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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 009 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 2 mars 2022

[Enregistrement électronique]

  (1620)  

[Français]

    Bonjour à tous et à toutes.

[Traduction]

    Bienvenue à la 9e séance du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes.

[Français]

    La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le jeudi 25 novembre 2021. Les membres peuvent y participer en personne ou au moyen de l'application Zoom. Les délibérations sont diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. À titre d'information, la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle plutôt que l'ensemble du Comité.

[Traduction]

    Compte tenu de la pandémie qui sévit actuellement et conformément aux recommandations des autorités sanitaires et à la directive émise par le Bureau de régie interne le lundi 14 février 2022, pour rester en santé et sécurité, toutes les personnes qui assistent à la séance en personne doivent maintenir une distance de deux mètres et porter un masque non médical lorsqu'elles circulent dans la pièce. Il est fortement recommandé d'en porter un en tout temps, y compris en position assise. Vous devez également maintenir une hygiène adéquate des mains en utilisant le désinfectant prévu à cette fin dans la pièce.

[Français]

    En tant que président du Comité, je ferai appliquer ces mesures pendant toute la durée de la réunion, et je remercie à l'avance les membres du Comité de leur excellente coopération.
    Pour ceux qui participent à la réunion de façon virtuelle, je voudrais énoncer quelques règles à suivre.
    Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Des services d'interprétation sont disponibles pendant la réunion. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre les options suivantes: le parquet, l'anglais et le français. Si vous n'entendez pas l'interprétation, veuillez immédiatement m'en informer — vous pouvez m'interrompre pour le faire. Nous veillerons à ce que l'interprétation soit correctement rétablie avant de reprendre les travaux.
     Pour ce qui est des députés qui participent à la réunion en personne, ils peuvent procéder comme ils le feraient habituellement lorsque l'ensemble du Comité se réunit dans une salle de réunion.
    Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Ceux qui participent à la réunion par vidéoconférence doivent cliquer sur l'icône du microphone pour activer leur micro. En ce qui concerne ceux qui sont dans la salle, leur micro sera contrôlé par la technicienne ou le technicien chargé des procédures et de la vérification, comme d'habitude.
    Je rappelle que tous les commentaires des membres du Comité doivent être adressés à la présidence. Lorsque vous parlez, faites-le lentement et clairement. Lorsque vous ne parlez pas, votre micro doit être en sourdine.
    En ce qui concerne la liste des intervenants, la greffière du Comité et moi-même ferons de notre mieux pour maintenir l'ordre de parole des députés, qu'ils participent à la réunion de manière virtuelle ou en personne.

[Traduction]

    Si des problèmes techniques surviennent, veuillez m'en aviser. Sachez que nous pourrions devoir suspendre la séance quelques instants pour assurer la participation pleine et entière de tous les membres du Comité.

[Français]

    Conformément à l'article 108(3)f) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 31 janvier 2022, le Comité reprend son étude sur l'immigration francophone au Canada et au Québec.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins qui prendront la parole au cours de la première heure de la réunion.
    Avant d'aller plus loin, je voudrais souligner que, bien qu'il y ait des votes à la Chambre, notre équipe extraordinaire, composée de l'analyste, de la greffière, des techniciens et des interprètes, a réussi à étirer le temps. À mon avis, et si le Comité y consent, la réunion pourra être d'une durée de deux heures. Nous verrons, mais l'équipe est disponible pour une réunion de deux heures.
    Monsieur le président, j'aimerais poser une question.
    Monsieur Godin, vous avez la parole.
    Nous venons d'apprendre qu'il y aura un appel au vote à 16 h 49; le vote aura lieu à 17 h 20. Cela vient court-circuiter votre plan.
    J'aimerais que nous ayons un plan pour les deux groupes de témoins. Moi, je suis disponible pour rester un peu plus tard, mais mon horaire ne me permet malheureusement pas de rester ici deux heures de plus.
     J'aimerais vérifier ce qu'il en est auprès des autres membres du Comité.
    La réunion se terminera à 18 h 15; on ne demande pas d'ajouter deux heures à la réunion.
    Le problème, c'est que...
    Ce que nous pourrions faire...
    Chers messieurs et mesdames, lorsque les cloches sonnent, nous pouvons continuer la réunion, si tous les membres sont d'accord. Ce n'est que pendant le vote que nous devons voter.
     Monsieur le président, je suis bien d'accord avec vous. Le problème, c'est que nous allons entendre le premier groupe de témoins, mais peut-être pas le deuxième.
    Je veux simplement que nous prenions une décision maintenant, par respect pour nos deux groupes de témoins. Voulons-nous raccourcir la période prévue pour le premier groupe pour accorder du temps au deuxième groupe?
    Je propose que nous nous entendions pour continuer jusqu'à 18 heures, en sachant qu'il se peut que certains membres doivent nous quitter avant cela.
    De toute façon, nos règles nous permettent de continuer après cela, pour ceux qui peuvent rester.
    Malheureusement, je ne peux pas rester plus tard que 18 heures, et mon collègue doit partir à 17 h 50. Alors, visons 18 heures.
    D'accord. Ce que je dis, c'est que nos règles nous permettent quand même de continuer d'entendre des témoignages même si des gens doivent partir.
    Est-ce le cas même s'il n'y a pas quorum?
    Oui, puisqu'il n'y a pas de vote.
    Sans plus tarder, nous allons procéder. Nous essaierons de terminer la première partie de la réunion vers 17 h 15 et de passer ensuite au deuxième groupe de témoins.
    Je prie les témoins de nous excuser. C'est toujours chamboulé comme cela, quand il y a des votes.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à notre premier groupe de témoins. Au cours de la première heure, nous recevons, par vidéoconférence, Me Stéphane Handfield, avocat chez Handfield et Associés, ainsi que Mme Honorine Ngountchoup, agente de soutien à l'accueil et à l'intégration des étudiants et étudiantes internationaux du Collège communautaire du Nouveau‑Brunswick. Ils témoigneront tous deux à titre personnel.
    Enfin, nous recevons des représentants de l'Asssemblée de la francophonie de l'Ontario: le président, M. Carol Jolin, le directeur général, M. Peter Hominuk, et M. Bryan Michaud, analyste de politique.
    Chacun de vous disposera d'un maximum de cinq minutes pour faire sa présentation, après quoi nous procéderons à une série de questions. Je vous ferai signe lorsqu'il vous restera une minute.
    Maître Handfield, vous avez la parole.

  (1625)  

    Je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui.
    Je suis membre du Barreau du Québec depuis 1992. J'ai été commissaire à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada pendant 11 ans. De 2012 à 2015, j'ai été chargé de cours au Cégep de Saint‑Laurent dans le programme de Techniques administratives - Service-conseil en immigration. Je suis membre de l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l’immigration ainsi que de l'Association des avocats de la défense de Montréal.
    Je pratique exclusivement dans le domaine du droit de l'immigration chez Handfield et Associés, Avocats. J'exerce également la fonction d'inspecteur au Service de l'inspection professionnelle du Barreau du Québec. J'ai collaboré à l'ouvrage Démantèlement tranquille, paru aux Éditions Québec Amérique en 2018. Je suis l'auteur du livre Immigration et criminalité au Canada : Quand l'expulsion devient inévitable, qui a été publié par la maison d'édition Wilson & Lafleur en 2020, ainsi que du livre Fatima : le parcours d'une réfugiée, qui a été publié en 2021, également par la maison d'éditon Wilson & Lafleur.
    Au cours des 30 dernières années, j'ai souvent dû faire face au non-respect de la langue française en matière d'immigration, et ce, dans le cadre de diverses instances. Cela s'est produit aussi bien à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié qu'à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada ou encore à l'Agence des services frontaliers du Canada. J'ai été à même de constater que cette situation s'amplifiait depuis plusieurs années. Voici quelques exemples.
     Dans le cadre de l'audience d'un demandeur d'asile, la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a tenté de m'empêcher de recourir à la langue des procédures choisie par mon client, en l'occurrence le français. La Cour fédérale a dû intervenir afin de faire respecter le choix de mon client, ce qui a mobilisé du temps et de l'énergie qui auraient pu être investis d'une bien meilleure façon.
     Il a été impossible de communiquer en français avec des agents du greffe de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, au bureau régional de Toronto, alors que plusieurs dossiers de demandeurs d'asile de Montréal avaient été transférés à ce bureau.
    Pas plus tard qu'hier, dans le dossier d'un demandeur d'asile, à Montréal, alors que la langue des procédures était le français, il a été impossible d'avoir recours aux services d'un interprète francophone pour traduire du français à la langue maternelle du demandeur d'asile. Seul un interprète anglophone avait été assigné au dossier.
    Il n'est pas rare de recevoir d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada une communication de 12 lignes contenant pas moins de 17 fautes de français.
    Tout récemment, j'ai reçu d'un agent d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada des motifs écrits d'une décision concernant une demande de résidence permanente comportant des considérations d'ordre humanitaire. Or cette communication était uniquement en anglais, alors que la demande avait été soumise en français et que la langue de correspondance choisie était le français.
    Les motifs d'une décision d'un agent affecté à l'examen des risques avant renvoi ont été envoyés uniquement en anglais, alors que la demande et les arguments écrits avaient été soumis en français et que la langue des procédures choisie par le client était le français.
    Recevoir de la part d'un agent d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada de la correspondance uniquement en anglais dans le cadre d'un dossier de regroupement familial, alors que le dossier a été soumis en français et que la langue de correspondance choisie était également le français, est chose courante.
    Malheureusement, il ne semble pas s'agir de cas d'exception ou isolés, mais plutôt d'une tendance qui prend racine. On peut donc soulever l'hypothèse voulant qu'il y ait de la de discrimination envers les francophones dans le domaine de l'immigration.
    Comme je pratique depuis 30 ans le droit de l'immigration, je pourrais continuer à vous donner des exemples de cas où la langue française a été bafouée par les autorités de l'immigration au Canada au profit de la langue anglaise.
    Par conséquent, il m'apparaît que l'intervention du gouvernement afin de faire respecter le français devant les diverses instances de l'immigration est plus urgente que jamais.
    Je vous remercie de votre attention.

  (1630)  

    Merci beaucoup, maître Handfield. Vous avez réussi à faire votre présentation en trois minutes et demie. C'était très bref.
    Je vais maintenant céder la parole à Mme Honorine Ngountchoup pour cinq minutes.
    Je m'appelle Honorine Ngountchoup. Je suis originaire du Cameroun, et je suis arrivée au Canada en 2016.
    En tant qu'immigrante francophone, je me considère comme Canadienne étant donné ma présence, mes implications communautaires et mon amour pour le Canada.
    Je suis membre de conseils d'administration aux niveaux provincial, régional et local. J'ai un travail à temps plein et je suis mère monoparentale d'un garçon né au Canada. J'ai instauré une initiative pour donner le goût à ma région de découvrir ma culture, pour permettre aux nouveaux arrivants de retrouver un peu de ce qu'ils ont laissé en venant s'installer au Canada et pour rassembler tous les francophones et francophiles de notre beau pays. Par ma personnalité, mon bagage, ma vision et mon entrepreneuriat, j'enrichis le contenu culturel de ma province. Les murales que j'ai réalisées pour la francophonie et pour consolider les peuples et les vécus sont nombreuses.
    Je fais partie du collectif du Festival international de Slam/Poésie en Acadie et j'anime depuis quatre ans une émission intitulée Francophone à Sommet FM afin de promouvoir la langue française. Cela fait de moi une actrice de l'expansion de la langue française. Mon apport dans ma communauté et dans la province a été qualifié d'exceptionnel. À ce titre, j'ai reçu, en 2009, le prix de la direction du campus du Collège communautaire du Nouveau‑Brunswick à Campbellton, le CCNB, et, en 2020, le prix de championne de la diversité culturelle, catégorie individu, du Conseil multiculturel du Nouveau‑Brunswick. Je continue de m'impliquer dans des projets communautaires, artistiques et littéraires de ma province.
    Dernièrement, j'entends beaucoup parler du racisme systémique. Est-ce que je le vis? La question est là. Est-ce que je saurais le reconnaître en tout temps? Je ne le sais pas, car cette notion est toute nouvelle pour moi. Est-ce que j'ai le sentiment de vivre des injustices à cause de mon statut d'immigrante? Ma réponse est oui.
    Il m'est impossible de parler de mon parcours d'immigrante en cinq minutes, alors je vais le résumer dans ce slam:
    


Décision finale

22 septembre 2021
Nous regrettons de vous informer que vous ne répondez pas aux critères d'admissibilité. Veuillez consulter la décision finale ci-dessous.
La nouvelle est tombée comme un coup de massue
En plein dans ma tête
En plein dans mon cœur
Qui palpite de peur
À la vue de la dernière heure
Qui vient à l'instant de sonner

Je veux savoir le pourquoi de « nous regrettons. »
Et puis je clique
Je regarde et souhaite que ce ne soit qu'un hic
Statut de la Demande: Refusé
Comment ça refusé?
Qui a bien pu valider le refusé
Alors que je bosse fort pour mériter
Le statut accepté

Clic sur lettre de refus
Cette page ne fonctionne pas
Services en ligne CIC a envoyé une réponse incorrecte
Actualiser 10, 20, 100 fois
100 malheureux vœux envoyés à l'univers
Rêvant qu'un miracle mette le verdict à l'envers

Car fatiguée
Je me sens épuisée
De remplir les énoncés
Qui un jour, m'offriront la citoyenneté

Pourquoi impitoyables sont-ils?
Pourquoi en sourdine se mettent-ils
Pourquoi, la réalité ignorent-ils?
De notre volonté, doutent-ils?

Ne dit-on pas que la vérité affranchie?
Ma vérité ne m'a pas blanchie
Vu que mon parcours est riche
Ça m'a pris tes jours pour remplir mes fiches
À vivre des traumatismes, mais ils s'en fichent

Demande refusée ne peut pas être mon issue
Croyez-moi
Je ne suis pas coupable du fossé
Je ne suis pas coupable malgré l'énoncé
Je suis coupable de mon envie d'exister
Coupable de ma volonté
Coupable de ma soif de liberté
Par-dessus tout, coupable de ma vérité

Celle que j'ai nourrie un jour
À vouloir voir le jour
Dans ce pays où il fait « bons jours »

Message pour IRCC
En prenant la prochaine décision finale
Pensez que l'avenir de mon fils n'est pas banal
Pensez que je n'ai pas eu de repos depuis un bail
Et pensez qu'ici, c'est déjà mon bercail

Une chose est certaine
J'ai surmonté des migraines
J'ai souffert le comble de ma peine
J'ai foi, qu'au bout de mes peines
J'en sortirais Reine

Décision finale

Slam

    Pour atteindre la cible fixée à 4,4 %, IRCC doit élucider la question du test de français. J'ai échoué à une épreuve de français, et il m'a fallu payer de nouveau et refaire l'évaluation au complet avant de déposer ma demande de résidence. Ce fut un coup dur, car on m'a toujours dit que mon niveau de français était excellent. J'ai grandi, étudié et travaillé en français. Même si on réussit ce test, la validité de deux ans de ce test est un stress supplémentaire.
    Certains services d'IRCC doivent être décentralisés, comme l'enregistrement des données biométriques et les examens médicaux. Service Canada et les hôpitaux des régions rurales qui accueillent de plus en plus de francophones peuvent offrir des services et nous épargner des voyages de 8 à 10 heures de route pour des rendez-vous qui durent entre 5 et 40 minutes.
    La capacité financière est aussi un frein pour les francophones enrichissants, impliqués et présents sur le sol canadien. L'accès au site d'IRCC est une question de chance, et parler à un agent au téléphone est un exploit. Tous ces aspects mettent la santé mentale des immigrants en danger durant tout ce parcours vers la résidence permanente.
    Vivement que des solutions concrètes soient prises!
    Je vous remercie, monsieur le président.

  (1635)  

    Merci, madame Ngountchoup.
    Le président de l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario, M. Jolin, a maintenant la parole.
    Bonjour à toutes et à tous.
    J’aimerais d’abord vous remercier d’avoir invité l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario à venir témoigner dans le cadre de vos travaux sur l’immigration francophone au Canada. En tant qu’organisme, nous représentons près de 744 000 Franco-Ontariennes et Franco-Ontariens.
    Je tiens aussi à souligner que je suis aujourd'hui accompagné du directeur général de l’AFO, Peter Hominuk, et de notre analyste politique, Bryan Michaud.
    Nous sommes heureux de constater que le gouvernement du Canada reconnaît l’importance de l’immigration francophone au Canada. La survie de la communauté franco-ontarienne dépend grandement de l’immigration de personnes d’expression française.
    De plus, j'aimerais souligner les avancées proposées dans le projet de loi C‑13. Le texte de loi précise que la politique doit inclure une cible et des mesures de reddition de comptes. Il serait intéressant de l'amender afin de clarifier l'objectif précis de la nouvelle politique. La loi ne fait pas ce que le gouvernement dit en matière d'immigration.
    Au cours des dernières années, nous avons vu des initiatives avoir une incidence positive sur l’accueil et la rétention des nouveaux arrivants. L’accueil pour les francophones à l’aéroport Pearson, les améliorations au système Entrée express et la désignation de trois communautés francophones accueillantes ont eu des effets intéressants en Ontario.
    Cependant, il reste du chemin à faire. C'est pourquoi nous profitons de cette occasion pour souligner quelques défis auxquels fait face la communauté franco-ontarienne: en Ontario et partout au pays, les cibles d'immigration francophone n’ont toujours pas été atteintes. De plus, nous constatons que des permis d’études sont refusés à des étudiants internationaux, surtout ceux en provenance de l’Afrique.
    Il y a quelques semaines, nos recteurs universitaires ont témoigné devant le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration. Ils ont souligné qu'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada refusait près de 70 % des demandes de permis d’études à celles et ceux souhaitant étudier dans les établissements postsecondaires de langue française en Ontario. L’une des raisons évoquées par les agents qui évaluent les demandes est qu’ils ne considéraient pas le fait de vouloir étudier en français à l’extérieur du Québec comme un cheminement acceptable.
    Au moment où nous sommes témoins de la mise en œuvre et de la transformation des universités francophones en Ontario, ce type d'argument est contre-productif par rapport à ce que nous tentons d’accomplir dans notre province. Nos universités, en plus de devoir servir les francophones et les francophiles d’ici, sont des outils puissants de recrutement en immigration francophone. Le parcours postsecondaire en français en Ontario est un parcours valable et reconnu et entériné par les gouvernements du Canada et de l’Ontario.
    L’argument invoqué par les agents d’IRCC est reçu comme une gifle par notre communauté et par toutes les étudiantes et tous les étudiants qui fréquentent nos établissements postsecondaires. De plus, il semblerait que plusieurs étudiants se font refuser leur demande de visa parce qu'ils ont manifesté leur désir de travailler au Canada à la fin de leurs études. L’immigration francophone nourrit et enrichit nos communautés, en plus d’augmenter le bassin de main-d'œuvre francophone.
    Nous vivons actuellement une pénurie de main-d'œuvre francophone en Ontario, accentuée par la pandémie que nous traversons, et nous croyons que l'accueil d'étudiantes et d'étudiants internationaux francophones dans nos établissements est une partie importante de la solution.
    Les étudiants internationaux francophones qui fréquentent nos établissements reçoivent une expertise canadienne et renforcent nos communautés de langues officielles en situation minoritaire. La formation offerte en Ontario assurerait la réussite de leur intégration professionnelle, économique, sociale et culturelle s’ils décident de soumettre une demande de résidence permanente. Leur réussite constitue un élément clé pour la vitalité de la francophonie ontarienne et pour l’avenir de la province.
    Le contexte de la pandémie actuelle a plombé l’immigration partout au pays. Cette situation se fait encore plus sentir dans le contexte minoritaire francophone en Ontario. La province s’est donné une cible d’immigration francophone de 5 %, et le gouvernement fédéral, de 4,4 % à l'extérieur du Québec. Force est de constater que ces deux cibles sont loin d’être atteintes.
    Au troisième trimestre de 2021, en pleine pandémie, l’Ontario n’a accueilli qu’un peu plus de 2 % d’immigrants francophones. Cette statistique alarmante s’applique à l’ensemble du Canada. Pourtant, l’Ontario était parvenu à atteindre 4,09 % en 2020, ce qui était encourageant.

  (1640)  

    Depuis quelques années, la province de l’Ontario sélectionne plus de 5 % d’immigrantes et d’immigrants francophones par l'entremise de son seul programme d’immigration, soit le Programme ontarien des candidats à l’immigration. Il est de notre avis que le gouvernement fédéral devrait donner le pouvoir au gouvernement de l’Ontario de sélectionner davantage d’immigrantes et d’immigrants par l'entremise du Programme ontarien des candidats à l'immigration.. En retour, la province devrait s’engager à continuer de sélectionner au moins 5 % de candidates et de candidats francophones.
    Je vous remercie.
     Merci, monsieur Jolin.
    Je vous remercie.
    Nous allons entreprendre le premier tour de questions. Chaque personne qui posera des questions disposera de six minutes.
    Nous allons commencer par notre ami M. Joël Godin.
    Monsieur Godin, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je profite de l'occasion pour remercier les témoins de leur patience dans des situations assez particulières, comme lorsqu'il y a des votes à la Chambre des communes.
    Monsieur Handfield, vous êtes sur le terrain. Vous avez le privilège de côtoyer des clients, des gens qui ont besoin d'aide et d'accompagnement dans le processus d'immigration. Vous avez dit que les instances ne respectaient pas la langue française en immigration. Vous avez aussi parlé des interventions de la Cour fédérale.
    Ma question est simple: que devons-nous faire?
     Vous le vivez au quotidien et toutes les données et les indicateurs le démontrent: l'immigration francophone n'est pas respectée, comme vous l'avez dit.
    Pouvez-vous nous donner des pistes de solution pour régler ce problème, qui est majeur et qui, à mon avis, devient exponentiel?
    La Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada est un tribunal quasi judiciaire, donc c'est un peu difficile pour les parlementaires d'intervenir directement à ce niveau, j'en conviens. Cependant, que ce soit devant le ministère de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, ou IRCC, ou devant l'Agence des services frontaliers, le problème que je constate au cours des dernières années en matière de non-respect de la langue française, c'est que peu de recours s'offrent à nous pour faire respecter le choix de la langue du client. Outre une plainte au commissaire aux langues officielles, il n'y a pas beaucoup de recours. Cela m'amène à vous recommander d'assurer une reddition de comptes de la part des agents des services frontaliers ou d'IRCC.
    Lorsqu'on reçoit une décision uniquement en anglais dans un dossier qui a été soumis en français et où le client ne maîtrise pas du tout l'anglais, mais plutôt le français, il n'y a pas de conséquence. C'est un peu préoccupant et stressant pour un justiciable de recevoir une décision. Lorsque sa demande est acceptée, les conséquences sont moindres, mais, lorsque la décision est un refus et que le justiciable ne comprend pas du tout la nature de cette décision, on imagine le stress supplémentaire qui vient s'ajouter à cette décision.
    Monsieur Handfield, en écoutant votre intervention, j'ai eu envie de vous poser une question bien précise concernant la situation avant le 1er mars et après le er mars. Hier, on a déposé le projet de loi de modernisation de la Loi sur les langues officielles. Dans ce projet de loi, il y a un article concernant l'immigration francophone.
    Avez-vous eu le temps de prendre connaissance de ce projet de loi?
    Pas aujourd'hui, je suis désolé.
    Je vais vous citer l'article 44.1, en passant tout de suite au contenu:
44.1(2) La politique comprend notamment:

a) des objectifs, des cibles et des indicateurs;

b) un énoncé du fait que le gouvernement fédéral reconnaît que l’immigration est l’un des facteurs qui contribuent au maintien ou à l’accroissement du poids démographique des minorités francophones du Canada.
    Je pourrais lire la suite du projet de loi, mais pensez-vous que celui-ci peut vous donner des outils et permettre à vos clients d'avoir un accès équitable à la langue française comme langue utilisée pour défendre leur cause?
    Malheureusement, compte tenu du peu d'information que vous venez de me fournir, je dois répondre par la négative à votre question. Le fait qu'on souhaite avoir des seuils d'immigration francophone et qu'on tente de les atteindre par différents mécanismes ne fera pas en sorte que le français soit respecté dans les services offerts aux justiciables, donc aux candidats à l'immigration, que ce soit au ministère ou devant le tribunal.
    Je crois que des mesures plus concrètes devraient être prises pour faire respecter, une fois pour toutes, le français. Il est important de rappeler que cette situation que je vis n'est pas récente, c'est une situation qui perdure depuis de nombreuses années et qui semble malheureusement vouloir s'incruster.
    Tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas de mesures plus concrètes que ce que vous venez de mentionner, cette situation ne changera pas.

  (1645)  

     Merci, monsieur Handfield.
    Ma prochaine question sera brève et s'adresse à Mme Ngountchoup.
    Vous avez sûrement remarqué comme moi que, dans l'actualité, on rapporte que plus de 80 % des immigrants francophones venant d'Afrique sont refusés. Dans votre témoignage, vous avez manifesté le sentiment d'être un peu victime de racisme. Est-ce attribuable à votre pays d'origine ou à la langue que vous parlez?
    Vous avez 40 secondes, madame Ngountchoup.
    Je ne saurais dire si c'est en lien avec mon pays d'origine ou avec la langue que je parle, mais ce que je sais, par contre, c'est que j'ai eu le sentiment que ma demande avait été traitée de manière bâclée et sévère, sans aucune raison.
    Je vais vous donner un exemple concret. Lorsque j'ai fait ma demande de résidence permanente, l'agente qui traitait mon dossier m'a demandé de fournir des documents supplémentaires. Or, peu de temps après, elle m'a informée que ma demande était rejetée parce que je n'avais pas fourni ces documents. Visiblement, elle n'avait même pas pris le temps de vérifier si j'avais fourni les documents exigés avant de rejeter ma demande. Tout de suite, cela a été...
    Merci, madame Ngountchoup. C'est six minutes exactement. Je suis désolé de vous interrompre de la façon la moins impolie possible, mais vous pourrez continuer à répondre lorsqu'on vous adressera d'autres questions.
    Le prochain intervenant sur la liste est M. Drouin, pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais permettre à Mme Ngountchoup de compléter son intervention.
    D'accord.
    Tout de suite, quand j'ai déposé ma demande, on m'a demandé de fournir des documents supplémentaires, ce que j'ai fait. L'agente m'a répondu que ma demande avait été rejetée sans avoir vérifié si j'avais fourni les documents demandés. J'ai fait des démarches et plusieurs appels. J'ai fait toutes les démarches nécessaires pour soumettre ma demande à nouveau. Peu de temps après, ma demande a encore été refusée, au motif que je n'avais pas suffisamment démontré que je travaillais dans la catégorie d'emploi pour laquelle je postulais. J'ai eu le sentiment que l'agente responsable de mon dossier n'avait pas fait l'effort de m'appeler ou de m'écrire pour demander certaines informations. Le pire, c'est qu'on n'a pas de recours.
     J'aimerais souligner une autre injustice. Ma lettre de refus n'était pas dans mon compte IRCC, de sorte que je ne pouvais pas voir les raisons du refus de ma demande. J'ai fait des démarches et un agent m'a envoyé la lettre de refus. À ce jour, cette lettre n'est toujours pas versée dans mon compte.
     Entretemps, j'ai fait une autre demande de résidence permanente en vertu du nouveau programme qui avait été lancé. Selon la lettre envoyée par courriel par le nouvel agent, je réalise que j'ai commis la même erreur.
    On ne dispose d'aucun recours. Déjà, il faut appeler un agent. J'ai dû passer plus de 50 appels, je dirais même 100, sans compter toutes les heures d'attente au bout du fil. Ce n'est vraiment pas évident.
     Quoi qu'il en soit, je ne saurais vous dire si le refus de ma demande est en lien avec mon origine ou avec ma langue. Une chose est certaine, toutefois, en ce qui concerne la langue. Lorsque j'ai appelé pour prendre rendez-vous pour passer des examens médicaux, la personne parlait uniquement anglais et n'a pas fait l'effort de parler français. Je me suis efforcée de communiquer en anglais et j'ai été obligée de rédiger mes courriels en anglais pour qu'on puisse me donner un rendez-vous. Il a fallu que je traduise le tout avec Google Traduction. J'ai finalement eu mon rendez-vous et j'y suis allée.
    Merci beaucoup, madame Ngountchoup.
    Ma question s'adresse à vous, monsieur Jolin. Je veux m'assurer que j'ai les bonnes statistiques. Selon votre témoignage, le Programme ontarien des candidats à l'immigration a permis au gouvernement provincial d'atteindre un objectif de 4,09 % en 2020 alors qu'il était de 5 %. Vous ai-je bien compris?
     L'objectif de 4,09 % était pour l'immigration francophone au total. Par l'entremise du Programme ontarien des candidats à l'immigration, le gouvernement de l'Ontario a pu sélectionner ses candidats et atteindre ses objectifs. L'objectif de 5 % a même été dépassé: on a atteint 5,4 %, en 2018 et 7,3 %, l'année suivante. Le gouvernement de l'Ontario pouvait sélectionner lui-même 8 350 personnes qui voulaient s'établir en Ontario en 2021.
    Ce que nous demandons, et le gouvernement de l'Ontario le souhaite aussi, c'est que ce dernier puisse sélectionner lui-même 13 000 nouveaux arrivants. Ce programme offre toutes les chances d'atteindre l'objectif de 5 %, et même de le dépasser.
    Étant donné que le gouvernement de l'Ontario a démontré être en mesure d'atteindre sa cible d'immigration francophone, par l'entremise de ce programme du moins, le gouvernement du Canada pourrait lui accorder davantage de pouvoir pour sélectionner un plus grand nombre d'immigrants.

  (1650)  

     Je n'ai pas de position pour ou contre, mais vous présentez un très bon argumentaire.
    Selon les calculs, nous pourrions accepter environ 400 000 immigrants d'ici 2023 — c'est peut-être 450 000, je ne me souviens pas du nombre exact —, soit environ 16 000 immigrants francophones, si on respecte la cible de 4 % en 2023. Votre solution pour atteindre cette cible consisterait à donner les outils au gouvernement provincial afin qu'il puisse vous donner un coup de main au gouvernement fédéral à cet égard.
    C'est un élément.
    Il reste à savoir si la cible de 4,4 % est toujours pertinente pour les francophones hors Québec. La Fédération des communautés francophones et acadienne, la FCFA, est en train de terminer une étude rigoureuse sur la question des cibles. Cette étude est basée sur des données de Statistique Canada et sur le modèle d'analyse qui a été balisé par cette organisation. Nous attendons la publication de l'étude avant de nous prononcer officiellement à savoir jusqu'où il faut aller au sujet des 4,4 %, mais il faut absolument faire mieux.
    Je ne me souviens pas du nom du professeur du Nouveau-Brunswick, qui expliquait que c'était très difficile d'attirer des francophones. Je ne cherche pas à pointer du doigt, mais le Québec a un grand kiosque lorsqu'il y a des conférences ou des endroits pour recruter des immigrants. Le Québec a un grand kiosque qui indique qu'on y parle français et qui invite les gens à s'y établir, et il y a les petits kiosques du Nouveau‑Brunswick et de l'Ontario qui signalent qu'on y parle aussi français et qui demandent qu'on ne les oublie pas.
    Excusez-moi de vous interrompre, monsieur Drouin, mais il vous reste 30 secondes et la sonnerie nous appelle. Avons-nous un consentement unanime pour continuer les questions jusqu'au vote?
    Je constate que tout le monde est d'accord. Nous continuons.
    Il vous reste 30 secondes, monsieur Drouin.
    Merci beaucoup.
    Voici où je veux en venir: peu importe les lois qui seront adoptées, comment les choses se passent-elles sur le terrain?
    Avez-vous des témoignages sur la façon dont cela se passe, par exemple, dans des pays où nous aimerions normalement recruter des étudiants francophones?
    Il y a beaucoup de gens qui proviennent de l'immigration francophone, par exemple, du continent africain. À cet égard, il y a un manque flagrant de bureaux des visas...
    Je suis désolé de vous interrompre, monsieur Jolin, mais vous pourrez continuer en répondant à d'autres questions.
    Nous allons maintenant céder la parole à notre second vice-président, M. Beaulieu, qui dispose de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à Me Handfield.
    Vous nous dites que, à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, on vous a déjà interdit de plaider en français, même si c'était à la demande de votre client. Cela se passait au tribunal de l'immigration à Montréal, au Québec.
    Est-ce vraiment une exception? Vous semblez dire que cela arrive quand même assez fréquemment.
    J'aimerais bien pouvoir répondre qu'il s'agit d'une exception, mais, malheureusement, ce n'en est pas une. De telles situations se produisent effectivement et il arrive qu'on tente de nous empêcher de plaider en français.
    Je parlais d'un dossier où on a dû se plaindre devant la Cour fédérale, qui a dû intervenir et rappeler à l'ordre le tribunal de la Section de la protection des réfugiés, en indiquant que le tribunal doit respecter la langue des procédures choisie par le client, dans ce cas-ci, c'était le français. Ainsi, si le client choisit de procéder en français, les procédures doivent se dérouler dans cette langue.
    Dans un autre cas, j'ai insisté devant le tribunal pour procéder en français, alors que ce dernier voulait procéder en anglais pour des raisons qui lui appartiennent. J'ai donc insisté et j'ai rappelé cette fameuse décision de la Cour fédérale. On m'a sèchement répondu, en anglais, qu'on me connaissait et qu'on savait que j'étais un fauteur de troubles. Alors, le tribunal a quitté les lieux et, par la suite, nous avons obtenu une audience en français.
    D'autre part, on sait qu'à Montréal, il y a énormément de dossiers de demandeurs d'asile. Dans les médias, on parlait, au Québec, du fameux chemin Roxham. Or plusieurs dossiers ont été transférés au bureau régional de Toronto. Malheureusement, il est difficile, dans certains cas, de pouvoir discuter en français avec un greffier de ce bureau régional. Dans un cas, comme nous insistions pour parler avec un greffier en français, on nous a dit qu'on allait nous rappeler. Nous attendons ce retour d'appel, depuis plusieurs mois.
    Malheureusement, cette tendance semble plutôt vouloir s'installer.

  (1655)  

     Je trouve cette situation est assez incroyable, même si je suis au courant du dossier. J'ai vécu ce genre de situation dans une autre vie et j'ai essayé de faire pression afin que les avocats aient le droit de plaider en français.
    Comment peut-on expliquer que, au Québec, quelqu'un refuse qu'on procède en français? Selon vous, quelles raisons peuvent expliquer cela?
    Je m'explique mal cette façon de faire, tout comme je m'explique mal qu'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada offre en 2021 et 2022 des postes d'agent d'immigration unilingue anglais à Montréal. Le message qu'on semble vouloir clairement envoyer est que les dossiers d'immigration se traitent en anglais, que ce soit au Québec ou ailleurs au Canada. C'est la seule explication que je peux voir.
    C'est incroyable.
    Dans le jugement de la Cour fédérale, il y avait une explication. Au début, la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada disait qu'il n'était pas nécessaire de procéder en français, parce cela ne causait pas de préjudice. Quel a été le résultat du jugement du tribunal fédéral?
    En fait, la Cour fédérale a été claire: il n'appartient ni au tribunal ni aux représentants des ministres, que ce soit celui de l'Agence des services frontaliers du Canada ou celui d'Immigration, Réfugiés et Ciroyenneté Canada, de choisir la langue des procédures. Évidemment, c'est le client, le justiciable, qui a l'obligation de choisir de procéder soit en français, soit en anglais. Ce droit de procéder dans l'une des deux langues officielles appartient au client et à personne d'autre, pas plus au tribunal.
    Dès que le client désire et souhaite procéder en français, le tribunal doit se soumettre à sa décision et offrir des services en français. Les documents doivent donc être déposés en français et, si le justiciable ne maîtrise pas l'une des deux langues officielles et que tout doit être traduit dans sa langue maternelle, un interprète parlant le français et la langue maternelle du client doit être désigné au dossier. Voilà la conclusion de la Cour fédérale, heureusement.
    Si l'administration de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié avait la volonté politique de permettre à tous et à toutes de procéder en français, ce qui est un droit prévu dans la Loi sur les langues officielles, mais encore plus dans la Charte de la langue française, pensez-vous qu'il pourrait être efficace de rappeler aux agents d'immigration et aux commissaires de respecter le français?
    Je vais scinder votre question en deux.
    En ce qui concerne le tribunal qu'est la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, il faut que des directives claires émanent du ministre et se rendent jusqu'au président de la Commission, puis aux commissaires des différentes sections du tribunal pour que le français et le choix de la langue des procédures soient respectés.
    D'autre part, au sein du ministère, il doit y avoir des mesures claires quant au fait que les agents d'immigration doivent respecter la langue choisie par le justiciable et qu'ils rendent des comptes.
    Comme je le mentionnais tout à l'heure, le seul recours qui s'offre à un client est de déposer une plainte auprès du commissaire aux langues officielles, et on sait ce que cela peut donner par la suite.
    Merci maître, c'était vraiment intéressant.
    Je cède maintenant la parole à Mme Niki Ashton, du Manitoba, pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins qui sont parmi nous aujourd'hui. Je tiens à leur dire que je trouve leurs témoignages accablants. Nous sommes tous au courant du dossier et de quelques-uns des enjeux, mais ce dont ils nous ont fait part est très préoccupant. D'une part, le Canada dit vouloir accueillir des immigrants francophones, mais, d'autre part, il ne leur offre pas les services nécessaires pour qu'ils puissent venir et rester ici. Il faut agir sur ce que les témoins proposent aujourd'hui. Je les remercie de leurs messages.
    Mes premières questions s'adressent à Mme Ngountchoup.
    Madame Ngountchoup, le poids démographique des francophones en Acadie et au Nouveau‑Brunswick diminue, comme à plusieurs endroits au Canada. Moncton a une université francophone...

  (1700)  

    Excusez-moi, j'entends l'interprétation en anglais, je ne sais pas pourquoi.
    Un instant, madame Ngountchoup. Nous allons vérifier cela.
    Est-ce que cela fonctionne?
    C'est la même chose de mon côté, monsieur le président.
    Quand je parle, est-ce que vous m'entendez uniquement en français?

[Traduction]

     Si je parle en anglais, entendez-vous mes propos en français?

[Français]

     Non, il n'y a pas d'interprétation en français.
    D'accord.
    On me dit que le problème est réglé.
    Vous pouvez poursuivre, madame Ashton.
    À Moncton, il y a une université francophone. Comme on le sait, le Canada a refusé, de façon systémique, d'accueillir des immigrants francophones africains. Parallèlement à cela, le Canada a raté sa cible d'accueillir 4,4 % d'immigrants francophones. On s'était donné cette cible en 2003, soit il y a près de 20 ans.
    Pensez-vous qu'il y a une incohérence entre la cible donnée et le refus d'accepter des étudiants francophones?
    Je pense qu'il y a une très grande incohérence, surtout si l'on tient compte du fait qu'il y a en ce moment, en sol canadien, beaucoup de francophones qui ne sont pas des résidents permanents.
    La façon d'évaluer les tests de langues... On ne peut pas déposer une demande de résidence permanente si l'on n'a pas réussi les tests de langues. Ces derniers sont évalués en France.
    Cela dit, personnellement, j'ai eu l'impression d'avoir un niveau de français supérieur à celui de la personne qui a fait mon évaluation. Or j'ai échoué au test, et je ne suis pas la seule personne dans ce cas. Je connais d'autres personnes qui n'ont pas réussi le test de langue, et ce, même si elles ont vécu, grandi, étudié et travaillé en français pendant plusieurs années. Plusieurs personnes ont la capacité de s'exprimer en français au quotidien, de défendre le français et la francophonie, mais elles ne peuvent pas faire une demande de résidence permanente. Cela crée un fossé.
    Beaucoup de francophones vivent dans des régions éloignées, et c'est difficile pour elles d'avoir accès à des services en français. En hiver, personne n'a envie de risquer sa vie en se déplaçant pour aller faire un test de français. J'ai voyagé pendant la période hivernale et j'ai risqué ma vie à trois reprises. Quand j'ai terminé le test de langue, j'avais un important traumatisme. Je me suis dit que je n'étais pas la seule dans cette situation. En effet, de nombreuses personnes qui parlent français sont déjà sur le territoire canadien, mais on ne leur donne pas le statut de résident permanent. Imaginons ce qui en est pour ceux qui sont à l'étranger.
    Plus tôt, un député a mentionné que lorsqu'on décide de venir au Canada, il faut démontrer que l'on a l'intention de retourner dans son pays par la suite. C'est exact. On doit démontrer que l'on ne va pas rester au Canada, et ce, même si le Canada veut accueillir des francophones.
    À quel niveau vont-ils rétablir le service pour que ce soit plus cohérent par rapport à l'objectif ciblé? Je ne saurais le dire.
    Je vous remercie de nous avoir fait part de votre expérience personnelle difficile.
    Vous avez parlé du fait que l'on doit payer pour passer les examens et des obstacles auxquels se heurtent les étudiants internationaux. On a besoin de l'immigration pour rétablir le poids démographique des communautés francophones.
    Selon vous, si le gouvernement supprimait ces obstacles, se rapprocherait-on de ces cibles?
    Oui, c'est certain.
    Je vais parler en tant qu'ancienne étudiante, car je n'ai pas le droit de parler en tant que professionnelle, c'est-à-dire au nom de mon collège. L'obstacle de la langue est important. Personnellement, j'ai gardé des séquelles de mon traumatisme.
    Si l'on enlève l'obstacle de la langue, sachant que la personne est francophone, ce serait un très grand soulagement, sans compter que le coût du test de français est très cher. La personne qui échoue à l'examen doit payer pour le passer à nouveau. C'est un important défi.
    Apporter des allègements à cet égard ferait une très grande différence pour les personnes qui sont déjà sur place et pour celles qui veulent venir au Canada.
    Madame Ngountchoup, je vous remercie du travail que vous faites, même si vous n'êtes pas la représentante de l'organisme pour lequel vous travaillez. Votre travail fait évidemment partie de la solution.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Jolin.
    Monsieur Jolin, un témoin provenant de la communauté francophone de Sarnia a témoigné de l'absence de services de francisation aux nouveaux arrivants, puisque l'on doit choisir entre l'anglais et le français et que les allophones choisissent majoritairement l'anglais.
    Devrait-on en faire plus sur le plan de la francisation des nouveaux arrivants? Devrait-on offrir des cours d'apprentissage dans les deux langues officielles?

  (1705)  

    Il faut assurément offrir des cours dans les deux langues officielles. Cela permettrait aux gens qui veulent apprendre le français de le faire. Les cours doivent leur être offerts.
    Nous avons encore du travail à faire à cet égard. Il y a deux langues officielles au pays, et il faut s'assurer que les gens peuvent étudier dans la langue de leur choix. S'ils veulent apprendre l'autre langue officielle, ils doivent être en mesure de le faire. D'ailleurs, c'est ce que nous demandons depuis un bon moment.
    C'est tout à fait logique d'aller dans cette direction.
    Merci beaucoup, monsieur Jolin.
    Lors du prochain tour de questions, je vais donner la parole à un député de chaque formation politique. Comme le temps est restrein, le temps sera donc réparti ainsi: quatre minutes, quatre minutes, deux minutes et deux minutes. Cela nous mènera à l'heure du vote.
    Monsieur Gourde, vous avez maintenant la parole pour quatre minutes.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    Mon intervention sera brève.
    Je remercie les témoins d'être ici et de nous avoir livré leur témoignage.
    Depuis 16 ans, je suis député. Depuis 16 ans, à mon bureau, nous aidons des gens à traiter avec Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Les témoignages que j'entends ne me rassurent pas, parce que cela me prouve à quel point le processus est compliqué. Il n'y a pas seulement des problèmes dans ma circonscription, mais il y en a partout au Canada. Cela me désole grandement, parce que nous faisons affaire avec des humains et que nous brisons la vie des gens qui font affaire avec le ministère. C'est vraiment très triste.
    Ma question s'adressera à Me Handfield.
    Maître Handfield, certaines personnes devraient porter plainte, et je pense qu'il y a très peu d'endroits, voire aucun, où elles peuvent s'adresser. Je trouve cela décevant. Si vous aviez un conseil à nous donner à cet égard, quel serait le processus que nous pourrions mettre en place pour offrir la possibilité aux gens qui se sentent lésés de présenter un recours?
    Votre question est fort pertinente, monsieur Gourde. En fait, je me pose la même question.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, que pourrait-on faire pour que ces personnes aient un recours, mis à part le fait de s'adresser à la Cour fédérale dans certains cas, lorsque la décision ou la position vient du tribunal? Je l'ai mentionné et je le répète, c'est une question de reddition de comptes. Un agent d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada ne subit aucune conséquence s'il rend une décision dans une langue autre que celle choisie par le client. À part le dépôt d'une plainte auprès du commissaire aux langues officielles, il n'y a pas de levier solide pour renverser cette tendance.
     Malheureusement, je n'ai pas de solution miracle à vous proposer cet après-midi. Si j'en avais une, évidemment, je l'aurais déjà soulignée et j'en aurais fait part à divers parlementaires. Je ne sais pas si les autres intervenants ont des solutions concrètes à apporter quant à cela, mais, moi, malheureusement, je me pose la même question que vous depuis fort longtemps.
    Je laisserai la chance aux autres intervenants de répondre à cette question mais, avant cela, je poserai une question à Mme Ngountchoup.
    Madame Ngountchoup, vous avez parlé de l'examen de français. J'ai constaté que votre français était impeccable. Ce n'est pas la première fois que j'entends dire que l'examen de français semble avoir un niveau de difficulté très élevé. Moi qui suis un francophone du Québec, je crois que je ne le réussirais peut-être même pas.
    Le niveau de difficulté de l'examen de français est-il vraiment exagéré? Se sert-on trop souvent de cet examen pour refuser les gens?
    Personnellement, j'ai trouvé qu'il y avait certaines épreuves de l'évaluation dont le niveau de difficulté était élevé, mais le hic se situerait plutôt à la correction. Je sais que j'ai bien répondu à certaines épreuves et je ne comprends pas pourquoi je les ai échouées. Oui, le niveau de difficulté est très élevé pour quelqu'un dont le niveau de langue n'est pas assez avancé. Je vous dirais que, quand je les ai lues, j'ai su qu'elles s'adressaient à quelqu'un qui a beaucoup de matière grise. Or, avec un certain niveau de français, on est capable de vivre et de travailler au Canada.
    Avez-vous des suggestions à nous faire quant aux mesures auxquelles pourraient avoir recours les personnes qui se sentent lésées par le ministère?
    Premièrement, afin d'éviter les courriels à retourner à répétition, vous pourriez créer un site Internet pour recueillir les plaintes des gens ayant eu des expériences négatives. Cela permettrait, ensuite, de leur proposer des solutions de recours en place. Ce serait déjà un bon début.
    Je vous remercie.

  (1710)  

    Il vous reste 20 secondes, monsieur Gourde.
    Nous poursuivrons avec Mme Kayabaga pour quatre minutes également.
    Madame Kayabaga, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je commencerai par remercier nos témoins d'aujourd'hui.
    Madame Ngountchoup, je tiens à vous souligner que c'est correct si votre fils se joint à nous pour la discussion, qui doit être très intéressante pour lui.
    Ma question s'adressera à M. Jolin et à Mme Ngountchoup.
    Monsieur Jolin, je me fais un plaisir de vous revoir au Comité.
    Monsieur Jolin et madame Ngountchoup, on sait déjà que 60 % des francophones dans le monde se trouvent en Afrique. Bien que le gouvernement ait quand même des plans ambitieux en matière d'immigration francophone, quelles suggestions pourriez-vous lui donner pour accroître le nombre d'immigrants francophones, surtout en provenance de l'Afrique? Moi qui habite dans une ville complètement anglophone, j'aimerais bien qu'il y ait plus de francophones qui se joignent à moi en tant que Franco‑Ontariens.
    Pouvez-vous répondre à ma question en deux points?
     C'est exact, et la grande majorité des immigrants francophones viennent d'Afrique.
    Pour le moment, le gouvernement fédéral est très peu présent en Afrique par l'entremise de ses bureaux des visas. Par exemple, je sais qu'un bureau au Sénégal sert une douzaine de pays. C'est très difficile pour les gens de traverser quelques pays pour se rendre à un bureau des visas. Nous avons donc besoin d'une présence accrue. On dit vouloir de l'immigration francophone au Canada, alors il faut se donner les moyens de le faire, en commençant par remédier à cette situation.
    En Afrique subsaharienne, il n'est pas rare qu'un candidat doive traverser six pays pour déposer une demande. C'est tout à fait ridicule et ce n'est pas sérieux. Cela va à l'encontre de ce qu'on essaie de faire. On dit vouloir de l'immigration francophone et tout faire pour atteindre nos objectifs, mais, d'un autre côté, les gens qui veulent venir ne sont pas capables de nous rejoindre. C'est donc un élément extrêmement important sur lequel on doit travailler.
    J'ai parlé de la sélection d'immigrants par l'Ontario, qui a atteint son objectif de 5 % dans ce cas-là. Nous demandons que l'Ontario puisse choisir davantage d'immigrants. Il a choisi 8 350 immigrants et immigrantes en 2021 et il désire en choisir 13 000. Comme l'Ontario atteint et dépasse même l'objectif de 5 %, alors c'est le nouvel objectif qu'on s'est donné.
    Je vous remercie beaucoup de votre commentaire.
     Nous voulons bien que ces immigrants francophones puissent aller ailleurs qu'au Québec aussi. Par exemple, à London, nous aimerions bien continuer à faire grandir notre communauté francophone.
    Madame Ngountchoup, pouvez-vous prendre quelques secondes pour répondre à ma question?
    Oui, j'ai deux solutions à proposer.
    La première serait d'enlever la note disant qu'il faut démontrer qu'on veut retourner dans son pays après avoir terminé ses études. C'est difficile pour quelqu'un de démontrer qu'il a l'intention de retourner dans son pays, alors qu'il a toutes les compétences et le potentiel qu'il faut pour être sur la place canadienne. Ce serait déjà une bonne avancée.
    La deuxième solution serait de cibler les institutions francophones. On sait que, dans les établissements scolaires, à partir des études postsecondaires ou universitaires, tous ceux qui sont là ont un minimum de connaissances en français. Cela pourrait être considéré comme une confirmation qu'ils ont le niveau de base qui est requis ici. Ensuite, il faudrait revoir la façon d'évaluer la connaissance de la langue française. Est-ce que le niveau d'évaluation est important? Si on a atteint un certain niveau d'études en français, on a forcément un certain niveau. Dès lors, a-t-on vraiment besoin d'un test de français pour immigrer?
    Je vous remercie de ce commentaire. Je suis d'accord avec vous.
    Il y a une pénurie de main-d'œuvre, donc on doit aussi utiliser ces immigrants francophones pour...
    Monsieur Beaulieu, vous avez la parole pour deux minutes.
    Il semble y avoir un problème systémique au ministère de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté. Nous avons reçu des fonctionnaires lors de la dernière séance et ils niaient un peu le problème. Ils disaient ne pas savoir pourquoi on en parlait. S'ils ne reconnaissent pas le problème au départ, c'est très difficile de penser que cela va s'améliorer.
    Au Bloc québécois, c'est sûr que nous demandons de rapatrier tous les pouvoirs possibles en immigration au Québec. Je voulais savoir ce que les invités en pensent. Monsieur Jolin, vous semblez dire que l'Ontario devrait avoir plus de pouvoirs en immigration aussi. Alors, qu'est-ce que vous en pensez?
    Pour le Québec, peut-être que Me Handfield peut répondre, mais le Nouveau‑Brunswick et l'Ontario ne devraient-ils pas avoir aussi davantage de pouvoirs en immigration?

  (1715)  

    Dans le cas du Québec, monsieur Beaulieu, je pense que ce serait l'idéal, parce que les délais dans certains dossiers sont exponentiels. Cela est dû au fait que certaines demandes doivent être traitées à la fois par le MIFI, le ministère de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration, et par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
    Évidemment, si tous les dossiers étaient traités de A à Z par un seul ministère, soit le ministère de l'Immigration du Québec, ce serait l'idéal. On aurait une cohérence décisionnelle et, en plus, on diminuerait énormément les délais de traitement. Ce serait une solution envisageable. De plus, il n'y aurait pas de problème de respect de la langue des procédures parce que, évidemment, tout se déroulerait en français.
     Merci, maître Handfield.
    Nous allons faire un dernier tour de questions de deux minutes.
    Vous avez deux minutes, madame Ashton.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais vous adresser une question, monsieur Jolin. Vous avez confirmé que la cible de 4,4 % n'avait pas été atteinte. Il y a quelques jours, nous avons demandé aux gens du ministère de l'Immigration si ce dernier allait fixer une cible de rattrapage. On nous a répété que la cible en cours était toujours de 4,4 %.
    Si l'on veut protéger le poids démographique des communautés francophones en Ontario et ailleurs au Canada, le gouvernement doit-il se donner une cible de rattrapage?
    L'Assemblée de la francophonie de l'Ontario est en train de terminer une étude rigoureuse sur la question des cibles. L'étude est basée sur des données de Statistique Canada, et le modèle d'analyse a été validé par l'organisation. On veut attendre la publication de l'étude avant de se prononcer officiellement sur une cible, mais il est clair qu'il faut en faire plus et faire mieux.
    Avec une cible 4,4 % , il y a énormément de rattrapage à faire. En Ontario, notre cible est de 5 %, et cela fait déjà 10 ans que nous sommes loin de l'atteindre. Notre poids démographique s'en trouve grandement affecté. Nous voulons non seulement que notre cible de 5 % soit atteinte, mais il faut également qu'elle soit dépassée. C'est certain que la cible fédérale doit être augmentée.
    Rapidement, pensez-vous que le gouvernement fédéral devrait mettre sur pied un programme d'immigration francophone en milieu minoritaire pour les provinces, notamment pour la mienne, le Manitoba, l'Ontario et les autres?
    Un des points importants du projet de loi qui a été déposé hier a trait à la nécessité d'établir une politique d'immigration francophone. Il est question de se donner des cibles à ce chapitre et d'une reddition de comptes, mais on n'y fait pas mention de chiffres.
    Merci beaucoup, ce sera tout.
    Avant de terminer, j'aimerais quand même remercier nos témoins. Madame Ngountchoup et maître Handfield, c'est la première fois que nous vous recevons au Comité. Nous vous remercions de nous avoir fait part de votre expérience avec autant de clarté.
    À nos habitués, messieurs Jolin, Hominuk et Michaud, merci encore une fois. Vous avez fait de bons témoignages qui nous éclairent beaucoup.
    Je suspends la séance et nous la reprendrons après le vote.
    Les témoins de la deuxième partie de la réunion, ceux qui sont en attente, je vous prie de rester là. Nous reviendrons dans 15 ou 20 minutes, après le vote.

  (1715)  


  (1735)  

     Nous reprenons la séance. Pardonnez-nous, mais c'est cela, notre belle démocratie. Il faut voter parfois au Parlement.
    Nous accueillons...
    Monsieur le président, je m'excuse de vous interrompre.
    Oui, monsieur Godin?
    J'aimerais avoir le consentement unanime pour déposer une motion sur le budget de fonctionnement de l'étude que nous entamons aujourd'hui. Je pense que vous avez tous reçu un document à cet effet. Je suggère que nous approuvions cette proposition.
    Y a-t-il consentement unanime? Je vois que oui.
    (La motion est adoptée.)
    Je reprends où j'en étais.
    Pour la prochaine heure, ou ce qui en reste, nous entendrons les témoins suivants. Par vidéoconférence, il y a M. Moïse Zahoui, coordonnateur des services en immigration, du Centre de santé communautaire du Grand Sudbury, ainsi que MM. Karl Blackburn et Denis Hamel, du Conseil du patronat du Québec, que nous avons eu la chance de recevoir il n'y a pas si longtemps.
    Monsieur Zahoui, nous allons commencer par vous. Vous avez cinq minutes pour faire votre présentation. À vous la parole.
    Je suis Moïse Zahoui, coordonnateur des services en immigration du Centre de santé communautaire du Grand Sudbury. Je vous remercie de cette occasion de vous parler de notre réalité locale.
    Le Centre de santé communautaire du Grand Sudbury est aussi l'agent principal de l'initiative des communautés francophones accueillantes de Sudbury, en plus d’être un pourvoyeur de services à l'intention des nouveaux arrivants.
    Parlons d’abord des cibles.
     Avant la pandémie, la ville du Grand Sudbury, qui, depuis mai 2020, est l'une des 14 communautés francophones accueillantes, recevait de plus en plus d’immigrants francophones. La population étant très transitoire, nous n’avons pas de chiffres exacts. Cependant, lorsque la pandémie a été déclarée, le Centre de santé communautaire du Grand Sudbury comptait plus de 170 individus ou familles identifiés comme nouveaux arrivants parmi sa clientèle. C'est un chiffre record, et c'est sans compter tous les étudiants internationaux, les travailleurs avec un visa temporaire et les demandeurs d’asile.
    Entre 2018 et 2020, deux études ont été menées sur l’état de la situation à Sudbury. Ce qu’on a constaté, c’est qu'à cette époque, très peu de services à l'intention des nouveaux arrivants étaient disponibles en français. Les 177 nouveaux arrivants francophones qui ont participé à ces études étaient jeunes; ils avaient moins de 46 ans. Cinquante-sept pour cent d'entre eux étaient des résidents permanents, et 36 %, des étudiants internationaux en provenance de l’Afrique subsaharienne, du Maghreb et des Caraïbes. Quatre-vingt-trois pour cent sont venus à Sudbury pour y faire leurs études, 10 % pour un regroupement familial, et 7 % pour le travail.
    Selon nos données, Sudbury était la première destination des étudiants internationaux, mais elle constituait une seconde migration des immigrants avec un statut de résident permanent en provenance, pour la plupart, de l’Ontario et du Québec. Trente et un pour cent des répondants sont venus directement à Sudbury, 25 % de Montréal, 14 % de Toronto et 11 % d’Ottawa.
    En général, le revenu de ces nouveaux arrivants était très bas. Près des trois quarts des répondants avaient un revenu inférieur à 30 000 $ par année, et 75 % des répondants étaient aux études et les combinaient avec un travail à temps partiel ou à temps plein. Ils maîtrisaient peu ou pas l’anglais. Souvent peu informés des services disponibles, ces nouveaux arrivants étaient souvent confrontés à l’isolement, au stress et à la discrimination.
     Comment ces constats nous aident-ils à comprendre l’incapacité à atteindre nos cibles? Nous n’avons pas à regarder très loin. Avant la pandémie, nous ne réussissions pas à atteindre nos cibles parce que les nouveaux arrivants dans le Grand Sudbury n’arrivaient pas à s’établir, à trouver un emploi et à vivre en français. Par conséquent, ils partaient en direction d'Ottawa, de Toronto ou de Montréal.
    Les projets de communautés francophones accueillantes et de services directs nous ont permis d’embaucher une équipe de quatre personnes qui se penchent spécifiquement sur les besoins d'établissement et les défis d’intégration socioéconomique des nouveaux arrivants mentionnés ci-haut.
    Ces projets nous ont aussi permis de renforcer la présence locale de certains partenaires, comme la Société économique de l’Ontario et le Conseil de la coopération de l’Ontario. Le seul problème, c’est que toutes ces ressources sont arrivées en pleine pandémie. Pendant la pandémie, les restrictions sanitaires et la fermeture des frontières du Canada rendaient très difficile le travail des services d’établissement et des projets de communautés accueillantes nouvellement établis. Nous nous sommes donc tournés vers les clients déjà en place: les résidents permanents arrivés dans les cinq dernières années, les étudiants internationaux et les travailleurs temporaires avec un visa fermé ou ouvert.
    Comment le gouvernement peut-il travailler à maintenir ou à augmenter le poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire? La promotion de l’immigration francophone étant essentielle, nous demandons au gouvernement du Canada de prendre les mesures suivantes.
    Il devrait reconduire les projets lancés au début de la pandémie, afin qu’ils puissent faire leurs preuves et démontrer l'effet des investissements sur les communautés francophones en situation minoritaire.
    Il devrait rendre obligatoire l'orientation des clients francophones vers les services d’établissement francophones tout en respectant leurs choix.
    Il devrait ancrer la cible de 4,4 % de francophones dans tous les programmes d’immigration.
    Il devrait adapter les campagnes de recrutement du gouvernement canadien à l’international aux réalités des communautés francophones en situation minoritaire, notamment en ce qui concerne les emplois disponibles et la situation linguistique.
    Il devrait ouvrir des bureaux et des services prédépart et de visa dans les pays d’Afrique subsaharienne, des pays qui représentent un plus grand réservoir d’immigration francophone.
    Il devrait établir des stratégies pour écourter le temps de traitement des demandes de résidence permanente, de permis de travail et de citoyenneté, ce qui assurerait une plus grande stabilité aux demandeurs.
    Il devrait restaurer les services d’immigration en région, notamment le bureau d’IRCC à Sudbury.
    Il y a un point que je n'ai pas noté. Le gouvernement devrait s'assurer que les fournisseurs de services francophones en Ontario aient des agents au ministère qui soient d'abord francophones, afin qu'ils puissent aider les immigrants francophones.
    Je vous remercie. Je suis disposé à répondre à toutes vos questions.

  (1740)  

     C'est parfait, vous avez réussi en moins de cinq minutes, monsieur Zahoui.
    Je cèderai maintenant la parole pour cinq minutes soit à M. Blackburn ou à M. Hamel.
    Allez-y, messieurs.
    Mesdames et messieurs membres du Comité, je m'appelle Karl Blackburn, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec. Je suis accompagné de Denis Hamel, vice-président aux politiques de développement de la main-d'œuvre.
    Notre organisation, créée en 1969, est une confédération de près de 100 associations sectorielles et de plusieurs membres corporatifs, qui représente les intérêts de plus de 70 000 employeurs, de toutes tailles et de toutes les régions du Québec, issus du secteur privé et parapublic.
    Depuis les derniers mois, c'est la deuxième fois que j'ai le plaisir de m'adresser à ce Comité pour parler du rôle que devrait occuper le gouvernement du Canada dans la promotion du français, mais cette fois au moyen de l'immigration.
    Le portrait de l'immigration de façon générale, et particulièrement celui de l'immigration économique francophone, est une grande préoccupation des employeurs. Comme vous le savez, notre démographie vieillissante ne nous permettra pas de pourvoir tous les postes vacants au cours de dix prochaines années. Même si nous parvenons à accroître la participation sur le marché du travail des personnes sans emploi, des travailleurs expérimentés et des personnes qui font partie de groupes qui sont sous-représentés, il n'en demeure pas moins qu'environ le quart des emplois vacants, aujourd'hui et demain, ne pourront l'être que par la voie de l'immigration.
    À cet égard, force est de constater que la situation actuelle est insoutenable. Le nombre de postes vacants atteint des sommets inégalés. Il y a présentement plus de postes à pourvoir que de personnes qui reçoivent des prestations d'assurance-emploi au Québec. Les programmes d'immigration fonctionnent au ralenti, et la frustration des employeurs et des candidats à l'immigration s'amplifie à cause des délais sans précédent.
    En avril 1991, les gouvernements du Canada et du Québec s'étaient entendus pour partager les compétences en matière d'immigration afin de fournir au Québec de nouveaux moyens de préserver son poids démographique au sein du Canada, tout en préconisant la consolidation et l'enrichissement du patrimoine culturel et social du Canada, compte tenu de son caractère fédéral et bilingue. Il est triste de constater que, plus de 30 ans après l'entrée en vigueur de l'Accord Canada-Québec relatif à l'immigration et à l'admission temporaire des aubains, l'immigration est devenue un enjeu politique qui a éloigné les gouvernements de leurs obligations respectives.
    Cette double administration donne lieu à des frictions de nature politique. Les ministères se renvoient la balle, pour ce qui est de savoir qui est responsable des longs délais de traitement. On pointe régulièrement du doigt le Québec, ayant la responsabilité de déterminer le nombre d'immigrants permanents qui entrent sur son territoire, est la cause de l'accumulation des dossiers sur les bureaux des fonctionnaires fédéraux. En parallèle, le gouvernement fédéral a récemment admis avoir volontairement ralenti le traitement des dossiers de travailleurs qualifiés du Québec, évoquant un important inventaire de demandes, alors que Québec avait, dans le même temps, réduit ses cibles d'admission.
    Cette incohérence se manifeste de façon frappante — et je dirais choquante — dans le dossier des étudiants étrangers. D'une part, les agents d'immigration refusent couramment les demandes de permis d'études des étudiants francophones en invoquant le Règlement sur l'immigration qui stipule que les demandeurs devront quitter le Canada à la fin de leurs études. En parallèle, le Québec, par l'entremise de son Programme de l'expérience québécoise, le PEQ, encourage les étudiants étrangers à demander un statut permanent après l'obtention de leur diplôme. Comment s'y retrouver?

  (1745)  

    Ce qui est particulièrement troublant, c'est que les étudiants francophones semblent faire l'objet d'un zèle accru de la part des agents d'immigration lorsque vient le temps d'examiner leur dossier. Le taux de refus des demandes de permis d'étude a atteint 60 % au Québec, alors qu'il n'a jamais dépassé 45 % dans le reste du Canada. Le Québec et la francophonie canadienne sont pénalisés en raison de la provenance des bassins de recrutement francophones qui se situent majoritairement en Afrique. L'Algérie, le Sénégal et le Cameroun figurent, par exemple, parmi les six premiers pays d'origine des étudiants étrangers au Québec et ont connu des taux de refus de plus de 80 % en 2020 et en 2021. Dans les autres provinces, l'Inde représente une grande partie du bassin d'étudiants étrangers, mais son taux de refus est beaucoup moins élevé que pour ces pays africains francophones. Une lacune importante a été identifiée, en mai dernier, par vos collègues du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. En effet, on recommandait au gouvernement d'accorder un financement additionnel aux centres de traitement des demandes de visa dans les pays francophones de l'Afrique pour accroître le nombre d'employés afin d'accélérer le traitement des données biométriques et des permis des étudiants.
     Merci, monsieur Blackburn.
    Vous aurez l'occasion de nous en parler davantage en répondant aux questions.
En raison de la contrainte de temps, certains de nos collègues doivent maintenant quitter la réunion afin d'assister à d'autres réunions de comités. De plus, le temps est restreint en raison des votes. Nous nous sommes entendus pour que chaque formation politique ait un tour de questions de six minutes.
    Pour commencer, je laisse la parole à M. Joël Godin, le premier vice-président du Comité.
    Monsieur Godin, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur patience. Nous nous excusons du chambardement causé par la contrainte de temps. Monsieur Blackburn, c'est cela, la vie en politique.
    Tout à fait.
    Mes questions s'adressent au Conseil du patronat du Québec.
    Comme l'a dit M. Blackburn, lors de son allocution, il y a une particularité en matière d'immigration: le Québec essaie de retenir les étudiants francophones alors que le Canada les oblige à repartir. Je peux comprendre que ce soit ainsi lorsqu'on est en situation de plein emploi, mais il y a présentement une pénurie de main-d'œuvre.
    Monsieur Blackburn, pouvez-vous nous dire quel pourcentage d'immigration est nécessaire pour répondre au problème de la pénurie de main d'œuvre, et quel pourcentage est nécessaire à la formation? Je parle d'immigration et d'immigration francophone.
    Pouvez-vous dresser le tableau des pistes de solution envisagées par le Conseil du patronat du Québec et par les 70 000 employeurs du Québec? Cela aiderait le gouvernement à mieux accompagner les manufacturiers.
    Je vais vous donner des chiffres provenant de l'évaluation faite en 2017 par le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale. On a fait cette évaluation en vue de pallier le départ à la retraite de près de 1,4 million de travailleurs. D'une part, 50 % de ceux qui pouvaient remplacer ces gens provenaient du milieu universitaire, c'est-à-dire qu'ils provenaient des bancs d'école ou qu'ils pourraient profiter d'un rehaussement de leurs compétences. D'autre part, 25 % étaient un peu plus éloignés du marché du travail. Il peut s'agir, par exemple, des gens des Premières Nations, des gens en situation de handicaps, des femmes, des personnes âgées qui désirent rester sur le marché du travail ou des gens judiciarisés. Enfin, de 2 à 3 % provenaient de l'investissement technologique et de la robotisation.
    Néanmoins, près du quart de ces remplacements provenait de gens issus de l'immigration. En 2017, on parlait de 64 000 immigrants par année. Malheureusement, la réalité a toujours été bien en deçà du seuil de 64 000 immigrants par année.
    On voit bien les objectifs que s'est fixés le gouvernement du Québec. Force est de constater que nous n'arriverons pas à atteindre les objectifs souhaités en 2017. Le gouvernement du Canada vient d'énoncer de nouveaux chiffres en lien avec le seuil d'immigration des prochaines années. Si l'on respectait le prorata, près de 98 000  immigrants devraient arriver sur le territoire du Québec.
    Comme vous pouvez le constater, on est bien loin du compte.

  (1750)  

    Monsieur Blackburn, si je me souviens bien, le Québec a besoin d'accueillir entre 40 000 et 46 000 immigrants.
    C'est exact, mais les objectifs sont un peu plus élevés. En 2018, c'était 44 000 immigrants; en 2019, c'était 31 000; en 2020, c'était 21 000. Cela tourne toujours autour de ces chiffres.
    Cette année, il y eut une accélération du traitement des dossiers des citoyens immigrants qui sont déjà sur le territoire du Québec. Il ne s'agit donc pas de nouvelles arrivées.
    Ce qui est particulier, c'est que les chiffres sont en décroissance. Vous dites que si l'on veut répondre aux besoins, le Québec devrait accueillir 98 000 immigrants. Le délai de traitement des dossiers est de 26 ou 27 mois. De plus, on n'accueille pas assez de gens francophones pour répondre à la réalité de la décroissance démographique.
    Est-ce bien cela?
    C'est exactement cela.
    Pouvez-vous nous dire quelles pistes de solutions nous devrions suivre pour répondre adéquatement à la situation? Il s'agit d'une situation assez particulière sur le plan humain, surtout pour les gens qui proviennent d'Afrique. Comme vous l'avez mentionné, le fédéral ralentit ce traitement. Comment peut-on forcer le gouvernement fédéral à agir?
    Nous avons reçu des représentants d'Immigration et citoyenneté Canada, mais je dois dire que leurs témoignages étaient très décevants. Comment pouvons-nous dénouer tout cela? Donnez-nous des pistes de solutions à inclure dans notre rapport, afin que le gouvernement s'en inspire pour outiller le Conseil du patronat du Québec et l'ensemble de l'immigration francophone au Canada.
     Avant de demander à mon collègue Denis Hamel de répondre à cette question, j'oserai m'avancer sur un territoire plus politique.
    On voit bien qu'il semble y avoir une volonté politique, mais, malheureusement, dans la machine administrative, cette volonté ne se traduit pas par des gestes. Il serait donc important que les bottines suivent les babines.
    Dans ce contexte, je vais demander à mon collègue M. Hamel de vous donner des exemples très concrets de problèmes reliés au transfert des dossiers que l'on pourrait régler afin d'aller beaucoup plus rapidement.
    Vous avez 30 secondes.
    Je m'excuse, monsieur Hamel, mais je vais m'adresser de nouveau à M. Blackburn.
    Monsieur Blackburn, vous affirmez qu'il y a une volonté politique. Je ne sais pas si vous avez pris connaissance du nouveau projet de loi qui a été déposé hier concernant l'immigration. Ce projet de loi n'aborde pas vraiment le problème. Il prévoit certaines mesures, mais il n'inclut pas de mécanismes et d'outils qui permettraient d'obtenir des résultats à court terme.
    Merci, monsieur Godin. Je suis désolé, mais j'ai le devoir de vous interrompre.
    Notre prochain intervenant sera le secrétaire parlementaire de la ministre des Langues officielles, M. Marc Serré.
    Monsieur Serré, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie grandement les témoins de leur présence.
    Ma première question s'adressera à M. Zahoui.
    En premier lieu, je vous remercie du travail que vous faites au sein du Centre de santé communautaire du Grand Sudbury. Votre organisme met notamment sur pied des programmes en matière de santé et d'éducation et des programmes pour les sans-abri au centre-ville. Je vous en remercie.
    Je m'adresse à vous, monsieur Zahoui, parce que vous avez été étudiant au Collège Boréal et vous avez travaillé au Réseau du Nord pour le soutien à l'immigration. Vous avez travaillé également dans le domaine de l'immigration au centre communautaire de santé. Vous avez donc une expérience en tant qu'étudiant et vous avez une expérience de travail. Par conséquent, j'aimerais savoir quelles sont vos recommandations pour le gouvernement fédéral, notamment en matière de recrutement.
    Qu'est-ce que le gouvernement fédéral peut faire pour recruter plus de francophones à Sudbury?
    Vous avez parlé de rétention en ce qui a trait à l'emploi, mais aussi en ce qui a trait à l'aspect socioéconomique, au logement, à la santé et à l'éducation, laquelle est de compétence provinciale. J'aimerais entendre vos recommandations précises. Vous avez parlé des bureaux des visas; c'est un aspect important.
    Avez-vous d'autres recommandations concernant le recrutement et la rétention?

  (1755)  

    Les bureaux des visas sont très importants.
    Dans le Nord de l'Ontario, beaucoup de personnes viennent de l'Afrique subsaharienne. Cependant, quand elles arrivent ici, elles doivent s'engager dans un parcours du combattant, car il n'existe pas de bureau des visas ni de services prédépart dans leurs différents pays. Parfois, les gens de l'Afrique de l'Ouest doivent se rendre au Sénégal, où se trouve le seul bureau. C'est une situation pénible pour eux.
    Le Nord de l'Ontario a des besoins précis en matière de recrutement. Les différentes régions de l'Ontario ont leurs propres besoins, et il arrive souvent que les personnes recrutées ne répondent pas aux besoins sur le terrain. Il s'agit de la principale difficulté. Si le gouvernement adoptait une politique basée sur les besoins locaux, cela nous serait profitable. Cela nous permettrait de recruter des personnes qui répondent directement à nos besoins, et nous pourrions les intégrer directement.
    On parle de recommandations précises. Un des critères qui permet aux étudiants de venir, c'est leur intention de retourner dans leur pays. Croyez-vous que c'est une barrière? Pensez-vous que le gouvernement du Canada devrait retirer ce critère?
    Absolument.
    Nous constatons en effet qu'il s'agit d'une barrière. Des personnes très intéressantes viennent ici, commencent à contribuer au développement de notre communauté francophone et deviennent des acteurs essentiels. Nous fondons des espoirs sur ces personnes, mais, malheureusement, au terme de leurs études, elles ne peuvent plus contribuer à notre communauté et y apporter ce vent de nouveauté et cette chaleur. Nous apprenons à les connaître et nous les perdons, et c'est dommage pour nous.
    Si nous voulons atteindre la cible de 4,4 % alors que nous sommes en déficit, il faut mettre en place des mécanismes qui facilitent l'atteinte de la cible.
    On parle du Nord de l'Ontario. Vous avez mentionné que le bureau d'IRCC avait fermé ses portes, en 2012, à Sudbury. Or le Nord de l'Ontario constitue 90 % de la surface totale de l'Ontario.
    Pourquoi est-il important d'avoir un bureau de l'immigration à Sudbury?
    C'est très important.
    J'ai l'habitude de dire que, Sudbury, c'est la capitale du Nord. Nous sommes entourés de plusieurs villes et nous faisons des efforts colossaux pour attirer des nouveaux arrivants. Nous nous rendons compte que le processus que doivent suivre les étudiants internationaux qui veulent obtenir leur résidence permanente les oblige à faire des heures de route. Lorsqu'ils arrivent dans le Sud, ils doivent avoir les moyens de se loger à l'hôtel. C'est compliqué pour eux. On a vécu une situation dramatique avec une famille de demandeurs d'asile, dont les membres ont malheureusement perdu la vie.
    Ce sont des aspects très importants selon nous. S'il y avait un bureau dans notre localité, cela faciliterait la tâche à ces personnes qui doivent entendre toutes ces démarches et cela leur permettrait de s'intégrer plus facilement.
     Une des recommandations faites précédemment par l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario voulait que le fédéral transfère les pouvoirs d'immigration à la province de l'Ontario.
    Auriez-vous des commentaires ou des suggestions à cet égard?
    Comment se passent vos interactions avec le Programme des candidats des provinces, soit le PCP?
    Auriez-vous des commentaires concernant vos interactions avec la province de l'Ontario, des recommandations de choses qui fonctionnent bien ou de mesures que le fédéral pourrait implanter?
    Croyez-vous qu'il devrait y avoir des transferts de pouvoirs à la province?
    Ce serait vraiment intéressant, mais dans le cadre [difficultés techniques]. Nous avons remarqué que nous avions carrément de la difficulté. Nous sommes dans une situation minoritaire, et nous aurions besoin d'un référencement.
    En fait, nous perdons beaucoup des francophones que nous accueillons ici parce que nos services ne sont peut-être pas assez visibles. Si la province doit prendre les devants, il faudra s'entendre, établir des communications pour prendre en considération tous nos besoins. Nous devons avoir de la visibilité de sorte que les organismes anglophones dirigent les francophones vers nous. Je ne dis pas que ce doit être imposé, mais nous devons offrir ce choix aux gens. Ainsi, chacun pourra recevoir l'appui nécessaire dans la langue de son choix. Sans cela, nous ne pourrons pas atteindre nos buts.
    Je vous remercie.
    Je suis désolé, mais je dois vous interrompre, messieurs Serré et Zahoui.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Beaulieu pour quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos deux témoins.
    Monsieur Blackburn, j'ai trouvé que vous aviez fait une très bonne présentation.
    Vous qui êtes du Conseil du patronat du Québec, en tant que gestionnaire, si votre entreprise ou vos employés n'atteignent pas leurs objectifs, année après année, qu'allez-vous faire?

  (1800)  

    Nous allons changer de processus.
    On dit souvent que, dans un plan d'action, il est important d'avoir des objectifs qu'on peut cibler, chiffrer et mesurer. On entend souvent l'expression suivante: tout ce qui se mesure se contrôle. Alors, dans un contexte où, malheureusement, nous n'atteignons pas les cibles, année après année, de deux choses l'une: soit les cibles ont été mal établies, soit le processus à l'interne, pour les atteindre, est mal organisé, et on doit absolument revoir le processus.
    Il me semble qu'il y aurait moyen de passer un mot d'ordre afin de favoriser l'immigration francophone. Il faudrait donc modifier les critères et faire quelque chose.
    Présentement, en ce qui a trait aux permis de séjour temporaires et aux permis d'études, comme vous l'avez mentionné, les taux de refus sont beaucoup plus élevés dans les pays de la Francophonie, et particulièrement dans les pays africains. De surcroît, pour les mêmes pays d'origine, les taux de refus sont plus élevés chez les étudiants qui sont destinés aux universités francophones que chez ceux destinés aux universités anglophones.
    Il y a donc un problème quelque part. Je pense qu'il y a un manque de volonté politique, et que ce n'est pas seulement une question de loi. Quand on veut que des employés se dirigent dans une direction, il y a toujours un moyen de le faire.
    Monsieur Beaulieu, il semble y avoir un problème qui nuit à l'immigration francophone.
    Souvenez-vous, il y a quelques semaines, lorsque nous nous sommes rencontrés pour la première fois, je vous ai beaucoup parlé de la volonté de développer la francophonie économique avec nos partenaires de plusieurs pays francophones de partout au monde. Nous étions plus de 27 pays francophones, en août 2021, à Paris, pour la Rencontre des entrepreneurs francophones 2021. Notre volonté était de créer et de lancer une organisation qui allait permettre, justement, à cette francophonie économique, de rayonner dans le monde.
    Je vous ai aussi dit que, à la fin du mois de mars, nous allions procéder au lancement officiel d'une nouvelle organisation mondiale, qui visera à promouvoir et à donner la priorité à la francophonie économique. Le Conseil du patronat du Québec jouera un rôle central dans cette nouvelle organisation, et ce sera certainement un élément important pour que le Canada, à l'intérieur de cette Francophonie, puisse non seulement jouer un rôle important de porte d'entrée pour l'ensemble des entrepreneurs francophones de la planète, mais également pour qu'il puisse servir de tremplin à ceux et celles qui veulent développer la francophonie économique dans le monde. Cette nouvelle organisation nous réjouit au plus haut point.
    Toutefois — et vous faites bien de le mentionner —, s'il y a des choses qui ne fonctionnent pas actuellement dans les bureaux des fonctionnaires fédéraux, nous devons nous accorder le pouvoir...
     Plus tôt, un témoin, un avocat, disait qu'il fallait une reddition de comptes.
    C'est exact.
    Cela n'a pas de sens de continuer ainsi. Nous avons reçu des représentants du ministère de l'Immigration, mais ils ont été incapables de nous mentionner un seul facteur permettant d'expliquer les difficultés que le ministère doit affronter.
    Il semble donc y avoir un manque de volonté politique de la part des hauts fonctionnaires. Quelque chose bloque le processus. On verra ce qui arrivera. C'est la même chose pour ce qui est de l'immigration francophone à l'extérieur du Québec. En Ontario, il y a des universités francophones, et le taux de refus y est plus élevé.
    Merci, monsieur Beaulieu.
    Les dernières questions vont être posées par Mme Ashton.
    Madame Ashton, vous avez la parole pour quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également tous les témoins.
    Ma question s'adresse à M. Zahoui.
    Nous avons suivi ce qui s'est passé dans le cas de l'Université Laurentienne, et nous en avons été consternés. Nous appuyons l'Université de Sudbury et nous tenons à ce qu'une éducation postsecondaire en français soit offerte dans le Nord de l'Ontario ainsi que dans les régions francophones du Canada.
    Votre témoignage portait sur le rôle des étudiants dans la communauté. La communauté francophone de Sudbury désire accueillir des étudiants étrangers, notamment.
    Quel rôle doit jouer un établissement d'éducation postsecondaire comme l'Université de Sudbury?
    Comme vous avez pu le constater lorsque je vous ai fait part des chiffres, les personnes qui viennent à Sudbury viennent d'abord pour avoir accès à l'éducation.
    Pour nous, il s'agit d'un rôle primordial, parce que c'est l'outil qui nous permet d'attirer des étudiants internationaux et des résidents permanents. On parle de délocalisation. Les gens qui viennent ici se retrouvent majoritairement dans les grands centres, comme Toronto ou Montréal.
     La perte de l'Université Laurentienne nous a porté un grand coup. Selon nous, le projet d'avoir une université francophone est une solution cruciale qui nous permettrait de retenir les gens chez nous, à Sudbury.

  (1805)  

    Merci beaucoup.
    C'est une réalité que l'on connaît bien ici. Au Manitoba, plus précisément à Winnipeg, il y a l'Université de Saint-Boniface. Ce que vous dites s'applique à plusieurs communautés.
    Ma prochaine question concerne l'accès aux services de soins pour les francophones, ce qui est un véritable problème. L'immigration francophone pourrait contribuer au recrutement de personnel qualifié dans le domaine de la santé, par exemple, afin d'offrir à tous les francophones un service de santé décent.
    Quelle stratégie envisagez-vous dans ce domaine?
    La reconnaissance des acquis est un [difficultés techniques], comme on a pu le voir ici. Je n'oserais pas dire que les personnes qui viennent ici sont souvent mal évaluées, mais il y a quand même un souci pour ce qui est de l'évaluation, surtout en ce qui a trait à la reconnaissance des acquis et au transfert des compétences.
    Les témoins précédents l'ont dit, il faut repenser la manière d'évaluer la population immigrante. Ces gens nous apportent beaucoup, mais le système ne leur en offre pas la chance. C'est ce qui est pénible. Prenons le cas de la pandémie: ces personnes ont pu apporter un souffle nouveau, et leur appui était essentiel.
    Ce que je dis, c'est qu'il faut vraiment repenser la machine. Il faut qu'il y ait un assouplissement du système et de bons mécanismes qui nous permettent d'atteindre nos cibles.
    Je vous remercie.
    Finalement, que recommandez-vous au gouvernement fédéral pour offrir des services en français aux nouveaux arrivants, particulièrement à ceux qui vivent loin des centres urbains?
    Il faut que le gouvernement mette plus de moyens, parce qu'il n'y a pas assez de services dans les zones éloignées. Nous avons mentionné que nous n'avons pas de bureau d'IRCC, ce qui est un problème. Il faut donner des ressources aux communautés; elles en ont besoin.
     Merci, monsieur Zahoui.
    Merci, madame Ashton.
    Messieurs les témoins, vos propos étaient vraiment intéressants. Je vous remercie de vos présentations.
    Monsieur Zahoui, je crois que c'était votre première comparution devant notre comité. Je vous souhaite donc la bienvenue. C'était vraiment intéressant.
    Messieurs Blackburn et Hamel, vous revoir a été un plaisir.
    Si nous avons manqué de temps et si vous croyez que d'autres informations utiles auraient dû être fournies au Comité, n'hésitez surtout pas à nous la faire parvenir, par écrit, par l'entremise de notre greffière. Celle-ci la communiquera alors à tous les membres du Comité.
    Je vous remercie tous. Je remercie mes collègues. C'était une très bonne réunion.
    La séance est levée.
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