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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 059 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 9 mai 2017

[Enregistrement électronique]

  (1305)  

[Traduction]

    La séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne est ouverte. Aujourd'hui, nous avons deux distingués témoins, dont un ancien invité et membre du Sous-comité, et une personne avec qui nous avons en commun diverses préoccupations et que nous aurons le plaisir d'entendre pour la première fois, je crois.
    Avant de commencer, j'aimerais expliquer que nous amorçons deux jours d'audiences dans le cadre de la Semaine de la responsabilisation de l'Iran que le Sous-Comité tient annuellement. Au cours de la dernière année, les violations des droits de la personne et la répression se sont intensifiées en Iran, où l'on continue de recourir aux exécutions et à la torture, et où les droits politiques et civils continuent de se détériorer. Nous, les membres du Sous-comité des droits internationaux de la personne, voulons indiquer clairement que les violations des droits de la personne en Iran demeurent au sommet de nos préoccupations et qu'il faut continuer d'y accorder de l'importance et de l'attention.
    Pendant ces deux journées d'audiences, nous allons nous concentrer sur la répression exercée par le régime iranien en particulier sur les prisonniers politiques, ainsi que sur les graves violations des droits de la personne que subissent la communauté et les particuliers LGBTQ.
    Aujourd'hui, nos témoins sont Corinne Box, directrice des relations gouvernementales de la Communauté bahá'íe du Canada, et comme je l'ai déjà dit, l'honorable Irwin Cotler, président fondateur du Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne.
    Madame Box, si vous le voulez bien, nous allons écouter votre déclaration liminaire. Nous écouterons ensuite celle de M. Cotler.
    Merci.
    Monsieur le président, je vous remercie de votre invitation à témoigner devant les distingués membres du Sous-comité.
    Comme vous êtes nombreux à le savoir, la foi baha'ie a vu le jour en Perse, l'Iran d'aujourd'hui. La communauté baha'ie est la plus importante minorité religieuse non musulmane du pays.
    Les persécutions contre les baha'is ont commencé dès la naissance de cette religion au milieu du 19e siècle et se sont intensifiées peu de temps après la révolution islamique de 1979. Elles continuent avec la même intensité à ce jour et affecte les bahai's à toutes les étapes de leur vie, du berceau au tombeau.
    Bien sûr, les chrétiens, juifs et zoroastriens subissent aussi de la discrimination, tout comme les soufis, les sunnites et les chiites dissidents. Cependant, pour la communauté baha'ie, le but du gouvernement est de l'éradiquer. En fait, cela fait l'objet d'une déclaration claire énoncée dans un mémoire gouvernemental signé en 1991 par le guide suprême actuel et dont les dispositions demeurent toujours en vigueur. Cherchant à dissimuler les efforts qu'il continue de déployer pour détruire la communauté baha'ie, le gouvernement iranien a changé de stratégie au fil des années. Les arrestations et les emprisonnements arbitraires se poursuivent, mais en plus, le gouvernement utilise des tactiques moins flagrantes comme l'oppression économique. Il pratique donc l'exclusion systématique de la vie économique, notamment, en refusant aux baha'is l'accès à l'éducation et aux emplois dans la fonction publique et en dirigeant des attaques contre les entreprises baha'ies privées.
    Avant de parler de ce dernier point, j'aimerais mettre en évidence deux autres sujets de préoccupations: la détention continue des dirigeants baha'is d'Iran, et les efforts accrus que le gouvernement déploie pour inciter à la haine contre les baha'is. Il y a en ce moment quelque 90 baha'is emprisonnés en Iran; leur seul crime est leur religion. Sept d'entre eux — deux femmes et cinq hommes — formaient un groupe spécial qui s'occupait des besoins spirituels et sociaux de la communauté.
    Emprisonnés en 2008 après un procès mené sans procédure établie, ils ont été accusés à tort et condamnés aux plus longues peines d'emprisonnement imposées à tout prisonnier de conscience en Iran. Le 14 mai marquera le neuvième anniversaire de leur incarcération. Nous espérons que notre gouvernement saisira cette occasion pour participer aux pressions internationales visant à souligner qu'en vertu de son propre code pénal, l'Iran aurait déjà dû avoir accordé une libération sous condition à ces sept détenus.
    La peine injuste qui leur a été imposée aura été entièrement purgée en mai 2018. Nous devons veiller à ce qu'ils ne soient pas détenus passé cette date. Les déclarations publiques du gouvernement du Canada, toute motion de votre sous-comité et les déclarations de députés particuliers du Parlement produisent des effets.
    Je reviens à la question de l'incitation à la haine fomentée par l'État. Depuis le début de 2014, plus de 20 000 éléments de propagande anti-baha'ie ont été publiés ou diffusés dans les médias officiels, au moyen de dépliants et de tracts, à partir de diverses tribunes et à l'occasion d'expositions et d'événements. Il y en a eu plus de 11 000, seulement en 2016.
    On empêche constamment la communauté baha'ie iranienne d'utiliser les moyens de communication de masse pour répondre aux fausses allégations et aux fausses déclarations, ce qui fait que les préjugés sont maintenant répandus et qu'ils se maintenant de façons réelles et scandaleuses.
    Il s'est créé une culture d'impunité autour de la démonisation des baha'is. Dans un cas extrême, en septembre dernier, un baha'i a été poignardé à mort à l'extérieur de chez lui par deux assaillants qui ont confessé l'avoir tué uniquement à cause de ses croyances religieuses. La discrimination économique semblable à l'apartheid est un autre aspect moins connu de la persécution, mais tout aussi insidieux. Elle est fondée sur la religion, elle est institutionnalisée et elle est encouragée par l'État. Elle a pour but d'appauvrir, d'isoler et, au bout du compte, de chasser les baha'is d'Iran. Trois générations de baha'is ont été privés d'éducation postsecondaire. De nombreux baha'is font des études informelles grâce à une initiative d'autoassistance: l'Institut baha'i d'enseignement supérieur. Certains sont partis étudier à l'étranger, mais on les prive systématiquement d'un accès égal à de nombreux domaines d'emploi.
    De plus, depuis le début de la révolution, les baha'is sont complètement exclus des emplois dans la fonction publique. Dans le secteur privé, ils sont limités dans les types d'entreprises qui pourraient les embaucher sous prétexte qu'ils sont religieusement impurs. On fait des pressions sur les employeurs pour qu'ils n'embauchent pas de baha'is. Par conséquent, de nombreux baha'is, sinon la plupart, ont lancé leurs propres petites entreprises pour subvenir aux besoins de leurs familles et pour contribuer à la communauté.
    Cependant, ils subissent aussi des attaques. Depuis 2007, plus de 1 000 incidents liés à la persécution économique directe ont été documentés par la Communauté internationale bahá'íe. On a, entre autres, révoqué des permis d'entreprise, fait du harcèlement, imposé des amendes, lancé des raids et donné des ordres de destruction de terres agricoles et de bétail.
    Depuis peu de temps, quand les baha'is ferment leurs commerces pour observer les jours saints de leur religion, leurs commerces sont scellés, parfois indéfiniment. C'est la plus récente d'une série de tactiques visant à nier aux baha'is un moyen de gagner leur vie décemment. Plus de 100 entreprises appartenant à des baha'is ont été touchées en novembre dernier et bon nombre sont encore fermées. C'est d'une portée sans précédent et c'est une cause d'inquiétude profonde.
    Ces incidents ont eu lieu malgré les déclarations récentes d'éminents avocats iraniens et de rapporteurs spéciaux des Nations unies, et malgré la demande pressante faite par la Communauté internationale bahá'íe au président d'Iran de cesser cette oppression économique.
    Devant cette persécution impitoyable et systématique, les baha'is d'Iran continuent de chercher à se faire entendre de leur gouvernement par des moyens pacifiques et légaux. Ils ont demandé le respect de leurs droits fondamentaux et ont souligné les contributions qu'ils peuvent faire pour améliorer la société qui les entoure. Même si on leur refuse les droits de tout citoyen, ils cherchent des moyens de travailler pour le bien commun.
    Par cette réponse non violente, ils s'attirent les éloges d'un nombre toujours croissant d'Iraniens. De nombreux Iraniens ont risqué leur propre sécurité pour protéger leurs amis et voisins baha'is. Certains Iraniens en vue, à l'intérieur et à l'extérieur de l'Iran, ont publiquement décrié la persécution des baha'is et demandé le respect de leurs droits.
    La question des baha'is est largement reconnue comme un test décisif pour la situation plus générale des droits de la personne dans ce pays, et elle mérite par conséquent qu'on lui accorde plus d'attention. À cet égard, nous sommes reconnaissants et fiers de compter le Sous-comité et bon nombre de ses membres parmi ceux qui se sont faits les champions de cet enjeu. Soyez assurés que vos gestes et vos déclarations publiques contribuent dans une grande mesure à la protection des baha'is d'Iran. Les autorités iraniennes reçoivent clairement ces messages; ils donnent de la force à ceux qui subissent des injustices, ils réconfortent leurs proches et ils encouragent ceux qui se portent à leur défense.
    En conclusion, nous espérons que nos représentants élus et le gouvernement utiliseront tous les moyens possibles pour obliger les autorités iraniennes à rendre des comptes. Au fil des années, le leadership canadien concernant la résolution annuelle des Nations unies sur la situation des droits de la personne en Iran et les déclarations publiques générales qui ont été faites autant sous le règne des libéraux que des conservateurs sont des composantes essentielles du vaste effort déployé pour veiller à ce que l'Iran n'agisse pas en toute impunité. Il faut continuer d'agir ainsi pour que les récentes tactiques d'oppression de l'Iran ne mènent pas à l'atteinte de son objectif ultime.
    Les manifestations publiques d'inquiétude servent à exposer la vérité sur les violations des droits de la personne commises par le gouvernement iranien. Elles encouragent les Iraniens ouverts d'esprit à favoriser une culture de justice, de tolérance et d'équité.
    Les critiques de l'oppression que le gouvernement fait subir aux baha'is peuvent être conjuguées à l'engagement plus général de faire la promotion de l'inclusion dans les sociétés diversifiées. Ces approches ne sont pas incompatibles.
    Au moment où le Canada cherche à rétablir des liens diplomatiques avec l'Iran, nous ne pouvons ignorer la nécessité d'un dialogue constructif sur les droits de la personne et l'inclusion. Il y a en Iran des baha'is de toutes les origines ethniques et religieuses, et ils sont le reflet de la riche diversité de la société iranienne comme telle.
    Dans notre dialogue avec les autorités iraniennes, nous devons faire appel au gouvernement pour qu'il prenne des mesures claires et concrètes afin d'émanciper les baha'is. Nous continuons d'espérer que les dirigeants iraniens en viendront petit à petit à trouver le courage de protéger la dignité et l'égalité de tous les humains. L'avenir de l'Iran en dépend.

  (1310)  

[Français]

    Je vous remercie de votre aimable attention. Je serai heureuse de répondre à vos questions.

  (1315)  

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame Box.
    Nous passons maintenant directement à M. Cotler. Nous vous écoutons, monsieur.
    Merci, monsieur le président. Je suis ravi de comparaître devant vous avec Corinne Box, et je tiens à la féliciter de son témoignage complet et efficace. Comme elle l'a si bien dit, les conditions de vie et la situation des baha'is représentent un test décisif sur les droits de la personne en Iran ainsi que sur l'avenir de la justice et de la paix en Iran.
    Je suis ravi de pouvoir participer à la Semaine de la responsabilisation de l'Iran, qui se déroule dans le contexte de la convergence toxique des cinq menaces de l'Iran de Khamenei. Je parle de l'Iran de Khamenei afin de le distinguer du peuple et des segments de la population de l'Iran qui sont les cibles d'une répression intérieure massive. En fait, c'est un thème qui sous-tend notre audience d'aujourd'hui, dans le contexte de la Semaine de la responsabilisation de l'Iran.
    Les cinq menaces sont, d'abord, la menace nucléaire, qui justifie maintenant qu'on exerce une surveillance, à la lumière du Plan d'action global conjoint relatif au programme nucléaire iranien, ou PAGC; la menace terroriste, qui fait que l'Iran est caractérisé année après année comme étant l'État qui parraine le plus le terrorisme dans le monde, et dont l'empreinte mondiale ne se limite pas au Moyen-Orient, mais s'étend à l'Asie, l'Afrique, l'Amérique latine et autres; la menace de l'incitation, par laquelle l'Iran de Khamenei perpétue la violation du droit international interdisant l'incitation par un État au génocide, et par laquelle l'Iran s'adonne à des actes continus d'incitation à la haine contre la communauté baha'ie en particulier, comme Mme Box l'a fait remarquer; la menace d'une hégémonie régionale — je parle ici des agressions belligérantes en Syrie, parce qu'il est complice de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité en Syrie, ainsi que de ses agressions belligérantes et hégémoniques au Liban, par sa complicité avec le Hezbollah à l'égard du Liban, de même qu'à l'égard de l'Irak, du Yémen, et d'autres encore; et enfin, ce qui préoccupe surtout le Sous-comité, la répression intérieure massive que je vais résumer dans un style télégraphique, faute de temps.
    Premièrement, l'Iran exécute proportionnellement plus de gens que tout autre pays du monde, comme en a témoigné devant ce comité l'ancien rapporteur spécial sur les droits de la personne en Iran, M. Ahmed Shaheed. Seulement au cours des quatre premiers mois de 2017 — de janvier à avril —, l'Iran a mené des exécutions au rythme de près d'un prisonnier toutes les neuf heures, et le 3 mai, au début du mois en cours, huit personnes ont été exécutées en une seule journée. La tendance des exécutions injustifiées et excessives se poursuit donc.
    Deuxièmement, l'Iran s'adonne à la persécution de plus en plus intense des minorités religieuses et ethniques, les baha'is étant un cas particulier de minorité religieuse qu'on ne se contente pas de soumettre à des accusations et des traitements différentiels et discriminatoires, mais dont on a en fait rendu illégale la pratique même de la religion.
    Troisièmement, c'est la criminalisation des libertés fondamentales, dont la liberté d'expression et de réunion, la liberté de la presse et d'association, et la liberté de conscience et de religion. À ce sujet, Mme Asma Jahangir, rapporteuse spéciale sur les droits de la personne en Iran, a récemment soulevé la question de l'incarcération d'un plus grand nombre de journalistes et de blogueurs que dans tout autre pays du monde.
    Quatrièmement, la torture en détention, décrite de façon graphique dans le rapport de M. Shaheed.
    Cinquièmement, la culture d'impunité qui entoure tout cela et qui s'exprime de façon saisissante par le fait qu'on attribue au ministre iranien de la Justice, Mostafa Pourmohammadi, la responsabilité du massacre de prisonniers politiques commis en Iran en 1988. Cela ne l'empêche pas de présider le système de justice iranien aujourd'hui.
    Sixièmement, l'attaque menée contre la primauté du droit et la moindre apparence d'indépendance du système judiciaire.
    Septièmement, l'attaque contre les dirigeants de la société civile en Iran.

  (1320)  

    Huitièmement, encore une fois, la discrimination sanctionnée par l'État que vous avez mentionnée dans votre introduction, monsieur le président, contre les gais et lesbiennes, les femmes, les minorités vulnérables, et ainsi de suite.
    Neuvièmement — et c'est un autre sujet de préoccupation du groupe présent —, la détention continue et injuste de plus de 1 000 prisonniers politiques, notamment la détention mentionnée de dirigeants baha'is qui purgent des peines de 20 ans de prison, ce qui correspond, dans les faits à une peine de mort, vu leur âge avancé, et la détention d'avocats, de chefs de syndicats, de défenseurs des droits de la personne, d'artistes, d'étudiants et de journalistes. En un mot, comme je l'ai dit, ce sont des leaders de la société civile iranienne, et bon nombre d'entre eux sont menacés d'exécution ou sont effectivement exécutés.
    En fait, je comparais devant vous à titre d'avocat de certaines personnes incarcérées en Iran en ce moment, comme les sept dirigeants religieux baha'is, l'ayatollah Boroujerdi — une des figures héroïques de l'Iran qui, en plus d'être emprisonné depuis 11 ans, subit la torture pour avoir simplement préconisé la liberté de religion en Iran, entre autres. Il y a également Saeed Malekpour, un résident permanent du Canada qui en est maintenant à sa neuvième année de prison en Iran pour avoir simplement exercé son droit de liberté d'expression.
    Je vais maintenant faire un résumé.
    Compte tenu des trois personnes que je représente, les tendances en matière de persécution et de poursuites contre les prisonniers politiques s'expriment sous diverses formes, premièrement, les détentions continues, arbitraires et illégales. En fait, comme le Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations unies l'a constaté, les arrestations arbitraires et illégales ont tendance à être constantes et omniprésentes en Iran.
    Deuxièmement, les détentions de longue durée et illégales avant le procès.
    Troisièmement, comme je l'ai dit, la criminalisation des libertés fondamentales, dans les trois cas que j'ai mentionnés, qu'il s'agisse des baha'is, de l'ayatollah Boroujerdi ou de Saeed Malekpour.
    Quatrièmement, les condamnations injustifiées fondées sur des accusations fabriquées, aussi fausses qu'absurdes, comme l'accusation de corruption sur la terre.
    Cinquièmement, la torture en détention, souvent pour obtenir une fausse confession, comme dans le cas de Saeed Malekpour.
    Sixièmement, la culture d'impunité; dans les cas que j'ai mentionnés, la culture d'impunité est constante. Personne n'a été tenu responsable des gestes illégaux, dans ces cas.
    Septièmement, le déni du droit à un procès équitable, ce qui comprend souvent le déni du droit à un avocat, le déni du droit de présenter un argument indépendant, le déni du droit de réfuter les accusations, le déni du droit de comparaître devant un juge indépendant, et ainsi de suite.
    Huitièmement, l'intimidation et le harcèlement des membres de la famille.
    Neuvièmement, l'incarcération des personnes qui cherchent à les défendre.
    Enfin — et c'est un aspect qu'il faut toujours bien comprendre —, l'approbation de l'État à ces modèles de persécution et de poursuite.
    Si vous me le permettez, monsieur le président, je vais terminer sur des recommandations très précises au comité, concernant la situation des droits de la personne en général.
    Premièrement, j'inviterais le comité à répéter ce qu'il a fait dans le passé, soit condamner les violations systématiques et étendues encouragées par l'État des droits des Iraniens et en particulier des dirigeants de la société iranienne.
    Deuxièmement, il faut reconnaître l'importance de ne pas permettre que l'accord sur le nucléaire nous amène à laisser de côté, oublier ou même aseptiser les violations des droits de la personne qui persistent dans l'Iran de Khamenei.
    Troisièmement, demandez au régime iranien de déclarer un moratoire sur sa politique d'État visant les exécutions sans motif.
    Quatrièmement, demandez au régime iranien de cesser et d'abandonner ses poursuites et sa persécution de la communauté baha'ie et en particulier de libérer les sept leaders baha'is.
    Cinquièmement, pressez le régime iranien de libérer ses prisonniers politiques. J'ai mentionné à cet égard l'ayatollah Boroujerdi et le Canadien Saeed Malekpour.
    Enfin, demandez au régime iranien de faire respecter la primauté du droit, de protéger l'indépendance du pouvoir judiciaire, de mettre fin à la culture d'impunité et de cesser et d'abandonner l'arrestation et l'incarcération d'avocats pour la seule raison qu'ils défendent des personnes dont les droits fondamentaux ont été violés.

  (1325)  

    Il ne faut jamais oublier la responsabilité du comité à l'égard des prisonniers politiques. Le comité a un rôle précis et déterminant à jouer pour faire savoir aux prisonniers politiques de l'Iran qu'ils ne sont pas seuls, que nous nous montrons solidaires envers eux, que nous les défendrons sans relâche, que nous rechercherons toujours la justice, que la libération des prisonniers politiques sera toujours pour nous une priorité, une question de principe et de politique, et qu'elle peut transformer la quête de justice au pays et ailleurs. Le comité s'acquitte bien de ce rôle.
    Je vais vous donner un exemple en guise de conclusion. Nelson Mandela a passé 27 ans dans une prison sud-africaine. Après sa libération, non seulement a-t-il participé au démantèlement de l'apartheid, mais il est aussi devenu le premier président d'une Afrique du Sud démocratique, libre et égalitaire.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous deux pour votre témoignage.
    Nous allons tout de suite passer à la période de questions. Monsieur Sweet, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je ne veux pas jeter le blâme sur qui que ce soit, mais je crois que nous devrions prendre une part de responsabilité et veiller à ce que toutes les réunions tenues pendant la Semaine de responsabilisation de l'Iran soient télédiffusées. Je crois que les deux témoins ont été clairs à ce sujet: l'une des choses les plus importantes qu'on puisse faire, c'est d'aborder la question publiquement. Nous devrions miser sur la télédiffusion de nos réunions.
    Je remercie les deux témoins. J'ai aimé vos témoignages.
    Madame Box, je n'ose pas imaginer les émotions et l'angoisse que vit la communauté baha'ie, non seulement en raison de la persécution qu'elle subit en prison, mais aussi en raison de ce génocide religieux, comme vous l'avez dit, puisque les lois mêmes du pays prévoient l'élimination des baha’is de l'Iran.
    Monsieur Cotler, vous avez parlé de transformation, et je tiens à dire que l'effet contraire peut se produire lorsqu'on ne met pas les violations des droits de la personne à l'avant-plan. On voit ce qui se passe aujourd'hui avec la persécution de la communauté baha'ie au Yémen, et je crois que le fait qu'on n'aborde pas la situation en Iran y est pour quelque chose.
    Monsieur Cotler, nous vous remercions pour toutes vos années passées au comité et pour tous vos efforts en matière de défense des droits de la personne. J'ai remarqué que les menaces étaient aujourd'hui plus importantes. Lorsque vous travailliez avec nous, il y en avait quatre; aujourd'hui, on en compte cinq. Je crois que cela représente bien ce qui se passe dans la région, comme vous l'avez dit, et non seulement en Syrie, mais aussi au Yémen et dans l'ensemble de la région.
    Je voulais vous poser la question, parce que vous avez une opinion précise à cet égard: pourquoi est-il important de tenir compte de l'ensemble des menaces qui planent sur l'Iran en matière de droits de la personne?
    Ensuite, en ce qui a trait à l'importance de faire connaître la situation au public, que vous avez tous deux soulignée, j'ai fait une recherche rapide sur Google pour me préparer à la réunion et j'ai constaté qu'on ne disait rien sur la dépouille de Zahra Kazemi, qui n'avait toujours pas été rendue au Canada. Cela fait près d'un an... c'était tout juste après la libération de Mme Hoodfar. On n'en parle pas du tout dans les médias. Je voulais savoir ce que vous en pensez, parce que je sais que vous avez été assez catégorique à ce sujet. Nous ne sommes pas les seuls responsables de la médiatisation des enjeux en matière de droits de la personne. Les médias sont aussi responsables d'informer les gens à cet égard.
    Voilà les deux sujets que je voulais que vous commentiez.
    Je vous remercie de votre question, monsieur Sweet. J'ai toujours respecté votre constance et votre engagement à l'égard du travail du comité et d'autres questions.
    En ce qui a trait à l'importance de la publicité, j'aimerais faire une parenthèse et dire que vous avez raison: j'ai ajouté une cinquième menace depuis mon passage ici, mais cela fait état d'une autre préoccupation relative à l'Iran: la belligérance hégémonique régionale. Cela a trait à ce qui se passe au Moyen-Orient, comme je l'ai dit tout à l'heure. Vous avez parlé du Yémen. La persécution de la communauté baha’ie s'étend au Yémen, en plus de la belligérance générale à cet égard, surtout en Syrie.
    En ce qui a trait à l'importance des questions relatives aux droits de la personne, si la culture d'impunité à l'égard des violations graves des droits de la personne en Iran perdure, cela minera non seulement notre engagement en matière des droits de la personne, mais aussi notre accord nucléaire avec l'Iran, par exemple. Si l'Iran croit qu'il peut violer impunément les droits de la personne sans être tenu responsable, il croira peut-être aussi pouvoir violer l'accord nucléaire, parce qu'il n'en sera peut-être pas tenu responsable.
    J'ai été déçu de voir que l'accord nucléaire ne faisait pas référence à d'autres menaces et ne prévoyait aucune sanction à cet égard, mais l'absence de sanctions relatives aux violations des droits de la personne nuira peut-être à l'accord nucléaire.
    C'est aussi vrai dans le cas de Mme Kazemi. Si nous l'ignorons, si nous ne faisons rien à propos de l'impunité et de l'immunité associées à son emprisonnement et à sa torture, et si nous n'imposons aucune sanction à ceux qui violent les droits de la personne en Iran, tant dans le cas de Mme Kazemi que dans celui dont nous parlons aujourd'hui, alors nous allons encourager ces violations, l'exacerbation de la menace et la convergence toxique dont nous sommes témoins dans l'Iran de Khamenei.
    Nous sommes ici au nom du peuple iranien pour que l'entourage de Khamenei soit tenu responsable de l'agression du peuple iranien.

  (1330)  

    Depuis la révolution, on nous promet toujours une réforme. Rohani, le président actuel, a dit qu'il allait aborder la question des droits des femmes. Je crois qu'on peut confirmer son inaction à cet égard. En fait, la persécution des femmes s'est probablement accrue.
    Je voulais vous parler de cela. Les élections arrivent. Moussavi est toujours assigné à sa résidence; c'était la dernière grande promesse du Mouvement vert. Voyez-vous d'un bon oeil les élections à venir?
    Un des problèmes avec Rohani, c'est que le nombre d'exécutions a augmenté et que les violations des droits de la personne se sont intensifiées depuis sont arrivée au pouvoir. On le considère comme étant modéré, ce qui m'inquiète quand je songe aux autres candidats et à la façon dont on laisse les choses aller. Je vais vous donner un exemple.
    Neuf ministères du gouvernement relèvent directement du président — Rohani, dans le cas présent — et sont eux-mêmes responsables des violations continues des droits de la personne. Je serai très bref. Il s'agit notamment du ministère de la Culture et de l'Orientation islamique, qui continue d'éliminer ce qu'il appelle les opinions subversives; le ministère du Renseignement et de la Sécurité, qui procède à la détention arbitraire et indéfinie des défenseurs des droits de la personne dans des lieux secrets et a recours à la torture et à d'autres traitements dégradants pour obtenir des confessions, et le ministère de l'Intérieur, qui continue d'empêcher les rassemblements pacifiques en refusant d'octroyer des permis à cet égard et en criminalisant les personnes qui y participent.
    Ces ministères relèvent de Rohani, mais ils violent continuellement les droits de la personne et ne sont pas punis.

  (1335)  

    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Fragiskatos. Allez-y, monsieur.
    Je vous remercie de votre présence et de votre travail acharné.
    L'un d'entre vous pourrait-il nous parler de la communauté baha’ie et des méthodes ou tactiques utilisées par le régime de Téhéran pour assimiler la minorité? Je vais vous donner l'exemple des Kurdes en Irak, en Turquie, en Syrie et en Iran. Les régimes de ces pays ont tenté de maîtriser les rebelles et les opposants — cela n'a pas été un succès — en les faisant participer à la bureaucratie, en les faisant travailler au bureau du président et dans les ministères, en leur donnant un titre politique élevé.
    Est-ce que c'est ce qui s'est passé en Iran? A-t-on déployé des efforts pour éliminer l'opposition possible de la minorité baha’ie avec de telles tactiques? Si oui, pouvez-vous nous donner des exemples?
    Ce qu'il faut savoir au sujet de la communauté baha’ie, c'est qu'elle n'est ni violente ni partisane. Vous ne verrez jamais un baha’i en politique.
    Je ne le savais pas. Merci. Voilà qui répond à ma question. Je vais passer à la suivante.
    Pouvez-vous me parler de l’Institut bahá’í pour l’enseignement supérieur et des défis auxquels il est confronté? J'en ai entendu parler. Il semble que l'enseignement se fait de façon improvisée à partir des maisons. En gros, l'enseignement se fait par Skype. Cela me semble très difficile.
    L’Institut bahá’í pour l’enseignement supérieur a été créé parce qu'on refusait à la communauté baha’ie l'accès à l'enseignement supérieur. C'est un exemple de résilience constructive. Ce sont des gens très persévérants, puisqu'ils font cela depuis près de 30 ans, et même plus. C'est aussi un signe que la communauté accorde une grande importance à l'éducation.
    Au début, on donnait les cours à partir de la maison, comme vous l'avez dit. Aujourd'hui, les cours sont surtout offerts en ligne et c'est toujours difficile. Non seulement refuse-t-on aux membres de la communauté baha’ie l'accès à l'enseignement supérieur, mais on s'attaque aussi à leurs projets. La communauté a été victime de raids au fil des années. Toutes les personnes associées à l'Institut sont emprisonnées, y compris certaines personnes qui ont étudié ici au Canada. Un contingent de baha’is venu au Canada pour apprendre de nouvelles méthodes et les reproduire en Iran [inaudible].
    Merci beaucoup.
    Je vais partager mon temps de parole avec mon ami, M. Housefather.
    Merci à vous, madame Box et monsieur Cotler, de votre témoignage.
    Ce qui me frappe, c'est qu'on parle des violations des droits de la personne en Iran, mais que l'Iran siège toujours aux comités et sous-comités de l'ONU, qui dénoncent les autres pays qui violent les droits de la personne. On n'a qu'à penser au vote de l'UNESCO d'il y a quelques jours, où l'Iran a voté en faveur de la suppression des liens chrétiens et juifs avec la ville sainte de Jérusalem et en faveur de la dénonciation de la violation des droits de la personne en Israël, pour comprendre qu'il est farfelu que pour les organismes internationaux de permettre à des États voyous comme l'Iran de voter sur de telles questions.
    J'aimerais soulever quelques points qui, à mon avis, aideraient les Canadiens à mieux comprendre la situation. Nous avons parlé de l'Iran, de son système gouvernemental et des élections présidentielles à venir. Je crois que la plupart des Canadiens ne savent pas ou ne comprennent pas que le président de l'Iran n'est pas vraiment le chef du pays, qu'il y a un guide suprême, et que les candidats aux élections présidentielles doivent être approuvés par le Conseil des gardiens de l'Iran. Ceux qui n'appuient pas le régime ne peuvent se présenter aux élections. L'un d'entre vous peut-il nous parler un peu du système politique?
    Aussi, monsieur Cotler, pourriez-vous nous parler du système juridique? Dans la plupart des pays, les gens vont présumer que les personnes condamnées à l'emprisonnement en Iran passeront par un processus judiciaire similaire au leur, c'est-à-dire des procès publics et devant jury où l'accusé a droit à un avocat de son choix et où toutes les parties sont représentées. Pouvez-vous nous parler du système procédural par lequel on passe lorsqu'on condamne des gens à la prison ou à la peine de mort pour des crimes politiques?

  (1340)  

    Je répondrai avec plaisir à votre question, mais j'aimerais tout d'abord faire une parenthèse au sujet de l'Institut bahá’í d'enseignement supérieur. Comme l'a fait valoir Mme Box, je crois, l'Iran refuse non seulement à la communauté baha’ie de vivre sa foi, mais lui refuse aussi l'accès à l'enseignement supérieur. Je crois qu'il importe de souligner que les personnes qui ont obtenu un diplôme de l'Institut — qui fait preuve de résilience et d'engagement à l'égard de l'éducation et de la paix — et qui sont venues au Canada pour poursuivre des études supérieures ont été emprisonnées à leur retour en Iran. Il y a un lien entre l'Iran et le Canada et il ne faut pas permettre cette impunité. J'ai eu le plaisir d'annoncer la nomination de l'Institut bahá’í d'enseignement supérieur au prix Nobel de la paix pour sa résilience et son engagement à l'égard de l'éducation et de la paix.
    Cela m'amène à vos questions et commentaires. Je suis d'accord avec vous au sujet de la culture d'impunité qui règne aux Nations unies. L'Iran, qui commet les violations graves des droits de la personne que je viens de vous décrire, peut non seulement continuer de violer les droits de la personne, mais s'en voit aussi récompensé, puisqu'il siège au Conseil des droits de l'homme des Nations Unies. Cela tourne en dérision notre engagement à l'égard du Conseil des droits de l'homme, qui est l'organisme responsable d'établir les normes en matière de promotion et de protection des droits de la personne. À mon avis, une telle récompense donnée à un pays comme l'Iran est un exemple dramatique de la culture d'impunité sous toutes ses formes.
    En ce qui a trait au président de l'Iran... et c'est pourquoi j'ai parlé de « l'Iran de Khamenei », parce c'est le guide suprême qui dicte le processus et le résultat des élections, et qui gouverne l'Iran. Pour ce qui est des questions de procédure, dans le cadre du processus judiciaire, certaines personnes sont accusées à tort d'avoir semé la corruption sur la terre ou d'autres crimes. J'ai tenté de résumer les tendances en matière de poursuites et de persécution en Iran, mais pour ce qui est de la procédure juridique, on rejette catégoriquement le droit d'une personne à un procès équitable devant un tribunal indépendant sous toutes ses formes. Cela signifie non seulement qu'on refuse aux personnes le droit à un avocat de leur choix, mais aussi très souvent qu'on emprisonne les avocats qui tentent de défendre les prisonniers politiques. On refuse le droit de présenter une preuve au nom d'une autre personne ou de réfuter la preuve, qui n'est souvent même pas présentée avant qu'il y ait condamnation.On obtient la preuve par la torture et par de fausses confessions, comme cela a été le cas pour Saeed Malekpour, et on ne peut la réfuter. Au bout du compte, on assiste à de faux procès; parfois, il n'y a même pas de procès.
    Tout cela se passe sous l'autorité du guide suprême Khamenei. Le président est responsable de neuf autres ministères du gouvernement qui, seuls ou de concert avec d'autres, violent les droits de la personne et contribuent à la culture d'impunité.
    Merci beaucoup.
    Madame Hardcastle, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Wow, voilà des idées qui font réfléchir. Certains commentaires de mes collègues au sujet de la culture d'impunité et de l'engagement à l'égard des droits de la personne m'intriguent.
    J'aimerais connaître votre opinion à tous les deux au sujet du concept des sanctions et des mesures que peuvent prendre le Canada et les membres du Parlement à cet égard. Nous avons la Loi sur les mesures économiques spéciales, qui a allégé certaines des sanctions contre l'Iran en janvier 2016. Quelle est votre opinion à ce sujet? Quelle est la voie à suivre?
    J'aimerais que vous preniez tous deux le temps de répondre à ma question. Si je n'ai pas le temps d'en poser une autre, ce n'est pas grave. J'aimerais toutefois que vous nous donniez une réponse approfondie. Merci.

  (1345)  

    Ma réponse sera très brève: ma communauté ne prend pas position au sujet des sanctions.
    J'aimerais vous donner le temps d'expliquer votre réponse, parce que vous avez répondu de la même façon à une question précédente sur la communauté baha’ie. Puisque la communauté baha’ie n'est pas politisée ou ne prend pas position au sujet des sanctions, qui défend ses droits? Qui parle en son nom en Iran? Je suppose que vous êtes ici pour le faire. Que souhaiteriez-vous voir? La communauté ne croit peut-être pas en l'efficacité des sanctions, mais elle mérite quand même d'être entendue.
    Bien sûr, je peux répondre à cela.
    En gros, ce que la communauté baha’ie aimerait qu'on fasse ou ce que je recommande au gouvernement et à ses représentants élus de faire, c'est de sensibiliser la population à l'égard de la situation des baha’is en Iran, de condamner les violations des droits de la personne tant en coulisse qu'en public, d'assurer un contrôle notamment par l'entremise de la résolution de l'ONU, de réprimander le non-respect de la loi en vertu du droit international et la non-coopération par l'entremise du mécanisme de l'ONU, et d'insister sur le changement dans le cadre de notre dialogue avec l'Iran. En ce qui a trait à l'exemple des baha’is et à l'importance d'insister sur le changement et de valider la sincérité du gouvernement dans le cadre d'un dialogue sur les droits de la personne, on pourrait libérer les sept baha’is immédiatement et sans condition. On pourrait annuler le mémoire de 1991 dont j'ai parlé dans mon exposé, qui est ni plus ni moins un plan directeur visant l'élimination de la communauté baha’ie en Iran. On pourrait permettre aux baha’is d'aller à l'université et exiger que cesse l'incitation à la haine. Je pourrais continuer.
    D'après mon expérience, les gouvernements et les représentants élus disposent de nombreuses plateformes pour étudier ces mesures. Ils pourraient le faire avec leurs homologues, avec d'autres pays. On pourrait le faire en coulisse ou publiquement, de façon officieuse ou officielle, de façon bilatérale ou multilatérale, et les divers ordres de gouvernement pourraient y prendre part.
    Je vous remercie de votre question. Encore une fois, je félicite Mme box pour sa réponse au sujet des bahá'ís.
    Premièrement, en ce qui a trait aux sanctions, je crois qu'il faudrait appuyer les sanctions en vertu du paragraphe 4(1) de la Loi sur les mesures économiques spéciales, ou la LMES, contre les principaux responsables des violations des droits de la personne en Iran, c'est-à-dire ceux qui sont complices des exécutions sans motif et qui ne sont toujours pas punis, ceux qui sont impliqués dans la détention des prisonniers politiques ou ceux qui prennent part aux attaques contre les bahá'ís, et leur faire comprendre qu'ils seront tenus responsables en vertu de la loi. S'ils savent qu'ils peuvent commettre ces infractions sans être punis, ils vont continuer de le faire et nous allons les habiliter à le faire si nous ne leur imposons pas de sanction.
    Deuxièmement, je crois que le Comité, qui entend de nombreux témoignages, connaît la proposition pour la justice mondiale par l'entremise de la loi de Sergueï Magnitski, qui permettrait de sanctionner les responsables des violations des droits de la personne en les empêchant d'abord d'entrer dans notre pays et aussi d'y blanchir leur argent. Malheureusement, certains de ces délinquants, venus notamment d'Iran, ont blanchi leur argent au Canada.
    Troisièmement, il faut exhorter l'Iran à permettre au rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran de visiter le pays.
    Jusqu'à présent, le rapporteur spécial n'a pas pu visiter les prisons, s'entretenir avec les prisonniers politiques ou surveiller la situation des bahá'ís. Le rapporteur spécial de l'ONU sur la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran n'a pas pu se rendre en Iran; les autres responsables des procédures spéciales des Nations unies, que ce soit le rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des défenseurs des droits de l’homme, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ou le rapporteur spécial de l'ONU sur la liberté de religion ou de croyance n'ont pas pu s'y rendre non plus.
    Aucun d'entre eux n'a pu se rendre en Iran; on entretient ainsi la culture d'impunité.
    Enfin — et je fais référence à la question de M. Housefather et d'autres —, il faut non seulement exhorter le régime iranien, mais aussi la communauté internationale à veiller à ce que le droit de tous les Iraniens de présenter leur candidature aux élections soit respecté et à ce qu'on tienne des élections libres et justes en Iran.
    Il faut accroître la transparence du processus électoral iranien en permettant à des observateurs indépendants nationaux et internationaux de les surveiller. Cela n'a pas été le cas pour les élections parlementaires et ce ne le sera pas pour les élections présidentielles à venir.
    Je vous rappelle que les leaders de l'opposition démocratique en sont à leur sixième année d'emprisonnement en Iran. Ils sont assignés à résidence. Cela témoigne de la culture d'impunité qui règne toujours au pays.

  (1350)  

    Merci beaucoup. La parole est maintenant à M. Tabbara. Allez-y, monsieur.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous deux de votre présence ici aujourd'hui. Je vous en suis très reconnaissant. Nous nous attaquons à ce sujet année après année et il est bon de jeter une certaine lumière sur la question.
    En 2014, le gouvernement du Canada a présenté cinq recommandations au gouvernement iranien, qui ont été rejetées. Je vais vous lire l'une d'entre elles:
Prendre des mesures législatives et administratives pour éliminer les restrictions juridiques et les obstacles sociaux qui nuisent à la participation égale des femmes à la population active et à leur accès à l'éducation de même qu'aux postes décisionnels au sein du gouvernement.
    C'est l'une des recommandations qui ont été rejetées. Pouvez-vous nous dire ce que peuvent faire les membres du Parlement du Canada pour encourager la participation égale des femmes en Iran et nous parler de la façon dont le régime actuel nuit à l'avancement des femmes?
    Le Canada — et c'est tout à son honneur — est à la tête d’un groupe de coparrains qui présentent la résolution à l’Assemblée générale des Nations unies sur la situation des droits de la personne en Iran. Vous avez fait référence à cette résolution, que nous avons coparrainée. De plus, on procède à un examen des violations des droits de la personne au pays et nous avons présenté des recommandations précises à cet égard, notamment au sujet des préjudices et des difficultés auxquels est confrontée la communauté bahá'íe, et qui n'ont pas été abordés. C'est pourquoi je dis que dans la situation actuelle, le Canada propose des recommandations appropriées, efficaces et précises en vue d'améliorer la situation des droits de la personne en Iran et de lutter contre les violations en la matière et qu'en guise de réponse, l'Iran intensifie les violations des droits de la personne et baigne dans une culture d'impunité.
    Il est temps pour nous d'imposer des sanctions aux responsables des violations des droits de la personne afin de mettre un terme à cette culture d'impunité et de faire valoir que nous voulons entretenir des relations avec l'Iran, mais qu'elles ne peuvent pas être à sens unique. À l'heure actuelle, l'Iran ignore nos recommandations et intensifie les violations. Nous nous sommes engagés au nom de la population iranienne, de la primauté du droit, de la justice indépendante et d'un gouvernement démocratiquement élu en Iran. Nous avons parlé de tout cela ici aujourd'hui.
    Je tiens une fois de plus à souligner les préjudices et les difficultés auxquels sont confrontés les bahá'ís à titre d'éléments importants de la situation des droits de la personne en Iran.

  (1355)  

    Merci beaucoup.
    Nous avons le temps pour une dernière question.
    Monsieur Anderson, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à vous remercier tous les deux de votre présence ici aujourd'hui. Nous sommes reconnaissants de pouvoir apprendre de vous.
    En 2016, le gouvernement iranien a adopté un projet de loi, qui s'appelle la loi sur les crimes politiques, je crois. Il vise à criminaliser ce que le gouvernement appelle des mensonges et les tentatives de réformer l'État. Je me demande si l'on s'est servi de cette loi contre votre communauté au cours de la dernière année ou si l'oppression est si forte que la loi ne change pas grand-chose. A-t-on utilisé d'autres instruments contre vous?
    Je ne suis pas au courant. Je ne peux pas vous répondre.
    Monsieur Cotler, pouvez-vous nous parler un peu plus de la culture d'impunité? Elle semble venir des hautes instances, mais qui entretient le plus cette culture? Est-ce le système juridique, le système pénal ou la police? Est-ce à l'échelle régionale ou nationale? Dites-nous en un peu plus à ce sujet.
    Elle est persistante et omniprésente.
    Dans son rapport, la Campagne internationale des droits de la personne en Iran, qui s'appelle maintenant le Centre des droits de la personne en Iran, désigne les neuf principaux ministères du gouvernement. J'ai fait référence à trois d'entre eux. Ces neuf grands ministères du gouvernement relèvent du président de l'Iran, mais dans les faits, ils relèvent du guide suprême, l'ayatollah Khamenei; ils sont tous impliqués dans la violation des droits de la personne et entretiennent la culture d'impunité.
    Il faut s'attaquer à la situation en Iran, que j'ai décrite tout à l'heure. Lorsqu'on parle de l'Iran, il faut comprendre que le pays contrevient à ses propres lois dans de nombreux cas. Il contrevient aux traités internationaux auxquels il prend part avec le Canada. Lorsqu'il contrevient à ces traités, il contrevient à ses obligations bilatérales envers nous.
    En ce qui a trait à la situation des bahá'ís, les poursuites et la persécution contre les leaders de la communauté sont un exemple de l'injustice systématique en Iran. En ce 9e anniversaire de l'emprisonnement des grands leaders du bahaïsme, nous sommes témoins d'une détention arbitraire, illégale et prolongée, de torture et de mauvais traitements en détention, de fausses accusations comme la « propagation de la corruption sur terre », qui est passible de la peine de mort, du déni du droit à un procès efficace, du déni du droit de connaître et de réfuter les motifs de mise en accusation et de l'absence d'une quelconque forme d'application régulière de la loi dans le système judiciaire.
    Voilà pourquoi je dis que la situation de la communauté bahá'íe témoigne de l'injustice générale et systématique qui règne au pays, mais aussi d'une injustice particulière, puisqu'on refuse à la communauté le droit de vivre sa foi et l'accès à l'enseignement supérieur. De plus, on exclut la commuanté et elle fait l'objet de poursuites de la part de la société iranienne. Pourtant, il s'agit d'une communauté pacifique qui respecte la loi.
    Je crois que peu importe la mesure dans laquelle nous allons pouvoir atténuer les souffrances et les difficultés de la communauté bahá'íe et favoriser la libération de ses leaders, nous ferons avancer la cause de la justice et de la paix dans son ensemble.
    Merci beaucoup.
    Je tiens à remercier les deux témoins de leur présence devant le Sous-comité.
    De façon particulière, monsieur Cotler, je tiens à souligner votre travail dans ce dossier. Vous avez lancé la Semaine de la responsabilisation de l'Iran ici il y a quelques années et vous continuez de défendre le peuple iranien et les prisonniers politiques. Vous êtes un modèle et un mentor pour nombre des membres du Comité, en raison de votre travail sur l'Iran. Vous avez su maintenir cette question à l'avant-plan au Parlement du Canada et de façon plus générale aujourd'hui, grâce à votre travail auprès du caucus Wallenberg.
    Au nom de tous les membres du Comité, je tiens à vous faire part de notre appréciation sincère de votre travail.

  (1400)  

    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais faire un dernier commentaire, si vous me le permettez.
    J'espère que nous saurons maintenir l'un des volets de la Semaine de la responsabilisation de l'Iran. Nous avons mis sur pied le projet de défense des droits des prisonniers politiques iraniens, par l'entremise duquel les députés du Parlement appuyaient la cause de certains prisonniers politiques et faisaient des interventions à cet égard à la Chambre et ailleurs en leur nom; ils organisaient aussi des conférences de presse. Permettez-moi de vous dire que ces mesures ont donné lieu dans certains cas à la libération de prisonniers politiques en Iran.
    J'espère que la Semaine de la responsabilisation de l'Iran donnera lieu à d'autres mesures du genre pour aider les prisonniers politiques et surtout pour aider les leaders de la communauté bahá'íe, puisqu'on soulignera bientôt le 9e anniversaire de leur emprisonnement.
    Merci, monsieur le président.
    Un grand merci à vous deux.
    La séance est levée.
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