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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 028 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 26 mai 2014

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, nous allons commencer. En ce lundi 26 mai, je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Conformément à l'ordre du jour, nous étudions le renforcement de la protection des femmes dans notre système d'immigration.
    La réunion est télévisée. Nous recevons trois invités; deux sont ici à Ottawa et un se joint à nous par téléconférence à partir de Montréal.
    Je n'arriverai pas à prononcer vos noms correctement, et vous pourrez me corriger.
    Nous recevons aujourd'hui M. Shahin Mehdizadeh...
    J'ai essayé.
    Il est le surintendant de la Division « D », Manitoba, de la Gendarmerie royale du Canada.
    Nous recevons également Mme Raheel Raza, présidente de Muslims Facing Tomorrow.
    Par téléconférence, nous entendrons également Mme Makai Aref, présidente du Centre des femmes afghanes de Montréal.
    Madame, est-ce que vous m'entendez?
    Je vais vous donner la parole en premier, madame Aref. Vous disposez de huit minutes pour présenter votre exposé au comité.
    Je suis prête à lire ma déclaration. D'accord?
    Oui, tout à fait.
    Mais je ne suis pas certaine. Je prendrai peut-être huit ou dix minutes.
    Vous avez la parole.
    Merci.
    Merci de témoigner devant nous.
    D'accord. Tout d'abord, bonjour. Je m'appelle Makai Aref. Je remercie le Comité de la citoyenneté et de l'immigration de me donner l'occasion de vous parler du programme de parrainage de conjoints.
    Je ne suis pas ici pour vous donner mon opinion personnelle sur la question, mais plutôt pour vous parler de l'expérience des femmes immigrantes et des familles avec lesquelles je travaille depuis 13 ans au sein du Centre des femmes afghanes de Montréal.
    Aujourd'hui, j'aimerais vous faire part de leurs préoccupations et de leurs expériences. Comme il y aura une période des questions et que j'aborderai volontiers tous les sujets qui vous intéressent, je vais vous présenter rapidement les principaux enjeux auxquels sont confrontées les femmes lorsqu'elles sont parrainées par un conjoint et lorsqu'elles parrainent leur conjoint dans un autre pays.
    J'aimerais d'abord souligner que bien que la majorité des clientes du centre soient Afghanes, nous aidons les femmes de nombreuses autres communautés d'immigrants, comme le Pakistan, le Bangladesh, l'Iran et l'Inde. Toutes les questions que je vais soulever en parlant des femmes afghanes s'appliquent à elles également.
    Mon travail des 13 dernières années auprès des clientes du centre et les cas que j'ai gérés m'ont permis de constater que la victimisation des femmes parrainées par un conjoint qui vit au Canada émane de certaines situations, dont je vais vous parler. Presque toutes les femmes afghanes parrainées par un conjoint dépendent financièrement de leur mari. Elles ne parlent ni le français ni l'anglais et n'ont pas les compétences requises pour travailler au Canada. En tant que nouvelles arrivantes, elles n'ont pas de système de soutien social autre que leur mari et leurs beaux-parents au Canada.
    Les hommes vont en Afghanistan et marient des filles beaucoup plus jeunes qu'eux. Dans notre communauté d'immigrants, nous avons été témoin de nombreux cas d'hommes de 50, 60 ou 70 ans qui y ont marié des adolescentes. Malheureusement, ces hommes font un choix délibéré et croient qu'ils pourront contrôler ces jeunes filles lorsqu'elles seront au Canada.
    Les femmes subissent des pressions et sont forcées de se marier avec des hommes au Canada par leur famille. L'Afghanistan est un pays dévasté par la guerre et beaucoup de gens souffrent de pauvreté. On croit que si une fille épouse un homme qui vit au Canada, aux États-Unis ou en Europe, elle pourra aider sa famille financièrement par la suite.
    Les hommes et leur famille ne disent pas la vérité aux femmes et à leur famille avant le mariage. On leur ment au sujet de l'âge des hommes, de leur état matrimonial, de leur santé, de leur situation économique et même au sujet de leur caractère. De nombreuses clientes du centre ont constaté, à leur arrivée au Canada, que l'homme qu'elles avaient épousé avait déjà d'autres femmes et des enfants. Certaines ont découvert que leur mari avait une maladie psychologique ou physique dont elles n'étaient pas au courant.
    Par conséquent, de nombreuses femmes sont confrontées à l'isolement social, à des difficultés économiques et à la violence physique ou verbale; comme elles manquent de compétences professionnelles et ne connaissent pas bien leurs droits ni les ressources qui leur sont offertes, elles sont prises au piège.

  (1535)  

    Certaines femmes refusent d'obtenir de l'aide, même si elle leur est offerte, pour des raisons culturelles. D'autres refusent de quitter une situation de violence parce qu'elles savent qu'elles n'ont pas les moyens financiers de subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants. Elles ont également de la difficulté à obtenir des services dans leur langue. Elles ne peuvent pas communiquer leur situation aux travailleurs sociaux, aux avocats ou à la police en français ni en anglais, et ne peuvent donc pas obtenir leur aide.
    Bien que le programme de parrainage de conjoints soit utilisé par de nombreux couples très heureux, je sais, par mon travail, qu'il peut également servir à créer des mariages et qu'en conséquence, un trop grand nombre de femmes et de jeunes filles vivent dans d'horribles conditions de violence physique et psychologique, et d'oppression économique et sociale. J'espère que notre discussion d'aujourd'hui nous permettra de les aider à retrouver leur voix, l'espoir et leur vie.
    Merci.

  (1540)  

    Merci, madame Aref.
    Nous allons entendre deux autres témoins, puis les membres du comité vous poseront des questions. Je vous remercie de votre exposé.
    Je vais essayer de nouveau, monsieur Mehdizadeh.
    Merci.
    Je vous remercie de votre présence. Vous disposez également de huit minutes. Allez-y, monsieur.
    Merci.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je m'appelle Shahin Mehdizadeh. Je suis né en Iran et j'ai quitté le pays pendant la révolution, à la fin des années 1970. J'ai vécu en Inde pendant cinq ans avant d'immigrer au Canada en 1984. Je suis membre de la GRC depuis plus de 25 ans. J'ai servi plusieurs collectivités dans quatre provinces, et j'ai travaillé dans de nombreux secteurs des services policiers.
    Aujourd'hui, monsieur le président, je ne m'adresse pas au comité au nom de la GRC. Je suis ici en tant qu'immigrant et citoyen canadien, et bien que je ne porte pas mon serge bleu, mon témoignage se fondera sur mon expérience et mes connaissances à titre de policier.
    Mon objectif consiste à vous faire part des mesures prises par les forces policières, les organisations non gouvernementales et surtout nos citoyens pour rendre notre pays plus sécuritaire pour les immigrantes. Je vous ferai également part de mes observations relatives à certaines lacunes, qui pourraient vous être utiles.
    En tant qu'immigrant, je peux vous dire que les premières années suivant l'immigration au Canada sont les plus difficiles et les plus risquées. Les nouveaux immigrants sont exposés à un environnement qui leur est quelque peu étranger et doivent s'ajuster rapidement pour s'intégrer. Ces ajustements peuvent être plus difficiles pour certains que pour d'autres.
    Bien que les nouveaux immigrants vivent un sentiment de joie et d'accomplissement, ils vivent également d'autres émotions comme la peur et l'incertitude, ce qui ajoute à leur niveau de stress. En raison de leur manque possible de compétences linguistiques et autres, les femmes immigrantes ont parfois tendance à se cacher et à rester au sein de leur groupe culturel ou de leur famille, puisqu'il s'agit de leur zone de confort. Elles acceptent parfois aussi les mauvais traitements de leur mari puisqu'elles pensent qu'elles n'ont pas d'autre choix.
    Les nouveaux arrivants ont tout mis en oeuvre pour pouvoir immigrer au Canada. Les conditions dans certaines régions du monde sont telles que pour certaines femmes, la vie au Canada est meilleure que la vie qu'elles avaient avant, même si elles sont maltraitées ici. Dans certains cas, les parents et amis de ces femmes n'acceptent pas l'idée qu'elles quittent leur famille, puisqu'elles leur attireraient la honte. C'est pourquoi parfois, le seul conseil offert par les proches parents est de maintenir la relation à tout prix.
    Comme vous l'avez entendu, la motivation derrière de nombreux homicides au Canada est l'honneur de la famille. Récemment, l'affaire Shafia a été très médiatisée. J'ai participé à cette enquête et j'ai aidé le service de police de Kingston, qui était responsable du dossier.
    C'est l'un des cas les plus tristes que j'ai traités dans ma carrière. Cela m'a permis de voir toutes les lacunes et la nécessité de sensibiliser la police et les autres organismes de soutien au Canada. La sensibilisation accrue leur permettrait d'avoir un meilleur point d'observation lorsqu'ils feront face à ces situations, et d'exécuter leurs tâches plus efficacement. Après tout, l'objectif commun est de garantir la sécurité et la protection de tous les citoyens.
    À la suite du procès, j'ai mené une initiative qui a permis à la GRC, en collaboration avec le ministère de la Justice, de mettre au point une formation en ligne d'introduction à la violence fondée sur l'honneur et aux mariages forcés. Cette formation en est à l'étape de la vérification finale et sera offerte dans les deux langues officielles à tous les agents de la GRC par l'entremise de la formation interne basée sur le Web. Ce cours sera également offert aux autres services de police par l'entremise du Réseau canadien du savoir policier.
    Je sais aussi que d'autres formations sont en cours d'élaboration, notamment une formation similaire à la nôtre sur la violence fondée sur l'honneur et les mariages forcés, qui sera offerte par le Collège de police de l'Ontario.
    J'espère que la sensibilisation des policiers de première ligne à cette question leur permettra de reconnaître et d'évaluer plus efficacement les risques pour les femmes immigrantes lorsqu'ils répondront à des cas de présumée violence en milieu familial ou de mariage forcé. De façon plus importante, leur compréhension de ces questions leur donnera les outils nécessaires pour activer les systèmes de soutien et assurer la sécurité des victimes.
    De nombreux autres ministères et organismes du gouvernement, tant à l'échelle fédérale qu'à l'échelle provinciale, comme Condition féminine Canada, Emploi et Immigration Canada et le ministère de la Justice ont sensibilisé activement leurs employés et d'autres à cette question.

  (1545)  

    En ce qui a trait aux autres organisations, je peux vous parler des mesures prises par le programme de prévention du crime de l'Alberta pour mettre au point une formation sur la violence fondée sur l'honneur et les mariages forcés, offerte aux intervenants des divers organismes de soutien comme le personnel infirmier, les travailleurs sociaux et les professeurs. Je suis très heureux de cette initiative, et j'espère qu'une fois qu'elle sera prête, la formation pourra être transmise aux organismes des autres provinces.
    La sensibilisation, c'est la clé pour aider ces victimes, puisque ces crimes ne sont souvent pas signalés. Dans la plupart des cas, seules les personnes formées peuvent détecter ces crimes, puisqu'elles évaluent la situation selon une perspective plus large et savent communiquer efficacement avec les victimes. Ces organisations jouent un rôle essentiel pour améliorer la sécurité des femmes au Canada, y compris les immigrantes.
    Je connais plusieurs groupes de femmes d'influence au Canada qui organisent des séances d'information et des conférences pour discuter de ce sujet important et accroître la sensibilisation des membres de la collectivité. À mon avis, c'est par là que passera le changement positif, qui améliorera la sécurité des femmes au Canada et au sein du système d'immigration. Ces efforts doivent être appuyés par notre organisation.
    En fin de compte, l'objectif consiste à prévenir les crimes avant qu'ils ne se produisent, puisque lorsque les policiers sont appelés à intervenir, il peut être trop tard pour les victimes.
    Tous ces efforts visent la promotion d'un thème commun, soit de faire connaître leurs droits aux victimes de cette violence, mais surtout de leur faire comprendre ce qu'elles doivent faire à l'avenir si elles se sentent victimisées. L'éducation accrue des nouveaux arrivants à cet égard sera très utile. Toutefois, les obstacles linguistiques font en sorte qu'il est très difficile de transmettre l'information nécessaire à tous.
    Cette lacune rend également la tâche difficile aux victimes qui veulent demander de l'aide. Bien sûr, de nombreuses autres raisons expliquent pourquoi les victimes refusent de se manifester, comme la peur de la famille, la honte et la dépendance financière à l'égard de l'agresseur. Elles ont peut-être aussi peur des autorités ou ne leur font pas confiance.
    Divers organismes poursuivent leurs efforts pour établir des relations de confiance avec les immigrants. Après tout, c'est ce que nous faisons au Canada. L'important, c'est de poursuivre sans relâche ces efforts et d'être présents pour les victimes lorsqu'elles demandent de l'aide. Pour ce faire, il faut une grande collaboration et un travail d'équipe entre les divers organismes, et j'insiste sur le « s » dans organismes, parce qu'on ne peut pas réussir seuls.
    Au fil des années, les organisations se sont beaucoup améliorées dans ce domaine. Toutefois, on peut toujours faire mieux. Le Royaume-Uni étudie la question des mariages forcés depuis plusieurs années; il a élaboré de nombreux processus pratiques et formé des experts en la matière au sein de diverses organisations dans le but de lutter contre les mariages forcés et la violence fondée sur l'honneur. Il serait peut-être utile d'étudier de plus près les mesures prises par le Royaume-Uni pour voir comment nous pourrions les adapter au Canada.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, pour conclure, j'aimerais vous remercier de m'avoir permis de participer à cette importante étude sur la sécurité des femmes immigrantes vulnérables au Canada. J'espère que l'information que je vous ai transmise et mes réponses à vos questions vous seront utiles.
    Merci.
    Merci, monsieur, de votre exposé. Je sais que les membres du comité auront des questions à vous poser après la déclaration de notre dernier témoin. Je vous remercie de votre présence.
    Madame Raza, vous êtes la dernière, mais non la moindre. Vous avez la parole.
    Bonjour. Je remercie le comité de l’occasion de témoigner sur une question très importante et je félicite le gouvernement du Canada de faire de la protection des femmes et du renforcement de leurs droits une priorité.
    À titre de présidente du Council for Muslims Facing Tomorrow et en tant que militante de longue date pour les droits des femmes, je voudrais mettre l’accent sur la communauté sud-asiatique, où bon nombre de ces problèmes se produisent et où j’ai interagi le plus avec les victimes de la polygamie, des mariages par procuration, des mariages forcés et des mariages précoces, qui ont tous lieu à l’échelle locale.
    Permettez-moi de commencer par les mariages forcés. Vous connaissez sans doute le rapport de la South Asian Legal Clinic of Ontario, qui indique que les parents, les frères et soeurs, la famille élargie, les grands-parents et les chefs religieux étaient tous mêlés dans des stratagèmes visant à obliger des gens à conclure des mariages forcés. Je ne répéterai pas les statistiques, parce qu’elles ont été documentées, mais je dirais que ce document a pris tout son sens pour moi quand j’ai rencontré une jeune fille à l’occasion d’une conférence tenue à Kingston il y a quelques mois. Quand elle a vu ma carte, elle m’a amenée à l’écart pour me raconter son histoire, dans ma langue; c’était une histoire choquante et triste.
    Elle est venue ici à 16 ans, bien qu’on ait falsifié l’âge qui figure sur son passeport pour qu’il indique qu’elle avait 18 ans. Ses parents l’ont forcée à épouser un citoyen canadien qu’elle n’avait jamais rencontré. Cela s’est fait par l’intermédiaire d’un médiateur qui a exigé beaucoup d’argent pour cet arrangement en lui promettant une vie merveilleuse avec un homme merveilleux, en plus d’une acceptation immédiate de sa demande d’immigration au Canada. Une fois au pays, le parrain, qui n’était pas aussi merveilleux qu’on le lui avait laissé entendre, a obligé sa famille à lui envoyer de l’argent. Officiellement, c’était pour assurer sa subsistance. Lorsque les parents ont refusé, parce qu’ils n’avaient pas plus d’argent à donner, il lui a fait subir de mauvais traitements, puis il l’a abandonnée en gardant toutes ses pièces d’identité. Elle m’a dit qu’elle était littéralement à la rue, avec pour seuls biens les vêtements qu’elle portait. Elle ne savait pas où aller, ni quoi faire, ni où vivre.
    D’aimables voisins l’ont accueillie et l’ont aidée à trouver sa voie. Ils l’ont aidée à entreprendre des études et à demander de nouvelles pièces d’identité, ce qui est extrêmement difficile, comme vous le savez; ce qu’elle a confirmé. Elle est encore dans une situation précaire. Elle vit la dépression, l’isolement et la peur. En mon sens, ce dont elle se plaint, c’est que le système ne l’aide pas, même si dans les faits, c’est elle, la victime. Si elle avait eu connaissance du système juridique plus tôt, elle ne se serait pas sentie si impuissante.
    Il y a beaucoup d’autres cas comme le sien, et je suis ici parce que je ne veux plus jamais qu’une personne vive une telle situation.
    En ce qui concerne la polygamie, les lois canadiennes à cet égard doivent évidemment être revues. Dans le cas de la communauté musulmane — et j’en parle parce que c’est ma communauté —, les chefs religieux ont le droit de célébrer le nikah, un mariage musulman. Toutefois, ils ne sont pas tenus de vérifier si la femme a été obligée d’accepter ce mariage ou s’il s’agit d’un cas de polygamie. Par conséquent, je crois qu’il faut des contrôles plus solides et une plus grande responsabilisation des autorités religieuses.
     Permettez-moi de souligner que certains chefs religieux invoquent certains aspects de leur foi pour célébrer des mariages polygames, même si c’est contraire à la loi canadienne. Donc, lorsqu’on examine la polygamie, il faut tenir compte de l’incidence de la charia.
    Pour revenir aux mariages forcés, la question est de savoir quel suivi nous faisons à cet égard. Je me réfère aux propos de Shahin, et j’attire votre attention sur le Royaume-Uni, où le mariage forcé a été un grave problème. Le Home Office du gouvernement britannique a une unité consacrée au mariage forcé, la FMU, qui a découvert qu’au Royaume-Uni, plus de 5 000 personnes sont forcées de se marier chaque année. Dans 82 % des cas, les victimes sont des femmes, et 74 % des cas concernent des Asiatiques du Sud. L’an dernier, en septembre, la Forced Marriage (Civil Protection) Act est entrée en vigueur, faisant ainsi du mariage forcé une infraction criminelle. Il y a aussi un service d’assistance téléphonique pour les femmes, et les organismes d’application de la loi reçoivent une formation sur le dépistage des signes de mauvais traitements.
    Il faut une loi de ce genre au Canada. Nous avons besoin d’un service d’assistance téléphonique et nous devons offrir de la formation à nos fonctionnaires, ce qui vient de commencer, je crois.
    Je recommande également d’informer de leurs garanties juridiques les conjointes potentielles avant leur arrivée au Canada lorsqu’elles se rendent dans les consulats canadiens à l’étranger pour leurs documents d’immigration. On devrait leur fournir le numéro d’une ligne téléphonique désignée ou d’un organisme canadien de façon à effectuer un suivi de leur situation et de leur sécurité au pays jusqu’à ce que leurs documents soient traités, ou jusqu’à ce qu’elles deviennent autonomes.

  (1550)  

    Il faut leur offrir une séance d’information dès leur arrivée, en présence du parrain, pour que les deux parties prennent connaissance des lois canadiennes et des droits de la personne.
    J’insiste sur le fait qu’il faut la présence des deux parties, parce que je crois qu’il est très important, dans le cas où le parrain serait un Canadien qu’il comprenne que s’il parraine une femme en vue de son immigration au Canada, elle voudra peut-être poursuivre des études ou se trouver un emploi, l’éducation ou la culture du parrain ne devrait pas l’empêcher de faire des choses qu’elle est en droit de faire.
    En outre, je crois que le parrain devrait être obligé de mettre de l’argent de côté afin de soutenir sa conjointe sur le plan financier. Rien de tout cela ne devrait relever de la famille ou de la communauté, qui sont parfois complices. Pour dissuader les fraudeurs potentiels, des pénalités sévères devraient être prévues pour les parrains qui ne respectent pas les règles.
    J’appuie l’idée selon laquelle les gens qui viennent au Canada doivent avoir une connaissance des langues officielles, parce que c’est le seul moyen dont les victimes potentielles disposent pour connaître leurs droits et, surtout, pour les faire respecter.
    Cela dit, la différence est manifestement très ténue entre le parrainage frauduleux et le parrainage authentique d’une conjointe. Je ne veux pas être perçue comme une personne qui s’immisce dans le mariage de deux personnes, mais je tiens à dire que même si l’on resserre le programme de parrainage des conjoints, il faut véritablement s’efforcer de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain.
    Merci beaucoup.

  (1555)  

    Merci.
    Nous avons entendu trois excellents exposés. Mes collègues voudront maintenant vous poser des questions pour obtenir des précisions sur les enjeux dont vous avez parlé.
    Nous commençons par M. Menegakis.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos trois témoins de comparaître au comité aujourd'hui. J'ai écouté vos témoignages avec grande attention, et je les trouve très instructifs et très réfléchis. Je vous en remercie.
    Monsieur Mehdizadeh, dans votre exposé, vous avez parlé de « meurtres fondés sur l’honneur » ou de « crimes d'honneur », que tous les Canadiens trouvent très troublants. Certes, comme nous le savons tous, le procès Shafia nous a fait connaître de près cette réalité. Personne ne s'attendait à devoir s’en préoccuper, mais il en a été autrement, bien entendu.
    Pourriez-vous nous parler davantage de votre expérience dans la force policière par rapport à la formation sur les meurtres fondés sur l’honneur? À votre avis, les services de police du pays ont-ils suffisamment de connaissances pour porter une attention particulière à cet aspect?
    J’ai évidemment suivi l’affaire Shafia. En parlant à de nombreux agents de police partout au pays — et croyez-moi, j’ai travaillé dans tout le pays pendant mes années de service —, j’ai constaté qu’il y a un manque de connaissances culturelles. Le Canada étant un pays multiculturel — il compte 6,8 millions d’immigrants —, il est pratiquement impossible pour les services de police de mettre en place du jour au lendemain la capacité nécessaire pour servir chaque communauté et s’attaquer aux enjeux qui les touchent.
    Lorsque j’ai étudié ces lacunes, notamment en ce qui concerne la façon dont les accusés ou les personnes qui commettaient ces actes tentaient de justifier leurs actes en invoquant l’honneur de la famille — ce qui est un acte très méprisable, mais c’est ainsi qu’ils le justifient —, j’avais le sentiment qu’il fallait plus de sensibilisation. La formation dont j’ai parlé ne vise pas à faire des gens des experts en la matière, parce qu’il faut apprendre à marcher avant de commencer à conduire. C’est un cours d’introduction sur les notions de base. La formation se fait en ligne; elle est donc accessible à tous, de façon très conviviale. De là, nous pouvons favoriser l’acquisition d’une plus grande expertise chez les personnes qui ont un intérêt certain à cet égard et ainsi renforcer cette capacité au sein des services de police.
    Ce qu’il y a de bon au Canada, c’est que nous avons beaucoup de services de police, mais ils travaillent tous ensemble et nous avons vraiment éliminé les écarts entre les divers services de police. Le procès de Kingston est un exemple parfait : de nombreux organismes ont aidé le service de police de Kingston dans ce dossier. Tandis que nous cherchons à accroître la capacité au Canada, et pas seulement au sein de la GRC, je pense que le fait de pouvoir cerner ce genre de cas et peut-être de les prévenir avant qu’il ne soit trop tard nous permettra d’avoir de meilleurs résultats.

  (1600)  

    La principale raison pour laquelle nous avons décidé de faire cette étude, c’est que nous avons constaté des abus dans le système d’immigration du Canada, principalement par rapport aux femmes. Il y a aussi des problèmes du côté des hommes.
    Nous avons jugé qu’il était très important de mener une étude sur cet enjeu précis afin d’éliminer les lacunes qui permettent à des gens d’utiliser le système pour violer les droits d’une personne. Par exemple, quelqu’un rencontre une charmante jeune femme originaire d’un autre pays — et je ne nommerai pas un pays précis — et l’amène au Canada en vertu d’un statut de résident permanent. Ils se marient et font leur vie. Bien entendu, une des conditions, c’est qu’elle demeure mariée et qu’elle n’utilise pas le système pour sortir du pays. Or, dans certaines situations, cela crée un déséquilibre dont certaines personnes peuvent profiter et utiliser pour trahir la confiance de la personne qu’ils ont parrainée. La personne parrainée se retrouvera dans une impasse, ne sachant où aller. Elle dira qu’elle est au Canada parce que son mari l’y a amenée et qu’il lui fait maintenant subir de mauvais traitements. Elle a besoin d’aller ailleurs, et elle a besoin d’aide.
    Je vais vous poser une question. Nous avons pensé que l’une des façons de sensibiliser les gens était de nous concentrer sur les nouveaux arrivants. Nous nous concentrons sur les personnes maltraitées, mais nous voulons nous concentrer sur les femmes qui sont venues ici et qui ont réussi. À votre avis, les personnes qui sont venues ici, ces femmes qui sont venues au Canada et y ont prospéré, ont obtenu un emploi, se sont intégrées, ont élevé leurs enfants selon des valeurs familiales canadiennes et sont des membres très utiles de la société canadienne peuvent jouer le rôle de mentor auprès des femmes et des nouveaux arrivants au Canada?
    Absolument. Je crois que le programme de mentorat serait une excellente idée. Je sais que ces situations abusives ont lieu, mais beaucoup de femmes viennent au pays et se construisent une très bonne vie et connaissent beaucoup de succès dans la vie.
    Au sujet de la violence que vivent les femmes immigrantes qui arrivent au pays, je tiens à dire que certains des défis et des problèmes auxquels elles sont confrontées sont très semblables à ceux de n'importe quelle autre femme au Canada qui subissent la violence de la part d’une personne, de leur partenaire. L'écart résulte de facteurs qui aggravent leur situation: la culture, le manque d'éducation, peut-être, les compétences linguistiques, etc. Donc, je crois que ce serait très utile si des mentors pouvaient réellement les aider, leur fournir de bons renseignements et leur servir d’exemple.
    Merci, monsieur.
    Madame Blanchette-Lamothe.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
    Je vais poser mes questions en français.
     Madame Aref, arrivez-vous à entendre l'interprétation?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Ma première question concerne la résidence permanente conditionnelle. C'est relativement nouveau au Canada. Autrefois, les époux et épouses qui étaient parrainés avaient un statut de résidence permanente lorsqu'ils arrivaient ici. Or en vertu de cette nouvelle mesure, il s'agit maintenant d'un statut conditionnel de deux ans. Si la relation prend fin et qu'il ne s'agit pas d'un cas prouvé d'abus ou de maltraitance, l'époux ou l'épouse doit retourner dans son pays d'origine. Beaucoup de témoins ont soulevé des questions relativement à cette mesure conditionnelle. En effet, ils craignent que celle-ci contribue à rendre les femmes plus vulnérables.
    Madame Aref, vous avez parlé de femmes qui n'avaient pas reçu toute l'information sur leurs maris, par exemple qu'ils étaient déjà mariés ou souffraient d'une maladie qu'ils n'avaient pas déclarée. Dans de tels cas, si elles décidaient de mettre fin à cette relation, ces femmes pourraient être renvoyées dans leur pays d'origine.
    D'autres inquiétudes ont été exprimées, notamment sur le fait qu'il incombait à la femme faisant l'objet d'un abus de prouver ce dernier. Plusieurs ont souligné que la violence verbale ou psychologique n'était pas nécessairement facile à prouver.
    J'aimerais entendre vos commentaires sur l'aspect conditionnel de la résidence permanente. Pensez-vous que cela peut être un obstacle à la sécurité et à la protection des femmes?
    Madame Raza, voudriez-vous répondre à cette question?

  (1605)  

[Traduction]

    Oui. Selon la situation que vous avez décrite, le fardeau de la responsabilité repose entièrement sur le conjoint parrainé; disons la femme, dans ce cas. Le risque de violence est omniprésent. À moins que l’on n’augmente la responsabilité des deux côtés... C'est ce que j'ai mentionné dans mon document. Quelle que soit l'orientation, la formation ou l'éducation offerte, les deux parties doivent participer. Dans un tel cas, pourquoi le parrain n’est-il pas aussi tenu responsable?
    Je pense que l’on pourrait un jour examiner cette solution, tout en gardant à l'esprit que les femmes qui viennent de pays du tiers monde sont vulnérables, n'ont pas les compétences linguistiques nécessaires et proviennent peut-être de pays déchirés par la guerre. Il peut y avoir un sentiment de désespoir. Je pense que cela les rend très vulnérables.
    Cela correspond à ce que Shahin a dit, et il a mentionné la violence fondée sur l'honneur, qui se produit lorsqu’une femme arrive au Canada et décide qu'elle veut l'éducation, la liberté et tout ce que veulent les autres Canadiennes.
    Le partage des responsabilités est un élément très important.

[Français]

    Monsieur Mehdizadeh, avez-vous quelque chose à ajouter au sujet de l'aspect conditionnel de la résidence permanente?

[Traduction]

    Je suis désolé. J'ai oublié de mettre l'écouteur.

[Français]

    Madame Aref, avez-vous quelque chose à ajouter à cet égard?
     Que pensez-vous de cet aspect conditionnel?

[Traduction]

    Oui. J'ai une assistante. Elle vous l'expliquera très bien. Je tiens à vous présenter Patmeena. Elle est avec moi. Elle va répondre à cette question pour vous.
    Cela ne pose pas problème. Pourriez-vous nous dire son nom, s'il vous plaît?
    Je m'appelle Patmeena Sabit. Je suis assistante de programme auprès de Mme Aref au Centre des femmes afghanes.
    Je voulais préciser une chose par rapport à la question de la maladie. Je pense que Mme Aref a dit que les femmes reçoivent des informations erronées, par exemple, de leur mari ou de personnes qui se rendent sur place. À leur arrivée au Canada, ces femmes constatent qu’une partie de l’information était inexacte ou trompeuse, que ce sont en fait les hommes eux-mêmes qui ont certaines maladies physiques ou mentales, ou ont peut-être déjà été mariés ou ont une autre famille. Je tenais simplement à éclaircir ce point.
     Deuxièmement, en ce qui concerne le parrainage provisoire ou conditionnel ou la résidence permanente conditionnelle, je pense que Mme Aref veut faire valoir que ce sont d’autres mécanismes permettant à certaines personnes d’utiliser le système à mauvais escient.
     Par exemple, pour les femmes qui sont amenées ici et qui n’ont ni compétences, ni emploi, et qui sont victimes de violence verbale, émotive ou physique, cela devient en quelque sorte une période d’essai où il pourrait leur être impossible de demander de l’aide en raison de la menace qui pèse sur elles, soit l’idée selon laquelle leur parrain pourrait, au cours de cette période de deux ans, les renvoyer dans leur pays d’origine si elles n’adoptent pas le comportement souhaité.
     Il y a donc là un aspect qui ouvre la porte à une autre façon pour les gens d’utiliser le système à mauvais escient. Je pense que ces femmes sont déjà très vulnérables. Cela pourrait accroître cette vulnérabilité.

[Français]

    Suggéreriez-vous d'éliminer l'aspect conditionnel de la résidence permanente ou aimeriez-vous faire des suggestions visant à éviter que cet aspect rende les femmes plus vulnérables?
    Mme Aref ou sa collègue peut répondre à cette question.

[Traduction]

    Une des choses que Mme Aref et nous voyons au Centre des femmes afghanes... Nous savons par expérience que pendant les deux années de résidence permanente conditionnelle, on peut s'attaquer au problème si, par exemple, des fonctionnaires, des travailleurs sociaux ou des travailleurs humanitaires parlent aux femmes ou leur donnent des conseils pour connaître leur point de vue.
    Je ne sais pas comment on établirait cela si, par exemple, quelqu'un avait profité du système et qu'il avait été décidé pendant ces deux années qu'il doit retourner chez lui. Je pense qu'il est très important de documenter ce qu'ils ont vécu et de s'informer de leur expérience pendant cette période.

  (1610)  

    Merci, madame Sabit.
    Monsieur McCallum.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite encore une fois la bienvenue à tous nos témoins.
    J'aimerais poursuivre un peu dans la même veine que les néo-démocrates, d'une manière légèrement différente. Pendant les audiences du comité, nous nous sommes inquiétés d'un déséquilibre entre le pouvoir de la personne parrainée et celui de son parrain. Tant à l'égard de la résidence permanente conditionnelle pour le mariage... En cas de rupture, la personne parrainée risque d'être expulsée, ce qui témoigne d'un déséquilibre flagrant.
    Je suppose que j'aimerais répéter la question qui a été posée plus tôt, mais je demande à chacun de vous de répondre brièvement par oui ou non, car j'ai déjà adressé cette question à d'autres témoins. Si vous aviez le choix entre maintenir le statu quo avec la résidence permanente conditionnelle comme option, ou abolir la résidence permanente conditionnelle et revenir à l'ancien système, dans lequel la personne a automatiquement le statut de résident permanent à son arrivée, préféreriez-vous le statu quo ou le vieux système?
    À mon avis, l'avantage de l'ancien système est qu'il prévient ce déséquilibre des pouvoirs, tandis que le statu quo permettrait peut-être de réduire le nombre de personnes mariées illégitimement qui entrent au pays, même s'il s'agit du travail des agents d'immigration, qui doivent déterminer si une union est valide avant d'autoriser l'entrée au pays.
    Je me demande si vous vous sentez à l'aise par rapport à cette question, si chacun de vous pouvait seulement dire s'il voudrait, oui ou non, abolir le système de résidence permanente conditionnelle et revenir à celui que nous avions avant.
    Je peux commencer.
    Il faudrait probablement que j'examine très attentivement les conditions, les règles et les règlements des deux options pour être en mesure de répondre. Je ne peux pas vraiment répondre à la question.
    C'est une réponse valable.
    Madame Raza.
    Je vais emprunter la voie du centre; ce n'est ni oui, ni non. Je sais que ce n'est pas ce que vous voulez entendre, mais c'est la réalité. Il y a une approche intermédiaire, qu'on vient tout juste de mentionner. On pourrait opter pour le statu quo avec un mécanisme de surveillance des époux parrainés pour s'assurer que leurs droits ne sont pas bafoués. Je pense que c'est également ce que j'ai dit dans mon exposé.
    Je crois qu'une surveillance et un suivi exercés par le gouvernement du Canada constitueraient un élément très important de n'importe quelle entente à l'égard du parrainage de conjoint.
    Madame Aref?
    Dans ce cas-ci, je choisirais la deuxième option, c'est-à-dire l'ancien système, à l'exception de la deuxième décision. Il est important de leur donner non seulement deux années avant d'obtenir le statut de résident, mais aussi de l'information, de la formation et des conseils à propos du mode de vie, des différences par rapport au pays d'origine, d'à quel point c'est différent... et de ce qui a changé, du degré de sécurité. Beaucoup...
    Merci. Je pense qu'il ne me reste plus beaucoup de temps, mais je pourrais peut-être aborder très rapidement un autre point.
    Nous avons appris qu'en Australie et en Nouvelle-Zélande, lorsqu'un mariage est rompu, la personne parrainée peut obtenir en peu de temps le statut de résident permanent et ainsi éviter d'être rapidement et automatiquement expulsée du pays.
    Je pense qu'il serait judicieux de notre part de réduire la bureaucratie et d'accélérer grandement les démarches d'une personne dont le mariage semble s'être brisé pour qu'elle obtienne rapidement le statut d'immigrant reçu.
    Je voulais seulement savoir si vous étiez d'accord avec moi à ce sujet.
    Je vais répondre à cette question en premier.
    Tout ce qui permet de réduire la démocratie est sans aucun doute une bonne chose, n'importe quand. Tout ce que vous pouvez faire pour accélérer le traitement de ces dossiers.
    Bien.
    C'est un des ministères les plus bureaucratisés; c'est donc une bonne réponse.
    Merci.
    Mon adjointe peut-elle également vous répondre?
    Oui, je pense que nous avons convenu qu'un processus accéléré... pour leur accorder un certain statut afin qu'ils puissent rester ici, et la réduction de la démocratie. À mon avis, c'est un des principaux problèmes que nous voyons en cas de rupture de mariage: les gens croient qu'ils peuvent se débarrasser très rapidement de leur conjoint tout simplement parce qu'il n'a pas le statut de résident. Ce serait donc utile, cela va de soi.

  (1615)  

    Merci, monsieur le président.
    Mon temps de parole est probablement écoulé.
    En gros, oui.
    Monsieur Leung.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins de leurs observations. Dans une société multiculturelle, lorsque des gens apportent différentes valeurs, religieuses ou non, dans un pays, il faut se pencher sur la question. Pour gérer cette diversité ou ces différences, il faut entre autres une base solide de gestion des risques dans tout le système d'immigration.
    Afin de gérer les risques associés au système, nous devons, d'une part, nous fier aux gens qui sont de bonne foi et qui font venir un époux pour répondre à un réel besoin, qui consiste probablement à trouver quelqu'un dont les coutumes ou les croyances religieuses ressemblent davantage aux leurs. D'autre part, cela permet également, dans une certaine mesure, à des gens malintentionnés d'abuser du système.
    Dans le cas de la résidence permanente conditionnelle, pour éviter que les gens abusent carrément du système, nous avons pensé à cette condition pour qu'ils aient le temps de s'établir et que nous puissions examiner leurs dossiers. Ce n'est qu'un seul des mécanismes employés. J'aimerais que vous me parliez de l'ensemble du processus d'immigration, de la présentation de la demande dans le pays d'origine à l'arrivée au pays et à la surveillance du mariage pour voir s'il est légitime ou non pendant la période de deux ans. Quels sont les autres outils dont nous disposons en tant que pays pour nous assurer que le processus est juste et équitable?
    Commençons par M. Mehdizadeh, s'il vous plaît.
    Merci.
    J'ai moi-même suivi le processus, et je peux dire en toute honnêteté que, pour ce qui est des milliers d'immigrants qui arrivent au Canada et des quelques cas où nous constatons qu'on fraude le système ou qu'on s'en sert à mauvais escient, apporter de grands changements revient essentiellement à punir la majorité à cause d'une minorité de contrevenants. Ce que j'ai constaté en tant qu'immigrant, c'est que la seule lacune dans le processus était le manque d'information ou le fait de ne même pas faire passer de tests avant l'arrivée au Canada. Pour devenir citoyen, il faut entre autres passer un test devant un juge...
    Avant de présenter une demande d'immigration, il me semble qu'il faut d'abord avoir des aspirations ou une compréhension du pays. Pourquoi ne pas plutôt considérer les États-Unis, l'Afrique du Sud ou l'Inde? Il faut avoir certaines connaissances.
    En tant qu'immigrant, je suppose que les gens sont parfois tellement désespérés qu'ils vont tout simplement présenter une demande à n'importe quel pays qui pourrait les accueillir et qui est mieux que le leur. C'est évident quand nous pensons aux navires de migrants qui peuvent accoster n'importe où.
    J'estime que c'est un premier pas si on leur donne certains renseignements avant qu'ils arrivent ici, car ils devront passer des tests pour obtenir leur citoyenneté, avant que nous en fassions des citoyens canadiens. Il pourrait donc être utile de leur fournir certains renseignements, au moins sur ce qui caractérise le Canada.
    Madame Raza, vous pourriez peut-être nous dire ce que vous...
    Je suis d'accord avec Shahin à propos des renseignements. Ce n'est pas nouveau. Nous exerçons des pressions dans ce dossier depuis de nombreuses années. Il faut fournir des renseignements très clairs sur ce qui distingue le Canada, son système judiciaire, ses lois, ses droits, ses responsabilités. Il est également très important de ne pas oublier les responsabilités.
    J'aimerais prendre un instant pour mentionner, encore une fois, que je parle de pays du tiers monde, de l'Asie du Sud, où il y a des agents d'immigration corrompus qui font la promotion du Canada sans dire aux gens où ils s'en vont. Ce sont les mêmes personnes qui achètent et qui vendent des gens. Ce sont eux qui arrangent les mariages sur papier. Il faut également se pencher sur cette partie du système, car ce n'est pas toujours aussi simple que la présentation d'une demande. Nous sommes passés par le système régulier, mais certaines personnes ont vendu leur maison et se sont retrouvées démunies juste pour venir ici, car un agent d'immigration corrompu...

  (1620)  

    Faites-vous allusion à un agent d'immigration canadien à l'étranger ou à du personnel recruté sur place?
    Il y en a deux sortes. Certaines personnes ont la citoyenneté canadienne, mais elles retournent dans leur pays d'origine pour y devenir des experts en immigration canadienne — sans permis ni autorisation, mais c'est ce qu'elles font —, et il y en des centaines. Elles ouvrent des commerces.
    Elles doivent maintenant avoir un permis.
    Elles doivent avoir un permis.
    Je viens du Pakistan. Sur des baraques le long de la rue, j'ai vu des panneaux sur lesquels on avait écrit: « Venez au Canada ». Selon moi, ceux qui ouvrent ce genre de commerces représentent une des plus grandes failles du système. Ils ne brossent pas un très bon portrait du pays. Bien entendu, en échange d'argent, on peut obtenir un passeport et un acte de mariage. C'est un autre aspect sur lequel il faut absolument se pencher, à savoir les moyens détournés de venir au Canada.
    J'aimerais également savoir ce qu'en pense Mme Aref.
    Madame Aref, auriez-vous l'obligeance de nous faire part de votre point de vue?
    Oui, mon adjointe va vous l'expliquer.
    Je pense que certains points très valables ont été soulevés à propos du processus de demande dans les pays du tiers monde, mais je crois que nous voulions parler de la surveillance. Une des ressources les plus importantes que pourrait fournir le Canada serait de l'information sur les droits dont jouissent les gens lorsqu'ils sont ici, pendant la période de deux ans ou après. Ce que nous constatons sans cesse, c'est que les femmes parrainées — et pas seulement les femmes, car je pense que c'est également la même chose pour les hommes — ne savent pas du tout quels sont leurs droits, même si elles ne sont pas citoyennes. Elles ne connaissent pas leurs droits juridiques ni les recours qu'elles ont, par exemple, lorsque leur mariage est rompu. Je pense que c'est très important. On pourrait leur fournir cette information avant leur arrivée au Canada, ainsi qu'après — ce serait très important — pour qu'elles sachent qu'elles ont des droits.
    Merci.
    Merci, madame Sabit.
    Madame Sitsabaiesan.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins d'être ici aujourd'hui.
    Je vais commencer par M. Mehdizadeh.
    Vous avez mentionné que vous aimeriez que les membres de la GRC suivent davantage de formation. Vous avez dit qu'il serait difficile — je comprends — que tous nos corps policiers soient bien sensibilisés aux diverses cultures. C'est possible, mais cela ne se fera pas du jour au lendemain. C'est en gros ce que vous avez dit à propos de la formation.
    J'aimerais concrétiser ces besoins de formation. Il faut mieux y répondre pour que ceux qui s'occupent des victimes ou des femmes qui arrivent soient sensibilisés aux réalités culturelles. Pensez-vous que les employés du CIC et les agents de l'ASFC, qui rencontrent peut-être ces femmes à l'aéroport, devraient suivre ce genre de formation?
    Comme je l'ai dit dans mon exposé, de nombreux partenaires différents peuvent accroître la sécurité de tout le monde: les enseignants ou même les orienteurs d'une école. Il faut former les gens quant à la façon d'aborder certains sujets auprès de membres de certains groupes d'immigrants au Canada pour communiquer ces renseignements. Même pour ce qui est du simple recours à des interprètes, à qui doit-on s'adresser? Un grand nombre de facteurs peuvent améliorer la façon d'obtenir l'information nécessaire pour les protéger.
    Je vois.
    Quand nous avons reçu ici des fonctionnaires de CIC, ils ont dit qu'on offre déjà cette formation et qu'ils n'ont pas vraiment besoin d'être sensibilisés davantage.
    Je ne sais pas. Peut-être que Mme Aref, votre adjointe, Mme Raza ou vous-même pourriez éclairer ma lanterne. D'après ce que vous voyez dans les communautés, pensez-vous que les agents sont suffisamment sensibilisés à ce que vivent ces femmes, ou qu'ils doivent être formés davantage?
    Bien. Mon adjointe peut-elle vous répondre?
    À mon avis, un des plus grands problèmes est la difficulté qu'ont ces femmes à ne serait-ce qu'approcher ces agents. C'est peut-être lié à l'idée qu'une telle sensibilité ou simplement les connaissances culturelles ne sont pas au rendez-vous au moment d'aider ces femmes maltraitées ou celles qui ont demandé de l'aide. Cela dit, je pense que nous avons compris de notre côté qu'un des enjeux est tout simplement de leur faire comprendre qu'elles peuvent demander de l'aide, et de briser ce tabou pour qu'elles sachent que c'est possible.

  (1625)  

    J'aimerais ajouter que de toute évidence, la composition de la démographie canadienne a considérablement changé au cours des deux dernières décennies. Il est important de tenir compte dans la formation des travailleurs de première ligne... sans aucun doute au moment de parfaire leur formation. Il y a, disons, 30 ans, nous n'étions pas confrontés aux enjeux dont nous parlons, comme les mariages forcés, les mariages par procuration, la violence fondée sur l'honneur. Il faut s'adapter aux changements démographiques, au visage changeant du Canada et aux problèmes actuels. J'aimerais prendre un instant pour dire que le groupe de lutte contre les mariages forcés en Angleterre comprend des agents d'immigration formés pour reconnaître les signes de mauvais traitements.
    Désolée, il me reste une minute. C'est pourquoi j'essaie de me dépêcher.
    Je veux parler de l'isolement auquel font face les nouvelles arrivantes. Bon nombre de témoins nous ont parlé de cette question, parce que ces femmes n'ont pas accès à une formation linguistique. Une de vous — je ne sais plus qui — a mentionné que les femmes qui viennent rejoindre leur conjoint ne maîtrisent pas l'anglais ou le français. Comme elles n'ont pas la formation linguistique ou les compétences nécessaires pour pouvoir entrer sur le marché du travail, elles sont habituellement forcées de s'isoler dans leur foyer ou dans leur petite cellule familiale. D'autres témoins nous ont proposé d'offrir une séance obligatoire de formation linguistique ou d'acquisition de compétences à ces femmes.
    Quelles sont vos suggestions à ce sujet, mesdames Aref et Sabit?
    Mon adjointe pourra vous en parler. Pourquoi avons-nous ouvert ce centre? Le centre fournit justement des services aux femmes qui viennent sans famille, qui sont célibataires. Elles ont de très gros problèmes.
    Mais Patmeena pourra vous donner plus d'explications à ce sujet.
    Je pense que la question de la langue que nous avons soulevée concernait le français et l'anglais. Selon moi, la formation obligatoire... cela revient à l'une des questions que l'un des membres du comité a posées: que peut-on faire durant ce processus? Je crois qu'il y a lieu de fournir des séances obligatoires de formation linguistique ou d'acquisition de compétences avant que ces femmes arrivent au Canada; en tout cas, c'est certainement quelque chose qui est nécessaire avant ou après leur arrivée. Il va de soi que ce problème contribue à l'isolement, mais il empêche aussi ces femmes de demander de l'aide en cas de besoin.
    Merci.
    Monsieur Shory, vous avez le temps de poser une question.
    Merci, monsieur le président.
    Brièvement, comme on a soulevé la question de la résidence permanente conditionnelle, j'aimerais préciser, aux fins du compte rendu, que cette mesure a été instaurée au terme de consultations menées partout au Canada. Bien entendu, c'est conforme à l'approche adoptée dans d'autres pays aux vues similaires: les États-Unis, l'Australie et le Royaume-Uni. Le but était de détecter les mariages frauduleux et de faire en sorte que les agents d'immigration accordent des exemptions dans les cas de décès ou de violence conjugale présumée.
    La question qui m'intéresse surtout aujourd'hui, parce que vous trois... En passant...
    Désolé, la sonnerie se fait entendre.
    Oh là là!
    Le président: Vous pouvez terminer.
    M. Devinder Shory: Brièvement, vous avez parlé des obstacles linguistiques et de l'idée de fournir une séance d'orientation avant et après l'arrivée. J'aimerais donc en savoir plus sur la question de la langue.
    Madame Raza, vous avez dit être en faveur de l'idée des compétences linguistiques. Je veux en entendre plus long sur l'orientation avant et après l'arrivée; pouvons-nous utiliser les demandes de visa pour sensibiliser particulièrement les femmes dans plus de 90 pays.
    Absolument, je pense que vous le pouvez. Dans de nombreux pays européens, on s'attend maintenant à ce que les immigrants suivent une séance obligatoire d'orientation, pour ainsi dire, et de formation linguistique avant leur arrivée. L'exigence de connaître au moins une des langues officielles est dans l'intérêt tant du Canada que des gens qui viennent au pays, car ils peuvent ainsi se débrouiller seuls et savoir quels sont leurs droits et responsabilités. On ne parle pas nécessairement d'une année d'études. Il s'agit d'une séance d'orientation très élémentaire qui, selon moi, fonctionnerait beaucoup mieux si elle était offerte avant leur arrivée au pays ou, à tout le moins, immédiatement après leur arrivée.
    Madame Raza, je suis désolé, mais quand la sonnerie se fait entendre, c'est signe que nous devons partir. Alors, nous devons y aller maintenant.
    En fait, notre temps est écoulé, et je tiens à vous remercier et... Puis-je vous appeler Shahin? Merci beaucoup.
    Mesdames Aref et Sabit, je vous remercie d'être venues témoigner devant le comité et de nous avoir fait part de vos réflexions sur cette question très importante.
    Des voix: Merci beaucoup.
    Le président: Nous allons suspendre la...

  (1630)  

    Monsieur le président, avant que vous leviez la séance, j'aimerais ajouter un petit point. Mercredi, nous allons recevoir les fonctionnaires et le ministre pour discuter du Budget principal des dépenses. À cause d'un contretemps, le ministre comparaîtra durant la deuxième heure, alors que les fonctionnaires témoigneront durant la première heure. Je voulais simplement en informer le comité.
    Merci, monsieur.
    Devrions-nous suspendre la séance ou nous arrêter là?
    Ne partez pas tout de suite; j'ai besoin de votre aide. Voulez-vous suspendre la séance ou l'ajourner?
    Des voix: L'ajourner.
     Nous pouvons peut-être adopter le rapport, tel que proposé, à la fin de cette réunion?
    Non, je vais lever la séance. Nous y reviendrons une autre fois.
    La séance est levée.
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