volontaires qui manquent.
    Nous devons veiller à ce que ces ressources soient bien organisées et disponibles. Voilà comment, selon moi, nous pouvons nous assurer que les forces armées demeurent une option de dernier recours. Si nous en sommes au point de faire appel aux forces armées, je pense que nous devons veiller à ce qu'elles puissent être là pour nous et être bien formées pour répondre à nos besoins afin qu'elles puissent être intégrées dans notre système et combler les lacunes que nous ne pouvons combler. Comme je l'ai dit, je pense qu'au moment où nous faisons appel aux forces armées, nous avons besoin d'un plan exhaustif... du type: venez nous débarrasser de ce problème du point de vue de la logistique, des opérations et de la gestion, je vous prie.
    J'espère avoir répondu à votre question.
    Il vous reste 10 secondes.

[Français]

     J'aurais aimé reposer ma question différemment, mais je pense que je n'aurai malheureusement pas le temps.
    Je m'excuse.
    Il n'y a pas de problème.

[Traduction]

    Allez‑y, monsieur Desjarlais. Vous disposez de deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Si possible, j'aimerais reprendre ma discussion sur l'infrastructure avec M. Leuprecht là où nous l'avions laissée.
    Pour en revenir au point soulevé par M. Tolmie, je pense qu'il serait responsable qu'un jour le Canada prenne en charge le travail de réponse à la crise climatique, d'adaptation et tout cela au lieu des Forces armées canadiennes afin qu'elles puissent continuer à faire le travail qu'elles sont censées faire ailleurs. À bien des égards, j'estime que les forces armées sont une option de dernier recours pour obtenir de la main-d'œuvre. Elles sont le dernier recours pour ceux qui vont défendre les Canadiens au pays.
    À court terme, je comprends tout à fait la nécessité de veiller à ce que nous fournissions davantage de ressources pour continuer de soutenir les Forces armées canadiennes afin qu'elles puissent continuer d'aider les Canadiens qui en ont le plus besoin lorsqu'elles sont disponibles. En ce qui concerne l'avenir, il faudra réfléchir au type de financement, de programmes et de services de base nécessaires pour répondre à ce genre de catastrophes de façon responsable. Combien de temps pensez-vous qu'il faudra à un pays de la taille du Canada pour faire ce travail? De quel type d'investissement parlons-nous par rapport au PIB, par exemple?
    Il ne s'agit pas d'un investissement énorme, car, comme l'ont déjà dit nos collègues, une grande partie de ces initiatives est menée par des bénévoles. Le défi, c'est d'avoir la bonne capacité d'appoint au bon moment. À l'heure actuelle, nous ne disposons pas d'un bon modèle pour envoyer les bonnes personnes au bon endroit au bon moment. Les Forces armées canadiennes sont essentiellement devenues l'option de dernier recours pour fournir cette capacité d'appoint jusqu'à ce que d'autres organisations puissent prendre la relève quand personne ne se mobilise.
    Cela ne concerne pas seulement les ONG. Par exemple, vous vous souviendrez peut-être qu'au début de la pandémie, les Forces armées canadiennes ont apporté leur aide pour évacuer des Canadiens qui étaient alors en quarantaine sur la base de Trenton. Une autre entité était censée faire ce travail, mais elle n'a pas été en mesure de le faire à temps, et donc les Forces armées canadiennes sont intervenues, pas parce qu'elles y tenaient absolument, mais parce qu'il n'y avait personne d'autre pour le faire.
    D'autres personnes doivent être réellement capables d'intervenir rapidement et à point nommé. Pour revenir au point soulevé par Mme Normandin, oui, nous parlons des Forces armées canadiennes comme d'une option de dernier recours, mais si vous examinez mon étude, madame Normandin, vous verrez que les gouvernements provinciaux et territoriaux font de plus en plus appel aux Forces armées canadiennes, même lorsque nous pouvons démontrer empiriquement qu'ils n'ont pas épuisé toutes leurs ressources. Les forces armées sont essentiellement considérées comme une organisation d'intervention pour des mesures semi-urgentes.
    Il est important que le gouvernement établisse de façon nettement plus claire qu'il est inacceptable d'utiliser les Forces armées canadiennes comme une organisation d'intervention pour des mesures d'urgence provinciales afin de compléter les capacités. Les forces armées doivent être une option de dernier recours. Le problème, c'est que c'est de moins en moins le cas.

  (1840)  

    J'aimerais remercier tous nos témoins. Vous avez été incroyables, en restant avec nous malgré tous les changements. Je sais que vous avez témoigné d'un peu partout, du Yukon à l'Europe. J'ignore quelle heure il est là‑bas, professeur. Merci beaucoup de votre attention et du temps que vous nous avez accordé. Vous avez grandement contribué à notre étude sur un sujet très important. Vous nous avez fait part de votre temps et de votre expertise, et nous vous en sommes très reconnaissants.
    Cela dit, la séance est levée.
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