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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 034 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 29 octobre 2014

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Il s'agit de la 34e réunion du Comité permanent de l'environnement et du développement durable. Nous poursuivons aujourd'hui notre étude du projet de loi C-40, Loi concernant le parc urbain national de la Rouge.
    Nous sommes ravis d'accueillir des témoins de la Société pour la nature et les parcs du Canada, de la Waterfront Regeneration Trust Corporation et de la York Region Federation of Agriculture.
    M. Éric Hébert-Daly, directeur général national de la Société pour la nature et les parcs du Canada, prendra la parole en premier pour sept minutes, puis nous entendrons Mmes Pauline Browes et Kim Empringham.
    Compte tenu du nombre de témoins que nous recevons aujourd'hui, nous essayerons de réserver du temps pour les questions et les réponses.
    Nous allons maintenant entendre M. Hébert-Daly, pour les sept premières minutes.
    Bonjour. Je vous remercie de nous donner l'occasion de faire part à votre comité de nos recommandations et de nos réflexions sur le projet de loi C-40, Loi concernant le parc urbain national de la Rouge.
    Je suis Éric Hébert-Daly, directeur général national de la SNAP. Depuis sa création il y a une cinquantaine d'années, la SNAP joue un rôle de premier plan dans la création de plus des deux tiers des aires protégées du Canada. Nous comptons 13 sections régionales dans presque toutes les provinces et tous les territoires au pays, dont la section Wildlands League à Toronto et le bureau national à Ottawa. Nous avons plus de 60 000 partisans un peu partout au pays, et nous travaillons en collaboration avec les gouvernements, l'industrie, les Premières Nations et d'autres intervenants pour préserver le patrimoine naturel du Canada.
    Au cours des cinq dernières années, nous avons accueilli l'arrivée de nouveaux projets de parc, dont la multiplication par six de la superficie de la réserve de parc national Nahanni en 2009 et la création de l'aire marine nationale de conservation Gwaii Haanas en Colombie-Britannique en 2010.
    Nous sommes ici pour discuter d'un type de parc différent, à savoir la création du premier parc urbain national dans la région du Grand Toronto. La SNAP est très emballée par ce projet, qu'elle appuie depuis le début. À nos yeux, c'est une occasion remarquable pour nous de protéger une vallée naturelle très spéciale située dans la plus grande région urbaine du Canada, tout en rapprochant les gens de la nature.
    Je tiens également à préciser que la SNAP reconnaît depuis le début que l'agriculture est et continuera d'être un élément important de ce parc. Nous croyons que l'agriculture peut contribuer à la conservation de la nature et vice versa. Nous, en tant qu'agents de protection de la nature, partageons un intérêt commun avec les agriculteurs: empêcher l'aménagement et l'étalement urbains sur ces terres. Nous faisons souvent remarquer que si nous avons l'occasion de créer ce parc national urbain, c'est en partie grâce aux agriculteurs qui tiennent en échec l'aménagement urbain et aux groupes communautaires qui font la promotion du parc de la Rouge depuis plusieurs décennies. En fait, nous ne proposons aucun changement aux dispositions relatives à l'agriculture dans le projet de loi.
    Au cours des dernières semaines, nous avons écouté avec beaucoup d'intérêt les débats sur le cadre de gestion approprié pour le parc de la Rouge: devrait-il être axé sur l'intégrité écologique ou sur la santé des écosystèmes? Même si nous pensons qu'il y a des arguments valables pour les deux, la SNAP estime que le projet de loi devrait se pencher sur un enjeu plus fondamental, à savoir que la conservation de la nature devrait clairement être considérée comme étant la priorité absolue dans la gestion du parc. C'est la raison d'être d'un parc. Autrement, on n'a pas vraiment de parc. Ce pourrait être une aire à usages multiples ou un autre type de réserve.
    Toutefois, accorder la priorité à la conservation de la nature est conforme aux normes internationales relatives aux aires protégées ainsi qu'aux lois fédérales et provinciales de l'Ontario visant les parcs et les aires protégées. Cette priorité devrait et peut être énoncée dans le projet de loi sur le parc de la Rouge, ce qui n'est pas le cas en ce moment. Le ministre n'aurait qu'à tenir compte de la nature et de la faune dans la gestion du parc.
    Depuis plusieurs années, Parcs Canada dit privilégier un cadre pour la santé des écosystèmes à un cadre pour l'intégrité écologique dans la gestion du parc national urbain de la Rouge, en vue de distinguer les parcs nationaux urbains des autres parcs nationaux. Dans l'optique de trouver des solutions, nous avons élaboré des recommandations constructives qui visent à optimiser la santé des écosystèmes au cours de cette période.
    Nous recommandons de modifier le projet de loi pour qu'il y soit clairement énoncé que l'optimisation de la santé des écosystèmes est la priorité, ce qui est une condition très importante dans le cadre de l'objectif de gestion globale du parc de la Rouge. Nous recommandons également de définir explicitement ce qu'il faut faire pour optimiser la santé des écosystèmes.
    Nous recommandons de modifier le libellé du projet de loi de manière à respecter les normes internationales et nationales relatives aux aires protégées. Les gestionnaires du parc seraient alors dotés d'outils plus efficaces pour en protéger les valeurs naturelles existantes et améliorer le plus possible la santé de ses écosystèmes, surtout en raison du contexte urbain et agricole. Parcs Canada sera ainsi responsable d'améliorer la santé de l'écosystème au fil du temps, sans toutefois donner l'impression qu'il doit atteindre une intégrité écologique complète.
    De surcroît, notre recommandation permettrait à Parcs Canada d'avoir un mandat clair et l'inciterait à travailler en collaboration avec les agriculteurs pour cibler des stratégies avantageuses pour la nature et les agriculteurs à long terme.
    Nous avons également dégagé quelques éléments du projet de loi qu'il faut améliorer. En matière de planification de la gestion, nous estimons qu'il faut établir à l'article 9 des objectifs et des indicateurs relatifs à l'écologie ainsi que des mesures de surveillance écologique et de reddition de comptes.

  (1535)  

    On devrait exiger qu'un rapport sur l'état des parcs soit présenté au Parlement tous les cinq ans, comme on le fait pour d'autres parcs nationaux. Ainsi, les parlementaires et la population peuvent savoir si Parcs Canada atteint ses objectifs au fil du temps.
    En ce qui concerne l'infrastructure publique, il faut renforcer les articles 12 et 16 par l'ajout de critères rigoureux qui aideront les responsables à prendre des décisions éclairées avant le déboisement ou l'aliénation de terres du parc pour des projets d'infrastructure. Par exemple, nous suggérons que les décideurs soient tenus d'envisager des solutions de rechange raisonnables et de s'assurer que l'argent n'est pas la seule raison pour laquelle on propose des projets d'infrastructure pouvant nuire au parc.
    Enfin, j'aimerais vous énumérer les parties du projet de loi que nous appuyons et que nous voulons que vous mainteniez dans un projet de loi amendé. Nous appuyons la liste d'interdictions qui se trouve actuellement dans le projet de loi. Nous sommes en faveur de la limite maximale de 200 hectares du parc pouvant être morcelés pour l'aménagement d'infrastructure. C'est extrêmement important pour éviter que l'on empiète sur le parc au fil des ans.
    La SNAP exhorte les membres du comité à travailler ensemble pour renforcer le projet de loi afin que les responsables du parc national urbain de la Rouge protègent efficacement ce trésor naturel à long terme, tout en faisant la promotion d'une communauté agricole saine et dynamique et en encourageant les gens à se rapprocher de la nature.
    Nous avons rédigé plusieurs amendements précis que nous remettrons à tous les membres du comité dans les prochains jours.
    Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de vous faire part de nos recommandations. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Hébert-Daly. Nous vous remercions d'avoir respecté le temps de parole imparti.
    Nous allons maintenant entendre l'honorable Pauline Browes, qui fera sa déclaration liminaire de sept minutes.
     Merci beaucoup. Je suis ravie d'être de retour sur la Colline parlementaire.
    Je suis heureuse de voir des collègues de la région de Scarborough. Je suis ravie de participer à votre séance dans le cadre de votre étude sur le parc urbain national de la Rouge.
    J'aimerais brièvement vous parler des 30 années que j'ai passées à protéger la Rouge.
    Au début des années 1980, des initiatives ont été faites pour protéger la vallée de la Rouge. La collectivité était enthousiaste et manifestait sans relâche son intérêt; les gens se rendaient en grand nombre assister aux rencontres du conseil municipal pour demander de passer à l'action et d'adopter des règlements municipaux officiels sur le zonage en vue de préserver la Rouge. La majorité du territoire appartenait à la province, étant donné que c'était réservé pour un espace vert entre le projet de l'aéroport de Pickering et la zone urbaine de Toronto. Cependant, il y avait une grande menace concernant des projets de lotissement, de dépotoirs et de tours d'habitation dans le secteur de la Rouge.
    À l’époque, j'étais la députée fédérale de Scarborough-Centre, et des représentants de l'organisme de protection de la Rouge, Glenn De Baeremaeker, Jim Robb, Ron Moeser et Cathy Gregorio, sont venus à mon bureau de circonscription pour demander de l'aide sur la manière dont ils pourraient protéger la Rouge. C'est une magnifique zone à l'état sauvage avec des panoramas à couper le souffle des berges de la Rouge et de la petite Rouge; c'est un secteur patrimonial et culturel où se trouvent une flore et une faune imposantes. Des cerfs de Virginie s'y promènent librement. Le parc sera à proximité du plus grand centre urbain au Canada. Il ne faisait vraiment aucun doute que ce territoire devait être protégé et préservé.
    Par contre, nous devions trouver une manière. En 1987, le ministre de l'Environnement à l'époque était Tom McMillan, et j'étais sa secrétaire parlementaire. Le ministre avait demandé une étude concernant Parcs Canada, et cette étude avait notamment conclu qu'il y avait d’importantes zones géographiques au Canada qui devraient être préservées, mais qui ne répondaient pas nécessairement aux critères en vue d'accorder la désignation de parc national. C'était tout ce dont nous avions besoin. La Rouge répondait parfaitement à ces critères.
    Nous avions besoin de beaucoup de fonds pour protéger la Rouge. À la suite de nombreuses rencontres et interventions, le ministre McMillan a annoncé en 1988 au nom du gouvernement Mulroney que 10 millions de dollars seraient investis en vue de protéger et de préserver la Rouge comme parc.
    En 1990, lors du premier point à l'ordre du jour de l’année à la Chambre des communes, j'ai eu l'occasion de proposer une motion d'initiative ministérielle, appuyée par mon collègue libéral Derek Lee, en vue de désigner la Rouge comme parc. La motion a été adoptée à l'unanimité à la Chambre des communes. C'était un autre pas dans la bonne direction.
    Parallèlement, David Crombie a publié le rapport de la Commission royale sur l’avenir du secteur riverain de Toronto dans lequel il mentionnait que la Rouge devait être protégée et devait être désignée comme parc. Ce commentaire a donné un sérieux coup de pouce à l’initiative. Par la suite, l'Ontario a pris des mesures et a nommé un groupe consultatif pour examiner la question.
    Ensuite, David Crombie a formulé la structure de gouvernance, à savoir l’Alliance du parc de la Rouge, avec des représentants des municipalités du bassin hydrologique de la Rouge, de l’Organisation de la vallée de la Rouge, de l’Office de protection de la nature de Toronto et de la région, du Zoo de Toronto et des gouvernements provincial et fédéral. Les 10 millions de dollars ont d’abord été transférés à la commission royale, puis ont été transférés à la Fiducie de régénération du secteur riverain, dont je suis membre. C'est à cet endroit que les fonds se trouvent pour le parc.
    L'intérêt sur cette contribution financière du gouvernement fédéral a été d’environ 450 000 $ par année. C'était la principale source de fonds pour le parc de la Rouge durant le mandat de l’Alliance du parc de la Rouge. Je mentionne au passage que de cette somme environ 100 000 $ ont été donnés annuellement à Jim Robb des Amis du bassin de la Rouge.
    Des progrès considérables ont été faits. Par exemple, des milliers d'arbres et de fleurs sauvages ont été plantés; des milieux humides ont été créés; des marais et des espèces en péril ont été protégés; des terres agricoles ont été préservées; et des sentiers ont été aménagés. Entre-temps, sur la scène provinciale, des gouvernements de toute allégeance politique ont désigné de manière non partisane de plus en plus de territoire en vue d'agrandir le parc. David Peterson, Bob Rae, Mike Harris et Dalton McGuinty ont tous collaboré à former le parc que nous connaissons aujourd’hui.
    Au fil des ans, l’Alliance du parc de la Rouge a discuté de la manière d'avoir une gouvernance différente et d'avoir plus de fonds pour protéger le parc. Nous avons étudié toutes les options. Devrions-nous en faire un parc provincial? Devrions-nous en faire un parc municipal? Devrions-nous en faire un parc de conservation? Devrions-nous en faire un parc national?
    Tous les critères... Après de mûres délibérations et des examens exhaustifs de toutes les politiques, nous avons déterminé que la Rouge devrait être un parc national, ce qui donnerait au parc la meilleure protection et lui permettrait de s'étendre du lac Ontario à la moraine d’Oak Ridges.

  (1540)  

    Toutes les municipalités du bassin de la Rouge ainsi que l'Office de protection de la nature de Toronto et de la région ont adopté une motion recommandant au gouvernement fédéral d'établir un parc national. Le gouvernement de l'Ontario a appuyé publiquement cette recommandation avec beaucoup d'enthousiasme. Les citoyens étaient également en faveur de cette proposition qui a été soumise au gouvernement fédéral. Avec l'aide de l'honorable Michael Chong, qui représentait l'Alliance du parc de la Rouge, et sous l'égide de l'honorable Peter Kent et du regretté honorable Jim Flaherty, la création du parc urbain national de la Rouge a été annoncée dans le discours du Trône. On a par la suite alloué d'importantes ressources financières à ce projet, ce qui était tout à fait fantastique. L'entente a été conclue avec le gouvernement provincial pour la cession des terres publiques à Parcs Canada.
    Vous devez maintenant étudier le projet de loi à cet effet. Parcs Canada, une organisation de grande réputation pouvant compter sur des employés très compétents, s'est vu confier la responsabilité de protéger et préserver en permanence les aspects naturels, culturels et agricoles du parc urbain national de la Rouge. J'aimerais traiter tout particulièrement des articles 4 et 6 du projet de loi. J'ai pris connaissance de vos interventions à la Chambre des communes et j'ai été très impressionnée par les arguments que chacun de vous a pu mettre de l'avant. Le libellé de ces deux articles est toutefois très clair et se passe d'explication. Ils permettront au ministre de prendre les décisions qui s'imposent en fonction des fins pour lesquelles le parc est créé et des facteurs à prendre en considération. Si l'on mettait en opposition les différents éléments en décrétant que l'un d'entre eux est prioritaire, comme le préconisait mon camarade, on créerait vraiment une situation de conflit. Je vous demande donc de prendre en considération à la fois les aspects naturels, culturels et agricoles, en incluant dans les aspects culturels les questions autochtones et les enjeux archéologiques. Lorsque j'étais députée, des fouilles effectuées dans le parc ont permis de découvrir une pièce de monnaie française du XVIIe siècle. Ce parc recèle donc un important patrimoine culturel.
    Je me réjouis d'être des vôtres. Vous êtes en quelque sorte en train d'écrire l'histoire en créant le premier parc urbain national au Canada. Je vous invite à visiter le parc et je vous exhorte à adopter ce projet de loi.
    Merci.

  (1545)  

    Merci beaucoup, madame Browes.
    Nous allons maintenant passer à Kim Empringham de la York Region Federation of Agriculture. Vous nous excuserez, madame Empringham, d'avoir mal orthographié votre nom en omettant le g. Nous savons toutefois très bien qui vous êtes et nous vous souhaitons la bienvenue au comité. Nous passerons aux questions des députés après votre déclaration préliminaire.
    Je tiens à vous remercier au nom de notre fédération de me donner l'occasion d'exprimer le point de vue des 700 membres de notre région, y compris les agriculteurs actifs sur le territoire du futur parc urbain national de la Rouge. Nous représentons les agriculteurs de la région dans les dossiers qui influent sur leurs activités et relativement aux décisions qui pourraient façonner leur avenir.
    Nous appuyons le processus de consultation mené par Parcs Canada auprès de plus de 150 groupes d'intérêt et de milliers de Canadiens aux fins de la création du parc urbain national de la Rouge. Nous sommes favorables à l'approche intégrée conciliant patrimoine naturel, agriculture durable, patrimoine culturel et expérience des visiteurs que l'on retrouve à la fois dans le projet de loi C-40 et dans l'ébauche de plan directeur. Nous sommes persuadés que Parcs Canada parviendra à améliorer la santé écologique du parc tout en maintenant la production agricole.
    Deux des principes directeurs établis pour le parc urbain national de la Rouge consistent à maintenir et améliorer la santé écologique et l'intégrité scientifique, et à respecter, intégrer et soutenir l'agriculture durable et d'autres utilisations compatibles des terres.
    Voici ce que dit l'ébauche de plan directeur:
La protection, la conservation et la restauration de ressources naturelles, culturelles et agricoles du parc seront les critères fondamentaux de toutes les décisions de gestion relatives au parc.
    Les quelque 7 500 acres en culture dans le parc urbain national de la Rouge sont des terres de catégorie 1, c'est-à-dire les meilleures pour la production agricole. La catégorie 1 regroupe moins de 1 % des terres agricoles au Canada. Les agriculteurs du parc ont déjà cédé 1 000 acres de terres productives pour des projets de reboisement réalisés dans le contexte de l'ancien parc de la Rouge.
    Étant donné que la population mondiale devrait passer de sept milliards à neuf milliards d'ici 2050, il deviendra plus que jamais primordial de protéger les ressources agricoles et d'appuyer la production alimentaire pour répondre aux besoins du pays et de toute la planète.
    Les terres agricoles doivent être préservées pour continuer à être utilisées de la meilleure façon qui soit: pour l'agriculture et la production alimentaire. Les activités de plantation d'arbres et de remise en état de l'habitat devraient être encouragées dans les secteurs où l'agriculture est impossible, comme les terrains en pente, les rives des cours d'eau, les milieux humides ou les couloirs séparant les champs. Les agriculteurs appuient la protection des milieux naturels, mais il faut s'assurer que la remise en état de notre patrimoine naturel n'empiète pas de façon indue sur les terres cultivées.
    Les fermiers du parc appliquent des plans agro-environnementaux misant sur les pratiques optimales pour assurer la gouvernance continue des terres agricoles qu'ils cultivent depuis des générations.
    Les terres agricoles ont différents usages: production alimentaire, séquestration du carbone, régulation du climat, amélioration de la qualité de l'air, habitat faunique, fonctions hydrologiques, réapprovisionnement de la nappe souterraine et zone tampon pour la protection des composantes du patrimoine naturel.
    Que nous pensions aux 51 000 fermes de la province de l'Ontario, aux 800 de la région de York ou aux 40 du parc urbain national de la Rouge, nous avons affaire à des exploitations agricoles familiales, plutôt qu'à des entreprises industrielles. Plus de 98 % des fermes au Canada appartiennent à une famille et sont exploitées par cette famille. Elles sont transmises de génération en génération, mais il ne faut pas oublier que ces fermes familiales demeurent des entreprises agricoles.
    Le secteur agroalimentaire est le deuxième moteur économique en importance pour la province. Nous avons un mandat primordial à remplir en nourrissant non seulement nos voisins de Markham ou de Toronto, mais les citoyens de toute la province et d'un peu partout dans le monde. L'agriculture est notre raison d'être, mais nous avons à coeur l'intérêt de nos familles et de nos terres.
    Pour que l'exploitation agricole demeure viable dans le parc du point de vue environnemental et économique, il sera important de veiller à ne pas imposer aux agriculteurs une réglementation ou des restrictions indues. Ils ne peuvent pas être désavantagés par rapport à leurs concurrents du reste de la province.
    Les agriculteurs du parc urbain national de la Rouge sont issus de ces mêmes familles qui s'occupent de la terre et produisent des aliments pour les Ontariens depuis 200 ans.
    L'avenir de l'agriculture dans le parc est incertain depuis que des fermes ont été expropriées dans les années 1970. Les agriculteurs qui ont choisi de demeurer sur la ferme familiale après l'expropriation ont dû composer avec des baux d'une année n'offrant aucune certitude pour l'avenir et ne leur permettant pas d'améliorer leurs installations agricoles dont ils pouvaient être évincés du jour au lendemain.

  (1550)  

    Les agriculteurs du parc ne s'enrichissent pas aux dépens des Ontariens. Leurs baux coûtent de 20 $ à 30 $ de plus l'acre que le montant versé pour des terres privées par les agriculteurs à l'extérieur du parc.
    En raison des baux d'une année et de l'avenir incertain, les infrastructures des exploitations agricoles du parc n'ont pas beaucoup été améliorées au fil des 40 dernières années. Les baux à long terme prévus dans l'ébauche de plan directeur permettront aux agriculteurs d'investir dans leurs fermes pour l'avenir du parc.
    On recense 46 cultures agricoles différentes au sein du parc urbain national de la Rouge. Une partie des récoltes sont vendues directement aux consommateurs pendant que le reste exige une forme quelconque de transformation.
    Certains doutent de la pertinence de cultiver du maïs sur des terres publiques, étant donné qu'il ne s'agit pas d'un aliment local et que de grandes quantités de maïs sont cultivées en Ontario. Des 280 millions de boisseaux de maïs récoltés en Ontario cette année, 190 millions ont servi à l'alimentation humaine et animale, et 135 millions à la production d'éthanol pour satisfaire à l'exigence gouvernementale d'inclure 10 % d'éthanol dans l'essence. L'ajout d'éthanol à l'essence permet une réduction nette de 62 % des émissions de gaz à effet de serre par litre par rapport aux produits pétroliers équivalents, mais nous ne produisons pas suffisamment de maïs pour répondre à nos besoins. Nous devrons en importer en 2014 et en 2015 pour que cette importante initiative environnementale puisse aller de l'avant.
    Je veux insister sur le fait que les terres agricoles doivent être préservées dans le parc de telle sorte que les fermiers des générations futures puissent continuer à produire des aliments, des fibres et du carburant pour leurs concitoyens des régions avoisinantes.
    Je veux vous remercier encore une fois de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui.
    Merci beaucoup, madame Empringham.
    Nous passons maintenant au premier tour de questions avec M. Woodworth.
    Merci à nos témoins de leur présence aujourd'hui.
    J'ai différentes questions qui comportent des considérations juridiques et j'aimerais vérifier quelque chose.
    Monsieur Hébert-Daly et madame Woodley, aucun de vous deux n'est avocat, n'est-ce pas? C'est bien ce que je pensais.
    J'ai l'impression que vous n'êtes pas nécessairement au fait du protocole d'entente conclu le 26 janvier 2013 entre le Canada et la province de l'Ontario. Est-ce que je me trompe?
    Nous connaissons ce protocole d'entente.
    Est-ce que vous l'avez lu?
    Nous l'avons effectivement lu.
    Avez-vous lu les dispositions qui exigent que le gouvernement du Canada respecte certaines politiques du gouvernement ontarien?

  (1555)  

    Oui.
    Alors, vous savez de quoi il en retourne.
    J'ai ici un communiqué dont le titre indique que la SNAP et d'autres importants groupes environnementaux se réjouissent de la prise de position de l'Ontario concernant les terres du parc de la Rouge. Vous connaissez ce communiqué?
    Oui.
    L'avez-vous approuvé lorsqu'il a été rendu public?
    Oui, nous l'avons approuvé.
    Je m'intéresse tout particulièrement à la dernière phrase du deuxième paragraphe où l'on indique que le projet de loi contrevient au protocole d'entente de janvier 2013 qui exigeait que les politiques écrites régissant le parc satisfassent aux politiques provinciales ou aillent plus loin encore.
    Êtes-vous d'accord avec cet énoncé?
    Oui, c'est ce que nous croyons.
    De quelles politiques provinciales parlez-vous dans cette affirmation?
    Le plan directeur du parc de la Rouge indique expressément que les particularités naturelles et l'écosystème seront préservés à perpétuité...
    Puis-je vous interrompe un instant?
    Oui.
    Nous avons vraiment très peu de temps et ce n'est pas tant le contenu du plan directeur du parc de la Rouge qui m'intéresse, mais bien... Je crois comprendre que vous estimez que le plan directeur du parc de la Rouge renferme une politique à laquelle le projet de loi contrevient. Est-ce bien cela?
    Oui. Il y a le Plan de la ceinture de verdure et la référence au plan directeur.
    Rien d'autre?
    Rien d'autre dans le sens de...?
    Y a-t-il d'autres politiques provinciales ou seulement celle-là?
    C'est assurément surtout cette politique-là qui nous préoccupe. Cela nous ramène au débat soutenu concernant l'intégrité écologique qui fait partie intégrante de la Loi sur les parcs provinciaux et au fait qu'il n'y a bien sûr pas de parc provincial dans le contexte qui nous intéresse. On fait donc ici référence à la loi provinciale.
    Ne convenez-vous cependant pas avec moi que ce protocole d'entente ne prévoit aucunement que le gouvernement du Canada est tenu de se conformer à la loi ontarienne sur les parcs provinciaux?
    La loi ontarienne sur les parcs provinciaux? Non, absolument pas.
    En fait, le protocole d'entente précise bien que le gouvernement du Canada est tenu de se conformer uniquement aux politiques prévues dans le Plan de la ceinture de verdure de 2005, le Plan de conservation de la Moraine Oak Ridges, le Plan de croissance de la région élargie du Golden Horseshoe de 2006, et le Grand projet. Les autres politiques provinciales n'ont rien à voir là-dedans. Est-ce bien cela?
    C'est exact.
    Très bien.
    Ce protocole d'entente indique également que ce sont les politiques écrites de Parcs Canada concernant la création, la gestion et l'administration du parc qui doivent satisfaire aux politiques provinciales ou aller plus loin encore dans le cadre des quatre ou cinq initiatives que je viens de mentionner. Vous êtes d'accord?
    C'est bien cela.
    Ai-je raison de dire que les politiques de Parcs Canada sont contenues dans ce plan directeur?
    C'est exact, dans ce plan qui n'a pas encore été adopté.
    Très bien. Il n'a pas encore été adopté?
    Les discussions et les consultations publiques se poursuivent.
    Je suppose que nous pouvons donc affirmer que Parcs Canada n'a pas encore de politiques écrites qui pourraient aller à l'encontre des politiques provinciales?
    Nous sommes ici pour parler uniquement du projet de loi.
    Oui, mais ne diriez-vous pas que le protocole d'entente vise les politiques écrites de Parcs Canada pour la création, la gestion et l'administration du parc et ne traite pas du projet de loi?
    C'est exact, mais il va de soi que nos observations concernent le projet de loi dans sa forme actuelle.
    D'accord, je ne dis pas le contraire. Je n'arrive toutefois pas à comprendre comment on peut affirmer que le gouvernement du Canada n'a pas respecté le protocole d'entente. Je pourrais même vous demander si vous croyez que l'une ou l'autre de ces politiques provisoires va à l'encontre des différentes dispositions de ces cinq plans d'aménagement du territoire auquel l'entente fait référence. Y a-t-il un seul élément que vous pourriez me souligner?
    Je vais demander à Alison de vous répondre.
    Nous examinons la situation dans une perspective générale afin de déterminer, par exemple, si le parc répond à la définition d'aire protégée en vertu des normes internationales qui exigent que la conservation soit désignée comme étant la priorité principale, ou tout au moins l'une des priorités. Tant dans le plan directeur, que nous avons minutieusement examiné, que dans le projet de loi, nous n'avons pas trouvé d'indication claire à cet effet, alors même que l'énoncé de vision du plan directeur du parc de la Rouge précise très clairement que la conservation est une priorité. C'est donc une distinction que nous avons pu établir.
    Malheureusement, vous avez plutôt dit aux gens que le gouvernement du Canada n'avait pas respecté son protocole d'entente avec la province, alors qu'en fait les politiques écrites auxquelles s'applique ce protocole d'entente ne sont encore, tout au moins pour l'instant, que des ébauches. De plus, vous n'avez pas été en mesure de me dire laquelle de ces politiques contrevenait à une politique provinciale énoncée dans ces cinq plans d'aménagement du territoire auxquels le protocole d'entente fait référence.
    Tout cela est bien beau, mais j'aimerais savoir s'il y a effectivement une politique écrite de Parcs Canada qui n'est pas équivalente ou supérieure à celles prévues dans ces cinq plans. Soit dit en passant, j'ai pris connaissance des cinq plans en question et je peux vous assurer qu'on n'y trouve aucune politique concernant l'intégrité écologique. Il y a seulement des objectifs et des énoncés de vision en la matière qui sont assortis de politiques visant expressément leur mise en oeuvre.

  (1600)  

    Le Plan de la ceinture de verdure indique clairement que la gestion de la zone où le parc de la Rouge sera créé sera guidée par le plan directeur de la Rouge au sud de Steeles, alors que c'est le plan directeur pour le nord de la Rouge qui prévaudra au nord de Steeles. C'est prévu dans le Plan de la ceinture de verdure et incorporé par renvoi. C'est donc le plan directeur de la Rouge qui renferme les politiques ontariennes qui s'appliquent directement à ces terres.
    Merci, monsieur Woodworth. Désolé, mais vous n'avez plus de temps.
    Nous passons à Mme Leslie pour les sept prochaines minutes.
    Merci à tous non seulement pour votre comparution d'aujourd'hui, mais pour toutes ces années d'efforts dans ce dossier. Ce n'est pas un projet de loi facile, et ce n'est pas non plus un parc facile à créer. Je veux donc vous féliciter pour le travail que vous avez accompli en coulisse depuis des années. Il faut espérer que nous puissions tirer de tout cela un projet de loi efficace et un magnifique parc urbain.
    Je sais que vous avez tous suivi les allocutions prononcées en Chambre et que vous savez donc tous très bien où chacun se situe et quelles sont les principales préoccupations.
    J'aimerais d'abord poser une question aux gens de la SNAP avant de vous demander ce que vous en pensez, madame Empringham. Cela concerne les terres agricoles.
    M. Calandra a cité un exemple pertinent, celui du parc commémoratif Bob Hunter où la restauration a été considérée comme une remise à l'état naturel. La définition exacte de restauration soulève certaines craintes. Je peux bien croire que cela n'inclut pas la remise à l'état naturel, mais c'est simplement mon opinion à moi, et ce n'est pas ce que la loi indique.
    M. Hébert-Daly, vous avez soutenu qu'il faudrait prévoir dans la loi un mandat clair pour que l'on travaille avec les agriculteurs. J'ai beaucoup réfléchi à la manière dont ce mandat pourrait s'articuler, et j'ai noté quelques idées qui traitent notamment de la nécessité de reconnaître dans toute la mesure du possible le contexte agricole et urbain du parc, ou de l'obligation de travailler avec les agriculteurs et de tenir compte de la présence d'une autoroute et d'exploitations agricoles.
    J'aimerais d'abord que les gens de la SNAP me disent ce qu'ils pensent de cette idée que j'aime bien.
    Je vous laisse la parole.
    Vous soulevez un argument tout à fait valable. Je pense que nous nous retrouvons dans une situation où, à tort ou à raison, il y a une angoisse générale quant au risque que d'autres fermes soient expropriées.

  (1605)  

    Oui.
    J'estime que c'est un contexte de travail très pénible pour nous.
     Je continue de maintenir que les agriculteurs ont très bien réussi à nous protéger contre la pire des menaces, à savoir l'étalement urbain. N'eut été de leur travail, je ne vois pas comment on pourrait songer aujourd'hui à créer ce parc.
    Vous avez tout à fait raison.
    À mon avis, c'est un élément très important.
    Le projet de loi ne vise pas, et ne devrait pas viser, un changement dans l'utilisation des terres. Nous ne voulons en aucun cas que les fermes soient réduites ou transformées. Ce que nous souhaitons vraiment, c'est que les agriculteurs, Parcs Canada et les acteurs locaux puissent s'asseoir et discuter ensemble des façons de gérer le paysage pour que la conservation de la nature et la santé des fermes puissent aller de pair.
    Quand on parle de rétablissement, c'est habituellement un mot clé.
     C'est exact.
    C'est habituellement un mot clé, car les gens pensent que cela veut dire planter des arbres et laisser la nature reprendre ses droits sur les terres agricoles, alors que nous disons depuis le début que ce n'est absolument pas notre point de vue. Comme nous l'avons mentionné, le paysage subit la pression des infrastructures tout autour — l'autoroute, le réseau d'égouts, etc. —, et il faut absolument s'assurer que le mot rétablissement dans ce contexte signifie garder la nature en santé dans le parc.
    C'est exact.
    En donnant un mandat pour s'assurer que les problèmes ne seront pas tout simplement ignorés, on demande en fait qu'il y ait une tribune pour en discuter.
    Le plan de gestion, même dans sa forme actuelle, contient une très bonne disposition qui parle de mettre en place un comité de collaboration pour trouver des solutions à ce sujet. Je tiens à préciser que nous n'avons, en aucun cas, recommandé un changement dans l'utilisation des terres agricoles.
    Merci.
    Madame Empringham, si le projet de loi comportait une disposition visant à privilégier la conservation, suivant ce qui a été mentionné ici et au cours des débats, s'il y avait une façon de le faire, où il est clairement indiqué lorsque c'est possible — et ce n'est sans doute pas encore ici les bons mots —, mais dans la mesure du possible, étant donné qu'il s'agit de fermes en milieu urbain, s'il était clair pour les agriculteurs que... Vous avez dit que les terres agricoles doivent être préservées. C'est en partie ce que nous faisons ici. Pensez-vous que les agriculteurs seraient à l'aise avec cette idée?
    La préservation des terres agricoles veut dire qu'elles continuent d'être cultivées. Mettre en place des projets de conservation qui auraient pour effet de réduire l'espace cultivé est une chose, mais s'il s'agit simplement de demander aux agriculteurs d'utiliser des pratiques ou des méthodes de gestion exemplaires qui garantissent le même niveau de production, je ne crois pas que cela pose problème.
    À notre avis, on s'engage sur une pente glissante lorsqu'on veut privilégier la conservation au détriment de l'agriculture.
    Tout à fait.
    Nous craignons de perdre graduellement nos terres avec le temps. Quand on n'accorde pas la même importance aux deux éléments, il est difficile pour les agriculteurs et pour l'agriculture de se maintenir et de ne pas être désavantagés.
    Merci. Il me reste environ une minute et j'ai une autre question à poser.
    Madame Browes, y a-t-il des sonnettes d'alarme à tirer d'après vous?
    J'ai grandi sur une ferme et je pense qu'il est très important d'avoir des terres agricoles de cette qualité si près d'un centre urbain. De nombreux maraîchers s'y trouvent. Nous allons cueillir des fraises, des framboises et des tomates. C'est une des particularités de la Rouge.
    Je pense au grand nombre d'enfants qui vivent en ville et qui n'ont jamais vu une ferme. C'est merveilleux pour les enfants de pouvoir aller dans une grange ou de voir un concombre sur une vigne. C'est un aspect très excitant du parc.
    De pouvoir aller dans une ferme et un parc.
    C'est exact.
    Très bien. Votre temps est écoulé.
    Merci, madame Leslie.
    Nous passons maintenant à M. Calandra. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci à tous nos témoins de leur présence.
    Madame Empringham, je vais commencer par vous. Dans une lettre datée du 2 septembre adressée à la ministre Aglukkaq, le ministre Duguid mentionne:
J'ai entendu beaucoup d'intéressés... dont des membres des groupes les Amis du bassin de la rivière Rouge, Environmental Defence et Ontario Nature au sujet du projet de loi C-40 et du plan provisoire de gestion du parc diffusé par le gouvernement fédéral pour consultation publique.
    Il poursuit au sujet de la décision de ne pas transférer de terres, et il dit que c'est la conclusion à laquelle il — le ministre Duguid — est arrivé après en avoir discuté avec les intéressés, les groupes citoyens et ses collaborateurs.
    Quels commentaires avez-vous faits au ministre Duguid avant l'envoi de cette lettre?
    Aucun.
    Vous ne lui avez rien dit, donc les agriculteurs...
    Il ne nous a jamais consultés. À ma connaissance, il n'a jamais consulté la fédération ou les agriculteurs dans le parc.
    Vous faites partie de la York Region Federation of Agriculture. Combien d'entreprises agricoles représentez-vous environ?
    Dans la région, 700.
    C'est donc 700 entreprises agricoles.
     J'ai une copie de la lettre que la fédération a envoyée au ministre Duguid par la suite, le 5 septembre, qui dit, « Nous vous prions de ne pas empêcher le transfert des terres provinciales à Parcs Canada ».
    Est-ce exact?

  (1610)  

    C'est exact.
    Il faut que les membres soient sur la même longueur d'onde.
    On a rappelé à maintes reprises qu'il est souvent arrivé que les agriculteurs se sont fait dire qu'ils n'avaient rien à craindre: vous n'aurez jamais rien à craindre, tout se passera très bien, et les erreurs du passé ne se répéteront pas.
    Dans la lettre que j'ai, le ministre Duguid parle des trois organisations suivantes: Environmental Defence, Ontario Nature, et les Amis du bassin de la rivière Rouge. Au point numéro un, on parle: « de respecter, de renforcer et d'appliquer la vision, le but et les objectifs des plans approuvés du Parc de la Rouge en 1994 et 2001 ».
    Je vais vous lire quelque chose.
    Le plan de 1994 mentionne: « La protection des valeurs du patrimoine culturel du parc passe par le maintien des activités agricoles ». Tout va bien jusqu'ici. Puis on ajoute: « comme toutes les activités doivent répondre aux objectifs du parc, la priorité étant accordée à la protection et au rétablissement du patrimoine naturel, on recommande de réduire la portion réservée aux terres agricoles afin d'atteindre les objectifs de rétablissement à l'état naturel du parc ».
    C'est dans le plan de 1994, mentionné par les trois groupes, et qu'on mentionne constamment. Le ministre Duguid le mentionne lui aussi.
    Est-ce une des raisons pour lesquelles les agriculteurs craignent qu'on empiète sur leurs terres? Ai-je raison?
    C'est exact.
    Merci.
    Je vais maintenant vous lire une autre citation. Je veux que mes collègues puissent bien comprendre les préoccupations que peuvent avoir les agriculteurs dans la région.
    Voici une autre citation du directeur général des Amis du bassin de la rivière Rouge, Jim Robb, provenant d'un article du Toronto Star paru le 25 novembre 2012:
Les agriculteurs occupent des parties de la vallée de la Rouge depuis le XIXe siècle. Selon M. Robb, toutefois, les fermes grossissent et les activités s'intensifient et cela risque de nuire au rétablissement de la Rouge à son état naturel.

« Ce n'est pas un parc, mais une ferme industrielle », a déclaré M. Robb. « Les intérêts d'un petit nombre... priment l'intérêt public et celui de l'environnement ».
    Que pensent les agriculteurs lorsqu'ils entendent une citation comme celle-là, c'est-à-dire que vous n'êtes rien d'autre qu'une bande d'agriculteurs industriels dont on privilégie les intérêts au détriment de ceux de millions de personnes? Que pensent les agriculteurs de ce genre de citation?
    Cela nous dérange.
    Ces millions de personnes mangent tous les jours aussi. Pour ce qui est des commentaires au sujet des fermes industrielles, certains pensent que parce que les tracteurs sont plus gros, l'équipement est plus gros... Pour réaliser des économies d'échelle, il faut grossir, comme bien d'autres dans le monde aujourd'hui. Pour certaines cultures, nous devons cultiver une grande superficie pour payer les intrants et l'équipement, et rentabiliser le tout.
    Prenons l'équipement, par exemple. Dans bien des cas, plus c'est gros, mieux c'est. Pour des raisons de conservation, notamment, les gros tracteurs sont mieux que les petits, parce que le poids est réparti sur une plus grande surface, il y a moins de compaction, et cela donne un sol en bien meilleure santé.
    Sans vouloir cibler personne, le député de Scarborough—Guildwood a mentionné ce qui suit à mon sujet: « Bien franchement, je pense que le député — moi — déforme les craintes des agriculteurs. Bon nombre de partisans du parc au sud de Steeles sont, en fait, d'ardents défenseurs des agriculteurs au nord de Steeles ».
    Est-ce que je me trompe quand je dis que les agriculteurs ont peur de perdre leurs terres?
    Non.
    Non.
    J'aimerais vous poser une autre question, si je peux me permettre.
    Le député libéral de Trinity—Spadina, Adam Vaughan, a posé la question suivante:
Le député pourrait-il me dire s'il a eu connaissance d'un plan quelconque visant à exproprier les agriculteurs en question?
    J'ai lu le plan d'aménagement du parc de la Rouge de 1994, dans lequel on dit clairement qu'on veut réduire l'exploitation agricole. Vous connaissez sans doute des gens qui ont été touchés par la décision de Bob Hunter.
    Mme Kim Empringham : Oui.
    M. Paul Calandra : Lors de cette décision, on avait dit aux agriculteurs qu'ils ne seraient pas touchés par la création du parc. On est venu vous voir par la suite pour vous dire que « tout a changé », et c'est pourquoi les agriculteurs ont été expropriés.
    Croyez-vous que l'on pourrait vous dire encore une fois que « tout a changé  » si vous n'êtes pas précisément protégés comme le fait le projet de loi?

  (1615)  

    Nous avons vu les terres agricoles au sud de Steeles disparaître; 10 % seulement des fermes patrimoniales ont été conservées. Quand les agriculteurs ont commencé à recevoir des avis d'annulation de bail pour la création du parc Bob Hunter, nous nous sommes impliqués beaucoup plus. Les agriculteurs craignent assurément qu'on trouve d'autres raisons pour aller de l'avant et leur faire perdre leurs baux.
    C'est maintenant au tour de M. McKay. Vous avez sept minutes.
    Je vous remercie tous de votre participation.
    J'aimerais mettre un peu un frein ici à cette fausse bataille d'arguments pour voir si nous pouvons en venir à avoir une bonne compréhension des arguments des deux côtés de ce qui est essentiellement un faux débat. Je pense que les agriculteurs doivent, essentiellement, se lever pour dire qu'ils sont parmi les plus grands écologistes du monde. Si je ne m'abuse, les écologistes et les environnementalistes ont tous les deux dit que c'était le cas. C'est ce que je retiens de la fausse bataille d'arguments qui est en cours et qui ne nous mène nulle part.
    Je pense que c'est l'article 6 qui est le noeud du problème. Le noeud du problème vient du fait que la ministre dit qu'elle doit seulement « prendre en considération », et il y a deux ou trois autres choses, « la protection des paysages culturels et des écosystèmes naturels du parc », etc. Il y a une différence entre cela et ce que dit normalement la disposition sur l'intégrité écologique dans un projet de loi sur la création d'un parc, soit que le ministre établit, dans les cinq ans, un ensemble d'objectifs et d'indicateurs relatifs à l'intégrité écologique, et des dispositions visant le rétablissement et la protection des ressources, les modalités d'utilisation du parc par les visiteurs, le zonage, la sensibilisation du public et l'évaluation du rendement, et qu'il dépose le tout au Parlement.
    J'aurais pensé qu'une disposition de cette nature serait aussi importante pour les agriculteurs que pour les écologistes. Si j'étais agriculteur, j'aimerais des baux plus stables, des directives sur la façon de gérer les cours d'eau, les terres, etc., tout ce que vous avez décrit, madame Empringham, et il me semble que j'aimerais savoir qu'aucun ministre ne pourra modifier unilatéralement le zonage, les endroits ouverts au public, la sensibilisation, et ne pourra modifier mon utilisation et ma jouissance des terres. Si on ne peut pas intégrer cette disposition, et le gouvernement a martelé qu'elle ne le sera pas, qu'est-ce qui pourrait rassurer les écologistes et les agriculteurs pour leur confirmer qu'ils sont d'accord et qu'ils sachent, et que tout le monde sache, quel cadre sera utilisé dans le plan de gestion qui sera élaboré?
    Ma question s'adresse à vous d'abord, monsieur Hébert-Daly, puis à vous, madame Empringham.
    Je pense en avoir parlé un peu dans mon exposé. Il y a essentiellement deux éléments. L'un d'entre eux est comment définir la façon de maximiser la santé des écosystèmes? Je pense qu'il faut se poser la question. Nous sommes tous d'accord pour le faire, alors la question est comment procède-t-on? Selon nous, il s'agit essentiellement de savoir comment maintenir... Si on imagine l'intégrité écologique comme...
    Le modèle par excellence, oui.
    ... la ligne de fond, si on veut, c'est ce que tout le monde veut atteindre. Le fait de maximiser la santé des écosystèmes, pour nous, cela veut dire faire un pas en avant, sans qu'il y ait nécessairement un but à atteindre à un moment précis. C'est basé sur les stimulants. C'est faire un pas dans cette direction sans qu'il soit nécessaire d'atteindre l'intégrité écologique. Pour nous, la définition est un élément clé, et l'établissement des priorités est aussi un élément clé. C'est un filtre à travers lequel nous examinons les décisions de gestion. Je ne pense pas qu'il faille y voir, et je ne pense certainement pas qu'il faille l'interpréter de cette façon, un obstacle à l'utilisation et à la jouissance des terres ou des sites patrimoniaux culturels ou...

  (1620)  

    Permettez-moi de vous arrêter ici, car je veux entendre les commentaires de Mme Empringham sur ces deux points, soit la maximisation de la santé écologique et les priorités.
    Quel est votre point de vue?
    En ce qui a trait aux priorités, nous voulons être sur un pied d'égalité avec l'environnement et la protection patrimoniale.
    Désolée, quel est l'autre point?
    L'autre point est la maximisation de la santé écologique.
    Les agriculteurs utilisent déjà des plans environnementaux. Ils utilisent déjà des pratiques de gestion exemplaires. Lors des consultations initiales avec Parcs Canada, nous leur avons proposé de les utiliser comme norme afin que les agriculteurs sachent ce qu'on attend d'eux.
     Si le gouvernement proposait un genre de définition qui établissait vos priorités, ses priorités, pour que les normes soient relativement similaires, il me semble qu'à partir de là, vous cherchez tous les deux à maximiser la santé écologique de l'élément en question. Est-ce que je me trompe?
    Madame Browes.
    Si elles sont sur un pied d'égalité, si on les considère comme une seule et même norme pour la santé des écosystèmes, il n'est pas nécessaire de les classer en ordre de priorité.
    Un des éléments qui revient dans les débats est l'intégrité écologique. Quand on pense au nombre d'interventions humaines dans la vallée de la Rouge, il est impossible d'atteindre l'intégrité écologique. Je parlais l'autre jour de... eh bien, peut-être que les marais de la Rouge près du lac Ontario sont une zone d'intégrité écologique, mais ce n'est pas le cas.
    Ce n'est pas le cas, non.
    Ce n'est pas le cas, parce que dans les années 1800, les chemins de fer ont installé une grande berme à cet endroit et les marais de la Rouge sont remplis de vase. Si on voulait rétablir l'intégrité écologique des marais, il faudrait se débarrasser du chemin de fer.
    Mais on ne parle pas d'intégrité écologique. Même les gens de la SNAP disent que ce n'est ni possible, ni faisable concrètement.
    Merci, monsieur McKay.
    Nous passons maintenant à...
    Je voulais simplement répondre à certains points soulevés dans les débats à la Chambre.
    Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Sitsabaiesan.
    Merci à tous de votre présence. J'ai cinq minutes et une foule de questions.
    Madame Empringham, vous avez dit que les agriculteurs utilisent déjà des pratiques de gestion exemplaires. Vous avez dit aussi qu'ils utilisent aussi actuellement des plans environnementaux. Qu'est-ce que cela signifie?
    Un plan environnemental en agriculture est un plan qui a été élaboré par des agriculteurs. C'est un plan dont on prend connaissance dans le cadre d'un atelier, où on nous fournit un cahier qui contient... C'est un plan qui porte essentiellement sur la salubrité de l'eau et de l'environnement. Il nous faut examiner notre propre exploitation agricole en fonction des critères énoncés dans le cahier. Cela nous permet de déterminer s'il y a des aspects que nous devons améliorer. C'est un plan qui sert à nous guider.
    Où peut-on le trouver? Peut-on y avoir accès en ligne?
    Oui, on peut le consulter sur le site de l'Association pour l'amélioration des sols et des récoltes de l'Ontario, qui participe à la gestion du programme.
    D'accord, nous le consulterons sans doute. Il est clair qu'il s'agit d'une initiative importante et...
    Aussi, le ministère ontarien de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Affaires rurales a publié un ouvrage sur les pratiques de gestion exemplaires, que vous pouvez consulter.
    D'accord.
    Je sais que la durabilité est un enjeu. Acheter et manger local est important pour moi et ce l'est aussi pour le NPD. Je vais vous poser deux questions en même temps.
    Je ne veux pas m'en prendre aux agriculteurs, mais je souhaite qu'ils adoptent davantage des pratiques d'agriculture durable. Si vous me dites que c'est ce qu'ils font déjà, alors c'est fantastique. Ma question est la suivante: dans quelle mesure les pesticides et les engrais utilisés dans les exploitations agricoles seront-ils employés dans le parc? J'aimerais aussi savoir comment faire en sorte qu'il y ait davantage d'agriculture communautaire ou locale afin que, comme l'a expliqué Mme Browes, les enfants et les personnes qui vivent dans la jungle urbaine soient mis en contact avec l'agriculture et qu'ils puissent participer à une initiative d'agriculture communautaire?

  (1625)  

    Pour ce qui est des pesticides et des engrais, ils sont utilisés conformément à la réglementation. Avant de pouvoir acheter des pesticides, les agriculteurs doivent suivre un cours afin d'apprendre comment les utiliser correctement. La lutte antiparasitaire intégrée signifie qu'on détermine quels parasites sont présents de façon régulière et qu'on décide du moment où il faut employer ces produits et de la quantité à utiliser.
    Les pesticides et les engrais sont utilisés conformément aux règles...
    ... oui, conformément à la réglementation.
    D'accord.
    Pour ce qui est de faire l'expérience de l'agriculture, je peux vous dire que certaines exploitations agricoles dans le parc offrent maintenant l'autocueillette. Si vous songez davantage à des fermes ayant un objectif éducatif, je peux vous dire que Parcs Canada a proposé dans le plan de gestion l'aménagement d'une ferme de démonstration. L'âge moyen des agriculteurs dans la région de York est de 58 ans. Avec le temps, certains prendront leur retraite, et il sera alors facile de trouver...
    Pardonnez-moi, madame Empringham, mais je vais devoir vous interrompre, car il me reste moins de deux minutes.
    Monsieur Hébert-Daly, vous avez dit que nous avons des obligations internationales à respecter en matière de conservation et vous avez expliqué que la conservation devrait être une priorité et que, sans elle, ce parc n'existerait pas.
    Qu'est-ce que cela signifie? Quelles sont ces normes internationales que nous devons respecter pour ce parc? Pourquoi est-ce important?
    L'UICN, l'Union internationale pour la conservation de la nature, est l'organisme qui établit des normes internationales pour ce qui est reconnu comme une aire protégée. La définition de l'UICN d'une aire protégée est la suivante:
un espace géographique clairement défini, reconnu, consacré et géré, par tout moyen efficace, juridique ou autre, afin d'assurer à long terme la conservation de la nature ainsi que les services écosystémiques et les valeurs culturelles qui lui sont associés.
    C'est la définition qu'elle donne. Elle précise également que seules les aires pour lesquelles le principal objectif est la conservation de la nature peuvent être considérées comme des aires protégées. La définition de l'UICN procède d'une priorité. À notre avis, il est important et essentiel que les décisions en matière de gestion soient prises d'abord et avant tout en fonction de la conservation.
    Cet objectif n'entre pas nécessairement en conflit avec d'autres. En effet, la loi prévoit des objectifs en ce qui concerne les visiteurs, l'agriculture, etc. Elle précise que d'autres objectifs peuvent être poursuivis en même temps, mais que, s'il y a un conflit, la conservation de la nature est la priorité. C'est un élément qui doit compter dans toutes les décisions.
    Je vous remercie beaucoup. Notre temps est écoulé.
    Je tiens à remercier chacun des témoins d'être venu aujourd'hui.
    Notre première heure est terminée. Nous allons faire une pause de trois minutes avant de reprendre pour entendre nos prochains témoins.
    Je vous remercie d'avoir pris le temps de comparaître devant nous et de nous avoir présenté vos exposés, que nous avons trouvé très utiles.

  (1625)  


  (1635)  

    Il y a eu un peu de confusion au sujet des témoins. Nous en attendions trois, mais nous en avons deux.
    Nous étions censés accueillir Tim Gray, de l'organisme Protection environnementale du Canada, mais il n'est pas là. Il sera remplacé par Caroline Schultz, d'Ontario Nature. Nous recevons aussi Mike Whittamore, de Whittamore Farm. Nous vous souhaitons la bienvenue.
    Nous allons procéder dans l'ordre qui a été établi.
    Nous allons donc commencer avec Caroline Schultz. Vous disposez de sept minutes pour faire votre exposé.
    Soyez la bienvenue.
    Je tiens à remercier les membres du comité de me donner l'occasion de leur faire part de nos recommandations au sujet du projet de loi C-40
     Comme on l'a dit, je vais parler au nom d'Ontario Nature et de Protection environnementale du Canada. Je m'appelle Caroline Schultz et je suis directrice générale d'Ontario Nature.
    Ontario Nature est un organisme de bienfaisance qui s'emploie à protéger les espèces et les espaces sauvages au moyen de la conservation, de l'éducation et de la mobilisation publique. Nous représentons plus de 30 000 membres et militants ainsi que 154 groupes membres dans l'ensemble de la province de l'Ontario.
    Depuis que notre organisme a été fondé sous le nom de Federation of Ontario Naturalists en 1931, Ontario Nature est le porte-parole des enjeux liés à la nature dans la province, s'emploie à protéger et à rétablir les habitats naturels et à mettre les personnes et les communautés en contact avec la nature. En 84 années d'existence, Ontario Nature a largement contribué à l'établissement de la plupart des aires protégées de la province.
    Ontario Nature et Protection environnementale du Canada appuient la création du parc urbain national de la Rouge. Le parc offre d'immenses possibilités de préserver la biodiversité, tout en protégeant la production locale d'aliments sains et en reliant les citadins de la région la plus densément peuplée du Canada au réseau des parcs nationaux.
    Toutefois, si le parc urbain national de la Rouge doit réaliser son potentiel, nous estimons que le projet de loi C-40 doit être modifié pour qu'il soit clair qu'on accorde la priorité à l'intégrité écologique.
    Je vais vous présenter nos recommandations.
    Premièrement, nous demandons que l'intégrité écologique soit la priorité absolue du ministre dans la gestion du parc. Le projet de loi C-40 assure nettement moins la protection de l'environnement naturel que la Loi sur les parcs nationaux du Canada ou la Loi sur les parcs provinciaux et les réserves de conservation de l'Ontario. Dans ces deux lois, l'intégrité écologique doit être la priorité absolue du ministre lorsqu'il prend des décisions sur la gestion du parc.
    Cela contraste avec le projet de loi C-40, qui ne mentionne jamais l'intégrité écologique, notion qui fait partie intégrante de l'objectif même des deux autres lois. Le projet de loi n'exige pas non plus que le parc soit géré de manière à protéger la faune et les écosystèmes naturels. Il laisse plutôt cet élément crucial de la gestion du parc à l'entière discrétion du ministre. Autrement dit, le ministre ne doit tenir compte que de la protection des écosystèmes naturels dans la gestion du parc.
    L'article 6 devrait être modifié pour exiger et garantir que la protection de l'environnement naturel soit une priorité de la gestion du parc.
    Deuxièmement, nous croyons que l'annexe doit être révisée de manière à inclure dans le parc environ 48 kilomètres carrés de terres domaniales de compétence fédérale. La vallée de la Rouge relie le lac Ontario à la moraine d'Oak Ridges. Les terres décrites dans l'annexe n'assureront cependant pas la protection de cet important couloir écologique. Il existe un mur de développement urbain autour de Stouffville qui isole effectivement la moraine d'Oak Ridges du lac Ontario.
    L'annexe exclut environ 48 kilomètres de terres domaniales qui jouxtent immédiatement le parc envisagé. En incluant ces terres attenantes dans le parc, on garantira cet important couloir écologique entre le lac Ontario et la moraine d'Oak Ridges une fois que les terres provinciales auront été cédées. Le parc doublera pratiquement de superficie, ce qui rend beaucoup plus vraisemblable la préservation de la biodiversité et des services écosystémiques.
    Troisièmement, nous croyons qu'il faut renforcer les exigences du plan de gestion en incluant explicitement des précisions sur les objectifs écologiques, les indicateurs, la surveillance et l'établissement de rapports. L'article 9 du projet de loi C-40 expose en détail ce qu'il y a lieu d'inclure dans un plan de gestion du parc, mais il manque des précisions sur les éléments écologiques à y inclure. Nous recommandons de modifier le paragraphe 9(1) qui stipule que le plan de gestion doit comporter des objectifs et des indicateurs sur l'intégrité écologique, des dispositions sur la surveillance écologique et l'établissement de rapports et l'évaluation du rendement.
    Pour ce qui est de l'évaluation, nous recommandons par ailleurs qu'un rapport sur l'état du parc soit déposé devant le Parlement tous les cinq ans.
    Dans une optique scientifique, la superficie et la connectivité du paysage sont des paramètres cruciaux dans la conception des zones protégées. C'est pourquoi nous recommandons que ces terres fédérales attenantes soient comprises dans l'annexe.
    Quatrièmement, nous recommandons d'ajouter des dispositions pour veiller à ce que les effets écologiques néfastes éventuels soient dûment pris en considération lorsque l'on prend des décisions sur l'aménagement ou l'entretien d'infrastructures.
    L'article 12 énonce les pouvoirs du surintendant du parc en ce qui concerne le dégagement des terres en vue de l'aménagement et de l'entretien d'infrastructures, alors que l'article 16 énonce le droit de céder des terres dans les limites du parc en vue de l'aménagement ou de l'entretien d'infrastructures. Ces activités risquent d'avoir des effets délétères sur la faune, les écosystèmes et l'intégrité écologique du parc. Pour s'assurer que ces problèmes sont dûment pris en considération, nous proposons que chacun de ces articles soit révisé pour englober des exigences en vue de songer à d'autres solutions raisonnables et pour minimiser et si possible éviter les incidences sur l'environnement.
    Nous tenons à préciser que nous appuyons la limite de 200 hectares pour les cessions, telle qu'elle est actuellement exposée dans le projet de loi.
    Cinquièmement, nous recommandons de renforcer le préambule du projet de loi. Nous recommandons de le modifier de manière à ce que, premièrement, il prévoie explicitement le rétablissement du patrimoine naturel, et, deuxièmement, il évite le terme vague et non défini de « paysages divers ». Nous estimons que le parc urbain national de la Rouge offre l'occasion exceptionnelle de protéger et de célébrer la nature et notre patrimoine agricole. La nature et l'agriculture sont expressément mentionnées à l'article 4, alors que « paysages divers » ne fait que distraire de la clarté de cet objectif.
    Je tiens à vous remercier de m'avoir écoutée et permis de vous faire part des recommandations d'Ontario Nature et de Protection environnementale du Canada. Je serai ravie de répondre à vos questions.

  (1640)  

    Merci, madame Schultz.
    Je vais donner la parole à Mike Whittamore pour son exposé, et ensuite, nous passerons aux questions.
     Je remercie les membres du comité de me donner l'occasion de parler aujourd'hui de l'importance de l'agriculture dans le parc urbain national de la Rouge.
    On a dit que les agriculteurs du parc de la Rouge exploitent des fermes industrielles pour cultiver de façon intensive le maïs et qu'ils polluent la rivière Rouge avec des eaux de ruissellement contenant des pesticides et du phosphore. Ce genre de déclaration n'est absolument pas fondée. Elle est toutefois représentative des adjectifs employés et des opinions et des idées formulées au sujet du parc au Parlement durant le débat qui a eu lieu à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-40.
    J'ai lu tous les comptes rendus. Je peux vous dire que les agriculteurs, y compris ceux de ma collectivité, sont dégoûtés, furieux, mais surtout tristes que des gens aient une si mauvaise opinion d'eux.
    C'est une opinion qui se construit depuis une vingtaine d'années. Tout a commencé après la création du parc en 1994. Pendant toutes les consultations qui ont eu lieu au cours des 20 dernières années, les points de vue et les préoccupations des agriculteurs n'ont pas été pris en compte. On nous a dit que nous étions seulement des locataires en conflit d'intérêts. Cette description de l'agriculture a acquis une vie propre et des environnementalistes ont mis de l'huile sur le feu.
    On ne compte plus les articles et les éditoriaux publiés dans la presse torontoise au cours des 20 dernières années qui contiennent ces mêmes adjectifs, points de vue et idées. Cela visait à justifier le reboisement de larges portions de terres agricoles productives afin de créer un habitat forestier mixte et carolinien reliant le lac Ontario à la moraine d'Oak Ridges.
    Jim Robb, directeur exécutif de Friends of the Rouge Watershed, a confirmé, lors d'une rencontre en septembre avec le ministre provincial de l'Infrastructure, qu'il faudrait reboiser encore 1 700 acres des terres agricoles de catégorie 1 pour atteindre les objectifs du plan de gestion qu'on appelle le Rouge North Management Plan. Ce nombre d'acres s'ajoute aux 1 000 acres de terres agricoles de grande qualité qui ont déjà été reboisées dans les dernières années.
    Il s'agit donc de 2 700 acres, ce qui est suffisant pour nourrir plus de 75 000 personnes continuellement, et ce n'est que le début. Planter des arbres sur des terres agricoles productives, ce n'est pas la chose à faire, car il s'agit d'une ressource rare qui est une source d'aliments, de fibres et de sécurité, particulièrement de sécurité alimentaire, pour les sept millions de personnes qui habitent à une distance d'une heure du parc.
    On peut atteindre les objectifs en matière de santé de l'écosystème du parc urbain national de la Rouge de bien des façons, pas seulement en plantant des arbres. L'agriculture peut et devrait faire partie de la solution intégrée pour l'atteinte de ces objectifs.
    Je cultive des fruits et des légumes dans ma ferme. Cela fait 30 ans que je suis agriculteur, et, durant cette période, nous avons adopté de nombreuses méthodes novatrices de production de cultures tout en réduisant notre empreinte écologique. Il s'agit notamment de l'irrigation au goutte-à-goutte, du travail réduit au sol, de la lutte antiparasitaire intégrée, du semis direct et de bien d'autres méthodes. Nous continuons également d'utiliser des méthodes de gestion qui existent depuis des millénaires, dont le drainage par tuyaux enterrés, l'utilisation de brise-vent et la rotation des cultures.
    L'agriculture d'aujourd'hui permet non seulement de fournir des aliments et des fibres à une population urbaine en expansion, elle offre aussi divers bienfaits. On peut citer comme exemple la séquestration du carbone et l'amélioration de la fonction hydrologique et de la qualité de l'air. Elle permet aussi d'offrir un habitat aux pollinisateurs ainsi qu'un habitat et de la nourriture à une grande partie de la faune.
    Le projet de loi C-40 et l'ébauche du plan de gestion du parc urbain national de la Rouge énoncent clairement l'importance de l'agriculture dans ce parc. Ce plan démontre que l'agriculture, la culture et la nature contribuent toutes de façon importante à faire de ce parc urbain un lieu dynamique axé sur l'éducation. L'agriculture peut contribuer et contribuera de façon importante à l'atteinte des objectifs du parc urbain national de la Rouge.
    Les agriculteurs du parc de la Rouge exploitent des fermes familiales et produisent de manière efficiente des aliments et des fibres en ayant recours aux pratiques exemplaires de gestion qui visent à protéger et à renforcer l'écosystème.
    Voilà tout ce qui est vrai à propos de nous, de ce que nous faisons et de ce que nous avons accompli depuis des générations. Nous sommes fiers de notre industrie et nous demandons à tous les députés de chercher la vérité et de cesser de dépendre des autres pour formuler leurs opinions au sujet de l'agriculture dans le parc urbain national de la Rouge.

  (1645)  

    Je vais terminer avec une réflexion. Que vous construisiez une maison, que vous asphaltiez un stationnement ou que vous plantiez un arbre, les résultats seront les mêmes pour les terres agricoles de catégorie 1.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Whittamore.
    Nous allons passer aux questions. Le premier intervenant est M. Chisu, qui dispose de sept minutes.
    Je remercie beaucoup les témoins pour leurs exposés. Je les ai écoutés avec attention.
    J'habite à 100 mètres du parc de la Rouge. Ma famille et moi-même profitons du parc depuis 25 ans. Je suis ravi de participer activement à cet événement historique qui fera enfin de ce parc un trésor national situé à proximité de la plus grande ville du Canada, c'est-à-dire Toronto.
    Je peux vous dire que je n'ai pas été impressionné par la lettre qu'a adressée le ministre Duguid du gouvernement libéral de l'Ontario à la ministre Aglukkaq, dans laquelle il fait volte-face au sujet du protocole d'entente signé avant la dernière élection provinciale. C'est clairement injustifiable.
    Ceci étant dit, et compte tenu de l'exposé que nous avons entendu au sujet de l'agriculture dans le parc de la Rouge, j'aimerais savoir depuis combien de temps M. Whittamore et sa famille pratiquent l'agriculture dans le parc de la Rouge.
    La famille de ma mère s'y est établie en 1804, alors nous y sommes depuis 200 ans. Elle fait partie de la famille Lapp. Mon père est venu s'y installer dans les années 1950.
    Selon vous, quels avantages procureront les baux à long terme? Vous avez mentionné qu'on vous accordait des baux à très court terme.
    Un bail à long terme favorisera l'investissement dans l'infrastructure agricole. On investira probablement en premier lieu dans le drainage par tuyaux enterrés. Comme on nous accorde des baux d'un mois depuis 30 ans, nous hésitons à investir 1 000 $ par acre dans un tel système. Le drainage par tuyaux enterrés existe... Lorsque je suis allé en Chine, j'ai vu ce système dans un musée, alors nous savons qu'il existe depuis 4 000 ans. Le drainage par tuyaux enterrés est la principale méthode en agriculture pour accroître l'efficacité, le rendement et la fonction hydrologique, car lorsque l'eau, au lieu de s'écouler sur la terre, peut s'écouler dans la terre, elle est plus propre, ce qui est beaucoup mieux pour l'environnement.
    À la maison, si on donne trop d'eau à nos plantes, elles meurent rapidement. Je réussis bien à faire pousser des plantes à l'extérieur, mais je ne parviens pas à le faire à l'intérieur. Les pots pour les plantes ont un trou au fond, car les plantes ont besoin de beaucoup d'humidité et d'un terreau bien drainé. C'est ce qui est le plus important.
    On verra aussi les agriculteurs investir dans des constructions extérieures, qui servent à abriter les animaux ou de l'équipement. Les baux à long terme encourageront les investissements.

  (1650)  

    Sur le plan de l'environnement, quels sont les avantages de la rotation des cultures, par exemple? Je suis un ingénieur, et non un avocat, mais je pose la question quand même. Je connais ces avantages.
    Principalement, la rotation des cultures permet de briser le cycle de vie des insectes, des maladies et des mauvaises herbes, ce qui permet de réduire l'utilisation de pesticides. On pratique la rotation des cultures depuis des millénaires, comme je l'ai dit. C'est bon pour la terre et cela permet de créer une flore, qui favorise l'activité bactérienne et attire les vers. C'est bénéfique pour l'environnement et pour les cultures de couverture. Nous utilisons beaucoup de cultures de couverture pour prévenir le ruissellement.
    J'ai une dernière question à vous poser. Est-ce que les baux à long terme permettront de réduire la quantité d'engrais que vous aurez besoin d'utiliser sur vos terres?
    Est-ce que les baux à long terme permettront de réduire l'utilisation des engrais? Je suppose que oui si, par exemple, l'agriculteur décidait de produire différents types de cultures que ce qu'il fait en ce moment. À l'heure actuelle, les agriculteurs appliquent les meilleures pratiques de gestion. Certaines des techniques d'application... Comme je l'ai dit, nous employons la méthode d'irrigation goutte-à-goutte. Il y a 30 ans, nous épandions l'engrais sur tout le champ. Aujourd'hui, chaque rangée de fraises, chaque rangée de framboises et chaque culture est irriguée au goutte à goutte. Cette façon de faire nous a permis de réduire de façon considérable la quantité d'engrais utilisée.
    Merci beaucoup.
    J'ai quelques questions pour Mme Schultz. Vous avez beaucoup parlé de l'intégrité écologique et j'apprécie vos commentaires sur le sujet.
    Comment définissez-vous l'intégrité écologique dans le contexte du parc urbain national de la Rouge? Quel est le niveau de protection qu'on y retrouve?
    Nous sommes en train de créer un nouveau parc. Ce parc est différent des parcs nationaux. Quelle est votre vision de ce parc?
    Quelle est votre définition de l'intégrité écologique dans cette situation particulière?
    Ma définition ressemble à celle qui figure dans la Loi sur les parcs nationaux et dans la Loi sur les parcs provinciaux et les réserves de conservation. Toutefois, je ne crois pas qu'on exige la perfection dès le départ.
    La notion d'intégrité écologique étant la norme d'excellence — vous devez l'atteindre et si vous ne l'atteignez pas, ce n'est pas pertinent pour le parc —, c'est ce que nous contestons. Il existe de nombreux exemples de parcs provinciaux et de parcs nationaux dans le réseau qui n'ont pas les mêmes perturbations que le parc de la Rouge, mais qui ont des perturbations équivalentes, et ces parcs sont tout de même gérés en fonction de cette norme.
    Ce qui nous préoccupe, c'est que le projet de loi ne prévoit pas mettre en place les procédures ou les processus de gestion pour atteindre cette norme dans la gestion du parc.
    Quel est le niveau de protection actuellement accordé par le gouvernement de l'Ontario? Quelle norme applique-t-on à l'heure actuelle? Devrions-nous accepter les terres du gouvernement de l'Ontario puisqu'elles ne répondent pas aux normes?
    Votre temps est écoulé, mais je vais vous laisser 15 ou 20 secondes pour répondre à la question.
    Je dirais que le parc de la Rouge actuel... Nous voudrions y accorder une plus grande protection écologique que par le passé, compte tenu des diverses interactions des différents régimes de gestion.
    Nous avons ici l'occasion de créer un parc qui favorise l'agriculture durable, ainsi que la protection et l'intégrité écologique, ce que l'on recherche dans un écosystème naturel.
    Merci, monsieur Chisu.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Harris. Vous disposez de sept minutes.

  (1655)  

    Merci à nos témoins d'être ici aujourd'hui.
    Monsieur Whittamore, vous avez indiqué au début de votre exposé que peu importe ce qui arriverait, il y aurait des répercussions sur l'agriculture.
    Évidemment, vous êtes très au fait de la situation des baux à court terme qui dure depuis longtemps. Juste à côté du parc de la Rouge, on a réservé un énorme terrain en vue d'y construire l'aéroport de Pickering. Selon vous, ne serait-il pas logique que ces terres redeviennent des terres agricoles?
    Parlez-vous des terres au nord du parc qui ne font actuellement pas partie du plan à l'étude?
    C'est exact.
    Oui. Je n'ai aucun problème avec ça. J'ai 30 ans d'expérience avec les gens qui travaillent...
    Si vous me permettez, j'aimerais dire un mot à propos de Jim Robb. Il a fait un travail formidable, et j'ai beaucoup de respect pour ce qu'il a fait, mais il s'intéresse surtout au reboisement.
    J'ai assisté à cette réunion, en septembre dernier, en compagnie du ministre de l'Infrastructure, et il a été question de cette parcelle de terrain. Je ne crois pas du tout que les terres qu'il étudie et qu'il envisage au final d'intégrer au parc auront une vocation agricole, étant donné que la forêt carolinienne mixte était l'un des cinq éléments contenus dans l'annexe présentée au ministre. C'est une toile blanche pour bon nombre de ces personnes. L'intégrité écologique est un nouvel objectif à atteindre, et cela exclura l'agriculture.
    J'ai vu mes voisins perdre des milliers d'acres de terres.
    Je ne posais pas la question à savoir si ces terres devraient être ajoutées au parc, mais plutôt si on devrait les désigner de nouveau comme des terres agricoles au lieu de les réserver pour la construction d'un aéroport et, par le fait même, d'expulser les agriculteurs. C'est la raison pour laquelle je posais la question, parce que nous n'avons pas suffisamment de terres agricoles locales pour nourrir nos villes. Par conséquent, le fait d'avoir plus de terres consacrées à l'agriculture nous permettrait de combler ces besoins futurs.
    J'aimerais maintenant m'adresser à Mme Schultz. Les débats s'enflamment souvent parce que les gens disent différentes choses. Mon collègue, M. Calandra, a dit qu'Ontario Nature voulait évincer les agriculteurs du parc de la Rouge.
    Dans le cadre de ce plan, est-il vrai qu'Ontario Nature veut expulser les agriculteurs du parc de la Rouge? Quelle est votre position là-dessus? J'aimerais que cela vienne directement de vous.
    Quiconque a dit que nous, ou d'autres organisations avec qui nous collaborons, nous opposons à l'agriculture dans ce parc se trompe; c'est complètement faux. Je ne sais pas d'où M. Calandra tient cette information. Nous sommes d'avis que l'agriculture fait partie intégrante du parc national urbain de la Rouge, et c'est une occasion exceptionnelle d'intégrer la production d'aliments locaux au parc. Comme M. Whittamore l'a indiqué, je pense qu'on a recours à de nombreuses pratiques écologiques en vue de fournir un habitat aux pollinisateurs et à d'autres espèces sauvages, etc.
    Par conséquent, c'est tout à fait faux.
    Excellent. Je vous remercie de mettre les choses au clair.
    Vous avez indiqué que vous appuyez les 200 hectares pour la croissance future de l'infrastructure, et c'est la limite maximale, en espérant qu'on ne se rende pas là. Selon vous, pour que la région soit en mesure d'appuyer plus de développement et d'intensification, de façon à éviter l'étalement urbain, doit-on mieux protéger les cours d'eau afin d'atténuer les effets d'une croissance future?
    Si j'ai bien compris votre question, je dirais que oui.
    Par exemple, le ruisseau Little Rouge traverse la région du parc, mais la rivière Rouge déborde de la région protégée, et les eaux d'amont...
    Il est très important de protéger les eaux d'amont. Il est essentiel de protéger tout le corridor écologique, à partir du lac Ontario jusqu'à la moraine dont j'ai parlé plus tôt, parce que dans bien des cas, nous protégeons les eaux d'amont de la moraine, mais si nous ne protégeons pas tout le corridor, cela augure mal pour l'ensemble du système.

  (1700)  

    Très bien. Merci beaucoup.
    De plus, la ministre, qui a comparu il y a deux jours, a été très ferme lorsqu'elle a dit que le projet de loi excédait le niveau de protection actuellement accordé. Elle a donné plusieurs exemples, tels que l'exploitation minière et la chasse, pour démontrer qu'il y aurait des mesures de protection additionnelles.
    Selon vous, y a-t-il des endroits dans le projet de loi où on échoue à accroître la protection locale? Bien entendu, nous voulons tous adopter un bon projet de loi et nous assurer de créer un parc fantastique qui tient compte de toutes les nuances et de toutes les différences, parce qu'il ne s'agit pas d'un parc national tel qu'on les connaît.
    Pourriez-vous nous dire quelles sont les lacunes du projet de loi?
    Comme je l'ai indiqué dans mon exposé, dans sa version actuelle, le projet de loi ne fait aucunement mention de l'intégrité écologique ni de la protection des écosystèmes. Sans réitérer tout ce que j'ai dit, j'ai déjà indiqué les aspects du projet de loi qui devraient être renforcés pour assurer une véritable protection écologique du parc.
    Je pense que nous aspirons tous à créer un parc qui a une meilleure fonction écologique qu'aujourd'hui, et ce, sans compromettre d'autres activités, comme l'agriculture dans le parc. Ce qui manque surtout dans le sud de l'Ontario, particulièrement dans cette région du sud de l'Ontario, ce sont des écosystèmes naturels et des terres agricoles de qualité, parce que nous en avons perdu beaucoup à cause de l'étalement urbain, particulièrement dans la région du Grand Toronto.
    Non, je veux dire...
    Vos sept minutes sont écoulées, alors je vous remercie, monsieur Harris.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Calandra, pour sept minutes.
    Madame Schultz, si je ne me trompe pas, vous dites que l'agriculture devrait être maintenue sur l'ensemble du parc de la Rouge, comme c'est le cas actuellement, et ce, sans aucune restriction.
    Nous estimons que l'agriculture devrait se poursuivre dans le parc....
    Vous dites donc que la totalité des terres qui sont exploitées à l'heure actuelle, dans le cadre des baux agricoles en vigueur, devraient continuer de l'être, n'est-ce pas?
    Il faudrait nous assurer que l'agriculture qui se fait dans le parc est compatible avec les systèmes naturels, et nous croyons que cela pourrait être possible.
    Vous ne voulez clairement pas répondre par oui ou non. C'est correct.
    Vous reconnaissez cette lettre, parce que vous l'avez cosignée, n'est-ce pas?
    Mme Caroline Schultz: Oui.
    M. Paul Calandra: Dans cette lettre, vous faites allusion au plan de gestion de 1994, si je ne me trompe pas? On dit que dans ce plan de gestion de 1994, et je vous cite:
    
...la plus grande priorité étant la protection et la restauration du patrimoine naturel du parc, nous recommandons de réduire la superficie totale des terres agricoles afin de réaliser nos objectifs en matière de restauration naturelle.
    Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
    Tout à fait. Pour ce qui est des détails quant à savoir où cela devrait se produire, ils feront partie du plan de gestion.
    Êtes-vous également d'accord pour dire qu'il faudrait un corridor écologique?
    Oui.
    Maintenant, un corridor écologique... Jim Robb lui-même, qui a cosigné cette lettre, a estimé que 1 700 acres de terres agricoles de classe 1 seraient retirés de la production. Parcs Canada estime qu'environ 2 000 acres de terres agricoles de classe 1 ne seraient plus exploités. Comment peut-on ne pas évincer les agriculteurs de leurs terres alors qu'on leur en prend la moitié?
    Nous estimons que la production agricole peut faire partie d'un corridor écologique, selon le type d'agriculture. Il y a certains types qui ne seraient pas compatibles.
    Vous avez frappé en plein dans le mille. Vous dites que vous accepteriez certains types d'agriculture que vous jugez adéquats.
    Du point de vue de l'intégrité écologique, il y a certains types d'agriculture qui sont compatibles.
    Monsieur Whittamore, Mme Schultz ne veut pas vous expulser, mais veut vous dire comment cultiver vos terres.
    Si je comprends bien, on veut créer un corridor écologique qui ferait en sorte de retirer 2 000 acres de terre de la production. On veut respecter les lignes directrices de 1994 et dire aux agriculteurs comment et où cultiver leurs terres. Selon vous, combien d'agriculteurs resteraient sur leurs terres et dans quelle mesure cela serait-il rentable?
    Avant de répondre à votre question, j'aimerais simplement m'assurer que Caroline a bel et bien dit qu'il faudrait créer ce corridor écologique.

  (1705)  

    Oui.
    Tout le monde comprend qu'il s'agit de 600 mètres. Il n'y a aucune agriculture à l'intérieur de ce corridor. On a établi ce corridor afin d'appuyer les espèces qui y habitent, notamment les oiseaux. C'est de là que ça vient. On parle d'un corridor de 600 mètres; on utilisera jusqu'à 2 000 acres de terres.
    Dans le plan de gestion provisoire, et nous avons collaboré avec les gens de Parcs Canada et discuté de la façon dont pourrait se pratiquer l'agriculture, je suis contre le corridor. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire. Il y a d'autres façons d'assurer la santé de l'écosystème.
    Monsieur Calandra, vous avez demandé combien d'agriculteurs resteraient sur leurs terres. S'il n'y a pas de corridor et que nous avons des gens comme Jim Robb pour nous dire comment cultiver nos terres, ce sera une mort à petit feu. Je dis ça parce que Jim a déjà déclaré publiquement qu'il s'attaquerait ensuite aux pesticides et aux engrais utilisés dans le parc.
    Je vais vous arrêter ici, parce que Jim Robb a déclaré — et sa citation se trouve sur InsideToronto.com — qu'on se plie ici aux volontés des gens qui ont recours, sur 70 % du parc de Markham, à des pesticides et à des cultures génétiquement modifiées pouvant nuire à l'environnement.
    À quel point cette déclaration est-elle vraie?
    Au fil des années, Jim a dit beaucoup de choses, notamment que les agriculteurs polluaient les rivières. Je lui ai souvent dit: « Jim, si nous polluons les rivières, prouve-le. Dis-nous où est la source de pollution. »
    On nous a accusés de contaminer la rivière par la bactérie E. coli. La TRCA, soit la Toronto and Region Conservation Authority, a mené une étude, et il s'est avéré que c'était la faute des bernaches du Canada.
    Nous faisons souvent l'objet de fausses accusations, et c'est ce dont je parlais. Les agriculteurs n'ont pas réussi à dire qui ils sont vraiment ni ce qu'ils font, et nous sommes à blâmer, mais ces accusations sont fausses. S'il y a des problèmes, nous sommes les premiers à vouloir le savoir pour pouvoir modifier nos styles de gestion. Jusqu'à présent, il n'y a eu aucune preuve, alors quand nous entendons sans cesse ces allégations dans les médias et les lieux publics, cela nous fâche énormément.
    Mon bon ami de Scarborough Southwest a dit ce qui suit en parlant de moi:
Le député a affirmé à tort que la majeure partie des terres sur les terrains de l'aéroport de Pickering étaient actuellement exploitées par les agriculteurs. Je lui recommanderais d'aller faire un tour dans le coin, car la plupart de ces terres sont en jachère.
    Selon vous, est-ce que la majeure partie des terres de Pickering sont en jachère en ce moment et remplies de mauvaises herbes?
    Non. Les terres de Pickering... et vous savez que des gouvernements se sont succédé dans le dossier des baux à court terme. Il y a beaucoup de terres qui sont exploitées. Oui, certaines terres sont inutilisées, mais tout cela découle des baux à court terme.
    Comme je l'ai dit plus tôt, s'il y avait des baux à long terme, les agriculteurs investiraient davantage dans le drainage agricole afin de retirer l'eau des zones humides. Les terres sont tellement humides qu'il est souvent impossible de les exploiter. Sans ces baux à long terme, les agriculteurs n'investiront pas dans les infrastructures.
    D'accord.
    Soit dit en passant, ce sont de très bonnes terres agricoles, mais elles ont été négligées pendant 40 ans.
    Oui, je suis d'accord.
    Voici une autre citation. Le député de Scarborough—Guildwood a laissé entendre lors du précédent tour de questions que nous inventions tout cela; tout le monde appuie les agriculteurs, et nous ne devrions pas nous inquiéter. Voici ce qu'a dit le député de Scarborough-Sud-Ouest dans son allocution:
Rien ne sera jamais réalisé dans le parc de la Rouge sans l'adhésion des Amis du bassin de la rivière Rouge. Ils sont sur le terrain depuis toujours. Ils sont attachés au parc et l'entretiennent bénévolement depuis 40 ans. Ils ne permettront pas qu'il soit morcelé... Ils s'investissent dans ce parc depuis des générations.
    Vous pouvez donc entendre ces affirmations à l'effet que l'adhésion des Amis du bassin de la rivière Rouge est essentielle. Le comité de Markham... J'ai ici un enregistrement, mais je ne vais pas vous le faire écouter, car ce serait trop long.
    Lorsque vous entendez des déclarations semblables et que vous voyez des députés présenter des pétitions au nom de Jim Robb pour sauver le bassin de la rivière Rouge en parlant de ce corridor écologique, est-ce que vous pouvez avoir la conviction que l'on vous permettra de continuer à cultiver vos terres à perpétuité si ce projet de loi n'est pas adopté?
    Non, je n'en suis pas du tout convaincu.
    Nous passons à M. McKay pour les sept prochaines minutes.
    Merci à vous deux de votre présence aujourd'hui.
    J'ai bien hâte de demander à Jim Robb où il cache ses cornes.
    Je connais Jim depuis des années et ce qu'on entend ici est merveilleusement ironique, monsieur Whittamore, car sans le travail accompli depuis 30 ans par M. Robb et ses collègues — y compris Mme Browes, M. Lee et toute une panoplie de personnes qui ne sont pas ici aujourd'hui — les pressions exercées sur les différents gouvernements pour que vos terres et toutes les autres soient vendues seraient énormes. Vous êtes coincés au milieu de ce ballet rhétorique qu'il est peut-être plus intéressant d'observer à distance.
    À mon avis, il nous faut déterminer comment nous allons répondre aux préoccupations des agriculteurs parce qu'il va de soi que leur situation changera avec la création du parc. Madame Schultz, voyez-vous quelque raison que ce soit pour que l'on n'accorde pas de baux à long terme aux agriculteurs?

  (1710)  

    Non.
    Non, bien sûr.
    On peut faire valoir différents éléments. Pensons à la gestion de l'eau et au drainage par canalisations enterrées. Lorsque nous avions une ferme, nous devions drainer le sol. C'est un exercice coûteux et il vaut mieux être certain que l'on peut garder la ferme pendant un bon moment pour pouvoir récupérer cet investissement. Je n'y vois aucune objection. Il y a aussi la lutte antiparasitaire. Il arrive qu'on ne parvienne pas à concilier les efforts de renaturalisation, la lutte antiparasitaire et les besoins des agriculteurs. Encore là, je ne sais pas si cela justifie vraiment l'inaction.
    Je voudrais que l'on puisse prendre en considération vos préoccupations respectives, de part et d'autre de l'équation, pour que vous obteniez tous deux les garanties dont vous estimez avoir besoin.
    Je viens de relire l'article 6 et, si je me mets à la place des agriculteurs, je n'y vois pas nécessairement une garantie suffisante. Voici ce qu'il dit: « Dans le cadre de la gestion du parc, le ministre prend en considération la protection des paysages culturels — je ne sais pas si la cour remplie de voitures accidentées au bout de la rue répond à cette définition. Je ne crois pas en fait — et des écosystèmes naturels — qui peuvent ou non être des fermes —, la préservation des espèces sauvages indigènes de celui-ci et le maintien de la santé de ces écosystèmes ». Mis à part l'article 4 qui parle de « favoriser le dynamisme des collectivités agricoles », je ne vois pas en quoi le ministre serait tenu de prendre en considération la question des exploitations agricoles.
    Il s'agit alors de déterminer comment nous pouvons en arriver à une disposition pouvant répondre à vos préoccupations à tous les deux. Pouvez-vous me dire ce que vous en pensez?
    Je peux vous dire d'entrée de jeu qu'il existe bon nombre d'excellents exemples de situations où des intervenants de mon côté de l'équation, des militants pour la conservation et la protection de l'environnement, et des représentants de la communauté agricole ont réussi à trouver des solutions grâce à une collaboration très efficace. Ma propre organisation travaille en étroite collaboration avec la communauté agricole dans le cadre de différentes initiatives menées en Ontario. Nous coopérons ainsi avec la Fédération de l'agriculture de l'Ontario, la Fédération des agriculteurs chrétiens de l'Ontario, le Syndicat national des cultivateurs, les éleveurs de bétail et d'autres intervenants, surtout aux fins de la conservation des espèces menacées, mais également dans d'autres dossiers.
    Je ne pense pas qu'il soit impossible de trouver ici une solution satisfaisante pour les deux parties de telle sorte que ce parc puisse atteindre le niveau d'intégrité écologique que nous estimons approprié. Je ne pense pas que nos points de vue soient incompatibles.
    Qu'en dites-vous, monsieur Whittamore?
    Je n'ai pas consacré beaucoup de temps à l'examen du projet de loi C-40. Je me suis surtout attardé à l'ébauche de plan directeur en considérant ce que Jim et d'autres souhaiteraient y voir ajouter, ce qui correspond à un retour aux plans de 1994 et de 2001. Je constate que ce nouveau plan directeur provisoire accorde une importance égale à l'agriculture, à la culture et à la nature, ce qu'on ne voyait pas dans les documents des 20 dernières années. Dans ces documents, l'agriculture n'était qu'une préoccupation secondaire comme j'ai pu en être témoin au sud de Steeles. J'avais un voisin du nom de Bert Patterson. Il a abandonné son bail. Sa ferme devait être reprise par un jeune agriculteur, quelqu'un qui souhaitait faire ses débuts dans ce domaine. Les terres en question ont été reboisées en l'espace de deux ans à peine.
    Je sais exactement de quelle ferme vous parlez. Le problème reste quand même que le ministre serait seulement tenu de prendre ces choses-là en considération. Prendre des éléments en considération, cela n'équivaut pas à établir un plan. C'est en quelque sorte un voeu pieux. On peut facilement imaginer un ministre de l'Environnement plutôt radical, ou même pas si radical que cela, qui n'hésiterait pas à passer cet article à la moulinette. C'est tout ce qu'il resterait, car les plans de gestion ne sont pas éternels. Je me préoccupe autant du sort des gens qui sont au sud de Steeles que de celui des citoyens qui vivent au nord.
    Il m'apparaît être dans l'intérêt de chacun que nous puissions rédiger un article assurant un juste équilibre entre intégrité écologique et intégrité agricole de manière à ce que les deux parties soient raisonnablement satisfaites.
    Des commentaires? Monsieur Whittamore.

  (1715)  

    Je prends bonne note de votre commentaire concernant ce ministre plutôt radical, mais je peux toutefois vous dire, pour avoir lu les amendements recommandés par les Amis du bassin de la rivière Rouge, que ces gens-là souhaitent que l'on en revienne à ce qui existait auparavant. On peut sans doute passer tout cela à la moulinette, mais supposons que nous ayons un jour un ministre qui veuille intervenir dans l'autre sens. Croyez-vous vraiment qu'une fois que l'on aura reboisé une dizaine de milliers d'acres de terre, le ministre pourra affirmer que l'on va maintenant enlever tous ces arbres et revenir en arrière?
    C'est un sens unique.
    Pas nécessairement; on peut aller dans un sens ou dans l'autre.
    Nous pouvons préserver les terres agricoles et continuer de les exploiter, mais une fois qu'on y a planté des arbres, je vois mal quelqu'un se lever pour affirmer que l'on va tous les abattre pour reprendre l'agriculture. C'est tout simplement impossible.
    Vous n'avez pas tort.
    Merci, monsieur McKay.
    Madame Sitsabaiesan, vous avez cinq minutes.
    Je veux revenir un peu sur ce que disait M. McKay. Au fil des 35 dernières années, il y a effectivement eu de nombreux militants et bénévoles, y compris les Amis du bassin de la rivière Rouge, qui ont mis de grandes superficies de terre à l'abri du développement. Je leur en suis reconnaissante, mais nous en sommes maintenant à une nouvelle étape.
    Ma question s'adresse à M. Whittamore. Quelle est selon vous la plus grande menace qui plane sur les fermes de catégorie A qui sont exploitées depuis toutes ces années à Markham? Quel est le plus grand péril?
    Dans la zone envisagée pour le parc...?
    Je crains surtout que l'approche adoptée et suivie avec le plan de gestion du nord de la Rouge en matière d'intégrité écologique soit appliquée sans distinction, car...
    Nous sommes essentiels à l'équation si l'on veut parvenir à l'intégrité écologique. Ce sont des terres agricoles en friche. C'est là qu'on fait du reboisement. C'est là qu'on retrouve les terres humides.
    Ce serait donc le reboisement ou la restauration écologique qui constituerait selon vous la principale menace pour les terres agricoles.
    Oui.
    D'accord.
    Madame Schultz, je vais vous poser une question semblable qui découle de la réponse que nous venons d'entendre. Croyez-vous que la restauration écologique soit une véritable menace pour les agriculteurs du parc de la Rouge?
    Je ne pense pas que les agriculteurs du parc devraient voir cela comme une menace. Tout dépend en fait de ce que vous entendez exactement par restauration écologique, car c'est un terme qui peut avoir un sens assez large.
    Le reboisement des terres agricoles existantes...
    Eh bien, le reboisement n'est qu'un des aspects de la restauration écologique. Tout dépend de l'écosystème que vous voulez rétablir. J'estime primordial que l'on cherche à revitaliser les fonctions écologiques, notamment sur les terres agricoles où l'on prend sans cesse des mesures en ce sens. Les agriculteurs figurent en effet parmi les meilleurs intendants de la terre et procurent quelques-uns des meilleurs habitats.
    En lisant différentes choses, j'apprends que les agriculteurs sont des militants environnementaux. Comme j'étais médiatrice avant d'être députée, je reprends un peu mes anciennes fonctions en vous permettant d'établir vos positions respectives pour que nous puissions déterminer comment il est possible de les concilier. Est-ce que vous pouvez tous deux entrevoir un mode de collaboration entre agriculteurs et écologistes pour atteindre l'objectif ultime qui consisterait à protéger la totalité des terres? Dans un monde idéal, nous voudrions mettre fin à l'étalement urbain. Nous voulons qu'il y ait des terres agricoles productives, mais aussi des forêts et des territoires naturels protégés.
    Ma question s'adresse donc à vous deux, monsieur Whittamore et madame Schultz. Croyez-vous possible d'aller de l'avant et de travailler ensemble pour atteindre cet objectif?
    Nous voulons collaborer avec les groupes environnementaux. Nous travaillons de concert avec Parcs Canada qui nous offre ce qu'il y a de mieux en fait de mécanisme de médiation, de tribune de négociation ou de courroie de transmission, selon l'appellation que l'on voudra bien lui donner. C'est la meilleure chance que nous ayons d'en arriver, comme nous l'espérons, à conjuguer les efforts de toutes les parties pour trouver une solution raisonnable. J'en reviens à l'ébauche de plan directeur où l'on a placé sur le même pied l'agriculture, la culture et la nature. C'est ce qu'il nous faut faire pour aller de l'avant.

  (1720)  

    Merci.
    Madame Schultz.
    Ma réponse est bien simple. C'est tout à fait possible. Cela ne fait aucun doute. Il y a tellement d'exemples en ce sens. Ce n'est pas nécessairement dans le contexte d'un parc, mais il y a actuellement en Ontario toutes sortes de dossiers où les défenseurs de l'environnement collaborent avec les agriculteurs pour protéger les écosystèmes naturels, préserver les zones de connexion entre les habitats essentiels et promouvoir une agriculture durable. Je pourrais vous donner l'exemple des Services de diversification des modes d'occupation des sols, que notre organisation a contribué...
    Désolée de vous interrompre, mais il ne me reste sans doute qu'une minute.
    Les deux organisations que vous représentez aujourd'hui, Protection environnementale du Canada et Ontario Nature, font partie de celles qui exhortent le gouvernement ontarien à ne pas procéder à la cession des terres, n'est-ce pas?
    C'est exact.
    Pouvez-vous nous expliquer brièvement les motifs qui expliquent une telle recommandation?
    C'est parce que nous ne croyons pas que ce projet de loi dans sa forme actuelle va suffisamment loin pour la protection des écosystèmes et l'atteinte de l'intégrité écologique. On a l'impression que c'est un élément secondaire du projet de loi, alors que cela revêt une importance capitale à nos yeux. Dans un tel contexte, pourquoi la province de l'Ontario accepterait-elle de céder ces terres alors que le but visé consiste, croyons-nous, à protéger les écosystèmes de la Rouge?
    Comme il me reste seulement 20 secondes, je vais me contenter de vous remercier tous les deux.
    Nous passons à notre dernier intervenant, M. Carrie.
    Madame Schultz, nous avons accueilli il y a quelques jours la ministre et les représentants de Parcs Canada. Ils ont été très surpris d'apprendre que l'Ontario avait choisi de ne pas respecter le protocole d'entente conclu avec eux en faisant volte-face à la dernière minute. C'était pourtant un protocole d'entente juridiquement contraignant pour les deux parties, et ils ont appris la nouvelle dans le Toronto Star. J'aimerais juste savoir à quel moment vous avez appris que l'Ontario empruntait cette avenue?
    En même temps que tout le monde, je suppose.
    Le même jour, soit le 3 septembre, dans le Toronto Star.
    Oui.
    D'accord, mais vous avez signé une déclaration de la SNAP qui a aussi été rendue publique le 3 septembre 2014 et qui disait essentiellement: « Nous demandons au gouvernement fédéral de respecter l'engagement pris dans le protocole d'entente ». Est-ce que vous-même ou quelqu'un de votre organisation avez pris connaissance de ce protocole d'entente à caractère obligatoire avant d'émettre ce communiqué?
    Je ne l'ai pas moi-même lu, mais notre directeur responsable de ce dossier l'a fait.
    Comprenez-vous la teneur du protocole d'entente?
    Oui.
    Vous comprenez. Avez-vous remarqué qu'il n'est question nulle part dans ce protocole d'entente de la notion d'« intégrité écologique »?
    Oui.
    Vous l'avez remarqué. Très bien. Comprenez-vous la différence entre une politique et une loi?
    Oui.
    C'est bien. Pensez-vous qu'il soit juste de dire que les politiques devraient être comparées aux politiques, et que les lois devraient être comparées aux lois?
    Désolée, pouvez-vous répéter?
    Pensez-vous que l'on devrait comparer les lois aux lois, et les politiques aux politiques, ou estimez-vous plutôt que l'on peut très bien comparer lois et politiques comme bon nous semble?
    Je ne pense pas que ce soit une question de choix, mais il faut tenir compte de tous les aspects.
    Vous avez indiqué dans votre déclaration que le projet de loi fédéral C-40 n'offre pas la protection que mérite le parc de la Rouge, contrairement aux politiques provinciales régissant ce parc. Vous comparez ensuite ces politiques au projet de loi fédéral en faisant valoir que ce dernier ne fait pas une priorité de l'intégrité écologique dans la gestion du parc. Vous comparez donc des politiques avec une loi. Est-ce que cela vous paraît logique? Est-ce une comparaison équitable?
    Je pense que la comparaison est équitable, car elle porte sur l'intention visée.
    L'intention visée par quoi?
    Par la formulation utilisée.
    Autrement dit, vous affirmez que les politiques du gouvernement ontarien permettent actuellement une meilleure protection du parc que ne le ferait le projet de loi fédéral. Est-ce bien ce que vous dites?
    Tout à fait.
    Lors de sa comparution, la ministre nous a expliqué en long et en large en quoi ce projet de loi permettra non seulement de satisfaire aux normes de protection environnementale actuellement appliquées sur ces terres, mais de faire encore mieux dans bien des cas. Pouvez-vous nous citer des situations précises où ce projet de loi ne permettra pas d'assurer une protection environnementale équivalente, voire supérieure?
    Je ne peux vous donner rien de précis, car je n'ai pas en main les politiques provinciales.
    Savez-vous si le gouvernement de l'Ontario offre par le truchement de ses mesures législatives le niveau de protection qu'il a lui-même exigé pour ces terres?
    De quelles mesures législatives parlez-vous?
    La loi actuelle qui assure la protection de la Rouge. Puis-je vous demander si l'Ontario respecte ses propres normes?

  (1725)  

    Est-ce que vous parlez de...? Désolée, mais pourriez-vous me dire exactement ce que vous voulez savoir?
    En fait, le gouvernement ontarien a indiqué vouloir offrir un certain niveau de protection des terres désignées. Est-ce que ce niveau est atteint dans le cas de la Rouge?
    Comme il y a différents paliers de protection pour la Rouge, je ne sais pas exactement à quoi vous faites référence, parce que... Je crois qu'il me faudrait plus de précisions.
    Essentiellement, ces terres sont actuellement protégées par le gouvernement de l'Ontario. Vous dites que cette protection est meilleure que celle qu'offrirait le projet de loi. Est-ce bien ce que vous affirmez d'un point de vue législatif?
    Je crois que oui.
    C'est ce que vous croyez?
    Oui.
    Eh bien, je ne suis pas d'accord avec vous.
    J'ai une brève question pour M. Whittamore.
    Nous avons reçu précédemment les représentants de la SNAP qui nous ont indiqué souhaiter la meilleure protection possible en matière de santé écologique. Ils ont dit qu'ils appuyaient les agriculteurs, mais vous avez vécu une situation semblable, et je crois que c'est M. McKay qui a soulevé la possibilité qu'un ministre de l'Environnement en vienne à adopter une attitude radicale qui pourrait miner notre capacité de protéger les terres. Vous avez répliqué à juste titre que l'inverse pouvait aussi se produire. Si les dispositions de ce projet de loi pouvaient permettre d'offrir la meilleure protection possible en matière de santé écologique, seriez-vous rassuré?
    Pour les fins du compte rendu, il nous faut davantage qu'un simple hochement de tête.
    Désolé, pourriez-vous répéter la question?
    Oui. La SNAP voudrait que ce projet de loi offre la meilleure protection possible en matière de santé écologique.
    Ils veulent que cela soit ajouté au projet de loi.
    Ils veulent s'assurer qu'on y trouve des mesures en ce sens. Seriez-vous rassurés si c'était bien le cas?
    Non, parce qu'on s'engage ainsi sur un terrain glissant et je sais où cela peut nous mener.
    D'accord, nous n'avons plus de temps.
    Merci, monsieur Carrie.
    Merci à nos témoins de leur présence aujourd'hui.
    Merci également aux membres du comité. J'apprécie votre contribution alors que nous progressons dans notre étude du projet de loi C-40.
    La séance est levée.
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