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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 065 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 6 juin 2017

[Enregistrement électronique]

  (1305)  

[Traduction]

     Bonjour à tous. Je déclare ouverte cette séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne. Nous poursuivons notre étude sur la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle commerciale en Asie du Sud.
    Je souhaite la bienvenue à notre invitée, Mme Nipa Banerjee, professionnelle en résidence à la Faculté des sciences sociales de l’École de développement international et mondialisation de l’Université d’Ottawa.
    Je vous informe que Mme Banerjee est titulaire d’un doctorat et que ses domaines d’expertise comprennent le développement en Asie du Sud et en Asie du Sud-Est, domaine dans lequel elle possède plus de 40 ans d’expérience. Elle a passé 33 ans à représenter l’Agence canadienne de développement international en Inde, au Bangladesh, en Indonésie, en Thaïlande, au Cambodge, au Laos et en Afghanistan, et elle a dirigé le programme d’aide du Canada dans ces quatre derniers pays. Mme Banerjee a aussi collaboré avec le Centre de recherche et de développement international et CUSO International. Tous les trimestres, elle se rend au Bangladesh et en Inde, entre autres pays.
    Madame Banerjee, je vous souhaite la bienvenue au Comité. Vous disposez de 10 à 12 minutes pour faire votre déclaration liminaire. Nous passerons ensuite à la période de questions.
    Merci.
    Je veux d’entrée de jeu signaler que le préavis qu’on m’a donné était très court et qu’il s’agit d’un sujet très vaste. Bien que ce soit un sujet que je connaisse et que j’aie étudié, cela m’a un peu prise de court. Compte tenu des sujets dont il est question et de la taille de cette région, voyons comment je m’en sortirai. Si vous le souhaitez, je pourrai ultérieurement vous soumettre un bref mémoire pour étayer certaines des questions que je ne pourrai qu’effleurer aujourd’hui.
    J’ai déjà présenté des mémoires. La plupart concernaient l’Afghanistan et ils ont été préparés au moment où ce pays faisait partie de nos grandes priorités, ce qui n’est plus le cas. Cela fait donc un certain temps que je n’ai pas fait d’exposé.
    Je vais essayer de faire un exposé de 10 minutes. Veuillez m’excuser si mes renseignements vous paraissent incomplets — et ils le seront —, mais comprenez bien qu’il s’agit d’un sujet d’envergure.
    Voici de l’information contextuelle sur la traite des personnes en Asie du Sud. Les sujets particuliers dont je vais parler dans ce contexte sont les suivants: la portée de la traite des personnes, l’étendue et la nature de la traite des personnes, les facteurs qui encouragent la traite des personnes et l’élaboration de mesures pour contrer la traite des personnes en Asie du Sud, sujet que je me contenterai d’effleurer. Je profiterai peut-être de la période des questions pour parler davantage des mesures qui pourraient être utiles.
    En ce qui concerne la portée de la traite des personnes, disons que les définitions boiteuses qu’on en a données et l’absence de terminologie commune et d’un cadre commun ont constamment nui à la lutte contre cette pratique. C’est pour cette raison que j’ai recours au concept plus global de la traite des personnes, ce concept qui inclut la traite des personnes en général et non le seul trafic sexuel. L’exploitation est le thème commun à toutes les déclinaisons de la traite des personnes: le travail et les services forcés, le travail des enfants, la servitude pour dettes, la prostitution forcée, l’exploitation à des fins économiques, les enfants-soldats, et même le prélèvement d’organes, autant de pratiques qui sont en violation avec les droits de la personne.
    On parle d’exploitation sans consentement lorsque les victimes sont forcées à faire ce pour quoi on les exploite ou qu'elles sont attirées à cela par des moyens malhonnêtes. L’exploitation comporte un élément de coercition, de fraude ou de tromperie. L’exploitation consensuelle se produit lorsque la vulnérabilité économique de la victime la force à accepter des conditions de travail abusives. En général, l’exploitation consensuelle s’incarne lorsque la victime n’a pas accès à d’autres issues sur le plan économique et elle se traduit par le traitement injuste de l’exploité. Toutes ces formes de traite sont présentes en Asie du Sud.
    La traite des personnes en Asie du Sud se fait « à l’interne », à l’intérieur des régions, à l’intérieur des frontières nationales ainsi que d’un pays à l’autre. La traite interrégionale aux fins de prostitution de jeunes femmes et de filles du Népal et du Bangladesh à destination des bordels indiens est chose courante. On peut dire la même chose des mouvements transnationaux de tous les types qui partent de l’Asie du Sud en direction du Moyen-Orient et d’autres pays. Le trafic interne — qu’il soit consensuel ou non —, le travail forcé ou assujetti à des dettes, et l’exploitation sexuelle de la pire espèce sont tous présents en Asie du Sud.
    Passons maintenant à l’étendue de la traite des personnes. À l’échelle mondiale, on reconnaît que la traite des personnes est un phénomène qui est présent dans tous les pays et que la majorité des victimes proviennent des pays pauvres. Étant donné le caractère illégal de la traite des personnes, il est difficile de recueillir des statistiques précises sur l’ampleur du phénomène. Les statistiques disponibles — et qui sont les plus couramment citées — sont souvent en deçà de la réalité.

  (1310)  

    Selon l'indice mondial de l’esclavage de 2014, 36 millions de personnes seraient victimes de la traite des personnes. De ce nombre, les deux tiers sont originaires de l'Asie — et pas seulement de l'Asie du Sud. C'est en Inde, au Népal et au Bangladesh que la traite des personnes est la plus répandue, et ces trois pays sont parmi les 10 pays du monde qui comptent le plus grand nombre de victimes. L'Inde est au sommet de cette liste, avec 14 millions de victimes. En matière de traite, l'Inde est une source, une plaque tournante et une destination. Le Bangladesh et le Sri Lanka sont des régions sources; le Bhoutan et les Maldives sont des destinations.
    Les rouages de la traite des personnes s'étendent partout en Asie du Sud. Malgré les différences historiques et culturelles qui existent entre les régions, les modus operandi comportent des similarités évidentes d'une région à l'autre.
    Maintenant, en ce qui concerne la nature de la traite des personnes, disons que la plupart des victimes proviennent des couches les plus pauvres des populations d'Asie du Sud. Les femmes, les adolescents et les enfants qui vivent dans la pauvreté sont particulièrement vulnérables. Ils n'ont pas de moyens pour se défendre et ils deviennent aisément la proie des trafiquants. Les personnes de castes inférieures ont moins facilement accès à l'éducation et aux emplois. Les options qui s'offrent aux femmes sont particulièrement limitées. L'Inde compte également beaucoup de travailleurs asservis pour dettes. C'est une pratique culturelle que l'on voit beaucoup dans les régions rurales: des personnes sont forcées de travailler en fonction d'une servitude qui les oblige à rembourser les dettes contractées par leurs parents. En Inde, au Bangladesh et au Népal, le travail des enfants est un grave problème. Les enfants sont forcés de travailler pour des salaires de misère dans des industries dangereuses, dans la confection de bracelets de verre et dans des cirques.
     Une tendance nouvelle qui est en train de prendre de plus en plus de place — notamment au Bangladesh —, c'est le trafic d’organes humains aux fins de transplantation. L'achat et la vente à grand prix d'organes — surtout des reins — à l'intérieur et au-delà des frontières nationales sont de plus en plus fréquents.
     Les plus récentes victimes de la traite des personnes, ce sont les enfants qui sont enrôlés comme soldats ainsi que les jeunes chômeurs insolvables qui sont recrutés comme jihadistes islamiques.
    Je vais maintenant passer aux facteurs qui favorisent la traite des personnes. En Asie du Sud, la traite est exacerbée par la faiblesse des économies, les inégalités sociales et économiques ainsi que par les traditions socioculturelles. Il ne fait aucun doute que l'exclusion économique, l'exclusion sociale et le manque d'humanité sont la racine de la traite des personnes. La pauvreté ou l'obligation de subvenir aux besoins de base, en conjonction avec d'autres facteurs comme l'absence d'éducation, les familles dysfonctionnelles, l'exclusion sociale, la discrimination à l'endroit des femmes — une discrimination cautionnée par la culture — ainsi que la discrimination et la violence fondées sur le sexe qui en découlent sont les facteurs les plus souvent évoqués comme favorisant la traite de personnes. Les jeunes filles des régions rurales du Bangladesh, de l'Inde et du Népal sont vendues aux fins de mariage ou de prostitution.
     Comme causes de la prévalence de la traite des personnes, il convient aussi de parler des pratiques lamentables en matière de gouvernance, de loi et d'ordre ainsi que des systèmes de justice sociale et de justice pénale inopérants. Les catastrophes naturelles, surtout au Bangladesh et au Népal, augmentent aussi la vulnérabilité des populations.
     Malheureusement, certains gouvernements d'Asie du Sud imposent des mesures punitives aux victimes. Ce phénomène se voit surtout lorsqu'il s'agit de femmes qui ont été forcées à se prostituer. C'est un fait reconnu que les filles et les femmes qui sont secourues des bordels indiens se font agresser sexuellement par les policiers ainsi que par le personnel des centres d'éducation surveillée du gouvernement.

  (1315)  

    La corruption et les pots-de-vin impliquant des fonctionnaires, des forces de l'ordre, des avocats et les trafiquants ont ces deux effets nuisibles de nourrir la traite et de saper les efforts pour la contrer. Au Bangladesh et en Inde, des preuves de collusion entre les trafiquants d'organes et les médecins ainsi qu'entre les avocats et les trafiquants ont été mises au jour. Les procès concernant les cas de traite n'avancent pas à moins de pots-de-vin. En Inde, la police, l'appareil judiciaire et les gardes-frontières sont impliqués dans la traite des personnes et ils en retirent des avantages financiers. Au Népal, on s'est aperçu que les trafiquants utilisaient leurs contacts avec les politiciens, les gens d'affaires, les fonctionnaires de l'État, les agents des douanes et la police frontalière pour faciliter la traite, et qu'ils versaient des pots-de-vin en échange de protections et de faveurs. Toute cette corruption ne fait qu'entretenir la traite des personnes.
    Je vais parler très brièvement des mesures qui pourraient être prises pour contrer la traite des personnes, laquelle est un frein au développement.
    La traite des personnes profite de la pauvreté et de l'insolvabilité économique de ses victimes. De plus, à cause de l'incidence négative qu'elle a sur la productivité et l'efficacité, la traite des personnes entrave le développement. La traite des personnes alimente l'exploitation puisqu'elle soutient le maintien des salaires à des niveaux très bas et qu'elle encourage même la suppression des salaires. Elle nuit à la fois à la vigueur du marché de l'emploi et au développement.
     Ces effets négatifs de l'exploitation peuvent être contrecarrés par des interventions dans différents domaines: marché de l'emploi, protection sociale, développement social, réformes juridiques, etc. La plupart de ces interventions auront également un effet préventif indirect. Les programmes de lutte contre la pauvreté qui visent à réduire les vulnérabilités sociales, économiques et environnementales sont des moyens potentiellement très efficaces d'éliminer les facteurs qui favorisent la traite des personnes. Des programmes de développement pourraient aussi permettre de venir à bout d'autres vulnérabilités, dont celles qui découlent de l'analphabétisme et du manque d'éducation, du manque de connaissances, des politiques discriminatoires, de l'exclusion sociale, de la discrimination culturellement admise à l'endroit des femmes et de la discrimination culturellement admise fondée sur le sexe.
    Merci beaucoup.

  (1320)  

    Merci beaucoup, madame Banerjee.
    Nous allons passer à la période de questions. C'est le député Anderson qui donnera le coup d'envoi.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux remercier notre témoin de sa présence.
     Madame Banerjee, vous avez parlé des enfants-soldats. Nous avons entendu parler des situations dans lesquelles certains jeunes se retrouvent et des conséquences que ces situations peuvent avoir. Or, vous avez mentionné celle de ces jeunes hommes qui sont sans ressource aucune. La plupart d'entre eux seraient sans emploi. Ils seraient achetés et rémunérés par des jihadistes. Je ne sais pas si cela entrerait dans votre définition d'exploitation consensuelle, mais nous savons que les gens sont achetés et échangés pour servir dans les rangs des terroristes. Pourriez-vous nous en dire un peu plus long à ce sujet?
     Oui.
    Pour ce qui est de savoir si les enfants-soldats entrent dans le consensuel ou dans le non consensuel, j'aurais tendance à dire que c'est non consensuel, puisque ces enfants sont très jeunes et complètement inconscients. Pour ce qui est des jeunes hommes qui n'ont pas d'emploi, je peux vous donner l'exemple de l'Afghanistan et des personnes à qui j'ai parlé là-bas.
    L'autre jour — et c'est un exemple bien réel — j'ai commandé de la nourriture afghane. Le livreur était un jeune Canadien d'origine afghane qui parlait un anglais hésitant. J'ai une réplique d'un Bouddha de Bamiyan. Bamiyan est une province de l'Afghanistan, et les talibans ont détruit les statues de Bouddha, les magnifiques statues de Bouddha qui se trouvaient là. J'ai visité les grottes qui sont sur ce site. Elles sont vides maintenant, mais je les ai quand même visitées. Vous pouvez encore y acheter des répliques de ces statues. Alors, j'en ai acheté une et je l'ai accrochée au mur qui est dans mon entrée.
    Voyant cela, le jeune homme m'a demandé si je connaissais l'Afghanistan, si j'y étais déjà allée. Je lui ai répondu que oui. Puis, dans son anglais vraiment rudimentaire, il n'a pas arrêté de me dire comment les choses étaient terribles là-bas pour les Afghans ordinaires, et tout spécialement pour les jeunes qui n'ont pas d'emploi. Ils n'ont pas d'éducation non plus. S'ils n'ont pas d'argent, ils ne peuvent pas acquérir une éducation. Du reste, les écoles ferment et il n'y a pas d'emplois. Il m'a dit: « Je suis si heureux d'avoir été en mesure de sortir de l'Afghanistan. Si je n'étais pas sorti, je serais un taliban à l'heure qu'il est. Je me serais joint aux talibans parce que je n'avais aucune autre source de revenus. Je suis content que le Canada m'ait accepté comme réfugié et que j'aie pu me rendre jusqu'ici. »
    C'est un phénomène qui est très important et qui se produit partout. Ce n'est pas seulement là-bas; cela se produit même dans les pays de l'Union européenne. Ce que mes recherches et mes lectures m'ont permis de comprendre, c'est que lorsque les réfugiés de certains pays africains migrent, ils optent pour des pays arabes, pour des pays de l'Union européenne. Ils ne sont pas intégrés à la société. Ils jouent dans leur coin. Ce sont des jeunes, pas exactement des enfants, mais des jeunes qui jouent dans leur coin...
    Je m'excuse de vous interrompre, mais j'ai une question de suivi que je tiens à vous poser. Alors, j'aimerais le faire avant de manquer de temps et d'être interrompu par le président.
    Pour donner suite à ce que vous disiez, il convient de mentionner que, ces dernières années, nous avons grandement axé notre aide au développement international sur les femmes et les enfants. Je veux revenir sur la question des jeunes hommes sans emploi et sans ressource. Nous envoyons de l'aide dans des pays où, essentiellement, les gouvernements sont instables, les économies fonctionnent à bas régime et les droits de la personne ne sont pas encadrés.
    Devrions-nous opter pour une approche plus holistique que celle que nous avons à l'heure actuelle? Faisons-nous fausse route en nous focalisant sur un seul groupe de personnes alors que la plupart des troubles que nous vivons semblent provenir de ces jeunes hommes qui n'ont pas d'éducation, pas d'emploi et aucun espoir d'avenir?

  (1325)  

    Je crois que je serais d'accord avec vous, si c'est ce que vous dites.
     En fait, c'est de là que je suis partie. Ma définition de la traite des personnes ne s'applique pas qu'aux femmes et qu'aux enfants. Elle s'applique aussi aux hommes, et il est très important de les y inclure. Oui, les femmes sont vraiment la section la plus vulnérable de la société, mais c'est aussi vrai pour les jeunes hommes qui sont sans emploi.
    Je ne sais pas si vous êtes allé dans l'un des pays qui sont secoués par des conflits armés, comme le Yémen ou l'Afghanistan, mais sachez que les conditions des hommes y sont vraiment terribles. Ils mendient dans les rues. Ce sont ces gens que les talibans ciblent, tout comme le groupe État islamique d'ailleurs. Le groupe État islamique cible les pays de l'Union européenne.
    Compte tenu de la situation actuelle, je crois qu'il est extrêmement important de nous focaliser également sur les jeunes dans les pays en guerre ou sortant d’un conflit. Bien sûr, cela ne signifie pas que nous devons laisser tomber l'aide sexospécifique.
     Il me reste encore un peu de temps, alors pouvez-vous nous en dire un peu plus long sur ce que vous savez concernant le rôle de la corruption? Vous avez parlé des économies chancelantes, des inégalités et des traditions. Habituellement, lorsque nous intervenons pour tenter de changer les choses, nous nous butons à ces trois éléments. Pourriez-vous nous en dire un peu plus au sujet de la corruption et de l'incidence qu'elle a sur cette notion d'exploitation et sur la traite proprement dite?
    De plus, vous avez surtout insisté sur le fait que la traite des personnes était un phénomène régional. Selon vous, dans quelle mesure la traite des personnes est-elle aussi un phénomène international? Votre expérience vous porte-t-elle à croire qu'il s'agit d'un phénomène surtout régional ou considérez-vous plutôt qu'il s'agit avant tout d'un problème mondial?
    Pour ce qui est de savoir si la traite est surtout à l'intérieur de la région, mais aussi transnationale, je dirais qu'elle est très transnationale, surtout lorsqu'il s'agit de traite consensuelle. Elle touche à la fois les hommes et les femmes.
     Au Bangladesh, la plus importante contribution au PIB provient des transferts de fonds. Les transferts de fonds sont le soutien financier que les victimes de la traite envoient dans leur pays d'origine lorsqu'elles vont travailler ailleurs. Les victimes se retrouvent surtout au Moyen-Orient, mais il y en a aussi au Canada et en Amérique du Nord.
    Vous vous souvenez peut-être du cas de Mme Khobragade, cette diplomate qui travaillait pour l'ambassade de l'Inde. Elle avait amené avec elle une femme qu'elle faisait travailler pour un très maigre salaire. Cette femme travaillait de 15 à 18 heures par jour, parfois davantage. C'est ce genre de choses que l'on voit, surtout au Moyen-Orient.
    Au Bangladesh, j'ai rencontré des femmes et des hommes qui étaient revenus de ce type de... On ne peut pas parler de travaux forcés. C'est un travail qui est fait de manière consensuelle, mais c'est de l'exploitation parce que les salaires sont très bas.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Mme Khalid.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous, madame Banerjee, de votre témoignage.
    Comme vous le disiez, la traite des personnes est un phénomène international qui concerne toute la planète. C'est quelque chose qui existe au Canada et, si l'on en croit les différents membres du Congrès à qui nous avons parlé, c'est aussi un problème aux États-Unis.
    C'est très intéressant. Vous avez parlé d'un certain nombre de facteurs qui contribuent à la traite des personnes et, dans ce cas, à la traite aux fins d'exploitation sexuelle plus particulièrement. Vous avez dit qu'en Asie du Sud, la pauvreté est l'un des facteurs prédominants. La pauvreté n'est peut-être pas un facteur aussi important dans des endroits comme le Canada ou les États-Unis.
    Vous avez parlé un peu d'autres facteurs, dont l'exclusion sociale. J'aimerais vous interroger à ce sujet.
    Nous avons eu de très bons échanges sur les jeunes hommes et sur le fait qu'ils étaient eux aussi vulnérables, mais je soutiens que les femmes le sont énormément. Les mariages forcés sont un exemple où l'on voit des gens sans éducation forcer leurs filles — qui sont souvent considérées comme un fardeau pour la famille — à se soumettre à la traite.
    Pouvez-vous parler de la culture sociale et de la discrimination à l'endroit des femmes?

  (1330)  

     C'est un sujet que je connais très bien. Je m'excuse, je n'ai pas parlé de la corruption. Je dirai peut-être rapidement deux ou trois choses là-dessus lorsque nous arriverons à la fin.
    Tous les pays d'Asie du Sud ont une tradition socioculturelle, cela ne fait aucun doute. Je suis née en Inde et j'y suis restée jusqu'au secondaire, puis j'ai déménagé au Canada.
    Il y a différents problèmes. La question du mariage est une question très importante. Que dire? Ce sont des pratiques qui ont cours et qui continuent d'avoir cours. Or, l'un des problèmes, c'est que les classes éduquées — et, en Inde, elles ne sont pas nécessairement riches — qui pourraient avoir une influence ne sont pas assez conscientes de cette dynamique et qu'elles ne sont pas prêtes à s'attaquer à ces questions. Je crois qu'il est très difficile pour les pays étrangers de travailler sur cet aspect des choses, sur ces traditions socioculturelles. Vous pouvez aller là-bas pour essayer de leur faire la leçon, mais cela ne marchera pas. Il n'y a rien que vous puissiez y faire. Ce sont des traditions millénaires. Il y a des activistes et des ONG qui travaillent sur place. Je ne dirais pas qu'ils n'ont aucun impact; ils ont un certain impact, mais pour que les choses changent, il faut que les classes éduquées se mettent de la partie.
    Bien entendu, il y a des lois internationales. Toutefois, les lois nationales ne sont pas toujours appliquées. Ces pays sont si populeux que cela rend la chose impossible. Encore une fois, la corruption contribue aussi à faire en sorte que ce problème ne soit pas abordé.
    Vous avez également mentionné le fait que les gens franchissent les frontières et se rendent dans différentes parties du monde. Pouvez-vous parler des mesures que les pays d’Asie du Sud ont prises pour travailler les uns avec les autres à la résolution des problèmes liés à la traite de personnes à des fins sexuelles? Y a-t-il des exemples de réussite? Quels sont les plus grands défis qu’ils doivent relever? Vous avez mentionné que la corruption en faisait partie, mais quelles autres difficultés doivent-ils affronter?
    En ce qui concerne la coopération régionale, les pays ne collaborent qu’avec la SAARC. Cependant, à mon avis — et j’étudie la question depuis très longtemps — la SAARC ne fonctionne pas vraiment très bien. C’est principalement dû au fait que deux des pays membres, le Pakistan et l’Inde, ne s’entendent pas et n’ont fait aucun effort pour travailler ensemble. Leur désaccord ne se limite pas à ce seul enjeu; il s’applique à divers autres enjeux.
    C’est le seul organisme de coopération qui existe. En plus de cet organisme, il y a des ONG internationales qui permettent de coopérer à l'échelle régionale. Elles sont efficaces dans une certaine mesure, mais, personnellement, je ne peux en ce moment vous donner aucun exemple précis de cette coopération qui a fonctionné, sauf dans certains cas où des filles ou des jeunes ont été secourus et où diverses ONG se sont réunies dans une région pour tâcher de les aider.

  (1335)  

    Voici la dernière question que j’aimerais vous poser.
    J’imagine que la traite de personnes à des fins sexuelles ou non comporte un immense élément commercial grâce auquel des organisations profitent de la vente ou de l’exploitation de personnes à des fins sexuelles ou à des fins de travail forcé. Y a-t-il des différences entre les organisations idéologiques telles que Daech qui, comme cela a été mentionné auparavant, se sert peut-être de la traite de personnes comme moyen d’intimidation? N’êtes-vous pas d’accord pour dire que, pour ces organisations, le caractère commercial et lucratif de cette activité est plus important que son rôle distinct à titre de moyens d’intimidation?
    Oui, je dois convenir que l’exploitation commerciale est un élément très important et que même la corruption que nous observons vise les profits commerciaux.
    Cela ne semblera pas très édifiant, mais je vais mentionner les redevances que le Bangladesh touche en raison de ces gens qui vont dans des pays étrangers où ils sont exploités économiquement. Le gouvernement du Bangladesh n’a pris aucune mesure à cet égard. En fait, ce gouvernement encourage cette pratique et affirme qu’elle est consensuelle. Elle est effectivement consensuelle, mais, lorsque ces gens vont dans divers pays, en particulier au Moyen-Orient, ils ne bénéficient d’aucune protection. Aucune loi internationale ne peut les protéger. Personne ne les surveille. L’ONUDC est responsable de la lutte contre la traite de personnes, mais, en même temps, personne ne surveille cette traite de façon adéquate.
    J’ai rencontré des gens qui revenaient de l’étranger — en particulier des femmes qui revenaient du Moyen-Orient — qui m’ont dit qu’ils faisaient l’objet d’une stigmatisation sociale. Ces personnes ne se sont pas nécessairement prostituées. Elles travaillaient là-bas, mais il n’en reste pas moins que, lorsque des femmes se rendent ainsi dans des pays arabes, elles sont victimes de préjugés sociaux. Elles disent que notre gouvernement et certaines organisations non gouvernementales devraient leur venir en aide, mais je pense que le gouvernement du Bangladesh ne tentera pas vraiment de faire quoi que ce soit parce qu’il est motivé par des profits qui prennent la forme de redevances.
    Merci beaucoup.
    Députée Hardcastle.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, madame Banerjee, d’être venue.
    Je vais vous poser une question et vous permettre d’utiliser mon temps de parole pour décrire les différences entre les pays sources et les pays de destination. J’aimerais également que vous vous étendiez sur vos idées concernant les causes profondes de la tradition sociale, la capacité en matière d’application de la loi et le contexte dans lequel chacun de ces facteurs est le plus utile pour lutter contre la traite de personnes à des fins sexuelles.
    Quelle était la dernière question ?
    Elle concernait la pertinence d’employer des programmes d’éducation pour éliminer les causes sociales fondamentales, ainsi que la capacité en matière d’application de la loi. Je pose la question parce que nous avons besoin des deux mesures pour lutter contre ce problème. Toutefois, vous utilisez probablement différentes tactiques et stratégies une fois que vous avez reconnu qu’un pays est une destination plutôt qu’une source.
    Les sources sont surtout les pays les plus pauvres de l’Asie du Sud. Comme je l’ai indiqué, l’insolvabilité est le principal problème, même en ce qui a trait à la traite de personnes à des fins sexuelles. Les sources sont donc les pays les plus pauvres. Le Bangladesh n’est jamais un pays de destination; c’est un pays source.
    Par ailleurs, l’Inde est un pays source pour la traite de personnes fondée sur le sexe en raison de ses traditions sociales. De plus, une main-d’oeuvre consensuelle indienne est exportée vers les pays arabes, les Émirats arabes unis, mais vous constaterez que, dans les Émirats arabes unis, il y a surtout des gens du Bangladesh.
    Il y a des pays sources, des pays de destination ainsi que des pays de transit. Les Maldives et le Sri Lanka sont des pays de destination parce que leur situation économique est meilleure. Par conséquent, vous pouvez clairement remarquer que les habitants des Maldives ne quittent pas leur pays pour chercher des emplois. Voilà les deux principaux pays de destination.
    Le PIB de l’Inde augmente très rapidement. C’est un pays émergeant, et il s’ensuit qu’il est en train de devenir un pays de destination. Du même coup, l’Inde est le principal pays de destination à des fins de prostitution pour le Népal et le Bangladesh. C’est aussi un pays de transit. En fait, les Népalais se rendent en Inde, c'est-à-dire la région centrale où les trafiquants s’emploient à recruter leurs victimes. Voilà comment les choses fonctionnent.
    Quel était le deuxième sujet dont vous avez parlé?

  (1340)  

    C’était l’éducation, les causes profondes et l’application de la loi.
    L’éducation est l’une des causes profondes. Vous savez, si les gens pauvres et même les chômeurs étaient sensibilisés aux périls de la traite de personnes et à ce qui pourrait se produire si, sans savoir, ils vont là-bas simplement pour gagner de l’argent, je dirais qu’il y aurait de moins en moins de victimes de la traite de personnes.
    Toutefois, comme je l’ai indiqué, même les classes de gens instruits ne contribuent pas vraiment à rectifier la situation. Si vous parlez aux Indiens très instruits, ils vous diront: « Eh bien, nous n’avons pas ces problèmes ici. Tous les problèmes surviennent au Népal, au Bangladesh et au Pakistan, c'est-à-dire dans des pays principalement musulmans. » Voilà les paroles qui leur échapperaient, mais vous devez les inclure dans vos efforts. Vous devez les englober dans le groupe que vous ciblez en vue de l’éduquer.
    La sensibilisation devrait viser tant ceux qui pourraient être victimes de la traite de personnes que les autres membres de la société qui pourraient contribuer à éliminer son existence.
    Ai-je plus ou moins répondu à votre question?
    Oui. Pour étoffer ce que vous venez de dire, devons-nous vraiment éduquer les gens, ou faut-il encourager ou promouvoir le militantisme social afin que les gens dénoncent certaines traditions, même une tradition comme celle des mariages forcés? C'est là une question de droits de la personne. Intégrez-vous ces messages dans les programmes d’éducation?

  (1345)  

    Non, le fait est qu’ils disposent à l’échelle nationale de mesures législatives portant, entre autres, sur les mariages précoces, les mariages forcés et la lutte contre la discrimination fondée sur la caste, mais le problème, c’est qu’elles ne sont pas mises en œuvre. En ce qui concerne l’éducation, je parle aussi de scolarisation telle que celle visant à augmenter le taux d’alphabétisme. Un taux d’alphabétisme accru aidera à atténuer la situation. Cela a fonctionné pour la planification familiale. À l'aide d'affiches, vous pourriez sensibiliser les gens aux périls de la traite de personnes, afin de les dissuader de tomber dans le panneau. Voilà une solution.
    Une autre solution consiste à promouvoir le militantisme. Au Bangladesh et en Inde, les gens instruits ont fondé de nombreuses organisations. Au Népal, il y en a peut-être moins, mais les organisations indiennes se rendent au Népal. Au Bangladesh, il y a une organisation appelée BRAC qui ne s’occupe que des questions de traite de personnes. Par conséquent, ces organisations existent, mais, comme je l’ai indiqué, il est extrêmement difficile d’identifier les victimes et de maîtriser ce problème.
    Ces efforts sont en cours et sont nécessaires, mais le gouvernement doit être… Je dirais que la volonté politique est le principal élément manquant.
    Merci beaucoup.
    Député Fragiskatos.
    Merci d’être venue aujourd’hui.
    Au cours de vos observations, vous avez mentionné qu’un certain nombre de facteurs étaient responsables de la situation. Vous avez déclaré que les économies faibles étaient les principales coupables lorsqu’il s’agit d’expliquer la raison pour laquelle le problème existe en premier lieu. Je me demande si vous pourriez donner suite à ce que vous avez dit au sujet des programmes de réduction de la pauvreté en tant que moyens de remédier à ce problème particulier et de contribuer, en fait, à combattre le problème de la traite de personnes. Je me demande si vous pourriez répondre à la question en ne perdant pas de vue le contexte suivant. Je sais que vous avez travaillé avec l’ACDI. En tant que puissance moyenne, le Canada a grandement contribué à l’élaboration de politiques à l’échelle mondiale, et il a fait un excellent travail à cet égard au cours de son histoire. Toutefois, il y a toujours de nouvelles choses à apprendre. Comment pouvons-nous participer de manière à éviter d’imposer notre approche ou notre point de vue et à permettre plutôt aux gens d’être les maîtres d’oeuvre de projets particuliers?
    Permettez-moi de vous donner un exemple. On a beaucoup parlé du microcrédit, par exemple, et de son potentiel pour ce qui est de permettre aux gens sur le terrain d’être les maîtres d’oeuvre de leur propre vie au moyen de projets économiques. Je me demande si des projets de ce genre contribueraient à susciter un sentiment d’estime de soi et le sentiment d’indépendance nécessaire pour combattre les problèmes d’inégalité qui existent dans les économies faibles et si cela nous aiderait en fait à nous attaquer au problème de la traite de personnes d’une façon qui n’a pas été conçue par nous, mais plutôt par les gens sur le terrain, que nous aiderions seulement au besoin.
    Comme vous le savez, j’ai travaillé pendant de nombreuses années à l’ACDI. Si je travaillais toujours pour le gouvernement, je ne pourrais pas vous dire cela, mais, aujourd’hui, je peux déclarer que je pourrais compter sur les doigts d’une main les programmes qui ont vraiment réussi à réduire la pauvreté et à remédier à certains autres problèmes.
    Le microfinancement est l’un des programmes que vous avez mentionnés. Ce programme a été couronné de succès malgré ses nombreuses lacunes. Je ne parlerai pas de ces lacunes, mais elles sont signalées aux militants et aux organisations non gouvernementales qui mettent en oeuvre ces programmes. En dépit de leurs lacunes, ces programmes ont très bien réussi à apporter aux gens exactement ce que vous avez décrit, à savoir l’estime d’eux-mêmes et la conscience d’être maîtres de leurs actions.
    Je vais vous donner l’exemple de ma propre expérience au Bangladesh. J’ai obtenu ma première affectation là-bas en 1983, et je suis restée sur place jusqu’en 1986. Maintenant, j’y retourne dans le cadre d’un programme pratique dont je m’occupe et qui offre des cours sur le terrain à nos étudiants de l’Université d’Ottawa. J’amène les étudiants travailler à des projets pratiques qui sont mis en oeuvre sur le terrain par des organisations non gouvernementales, étant donné que le gouvernement ne dispose pas de la capacité nécessaire pour exécuter ce genre de programmes. Les programmes sont soutenus par le gouvernement, mais ils sont exécutés par des organisations non gouvernementales.
    J’étais là-bas lorsque ces programmes ont débuté il y a environ 10 ans, c’est-à-dire après l’indépendance du Bangladesh. Il s’agit principalement de programmes pour les femmes axés sur l’égalité des sexes.
    Ce que j’ai observé alors dans le cadre de programmes qui étaient même financés par nous — et je vous en reparlerai — et ce que je vois aujourd’hui dans le comportement des femmes diffèrent à plusieurs égards. Je ne peux même pas comparer les deux. Ces mêmes femmes, qui ne pouvaient probablement pas m’adresser même la parole — et je suis une femme qui parle leur langue — sans porter leur voile, s’expriment maintenant en public devant des hommes, et il s’agit d’une société musulmane. Elles critiquent le gouvernement, les organisations non gouvernementales en tant que telles et les hommes.
    Par exemple, en ce qui concerne leur recherche de la justice, BRAC, une organisation très bien connue, demande aux femmes de se plaindre devant le tribunal du district. Une femme a dit que c’était facile pour moi de dire qu’elle devrait se plaindre au district de la violence faite aux femmes, mais que son époux l’apprendrait et l’assassinerait. Elle m’a demandé ce que j’allais faire à ce sujet. Cela prouve qu’il y a probablement encore beaucoup de travail à accomplir et que les femmes ne peuvent toujours pas faire certaines choses par elles-mêmes, en raison de certaines traditions et barrières sociales et culturelles. Cependant, en même temps, elles ont le courage de prendre la parole.

  (1350)  

    Cela se produit en raison du microfinancement. Elles ont le courage de prendre la parole parce qu’elles sont en mesure de toucher un revenu et d’occuper une position dans la société et leur famille, et qu’elles ont gagné le droit d’être traitées avec dignité. Cela est extrêmement important.
    Ce que je retiens de vos commentaires, c’est qu’il y a des programmes particuliers qui sont mieux adaptés à la lutte contre des problèmes comme la traite de personnes. Je sais que nous disposons d’un temps limité, et je pense avoir utilisé la totalité de mon temps de parole, mais vous avez mentionné un mémoire écrit. Si vous prenez la décision de rédiger un bref mémoire à notre intention, je me demande si vous pourriez y présenter des programmes particuliers qui, d’après votre expérience, ont permis d’obtenir le genre de résultats que vous venez de mentionner et qui, par conséquent, nous aideraient le mieux à lutter contre les problèmes de traite de personnes.
    Je serais ravie de le faire. J’étais découragée à ce sujet parce qu’en 10 minutes, il est impossible d’aborder ces questions.
    M. Peter Fragiskatos: Je sais.
    Merci. Nous vous sommes reconnaissants d’avoir offert de nous envoyer des renseignements supplémentaires.
    Nous avons le temps pour une dernière question de la part du député Sweet.
    Merci, monsieur le président. J’espère que nous disposons d’un peu plus de temps que cela. Je pense qu’il nous reste cinq minutes. J’ai deux ou trois choses à dire.
    Avant de poser une question, je tiens simplement à signaler à notre équipe d’analystes que, selon moi, l’un des éléments que nous devons cerner dans notre rapport à la fin de l’étude, c’est le témoignage d’aujourd’hui de Mme Banerjee, ainsi que quelques notes d’information, dont celles d’aujourd’hui et une autre datant de plus tôt.
    Nous disposons de cinq chiffres différents. Il y a les 150 000 victimes de la traite provenant de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime, les 150 000 femmes et filles citées dans les notes de l’Agape Research Foundation, les 20 000 femmes signalées par le gouvernement indien, les 20,9 millions de victimes du travail forcé à l’échelle mondiale selon l’Organisation internationale du travail, dont nous savons qu’un important pourcentage provient d’Asie du Sud, et un indice mondial de l’esclavage de l’ordre de 36 millions présenté par Mme Banerjee. Je me demande si nous pourrions tenter de créer un graphique illustrant ces chiffres et de comprendre comment nous pourrions nous efforcer — et je sais que ces chiffres sont difficiles à cerner — de conférer à ces chiffres une certaine légitimité ou véracité dans notre rapport, du mieux que nous pouvons.
    Il y a, monsieur le président, un autre enjeu sur lequel nous devrions également mettre l’accent lorsque nous arriverons à nos conclusions. Mme Banerjee a mentionné un aspect dont nous ne retrouvons pas souvent la trace, en ce sens que la plupart des gens vulnérables sont des femmes et des filles, mais, dans son exemple qui est excellent, un jeune homme était, en raison d’inégalités économiques, victimisé par le régime taliban ou l’État islamique, puis ce même homme commençait plus tard à victimiser des femmes ou à en faire la traite. Je pense que nous pourrions tenter de mettre l’accent là-dessus, aussi, afin de déterminer exactement dans quelle mesure ces jeunes hommes ou ces hommes, laissés-pour-compte en raison des inégalités, contribuent au problème.
    L’un des aspects mentionnés dans notre note d’information — et je pense que vous y avez peut-être fait allusion, madame Banerjee, pendant que je tentais, je m’en excuse, d’écouter et de prendre des notes en même temps — avait trait au prélèvement d’organes. Cela apporte une différente dimension à la traite de personnes, parce que cela veut dire qu’il est nécessaire d’avoir recours à des personnes ayant des talents très perfectionnés pour extraire les organes et les maintenir, bien entendu, en bon état afin qu’ils puissent être transplantés et rapporter quelque chose. Disposez-vous d'une quelconque preuve indiquant que cette activité s’intensifie en Asie du Sud?

  (1355)  

    Je vais devoir rechercher ces preuves.
    Il y a collusion parce que le processus est à ce point perfectionné. J’ai mentionné que les médecins et les trafiquants sont de connivence. Les deux groupes tirent profit de cette activité. Cela est certainement mentionné dans plusieurs études qui traitent des organes. Je pense que même dans le protocole de l’ONUDC ou dans le rapport que l’organisation publie, il y a… Vous avez signalé votre souci d’obtenir de meilleures statistiques. Le rapport de l’ONUDC de 2016 est disponible. Je vais y jeter un coup d’oeil. Je l’ai examiné, et il vous est possible d’obtenir de meilleures statistiques dans ce document aussi.
    D’accord.
    J’ai une dernière brève question à poser, monsieur le président.
    Nous avons abondamment parlé de la pauvreté et de son rôle dans l’intensification du problème. Je ne nie pas cela. J’aime ce que mes collègues ont dit à ce sujet, à savoir que le problème est en réalité lié à la disparité économique, parce que lorsqu’une personne est plus riche qu’une autre, elle peut victimiser l’autre personne. La disparité joue aussi un énorme rôle à cet égard.
    Je veux vous dire quelque chose ou peut-être poser cela comme postulat. Je pense que l’une des raisons pour lesquelles ce crime continue de sévir dans la mesure où il le fait, c’est qu’il est facile de le commettre impunément en raison des aspects culturels et des genres de profits qu’on peut en retirer. Si vous êtes arrêté en possession de drogues dans certains de ces pays, vous serez incarcéré pendant 20, 30, 40 ou 50 ans. Par contre, vous pouvez gagner beaucoup d’argent en faisant la traite de personnes et vous en tirer très facilement, en particulier lorsque les victimes sont pauvres. Je sais que, dans le contexte nord-américain, si vous rendez ces personnes dépendantes de la drogue, elles ne pourront même pas témoigner efficacement contre vous.
    Il est très vrai qu’on ne se soucie pas suffisamment d’identifier les victimes. L’identification des victimes permet de cerner plus aisément certains des problèmes, et, malheureusement, cette identification n’a pas lieu. C’est une lacune qui devrait être examinée.

  (1400)  

    Monsieur le président, je tenais simplement à faire valoir que les profits et la corruption font partie de cette équation, tout comme la pauvreté.
    Merci beaucoup, madame.
    Merci beaucoup, madame Banerjee. Nous vous sommes très reconnaissants du témoignage que vous avez apporté devant nous aujourd’hui. Nous vous savons également gré d’avoir offert de vous acquitter d'un petit devoir et de nous le faire parvenir par la suite, afin que nous puissions mieux cerner certains de ces enjeux.
    Je vous remercie infiniment de m’avoir invitée et d’avoir accepté mon exposé.
    Merci.
    Nous allons poursuivre la séance à huis clos pendant quelques minutes, si c’est possible. Il y a deux autres points dont nous allons discuter.
    Monsieur le président, je vais devoir présenter le mien un autre jour, car je dois partir.
    Alors, la séance est levée.
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