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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 122 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 19 novembre 2018

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Bonjour à toutes et à tous. Bienvenue à la 122e séance du Comité permanent de la condition féminine. La séance d'aujourd'hui est publique.
    Nous poursuivons notre étude sur le réseau de refuges et de maisons de transition qui desservent les femmes et leurs enfants affectés par la violence faite aux femmes et la violence par un partenaire intime.
    Je suis ravie d'accueillir notre premier groupe de témoins.
    Nous accueillons Mme Eva Kratochvil, survivante et intervenante de première ligne, Hiatus House; Mme Anita Olsen Harper, conseillère en recherche, Cercle national autochtone contre la violence familiale; et Mme Dawn Clark, qui se joint à nous par vidéoconférence et que vous verrez à l'écran. Bienvenue à toutes.
    Je vous rappelle que vous avez sept minutes pour présenter votre déclaration préliminaire.
    Je donne la parole à Eva.
    Merci de m'avoir invitée à vous adresser la parole aujourd'hui de mon point de vue d'intervenante de première ligne et de survivante.
    Chaque jour, lorsque les refuges pour femmes victimes de violence partout au pays sont forcés de refuser des femmes et des enfants en raison de problèmes de capacité, ces femmes et ces enfants tombent dans l'itinérance ou dans le système des refuges pour sans-abri. Malheureusement, à cause du grave manque de financement des refuges pour sans-abri — qui fonctionnent selon un modèle non adapté aux victimes de violence, où le logement est prioritaire —, ces femmes et ces enfants ne reçoivent jamais le counselling et les services auxquels ils ont droit et qui les aideraient.
    Je dirais que cette impossibilité d'obtenir de l'appui adapté précisément à la violence familiale perpétue le cycle de la violence, car les victimes n'ont pas accès à des services d'intervention et de counselling adéquats. Nous nous convainquons que les femmes envoyées aux refuges pour sans-abri reçoivent des services, alors que souvent, ce n'est pas le cas.
    Par exemple, certaines ne répondent pas aux critères d'admissibilité pour accéder aux refuges pour sans-abri, qui diffèrent grandement d'une collectivité à l'autre. Par ailleurs, même si elles réussissent à obtenir une place au sein du système, les refuges pour sans-abri ne sont pas des installations sûres conçues pour protéger les femmes.
    Quand il y a des ratés, ce sont souvent les femmes qui finissent par en porter le blâme. J'ai vu des femmes se faire refuser l'accès à des services en raison de problèmes de capacité, puis se déplacer d'un endroit à l'autre pendant plusieurs semaines, se servant de leurs amis et de leur famille comme mesure provisoire. Plus tard, lorsque ces femmes réessaient d'obtenir des services, il arrive qu'on leur dise que leur situation n'est plus un cas urgent de violence familiale, mais plutôt un problème de logement.
    L'autre réalité, c'est que les refuges pour femmes victimes de violence qui offrent des séjours limités poussent les femmes à quitter le système de lutte contre la violence faite aux femmes et à se diriger vers l'itinérance si elles n'arrivent pas à trouver un logement sécuritaire et abordable dans le délai imparti. De nombreuses femmes sans abri affirment que leur itinérance est l'une des raisons pour lesquelles elles vivent dans des relations de violence: elles choisissent de vivre avec un seul agresseur plutôt que d'en côtoyer plusieurs, comme ce serait le cas si elles étaient poussées à la rue, dans une situation d'itinérance absolue.
    Nous ne pouvons plus prétendre qu'il n'y a pas de corrélation et de chevauchement certain entre la violence envers les femmes et l'itinérance; ce serait faire preuve d'irresponsabilité et refuser à toutes les femmes le droit à des services adéquats. Les dispositions relatives au financement du secteur de l'itinérance contribuent à créer ce fossé artificiel, de peur que le financement ne soit touché. Il ne devrait pas y avoir de distinction entre les femmes, et les femmes itinérantes ne devraient pas être traitées comme des citoyennes de seconde classe au sein du système de refuges.
    Si vous avez besoin d'un exemple concret illustrant la différence de niveau de service, la collectivité de Windsor, en Ontario, montre la distinction entre le volet de la violence envers les femmes et celui de l'itinérance chez les femmes. Au cours du dernier exercice, Hiatus House a dû refuser l'accès à 146 femmes et à 188 enfants, et ces chiffres continuent d'augmenter.
    Je trouve important que vous sachiez comment les travailleurs se sentent chaque jour lorsqu'ils répondent à des appels d'urgence et qu'ils n'ont pas de lits à offrir aux femmes. Je veux que vous compreniez la douleur qui nous prend à la gorge chaque fois que les actualités parlent d'une femme qui a été agressée ou qui a perdu la vie, la douleur que nous ressentons pendant que nous attendons d'apprendre son nom pour vérifier si c'est celle à qui nous avons dû dire non.
    Je veux que vous compreniez les épreuves que les femmes et les enfants vivent lorsque les femmes n'arrivent pas à trouver de logement sécuritaire et abordable dans leur collectivité, sans faute de leur part, simplement parce qu'il n'y en a pas, et qu'elles sont obligées de choisir entre le refuge pour sans-abri, un retour à la maison et à la violence, ou un logement insalubre.
    Je veux que vous soyez conscients des répercussions sur le refuge de la perte de notre plus grande ressource: les gens que nous formons, les collègues qui acceptent d'autres emplois à cause du salaire non concurrentiel que touchent les intervenants de première ligne des refuges.
    Lorsque le nombre limité de lits force constamment le personnel des refuges à se servir du critère de risque élevé pour accorder l'accès aux services, en posant des questions comme: « Avez-vous été victime de violence physique? Avez-vous des blessures? Vous a-t-il étranglée? A-t-il menacé de vous tuer? A-t-il agressé les enfants ou les animaux? Possède-t-il des armes? A-t-il déjà été accusé? Avez-vous appelé la police? », nous perpétuons la vision de la société selon laquelle la seule forme de violence réelle est la violence physique.

  (1535)  

    Mon travail a changé au fil des années. Avant, je disais aux femmes qu'elles n'avaient pas à attendre que la violence devienne physique. Maintenant, j'essaie d'élaborer des stratégies pour déterminer quelle femme se trouve dans la situation la plus grave afin de lui donner droit à un des derniers lits.
    Nous pouvons parler longuement des mesures de prévention et des initiatives de sensibilisation qui montrent aux femmes les signes d'une relation de violence afin qu'elles puissent reconnaître rapidement qu'elles sont à risque. Or, si elles ne peuvent pas obtenir de soutien, tout cela est plutôt inutile.
    Les solutions ne sont pas simples, et il n'existe pas de panacée. Les femmes doivent voir qu'il y a une issue. Elles ont besoin de soutien, de ressources financières, d'accès à des services de garde, de counselling et, enfin, de logements abordables et sécuritaires d'où elles peuvent refaire leur vie. Les femmes doivent pouvoir être optimistes; elles doivent pouvoir croire que leur situation s'améliorera si elles partent. Elles ne peuvent pas craindre que leur départ leur fasse tout perdre: leurs enfants, leur emploi, leur crédibilité et toute forme de normalité.
    Les refuges arrivent à fournir une grande partie des services requis, mais ils ne peuvent pas tout faire. Il faut qu'il y ait assez de lits pour répondre à la demande. Les refuges ont besoin de financement pour fonctionner. Il ne suffit pas de construire la structure; il faut aussi la pourvoir de personnel et assurer son fonctionnement.
    Les refuges sont forcés de prendre des décisions qui compromettent les services qu'ils sont en mesure d'offrir. Par exemple, Hiatus House a dû faire passer le nombre de travailleurs auprès des enfants et des jeunes de cinq à un et demi, afin que plus qu'un employé soit présent durant les quarts de nuit. Puisque le refuge est toujours plein, il commençait à y avoir des problèmes de sécurité.
    De tels sacrifices ont des répercussions. Je vois le seul employé à temps plein et l'employé à temps partiel faire des pieds et des mains pour répondre aux besoins d'une moyenne quotidienne de 20 à 25 enfants, tout en épaulant les mères qui essaient d'aider leurs enfants à s'adapter, de trouver de nouvelles façons de jouer leur rôle de parent et de reprendre ce rôle durant une période chaotique. Ou encore, ils tentent de donner aux mères un peu de temps pour être seules ou pour effectuer les tâches qu'elles ont absolument besoin d'accomplir. C'est vraiment un exploit impossible.
    Comment pouvons-nous enseigner aux femmes à avoir des attentes saines alors que nous travaillons nous-mêmes dans un milieu rendu malsain par un excès de stress, de travail et de ressources continuellement épuisées? Pourtant, je me sens coupable de me plaindre de la situation des intervenants, car je sais que nous ne sommes pas les personnes les plus importantes dans tout cela: ce sont les femmes et les enfants qui sont les plus importants. Or, je sais aussi que tout ce que nous faisons a une incidence sur eux. Nous pourrions faire beaucoup mieux si seulement nous avions les ressources nécessaires.
    En outre, il n'existe pas de norme applicable aux services fournis par les refuges. Nous tentons tous de faire de notre mieux, selon les circonstances qui nous entourent et l'endroit où nous nous trouvons dans notre vaste pays, mais il n'y a pas d'uniformité. Or, les femmes et les enfants ne devraient pas être à la merci du gouvernement en place. Toutes les Canadiennes victimes de violence familiale ou sexuelle ne devraient-elles pas avoir droit au même nombre de jours de congé? Bien sûr que oui. Nous savons tous que pour qu'une telle mesure soit mise en place, il faudrait que le gouvernement fédéral prenne les rênes. Je vous prie de considérer la possibilité de mettre en oeuvre un plan d'action national en vue de combler les lacunes.
    De plus, vous devez renforcer les services offerts par les refuges. Une des meilleures façons de créer un réseau serait en soutenant les associations provinciales de refuges, de façon à ce que tous les refuges puissent y adhérer et à ce que les associations deviennent des centres d'expertise, de formation et de pratiques exemplaires. Cependant, tant et aussi longtemps que la survie des associations de refuges dépendra des frais d'adhésion, elles ne formeront pas un réseau solide, car c'est impossible pour les refuges les plus éloignés et les plus petits d'en devenir membres. Je vous prie d'examiner de nouvelles formules de financement qui permettront aux associations provinciales d'accomplir leur travail de chefs de file.
    Or, le plus important, c'est de donner un rôle significatif aux survivantes, de les placer à la tête du mouvement pour restaurer la crédibilité, pour réduire la stigmatisation et pour veiller à ce que rien ne soit créé pour elles, sans elles. Favorisez, soutenez et financez la participation et les initiatives des survivantes.

  (1540)  

    Eva, vos sept minutes sont écoulées. Je sais que vous avez encore votre résumé à présenter.
    Il me reste seulement le résumé.
    Oui, mais votre résumé prendra un peu plus d'une minute.
    Je veillerai à ce que, pendant la période de questions, nous ayons le temps d'y revenir. Nous avons d'autres témoignages à recevoir.
    Je comprends parfaitement. Merci.
    Merci beaucoup, Eva. Je vous en suis très reconnaissante.
    Anita, la parole est à vous. Vous avez sept minutes.
    Je m'appelle Anita Olsen Harper. Je suis une Anishinabe de Namekoosipiing, ou Trout Lake, dans le nord-ouest de l'Ontario. J'ai un doctorat en éducation. Ma thèse portait sur la violence familiale et la résilience dans les collectivités des Premières Nations.
    Je suis chercheuse pour le Cercle national autochtone contre la violence familiale, ou le CNACVF, un organisme sans but lucratif. Nous travaillons avec la majorité des refuges pour femmes situés dans les réserves, ainsi que plusieurs refuges situés hors réserve. Nous fournissons le plus de services de soutien possible pour que les directeurs de refuges puissent aider leur clientèle: les femmes et les enfants ayant besoin d'un abri à cause de la violence familiale.
    Juste pour préciser, durant mon témoignage, j'utiliserai le terme « refuge ». J'entends par là un complexe résidentiel destiné aux femmes et aux enfants et comptant des pièces comme des cuisines, des salles de bain et des chambres à coucher. Il s'agit d'un endroit où les personnes fuyant la violence familiale peuvent trouver de la protection et du soutien temporaires. Certains emploient des termes comme « maison de transition », mais j'utiliserai le mot « refuge ».
    Services aux Autochtones Canada, ou SAC, finance et supervise les refuges pour femmes situés dans les réserves, par l'intermédiaire de l'Initiative de lutte contre la violence familiale, ou l'ILVF. SAC finance aussi d'autres programmes de lutte contre la violence familiale, comme des programmes de sensibilisation pour les familles autochtones, par le truchement du Programme pour la prévention de la violence familiale, ou le PPVF. À l'heure actuelle, 40 refuges financés et contrôlés par SAC sont aussi membres du CNACVF.
    Le problème le plus urgent que connaissent les refuges pour femmes situés dans les réserves, c'est le manque de financement de la part de SAC. Les refuges situés dans les réserves reçoivent l'équivalent de 50 à 75 % des fonds versés aux autres refuges pour femmes qui sont financés par la province où ils se trouvent. Les refuges situés dans les réserves reçoivent donc un financement inéquitable, et ce, malgré le fait que les besoins sont plus grands dans les réserves.
    De plus, quand une femme autochtone — une femme ayant le statut d'Indien et vivant normalement dans une réserve — obtient les services d'un refuge pour femmes hors réserve, SAC rembourse le refuge financé par la province au taux de la province, un taux plus élevé que celui qu'il paye à la Première Nation pour fournir les mêmes services à l'intérieur de la réserve, dans les cas où ces services existent. Cette pratique est discriminatoire.
    En outre, le financement est inéquitable. Plus précisément, la structure de financement de SAC est fondée sur la population et sur la supposition que la clientèle autochtone est identique à la clientèle non autochtone, plutôt que sur ses besoins réels. SAC ne prend pas en considération les circonstances historiques et les besoins accrus d'une population ayant subi les pensionnats indiens, le colonialisme continu et le traumatisme intergénérationnel. Il ne tient également pas compte du fait qu'il coûte plus cher de fournir des services dans les collectivités rurales et éloignées, y compris dans les réserves.
    On sait que les services sociaux, de santé, de logement et d'éducation offerts dans les réserves sont limités. Or, ces services sont essentiels pour soutenir et compléter les programmes et les services offerts par les refuges. Le financement inégal et inéquitable des refuges pour femmes situés dans les réserves a, au minimum, les quatre conséquences suivantes.
    Premièrement, l'épuisement professionnel est fréquent, les taux de roulement du personnel sont élevés, les travailleurs sous-payés se sentent isolés, et les refuges ont de la difficulté à recruter et à maintenir en poste des professionnels pouvant répondre aux besoins réels des femmes et des enfants.
    Deuxièmement, il y a un manque de ressources et de programmes adaptés à la clientèle autochtone des refuges.
    Troisièmement, les infrastructures sont inadéquates, et les espaces limités sont inefficaces tant pour les adultes que pour les enfants. Il y a souvent un besoin urgent de rénover et d'agrandir les refuges. Les normes de santé et de sécurité sont donc très peu respectées.
    Quatrièmement, les refuges ne peuvent pas fournir de logements de deuxième étape, c'est-à-dire des logements à plus long terme où sont offerts des programmes.
    Les femmes autochtones fuyant la violence familiale ou à risque d'en subir n'ont pas accès à des refuges de la même qualité que ceux dont bénéficient les autres Canadiennes. Certaines n'ont pas du tout accès à de tels services. À l'heure actuelle, la protection que le Canada offre aux femmes autochtones contre la violence familiale n'est ni égale, ni équitable, ni adaptée à la culture.

  (1545)  

    Enfin, à titre de recours et de recommandation précise, le Canada doit financer et offrir des services de refuges et des programmes équitables et appropriés sur le plan culturel aux femmes autochtones et à leurs enfants qui fuient la violence familiale ou qui risquent d'être confrontés à la violence familiale. Ainsi, les services et les programmes doivent être adaptés aux circonstances géographiques, culturelles et historiques uniques des femmes qui ont recours aux services des 40 refuges financés par SAC au Canada.
    Meegwetch. Merci.
    Merci beaucoup, madame Olsen Harper. Nous vous sommes reconnaissants.
    Nous allons maintenant entendre Dawn Clark, de la Haven Society.
    Dawn, vous disposez de sept minutes.
    Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invitée à témoigner devant le Comité. Je m'appelle Dawn Clark. Je suis la directrice des programmes à la Haven Society, située à Nanaimo.
    La Haven Society a été constituée en société à but non lucratif et organisme de bienfaisance enregistré le 22 décembre 1978. Cette année marque notre 40e anniversaire à titre d'organisme offrant des services aux femmes et aux enfants qui fuient la violence et les mauvais traitements. À Nanaimo, nous exploitons une maison de transition de 17 lits et en 2013, en partenariat avec la Society of Organized Services, nous avons élargi nos services de refuges afin d'offrir une maison d'hébergement dans la région d'Oceanside.
    Notre mission est de promouvoir l'intégrité et la sécurité des femmes, des enfants, des jeunes et des familles, de même que de bâtir une communauté respectueuse et saine. Haven jouit d'une solide réputation dans la communauté et en Colombie-Britannique, à titre de chef de file dans la lutte contre la violence. Notre organisme est respecté dans les domaines du leadership, de la formation et de la collaboration. Nous nous engageons à offrir un continuum de services, à éduquer la population et à défendre les droits des femmes et des enfants.
    Je suis certaine que la plupart d'entre vous ont déjà entendu ces statistiques, mais je crois qu'il est important de les répéter, puisqu'il s'agit des femmes que nous voyons tous les jours.
    Selon le plus récent document de la Fondation canadienne des femmes d'août 2016, les femmes sont quatre fois plus susceptibles que les hommes d'être victimes d'homicide commis par un partenaire intime; les femmes autochtones sont 2,5 fois plus susceptibles d'être victimes de violence que les femmes non autochtones; environ tous les six jours, une femme est tuée par son partenaire intime au Canada; les femmes autochtones sont six fois plus victimes d'homicide que les femmes non autochtones; et 70 % des cas de violence ne sont pas rapportés à la police.
    De plus, à tous les soirs au Canada, près de 6 000 femmes et enfants dorment dans des refuges parce que leur sécurité à la maison est compromise, et près de 300 femmes et enfants se voient refuser l'entrée parce que les refuges sont pleins. Les femmes qui s'identifient à titre de lesbiennes ou de transgenres et qui sont victimes de violence conjugale sont moins susceptibles d'accéder aux services de refuges; les femmes courent un plus grand risque d'être victimes de mauvais traitements à l'égard des aînés par un membre de la famille et les femmes doivent souvent faire un choix entre rester avec un agresseur et risquer la pauvreté et l'itinérance.
    De plus, la cyberviolence, qui comprend les menaces faites en ligne, le harcèlement et les menaces physiques, apparaît rapidement à titre de prolongement de la violence contre les femmes; les femmes qui ont des problèmes de santé mentale ou des troubles du comportement de même que des maladies chroniques ou débilitantes présentent un taux de victimisation quatre fois plus élevé que celui des autres femmes; la toxicomanie et les problèmes de santé mentale coexistent souvent chez les femmes, puisque nombre d'entre elles désignent la consommation de drogues à titre de façon de composer avec la violence fondée sur le sexe et les traumatismes.
    Bon nombre des femmes qui ont recours à nos maisons de transition ou d'hébergement vivent des traumatismes complexes, ont recours à divers services autorisés, ont des problèmes de santé et des problèmes liés à la pauvreté, et ont un avenir incertain. Leurs enfants peuvent présenter divers comportements directement liés à la violence à laquelle ils sont exposés et bon nombre d'entre eux ont de la difficulté à vivre dans un environnement de vie commune avec des étrangers et de nouvelles règles. Ils risquent de s'isoler et de devenir surprotecteurs ou de montrer des signes d'agressivité. De plus, les femmes en mauvaise santé, qui ont des problèmes de santé mentale ou qui consomment de l'alcool ou d'autres substances risquent de ne pas communiquer ces préoccupations au moment de leur inscription par peur d'être refusées.
    Ces obstacles concomitants obligent le personnel de nos maisons de transition et d'hébergement à devenir des personnes à tout faire, à gérer les crises à tout moment et à offrir un soutien affectif et une sécurité aux femmes, tout en répondant à leurs besoins immédiats et futurs.
    Notre travail à Haven consiste à offrir un endroit sécuritaire aux victimes de violence afin qu'elles soient entendues, crues et appuyées. À la base de toutes les relations que nous bâtissons avec ces femmes se trouve la croyance qu'elles sont les expertes de leur vie. Notre intention est de fournir un éventail de services équitables et nous présumons que chaque femme et chaque enfant a le droit à un soutien qui répond à ses besoins individuels, qui est adapté sur le plan culturel et qui préserve la dignité.

  (1550)  

    Pour offrir des services complets aux femmes et enfants que nous aidons, nous croyons qu'il est nécessaire de mettre en oeuvre les recommandations suivantes.
    Premièrement, il faut veiller à ce que les refuges pour femmes et les maisons de transition reçoivent un financement complet et aient la capacité professionnelle et le personnel nécessaires pour offrir un soutien affectif approprié et pour gérer les crises tout en protégeant le bien-être de tous les clients du refuge ou de la maison de transition.
    De plus, il faut continuer de militer pour des maisons d'hébergement transitoire qui permettront aux femmes de faire la transition d'une relation violente vers un milieu sécuritaire; offrir des options de logement qui permettent aux femmes de préserver ou de rétablir la relation avec leurs enfants et offrir des services de garde et des services familiaux subventionnés; accroître le financement des programmes axés sur les traumatismes, comme le programme Mettre un terme à la violence, de même que les programmes destinés aux enfants, afin de s'attaquer aux listes d'attente et de permettre à un plus grand nombre de femmes et d'enfants d'avoir accès à des services de counselling et des services cliniques accrus; et améliorer l'éducation et l'élaboration d'approches axées sur les femmes, et de pratiques axées sur les traumatismes, la santé mentale et les dépendances.
    Il faut aussi accroître le suivi communautaire associé aux services de soutien individuels et novateurs, et offrir aux femmes l'occasion d'émettre des commentaires au sujet de la conception des programmes et d'influer sur la prestation des services; élaborer des programmes facultatifs et obligatoires pour les agresseurs; et financer la mise sur pied et le renforcement des partenariats entre les secteurs en vue d'aider les femmes.
    Il faut également travailler avec les organismes gouvernementaux et les partenaires communautaires afin d'améliorer la compréhension des obstacles systémiques auxquels sont confrontées bon nombre de femmes qui fuient la violence et trouver des façons de les réduire, notamment par l'entremise de la stabilité économique et d'un accès accru à des logements sécuritaires et abordables, à des services de soutien et à des services adaptés sur le plan culturel, pour ne nommer que ceux-là.
    Il faut établir un programme scolaire obligatoire sur la prévention de la violence, destiné aux enfants de tous les niveaux scolaires.
    Il faut trouver les meilleures pratiques puis élaborer et mettre en oeuvre des approches novatrices et éprouvées en matière de prestation de services pour les femmes qui fuient la violence; examiner la capacité actuelle dans certains domaines clés des services offerts aux femmes afin de mieux comprendre les pénuries au sein des divers organismes; et offrir un financement pour combler les lacunes.
    Pour terminer, j'ajouterais qu'on ne pourra pas éliminer la violence familiale en ayant recours à des interventions qui se centrent uniquement sur les femmes ou les survivants. Nous devons promouvoir des interventions systémiques qui permettent d'éviter la violence familiale et mettre en oeuvre des mesures visant non seulement les agresseurs, mais aussi la société dans son ensemble.
    Merci.
    Merci beaucoup, Dawn.
    Nous allons commencer notre première série de questions de sept minutes.
    Notre première intervenante est Eva Nassif. Vous disposez de sept minutes.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos trois témoins de leurs présentations vraiment touchantes.
    Je commencerai par Mme Kratochvil.
    Madame Kratochvil, j'ai été touchée par votre témoignage. Pourriez-vous nous parler davantage de votre expérience?

[Traduction]

    Comment avez-vous réussi à vous aider vous-même en tant que victime de violence, et à aider les autres femmes qui demandent de l'aide dans votre refuge? Comment votre courage et votre expérience peuvent-ils encourager les autres femmes à se manifester et à demander de l'aide?
    Je crois que mon histoire personnelle...
    L'interprétation ne fonctionne pas.
    Eva comprend une partie, mais nous allons prendre un peu plus de temps, donc s'il y a des questions...
    Il n'y a pas de problème. Je peux continuer en anglais.

  (1555)  

[Français]

    J'ai compris la question.
    Par suite de mon expérience, j'ai une certaine perception selon laquelle, au travail, je dois chercher comment cela peut mieux fonctionner. C'est mieux parce que j'offre des services aux femmes. Je suis une survivante, comme vous le savez.

[Traduction]

    Je crois qu'en tant que survivante qui offre des services aux autres femmes, je leur montre qu'il est possible de se sortir de la violence. Elles sont à même de constater qu'il y a de l'espoir.
    La vérité, c'est que ce ne sont pas les refuges qui m'ont permis de me sortir de ma situation. En fait, ce sont des amis qui m'ont aidée. Je travaillais pour un refuge alors que je vivais cette situation, ce qui a nui à de nombreuses possibilités.
    Je crois que c'est un bon exemple de la stigmatisation à laquelle les femmes font face lorsqu'elles sont victimes de violence familiale et doivent demander de l'aide. Dans les faits, je crois que moins de 11 % des femmes victimes de violence se tournent vers les refuges pour se sortir de leur situation.
    Cette question dépasse la simple offre de services de refuges. La grande question, c'est comment on peut aider ces femmes à se remettre sur leurs pieds et veiller à ce qu'elles ne soient pas confrontées à la pauvreté dans l'avenir, surtout lorsqu'elles ont des enfants. C'est beaucoup plus complexe que la simple offre de refuges.
    Toutefois, comme je suis une survivante et que je fais un travail de première ligne, mon intervention peut avoir une incidence sur les femmes que je rencontre. Je les comprends et je veux leur bien, et elles le sentent.
    Le fait d'avoir des survivantes en première ligne... En professionnalisant les systèmes de refuges, nous avons un peu mis de côté les survivantes. Nous devons les réintégrer dans les systèmes.
    C'est pourquoi il était si important pour moi d'être à la table aujourd'hui. Lorsque j'ai regardé votre liste — c'est l'un des commentaires que j'ai transmis à votre greffière —, j'ai remarqué que vous receviez de nombreuses personnes haut placées. Vous ne receviez pas d'intervenants de première ligne ni les femmes touchées. Je vous remercie de m'avoir reçue.

[Français]

    Vous avez dit que le fait d'être mères est un obstacle pour les femmes et que cela les empêche de demander de l'aide.
    À part cela, quels sont les principaux obstacles, selon vous, qui empêchent les femmes de partir lorsqu'elles vivent une relation violente?

[Traduction]

    Est-ce que vous me demandez quelles sont les options offertes aux femmes?
    Je ne parle pas d'options, mais bien d'obstacles, autres que celui d'être une mère.
    Les plus grands obstacles sont la pauvreté, le manque de ressources pour s'en sortir et l'absence de logements sécuritaires et abordables. Certains logements sont disponibles, mais ils sont en mauvaise condition. Il n'y a pas de garderies pour permettre aux femmes de travailler. Elles peuvent se ruiner.
    Il y a de nombreuses couches et des millions de raisons pour lesquelles les femmes restent dans cette situation au lieu de partir, souvent parce qu'elles n'ont tout simplement nulle part où aller. C'est probablement le plus grand obstacle. Les femmes de ma communauté ne peuvent aller nulle part. C'est pour cela qu'elles restent là.

[Français]

    Quelles sont les raisons qui vous ont poussée à réagir et qui vous ont donné le courage de mettre fin à votre relation et de demander de l'aide, à part les encouragements des amis?

[Traduction]

    Voulez-vous savoir ce qui m'a aidée à me sortir de cette situation?
    Combien d'années a duré votre relation?
    Pendant mes années d'université, il y a tellement de raisons pour lesquelles c'est arrivé. J'ai réussi à m'en sortir en me créant un espace à part, en établissant une distance, et j'ai pu me réinstaller dans une autre communauté, puisque le parent d'un ami m'a hébergée. Mes collègues ont remarqué que j'étais une « sans-abri cachée », parce que j'accrochais ma garde-robe derrière la porte de mon bureau. Ces collègues ont dépassé les limites ou les critères professionnels qu'ils devaient respecter et ils m'ont permis de m'en sortir et de... Le gestionnaire d'un immeuble à but non lucratif m'a dit: « Je vais vous donner cette aire commune; ce sera votre espace. Je vais vous donner la clé, parce que vous avez besoin de vous remettre sur vos pieds. Je vais vous aider à y arriver. »
    Ce sont les personnes qui ont enfreint les règles qui m'ont le plus aidée, parce que sans eux, je ne sais pas où je serais aujourd'hui.

[Français]

    Vous êtes donc allée à un refuge, si je comprends bien?

[Traduction]

    Je n'ai pas pu aller dans un refuge à l'époque, comme bon nombre de femmes au pays. Elles n'ont nulle part où aller. Souvent, à cause du grand isolement et de tout ce qui se passe, elles n'ont pas d'amis ni de famille pour les aider. Elles n'ont rien. Ainsi, elles se dirigent vers l'itinérance. Je vous ai déjà parlé de ce qui se passait lorsqu'on prenait le chemin de l'itinérance.

  (1600)  

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à Mike Lake.
    Mike, vous disposez de sept minutes.
    Je remplace un membre du Comité aujourd'hui, alors c'est ma première occasion d'entendre les témoins sur ce sujet. Bon nombre des enjeux que vous évoquez me sont très familiers, en raison de mon travail sur la santé mentale. Mon fils est autiste et j'ai parlé à de nombreuses familles qui vivent avec l'autisme et qui, à un moment de grand désespoir, n'ont nulle part où aller non plus. Ils disent presque exactement la même chose que vous.
    Eva, vous avez dit « rien ne se fera pour nous sans nous » et c'est une phrase importante dans de nombreux domaines que nous abordons.
    Je vais commencer avec Anita, si vous me le permettez.
    Anita, en ce qui a trait aux Premières Nations, d'après ce que j'ai vu lors de mes visites des refuges pour femmes, la nature secrète des lieux est l'une des choses les plus importantes. Souvent, les femmes vont dans un refuge qui ne se trouve pas dans la région où elles vivent en raison de la nature de la violence. D'après ce que je vous entends dire, il semble que ce soit plus difficile à faire dans certaines communautés des Premières Nations, qui sont plus petites, et où les femmes souhaitent peut-être rester. Est-ce que c'est un gros problème?
    Oui, c'est un grand problème; je vous remercie d'en parler. Vous parlez de la nature secrète des lieux, mais dans les petites communautés, tout le monde sait où se trouve le refuge. Bon nombre des Premières Nations comptent une population inférieure à 1 000 personnes et sont très isolées. La confidentialité est un enjeu très important.
    L'idée d'un lieu secret est un mythe. On peut prendre certaines mesures avant de construire un refuge. Premièrement, on étudie minutieusement l'emplacement du refuge et on peut par exemple le construire près d'un détachement de la GRC ou d'un service de santé, pour des raisons de sécurité. Bon nombre des femmes et des enfants qui font appel aux refuges dans les réserves ont aussi besoin de soins médicaux.
    Nous pouvons restreindre l'accès aux refuges en plaçant des caméras de sécurité, par exemple, mais c'est un enjeu important.
    Je vais m'adresser à Dawn, car je sais d'expérience qu'on a souvent tendance à négliger ceux qui témoignent par vidéoconférence au profit de ceux qui sont ici en personne.
    Dawn, lorsque je pense aux enjeux comme celui dont nous discutons aujourd'hui... Si vous discutez avec eux, les députés de tous les partis démontreront beaucoup d'empathie et conviendront évidemment de l'importance de cet enjeu. Nous avons peut-être des façons différentes de traiter ces choses, mais nous avons tous, au gouvernement, des ressources limitées. Nous devons toujours composer avec de multiples priorités. Quand on pense aux populations vulnérables dans ce monde, cela va des enjeux de santé mentale aux questions liées aux aînés, aux anciens combattants et aux personnes handicapées, comme je l'ai mentionné, pour n'en nommer que quelques-uns.
    Que fait-on pour réduire la nécessité de recourir à ces ressources? Selon votre expérience, voyez-vous dans la société, en particulier chez les hommes, une évolution des attitudes qui fait ou fera en sorte que les besoins en refuges diminueront — espérons-le —, ou est-ce le contraire? Je n'ai pas beaucoup d'expérience dans ce domaine. Qu'en pensez-vous, selon votre expérience ou votre expertise?
    À vrai dire, les besoins sont en hausse.
    Je tiens aussi à dire que beaucoup d'hommes sont nos alliés et appuient le travail que nous faisons, mais nous accueillons plus de personnes malgré tout. Notre refuge est toujours plein et les séjours sont plus longs. Ce que je veux dire, c'est que les femmes séjournent généralement au refuge pendant 30 jours, mais c'est irréaliste, étant donné le manque de logements sécuritaires et abordables. Dans notre communauté, en particulier, les loyers dépassent l'entendement. Beaucoup de gens refusent de louer aux mères célibataires sur l'aide sociale, car ils peuvent louer à une personne qui a les moyens de payer un loyer plus élevé, qui a un emploi, qui n'a pas d'enfant et qui n'a pas un passé qui pourrait avoir une incidence sur le maintien en état de leur investissement, c'est-à-dire le logement locatif.
    Cela répond-il à votre question?

  (1605)  

    Oui.
    J'ai une autre question à ce sujet. Dans les domaines où j'ai travaillé, j'ai constaté qu'une des choses qui donnent des résultats, peu importe les ressources... On pourrait dire qu'il faut plus de ressources, mais nous avons constaté, quel que soit le niveau de ressources, que la mise en commun de pratiques exemplaires change vraiment la donne, comme quelqu'un l'a indiqué aujourd'hui.
    Au pays, dans quelle mesure le milieu est-il axé sur le réseautage, le partage des ressources et le désir de trouver des points communs? J'imagine qu'il existe, dans pratiquement tous les secteurs d'activité, divers points de vue sur ce qui fonctionne et ne fonctionne pas, mais souvent, lorsque les intervenants se rencontrent, ils trouvent des points communs et peuvent vraiment progresser. Y a-t-il un domaine dans lequel cela fonctionne pour ce type d'enjeux?
    Je peux vous dire ce qu'il en est ici, à Nanimo.
    Notre organisation travaille avec acharnement pour favoriser la collaboration dans la communauté. Notre directrice générale a pris l'initiative d'inviter divers intervenants à discuter pour que nous puissions agir de façon concertée. Par exemple, notre programme « Men Choose Respect » est un programme destiné aux hommes qui ont reconnu avoir des comportements pouvant mener à la violence et qui aimeraient changer avant d'en arriver là.
    Nous avons aussi un partenariat avec deux autres organisations qui interviennent auprès des hommes qui sont tenus de participer à des séances de counseling et les groupes de discussions. En partenariat avec ces deux organismes, nous avons réussi à mettre en place un continuum de services pour les hommes qui aimeraient modifier leurs comportements. Il s'agit parfois d'hommes qui ont eu des démêlés avec la justice ou qui sont en probation, et qui sont tenus de participer à un programme plus intensif.
    Nous avons réussi à faire cela...
    Donna, je vous ai laissé continuer un peu plus longtemps, mais je dois vous interrompre. Je suis vraiment désolée. Nous passons maintenant à Sheila Malcolmson, pour sept minutes.
     La parole est à vous, Sheila.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie la représentante de Hiatus House. Votre témoignage correspond essentiellement à notre conclusion. Vos propos sont extrêmement puissants, très éloquents, terribles et véridiques. Je vous remercie de votre témoignage.
    Pour la représentante de Haven Society de Nanaimo, la circonscription que je représente, je suis extrêmement fière du travail que vous faites. En réponse à la question sur la collaboration posée par mon collègue, votre directrice générale, Anne Taylor, a indiqué que vous collaborez. La collaboration est phénoménale dans le mouvement féministe et en particulier dans le milieu des refuges, mais vous devez sans cesse prouver l'ampleur de cette collaboration lorsque vous présentez des demandes de financement pour divers programmes. Vous devez créer de nouveaux programmes pour démontrer votre capacité de collaboration et offrir un service qui n'existait pas auparavant. Selon les commentaires que j'ai entendus de nombreux intervenants, vous faites toutes sortes de contorsions pour inventer de nouvelles choses, alors que tout ce que vous voulez, essentiellement, c'est offrir une rémunération adéquate aux travailleurs, payer l'électricité et le loyer et assurer la prestation de services de base.
    Vendredi, le NPD a lancé une nouvelle campagne à Nanaimo. Lesley Clarke, du Women's Resource Centre de Nanaimo a notamment indiqué qu'elle a l'impression, particulièrement pour son organisation et les femmes qui participent à ses programmes, que le filet de sécurité qu'elle construit est un château de cartes. Les programmes constituent la base de ce château de cartes, mais ils doivent être éliminés après un certain temps, puisqu'ils ne sont plus novateurs et ne sont donc plus financés.
    Voilà ce que nous essayons de faire comprendre au gouvernement. Il doit financer les programmes de base pour que les femmes de partout au pays puissent toutes avoir accès à la sécurité et pour que les refuges puissent simplement poursuivre leurs activités à cette fin. Pouvez-vous nous donner une idée des coûts que cela représente? Quelles pratiques exemplaires avez-vous abandonnées pour avoir droit au financement pour les nouveaux programmes qu'on offre au lieu d'investir dans les programmes de base?

  (1610)  

    Je pense que Lesley a visé juste lorsqu'elle a dit que pour demeurer ouvert et payer l'électricité, il faut parfois abandonner les services de base pour les réinventer, alors que rien n'a changé, en fait.
    Je pense en particulier à la maison transition. Nous avons 17 lits; 10 pour les enfants et 7 pour les femmes. Pour offrir les services que nous voulons offrir, nous devons les réinventer, c'est-à-dire créer les groupes. Nous en avons plusieurs, notamment 16 Steps for Discovery and Empowerment, Weaving Our Voices ou Process of Change, mais ce sont essentiellement des groupes de soutien par les pairs dirigés par des femmes.
    Quant aux services aux enfants, nous avons le programme PEACE, anciennement le programme Children Who Witness Abuse. J'oublie la signification de l'acronyme, Sheila, car je suis un peu nerveuse en ce moment. Nous avons renommé le programme, mais en fin de compte, nous offrons aux enfants, aux familles et aux aidants des services et du soutien pour les aider à composer avec les mauvais traitements et la violence dont les enfants ont été témoins.
    Quant au logement, nous avons dû faire preuve d'une grande créativité dans nos interventions auprès des propriétaires et d'autres partenaires de la communauté, comme la Nanaimo Affordable Housing Society, pour que les femmes puissent quitter les refuges et vivre à long terme dans un logement sécuritaire et abordable.
    Donc, il faut être extrêmement créatif et essayer d'optimiser les ressources. Il faut être résolu à offrir ce service en toutes circonstances, car on ne sait pas à quel moment le financement disparaîtra.
    Je pense que presque tous les témoins ont indiqué qu'il y a un prix à payer — la sécurité — lorsque les services sont interrompus et qu'on refuse des services à des femmes qui ont eu le courage de demander de l'aide.
    Mme Dawn Clark: Oui.
    Mme Sheila Malcolmson: Quoi qu'il en soit, vous collaborerez et innoverez. Ce sont simplement les règles du jeu.
    Exactement. La bonne nouvelle, c'est qu'en Colombie-Britannique, nous avons une formidable association de maisons de transition et de refuges. Nous pouvons donc communiquer avec d'autres refuges du réseau lorsque nous manquons de place ou lorsqu'une personne doit quitter la communauté pour des raisons de sécurité. Nous pouvons ensuite aider cette femme et ses enfants à se rendre ailleurs. Cela dit, refuser quelqu'un par manque de place est très difficile.
    Leur vie est en jeu.
    En effet.
    Je n'ai vraiment pas beaucoup de temps. Je suis vraiment désolée.
    Madame Anita Olsen Harper, je tiens à vous poser d'autres questions sur le travail. Cela nous sera très utile pour notre étude. Cela m'attriste de savoir que nous en sommes à notre dernière réunion consacrée aux témoignages.
    Vous êtes la seule à avoir parlé directement des enjeux qui touchent les Autochtones, et je sais qu'Hébergement femmes Canada a exprimé des préoccupations à ce sujet. Selon vous, quelles autres personnes devions-nous inviter à témoigner? J'essaierai ensuite de voir si nous pouvons trouver un peu de temps pour entendre d'autres témoignages.
    Je pourrais certainement le faire. Pas maintenant, toujours?
    Vous pourriez nous dire si vous considérez que cela nous serait utile, et vous pourriez nous envoyer des suggestions plus tard.
    Oh, bien sûr. Vous pourrez entendre autant d'Autochtones que vous voudrez sur cet enjeu; beaucoup de femmes aimeraient en discuter. Je ne sais pas vraiment pourquoi je suis la seule Autochtone à traiter de cette question, car nos taux de violence familiale sont de loin supérieurs au taux moyen au Canada, et ils sont encore plus élevés au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest. Vous n'aurez aucune difficulté à trouver des femmes prêtes à venir en parler.

  (1615)  

    Merci.
    Madame la présidente, j'aimerais présenter un avis de motion.
Que, nonobstant la motion adoptée par le Comité le mardi 19 juin 2018 en ce qui concerne l’étude sur le réseau de refuges et de maisons de transition qui desservent les femmes et leurs enfants affectés par la violence faite aux femmes et la violence par un partenaire intime, le Comité prolonge la durée de son étude afin d’y inclure les témoins d’organismes, de refuges et de maisons de transition de femmes autochtones, ainsi que des femmes autochtones suite au manque de voix autochtones durant cette étude.
    Merci.
    Puis-je aussi faire une recommandation?
    Concernant les femmes autochtones, vous devriez inviter des survivantes, en particulier celles qui n'ont pas leurs enfants et qui ont perdu leurs enfants en raison de la situation de violence familiale. En fait, elles ne les ont pas perdus; ils leur ont été retirés.
    Pourriez-vous inclure ces voies à la table? Ce sont les voix que j'entends au téléphone lorsqu'il m'est impossible de les accueillir au refuge. On leur enlève leurs enfants parce qu'ils ne peuvent être en sécurité. Je vous en serais reconnaissante.
    Merci beaucoup.
    Vous avez l'avis de motion, alors c'est fait.
    Nous poursuivons.
    Bob, la parole est à vous, pour sept minutes.
    Merci à toutes. C'est vraiment fascinant et troublant.
    Je viens du milieu municipal. Donc, à titre de conseillers — j'étais maire de Hamilton —, nous observions ces problèmes sur le terrain. À titre d'exemple, Mission Services souhaitait utiliser un bâtiment, et je leur ai suggéré de le vendre. Au début, ils étaient réticents, mais ils ont fini par le vendre pour 700 000 $. Ils se demandaient quoi faire, maintenant qu'il était vendu. Nous leur avons trouvé un bâtiment excédentaire mieux adapté, au prix de 350 000 $. C'était en 2008-2009. Les prix ont augmenté depuis, mais ce qu'il faut retenir, c'est qu'ils ont pu utiliser leurs actifs pour améliorer leur situation.
    Ma question s'adresse à chacune d'entre vous. J'aimerais savoir si vous avez aussi des liens avec une municipalité et si ces gens sont informés et conscients des enjeux. Ils ont des immeubles vacants, des propriétés, et toutes sortes de choses qui pourraient vous être utiles.
    Je demanderai à Dawn de répondre en premier, suivie de Eva et Anita.
    Dawn, avez-vous des liens avec la municipalité de Nanaimo? Vous est-elle avantageuse?
    Oui; notre maison de transition actuelle est située sur une propriété de la municipalité. Nous avons un bail de 99 ans. L'immeuble nous appartient, mais le terrain appartient à la municipalité. Ce partenariat a été établi en 1993 et nous payons un dollar par année pour l'utilisation du terrain.
    Vous savez quoi? Je vais en faire une affaire très personnelle et remonter jusqu'à une certaine époque, à Ottawa, parce que c'est là où nous sommes en ce moment et que c'est ma ville natale. On suggère souvent d'utiliser des immeubles vacants. Je regarde ma communauté et je vois, à Windsor, qu'il y a des immeubles vacants et je me demande parfois pourquoi.
    Je suis aussi convaincue que les femmes et les enfants méritent les services de meilleure qualité possible et qu'on ne devrait pas utiliser un immeuble en mauvais état qu'on répare un peu n'importe comment. Donc, je suis reconnaissante lorsque l'endroit est bien.
    Je vais utiliser la ville d'Ottawa de 1983-1984 comme exemple. En 1983, les policiers d'Ottawa ont déménagé dans leur tout nouvel immeuble sur Elgin. L'ancienne station de police du 60, rue Waller, est devenue un refuge pour sans-abri et un refuge d'urgence pour les femmes et les enfants. J'ai commencé à y résider quelques jours avant Noël et j'y suis restée jusqu'en février de l'année suivante, 1985. L'immeuble était en mauvais état et il a fini par être démoli, je pense. C'est là que se trouve la nouvelle Galerie d'art de l'Ontario.
    Quant à savoir si l'endroit convenait à accueillir des femmes et des enfants, nous étions dans une petite pièce qui avait probablement été une salle d'interrogatoire, d'après ce que j'ai compris. Les fenêtres étaient si hautes qu'on ne pouvait les atteindre. Il y avait des banquettes en ciment sur lesquelles on avait déposé de petits matelas en mousse, et une toilette en acier. Je ne pense pas que c'était l'endroit idéal pour accueillir des enfants, pour faire un refuge pour sans-abri. Je vous inviterais à étudier attentivement ces solutions et à chercher à savoir ce qu'elles représenteraient dans les différentes communautés. Lorsqu'on fait bien les choses, c'est formidable, mais je pense que nous sommes...
    La solution n'est pas dans la brique ou le béton. Je ne crois pas qu'il suffise d'ériger des bâtiments pour assurer le bonheur général. En fait, je cherche à savoir comment nous pouvons, si nous élaborons un programme gouvernemental, un programme d'investissements, maximiser les actifs pour répondre à tant de besoins dans tout le pays? C'est le témoignage qui nous arrive de partout au Canada.

  (1620)  

    Pour les femmes en attente de logement, nous n'avons pas besoin d'entrepôts, mais de logements.
    Il faut construire un programme pour l'éviter. Voilà pourquoi je dis que nous avons besoin de nouer des rapports avec les villes pour nous aider à collaborer à l'obtention de meilleurs résultats. N'allez pas croire que je veux mettre des gens... C'est arrivé à Hamilton, et c'était dégoûtant. Les endroits, les logements de la ville étaient épouvantables, à cause de l'indifférence des gestionnaires. C'est la raison pour laquelle je suis ici. Pour que ça ne se répète plus.
    Anita, avez-vous une idée de la situation des femmes autochtones dans les refuges hors réserve, parce qu'il y en a là et dans les réserves? Il y en a tellement et, à Hamilton, elles sont nombreuses. Connaissez-vous bien leur situation?
    Tout d'abord, l'écart entre le niveau municipal de services et les services dans la réserve, ou, simplement, entre les municipalités et les réserves, est tellement grand. Les réserves sont de compétence fédérale, et beaucoup se trouvent dans des régions isolées. Non seulement les municipalités sont-elles la sphère inférieure de pouvoirs, mais les provinces aussi sont en quelque sorte prises entre les deux, pour ce qui concerne les refuges dans les Premières Nations. Nous avons vraiment très peu de rapports avec les municipalités.
    Je sais que, à Hamilton, il y avait un refuge pour les hommes autochtones, les sans-abri, qui bénéficiait d'un financement fédéral. Voyons la situation dans la réserve. Comment faites-vous de la place aux femmes dans la réserve?
    La construction de refuges dans les réserves a battu son plein au début des années 1990, il y a donc 20 ou 25 ans, après l'élan observé dans la population générale. Le financement par l'entremise de la Société canadienne d'hypothèques et de logement ne concernait que les bâtiments proprement dits. À la fin de la construction, la bande se faisait dire: « Voilà votre refuge. À vous maintenant de le diriger ».
    La bande ne pouvait compter sur aucune méthode de travail organisé et efficace. Au tout début, c'était très empirique, et les erreurs ont été nombreuses. C'est beaucoup mieux maintenant. Par exemple, le Cercle national autochtone contre la violence familiale a fait des études, et nous aidons les directrices de refuges à appliquer des politiques et à se communiquer mutuellement, à tous les niveaux, des pratiques exemplaires.
    De nouveaux refuges viennent d'ouvrir, par exemple à Nelson House, dans le nord du Manitoba. Habituellement, il s'en ouvre — combien donc? — trois ou quatre tous les cinq ou six ans. Comme, pour les plus de 600 Premières Nations du Canada, il n'y en a que 40, il est très évident que les réserves sont mal desservies.
    Voilà un témoignage éloquent. Je vous en remercie.
    Merci beaucoup.
    Entamons le deuxième cycle de questions. Nous aurons du temps pour deux questionneurs. Jim, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie, toutes les trois, de votre travail auprès de différentes sociétés et associations. J'ai été 35 ans dans la police, surtout dans la police autochtone, et le service que vous rendez est tellement formidable. Je me souviens, il y a tellement d'années, qu'il n'y avait tout simplement rien. Une fois, j'ai appelé ma femme, au milieu de la nuit, pour qu'elle y fasse dormir nos enfants dans notre lit, parce que j'accueillais des gens à la maison. C'est ce qu'il faut faire dans beaucoup de communautés rurales, parce que, cette fois-là, il n'y avait rien pour ces gens. C'était à nous de fournir la protection.
    Vous vous êtes toutes exprimées. Je pense que vous êtes ici parce que vous constatez le besoin, pour le gouvernement fédéral, d'intervenir. Vous avez tellement raison.
    Eva d'abord, Anita ensuite, puis Dawn, sur le financement que vous obtenez aujourd'hui pour faire fonctionner de vos établissements, quel est le pourcentage d'origine fédérale, provinciale ou communautaire, que ce soit par des activités de financement ou par des subventions municipales et ce genre de choses?
    Les organismes communautaires tels que la police, les services sociaux et les professions médicales sont-ils au courant des services que vous offrez et collaborent-ils avec vous assez étroitement ou devons-nous mieux garantir leur aide?
    Merci.
    Allez-y, Eva.

  (1625)  

    Dans notre communauté, la plus grande partie du financement d'Hiatus House, heureusement, est d'origine fédérale. Le reste est d'origine provinciale et non municipale. La municipalité finance les refuges de sans-abri. Ça fait partie, je crois, de la répartition des missions. À l'échelon municipal, le financement est tellement indigent que personne ne veut en bénéficier.
    La collaboration des organismes qui nous appuient est absolue. Ils dirigent continuellement vers nous des clients.
    La triste vérité est qu'ils savent aussi que nous manquons toujours de place, ce qui les amène à nous consulter pour savoir où envoyer, pour la nuit, telle femme sauvagement battue. La police intervient. Il a fallu refuser la femme. Ça m'est arrivé il n'y a pas longtemps, quand j'étais postée de nuit. Une femme et son bébé de quatre mois. Je me suis adressée à Sarnia, Chatham, Strathroy et London. Jusqu'où doit-elle aller pour obtenir un lit dans un refuge?
    Je vois. Je pense que nous voyons. Je veux seulement que chacune ait la chance de le dire.
    Anita.
    Merci.
    Dans la réserve, le financement est entièrement fédéral. Les directrices des refuges rédigent des propositions pour répondre aux besoins particuliers de leur refuge — sièges de sécurité pour enfant, par exemple. Parfois, ça signifie obtenir de petites sommes à des fins particulières. Souvent.
    Les organismes communautaires collaborent-ils avec nous? Oui, et j'apprécie ce que vous avez fait pour aider les femmes et les enfants victimes de violence.Meegwetch.
    Nous ne recevons pas de financement fédéral. La plus grande partie de notre financement provient de la province, par l'entremise du programme d'aide aux femmes de BC Housing. De 10 % à 15 %, peut-être, provient de dons privés. Nous rédigeons continuellement des demandes de subventions pour financer le travail réalisé à la maison de transition.
    Par exemple, notre ligne d'écoute téléphonique, qui est le premier point de contact des femmes qui veulent obtenir notre service, n'est pas financée. Nous la prenons donc entièrement à notre charge. Elle est indispensable aux femmes qui s'adressent à nous. C'est un exemple seulement d'un maillon insuffisamment financé, qui a besoin de financement.
    Très bien. Il me reste cinq secondes.
    Très bien. Excellent travail.
    À Pam maintenant.
    Merci, madame la présidente.
    Pour enchaîner, après la question de mon collègue, toutes les organisations qui ont témoigné devant nous ont souligné la nécessité d'un financement de base. Je ne dis pas non, mais si vous voulez diriger des refuges pour les femmes — et nous souhaitons tous que ce sera temporaire, mais ils existent depuis 45 ans — et si un gouvernement accorde ce financement, ça reste fragile comme nous le voyons en Ontario, où les programmes de services sociaux subissent des coupes sombres.
    Comment vous facilitez-vous la tâche de recevoir des subventions ou d'autres financements, en sachant que les gouvernements changent? Si nous devions accorder un financement de base, un gouvernement qui nous succéderait pourrait tout faire disparaître, comme ça s'est produit en Ontario. Vous seriez alors vraiment dans le pétrin.
    Eva, vous hochez la tête. Avez-vous des idées sur la façon de rendre plus utile pour vous le programme de subventions? Comment pouvons-nous intervenir?
    Je ne suis pas une rédactrice de demandes de subventions. Je travaille en première ligne. Voici le point de vue d'une survivante: uniquement parce que le gouvernement change, ce n'est pas une raison pour nous passer des pompiers, des ambulanciers et de la police. Pourquoi ne sommes-nous pas un service essentiel?
    Il m'est venu à l'idée que le financement semblait provenir du ministère de la Condition féminine. Je me demande s'il ne devrait pas provenir de la Sécurité publique. Au lieu de croire que c'est un problème féminin et d'en financer la solution par le ministère de la Condition féminine, qui a très peu d'argent, est-ce que ça ne devrait pas être confié, à la faveur d'un changement complet des mentalités, à la Sécurité publique?

  (1630)  

    Le service d'incendie ne répond jamais que, aujourd'hui, le nombre d'incendies est malheureusement excessif et que la personne qui appelle devra se passer de son aide. La police non plus ne donne pas ce genre de réponse.
    Si nous sommes un service essentiel, nous ne refuserons pas d'héberger une personne pour la nuit. Nous accordons des services conformément aux besoins nationaux. Il faut nous considérer comme un service essentiel. C'est ma vision.
    Il faut que ce soit compliqué.
    Les autres témoins ont-elles une opinion à ce sujet?
    Pour les refuges pour femmes dans la réserve, qui reçoivent un financement fédéral, il devrait exister une formule bien établie de financement à l'échelon du district, pas même à celui de la province. Nous constatons d'importantes différences géographiques selon leur emplacement.
    Je suis d'accord, ce n'est pas un problème féminin, et c'est Services aux Autochtones Canada qui finance les refuges dans les réserves.
    Deux témoins du Nord nous ont parlé des problèmes qui sévissent dans les Territoires du Nord-Ouest et au Yukon — les déficiences des transports, les obstacles pour s'en prévaloir et ainsi de suite.
    Il ne me reste que deux minutes, Dawn, mais je me demande ce que vous en pensez.
    Il importe que l'État accorde de la valeur aux femmes et aux enfants, qu'il les considère comme des plus. Les interruptions du financement de base après des changements de gouvernement sont révélatrices d'une minimisation du problème. Je pense qu'il faut un meilleur éclairage de tout le problème de la violence et des moyens de mieux soutenir les familles, qui sont notre avenir.
    Madame Harper, avec tout votre travail dans les communautés rurales et autochtones, à quelle fréquence les armes à feu sont-elles un facteur qui dirige les femmes vers votre refuge?
    Je ne peux vraiment pas répondre. Le taux d'homicides en milieu familial dans les populations autochtones est au moins cinq fois plus élevé que le taux national moyen. Les homicides sont souvent par balles, mais je ne peux pas vous fournir de statistiques à ce sujet.
    Et vous, mesdames?
    C'est l'une des questions à haut risque que nous nous posons. Compte tenu de la population du refuge, ce serait l'un des facteurs qui la qualifient. Les statistiques risquent d'être un peu biaisées, parce que les armes à feu élèvent considérablement le risque, ce qui conduit à une fréquence accrue d'admissions dans le refuge.
    Je suis d'accord. Dans nos évaluations, nous privilégions beaucoup la sécurité. C'est simplement notre travail.
    Merci beaucoup. Vous nous avez apporté d'excellents témoignages.
    Eva, Anita, Dawn, merci beaucoup pour tous vos renseignements.
    Je suspends les travaux deux minutes. Au retour, nous serons avec Pam.

  (1630)  


  (1635)  

    Soyez les bienvenus à la 122e séance du Comité permanent de la condition féminine. Je suis ravie d'accueillir, pour la deuxième heure, les représentants du Centre canadien de la statistique juridique de Statistique Canada, c'est-à-dire son directeur, M. Yvan Clermont, et sa directrice adjointe, Mme Kathy AuCoin.
    Je vous cède maintenant la parole pour votre déclaration préliminaire, pour laquelle vous disposez de sept minutes.

[Français]

    Bonjour.
    Je vous remercie de me donner aujourd'hui l'occasion de présenter les résultats qui, nous l'espérons, permettront d'éclairer la discussion sur la demande de places dans les refuges pour les femmes qui cherchent de l'aide en raison de violences exercées par un partenaire intime. Je vais présenter des données obtenues auprès des services de police ainsi que des données issues d'une enquête menée auprès des refuges.
    Vous trouverez nos principales constatations à la diapositive no 2 de la présente présentation. Au cours des trois dernières années, la violence conjugale envers les femmes exercée par un partenaire intime a légèrement augmenté, soit de 4 %. Les taux de violence conjugale étaient les plus élevés dans les territoires, en Saskatchewan et au Manitoba. La dernière collecte de données dans les refuges nous a permis de constater qu'une femme sur quatre y avait déjà cherché refuge. En outre, plus de la moitié des femmes qui cherchaient un refuge en raison de la violence y étaient accompagnées de leurs enfants. J'aimerais également souligner que nous disposons de nouvelles données sur les refuges, qui seront disponibles au printemps prochain. À notre avis, elles seront cruciales pour le travail de ce comité.
    La diapositive no 3 présente des données provenant de l'enquête sur les maisons d'hébergement. Ces données ont été collectées pour la dernière fois en 2014. Cette année-là, plus de 600 refuges au Canada offraient des services aux femmes et aux enfants de ces dernières qui fuyaient la violence familiale. Au total, ces refuges ont fourni plus de 12 000 lits. Les provinces disposant du plus grand nombre de refuges étaient l'Ontario, le Québec et la Colombie-Britannique. Le jour du décompte, plus de la moitié des femmes qui avaient recours à ces refuges étaient âgées de moins de 35 ans, et plus de 7 femmes sur 10 étaient à la recherche d'un refuge dans une grande ville. En 2014, il y avait en moyenne 19 lits par établissement.
    Passons maintenant à la diapositive no 4, qui dresse le portrait de la capacité au regard du nombre d'incidents de violence mettant en cause des partenaires intimes. Nous savons qu'au cours de la même année, environ 70 000 femmes ont été victimes de violence exercée par un partenaire intime. Ces actes de violence avaient été déclarés par la police. Encore une fois, le nombre le plus élevé de victimes a été observé en Ontario, au Québec et en Colombie-Britannique, soit les trois plus grandes provinces du pays.
    Un autre point de données devant être pris en compte est le taux de violence entre partenaires intimes. Dans ce contexte, nous considérons le nombre de victimes et les différences entre les populations. De cette façon, nous constatons quelles régions sont les plus exposées à un risque. En 2014, comme pour la criminalité en général, les régions affichant les plus hauts taux de violence exercée par un partenaire intime étaient les trois territoires ainsi que la Saskatchewan, le Manitoba et l'Alberta.

[Traduction]

    La diapo 5 révèle que la majorité des femmes accueillies dans les refuges en 2014 ont dit avoir fui une situation de violence, et 78 % d'entre elles ont déclaré que leur agresseur était un partenaire intime.
    Le graphique de la diapo 6 montre les diverses formes de violence incriminées par les femmes accueillies par le refuge. À noter que chaque victime peut en incriminer plus d'une. Le graphique les énumère. Par exemple, les deux tiers de ces femmes ont dénoncé la violence psychologique; la moitié, la violence physique; 21 % ont déclaré que la violence sexuelle les avait incitées à chercher un refuge, et plus du quart voulaient éviter à leurs enfants d'être des témoins de la violence.
    La diapo 7 met en relief les problèmes de manque de place. En 2014 en une journée représentative particulière, plus de 300 femmes et 200 de leurs enfants se sont vu refuser l'entrée d'un refuge. Plus de la moitié faute de place dans le refuge. Parmi les autres motifs invoqués, citons des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie, 8 %; des problèmes de santé mentale, 6 %; une liste noire de personnes à ne pas admettre ou faisant l'objet de mises en garde, 4 %.
    Autres données d'une importance capitale: le quart des résidentes accueillies en cette journée particulière avaient déjà séjourné dans le refuge, c'est-à-dire qu'elles y revenaient; 37 % d'entre elles une fois dans les douze derniers mois; 17 % deux ou trois fois; 30 %, plus d'un an auparavant.

  (1640)  

    De plus, près de la moitié des résidentes n'avaient pas signalé la violence dont elles avaient été victimes à la police.
    Voyons maintenant les services offerts par ces refuges. D'après le dernier volet de l'étude des maisons de transition de 2014, elles offraient une gamme de services aux résidentes, notamment du counselling, des services de transport ou, encore, elles les dirigeaient vers des logements. Beaucoup de refuges étaient également en mesure de satisfaire aux divers besoins des femmes et des enfants autochtones.
    Jusqu'ici, j'ai présenté des renseignements rassemblés en 2014, la dernière année où nous l'avons fait sur les refuges. Voyons maintenant les résultats d'une analyse des tendances de la violence subie par les femmes aux mains d'un partenaire sexuel et signalée à la police, d'après les déclarations uniformisées de la criminalité.
    À l'échelle du Canada, le taux de violence aux mains d'un partenaire intime a constamment diminué de 2009 à 2014. Mais, depuis, il a augmenté de 4 %, presque toujours sous l'effet d'une augmentation du nombre de femmes victimes.
    Voyons maintenant les différences régionales.
    Les augmentations les plus importantes en trois ans ont été observées dans les Territoires du Nord-Ouest, au Manitoba et dans l'Île-du-Prince-Édouard, tandis que des diminutions ont été observées au Yukon, en Colombie-Britannique et en Alberta. Rappelez-vous qu'il s'agit de pourcentages de variation. Globalement, le taux de violence exercée contre les femmes par le partenaire intime reste beaucoup plus élevé dans les territoires et plus élevé au Manitoba et en Saskatchewan qu'en Colombie-Britannique et dans l'Est.
    En guise de conclusion, j'attire votre attention sur deux nouvelles enquêtes qui se trouvent encore au stade de la collecte et du traitement des données et qui apporteront des renseignements à votre recherche indispensable.
    La première est l'enquête sur les établissements d'hébergement pour les victimes de violence, qui remplace l'enquête sur les maisons de transition réalisée pour la dernière fois en 2014. Elle permettra de recueillir de nouveaux renseignements importants qu'énumère la diapo 11. Plus particulièrement, elle nous renseignera sur les caractéristiques des résidents des refuges, selon l'âge et le sexe, puis selon leur appartenance à un peuple autochtone ou à une minorité visible, leur statut de résidence, leurs éventuels handicaps et, le cas échéant, le type de handicap. Les premiers résultats seront accessibles le printemps prochain, en 2019.
    Puis, vers la fin de l'été 2019, Statistique Canada publiera des données de la nouvelle enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés, des renseignements utiles à votre comité — on demandera notamment aux victimes de la violence aux mains de partenaires intimes de dire si cette violence leur a fait fuir leur foyer et, dans l'affirmative, vers quel endroit elles se sont dirigées. Ces données, qu'on appariera avec de nombreuses caractéristiques individuelles et d'autres résultats sur la victimisation, présenteront une image très intéressante de la situation.
    L'exposé se termine ici. Nous sommes prêts à répondre à vos questions. Merci.

  (1645)  

    Je vous remercie de vos exposés.
    Nous allons commencer notre premier tour de sept minutes avec Marc Serré.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Clermont, je vous remercie beaucoup de votre présentation et du travail que vous faites ici.
    Il y a beaucoup d'informations à assimiler. J'aurais en effet plusieurs questions par page. Vous avez parlé de statistiques compilées en 2014, puis d'autres données à venir pour 2019. Vous avez aussi fait allusion à un nouveau rapport.
    Vous avez entendu plusieurs témoins parler du manque de données et du besoin d'en obtenir davantage. J'aimerais savoir comment il serait possible d'enrichir ces éléments d'information et de trouver des ressources additionnelles pour vous aider.
    Premièrement, pouvez-vous expliquer un peu la différence qui existe entre les deux rapports?
    Je le ferai avec plaisir, monsieur Serré.
    La question porte sur l'enquête ayant trait aux maisons de transition, qui est un type d'enquête où les données sont agrégées. Je ne voudrais pas trop entrer dans les détails, mais je dirai tout de même que nous avons mené cette enquête tous les deux ans jusqu'en 2014. À ce moment-là, nous avons éprouvé le besoin de remanier l'enquête de façon à ajouter des éléments d'information importants et à réévaluer les données de base qui étaient utilisées pour l'enquête, car elles étaient déficientes à certains égards.
    Nous avons effectué ce remaniement, et nous allons être en mesure de procéder à nouveau à cette enquête. Nous en sommes présentement à l'étape de la collecte de données. Le contenu de la nouvelle version de l'enquête sera beaucoup plus détaillé, et nous aurons les premiers résultats au printemps de 2019.
    Pour répondre à la question concernant nos besoins, ou la nécessité de pouvoir compter sur de nouvelles ressources, je peux vous dire que cette enquête est subventionnée par la Société canadienne d'hypothèques et de logement.
    C'est parfait.
    Aux pages 4 et 5, vous donnez également des statistiques par province. Avez-vous aussi des statistiques qui permettent de comparer les réalités urbaine et rurale, au-delà du découpage par province?
    Pour ce qui est des données dont disposent les services de police, c'est possible d'avoir un découpage en fonction des réalités urbaine et rurale.
    Toutefois, vous n'avez pas cette information, n'est-ce pas?
    Nous ne les avons pas ici, dans la présentation, mais nous pourrions les produire, au besoin, dans une autre réunion.
    Pourrez-vous donner l'information au greffier?
    Oui, absolument.
    D'accord.
    À la page 2, vous parlez de violence mettant en cause un partenaire intime. De quel genre de statistiques disposez-vous? Par exemple, avez-vous de l'information sur des actes de violence commis au moyen d'une arme à feu? Encore une fois, il y a également la question du découpage suivant les réalités urbaine et rurale.
    Lorsqu'il s'agit de données fournies par les services de police, nous sommes en mesure de dire si le partenaire a fait usage d'une arme à feu. Le 5 décembre, nous produirons un rapport sur la violence familiale faisant état, justement, de l'usage d'une arme à feu lors d'actes de violence commis par un partenaire intime.
    D'accord.
    À la page 5, vous illustrez les formes de violence, qui peuvent englober, par exemple, la dépendance.
    À votre avis et selon votre étude, y a-t-il des statistiques autres que celles actuellement établies qu'il y aurait lieu d'obtenir, et cela pourrait-il faire l'objet d'une recommandation au Comité?
    Parlez-vous de la page 5 de la présentation?
    Je parle en fait des pages 5 et 6.
    D'accord.
    Oui, exactement.
    Madame AuCoin, les types sont-ils plus détaillés dans l'enquête à venir en 2019?
    Nous avons mené des consultations auprès de gestionnaires d'enquête pendant deux ans.

  (1650)  

[Traduction]

    Les trois principaux éléments qu'ils voulaient que nous recueillions étaient les femmes handicapées demandant refuge et les types de handicaps. Quand nous nous sommes penchés sur les femmes autochtones, ils voulaient plus de clarté concernant les femmes des Premières Nations et les Métisses. Ils étaient satisfaits des questions sur les formes de violence.
N'oubliez pas que ce n'est qu'un des outils. Nous avons aussi l'Enquête sociale générale — Victimisation, qui mise sur l'autodéclaration et grâce à laquelle nous obtenons beaucoup d'information détaillée sur les types de violence que les femmes subissent. Nous obtenons aussi cela grâce au Programme de déclaration uniforme de la criminalité quand une arme a été utilisée, s'il y a eu blessure, alors nous utilisons de multiples sources de données diverses.
    Est-ce que cette enquête est menée tous les sept ans? Je pense que nous avons entendu dans le passé qu'elle devrait être menée plus souvent que cela, mais qu'il faudrait des ressources.
    C'est un énoncé valide. Elle est menée tous les cinq ans, mais en plus, grâce à du financement provenant de Condition féminine Canada, nous menons l'Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés. Elle est en cours et va compléter les données acquises grâce à l'autre enquête. Elle ajoutera à nos connaissances.
    Avec une grande partie de cette information, en 2019, vous aurez des données sur les Premières Nations, l'invalidité et l'immigration, alors que vous n'aviez pas les ressources pour le faire auparavant.
    En effet.
    Comme nous l'avons dit en guise de conclusion à notre exposé, nous aurons de l'information provenant de deux sources différentes, en 2019 — l'Enquête sur les établissements d'hébergement nouvellement remaniée qui donnera des données agrégées et l'Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés.
    Je tiens à vous remercier pour ce travail.
    J'aimerais revenir sur la question de l'invalidité. Nous n'avons pas de données au sujet de l'invalidité. Avez-vous d'autres données que vous pourriez fournir au Comité concernant le soutien donné dans les établissements d'hébergement?
    Le deuxième aspect est celui des dépendances.

[Français]

    Je veux dire en ce qui concerne l'aspect social des dépendances.

[Traduction]

    Ce que les données relatives aux maisons de transition ou aux établissements d'hébergement pouvaient nous dire, c'était le nombre de personnes, de particuliers ou de femmes qui sont refusés à cause de leurs problèmes de dépendance, notamment à l'alcool. Je suis sûre que d'autres témoins vous ont dit que c'est un groupe important de personnes dont les besoins ne sont peut-être pas satisfaits, et on les refuse.
    En plus de cela, ce que nous pouvons fournir, et que nous avons fourni, c'est la prévalence des femmes handicapées et la prévalence des femmes victimes de violence conjugale. Je pourrais vous transmettre un rapport que nous avons produit. Elles courent un plus grand risque.
    Encore là, je suis sûre que vous avez aussi entendu des gestionnaires de refuges vous décrire les services qu'ils peuvent offrir à cette communauté. Les données que nous avons ne se concentrent pas vraiment sur cet aspect, mais je peux vous fournir la prévalence globale des femmes handicapées et leur susceptibilité de subir ce type de violence.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Madame Boucher, vous avez sept minutes.

[Français]

    Je suis nouvelle à ce comité puisque je remplace un député. Je trouve que ce dossier est très important. Mon confrère libéral vous a demandé s'il y a une différence entre la violence en milieu rural et la violence en milieu urbain. Pour ma part, je pense qu'il y en a une.
    Vous avez parlé de violence commise au moyen d'armes à feu. Selon une étude récente au Québec, il y a beaucoup d'actes de violence à l'arme blanche, mais aussi d'autres à mains nues. On met tous ces actes dans la même catégorie pour ne pas cibler que les armes à feu, mais en matière de violence conjugale, on voit toutes sortes de choses un peu partout.
    Dans votre présentation, vous faites beaucoup état de la différence entre la violence exercée chez les Autochtones et les non-Autochtones. Avez-vous fait le même travail concernant les immigrants, dont le nombre est en augmentation au Canada? Subissent-ils la même violence que nous? Quels sont les types d'actes de violence qu'ils subissent selon l'endroit où ils s'établissent ici?
    Je vais tenter de répondre du mieux que je peux à votre première question.
    Il est possible d'établir les différences dans le modus operandi de la violence conjugale en milieu urbain et en milieu rural. Nous cherchons à savoir si ce sont des armes de poing, des armes blanches ou des mains qui ont été utilisées pour commettre les actes de violence. Nous pouvons donc effectuer cette comparaison entre le milieu urbain et le milieu rural. Nous pourrons vous fournir plus de détails à cet effet.
    Vous avez aussi demandé si la violence est différente selon qu'elle s'exerce en milieu autochtone, en milieu non autochtone ou au sein des populations de différentes origines ethniques. Les données policières ne permettent pas de savoir ce qui est signalé pour chacune de ces catégories, étant donné que les services policiers ne sont pas en mesure de donner de façon consistante l'identité autochtone, l'origine ethnique et le statut d'immigrant, tant des victimes que des accusés.
    Dans le cas d'un homicide, c'est différent parce qu'on mènera une enquête beaucoup plus approfondie. Toutefois, dans les cas de voies de faits ou de menaces, les renseignements ne sont pas toujours colligés et traités ici. Par contre, nous pouvons avoir un certain nombre d'indicateurs à partir de l'Enquête sociale générale. Cette enquête par échantillonnage nous permet de faire ces distinctions parce que nous connaissons le statut d'immigrant, l'origine ethnique et le statut autochtone.

  (1655)  

    Merci beaucoup.
    Ai-je encore du temps?

[Traduction]

    Il vous reste trois minutes et demie.

[Français]

    On parle ici de violence exercée par un partenaire intime. Dans le passé, j'ai été secrétaire parlementaire pour la Condition féminine. Je me souviens d'avoir fait un voyage à Iqaluit, dans le Nord. Là-bas, les refuges sont connus de tous. Dans le village, il y a un refuge et tout le monde sait où il est. Dans les autres provinces, à tout le moins au Québec, le partenaire de la femme qui va dans un refuge n'est pas censé savoir où celui-ci se trouve. Est-ce la même chose dans toutes les provinces ou est-ce typiquement au Québec qu'on ne sait pas où se réfugie la victime d'un acte criminel? Avez-vous cette information?

[Traduction]

    Ce serait une excellente question à poser à l'une des associations de refuges. Nous ne posons pas cette question, mais en effet, l'emplacement de la plupart des refuges est confidentiel, pour la protection des femmes. Cependant, d'après ce que je comprends, dans les plus petites collectivités où il n'y a qu'un refuge, il arrive que les femmes quittent la collectivité pour se mettre à l'abri du danger. Le transport devient alors un enjeu. Encore là, ce n'était pas dans l'enquête.

[Français]

    Ce serait donc un point à considérer. Il faudrait que le Comité pose la question directement aux gens des refuges.
    Nous avons vu plus tôt que c'était au Nouveau-Brunswick, au Québec et en Ontario qu'il y avait le plus grand nombre d'actes de violence. Est-ce parce que ce sont des provinces plus vastes? Honnêtement, j'ai été surprise de voir que ce nombre était moins élevé en Colombie-Britannique qu'au Québec et au Nouveau-Brunswick, non pas parce que je trouve cette province plus violente, mais parce qu'il s'agit d'un très vaste territoire et que les cas de violence y sont nombreux.
    Oui. En fait, vous faites probablement allusion aux taux d'augmentation qui ont été notés entre 2014 et 2017.
    En effet.
    Les taux ont changé entre 2014 et 2017. Cela dit, il ne s'agit pas des niveaux. Dans mes notes, j'ai fait la distinction suivante, à savoir que, même si on note qu'il y a des augmentations plus importantes dans certaines de ces provinces et que, même dans les provinces maritimes et au Québec, il y a de plus grandes augmentations, les niveaux demeurent plus élevés dans les territoires et les provinces de l'Ouest, notamment en Saskatchewan, au Manitoba et en Alberta. Vous avez donc raison de le noter. Il s'agit ici de changements au fil du temps. Cependant — et cela aurait pu être illustré ici —, les niveaux sont plus élevés dans les provinces de l'Ouest. Cela suit les tendances générales de la criminalité normalement observées dans ces endroits.

  (1700)  

    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Sheila, vous avez les sept prochaines minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos témoins. Le moment est vraiment bien choisi pour rassembler cette information.
    Le 8 novembre, notre Centre canadien de la justice statistique, à Statistique Canada, a publié un rapport intitulé « Agressions sexuelles signalées à la police au Canada avant et après #MoiAussi, 2016 et 2017 ». Les nombres sont vraiment frappants. Il y a eu 25 % plus de victimes d'agressions sexuelles signalées à la police après que #MoiAussi soit devenu viral. Le nombre moyen de victimes d'agressions sexuelles signalées à la police est passé de 59 par jour, avant #MoiAussi, à 74 par jour après #MoiAussi.
    Ce que j'entends, c'est que cela alourdit le fardeau des organismes d'aide aux femmes de première ligne, qu'ils tiennent des refuges pour femmes victimes de violence familiale ou... C'est dans tous les cas de la prévention des agressions sexuelles. Tout cela est étroitement lié.
    Je suis curieuse de savoir si vous avez des données ou comptez recueillir des données, maintenant que le tabou du signalement est levé, sur la mesure dans laquelle cette augmentation de la demande repousse les limites des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, des centres d'aide aux victimes de viol, des lignes d'assistance et des lignes destinées aux personnes ayant subi des traumatismes. Il y a tant d'éléments qui interviennent sur ce plan.
    Est-ce que Statistique Canada recueille de telles données ou a l'intention de le faire?
    Au cours des deux dernières années, nous avons travaillé avec les directeurs des services aux victimes des provinces et des territoires à une nouvelle enquête dont le but est d'établir le nombre de victimes faisant appel à divers services. Il ne s'agit pas que des refuges. On parle de tous les types de services. Nous faisons un suivi très étroit de cela.
    De même, nous allons regarder de plus près les données des services de police afin de voir si le nombre d'agressions sexuelles signalées à la police se maintient.
    Le rapport sur les signalements avant #MoiAussi et après #MoiAussi que vous avez mentionné est très intéressant. Nous avons fait un suivi trimestriel afin de suivre l'augmentation des agressions sexuelles signalées à la police. Nous avons regardé cela pour chaque province ainsi que pour chaque grande ville. Nous avons noté qu'après le phénomène média #MoiAussi, il y a eu une augmentation très importante, suivie cependant d'une diminution. Nous ne savons pas trop pourquoi. Il pourrait y avoir deux raisons à cela. Nous savons que certains services de police ont fait la promotion de nouvelles lignes d'écoute, et nous savions qu'il y avait des Canadiennes — c'était dans les médias — et peut-être plus de victimes qui se sentaient plus à l'aise de signaler à la police ce qu'elles avaient vécu.
    Nous allons continuer de suivre cela afin de voir si les nombres augmentent, et nous allons travailler avec les directeurs des services aux victimes afin d'en obtenir de l'information.
    Le NPD a trouvé décevant que le gouvernement fédéral n'aille pas jusqu'au bout dans le respect de l'engagement qu'il a pris à l'ONU de créer un plan d'action national pour mettre fin à la violence faite aux femmes. Ils ont dit qu'ils créeraient un plan d'action fédéral, au lieu de cela — ce qui est nettement plus restreint — et qu'ils se concentreraient sur les organismes fédéraux.
    L'un d'eux est Statistique Canada. Ils ont dit qu'ils mettraient de l'ordre dans leurs propres affaires avant de s'acquitter de leur engagement à l'ONU, soit travailler à l'échelle nationale avec les provinces à la création d'un plan applicable d'un océan à l'autre.
    Pouvez-vous nous en dire davantage sur ce que Statistique Canada pourrait entreprendre pour recueillir plus de renseignements au sujet des groupes de première ligne? Ce sont eux qui fournissent les services. Quand des femmes sont refusées, êtes-vous en mesure de dire si c'est parce qu'il n'y a pas assez de lits, parce qu'elles sont incapables de payer leur loyer, ou parce qu'il n'y a pas assez de travailleurs pour fournir les services?
     Dans le cadre de la stratégie fédérale visant la violence faite aux femmes, nous avons reçu du financement de Condition féminine Canada pour l'exécution de trois enquêtes cruciales. L'une est l'Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés. Cette enquête porte sur diverses formes de violence, y compris la violence sexuelle, à savoir si elle correspond à un acte criminel, ainsi que les comportements inappropriés, que ce soit dans un lieu public ou privé. Nous posons des questions sur l'accès aux refuges et déterminons si les victimes ont accédé aux services ou pas.
     Les deux autres enquêtes visent les inconduites sexuelles ou les comportements inappropriés chez les étudiants de niveau postsecondaire. La troisième couvre les milieux de travail. De plus, avec la nouvelle enquête sur les établissements d'hébergement qui est en cours, nous allons déterminer si des femmes, ou même des hommes, ou des membres de la communauté LGB ont été refusés. Dans le cadre de cette enquête, nous allons nous pencher sur des questions de capacité, et nous allons le refaire au printemps.

  (1705)  

    Merci.
    Je vais passer à quelque chose de différent, pour le temps qu'il me reste.
    Dans le sillage des reportages qu'il y a eu pendant la semaine où nous étions absents du Parlement, concernant la stérilisation forcée des femmes autochtones, j'aimerais demander au Comité d'inviter la ministre à parler de cela. J'ai une motion à proposer. Je sais que ce n'est pour l'instant qu'un avis de motion, mais j'espère que les membres du Comité vont accepter de renoncer à l'avis et d'inviter la ministre sans tarder.
    Voici la motion:
Que conformément au mandat du ministre de « renouveler la relation de nation à nation avec les peuples autochtones pour qu’elle soit fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la collaboration et le partenariat » et à l’engagement pris par le gouvernement de respecter l’article 7(2) de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le Comité demande à la ministre de la Santé...
    J'ai écrit « ministre de la Santé », mais j'aurais pu aussi bien écrire « ministre des Services aux Autochtones », si c'est ce qui convient le mieux.
... de comparaître au plus tard en décembre 2018, pour informer le Comité des efforts déployés par le gouvernement pour mettre immédiatement fin à la pratique de la stérilisation forcée de femmes autochtones; et que cette réunion soit télévisée et dure au moins une heure.
    J'aimerais une précision. Voulez-vous que nous voyions si les membres du Comité consentent unanimement à faire abstraction des règles afin que nous nous occupions de cela maintenant?
    Ce serait idéal. Je vous remercie.
    Je crois en fait qu'il faudrait que ce soit la ministre des Services aux Autochtones.

[Français]

    Étant donné que certains d'entre nous remplacent des membres du Comité aujourd'hui, je préférerais que vous attendiez à la prochaine réunion, de façon à ce que ces membres puissent lire la motion. Comme nous sommes des remplaçants et non des membres actifs du Comité, il serait préférable d'attendre à la prochaine réunion.

[Traduction]

    C'est donc non.
    Je tiens à indiquer à ma collègue que le Comité ne va pas se réunir autrement qu'à huis clos pendant quelques semaines, alors c'est ma raison pour le faire maintenant.
    Ce n'est pas mon problème.
    Je comprends.
     Si vous me dites que nous n'avons pas le consentement unanime, c'est clair.
    C'est donc un avis de motion. J'espère que nous pourrons la mettre aux voix à la prochaine occasion que nous aurons, lors d'une réunion qui ne se déroulera pas à huis clos.
    Merci.
    Merci. Vous avez encore 30 secondes. Voulez-vous ajouter quelque chose pendant le temps qu'il vous reste?
    Non. Ça va aller. Je vous remercie.
    Emmanuella, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui pour répondre à nos questions.
    De toute évidence, le nombre réel de femmes qui subissent de la violence et qui devraient demander l'aide des refuges est bien plus élevé que le nombre de femmes qui vont effectivement chercher de l'aide. Elles sont nombreuses à se cacher. Elles sont nombreuses à ne pas se manifester, et on considère qu'elles sont nombreuses à vivre une situation d'itinérance cachée.
    Je sais que nous discutons des données que vous recueillez auprès des refuges et des personnes qui utilisent les services des refuges, mais que suggérez-vous que nous fassions, ou que vous fassiez, ou que nous fassions tous, collectivement, pour recueillir plus d'information? Il se peut qu'une personne ne veuille pas se présenter dans un refuge, mais si on lui posait la question sur papier, même en étant identifiée, elle serait peut-être plus disposée à l'admettre.
    Je fais une suggestion, dans ma question, mais que suggérez-vous pour améliorer nos données sur cette question?
     Je veux bien approfondir les choses, et comme je suis une statisticienne et une personne axée sur les données qui travaille depuis 15 ans sur les questions de violence familiale, je suggérerais une enquête sur les femmes qui ont séjourné dans un refuge, peut-être. D'après nos données, nous savons que des femmes y retournent, et cela devient d'après moi une porte tournante. Si elles sont venues dans un refuge et y sont restées pendant deux ou trois mois, et qu'elles y reviennent à l'intérieur d'un an, il y a un besoin qui n'a pas été satisfait, ou elles sont encore extrêmement vulnérables. Il faut donc regarder ces femmes et s'enquérir de ce qu'il leur faut pour passer au niveau suivant de sécurité et trouver un domicile sûr.
    Grâce à l'Enquête sociale générale sur la victimisation, nous savons que très peu de femmes victimes de violence conjugale utilisent les refuges, mais dans l'important échantillon que nous utilisons, il y en a peut-être qui avaient une famille élargie ou qui ont eu plus de chance. Celles qui utilisent les refuges — et je suis sûre que vous avez parlé à des gestionnaires — sont celles qui ont les plus grands besoins. Ce sont parfois les femmes qui partent de leur appartement avec un sac vert et leurs deux enfants, et qui se rendent au refuge en autobus. Ce sont les personnes les plus vulnérables. Du point de vue de la collecte de données, je suggérerais une enquête sur les femmes dans les refuges, afin de vraiment cerner ce qu'il faut comme politiques pour pouvoir les sortir de ce cycle.
    Ce n'est que mon opinion.

  (1710)  

    Pour ce que vous avez soulevé au sujet des femmes qui ne vont pas toutes se prévaloir des services d'un refuge, je pense que l'Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés va nous permettre d'avoir une meilleure compréhension ou d'obtenir plus d'information concernant celles qui n'ont pas recouru aux services fournis dans les refuges, même si elles étaient des victimes, et que nous pourrons aussi savoir pourquoi elles ne l'ont pas fait. Cette nouvelle enquête va nous apporter de nouvelles données. Ce n'est que quand nous nous mettrons à les analyser que nous verrons si nous avons encore d'importantes lacunes dans l'information que nous avons à ce sujet.
    Merci beaucoup.
    Vous avez aussi mentionné que dans la nouvelle enquête dont les résultats sortiront en avril 2019, vous entrez beaucoup plus dans les détails concernant les personnes qui reçoivent ces services. Cependant, nous savons que de nombreuses personnes sont refusées. Chacun des témoins que nous avons entendus nous a dit qu'il doit refuser plus de personnes qu'il peut en accepter. Recueillons-nous aussi des données sur les personnes qui sont refusées?
    Nous savons que dans bien des cas, c'est à cause de l'alcoolisme ou de la toxicomanie, mais nous ne savons pas si d'autres facteurs entrent en jeu, comme le racisme ou l'homophobie, entre autres. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Encore là, pour remanier l'Enquête sur les établissements d'hébergement, nous avons consulté les associations de maisons de transition provinciales et territoriales, le milieu universitaire et les ONG, et d'après eux, en réalité, la plupart des refus étaient causés par l'abus d'alcool et de drogue.
    Des préoccupations ont été exprimées concernant la population transgenre, et c'est ressorti dans notre consultation. Certains refuges n'ont pas la capacité de gérer les personnes transgenres, car leur clientèle principale est composée de femmes. Nous recueillons d'autres données de ce type, car nous avons perçu cela comme une lacune et un enjeu prévalent.
    C'est tout pour moi. Je vous remercie beaucoup.
    Jim, vous avez deux minutes. Est-ce que quelqu'un d'autre de ce côté veut avoir deux minutes?
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui. Vous nous avez fourni des statistiques fort intéressantes.
    J'ai une question que j'hésite à vous poser, et je vais donc attendre la fin de mon intervention.
    Je m'intéresse particulièrement au graphique no 3. Ou bien je ne comprends pas, ou bien je serai sidéré par votre réponse.
Selon l'ESG de 2014, 6 % des femmes qui étaient victimes de violence conjugale dans les provinces ont déclaré avoir communiqué avec un refuge ou une maison d'hébergement...
    Voilà ce qui est indiqué. Or, vous avez dit que nous avons 12 058 lits au Canada et que 51 % des femmes ont été refusées, et je tente de faire le calcul.
    C'est déjà inconcevable que nous ayons besoin de 24 000 lits. Nous le savons. C'est un premier constat, mais lorsque je vois que nous n'avons que 6 % des lits nécessaires, et si 6 % représentent 12 058, qu'est-ce qu'il y a que je ne comprends pas? Je suis confus. Ou bien nous manquons cruellement de lits, ou bien il y a quelque chose d'énorme qui nous échappe. Selon votre statistique, le problème prend des proportions que nous ignorons. Pouvez-vous répondre à ma question?
    Dans l'Enquête sociale générale, on demande aux Canadiens et aux Canadiennes si, au courant des cinq dernières années, ils ou elles ont été victimes d'une forme de violence de la part de leur partenaire intime. Cela vise toute une gamme de comportements possibles, allant de menaces jusqu'aux gifles ou autres violences physiques quelconques, et les réponses positives sont comptées. Il se peut qu'il n'y ait eu qu'un seul geste violent. Cette personne-là aurait-elle quitté son foyer ou son partenaire en raison de cette violence? Bien souvent, la réponse est non. Lorsque nous avons recueilli les données de l'ESG, nous avons trouvé que ce n'est que dans les cas les plus graves que les femmes partent et se présentent à un refuge. Ce ne sont pas toutes les femmes, ni tous les hommes d'ailleurs, qui vont à un refuge après avoir été violentés dans leur couple. Il se peut que la personne parte et se réfugie chez des membres de sa famille ou des amis.

  (1715)  

    Le 6 % n'a pas vraiment de rapport au graphique...
    C'est exact.
    Vous avez fait une autre enquête. Merci pour cette précision.
    Ce sont des renseignements contextuels, et vous avez raison. Ces lits peuvent servir...
    Yvan, vous avez indiqué dans votre exposé que la dernière enquête remonte à 2014. Pourquoi? Nous aurions pu disposer de deux années de données supplémentaires. Pouvez-vous me l'expliquer?
    C'est une excellente question.
    La raison pour laquelle l'enquête a pris fin en 2014, tout d'abord, c'était que c'était une enquête bisannuelle. Une enquête avait été effectuée en 2012, et ensuite en 2014. À l'époque, l'enquête présentait des problèmes méthodologiques, et on a décidé de prendre les deux prochaines années afin de revoir de fond en comble l'enquête, à la fois sur le plan de l'échantillonnage pour s'assurer du nombre exact de refuges et des contacts dans chaque province territoire pour recenser tous les refuges existants, et sur le plan du contenu, car celui de l'enquête de 2014 et de 2012 commençait à dater et n'était pas forcément adapté à la nouvelle réalité. Nous avions le choix de refaire le tout ou d'effectuer une collecte. Nous avons décidé de refaire le tout. Nous avons effectué une collecte en 2018. Nous avons sauté un cycle, et les données seront publiées au printemps prochain.
    Encore une fois, je vous renvoie au graphique no 3, où il est question des différentes provinces, du nombre de refuges, et du nombre total de lits, soit 12 058. Selon les données que vous nous avez fournies, 51 % des gens se voient refuser. Ce pourcentage concerne-t-il le total ou un autre chiffre?
    Je vais aller voir la diapositive afin de l'expliquer.
    J'aimerais bien comprendre.
    En 2014, nous avons pris les données d'un jour donné afin de tâter le pouls et demander aux directeurs des refuges combien de femmes et d'enfants étaient hébergés. Ce jour-là, il y avait plus de 7 000 personnes, et on avait refusé 300 femmes et 200 enfants.
    Ce n'est donc qu'un instantané.
    Oui, et 56 % des 300 femmes et 200 enfants ont été refusés en raison d'un problème de capacité. Plus de 7 000 femmes et enfants se trouvaient dans des refuges ce jour-là. Le jour qui nous a servi d'instantané, 500 femmes et enfants se sont vus refusés pour diverses raisons. Dans certains cas, c'était à cause de problèmes d'alcool ou de troubles psychologiques, ou encore ces personnes faisaient l'objet d'une interdiction, mais 50 % des personnes ont été refusées en raison d'un problème de capacité dans les refuges. Il se peut qu'il y ait eu des places à Toronto, même beaucoup de places, mais ce n'était pas le cas au Nouveau-Brunswick ce jour-là.
    Merci beaucoup pour cette précision. Me reste-t-il du temps?
    Vous avez déjà dépassé le temps prévu.
    Je croyais que vous alliez me donner ces deux minutes.
    J'allais vous en donner une partie.
    Je crois que ma question est très pertinente aux yeux de tous ici présents.
    Toujours à la diapositive 3, est-il possible d'obtenir une ventilation afin de voir ce qui se passe dans les régions rurales? Je représente une circonscription rurale. Nous avons des députés de circonscription urbaine dans notre comité, et je sais que la plupart des collectivités urbaines sont assez bien servies. Or, ce n'est pas le cas des régions rurales. Serait-il possible de nous faire suivre des statistiques qui montreraient la différence?
    J'y réfléchis, car dans bien des cas, l'emplacement des refuges est confidentiel. Après avoir travaillé avec divers groupes, notamment dans des régions rurales, je sais que certaines femmes pourraient quitter leur collectivité pour assurer leur sécurité. Je vais voir ce que je peux faire.

  (1720)  

    Merci, et merci à vous, madame la présidente, de m'avoir permis de poser cette question.
    Sonia, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous tous d'être venus et de répondre à nos questions.
    Revenons à la diapositive no 1. Vous avez dit que le taux de violence est le plus élevé dans les territoires et en Saskatchewan et au Manitoba. Est-ce parce qu'il y a moins de refuges? Lorsque vous posez la question sur les taux d'agression, cherchez-vous une façon d'expliquer la raison pour laquelle le taux est élevé dans ces régions?
    Ce sont les incidents violents déclarés à la police et recueillis dans la Déclaration uniforme de la criminalité. Ils suivent essentiellement les tendances générales de la criminalité allant de l'est vers l'ouest, et le taux est toujours plus élevé dans l'ouest et dans les territoires, voire beaucoup plus élevé dans les territoires. Il s'agit surtout des incidents signalés à la police; il n'y a pas de lien avec les refuges ou le nombre de lits.
    À ce moment-là, lorsque vous avez remanié l'échantillonnage et les questions, avez-vous ajouté une question sur la raison et cherché à savoir si le taux concerne les crimes ou les actes de violence? Avez-vous modifié la question dans l'enquête?
    La Déclaration uniforme de la criminalité ne sera pas remaniée pour servir de source sur les tendances haussières du taux de criminalité de l'est vers l'ouest.
    Les raisons sont essentiellement d'ordre démographique et c'est ce que nous avons observé. Ce sont des tendances ou des différences bien établies entre les provinces et les territoires que nous observons depuis plusieurs années déjà et qui persistent.
    Merci.
    Nous avons appris qu'il existe 41 refuges pour les femmes et les enfants qui vivent dans des réserves dans les provinces et au Yukon, mais j'aimerais savoir comment vous recueillez les données sur les femmes qui ne vivent pas près de l'un de ces 41 refuges.
    Les données que nous obtenons grâce à notre enquête sur les refuges proviennent des refuges au Yukon et ce sont les femmes qui se serviraient des enquêtes. Si des femmes du Yukon quittent leurs collectivités et se rendent dans un refuge dans une autre province, nous recueillons des données sur elles, mais je ne saurais pas si elles ont déménagé ou non.
    Nous avons effectué des consultations lorsque nous en étions à l'étape de la conception de l'Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés afin de voir si nous pouvions cerner cette donnée, mais il est très difficile pour les gestionnaires d'enquête de commencer à exiger beaucoup d'information détaillée des résidentes, parce qu'ils entretiennent des rapports de confiance. Par conséquent, nous n'étions pas en mesure d'obtenir cette information.
    Cela dit, grâce aux données obtenues de la police et de notre Enquête sociale générale, nous saisissons mieux où sont les taux les plus élevés de violence aux mains des partenaires intimes et, encore une fois, en travaillant avec nos directions des services aux victimes, nous saurons le nombre de Yukonnais qui demandent des services aux victimes, y compris pour agression sexuelle et violence conjugale, ainsi que le nombre de personnes dans les refuges, mais ce sera un agrégat.
    Communiquez-vous aussi avec les travailleurs sociaux? Ils ont énormément de données sur leurs clients, eux aussi.
    C'est une bonne question.
    En ce moment, l'Agence de la santé publique subventionne un autre projet de Statistique Canada qui vise à recueillir des données administratives pour les services communautaires, ce qui touchera le travail social, le régime d'assistance sociale et les cas où la maltraitance des enfants est soupçonnée. Nous étudions la façon de recueillir ces données, mais nous en sommes encore à une étape très préliminaire et nous tentons de voir si la démarche est viable.
    Merci.
    Allez-y Marc.
    J'aimerais moi-même poser quelques petites questions lorsque nous aurons terminé.
    Vous nous avez décrit l'instantané d'un jour donné, mais ne vaudrait-il pas mieux de demander aux refuges de vous donner le résumé des 12 derniers mois? En un seul jour, il est difficile d'obtenir des données concrètes qui pourraient servir. Ce qu'il faut, c'est...

  (1725)  

    Je le répète, d'après mon travail effectué auprès des gestionnaires d'enquête, les ressources sont limitées. La priorité est accordée aux femmes et aux enfants qui se présentent aux refuges. Les gestionnaires ne sont pas chargés de recueillir des données.
    Nous travaillons de près avec les associations afin de trouver une façon de recueillir les renseignements sans imposer de fardeau, car les ressources sont limitées.
    Votre question est tout à fait valide, mais les responsables peuvent nous fournir l'instantané d'un seul jour, et dans certains cas même cela, c'est difficile.

[Français]

    Avez-vous des recommandations à faire concernant la collaboration entre les provinces et les municipalités?
    Que peuvent-elles faire pour aider le fédéral en ce qui a trait à la collecte de données? Avez-vous des recommandations à présenter au Comité? Il n'est pas nécessaire que vous le fassiez aujourd'hui même.
    La collecte d'information, lorsqu'elle est réalisée de façon systématique et harmonisée, est une tâche assez lourde sur le plan administratif. Compte tenu de leurs ressources limitées, les maisons de transition ou les centres d'hébergement peuvent difficilement avoir des systèmes informatisés et procéder à des collectes de données. Je suis d'avis que les enquêtes où les données sont agrégées et complétées par l'Enquête nationale auprès des ménages peuvent nous fournir un très grand nombre de renseignements.
    Les résultats de la nouvelle enquête, qui découleront encore une fois d'un décompte réalisé à une date précise, ainsi que l'Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés vont pouvoir nous fournir une très grande quantité d'informations. À partir de cela, nous serons davantage en mesure de juger des lacunes en matière d'information et de faire des recommandations. Pour le moment, il nous est un peu difficile de le faire. Cela dit, je ne recommanderais certainement pas de concevoir des systèmes de collecte d'information touchant chaque personne qui passe par un centre d'hébergement. C'est ce qui est fait dans le cas des services correctionnels. Or même si ces derniers sont financés, leur personnel a parfois de la difficulté à accomplir cette tâche.

[Traduction]

    J'ai accordé pas mal de temps supplémentaire de part et d'autre. Il ne reste que peu de temps et, avec votre indulgence, j'aimerais poser quelques questions.
    Recueillez-vous des données sur les partenaires de même sexe et des problèmes qui surviennent dans les refuges lorsqu'il s'agit d'un couple de même sexe? Vous avez parlé brièvement des transgenres, mais nous avons à peine évoqué la violence aux mains d'un partenaire intime dans des couples de même sexe.
    Je vais devoir vérifier comment cet aspect a été abordé dans la nouvelle enquête pour répondre à votre question, mais sachez que nous avons des données de l'Enquête sociale générale, l'ESG, ainsi que de la nouvelle enquête visant la plus forte prévalence de victimisation par un partenaire intime dans des couples de même sexe. Nous avons beaucoup de données pertinentes. J'aimerais seulement voir si je peux obtenir celles que je pense vous intéressent.
    Avez-vous des questions qui portent sur les animaux de compagnie? D'après mes échanges avec les responsables des refuges, dans bien des cas les femmes ne quittent pas leur foyer violent parce que la plupart des refuges n'acceptent pas les animaux. Avez-vous des données qui portent sur l'interdiction ou non des animaux dans les refuges, ou encore si les femmes restent à cause des animaux?
    Je suis presque sûre que non. Je peux revoir notre consultation et vérifier si la question a été soulevée. Encore une fois, nous avons consacré 12 mois aux discussions. Je vous reviendrai.
    J'ai une dernière question. Nous avons des statistiques sur les crimes violents qui ont été signalés à la police, mais nous savons que ces chiffres sont extrêmement bas. De plus, certaines communautés, par exemple les femmes autochtones, hésitent beaucoup à déclarer un crime à la police. Essayez-vous d'en tenir compte dans les statistiques?
    Je peux vous envoyer... Nous savons, grâce à notre dernière Enquête sociale générale, que seulement 30 % des victimes de violence conjugale, de violence aux mains d'un partenaire intime, feront une déclaration à la police. Dans le cas des femmes autochtones, je crois que cela se chiffre a à peu près 33 %. Nous avons ces taux, et je pourrais les transmettre au Comité.
    Avez-vous des statistiques sur le nombre de femmes qui ne peuvent pas être hébergées dans des refuges et se retrouvent en prison? Dans bien des cas, lorsque les femmes doivent quitter un refuge ou un partenaire violent, elles finissent par commettre des crimes en raison de leur pauvreté. Avez-vous des données sur la corrélation entre les refuges et l'incarcération?
    C'est une excellente question, mais nous n'avons pas ce genre de renseignement. Nous aimerions voir si, lorsque les femmes se trouvent dans une relation violente... Par exemple, dans les cas de maltraitance des enfants, y a-t-il eu un incident déterminant tout au début qui a causé ce phénomène? Nous devrions nous pencher sur l'intersectionnalité des incidents qui se produisent à un jeune âge et qui persistent, avec la victime qui se retrouve peut-être dans un établissement pénitencier en raison d'une vie marquée par la violence, mais nous ne le faisons pas actuellement.

  (1730)  

    Je vous remercie beaucoup de vos témoignages. Nous nous ferons un plaisir de lire les rapports qui seront publiés, et votre aide nous sera d'une grande utilité.
    J'aimerais rappeler aux membres que les ébauches de recommandations pour l'étude sur les obstacles auxquels se heurtent les femmes en politique doivent être remises ce mercredi 21 novembre. Il n'y aura pas de réunion ce mercredi en raison de l'Énoncé économique de l'automne. Nous nous réunirons à huis clos le lundi 26 novembre pour commencer notre travail sur l'ébauche du rapport de l'étude sur les obstacles auxquels se heurtent les femmes en politique.
    Sur ce, la séance est levée.
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