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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 150 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 14 mai 2019

[Enregistrement électronique]

  (0835)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je déclare ouverte la séance du Comité des affaires autochtones et du Nord, un comité permanent du Parlement.
    Aujourd'hui, notre réunion commence par une discussion sur le nouveau plan organisationnel, recommandé il y a plusieurs années, selon lequel AINC doit être divisé. Nous avons hâte de comprendre comment tout cela se déroule.
    Mais tout d'abord, j'aimerais reconnaître une fois de plus que nous nous réunissons sur le territoire non cédé du peuple algonquin, il est important que nous reconnaissions tous que le Canada recherche enfin — et courageusement — la vérité, et pas seulement au Comité. J'espère que tous les Canadiens commenceront à réfléchir à notre histoire — les bons coups et les moins bons — et à apporter des changements dans le cadre du processus de vérité et réconciliation.
    Vous pourrez présenter vos exposés pour une période pouvant aller jusqu'à 10 minutes. Après tous les exposés, nous passerons aux questions des membres.
    Pour commencer, nous recevons Daniel Watson et Jean-Pierre Morin, du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
    Merci, madame la présidente. C'est avec plaisir que je comparais devant le Comité aujourd'hui. Permettez-moi d'abord de reconnaître, tout comme vous, que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin.

[Français]

     J'ai le plaisir d'être accompagné aujourd'hui du sous-ministre de Services aux Autochtones Canada. Nous parlerons tous deux de la section 25 du projet de loi C-97, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2019 et mettant en oeuvre d'autres mesures.

[Traduction]

    Le gouvernement du Canada établit une nouvelle relation avec les peuples autochtones, une relation fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la coopération et le partenariat.

[Français]

    L'engagement du Canada à prendre des mesures pour démanteler les structures coloniales du passé est un élément essentiel de cette nouvelle relation. Le 28 août 2017, le premier ministre a annoncé la dissolution d'Affaires autochtones et du Nord Canada et la création de deux nouveaux ministères, soit Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada ainsi que Services aux Autochtones Canada.

  (0840)  

[Traduction]

    Nous devons commencer à établir une relation véritablement nouvelle avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis. La section 25 du projet de loi C-97, Loi d'exécution du budget de 2019, constitue une étape clé du processus continu de réconciliation. Elle s'appuie sur les recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones de 1996:
[...] Après la proclamation, le Parlement du Canada adopterait un cadre législatif complémentaire pour créer les lois et les institutions nécessaires à la mise en œuvre d'une relation renouvelée. Ces nouvelles lois viseraient toutes à doter les Autochtones des pouvoirs et des outils dont ils ont besoin pour structurer eux-mêmes leur avenir politique, social et économique.
    Il y a plus de 20 ans, la Commission royale sur les peuples autochtones a plaidé pour la création de ces nouveaux ministères afin d'améliorer la prestation des services destinés aux Autochtones et d'accélérer les progrès vers l'autodétermination. En termes simples, nous arriverons à mieux répondre aux besoins distincts des membres des Premières Nations, des Inuits et des Métis avec deux ministères. En outre, la création de deux ministères est conforme à l'orientation de la Commission de vérité et réconciliation et de l'article 4 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et assure ainsi la promotion de l'autodétermination.
    La section 25 édicterait deux lois pour créer Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada et Services aux Autochtones Canada. Ces lois définissent les pouvoirs, les obligations et les fonctions de leurs ministres respectifs et abrogent la Loi sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien afin de dissoudre officiellement Affaires autochtones et du Nord Canada.

[Français]

    Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada accélèrera le travail déjà entrepris pour renouveler la relation entre le Canada et les peuples autochtones. Chose tout aussi importante, le ministère continuera de favoriser l'autonomie, la prospérité et le bien-être des résidants et des communautés du Nord. Il continuera de travailler à la création d'institutions de Premières Nations inuites et métisses afin de développer la capacité nécessaire pour soutenir la mise en oeuvre de leur vision de l'autodétermination.
    La ministre des Relations Couronne-Autochtones guide le travail transformationnel prospectif du gouvernement visant à créer une nouvelle relation avec les peuples autochtones. Le premier ministre a chargé la ministre d'assurer une meilleure coordination pangouvernementale et l'accélération de la conclusion d'ententes sur l'autonomie gouvernementale et l'autodétermination en se fondant sur de nouvelles politiques, lois et pratiques opérationnelles.

[Traduction]

    Étant donné que les besoins du Nord et de ses résidants sont particuliers et distincts de ceux du Sud, ce projet de loi fournirait un fondement juridique à la création du poste de ministre des Affaires du Nord. Le ministre des Affaires du Nord guiderait les travaux du gouvernement dans le Nord, notamment en ce qui concerne la nouvelle politique canadienne sur l'Arctique. En collaboration avec la ministre des Relations Couronne-Autochtones, il poursuivra les travaux sur le modèle de leadership partagé dans l'Arctique et appuiera les programmes, les institutions de gouvernance et les initiatives scientifiques dans le Nord.
    L'initiative législative proposée constitue une étape importante dans le processus d'élimination des structures coloniales. Elle créerait une nouvelle base législative qui permettra une meilleure collaboration pour aider les peuples autochtones à définir leur vision de l'autodétermination.

[Français]

     Je remercie les membres du Comité de leur attention.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant au ministère des Services aux Autochtones Canada. Nous recevons encore une fois le sous-ministre, et nous sommes très heureux de vous voir.
    Vous avez dit « encore une fois »; cela semble un peu négatif.
    Désolé, je blague.
    Non, non.
    C'est pourquoi nous vous aimons.
    Je suis désolé.
    Nous aimons détendre un peu l'atmosphère. Nous traitons de beaucoup de questions très sérieuses.
    Désolé.
    Jean-François Tremblay et François Masse sont ici au nom des Services aux Autochtones.
    Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
    Je tiens aussi à vous remercier de nous fournir l'occasion de nous adresser au Comité aujourd'hui. Je tiens à reconnaître que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel du peuple algonquin.

[Français]

    À la suite des observations de mon collègue le sous-ministre de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, je voudrais parler des répercussions du projet de loi sur mon ministère comme tel.

  (0845)  

[Traduction]

    Je serai très bref, mais je vais juste revenir sur quelques éléments.

[Français]

    En adoptant la section 25 du projet de loi C-97, qui prévoit la dissolution d'Affaires autochtones et du Nord Canada, le gouvernement fédéral crée deux ministères qui seront mieux équipés pour travailler avec des partenaires autochtones. C'est un tournant important dans la relation entre les peuples autochtones et le Canada.

[Traduction]

    Le ministère des Services aux Autochtones a pour mandat de travailler en collaboration avec des partenaires afin d'améliorer l'accès à des services d'excellente qualité pour les Autochtones. Sa vision consiste à soutenir et à habiliter les Autochtones pour leur permettre de fournir indépendamment des services et de s'attaquer aux conditions socioéconomiques dans leurs collectivités, tandis qu'ils progressent sur la voie de l'autodétermination.
    Le ministre des Services aux Autochtones poursuit les travaux importants visant à améliorer la qualité des services offerts aux membres des Premières Nations, aux Inuits et aux Métis. Il veille notamment à ce qu'une approche cohérente, d'excellente qualité et fondée sur les distinctions soit appliquée à la prestation de ces services. Une stratégie rigoureuse axée sur les résultats et l'exécution est adoptée, et a pour but d'améliorer les résultats pour les Autochtones. Avec le temps, une des principales mesures de notre réussite sera que les peuples autochtones assurent de plus en plus la prestation, dans leurs collectivités, de programmes et de services adéquats.
    Madame la présidente, la transformation consiste à modifier notre façon de travailler, de penser et d'écouter ainsi que notre façon d'établir des partenariats de manière à pouvoir appuyer adéquatement les droits et l'autodétermination des peuples autochtones.

[Français]

    Je remercie les membres du Comité de leur attention.

[Traduction]

    Nous répondrons maintenant à vos questions.
    Nous recevons aussi le ministère de la Justice. C'est toujours bon de l'avoir.
    Suzanne Grondin, bienvenue à notre comité. Veuillez commencer quand vous êtes prête.

[Français]

    Je remercie les deux sous-ministres de leurs présentations. Je les accompagne aujourd'hui pour répondre à certaines questions un peu plus liées au ministère de la Justice, des questions plus techniques sur les deux lois qui créeront les deux ministères.

[Traduction]

    Merci de vos commentaires. Les députés en prendront note.
    Nous commençons par les libéraux, et Mike Bossio est le premier.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie tous énormément d'être ici ce matin. Nous apprécions votre compagnie. Vous êtes venus ici pour présenter de l'information importante sur nos progrès relativement à la division de ces entités différentes qui ont déjà été AINC et qui sont maintenant trois entités distinctes. Nous sommes heureux de voir que la CRPA, après quelque 20 années, est finalement en train d'être reconnue; on reconnaît particulièrement l'importance de diviser ces entités d'AINC, ce qui a été communiqué par l'intermédiaire de la CRPA, dans le volume 2 du « Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones ». Il recommande:
Que le gouvernement du Canada dépose une loi visant à dissoudre le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et à le remplacer par deux nouveaux ministères: le ministère des Relations avec les autochtones et le ministère des Services aux Indiens et aux Inuit.
    Pourriez-vous expliquer ce que vous comprenez des raisons sous-jacentes expliquant cette recommandation de la CRPA?
    J'avais cru comprendre que l'objectif important à l'époque était de miser sur la relation, de séparer le côté des relations de celui des services. Il était important de nous assurer de mettre vraiment l'accent sur l'établissement d'une nouvelle relation, et l'accent que l'on mettrait sur les services serait distinct.
    Il était aussi important d'éliminer la vieille structure coloniale que représentait AINC, que l'on a pendant très longtemps considérée comme la législation qui met essentiellement en œuvre la Loi sur les Indiens de A à Z. C'est ce sur quoi portait la Commission.
    Pour nous, cela veut aussi dire, pour être juste, que la relation ne va jamais disparaître. Il est important de continuer d'entretenir une relation avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Pour ce qui est de la prestation, l'objectif est de faire en sorte que nous ayons en place la structure nécessaire pour fournir les meilleurs services. Nous croyons que, à long terme, les services devraient être offerts par les Premières Nations, les Inuits et les Métis.
    Si vous regardez les deux ministères, certains aspects de mon ministère sont censés disparaître au fil du temps, tandis que les autres ministères ne disparaîtront pas. Comme je le dis parfois au personnel, notre objectif, c'est d'être une espèce en péril, qui recherche sa propre extinction. Au final, nous tentons de mettre en place, du côté des services, le moyen le plus efficace de fournir ces services.
    Nous croyons que les gens eux-mêmes devraient fournir ces services. C'est le même objectif des deux côtés. Pour ce qui est des Relations Couronne-Autochtones, cela débouche sur le programme des droits. Quant à nous, ce pourrait être la structure administrative qui débouche, à un certain moment, sur le programme des droits. Toutefois, des deux côtés, nous essayons essentiellement d'encourager et de promouvoir l'autodétermination.

  (0850)  

    Dans votre rapport capital, on dit que « L’établissement du mandat et de la structure du ministère des Relations avec les autochtones et du ministère des Services aux Indiens et aux Inuit pourra, dans un premier temps, se faire par décret », ce que vous avez fait. Depuis combien de temps le décret est-il en vigueur? Qu'est-ce que la législation permettra de faire qui n'est pas déjà fait au moyen du décret?
    Le décret est entré en vigueur à la fin novembre 2017. Évidemment, la législation entrerait en vigueur, si elle est approuvée. Elle officialise les décisions qui ont été prises au moyen du décret, mais fait encore plus important, c'est un signal très clair qu'il ne s'agit pas simplement d'une décision à court terme. Ce serait une loi du Parlement du Canada qui dirait à tous les peuples autochtones et à tous les Canadiens que le travail de réconciliation et de prise en considération de la prestation de services sera effectué d'une façon très différente de celle utilisée dans le passé. C'est une caractéristique permanente et une attente du Parlement du Canada. Cela ajouterait une valeur essentielle et symbolique.
    Pour ce qui est de la prestation, nous continuerons de faire le type de travail que nous avons fait au cours des deux dernières années, durant un peu plus d’un an et demi, et cela consiste à nous concentrer sur les éléments différents et distincts des mandats de chaque ministère, mais cela serait maintenant solidifié dans la loi.
    Quels ont été les résultats de la division de ces deux ministères? Je sais que vous avez établi un certain nombre de tableaux des droits dans de nombreuses collectivités différentes. Du seul point de vue des Relations Couronne-Autochtones, pouvez-vous nous donner une idée des progrès réalisés au regard de l'autodétermination?
    De mon point de vue, il y a deux choses, mais j'aimerais ajouter quelque chose à ce qu'a dit plus tôt mon collègue concernant la justification. C'est très difficile d'aller dire à quelqu'un le matin: « Écoutez, je vais communiquer de nouveau avec vous au sujet de votre règlement municipal sur la fourrière pour les chiens dans deux ans, et je vous dirai si c'est correct », puis, de lui dire l'après-midi: « Et nous aimerions parler d'un nouvel avenir brillant dont nous ne faisons pas partie ».
    Ce type de dynamique ne fonctionne vraiment pas très bien. Certainement, ce sur quoi on mise ici permet à des gens de fournir les services et de finir par céder ces services aux collectivités, ce qui est une tâche énorme en soi. En même temps, nous cherchons à faire ce que nous avons fait pendant plus de 20 ans, c'est-à-dire renégocier de nouvelles ententes pour voir ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné, et élaborer des approches nécessaires pour l'avenir. Cela donne les moyens de tenir ces conversations de façon très différente.
    Merci beaucoup.
    Madame Cathy McLeod, allez-y.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les représentants.
    J'aimerais dire aux fins du compte rendu que ce texte de loi est dissimulé sous un projet de loi omnibus. Jusqu'ici, le Comité des finances a entendu plus de 100 témoins. Il n'a pas eu l'occasion d'examiner cet aspect particulier ou de convoquer des témoins concernant ce texte de loi. Nous avons demandé au Comité une heure supplémentaire pour convoquer certains témoins qui ne sont pas des représentants ministériels. Je tiens à souligner que le Comité a refusé de prendre une heure de plus pour faire venir quelques organisations qui pourraient être touchées par cette législation, afin d'obtenir leur point de vue sur ce qui se passe et de savoir comment cela se passe.
    Je compare cela au projet de loi S-3, qui était un texte de loi indépendant. Quand les représentants se sont présentés à nous, ils nous ont assuré que tout allait bien. J'entends aujourd'hui dire que tout va bien, sans qu'il ne soit possible de recevoir des témoins. Par l'entremise de nos témoins, nous avons appris qu'il y avait des lacunes, que des amendements étaient nécessaires. Nous sommes très mal à l'aise avec le processus et avec le fait que notre Comité n'ait pas eu la capacité de l'examiner à la loupe. Certes, sur le plan philosophique, nous croyons que la séparation des ministères est une bonne initiative. Le fait que nous ne soyons pas en mesure de faire notre travail est, je crois, assez honteux.
    Je sais que ce n'est pas votre responsabilité. C'était la décision du gouvernement actuel de faire ce qu'il a dit qu'il n'allait pas faire: enterrer des choses dans une loi omnibus et ne pas permettre au Comité de faire le travail qu'il est censé faire. Lorsque des problèmes seront signalés plus tard, je crois que nous pourrons rappeler qu'on n'a pas prévu un processus approprié.
    Je vais commencer par une question rapide. J'espère que vous avez l'information à portée de main.
    Si on parle des ETP pour les deux ministères, au chapitre de la santé, avant le changement, et les ETP maintenant... encore une fois, j'aimerais un total combiné; cela devrait être à portée de main, y compris la santé, car nous reconnaissons le transfert.

  (0855)  

    Selon les chiffres que je détiens en ce moment, en date de mai 2019, de mon côté, le total est de 5 230 employés, soit une augmentation de 135 ETP. Ce n'est pas nécessairement lié à des services internes; ça pourrait aussi être lié à beaucoup de programmes et de nouvelles initiatives. Comme vous le savez, nous avons reçu un investissement important dans les budgets au cours des dernières années.
    C'est 135 par rapport à quelle période, 2015 ou 2016?
    À partir de la création de mon ministère, il y a deux ans. Ce n'est pas nécessairement en 2015.
    Merci.
    Le chiffre correspondant pour RCAANC est de 186 ETP; c'est la différence entre aujourd'hui et le 30 novembre 2017, soit la même période dont parlait mon collègue. Encore une fois, ce n'est pas nécessairement lié à la transformation, car à mesure que les programmes vont et viennent, les employés vont et viennent avec eux à chaque cycle budgétaire.
    C'est donc une augmentation de 186 ETP à partir de ce point de référence?
    Le 30 novembre...
    Vous avez dit que c'est une augmentation.
    C'est une augmentation, oui.
    Quel est le nombre total?
    Le total est de 2 850 ETP.
    Merci.
    Je vois que la ministre des Relations Couronne-Autochtones est responsable de la Loi sur la gestion financière des premières nations. Vous avez déplacé la Loi sur la transparence financière des Premières Nations aux Services aux Autochtones. Je remarque que, quand on a décidé de ne pas appliquer cette loi, on s'était engagé à la remplacer. Nous n'avons rien. Je connais les nouvelles relations — 10 ans pour les gens qui ont de bons dossiers — mais il n'y a eu aucune transparence.
    Comment pouvez-vous demander à un ministère d'être responsable d'une loi que vous refusez d'appliquer et à un autre d'être responsable des nouvelles relations financières? Comment cela va-t-il fonctionner?
    Quel est le plan pour que toutes les collectivités échangent et proposent quelque chose?
    Je continue de recevoir des appels tout le temps, particulièrement de la part de femmes qui vivent dans des collectivités et se préoccupent au sujet du manque de transparence de leurs chefs. Qui va assumer la responsabilité? Quel est le plan?
    Cette loi sera-t-elle abrogée et remplacée, pour que chaque collectivité ait le droit à l'information?
    Par rapport à la relation financière, le travail que mon ministère a effectué va se poursuivre au cours des prochaines années. Ce n'est pas un changement d'un ministère à un autre dans ce cas-ci.
    Vous avez raison de dire que la loi sur la transparence serait de notre côté. La réponse demeure la même: nous allons poursuivre le travail auprès des Premières Nations pour créer une nouvelle relation financière et une nouvelle structure redditionnelle en fonction de laquelle nous ne faisons pas nécessairement tout le travail au quotidien, mais qui suppose aussi la création d'une institution, peut-être à la manière du vérificateur général, ce que vous avez déjà entendu.
    Nous avons commencé il y a trois ans et demi. Une des premières mesures prises par le gouvernement consistait à cesser l'application de la loi sur la transparence. Trois ans et demi plus tard, on a promis à des membres de ma collectivité quelque chose pour la remplacer. Je crois que c'est important de souligner que les collectivités où c'est un problème n'ont rien. Je crois que, malgré les nouveaux ministères et la transformation, les chefs ne rendent pas de comptes à leur collectivité. C'est certainement une préoccupation.

  (0900)  

    J'ai un certain nombre d'autres questions. En guise de résumé pour cette série de questions, je dirais que, sur le plan philosophique, nous croyons que c'est une étape positive. Je crois que le gouvernement a entamé un processus très lacunaire en ne nous permettant pas d'examiner la législation avec des témoins qui peuvent faire ressortir les problèmes.
    Merci.
    C'est maintenant à Mme Rachel Blaney de poser des questions.
    Merci à vous tous d'être ici aujourd'hui avec nous.
    J'ai quelques questions. La première s'adresse à M. Watson et à M. Tremblay.
    Dans vos deux exposés, vous avez parlé des structures coloniales et du fait d'essayer de vous en dégager. Essentiellement, en raison du fondement même de vos deux systèmes, c'est une structure coloniale.
    Je suis curieuse de connaître le plan. Comment rendez-vous des comptes aux collectivités autochtones de l'ensemble du Canada au sujet de votre processus de décolonisation?
    C'est une excellente question; merci beaucoup de la poser.
    Dans le premier cas, notre principale responsabilité est de négocier des ententes et des traités qui vont en réalité éliminer l'un ou l'autre de nos deux ministères dans ces collectivités. Dans le premier cas, je crois que c'est la chose la plus importante.
    Toutefois, une autre partie, c'est que la législation témoigne de l'importance, pour nous, d'élaborer nos approches à l'égard de ces choses, pas seuls dans notre édifice des Terrasses de la Chaudière, mais conjointement avec les collectivités qui seront touchées. En fait, je crois que c'est un aspect particulièrement important. Si nous trouvons des solutions par nous-mêmes de la même façon dont nos ancêtres du ministère des Affaires indiennes original l'ont fait, il est probable que nous rencontrions les mêmes problèmes et difficultés que dans le passé. Il est évident que nous devons travailler avec les collectivités autochtones pour trouver ces solutions.
    Je crois que le principe sous-jacent dans la mise sur pied du ministère lui-même représente davantage qu'une seule affirmation symbolique. C'est en fait une attente du Parlement du Canada: les fonctionnaires qui exécutent le travail au nom du Canada et du gouvernement doivent le faire dans un esprit qui aspire à la réconciliation, en comprenant que nous ne définissons pas la réconciliation nous-mêmes. Cela doit être imaginé avec d'autres personnes et en fonction d'autres perspectives d'une façon très différente de ce que l'on faisait dans le passé.
    J'aimerais dire certaines choses à ce sujet.
    Je crois que le point le plus important pour nous, c'est la façon de passer à des services qui seraient fournis par les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Si vous regardez, par exemple, les dernières années et ce que nous avons tenté de faire, ce sont maintenant 85 Premières Nations qui reçoivent des subventions de 10 ans. Cela veut dire que 90 % de la reddition de comptes qui portait surtout sur ce que nous pourrions leur demander, du point de vue des exigences du Conseil du Trésor, sont maintenant éliminés. Cela veut dire qu'ils ont la flexibilité nécessaire pour décider comment investir ces fonds afin d'obtenir les résultats qu'ils recherchent.
    C'est un changement majeur, et c'est quelque chose que nous essayons d'accroître. Nous nous penchons maintenant sur les questions comme celle de savoir quelle est la bonne indexation pour ces Premières Nations si nous voulons nous assurer que ces services sont durables.
    Prenez ce que nous essayons de faire du côté de la santé. En Colombie-Britannique, l'Autorité sanitaire des Premières Nations nous inspire. Partout au pays, nous discutons avec des membres des Premières Nations dans des lieux où elles aimeraient prendre en main leurs services de santé.
    Nous faisons la même chose par rapport à l'éducation et à la création de conseils scolaires. Il s'agit de trouver des moyens qui nous permettent de céder la place. Nous n'imposons pas d'approche. Nous ne leur disons pas l'approche qu'elles devraient suivre. Toutefois, nous disons que nous sommes ouverts à ce type d'affaires, et il y a eu une réponse.
    La législation sur les services à l'enfance et à la famille est un élément important pour nous. Nous sommes conscients des sphères de compétence et demandons aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis qui le veulent d'affirmer leur compétence. Je crois que c'est probablement l'aspect le plus important concernant la décolonisation dans notre ministère.
    De plus, pour nous, pour ce qui est de la façon de passer des programmes à des services dans la culture du ministère, nous ne cherchons pas à imposer des programmes depuis le centre. Nous ne cherchons pas à juste dire: vous avez demandé quelque chose, mais cela ne concorde pas avec les programmes. Nous essayons d'adopter l'approche opposée, en disant: c'est logique, et comment pouvons-nous nous assurer que ça fonctionne?
    C'est une nouvelle approche.
    Je m'en vais demain à Toronto pour des réunions de rassemblement avec les chefs de l'Ontario. Nous avons aussi des rassemblements du genre en Ontario.
    De plus en plus de réunions du personnel se tiennent entre nos employés et les Premières Nations, les Inuits et les Métis: nous essayons de les intégrer dans notre processus décisionnel. Comme vous le savez, nous travaillons aussi davantage sur l'élaboration conjointe, comme nous l'avons fait pour l'éducation et les services à l'enfance et à la famille. C'est une approche totalement nouvelle pour nous. Nous essayons de changer notre façon d'aborder les questions autochtones pour nous assurer qu'elles reposent sur un partenariat, sans nécessairement essayer d'élaborer des programmes depuis le centre.
    Le recrutement est important: il s'agit d'amener un plus grand nombre de membres des Premières Nations, d'Inuits et de Métis dans le ministère. Si vous regardez mes statistiques, il y a probablement de 26 à 28 % de nos employés qui s'autoidentifient comme des membres des Premières Nations, des Inuits ou des Métis. Dans certaines régions, c'est 50 %. Nous nous efforçons de recruter plus de Premières Nations, d'Inuits et de Métis, particulièrement à l'échelon de la direction.
    Ce sont les types de mesures que nous essayons de prendre pour nous assurer qu'il y a une décolonisation.

  (0905)  

    J'ai une autre question qui porte sur la façon dont les trois ministères ont été créés. Beaucoup de collectivités nordiques et autochtones en région éloignée font face à de multiples difficultés, et elles doivent maintenant traiter avec trois ministères par rapport à certaines questions.
    Je me demande si vous pourriez nous dire comment vous gérez cela de façon équitable, j'imagine. C'est beaucoup de choses à assumer, particulièrement si vous êtes une petite collectivité et que vous n'avez pas une grande capacité.
    Quel est le plan pour faire en sorte que les trois ministères travaillent avec cohésion pour s'assurer que ces services sont fournis?
    Nous sommes dans le même édifice. Cela nous aide.
    Un de nos engagements consiste à travailler de façon harmonieuse ensemble.
    Encore une fois, même le concept de collectivités « nordiques » varie dans de nombreux endroits différents. Parfois, les gens parlent des « territoires », et parfois, cela comprend le Labrador, le Nord du Québec et le Nord de l'Ontario, ainsi que d'autres provinces.
    RCAANC possède des bureaux régionaux dans chacun des trois territoires, et nous travaillons donc en étroite collaboration avec nos collègues de SAC lorsque des questions se chevauchent. La même chose est vraie au sud du 60e parallèle et dans toutes les provinces où SAC détient des bureaux régionaux.
    Notre objectif, c'est qu'il n'y ait pas de mauvaise porte. Vous pouvez venir vous adresser aux mêmes fonctionnaires qu'à ceux à qui vous avez parlé dans le passé. Si un certain type de communication doit se faire, nous le ferons derrière des portes closes. Ce n'est pas quelque chose dont vous devriez être au courant si vous êtes à l'extérieur. Vous ne devriez pas être en mesure de le voir.
    Je crois que ce sera le critère. Ce n'est pas différent de ce que nous avons fait dans le passé.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de Will Amos de poser les questions.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos vaillants fonctionnaires.
    J'aimerais profiter du fait que nous avons ici un historien ministériel.

[Français]

     Monsieur Morin, je crois que vous serez d'accord que le Canada veut aller vers la réconciliation, mais qu'il veut s'assurer que les ministères comprennent jusqu'à quel point ils ont nui aux communautés par le passé, même si leur but était d'avoir de bons résultats.

[Traduction]

    Je crois que les Canadiens recherchent la garantie qu'il ne s'agit pas juste de prononcer de beaux discours et de déplacer les chaises sur le pont, mais qu'il y a plutôt une reconnaissance concrète des torts commis dans le passé et des dommages causés, dont un grand nombre sont liés aux institutions des services publics elles-mêmes. Je crois que la commission royale a profondément abordé cette question.
    Monsieur Morin, si vous pouviez s'il vous plaît nous fournir un résumé des pires coups, pour ainsi dire, je crois que ce genre d'information devrait figurer au compte rendu, et je sais que mes électeurs algonquins aimeraient entendre ce genre de reconnaissance de la part d'un haut fonctionnaire.
    Le ministère des Affaires indiennes est en fait une des plus vieilles institutions continues de l'histoire du Canada. Il existe depuis environ 1755 sous diverses formes. Il a changé et évolué à de nombreuses occasions, mais il a presque toujours eu la même fonction essentielle, jusqu'à tout récemment, c'est-à-dire l'intégration et l'assimilation des peuples autochtones dans la société canadienne élargie.
    Au fil des ans, le ministère, sous ses nombreuses formes, a toujours joué ce rôle central de « prendre soin des autres », de façon extrêmement paternaliste, depuis la création d'écoles, pour dicter comment les enfants autochtones devraient être éduqués, jusqu'à l'établissement de structures de gouvernance qui sont imposées par l'intermédiaire de la Loi sur les Indiens pour limiter la façon dont les collectivités peuvent se gouverner, afin de conserver ce pouvoir au sein du ministère lui-même.
    Cette situation a largement contribué à la création d'une institution, une institution culturelle, à l'intérieur du ministère, où celui-ci croyait toujours avoir raison, et il a donc agi dans ce qu'il croyait être l’intérêt de la collectivité, mais souvent, ce n'était en fait pas la meilleure chose. C'était dans l'intérêt de l'État ou du gouvernement de l'époque.
    Au fil du temps, nous nous sommes considérablement éloignés de ces premiers concepts, particulièrement depuis les années 1950 et 1960, où nous avons commencé à nous rendre compte — « nous », en tant que ministère — du fait que la Loi sur les Indiens était beaucoup plus dommageable que protectrice. Au fil du temps, nous avons modifié divers textes de loi et créé de nouvelles structures pour remédier à ce fait, mais comme la commission royale l'a fait remarquer, la structure demeure encore. Nous continuons de fonctionner suivant la même structure que celle établie en 1966, en vertu de la Loi sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
    Nous avons l'occasion de briser ces structures pour en créer de nouvelles et établir dans l'avenir de nouvelles relations qui reposent sur l'intention originale et les relations initiales entre les colons et les peuples autochtones au Canada.

  (0910)  

    Je vous remercie. Je crois que le concept de « pupilles de l'État » a été extrêmement dommageable. J'aimerais nous ramener dans un contexte actuel et vous présenter à vous, mais aussi à nos sous-ministres, une étude de cas parce qu'il y a des répercussions actuelles dans ma collectivité de Rapid Lake.
    La collectivité de Rapid Lake ne vient que tout récemment de se dégager de la gestion par un tiers, une institution légale qui lui avait été imposée. Elle a désespérément besoin d'une nouvelle école. Nous avons travaillé très fort — y compris avec notre secrétaire parlementaire — avec le ministère des Services aux Autochtones pour y arriver, mais dans notre tentative de concrétiser ce type de renouvellement des infrastructures, qui peut ensuite se solder par le renouvellement de la collectivité et d'autres investissements en infrastructure, nous nous butons à d'autres institutions qui ont une incidence coloniale, comme Hydro-Québec, par exemple, ou d'autres gouvernements qui ne changent pas nécessairement leur façon d'exercer leurs activités.
    À votre avis, quelles sont les difficultés liées à l'intersection entre les institutions fédérales renouvelées, modernisées ou réconciliées et les institutions non fédérales qui ne sont pas allées aussi loin?
    C'est une excellente question.
    Dans la législation concernant RCAANC, par exemple, l'attente selon laquelle nous devons travailler avec les provinces, les territoires et d'autres entités est inscrite dans la loi. Je crois qu'une bonne partie de la responsabilité du ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord supposera d'aider d'autres gouvernements à voir ce qui est dans leur intérêt.
    Ce ne sont pas des choses que nous faisons simplement parce qu'elles sont bonnes à faire. Si nous voulons voir des collectivités avancer au Canada, c'est très difficile de le faire sans écoles, sans eau potable et sans logement.
    Dans notre fédération, le travail avec les provinces et les territoires représente un aspect essentiel de la réussite de ces choses. Cela constituera une grande partie de notre travail. En toute justice, partout au pays, certaines provinces se demanderont peut-être si elles nous ont devancées, et elles pourraient parfois avoir l'impression de nous faire avancer. Dans d'autres cas, nous devrons travailler d'arrache-pied avec elles pour les amener à participer à des projets qui sont, à notre avis, dans notre intérêt collectif.
    Comme l'historien ministériel l'a souligné, au fil du temps, notre réflexion sur ces choses a changé. C'était vrai au gouvernement fédéral, et je crois que ça l'a aussi été dans de nombreux gouvernements provinciaux et territoriaux.
    Je crois que votre efficacité se mesure à l'aune de vos résultats, et que la meilleure chose pour nous est de montrer ce qui fonctionne sur le terrain et les solutions réelles.
    Si vous vous rendez dans une collectivité des Premières Nations qui est dans une situation d'autonomie gouvernementale, vous voyez une différence. Si vous allez en Colombie-Britannique et que vous discutez avec l'Autorité sanitaire des Premières Nations, vous voyez un système qui fonctionne mieux que le système que nous avons en place. Si vous rencontrez les Micmacs de l'Atlantique, qui gèrent leur système d'éducation, et ce, depuis plus de 20 ans, ils obtiennent de meilleurs résultats. Je crois que, lorsque vous montrez ces résultats, vous montrez aux partenaires que c'est la façon de travailler ensemble.
    Merci.
    Nous passons maintenant à une période de questions de cinq minutes. C'est au tour des conservateurs.
    Monsieur Arnold Viersen.

  (0915)  

    Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos invités d'être ici aujourd'hui.
    Dans le Plan ministériel 2018-2019 des Services aux Autochtones, pour 50 % des cibles de l'année, leurs résultats prévus sont laissés vides. En ce qui concerne la date d'atteinte des cibles, 55 % sont à déterminer, et 61 % des résultats pour 2016-2017 ne sont pas disponibles.
    Le gouvernement a répété à maintes reprises qu'il n'y a pas de relation plus importante que celle avec les peuples autochtones. Il a fait des promesses ambitieuses. Pourquoi ne donne-t-on pas suite au plan ou pourquoi est-il entièrement compromis?
    Il me faudrait voir les documents. Nous pouvons vous recontacter à ce sujet.
    S'agit-il du plan ministériel?
    Tout un tas de lignes sont laissées vides.
    C'est ce que je dois vérifier, pour savoir si c'est en raison de la transition... et nous sommes passés du vieux rapport ministériel sur le rendement d'AINC aux deux nouveaux rapports. C'est peut-être la raison. C'est pourquoi j'aimerais l'examiner.
    Je peux vous dire que les résultats... Si vous allez sur le site Web et regardez ce que nous faisons sur le plan du logement, de l'eau et des principales priorités, y compris, par exemple, ce dont je parlais relativement aux subventions, nous avons en fait produit les résultats et les extrants que nous recherchions pour la plupart de nos priorités, donc je suis un peu surpris par cela.
    Dans ce cas, c'est intéressant qu'il ne soit pas mentionné que cette ligne a été déplacée vers l'autre ministère.
    Je devrai vérifier, mais c'est un des problèmes. Il y avait un rapport ministériel sur le rendement, et il y a maintenant deux ministères, ce qui peut avoir créé de la confusion dans les rapports. J'en suis désolé. Nous pouvons vous fournir plus tard les renseignements concernant ce que cela veut dire de notre côté.
    L'autre chose, c'est que, pour plus de la moitié des cibles que nous examinons, on a dit que les résultats devaient encore être déterminés pour 2016-2017. Savez-vous qu'est-ce qui explique ce délai?
    Je dois voir les documents. Je ne vais pas spéculer sur ce sujet.
    D'accord.
    C'est juste intéressant, j'imagine, qu'il s'agisse du plan ministériel. Le fait de le diviser entre les deux... Il semble que le ministère n'ait même pas nécessairement une bonne idée de ce qui doit y figurer, essentiellement.
    Il y a eu quelques transformations, mais certains éléments doivent toujours être clarifiés.
    Pour être honnête, 95 % de ce travail a été fait assez rapidement. L'élément le plus important pour nous, c'était que tous les services soient transférés à SAC, y compris la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits qui se trouvait précédemment à Santé Canada. Nous avons abondamment parlé de la division, mais nous avons omis le fait que nous avons également réuni des services en ramenant la santé de notre côté, ce qui n'était pas le cas auparavant. Donc non, désolé, mais je ne suis pas d'accord. La plupart des éléments importants du ministère étaient déjà clairs dès le départ.
    Les répercussions sur les services internes ont été plus difficiles pour ce qui est de savoir qui va se rendre de quel côté. Vous finissez par avoir des enfants qui sont sous la garde des deux parents, si vous voulez. C'est quelque chose que vous devez clarifier à un certain point; qu'est-ce qui va rester pour servir les deux ministères, qu'est-ce qui ira de ce côté-là et qu'est-ce qui viendra de mon côté. Cela concerne surtout les services internes.
    Par rapport aux programmes, il était très clair dès le départ qui fournissait les services, gérait la relation sur le terrain, négociait les traités et ainsi de suite.
    Y a-t-il un endroit où nous pouvons aller pour voir comment c'était organisé auparavant et comment c'est organisé maintenant?
    Nous pouvons vous en faire part; si vous allez sur le site Web, c'est là. Si vous examinez la législation, vous voyez qu'elle a établi les services. Nous pouvons vous montrer l'organigramme des deux ministères et l'endroit exact où se retrouvent les services principaux.
    Il y avait par exemple un SMA responsable des services sociaux. C'est de mon côté. Tout ce qui concernait la santé des Premières Nations et des Inuits se retrouve en fait de mon côté. Le développement économique a été un peu plus complexe, parce que cela comprend aussi les travaux sur des terres, et c'est quelque chose sur quoi nous travaillons. Pour le reste, les traités et la négociation étaient de ce côté-ci, ainsi que les Affaires du Nord, donc c'est en fait assez clair.

  (0920)  

    Merci.
    Nous allons maintenant passer à Will Amos.
    J'aimerais poursuivre dans la même veine et savoir de quelle façon la décision du ministère permettra d'obtenir des résultats concrets sur le terrain.
    Je vais commencer par poser des questions. Qu'est-ce qui est si nécessaire au sujet d'un décret? Je sais que M. Bossio en a parlé précédemment, mais je ne sais toujours pas pourquoi nous ne pourrions pas maintenir un décret indéfiniment. L'organisme de réglementation qui s'occupe de la planification de la lutte contre les inondations, de la gestion du débit de la rivière Ottawa, existe depuis le début des années 1980 en vertu d'un décret, et ce, tant à l'échelon provincial qu'à l'échelon fédéral. Pourquoi pas les ministères?
    J'ai été sous-ministre d'Infrastructure Canada, et il n'y avait pas de loi. L'entité relevait d'un autre... On peut toujours se demander s'il devrait y avoir une loi ou non. C'est une bonne question.
    Selon moi, dans notre cas, c'était nécessaire d'avoir une loi, parce qu'il y en a déjà une. Il y en a une qui, en fait, reconnaissait AINC comme étant un ministère, alors il fallait remplacer AINC par quelque chose d'autre. La loi nous a permis de le faire. La loi définit aussi davantage les pouvoirs des deux ministres au Parlement, donc devant vous. Un décret, c'est vraiment une action de l'exécutif. Ça reflète davantage une relation entre le premier ministre, l'exécutif et le ministre. Dans la situation qui nous occupe, cela nous a donné des pouvoirs juridiques que nous n'aurions pas eus en vertu d'un décret, surtout, par exemple, en matière de gestion des données et, tout particulièrement en ce qui concerne l'instance responsable de la loi qui est créée. C'est quelque chose qu'on a.
    Il y a des antécédents. La Loi sur la gestion des terres des premières nations, l'autre loi qui est liée aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis, a été mentionnée. C'était important de définir, dans une loi, qui était responsable de ces pouvoirs.
    Il n'y a pas de science, de mécanismes. C'est plutôt un art, pour être honnête avec vous. Il y a des ministères qui peuvent se contenter d'un décret, mais, dans ce cas-ci, vu l'importance de l'enjeu, aussi... Nous parlons de deux ministères. Si vous regardez de mon côté, et je ne veux pas minimiser d'aucune façon ce que fait l'autre côté, parce que c'est aussi complexe... Si on regarde les gouvernements provinciaux, vous ne trouverez pas de ministère qui s'occupe de la santé, de considérations sociales et économiques... et qui s'occupe aussi d'infrastructures et d'autres choses. C'est en fait un domaine très complexe, et obtenir un fondement législatif est en fait très utile pour nous.
    J'aimerais ajouter quelque chose. J'ai passé 10 ans de ma carrière à travailler pour des gouvernements provinciaux. Deux des principaux ministères dans tout gouvernement provincial, ce sont la santé et les services sociaux. Les gouvernements provinciaux consacrent beaucoup, beaucoup de temps et de réflexion à ces ministères. Le fait de lier toutes ces activités ensemble en plus de redéfinir des aspects de la façon de notre compréhension du pays et des relations entre la Couronne et les Autochtones est quelque chose de très difficile.
    J'aimerais ajouter une dernière chose, rapidement. La Loi d'interprétation dit qu'une loi a vocation permanente. Vu la façon dont la Loi sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien existait précédemment, l'intention était qu'elle ait vocation permanente. Je crois que c'est important d'un point de vue symbolique. L'une des choses prévues dans la loi pour Services aux Autochtones Canada, c'est que l'organisation doit, en fait, au fil du temps, transférer les services dont elle assure la prestation à d'autres entités. Selon moi, c'est quelque chose qu'on n'aurait pas pu faire par décret.
    Merci de vos commentaires.
    Comme vous le savez probablement, ma circonscription de Pontiac compte bon nombre de fonctionnaires qui travaillent très dur pour ces deux ministères. Beaucoup sont très satisfaits de leur travail, mais certains m'ont dit à l'oreille qu'ils ont été frustrés dans le passé par Affaires autochtones et du Nord Canada en raison du fait qu'il s'agissait d'une institution publique très hiérarchisée et très verticale. Ils avaient l'impression qu'on ne les écoutait pas. Bon nombre d'entre eux étaient des Autochtones.
    En quoi la scission en deux ministères a-t-elle permis à ceux qui ne sont pas des fonctionnaires principaux de se faire entendre? Pouvez-vous dire aux Canadiens que les représentants du ministère à tous les niveaux pourront vraiment avoir leur mot à dire dans le cadre de la transformation?
    La transformation est un sujet de discussion au sein du ministère. Ça l'a été et ça continue de l'être, et ce, de façon permanente. Dès que nous avons entendu parler du décret, nous avons mobilisé le personnel. En fait, nous avons organisé des séances pour les employés en tant que tels et nous avons aussi organisé des séances de mobilisation.
    Plus de 3 400 employés ont participé à ces séances, qui étaient présidées et organisées par les employés eux-mêmes. Les employés ont formulé des recommandations et ils continuent de travailler sur la transformation. Par conséquent, ils participent et sont mobilisés depuis le début.

  (0925)  

    Merci.
    Nous allons maintenant passer à Kevin Waugh.
    Merci, madame la présidente.
    Bienvenue à tous.
    De quelle façon le ministère de la Justice travaille-t-il en collaboration avec ces groupes? Je vois que vous avez de très bons liens avec les deux. Avez-vous bénéficié d'une augmentation des effectifs? Pouvez-vous tout simplement nous parler de votre rôle dans tout cela?
    Si vous me le permettez, je vais parler de mon organisation, soit les Services juridiques. Nous servons maintenant les deux ministères, mais pour ce qui est d'une augmentation, non, il n'y a pas eu d'augmentation des ETP. Pour l'instant, je dirais que ce n'est pas nécessaire. Nous sommes confrontés à des défis en raison des deux ministres et vu nos ETP actuelles. Cela ne signifie pas qu'il n'y aura pas de changement à l'avenir, mais, pour l'instant, il n'y a pas eu d'augmentation.
    Alors tout est un peu comme avant, même si les ministères se sont séparés. J'ai raison?
    Je ne dirai pas que c'est la même chose, parce que nous devons composer avec plus de personnes, mais nous faisons toujours partie d'une équipe. Nous sommes là pour fournir de l'aide lorsque les gens ont des questions d'ordre juridique. De ce côté-là, rien n'a changé.
    C'est un peu plus complexe, parce que nous avons participé à des enjeux liés à la législation ministérielle et d'autres enjeux qui n'avaient jamais été soulevés. Essentiellement, cependant, nous faisons toujours partie de l'équipe et nous travaillons en collaboration comme avant.
    Quels enjeux différents d'avant constatez-vous en raison des deux nouveaux ministères? Y a-t-il quoi que ce soit qui a changé au sein de votre service? Y a-t-il quoi que ce soit avec quoi vous devez composer tandis que vous n'aviez pas à le faire lorsque tout était réuni?
    Vous parlez d'enjeux juridiques?
    Oui.
    C'est une bonne question. Bien sûr, depuis l'annonce du gouvernement, qui a été suivie des principes et de la relation, la relation nation à nation, tout cela... Oui, je dirais qu'il y a de nouveaux enjeux juridiques. Ces enjeux découlent aussi de la DNUDPA et de la façon dont nous l'appliquons. Ce sont de nouveaux problèmes qui n'étaient pas soulevés avant et qui sont seulement survenus depuis environ deux ans.
    Est-ce que votre ministère a la capacité de composer avec tout cela?
    Nous avons la capacité de soutenir nos clients, qui s'en occupent.
    Bien.
    Monsieur Tremblay, c'est intéressant... Comment se passe le transfert graduel, j'imagine, vers les organisations autochtones? Dans certains cas, lorsqu'on parle de graduel, cela peut signifier des décennies.
    Oui. En fait, nous avons mis en place un nouveau secteur d'activité qui nous permettra de cerner à l'avenir les services à l'extérieur du ministère et de produire des rapports connexes. La question, ce sera de savoir de quelle façon tout cela continuera de croître au fil des ans. Si vous regardez les 85 subventions qu'on a actuellement — et il n'y a aucune raison de croire qu'il ne peut pas y en avoir plus au cours des prochaines années — c'est beaucoup d'argent et beaucoup de collectivités des Premières Nations qui gèrent leurs services. Cela ne signifie pas nécessairement que nous disparaîtrons complètement à ce moment-là. Cela signifie que notre relation avec ces Premières Nations sera extrêmement différente. Ce n'est pas une relation qui concerne la conformité à l'égard de programmes en tant que telle, c'est plus une question de relation, c'est-à-dire: « Comment les choses se passent-elles et comment pouvons-nous vous aider? »
    Par conséquent, j'estime que c'est encourageant. Ce qu'on tente de faire de plus en plus, c'est de cerner les prochaines étapes, parce que, vous avez raison, la route pourrait être longue. La question consiste à savoir de quelle façon on célèbre et cerne les jalons. Comme je l'ai mentionné, nous travaillons du côté de la santé et du point de vue aussi de l'éducation. La question, pour nous, c'est celle du répertoire des prochaines étapes qu'il peut y avoir de ce côté-là, et nous travaillons aussi en collaboration avec nos collègues de Relations Couronne-Autochtones. Une des choses qu'il serait intéressant de voir — si le projet de loi est adopté, et je suis sûr qu'il le sera — ce sont les services à l'enfance et à la famille. C'est une autre chose que nous étudions. Il y a beaucoup d'intérêt lié à la santé et aux services sociaux et beaucoup d'intérêt aussi du côté de l'éducation. Nous avons signé un accord d'autonomie gouvernementale dans le Nord de l'Ontario relativement à l'éducation, et il revêt une grande importance. Il y a de l'intérêt au Québec en ce qui a trait à la fois au programme lié à la santé et aux programmes sociaux. Si vous regardez la carte à l'échelle du pays, tout cela, plus les subventions permettra d'obtenir d'importants résultats, selon moi, au cours des prochaines années.
    Je tiens à vous rappeler que, en Colombie-Britannique, nous n'avons pas de bureau régional responsable des enjeux liés à la santé. Tout cela a été transféré. Nous avons fermé boutique il y a des années à la suite de la création de la Régie de la santé des Premières Nations. C'est donc quelque chose qui serait possible à l'avenir. Ce ne sera peut-être pas à l'échelon provincial, ce sera peut-être subrégional, selon la volonté des partenaires.

  (0930)  

    Votre commentaire sur l'éducation a piqué ma curiosité, parce que nous avons accueilli le vérificateur général. L'année dernière, il y a eu un rapport cinglant selon lequel nous ne respections pas les objectifs en matière de taux de diplomation. Et là, vous créez des commissions scolaires, comme vous l'avez dit précédemment, tandis que, d'autres administrations, comme la Nouvelle-Écosse, les éliminent. Le Québec a parlé de les éliminer aussi. Le Manitoba de même. Et malgré tout, vous allez dans la direction opposée. Pourquoi?
    Vous devrez attendre jusqu'à la prochaine série de questions.
    Et voilà.
    Nous allons suspendre la réunion pendant quelques minutes, mais, avant de le faire... Nous avions prévu deux heures. Je crois savoir que, des deux côtés, on aimerait peut-être réduire la durée, mais, en tout cas, on n'aurait pas besoin de l'heure au complet.
    J'aimerais qu'on en parle rapidement. Veut-on s'arrêter ici?
    Allez-y, madame McLeod.
    Madame la présidente, on en revient à ma motion initiale en vertu de laquelle nous voulions que les représentants soient ici pendant une heure. Je crois qu'ils ont fait preuve de beaucoup de diligence. Nous voulions vraiment accueillir des témoins durant la deuxième heure. Le fait que notre motion liée à cet enjeu précis ait été rejetée me trouble, parce que cela signifie que nous ne sommes pas engagés à faire notre travail. Nous avons le temps. Nous aurions pu accueillir des témoins qui auraient pu parler directement de la loi ou qui auraient pu souligner quelques problèmes liés à la loi.
    Je suis assez consternée de constater que mes collègues n'ont pas soutenu ce plan précis pour composer avec ce projet de loi très important.
    Mais, pour ce qui est de l'idée de laisser ces personnes retourner travailler au sein de leurs ministères afin de se débarrasser de la Loi sur les Indiens...? Je dis ça comme ça. C'est ce que je dirais.
    Madame Blaney, vous avez la parole.
    J'ai encore des questions, madame la présidente, et je ne crois pas avoir obtenu mon deuxième tour. Je crois avoir droit à un autre. Je n'ai pas eu droit à mes trois minutes.
    Vous avez perdu vos trois minutes parce que nous sommes arrivés au bout de la période prévue.
    Oui.
    Je vais poser la question au membre représentant le gouvernement. Peut-on poursuivre pendant une autre série, peut-être, pour permettre à tous les membres...
    J'invoque le Règlement, madame la présidente. Je crois qu'on avait prévu une réunion de deux heures.
    C'est le cas.
    Ça ne devait pas durer une heure. Qu'on interrompe ma collègue du NPD avant ses trois minutes... C'est une réunion de deux heures qui était prévue, alors on n'a pas à s'entendre sur la prolongation. La parole aurait dû lui revenir, et on aurait dû poursuivre jusqu'à ce qu'on décide qu'on n'a plus de questions.
    Eh bien, la réunion est prévue pour deux heures. Et le nom de Mme Blaney figure bel et bien sur la liste pour son intervention de trois minutes.
    Je vois M. Amos.
    Non. C'est moi. Je n'ai pas eu ma série de questions, madame la présidente.
    Oh, je suis désolée. On ne s'est pas rendu à vous non plus, monsieur Bossio.
    Ma suggestion serait tout simplement que, bien sûr, si les membres de l'opposition et M. Bossio aimeraient poursuivre — sauf si, d'un autre côté, on a l'impression de devoir continuer à poser des questions —, eh bien, qu'on renonce à ces occasions. L'opposition peut continuer comme bon lui semble. Si, à un moment donné, nous avons une question que nous estimons devoir poser, à la lumière de ce qui aura été demandé... Sinon, nous pourrions renoncer à nos interventions de notre côté, afin que le gouvernement puisse aller de l'avant.
    D'accord. Je crois que c'est une approche très raisonnable. Les partis d'opposition ont des questions.
    Nous allons continuer.
    Nous allons maintenant passer à Mike Bossio, pour une intervention de cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais approfondir les résultats liés au fait de séparer AINC en trois ministères distincts. Lorsqu'on regarde la question du logement, de l'éducation, de l'eau, du principe de Jordan et, comme vous l'avez mentionné, que la question des services de santé passe de Santé Canada à SAC, ce sont là des différences marquées pouvant avoir des répercussions positives sur les collectivités.
    Pour ce qui est de la première partie, j'aimerais que vous nous en disiez plus sur les répercussions des changements que vous constatez sur le terrain, quant au fait d'avoir cet effort ciblé du côté de SAC. Par ailleurs, j'aimerais beaucoup vous entendre parler de la réussite au chapitre de l'autodétermination, grâce à des négociations avec un certain nombre de collectivités partout au pays, aussi. La séparation a en fait accéléré la prestation des services et de l'évolution de la relation de nation à nation.

  (0935)  

    Oui. Il est clair qu'il y a eu beaucoup plus d'initiatives et d'activités en conséquence au cours des dernières années. Est-ce que tout ça est lié au fait d'avoir deux ministères ou juste un? Difficile de le savoir, mais le fait d'avoir deux ministres — un ministre qui s'occupe seulement des services, et l'autre, des droits — a été très utile au cours des dernières années. Cela signifie qu'un ministre n'a pas à choisir — parfois, durant la même journée — ce qu'il fera. C'est la même chose pour les sous-ministres et la même chose pour l'organisation. Nous pouvons rouler à plein régime du côté des services.
    Vous avez mentionné une longue liste de résultats et d'activités. Du côté du logement, nous visons encore à réparer ou à construire 16 000 résidences en 5 ans, avec nos collègues, bien sûr, de la SCHL. Nous avons construit un grand nombre d'écoles. Nous respectons les échéanciers en ce qui a trait à la fameuse question de l'eau. Plus de 85 % des avis à long terme d'ébullition de l'eau ont été levés.
    Vous avez aussi parlé du principe de Jordan. Il y a maintenant plus de 220 000 demandes qui ont obtenu une réponse en vertu du principe de Jordan, ce qui est énorme. Nous avons mentionné les services à l'enfance et à la famille. En un peu plus d'un an, nous avons coélaboré un projet de loi que vous avez maintenant devant les yeux, au sujet de la compétence en matière de services à l'enfance et à la famille.
    Nous avions mentionné les subventions précédemment. Il y a plus de 85 collectivités. Nous avons offert des subventions de 10 ans à plus de 100 collectivités des Premières Nations l'année dernière. Je tiens à vous rappeler que les subventions ont fait l'objet de discussions durant le mandat de l'ancien AINC, depuis les années 1980. Il y avait une seule collectivité au pays qui avait en fait une subvention, et nous en sommes maintenant à 85. C'est un changement majeur.
    Lorsqu'on regarde tout ça ensemble... du côté de la santé mentale, nous en avons fait beaucoup. Nous avons fait beaucoup de choses dans d'autres domaines, aussi. Nous pouvons vous fournir plus de statistiques, si vous voulez, mais une bonne partie de tout ça figure sur notre site Web.
    Pour ce qui est du dernier point, nous avons élaboré, comme vous le savez, une nouvelle formule de financement pour ce qui est de l'éducation. Nous mettons maintenant en place la formule à l'échelle du pays. La formule a été coélaborée avec les Premières Nations.
    Des choses importantes se sont produites. Assurément, le fait que nous nous soyons séparés et avons créé deux ministères a aidé. Le fait que nous ayons la question de la santé de notre côté aide aussi. Lorsqu'on s'attaque aux enjeux du logement, comme ceux à Cat Lake, comme vous en avez entendu parler cet hiver, c'est vraiment utile de réunir ensemble la santé, les services sociaux et l'infrastructure. Je crois que, oui, la séparation nous a clairement offert des outils que nous n'avions pas avant.
    Pour les collectivités des Premières Nations, cela signifie aussi une capacité future d'intégrer ces services. Par exemple, du côté des subventions, nous avons pu inclure la santé, ce que nous n'aurions pas pu faire à l'époque de l'ancien AINC. Beaucoup de résultats ont vu le jour, et la plupart de ces résultats découlent probablement du fait qu'il y a une séparation entre deux ministères.
    Monsieur Watson, vouliez-vous ajouter quelque chose à cela?
    Bien sûr.
    Lorsqu'on parle des relations qui changent — peu importe le domaine —, on aide vraiment les gens à se voir différemment et à voir aussi différemment leur incidence sur la relation. C'est l'une des choses les plus difficiles à faire pour l'humain.
    Ça peut sembler simple, mais, en fait, une bonne partie de notre travail consiste à aider les gens à voir les choses différemment et aussi à voir d'un autre œil l'incidence qu'ils ont eue sur la relation. Cela exige beaucoup d'efforts de la part de la direction. D'après mon souvenir, mon collègue est responsable de l'administration d'un budget qui est environ de la taille de celui du gouvernement du Manitoba, si j'ai bien compris les chiffres. Eh bien, administrer ainsi de tels fonds en plus d'essayer d'aider les gens à se voir différemment, à voir leur histoire et leur avenir d'un nouvel œil est beaucoup, beaucoup de travail. On nous a maintenant délestés de certaines choses afin que nous puissions nous occuper du deuxième volet et seulement de ça. On parle du travail qui est fait au sein du gouvernement fédéral, mais c'est aussi à l'extérieur, auprès des collectivités autochtones. Ça nous aide aussi à nous voir différemment. Tout ça exige énormément de temps de la direction.

  (0940)  

    La parole passe maintenant à Rachel Blaney.
    Merci.
    Je veux revenir à vous, monsieur Tremblay.
    L'une des choses que vous avez dites dans votre exposé, c'est qu'en travaillant ainsi — et vous dites aux employés du ministère que c'est aussi ce qu'ils font —, vous finirez par ne plus avoir de travail. J'aimerais savoir si vous pourriez nous parler rapidement de ce à quoi tout ça ressemble. C'est un immense changement. Je suis d'accord avec vous pour ce qui est des services de santé en Colombie-Britannique. Je suis une députée de cette région. J'apprécie assurément la responsabilité locale à cet égard et la façon dont les intervenants composent avec les enjeux touchant diverses compétences; les relations sont nettement meilleures en Colombie-Britannique comparativement à ce qui se passe dans bon nombre d'autres provinces et territoires.
    J'aimerais savoir de quelle façon la planification se produit. De quelle façon les collectivités autochtones participent-elles aux activités de planification? De quelle façon, en quelque sorte, regardez-vous la situation de tout le pays et les réalités différentes?
    Je représente plus de 20 collectivités autochtones dans ma circonscription. Beaucoup de collectivités en Colombie-Britannique sont petites. Certaines dans les autres provinces sont plus imposantes. C'est un processus très imposant. Je me demande tout simplement de quelle façon vous commencez à parler de ces choses.
    Je crois que cela a toujours fait partie de l'ADN du ministère. Je crois que ça ne s'est pas fait parce que nous n'avions pas les outils pour y arriver. Depuis les années 1980, au moins, et même dans les années 1970 — les historiens seront peut-être en désaccord avec moi —, il y a toujours eu une tentative de délégation. C'est ainsi qu'on en parlait à l'époque. Le transfert des services, la plupart du temps, se faisait au niveau communautaire. La plupart du temps, ce sont les programmes qui étaient transférés. Et, aussi, la plupart du temps, les ressources n'étaient peut-être pas aux niveaux appropriés. Nous tentons maintenant de déterminer quelle serait la bonne combinaison de ces trois éléments.
    C'est la raison pour laquelle, par exemple, du côté des commissions scolaires, nous ne reculons pas. Nous répondons en fait aux demandes. Les Premières Nations, les Inuits et les Métis décident de quelle façon ils veulent procéder. Il s'agit de leurs services, au bout du compte. Il n'y a pas d'approche universelle dans tout ça.
    Ce que nous essayons de faire davantage, c'est de cerner des partenaires à l'échelle du pays qui veulent faire les choses différemment et qui veulent s'occuper de leurs services. Nous n'arrivons pas à la table de négociations en empêchant des choses et en ayant une idée de ce qu'il faut faire, parce que, dès qu'on agit de la sorte, on se retrouve avec un programme et il finira par y avoir des exceptions partout au pays, franchement. Nous essayons plutôt d'écouter les gens.
    On s'intéresse, par exemple, à l'enseignement postsecondaire. Il y a beaucoup d'intérêt du côté des infrastructures. Vous avez peut-être entendu parler du fait qu'il y a, en fait, des Premières Nations en Colombie-Britannique qui veulent créer une première institution des Premières Nations responsable des infrastructures. Nous les soutenons lorsqu'elles essaient de déterminer ce à quoi ça pourrait ressembler. Nous allons les aider ainsi sans avoir d'idée préconçue du résultat. C'est un peu de cette façon que nous travaillons. Nous nous dirigeons dans cette direction.
    Cela ne signifie pas que tous les employés perdront leur travail. Ce n'est pas ainsi que nous voyons les choses. Par exemple, nous continuons de maintenir des liens avec les régies de la santé des Premières Nations. Nous avons des liens réguliers. Il s'agit davantage d'un partenariat. Nous n'assurons tout simplement plus la prestation des services comme nous le faisions avant. Nous avons conclu des accords trilatéraux sur la santé mentale avec eux et avec la province de la Colombie-Britannique l'année dernière. C'est quelque chose que nous continuerons de faire.
    La façon dont nous abordons tout ça, c'est vraiment de demander aux partenaires de quelles institutions et capacités ils ont besoin. Quel genre de services veulent-ils offrir? Ce ne devrait pas être des programmes, ce devrait être des services, et il faut s'assurer que les ressources sont au rendez-vous.
    Les travaux que nous avons faits relativement à la formule pour l'éducation sont importants. Les travaux que nous faisons au sujet des formules applicables aux subventions sont aussi importants. Si on s'entend sur la formule de financement, ensuite, il s'agit plutôt de savoir comment les gens en assureront une gestion différente.
    C'est difficile à expliquer parce qu'il n'y a pas de solution universelle. Il faut essentiellement ouvrir la porte à toutes les approches différentes.
    Madame la présidente, je vous remercie. Je suis désolé. J'ai parlé longtemps.
    Merci.
    Nous allons maintenant recommencer le processus. Nous en sommes à des interventions de sept minutes.
    Nous allons commencer par M. Ouellette.
    [Le député s'exprime en cri ainsi qu'il suit:]
    ᓂ ᐚᐦᑰᒫᑲᓇᐠ ᑖᓂᓯ ᓂ ᒥᔦᐧᔨᐦᑌᐣ ᑳ ᐋᐧᐸᒥᑕᑲᐧᐤ
    [Les propos du député sont traduits ainsi:]
    Madame la présidente, je salue tous les gens que je connais. Je suis très fier d'être ici.
    [Traduction]
    En fait, j'ai seulement quelques questions.
    Monsieur Watson, vous avez mentionné que vous voyez les choses différemment et que les gens voient leur avenir différemment, qu'ils se voient différemment. De qui parlez-vous exactement lorsque vous parlez des « gens »?
    Nous tous, collectivement devons le faire. Nous sommes différentes parties qui avons des points de vue différents sur ces choses. Pendant trop longtemps, l'ancien ministère des Affaires indiennes occupait tout l'espace et décidait de la bonne marche à suivre. Tandis que nous allons de l'avant, que nous travaillons auprès des collectivités inuites et métisses et assurément en collaboration avec les Premières Nations, nous devons comprendre de quelle façon ces collectivités voient leur avenir. Nous devons comprendre la relation qu'ils veulent relativement à la prestation des services, la façon dont ils veulent interagir avec nous et les types d'accords qu'ils veulent négocier avec nous. Comprendre tout ça est crucial si nous voulons bien faire les choses, les faire différemment de ce qu'on faisait dans le passé.

  (0945)  

    De quelle façon peuvent-ils vous faire confiance?
    On en revient à certaines des choses que mon collègue a dites. Il faut mettre l'accent sur les résultats. Je crois que nous comprenons maintenant certains des résultats et que tout ça est établi dans la loi. Nous commençons à bâtir ces résultats en discutant d'entrée de jeu de l'objectif visé. Je crois que c'est l'une des raisons importantes pour lesquelles la loi dit que nous devons travailler en collaboration avec les groupes autochtones, les Métis, les Inuits, les Premières Nations, pas en fin de processus pour mettre en œuvre une idée que nous avons eue nous-mêmes aux Terrasses de la Chaudière, mais plutôt pour bâtir quelque chose ensemble au terme de discussions qui commencent, dès le début, pas seulement à la toute fin.
    Après 133 ans d'existence du ministère des Affaires indiennes... cela signifie-t-il que votre ministère s'est trompé pendant 133 ans?
    Je ne pense pas que tout est bien ni que tout est mal. Mais il y a certainement eu beaucoup d'erreurs. Il suffit de consulter les tribunaux pour savoir à quel point nous nous sommes trompés dans un certain nombre de cas. Certes, je pense qu'en ce qui concerne bon nombre des choses que nous avons faites, nous déciderions délibérément de ne jamais les refaire.
    De quel type de programmes de formation disposez-vous actuellement pour changer la culture et la mentalité des employés d'AINC? Je suis anthropologue. Si vous faites quelque chose depuis 25 ans, que vous avez investi 35 ans de votre carrière dans une certaine manière de faire les choses, il doit être assez difficile de dire que vous allez faire les choses différemment.
    C'est difficile et ça ne l'est pas. Bon nombre des choses dont nous parlons aujourd'hui... Les employés du ministère nous disent depuis longtemps que nous devrions le faire. Après avoir passé la majeure partie de ma carrière dans le rôle de négociateur, je ne peux pas être assis à la table et entendre les collectivités me dire des choses qui semblent parfaitement sensées au sujet de leur passé, de leurs espoir, de leurs aspirations et ne pas être profondément touché par la rationalité de ces propos.
    Ensuite, quand vous revenez et trouvez une institution qui n'est peut-être pas dans cet état d'esprit, vous commencez à parler au sein de votre organisation. Dans de nombreux cas, nous ferons des choses que beaucoup d'employés nous suggèrent de faire depuis longtemps.
    Dans d'autres cas, cependant, vous avez raison, nous devrons continuer à travailler avec les gens afin de comprendre les choses différemment, car nous parlons ici de changements en profondeur. Nous avons des programmes de formation en place pour les personnes qui arrivent au ministère. Comme mon collègue l'a mentionné plus tôt, le fait d'avoir des employés autochtones, des Inuits, des Métis et des membres des Premières Nations, en est un élément essentiel. Pour ceux qui ne sont pas autochtones, il faut qu'ils comprennent et se fassent dire clairement que nous nous attendons à ce qu'ils saisissent que la valeur qu'apportent ces employés est importante.
    Je me demandais si tout le monde a maintenant accès à la lettre de mandat. Je parlais à des employés, et dès l'entrée en fonction de notre gouvernement, certains gestionnaires subalternes ne devaient pas communiquer, au sein de Services aux Autochtones, les lettres de mandat, même si elles étaient publiques. C'est ce que j'ai entendu de la part d'employés.
    Elles sont accessibles en ligne.
    Les gens en discutent activement ou en ont discuté au ministère, à tous les échelons?
    Nous mentionnons régulièrement les résultats attendus dans nos exposés, dans nos lettres de mandat et dans la correspondance élaborée par le personnel. Ils sont très connus.
    C'est très bien. Je pense que c'est fantastique.
    Je me demandais simplement quel est le nombre total d'employés à Services aux Autochtones Canada et au ministère des Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada? Quel est le plan pour l'avenir? Verrons-nous une réduction des effectifs au fur et à mesure que nous transférons ces services aux peuples autochtones ou assisterons-nous à une augmentation des effectifs de ce que nous appelons souvent le secteur autochtone?
    À SAC, il y a 5 230 employés.
    De plus, RCAANC compte 2 850 employés; le nombre total d'employés s'élève donc à 8 080.
    Croyez-vous que le nombre diminuera dans un certain laps de temps ou qu'il se stabilisera?
    Il est difficile de savoir à court terme. À moyen terme, bien sûr, nous pensons voir une réduction.
    J'ai mentionné le dossier de la santé en Colombie-Britannique. Au moment du transfert à la Régie de la santé des Premières Nations, nous avons essentiellement fermé les bureaux régionaux, ce qui a signifié un grand nombre d'emplois. C'est une chose sur laquelle nous devons nous pencher.
    Si nous faisons la même chose dans d'autres régions, les conséquences seront les mêmes. Si je me rappelle bien, nous avons transféré des services de santé, des services de soins infirmiers, à un conseil tribal en Saskatchewan. Cela signifie le transfert de certains postes. Nous faisons cela. Selon la taille du transfert, il y aura toujours...

  (0950)  

    Est-ce « oui » à la réduction du nombre?
    C'est un oui.
    Sommes-nous en train d'élargir le côté autochtone et d'élargir...
    Il faut aussi tenir compte de la taille des initiatives en ce moment. Il est difficile de réduire l'effectif lorsque vous créez de plus en plus d'initiatives. Nous avons reçu beaucoup d'argent au cours des dernières années. Vous avez donc toujours besoin de personnes pour gérer les fonds. Si ce n'est pas transféré et que vous obtenez une augmentation de financement...
    Ces investissements supplémentaires ont-ils contribué à changer les choses dans l'établissement de cette relation?
    S'agit-il d'un aspect important à cet égard?
    Sans cela, cette évolution de la relation et de la façon de penser n'aurait pas eu lieu, et il n'aurait pas été possible de voir différemment l'avenir, les choses et nous-mêmes.
    Vous devez passer de la parole aux actes. Si la relation qui évolue n'entraîne aucun financement, la tâche serait difficile.
    Par exemple, dans le domaine de l'éducation, lorsque j'ai parlé de la formule de financement, si nous avions négocié une formule de financement avec les fonds dont nous disposions il y a quatre ans, cela aurait été plus difficile. Cependant, le fait qu'il y ait eu une injection de fonds en même temps rend les choses plus crédibles et renforce la relation de confiance que vous avez mentionnée.
    Merci.
    La prochaine intervenante est Cathy MacLeod.
    Merci, madame la présidente.
     Encore une fois, je soulignerai que le projet de loi C-97 semble assez convenu; et la partie 4, section 25, donne l'impression qu'il s'agit simplement d'un petit élément. La section 25 compte 33 pages.
    Par conséquent, tout d'abord, j'aimerais proposer que nous invitions le Conseil national des Métis, l'ITK, l'Inuit Tapiriit Kanatami, et l'APN, l'Assemblée des Premières Nations — et je sais que notre temps est compté — afin de leur demander de commenter la question et de soumettre leurs observations au Comité pour examen.
    On a déposé une motion. Quelqu'un veut-il intervenir?
    Monsieur Bossio, vous avez la parole.
    Cela ne se produit-il pas déjà avec le comité des finances? Je pensais que le comité des finances menait toutes les consultations nécessaires. Je n'ai pas de problème à ce qu'ils envoient un mémoire au comité pour exposer leurs points de vue. Ce serait totalement ouvert à tout groupe, peu importe la motion sur laquelle nous allons voter. Je n'ai certainement aucun problème à les inviter à présenter quelque chose, mais pour ce qui est de les faire venir témoigner, je ne veux tout simplement pas retarder le renvoi de ce projet de loi à la Chambre.
    Madame MacLeod, la parole est à vous.
    Madame la présidente, je ne crois pas qu'il y ait de retard. Je crois que, si nous n'envoyons pas de lettre au comité des finances, on estime que c'est réglé. Il y a une date butoir pour le Comité s'il renvoie les questions au comité des finances, mais rien ne retarderait la prise en considération par le comité des finances de nos commentaires relatifs aux dispositions législatives.
    Les membres souhaitent-ils suspendre les travaux pendant cinq minutes?
    Non. D'accord.
    Encore une fois, l'envoi d'un mémoire écrit au comité ne nous pose aucun problème, mais nous ne sommes pas en faveur d'une réunion à laquelle ces organismes assisteraient. Quel est le but si cela ne va pas réellement éclairer le projet de loi lui-même?
    Si vous dites qu'il sera renvoyé, il le sera. Comme je l'ai dit, la présentation d'un mémoire ne me pose pas de problème, mais au-delà de cela, je pense personnellement que ce n'est pas nécessaire.
    Madame MacLeod, souhaitez-vous modifier votre motion?
    Madame la présidente, le comité des finances s'attend à des recommandations de notre part. Ce pourrait être aussi simple que de ne formuler aucune recommandation ou il pourrait s'agir d'une recommandation de faire telle ou telle chose, peut-être apporter des changements et proposer des amendements au comité des finances.
    Pour être franche, le comité des finances a devant lui un projet de loi énorme. Ses membres ne prêtent pas une attention particulière à cette question. Il nous incombe de faire de notre mieux pour formuler des recommandations au comité des finances sur cette question. Vous le savez, il appartiendra au comité des finances de déterminer s'il appuiera ou non nos recommandations.
    Monsieur Ouellette, vous avez la parole.
    En tant que membre du comité des finances depuis plusieurs années, je peux vous dire que les consultations prébudgétaires sont souvent très longues. Dans ce cas, je crois que plus de 2 000 mémoires ont été présentés. Il y avait des centaines de témoins, et des heures et des heures de travaux. Les membres du comité siègent généralement toute la semaine, souvent du petit matin jusqu'à tard le soir. Les organisations autochtones nationales sont souvent appelées à témoigner; de fait, elles sont toujours appelées à témoigner et à présenter les déclarations de leurs témoins, et leur témoignage est recueilli. Je crois que le tout est acheminé au ministère des Finances, et le ministre des Finances étudie ensuite cette information et en discute.
    Dans le cas qui nous occupe, si nous allons rater une échéance, et que cette information doit être disponible avant un certain temps, je ne sais pas à quel point cela serait utile. Je soupçonne que le Conseil national des Métis serait en faveur de cela. Nous pourrions demander aux témoins s'ils ont tenu des discussions avec le Conseil national des Métis. Lors de ces discussions, nous pourrions également poser des questions au sujet de leurs discussions dans le cadre des consultations avec les peuples autochtones et de leurs réactions concernant la division par rapport à ce projet de loi budgétaire, étant donné que nous accueillons ces témoins. En ce qui a trait aux fonctionnaires servant le public canadien, je pense que leur témoignage serait probablement aussi véridique et très utile pour nous informer de l'orientation que nous devrions adopter avec le projet de loi.

  (0955)  

    D'accord.
    Je crois que cela met fin à notre discussion sur la motion.
    Tous ceux qui sont en faveur de la motion? Tous ceux qui s'y opposent?
    Mme Fry n'a-t-elle pas voté?
    Il y a égalité, je vais donc voter en faveur du gouvernement.
     (La motion est rejetée. [Voir le Procès-verbal])
    Madame MacLeod, la parole est à vous.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais souligner que le Comité a maintenant refusé que des témoins comparaissent devant nous au sujet de cet important projet de loi, et nous avons même refusé de demander un mémoire afin que nous puissions informer correctement le comité des finances, en nous appuyant sur les meilleurs renseignements possibles, à propos de ce que nous devrions faire au sujet de cette section, division 4, section 25, qui fait plus de 32 pages.
    Maintenant, je suppose que je devrai m'adresser à nos témoins et, de leur point de vue, les inviter à parler au nom d'une autre organisation, ce qui est tout à fait inapproprié, malgré les propos de M. Ouellette. Je remarque que l'Assemblée des Premières Nations était préoccupée par certaines sections du libellé du projet de loi qui ne reconnaissaient pas les champs de compétence et les responsabilités des Premières Nations.
    Pouvez-vous formuler des commentaires sur les préoccupations exprimées?
    Vous avez 20 secondes.
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement.
    Je ne crois pas que le temps passé à discuter d'une motion est pris à même les sept minutes.
    Je vais renvoyer la question au greffier.
    Si j'ai bien compris, cela a pris beaucoup de temps, mais quelle est la pratique courante?
    C'est vraiment la volonté du Comité. Le Comité n'a pas adopté de motion de régie interne quant à la façon dont il utilise son temps lorsqu'un membre prend le temps qui lui est alloué pour présenter une motion, mais c'est son temps de parole.
    Cela a été la pratique jusqu'à maintenant, et aucune autre motion ne nous guidera. Alors, répondez rapidement.
     La transformation et la division des ministères n'ont pas commencé la semaine dernière. Cela remonte à près de deux ans maintenant. Depuis, il y a eu beaucoup de travail et de mobilisation auprès des Premières Nations, des Inuits et des Métis sur ce que signifie la création de ces deux ministères. La ministre Bennett a également organisé un grand nombre de séances au cours de la dernière année et demie afin d'entendre ce que les Premières Nations, les Inuits et les Métis avaient à dire au sujet des ministères et d'étudier la question. Elle a rencontré des milliers de personnes et d'organisations.
    Nous avons parfois entendu des préoccupations. La plupart des préoccupations — et je ne veux pas parler au nom de quiconque — concernent l'approche fondée sur les distinctions; on veut s'assurer qu'il s'agit bien d'une approche fondée sur les distinctions, que la continuité des services n'est pas compromise et que la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones est reconnue tout comme l'existence de la compétence. Ce sont les préoccupations que nous avons entendues. Pour être juste, elles ne sont pas nécessairement liées aux seules mesures législatives. Ce sont des préoccupations que nous entendons régulièrement au sujet de la progression de notre politique.
    D'accord. Nous avons accordé une prorogation de délai en reconnaissant qu'il y avait un problème de procédure.
    Nous passons maintenant à Rachel Blaney.

  (1000)  

    Merci, madame la présidente. J'ai deux autres questions.
    Dans vos exposés, vous avez tous les deux fait référence au travail que vous effectuez pour l'élaboration conjointe; j'espère que j'ai bien compris. En ce qui concerne différents textes de loi — et, bien entendu, le projet de loi C-92, évidemment —, de nombreuses personnes et organisations pensaient que ce n'était pas la bonne façon de décrire l'interaction et qu'il ne s'agissait certainement pas d'élaboration conjointe. Nous avons entendu cela à plusieurs reprises.
    Je me demande simplement quel est votre mandat concernant l'élaboration conjointe. Comment cela évolue-t-il avec le temps?
     En ce qui a trait au projet de loi C-97, nous savons que l'APN nous a fait part de préoccupations quant à la compétence. L'Assemblée des chefs du Manitoba nous a dit qu'il n'y avait pas eu de consultation sérieuse. Il semble y avoir beaucoup d'intérêt à faire en sorte que la consultation soit définie comme quelque chose d'un peu plus concret et non pas selon l'interprétation du gouvernement.
    Je pense que l'élaboration conjointe est la façon dont la langue évolue, mais l'action réelle qui la sous-tend se produit-elle? Comment, dans ces deux ministères, rendez-vous des comptes aux collectivités autochtones du pays en ce qui concerne les définitions d'élaboration conjointe et de consultation?
     L'élaboration conjointe est un domaine complexe, car elle suppose... et pourrait signifier beaucoup de monde à la table. Vous pouvez regarder le projet de loi C-92. Nous avons élaboré conjointement la législation avec les organisations nationales, mais nous avons également beaucoup travaillé à l'échelle régionale et locale au cours de la dernière année. L'objectif de cette loi — et c'est un élément important que nous tentons de faire le plus possible — est défini moins... le moins possible dans la législation.
     La véritable histoire du projet de loi C-92 ne se limite pas aux mesures législatives. En fait, elle tient à ce que nous disons aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis: « Allez-y, élaborez votre loi et venez nous la soumettre. » Ce n'est pas une loi qui tente d'imposer une approche. C'est une loi qui dit simplement: « Vous devriez être ceux qui élaborent cette approche. » C'est une élaboration conjointe qui conduit à une approche selon laquelle ils élaborent leur propre législation eux-mêmes. Je pense qu'il est important de voir la distinction. Au cas par cas, nous avons fait beaucoup d'élaboration conjointe dans le domaine de l'éducation.
    Pour ce qui est de rendre compte aux Autochtones, comme je l'ai déjà mentionné, nous tenons de plus en plus de discussions régionales et de rassemblements annuels auxquels assistent les membres de notre personnel ainsi que les Premières Nations, les Inuits et les Métis — particulièrement les Premières Nations en raison des services offerts dans les réserves —; nous y discutons de l'évolution des relations.
    J'invite les organisations nationales à venir aux réunions de mon comité de la haute direction tous les trois ou quatre mois — nous essayons de tenir des réunions régulières — pour discuter de l'évolution de la situation. Nous assistons à leurs réunions: leurs comités de direction, leurs comités sur le logement, sur l'éducation. En ce qui nous concerne, dans la mesure du possible, nous devons faire preuve de transparence dans la façon dont nous menons nos affaires et agissons, et c'est ainsi que nous réalisons l'élaboration conjointe. Je pense que nous avons fait des progrès significatifs, en toute honnêteté.
    Cependant, l'une de mes questions porte sur ce que vous avez mentionné la dernière fois que nous avons discuté: la partie relative à la « prise en charge » et au sujet de ce que les collectivités autochtones sont prêtes à assumer. Je regarde certaines des collectivités que je sers, et il y a de nombreux défis à relever, alors quand on dit « prise en charge »... Récemment, un jeune homme s'est suicidé dans l'une de mes collectivités, et cette collectivité s'est unie, a mobilisé des ressources et a tenté de faire des choses. Beaucoup de jeunes discutent sur les médias sociaux. Je regarde une autre collectivité comme Grassy Narrows, par exemple, qui fait actuellement face à une intoxication. Ses membres ont attendu très longtemps, et les gens sont très malades et meurent à cause de cela.
    Lorsque nous parlons d'élaboration conjointe, de consultation et de prise en charge des peuples autochtones, nous devons replacer le problème dans ce contexte. Alors, où est la notion de reddition de comptes face à ces collectivités, en particulier une collectivité comme Grassy Narrows, où ce à quoi ses membres doivent faire face est inimaginable pour le Canadien moyen?
    Le problème que nous avons en ce moment est que nous traitons toutes les collectivités des Premières Nations de la même façon. Vous mettez en oeuvre les programmes tels qu'ils ont été conçus, même si votre capacité était supérieure ou inférieure. Si nous allons de l'avant avec des subventions et une plus grande autodétermination, les collectivités qui sont prêtes l'assumeront, ce qui signifie que notre personnel sera en mesure de se concentrer davantage sur la relation avec les Premières Nations qui ont davantage de besoins.
    Qui devrait les aider? Nous avons beaucoup travaillé avec les institutions des Premières Nations afin qu'elles puissent nous aider à faire en sorte que les Premières Nations arrivent à se libérer de la gestion par un tiers, par exemple; nous ne devons pas leur dire quoi faire, mais faire en sorte que davantage d'institutions des Premières Nations travaillent avec elles.
    Pour des collectivités comme Grassy Narrows, Cat Lake et celles dans le Nord, dans de nombreux cas, la question est de savoir comment les soutenir et les aider à obtenir la capacité voulue au lieu de simplement s'en tenir à la conformité avec nos programmes. C'est ainsi que nous voulons voir le changement et que nous les dirigeons dans cette voie afin qu'elles parviennent à l'autodétermination.
    L'autodétermination ne revêt pas forcément un aspect local seulement. Ce pourrait être régional. Le travail que nous avons effectué dans le domaine de l'éducation dans le Nord, par exemple, ne concerne pas une seule collectivité; cela touche de nombreuses collectivités. Je pense qu'il s'agit de rechercher avec elles les modèles qui les aideraient à y arriver et à prendre les décisions qu'elles souhaitent prendre pour parvenir à l'autonomie gouvernementale.
    Auparavant, l'approche était universelle. Le programme était le même pour tout le monde, même si vous étiez dans une meilleure position, que vous n'avez pas nécessairement besoin de cet argent pour cet aspect spécifique, puisque vous avez déjà réglé cette question. Comment pouvez-vous réaffecter les fonds? Nous obtenons cette souplesse et l'offrons aux collectivités qui sont prêtes à l'accepter, ce qui nous donnera l'occasion de disposer d'un plan et de travailler directement avec les collectivités dans le besoin.

  (1005)  

    Les leçons sur la façon dont nous avons tenté d'offrir des programmes exactement de la même manière sont, à mon avis, importantes dans le monde de la consultation et de l'élaboration conjointe. Si vous avez un traité moderne ou historique ou que vous n'avez pas de traité, la façon dont vous participez est différente, et la capacité d'élaboration conjointe peut varier, en fonction de l'expérience que vous avez acquise dans le passé.
    Donc, proposer une définition unique de la manière dont nous allons procéder à l'élaboration conjointe partout au pays et suivre cette définition ou s'en écarter répéterait, je pense, certaines des erreurs du passé, mais cela ne signifie pas que nous ne prenons pas la question au sérieux. Cela veut juste dire que nous devons déterminer, avec les différentes collectivités, ce que nous pouvons faire et ne pouvons pas faire. Je ne doute pas que nous aurons, au fil du temps, des points de vue très différents quant au moyen le meilleur et le plus indiqué pour aller de l'avant.
    Cependant, je pense que l'important consiste à tenir ces discussions et à être réceptifs des deux côtés; en particulier, de toute évidence, vu mes responsabilités du côté gouvernemental, du côté de la fonction publique, nous devons nous assurer d'entendre ce qu'on nous dit. Toutefois, nous devons encore prendre des décisions importantes afin de déterminer la participation la plus efficace possible.
    Nous passons maintenant aux questions de M. Mike Bossio.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à tous de vos excellentes réponses.
    Nous avons entendu parler de certains des problèmes existants. Nous étions en plein milieu d'une étude sur la capacité avant d'être interrompus par les nombreux projets de loi dont le Comité est maintenant saisi, mais nous avons pu constater de première main les problèmes qui se posent en matière de capacité. Pourriez-vous nous expliquer un peu plus les problèmes et les obstacles liés à la mise en œuvre intégrale de l'intention et des objectifs à long terme de la division du ministère en trois unités distinctes?
    La capacité est un problème, bien sûr. Ce n'est pas nécessairement le plus gros. Pour moi, cela revient à dire... de quelle façon peut-on soutenir les Premières Nations, les Inuits et les Métis dans la mise en place de leur propre fonction publique? Pour nous, c'est l'une des raisons pour lesquelles nous souhaitons embaucher davantage de membres des Premières Nations, d'Inuits et de Métis, parce qu'en fin de compte, ils prendront ma place ou assumeront les responsabilités des ministères. C'est ce que nous voulons.
    Plus vous avez de personnes formées en tant que fonctionnaires, plus vous avez de personnes possédant des connaissances différentes qui peuvent prendre des responsabilités. La beauté des Premières Nations, c'est que... Prenons, par exemple, la Régie de la santé des Premières Nations; ce service public, qui est un service public des Premières Nations en majeure partie, gère le système de santé de manière comparable à une province. Les responsables font un travail fantastique, travaillent très bien avec la province et font un meilleur travail que nous.
    C'est la même chose pour les Micmacs de l'Atlantique. Comment pouvons-nous y arriver? Comment soutenons-nous la capacité en matière de prestation de services? C'est un problème, mais je pense que nous devons aussi faire confiance aux collectivités des Premières Nations. Elles trouvent des solutions.
    Nous parlons souvent des cas et des endroits où cela ne fonctionne pas. Il y a beaucoup d'endroits où cela fonctionne. Bon nombre de collectivités mettent au point une approche innovatrice pour résoudre leurs propres problèmes. Dans de nombreux cas, nos programmes sont la raison pour laquelle elles ne s'en tirent pas mieux. C'est à cause de nos propres cloisonnements. Dans de nombreux cas, il s'agit de libérer cette capacité et de faire en sorte que les personnes à l'échelle locale qui souhaitent influencer le cours des choses puissent disposer des outils pour y parvenir.
    Voilà le défi, mais cela revient à ce que Daniel a dit. Cela signifie que leurs propres employés doivent être en mode service, et non pas en mode prestation de programme. Ils doivent aller dans la collectivité et demander comment ils peuvent aider. C'est la meilleure approche.

  (1010)  

    Vous avez mentionné les trois ministères. Nous n'avons pas beaucoup parlé de la composante Affaires du Nord. Dans les dispositions législatives relatives à RCAANC, de nombreuses références garantissent que ces deux ministères et ministres travailleront en étroite collaboration. Il y a un libellé spécifique au ministre des Affaires du Nord qui utilise les installations du ministère des Relations Couronne-Autochtones. Ces éléments sont donc là pour garantir que certaines des visions qui auraient autrement pu se présenter ne voient pas réellement le jour et que nous travaillons de la manière la plus harmonieuse possible à cet égard.
    Entrevoyez-vous d'autres difficultés en ce qui concerne la mise en place autre que la capacité? Vous avez réglé un aspect: le financement stable et à long terme du processus de subvention sur 10 ans. Comment pouvons-nous l'obtenir pour toutes les collectivités autochtones?
    Il y a un défi à relever en ce qui concerne la façon de travailler avec les collectivités dans le besoin. Quelle est la solution pour les collectivités des Premières Nations qui sont aux prises avec des problèmes de capacité ou d'autres problèmes? Comment pouvez-vous le faire d'une certaine façon et résister... de façon à ne pas adopter une approche paternaliste?
    Nous avons vu par le passé qu'une approche imposée du centre ne fonctionne pas très bien. Comment pouvez-vous mettre en place des institutions et une capacité afin de soutenir ces collectivités? Il est injuste de penser qu'une collectivité de 200 personnes peut tout accomplir. Elle peut accomplir beaucoup de choses, mais elle a également besoin d'un peu de soutien.
    C'est pourquoi certaines organisations travaillent efficacement à l'échelle régionale: parce qu'elles sont ainsi en mesure de renforcer leurs capacités. Comment pouvons-nous guider les collectivités vers l'autodétermination et les aider à résister... au programme? Ce programme est important. Il est accompagné d'un défi à relever, parce qu'on a tendance à dire: « Vous devriez le faire. Pouvez-vous régler la question de l'éducation? Pouvez-vous réparer ceci? Pouvez-vous construire cela? »
    Nous devons résister à cela, parce que la plupart du temps, cela mène à une longue liste de programmes qui connaissent des problèmes au chapitre de la reddition de comptes et de la conformité et qui ne donnent pas les résultats escomptés. Nous allons devoir résister, parce que sous la pression, nous avons tendance à nous tourner vers ce que nous connaissons: les programmes. C'est probablement notre plus gros défi.
    Permettez-moi d'ajouter quelque chose. L'autre chose que nous connaissons, ce sont les bandes assujetties à la Loi sur les Indiens. L'un des défis qui nous attendent sera qu'il y ait une conversation pour savoir à qui nous nous adressons. Par le passé, notre position par défaut, c'était celle des bandes assujetties à la Loi sur les Indiens, mais ce ne sera probablement plus le cas à l'avenir. La façon dont les gens s'organisent et le fait qu'ils veuillent se regrouper ou non occupera une place importante dans notre réflexion, et nous devons permettre à ces collectivités d'y réfléchir en profondeur. Si vous avez été séparés pendant 150 ans en raison de décisions administratives visant à déterminer à quelle bande vous appartenez, sans compter le fait que vos ancêtres ont collectivement reconstruit cette compréhension, vous voulez aller de l'avant dès aujourd'hui, et ce point occupera une place importante dans la discussion.
    Il s'agit d'une évolution, et non pas d'une révolution.
    Finalement, vous avez beaucoup parlé des consultations importantes que vous avez tenues. Quelles seraient certaines des préoccupations que vous avez entendues de la part des collectivités autochtones par rapport à ce projet de loi?
    La préoccupation a toujours été, pour bon nombre de personnes, et à juste titre, de savoir si le gouvernement va respecter ce qu'il considère comme étant la reconnaissance appropriée des droits qu'ont les Métis et les gouvernements des collectivités des Premières Nations. Ces personnes vont vouloir s'assurer que rien ici ne leur enlève cela d'aucune façon que ce soit. Ils nous obligeront à respecter ce critère, non seulement sur la nature de ce projet de loi, mais, plus important encore, par rapport aux milliers de mesures qui seront mises en place si le projet de loi est adopté.
    Merci.
    Monsieur Kevin Waugh, vous avez la parole.
    J'imagine que je fais partie de l'une des personnes dont vous parliez, monsieur Tremblay. Je reviens constamment en arrière. Je vais poser une question sur l'éducation. Qu'est-ce que la formule de financement et qui l'a créée?
    La formule de financement a été créée en collaboration avec l'APN et le comité régional sur l'éducation. Nous l'avons présentée à l'échelle régionale. Nous avons durement travaillé pendant plus d'un an, si ma mémoire est bonne.
    La formule se fonde sur ce que la province fournit, pour que l'on s'assure qu'il y a une comparabilité avec les provinces. De plus, il y a du financement d'environ 1 600 $ par élève pour les langues. Ce financement vise à renforcer la capacité et à offrir une éducation spécialisée, surtout pour la petite enfance et l'école maternelle. C'est essentiellement la formule.
    On s'attend à ce que la formule évolue. Il s'agit d'une formule préliminaire; elle pourrait donc changer au fil du temps. Nous la mettons à l'essai à l'heure actuelle. Elle évoluera en fonction du financement des provinces et des besoins. Elle est importante. Cette formule nous soutient et facilite la discussion, parce que si vous êtes d'accord avec elle, les questions portent plutôt sur la façon de maximiser l'utilisation de ce financement afin d'atteindre les objectifs. Nous éliminons de l'équation, en quelque sorte, un des aspects clés du discours et du débat concernant l'éducation, c'est donc très utile.

  (1015)  

    Certaines de nos divisions scolaires dans les réserves ont des ententes avec les municipalités. Comment est-ce que cela fonctionne? Nous avons eu un témoin ici de Saskatoon qui a dit qu'on ne lui avait accordé aucune subvention pour les langues parce que ses enfants n'étaient pas dans la réserve. On les transporte en autobus vers Saskatoon et Stonebridge. Tout d'un coup, il n'y a plus de financement pour les langues.
    Nous avons rencontré le même chef. Le fait que le financement pour les langues est lié au système d'éducation des Premières Nations, et non pas au système d'éducation provincial est un problème qui a été soulevé.
    Certaines personnes ont une entente avec la province — le système d'éducation et les écoles, lesquelles sont en fait des écoles provinciales —, mais le financement pour les langues ne s'y rend pas. Il s'agit d'un point qui a été soulevé et qui fera l'objet de discussions au cours des prochaines années.
    C'est une formule, mais elle n'est pas définitive. Le dialogue se poursuivra. Nous cherchons toujours des façons d'améliorer cela, mais il s'agit clairement de quelque chose que nous avons déjà entendu. Notre objectif était de promouvoir les langues des Premières Nations au sein de leurs écoles, mais je reconnais qu'il s'agit d'un enjeu dont nous avons déjà entendu parler.
    Le même chef a dit que le financement offert par la SCHL pour la Saskatchewan a diminué de 15 % cette année. Vous avez tous les deux parlé de la question du logement, et ici, il y a une baisse de 15 % — non seulement pour lui, mais également pour d'autres personnes dans ma province. Le logement est un énorme problème, peut-être même le problème le plus important qui est soulevé lorsque nous discutons avec les collectivités. Il y a une baisse de 15 % à l'heure actuelle.
    Oui, il s'agit de l'argent de la SCHL. Nous ne voulons pas nécessairement faire des commentaires sur leur budget, mais l'infrastructure et le budget font l'objet des mêmes commentaires. Vous devez examiner cela sur plusieurs années. Parfois, cela dépend de l'édifice, de la construction, particulièrement pour l'infrastructure. Par exemple, nous avons vécu cela avec l'eau. Puisqu'ils prennent plus de temps, les projets de plus grande envergure obtiendront moins de financement pendant les premières années que les endroits où les projets sont plus petits. Je ne connais pas exactement la situation en Saskatchewan, mais peut-être qu'il s'agit d'un cas où le financement accordé par la SCHL doit être examiné sur plusieurs années plutôt que sur une année en particulier.
    Cependant, il est difficile d'établir un budget pour cela. Vous pouvez comprendre le point de vue de ces chefs, n'est-ce pas?
    C'est pourquoi nous tentons de passer à des ententes sur 10 ans. C'est pourquoi nous tentons de faire en sorte que l'on sache où il y a une idée de ce que sera le montant d'argent. Nous pouvons toujours débattre à savoir s'il s'agit d'un montant suffisant ou non — il est normal d'avoir ce genre de discussion —, mais il faut être en mesure de prévoir le financement pour être capable de planifier.
    Combien ont conclu une entente sur 10 ans? Avez-vous dit 85?
    Il me semble que c'était 84 ou 85 la dernière fois que j'ai vérifié.
    Y a-t-il une limite?
    Nous commençons en début d'année, il leur serait donc difficile de s'y joindre en milieu d'année...
    D'accord.
    ... cependant, il serait intéressant de voir s'il y aura une seconde vague de Premières Nations à qui une subvention sera accordée l'an prochain. Il n'y a pas de limite. Si elles sont admissibles, si elles démontrent qu'elles ont la capacité, un plan financier en place et les outils nécessaires, il n'y a pas de raison pour que nous la leur refusions.
    Merci, monsieur Waugh.
    Je vais maintenant poser une question. Ma question — et je partage mon temps avec M. Ouellette — concerne l'aide sociale. J'aimerais savoir s'il y a eu des discussions concernant le transfert de l'administration de cet argent afin qu'il soit alloué directement aux collectivités plutôt que de passer par le gouvernement fédéral.
    À titre d'exemple, il y a une réserve au Manitoba où les personnes qui ont une hypothèque de la SCHL sont admissibles pour recevoir des prestations d'aide sociale. Si la bande a été en mesure de construire une maison par ses propres moyens et de payer l'hypothèque, les familles — si elles vivent une période de chômage ou de difficultés financières — ne seraient pas admissibles. Si la bande avait le choix, elle choisirait probablement autre chose.
    Souhaite-t-on accorder ce type de financement global ou de subvention directe aux collectivités plutôt que de laisser le gouvernement décider?

  (1020)  

    Celles qui obtiennent des subventions peuvent faire cela.
    Pardonnez-moi?
    Si je me souviens bien, les collectivités qui obtiennent des subventions — et je vais vérifier au cas où je serais dans l'erreur — reçoivent un financement de base qui inclut l'aide sociale. Cela signifie qu'elles ont la capacité de redistribuer l'argent ou de le dépenser d'une autre façon si elles le désirent.
    Pour ces 85 collectivités ou peu importe leur nombre, pour lesquelles vous avez fait...
    Vous avez raison. Des chefs et des membres de collectivités nous disent qu'ils souhaiteraient utiliser l'aide sociale différemment. Les subventions ou l'autonomie gouvernementale, bien entendu, vous donneraient cette flexibilité.
    Nous avons collaboré avec des Premières Nations sur un examen de l'aide sociale et de la façon dont nous pouvons fournir cette capacité et dont ils peuvent l'utiliser pour des mesures plus actives, si je puis dire, comme les provinces le font. Nous essayons de faire cela, et, en toute franchise, nous connaissons un certain succès.
    Cependant, les collectivités qui reçoivent des prestations d'aide sociale, si ma mémoire est bonne, ce qui leur donne de la flexibilité.
    D'accord. C'est très bien.
    Nous allons maintenant passer à mon collègue M. Ouellette.
    Je me questionne sur le nombre d'employés autochtones au cours des dernières années. Avez-vous remarqué une augmentation ou une diminution, et également, qu'est-ce que vous prévoyez pour l'avenir?
    Il me semble — je n'ai pas les chiffres exacts avec moi — qu'ils comptent pour plus de 20 %.
    Je crois que vous aviez parlé de 26 % ou de 28 % dans votre...
    Oui, il s'agit probablement de 26 % à 28 %.
    Nous en avons un peu moins, mais le pourcentage se situe dans ces environs.
    Est-ce que ce pourcentage a augmenté ou diminué?
    Il est resté à peu près le même au cours des dernières années, mais a augmenté au fil du temps.
    Je crois qu'il y a une augmentation du côté des postes de direction, ce qui est encourageant. Cela varie d'un endroit à l'autre. Ce que nous tentons de faire à l'heure actuelle, c'est d'adopter une approche ciblée.
    Ce que je veux dire, c'est que si je me penche sur mes régions en Ontario, c'est de l'ordre de 50 %, ce qui est considérable. Les autres régions et secteurs ont un pourcentage plus bas. Je crois que la prochaine étape pour nous est d'examiner ces chiffres et de déterminer quelle stratégie adopter. Pourquoi certains endroits réussissent-ils mieux que d'autres?
    L'un des points clés, ce sont les fonctions de direction, c'est-à-dire qu'il y ait plus de sous-ministres adjoints, de directeurs généraux et de directeurs pour les Premières Nations, les Inuits et les Métis. C'est la clé. Nous mettons l'accent là-dessus depuis quelques années et nous avons connu une certaine réussite.
    Quel est le nombre d'employés en région par rapport à Ottawa? Avez-vous remarqué une augmentation ou une diminution au cours des dernières années?
    Par exemple, il y a beaucoup d'Autochtones au Manitoba, mais les gouvernements précédents étaient plus centralisés, et les choses se passaient à Ottawa.
    La majorité de mes employés se trouvent dans les régions. Compte tenu de la division du travail, entre nous, si vous voulez, la majorité de mes employés se trouvent dans les régions. C'est probablement — je n'ai pas les chiffres exacts — près des deux tiers, donc c'est assez considérable.
    Je m'attends à ce que cela augmente si nous ne transférons pas les services aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis.
    Dans vos deux ministères, les langues officielles, le français et l'anglais, sont utilisées.
    Existe-t-il des programmes pour encourager les gens à parler les langues autochtones?
    Malheureusement, il n'y a pas de programme encourageant les gens à parler les langues autochtones au bureau en tant que tel. Nous encourageons nos employés autochtones qui travaillent auprès des collectivités autochtones à parler leur propre langue. Nous avons cela et nous le constatons.
    Existe-t-il un programme d'encouragement qui leur permet de recevoir des fonds s'ils parlent une langue autochtone, ou est-ce que cela est pris en compte pour la promotion, les postes de direction ou d'autres postes au sein de la fonction publique fédérale?
    Nous avons des programmes dans le cadre desquels nous effectuons un processus de recrutement ciblant les Autochtones.
    Nous n'établissons pas nécessairement de lien...
    Si, par exemple, quelqu'un veut occuper un poste dans la fonction publique fédérale à l'heure actuelle, il doit être BBB ou exempté ou autre.
    Que se passe-t-il si vous ne parlez que l'anglais et une langue autochtone?
    Je ne peux pas...
    Pourrez-vous être promu à ce poste?
    On ne peut pas obtenir d'exemption à l'égard de la politique sur les langues officielles.
    Nous essayons d'embaucher ces gens et de les envoyer suivre une formation en français, pour nous assurer qu'ils répondront aux exigences dans deux ans, et nous gérons les risques à cet égard. Nous faisons de notre mieux, mais nous avons des obligations juridiques en vertu de la politique sur les langues officielles.
    C'est plus facile dans les régions. Dans les régions qui ne sont pas nécessairement bilingues, les gens peuvent accéder à des postes niveau EX, mais à l'administration centrale, c'est une des difficultés auxquelles nous faisons face, soit l'application des langues officielles.

  (1025)  

    La parole est maintenant à Mme Cathy McLeod.
    Je vous remercie.
    Madame Grondin, nous avons interrogé tout le monde au sujet de leur nombre d'ETP. Vous avez dit que le vôtre était stable.
    Combien de personnes travaillent avec vous pour appuyer Relations Couronne-Autochtones et Services aux Autochtones?
    Je dirais qu'il y a environ 60 conseillers juridiques et du personnel de soutien, soit environ 80 ETP, y compris notre bureau d'origine à Vancouver.
    Est-ce que toutes les questions juridiques liées au du ministère passent par vous?
    La plupart d'entre elles. Nous avons également des gens dans les bureaux régionaux, alors parfois nous devons traiter avec eux parce que la question est davantage liée à la région.
    Prévoyez-vous que la grande majorité de votre charge de travail sera liée à Relations Couronne-Autochtones ou à Services aux Autochtones?
    C'est difficile à dire, parce que, durant la dernière année, je dirais que nous étions dans une période de transition. Lorsque nous calculons le temps que nous consacrons à un dossier, nous n'avons pas tout fait, alors il m'est difficile d'avoir une réponse exacte, parce que les chiffres ne sont pas encore tout à fait définitifs.
    Je crois comprendre que l'ancienne procureure générale a changé une partie de la philosophie concernant les questions juridiques. Dans quelle mesure cela influe-t-il sur ce que vous faites et la façon dont vous le faites?
    Cela prend du temps, parce que, dans certains cas, les enjeux sont majeurs. Vous faites peut-être référence à la nouvelle directive sur les litiges. Cela prend du temps, parce que nous devons changer l'approche à l'égard des dossiers qui sont déjà dans le système.
    Est-ce par l'entremise de votre ministère que vous avez donné des conseils sur la façon de traiter la question des paiements liés aux pensionnats?
    Je ne suis pas certaine de comprendre la question.
    Le gouvernement a récemment décidé qu'il allait... les pensionnats... Il a conclu une entente, et c'est votre ministère qui a travaillé avec... et qui a donné des conseils sur la façon dont ce litige serait traité — les pensionnats.
    Je ne suis pas certaine de comprendre la question.
    Mon ministère travaille en étroite collaboration avec le ministère de la Justice et est guidé par un conseil pour régler la question des pensionnats, en effet. Si vous parlez du cas qui a été mentionné dans les médias comme ayant fait l'objet d'une audience hier, par exemple, un avocat nous représente.
    Hier, j'ai noté que le cabinet d'avocats Gowling, qui, je suppose, a été saisi de cette question particulière, a déterminé qu'il n'y aurait pas de processus pour évaluer... Je crois comprendre qu'il y a une possibilité... de 50 000 $ à 200 000 $ pour ceux qui ont été victimes de mauvais traitements, ce qui ne fait pas partie du règlement. Quel sera le processus pour prouver ces questions particulières en ce qui concerne le règlement?
    Étant donné que cela fait l'objet d'une audience en ce moment même, je ne suis pas en mesure de faire des commentaires à ce sujet pour le moment.
    L'avocat du cabinet Gowling a indiqué qu'il n'y aurait pas de contre-interrogatoire en raison du traumatisme subi par les victimes.
    Encore une fois, cela fait l'objet d'une audience en ce moment même, je ne suis donc pas en mesure de faire des commentaires à ce sujet.
    Je vous remercie.
    Je m'adresse maintenant à M. Tremblay. Nous avons eu la décision Daniels. C'était il y a quelques années. Bien sûr, vous êtes responsable de la prestation des services. Quelles ont été les répercussions de la décision Daniels sur...? Avez-vous déterminé le nombre de personnes qui seraient touchées par la décision Daniels? Avez-vous commencé à mettre en œuvre une quelconque prestation de services à cet effet? Pouvez-vous nous faire une mise à jour à ce sujet?

  (1030)  

    Soyez très bref, vous avez 15 secondes.
    Dans l'arrêt Daniels, il est indiqué, si je me souviens bien, que tous ces peuples autochtones tombaient sous le coup du paragraphe 91(24), qui est un pouvoir législatif autorisant le gouvernement fédéral à légiférer pour les Indiens... Cela ne veut pas dire que les programmes qui s'adressent spécifiquement aux Premières Nations, aux Inuits ou aux Métis s'adresseront soudainement à tout le monde. Ce n'est pas notre interprétation. La question est de savoir comment aider tous les Autochtones qui s'identifient comme tels à combler les lacunes dans les conditions sociales et économiques, s'il y a lieu. Je pense que c'est plutôt une réponse pour tous les ministères, non pas nécessairement une réponse pour des programmes spécifiques relativement à la décision Daniels. Nous avons des programmes qui s'adressent à tous les Autochtones, mais la plupart du temps, l'ensemble des programmes s'adresse davantage aux Premières Nations — comme vous le savez, un pourcentage élevé, surtout dans les réserves — et viennent ensuite les Inuits et les Métis. Nous n'avons que quelques programmes qui s'adressent vraiment à tous les Autochtones. Je vous invite à examiner... Récemment, une annonce a été faite au sujet de l'infrastructure dans les régions urbaines, ce qui aurait probablement une incidence sur tous les Autochtones, même si nous collaborions étroitement avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis. C'est la politique que nous avons adoptée en ce qui concerne nos programmes.
    Merci beaucoup d'être venus et d'avoir travaillé avec nous pendant deux heures. C'était très généreux de votre part et très informatif. Nous sommes reconnaissants de toutes vos informations.
    Meegwetch.
    La séance est suspendue pour quelques minutes. Ensuite, nous entendrons les nouveaux groupes de témoins.

  (1030)  


  (1035)  

    Bienvenue à tous. Merci beaucoup.
    Nous sommes un peu en retard, étant donné que nous passons d'un projet de loi à l'autre. Dans ce cas-ci, nous allons passer au projet de loi C-92, qui tente de s'attaquer à l'une des situations les plus horribles au Canada: les enfants autochtones qui sont pris en charge, qui sont déplacés et qui perdent leur culture. On estime qu'il y a plus d'enfants en famille d'accueil qu'il y en avait dans les pensionnats. Ce projet de loi vise à s'attaquer aux répercussions négatives de cette situation, et c'est pourquoi nous souhaitons vivement entendre les témoignages de nos témoins. Nous sommes ici sur le territoire non cédé du peuple algonquin et nous poursuivons nos discussions.
    Nous avons trois groupes de témoins. L'un d'eux comprend trois témoins. Vous avez chacun jusqu'à 10 minutes, après quoi nous passerons aux questions des députés.
    Mme Jocelyn Formsma est directrice exécutive de l'Association nationale des centres d'amitié. Bienvenue.

  (1040)  

    Merci beaucoup de l'invitation. Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de formuler des commentaires ce matin.
    Wachay misiway. Jocelyn Formsma nitoscheen.
    Je suis de la Première Nation Moose Cree. Je suis actuellement directrice exécutive de l'Association nationale des centres d'amitié.
    Depuis une quinzaine d'années, je défends également les droits des enfants autochtones, la mobilisation des jeunes Autochtones et le perfectionnement du leadership. Je participe également à divers aspect de la réforme de la protection de l'enfance.
    Je suis membre du conseil d'administration de la National Indian Child Welfare Association depuis 12 ans. J'ai participé à leur travail de défense des droits à l'échelle internationale, ce qui a contribué à l'élaboration du premier règlement d'application de la Indian Child Welfare Act au cours des 36 années qui ont suivi l'adoption de la loi.
    Aujourd'hui, je vais vous donner un aperçu de la façon dont les centres d'amitié se sont engagés dans les services à l'enfance et à la famille, de notre point de vue sur le projet de loi et des répercussions qu'il pourrait avoir sur les Autochtones vivant en milieu urbain. Je serais également heureuse de parler des expériences relatives à la Indian Child Welfare Act, si vous me posez des questions à cet égard après cet exposé.
    Le travail des centres d'amitié dans le domaine des services à l'enfance et à la famille est largement méconnu et non reconnu. Comme vous le savez, les centres d'amitié offrent une vaste gamme de services, dont bon nombre peuvent être considérés comme des services de prévention, comme le soutien prénatal, le soutien parental, le soutien aux enfants, les programmes qui aident les familles à garder leurs enfants et à en prendre soin et les programmes qui aident les parents à récupérer leurs enfants s'ils ont pris en charge.
    Nous avons élaboré un programme de compétences culturelles à l'intention des parents de familles d'accueil, qui offrent des programmes culturels essentiels aux enfants pris en charge. Les parents des familles d'accueil et les parents adoptifs ont souvent recours aux programmes des centres d'amitié pour s'assurer que leurs enfants en famille d'accueil ou adoptés ont accès à la culture et à la communauté.
    Les centres d'amitié sont des lieux de visites supervisées, ont parfois été des lieux de prise en charge et ont aussi été appelés à fournir des services d'intervention au nom d'organismes de services à l'enfance et à la famille ou de soutien judiciaire aux enfants, aux adolescents et aux familles autochtones. Les centres d'amitié offrent également des services de suivi pour les jeunes qui quittent la prise en charge.
    En ce qui concerne le projet de loi, nous ne voyons pas de considération explicite pour les enfants, les jeunes, les familles et les collectivités autochtones en milieu urbain et rural.
    L'ANCA, en tant que secrétariat du Réseau de connaissances des Autochtones en milieu urbain — qui sera bientôt dissout faute de financement —, a facilité des initiatives de recherche communautaire axées sur la situation des enfants autochtones pris en charge et des familles autochtones ayant des démêlés avec le système de protection de l'enfance, examinant la nécessité d'une formation adaptée sur le plan culturel pour les fournisseurs non autochtones de soins aux enfants autochtones pris en charge, le tout dans une perspective urbaine.
    À l'heure actuelle, de nombreuses définitions qui figurent dans le projet de loi sont suffisamment larges pour que l'on puisse avancer des arguments en faveur de notre inclusion, mais nous craignons que, en l'absence d'une inclusion explicite, cela laisse également place à l'exclusion passive.
    Nous avons rédigé un mémoire qui expose certains de nos points de vue et nous aimerions le soumettre au Comité pour examen. Il présente certains des points de vue qu'il nous semble nécessaire de prendre en considération avant de finaliser la loi.
    Après avoir examiné le projet de loi C-92, l'ANCA s'inquiète des réalités sur le terrain de la mise en œuvre de la compétence concernant les enfants autochtones qui vivent en milieu urbain. Bien que l'ANCA appuie et promeut pleinement la compétence des Premières Nations, des Inuits et des Métis, nous savons que, en réalité, les ressources sont souvent inaccessibles ou insuffisantes pour que les gouvernements autochtones puissent fournir toute la gamme des services requis dans les villes ou les villages où résident leurs membres. Les centres d'amitié et d'autres organisations autochtones urbaines qui offrent des services similaires se retrouvent souvent involontairement à travailler avec des enfants, des jeunes et des familles autochtones qui ne bénéficient pas actuellement des services et du soutien de leur gouvernement autochtone respectif.
     L'ANCA aimerait que l'on déclare publiquement qu'elle s'intéresse à l'élaboration de tout règlement qui pourrait découler de l'adoption du projet de loi C-92 et qu'elle a des perspectives uniques à cet égard. La partie de la loi proposée concernant le règlement fait mention de l'inclusion d'organes directeurs autochtones dans le processus de consultation relatif à l'élaboration de ce règlement. Nous croyons que nos connaissances et celles des centres d'amitié peuvent aider à faire en sorte que les règlements et les politiques tiennent compte des besoins des peuples autochtones qui vivent en milieu urbain.
    Nous avons un certain nombre de recommandations au sujet du projet de loi C-92.
    L'une concerne l'inclusion des Autochtones en milieu urbain. Les enfants, les jeunes, les familles, les collectivités et les organisations autochtones rurales et urbaines devraient être mentionnés dans le libellé et la mise en œuvre de cette loi. À l'heure actuelle, nous estimons que, de façon générale, le libellé général du projet de loi laisse une place pour l'inclusion des Autochtones vivant en milieu urbain, mais nous craignons également que cette formulation large entraîne une exclusion.
    En ce qui concerne la compétence, il faut préciser davantage l'expression et l'étendue de la compétence entre les différents gouvernements des Premières Nations, des Métis et des Inuits, les gouvernement fédéral, provinciaux et territoriaux et les rôles de la société civile et des entités non politiques, mais appartenant à des Autochtones et exploités par eux, comme les centres d'amitié. Ce que nous constatons dans les milieux urbains, c'est que ces compétences se chevauchent souvent, et, à moins qu'il y ait collaboration et coordination sur la façon dont les compétences se chevaucheront dans les milieux urbains, nous craignons que les enfants soient laissés pour compte ou soient un des cas qui ont mené à cette malheureuse situation à l'origine du principe de Jordan.

  (1045)  

    Des engagements et des mécanismes stables en matière de financement sont nécessaires pour que l'on puisse s'assurer que la mise en œuvre de cette loi sera possible pour les collectivités. De plus, ces dispositions de financement devraient tenir compte du travail qui sera nécessaire à la suite de l'adoption du projet de loi, ce qui comprendra l'éducation, la participation des intervenants et la défense des intérêts, ce qui pourrait également inclure la collecte de données.
    La capacité financière devrait être prise en compte, étant donné que les collectivités devront travailler au renforcement des capacités si elles veulent assumer la responsabilité des services et des ressources à l'appui de l'établissement de partenariats et de l'engagement avec les intervenants.
    Le projet de loi C-92 ne prévoit aucun mandat pour la collecte de données. En tant qu'organisation représentant les centres d'amitié, l'Association nationale des centres d'amitié, l'ANCA, connaît la valeur des données et sait comment elles peuvent éclairer et orienter des programmes et des services efficaces, ce qui donne de meilleurs résultats pour les gens que servent les centres d'amitié. La collecte de données est un outil nécessaire à l'amélioration des services et à la détermination des lacunes à combler. En ne précisant pas un mandat précis pour la collecte de données, le projet de loi C-92 pourrait, par inadvertance, favoriser le maintien de la situation actuelle en matière de données, soit l'absence de données nationales détaillées sur le bien-être des enfants et des familles autochtones. C'est quelque chose que nous avons vécu avec la Indian Child Welfare Act. Bien qu'il y avait des dispositions en ce qui concerne la collecte de données, celles-ci n'étaient pas suffisamment financées et appuyées, ce qui a entraîné un manque de données malgré le fait que cela faisait presque 40 ans que la loi existait.
    Nous vous remercions encore une fois de nous avoir donné l'occasion de vous faire part de nos commentaires et nos points de vue sur le projet de loi; nous espérons que nos mémoires éclaireront votre travail. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Pam Palmater, titulaire de la Chaire de gouvernance autochtone du Département de politique et d'administration publique de la Ryerson University.
    Bienvenue encore une fois à notre comité, madame Palmater.
    Kwe, ni'n teluisi Pam Palmater.
    Je suis de la nation souveraine micmaque, occupant un territoire micmac non cédé. Je pratique le droit depuis 20 ans, dont 10 ans à Justice Canada et aux Affaires indiennes, où j'ai reçu toute la formation sur le processus législatif, l'interprétation des lois et la rédaction législative. Je suis également titulaire d'un doctorat en droit et je me spécialise sur les lois qui ont une incidence sur les peuples autochtones, alors je m'intéresse tout particulièrement à cette question, qui repose vraiment sur les lois plutôt que sur la politique.
    Je suis ici pour m'opposer au projet de loi C-92 tel qu'il est actuellement rédigé. Je pense que, en l'absence d'amendements de fonds, il risque d'engendrer le chaos entre les administrations, le chaos sur le plan juridique et le chaos à l'intérieur et à l'extérieur des réserves. De plus, bien entendu, cela ne fera rien pour régler la crise humanitaire.
    J'ai plusieurs problèmes fondamentaux à ce sujet. Le premier est le même problème que j'ai avec les projets de loi C-91 et C-97, c'est-à-dire qu'il s'agit d'une mesure législative panautochtone. En étant panautochtone, en fait, elle est discriminatoire envers les Premières Nations, parce qu'elle ne met pas l'accent sur les droits, l'histoire, les conditions socioéconomiques ou les intérêts qui leur sont propres. À mon avis, les droits des Premières Nations ne devraient jamais être limités par les différents statuts juridiques, politiques et sociaux des autres groupes.
    Par exemple, les Métis ne vivent pas dans les mêmes conditions socioéconomiques difficiles que les Premières Nations. C'est simplement un fait. Nous savons également que, dans le droit canadien, lorsqu'on traite officiellement tout le monde de la même façon, on finit par traiter les plus défavorisés de façon inégale. Ce que nous préconisons, c'est une égalité réelle qui est propre aux Premières Nations, donc une législation propre aux Premières Nations et non une égalité formelle.
    L'autre préoccupation, c'est qu'il n'existe pas de reconnaissance ou de statut indépendant qui accorde la priorité aux Premières Nations. Elles sont considérées comme une loi fédérale, qui n'est pas différente d'un règlement pris en vertu de la Loi sur les Indiens. Pour quiconque a déjà travaillé avec les Premières Nations, à Justice Canada ou aux Affaires indiennes, il est presque impossible de faire appliquer la réglementation prise en vertu de la Loi sur les Indiens pas la GRC ou quiconque.
    À l'heure actuelle, en vertu de ce projet de loi, au lieu d'être prioritaires, les lois des Premières Nations sont conditionnelles ou assujetties aux dispositions de la Charte; à la Loi canadienne sur les droits de la personne; à l'article 35 de la Loi constitutionnelle, à toutes les causes limitatives devant la Cour suprême du Canada; au partage des pouvoirs prévus au paragraphe 91(24); aux accords de coordination et à toutes les interprétations que les tribunaux ont données à ces accords — qui pourraient se chiffrer à plus de 634 — ainsi qu'au non-respect de ceux-ci; aux définitions préexistantes que les tribunaux provinciaux ont établies pour l'expression « intérêt supérieur de l'enfant », qui, je dois le rappeler à tout le monde ici, est définie par les tribunaux et donne lieu au même degré de racisme et d'abus envers les enfants des Premières Nations que ce qui a déjà été démontré devant les tribunaux; et, bien entendu, aux articles 10 à 15 du projet de loi C-92 lui-même.
    Ce sont beaucoup d'éléments qui l'emportent sur les lois des Premières Nations, et c'est un problème. Il faut discuter non seulement de la reconnaissance de la compétence des Premières Nations en soi, mais également des questions relatives à la prépondérance des lois et à la façon dont ces compétences vont fonctionner ensemble.
    Mon autre préoccupation, c'est que cela force les Premières Nations à négocier des ententes avec les gouvernements fédéral et provinciaux, alors que ce sont les gouvernements provinciaux qui posent problème. Le gouvernement fédéral est le problème sur le plan du sous-financement discriminatoire et chronique. Le Tribunal canadien des droits de la personne en a déjà parlé. Toutefois, ce sont les provinces qui ont permis que ces violations des droits de la personne se poursuivent malgré les recherches et toutes les preuves. Les derniers intervenants avec lesquels de nombreuses Premières Nations veulent travailler sont les provinces, lesquelles commettent les abus. Le fait de forcer cette coopération vise à renforcer cette horrible crise humanitaire, et je pense que de nombreuses Premières Nations ont déjà témoigné contre cela, à juste titre.
    La chose la plus importante, je suppose, c'est que, même si on a affirmé que des fonds allaient être octroyés aux Premières Nations, il n'y a aucune obligation légale de financement. C'est une chose de reconnaître dans une clause « attendu que » qu'il y a des demandes de financement, que, en principe, on va peut-être parler de financement ou qu'on va trouver des moyens d'en parler. Toutefois, il n'y a pas de disposition obligeant le ministre à financer les Premières Nations pour tous les services et à définir quels sont ces services — et cela laisse beaucoup de souplesse.

  (1050)  

    Il n'y a pas de lignes directrices sur la façon dont ce financement sera accordé, comme la population, les données démographiques, les taux de natalité, les coûts réels et les droits des Premières Nations à cet égard, lesquels sont très différents des droits des Métis et des Inuits. Il n'y a rien qui rend le principe de Jordan obligatoire dans ce projet de loi, et cela devrait, en fait, en faire partie intégrante. Il s'agit certainement d'un élément central du Tribunal canadien des droits de la personne. Il n'y a aucun engagement à s'attaquer aux causes profondes sous-jacentes de la prise en charge des enfants, qui, pour les Premières Nations en particulier, tendent la plupart du temps à être des conditions socioéconomiques. Ce n'est pas suffisant de financer des programmes de suivi ou des programmes parentaux si vous ne vous dites pas également que vous vous engagerez aussi à fournir du logement, de la nourriture, de l'eau, de l'éducation et un accès aux soins de santé, qui sont les raisons pour lesquelles la plupart de ces enfants sont retirés à leur famille au départ.
    Un autre problème législatif fondamental est que le ministre conserve tous les pouvoirs que lui confère la loi, y compris le pouvoir de prendre des règlements. Il suffit de consulter les groupes autochtones, et nous savons tous à quel point la consultation fonctionne mal dans la pratique. Nous avons fait l'objet de centaines de poursuites judiciaires parce que le gouvernement fédéral ne comprend toujours pas comment faire des consultations, répondre aux besoins et obtenir le consentement, parce que toutes ces choses vont ensemble. Maintenant, avec la DNUDPA, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, nous parlons de consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. Le projet de loi fait le contraire. Il dit essentiellement que nous allons vous parler, mais que nous pouvons prendre tous les règlements, et c'est avec la réglementation qu'on peut faire beaucoup plus de tort et qu'on peut avoir beaucoup plus de contrôle. Ou il peut ne pas y avoir de règlement du tout, parce que nous avons vu des ministres promettre qu'ils allaient simplement passer cette loi et qu'ils régleraient tous les problèmes relatifs à la réglementation, mais aucun règlement n'a été adopté. Nous nous en tenons simplement aux pratiques passées.
    Les consultations mondiales panautochtones déforment également ce qui devrait figurer dans le règlement. Ce qui est bon pour les Premières Nations n'a peut-être rien à voir avec les Métis, alors pourquoi les Métis auraient-ils leur mot à dire sur le type de réglementation qui s'appliquera aux Premières Nations et vice versa? Cela fait partie du problème juridique de la consultation panautochtone. En accordant le pouvoir à une entité, c'est-à-dire, dans tous les articles de ce projet de loi, au ministre, vous le retirez essentiellement à une autre. Quel que soit le pouvoir du ministre, c'est quelque chose que les Premières Nations ne l'ont pas, et c'est un vrai problème.
    Sachant à quel point la stérilisation forcée est étroitement liée à la prise en charge d'enfants et la façon dont cela est lié, je trouve vraiment troublant que, dans l'ensemble du projet de loi, il n'y a aucune disposition qui interdit expressément le recours à la stérilisation forcée dans toute situation de services à l'enfance et à la famille, particulièrement en ce qui concerne les services de garde d'enfants.
    Il y a beaucoup d'autres problèmes concernant le libellé. Il devrait y avoir une discussion au sujet de la compétence à l'extérieur des réserves, sur les questions relatives à la collecte de données, mais selon les amendements que j'ai suggérés, si l'on veut légiférer pour les Premières Nations qui y consentent, il faut qu'il s'agisse d'une loi spécifique aux Premières Nations, qu'il s'agisse de langues ou de services à l'enfance et à la famille. Seules les Premières Nations sont assujetties à la Loi sur les Indiens. Les Premières Nations ont des droits et des lois tout à fait différents, et vous ne pouvez pas tous les mettre ensemble.
    Si on légifère, il faut qu'il y ait des dispositions d'exclusion entièrement financées afin que les Premières Nations qui s'occupent déjà des services à l'enfance et à la famille n'aient pas à être visées par cette loi, que leur choix ne se limite pas au statu quo ou qu'elles n'en aient aucun et qu'une solution de rechange totalement financée fasse en sorte que, si elles ne sont pas financées dans le cadre d'un processus, elles le seront dans le cadre de leur propre processus.
    Il faut un financement ciblé et engagé pour les Premières Nations, qui soit fondé sur la population, l'inflation, les coûts et les besoins. Le droit inhérent des Premières Nations à l'autodétermination en matière de services à l'enfance et à la famille doit être reconnu de plein droit, sans lien avec l'article 35 ni avec la DNUDPA ni avec quoi que ce soit d'autre. Le droit préexistant inhérent doit être le fondement de toute mesure législative à venir.
    J'ajouterais également que, si vous voulez vraiment donner effet à ce projet de loi, il faut abroger l'article 88 de la Loi sur les Indiens afin d'évincer complètement la compétence provinciale sur les Premières Nations dans leur ensemble.
    Mes dernières recommandations font expressément référence à la DNUDPA et à toutes les dispositions de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, et je dis que le projet de loi ne devrait pas être adopté tel quel. Il doit au moins faire l'objet d'un examen exhaustif de la part des experts des Premières Nations, y compris des gens comme Cindy Blackstock, qui a de nombreux amendements à apporter, et des organisations comme l'Association nationale des centres d'amitié.

  (1055)  

    Je vous remercie.
    Merci, Mme Palmater. J'ai bien aimé votre exposé.
    Nous passons maintenant à l'exposé de Joshua Ferland, qui est venu sans trop de préavis, mais nous sommes vraiment heureux de le recevoir. Il est accompagné d'une adulte, Patricia Ann Horsley.
    Je vous souhaite la bienvenue à notre comité. Vous pouvez commencer quand vous êtes prêt, monsieur Ferland.
    Bonjour, je m'appelle Josh Ferland. Je suis né à Winnipeg, où je vis encore. Je suis fier d'être ici aujourd'hui pour parler du projet de loi C-92 et pour vous faire part de mon expérience et de mes souhaits pour ce projet de loi. Merci de m'avoir invité et de me permettre de faire part de mes réflexions. J'espère que ma voix fera la différence pour les jeunes.
    J'ai été placé, quand j'étais enfant. D'après ce que je comprends, c'est la première fois que le gouvernement fédéral s'engage autant dans le dossier de la protection de l'enfance. Je suis en faveur du projet de loi C-92, car je suis Métis, et c'est la première fois que les Métis recevront un appui et un financement du gouvernement fédéral au chapitre de la protection de l'enfance.
    Comme j'ai été pris en charge, pendant mon enfance, je crois qu'il est important d'avoir de meilleurs appuis pour les jeunes, à tous les stades de leur développement, ainsi que des appuis qui les aideront à atteindre des objectifs à long terme. J'aurais préféré trouver une famille d'accueil à long terme, beaucoup plus tôt, que d'être dans un foyer de groupe. Les membres de ma famille d'accueil m'ont accueilli et m'ont traité comme l'un des leurs. Ils m'ont enseigné des compétences et des valeurs qui me servent bien dans ma vie d'adulte, à savoir l'importance de travailler dur, d'avoir une bonne éthique de travail, d'être respectueux et prévenant avec tout le monde, de donner en retour. Malgré les raisons pour lesquelles j'ai été placé, je suis reconnaissant envers ma famille d'accueil pour son amour et son acceptation.
    J'aimerais parler de certains autres appuis que j'ai eus dans ma vie. Je suis reconnaissant envers la Fédération des Métis du Manitoba, qui finance l'administration métisse des services à l'enfance et à la famille, qui m'a donné accès à une travailleuse spirituelle métisse. La Fédération m'a aidé à faire la transition après ma prise en charge. Je sais d'expérience qu'il n'y a pas beaucoup d'appuis pour les jeunes qui quittent les familles d'accueil. C'est pourquoi il est très important d'avoir du financement pour des programmes comme celui-ci. La travailleuse spirituelle métisse m'a parlé de la formation professionnelle offerte par la Fédération des Métis du Manitoba. Elle m'a aidé à m'inscrire et à me préparer et m'a même conduit au centre de formation, qui se trouve à une heure et demie de Winnipeg. Je continuerai à travailler avec Rhiannon Lynch aussi longtemps que je le pourrai. Ce programme n'offre plus d'appuis aux jeunes après l'âge de 25 ans.
    Je pense que ces types de programmes sont essentiels et devraient être une priorité pour ceux qui veulent aider les jeunes adultes. Au cours de ma formation, j'ai obtenu plusieurs certifications qui m'ont ouvert d'excellents débouchés. Je devais encore réfléchir à certaines choses avant que le travail ne devienne une réalité. Mon lieu de travail se trouvait à une heure et demie de la ville et je n'avais aucun moyen de m'y rendre. Je n'ai pas de voiture et aucun autobus ne va jusque-là. Je n'avais pas d'endroit où rester et pas d'argent pour louer un appartement. Il n'y a pas de financement de démarrage disponible pour un jeune comme moi. C'est insensé, quand on pense aux milliers et milliers de dollars qui ont été dépensés pendant mes 12 années de prise en charge. Et ensuite, quand je suis finalement arrivé à trouver un endroit où je pouvais commencer à vivre par mes propres moyens, j'avais seulement besoin de quelques centaines de dollars pour commencer à travailler, mais il n'y avait aucune aide. Il me fallait juste assez pour tenir jusqu'à mon premier chèque de paye. J'étais si près.
    Si je vous dis cela, c'est que, parfois, ce ne sont pas les grandes choses qui tuent nos rêves, mais les petites. J'aimerais que vous vous en rappeliez au moment de réfléchir aux conséquences de ce projet de loi.
    J'ai été chanceux d'avoir dans ma vie des gens qui avaient la volonté d'en faire plus que ce qu'ils avaient à faire. Ma travailleuse spirituelle métisse a collecté de l'argent pour moi, elle a collecté et donné des cartes-cadeaux. Pat Horsley, de l'organisme métis, qui est ici avec moi aujourd'hui, m'a conduit à mon travail et s'est occupée de mon logement jusqu'à ce que j'aie reçu mon premier chèque de paye. Pat a contacté la FMM et le Metis Community Liaison Department, et ils m'ont donné une carte-cadeau pour que je puisse m'acheter de la nourriture. Même si elle ne reçoit pas de financement provincial pour aider les jeunes qui ne sont plus pris en charge, l'administration métisse des services à l'enfance et à la famille a donné un coup de main pour que je puisse commencer ma vie. Je suis tellement content qu'elle ait trouvé une solution.
    J'ai été tellement reconnaissant que ces personnes m'aient donné la priorité, dans système qui semble lourd.

  (1100)  

    En tant qu'enfants pris en charge, nous avons l'impression d'entendre beaucoup de « non » et que ce qui nous arrive, en grande partie, échappe à notre contrôle.
    J'espère que le nouveau projet de loi nous redonnera l'espoir de pouvoir faire les choses différemment, à l'avenir. Il a le potentiel d'avoir davantage de résultats positifs pour les jeunes qui sont actuellement pris en charge.
    Merci de m'avoir écouté. Je suis honoré d'avoir eu cette possibilité.
    Merci, monsieur Ferland. Ce sont des paroles très importantes.
    Nous allons maintenant passer aux questions des députés. Prenez votre temps et soyez aussi honnête et ouvert que vous le pouvez.
    Nous allons commencer par M. Robert-Falcon Ouellette.
    Merci beaucoup.
    [Le député s'exprime en cri ainsi qu'il suit:]
    ᓂ ᐚᐦᑰᒫᑲᓇᐠ ᑖᓂᓯ ᓂ ᒥᔦᐧᔨᐦᑌᐣ ᑳ ᐋᐧᐸᒥᑕᑲᐧᐤ
    [Les propos du député sont traduits ainsi:]
    Madame la présidente, je salue tous les gens que je connais. Je suis très fier d'être ici.
    [Traduction]
    Merci beaucoup, monsieur Ferland, madame Formsma et madame Palmater.
    Monsieur Ferland, vous avez vu beaucoup d'enfants pris en charge; recevaient-ils tous les services appropriés? Devons-nous essayer autre chose?

  (1105)  

    Oui. Il faudrait soutenir davantage le financement des programmes pertinents, comme le programme des travailleurs spirituels métis, qui aide les enfants jusqu'à l'âge de 25 ans. Il les aide également au chapitre de l'emploi, à trouver un emploi, à trouver un logement et ainsi de suite.
    L'âge de 18 ans est-il un bon âge limite pour arrêter de recevoir des appuis?
    Je pense que cela devrait continuer jusqu'à au moins 26 ans.
    Pourquoi 26 ans?
    Je pense que vous devriez aider les gens là où ils en sont, et non pas là où on pense qu'ils devraient être.
    D'accord.
    Madame Formsma, pourriez-vous nous en dire un peu plus sur le programme de formation sur les compétences culturelles que vous offrez dans les centres d'amitié? Qu'est-ce que cela représente pour les familles? Est-il disponible dans tout le Canada et dans tous les centres d'amitié?
    Nous avons un réseau de 112 centres d'amitié membres, ce qui comprend également nos associations provinciales et territoriales. J'aimerais dire qu'aucun d'entre eux ne fait la même chose... Les centres d'amitié offrent un très large éventail de programmes et de services.
    Le programme de formation sur les compétences culturelles est ce qui est ressorti de nos consultations après du centre d'amitié Under One Sky du Nouveau-Brunswick.
    D'autres centres d'amitié offrent également un grand nombre de programmes différents. Certains d'entre eux offrent le programme I Am a Kind man, un programme de lutte contre la violence qui s'adresse aux hommes.
    J'ai entendu parler de quelques cas où un centre d'amitié qui a eu vent d'une famille qui risquait d'être brisée; et le centre a créé un programme en une fin de semaine, et les responsables du centre ont pu aller à la rencontre de l'agent des services d'aide à l'enfance et lui dire qu'un plan et un programme seraient offerts à la famille.
    Combien de parents de familles d'accueil non autochtones utilisent votre programme sur les compétences culturelles pour maintenir les liens culturels entre les enfants?
    Je n'ai aucune idée de ces chiffres, car...
    Est-ce que c'est important?
    Je pense que oui. Indépendamment de l'entité compétente, je pense qu'il y aura toujours des enfants autochtones pris en charge. Il y aura toujours des parents de familles d'accueil non autochtones, et ils continueront à conduire ces enfants dans des centres d'amitié pour qu'ils suivent le programme culturel. Nous n'avons aucune donnée sur tout cela.
    Nous en avons recueilli certaines dans un des rapports de recherche du Réseau de connaissances des Autochtones en milieu urbain. Il y a une donnée en particulier qui porte sur la formation sur les compétences culturelles pour les non-Autochtones... Je l'ai ici.
    D'accord.
    Je vais devoir vérifier, mais vous pouvez aller sur le site de ce réseau, avec l'acronyme anglais: UAKN.org. Regardez simplement sous la rubrique « services à l'enfance » ou « protection de l'enfance », et toutes les recherches que nous avons faites dans ce domaine s'afficheront sur le site Web.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais parler du paragraphe 9(3) du projet de loi. C'est à la page 7.
    Il traite de l'égalité réelle et de la notion selon laquelle les enfants sont censés recevoir la même qualité de services, peu importe l'endroit où ils vivent. L'alinéa 9(3)e) précise ce qui suit :
[...] dans le but de promouvoir l'égalité réelle entre les enfants autochtones et les autres enfants, aucun conflit de compétence ne doit occasionner de lacune dans les services à l'enfance et à la famille fournis à l'égard des enfants autochtones.
    Il ne fait aucune mention du principe de Jordan, mais ce projet de loi en lui-même ne concerne pas seulement les soins de santé; il concerne également un plus large éventail de services.
    Madame Palmater, je me demandais... Selon vous — et, bien sûr, je suppose que vous direz non —, pourriez-vous, vous en tant qu'avocate, poursuivre le gouvernement fédéral en justice s'il n'a pas financé ou s'il ne finance pas...? Disons qu'il y a un changement de gouvernement et que le nouveau gouvernement décide de ne pas financer les services de la protection de l'enfance pour une quelconque raison. D'ailleurs, je comprends que les Autochtones puissent craindre cela. Seriez-vous en mesure de poursuivre le gouvernement fédéral en justice, en disant qu'en vertu de ce projet de loi, il est censé y avoir une égalité réelle et qu'il ne la finance pas? A-t-il une grande différence entre le niveau de services et cette affaire de droits à la personne, a-t-il donc besoin de financer cela? Pourriez-vous vous adresser aux tribunaux en invoquant cet article?
    Vous pouvez présenter n'importe quel type d'argument quand vous êtes devant un tribunal. En fait, vous essayez de présenter vos meilleurs arguments en espérant qu'ils tiennent la route. Toutefois, il y a une différence fondamentale dans le libellé des textes de loi entre un « attendu », dans un article, un principe et un droit substantiel.
    Si vous dites, dans l'attendu, « nous voulons fournir un financement aux Premières Nations », ce n'est pas comme si vous aviez un article où il est indiqué que « le ministre doit fournir » un financement équitable aux Premières Nations ou un financement égal aux Premières Nations. Cela fait partie du problème, quand vous rédigez des lois. Chacun des engagements fondamentaux — les droits qui sont justiciables, sur lesquels vous pouvez compter, que vous pouvez invoquer pour saisir les tribunaux et intenter des poursuites, les faire appliquer, obtenir des injonctions et ainsi de suite — doit être fondé sur les droits et la réalité. Un principe, c'est une idée générale, mais il n'y a rien qui indique quelle est l'interprétation obligatoire.
    Ce serait un argument, mais il ne serait pas nécessairement bon.

  (1110)  

    Il n'y a pas de loi fédérale sur les services à l'enfance et à la famille, pourtant la Société de soutien à l'enfance et à la famille a poursuivi le gouvernement en justice et a gagné plusieurs affaires. Le gouvernement fédéral a fini par suivre le principe de Jordan, un certain nombre de fois. De toute évidence, il y a lieu de croire qu'une poursuite de ce genre serait de nouveau couronnée de succès, car c'est en fait plus explicite que dans toute autre loi. Il ne s'agit pas d'une motion simple du Parlement d'il y a 10 ou 20 ans, qui s'appuierait sur le principe de Jordan. Il s'agit d'un projet de loi, qui établit l'égalité réelle.
    C'est juste. Toutefois, vous devez garder à l'esprit le nombre d'ordonnances de non-conformité le Tribunal canadien des droits de la personne a prises à la suite de cette décision — sept, je crois —, et le tribunal débat encore de la question de savoir si cela s'appliquerait à tous les enfants, surtout en vertu du principe de Jordan.
    Pour le moment, la question de droit concerne le fait que le gouvernement fédéral n'accorde pas le financement prévu selon le principe de Jordan aux enfants autochtones non inscrits qui devraient, en réalité, être inscrits, s'il n'y avait pas la discrimination permanente du projet de loi S-3.
    Il y a plusieurs lois qui, ensemble, désavantagent les gens; ce serait donc difficile.
    Certains d'entre eux seraient considérés comme des enfants métis, donc je crois qu'il y a beaucoup de problèmes qui concernent le statut, c'est évident. Vous dites que ce n'est pas fondé sur les distinctions, et pourtant nous avons négocié — le gouvernement fédéral a négocié — avec les organisations nationales des Premières Nations et avons tenu d'importantes consultations avec les organisations des Métis et des Inuits...
    Merci. Le temps est écoulé. La question pourrait être reprise par M. Arnold Viersen.
    Oui, poursuivez.
    C'est de la collaboration.
    Merci. Il s'agit d'un aspect très intéressant.
    Je ne suis pas certain de comprendre. Vous êtes venus témoigner pour dire — je l'ai noté — que ce n'est pas fondé sur les distinctions, et, pourtant, les Inuits et les Métis nous ont dit le contraire, et les Premières Nations ont l'impression que c'est fondé sur les distinctions.
    De plus, dans le cadre de procédures judiciaires, nous parlons du fait que nous tentons d'examiner les services que les Métis pourraient recevoir également et de déterminer s'ils devraient en recevoir, et maintenant on propose le projet de loi S-3. La situation évolue. D'après bon nombre de témoignages que nous avons entendus, nous en sommes seulement à la première étape de notre démarche.
    Nous avons déjà entendu les témoignages d'avocats en droit constitutionnel. Je peux vous dresser une liste de noms. J'ai pris note de tous leurs témoignages. Ne s'agit-il pas simplement d'une possibilité de faire progresser les choses et d'essayer de trouver un meilleur moyen de donner le contrôle aux collectivités autochtones? Et même, dans l'article 22, il est littéralement indiqué que... Je suis désolé. Il s'agit de l'article 18 et ensuite de l'article 22, lequel énonce que toutes les lois autochtones ont préséance en cas de conflit. Si une nation autochtone — vivant sur un territoire visé par le Traité no 1 ou sur un territoire visé par le Traité no 4 — décide d'adopter des lois, ces lois auront préséance sur les lois fédérales ou provinciales en vertu des paragraphes 22(1) et 22(3). C'est écrit juste là.
    J'aimerais vraiment parler de plusieurs points que vous avez abordés.
    L'APN, le RNM et l'ITK ont déclaré que cela serait corédigé, et ce n'est pas ainsi que Justice Canada rédige des lois. On ne corédige pas les lois. Alors, ils ont changé la formulation, ont admis que ce n'était pas corédigé et que c'était « co-élaboré ».
    Rédiger des lois en collaboration avec une organisation, ce n'est pas comme en faire l'élaboration conjointement en respectant les directives des détenteurs de droits des Premières Nations. J'ai entendu les témoignages ici et lors de l'étude préliminaire du Sénat. L'Assemblée des chefs du Manitoba, qui représente 63 Premières Nations, est catégoriquement opposée au projet de loi C-92. Les membres ont tenu des manifestations contre le projet de loi vendredi. Une coalition des Premières Nations du pays organise des journées nationales contre le projet de loi C-92, y compris les Premières Nations des Chefs de l'Ontario et les Premières Nations de l'Alberta. Toute cette information se trouve dans le compte rendu. Il y a une résistance importante à cet égard, et des experts comme Cindy Blackstock, entre autres, ont déclaré que ce projet de loi pose de sérieux problèmes.
    Ce n'est pas la manière dont vous l'avez présenté. Vous avez en quelque sorte laissé de côté toutes les personnes qui s'y opposent pour des raisons légitimes, et vous devez garder à l'esprit que ces soi-disant lois des Premières Nations, ayant présumément préséance, sont des lois fédérales. Elles doivent être traitées comme des lois fédérales, non pas comme des lois des Premières Nations en tant que telles, et elles sont assujetties à la Charte et à la Loi canadienne sur les droits de la personne, à l'article 35, portant sur le partage des compétences et les accords de coordination, et aux articles 10 à 15 du projet de loi.
    On ne peut pas interpréter une loi en ne lisant qu'un seul article. Il faut la lire en entier et en examiner toutes les dispositions.

  (1115)  

    Merci.
    Monsieur Viersen, vous avez la parole.
    Merci.
    Madame Formsma, nous avons déjà discuté un peu des Premières Nations qui vivent dans les villes comparativement à celles qui vivent dans les réserves en particulier. Je n'oublie pas les communautés métisses et tout le reste.
    Quelle place allons-nous faire aux centres d'amitié? Les centres d'amitié sont des endroits où ces distinctions n'existent plus. J'en ai visité quelques-uns un peu partout au pays. Comment pouvons-nous reconnaître, dans le cadre de ce projet de loi en particulier, l'importance du travail accompli par les centres d'amitié, étant donné que nous leur donnons le droit de comparaître à des audiences et ainsi de suite? Quelle place donneriez-vous aux centres d'amitié?
    Il y a déjà certaines choses qui se passent et d'autres auxquelles il faut réfléchir. De toute évidence, nous ne voulons pas être perçus comme des personnes qui empêchent un gouvernement d'exercer une compétence légitime. Nous avons l'intention d'expliquer, du mieux que nous le pouvons, comment nous percevons la mise en œuvre de ce projet de loi. Nous l'envisageons de différentes manières.
    Bien entendu, nous n'allons pas l'étudier en comparant ceux qui vivent en milieu urbain et... Ce sont les mêmes personnes. Bon nombre d'Autochtones vivent en milieu urbain; bon nombre d'entre eux en partent et y reviennent. Mais il y a également des collectivités importantes, tout particulièrement dans les grandes villes, qui y sont installées depuis trois ou quatre générations. C'est leur collectivité. Les distinctions ne disparaissent pas, car ces gens, lorsqu'ils se retrouvent parmi ces collectivités, reconnaissent déjà leurs différences. Lorsque nous sommes dans un centre urbain, nous ne voulons pas dire à quelle nation nous appartenons, la nation crie, micmaque, mohawk ou peu importe.
    À notre avis, vu cette réalité, la mise en œuvre du projet de loi ouvre un espace aux centres d'amitié. Les responsables ont des contacts avec les peuples autochtones, ont parfois établi des partenariats officiels avec des organisations des Premières Nations ou des Métis, en fonction du centre d'amitié ou de la région dans laquelle ils se trouvent, et entretiennent parfois des relations formelles avec les principales sociétés d'aide à l'enfance.
    Il est difficile de faire valoir avec force une position quelconque, en ce qui a trait aux chevauchements, à la mise en œuvre et aux compétences, car tout revient à ce qui convient aux enfants, aux familles et à l'ensemble d'une collectivité. À certains endroits, un centre d'amitié fera partie du réseau. Dans certaines collectivités, les centres d'amitié n'occuperont pas autant de place dans le réseau, mais seront plutôt considérés comme un complément. Cela ne répond peut-être pas à votre question, mais j'espère que le point de vue de notre expérience pourra vous éclairer.
    Parmi les centres d'amitié que vous connaissez, y en a-t-il qui correspondraient à la description du corps dirigeant autochtone de ce projet de loi?
    C'est l'une des questions que nous voulions poser au sujet de l'article portant sur les définitions, car, selon le projet de loi...
    Bon nombre des centres d'amitié que j'ai visités établissent des partenariats officiels avec une collectivité locale. Ensuite, ils gèrent des programmes particuliers comme les services à l'enfance et à la famille. Je peux conclure que vous êtes autorisés à agir au nom d'un groupe autochtone.
    Répondez très rapidement.
    Oui.
    Je sais que des Premières Nations ont autorisé un centre d'amitié à intervenir à titre de représentant de bande, en tant que partie juridiquement... Il y a des cas où cette entité particulière serait autorisée, mais l'autorisation est très explicite.
    Dans d'autres situations, il arrive qu'un responsable d'un centre d'amitié, un travailleur social ou un travailleur auprès des tribunaux se présentent en cour avec une famille. Cela veut-il dire qu'ils ont obtenu l'autorisation de la famille autochtone concernée?

  (1120)  

    C'est juste.
    Merci.
    C'est tout pour les questions.
    Nous allons passer à Rachel Blaney.
    Je tiens à vous remercier tous d'être ici aujourd'hui.
    Pendant que nous débattons de ce projet de loi, il faut se poser la question suivante: combien de temps les enfants autochtones de ce pays devront-ils attendre?
    J'ai en grande estime le travail de Cindy Blackstock. À mon avis, c'est catastrophique qu'il y ait autant d'ordonnances de non-conformité au pays. Nous devons en assumer la responsabilité en tant que gouvernement fédéral. Tous les membres de la Chambre doivent reconnaître leur responsabilité à cet égard. C'est plutôt inquiétant.
    Je crois qu'il est nécessaire d'obtenir du financement dans le cadre de ce projet de loi. À tout le moins, nous devons nous assurer que des ressources sont à la disposition de ces collectivités afin qu'elles puissent effectuer le travail qui est si désespérément nécessaire.
    Madame Palmater, vous en avez parlé un peu, et j'aimerais beaucoup vous entendre tous. Ce projet de loi doit-il prévoir du financement?
    J'ai entendu bon nombre de témoins dire, et je suis d'accord sur ce point, que ce ne doit pas être un montant fixe, mais que des principes de financement solides doivent être établis. La décision rendue par le Tribunal des droits de la personne nous propose une terminologie qui, à mon avis, serait un bel ajout au projet de loi.
    Je pourrais d'abord aborder la question avec vous, Mme Palmater, et ensuite avec Mme Formsma et M. Ferland, si ces derniers souhaitent ajouter quelque chose.
    Je suis également d'accord. Je partage les préoccupations de Mme Blackstock et, bien entendu, je souscris à la décision rendue par le Tribunal canadien des droits de la personne concernant la nécessité d'un financement. Il ne peut s'agir d'un principe, ni d'un article commençant par « attendu que ». Il faut un engagement et des directives précises sur la manière dont le montant sera fixé, sur le fait que le financement sera fondé sur les besoins de la population et ainsi de suite. Le financement doit être suffisamment flexible pour que le montant soit négociable, mais les directives doivent être très précises pour que personne ne puisse s'y soustraire. Cela doit être un droit justiciable, dans le projet de loi, que nous pourrions défendre en cour.
    Une fois de plus, une partie du problème réside dans le fait que, si vous faites en sorte que le financement soit basé sur des principes ou des attendus que, vous obligez les personnes les plus défavorisées et les plus vulnérables du pays à réunir suffisamment d'argent pour poursuivre en justice le Canada aussi souvent qu'il le faudra, et ces poursuites engendrent des dépenses de millions de dollars.
    Le Tribunal canadien des droits de la personne n'est qu'une des instances possibles, mais, lorsqu'il faut convoquer des experts en cour, il faut dépenser littéralement des millions de dollars. Les employés des centres d'amitié et les membres des Premières Nations n'ont pas suffisamment d'argent pour cela. Les mères de familles monoparentales et les enfants qui demandent de l'aide au système n'ont pas assez d'argent pour cela. Le simple fait d'avoir assez d'argent pour peut-être se présenter en cour n'est pas la solution. Je suis entièrement d'accord avec Cindy Blackstock quand elle dit que nous devons aller au-delà des premières étapes. Mieux que rien, ce n'est vraiment pas assez. Nous devons aller au-delà des étapes graduelles. Vous êtes égaux ou vous ne l'êtes pas.
    Nous devrons effectuer un changement radical ici. Vous devrez vous engager par écrit et faire du financement un droit justiciable pour tous. Sinon, quel est l'intérêt? Ce n'est qu'une autre politique décousue qui nous obligera encore à intenter des poursuites et à passer des années devant les tribunaux, et des enfants gâcheront leur vie dans des familles d'accueil. Nous savons non seulement que la situation est néfaste, mais que des gens perdent la vie. Cela mène au meurtre et à la disparition de femmes et de filles autochtones, à la traite de personnes, à la pornographie juvénile, à la participation au crime organisé et à la surincarcération. Les deux tiers des Autochtones incarcérés proviennent du système de placement familial. Tous les problèmes que nous tentons de régler peuvent être résolus d'une manière très radicale si nous faisons ce que nous sommes censés faire à cet égard, c'est-à-dire mettre en place un cadre des droits de la personne et un cadre pour les Premières Nations. C'est aussi simple que cela.
    J'aimerais ajouter que la Indian Child Welfare Act, qui a été adoptée dans les années 1970, ne prévoyait absolument aucun financement. Les tribus doivent réunir elles-mêmes, au coup par coup, les fonds de fonctionnement nécessaires... On a accordé des pouvoirs aux tribus et à leurs tribunaux dans les années 1970. La Indian Child Welfare Act est une référence, mais elle ne prévoit aucun financement. Nous avons déjà vu ce genre d'approche de financement au coup par coup, où les fonds viennent de diverses sources, des sources fortement en faveur des retraits. Cela n'a rien de nouveau, n'est-ce pas? Les sources de financement sont temporaires, elles ne sont pas garanties, et chaque année, les tribus doivent gratter les fonds de tiroirs pour réunir des fonds pour les services d'aide sociale à l'enfance.
    La National Indian Child Welfare Association a élaboré un modèle illustrant le vaste éventail de services offerts, du début à la fin. Le modèle montre aux tribus l'ensemble des services d'aide à l'enfance qu'elles peuvent fournir, des services essentiels jusqu'à l'adoption et la tutelle. Présentement, aucune tribune n'est en mesure de fournir tous ces services, même si elles sont habilitées à le faire. Et c'est comme cela depuis les années 1970. Ce qu'elles doivent faire, c'est établir des partenariats. Elles cherchent du financement, même minime, partout où elles le peuvent. Même si certaines tribus font de leur mieux, il n'y en a aucune qui est en mesure d'offrir tous les services. Si nous nous engageons dans cette voie, je crains qu'il nous arrive la même chose, c'est-à-dire que les Premières Nations soient habilitées à fournir tous les services qu'elles souhaitent, sans pour autant avoir la capacité de réaliser ce rêve.

  (1125)  

    Au bout du compte, ce sont les enfants qui paient le prix, et c'est le véritable problème.
    Monsieur Ferland, vous avez parlé de l'importance du financement en disant que même une toute petite somme d'argent vous aurait aidé énormément à réaliser une partie de vos rêves. Cela m'a vraiment fait réfléchir au fait que les enfants placés en familles d'accueil ne peuvent pas toujours compter sur une cellule familiale pour leur donner un coup de main et un peu d'argent pour qu'ils puissent atteindre leur prochain but. Pourriez-vous nous parler de l'importance du financement dans ce modèle de soutien pour les enfants qui, comme vous, ont été placés en famille d'accueil?
    Je crois qu'un financement important serait utile pour aider les enfants qui atteignent la majorité en famille d'accueil ainsi que les enfants qui sont placés. Il faut plus de fonds pour aider les gens qui suivent des programmes ou cherchent un emploi. Mme Palmater a raison. Effectivement, ces enfants finissent en prison ou ils entrent dans un gang et font toutes sortes de choses. S'il y avait du financement adéquat pour les aider à trouver un emploi, ils n'aboutiraient pas là. Ils ne seraient plus placés en détention, ne disparaîtraient plus, etc. À mes yeux, il serait logique d'offrir davantage de soutien aux enfants des familles d'accueil ainsi qu'aux jeunes adultes, parce que la vie est très difficile quand vous êtes majeur et qu'on ne vous offre aucun soutien adéquat.
    Merci, monsieur Ferland.
    D'autres témoins nous ont dit eux aussi que la transition vers l'âge adulte des enfants en famille d'accueil est très difficile, parce qu'il n'y a aucun soutien. Nous vous avons entendu. J'espère que les choses vont changer.
    Il vous reste deux ou trois minutes. La parole va à M. Dan Vandal.
    Avant tout, je tiens à remercier nos trois invités de leurs témoignages.
    Je suis très heureux de vous voir, monsieur Ferland. Je suis toujours content de voir un autre Métis du Manitoba ici à Ottawa. Vous faites de l'excellent travail.
    Ma question s'adresse à Mme Pamela Palmater. Nous étudions la question depuis un certain temps. La question de la préséance est extrêmement importante dans ce projet de loi. Je vais vous lire le paragraphe 22(3) et vous demander votre opinion sur cette disposition:
Il est entendu que les dispositions relatives aux services à l’enfance et à la famille de tout texte législatif d’un groupe, d’une collectivité ou d’un peuple autochtones l’emportent sur les dispositions incompatibles relatives aux services à l’enfance et à la famille de toute loi provinciale ou de tout règlement pris en vertu d’une telle loi.
    À mes yeux, cette disposition est très claire et très ferme. Pouvez-vous faire des commentaires sur ce paragraphe, en fonction de votre interprétation?
    D'accord. La disposition dont il est question concerne tout particulièrement les conflits avec une loi provinciale. La disposition s'applique aux Premières Nations qui ont conclu un accord de coordination ou qui n'ont pas d'accord de coordination après le délai d'un an.
    Après un an...
    Cela vaut uniquement pour les lois provinciales. Les lois autochtones l'emportent uniquement parce que cela est prévu dans les dispositions d'une loi fédérale. Ce n'est pas que les Premières Nations... Le projet de loi aborde les lois des Premières Nations comme s'il s'agissait de lois fédérales. Ce ne sont pas uniquement les lois provinciales qui suscitent des préoccupations. Il y a aussi la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Charte et l'article 35 ainsi que la jurisprudence. Il y a le partage des compétences. Il y a aussi...
    Je n'ai pas beaucoup de temps, madame Palmater.
    ... les articles 10 à 15 du projet de loi lui-même.
    Ce n'est pas exact; le paragraphe 22(1) reprend la même formulation, sauf qu'il établit que les lois des groupes ou des peuples autochtones l'emportent sur les lois fédérales. Nous ne parlons pas de la même chose.

  (1130)  

    D'accord, mais voici très précisément ce que dit la disposition: les lois fédérales, autres que la présente loi... Dans le projet de loi, les articles 10 à 15 l'emportent sur les lois des Premières Nations. Voilà...
    Parce que c'est dans l'intérêt de l'enfant...
    ... qui l'emporte sur les lois des Premières Nations.
    ... ce sont des dispositions très robustes.
    Bon sang, l'intérêt supérieur de l'enfant est l'un des motifs évoqués pour le retrait des enfants des Premières Nations. C'est le noeud du problème. On permet...
    Non, c'est...
    ... au statu quo...
    ... un intérêt supérieur différent quant à l'enfant.
    ... de l'emporter sur les lois des Premières Nations. Ce n'est pas défini.
    Mon temps est écoulé.
    Merci.
    Le débat a été dynamique et informatif. Nous tenons à remercier tout spécialement ceux qui sont venus témoigner devant notre comité, malgré le court préavis. Merci de nous avoir présenté vos points de vue. Ils font maintenant partie du compte rendu permanent du Canada. Nous étudierons vos commentaires afin de proposer des modifications au projet de loi ainsi que pour les travaux futurs.
    Meegwetch.
    Nous allons prendre une pause, le temps que le prochain groupe de témoins s'installe.

  (1130)  


  (1135)  

    Reprenons. J'invite les témoins à prendre place. Je vois que nous sommes tous prêts.
    Je vous souhaite la bienvenue au nom du Comité. Le sujet de notre étude est probablement l'un des problèmes les plus importants au Canada présentement. Nous étudions la façon dont les enfants autochtones sont traités dans un système mal adapté à nos familles et notre nation. Nous nous trouvons sur le territoire non cédé du peuple algonquin.
    Voici comment nous procéderons: vous avez dix minutes pour présenter votre exposé, puis les députés auront des questions à vous poser.
    Nous accueillons le grand chef Jerry Daniels de la Southern Chiefs' Organization.
    Nous accueillons également M. Morley Watson, premier vice-chef de la Federation of Sovereign Indigenous Nations, et Mme Vera Sayese de Peter Ballantyne Child and Family Services, un organisme qui offre des services en Saskatchewan et au Manitoba.
    Bienvenue.
    Commençons par le grand chef Jerry Daniels. Merci d'être venu.
    Bonjour. Merci aux membres du Comité de m'avoir invité à témoigner sur ce dossier très important qui concerne nos enfants, nos familles, nos collectivités et notre nation.
    Je m'appelle Jerry Daniels. Je suis le grand chef de la Southern Chiefs' Organization, qui représente 34 Premières Nations du Sud du Manitoba, en particulier le peuple anishinabe et le peuple dakota. En tout, il s'agit de 90 000 personnes.
    [Le témoin s'exprime en ojibwé ainsi qu'il suit:]
    Ogimaamakwad ndizhinikaaz Binesii ndoodem.
    [Les propos du témoin sont traduits ainsi:]
    Je m’appelle Leading cloud, et j’appartiens au clan des Thunderbird.
    [Traduction]
    Chers frères, chères sœurs, je suis heureux d'être ici avec vous et de témoigner à propos d'un projet de loi que vous étudiez minutieusement, des répercussions qu'il pourrait avoir sur la qualité de vie de nos enfants et des possibilités qu'il nous ouvre. Le système dont il est question a eu des conséquences très négatives sur un grand nombre de nos enfants et de nos familles. Il nous a causé énormément de préjudices pendant de nombreuses années. Certaines personnes y voient même le prolongement de l'époque des pensionnats.
    Les Premières Nations ont un droit inhérent à l'autodétermination et à l'autonomie gouvernementale. Nous avons des lois, des coutumes et des traités. Les Premières Nations prennent soin de leurs enfants à leur façon. Je peux vous le dire: je fais partie de ceux qui sont passés dans le système des services à l'enfance et à la famille. J'ai été en foyer de groupe quand j'étais jeune, et j'ai eu une jeunesse très difficile. Ma famille déménageait souvent, et je me suis retrouvé dans le système. Cependant, au fil de mes expériences, j'ai pu rencontrer de nombreux aînés, et beaucoup de bonnes personnes, dans le système, m'ont aidé à devenir qui je suis aujourd'hui et à trouver mes valeurs. À dire vrai, c'est grâce au système des services à l'enfance et à la famille que j'ai assisté pour la première fois à une cérémonie de la suerie. C'était au Selkirk Healing Centre, au Manitoba.
    Les Premières Nations ont leurs propres moyens de garder leurs familles et leurs collectivités fortes et intactes. Cependant, nos lois, nos institutions et nos systèmes ont été influencés par le système juridique canadien, en particulier la Loi sur les régies de services à l'enfant et à la famille.
    Notre objectif est de soutenir des solutions communautaires. Depuis que j'ai été nommé grand chef — cela fait un peu plus de deux ans —, j'ai surtout essayé de trouver des solutions qui fonctionnent au Manitoba. Je me suis intéressé à la Première Nation de Sandy Bay, où le nombre d'enfants en famille d'accueil a diminué grâce aux pratiques concrètes utilisées dans les échanges avec les familles. En travaillant avec les familles et avec la famille élargie, on a pu trouver d'autres moyens de protéger l'intérêt supérieur de l'enfant, sans qu'il soit nécessaire de le retirer de sa famille ou de briser la famille. Voilà l'important, selon moi. Voilà les priorités que nous devons cibler dans le système des services à l'enfance et à la famille.
    La Southern Chiefs' Organization dispose d'un agent de liaison avec les services à l'enfance et à la famille. À dire vrai, nous sommes la première régie des services à l'enfant et à la famille du Sud du Manitoba. Nous nommons les membres du conseil d'administration de la régie du Sud, l'organisme de réglementation qui gère l'ensemble des régies du Sud du Manitoba. Nous travaillons en étroite collaboration avec ces dernières depuis quelques années afin de veiller à ce que la réglementation réponde aux besoins des collectivités et soutienne les efforts à déployer sur le terrain.
    Il y a énormément d'obstacles à surmonter, mais je ne crois pas qu'ils soient insurmontables. Je crois que nous sommes tout à fait capables de veiller à ce que les familles soient réunies et que l'intérêt supérieur de l'enfant, les valeurs culturelles et les traditions de notre peuple soient protégés afin que les enfants puissent développer leur identité sur un fondement solide.
    Il y a une chose que je veux dire en particulier: nous avons vraiment besoin de l'aide du fédéral pour les services à l'enfance et à la famille. Nous avons eu énormément de difficulté à trouver un terrain d'entente avec la province en ce qui concerne les responsabilités traditionnelles. La Southern Chiefs' Organization a donné son appui. Je m'oriente, avec la province... et nous travaillons ensemble, nous nous sommes entendus en principe sur les responsabilités traditionnelles. Je parle des lois et de l'orientation communautaires.

  (1140)  

    Cela orienterait les priorités et la réglementation, la façon dont nous aidons les enfants ou la façon dont nous réagissons quand l'intérêt de l'enfant est menacé.
    C'est notre priorité depuis quelques années. Nous avons constaté que l'orientation a changé. Nous voulions une approche où les responsabilités traditionnelles revenaient essentiellement à la collectivité et à la famille. Cependant, présentement, nous avons une approche de prise en charge personnalisée où ce sont les organismes qui ont la responsabilité. Le projet de loi actuel reflète cette tendance.
    Dans le projet de loi, il est question d'égalité réelle et de l'intérêt de l'enfant. Ce sont de bonnes choses, selon moi. Je doute que nous arrivions jamais à une solution parfaite. À mon avis, l'utilité de n'importe quelle loi dépend des gens qui l'appliquent sur le terrain et des gens qui l'interprètent dans les collectivités et dans la région.
    Les gens dans les collectivités ont de bonnes intentions. Ils ne sont pas là pour kidnapper nos enfants. Leur rôle est de protéger nos enfants du mieux qu'ils le peuvent. Je le crois sincèrement. Je ne pense pas que le personnel des services à l'enfance et à la famille aient d'autres desseins. Si on leur donne la capacité de financer l'aide aux familles et de veiller à ce qu'il y ait un plan et que les familles aient du soutien, je crois que nous obtiendrons de meilleurs résultats.
    Voilà pourquoi je soutiens le projet de loi C-92. Son but est avant tout de donner aux Premières Nations une compétence à cet égard, d'offrir du soutien et de prévenir les interférences dans cette compétence. Comme tous ceux qui sont ici et qui viennent de témoigner devant le comité et comme d'autres témoins qui sont venus précédemment, le financement me préoccupe: il ne sera peut-être pas suffisant du côté de la gouvernance, et il ne sera peut-être pas suffisant du côté de la prestation des services.
    J'espère que la disposition touchant l'égalité réelle reflétera cela et que nous aurons suffisamment de financement pour bien faire les choses. Il y a tellement d'enfants au Manitoba... C'est l'origine des services à l'enfance et à la famille. Nous devons avoir la possibilité d'assumer directement la responsabilité des services à l'enfance et à la famille, et il faut que ces services soient financés adéquatement. Nous sommes prêts à le faire. Nous sommes déjà en train de le faire. Nous travaillons avec les administrateurs des services à l'enfance et à la famille. Nous les avons mis en contact avec nos leaders communautaires. Nous faisons aussi participer les femmes et les grands-mères au processus. C'est l'approche que nous avons adoptée, et nous espérons que les gens continueront à travailler pour atteindre ces objectifs et qu'ils accordent la priorité au soutien pour les familles et la collectivité. Si on leur permet de prendre les choses en main, je crois que les services à l'enfance et à la famille et les services de protection de l'enfance seront beaucoup plus efficaces dans la collectivité. Il y aura un soutien beaucoup plus efficace.
    Il est grand temps que le gouvernement se retire et nous laisse faire cela. Il y aura des erreurs, les mêmes erreurs que le gouvernement commet depuis une centaine d'années, et il y en aura d'autres. Cependant, nous tirons des leçons et rectifions le tir en conséquence. Nous allons continuer de nous appuyer sur les connaissances que nous retirons de ces situations.
    Voilà notre argument. Nous ne croyons pas que le projet de loi C-92 sera la panacée pour les services à l'enfance et à la famille. Selon nous, il s'agit plutôt d'une mesure provisoire. Comme pour tout autre projet de loi adopté par le Parlement, la loi devra être modifiée et rectifiée en fonction des expériences sur le terrain.
    Voilà ce que je voulais vous dire. J'espère que le projet de loi sera adopté afin que nous puissions continuer d'encourager l'élaboration de lois dans nos collectivités et dans notre région. Nous devrons aussi nous pencher sur la notion d'égalité réelle afin de déterminer ce que cela voudra dire concrètement, dans les ententes globales de négociation, une fois le projet de loi adopté. Les membres de la collectivité devront y participer. Les membres de la collectivité devront avoir une voix. Les organismes régionaux devront aussi y participer.

  (1145)  

    Encore une fois, ce sera l'entente finale, jusqu'à nouvel ordre. Malgré l'entente, il faudra encore attendre de voir les répercussions sur le terrain. La qualité de vie des gens qui finissent en prison ou dans les rues va s'améliorer, parce qu'il y aura une stratégie communautaire. C'est ce qu'il y a de plus important dans ce projet de loi.
    Meegwetch.

  (1150)  

    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Morley Watson, premier vice-chef de la Federation of Sovereign Indigenous Nations. Vous avez fait un long voyage depuis la Colombie-Britannique. Merci d'être venu.
    Je veux saluer les sénateurs et les députés ainsi que les membres de l'Assemblée des Premières Nations qui sont avec nous. Je tiens à vous remercier de nous avoir offert vos prières ce matin. Comme vous l'avez fait, madame la présidente, je veux souligner que nous nous trouvons sur le territoire du peuple algonquin.
    Je suis le vice-chef Morley Watson, responsable du portefeuille de la santé et du développement social pour la Federation of Sovereign Indigenous Nations.
    Le projet de loi C-92 vise la conciliation des compétences touchant les enfants autochtones du Canada. Cette conciliation est d'une importance critique et nous l'attendons depuis longtemps. Pour les Premières Nations de la Saskatchewan, il s'agit d'un dossier prioritaire, puisque nous comptons le plus grand nombre d'enfants en familles d'accueil, après le Manitoba et que plus de 80 % de ces enfants sont autochtones. Nous avons enduré — et endurons toujours — l'un des systèmes de protection de l'enfance les plus dysfonctionnels. Le système est corrompu par le racisme et les préjugés défavorables et, en conséquence, il produit des résultats qui vont tout à fait à l'encontre des valeurs et des principes fondamentaux de la protection de l'enfance.
    Cela a commencé avec les pensionnats. Puis, il y a eu la rafle des années 1960. Aujourd'hui, on a décidé de nous enlever nos enfants, même s'il existe des solutions plus saines et plus sûres. Au bout du compte, les enfants des Premières Nations sont les victimes. Les provinces n'ont pas réussi à protéger et à soutenir les enfants et les familles des Premières Nations comme elles en avaient la responsabilité. Il est temps pour les provinces de se retirer et de soutenir plutôt ceux qui veulent réellement aider les enfants et les familles des Premières Nations.
    Il y a six dispositions dans le projet de loi C-92 qui sont très importantes pour nous, et je vais vous expliquer pourquoi.
    Premièrement, l'article 18 établit et reconnaît que nous avons le droit inhérent de prendre soin de nos enfants et de préserver l'unité des familles.
    Deuxièmement, l'article 14 énonce qu'il faut favoriser les soins préventifs et l'unité familiale.
    Troisièmement, dans l'éventualité où un enfant doit être retiré de sa famille, il doit être placé en priorité dans une famille appartenant à l'une de nos collectivités.
    Quatrièmement, il faut mettre un terme au système d'alerte des naissances. La prise en charge d'un enfant à l'hôpital est un événement extrêmement traumatisant pour la mère et pour la famille. Cela reflète tout ce qui ne va pas avec le système provincial de protection de l'enfance qui nous est imposé. Il en est question à l'article 14.
    Cinquièmement, l'article 9 prévoit que le principe de l'intérêt de l'enfant doit être interprété à la lumière de notre identité, de nos connexions familiales, de notre culture, de nos langues, de notre territoire et de nos valeurs.
    Sixièmement, la pauvreté et les problèmes de santé ne sont pas des raisons de retirer un enfant de sa famille et de sa collectivité.
    Nous savons que ce projet de loi n'a pas été rédigé en collaboration avec les Premières Nations. Le Canada l'a rédigé seul, mais il a au moins fait parvenir une ébauche à notre fédération à des fins de consultation. Le projet de loi a été élaboré en fonction de notre rétroaction, et notre organisation a rencontré les ministres — l'actuel et l'ancienne — ainsi que les fonctionnaires du ministère à de nombreuses reprises. Nous avons présenté des mémoires et des énoncés de position afin de proposer des modifications qui, selon nous, sont nécessaires. Le Canada n'a pas accepté toutes nos positions de principe, mais nous avons toutefois demandé instamment au Canada d'inclure des dispositions prévoyant un financement prévisible, durable et axé sur les besoins.
    En Saskatchewan, les 74 Premières Nations de la Federation of Sovereign Indigenous Nations ont, pendant plus de 50 ans, édifié des institutions coopératives mais distinctes pour servir nos collectivités. Par exemple, il y a la First Nations University of Canada, le Saskatchewan Indian Institute of Technologies et la Saskatchewan Indian Gaming Authority. D'autres organismes ont été mis sur pied et donnent de très bons résultats.
    Nous sommes en train de reconstruire de notre nation en soutenant nos jeunes et en leur fournissant l'éducation qui a été refusée à leurs grands-parents. Nous voulons renforcer ce qui est offert aux Premières Nations en matière de protection de l'enfance. Nous avons la capacité attestée de créer des emplois pour notre peuple et nous devons saisir les occasions d'améliorer notre économie. C'est un objectif clé et une priorité pour notre région. En renforçant leurs capacités, les Premières Nations ne seront plus, aux yeux de tous, un fardeau économique comme c'est le cas présentement. Nous allons construire notre propre économie, avec plus de débouchés et d'emplois, grâce à ce projet de loi. Nous allons protéger nos familles du même coup.

  (1155)  

    Le projet de loi doit mentionner la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones; il en est question dans le préambule du projet de loi C-91. La protection des droits de la personne et la mise en œuvre de la déclaration encadrent les efforts que nous devons tous faire au Canada pour renforcer notre culture, nos langues et nos familles.
    Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner à propos de ce projet de loi qui a beaucoup d'importance pour les Premières Nations de la Saskatchewan. Nous savons qu'il s'agit d'un travail difficile et qu'il faudra de nombreuses stratégies ainsi que des efforts concertés pour atteindre notre but. Nous vous implorons de reconnaître l'importance de ce projet de loi et de l'améliorer sans pour autant le retarder. La FSIN et bon nombre de nos conseils tribaux et de nos Premières Nations travaillent présentement à mettre en place leurs compétences et leurs lois sur les enfants et les familles.
    Nous ne pouvons plus attendre. Nos enfants méritent mieux que le statu quo. Nous espérons que ce projet de loi favorisera la reconnaissance continue de nos droits inhérents et issus de traités, de nos titres ancestraux et de notre compétence, dans les collaborations à venir. Nous savons que la seule façon de veiller à ce que nos collectivités soient saines et prospères est de veiller à ce que notre peuple puisse élever ses enfants dans le respect de notre histoire, de notre culture, de nos langues, de nos coutumes et de nos lois.
    Pour nous, les enfants ne sont pas des sujets ou des marchandises que l'on peut posséder comme s'ils étaient des biens. Ils sont un cadeau du Créateur. Il est de notre responsabilité sacrée de les protéger et de les élever. Il nous revient à nous, à notre peuple, de prendre soin de nos enfants en conformité avec nos lois, peu importe où ils vivent.
    Les enfants sont toujours pris en considération dans toutes les décisions. Cela était vrai même à l'époque des traités. Nos aînés voulaient s'assurer que tous nos enfants soient en santé et heureux, tant et aussi longtemps que brillera le soleil, que poussera l'herbe et que couleront les rivières.
    Madame la présidente, merci de nous avoir invités.
    Merci.
    La parole va maintenant à la représentante des Peter Ballantyne Child and Family Services.
    Madame Sayese, allez-y dès que vous êtes prête.
    Madame la présidente, Mme Sayese est venue avec moi pour répondre aux questions techniques, puisque je m'occupe depuis très peu de temps seulement de ce portefeuille. J'ai discuté avec elle, et elle a accepté de m'aider s'il y avait des questions techniques.
    Elle répondra aux questions.
    Elle répondra à toutes les questions difficiles.
    D'accord.
    Nous allons passer à la période de questions.
    La parole va à M. Dan Vandal.
    Avant toute chose, je veux vous remercier chaleureusement de vos exposés.
    Je vais citer directement un passage du projet de loi, puis je vais vous demander à tous les deux de formuler des commentaires.
    L'article 22 est, selon moi, le point essentiel du projet de loi. C'est dans cette disposition que l'on aborde le sujet très important de la prépondérance. Il indique que les lois des nations autochtones l'emportent sur les lois fédérales et provinciales.
    Je vais citer directement le projet de loi:
22 (1) Il est entendu que les dispositions relatives aux services à l’enfance et à la famille de tout texte législatif d’un groupe, d’une collectivité ou d’un peuple autochtones l’emportent sur les dispositions incompatibles relatives aux services à l’enfance et à la famille de toute loi provinciale ou de tout règlement pris en vertu d’une telle loi.
    Monsieur Watson, pouvez-vous faire un commentaire sur cette disposition?
    Je vous remercie, mon ami. Vous venez du Manitoba, n'est-ce pas?
    Oui, de la circonscription de Saint-Boniface—Saint-Vital
    Merci beaucoup, monsieur Vandal. J'ai été très heureux de vous rencontrer pendant le temps des Fêtes.
    Je crois que le message principal que nous voulons faire passer, c'est que nous avons toujours été en mesure, en tant que nations, de nous gouverner nous-mêmes. L'histoire l'atteste. Malheureusement, les gouvernements nous ont pris cette responsabilité, même si nous disons que nous avons cette capacité. Nous l'avons toujours eue. Malheureusement, trop souvent, on ne nous a pas laissé prendre les décisions concernant notre peuple et nos collectivités.
    Je crois que les temps ont changé. Nous avons toujours été prêts à accepter les responsabilités. Nous avons toujours voulu avoir cette possibilité.
    Si on nous donne cette possibilité, monsieur Vandal, nous allons agir, comme nous l'avons toujours fait, dans l'intérêt de notre peuple, et nos enfants sont tout aussi importants. Nous allons toujours agir dans leur intérêt et prendre les meilleures décisions pour eux.
    Tout ce dont nous avons besoin, mon ami, c'est qu'on nous donne l'occasion de gouverner et de diriger nos collectivités et notre peuple. Compte tenu de notre histoire et de nos connaissances, je suis certain que, si on nous accordait cela, nous pourrions gouverner notre peuple avec énormément de compétence.

  (1200)  

    Merci, monsieur Watson.
    Monsieur Daniels, voulez-vous faire des commentaires à propos de ce que je viens de lire?
    Bien sûr. Nous défendons depuis longtemps la capacité des Premières Nations à élaborer leurs propres lois qui seraient reconnues par les gouvernements provinciaux et fédéral. Nous nous sommes engagés depuis longtemps sur cette voie. Nous croyons que nous serons tout à fait en mesure de mettre en œuvre une stratégie ou un plan dans nos collectivités ou dans la région pour refléter nos valeurs communautaires.
    Je crois sincèrement que nous serons avantagés si le transfert des compétences se fait rapidement. Aucun peuple ni gouvernement n'accepte qu'on lui impose des lois. Lorsque cela arrive, les gens résistent. Il n'y a pas de coopération dans ce genre de relation. Cela ne fonctionne pas. Il faut prendre une approche axée sur la collectivité. Si vous reconnaissez réellement les lois et la compétence des Premières Nations, je crois que vous constaterez que les collectivités prendront bien mieux soin de leur bien-être, beaucoup plus que ne l'estiment les gens d'Ottawa ou du reste du Canada. Nous voulons veiller à ce que nos enfants et nos familles aient toutes les chances de leur côté. Vous le verrez sans doute, une fois que nous serons parvenus à une entente exhaustive sur la façon dont les collectivités ou les Premières Nations élaboreront leurs lois en matière de protection de l'enfance.
    Chef Daniels, combien y a-t-il d'organismes de protection de l'enfance dans votre région?
    Je crois qu'il y en a 14 dans le Sud.
    Combien de Premières Nations y a-t-il là-bas?
    Il y en a 34.
    Parlons un peu du processus d'élaboration en collaboration. Avez-vous participé à ce processus ou au processus de consultation?
    Nous avons eu des discussions. Je n'irais pas jusqu'à dire que nous avons été consultés, parce que je ne crois pas que les efforts déployés peuvent être considérés comme une consultation, mais nous avons eu une discussion. Nous sommes toujours proactifs, selon moi, pour ce qui est de participer aux discussions sur les politiques du moment.
    J'ai demandé aux représentants du bureau régional, quand nous avons discuté, comment allait être géré le financement accordé aux services à l'enfance et à la famille provenant de la province. Présentement, la province fournit 40 % du financement. Elle fournit 40 % du financement des services à l'enfance et à la famille, alors comment la réglementation fédérale est-elle censée l'emporter si le financement vient de la province? Si je soulève la question, c'est parce qu'elle concerne notre capacité de subvenir aux besoins de nos enfants. Pour nous, c'est une question de financement. Voilà ce qui me préoccupe, par rapport à la loi fédérale.
    Vous avez 34 Premières Nations et 14 organismes. Je tiens pour acquis, puisque vous êtes manifestement en faveur, que vos électeurs des Premières Nations le sont tout autant.
    Oui. Je peux dire sans avoir peur de me tromper qu'il y a suffisamment de Premières Nations dans le Sud du Manitoba qui veulent cela et qui soutiennent le projet de loi.
    Que pensez-vous...
    Je suis désolée, mais votre temps est écoulé.
    Peut-être que M. Waugh posera une question similaire. Nous devons continuer.
    Merci, madame la présidente. Merci à nos invités.
    Ce projet de loi est compliqué. Nous avons reçu des témoins du Manitoba, qui étaient assis où vous êtes, grand chef, qui détestaient viscéralement ce projet de loi. C'était la même chose pour notre province de la Saskatchewan, vice-chef Watson.
    Nous siégeons ici cinq heures par jour, et nous avons enfin des témoins qui aiment le projet de loi. C'est intéressant; le groupe de témoins précédent ne l'aimait pas du tout.
    Grand chef Daniels, vous avez dit que vous avez eu de la difficulté à trouver un terrain d'entente avec la province du Manitoba à propos des responsabilités traditionnelles. Vous en avez parlé dans votre déclaration préliminaire, alors vous devez avoir des préoccupations à propos de la disposition du projet de loi touchant l'accord de coordination, qui prévoit que le corps dirigeant autochtone doit négocier avec les provinces, et dans votre cas, ce sera avec la province du Manitoba. Y voyez-vous un problème?

  (1205)  

    Oui, bien sûr. Nous devons collaborer le plus possible. Lorsque ce n'est plus possible, nous devrons pouvoir passer à autre chose. Nous espérons que le gouvernement fédéral pourra intervenir dans ces circonstances. Voilà pourquoi j'ai demandé, longtemps avant que ce projet de loi soit présenté, comment le gouvernement fédéral réagirait si une province décidait qu'elle ne veut pas d'un accord au niveau fédéral.
    C'est une question qui me tient à cœur, et c'est pourquoi j'ai toujours collaboré avec la province pour essayer de trouver un accord qui nous permettrait d'atteindre notre but, c'est-à-dire faire reconnaître les stratégies communautaires et les lois autochtones. C'est notre objectif final, et nous avons besoin de fonds pour y arriver.
    Quand je dois travailler avec la province ou le gouvernement fédéral, j'insiste toujours sur le fait que nous sommes là pour participer aux discussions. C'est nous qui nommons les membres du conseil de la régie du Sud, l'organisme de réglementation actuel pour le Sud du Manitoba. C'est notre responsabilité de veiller à ce que nos partenaires — nos partenaires de traité — soient bien informés de ce qui se passe sur le terrain et agissent en conséquence. C'est ce que nous avons essayé de faire. Nous rencontrons très fréquemment les directeurs exécutifs et les administrateurs afin de recueillir leur opinion et pour assurer la communication entre eux et la régie du Sud. Nous voulons qu'il y ait une relation fonctionnelle.
    C'est essentiellement sur le terrain que cela est appliqué. Ensuite, nous devons composer avec la réglementation du gouvernement. Nous fournissons de l'information, pendant les discussions — comme je le fais présentement —, afin que les gens comprennent comment cela est mis en œuvre dans la réalité au Manitoba, dans le Sud du Manitoba. Voilà comment nous procédons.
    Nous sommes les seuls à participer à l'initiative des doulas, où nos femmes et nos doulas offrent du soutien aux familles. Présentement, de 200 à 300 mères obtiennent ce soutien dès la naissance d'un enfant. D'après ce que j'en sais, cette initiative a donné de très bons résultats et aura un effet positif sur les familles.
    J'ai visité votre site Web, et vous dites que votre processus de résolution des plaintes visant les services à l'enfance et à la famille couvre cinq régions. Je vous en félicite. Vous couvrez cinq régions.
    Je vais maintenant m'adresser au premier vice-chef Watson. Je crois avoir compris que vous venez d'être nommé à ce poste, malheureusement. J'imagine que Mme Sayese pourra vous aider.
    Nous avons parlé du paragraphe 14(1), qui concerne les soins préventifs. Vous avez abordé en profondeur le sujet de la prévention et avez mentionné six points. C'était le deuxième des six points. Je me demandais si ce qui était prévu en matière de soins préventifs était suffisant. Devrait-on ajouter quelque chose, selon vous? La disposition est plutôt brève, mais c'est probablement la plus importante, ou peut-être la deuxième en ordre d'importance, du projet de loi.
    Compte tenu de notre histoire, il y a toujours eu une certaine méfiance entre notre peuple et les gouvernements. Cela remonte à l'époque des pensionnats; l'agent des Indiens, le directeur du pensionnat et les organismes d'application de la loi étaient censés nous protéger, mais ils ne l'ont pas fait. Chaque pas en avant est accompagné d'un doute: fait-on ce qu'il y a de mieux pour nous?
    Certaines de nos collectivités doutent encore que ce soit la meilleure solution pour nous. Il y aura des collectivités qui seront très réticentes. Cependant, la plupart d'entre nous réalisons que, si nous voulons nous gouverner nous-mêmes, gouverner nos vies et notre avenir, nous devons commencer quelque part. Le mieux, c'est d'investir dans nos enfants.
    Nous voulons ramener nos enfants à la maison et les élever, comme toutes nos familles le font. Nous aimons nos petits-enfants. Nous voulons investir dans nos propres collectivités. Nous avons surmonté des obstacles énormes, comme les pensionnats... Nos grands-mères étaient prêtes, et je crois que nous le sommes aujourd'hui.

  (1210)  

    Madame Sayese, j'aimerais parler du placement familial de la Peter Ballantyne Cree Nation. Vous vous occupez d'une très grande région: Deschambault Lake, Pelican Narrows, Sandy Bay, Denare Beach, Sturgeon Landing.
    Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, j'aimerais savoir comment le placement familial... Je sais que votre organisme est situé à Prince Albert, mais vous vous occupez d'une très grande région.
    Je ne sais pas si vous avez consulté notre site Web ou si vous avez lu à propos de Peter Ballantyne Child and Family Services... Nous sommes une bande multicommunautaire. Cela nous cause des difficultés en matière de financement.
    Par rapport au placement familial, nous avons 17 foyers de transition. Nous avons parlé du manque de logement; donc, du manque de foyers d'accueil. Nous sommes probablement l'une des seules organisations en Saskatchewan qui dispose de 17 foyers de transition, y compris des foyers d'accueil d'urgence lorsque nous prenons des enfants en charge, dans nos plus grandes collectivités, comme Pelican Narrows... Nous avons deux foyers d'accueil d'urgence où nous pouvons placer des enfants. S'il n'y a pas de place... Nous avons des foyers traditionnels, dans la collectivité. Nous avons des foyers d'accueil, mais, compte tenu des politiques sur ces foyers, nous sommes très limités, parce que tous les foyers sont déjà surpeuplés. Les politiques du ministère des Services sociaux relatives au placement familial sont très contraignantes.
    C'est pour cette raison que nous avons nos propres foyers, pour que nos enfants restent avec nous. Nous avons des foyers d'accueil d'urgence et des foyers de pairs. Ceux-ci sont des foyers indépendants pour les adolescents qui approchent de la majorité. Nous avons des foyers pour les aider à développer des compétences essentielles qui les aideront lorsqu'ils devront s'installer avec d'autres membres de la collectivité ou vivre seuls. Nous offrons aussi un programme de six semaines dans un centre de bien-être familial où nous travaillons avec l'unité familiale avant de les renvoyer dans les foyers d'accueil.
    Nous déployons énormément d'efforts du côté des foyers d'accueil.
    Merci.
    La parole va maintenant à Mme Rachel Blaney.
    Merci beaucoup à chacun d'entre vous d'être ici.
    Comme vous avez probablement pu l'entendre dans ma dernière question, ma plus grande préoccupation concerne le financement durable dont vous avez vraiment besoin. Je vous remercie énormément, madame Sayese, des commentaires que vous venez de faire, parce qu'ils disent exactement de quoi vous avez besoin. Que faites-vous quand vous n'avez pas suffisamment de foyers ou qu'il y a trop de personnes dans un foyer, mais que vous voulez tout de même essayer de garder les enfants dans la collectivité afin qu'ils restent connectés à leur histoire et à leur famille? Ce sont des questions fondamentales, selon moi.
    Pourriez-vous faire des commentaires à propos du fait qu'il n'y a rien dans le projet de loi qui a trait au financement en particulier? Devrions-nous ajouter un objectif mesurable?
    Grand chef Daniels, j'aimerais que vous répondiez en premier.
    Même si nous pensons que ce serait bien qu'il y ait une disposition législative à cet égard, je pense qu'il est important que nous déterminions ce que signifie vraiment l'égalité réelle. L'égalité réelle pourrait en fait vouloir dire que vous financez beaucoup plus les Premières Nations que les collectivités non autochtones en raison de la situation d'inégalité dans laquelle se trouvent les Premières Nations depuis les 100 dernières années. Nous accusons un retard en ce qui a trait à nos possibilités et aux différents indicateurs de qualité de vie, de manière générale. Il nous faut des institutions comme celles qui assurent les services à l'enfance et à la famille, qui offrent de l'enseignement et des services dans d'autres secteurs; elles seraient un point d'ancrage en ce qui a trait à l'amélioration de la vie de nos citoyens.
    Il est important que nous définissions le niveau de financement lié au projet de loi, même si je ne voudrais pas le fixer, afin qu'il se poursuive... L'un des plus gros problèmes auxquels sont confrontés les parlementaires et les preneurs de décisions en ce qui a trait au financement, c'est que les fonds ne doivent pas nécessairement être les mêmes. Avec la mise en œuvre de ce projet de loi au cours des prochaines années, vous verrez qu'il y a certains secteurs où il pourrait être nécessaire d'accroître le financement. Certains secteurs n'ont peut-être pas besoin d'un financement aussi important. Tout dépend de la façon dont les choses se passent dans la collectivité.
    Je dirais que les bandes de Pauingassi, de la rivière Poplar et de Little Grand Rapids — le point zéro dans le Sud du Manitoba, pour tout le pays, en réalité —ont besoin de beaucoup plus de ressources que n'importe quelle autre collectivité. C'est vraiment en fonction de cela que j'ai essayé de me concentrer sur les services à l'enfance et à la famille et de les contextualiser, car on veut régler ces problèmes dans les sections les plus en difficulté. Dans ces cas-là, il faut plus de financement. Il faut beaucoup plus de financement et de soutien qu'il en faudrait dans d'autres secteurs.

  (1215)  

    Merci.
    Monsieur Watson, vous avez la parole.
    Tout à fait. Comme l'a dit le grand chef, certaines de nos collectivités nordiques, des collectivités très isolées, sont aux prises avec les mêmes problèmes que nous. J'ai vraiment l'impression que nous ne demandons pas beaucoup. Avec quelles ressources pouvons-nous faire notre travail adéquatement? Comment pouvons-nous assumer nos responsabilités? C'est ce que nous demandons.
    Il y a le coût de la vie. Nous avons tant de problèmes à résoudre et de facteurs à prendre en considération. Je crois que dans nombre de nos collectivités, nous agissons uniquement par amour pour nos enfants, afin de leur permettre de rester dans nos collectivités et d'éviter de se perdre en les quittant. Les enfants doivent avoir une bonne estime d'eux-mêmes. Je pense que bon nombre de nos organismes ne demandent pas beaucoup d'argent. Ils en demandent juste assez pour faire le travail adéquatement. C'est notre responsabilité. Comme je l'ai dit, si nous pouvons avoir les fonds nécessaires pour faire le travail comme il se doit, je pense que toutes nos nations en Saskatchewan et ailleurs s'en réjouiraient.
    Merci.
    Y a-t-il autre chose que vous aimeriez ajouter, madame Sayese, ou est-ce que tout a été dit? D'accord.
    Monsieur Watson, vous avez un peu parlé de quelque chose qui me préoccupe également, soit la définition de « l'intérêt de l'enfant ». À l'heure actuelle, l'expression a été définie par de nombreux tribunaux au pays. Bien des tribunaux ont défini ce que c'est. En ce qui a trait au projet de loi, si l'expression n'est pas définie plus clairement ou qu'on n'accorde pas à la nation le pouvoir de décider de l'intérêt de l'enfant, je crains simplement que ce soit interprété de la mauvaise manière, et que l'on voie, encore une fois, ces systèmes coloniaux imposer leur définition aux collectivités à l'échelle du pays.
    Pourriez-vous nous parler un peu de cette préoccupation?
    Encore une fois, comme le grand chef et moi-même l'avons dit plus tôt, nous agissons toujours dans l'intérêt de nos enfants. Certains défis nous attendent, c'est certain, mais je pense réellement que, au bout du compte, tout est une question de collaboration. Il a fallu du travail pour que le projet de loi en arrive à sa forme actuelle. Toutes les parties ont dû faire preuve de compréhension. Je pense vraiment que, dans tout ce que nous ferons à l'avenir, tant que nous donnons la possibilité aux Premières Nations de prendre des décisions qui ont une incidence sur leurs vies et sur la vie de leurs enfants, il n'y a rien que nous ne pouvons pas surmonter ici.
    Il ne faut pas oublier que le gouvernement doit comprendre que nous avons la capacité non seulement de prendre des décisions, mais aussi — fait plus important — de nous occuper adéquatement de nos enfants. Il faut nous éloigner de cette philosophie colonialiste. Nous sommes capables. Dans chacune de nos Premières Nations à l'échelle du Canada, nous avons la capacité de faire des choses si on nous le permet. J'espère certainement que le projet de loi C-92 nous en donnera la capacité.
    Merci.
    Nous allons maintenant céder la parole au député Robert-Falcon Ouellette.
    Je vous remercie tous de votre témoignage.
    Je me demande si vous pourriez discuter un peu de ce qui, selon moi, serait un changement plutôt important. Ma question gravitera peut-être autour de l'idée d'avoir des territoires ou des nations visés par des traités et non seulement des collectivités qui exercent leur autorité, leur compétence et leur droit à l'autodétermination. De quelle manière les organisations et les collectivités autochtones pourraient-elles unir leurs efforts pour adopter leurs propres lois? Ces institutions existent-elles déjà? Je sais que le Traité no 4 vise un territoire particulier. Les choses se feront-elles en fonction de groupes linguistiques ou culturels? Sera-t-il uniquement question des Dakotas, des Cris ou des Oji-Cris?
    Vous pourriez peut-être nous parler un peu de cela et de votre vision à cet égard.
    Dans le Sud du Manitoba, nous avons fait face à ce défi, en ce qui a trait non seulement aux services à l'enfance et à la famille, mais aussi à de nombreux secteurs différents, dans le cadre des discussions concernant le Traité no 1, le Traité no 2, la gouvernance des Dakotas, le Traité no 5 et les Traités nos 3 et 4 établis depuis longtemps.
    Ce qui unit nombre d'entre nous dans le Sud du Manitoba, c'est que nous sommes tous issus du peuple Anishinabe. Nous avons le peuple Dakota. En réalité, il n'y a que deux nations lorsqu'on y pense, mais nous aimons négocier avec le Canada en fonction des traités, car en réalité, nous devons rappeler au Canada et aux Canadiens que nous n'avons jamais cédé notre compétence. Aucune personne sensée ne ferait cela ou ne céderait son titre de propriété de la terre.
    En ce qui a trait à notre relation de gouvernement à gouvernement, nous voulons créer le cadre au moyen d'un traité reconnu à l'échelle internationale. C'est notre manière d'aborder ces choses.
    Ce que nous avons fait dans le Sud du Manitoba, et ce que nous ferons selon moi, c'est de reconnaître la inaakonigewin, le droit anishinabe, et plus tard, le droit de la nation Dakota. Ces mesures seront prises à l'échelle de la collectivité. Nous prendrons ces mesures à l'échelle du conseil tribal et à l'échelle du traité. Nos travaux visent à établir des lois à l'échelle de la SCO.
    L'élaboration est fondée sur l'harmonisation de toutes ces lois. Ces lois fondamentales viennent de la collectivité; il faut donc procéder collectivité par collectivité. Toutefois, à titre de législateur ou d'organisme de réglementation qui souhaite garantir la protection des enfants autochtones et le soutien des familles, nous devons procéder collectivité par collectivité. Lorsqu'il est possible d'adopter une loi ou de conclure une entente à l'échelon régional, nous devrions le faire, et par la suite, prendre plus de mesures à un échelon supérieur.
    C'est la même méthode qu'emploierait le Canada pour essayer d'harmoniser les lois de l'Alberta avec celles du Québec. Les cultures sont très diversifiées, mais il faut trouver un moyen de toutes les soutenir, de respecter les ambitions et les intérêts de tous. C'est ce que nous faisons dans le Sud du Manitoba.

  (1220)  

    Entrevoyez-vous la possibilité d'avoir une assemblée législative à un moment donné?
    Ce sont les chefs qui prennent les décisions. La façon dont nous sommes organisés est très semblable. À la SCO, il y a un directeur des familles et un chef des familles. Nous faisons la même chose pour le domaine de la santé. Notre structure favorise ce genre de choses, mais nous voulons soutenir le gouvernement visé par le traité également. Nous voulons soutenir ses priorités, sa vision et sa stratégie, et inclure cela dans le cadre de nos activités.
    Il y a différentes interprétations à cet égard, mais je pense que notre orientation est sensiblement la même. En réalité, tout cela se résume à la compétence à l'échelle de la collectivité. C'est de cela qu'il s'agit.
    Supposons que vous avez la pleine compétence et que vous l'exercez en vertu de la Constitution. Disons qu'il y a un cas où, après que vous avez adopté toutes vos lois, une personne conteste une décision. Elle ne pense pas que son enfant aurait dû lui être enlevé pour quelque raison que ce soit. Pensez-vous que vous mettriez sur pied votre propre mécanisme de règlement des différends, votre propre système judiciaire dans ce cadre?
    Les autres souhaitent peut-être répondre.
    Nous avons un programme de justice réparatrice à la SCO; il y a donc des comités de justice réparatrice au sein des collectivités. En fait, je m'en vais à la conférence sur la justice autochtone immédiatement après la séance, et nous allons parler de la Southern Chiefs' Organization et du travail que nous faisons au chapitre de la justice réparatrice de même que de la médiation.
    Qu'est-ce que j'entrevois en matière de systèmes judiciaires? Nous recréons un tout nouveau système judiciaire autochtone qui peut résoudre ce genre de problèmes, car les systèmes de justice coloniaux du Canada ne devraient pas décider de ce qui est dans l'intérêt de nos collectivités ou de nos familles. Ce sont nos gens qui doivent prendre ces décisions.
    Si on regarde les différents exemples à l'échelle mondiale, on voit que les peuples autochtones ont toujours misé sur l'harmonie au sein de la collectivité, pas forcément sur le fait de punir les gens. En procédant ainsi, on fait en sorte que ceux qui commettent des crimes comprennent beaucoup mieux les répercussions de leurs actes sur la collectivité. La collectivité accepte beaucoup mieux ces gens qui ont pris ces décisions et travaille avec eux.
    Aimeriez-vous répondre à la question, monsieur Watson?
    Tout à fait. Je pense que nous avons 74 Premières Nations en Saskatchewan. Nous réunissons nos chefs en conseil quatre fois par année et nous suivons leurs directives. Ils suivent les directives de leurs membres. Je pense que c'est ce que nous faisons dans bien des cas.
    Nous avons un défenseur des droits des Premières Nations, et lorsque nous suivons ces processus, nous comprenons qu'ils ne sont pas parfaits, mais nous agissons toujours dans l'intérêt de nos enfants. Cela suppose parfois de prendre des décisions difficiles, mais nous le faisons. Nous agirons toujours dans l'intérêt de nos enfants qui ont besoin de ces conseils et de cette protection, et nous croyons que nos organismes assurent cela à l'heure actuelle.
    Comme je l'ai dit, nous allons continuer de nous améliorer. Nous ne sommes pas parfaits, mais nous progressons. Je dirais que la chose la plus importante, c'est qu'on nous permette de nous occuper de nos propres enfants et de les garder au sein de nos collectivités. Je pense que c'est essentiel.

  (1225)  

    Ce message fort met fin à notre discussion avec ce groupe de témoins.
    Merci beaucoup d'être venus. Vos commentaires feront partie du compte rendu officiel. Si vous avez des mémoires, nous les prendrons également. Vous pouvez les remettre au greffier ou les transmettre en ligne.
    Meegwetch. Merci.
    Nous allons suspendre la séance, car un autre groupe de témoins prendra place.

  (1225)  


  (1230)  

    Nous allons reprendre.
    Nous avons deux témoins, qui comparaissent par vidéoconférence. Je suis ravie de vous voir. J'espère que le son fonctionne et que nous sommes prêts à commencer.
    Nous sommes ici à Ottawa sur le territoire non cédé du peuple algonquin. Tous les Canadiens ont pour objectif de réfléchir à leur histoire, qu'ils fassent partie d'une nation de colons ou d'un peuple autochtone qui était ici en premier. Le Canada vient d'entamer un processus de vérité et de réconciliation.
    Nous parlons d'un sujet important, soit la façon dont le Canada traite les enfants autochtones. Le système fonctionne-t-il? D'après nos statistiques, des changements majeurs doivent être apportés.
    Nous sommes impatients d'entendre vos commentaires et vos conseils. Vous disposerez chacun de 10 minutes, puis nous laisserons la chance aux députés de poser des questions.
    Nous allons commencer par Lyle Thomas et Bernie Charlie.
    [Le témoin s'exprime en secwepemctsin.]
     [Traduction]
    Je suis membre de la bande indienne de Neskonlith, mais j'habite avec mon épouse, qui vient de la tribu Secwépemc de Kamloops. Nous avons cinq enfants et un petit-fils. Je travaille pour la Secwépemc Child and Family Services Agency. Mon titre au sein de l'organisme est celui de « travailleur culturel ». Nous sommes des parents-substitus pour l'organisme et, actuellement, deux petites filles font partie de notre famille.
     Je suis honoré et reconnaissant de pouvoir, au nom de l'organisme, vous faire part d'une petite partie des réflexions sur le nouveau projet de loi C-92. Toutefois, avant de commencer, je voudrais reconnaître que la procédure en cours a lieu sur le territoire non cédé du peuple algonquin. Je voudrais le remercier de me donner la possibilité de communiquer mes sentiments et mes réflexions en ce qui concerne les enfants et les familles que nous servons.
    À la lecture du projet de loi C-92, voici la première question que je me suis posée: quelle est son incidence sur les familles et sur la culture de ces familles dans leur ensemble? Oui, le projet de loi C-92 se concentre sur les enfants qui pourraient être placés chez un membre de la famille élargie ou chez des membres de leur collectivité. Toutefois, ce qui est le plus important, c'est la façon dont il permet aux membres de la famille de rester en contact.
    Dans le cas des enfants, la principale chose qu'ils veulent, c'est être avec leurs parents. Compte tenu de ces réflexions et de ces sentiments concernant le fait de renouer les liens, ces mesures doivent aller au-delà des enfants et faire participer leurs parents. Elles devraient leur permettre de grandir ensemble, d'apprendre et de renouer leurs liens. Cet amour existera toujours entre un enfant et ses parents, et ils trouveront leurs racines en se souvenant de qui ils sont.
     Il est emballant de constater que, par l'adoption du projet de loi C-92, le gouvernement reconnaît toute l'importance du fait pour les gens d'être ancrés et d'avoir un sentiment d'appartenance et d'identité. Cependant, il y a aussi des moments où il faut se rappeler que ces enfants pourraient se trouver dans une autre nation ou sur un autre territoire et être en train d'apprendre le mode de vie et les traditions de cette nation. Peut-être qu'un élément du passé des parents les a amenés à déménager dans une autre nation, à s'éloigner afin de protéger les enfants qu'ils aiment contre leur propre nation, leur propre réserve, leur propre peuple. Dans l'intérêt des enfants, ils pourraient être placés auprès de parents-substituts de ces nations hôtes, qui les traitent et les aiment comme leurs propres enfants. Ils ont un lien avec la famille, mais, surtout, ils offrent un enseignement à l'enfant dans leur maison avec les mêmes valeurs, le même amour et le même respect que toutes les nations.
    Le projet de loi C-92 est peut-être aussi fort que le libellé des garanties prévues dans l'ancienne loi, selon laquelle les familles auront la possibilité de rester en contact tout au long de toute interaction avec les services d'aide à l'enfance et d'aide sociale.
    Je voudrais vous remercier de m'avoir accordé un bref moment pour prendre la parole. Je voudrais maintenant la céder à ma collègue.

  (1235)  

    [La témoin s'exprime en wet'suwet'en ainsi qu'il suit:]
    Hadih so’endzin? Siy Bernie Charlie sjutnee.
    [Les propos de la témoin sont traduits ainsi:]
    Bonjour, comment allez-vous? Je m’appelle Bernie Charlie.
     [Traduction]
    Je me suis présentée à vous dans ma langue, qui est le porteur.
     Je m'appelle Bernie Charlie. Je suis une fière matriarche en formation de la nation Carrier. Je suis la benjamine des neuf enfants de ma mère, Dil-za Dza-kiy, Violet Charlie, qui porte ce nom de chef héréditaire qu'elle a acquis par le système de gouvernance traditionnelle de mon peuple, qu'on appelle le bah'lats, aussi communément appelé le potlatch.
    Je veux rendre hommage à mon regretté père, Ben Charlie Sr., qui a traversé jusqu'au monde des esprits afin de veiller sur nous avec nos ancêtres.
     Dans notre bah'lats, nous avons quatre clans: le Jihl tse yu, c'est-à-dire le clan de la grenouille; le Likh ji bu, le clan de l'ours; le Gilhanten, le clan du caribou; et... Désolée, je n'arrive pas à lire ma propre écriture.
     Quoi qu'il en soit, je siège au Likj ji bu, le clan de l'ours de mon peuple, et mon regretté père appartenait au Gilhanten, le clan du caribou. Dans notre bah'lats, les enfants appartiennent de naissance au clan de leur mère. Avant le contact, c'étaient les matriarches, les mères, les grands-mères et la famille élargie qui prenaient les décisions pour le peuple relativement à la gouvernance politique, sociale et économique des collectivités. Les bah'lats sont encore très vivants au sein de notre nation. Ma collectivité d'origine, c'est-à-dire la nation de Lake Babine, est statistiquement la troisième plus grande bande de la Colombie-Britannique.
    Je veux reconnaître la terre natale ancestrale non cédée des Tk'emlúps te Secwépemc, où j'ai le privilège de travailler, de vivre et de jouer. J'ai beaucoup de chance d'avoir une famille d'adoption sur ce beau territoire du peuple Secwépemc. J'ai tout un réseau de parents d'adoption et de membres de la famille élargie au sein duquel je trouve du réconfort quand j'ai besoin de soutien dans ma vie.
     Je suis la mère de deux beaux enfants et la mère adoptive de plusieurs autres, qui me désignent comme une guide, une mentore et une protectrice pour eux. Je suis également une kyé7e, la grand-mère biologique d'une belle petite fille et la grand-mère de plusieurs autres qui me désignent comme telle dans nos coutumes culturelles.
    Comme j'étais la benjamine de la famille, mes frères et sœurs disaient que j'étais gâtée. Toutefois, je me rappelle que les multiples cousins qui ont vécu chez nous pendant une grande partie de ma jeunesse étaient souvent nourris les premiers, recevaient de nouveaux draps et se faisaient souvent acheter de nouveaux vêtements, contrairement aux vêtements recyclés parmi lesquels j'étais la première à pouvoir choisir. À cette époque, je ne rendais pas compte qu'il s'agissait d'enfants adoptifs et qu'ils avaient été confiés à notre famille parce qu'ils avaient été victimes de violence ou de négligence dans leur propre maison, plus loin sur la rue, dans notre réserve.
    Mes souvenirs d'enfance comprennent la vie dans une maison de quatre chambres subventionnée par la SCHL et surpeuplée où vivaient plusieurs générations, y compris ma xpé7e âgée, sourde et aveugle, mon grand-père, mes parents, mes frères et sœurs et mes cousins. À un certain moment, 13 personnes vivaient dans notre maison à quatre chambres. Mes parents s'assuraient que nous étions toujours nourris, que nous étions propres et que nous fréquentions l'école catholique locale. Quand mes frères et sœurs aînés ont terminé l'école primaire, ils ont été envoyés au pensionnat catholique, qui était situé à près de 300 kilomètres de chez nous.
     Il fallait que je vous raconte cette petite partie de mon histoire et que je vous explique en quoi elle est liée à l'étude préalable du projet de loi C-92.

  (1240)  

    Mon travail aux premières lignes en tant que travailleuse sociale spécialiste des ressources pour la Secwépemc Child and Family Services Agency m'a procuré une excellente expérience directe pour ce qui est de communiquer une partie de mon apprentissage. J'adopte une approche entièrement axée sur les relations du point de vue d'une travailleuse sociale de niveau C6, ce qui signifie simplement que j'ai le pouvoir et l'obligation de retirer un enfant d'un environnement dangereux.
    J'ai pris des notes concernant des éléments qui pourraient être pris en considération, et je les passerai simplement en revue dans l'ordre dans lequel ils figurent dans le document.
    En ce qui concerne le principe de l'intérêt de l'enfant, dans le passé, les enfants étaient élevés dans des systèmes familiaux communaux, où toute la famille élargie assumait la responsabilité de prendre soin des enfants: les parents, les tantes et les oncles, les grands-parents et d'autres membres de la communauté.
    Actuellement, sous le régime de la loi provinciale, l'accent est principalement mis sur l'enfant lui-même. Il s'agit de la pratique dans le milieu de l'aide sociale à l'enfance. En raison du grand nombre d'enfants autochtones pris en charge, il a été prouvé que ce processus ne fonctionne pas.
    Dorénavant, il faudra mettre l'accent sur l'unité familiale: la famille et la famille élargie qui s'occupent des enfants et subviennent à leurs besoins. Ce qui est le mieux pour les familles et pour les communautés sera toujours ce qui est le mieux pour les enfants.
    En ce qui concerne l'intérêt de l'enfant autochtone, puis-je proposer que le paragraphe 10(1) soit ainsi libellé: « l'intérêt de la famille est une considération primordiale »?
    Les capacités sont un autre thème, c'est-à-dire qu'il faut jeter les bases pour que les enfants soient chez eux et qu'ils y restent, en période de crise, et investir dans le rétablissement de ce qui a été perdu. Ainsi, les communautés reprendront vie et s'occuperont des familles naturellement.
    Parmi les autres facteurs en prendre en considération, en ce qui a trait à l'éducation culturelle, linguistique, religieuse et spirituelle et au patrimoine de l'enfant, ou à l'absence de ces éléments, des segments de la population urbaine, surtout en Colombie-Britannique, ont constaté qu'en raison de multiples facteurs tels que...
    Désolée. Veuillez conclure rapidement, car nous avons dépassé le temps qui nous était alloué.
    Merci.
    D'accord.
    En conclusion, je vous remercie de cette possibilité de vous faire part de mes réflexions au sujet du projet de loi C-92.
    Merci.
    Nous aurons l'occasion de lire votre mémoire. Vous nous le soumettrez en ligne, probablement, ou bien par l'entremise du greffier.
    Nous vous poserons des questions très bientôt, après que nous aurons entendu le témoignage de la chef Judy Wilson.
    Bonjour, madame Wilson. Bienvenue au Comité. Merci. Je pense que c'est encore le matin sur votre territoire, alors je vous remercie infiniment de votre participation.
    Dès que vous êtes prête, vous disposez d'une période allant jusqu'à 10 minutes.

  (1245)  

    [Le témoin s'exprime en secwepemctsin.]
     [Traduction]
    Je reconnais et honore les terres non cédées des peuples du territoire algonquin, où la procédure en cours a lieu.
    Je suis de la nation Secwépemc, l'une des plus grandes de l'intérieur de la Colombie-Britannique. Je suis membre du comité de direction de l'Union of British-Columbia Indian Chiefs. Nous travaillons à la mise en œuvre, à l'exercice et à la reconnaissance de notre titre inhérent et de nos droits conférés par les traités. Notre groupe participe avec les gouvernements provincial et fédéral à des travaux et à des efforts de défense des droits visant à faire reconnaître et à affirmer notre compétence inhérente sur nos enfants, depuis de nombreuses décennies.
    Il importe que le travail de promotion des politiques et des lois visant nos enfants soit une priorité pour les Premières Nations de la Colombie-Britannique, de même que pour l'Union of British-Columbia Indian Chiefs. Je suis également membre du Conseil des leaders des Premières Nations de la Colombie-Britannique. Nous sommes constitués du Sommet des Premières Nations, de l'Union of British-Columbia Indian Chiefs et de l'Assemblée des Premières Nations de la Colombie-Britannique. Nos trois organisations travaillent en collaboration et réalisent leur mandat politique respectif pour parler d'une voix collective, unifiée et ferme en Colombie-Britannique. Les enfants et les jeunes ont toujours été l'un de ces enjeux.
     Tout a commencé en 2002, avec l'accord des Tsawwassen — tout cela figurera dans le mémoire que nous vous avons soumis — ainsi que l'accord de leadership élaboré en 2005. Nous travaillons à l'obtention de ces résultats et de ces changements pour nos enfants. Le projet de loi C-92 offre un progrès pratique et significatif qui correspond au travail que nous faisons ici, en Colombie-Britannique.
    Ce projet de loi est d'une importance primordiale et arrive à un moment critique. Même si nous avons apporté certaines modifications aux lois de notre province, en ce qui concerne les enfants et les familles, nous constatons que nous sommes encore pris dans un grand nombre des vieux modèles. La seule chose que nous avons pu faire a été d'avoir recours à des organismes mandataires pendant de nombreuses années. En réalité, ces organismes étaient censés être une transition vers la pleine compétence pour nos nations.
    Nous sommes coincés dans ce processus. Nous devons poursuivre ce travail jusqu'à l'affirmation et à la reconnaissance de nos droits et titres inhérents, surtout en ce qui concerne nos enfants. Il faut que nous changions, car, partout au Canada, les enfants autochtones sont surreprésentés dans le système. Le premier contact avec les colons et les lois coloniales ont eu une incidence sur nos familles et les ont brisées, par l'intermédiaire des pensionnats. Cela a été documenté dans le cadre de toutes les diverses commissions et audiences qui ont eu lieu au Canada.
    Il faut que nous apportions ce changement. Nos familles sont fracturées, et nous devons les ressouder afin que ce changement significatif ait lieu dans la vie des enfants et que nous puissions les ramener chez eux.
    Au sein de notre collectivité, nous avons récemment ramené 20 enfants chez eux, mais cela a nécessité beaucoup d'efforts et une lutte importante. Nous avons tenu un événement pour rendre hommage à nos enfants et leur exprimer notre reconnaissance. Notre nation en a également tenu un, il y a environ un mois, à Vancouver, où de nombreuses familles ont été réunies avec leurs enfants. Ce n'est que le commencement du travail. Il faudra en faire beaucoup plus pour ramener nos enfants et vraiment les faire renouer avec leur identité, sur leurs terres, au sein de leurs familles et de leurs communautés. Il faut que nous apportions ce changement significatif pour nos enfants et nos familles.
    L'un des objectifs fondamentaux du projet de loi doit être la mise en œuvre de la déclaration des Nations unies. Il s'agit véritablement d'un cadre pour la réconciliation, et son adoption a été recommandée par la Commission de vérité et de réconciliation. Pourtant, les dispositions prévues à l'article 8 du projet de loi ne mentionnent pas cette déclaration comme étant le contexte de la réconciliation en ce qui a trait à l'aide sociale à l'enfance. La seule mention figure dans le préambule, et il n'en est pas question dans l'article 8, lequel est d'une importance cruciale et expose l'objet et les principes de la loi. Cela doit changer.
     Je le souligne aussi parce que la déclaration des Nations unies reflète les normes minimales pour la survie et la dignité de nos peuples autochtones. Elle établit les normes minimales en matière de droits de la personne. Il s'agit d'une disposition importante sur laquelle il faudra mettre l'accent dans le cadre de la mise en œuvre du projet de loi C-92, une fois qu'il aura été adopté. L'article 22 est axé sur l'importance du respect des droits des filles et des femmes et du fait de s'assurer qu'elles ne sont pas victimes de discrimination. Voilà pourquoi je vous exhorte à envisager d'apporter un amendement à l'article 8 du projet de loi C-92 par l'ajout d'un alinéa c) ainsi libellé: « de mettre en œuvre la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones en tant que cadre progressif pour le règlement des problèmes liés aux droits de la personne touchant les enfants, les jeunes et les familles. »

  (1250)  

    L'une des autres choses que je voulais souligner, c'est qu'il s'agit d'un moment historique et transformationnel pour le Canada et pour les Autochtones de partout au pays. Nous ne pouvons pas les laisser nous glisser entre les doigts. Si nous retournions dans le temps à l'époque où les changements ont été apportés aux lois régissant la politique sur les pensionnats, par exemple, si nous avions apporté cette modification, combien de familles n'auraient pas eu à vivre toute cette expérience des pensionnats? Nous affirmons que, grâce à ce projet de loi sur les enfants et les familles, nous avons l'occasion d'apporter ces changements, de faire cesser la prise en charge de nombreux enfants et de les réunir avec leur communauté et leur famille.
    Ce changement significatif doit avoir lieu, car davantage d'enfants sont maintenant pris en charge par ce système d'aide sociale à l'enfance qu'à l'apogée du régime des pensionnats. Ce nombre continue d'augmenter. L'ancienne ministre Philpott a mentionné qu'il s'agissait d'une crise humanitaire, et c'est vraiment le cas, alors nous ne pouvons pas rester assis sans rien faire. Nous devons continuer à exercer des pressions afin que soient apportés ces changements à venir. Nous le faisons devant les tribunaux ainsi qu'à d'autres endroits, mais, maintenant, nous avons la possibilité de le faire au moyen d'un projet de loi.
    Cela fait maintenant environ quatre ans que la Commission de vérité et de réconciliation a publié son rapport final exhortant le Canada à régler le problème des pensionnats et du système d'aide sociale à l'enfance et à soutenir les langues. Nous sommes sur ce seuil, et nous devons être en mesure de poursuivre ce travail sans que s'écoule une autre année.
    Le projet de loi C-92 prévoit un moyen par lequel nous pourrons commencer à prendre des mesures à l'égard de certaines de ces demandes. Je pense que la base... les familles, les collectivités et nos systèmes judiciaires sont vraiment importants. Comme je l'ai mentionné, depuis son établissement, cette loi coloniale a rompu ce lien. Elle était conçue pour assimiler notre peuple dans le système, et le résultat a été le retrait de nos enfants et la perturbation de nos systèmes familiaux.
    L'autre volet est celui du financement. Le projet de loi C-92 doit inclure le financement. Nous ne pouvons pas seulement compter sur les ententes de coordination qui déterminent les ressources nécessaires à cette reconstruction. Compte tenu de l'incidence du colonialisme, il importe que le Canada joigne également le financement à ce processus afin que nous n'ayons pas à dépendre, comme Mme Charlie l'a mentionné plus tôt, du point de vue occidental concernant l'intérêt de l'enfant. Il importe réellement que l'on tienne compte de l'intérêt collectif, pas seulement celui de l'enfant, mais celui des familles également. On a tenté de mettre fin à la transmission de notre culture, de nos cérémonies, de notre langue et de nos lois, mais nous pourrons renverser la vapeur afin d'accroître l'autonomie des enfants, des familles et des collectivités et de leur permettre de guérir et de se reconstruire. Il est vraiment important que nous puissions rétablir nos familles, nos collectivités, nos nations.
    La nation Secwépemc effectue une grande part de ce travail dans l'exercice de sa compétence à l'égard de l'enfance et de la famille. On l'appelle Stsmémelt. Nous travaillons avec les Secwépemc Child and Family Services et le Conseil tribal de la Nation Shuswap dans le cadre de cette reconstruction. C'est beaucoup de travail, et il faut que des ressources soient fournies.
    Cette approche n'a pas duré, car notre peuple était résilient et y a survécu. Je me tiens devant vous aujourd'hui malgré les dommages que les lois coloniales ont causés. Nous allons continuer à rétablir notre peuple, nos enfants et nos familles. Le Canada a l'obligation de réparer ces torts qui ont eu des conséquences sur un très grand nombre de nos familles et enfants partout au pays. Nous devons vraiment ramener nos enfants chez eux afin qu'ils puissent être élevés au sein de nos collectivités par nos propres gens et savoir qu'ils pourront établir des liens avec leur communauté, leur langue et leurs lois.
    Je voulais aborder un autre aspect. Je reconnais et soutiens un grand nombre des nations à qui le projet de loi pose des problèmes, car chaque nation a le droit à l'autodétermination au titre de l'article 3 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Si elles souhaitent promulguer leurs propres lois, elles ont tout simplement besoin de la reconnaissance nécessaire, qu'elle soit conférée par leurs traités ou inhérente; elles ont le libre choix de faire cela par elle-même. Le projet de loi doit trouver un moyen de respecter ce droit, sans quoi, encore une fois, ce sera la voie du colonialisme, et nous ne voulons pas l'emprunter.

  (1255)  

     Nous voulons être en mesure de respecter les nations qui prennent leurs propres décisions pour elles-mêmes et qui ne dépendent pas des lois du Canada pour le faire. C'est leur choix, si elles ne veulent pas reconnaître le projet de loi. En Colombie-Britannique, nous avons un mandat. Nos chefs ont déjà établi le mandat consistant à travailler à l'aide du projet de loi C-92. Il s'agit d'un texte de loi fédéral. Il prévoit l'affirmation des droits inhérents de nos enfants et ne dépend pas de ces lois coloniales.
    Nous allons soumettre notre mémoire. Encore une fois, je vous remercie de nous avoir accordé du temps pour discuter de ces enjeux avec vous. J'ai hâte aux questions que vous pourriez me poser.
    Merci, chef.
    Notre première série de questions commence maintenant, et la parole est Mme Fry.
    Merci infiniment de vos exposés.
    Je dois dire, madame Charlie, que la période que vous avez passée à parler de votre culture et de comment vous avez grandi, etc., nous rappelle vraiment le fait que, ce dont il est question, c'est la perte de la culture d'un peuple et des enfants retirés et envoyés vers des foyers d'accueil non autochtones.
    Il y a deux ou trois éléments. La plupart des personnes que nous avons entendues sont favorables au projet de loi, mais elles voulaient discuter de certains aspects. En voici un au sujet duquel je voudrais connaître votre avis: madame Charlie, je pense que vous avez soulevé un élément très important au sujet de l'intérêt collectif, pas seulement l'intérêt de l'enfant, mais celui des familles et de la collectivité, et de toute cette capacité de ramener les nations à leur situation d'autrefois. Comme vous l'avez dit, l'interprétation de ce qu'est l'intérêt de l'enfant du point de vue colonial occidental est très différente.
    En Colombie-Britannique, on nous a dit — et de nombreux bureaucrates provinciaux qui souhaitent rester dans l'anonymat me l'ont affirmé — qu'un plus grand nombre d'enfants sont retirés aujourd'hui et depuis 30 ans qu'à l'époque des pensionnats. Ils ont été enlevés à leurs familles et placés dans des foyers d'accueil non autochtones. Selon vous, comment cela se passe-t-il dans le cas des enfants autochtones vivant en milieu urbain? Je pense qu'il s'agit de l'élément clé.
    Dans les réserves, il est facile de renouer avec la famille. Toutefois, lorsqu'une personne a été envoyée dans une région urbaine et qu'elle est très loin de sa famille — et, bien souvent, ces personnes fuient la violence au sein de la famille elle-même —, comment envisagez-vous ce retour dans la collectivité, afin que vous puissiez protéger l'enfant, tout en tentant de le réunir avec la famille? Voilà la première question. La deuxième est la suivante: s'il est impossible de le faire, comment envisagez-vous le rôle des centres d'amitié ou des bandes voisines, qui pourraient assumer ce rôle consistant à ramener l'enfant? Considérez-vous qu'il s'agit d'une possibilité? Selon vous, devrait-on financer cette capacité afin d'aider les bandes voisines à ramener les enfants au sein de leur bande, même s'ils ne peuvent pas retourner dans leur bande initiale?
    Ce sont d'excellentes questions, et je suis heureuse d'y répondre.
    En ce qui concerne votre question au sujet des populations urbaines et les taux élevés d'enfants et de jeunes pris en charge dans nos centres urbains, je pense que la toute première solution à ce problème, c'est que nous devons cerner avec eux les personnes qui constituent leur réseau de soutien. Il pourrait s'agir de leurs voisins, d'un ami en qui ils ont confiance, des travailleurs de soutien à leur école, voire les... je ne sais pas, ils pourraient désigner diverses personnes. Tout récemment, j'ai entendu un de mes collègues poser la question suivante: « Qui sont les premières personnes avec qui tu établis des liens sur les médias sociaux? » Actuellement, il s'agit du principal mode de communication de nos enfants et de nos jeunes et aussi de la société dans son ensemble, en général. Je dirais qu'il faut établir et définir leurs réseaux.
    En ce qui concerne votre deuxième question, pourriez-vous peut-être l'expliquer à nouveau?

  (1300)  

    Ma question concernait, par exemple, les régions urbaines, dans les cas où la famille a déménagé en ville — parce qu'il y a un grand nombre de familles visées — et que les enfants ne peuvent pas retourner dans la collectivité initiale parce qu'il y a eu de la violence familiale ou un événement de ce genre au sein de cette collectivité. Ces enfants pourraient-ils aller dans une bande voisine de ce secteur urbain, laquelle pourrait les prendre en charge? Comment ce processus se déroulerait-il, et quel rôle les centres d'amitié auront-ils à jouer pour s'assurer que cela se produise, le cas échéant?
    À ce sujet, ici, aux Secwépemc Child and Family Services, nous intervenons auprès d'une population urbaine qui s'étend à l'ensemble du Canada. Nous accueillons ces gens et nous nous occupons de leur quête de retour au bercail.
    Pour ce qui est des capacités et du financement, une fois qu'ils ont désigné leur communauté d'appartenance, M. Thomas est notre travailleur de soutien culturel qui intervient auprès des enfants et les aide à recenser leurs relations. Nous entretenons des liens avec les centres d'amitié parce qu'ils s'occupent des mêmes populations.
    Selon moi, en ce qui concerne le financement, il faut commencer par en attribuer aux programmes et services de prévention; c'est la clé en ce qui a trait au travail auprès de nos enfants et familles autochtones vivant en milieu urbain.
    Merci beaucoup.
    Nous passons à Mme McLeod.
    Je vous remercie, madame la présidente, et merci aux deux groupes de témoins. Bien entendu, je voudrais être chez moi, dans la belle Colombie-Britannique, avec vous, à profiter de nos superbes conditions météorologiques.
    Je vais commencer par la chef Judy Wilson. Je pense que ce sera utile, car la Colombie-Britannique est un endroit un peu différent de certaines des autres provinces. Dans bien des cas, je crois que les ententes de transfert des responsabilités confèrent déjà la capacité à vos membres, à l'intérieur comme à l'extérieur des réserves, de fournir des services.
    Je pense que le projet de loi est peut-être une prochaine étape. Pouvez-vous me dire comment, de votre point de vue, le projet de loi vous aidera à passer à cette prochaine étape, et quelle sera cette prochaine étape? Encore une fois, je pense qu'un grand nombre de collectivités ne bénéficient même pas des ententes de transfert des responsabilités que nous avons déjà mis en place.
    Je pense que la partie importante, c'est qu'un grand nombre des nations de la Colombie-Britannique sont exclues du processus relatif aux traités de la province, alors elles ont un titre et des droits inhérents. Les traités modernes ont tracé une voie qui inclut les enfants. Ce que nous faisons, en Colombie-Britannique, c'est établir une table de négociation tripartite avec les gouvernements fédéral et provincial et nos organisations respectives. Des résolutions sont adoptées par chacune de nos tables en ce qui a trait aux enfants et aux familles.
    Nous avons suivi un processus dans le cadre des modifications provinciales, et il nous en reste encore certains à mener en ce qui concerne les dispositions législatives provinciales visant les enfants et les familles qui découleront du projet de loi fédéral. Je pense qu'il importe réellement que vous compreniez que nous avons participé à cette table tripartite provinciale et que nous avons examiné le projet de loi actuel et les changements qui doivent se produire.
    D'abord et avant tout, il s'agit de la reconnaissance de notre titre et de nos droits inhérents ainsi que de notre compétence et de nos ordres juridiques qui incluent les enfants, mais la plus grande part du travail consiste à rétablir et à guérir les nations. C'est très important, alors nous travaillons là-dessus également. Nous avons également établi des protocoles et des PE avec le gouvernement provincial dans divers domaines. Nous avons participé à la rédaction de beaucoup de textes législatifs avec lui. Ces activités définiront ce travail de reconnaissance de notre compétence sur nos enfants et nos familles, et je pense qu'il s'agit de l'un des éléments les plus importants.
    Cela existe actuellement, mais le projet de loi fédéral offrirait cette confirmation et cette reconnaissance de nos titres et droits inhérents, surtout en ce qui concerne les enfants. Je ne sais pas vraiment si cela répond à votre question exactement.

  (1305)  

    Envisagez-vous un moment où vous n'aurez plus autant besoin d'interagir avec le gouvernement provincial pendant que vous vous occuperez de ces enjeux, et où vous évoluerez de façon indépendante de ce gouvernement?
    Une des choses pour lesquelles je me suis toujours battu, c'était la nécessité de financer la prévention, parce que ce dont il est réellement question, c'est la guérison de nos enfants et familles et le rétablissement des liens qui les unissaient ainsi que la possibilité d'assurer notre propre gouvernance et compétence à leur égard. En raison de la perturbation coloniale et du nombre d'enfants qui ont été retirés de nos collectivités et de nos maisons, il nous faut cette prévention et cette guérison, et nous avons également besoin du financement afin de pouvoir travailler sur la gouvernance de nos nations pour nos enfants et nos familles.
    Quand j'ai parlé avec les représentants de notre organisme délégué local, nous avons tenu des séances d'élaboration de stratégies et abordé la fois où les lumières se sont éteintes, et tout le monde était vraiment triste. Je leur ai dit qu'il ne fallait pas l'être parce qu'il restait encore l'énorme volet de la prévention sur lequel travailler. Il ne s'agit pas de déplacer le travail. Votre travail ne consistera pas à cesser de retirer des enfants de leur famille et de les prendre en charge; il passera plutôt au volet de la guérison et de la prévention, à la culture, au fait de ramener les enfants chez eux, à la langue, au rétablissement des liens avec les familles. Cela prendra du temps parce que le colonialisme a eu des conséquences sur nos collectivités pendant des centaines d'années; il en a éradiqué certaines et en a assimilé de nombreuses autres. Il faudra encore bien d'autres années pour reconstruire nos nations, offrir un foyer à nos enfants et leur permettre de renouer avec leur langue et leur culture.
    Une des choses qui posent un défi, comme vous le savez, c'est qu'il y a eu beaucoup d'interprétations quant aux effets de la mise en œuvre de la déclaration de l'ONU, et cela comprend le droit absolu d'accepter ou de refuser. Si on prend l'article 19 de la déclaration de l'ONU portant sur l'application des mesures législatives et le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause, des groupes, comme l'Assemblée des chefs du Manitoba, nous ont dit, somme toute, qu'ils n'appuient pas ce projet de loi. Ils ne donnent pas leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. Donc, comment faire pour réconcilier ce concept énoncé dans la déclaration de l'ONU, à l'article 19, soit le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause, et une opposition importante? À mon sens, cela crée de véritables défis quant à ce que nous faisons et à la voie à suivre. Donc, d'un côté, vous mentionnez le besoin d'inclure cela dans la mesure législative. D'un autre côté, si c'est inclus, selon certains avis juridiques, cela signifiera qu'on ne pourra pas poursuivre le processus de ce projet de loi, vu les réponses données par certains groupes.
    Je crois que vous parlez de l'autodétermination. Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, les nations ont droit à leurs choix. Cela doit simplement être reconnu dans le texte de loi, de façon à ne pas nous placer sous le régime d'autres lois ou restrictions à caractère colonial. Toutefois, il s'agit d'autodétermination, et c'est ce dont parlent les articles 19 et 3 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Bon nombre des nations en sont à des étapes différentes. C'est un autre élément, mais il y a aussi le fait que le gouvernement du Canada a créé tout ce... Certaines Premières Nations ont des traités modernes; d'autres sont exclus du processus relatif aux traités; d'autres disposent d'une grande autonomie gouvernementale. Ce sont des obstacles que nous devons examiner.
    Les droits inhérents aux titres et à l'autodétermination sont essentiels dans l'ensemble de ce projet de loi. Je crois que cela doit être clair. Si certaines nations ne choisissent pas cette voie, mais décident plutôt de respecter les traités internationaux ou les traités numérotés auxquels elles sont parties, elles devraient pouvoir le faire. Toutefois, nous souhaitons l'affirmation et la reconnaissance des titres et des droits inhérents, c'est-à-dire ceux visés par nos processus.
    Merci.
    C'est maintenant madame Rachel Blaney qui a le droit de parole.

  (1310)  

    Je vous remercie beaucoup de votre présence aujourd'hui.
    Chef Wilson, je veux poursuivre à la suite des derniers propos que vous avez tenus. Je souscris entièrement à votre point de vue. Je crois que nous devons nous assurer que cette mesure législative permet aux nations de se retirer avec compensation, et non de se retirer sans rien recevoir.
    Pourriez-vous donner des commentaires sur la possibilité qu'une nation puisse décider de se retirer, mais qu'elle puisse quand même recevoir les ressources dont elle a cruellement besoin pour traiter à sa manière les problèmes auxquels elle fait face?
    Le projet de loi C-92 ne pourrait pas créer plus de division et de discrimination à l'endroit de nos nations. Je suis d'avis qu'il doit y avoir une reconnaissance des nations, peu importe la voie qu'elles décident de suivre, parce que l'objectif général de la mesure législative tient au fait de réunir les enfants avec leur peuple, leur collectivité et leur famille et de soutenir les droits collectifs des enfants et des familles. C'est ce que l'on doit viser avec ce projet de loi, et pas de créer davantage de division. Je ne vois pas pourquoi il ne serait pas possible d'y arriver, parce que toutes les nations, peu importe le choix qu'elles feront, doivent être reconnues, tout comme leur façon de travailler avec les gouvernement fédéral et provinciaux. Elles doivent recevoir des ressources, peu importe ce qu'elles choisissent, parce que les enfants n'ont pas pu choisir quand ils ont été retirés de leur domicile; on doit savoir si elles recevront les ressources ou non, et ce qui est prévu.
    Le projet de loi doit permettre de tenir compte des ressources adéquates ainsi que d'une guérison et d'une réunification adéquates de même que de la possibilité pour ces enfants de renouer des liens avec leur famille, leur nation et leur collectivité pour nous permettre de poursuivre sur le chemin de la guérison.
    Je crois que le fait de percevoir le projet de loi comme une réponse applicable à toutes les nations est erroné. Je crois qu'il faut le percevoir comme un pas en avant pour les nations qui ont déjà établi la voie qu'elles veulent suivre, et aussi comme un moyen d'appuyer les nations qui veulent que les lois ne limitent d'aucune façon l'exercice de leurs droits et titres ancestraux ou issus de traités.
    Chef Wilson, vous avez mentionné durant votre témoignage devant les membres de ce comité qu'on tenait une cérémonie au moment de ramener les enfants dans leur collectivité et que les familles étaient réunies à cette occasion.
    Pourriez-vous nous expliquer un peu à quoi tient cette cérémonie et nous dire qui y participe?
    Nous avons tenu une cérémonie dans notre nation il y a quelques mois, ici, à Vancouver, au centre Joe Mathias. Nous avons choisi de tenir cet événement à l'extérieur de notre nation, c'est-à-dire dans la ville de Vancouver, parce qu'il y a beaucoup d'enfants et de familles dans les régions urbaines. Un certain nombre de membres de nos 17 collectivités ont participé. Les enfants venaient d'un peu partout. Le centre était rempli de familles et d'enfants. Des membres de chaque collectivité ont pris part à l'exercice des couvertures et ont souhaité la bienvenue à leurs enfants. Certaines collectivités accueillaient beaucoup d'enfants, d'autres quelques-uns seulement.
    Il y a encore beaucoup de travail à accomplir. Les familles nous ont demandé de tenir cette cérémonie chaque année afin de reconnaître les enfants qui sont suivis par nos services et ceux que nous tentons encore de ramener à la maison.
    Environ un mois plus tard, notre collectivité de Neskonlith a vu revenir 20 enfants, ce qui était un nombre élevé. Gena Edwards, notre intervenante en soutien à la famille, et Fay Ginther, notre conseillère, ont travaillé longtemps pour réunir ces enfants avec la collectivité et leurs familles. C'était un moment vraiment rempli d'émotions pour beaucoup de familles.
    Je reconnais que ces enfants et ces familles ont beaucoup à faire encore pour guérir. Nos familles ont aussi demandé que nous poursuivions ce travail.
    Nous avons récupéré un bébé qui devait être retiré de sa famille à Toronto, par exemple, et, heureusement, on nous a informés de ce cas. Ce bébé a presque été inscrit dans le système. Nous avons presque dû faire du porte-à-porte dans notre collectivité pour retrouver des membres de sa famille. Nous avons appris que cette situation avait été causée par la rafle des années soixante, moment où son grand-père avait été retiré de la collectivité. Il n'avait pas de lien avec la collectivité, donc personne ne connaissait ce bébé, et cela était dû aux liens qui ont été brisés en raison de la rafle des années soixante. Nous avons réussi à ramener le bébé dans notre collectivité. Il comptait parmi les 20 enfants que nous avons ramenés, et nous travaillons à rétablir des liens avec sa famille. Malheureusement, sa sœur est toujours à Toronto. Elle ne vient pas de notre collectivité, mais sa grand-mère a manifesté son intérêt de la voir placée dans notre collectivité pour qu'elle et son frère ne soient pas séparés.
    C'est le genre de récit que chacun de ces enfants et leur famille auraient pu partager; cela témoigne des expériences terribles qu'ils ont vécues et du travail de guérison qu'il faudra accomplir pour qu'ils retrouvent leur famille, leur culture et leur langue.

  (1315)  

    Merci beaucoup.
    J'aimerais m'adresser brièvement à Mme Bernie Charlie. Je crois que nous sommes parents, mais nous en reparlerons à un autre moment. Je suis de Stellat'en.
    Vous avez mentionné que l'accent doit être mis sur la famille et l'unité familiale. Vous avez parlé du libellé que vous vouliez voir modifier en particulier. Pourriez-vous nous parler un peu du fait de tenir compte de l'ensemble de la famille, plutôt que de l'enfant seulement?
    Vu que je l'ai mentionnée dans mon exposé et quand j'ai parlé du travail que nous réalisons, je vais simplement donner des détails sur la cérémonie qui a été tenue sur le territoire des Salish de la Côte. Les enfants, les membres de leur fratrie et leurs parents biologiques y ont participé. En prolongement de ce groupe, il y avait les parents-substituts, les parents de famille d'accueil. Nous appuyons tout le cercle de soutien.
    M. Lyle Thomas vous a aussi fait part de son expérience et a expliqué que, à titre de parent-substitut pour ces enfants, on ne fait pas que leur prodiguer des soins, mais on soutient aussi leur relation avec leur famille, si leurs parents sont en mesure de le faire aussi.
    Dans ce contexte, il faut appliquer une approche communautaire globale qui sollicite la participation des membres de la famille élargie, des parents-substituts, des personnes qui sont chargées d'effectuer ce travail, de prodiguer des soins et de favoriser l'épanouissement des enfants et de leurs parents.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Dan Vandal.
    Je vous remercie beaucoup de vos deux exposés. Ils étaient très instructifs.
    Je vais adresser ma première question à M. Lyle Thomas et à Mme Bernie Charlie.
    Quels sont les défis les plus importants que pose la prestation de services d'aide à l'enfance dans votre territoire?
    Je vais commencer. C'est une question très importante.
    Le travail accompli par le personnel des Secwépemc Child and Family Services est important sur le plan de la réconciliation et de l'établissement de liens entre les enfants et leur famille, et le défi le plus important en ce moment tient au financement.
    Il s'agit de renforcer les capacités dans la collectivité et d'établir les soutiens naturels pour ces familles, c'est-à-dire l'unité familiale, et non seulement l'enfant, mais aussi les parents, et d'appuyer la réintégration du modèle de la famille étendue et du modèle communautaire. Il faut accroître les capacités au sein de la collectivité pour que les enfants n'aient pas à se déplacer vers des centres urbains pour obtenir du soutien médical ou éducationnel en raison de leurs besoins particuliers.
    À cet égard, je vais laisser M. Thomas donner des détails.
    Le défi le plus important, c'est que nous fournissons des services à sept bandes ici, qui sont établies dans des milieux plutôt ruraux, et nous servons aussi une population urbaine. Nous tentons de trouver un équilibre. Il faut trouver un équilibre pour tout le monde et comprendre notre clientèle et d'où elle vient. Nous essayons de transmettre des enseignements et de faire en sorte que les enfants comprennent. Ils vivent dans notre nation, sur notre territoire de Secwépemc, et nous échangeons simplement avec eux.
    Du point de vue culturel, nous voulons qu'ils se sentent le plus à l'aise possible avant de retourner chez eux — s'ils le peuvent — en visite.
    Selon moi, en ce qui concerne nos enfants ici — je les appelle nos enfants —, qui sont issus de la population urbaine, il faut mettre en place un nouveau système, un nouveau système d'accueil, qui sollicitera la participation de tous.
    Nous avons une grande population urbaine, mais les gens sont issus du même territoire. Nous avons besoin que tout le monde collabore et s'unisse, si possible. Nous devons trouver une façon de nous rallier et de nous entraider pour travailler ensemble.

  (1320)  

    Merci.
    Je vais adresser ma prochaine question à la chef Wilson. Beaucoup de discussions ont porté sur l'importance de définir l'intérêt de l'enfant. Ce sujet a été discuté ce matin, je crois. Je ne suis pas certain si c'était dans votre exposé, ou le précédent, où on soulignait l'importance de la famille, mais une des dispositions de ce projet de loi... Un des facteurs dont on doit tenir compte quand il s'agit de l'intérêt de l'enfant, c'est l'importance que revêt la continuité de la relation de l'enfant avec le groupe autochtone, la collectivité ou le peuple auquel il appartient, afin de conserver son identité culturelle et ses liens avec la langue et le territoire de ce groupe, de cette collectivité ou de ce peuple autochtone.
    Cela figure actuellement dans le projet de loi. Pourriez-vous formuler des commentaires quant à cette disposition?
    Je sais que l'intérêt de l'enfant a fait l'objet de nombreuses discussions. Nous avons toujours soutenu qu'il ne faudrait pas appliquer le point de vue occidental à l'intérêt de l'enfant, parce que quand ce principe a été établi, c'était sans une grande participation de notre part. Encore une fois, le point de vue autochtone, comme l'a souligné plus tôt Mme Charlie, est différent en ce qui concerne l'intérêt de l'enfant.
    L'article 9, qui porte sur la relation, est essentiel pour l'enfant. Selon le point de vue autochtone, nous ne possédons pas nos enfants. Ils nous sont donnés par le Créateur. Quand ils naissent, ils font partie de la nation. D'après la vision autochtone de l'intérêt de l'enfant, nous avons tous la responsabilité de soutenir et d'élever cet enfant. À nos yeux, les tantes sont aussi importantes. Les grands-pères, les grands-mères et les membres de la famille élargie sont tous importants pour élever cet enfant. Ce ne sont pas seulement la mère et le père; c'est toute la famille élargie. Il est très important de respecter cette vision autochtone et les relations qu'entretient l'enfant.
    On ne peut fonder ce principe sur une vision occidentale et colonisatrice de l'intérêt de l'enfant. C'est ce qui est important. La relation de l'enfant avec les membres de sa famille élargie et de sa nation est aussi importante.
    Je comprends. Merci.
    Je remercie les deux groupes de témoins d'avoir participé par vidéoconférence. Nous sommes tous reconnaissants. Cela conclut nos audiences publiques sur le projet de loi C-92. Nous serons heureux de recevoir vos mémoires. Si vous nous les transmettez, nous aurons tous l'occasion de les lire.
    Meetwetch.
    La séance est levée.
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