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ERRE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité spécial sur la réforme électorale


NUMÉRO 023 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 1er septembre 2016

[Enregistrement électronique]

  (0945)  

[Traduction]

    Bonjour, chers collègues. Bienvenue à nos témoins.

[Français]

     Je les remercie d'être parmi nous aujourd'hui pour partager leurs idées et leur perspective sur cet enjeu assez complexe.
     Ce matin, nous avons avec nous trois témoins, soit MM. David McLaughlin, Craig Scott et Graham Fox.
     Si vous me le permettez, je vais faire un résumé de leurs notes biographiques, en commençant par M. David McLaughlin.

[Traduction]

    David McLaughlin a beaucoup d'expérience dans le secteur des politiques publiques et a occupé divers postes supérieurs au gouvernement fédéral et au gouvernement provincial du Nouveau-Brunswick. M. McLaughlin a été le chef de cabinet du premier ministre Brian Mulroney, du premier ministre Bernard Lord et du ministre des Finances Jim Flaherty. Il a également occupé au gouvernement du Nouveau-Brunswick le poste de sous-ministre des Affaires intergouvernementales, des Politiques et de la Planification et siégé à la Commission sur la démocratie législative du Nouveau-Brunswick. À titre de commissaire, il a géré l'étude de la commission portant sur la réforme démocratique, qui a produit un rapport contenant plus de 80 recommandations aux fins d'une réforme électorale, démocratique et législative. De 2007 à 2012, il a aussi été président et premier dirigeant de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie, et il contribue régulièrement à diverses publications, notamment au Globe and Mail, au magazine Policy et au Huffington Post.

[Français]

    M. Craig Scott est professeur de droit à la faculté de droit Osgoode Hall de l'Université York. Il a été député de Toronto—Danforth de 2012 à 2015. Il a fréquenté l'Université d'Oxford en tant que boursier de la fondation Rhodes. Il a obtenu sa maîtrise en droit à la London School of Economics. Il a concentré ses travaux universitaires sur le droit international en mettant l'accent sur les droits de la personne.
    M. Scott est éditeur de la série Hart Monographs in Transnational and International Law et éditeur fondateur de Transnational Legal Theory. Il a été membre de la faculté de droit de l'Université de Toronto de 1989 à 2001. Il s'est joint à la faculté de droit Osgoode Hall en 2000, où il a servi, de 2001 à 2004, en tant que vice-doyen, Recherches et études supérieures. Lorsqu'il était député, M. Scott a été porte-parole de l'opposition au sujet de la réforme démocratique et parlementaire pour le Nouveau Parti démocratique.
    Bienvenue, monsieur Scott. C'est un plaisir de vous revoir ici sur la Colline.

[Traduction]

    Graham Fox est président et chef de la direction de l'Institut de recherche en politiques publiques et a beaucoup d'expérience en matière de politiques publiques. M. Fox a été chef de cabinet du très honorable Joe Clark et conseiller auprès de députés de la Chambre des communes. Il a également occupé un certain nombre de postes au sein d'organisations de recherche en politiques publiques, notamment celui de vice-président du Forum des politiques publiques et de directeur général du KTA Centre for Collaborative Governance.
    Avant de se joindre à l'Institut de recherche en politiques publiques, M. Fox a été conseiller en politiques stratégiques pour le cabinet d'avocats Fraser Milner Casgrain, où il effectuait des analyses stratégiques et donnait des conseils dans divers domaines des politiques publiques.
    Bienvenue à tous.
    Avant de commencer, je mentionnerai simplement notre façon de fonctionner. Après que chaque témoin aura présenté sa déclaration pendant 10 minutes, nous tiendrons deux séries de questions. Dans le cadre de chaque série, chaque membre a l'occasion d'interagir avec les témoins. Ce que j'entends par là, c'est que les questions et réponses doivent être formulées à l'intérieur d'une période de cinq minutes. Nous appliquons ce processus aux deux séries d'interventions.

[Français]

    Je tiens à vous souligner que si un député a terminé ses propos au cours de la période de cinq minutes qui lui est allouée et que vous n'avez pas eu le temps de répondre à une question ou de dire tout ce que vous vouliez, ne vous inquiétez pas, car vous aurez l'occasion, la prochaine fois que vous aurez la parole, de conclure votre pensée et d'aborder la question qu'on vous a été posée antérieurement.
    Nous commençons par vous, monsieur McLaughlin. Vous disposez de 10 minutes.

[Traduction]

    Bonjour à tous, et merci de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui. Laissez-moi commencer par vous souhaiter, tout d'abord, tout le succès possible dans votre travail sur cette question importante qui touchera tous les Canadiens.
    Je me présente à titre personnel, et je possède une certaine expertise et des connaissances en matière de délibérations concernant une réforme électorale et à titre de sous-ministre ayant siégé à la Commission sur la démocratie législative du Nouveau-Brunswick de 2003 à 2005. C'est à ce titre que je voudrais vous faire part de certaines observations et conclusions qui, je l'espère, vous aideront relativement à vos propres délibérations et recommandations.
    Le processus et le rapport du Nouveau-Brunswick étaient l'exercice de réforme démocratique le plus long à avoir été mené dans cette province. La réforme électorale était au cœur des travaux de la commission, mais n'en constituait aucunement la seule cible. Plus précisément, la commission avait reçu pour consigne d'examiner les façons de renforcer et de moderniser les institutions démocratiques du Nouveau-Brunswick et les pratiques dans trois domaines principaux: la réforme électorale, la réforme législative et la réforme démocratique, et elle devait formuler des recommandations à cet égard.
    La réforme électorale concerne la modification de notre système électoral, le découpage des circonscriptions électorales, l'établissement de dates d'élections fixes et l'augmentation du taux de participation des électeurs. La réforme législative concerne l'amélioration des rôles des députés à l'Assemblée législative et l'ouverture du processus de nomination pour les organismes, les conseils et les commissions. La réforme démocratique concerne l'augmentation de la participation du public au processus décisionnel et la proposition d'une loi référendaire.
    Le but de la commission était de présenter les recommandations qui apporteraient une représentation plus juste, équitable et efficace à l'Assemblée législative; une plus grande participation du public aux décisions touchant les gens et leur collectivité; des institutions et des pratiques démocratiques plus ouvertes, réceptives et responsables; et un taux plus élevé de mobilisation civique et de participation de la part des Néo-Brunswickois.
    Notre rapport final — que j'ai apporté — compte plus de 200 pages et contient près de 100 recommandations précises. Il présentait des recherches, des analyses, des recommandations stratégiques, et même des textes juridiques particuliers, dans un processus consistant en à peine plus d'un an de séances. La mission stimulante qui animait la commission — que je vous souligne à mon tour — était l'encouragement d'une démocratie dirigée davantage par les citoyens.
    Cet accent sur les citoyens a mené la commission à élaborer trois thèmes, dont ont découlé nos recommandations. L'élément commun à chacun était la façon dont on pouvait faire en sorte que la démocratie fonctionne mieux pour « vous, les citoyens ». Ces trois thèmes faisaient que votre vote comptait, faisaient fonctionner le système et vous permettaient de vous exprimer. Quand nous doutions de notre approche ou que nous faisions face à des compromis et à des choix — comme ce sera sans doute votre cas —, cet accent sur les citoyens nous permettait de rester ancrés et concentrés.
    Je veux souligner trois aspects de notre travail qui sont pertinents par rapport au mandat du Comité: les valeurs et les principes démocratiques, la réforme électorale et la mobilisation des citoyens. La commission a commencé — comme vous l'avez fait, vous aussi — par se concentrer sur les valeurs démocratiques. Quand est venu le temps de déterminer quel était le meilleur système électoral pour le Nouveau-Brunswick, nous avons dû faire des compromis quant à laquelle de ces valeurs avait le plus d'importance. Vous devrez le faire, vous aussi.
    Les principes clés que nous avons appliqués afin de prendre une décision relativement à un nouveau système électoral comprenaient la représentation locale, c'est-à-dire le principe selon lequel toutes les régions géographiques de la province doivent avoir leur propre représentant à l'Assemblée législative qui défend leurs intérêts; la représentation équitable, pour s'assurer que l'opinion de tous les Néo-Brunswickois était représentée de façon équitable à l'Assemblée législative; l'égalité des votes, pour veiller à ce que le bulletin de vote déposé par chaque électeur ait une incidence égale sur la détermination du gagnant des élections; et le gouvernement efficace, soit la capacité du système d'entraîner la sélection facile d'un gouvernement stable qui est capable de gouverner la province.
    Nous avons utilisé ces principes pour examiner les forces et les faiblesses des divers systèmes électoraux et les caractéristiques particulières de leur conception. Ces principes sont semblables à votre liste de valeurs, à peut-être une grande différence près: le gouvernement efficace. Vous mettez l'accent sur l'efficacité à l'intérieur du système électoral. Nous avons tenu compte de cet aspect, mais la commission était fortement d'avis que les résultats de ce système électoral devaient comprendre la notion de produire des gouvernements qui pourraient gouverner. L'instabilité des assemblées législatives et des gouvernements était très présente dans notre esprit.
    Nous avons recommandé un système mixte avec compensation proportionnelle en tant que solution optimale pour la province, à la lumière d'une étude de toutes les solutions de rechange relativement à la liste des principes démocratiques. Ce qui a le plus animé la discussion au Nouveau-Brunswick a été un résultat bizarre de la politique provinciale: de gros gouvernements majoritaires et des oppositions petites et faibles. Entre 1987 et 1999 — vous vous en souvenez peut-être —, l'opposition n'a jamais remporté plus de 20 % des sièges à l'Assemblée législative, malgré que, ensemble, les partis de l'opposition ont remporté entre 40 et 52 % du vote durant la même période. Le système mixte avec compensation proportionnelle permettrait de corriger cette situation.
    Ce système s'est également révélé attrayant lorsqu'on tenait compte de la nature régionale des collectivités urbaines et rurales de la province. Il s'est également révélé viable — et cet aspect était important pour le Nouveau-Brunswick, en tant que seule province officiellement bilingue du Canada — pour ce qui est d'assurer l'égalité de la représentation entre les communautés linguistiques anglophone et francophone. La capacité du système mixte avec compensation proportionnelle de créer une carte des régions découpée en fonction des frontières linguistiques et les sièges pour les partis permettant de compléter les votes dans un système à deux tours étaient jugés attrayants.

  (0950)  

    Nous avons recommandé une chambre à 56 sièges, dont les deux tiers seraient occupés par les députés élus au moyen du système uninominal majoritaire à un tour actuel, et l'autre tiers serait des sièges de RP occupés par cinq députés choisis parmi des listes de partis fermées dans l'une des quatre régions plurinominales, selon le vote reçu par le parti dans la région. La répartition deux tiers pour un tiers nous permettait à la fois d'assurer la représentation locale nécessaire, tout en instaurant un degré de proportionnalité suffisant pour permettre de façon significative de traduire les votes en sièges.
    Un seul minimal de 5 % du vote partisan distinct à l'échelle de la province était requis pour que le député soit admissible à remporter tout siège de RP figurant sur la liste. Cette mesure était nécessaire pour éviter que la prolifération de partis fondés sur un seul enjeu ait une influence indue au sein de l'Assemblée législative.
    Les candidats allaient être tenus de choisir de se présenter en tant que candidat d'une circonscription uninominale ou en tant que candidat régional inscrit sur la liste de RP, mais pas les deux, comme façon d'éviter les perceptions de manipulation du système électoral.
    La mobilisation des Néo-Brunswickois dans notre processus et la décision éventuelle concernant un nouveau système électoral étaient au cœur de nos considérations. Honnêtement, malgré les meilleurs efforts déployés et un site Web consacré à ces travaux, la technologie des médias sociaux de l'époque, les séances de discussion ouverte régionales, les questionnaires en ligne, un rapport provisoire, les conférences universitaires et les partenariats avec les organisations de la société civile, l'intérêt pour les travaux de la commission et le taux de participation à ces travaux étaient faibles.
    Nous ne doutions aucunement du fait que nous avions accompli notre travail de façon minutieuse et juste, mais un système électoral n'appartient ni aux politiciens ni aux partis. Nous étions fortement d'avis qu'un référendum était nécessaire pour légitimer un tel changement. Notre recommandation était une double majorité, constituée de 50 % plus un des votes exprimés par au moins 50 % des électeurs admissibles dans le cadre d'un référendum contraignant tenu à l'échelle de la province.
    Pour assurer l'équité et l'impartialité du processus référendaire, nous avons recommandé l'adoption d'une nouvelle loi référendaire provinciale contenant des dispositions complètes sur la gouvernance relative au processus qui devrait être suivi au moment des prochaines élections provinciales. Elle contenait les limites de dépenses et de contribution, l'établissement de comités référendaires, l'inscription des groupes, la sensibilisation des électeurs et un nouvel organisme indépendant appelé Élections Nouveau-Brunswick pour l'administrer. Nous avons également recommandé qu'un comité d'étude de l'Assemblée législative examine le nouveau système électoral après deux élections et qu'il rende compte de toute amélioration qui pourrait être nécessaire.
    Deux conclusions ont été tirées de nos travaux, lesquelles pourraient vous aider dans le cadre des vôtres.
    Premièrement, le système uninominal majoritaire à un tour possède de bonnes caractéristiques et est à la fois familier et légitime pour la plupart des électeurs. Après tout, nous acceptons les résultats le soir des élections, et le Canada a progressé. Toutefois, il présente des inconvénients et des lacunes clairs qu'un système mixte avec compensation proportionnelle pourrait atténuer. Nous savons que ce système reflète davantage les valeurs démocratiques de l'équité, de l'inclusivité, du choix et de l'égalité des votes. Cependant, le système mixte avec compensation proportionnelle à l'échelon national n'a jamais vraiment fait l'objet d'un modèle ni d'une analyse complète, à ma connaissance, sauf pour un rapport produit par la Commission du droit du Canada. Nous avons trouvé dans les résultats des conséquences réelles, à la lumière de la conception particulière de ce système, au sujet desquelles vous allez devoir faire des recherches et que vous devrez prendre en considération si vous décidez de recommander ce système.
    Deuxièmement, la légitimité publique d'un nouveau système électoral est hautement souhaitable et l'emporte sur les intérêts des partis et des politiciens. La question concerne les citoyens et les électeurs dans une démocratie axée sur les citoyens. La tenue d'un référendum est la façon la plus simple, la plus claire et la plus acceptable de conférer une légitimité à long terme, non seulement au système, mais — et c'est encore plus important — aux résultats qu'il produit.
    Je sais que cette question est litigieuse, alors laissez-moi proposer un deuxième choix qui est tout de même une option viable: prévoir un référendum de validation après deux élections, d'après un examen parlementaire du système, et donner aux Canadiens l'occasion de l'accepter, peut-être sous réserve d'améliorations, ou de revenir au système précédent.
    Je serais heureux de répondre à toute question que vous pourriez me poser. Merci de m'avoir invité et de m'avoir écouté.

  (0955)  

[Français]

     Merci, monsieur McLaughlin.
    Nous allons maintenant passer à M. Scott.

[Traduction]

    Merci infiniment, monsieur le président. Je suis heureux d'être de retour. Si j'avais su que je venais, j'aurais fait un gâteau, c'est-à-dire que j'aurais envoyé un document. Mais, je ne l'ai pas fait, et j'en enverrai un après la séance.
    Simplement pour vous situer brièvement, oui, j'ai travaillé sur ce dossier lorsque j'étais parlementaire. Selon moi, le point culminant, du point de vue de ce qui se passait au Parlement, a été une motion présentée par l'opposition en décembre 2014 précisément dans le but de tâter le terrain relativement à la possibilité d'abandonner les systèmes électoraux où le vainqueur remporte tout et d'appuyer un système mixte avec compensation proportionnelle adapté au Canada. La motion a été rejetée, mais il vaut la peine que vous sachiez que 16 des 31 députés libéraux qui ont voté ce jour-là ont appuyé la motion. Par conséquent, je pense que nous avons les bases de la tenue d'une discussion interpartisane/panpartisane, ce qui est clairement le but du Comité.
    Laissez-moi commencer par expliquer brièvement plusieurs raisons pour lesquelles le système mixte avec compensation proportionnelle mérite d'être en tête de liste ou d'être sur un pied d'égalité avec un ou deux autres modèles proportionnels.
    La raison standard que vous avez tous entendue, c'est qu'il représente le meilleur de deux mondes, c'est-à-dire les deux principes du mandat du Comité. Il s'agit de l'efficacité et de la légitimité, mais il s'agit effectivement du principe de la traduction équitable des votes en sièges et du principe de la représentation locale, qui sont tous deux respectés par le modèle.
    Les deux autres raisons que je veux souligner sont moins souvent mentionnées.
    La première en est une que j'essaie de promouvoir activement depuis trois ans, mais les autres ne semblent pas en parler tellement. Je pense que le système mixte avec compensation proportionnelle prend beaucoup plus au sérieux les députés et les candidats locaux que toute autre forme de RP et plus que le système uninominal majoritaire à un tour. C'est en raison de la possibilité de votes croisés. Les électeurs peuvent cocher « représentant local » et voter pour le candidat X, qui se présente pour un certain parti, puis parcourir les listes de députés régionaux et décider quel parti ils veulent appuyer et quelle personne, parmi celles dont le nom figure sur la liste, si elle est flexible. Elles n'ont pas à être du même parti.
    Je pense que cette possibilité a des conséquences salutaires. En Nouvelle-Zélande, environ 30 % des électeurs choisissent cette option de vote croisé. Cela signifie que les candidats locaux sont plus susceptibles de pouvoir récolter des votes pour qui ils sont, pour ce qu'ils ont fait et pour ce qu'ils peuvent apporter à l'échelon national, depuis l'échelon local, sans avoir à se soucier du vote stratégique. Selon moi, il s'agit d'une caractéristique extrêmement importante du système mixte avec compensation proportionnelle.
    La deuxième chose... C'est presque de l'hérésie que de le dire, mais je pense que l'idée de disposer d'un ensemble de députés régionaux aux côtés de députés purement locaux a une incidence salutaire sur la politique nationale. Elle éloigne déjà un tas de députés de la catégorie « purement local ». Il va falloir qu'on examine de façon un peu plus vaste la dynamique dans une région plus grande qu'une circonscription locale. Après trois ans sur la Colline, je crois que nous affichons un déficit en ce qui a trait à la capacité de nous concentrer sur des enjeux nationaux au sein de notre Parlement. Il est bien trop localisé, en raison du système des 338 circonscriptions établies côte à côte, lequel, d'une certaine manière, doit ensuite générer une politique nationale. Je pense que, de cette manière, le système mixte avec compensation proportionnelle offre des avantages supplémentaires.
    Certains des problèmes liés au système actuel méritent d'être soulignés, car je pense que le système mixte avec compensation proportionnelle permet de les régler, tout comme le ferait tout système de RP sérieux. Le premier, c'est celui de la « diversité des points de vue ». Quand on a de fausses majorités, la vraie diversité de l'éventail des opinions des électeurs est moins représentée. On a un sérieux problème posé par le manque de diversité des points de vue provenant des régions. En ce moment, le Canada atlantique est représenté par un parti qui, même s'il est assez dominant, demeure tout de même un parti. Toronto est sans représentant, à part un parti. Lorsque la vague du NPD a déferlé sur le Québec, en 2011, nous occupions 80 % des sièges, mais avions obtenu quelque chose comme 42, 43 ou 44 % du vote. Notre victoire n'était pas plus juste que ce qui est arrivé dans de nombreux autres contextes.
    Le système uninominal majoritaire à un tour exacerbe le régionalisme parce que les gens tendent à commencer à associer l'Alberta, par exemple à rien d'autre que des conservateurs, surtout si ce résultat se répète après plusieurs élections.
    Il contribue également à un système parlementaire de Westminster indûment dominé par l'exécutif. Les fausses majorités peuvent rendre possible cette dynamique des pouvoirs. Elles produisent une vision étroite des choses et des fixations idéologiques au sein des textes législatifs au lieu de forcer les rédacteurs à confronter les points de vue divergents que les élections à représentation proportionnelle tendent à produire, mais pas notre système de fausse majorité.

  (1000)  

    Je crois aussi que notre système — et cette caractéristique peut être exacerbée à divers moments — tend à s'éloigner du consensus et de la collégialité et à se rapprocher de l'antagonisme et de l'hyperpartisanerie; c'est presque de la politique de style terrain de rugby qui est un peu liée à la dynamique du vainqueur qui emporte tout et à l'organisation en vue des prochaines élections dans cette même optique.
    Le vote préférentiel est un système de scrutin préférentiel dans des circonscriptions uninominales, qui est proposé. Le Parti libéral l'avait proposé dans son propre livre sur les politiques, il y a un certain temps. Je veux simplement m'assurer que... Il est essentiel que tout le monde sache que le VP ne comporte aucune caractéristique qui contrerait vraiment la plupart de ces problèmes, si toutefois il permettait d'en régler.
    La première chose, c'est que, même s'il est imprévisible, le VP exacerbe presque toujours — du moins, dans une certaine mesure — le problème de la disproportionnalité. Éric Grenier, de CBC, qui a utilisé les données accessibles tout de suite après les dernières élections, a laissé entendre qu'environ 224 Libéraux auraient été élus au lieu des 185 — plus ou moins — qui l'ont été sous le régime du système actuel.
    Au-delà de cela, même en soi, le VP est présenté comme un système majoritaire. Je veux m'assurer que tout le monde comprend les limites de cette caractérisation.
    Tout d'abord, le vote préférentiel n'est pas vraiment majoritaire dans le sens d'une majorité de premières préférences. Dans le cas d'un grand nombre des circonscriptions, il faut ajouter des deuxièmes préférences. Voilà ce que tout le monde doit noter.
    Le deuxième élément, c'est qu'il ne permet même pas de faire en sorte que chaque vote compte, ce qui était le principal enjeu du programme du gouvernement lors des dernières élections.
    Pendant des années, nous avons tous présumé que l'expression « chaque vote doit compter » renvoyait en réalité à la représentation proportionnelle. Toutefois, il est clair que, si elle a été utilisée dans le programme libéral, ce devait être dans le but de peut-être servir à conserver la possibilité du vote préférentiel. Cependant, ce ne peut pas être le cas si le VP n'attribue pas une valeur égale à chaque vote. Le problème ne tient pas seulement au fait que, quand on compte les deuxièmes votes, on ne fait que compter de bas en haut jusqu'à ce qu'une personne franchisse le seuil des 50 %. On ne se rend presque jamais au dépouillement des deuxièmes votes pour les candidats occupant la première et la deuxième places après le premier tour. Il s'agit en fait d'une fausse présentation du fait de faire compter chaque vote.
    Je dirais qu'il y a aussi un problème de majorité trompeuse. Je vous enverrai le diagramme présentant le travail que j'ai effectué à ce sujet. On peut vraiment faire en sorte que des candidats franchissent le seuil des 50 % plus un dans les premiers votes, plus les deuxièmes, alors que, si on faisait la somme de tous les votes en première et en deuxième places, y compris ceux des deux premiers candidats, ce candidat ne serait pas le préféré.
    Il s'agit d'un système qui présente des avantages, mais vous devez faire très attention de savoir quels sont ces avantages et de ne pas dire à tort qu'il est question d'un système majoritaire. Il ne s'agit vraiment pas d'un système majoritaire ayant d'énormes conséquences.
    Je terminerai en disant que j'ai été pendant trois ans critique de l'opposition officielle pour la réforme démocratique. J'ai plaidé en faveur de la RP, que la position du NPD était le système mixte avec compensation proportionnelle. Le parti était arrivé à cette conclusion après avoir étudié ce système au début des années 2000. Diverses commissions ont été mises sur pied partout au pays, y compris une au Nouveau-Brunswick, qui a été très bien décrite par M. McLaughlin... l'expérience positive à l'étranger — en Écosse, en Nouvelle-Zélande et en Allemagne, par exemple — et mon propre examen. Je crois que le système mixte avec compensation proportionnelle est l'idéal, mais je veux mettre l'accent sur le fait qu'un compromis respectueux et fondé sur des principes peut aussi faire l'affaire. C'est déjà au cœur de vos travaux.
    Par exemple, j'exhorterais le Comité à envisager l'idée d'un système mixte avec compensation proportionnelle évoqué par la Commission Jenkins du Royaume-Uni, qui permet la tenue d'un scrutin préférentiel dans les élections locales. Il faudrait s'assurer qu'aucun écart entre les sièges locaux et régionaux ne favorise indûment le côté local des élections, car le scrutin préférentiel pourrait produire des distorsions plus importantes à cet échelon. Toutefois, si des gens ici présents affirment que le scrutin préférentiel présente un avantage indépendant relativement aux élections locales, il peut être intégré.
    Dans le même ordre d'idées, je crois également qu'il est possible de concevoir un mode de scrutin à vote unique transférable qui permettrait un certain degré d'attention locale. On peut répartir les circonscriptions plurinominales pour les fonctions de service. Il est possible que la prestation des services soit coordonnée, même si tous les députés représentent l'ensemble de la circonscription, et d'effectuer une approximation d'une forme d'attention locale grâce au scrutin à vote unique transférable.
    Il y a des moyens de faire des compromis et d'atteindre une multitude de buts.
    Je serai heureux de répondre à des questions concernant de nombreuses autres caractéristiques de la conception institutionnelle, mais je terminerais en disant que je pense que le Comité est vraiment parti du bon pied. Dans l'introduction de la ministre Monsef, il était question de deux maux, pas d'un. Elle a évoqué le problème de la fausse majorité. Elle a également parlé des raisons pour lesquelles un système de type vote préférentiel pourrait régler un autre ensemble de problèmes. Elle n'a pas été exclusive, et, selon moi, la composition du Comité a donné le coup d'envoi à quelque chose dont bien des gens doutaient même de la possibilité.
    Bien des gens — des rabat-joie, des commentateurs —tiennent pour acquis que, en coulisse — pas aux yeux des membres du Comité, mais en coulisse —, l'un des buts est que ce processus aboutisse à un échec monumental et qu'il y aura un blocage, une impasse, que rien n'en ressortira et que nous conserverons le système actuel. Je ne pense pas que cela doive obligatoirement se produire. Je fais preuve d'un optimisme sceptique qui me porte à croire que nous pouvons faire bien mieux, et je crois que vous amorcez ce processus parce que le Comité est formé comme le seront les comités dans l'avenir, selon une représentation proportionnelle. Vous pouvez y arriver. Le Comité en soi sera la preuve qu'un système comme celui-ci peut fonctionner dans l'avenir.

  (1005)  

    Merci beaucoup, monsieur Scott.

[Français]

     Je cède maintenant la parole à M. Fox.
    Membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité à m'entretenir avec vous aujourd'hui.
    Depuis le début de ses réunions, le Comité a rencontré plusieurs experts qui ont parlé des caractéristiques de divers modes de scrutin, des expériences avec ceux-ci dans divers pays et de leur applicabilité ou non au Canada, compte tenu de nos réalités géographiques et démographiques ainsi que de notre système politique.
     Ces considérations sont, bien entendu, fort importantes. Toutefois, au cours de mon intervention de ce matin, je vais plutôt mettre l'accent sur le mandat du comité, le processus délibératif et l'engagement des citoyens dans ce débat, dont l'issue pourrait avoir toutes sortes de conséquences pour le système démocratique, qu'elles soient voulues ou non. En ce sens, bien que cela n'ait pas été coordonné, je vais faire écho à plusieurs des points que MM. McLaughlin et Scott ont déjà soulevés.

  (1010)  

[Traduction]

    Voilà pourquoi la manière dont les Canadiens sont mobilisés dans le cadre de ce processus délibératif a une importance aussi cruciale par rapport à toute proposition éventuelle de réforme et à la légitimité qu'aura cette proposition aux yeux des électeurs.
    Il est exponentiellement plus important de bien faire les choses que de les faire à temps.

[Français]

     Au sujet des outils de consultation déjà annoncés, je salue les efforts de ce comité visant à multiplier les occasions d'exprimer son opinion sur cette question. Votre décision de tenir des rencontres dans l'ensemble du pays et la disponibilité d'un questionnaire en ligne sont évidemment de bons moyens de permettre à celles et ceux qui le veulent de se faire entendre.
    Cela dit, il s'agit là d'occasions d'exprimer un point de vue. Cependant, pour développer un large consensus chez les électeurs, ce qui, à mes yeux, est essentiel au succès à long terme d'un projet de réforme, il faut aussi créer des occasions de mise en commun, d'échange et de cheminement.

[Traduction]

    Le processus de consultation qui a maintenant été lancé permet la formulation d'intérêts, mais on ne peut pas déterminer aussi clairement comment ces intérêts variés et parfois concurrents seront regroupés dans un consensus public sur la meilleure façon de procéder.
    Les Canadiens devraient avoir le plus d'occasions possible de communiquer leur point de vue, mais un processus authentiquement délibératif devrait également saisir l'évolution des points de vue à mesure que les personnes entendent celui d'autres personnes ou examinent de nouvelles données probantes. En tant que représentants élus par le peuple, les députés peuvent certainement appuyer ce processus en se tenant au courant des points de vue changeants de leurs électeurs et en les reflétant dans leurs interventions au Parlement. Toutefois, la politique et la discipline des partis limiteront leur capacité de le faire librement, si les électeurs ont un point de vue qui diffère de celui de leur parti. Ces limites sont peut-être légitimes, mais il s'agit tout de même de limites.
    Lorsqu'il s'agit d'un enjeu d'une importance aussi fondamentale que le système démocratique, les Canadiens eux-mêmes doivent participer de façon significative au débat, et leur sagesse collective doit stimuler le résultat. Ainsi, la question qui m'est venue à l'esprit pendant que j'examinais ce processus, c'était comment nous passons des consultations publiques à la mobilisation citoyenne. Dans cette optique, je formulerais les observations suivantes afin que le Comité les prenne en considération.
    Tout d'abord, je ne suis pas certain que l'électeur moyen sache encore quel est le problème que nous tentons de corriger. Tous les systèmes électoraux provoquent des distorsions et présentent des lacunes, mais quel est l'aspect précis des résultats du système uninominal à scrutin majoritaire qui, selon nous, est lacunaire? Cette idée, dans l'esprit du public, que les systèmes de vote préférentiel produiraient des résultats plus souhaitables est, en soi, une question de point de vue.
    Le Comité a pour mandat d'adresser des recommandations à la Chambre, mais si, à la lumière des conseils du Comité, le gouvernement décidait de produire un projet de loi, un leadership public sera requis pour que l'on puisse s'assurer que l'intention de réformer le système électoral bénéficie d'un vaste soutien. À mon humble avis, un tel soutien n'existe pas actuellement. Afin d'obtenir tout consentement à l'égard de la réforme, nous devons d'abord nous assurer que tout le monde s'entend sur le fait qu'il y a un problème à corriger et que tout le monde convient de la nature de ce problème.

[Français]

    Bien sûr, je reconnais que le Comité a reçu un mandat bien précis et un cadre à l'intérieur duquel il doit fonctionner. Cependant, peut-être est-il possible, lors de vos échanges et dans vos écrits, de rappeler aux décideurs que la dimension pédagogique de ce débat est essentielle pour la suite des choses. Les fascicules d'information qui portent sur les options de réforme et que le Comité a rendus publics sont fort utiles, mais éventuellement, il faudra également que le gouvernement fasse preuve de leadership pour convaincre les citoyens que la réforme est nécessaire et prioritaire.
    Deuxièmement, le mandat de ce comité énumère des principes ou valeurs que toute proposition de réforme devrait soutenir ou renforcer, à savoir l'efficacité et la légitimité, la participation, l'accessibilité, l'intégrité et la représentation locale. À mes yeux, le mandat vise juste, en ce sens que les bons principes ont été identifiés. Le travail qu'il reste à faire, c'est le débat public sur la priorisation de ces cinq principes en cas de conflit entre ceux-ci.
     Comme citoyens, préférons-nous sacrifier un peu de représentation locale pour augmenter la participation de groupes qui sont actuellement sous-représentés ou préférons-nous un mode de scrutin qui protège à tout prix le lien entre l'élu et le territoire?
    Les deux options se défendent, mais encore faut-il en arriver à une réponse commune.

[Traduction]

    C'est sur les valeurs et les principes décrits dans le mandat du Comité que le débat public devrait être axé, du moins à l'étape initiale. Les débats éventuels sur les mécanismes des systèmes de vote devraient être fondés sur notre sentiment collectif à propos de ces valeurs et sur la façon dont nous avons convenu de régler les conflits entre eux, le cas échéant.
    Une compréhension commune de l'importance relative de ces valeurs pour les Canadiens nous permettra également de nous assurer que le choix éventuel d'un système électoral pourra être évalué en fonction d'une déclaration publique de valeurs communes plutôt que d'intérêts tactiques partisans, et, pour ce qui est de la question particulière de la conception de l'exercice de mobilisation, dans le cadre de ce processus ou de tout processus législatif subséquent, si un projet de loi est effectivement présenté au Parlement.
    J'encouragerais le Comité à faire appel à des praticiens experts, comme Don Lenihan, qui ont une expérience directe de travail sur des exercices de mobilisation à l'intérieur de processus parlementaires et gouvernementaux.
    En guise d'observation finale et pour reprendre un argument formulé par M. Scott, je veux réfléchir à la composition du Comité et au choix qui a été fait de veiller à ce qu'il reflète davantage le vote populaire que la composition de la Chambre des communes. D'une façon importante, cela fait du Comité un prototype du comité type de la Chambre des communes qui serait élu sous le régime d'un système plus proportionnel.

  (1015)  

[Français]

     L'un des principes qui a été mentionné dans le mandat du comité vise à encourager la collaboration dans les processus politiques. La composition du comité ouvre la possibilité d'aller au-delà des recommandations et d'en faire la démonstration dans le cadre de votre travail.

[Traduction]

    La façon dont le Comité mène ses activités et rend des comptes à la Chambre sera instructive quant à la façon dont le Parlement se comporterait dans le cadre d'un nouveau système. Vous avez l'occasion de laisser présager de ce que pourrait produire la réforme électorale. Dans ce cas, le processus, c'est le contenu.
    La nature délicate et politique des questions que vous devez étudier pourrait accroître le risque de tenter de parvenir à un consensus entre vous, mais le signal que cela pourrait envoyer augmentera peut-être aussi ses récompenses. Par contre, un résultat qui s'apparenterait davantage au rapport majoritaire attendu des députés du parti au pouvoir et aux rapports dissidents de tous les autres pourrait être moins encourageant pour les personnes qui espèrent que la modification du système électoral donnera lieu à une plus grande collaboration entre nos politiciens.
    Sur cette question précisément, laissez-moi vous dire que, comme M. Scott, je pense que le Comité est parti d'un très bon pied à cet égard.

[Français]

    Sur ce, monsieur le président, encore une fois, je vous remercie beaucoup de votre invitation. Je vous souhaite bon succès. Il me fera plaisir d'échanger avec les membres du comité et de répondre à leurs questions.
    Merci, monsieur Fox.
    Nous allons débuter le premier tour avec M. Aldag, qui dispose de cinq minutes.

[Traduction]

    Je remercie encore une fois tous nos témoins de leur merveilleux témoignage. Il y a beaucoup de matière à réflexion.
    Vous avez tous les trois présenté d'excellentes réflexions supplémentaires, des aspects sur lesquels je me penche, mais je vais commencer par revenir en arrière. Une partie de l'affaire a été déclenchée par une discussion lancée par un de nos témoins, hier, au sujet de la question suivante: « est-ce le bon moment pour changer? » J'aimerais vous poser cette question à tous les trois. Nous ne sommes pas en situation de crise, actuellement. Quelqu'un a commenté que la foule ne manifeste pas et qu'elle n'est pas montée aux barricades, munie de torches et de fourches. Devons-nous attendre que ce genre de crise frappe notre système pour le faire, ou bien est-ce le bon moment? J'ai entendu un appui généralisé à l'égard de la poursuite de notre discussion.
    Monsieur Fox, je pense que ma question est liée à des commentaires que vous avez formulés au sujet de déterminer si le changement est nécessaire maintenant.
    Premièrement, je dirais que je pense qu'en général le fait d'attendre qu'une crise survienne ne constitue pas une excellente politique publique.
    Deuxièmement, une accumulation progressive a mené à cette situation. Ce n'est pas comme si elle sortait de nulle part. Depuis le début des années 2000, nous avons mis sur pied un certain nombre de commissions et mené divers processus dans diverses provinces, même à l'échelon fédéral, avec la Commission du droit du Canada. Il convient de souligner le processus lent et les politiques cumulatives qui ont donné lieu à la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement, et c'est ce qui a tendance à pouvoir se produire un peu dans des processus parlementaires plus consensuels. Ils pourraient être un peu plus longs pour les mêmes raisons.
    Le troisième élément est ce qu'on appelle les promesses électorales. Si nous prenons au sérieux les fondements mêmes de notre démocratie électorale contribuant au système parlementaire, le fait d'amorcer ce genre de processus était une promesse assez importante de la part du gouvernement. Au moins deux autres partis avaient des idées plus précises, mais, manifestement, nous sommes ouverts à la grande discussion au sujet du type de réforme électorale à adopter, alors je pense qu'il y a un mandat populaire. Les gens votent pour toutes sortes de raisons et toutes sortes de dynamiques, mais nous balancerions par-dessus bord l'idée des programmes de parti et la valeur des promesses électorales si nous ne les prenions pas très au sérieux.

  (1020)  

    D'accord.
    Monsieur Fox.
    Pour appuyer ce que M. Scott vient tout juste de dire, je pense que c'est précisément parce qu'il n'y a aucune crise imminente que ce genre de travail doit être effectué maintenant. Toutefois, j'ajouterais que cela souligne l'importance de la sensibilisation du public et de la mobilisation des électeurs et des citoyens comme composante nécessaire d'un processus fructueux.
    D'accord.
    Monsieur McLaughlin.
    Je serais d'accord avec ce que Craig et aussi Graham ont dit, mais je serais en désaccord sur un petit point. Je crois franchement que votre travail se complique du fait qu'il n'y a pas de crise imminente ou de sentiment d'urgence, à l'heure actuelle, ce qui aurait capté l'attention du public. Une partie de votre tâche, parallèlement à l'étude des divers systèmes et à la recherche d'améliorations, comme de bien s'entend, puisque vous êtes députés, consiste aussi à convaincre les Canadiens qu'un changement est nécessaire.
    Graham l'a dit dès le début, quel problème essayons-nous donc de régler? Je crois sincèrement que vous devez encore prendre le temps de le faire savoir et de le présenter en des termes qui toucheront les gens. Il serait utile de nous replonger dans les commissions précédentes. Lorsque nous nous sommes penchés sur le cas du Nouveau-Brunswick, entre autres, le débat était engagé sur des résultats électoraux bien précis. Comme je l'ai mentionné, il y avait au Nouveau-Brunswick des gouvernements très majoritaires et des oppositions réduites. Cela agaçait les gens, et cela alimentait notre débat. En Colombie-Britannique, l'assemblée citoyenne est passée d'un extrême à un autre, lorsque Gordon Campbell a remporté presque tous les sièges. Au Québec, Jean Charest et les libéraux ont obtenu la majorité des votes, mais ont perdu l'élection. Ce sont des choses comme ça qui amènent les gens à penser que le système est injuste.
    Pour le moment, étant donné que ce sentiment n'est pas généralisé à l'échelle du pays, à mon avis, depuis les dernières élections, votre tâche est un peu plus difficile. Franchement, vous allez devoir trouver le moyen de faire en sorte que les gens y pensent, mais la façon dont vous faites votre travail jouera en votre faveur de deux façons. Il y a la façon dont vous faites votre travail, le processus de consultation, l'engagement, mais il y a aussi la qualité de votre travail et des recommandations que vous formulez.
    Merci.
    Nous donnons maintenant la parole à M. Reid.
    Merci beaucoup. Tous les exposés étaient d'excellente qualité, mais je dois adresser mes questions à une seule personne, et ce sera M. Scott.
    Pour commencer, permettez-moi de dire, Craig, que c'est un plaisir de vous revoir.
    C'est un plaisir pour moi aussi, Scott.
    Nous avons siégé à un même comité tout au long du mandat de Craig. J'ai toujours pensé que c'était l'une des personnes les plus réfléchies qui aient jamais siégé à ce comité. C'est un très beau compliment, étant donné que ce comité a déjà compté parmi ses membres, entre autres, M. Ed Broadbent.
    Merci.
    Revenons à nos moutons. Je suis d'accord avec votre analyse du vote préférentiel. Je crois que votre description est parfaitement correcte. Je crois qu'un problème supplémentaire se pose, au Canada, étant donné que, contrairement aux autres pays qui ont adopté le scrutin majoritaire uninominal à un tour, où il y a en général un parti de droite et un parti de gauche qui se font la lutte et où le gouvernement est par alternance de gauche ou de droite, le Canada a tendance à être gouverné par un parti centriste. Les libéraux ont donc un avantage systémique et prévisible dans le système de scrutin préférentiel.
    Harold Jansen, un témoin que nous avons déjà reçu, a souligné qu'aux élections de 2015, où le parti a obtenu ses meilleurs résultats en trois décennies, et aux élections de 2000, où les libéraux ont obtenu leurs pires résultats, ils auraient remporté plus de sièges selon un scrutin préférentiel que selon le mode de scrutin actuel. Je lui ai posé des questions sur les études précédentes et les élections précédentes. Il a dit qu'une étude avait été faite en 1997 et qu'elle confirmait cette tendance; j'ai pu par la suite consulter cette étude. Il semble que, étant donné notre structure de parti, cela permet de prédire les résultats, peut-être pas pour toujours, mais au moins pour les prochaines élections. C'est important étant donné qu'un parti pourrait obtenir moins de votes, en pourcentage, que les libéraux n'en ont obtenus cette fois-ci et obtenir quand même la majorité, selon le scrutin préférentiel, et par conséquent 100 % du pouvoir. En fait, je crois que le type de proportionnalité que nous cherchons est tout à fait à l'opposé de cela.
    Cela dit, je vais revenir sur votre discussion au sujet du système mixte proportionnel. Encore une fois, à mon avis, selon ce que les témoins nous ont dit, le SMP fonctionnerait mieux dans le contexte du Canada que dans d'autres pays à système proportionnel pour des raisons que je n'exposerai pas parce que je ne veux pas monopoliser la discussion. Vous avez parlé d'un modèle, qui a été recommandé par la commission Jenkins, qui intègre la proportionnalité à une liste et se double d'un vote préférentiel à l'échelon des circonscriptions. Vous avez dit qu'à votre avis ce système pouvait avoir quelques avantages.
    Je vais lire en temps et lieu le rapport de la commission Jenkins, mais ce qui me préoccupe, dans ce système, c'est que, s'il était mis en oeuvre ici, un parti seulement, le Parti libéral, obtiendrait la totalité ou la grande majorité des votes des circonscriptions, de sorte que les sièges de liste seraient dévolus aux autres partis. Cela créerait, à tout le moins, un bizarre équilibre au Parlement. Ce ne serait peut-être pas la fin du monde, mais j'aimerais savoir si vous n'y voyez pas un problème, étant donné la nature de notre pays.

  (1025)  

    Oui, c'est à coup sûr un problème. C'est la raison pour laquelle j'ai conclu en toute hâte mes commentaires en disant que vous devrez faire très attention à la façon dont les sièges de circonscription et les sièges de la liste régionale seront répartis, étant donné qu'il pourrait y avoir une distorsion au moins aussi importante sinon plus importante encore du nombre de sièges remportés par un parti que le scrutin préférentiel favorisera, dès le départ. Par exemple, si quelqu'un disait que la Commission de réforme du droit, sans recommander le scrutin préférentiel pour les élections à l'échelle locale, seulement le scrutin majoritaire uninominal pour les élections à l'échelle locale, avait recommandé une majorité de 65 contre 35, ou, en gros, deux tiers contre un tiers, si vous gardiez cette proportion en adoptant le scrutin préférentiel, ce ne serait pas suffisant. Vous devrez à tout le moins ramener la majorité à 60 % de façon à tenir compte de cette distorsion supplémentaire, pour les raisons que vous venez d'exposer.
    J'en parle, mais c'est quand même une position qu'il faut encore défendre. Les gens devront quand même chercher à savoir quel aspect exactement du vote préférentiel, outre toutes ces affirmations que je qualifie de relativement peu claires et pas tout à fait exactes sur le principe de la majorité, les gens estiment pouvoir régler quelque chose. Si on peut répondre à cette question, si quelqu'un veut aller dans cette direction, il vous sera toujours possible de l'intégrer à un système mixte proportionnel. C'est la seule chose que j'avais à dire. Ce ne serait pas mon premier choix, parce que je crois que l'aspect de la proportionnalité sera plus difficile à respecter.
    Je dispose de 20 secondes; alors, rapidement, nous avons entendu hier un très bon exposé par des Allemands selon lesquels nous devrions avoir des sièges de liste et des sièges de circonscription dans une proportion égale. Si vous aviez le choix, quel pourcentage préféreriez-vous?
    Je pencherais pour soixante-quarante; aussi, c'est pratiquement une estimation politique. La proportionnalité est la première chose à laquelle je m'arrête, quand il est question de la structure. Je crois que le système allemand est beaucoup plus susceptible de l'assurer, et les Allemands avaient une raison de recommander que ce soit cinquante-cinquante, mais, pour ce qui est de cette distribution, je crois que je ne voudrais pas dépasser une proportion de soixante-quarante.
    Merci.
    Monsieur Cullen.
    Je suis plutôt en faveur de soixante-dix-trente, mais nous pourrons en débattre plus tard.
    Je ne sais pas si quelqu'un parmi vous a lu le billet d'Andrew Coyne d'hier. Il parlait de l'efficacité du gouvernement. Pour être efficace, un gouvernement a besoin entre autres de savoir si son mandat durera deux, trois ou quatre ans. À l'issue de 9 des 20 dernières élections, les Canadiens avaient élu un Parlement minoritaire, et, selon le système majoritaire uninominal à un tour, ce type de Parlement est très instable, car n'importe qui peut, à un moment donné, avoir un motif pour faire tomber le gouvernement. Pourtant, si on regarde ce qui se passe ailleurs dans le monde, si on compare le scrutin majoritaire uninominal et le scrutin proportionnel, on constate que les gouvernements élus par scrutin proportionnel sont en fait un tout petit peu plus stables, étant donné qu'il n'y a pas, dans ce système, la même motivation à faire tomber le gouvernement.
    Jusqu'ici, monsieur Fox, monsieur Scott, y a-t-il quelque chose qui cloche dans mon analyse?
    Non, pas de mon point de vue; je crois que c'est un argument convaincant.
    Lorsque nous faisions nos travaux, nous avons constaté à peu près le contraire. Je vous recommanderais, si cela vous intéresse, de consulter des recherches universitaires que nous avons menées et que nous avons fait paraître sous forme de livre. Vous avez déjà reçu ici bon nombre de ces universitaires. Il se peut que les études datent d'un certain temps, mais nous avons mené des analyses originales pour montrer les répercussions de la façon dont un gouvernement est formé et de l'instabilité. À l'époque, de 2003 à 2005, les gouvernements élus selon la représentation proportionnelle semblaient un peu plus instables, mais je sais que vous avez reçu des recherches subséquentes. La situation a peut-être changé un peu, mais j'ai quand même fait cet examen.
    Nous avons pris connaissance d'une étude longitudinale menée par l'OCDE sur 60 ans et de choses du même type.
    Je crois que, dans le fond, ces deux systèmes, qui prennent la mesure de la stabilité selon le temps qui s'écoule entre deux élections et la durée d'un gouvernement, sont en réalité assez semblables. Ces études longitudinales de longue durée donnent un très léger avantage au système de représentation proportionnelle, mais il n'est pas statistiquement important. Un bon nombre des études qui auraient peut-être été prises en considération, au début des années 2000, incluaient l'Italie. Lorsqu'il y avait, en fait, un remaniement ministériel...
    Ah, l'Italie.
    ... c'était considéré comme un changement de gouvernement. Cela faussait certaines des statistiques.
    Lorsque le cabinet était remanié, on faisait comme s'il s'agissait d'un changement de gouvernement.
    C'est cela.
    C'est l'expérience des électeurs qui m'intéresse, et c'est pourquoi je vais revenir à vous, David, et aux recommandations que vous avez présentées au Nouveau-Brunswick sur la façon de traiter les votes de manière équitable, peu importe la façon dont ils sont exprimés. Vous vous êtes rallié, étant donné que nous nous posons aussi la question de la légitimité. Comment allons-nous légitimer ce qui se passe ici?
    Vous parlez tous les trois de manière différente de la responsabilité, du critère que nous devons respecter, en tant que Comité, touchant la composition du Comité, qui reflète d'assez près la façon dont les Canadiens ont voté, et aussi de savoir si notre Comité peut fonctionner. Jusqu'ici, tout va bien.
    David, l'idée de mettre en place un nouveau système de scrutin puis de l'évaluer obtient l'aval de certaines personnes, mais est décrié par les autres. Vous avez laissé entendre aujourd'hui qui vous étiez en faveur. Comment cela se fait-il?

  (1030)  

    Le point de départ, à mon avis, c'est le fait qu'il s'agit du système public. Il ne s'agit pas du système d'un parti ou d'un politicien, ou quoi que ce soit d'autre.
    Je pense aussi que notre perception de la démocratie a évolué au fil du temps de même que les attentes des gens par rapport aux représentants élus. C'est malheureux, mais nous ne les tenons pas en si haute estime que nous leur laisserions prendre toutes ces sortes de décisions. Même si je crois que, grâce à ce processus, les représentants élus arriveront très bien à éclairer les réflexions des gens et à les aider à comprendre les options, je suis tout simplement convaincu que les citoyens de notre pays ne renonceront jamais à ce droit ou à cette possibilité, selon la perception de chacun, de voter sur cette question, d'une façon ou d'une autre.
    Craig, vous avez parlé de vision étroite, au sujet des politiques. M. Broadbent, qui était ici plus tôt, prétendait que si l'on remontait dans le temps, on verrait que les gouvernements du Canada ont pris de nombreuses formes et que toutes les régions ont été très mal représentées. Il y a déjà eu des gouvernements libéraux qui ne comptaient presque aucun représentant des provinces de l'Ouest, et il prétendait que cela a expliqué quelques mauvaises politiques énergétiques. Nous avons eu des gouvernements conservateurs qui, au contraire, jouissaient d'une très bonne base dans l'Ouest, mais qui étaient quasiment absents du Québec, et pendant longtemps. Selon certaines personnes, l'équilibre à maintenir entre ces intérêts et les intérêts des régions, dans un système proportionnel, nuisent à la concentration du gouvernement, et diluent le potentiel des politiques qu'il présente.
    Qu'auriez-vous à rétorquer à cela?
    Soyez très bref, s'il vous plaît.
    Je serai très bref.
    Je crois que la lucidité et la légitimité découlent de la diversité. Lorsque vous débattez sérieusement de divers points de vue, et en toute bonne foi, vous formulez de meilleures politiques.
    Merci.

[Français]

     Monsieur Thériault, vous avez maintenant la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous remercie, messieurs, de ces présentations.
    Le Bloc québécois est en faveur d'un changement ouvert, mais pas n'importe lequel et pas n'importe comment. Nous disons qu'il faut dépasser le cercle des initiés, des experts et surtout des partis politiques. Nous partons de la prémisse qu'il s'agit d'un dossier dominé par la partisanerie. Le Comité, aussi équilibré soit-il, est aussi dominé par la partisanerie.
    C'est la raison pour laquelle nous pensons qu'une deuxième étape du processus est nécessaire. Il faut remettre les citoyens au centre de notre volonté de réforme. J'ai compris que vous étiez favorable à cela, monsieur McLaughlin.

[Traduction]

    Je n'ai pas l'impression que le Comité est tellement partial. J'ai cependant l'impression qu'il est proportionnel et que les partis font leur travail, tout comme les députés. Malgré cette légère dissidence, je crois en un référendum et je l'ai offert; j'ai offert aux citoyens et aux électeurs l'occasion de se prononcer sur le travail du Comité. Mais à la base, une motion du gouvernement, un projet de loi qui passerait par la Chambre des communes, qui suivrait le processus parlementaire, voilà la façon de donner toute la légitimité voulue à ce qu'il résultera de ce processus.

[Français]

    Qu'en pensez-vous, monsieur Scott?
    Comme l'a dit M. Fox, je suis aussi d'avis qu'il y a une dimension pédagogique à ce sujet. Ce n'est donc pas nécessairement une question de partisanerie, mais une question de savoir si, oui ou non, la population canadienne est représentée par les femmes et les hommes politiques.
    Ne croyez-vous pas, monsieur Scott, que lorsqu'une réforme est entre les mains d'un gouvernement ou de partis, le changement est désiré dans la mesure où il favorise le parti et les intérêts partisans?

  (1035)  

    Oui.
    D'emblée, personne ne va oublier cela. Tout le monde reconnaît qu'aucun système n'est parfait. Il y a des avantages et des inconvénients dans tout système.
    Ce n'est pas la même chose.
    L'arbitrage final doit être la responsabilité de la population et être entre les mains de celle-ci.
    Qu'en dites-vous, monsieur Fox?
    C'est justement pour cela que le débat sur les valeurs et les principes est si important.
    Même si on réunit les citoyens en assemblées constituantes, on fera ce que l'on voudra si, dans le cadre du débat, on commence tout de suite à parler de mécanismes et de modes de scrutin et si on se demande si on veut tel système ou un autre. Si on s'est pas d'abord entendu sur les valeurs qui devraient sous-tendre le système, on va être dans la dynamique que vous décrivez. Il faut produire une déclaration publique sur les principes auxquels on tient. Par la suite, on pourra mesurer les propositions précises par rapport à ceux-ci plutôt que par rapport aux intérêts partisans des uns et des autres.
     Si l'on adoptait un système proportionnel mixte, ne croyez-vous pas qu'on irait vers cela?
     Il faut aussi changer la mécanique, mais par souci d'équité, il faut aussi rétablir le financement de l'État quant aux votes qui sont exprimés. On ne peut pas être favorable au pluralisme idéologique sans donner la chance à chacune des voix que l'on veut voir être présentes dans leur pluralité à la Chambre.
     Par ailleurs, une réforme de la procédure parlementaire pourrait éviter que tous les députés se retrouvent dans une situation comme celle du Bloc québécois.
    Je ne veux pas nécessairement m'avancer sur la question précise du financement populaire des partis politiques. Par contre, une fois qu'on aura un peu clarifié le débat qui a lieu autour de cette table, il va falloir situer celui-ci dans un cadre plus grand de gouvernance.
    Qu'est-ce que cela va impliquer, pour le système fédéral, d'avoir peut-être davantage de coalitions au niveau gouvernemental à Ottawa, alors que les provinces n'auront peut-être pas le même système?
    La question du financement est connexe à tout cela. Il faut vraiment voir la situation dans son ensemble.
    Il reste que l'objet principal n'est pas la détermination de la gouvernance, mais bien la pluralité au sein du pouvoir législatif, qui est le socle de la démocratie. Le pouvoir exécutif n'est pas le socle de la démocratie.
    Je vous remercie.
    Nous passons maintenant à Mme May.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins et en particulier, encore une fois, comme vous l'avez dit dans votre déclaration liminaire, Craig, si vous aviez su que vous alliez venir... S'il y en a parmi nos téléspectateurs qui ne le savent pas, vous avez pu remplacer à la dernière minute un témoin qui a subitement annulé. Je ne sais pas combien parmi vous sont dans la même situation, mais je suis très reconnaissante aux témoins qui sont présents ce matin.
    Je vais m'adresser d'abord à vous, David, pour parler de l'expérience de la commission du Nouveau-Brunswick. J'ai reçu sur Twitter une question de Laurel Russwurm. Elle aimerait savoir si, à votre avis, le Nouveau-Brunswick aurait dû mettre les recommandations en oeuvre. C'est une question difficile. Vous avez beaucoup travaillé pour en arriver là. Auriez-vous préféré, rétrospectivement, que le Nouveau-Brunswick adopte le système mixte proportionnel?
    Oui, car il aurait été adopté par un gouvernement conservateur qui venait d'être réélu.
    Des voix: Oh, oh!
    Excellent.
    Le premier ministre Lord avait pris l'engagement suivant: s'il gagnait les élections suivantes, il serait allé de l'avant. Mais il y a eu un changement de gouvernement, et le nouveau gouvernement libéral a dit non.
    En ce qui concerne votre objectif, je me réjouis vraiment de l'objectif que vous avez présenté ici, que vous avez présenté à la commission, à savoir une démocratie dirigée par les citoyens. J'ai essayé de voir comment nous pouvions, à titre de députés, étant donné qu'autour de la table je vois ici surtout des députés, non pas une sorte d'unité agissant par procuration pour les grands partis politiques... Je crois que la façon dont nous en arriverons à un consensus, ici, consistera à agir à titre de députés, et nous devons d'une manière ou d'une autre laisser tomber l'idée d'un système de scrutin au service des partis politiques pour nous concentrer sur un système de scrutin qui sert les intérêts des électeurs afin qu'ils aient l'impression que leur vote compte.
    Comment, en pratique, est-ce que cela vous a fait pencher pour le système mixte proportionnel? Je vais poser la même question à Craig et à Graham, si je le puis. Comment pouvons-nous, en tant que députés, nous détacher... ou du moins communiquer aux Canadiens le fait que notre travail, ici, consiste à défendre les intérêts de la démocratie canadienne et des électeurs?
    Cela nous a amenés au système mixte proportionnel, étant donné le large mandat qui était le nôtre ainsi que les autres principes, le gouvernement efficace, la qualité du scrutin, etc.
    Lorsque nous avons eu à faire quelques compromis, nous avons examiné d'autres systèmes, par exemple le vote préférentiel, le vote unique transférable, nous avons étudié les modèles de l'Allemagne, de la Nouvelle-Zélande, tous des modèles de ce type. Si vous voulez un exemple plus précis, nous savions à moment-là que les Néo-Brunswickois tenaient vraiment beaucoup au fait d'avoir un député local. La perte de cette connexion aurait détourné l'attention des citoyens, si vous voulez, et c'est pourquoi nous l'avons intégrée.
    Nous avions également reçu des recommandations touchant la façon dont les partis pouvaient se restructurer, et cela se rapproche un peu des enjeux que M. Thériault a soulevés. Encore une fois, nous voulions un processus plus transparent.
    Nous pensions qu'un système à deux votes n'était pas compliqué. Tout le monde sait compter jusqu'à deux, mais nous avons pensé que, étant donné l'accent mis sur le citoyen, un système plus compliqué supposant une longue liste de candidats, sur le bulletin de vote, ne serait peut-être pas l'idéal, pour les électeurs. Nous nous étions attachés aux principes, au départ, Elizabeth, puis, à mesure que nous nous sommes attaqués aux divers éléments de la conception, cela nous a aidés à faire les choix qu'il fallait faire.
    Enfin, je dirais que les partis sont des acteurs légitimes, dans ce système. Dans un certain sens, il est impossible d'écarter complètement la justice à l'égard des partis. Mais, si tout revient aux partis et si tout semble tenir aux partis, vous avez fait fausse route, et le système partira à la dérive.

  (1040)  

    Craig, avez-vous un commentaire à faire sur ce sujet?
    Oui. Il ne portera peut-être pas directement sur le sujet, étant donné que je n'ai pas pu l'aborder dans l'essentiel de ma déclaration. Voici: si nous désirons vraiment prendre les Canadiens au sérieux, de la façon dont vous l'avez si bien expliqué, nous devrons aussi intégrer à la discussion, à l'échelon de l'institution, quelques autres questions.
    La question du sexe doit vraiment être placée au centre. Par exemple, si vous adoptez un système mixte proportionnel, faudrait-il absolument que, sur la liste, une personne sur deux, peu importe le parti, soit obligatoirement, de par la loi, une femme? Serait-il logique de faire quelque chose de semblable pour les Autochtones, étant donné la position dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui quant à notre connaissance collective des relations que nous entretenons depuis 150 ans avec les peuples autochtones? Je crois que vous devez d'une façon ou d'une autre réfléchir à ces deux facteurs ainsi qu'à d'autres communautés moins représentatives. Et il ne s'agit pas seulement du genre. Vous devez voir le Canada comme il est réellement et penser à des éléments que vous pouvez y intégrer sans que cela complique trop les choses.
    Je crois qu'il me reste 20 secondes pour entendre votre commentaire, Graham.
    Je ne voudrais pas finasser, mais trouvez plus de temps.
    Une assemblée citoyenne à l'échelle du Canada est probablement impraticable, étant donné notre géographie, entre autres, mais je crois qu'il existe d'autres manières de mettre un processus en place. Si vous voulez vous conformer à un principe, que vous devez d'abord définir avant de discuter et avant de prendre une décision, vous aurez besoin de plus de temps.
    Merci.
    Nous donnons maintenant la parole à Mme Romanado.
    Je tiens à remercier les trois témoins de s'être présentés ici aujourd'hui, par une belle journée ensoleillée du mois d'août... Désolée, nous sommes aujourd'hui le 1er septembre. L'été a été long.
    Monsieur Fox, vous avez abordé un sujet dont peu de témoins nous ont parlé, et on dirait que cela saute aux yeux, maintenant: quel est le problème que nous essayons de régler? De notre point de vue, c'est très clair, mais nous avons entendu les témoins d'hier dire que seulement 3 % des Canadiens s'intéressaient vraiment à ce processus. Étant donné le processus que nous avons mis en marche, jusqu'ici, devrions-nous effectuer une sorte d'analyse de la situation avant de commencer notre tournée? Que devrions-nous faire pour nous assurer que les gens comprennent le problème que nous essayons de résoudre, et quel serait le meilleur moyen d'y arriver? Pourriez-vous nous en dire un peu plus?
    Je crois que l'idée de faire le point, avant de commencer votre tournée, sur les conseils et les témoignages que vous avez entendus est une idée assez intéressante. Il se peut bien que, à huis clos, tous les membres du comité aient pu formuler une définition commune du problème. Je n'en sais rien.
    Il est certain que, si vous pouviez tous vous engager quant à la façon de présenter le problème que, à votre avis, vous tentez de régler, vous pourriez accélérer de manière extraordinaire le processus. Je crois que cela enverrait un message intéressant. Si votre comité peut s'entendre sur la façon de présenter le problème, il sera plus facile pour les Canadiens d'y réfléchir et de se demander s'ils sont ou non d'accord, plutôt que d'essayer, pendant que vous parcourez le pays, d'arriver tout naturellement à cette compréhension commune, puisque vous pourriez devoir en rédiger 18 ébauches sans jamais arriver à la version finale.
    D'accord.
    Monsieur McLaughlin, vous avez dit que la seule valeur qui n'avait pas été intégrée à tout cela, c'était celle de l'efficacité du gouvernement, et mon collègue l'a aussi mentionnée. S'il faut établir la liste de priorité des valeurs ou des principes, quels compromis les Canadiens seraient-ils prêts à faire? Nous avons entendu dire qu'il n'existe aucun système parfait qui réglera tous les enjeux liés à la réforme électorale dont le mandat nous revient.
    Que devrions-nous faire pour être certains de recueillir l'information pertinente, qui nous donnera une idée de ce qui est absolument non négociable et de ce que les gens pourraient accepter? Que recommanderiez-vous?

  (1045)  

    Je vais reprendre à mon compte quelques-unes des déclarations de Graham Fox: il faut présenter aux gens des propositions auxquelles ils pourront réagir. C'est ce que nous avons fait, à la commission du Nouveau-Brunswick. Nous avions un document exposant les options. Nous avions quelques ébauches de recommandations. Nous avons présenté tout cela afin de restreindre le débat pour amener les gens à réagir à des aspects précis, ce qui nous aidait à formuler des conclusions et à prendre des décisions. C'est ce que je vous recommande, mais je ne sais pas ce qui serait pour vous un équivalent.
    Un exemple de compromis aurait trait à la proportionnalité, la proportionnalité pure par opposition à un gouvernement efficace. Un système de représentation proportionnelle pure, conçu n'importe comment, entraînera des problèmes de stabilité, et tout ce qui s'ensuit. Il en existe un exemple. Jusqu'où les gens sont-ils prêts à aller? Ils vont dresser une liste de leurs valeurs et ils voudront que ces valeurs soient reflétées le mieux possible. Voilà le dilemme: le mieux possible. Voilà les mots clés: la conception importe. La façon dont votre système sera conçu, quant aux types de résultats qu'il produira, aura une véritable incidence sur l'importance des valeurs ou des principes qui y seront reflétés.
    Je crois que les Canadiens seront prêts à laisser un comité comme le vôtre, qui s'appuie sur des experts, participer à cette conception, dans la mesure où ils voient que les principes fondamentaux sont respectés. Étant donné qu'il n'existe aucun système idéal, il n'existe pas non plus de meilleur système. Ce sera par définition un choix entre divers compromis, mais plus vous pourrez rapidement présenter aux gens un aperçu de vos réflexions, quelque chose qui vous permet d'orienter la conversation de manière à mieux la diriger, plus vos travaux seront productifs.
    Bref, vous pouvez vous arrêter à bien des détails, mais quelque chose du genre serait utile.
    D'accord.
    Monsieur Scott, auriez-vous des suggestions?
    Vous avez environ 15 secondes.
    Je crois que ce que M. McLaughlin a dit est absolument vrai.
    Des voix: Oh, oh!
    D'accord, c'est bon.
    Monsieur Richards.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis heureux que vous soyez tous présents ici aujourd'hui.
    C'est un plaisir de vous revoir, monsieur Scott. Comme M. Reid l'a dit plus tôt, nous avons eu l'occasion nous aussi tous les deux de siéger à un même comité. J'ai l'impression que nous jouons à la chaise musicale, et je crois que vous étiez assis sur cette chaise-là, exactement...
    Exactement cette chaise-là...
    ... là où je suis présentement. J'étais assis en face. Je ne crois pas que ni vous ni moi ayons jamais pensé que nous serions assis là où nous le sommes; quoi qu'il en soit, nous sommes ravis de vous revoir.
    La retraite forcée a ses avantages, en passant.
    Je vais m'adresser pour commencer, toutefois, à vous, monsieur McLaughlin.
     Le Globe and Mail a publié en mai un de vos billets, et je vais en citer un extrait. Vous avez dit que le processus qui nous occupe: « manque de principes, manque de temps et manque de légitimité. » Je crois qu'il y a bien des gens ici présents qui seront surpris de savoir que je veux m'arrêter à l'aspect de cet extrait qui concerne le temps. Vous poursuivez l'article en disant ceci: « Les cinq provinces qui ont [changé leur mode de scrutin] y ont consacré chacune environ deux ans, non pas six mois. Chaque province a proposé un processus à deux ou trois étapes auquel ont participé l'Assemblée législative, des commissions indépendantes ou des assemblées citoyennes et, dans quatre cas, un référendum était également prévu. »
    Je voulais m'arrêter sur le fait que la promesse que les libéraux ont faite pendant leur campagne semble comporter deux volets concurrents, et nous devons maintenant nous y attaquer. Le premier volet, bien sûr, c'était la déclaration claire selon laquelle les élections seraient les dernières à se tenir par scrutin majoritaire uninominal à un tour, mais je crois que cette déclaration a un pendant. Les libéraux avaient déclaré qu'ils lanceraient un processus de consultation parlementaire. Je crois que cela suppose implicitement qu'il s'agirait d'un processus rigoureux accompagné de consultations appropriées. Je crois que nous en sommes arrivés à comprendre que ces deux choses ne s'accordent pas et qu'il est peut-être impossible de les réaliser toutes les deux.
    Je crois que ma question est la suivante: quel volet de cette promesse serait-il le plus important d'honorer? Est-il plus important de ne pas tenir les prochaines élections selon le scrutin majoritaire uninominal à un tour, ou de s'assurer que le processus est rigoureux, qu'il y a des consultations en bonne et due forme et que nous faisons bien les choses? Est-il plus important d'agir rapidement ou de bien faire les choses?
    Bien faire les choses. Ce n'est pas moi qui ai fait cette promesse...
    M. Blake Richards: C'est entendu.
    M. Davide McLaughlin: ... mais je crois qu'il vaut vraiment la peine d'étudier notre système électoral. Étant donné que j'ai étudié la question et que je suis également un électeur, je suis ouvert à l'idée d'un changement. Je vois bien les lacunes du système. Ce n'est pas que je veuille faire des manières, mais je crois vraiment que vous devez viser un processus qui sera suffisamment inclusif, suffisamment exhaustif et suffisamment rapide. Donnez-vous un peu plus de temps, si c'est possible, pour faire le point comme il se doit sur vos propres travaux. Je suis convaincu que la date du 1er décembre est trop hâtive. Je sais que vous travaillez dur, plus dur probablement que ce que les Canadiens en pensent, mais c'est un travail que vous devez faire.
    Au bout du compte, je tiens à souligner qu'il s'agit quand même d'un système canadien, et nous voulons savoir que ce travail a été fait. Nous voulons savoir que nous aurons l'occasion de formuler nos commentaires. Nous voulons également savoir quelles seront les conséquences de ce changement. Nous savons quelles seront les conséquences du statu quo. Rien ne changera. La vie continuera. Nous nous en sommes tirés. Mais en ce qui concerne les conséquences d'un changement, si les gens ne sont pas éclairés, si on ne les a pas fait participer au processus d'une façon ou d'une autre, vous devrez alors, je crois, fournir de longues explications. Je crois que cela serait injuste pour notre démocratie, pour notre société.
    J'insisterais sur le fait que vous devez vous donner plus de temps. Je sais que, en conséquence, ce ne sera pas fait à temps pour les prochaines élections, mais, au Nouveau-Brunswick, nous nous étions accordé deux élections. Les preuves sont là: tous ceux qui ont fait des changements profonds se sont donné ou bien assez de temps, ou bien une soupape de sécurité, si vous me passez l'expression, un référendum, une consultation populaire. Je suis convaincu que nous allons accepter les résultats de ce référendum, même s'il se tient dans les courts délais actuellement prévus.
    Donc, dans le souci de proposer quelque chose, à titre peut-être de solution de compromis, je proposerais que l'on tienne un référendum pour valider le système, une fois que nous aurons eu l'occasion d'en faire l'essai. Les Canadiens voudront savoir qu'ils ont la possibilité de refuser ce changement, qu'ils ne seront pas forcés de l'accepter. Je sais que cette distinction vous donne du fil à retordre. Je ne crois pas que vous ayez encore trouvé une solution satisfaisante, mais il vous reste encore un peu de temps.

  (1050)  

    Monsieur Richards, il vous reste environ 10 secondes.
    Je crois alors que je continuerai à mon prochain tour.
    Je suis désolé, monsieur Richards.

[Français]

     Monsieur DeCourcey, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les trois témoins de leurs commentaires et de la sagesse dont ils font preuve.

[Traduction]

    Monsieur McLaughlin, j'apprécie la simplicité de votre réponse à la question de Mme May. Je crois que cela nous rappelle que nous ne pouvons pas prévoir les résultats d'une élection. Je sais que les élections de 2006, au Nouveau-Brunswick, étaient anticipées dans l'espoir, j'imagine, de donner l'avantage au parti, mais que le résultat a été tout l'opposé.
    Je profite de l'occasion pour clarifier les choses à l'intention de mon ami M. Reid, qui apporte beaucoup à la conversation, lui aussi, à mon avis. En effet, Harold Jansen était d'accord pour dire que le vote préférentiel aurait peut-être toujours donné les mêmes résultats, mais, quand il s'est présenté devant notre Comité, il s'est contredit, pour l'essentiel, disant qu'au contraire, il était impossible pour nous de prédire les résultats d'une élection sans savoir ce qu'un autre système pourrait nous offrir et sans savoir avec quels autres enjeux il faudra composer à ce moment-là.
    J'ai quand même une question au sujet du processus; ce sera ma seconde question, mais j'aimerais discuter avec vous, monsieur Scott, d'un commentaire que vous avez formulé sur l'importance des promesses électorales. Je dirais, mais cela peut être contesté, que c'est là un des avantages du système actuel, les partis proposent des programmes, des visions quant à la façon dont ils veulent diriger le pays. Les électeurs votent en espérant que ces engagements seront tenus. Nous avons reçu des témoins selon lesquels les différents systèmes de représentation proportionnelle brouillaient quelque peu les visions présentées pendant la campagne ou intégrées aux programmes. J'aimerais que vous commentiez cela, que vous nous expliquiez quels avantages et inconvénients pourraient être en cause dans ce cas-ci et comment nous devrions présenter la chose aux Canadiens.
    Ma deuxième question a trait à cette notion d'équité et d'égalité des votes. Je suis d'accord sur le fait que certains aspects de la représentation proportionnelle assurent que le dépouillement des votes se fait de manière équitable. Avez-vous eu connaissance du témoignage de M. Maskin, qui nous a expliqué la notion de la règle de la majorité, selon laquelle chaque candidat gagnant est effectivement préféré à tous les autres candidats, dans une circonscription donnée? Pensez-vous qu'il serait correct, quand nous nous adressons aux Canadiens, de leur présenter à la fois le système mixte proportionnel comme moyen d'assurer l'équité des votes ainsi que ce système-là?
    Oui, cette dernière question est intéressante. Je ne suis pas certain de pouvoir donner une bonne réponse.
    Quant à la première question, je crois que vous avez mis le doigt sur un enjeu structurel très important, mais nous ne devons pas entretenir les mythes. Oui, donc, il y a des programmes et il y a des promesses, et les gens votent en espérant voir ce que leur parti, de manière générale — ceux qui savent ce que le programme contient — aimerait réaliser. Les gens savent pourtant que le système actuel peut donner lieu à des gouvernements minoritaires, et nous venons tout juste d'expliquer que cela n'est probablement pas une bonne manière de savoir quelles promesses électorales seront honorées, lesquelles seront laissées de côté et quels types de compromis seront faits.
    Quand on a un système qui permet aux gens de savoir à l'avance quelles parties du programme électoral vont nécessairement devoir faire l'objet de compromis, dans un environnement collégial, on serait peut-être avisé de commencer à inciter les partis à exposer un peu plus clairement leurs principales priorités, de façon, en somme, que les gens sachent ce qui pourrait se passer si un parti ou un autre commençait à parler de gouvernement de coalition. Je crois qu'il y a un problème lorsque les gens ne savent pas exactement à quoi s'attendre lorsque deux partis se mettent à parler ensemble, mais qu'ils n'ont pas déjà annoncé qu'ils formeraient une coalition. Dans la plupart des systèmes de représentation proportionnelle, on sait à l'avance quelles coalitions sont formées — pas toujours —, et cela peut avoir une incidence sur la façon dont les programmes sont présentés.
    J'ai écrit quelque chose à ce sujet, récemment. Je crois que c'est un aspect important et, de manière générale, nous devrions porter davantage attention à la facilité avec laquelle nous faisons des promesses ainsi qu'au nombre de promesses que nous faisons pendant une campagne électorale. Je pense en fait que notre processus électoral actuel est faussé. Les programmes sont bien trop ambitieux et irréalistes.
    Quant à votre seconde question, si les deux systèmes peuvent bien se conjuguer, qu'ils assurent la proportionnalité et que le modèle majoritaire dont il a été question possède ses propres caractéristiques, je ne l'éliminerais jamais.

  (1055)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur McLaughlin, la question que je veux vous poser, et nous pourrons peut-être explorer davantage le sujet pendant la seconde série de questions, concerne le processus de nomination des candidats de la liste qui a été proposé avec votre modèle, au Nouveau-Brunswick. De la façon dont je vois les choses, vous essayez de trouver un équilibre entre deux sources de tension qui s'opposent, à savoir permettre au parti de présenter des candidats diversifiés et, en même temps, rendre le processus de sélection de ces candidats aussi transparent et ouvert que possible pour les électeurs. Pourriez-vous parler du raisonnement qui sous-tend l'élaboration de cette recommandation touchant le scrutin proportionnel plurinominal ou des débats qui ont lieu à ce moment?

[Français]

     Je m'excuse, mais nous devrons revenir plus tard à cette question.
    Monsieur Boulerice, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les trois témoins de leur présence parmi nous ce matin dans le cadre de cette étude passionnante. Je remercie particulièrement M. Scott qui est de retour parmi nous. Je dois avouer que j'aurais beaucoup aimé qu'il soit à ma place.
    Monsieur Fox, vous avez dit précédemment quelque chose d'intéressant. Vous avez mentionné qu'il fallait que les citoyens comprennent le problème avant d'avoir une discussion pour déterminer quelles solutions y apporter. Effectivement, c'est très logique. Vous avez en bonne partie raison parce que c'est vrai qu'il est rare que les gens se lèvent le matin en se disant: « Le scrutin uninominal à un tour crée des distorsions. Le vote transférable unique pourrait être la solution, mais la géographie canadienne causerait des difficultés entre les zones rurales et urbaines. » Cela n'arrive pas souvent que les gens tiennent de tels propos.
    Toutefois, les gens ont l'impression que leur vote est gaspillé. Ils ne font pas toujours un calcul arithmétique, mais il y a neuf  millions de votes exprimés aux dernières élections qui ne sont pas reflétés à l'heure actuelle au Parlement. Sur l'île de Vancouver, 21 % des gens ont voté pour le Parti libéral et 21 % des gens ont voté pour le Parti conservateur, mais ils n'ont élu aucun député. Dans les Maritimes, il y a des néo-démocrates et des conservateurs qui ont voté en faveur de leur parti, mais ils n'ont élu aucun député. Et je ne parlerai pas de la situation à Toronto.
    Sur le terrain, les gens nous demandent ce qui suit: « Pourquoi irais-je voter si cela ne change rien? Mon vote ne change rien. »
     En 2008, quand je me suis présenté pour la première fois et que je n'ai pas été élu, les gens me disaient ceci: « Pourquoi voterais-je pour toi, Alexandre? Tu ne vas pas gagner. » Les gens ont l'impression qu'il n'y a pas de moyens permettant à leur vote de se rendre au Parlement.
    Monsieur Fox, selon vous, comment devrions-nous aborder cette question?
     Je suis d'accord avec vous.
    La personne que vous décrivez n'existe probablement pas, et c'est peut-être une bonne chose.
    Le fait que le vote de certaines personnes ne compte pas ou qu'il ne se reflète pas dans les résultats signifie pour certaines d'entre elles que, dans leur région, la couleur politique qu'elles appuient est mal représentée et ne se rend pas au Parlement. D'autres ont ce sentiment par rapport à leur groupe démographique, par exemple pour les jeunes ou les personnes âgées. Pour d'autres encore, il s'agit du genre ou de minorités de toutes sortes, qu'elles soient  linguistiques, ethniques ou autres.
     C'est pourquoi il est utile de préciser d'abord ce que l'on entend par un vote qui ne se rend pas. En effet, nous avons tous une version un peu différente à cet égard. La source de la frustration peut varier un peu à ce sujet. Selon cette source, la personne va préférer un mode de scrutin différent de celui des autres. Pour cette raison, je crois que le fait d'aborder en premier lieu cet élément de base avant d'étourdir les gens en leur présentant toutes sortes de modes de scrutin et de mécanismes n'est pas du temps perdu.

  (1100)  

    Merci.
    Monsieur McLaughlin, au sujet de groupes distincts ou de minorités, vous avez, au cours de votre intervention, tenu quelques propos qui m'ont intrigué. J'aimerais que vous me donniez plus de détails à ce sujet.
     Vous avez dit qu'un mode de scrutin proportionnel mixte pourrait être intéressant ou avantageux pour les francophones du Nouveau-Brunswick. Que vouliez-vous dire à ce sujet?

[Traduction]

    Ce que nous avons voulu dire par là, dans le rapport, c'est que la façon dont les limites des régions seraient dessinées, dans un système mixte proportionnel, permettait très facilement de protéger des communautés d'intérêt, par exemple lorsque des communautés minoritaires importantes étaient regroupées. Il serait en réalité possible de redécouper le territoire de façon à préserver tous les centres où les électeurs francophones sont regroupés, de façon que, même si l'on changeait le système, on ne provoquerait pas la dilution des députés qui se présentent comme des francophones, à l'assemblée. C'était évidemment une préoccupation, au Nouveau-Brunswick. Au sein de la commission, il y avait autant de membres francophones que de membres anglophones, ce qui nous a permis d'y arriver. Selon notre expérience, un changement du système électoral ne devrait pas constituer un obstacle. Vous pourriez trouver une façon de le contourner. Je voulais tout simplement porter cette question à votre attention, car c'est à mon avis un enjeu important.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Dans le cadre de nos travaux, nous avons entendu M. Jean-Pierre Charbonneau. À une certaine époque, il a participé à un projet de réforme du mode de scrutin au Québec. Dans ce contexte, les représentants de régions du Québec avaient exprimé la crainte d'être moins représentés  ou moins efficacement représentés au sein du gouvernement. Or M. Charbonneau a dit qu'un système proportionnel mixte pourrait agir dans le sens contraire s'il y avait un regroupement de députés régionaux.
    Monsieur Scott, vous en avez parlé plus tôt. M. Charbonneau disait que cela forcerait les députés régionaux, qu'ils soient du gouvernement ou de l'opposition, à travailler ensemble pour défendre leur région. Que pensez-vous de cette idée présentée par M. Charbonneau?
    Monsieur Scott, il va falloir que vous répondiez assez brièvement à la question.
    Je pourrais aussi y revenir plus tard, monsieur le président.

[Traduction]

    Encore une fois, je crois que la culture politique aura une grande importance. La transition prendra du temps, mais oui, le concept de députés régionaux représentant différents partis qui travaillent en collaboration fonctionne, en Allemagne, par exemple, même s'ils sont moins axés sur le service aux électeurs que nous ne le sommes, ce qui fait que le système n'est pas évalué de la même façon. Rien ne nous empêche d'adopter des façons de faire très différentes, dans notre travail de parlementaires.
    Merci.
    Monsieur Rayes, allez-y.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais d'abord saluer les trois témoins et les remercier d'être parmi nous aujourd'hui.
     Comme l'a dit plus tôt mon collègue, tous ceux qui voudraient changer de mode de scrutin pour adopter un système proportionnel, qu'il soit mixte ou autre, font toujours valoir que les gens leur disent régulièrement que leur vote ne compte pas.
    Pourtant, hier, le représentant de l'Institut du Nouveau Monde nous a mentionné, en se fondant sur un sondage, les raisons réelles que les gens invoquaient pour ne pas aller voter. Ces motifs invoqués par les gens interrogés sont notamment qu'ils sont trop occupés, qu'ils font face à un problème lié à leur inscription, qu'ils éprouvent du cynisme ou un manque d'intérêt face à la chose politique, qu'aucun des enjeux électoraux des candidats ou des partis ne les intéresse, qu'ils éprouvent un manque de confiance envers ces derniers, qu'ils se trouvent à l'extérieur de la circonscription, qu'ils souffrent de problèmes de santé et ainsi de suite.
    J'ai l'impression que le commentaire des gens voulant que leur vote ne compte pas est davantage lié au fait que leur parti politique n'a pas remporté les élections précédentes. Une certaine frustration peut en découler d'une élection à l'autre. Est-ce que je me trompe en disant cela?
    Quel que soit le mode de scrutin utilisé, le pourcentage de gens qui vont voter est à la baisse partout dans le monde. C'est pourquoi un changement au chapitre du mode de scrutin ne va pas faire en sorte que, de façon directe, les gens vont voter davantage ou devenir plus intéressés aux questions électorales. Je crois que cela nécessite davantage un changement de culture et d'éducation.
    Vous l'avez très bien dit. Les trois jeunes personnes qui sont venues nous parler ont réellement mis l'accent sur l'importance de l'éducation citoyenne en matière politique. Est-ce que je me trompe en disant cela?
     J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
     Vous ne vous trompez pas en disant qu'il est important de comprendre toutes les raisons qui amènent quelqu'un à ne pas aller voter. Il est vrai que certaines de ces raisons n'ont pas grand-chose à voir avec le mode de scrutin. Cela dit, on peut aussi souligner que, à cet égard, il y a quand même bon nombre de motivations qui sont liées au mode de scrutin.
    Vous soulevez un point que je considère important, à savoir qu'il ne faut pas penser que le fait de changer le mode de scrutin répondra à tous les besoins ou réglera tous les malaises qui pourraient affliger le système démocratique. Il y a d'autres choses qu'on peut faire pour augmenter la participation citoyenne. Je suis d'accord avec vous à ce sujet.

  (1105)  

    Un autre témoin voudrait-il ajouter quelque chose à cet égard?

[Traduction]

    Les données probantes montrent que les systèmes à représentation proportionnelle ont généralement tendance à faire augmenter le taux de participation des électeurs, et c'est pourquoi je crois que les gens ont probablement l'impression que leur vote comptera. Mais cette explication n'est probablement pas suffisante en soi. D'autres facteurs entrent en jeu. Nous savons bien que le taux de participation augmente lorsqu'il s'agit d'une élection axée sur le changement, par exemple, dans notre pays. Pourquoi? Parce que les gens estiment que leur vote comptera. Je croirais qu'il y a d'autres enjeux. Les gens se déplacent quand même pour voter, même dans un système inadéquat quant à l'égalité des votes. Ils se déplacent pour une multitude de facteurs, mais nous parlons en réalité ici de la motivation des électeurs, non pas des obstacles. Vous devrez vous en occuper, des obstacles auxquels font face les électeurs, et de toutes ces questions administratives. Vous devez quand même vous arranger pour que cela fonctionne. Mais les gens viendront voter s'ils croient que c'est important et s'ils croient que leur vote compte, tous enjeux confondus.
    Le système électoral aura clairement une incidence sur tout cela, puisqu'on sait que les circonscriptions qui sont toujours remportées par un conservateur, un libéral, un néo-démocrate seront toujours des cas particuliers. Les partis n'en font pas grand cas pendant la campagne. Ils ne font pas l'effort de convaincre les électeurs d'aller voter. Ce sont plutôt les circonscriptions où la concurrence est forte, les circonscriptions qui changent de main, qui intéressent les partis, et c'est dans ces circonscriptions que les électeurs sont renseignés et informés, c'est là qu'on envoie le message d'aller voter, et c'est parfois ce qui explique que le taux de participation est plus élevé.
    J'ajouterais tout simplement que je crois qu'il est important de comprendre que le changement du mode de scrutin et l'augmentation de 5 à 8 % du taux de participation qu'il entraîne, selon la plupart des études, ne tiennent pas uniquement au fait que les gens savent que je pourrai remporter plus facilement mes élections. C'est aussi lié à la mise en place d'un meilleur processus politique. Je crois que, pour sensibiliser les Canadiens, il faudra aussi parler des liens entre le système électoral et la forme que pourraient prendre le Parlement et la Chambre des communes, c'est-à-dire les différences que l'on peut raisonnablement s'attendre à voir. Je suis député depuis trois ans et demi, et selon mon expérience à ce titre, je crois que nous sous-estimons à quel point les gens se préoccupent de la façon dont le Parlement fonctionne et dont les parlementaires agissent. Cela ne fait peut-être pas partie de leurs priorités, mais ils s'en préoccupent.
    Merci.
    Madame Sahota.
    Je pense à des millions de choses en même temps, et je ne sais pas quelle question je vais poser.
    Monsieur Fox, vous aviez abordé la question de la prochaine étape de notre processus. Nous devrions vraiment être prêts lorsque nous nous présenterons devant les gens; nous devrions n'avoir qu'une seule chose en tête. Notre Comité a l'impression que c'est urgent. Le gouvernement a l'impression que c'est urgent, car il s'est engagé à examiner la question et à apporter un changement. Comment allons-nous convaincre les gens que c'est urgent? Cela fait des années que nous parlons de cette question, et nous savons qu'il y a là des enjeux importants pour les gens, mais comment pouvons-nous les amener à comprendre? À votre avis, quelle est la principale préoccupation dont nous devrions discuter avec les gens? Je sais que vous avez parlé de la question de savoir si nous avions mené une analyse pour savoir quelle était la principale préoccupation. Je crois que nos préoccupations sont nombreuses, mais nous ne savons pas par quels moyens amener les gens à se préoccuper de cet enjeu-ci.
    Je ne crois pas que c'est à moi qu'il incombe de proposer une façon d'exposer le problème. En ce qui a trait au processus, toutefois, si nous savions par quels moyens mobiliser les gens de la façon dont nous aimerions tous qu'ils soient mobilisés sur toutes les questions en tout temps, la vie politique serait beaucoup plus facile au Canada. C'est pour nous tous un problème qui se présente à bien des égards.
    Mais, pendant que vous formuliez votre question, deux choses me sont venues à l'esprit, et je crois qu'elles sont importantes. Première chose, et je crois que le Comité a pris un bon départ à ce chapitre, c'est qu'il faut que tous les débats se fassent publiquement. Je crois que, si vous êtes sincèrement ouverts, mais qu'en outre, on considère que vous êtes ouverts et que vous faites tout cela publiquement, cela vous aidera. Je crois qu'un processus qui ne cache rien du fait que vous n'avez aucune opinion préconçue quant à son issue encouragera également les gens à vous présenter des opinions différentes. Ce n'est pas une réponse parfaite, mais c'est la seule que je puissse vous donner pour l'instant.

  (1110)  

    J'ai écrit un article pour une publication de Graham où je formulais quelques suggestions quant à la façon dont vous pourriez consulter davantage et améliorer le processus.
    En un mot, je présentais des suggestions qui avaient déjà été mises en pratique dans le cadre du processus constitutionnel, sous Joe Clark, par exemple une conférence plus importante, des conférences de citoyens, voire une assemblée citoyenne; une recherche universitaire indépendante à laquelle le public pourrait avoir accès et que vous pourriez présenter au public pour lui montrer que vous examinez les compromis et les enjeux; puis une série d'outils en ligne, que vous avez déjà commencé à utiliser. Il y a un certain nombre de choses que vous pouvez faire pour mobiliser les gens, au-delà du traditionnel processus au sein d'un comité.
    Je vous encouragerais, si vous décidez de vous engager sur cette voie, de le faire le plus rapidement possible étant donné les contraintes de temps, évidemment, que vous devez respecter, que vous visiez le 1er décembre ou que vous vous accordiez un peu plus de temps. Cela ne représente pas beaucoup de temps.
    Ensuite, pour que cela fonctionne réellement... À quel moment les Canadiens nous accordent-ils leur attention? Ils le font lorsque cela est important ou lorsqu'ils pensent qu'une décision va bientôt être prise. Pour le moment, vous êtes plutôt en mode d'apprentissage, et vous avez un apprentissage important à faire. À un moment donné, vous devrez passer en mode délibérations, vous devrez discuter d'options ou de choix spécifiques. À ce moment-là, je vous encouragerais vraiment à présenter au public un bref document ou à lui donner quelques détails, pour dire aux citoyens: « Voici ce que nous pensons. Voilà la direction que nous avons prise. C'est vraiment important, et nous avons maintenant besoin de savoir ce que vous en pensez. » Vous devrez alors trouver, encore une fois, le moyen de recueillir leurs commentaires sur ces aspects spécifiques.
    Tant que vous n'aurez pas soumis aux Canadiens quelque chose de plus explicite, de plus précis et de plus concret, je crois que cela restera une notion intéressante, mais les gens ont autre chose à faire. Cela nous a donné du fil à retordre, au Nouveau-Brunswick, même si le processus ne visait que cette seule chose, et nous étions pris avec de nombreux dispositifs. C'est encore assez difficile. Je vous le recommande spontanément, mais n'hésitez pas à lire cet article aussi, si vous en avez envie.
    Je voudrais tout simplement dire qu'il faudrait inviter les Tragically Hip à accompagner le Comité à une série d'assemblées générales; on pourrait ensuite appeler Radio-Canada, et les gens seraient immédiatement mobilisés. Je ne plaisante qu'à moitié. Radio-Canada a commencé à s'intéresser aux assemblées générales à l'extérieur des périodes électorales, par exemple en accompagnant le premier ministre et un ou deux autres ministres. Il est tout à fait légitime de demander à un diffuseur public s'il ne serait pas intéressé à participer à un processus parlementaire absolument impartial qui présente nos travaux sous un autre jour, c'est-à-dire les assemblées générales.
    C'est une bonne idée. Je vous en remercie.

[Français]

     Nous allons maintenant entamer la deuxième ronde de questions.
     Monsieur  Aldag, vous avez la parole.

[Traduction]

    Monsieur McLaughlin, dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit, à propos du modèle qui a été élaboré, que le système de représentation proportionnelle mixte ne pouvait pas comprendre à la fois des députés de liste et des députés de circonscription. J'aimerais savoir pourquoi. Des témoins d'autres pays ont dit que cela se faisait. Je trouve intéressant que vous ayez exclu cette possibilité et j'aimerais comprendre le raisonnement sous-jacent.
    Permettez-moi de profiter de l'occasion pour répondre en même temps à la question de M. DeCourcey à propos de la liste fermée. Vos questions se recoupent, en quelque sorte.
    D'accord.
    Premièrement, nous avons choisi la liste fermée parce que nous avions l'impression que les partis consentiraient un effort plus important afin de présenter des candidates si la liste était fermée. La Commission voulait trouver des façons d'augmenter la représentation des femmes au Parlement.
    Deuxièmement, nous voulions éviter qu'une liste ouverte provoque une réelle lutte au sein des partis. Les candidats risqueraient de se faire concurrence en essayant de remonter sur la liste et d'obtenir plus de votes. Cela déboucherait sur une situation où les partis se feraient compétition à outrance, ce qui dévaloriserait légèrement le processus politique.
    Troisièmement, on aurait l'impression — et il s'agit peut-être d'une particularité du Nouveau-Brunswick — que les grandes agglomérations risqueraient d'étouffer les petites collectivités. Un député de liste lié à une ville ou à une municipalité plus importante obtiendrait plus de votes que les autres députés. Pour nous, ce n'était pas équitable. Voilà comment nous en sommes arrivés là.
    Je le redis, avec ce genre de processus, il est logique de décider de ne pas permettre aux candidats de figurer en même temps sur la liste et de se présenter comme député de circonscription. Il y avait deux points qui nous préoccupaient à ce chapitre.
    D'abord, il y avait la possibilité que le système soit manipulé, c'est-à-dire que les députés de liste soient vus différemment, et cela vaut aussi pour les députés qui se sont inscrits sur la liste. Une autre préoccupation était, en partie, le fait que cela pourrait créer deux paliers de députés. Ce n'est pas un fait immuable, mais il demeure que la façon dont vous obtenez votre poste, la façon dont vous obtenez votre siège au Parlement ou à la Chambre des communes, a une incidence sur la manière dont vos collègues vous traitent et réagissent à vos interventions. Cela influence également le comportement des citoyens ou de vos électeurs à votre égard, et c'est peut-être le point le plus important. Afin d'éviter cette perception tordue du système, on a cru bon de mettre au point un système qui ne comprend qu'un seul choix: soit vous l'emportez, soit vous êtes défait, point à la ligne.
    Vous devez garder à l'esprit que les systèmes — surtout celui de la Nouvelle-Zélande — sont relativement nouveaux. Certains témoins de la Nouvelle-Zélande se sont exprimés à propos de la perception selon laquelle il y a des députés principaux et des députés de seconde zone. C'est ce que nous voulions corriger.
    Vous allez pouvoir régler les autres détails au cours de vos travaux quotidiens, mais, de notre côté, ces préoccupations ont dirigé notre processus.

  (1115)  

    Monsieur Scott.
    Rapidement, je dois ajouter qu'il faut prendre en considération la dimension politico-culturelle. Au Pays de Galles, il y avait ce genre de ressentiment, et on est même allé jusqu'à essayer d'y imposer une règle assimilable à la proposition de la Colombie-Britannique, mais Westminster l'a abrogé. En Allemagne, tous les députés sont pratiquement forcés de se présenter dans une circonscription ainsi que sur la liste. Il semble qu'un fort pourcentage des députés allemands ont été élus grâce à l'une ou l'autre des façons au cours de leur carrière. L'approche allemande fait comprendre au public qu'il n'y a pas vraiment de différence entre les deux types de députés; elle offre également une plus grande continuité.
    Certaines personnes affirmeraient que cela n'est pas avantageux dans une culture où « on ne veut pas des bons à rien ». Je ne suis évidemment pas du bon côté de la table pour dire ceci, mais je crois qu'il y a probablement un trop grand roulement de députés au Canada. Nous avons probablement un roulement de députés supérieur à tous les autres gouvernements semblables. Il serait potentiellement avantageux pour nous de renforcer la continuité, surtout dans le contexte consensuel et collégial de l'Assemblée législative. On perd effectivement quelque chose lorsqu'il y a constamment un grand nombre de nouvelles personnes. La continuité est plus forte en Allemagne, et je crois que cela est dû au fait que les députés se présentent à la fois sur la liste et dans les circonscriptions.
    Merci.
    Monsieur Reid.
    À ce sujet, je suis d'accord avec le commentaire de Craig à propos du fait qu'il y a un roulement de députés élevé ici. C'est saisissant. Je suis ici depuis 16 ans, et je compte parmi les 15 plus anciens sur la Colline du Parlement. Si j'étais au Sénat américain, je pourrais à peine être...
    Élu pour un deuxième mandat.
    ... nommé vice-président d'un sous-comité qui n'intéresse personne. Je serais aussi entouré d'octogénaires qui sont là depuis l'ère du président Truman, par exemple, ou peut-être celle de McKinley. C'est un vrai problème, c'est évident.
    Je veux revenir à un thème que nous venons d'effleurer, mais que nous n'avons peut-être pas abordé directement. Monsieur McLaughlin, à la toute fin de votre exposé, vous avez mentionné que la façon dont vous avez élaboré votre système de représentation proportionnelle mixte pouvait soulever quelques problèmes. Je crois vous avoir entendu dire — mais je n'en suis pas sûr, et c'est pourquoi j'aimerais le confirmer — que le Comité pourrait, par exemple, simplement recommander d'adopter un système de représentation proportionnelle mixte sans fournir de détails précis et laisser le reste entre les mains du gouvernement. Après tout, c'est le Cabinet qui élaborera et mettra en oeuvre le système, lequel pourrait finir par être différent de ce que nous avons imaginé, du moins sur certains points potentiellement importants d'un point de vue partisan et sur d'autres points qui seront peut-être différents de ce que le Comité avait cru suggérer au gouvernement. J'ai peut-être mal compris, alors j'aimerais entendre ce que vous avez à dire à ce sujet.
    Votre interprétation me semble la bonne. Cela soulève une préoccupation. On nous a demandé de recommander un système électoral qui répondait à certains principes, et nous étions convaincus que la Commission avait pour mandat de décrire exhaustivement ce système potentiel ainsi que tous les détails connexes; c'est notre devoir de penser à tous les détails importants, vu les conséquences imprévues que pourrait avoir le système sur les divers acteurs politiques. Toutes les conséquences pouvant être des préoccupations légitimes, il fallait que nous les examinions en profondeur, et ce, au meilleur de nos capacités. En ce qui concerne les recommandations que nous avons présentées, nous les avons rédigées, lorsque c'était possible, sous forme de formules juridiques précises afin d'encourager le gouvernement et les partis d'opposition à les suivre. Nous ne voulions rien laisser au hasard; il fallait éviter de se retrouver avec une situation embrouillée.
    Alors oui, pour reprendre votre exemple, monsieur Reid, si vous proposiez un système de représentation proportionnelle mixte, même si vous fournissez des explications, il est possible que vous vous retrouviez avec un système qui diffère sur les points importants de ce que vous aviez envisagé ou souhaité si vous ne fournissez aucun détail précis.
    Vous avez des travaux à faire, alors faites-les. Faites un effort supplémentaire afin de préciser les détails et ainsi faire avancer les choses.

  (1120)  

    C'est peut-être injuste de vous demander de continuer sur le même sujet, mais je vais le faire de toute façon. Vous pouvez toujours refuser et dire que ce n'est pas légitime si le coeur vous en dit. Finalement, nous recommanderiez-vous — ou diriez-vous qu'il s'agit d'une bonne recommandation — d'axer nos efforts sur la sélection, si c'est possible ou si nous en arrivons à un consensus acceptable, d'un modèle qui existe déjà, puis d'essayer de fournir les détails manquants dans notre rapport?
    Oui, je vous encouragerais dans cette démarche, et ce, pour plusieurs raisons. Entre autres, je crois qu'il s'agit de la seule façon de faire progresser le dossier qui nous occupe de façon à, peut-être, respecter les délais qui nous sont imposés. Je vais essayer de faire preuve de respect à cet égard. Ensuite, je crois que cela démontrerait que le Parlement fait des efforts et que les travaux du Comité sont en cours. Je crois également que cela serait plus satisfaisant pour vous, en tant que groupe, si vous preniez ce genre d'engagement et ce genre de responsabilité. Alors, oui, pour un éventail de raisons, absolument.
    D'accord.
    Il y a une question que je dois poser, puisque le Comité n'a pas encore décidé qu'un des systèmes était préférable aux autres. Disons, aux fins de la discussion, que nous penchions en faveur du mode de scrutin à vote unique transférable. Vos recommandations resteraient-elles les mêmes, à savoir le faire que nous devons fournir des détails précis?
    Je le redis, cela vaut pour tous les systèmes. Donc, je crois que vous devriez décrire le système ainsi que son fonctionnement. Vous pourriez commencer avec les principes qu'il suppose, mais le public veut également savoir comment le tout fonctionne.
    Revenons-en aux résultats. D'une certaine façon, vous avez adopté une approche à long terme malgré le fait que vous disposez d'un délai très court. À long terme, vous voulez renforcer la légitimité des gouvernements et de notre système, etc. Cela découlera des résultats de vos travaux. Même si les gens seront peut-être réticents à l'égard du système au début, ils vont finir par s'y habituer et par le voir d'un bon oeil — voilà un bon changement qui ferait progresser le pays dans la bonne direction. Les détails et la légitimité des résultats sont des éléments vraiment importants.
    Honnêtement, vu le délai restreint dont vous disposez, comment allez-vous vous organiser en vue de la campagne électorale si vous décidez d'aller de l'avant et de donner des directives à Élections Canada ainsi qu'aux partis? Réfléchissez simplement aux questions qui sont constamment posées à Élections Canada à propos des règles de financement, etc. par votre directeur de campagne local, une personne qui serait censée savoir. Il s'agit de bénévoles, n'est-ce pas? Votre directeur financier est un bénévole. Et maintenant, avec un nouveau système, où se trouve la limite? Avant, on votait à l'église du coin. Une minute, c'était au tour de cette ville-là, puis après, c'était au tour de l'autre.
    Toutes ces choses ont une importance. Vous devez aider les Canadiens à comprendre tout cela. Voilà ce que je recommande fortement.

[Français]

     Merci.
    Monsieur Cullen, vous avez la parole.

[Traduction]

    C'est intéressant. Je suis ici depuis un certain nombre d'années. J'aime le fait que nous ayons des délais. J'ai vu le Parlement ressasser sans fin des idées. Tout le monde s'entendait sur l'importance d'une question à l'échelle du Canada, sur les raisons connexes et sur le fait que nous devions déployer des efforts. Dès que j'entends qu'on « devrait » faire quelque chose, je perds confiance: nous « allons » faire quelque chose.
    Je prends vos commentaires en considération, David: nous devons resserrer nos efforts qui, jusqu'ici, étaient plutôt étirés. J'ai un style d'apprentissage visuel, et quand j'ai suivi le processus en Colombie-Britannique à titre d'observateur, j'avais besoin de voir des cartes. Cela s'explique peut-être par la façon dont je fais de la politique, mais j'ai besoin de savoir à quoi le résultat va ressembler. Si je ne vois rien, tout reste théorique, et cela peut être déroutant.
    Monsieur Fox, vous hochez la tête. Le Comité va-t-il en arriver au point où nous pourrons, disons un chiffre au hasard, proposer aux Canadiens trois choix que nous avons pris en considération? Nous leur montrerons quelle forme cela va probablement prendre au Nouveau-Brunswick, à Toronto, à Vancouver et dans les régions rurales du Canada. S'agit-il d'une étape importante dans nos travaux, vu 'engagement et la légitimité que nous cherchons à renforcer?
    Je crois que oui. Je crois que plus vous serez en mesure de fournir des détails concrets et pratiques concernant vos modèles, plus le public sera convaincu que vous avez bien fait votre travail et que vous en êtes arrivés à un consensus. Si on réfléchit à ce qui va arriver après le dépôt de votre rapport, il sera plus intéressant ou avantageux pour le gouvernement de se fier à votre leadership, en autant que vous vous soyez bien entendu sur un grand nombre de détails, puisque c'est ici que la conversation nationale a eu lieu.

  (1125)  

    Nous avons appris, par des fonctionnaires électoraux, que ceux-ci allaient former une commission électorale vers la fin des travaux du Comité ou, fait plus important, du Parlement. L'idée selon laquelle des travaux précipités pourraient mener à la panique et, si je puis m'exprimer ainsi, à une situation peu cohérente pendant la prochaine période électorale, peut être atténuée si Élections Canada sait au préalable vers quel modèle le Parlement s'oriente. Voilà les façons dont on a choisi de fonctionner.
    Êtes-vous d'accord, David?
    Absolument. Élections Canada est responsable d'administrer la tenue des élections et doit s'assurer de leur bon fonctionnement jusqu'au bout. Alors, oui, ses fonctionnaires vont devoir commencer à travailler.
    Pourrais-je seulement...
    Bien sûr.
    Je vais résumer mon propos en deux phrases. Premièrement, on en revient à la suggestion de CBC: à un moment ou à un autre, le Comité devra délibérer sur les possibilités de conception institutionnelle d'un système de représentation proportionnelle mixte — il y a 15 options de conception institutionnelle principale, dont sept peut-être sont vraiment importantes —, et vous devrez travailler sur ces différents modèles, peut-être d'une façon un peu théorique, parce que vous n'arrivez pas à choisir les meilleurs d'entre eux ou peut-être même aucun d'entre eux. Les délibérations devront être bien dirigées, peut-être même filmées ou alors être publiques. C'est quelque chose que vous devriez envisager. Cela faisait partie de mon programme d'enseignement, à la dernière session. Agissez, dans vos interactions, à la façon d'une mini-assemblée citoyenne.
    C’est ce que nous avions suggéré au gouvernement en février dernier. Ça devait être couplé avec un processus d’assemblées de citoyens, pour savoir ce que ce genre de système signifierait pour les gens concrètement. Qu’est-ce que ça veut dire pour moi, ici à Mississauga, etc.?
    On parle beaucoup de compromis ici. C’est exactement ce que ce sera. C’est toujours le cas quand on redessine les frontières à l’intérieur du pays, il y a toujours des compromis. L’un des compromis qui m’inquiètent est cette histoire de liste. Je dois vous dire que je ne suis pas très chaud concernant le système de liste fermée, ne serait-ce qu’en termes de légitimité aux yeux des électeurs. Qui est sur la liste? Comment sont-ils arrivés là? Parce qu’ils connaissaient le chef du parti? Parce qu’ils sont des collecteurs de fonds? Les électeurs doivent participer. On a vu certains modèles selon lesquels la liste est composée des candidats de deuxième rang de la région, et ce serait un moyen de légitimer leur place au lieu d’avoir des députés à deux vitesses. Donc les électeurs choisissent cette personne, et c’est elle qui va de l’avant, au lieu d’un député d’arrière-ban.
    Que pensez-vous de ce modèle comparativement aux autres du point de vue des compromis?
    Vous tapez dans le mille, et c’est une question qui nous a bien occupés. C’est l’une des dernières pièces du casse-tête sur lequel nous avons travaillé, et nous avons fini par faire un choix. Le rapport était unanime, je pense, mais, à cause de notre mandat très large, il y a un document complémentaire sur tous les aspects de la réforme démocratique au Nouveau-Brunswick, en vue de changements dans la démocratie des partis.
    Nous avons entre autres proposé des modifications législatives sur la façon dont les partis procèdent aux nominations. Certains ont peut-être jugé que c’était plus interventionniste, mais nous avons demandé des procédures de nomination ouvertes et d’autres choses pour éviter que les décisions viennent du haut. Ça ne veut pas dire que les partis auraient apprécié, mais c’était un moyen pour nous d’essayer de répondre aux questions que vous soulevez et d’essayer de rendre les choses plus transparentes et ouvertes.

[Français]

     Merci.
    Monsieur Thériault, vous avez maintenant la parole.
     Merci, monsieur le président.
    Je vais essayer d'aborder trois sujets.
    Tout d'abord, monsieur Fox, si j'ai bien compris vos propos, vous préférez qu'on puisse bien faire les choses plutôt que d'agir avec précipitation. J'ai compris que M. McLaughlin pensait la même chose à ce sujet.
    Il me semble qu'à l'égard de ce dossier, le pire des scénarios serait que le pouvoir législatif — que nous représentons ici — termine ses travaux le 1er  décembre et qu'on laisse le pouvoir exécutif décider de la suite des choses. Je ne pense pas qu'on puisse avoir dans une période de trois semaines une idée juste de ce que les électeurs d'un océan à l'autre veulent avoir à cet égard.
    Cela dit, il serait pertinent que ce comité s'entende sur la recommandation voulant de continuer à laisser la suite des choses entre les mains du pouvoir législatif  et peut-être d'une assemblée constituante. Il doit y avoir une deuxième étape avant que l'exécutif ne se saisisse de cette question. En effet, celui-ci risquerait de considérer que le plus petit dénominateur commun est que tout le monde veut un changement et il pourrait alors décider de lui-même, du haut de sa majorité parlementaire, quel type de changement il voudrait. Dans un tel cas, ce serait l'échec total. Je vois que vous opinez du bonnet. Vous êtes donc d'accord avec moi.
    Parlons de la question de la parité.
    L'expérience québécoise nous amène à dire que certains mécanismes permettent davantage d'agir sur cette parité. Cependant, aucun système — et le nôtre non plus — ne permettrait que l'on agisse absolument sur cette parité.
    J'ai dû faire du recrutement et je me suis aperçu que le fait de permettre à une femme de se présenter dans un comté sûr n'est pas suffisant. Le problème à cet égard est ce que représente le fait de faire de la politique au niveau fédéral.
    Il serait pertinent qu'on commence à travailler sur la conciliation travail-famille dans le cadre du Parlement fédéral. Je peux vous dire que ce dernier souffre de la comparaison avec le Parlement québécois, où j'ai siégé. Si on ne fait pas cela, même s'il y a des listes, je ne pense pas qu'on pourrait faire ce type de recrutement et en arriver à cette parité. Dans certaines catégories d'âge, on passerait à côté de candidatures très intéressantes.
    Qu'en pensez-vous?

  (1130)  

    Je crois que M. Scott en a parlé plus tôt. Je pense en effet qu'il est très important de considérer non seulement la mécanique de la réforme, mais aussi les effets que cela aura sur le fonctionnement de la Chambre des communes. Comment en arriver à une conciliation travail-famille au fédéral quand on pense aux défis supplémentaires que représente la géographie, surtout si on compare cela aux assemblées législatives provinciales? C'est en effet un enjeu extrêmement important.
    Monsieur Scott, en ce qui a trait à la question du changement de culture, vous avez dit que la transition sera longue. Je suis d'accord avec vous. Ce n'est pas parce qu'on change la mécanique que, du jour au lendemain, les gens qui sont sur le terrain travailleront ensemble. D'ailleurs, si le modèle que présentait le Québec avait été adopté, cela aurait fait en sorte que, lorsque j'ai été élu en 2003, mon rival aurait été lui aussi élu, mais comme député appartenant à une liste. Il serait probablement devenu ministre des Transports.
    Imaginez quelle aurait été la collaboration réelle à cet égard. Je pense que cela aurait créé — puisque je l'ai vécu — de la partisanerie pendant quatre ans. D'un côté, il y aurait eu le représentant du gouvernement et, de l'autre, il y aurait eu le représentant de l'opposition.
    Bref, le changement de culture n'impliquerait-il pas que l'on se concentre davantage sur le pouvoir législatif, sur la façon de déterminer les représentants à la Chambre et sur la pluralité idéologique représentée afin que chaque vote compte? Si on veut aller plus loin dans le changement de culture, pourquoi n'élirait-t-on pas l'exécutif avec l'appui des deux tiers des représentants de la Chambre?
    C'est une importante question.
    C'est une suggestion importante. C'est peut-être une bonne idée, mais on n'aura pas le temps d'y répondre.
    Il reste 15 secondes et c'est une importante question.
    Madame May, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    En guise de préambule, quand vous parliez, Craig, du fait que c’est un problème depuis 2000, sachez que, quand on feuillette les documents parlementaires, on découvre que le premier comité parlementaire chargé d’examiner l’éventualité d’une réforme électorale remonte à 1921, au moment où l’Irlande venait d’adopter le vote unique transférable pour protéger les droits des minorités. C’est un sujet récurrent, et pour autant que je sache, toutes les commissions, fédérales et provinciales, toutes les assemblées de citoyens, toutes les commissions du droit et toutes les études sur la réforme électorale, depuis 1921 au Canada, en arrivent à la conclusion que nous devrions passer à un système de représentation proportionnelle. Il me semble que la situation est mûre et que nous sommes à un tournant décisif.
    Mais, dans les questions que je vous pose, je m’intéressais aux torts causés par le système majoritaire à un tour, parce que vous avez soulevé un problème qu’avait signalé le professeur Peter Russell. Quand on combine une démocratie parlementaire de style Westminster comme celle du Canada, où l’exécutif a encore plus de pouvoir que dans les autres démocraties de style Westminster du reste du monde et même qu’aux États-Unis, où l’exécutif a des comptes à rendre, il est assez important de s’assurer que la majorité des Canadiens appuient l’orientation générale d’un gouvernement majoritaire. Vous l’avez évoqué en passant dans vos remarques préliminaires. Je me demandais si vous voudriez bien aborder de nouveau la question du pouvoir de l’exécutif et des torts qui peuvent être causés quand il y a ce que le professeur Russell appelle une fausse majorité. Et ce n’est pas une formulation partisane. Je ne vois pas bien comment on pourrait appeler ça autrement.

  (1135)  

    En effet, on parle de fausse majorité quand un parti obtient plus de sièges que n’en justifie le vote populaire, et ça semble injuste. C’est une perspective axée sur les électeurs et c’est une bonne chose. Et c’est effectivement juste de dire que c’est un problème. Mais le fait est qu’on donne la majorité des sièges à un seul parti dans un système où il y a fusion entre l’exécutif et le législatif alors que le système de Westminster donne déjà beaucoup de pouvoir à l’exécutif. Dans notre, euh je ne dirais pas système politique, mais culture politique, il y a beaucoup plus d’unité, de discipline à l’intérieur des partis. Je pense que les pressions liées à la localisation qui s’exercent sur nos députés, à cause de la taille du pays et d’autres choses comme ça, ont également un effet sur la mesure dans laquelle les parlementaires peuvent être des législateurs, par opposition au statut de membres d’un parti, qui prennent des décisions après avoir pris conseil, etc. Dans notre type de culture, quand on a donné la majorité à un parti, on est plus ou moins à la merci des décisions du gouvernement parce qu’on est plus ou moins disposé à s’occuper du reste. Le reste n’est pas nécessairement l’opposition, mais les 60 % qui n’ont pas voté pour un parti qui détient maintenant 100 % du pouvoir.
    C’est un sujet sensible, parce que c’est une question crue. Notre gouvernement vient de changer, et je m’excuse auprès de mes amis des rangs conservateurs ici présents, mais Gérard Deltell a effectivement posé la question au professeur Russell « Quel tort le système majoritaire à un tour a-t-il jamais fait? » À ma grande surprise, le professeur a répondu: le changement climatique. On n’a rien fait pendant 10 ans, et 80 % des Canadiens, depuis le début des années 1990, ont toujours exprimé le désir, par leur vote, qu’on prenne des mesures concernant le changement climatique, et je sais que beaucoup de conservateurs le souhaitaient aussi. Malheureusement l’ex-premier ministre n’en faisait pas partie.
    Donc, pour moi, ce n’est pas simplement de tort théorique ou spéculatif qu’il s’agit. C’est très réel et ça a fait beaucoup de mal à notre réputation dans le monde, alors que c’est quelque chose que la plupart des Canadiens veulent. Alors pardonnez-moi de mentionner ça, mais je vais me tourner vers mon ami David McLaughlin, et je ne veux pas vous mettre sur la sellette, mais évidemment, vous êtes un conservateur. Vous l’avez clairement dit. Vous étiez chef de cabinet pour notre défunt ami, Jim Flaherty.
    Avez-vous des remarques au sujet du pouvoir exécutif dans une situation de fausse majorité? Vous en avez été victime en tant que président de la table ronde nationale sur le projet de loi général C-38, dont ne voulaient pas les Canadiens à mon avis.
    Avez-vous des réflexions à formuler concernant cet aspect du scrutin majoritaire à un tour?
    L’une des façons dont nous avons essayé d’aborder ce problème à la commission du Nouveau-Brunswick… là encore, nous avions un mandat très large… mais je voudrais attirer votre attention sur la partie du rapport où il est question du fonctionnement du système. Nous avons cherché le moyen d’améliorer le rôle des députés comme législateurs et de l’assemblée législative comme institution et de rééquilibrer les pouvoirs entre l’exécutif et le législatif. Nous avons proposé un certain nombre de mesures pour consolider les comités législatifs, améliorer le financement des députés, élargir le travail des comités et donner un rôle plus large au Parlement dans ce qui constitue généralement les activités gouvernementales.
    Ça nous a permis de faire ça indépendamment, si on veut, de la question du système électoral. Mais, en effet, il est clair qu’au Canada… et je suis d’accord avec Craig, du point de vue des enjeux de la culture politique, l’exécutif a énormément de pouvoir. J’ai travaillé au Cabinet du premier ministre. Certains jours étaient meilleurs que d’autres. Certains jours, on était content; d’autres non.
    Merci beaucoup.
    La parole est à vous, madame Romanado, je vous en prie.
    Je vais juste revenir sur quelque chose, et ensuite je poserai ma question. Je sais que des gens ont remis en cause l’échéancier. Je sais que, quand le directeur général des élections est venu ici, il a dit que c’était tout à fait possible. Nous espérons que ce comité remettra un rapport faisant consensus et que nous pourrons en appliquer les recommandations. Je tenais à rappeler ça.
    Une des choses que ce comité essaie de faire, et j’ai déjà employé cette expression tout à l’heure, c’est d’avoir une perspective axée sur les électeurs. Comme parlementaires, nous avons nos propres idées. Que veut-on dire par processus légitime? Que veut-on dire par processus simple? Parlons-nous selon notre propre perspective ou selon celle des électeurs? Je crois que nous devons faire attention quand nous communiquons avec les Canadiens. Nous avons passé la première étape de ce processus, qui nous a permis d’entendre des experts et tout ça, et maintenant nous allons sur la route.
    Compte tenu de votre expertise dans ce dossier, nous savons qu’il existe des solutions très accessibles au bobo de notre système, et ce n’est pas nécessairement un système électoral différent. Par exemple, on pourrait placer la date des élections un dimanche ou une journée où les gens ne travaillent pas, etc. Compte tenu d’une perspective axée sur les électeurs, que nous recommanderiez-vous de faire, quand nous serons sur le terrain auprès des Canadiens, pour nous assurer que le système ou les recommandations que nous proposerons traduisent effectivement ce qu’ils souhaitent?

  (1140)  

    Permettez que je réponde en premier. Mes collègues ajouteront leurs propres remarques.
    Contraignez-les à des compromis. Il le faut. Trouvez ce à quoi ils tiennent le plus. Proposez votre propre ensemble de principes, expliquez-les pour qu’ils puissent comparer avec d’autres. Je soupçonne que la représentation locale sera très près du sommet de la liste. Ils voudront savoir qui est leur député. Ils veulent savoir où vous vivez, parce que c’est cette imputabilité et cette possibilité de vous mettre dehors ensuite, c’est l’instrument démocratique brutal, et c’est correct.
    Je pense que ce serait le genre de choses qui passerait vite au premier plan, mais essayez de les y amener. Ensuite, si vous le pouvez, essayez de savoir ce qu’ils veulent vraiment du système électoral dans ce sens, et permettez que je plagie ce qu’a dit Elizabeth May au sujet du pouvoir central, du pouvoir de l’exécutif. Est-ce qu’ils pensent que ça réglera ce problème comparativement à quelque chose d’autre?
    Il est possible que vous puissiez dissiper des mythes et faciliter les améliorations. Ne laissez pas les mythes se répandre, par exemple l’idée que, si on change le système électoral, ça va régler A, B, C ou D. Aidez-les à comprendre que ce que sont ces choix absolus et que c’est une amélioration, mais pas une panacée, si vous voulez.
    Dans l’immédiat, c’est le genre de choses auxquelles on peut penser.
    Avant que mes deux collègues prennent la parole, je voudrais juste en savoir un peu plus à ce sujet. Vous avez dit que, si ce qui leur tient le plus à cœur c’est de connaître leur député et de savoir où il vit — et croyez-moi, il y a des gens qui se présentent chez moi —, eh bien, pourquoi recommander une liste fermée? Je le demande à tout hasard. Si les gens veulent savoir pour qui ils votent, les personnes en cause, pas seulement le parti, mais bien les personnes, pourquoi présenter une liste fermée?
    Je rappelle que la liste fermée est un processus mécanique ou une étape dans un but électoral. Les raisons que je vous ai données sont celles qui occupaient nos esprits à l’époque, et ça peut sembler manquer de transparence et d’imputabilité, etc., mais on se préoccupait plus du résultat électoral que du reste. Quand je parle de savoir où vit le député, c’est un euphémisme pour la suite, une fois qu’on est élu. Les gens veulent savoir à qui s’adresser pour régler leurs problèmes, et, évidemment, faire valoir leurs intérêts. En fin de compte, je ne crois pas vraiment qu’une liste fermée ou une liste ouverte soit absolument liée à ça. Je pense que c’est simplement une étape.
    Je passe la parole à mes deux collègues.
    Je serai bref.
    Je pense que Dave essayait d’imaginer ce qui passerait à l’avant-plan. Pour ce qui est de la liste fermée, il faut se rappeler qu’il y a une analogie directe. Les gens sont effectivement placés devant des listes fermées dans notre système actuel. C’est une liste à une personne, mais c’est le parti qui désigne la personne pour laquelle vous pouvez voter. Si vous penchez vers un certain parti ou un certain nombre de principes, vous savez qui est sur la liste produite par le Parti conservateur, le Parti libéral, le NPD, les Verts, etc. C’est absolument transparent, et la possibilité de cocher un nom est un élément de plus.
    Vous savez pour qui vous votez dans ces listes, et puis vous pouvez faire une évaluation: « Comment ont-ils produit cette liste? Je ne vais pas voter pour un parti qui a produit la liste de cette façon. J’aime mieux voter pour un parti qui a produit la liste de telle autre façon. » Une « liste fermée », ce n’est pas fermé dans tous les sens du terme, ça veut seulement dire que vous ne pouvez pas en changer le contenu.
    Je tiens à dire aussi que, quand j’ai voyagé à travers le pays comme critique de l’opposition officielle — je pense que j’y ai donné une douzaine de séances —, j’ai commencé avec une liste de 10 ou 11 principes ou variables. Ils devaient être beaucoup plus spécifiques que ce que prévoyait le mandat du comité. Je demandais aux gens de répondre ce qu’ils en pensaient au début, avant toute discussion. Ça prenait cinq à dix minutes. Ensuite il y avait la séance, et ensuite je leur faisais faire le même exercice.
    Les choses étaient un peu biaisées parce que les gens savaient que je suis néo-démocrate et que le NPD est en faveur d’un système de représentation proportionnelle, etc. Donc ça ne représente pas le Canada, mais ça représente d’où partent les gens, et c’est ce qui compte le plus, et ensuite en quoi ils ont changé leur point de vue. Il n’a pas changé beaucoup, mais, pour votre groupe, ces changements pourraient avoir beaucoup d’importance.

  (1145)  

    Je vous remercie.
    Monsieur Richards, vous avez la parole.
    J’ai une ou deux questions pour vous, monsieur Fox. Vous avez dit, dans vos remarques préliminaires — et je crois que je vous cite correctement parce que j’essayais de l’écrire à mesure, donc ça devrait être assez proche, sinon tout à fait exact —, que les Canadiens eux-mêmes doivent participer de façon effective et que leur sagesse collective doit faire partie du processus.
    Je suppose que ça veut dire que vous pensez que le processus actuel n’y parvient pas, et j’aimerais avoir votre avis et entendre vos réflexions concernant ce que ça devrait être. Qu’est-ce qui permettrait aux Canadiens de participer effectivement? Qu’est-ce qui permettrait à leur sagesse collective d’alimenter ou d’orienter le processus?
    Vous m’avez bien compris, au sens où je ne pense pas, en effet, que le processus actuel le permette, mais je ne sais pas exactement ce qu’il faudrait au stade où nous en sommes, au sens où il est important de faire des recherches et d’obtenir des données factuelles et des analyses. Pendant que vous réfléchissez à ce que vous allez faire avec les réunions que vous aurez en cours de route, pour revenir sur les deux derniers commentaires et les renforcer, vos options seront limitées à cause de votre échéancier et de votre calendrier, mais quant à moi, j’essaierais…
    Pour en revenir à la remarque de David concernant le fait de demander aux gens de faire des choix, je pense que ça peut être très utile. L’une des limites d’audiences comme celle-ci est que j’ai droit à mes cinq minutes et que, ensuite, je quitte la salle; quelqu’un d’autre entre, parle pendant cinq minutes, puis s’en va. Je n’ai pas la possibilité d’entendre la personne qui me précède et celle qui me suit ou de vous faire savoir que, peut-être, mon avis est différent en raison de ce que je viens d’entendre. Le fait de relancer des questions dans une certaine ville… Si un thème se révélait comme élément de consensus par exemple à Winnipeg, il faudrait le tester à Halifax: « À Winnipeg, beaucoup de gens nous ont dit ceci. Qu’en pensez-vous? »
    Il faudrait penser à regrouper ces points de vue autrement que sous forme d’une longue liste, parce que, franchement, on n’aura que des monologues se suivant à un rythme rapide. Aussi bien demander des mémoires et exposés par courriel.
    D’accord, je vois. Je comprends.
    Vous avez également beaucoup écrit sur la réforme parlementaire, et je pense que c’est lié à ce que nous faisons ici. Beaucoup de témoins nous ont parlé des différents compromis possibles selon les systèmes électoraux, et je pense que c’est une opinion presque universelle, sinon universelle, qu’il n’existe pas de système électoral parfait. Évidemment, on nous a beaucoup dit que nous devons nous intéresser aux valeurs et aux objectifs que nous essayons de concrétiser. Vous avez dit vous-même que la population ne semble pas être encore consciente du problème que nous essayons de régler.
    Ce que j’essaie de dire ici, c’est que le système électoral et sa modification peuvent être l’une des choses que nous pouvons faire pour essayer de régler certains problèmes, mais qu’une réforme du parlement pourrait aussi en régler, et peut-être même tous.
    Ma question est celle-ci: quels sont les autres changements éventuels qu’on pourrait envisager à l’échelle parlementaire et est-ce que certains de ces changements pourraient régler certains des problèmes que nous avons?
    C’est une excellente question.
    Je ne crois pas que j’irais jusqu’à dire qu’une réforme parlementaire ou d’autres réformes régleraient tous les problèmes, parce que, franchement, il faut d’abord se préoccuper des hommes et des femmes que nous envoyons aux Communes avant de s’inquiéter de ce qu’ils feront une fois qu’ils y seront. Depuis 15 ans, je me suis surtout intéressé à ce qui se passe ici quand les députés y arrivent. J’espère que, si nous changeons le mode de scrutin et si nous devons avoir une Chambre plus représentative du vote populaire, que cette diffusion du pouvoir décisionnel aura aussi un effet sur l’indépendance des comités et sur les votes aux Communes.
    Je comprends la nécessité de faire passer les messages de façon stricte. Les gens n’aiment pas la discorde parce que ça fait désordre et que ceux qui rendent compte de la vie politique la présenteront comme un monde caractérisé par la faiblesse et les volte-face, mais j’aimerais vraiment que les gouvernements redécouvrent la valeur des livres blancs et demandent aux comités de procéder à des travaux préliminaires bien avant qu’ils décident ce qu’ils veulent faire. C’est une question distincte de la réforme électorale, mais je pense que c’est lié et que ça peut éclairer la seconde.
    Excellent, merci.

  (1150)  

    Merci beaucoup, monsieur Richards.
    À vous, monsieur DeCourcey.
    J’aimerais éclaircir un point concernant la liste de parti fermée. J’en ai bien compris les raisons, que vous avez appliquées à la question de M. Aldag et à celle de M. Cullen.
    L’équité de la représentation est le principe actif de la liste de parti fermée. C’est le parti qui produit la liste. Comment, dans le cadre de cette recommandation du rapport, fonctionne la convention autorisant le parti à produire la liste?
    Nous sommes partis du principe que les partis sont des intervenants légitimes. Ils ont le droit d’attirer et de choisir les gens qui les représenteront, mais nous voulions créer un incitatif et une pression publique pour qu’ils le fassent.
    Revenons à la façon dont ça fonctionne. On fonctionne dans un environnement concurrentiel. Vous cherchez à obtenir un avantage politique dans le meilleur sens du mot par rapport à vos concurrents, en vous présentant sous votre meilleur jour, en exprimant votre penchant pour tel ou tel enjeu, en affichant vos couleurs. Dans combien de campagnes électorales est-ce que nous avons vu jusqu’ici des chefs de parti mettre en valeur les candidats qui les entouraient, des femmes, des membres de minorités visibles, etc.? C’est la façon dont le parti s’adapte à une nouvelle réalité et à une nouvelle pression venue de l’intérieur du pays dans le cadre du scrutin majoritaire à un tour, et nous présentons des candidats qui ressemblent au Canada si vous voulez.
    La question que vous soulevez nous a bien occupés et a suscité des opinions très tranchées des deux côtés. Mais le compromis que nous avons fait était que nous voulions plus de femmes parmi les députés. Il y avait d’autres enjeux, et ça nous a semblé, à nous les commissaires, traduire d’autres types de préoccupations.
    Je ne veux pas minimiser les choses, mais, monsieur DeCourcey, comme vous avez soulevé la question de la transparence et de la légitimité démocratique, je tiens à dire que nous nous sommes attaqués à ce problème. Au final, nous avons fait un choix fondé sur des compromis. C’est un exemple légitime de la façon dont vous devrez mener votre travail. Nous avons aussi pris l’avis des partis.
    Je réitère ce que j’ai dit tout à l’heure. Les partis sont des intervenants légitimes ici. Nous avons besoin de partis politiques forts. Ce sont des instruments partisans dans le meilleur sens du mot, qui permettent d’exprimer des points de vue, de soulever des problèmes et de débattre d’idées. Je suis en faveur de la partisanerie si elle permet de clarifier des idées, si elle offre des choix. Je pense que c’est une bonne chose dans une démocratie.
    Donc, c’est peut-être un point de vue opposé au sujet de la liste fermée, mais c’est dans ce sens qu’est allée notre réflexion.
    Mais, dans les faits, contrairement au vote des membres d’un parti pour le candidat favori comme ce qui se passerait dans une circonscription, est-ce que le parti énumérerait les candidats de la liste en indiquant quel est le premier, le deuxième, le troisième, le quatrième et en demandant aux membres du parti de les entériner? Est-ce que c’est comme ça que ça marche?
    Non. Nous savions que c’était une possibilité, absolument, les partis étant ce qu’ils sont et le leadership était le leadership des partis. Nous favorisons une procédure primaire et une méthode pour ça. C’est pour ça que j’ai dit qu’il y avait des recommandations et propositions complémentaires pour améliorer la démocratie des partis en parallèle avec les changements à apporter au système électoral. Là encore, c’est quelque chose qui a fait partie de notre réflexion sur les conséquences d’un changement de système sans prise en compte des intervenants en jeu ou des enjeux complémentaires. Un changement de système électoral s’accompagne d’une cascade d’effets dont il faut tenir compte.
    Monsieur Fox, vous avez rapidement abordé l’idée de rallier les Canadiens à une sorte de consensus sur le malaise ou le problème que nous essayons de régler ici. Je crois que l’un des aspects qui pourraient nous rallier tous ensemble est l’idée d’interroger les Canadiens sur la façon dont ils se considèrent représentés au Parlement, notamment les Canadiens qui se sentent à l’écart du système. Je sais qu’il y a des Canadiens qui ont le sentiment que leur vote ne compte pas au Parlement, mais aussi des Canadiens qui ne votent pas et sont complètement désengagés.
    Est-ce que vous pensez qu’on pourrait partir de là? Comment intéresser ceux qui ne sont jamais sentis parties prenantes du processus?
    Dans la mesure où le vote obligatoire ne m’inquiète pas, je ne suis pas convaincu que ce soit un moyen sûr, à long terme, de garantir la participation. Le taux de participation a été élevé dans les élections où les gens estimaient que les enjeux étaient importants, et ça a généralement coïncidé avec un changement de gouvernement, mais pas nécessairement. En 1988, premier exemple, il y avait un enjeu réel dans le choix d’une politique gouvernementale fondamentale qui a fait réagir des gens des deux points de vue… Donc je pense qu’il faut entre autres, pour essayer d’intéresser les citoyens à la vie politique et à la vie démocratique, s’assurer qu’ils comprennent que leur voix compte, que vous n’avez pas décidé préalablement et qu’ils ont la possibilité, dans leurs interventions, de faire bouger les choses. Je pense que ça fera avancer les choses. S’il n’y a pas de raison valable à mes yeux, pourquoi est-ce que je me déplacerais?

  (1155)  

    D’accord, merci.
    La parole est à M. Boulerice.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Avant de poser ma question, j'aimerais souligner que M. Cullen et moi ne constituons pas l'illustration d'une très grande diversité, et ce, à plusieurs égards.
    Oui, nous sommes tous les deux des hommes et tous les deux Blancs. L'un est barbu et l'autre ne l'est pas. Toutefois, nous sommes très différents relativement à quelque chose d'important et de typique quant à notre système électoral. La circonscription de M. Cullen a une superficie de 330 000 kilomètres carrés — elle est plus grande que la Pologne —, alors que la superficie de la mienne est de 11 kilomètres carrés. Par conséquent, nos réalités de travail de député sont extrêmement différentes.
    Quand on regarde les systèmes qui existent en Allemagne, en Nouvelle-Zélande, au Danemark et aux Pays-Bas, on retrouve beaucoup de choses très intéressantes. Cependant, on peut difficilement faire du copier-coller. C'est pour cette raison que la proposition de M. Jean-Pierre Kingsley de s'inspirer de ce qui se passe ailleurs, mais d'avoir un système fait au Canada, pourrait être intéressante. Je pense qu'on devrait travailler et réfléchir à cette question.
    Si on vise la proportionnalité, je pense qu'on pourrait l'obtenir de trois manières différentes, à savoir des listes par province, des listes par région à l'intérieur des provinces — certaines provinces sont plus grandes que d'autres — ou la fusion de circonscriptions, ce qui donnerait des comtés plurinominaux où il pourrait y avoir trois, quatre, cinq ou six députés qui représenteraient une même petite région.
    On comprend que cela se ferait assez bien sur l'île de Montréal, mais que cela se ferait moins facilement dans la réalité que représente M. Cullen ou dans les Territoires du Nord-Ouest. On a déjà évoqué cette question avec des témoins dont les opinions étaient partagées à cet égard.
    Pourrions-nous avoir un système où on garderait les circonscriptions uninominales à un tour alors que dans des centres urbains ou des banlieues, nous pourrions avoir des fusions de circonscriptions pour obtenir une certaine part de proportionnalité?
    J'aimerais vous entendre tous les trois à cet égard.
    À mon avis, on pourrait avoir un tel système. Selon moi, il n'y a pas non plus de problèmes constitutionnels à cet égard. Il serait vraiment important qu'il y ait des exceptions pour les circonscriptions du Nord et peut-être pour les très grands circonscriptions qui sont plus près des villes du Sud.
    Comme le NPD, nous avons pensé à un système mixte compensatoire adapté au Canada. Selon moi, la suggestion de M. Kingsley a beaucoup de mérites. Cependant, je ne sais pas si l'idée voulant que toutes les circonscriptions qui comptent une population moindre n'auraient qu'un seul député est pertinente. On pourrait les combiner, sauf dans le Nord où on devrait les garder telles quelles.

[Traduction]

    C’est une excellente question, et je serais très favorable à une solution « made in Canada ». Les systèmes électoraux étrangers peuvent nous aider à y voir clair, mais nous vivons dans des contextes différents. Il y a la langue, évidemment, et d’autres choses, mais la géographie est peut-être l’élément le plus déterminant.
    Au Nouveau-Brunswick, ça voulait dire que… adopter le système proportionnel que nous avions imaginé, sans augmenter le nombre de députés. Ça voulait dire que les circonscriptions à un député étaient un peu trop grandes; elles étaient très petites, mais elles étaient plus grandes. C’est ce que certaines personnes voulaient. Il faut y penser, si vous allez dans cette direction pour essayer de régler le problème, et je pense que c’est très légitime. Voulez-vous un plus grand nombre de députés à la Chambre des communes? Comment accommoder ça, puisque vous aurez ce genre d’inégalités et que vous voudrez conserver les variations à un niveau acceptable en termes de représentation de la population, ce qui fait partie d’un processus de redéfinition des limites des circonscriptions, et ça, vous n’y échapperez pas, par nécessité.
    Je ne sais pas si la solution est un système hybride. Là encore, j’en reviens à mon exposé: aucune étude n’a été faite à ce sujet. On a des études sur le système de représentation proportionnelle mixte. On en a examiné les principes de base, mais il faut aussi penser à son application sur la carte, aux limites de circonscription, au rôle des députés, au nombre de députés d’une province ou d’une région comparativement aux autres… ce sont autant de conséquences à envisager, et ça compte beaucoup pour les électeurs. C’est une idée intéressante, et je vous encourage à l’approfondir pour voir ce que ça donne. Peut-être que vous finirez par vous dire qu’on a besoin de plus de députés à la Chambre des communes. Le système de représentation proportionnelle mixte, c’est la multiplication des politiciens.
    Des voix: Oh, oh!
    M. David McLaughlin: C’est ce qui se passera. Ça n’a rien de péjoratif.

  (1200)  

[Français]

     Il ne reste que quelques secondes.
    Je suis d'accord à ce sujet.
    Merci.
    Monsieur Rayes, vous avez la parole.
    En 2003, lorsque je me suis lancé en politique pour la première fois au palier provincial, quelqu'un que je considère comme un sage m'a donné un conseil. Il nous écoute peut-être en ce moment par l'entremise de la webdiffusion. Il m'a toujours dit que tant et aussi longtemps que je traiterai les citoyens et les électeurs de façon intelligente, ils me répondront toujours de façon intelligente. En fin de compte, la population, les citoyens et le peuple ont toujours raison lorsqu'on leur laisse l'occasion de s'exprimer. C'est naturellement le cas si on a pris le temps de bien les informer.
     Le changement du mode de scrutin est vraiment l'élément central de la réforme, mais on s'entend pour dire qu'il y a beaucoup d'autres choses qu'on pourrait faire. Cela dit, j'aimerais que vous m'expliquiez ceci. Ma question s'adresse aux trois témoins.
    Lorsqu'on les a consultés de façon aléatoire par sondage ou par référendum sur cette question, la plupart du temps ou presque, les citoyens — au Canada particulièrement — ont rejeté l'option qui est présentée ou souhaitaient garder le statu quo. C'est ainsi, et ce, malgré tout ce que disent les tenants du changement au chapitre du mode de scrutin et de tous les voeux pieux voulant modifier le système, de même que le fait que les gouvernements ont les moyens financiers d'informer les citoyens par l'entremise du directeur général des élections. Je ne parle pas ici des consultations auprès des groupes d'intérêts étant donné que lorsqu'ils viennent nous présenter leur option, il semble que tout le monde pense comme eux et que leur proposition fait l'unanimité.
    Je me trompe peut-être, mais dans le cas de la Colombie-Britannique, il y a eu une majorité simple en faveur du changement.
    Tout à fait.
    Toutefois, elle n'était pas selon le seuil établi au préalable.
    C'était une proportion de 57 %.
    Exactement.
    Sauf qu'il peut y avoir des gens qui souhaitent le changement dans une proportion de 50 % plus un.
    Exactement.
    Je ne pars pas du principe que les gens rejettent l'option proposée, bien au contraire. On ne rejette pas une option seulement pour la rejeter. C'est peut-être parce qu'on apprécie à un certain niveau ce qui existe.
    C'est fort possible.
    J'aimerais avoir votre opinion sur cette tendance, sauf en ce qui a trait à ce qu'on a vu en Colombie-Britannique
    Ce fut le cas également en Ontario lors d'une élection au cours de laquelle j'étais moi-même candidat.
    Le référendum a eu lieu en 2007, soit en même temps que les élections provinciales. Le gouvernement de l'époque avait mentionné qu'il n'allait pas faire campagne pour ou contre le changement. La position de l'opposition officielle pour laquelle j'étais candidat était aussi un peu floue sur cette question. Elle laissait les candidats dans leur circonscription prendre position à ce sujet.
    Entre le statu quo et l'inconnu, j'ai l'impression que c'est le statu quo qui risque de l'emporter. Le fait que, dans certaines situations, personne ne présente d'arguments en faveur du changement peut aussi faire en sorte que les gens seront plus à l'aise de rester dans une situation qui leur est familière.
    Vous avez dit qu'il faut traiter les électeurs correctement et leur donner de l'information. Je suis entièrement d'accord avec vous à cet égard. Ils ne prennent pas de mauvaises décisions.

[Traduction]

    Je suis favorable à la position par défaut de laisser les électeurs décider, parce que c’est ce qui fonctionne pour nous. Au final, c’est ce qui marche généralement.
    Une des raisons est que nous acceptons les résultats. Nous avons de bons gagnants et de bons perdants. Les bons perdants, si vous voulez, participent différemment, sans avoir remporté la victoire, mais d’accord pour participer loyalement comme membres de l’opposition, etc. C’est la nature du système, nous l’acceptons et nous allons de l’avant.
    J’ai participé à des référendums. J’ai participé au référendum constitutionnel de 1992 à l’époque du premier ministre Mulroney. J’ai voyagé partout avec lui à cette occasion. Et, oui, j’ai vu de mes yeux comment l’antipathie à son égard a contribué à colorer les résultats, etc.
    Donc, d’autres choses peuvent entrer en ligne de compte, mais de là à dire que les gens ne connaissaient pas les enjeux, ne savaient pas tout ce qu’il y avait dans Charlottetown... Ils appréciaient Charlottetown comme solution globale, ils n’en aimaient pas des éléments particuliers. Donc on a peut-être trop mis de l’avant, et c’est un apprentissage.
    On sait aussi, d’après l’expérience électorale, pourquoi les responsables politiques actifs ont tendance à faire du porte-à-porte avec leurs documents pour asséner leur message — j’ai été directeur de campagne — à l’exclusion de tous les autres parce qu’ils essaient de simplifier les choses et de l’exprimer dans des termes qui comptent aux yeux de la population. Vous n’avez pas encore trouvé le point sensible à ce sujet. Peut-être qu’il se révélera dans le processus.
    À défaut d’argument définitif en faveur du changement — et c’est quelque chose que Graham rappelle d’emblée — ou en préalable à un effort concerté et indépendant de sensibilisation et d’information qui, selon moi, devrait accompagner un processus référendaire, je crains que la population s’en tienne à des propos ambivalents pour en arriver probablement à un vote pour le statu quo.

  (1205)  

[Français]

     Merci .

[Traduction]

    Si vous changez les choses, il faut apporter des justifications très solides.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Nous terminons cette semaine de travaux par une intervention de Mme Sahota.

[Traduction]

    Merci.
    Je voudrais qu’on s’oriente vers la recherche d’autres idées, d’une solution « made in Canada », et je pense que nous pourrions adopter beaucoup de ces systèmes pour les adapter à notre pays.
    Nous sommes très différents de beaucoup de pays. La redéfinition des limites des circonscriptions sera un obstacle considérable et ce sera complexe. Des bulletins de vote contenant beaucoup trop d’options risquent d’être problématiques. Nous avons parlé de beaucoup des enjeux à régler, mais aussi des valeurs qui sont importantes. Je sais que l’équité est une question qui revient constamment lorsqu’on parle de passer à un système de représentation proportionnelle.
    Et il y a aussi tous les problèmes dont nous avons parlé au cours de la semaine. J’ai l’impression que nous n’avons pas établir de lien concret de causalité avec la proportionnelle du point de vue de la représentation des femmes, de la diversité, etc. Étant donné le nombre de facteurs en jeu quand on examine tout ça, je ne pense pas qu’un système électoral ou un autre — corrigez-moi si je me trompe —, mais, d’après tous les témoins, il n’y a pas de lien direct de causalité qui se soit révélé jusqu’ici.
    J’aimerais jeter un coup d’œil à certaines solutions un peu différentes.
    Monsieur Scott, vous avez parlé de la Commission Jenkins et d’une solution que ses membres ont proposée parce qu’ils ne voulaient pas augmenter le nombre de députés ni peut-être redéfinir les limites des circonscriptions. Ils sont allés au-delà du vote alternatif, mais ils ont essayé de le rendre plus proportionnel, je ne suis plus très sûre. Pourriez-vous nous expliquer les différences entre leur solution et la représentation proportionnelle mixte? Est-ce que c’est la même chose ou est-ce que c’est différent?
    Oui, certains l’appellent le vote alternatif — plus et d’autres, la représentation proportionnelle mixte — plus.
    Je l’appelle la représentation proportionnelle mixte — plus parce que c’est un système de représentation proportionnelle mixte, mais, quand on vote à l’échelle locale, au lieu d’utiliser le scrutin majoritaire à un tour comme nous, on utilise un bulletin de vote de classement, et c’est comme ça qu’on produit les élus locaux. C’est la seule différence.
    Mais ils ont fait une critique acerbe du vote alternatif comme réforme unique selon laquelle on conserve des circonscriptions à un seul député et on utilise le vote alternatif. Je ne sais pas quelle a été la dynamique de compromis qui leur a fait considérer un ensemble de bonnes raisons distinctes d’obtenir un appui général — même si, dans certains cas, il s’agit de seconds choix, ça compte — qu’ils ont fait leurs. Je ne me rappelle pas bien leur raisonnement. C’était la seule différence avec la représentation proportionnelle mixte.
    D’accord.
    Les témoins d’Écosse nous ont fait comprendre que, quand les gens passent au système de représentation proportionnelle, ils ne reviennent jamais sur leurs pas. Mais je suis un peu perplexe: pourquoi est-ce que le référendum n’a pas marché au Royaume-Uni puisque tant de régions et leurs municipalités ont changé de système, mais…
    Je crois que le référendum portait sur le vote alternatif, pas sur la représentation proportionnelle.
    Ah, c’était donc la question. C’était le choix qu’on leur proposait qui n’a pas plu aux gens.
    Et ce n’était pas en lien avec le rapport de la Commission Jenkins. C’était distinct. C’est le vote alternatif qui a été mis aux voix, et il a été rejeté.
    C’était une entente de coalition avec les démocrates libéraux. Je pense que, dans le cadre de l’entente pour former une coalition, les conservateurs avaient accepté de tenir un référendum sur ce système. C’était le prix de la coalition. Il y a un prix à payer quand on forme un gouvernement de coalition.
    Intéressant.
    Au sujet de ce que vous avez dit, madame Sahota, concernant une solution « made in Canada » ou un système différent, etc., je vous invite et j’invite tous ceux que la question intéresse, parce que c’est ce qui nous a activés et orientés, à tenir compte du fait que plus ça ressemble à un système dont les Canadiens sont familiers, plus il sera facile de faire accepter le changement. Si vous proposez un tout nouveau système, de la proue à la poupe comme on dit dans les Maritimes, vous allez vous heurter au sentiment que c’est trop et déclencher des questions comme: Pourquoi tout ça? Quel est le problème, etc.?
    Le système de représentation proportionnelle mixte, et c’est la raison pour laquelle nous avons penché de ce côté, est encore un système majoritaire uninominal: tout le monde vote encore pour un député local, comme avant. Ça a permis d’introduire une certaine mesure de proportionnalité. Le degré de proportionnalité dépend des répartitions. Nous avons opté pour deux tiers et un tiers, et il y a d’autres caractéristiques. Nous avons estimé que ce n’était pas un gros changement pour les gens.
    C’est juste un conseil, une mise en garde pour la suite des choses. Un système trop nouveau peut bien englober tous les compromis et tous les principes, mais ça peut être juste un peu trop pour être accepté par les Canadiens, compte tenu de l’attachement au système actuel, parce que, entre autres, nous le connaissons bien et parce qu’il semble généralement bien fonctionner. Nous savons, en tant qu’experts, et vous vivez dedans, qu’il comporte des lacunes. Je ne suis pas sûr que beaucoup de Canadiens s’en rendent compte dans la vie de tous les jours.
    Donc, c’est simplement un conseil gratuit, si vous voulez, en réponse à ce que je considère comme une excellente question.

  (1210)  

[Français]

     Merci beaucoup.
    C'est ici que prend fin nos discussions.
     J'aimerais encore une fois remercier les témoins de leur présence parmi nous. Ils nous ont fait part de façon très claire de points de vue fort bien élaborés.
    Comme je l'ai déjà dit, monsieur Scott, c'est un plaisir de vous revoir sur la Colline.

[Traduction]

    Nous devons nous retirer cinq minutes à huis clos pour discuter de certaines questions à venir. Ce sera très bref.
    Merci à tous.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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