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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 065 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 7 février 2013

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    Commençons. Nous poursuivons notre étude sur les possibilités économiques pour les jeunes apprentis.
    Nous sommes heureux d'accueillir Lambert Opula. Il représente le Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre pour personnes immigrantes, le CAMO-PI. Vous pourrez faire un exposé. Essayez de parler assez lentement, pour que nos interprètes puissent faire leur travail. Nous allons vous donner assez de temps pour faire votre présentation.
    Ensuite, les membres de chacun des partis vous poseront des questions, ce qui nous amènera à près de 13 heures, ou plutôt, non, midi — je m'excuse. Oui, nous avons des témoins pour la deuxième heure aussi.
    Vous pouvez commencer. Nous écoutons votre exposé.

[Français]

    Honorable président du comité, honorables membres du comité, distingués invités, le CAMO-PI vous remercie de l'invitation que vous avez bien voulu lui adresser.
    Notre organisation existe depuis 18 ans. Elle a comme mandat, sur l'ensemble du territoire québécois, de participer à des actions de partenariat pour observer les différentes pratiques qui conduisent à l'intégration et, à partir de cela, formuler des observations et des avis sur la stratégie québécoise d'intégration des immigrants. Cette organisation a été souhaitée par des acteurs gouvernementaux, privés, syndicaux et communautaires. C'est à ce titre que nous exerçons notre mandat.
    Nos observations d'aujourd'hui portent sur quatre points: l'accès des jeunes immigrants à l'information sur les programmes d'apprentissage, l'accès de ces jeunes aux programmes, ce qui se passe lors du processus d'apprentissage et ce qui se passe au moment où ils tentent d'accéder à un emploi après l'apprentissage. Je vais commencer par le premier point, soit l'information sur les programmes d'apprentissage.
    Les jeunes immigrants, qui arrivent au terme d'un long processus traumatisant, font souvent face à des problèmes de pauvreté et de retard scolaire. Cela a comme conséquence que le milieu de vie où ils sont est souvent différent des circuits dans lesquels circule l'information qui fait la promotion des programmes d'apprentissage. Il n'est pas toujours facile pour ces jeunes d'avoir l'heure juste quand il y a une occasion de formation.
    Ils vivaient aussi dans des familles qui ont des traditions différentes avec ce qu'on sait et ce qu'on fait actuellement au Canada. Dans les pays d'où ils viennent, les traditions accordent beaucoup de valeur aux personnes qui font de longues études, considérées comme le seul modèle de réussite sociale. Par conséquent, toute possibilité pour un jeune de s'orienter vers des formations de courte durée est vue par les parents, qui souvent dictent leurs choix à leurs enfants, comme étant des contre-valeurs. Cela désoriente souvent les jeunes immigrants lorsqu'il y a une possibilité d'apprentissage.
    C'est pourquoi, en ce qui concerne les circuits d'information, la promotion des programmes et des occasions d'apprentissage, le CAMO-PI propose à votre comité d'envisager des stratégies de communication qui ciblent les milieux où vivent les immigrants. Autrement dit, les programmes de financement et les actions d'apprentissage pourraient avoir un volet de promotion auprès des jeunes de milieux marginalisés.
    En plus de l'information en milieu défavorisé, nous proposons aussi qu'on puisse prévoir du financement pour les différents programmes pour faire en sorte d'organiser ce que l'on appelle des actions de proactivité afin que les intervenants rencontrent ces jeunes dans leur milieu et les ramènent vers les occasions de formation.

  (1110)  

    Le deuxième point concerne l'accès des jeunes aux programmes comme tels. En ce qui a trait à l'accès des jeunes aux programmes, nous avons constaté qu'il existe des difficultés liées à la sous-représentation importante des groupes ethniques, aussi bien dans un métier que parmi les formateurs.
    L'absence de personnes appartenant à leur ethnie dans un métier fait que, dans ce milieu, les jeunes n'ont pas de modèle. De plus, ils craignent de faire un saut vers l'inconnu, vers un métier qui n'est pas connu dans leur milieu, surtout que c'est un métier qu'ils vont obtenir après une brève formation, ce qui est un contre-modèle pour les traditions d'origine.
    Le problème de la sous-représentation de groupes entiers dans certains milieux et certains métiers est un facteur qui limite l'intérêt de jeunes immigrants vers les programmes d'apprentissage. Je prends ici l'exemple des communautés maghrébines qui sont rares et difficilement acceptées dans les métiers relevant du secteur des technologies de l'information et de la communication. Cela constitue une sorte de monde inconnu pour les jeunes venant de ces communautés.
    Il y a toujours dans ces domaines l'absence d'un minimum de compétences de base dans les programmes d'apprentissage. Lorsque des jeunes arrivent au terme d'un processus d'immigration, ils ont connu beaucoup de difficultés et ils n'ont peut-être pas la maîtrise d'une langue de travail au Canada. On leur demande d'aller faire de l'apprentissage de passer directement par la suite à un emploi. Ils se sentent mal équipés, n'ayant pas les compétences de base. Pourtant, les programmes d'apprentissage sont censés leur donner seulement la maîtrise du savoir-faire. On oublie les compétences de base.
    Ce phénomène participe à l'élaboration d'une perception négative qu'ont les jeunes et les communautés vis-à-vis des métiers découlant de l'apprentissage.
    Par conséquent, le CAMO-PI propose que votre comité puisse envisager la possibilité de sensibiliser les milieux concernés, c'est-à-dire les employeurs, sur le fait que l'apprentissage constitue une source d'avenir pour la main-d'oeuvre qualifiée. Pour cela, lorsqu'il y a des lacunes au chapitre des compétences de base, il faut absolument chercher comment former plutôt que de voir à la dispensation de ces compétences de base. Il y a des coûts et des pertes de temps. C'est donc un facteur qui peut affecter la productivité de l'entreprise.
    Nous suggérons qu'il faut faire le contraire. Au regard des perspectives démographiques, l'immigration étant de plus en plus considérée comme une source d'avenir pour la main-d'oeuvre qualifiée, il va falloir investir et considérer les dépenses d'apprentissage comme des dépenses devant garantir la productivité à moyen et à long terme.
    Nous suggérons aussi que votre comité envisage la possibilité d'intégrer un minimum de compétences de base dans les formules des programmes d'apprentissage.

  (1115)  

    Cela pourrait contribuer à atténuer la perception négative qu'ont certains milieux à l'égard des métiers qui découlent de cette voie de formation. Nous pensons aussi qu'un effort en vue d'élargir la liste de métiers admis par le Sceau rouge à un certain nombre de métiers considérés comme des secteurs émergents serait aussi une façon de répondre aux préoccupations des jeunes, qui ont tendance à penser que l'apprentissage au Canada ne concerne généralement que les métiers traditionnels.
    Le troisième point concerne la situation des jeunes immigrants, en tant qu'apprentis, durant le processus d'apprentissage. Ces jeunes arrivent au Canada au terme d'un long processus qui, comme nous l'avons déjà mentionné, est souvent traumatisant. Les familles, lorsqu'elles arrivent ici, vivent d'abord des moments difficiles et vivent dans la marginalité. Elles n'ont pas assez d'argent. Or le fait que le soutien de la collectivité soit très modeste alors même que ces jeunes vivent des moments difficiles est un facteur qui les dissuade de s'engager sur la voie de l'apprentissage. L'apprentissage implique des coûts et ces personnes vivent dans la marge, en termes de revenus.
    Le processus qui conduit à l'achèvement de l'apprentissage est long. On ne peut pas faire autrement parce qu'il faut permettre au jeune ou à l'apprenti de maîtriser le savoir-faire. Or les conditions ne sont pas très souples face à la situation d'un jeune qui est pauvre. Le jeune a alors tendance à chercher de petits travaux de façon à pouvoir subvenir à ses besoins. Étant donné la durée assez longue du processus d'apprentissage, le jeune se sent coincé et il abandonne souvent son cycle de formation.
    Nous pensons qu'il va peut-être falloir rendre ces conditions un peu plus flexibles. Pour un jeune dépourvu de revenus, le fait qu'il y ait un seul bloc et que cela représente plusieurs semaines est très exigeant. Cela donne lieu à des taux d'abandon élevés. En fait, on en revient encore à l'incidence de tout cela sur la perception selon laquelle cette voie est un mode d'accès aux métiers. Autrement dit, cela génère une perception négative.

  (1120)  

[Traduction]

    Monsieur Opula, puis-je vous demander d'entamer la conclusion de votre exposé? Nous aimerions avoir le temps de vous poser des questions.

[Français]

    Merci.
    Pour cela, le CAMO-PI propose d'améliorer le soutien apporté aux jeunes apprentis. Ce soutien pourrait améliorer le taux relatif à l'achèvement des programmes chez les jeunes apprentis.
    Le dernier point est l'accès des jeunes apprentis à l'emploi lorsqu'ils ont terminé leur formation. On observe une sorte de méfiance ou d'inconfort de la part de certains d'employeurs vis-à-vis de la différence, ce qui se traduit par la difficulté pour les jeunes à trouver un emploi. La situation est difficile pour ceux qui ont terminé la formation et qui ne trouvent pas d'emploi. Par conséquent, on propose qu'il y ait une vaste campagne pour convaincre les employeurs que l'apprentissage des immigrants est une formule alternative à l'éducation et que la diversité est une richesse.
    En terminant, il y a une faible coordination entre le métier admis aux normes provinciales et le métier admis au Sceau rouge. Je prends l'exemple de l'aménagement paysager, dont le titre de la profession au Québec est celui d'ouvrier, alors que pour le Sceau rouge, au niveau fédéral, cette norme s'adresse aux ouvriers et aux techniciens. Il est donc difficile pour un ouvrier du Québec de réussir le métier correspondant au Sceau rouge. Il y a donc une sorte de manque d'harmonie qui fait que la mobilité interprovinciale voulue est difficile.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    C'est Mme Boutin-Sweet qui va commencer la première série de questions.
    Allez-y.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Opula, de votre présentation.
    Je vais commencer avec un des derniers points que vous avez soulevés, c'est-à-dire les programmes d'apprentissage qui devraient être plus souples. On a entendu plusieurs témoins parler de programmes d'apprentissage et souvent on leur demande si le programme répond aux besoins de certains groupes particuliers. Je pense par exemple aux groupes autochtones, aux femmes ou aux personnes à mobilité réduite.
    Vous avez parlé d'adaptation de programmes, ce qui serait culturellement plus facile pour les jeunes immigrants. Avez-vous des suggestions précises à formuler à ce sujet au gouvernement fédéral? Je sais que vous travaillez avec le gouvernement provincial, mais avez-vous des suggestions précises pour le gouvernement fédéral?
    Nous proposons de fragmenter la période de formation en deux ou trois blocs, ce qui permettrait à un jeune qui est engagé de subvenir à ses besoins en envisageant la possibilité d'emploi. En un seul bloc, le jeune passe une longue période sans emploi, ce qui est très exigeant et conduit souvent à l'abandon.
    Une partie de la formation est payée par le programme d'assurance-emploi. Cependant, le chèque d'assurance-emploi arrive parfois un peu tard. Par conséquent, ceux qui suivent un programme d'apprentissage font face à un problème financier. Voyez-vous une modification à faire au programme d'assurance-emploi pour aider les jeunes apprentis immigrants?
    Oui.
    Nous avons dit que le chèque d'assurance-emploi est modique pour des gens qui sont à ce niveau car ils ne peuvent pas prétendre accéder à des salaires intéressants. Lorsqu'on leur donne une portion seulement de ces salaires, cela devient encore plus difficile, ce qui les mène souvent à aller chercher d'autres voies d'accès au revenu, parfois même de façon anarchique. C'est pour cela qu'on pense qu'en fragmentant la période, on pourrait contourner cette difficulté.
    Également, on pense à des formules pouvant combiner la contribution de l'employeur et celle de l'assurance-emploi. Il faudrait étudier la question en profondeur et revoir toute la situation. Lorsqu'il s'agit d'une personne qui cherche à obtenir un emploi, il faut ouvrir la voie vers davantage d'intérêts pour les jeunes afin que le bassin de main-d'oeuvre à venir puisse se maintenir au niveau où il était au cours des années antérieures compte tenu des perspectives démographiques.

  (1125)  

    Vous avez parlé de modifier et d'adapter les programmes. Si j'ai bien compris, vous croyez qu'il faudrait peut-être consulter certains groupes, entre autres des organismes du domaine de l'immigration.
    Pour que ces programmes soient modifiés adéquatement, qui selon vous devrait faire partie d'une table de consultation?
    D'abord, il y a les groupes concernés. À mon avis, dans ces groupes, il y a un problème lié aux traditions. Il faudrait modifier la perception. Ensuite, il y a les intervenants des entités territoriales où vivent ces personnes. Il y a aussi les bailleurs de fonds, soit le gouvernement du Québec et les entités fédérales chargées de cette question. On parle donc ici d'une concertation impliquant des acteurs de différents ordres de gouvernement et des intervenants des communautés. Selon moi, c'est ce qui permettrait de trouver des formules plus accessibles et plus mobilisatrices.
    Au sujet de l'intégration en milieu de travail, je vous donne comme exemple un ingénieur d'origine iranienne qui vit dans ma circonscription. Ses diplômes ont été reconnus ici. Là n'est pas le problème. Dans son cas, l'expérience au Canada est le problème. Celle-ci représente beaucoup plus qu'une simple expérience de travail.
    De quelle manière pourrions-nous améliorer cette situation dans les milieux de travail et faire en sorte que les employeurs soient un peu plus sensibles à des cultures différentes?
    Vous avez parlé de campagne d'information, mais serait-il possible de démontrer de façon concrète aux employeurs que les gens de cultures différentes ont une autre façon de voir les choses et que cela doit être pris en considération?

[Traduction]

    Nous allons terminer avec la réponse à votre question.
    Nous vous écoutons.

[Français]

    À cet égard, deux aspects sont à considérer. Le premier concerne la culture. À ce sujet, j'ai proposé une campagne de sensibilisation visant à démontrer aux employeurs que l'immigration va devenir capitale pour le renouvellement de la main-d'oeuvre.
    Il y a aussi la voie des incitatifs. Généralement, les employeurs ont peur de la différence. Par contre, lorsqu'on leur offre des incitatifs qui ont une incidence sur la trésorerie de leur entreprise, ils sont souvent tentés. Au Québec, le programme PRIIME accorde des incitatifs aux employeurs qui acceptent d'embaucher des immigrants pour la première fois et finance les frais de mentorat ainsi que d'autres frais. Dans ces conditions, certains employeurs sont tentés de faire l'expérience et d'engager de nouveaux immigrants.
    En appliquant la même formule au niveau fédéral, les résultats pourraient être significatifs. Par contre, lorsqu'on met en oeuvre une mesure, il faut donner aux acteurs toutes les chances de réussir. Par exemple, on a lancé le projet IPOP, qui permet aux professionnels venant de l'étranger de faire un stage en milieu de travail en vue d'obtenir la reconnaissance de leurs compétences. C'est un projet dont tout le monde souhaite la réalisation, mais il n'offre pas assez de ressources pour soutenir les ordres professionnels appelés à le mettre en oeuvre. Ces ordres professionnels veulent en plus un chèque pour administrer le projet qui, jusqu'à présent, ne connaît pas le succès que l'on voudrait. Si on lui fournissait les moyens nécessaires, ce programme pourrait améliorer sérieusement la possibilité pour les professionnels étrangers d'obtenir cette reconnaissance. Par la suite, le programme PRIIME pourrait...

  (1130)  

[Traduction]

    Merci, monsieur Opula.
    Nous passons maintenant à M. Daniel.
    Vous pouvez y aller.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie d'être venu témoigner.
    J'aimerais d'abord mieux comprendre ce que nous faisons. Nous étudions la formation en apprentissage depuis un bon bout de temps, et en général, au Canada, les gens qui entament de tels programmes le font vers l'âge de 26 ans.
    Est-ce la même chose pour les nouveaux arrivants, ou est-ce que l'âge diffère?

[Français]

    Dans les milieux des immigrants, ce problème se pose. Par exemple, en milieu scolaire au Québec, on dit que les portes sont ouvertes aux jeunes à l'âge de 16 ans et même 18 ans pour l'école secondaire. Par contre, lorsque beaucoup de ces jeunes arrivent au Québec avec un retard scolaire à cause du long processus d'immigration, ils seront poussés à abandonner. Quand ils arrivent, on les déclasse. Ils ne peuvent plus être avec les jeunes de leur niveau scolaire étant donné qu'ils sont déjà plus âgés en raison du long processus migratoire. Ils sont un peu frustrés parce qu'ils ont été déclassés et ils ont honte d'avoir été mis de côté. Cela fait en sorte qu'ils vont vers la marginalité.

[Traduction]

    Quel est l'âge moyen des nouveaux arrivants avec lesquels vous travaillez et qui s'inscrivent à une formation en apprentissage?

[Français]

    L'âge moyen est de 18 à 24 ans, mais en réalité l'âge des jeunes est souvent plus élevé à cause du phénomène de retard.

[Traduction]

    Bon.
    Dans bien des cas, nous savons que, parce qu'ils commencent plus tard, le taux de décrochage est très élevé. Est-ce la même chose, ou est-ce différent pour les nouveaux arrivants avec lesquels vous travaillez?

[Français]

    Excusez-moi, je n'ai pas bien entendu la question.

[Traduction]

    Je répète ma question... Vous ne pouvez pas m'entendre?
    Avez-vous des données sur le taux de décrochage?
    Pourriez-vous reformuler votre question?
    Voici ma question. Est-ce que le taux de décrochage des immigrants avec lesquels vous travaillez correspond à la moyenne pour tous les apprentis à l'échelle du Canada, ou est-il supérieur?

[Français]

    Le taux de décrochage est le même ailleurs au Canada sauf que lorsqu'on regarde la situation à la grandeur du Québec, on voit que Montréal a un taux beaucoup plus élevé parce que c'est une ville où il y a une très forte concentration d'immigrants. Il y a beaucoup de problèmes et de pauvreté. Donc, à Montréal, le taux est très élevé.

  (1135)  

[Traduction]

    Sur le plan de ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour aider les jeunes et les encourager à se tourner vers ces métiers, vous avez mentionné qu'ils ont déjà une idée préconçue des métiers, mais qu'il y a 70, 80, ou des centaines de métiers différents pour lesquels ils pourraient se prévaloir du programme du Sceau rouge. Constatez-vous qu'ils ne se limitent qu'à quelques-uns de ces métiers? Reçoivent-ils l'information? Qu'est-ce que le gouvernement fédéral peut faire pour qu'ils sachent ce qu'il faut faire?

[Français]

    Ils ne connaissent pas tous les métiers qui existent. J'ai dit que l'information circulait dans des milieux qui sont loin de la réalité sociale des jeunes immigrants. Les jeunes constituent la clientèle potentielle de l'apprentissage. C'est la clientèle de gens qui ne veulent pas acquérir des connaissances scolaires ou universitaires ou n'en ont pas les capacités. Dans ce milieu, ils n'ont pas assez d'information. Il faut canaliser l'information dans les milieux où vivent ces jeunes gens pour être certain de les intéresser. Il faut canaliser l'information dans les milieux où vivent leurs parents pour agir sur leurs convictions d'origine.

[Traduction]

    Merci, monsieur Daniel.
    Nous passons à M. Lapointe.

[Français]

    Vous avez apporté plusieurs éléments rafraîchissants et intéressants. Je vais en faire le tour pour m'assurer que j'ai bien compris et approfondir la question.
    Au tout début de votre témoignage, vous avez dit qu'il y avait une difficulté de base. J'ai perçu, lors de votre témoignage, une espèce de tiraillement. Il y a un problème de compétences de base chez beaucoup de nouveaux immigrants parce qu'ils viennent d'une zone de guerre. L'école primaire avait peut-être été brûlée et fermée pendant huit ans. On comprend le contexte.
    Il y a une difficulté avec des problèmes de compétences de base, mais il y a aussi la perception que, pour réussir dans la vie, il faut aller à l'université. Comprenez-vous ce que je veux dire? Il y a un tiraillement complet entre la perception et le réel.
    Les programmes de métiers, qui sont un peu au milieu, pourraient répondre à certains besoins. Si je comprends bien, la perception des métiers, pour beaucoup de gens dans les communautés immigrantes, est assez négative. Pourtant, si on a été dans une famille canadienne depuis les années 1930, 1940, 1950, 1960 ou 1970, on a tous ces modèles. Un de mes oncles était électricien et il a pris une très belle retraite à 60 ans. Il était électricien de formation et avait eu, si je ne me trompe pas, deux ans de formation. C'est tout.
    Quand vous disiez que l'une de vos propositions était de cibler les milieux immigrants pour faire une promotion adaptée des programmes, l'idée était parfaite, mais comment faire? Est-ce en traduisant tout en 22 langues? Doit-on essayer d'expliquer le cas de mon oncle à des Maliens? Par exemple, doit-on dire à des Maliens: « Voyez, cette famille a été constituée en 1950. L'homme était un électricien et, à 60 ans, sa maison était payée. Il a eu une très belle vie »? On ne peut pas attendre 25 ans avant d'avoir un modèle compréhensible pour les Maliens ou les Sénégalais de Montréal.
    Comment arrive-t-on à faire cela?
    Il faut agir sur le plan de l'information. L'information qu'on fait circuler dans des sites Web ou par les organismes comme ACCESS, au Québec, par exemple, ne peut être vue que par les jeunes qui ont progressé normalement. Lorsqu'il s'agit de jeunes qui ont des difficultés ou qui vivent dans des milieux marginalisés, le fait d'accéder à l'ordinateur est un privilège. Pour savoir qu'il faut consulter tel site Web pour aller chercher telle information, il faut être encadré. Pour ces jeunes, cela ne vient pas facilement.
    Par conséquent, il faut canaliser cette information vers leur milieu de vie. Par exemple, dans quel quartier vivent-ils? Dans quel milieu vivent-ils? Est-ce dans un HLM? Il ne faut pas avoir recours aux sites Web, mais à l'affichage dans les HLM, les quartiers, les lieux de culte des organismes communautaires et les locaux des associations ethnoculturelles.

  (1140)  

    Je comprends.
    Vous avez proposé une idée qui me semble intéressante. Si j'ai bien compris, il s'agit d'ouvrir le Sceau rouge à des métiers de nouvelles technologies, ce qui pourrait donner être plus attirant pour les communautés.
    Pourriez-vous nous fournir plus de détails en ce qui a trait aux métiers. Vous pourriez faire parvenir au greffier vos suggestions à cet égard? Je trouve cela fort intéressant.
    Vous avez souligné un autre élément et il y a deux autres sujets sur lesquels j'aimerais vous entendre. On constate la sous-représentation du milieu ethnique chez les formateurs. C'est un peu le mystère de l'oeuf et de la poule. Pensez-vous que, malgré le fait qu'il n'y ait pas encore eu de grand succès chez certains groupes immigrants dans les métiers — le bassin de gens à qui on pourrait demander d'être formateurs doit être un peu limité —, il y aurait suffisamment, si on faisait l'effort, de formateurs de souche africaine, maghrébine et autres qui pourraient enseigner les métiers?
    Si on parle d'intégration, avez-vous des chiffres par rapport à la difficulté d'intégration dans les milieux ruraux? J'ai les chiffres de certaines MRC de ma région et il y a des efforts qui sont faits pour recruter des immigrants qui ont une formation dans un métier, mais le taux de rétention est épouvantablement bas. Une MRC a fait venir en région 12 immigrants qui habitaient à Montréal pour répondre à des besoins très concrets dans les emplois manufacturiers. Tout 10 d'entre eux ont quitté la région sur un période de trois ans.
     Avez-vous des chiffres là-dessus et peut-être des débuts de solutions à formuler?

[Traduction]

    Merci, monsieur Lapointe.
    Nous allons terminer avec votre réponse, monsieur Opula.
    Je sais que cela fait beaucoup de questions, mais je vais vous demander de répondre assez brièvement.

[Français]

    Parlons d'abord des formateurs. Le formateur lui-même est un moyen d'information. Le fait qu'il soit là permet aux jeunes autour de lui d'apprendre qu'il y a quelque chose.
    De par le monde, on constate que, lorsque des personnes d'autres origines ethnoculturelles investissent un métier, le taux de fréquentation des immigrants augmente. Je pense que c'est l'une des voies de solution.
    En ce qui a trait aux milieux ruraux, je ne pourrais pas vous donner de chiffres précis. Néanmoins, je sais que le taux de rétention est très faible, comme vous venez de le dire. Ce problème est dû au fait que, au début, lorsqu'on a commencé la régionalisation de l'immigration, on n'a pas pensé à établir un lien entre le profil économique de la région, c'est-à-dire les besoins réels des employeurs de la région, et celui des immigrants à recruter.
    Le CAMO-PI propose plutôt de promouvoir un modèle de microgestion. Il consiste à connaître les besoins réels et à aller recruter les personnes dont il est question. Le phénomène que vous avez constaté s'explique aussi par la présence de ce qu'on appelle les immigrants en regroupement familial. Les personnes recrutées dans le cadre des efforts de regroupement familial n'ont pas été évaluées et, parfois, n'ont pas les caractéristiques qu'il faut pour les besoins de la région. C'est pour cela qu'il y a des écarts. Quoi qu'il en soit, il faut savoir qu'on doit composer avec cela.

[Traduction]

    Merci, monsieur Opula.
    C'est maintenant le tour de M. Shory.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Opula. J'aime la passion que vous avez pour votre travail.
    Je suis aussi un immigrant, monsieur Opula, et je comprends très bien à quel point il est important de pouvoir faire reconnaître les compétences qu'on possède déjà. Il devrait au moins y avoir un cheminement clair à suivre, compte tenu de l'expérience et de l'instruction qu'on a déjà.
    Votre organisme, le CAMO-PI, a créé un programme qui vise à faciliter la reconnaissance des certificats de compétence professionnelle acquis à l'étranger, dans 22 États admissibles. D'après votre expérience, ce programme connaît-il du succès? La reconnaissance se fait-elle partout au Québec? Quels sont les obstacles? J'aimerais que vous nous en disiez davantage sur tous les aspects de ce programme.

  (1145)  

[Français]

     Merci.
    Le CAMO-PI a lancé plusieurs initiatives menant à la reconnaissance des diplômes obtenus à l'étranger. Nous avons étudié une expérience qui a conduit à une formule d'intégration pour les infirmières, les infirmiers, les infirmières et les infirmiers auxiliaires ayant obtenu leur diplôme à l'étranger. Or cette formule a été couronnée de beaucoup de succès et a contribué à résoudre le problème du manque de personnel en soins de santé au Québec.
    Nous avons aussi mis sur pied une formule d'encadrement pour les ingénieurs ayant obtenu leur diplôme à l'étranger. Cette formule a été étudiée de concert avec la Faculté Polytechnique de l'Université de Lubumbashi et l'organisme AMPE-CITI. L'objectif était de dispenser des cours à ces ingénieurs pour qu'ils augmentent leurs chances de réussir l'examen permettant d'accéder à l'Ordre des ingénieurs. Ce projet a été un succès en ce qui concerne l'accompagnement et la réussite à l'examen.
     Cependant, après que ces gens aient obtenu la reconnaissance de leur diplôme, il y a encore beaucoup d'efforts à faire avant qu'ils trouvent un emploi. Ici encore, je pense qu'il faut recourir à une campagne de sensibilisation pour faire accepter aux employeurs l'idée que dans peu de temps, l'immigration va devenir un moyen incontournable d'assurer le maintien de la productivité.
    Nous travaillons à d'autres formules. Nous avons remarqué, notamment en Ontario, qu'au moment où le CAMO lançait les trois formules, c'est-à-dire pour les ingénieurs, les infirmiers et les infirmières et les infirmiers et infirmières auxiliaires, la province n'avait pas encore commencé à bâtir des passerelles pour ces gens. Depuis ce temps, par contre, l'Ontario a réalisé 11 passerelles, alors que nous n'en sommes qu'à trois.
     Bref, je pense qu'il serait avantageux d'encourager toutes les provinces et territoires à accroître les formules d'accompagnement pour des catégories précises de professionnels afin que ceux-ci obtiennent la reconnaissance de leurs compétences.

[Traduction]

    Merci.
    Vous avez aussi parlé d'étendre le recours au programme du Sceau rouge à d'autres métiers. Pourriez-vous donner des exemples de cela? Le programme du Sceau rouge existe depuis toujours, et il devrait ressortir dans les domaines émergents aussi. Vous alliez en parler.
    J'aimerais aussi que vous nous parliez de votre programme hip-hop.
    Nous allons terminer là-dessus, monsieur Opula. Nous vous écoutons.

[Français]

    J'ai mentionné l'accompagnement des ingénieurs et des infirmiers et des infirmières, mais il y a aussi les professions libérales, par exemple la comptabilité, l'architecture, etc. Ce dont des domaines où le problème se pose depuis très longtemps. Par ailleurs, il y a depuis un certain temps des secteurs qui connaissent un grand essor au Canada, notamment l'industrie bioalimentaire, la biotechnologie et l'aérospatiale. Il va donc falloir penser à étendre à ces nouveaux secteurs la gamme des métiers encadrés. Je pense que cela va répondre aux intérêts des jeunes qui regardent dans cette direction sans toutefois trouver d'ouvertures.

  (1150)  

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Cuzner, vous avez des commentaires ou des questions?
    J'ai deux questions à poser, et vous pouvez consacrer à chacune le temps que vous voulez.
    Certaines des préoccupations que vous avez soulevées ne sont pas différentes de celles des Canadiens à l'échelle du pays, entre autres, le taux d'attrition des programmes d'apprentissage, parce qu'ils doivent partir, gagner leur vie et faire plus d'argent pour répondre à leurs propres besoins et à ceux de leur famille. D'autres témoins qui ne sont pas nécessairement de nouveaux arrivants nous en ont aussi parlé.
    Cependant, d'autres difficultés s'ajoutent en ce qui vous concerne, et je remercie mon collègue, M. Lapointe, des questions qu'il vous a posées au sujet de ce qu'il est possible de faire en particulier sur ce plan.
    On suggère que la formation des formateurs comporte un volet culturel. C'est une idée fort sensée, mais j'aimerais pousser cela plus loin. Parfois, cerner les problèmes, c'est ouvrir la voie aux solutions. Comment voyez-vous le rôle du gouvernement fédéral à cet égard?
    Mon autre question est tout aussi bonne. Elle a été soulevée hier, la dernière fois où nous avons reçu des témoins. Selon les Manufacturiers et exportateurs du Canada, certaines des grosses sociétés connaissent un réel succès — Bombardier, par exemple. La formation en apprentissage fonctionne très bien. Votre groupe travaille-t-il de concert avec des grandes sociétés de ce genre, qui semblent comprendre l'importance d'une formation soutenue? Assurez-vous une liaison constante avec certaines des grandes sociétés qui le font bien?
    Je vous laisse répondre. Merci.

[Français]

    Merci.
    Je vais d'abord parler de ce que le gouvernement fédéral devrait faire pour contribuer à trouver une solution à ces problèmes.
     Le gouvernement fédéral pourrait encourager les efforts qui sont faits par les provinces. Il pourrait s'agir d'un genre de maillage de programmes. En effet, plutôt que de réaliser des programmes dans le cadre desquels le fédéral propose des subventions à des organismes pour que ceux-ci interviennent, il y aurait moyen d'établir un système pour que ces intervenants aient d'abord à obtenir du financement provincial avant qu'une subvention fédérale leur soit accordée à titre complémentaire. En passant, ce système est une façon de résoudre le problème de visibilité des programmes fédéraux et de diffuser dans l'opinion publique l'idée que le fédéral applique une formule pour résoudre des problèmes précis. Je pense que l'idée du maillage est à développer.
    Comme vous l'avez remarqué, l'idée de l'Association des manufacturiers du Canada est réelle. Bombardier fait beaucoup d'efforts dans ce domaine, mais lorsque nous décrivons ce problème, nous ne parlons pas des cas exceptionnels que sont les grandes entreprises. Contrairement aux petites et moyennes entreprises, les grandes entreprises n'ont pas de difficulté à trouver de la main-d'oeuvre qualifiée. Elles ont tendance à travailler en vase clos tandis que les petites et moyennes entreprises, n'ayant pas les moyens de résoudre le problème, suivent les efforts que la collectivité est en train de faire.
     C'est pourquoi nos propositions concernent essentiellement la majeure partie des employeurs, donc les petites et moyennes entreprises. Nous n'oublions pas ce qui se passe dans les grandes entreprises. Toutefois, quand elles font face à une difficulté, elles n'hésitent pas à trouver des solutions en Asie, en Iran ou ailleurs et à faire venir des travailleurs étrangers, ce que les petites et moyennes entreprises ne peuvent pas faire seules.
     Nous pensons qu'il est important de prendre des mesures qui facilitent l'accès des employés aux petites et moyennes entreprises et de trouver des solutions à ces problèmes.
    Il y a trois ans, j'ai mené une étude sur le processus de recrutement de la main-d'oeuvre qualifiée à l'étranger. Cette étude portait essentiellement sur le secteur aérospatial.

  (1155)  

[Traduction]

    Merci, monsieur Opula. Nous avons apprécié votre exposé et vos commentaires. Nous allons certainement en tenir compte.
    Je vois que la plupart des témoins du deuxième groupe sont arrivés.
    Nous allons nous arrêter cinq minutes pour que tout le monde puisse s'installer.

  (1155)  


  (1200)  

    J'invite mes collègues à revenir s'asseoir.
    Je souhaite la bienvenue à MM. Reed et St. John, de la Central Ontario Building Trades.
    Nous avons aussi M. Martin, de la Fraternité internationale des ouvriers en électricité. Si j'ai bien compris, nous aurons deux exposés.
    M. Grimshaw va commencer, puis nous écouterons M. St. John. Nous aurons ensuite les questions.
    Veuillez parler assez lentement pour que les interprètes puissent traduire vos propos.
    Monsieur Grimshaw, nous vous écoutons.
    Je vous remercie de l'occasion que vous nous donnez de vous faire part de notre expérience et de nos points de vue sur l'important sujet de la formation en apprentissage. Nous sommes heureux de l'intérêt que le comité permanent manifeste pour cette question et nous attendrons avec impatience la publication de votre rapport.
    Je suis John Grimshaw. Je suis le secrétaire-trésorier exécutif de la Fraternité internationale des ouvriers en électricité, au sein du Construction Council of Ontario. Les sections locales affiliées au conseil comptent environ 14 000 compagnons d'apprentissage et apprentis dans le domaine de l'électricité. Les compagnons possèdent pour la plupart un certificat portant le Sceau rouge, lequel garantit la reconnaissance des compétences dans le domaine à l'échelle du Canada. Nous représentons aussi 750 monteurs de lignes à haute tension, ainsi que quelque 400 travailleurs en communication.
    Permettez-moi d'abord de vous faire part de la stratégie que nous utilisons pour garantir que pratiquement tous les apprentis de notre syndicat terminent leur formation en apprentissage.
    Nous estimons qu'environ 90 p. 100 de nos apprentis terminent leur formation. Je vous parle uniquement de l'Ontario, et non de l'ensemble du pays. D'après ce que nous en savons, le taux de réussite des autres apprentis se situe entre 50 et 60 p. 100.
    Premièrement, il faut comprendre la principale raison pour laquelle des apprentis décrochent: ils sont mis à pied par leur employeur et ne peuvent trouver un emploi auprès d'un autre entrepreneur prêt à engager un apprenti qui en est à leur degré de formation. Au sein de notre syndicat, nous avons un système qui sert à surmonter ce problème. Chacune de nos 11 sections locales a un comité mixte de formation en apprentissage qui travaille avec les employeurs. C'est ce comité, et non les employeurs individuellement, qui parraine officiellement chaque apprenti. Le syndicat peut envoyer un apprenti à n'importe lequel des 800 employeurs qui ont signé une convention collective avec notre syndicat. Ainsi, quand un apprenti est mis à pied par un employeur, il peut être affecté à un autre employeur, à condition, bien sûr, qu'il y ait du travail à faire.
    Dans le secteur de la construction, ce système de parrainage fondé sur un comité mixte est nettement plus efficace que le parrainage assuré par un employeur individuel. Avec le comité mixte, l'apprenti ne risque presque plus d'être interrompu par une longue période de chômage. En plus, l'apprenti peut obtenir une carte de voyageur qui lui permet d'obtenir du travail dans n'importe laquelle de nos sections locales à l'échelle du Canada. De nombreux apprentis et compagnons le font.
    Le deuxième aspect important à comprendre, c'est que la plupart des jeunes travailleurs n'entreprennent pas une formation en apprentissage dès qu'ils sortent du secondaire. Selon l'Ordre des métiers de l'Ontario, l'âge moyen de l'apprenti électricien est de 28 ans dans la province. Il y a donc tout un écart entre la fin du secondaire et le début de la formation en apprentissage. Les connaissances acquises au secondaire en maths et en sciences se sont émoussées, tout comme les compétences d'apprentissage en classe. Il s'agit pourtant de compétences essentielles dans notre métier. Un électricien, pour être compétent, doit posséder une base solide en maths pour comprendre les formules qui sont au coeur d'une grande partie du travail.
    Notre syndicat offre beaucoup de soutien additionnel à nos apprentis. Par exemple, le soutien offert par la section locale de Toronto comporte 13 semaines de cours obligatoires donnés les samedis et couvrant les aspects essentiels du métier, de sorte que les apprentis aient de meilleures chances de réussir à l'école de métiers d'un collège communautaire. À cela s'ajoutent 34 heures de formation obligatoire sur les mesures de sécurité au travail. Enfin, des réunions régulières entre l'apprenti et les représentants du comité mixte garantissent à l'apprenti qu'il obtient le soutien qu'il lui faut, ainsi que l'expérience pratique qu'il est censé obtenir.
    La plupart de nos autres sections locales — la mienne, à Hamilton, par exemple — offrent un soutien semblable aux apprentis. Ce soutien est absolument essentiel à l'obtention d'un taux de succès élevé. L'absence de soutien fait partie des raisons pour lesquelles le taux de réussite est si faible dans certains segments du secteur des entrepreneurs-électriciens.
    Dans le nord-ouest de l'Ontario, notre section locale offre un programme qui sert à hausser le niveau d'éducation des jeunes travailleurs des Premières Nations de sorte qu'ils puissent réussir un de nos programmes d'apprentissage. Au cours des cinq dernières années, notre section locale de Thunder Bay a diplômé 30 jeunes travailleurs des Premières Nations ayant participé à ce programme. Ils ont ensuite entrepris avec succès leur formation en apprentissage et bon nombre d'entre eux ont terminé leur formation. Sans ce soutien initial, puis le soutien que notre syndicat donne à tous nos apprentis, de nombreux jeunes travailleurs des Premières Nations n'auraient pas terminé leur formation avec succès.
    La troisième chose à comprendre, au sujet des taux de réussite, c'est que réussir exige un investissement conjoint: l'apprenti et l'employeur doivent être résolus à faire de la formation en apprentissage une réussite.

  (1205)  

    À l'intérieur du système que notre syndicat a établi avec nos employeurs, cet investissement conjoint est automatique. Le comité mixte choisit et parraine les apprentis, et les rencontre pour veiller à ce qu'ils suivent les deux cours que nous exigeons, en plus de leurs cours à l'école des métiers. Le comité mixte rencontre aussi les apprentis pour confirmer avec eux qu'ils sont bien exposés à toutes les facettes du métier quand ils sont au travail.
    Ce qui est vrai pour notre syndicat et nos employeurs ne l'est pas toujours pour d'autres employeurs. Il y en a beaucoup qui voient les apprentis comme une source de main-d'oeuvre à bon marché. Ces employeurs n'ont absolument pas l'intention d'engager l'apprenti, une fois sa formation terminée, et ils se fichent que la formation soit achevée avec succès ou non: tant qu'elle n'est pas terminée, ça leur coûte moins cher. Souvent, les employeurs de ce genre ne font aucun effort pour exposer l'apprenti à toutes les facettes du métier. Pas étonnant que tant d'apprentis décrochent ou échouent aux examens de l'école des métiers, dans un tel contexte.
    Tout cela m'amène aux programmes fédéraux à l'appui de la formation en apprentissage.
    Les subventions, notamment les subventions à caractère fiscal, sont utiles. Nous les appuyons. Cependant — et c'est important —, les subventions doivent être reportées: l'employeur ne doit obtenir une subvention qu'une fois que l'apprenti a terminé avec succès les différentes étapes de la formation en apprentissage, et le montant de l'aide doit augmenter aux dernières étapes de la formation en apprentissage.
    Les programmes actuels de subvention donnent aux employeurs opportunistes la possibilité d'intégrer des apprentis qui en sont à leur première ou deuxième année sans rien investir dans leur formation ou sans s'engager à les soutenir jusqu'à la fin. Les arguments économiques fonctionnent toujours. Quand vous subventionnez un mauvais comportement, il se répétera, et c'est précisément ce qui se produit.
    C'est facile à corriger: reconfigurez le soutien que vous donnez aux employeurs de sorte qu'ils reçoivent des montants croissants de soutien à la fin de chaque étape de la formation de l'apprenti.
    Le quatrième aspect dont je veux parler est lié aux effets négatifs des changements apportés aux politiques. Je vais vous donner deux exemples.
    Le premier remonte au milieu des années 1990. À l'époque, quand les apprentis laissaient leur emploi pour aller à l'école des métiers, ils recevaient huit semaines d'assurance-emploi. Comme vous le savez, les choses ont changé et les apprentis, comme tout autre travailleur au chômage, doivent maintenant subir une attente de deux semaines avant de recevoir leurs prestations. Ils reçoivent donc des prestations pendant six semaines, au lieu de huit. Je vous prie de vous pencher de nouveau sur cela. Les jeunes travailleurs ne mettent pas d'argent de côté. La perspective de devoir se passer de revenu pendant deux semaines suffit à décourager certains jeunes travailleurs de fréquenter l'école des métiers. Ils finissent par abandonner leur formation en apprentissage, et la subvention versée à l'employeur est gaspillée.
    Le deuxième changement — et je sais que cela ne relève pas du gouvernement fédéral — c'est qu'en Ontario, le gouvernement provincial a permis aux collèges d'exiger des droits de scolarité pour les formations en apprentissage. En ce moment, il en coûte 400 $ pour chaque session de huit semaines à l'école des métiers. L'élimination des deux semaines de prestations d'assurance-emploi et l'ajout de frais de scolarité se conjuguent pour faire grimper le coût de la formation que doit assumer l'apprenti. Encore une fois, les arguments économiques se tiennent. Quand vous augmentez le prix de quelque chose, il y en a moins. S'il faut payer plus cher pour fréquenter l'école des métiers, inévitablement, moins d'apprentis vont finir leur formation.
    Vous devez reconnaître qu'il y a une tension — une contradiction, même — entre nos aspirations et nos politiques. D'un côté, nous nous préoccupons tous du nombre élevé d'apprentis qui ne finissent pas leur formation. De l'autre, les subventions encouragent les employeurs à utiliser les apprentis qui sont en première ou deuxième année de formation, mais ne les encouragent pas à investir dans le succès des apprentis. En parallèle, les comités mixtes, qui investissent d'importantes ressources dans le soutien des apprentis, reçoivent peu de soutien pour leur travail, ou n'en reçoivent pas du tout. Et le comble, c'est que d'autres changements dans les politiques se traduisent par une forte augmentation du coût de la formation en apprentissage.
    Nos aspirations et nos politiques doivent être harmonisées. Nous espérons sincèrement que vous réussirez à résoudre ce problème.
    Merci encore. Si vous avez des questions, je serai heureux d'y répondre.

  (1210)  

    Je vous remercie beaucoup de votre exposé.
    Nous allons donner la parole à M. St. John.
    Merci. C'est un plaisir pour moi de m'entretenir avec le comité aujourd'hui.
    Je m'appelle James St. John. Je suis le directeur commercial du Central Ontario Building Trades, ainsi que le directeur de Hammer Heads. Je suis accompagné aujourd'hui par Peter Reed, l'un des agents commerciaux du Central Ontario Building Trades et le représentant régional de Hammer Heads. Nous avons également un de nos directeurs affiliés, Steve Martin, qui est le directeur commercial de la section locale 353 de la FIOE.
    Le Central Ontario Building Trades représente 80 000 hommes et femmes qui travaillent dans le secteur de la construction. Nous avons mis sur pied un programme qu'on appelle Hammer Heads, afin d'interagir avec les jeunes de la région du Grand Toronto. Nous sommes situés à Toronto, essentiellement dans la région du Grand Toronto. Le territoire que nous couvrons va de Trenton à Oakville à Parry Sound. Il s'agit donc d'une très vaste région qui représente, comme je l'ai déjà dit, 80 000 hommes et femmes du secteur de la construction.
    Nous avons 26 sections locales syndicales qui nous donnent accès à des centres de formation de pointe où nous pouvons engager des jeunes de notre région. C'était l'un des principaux objectifs de notre programme, qui a été lancé grâce au Youth Challenge Fund. Ce fonds a injecté 51 millions de dollars pour nous aider à mobiliser les jeunes de manière significative afin qu'ils entreprennent une carrière, et non seulement des emplois temporaires. C'est de cette initiative que le programme Hammer Heads est né.
    Nous ne sommes pas ici pour demander de l'argent au gouvernement, contrairement à bien d'autres témoins qui, j'en suis certain, se font entendre ici. Nous ne demandons pas d'argent aujourd'hui. Nous demandons plutôt au gouvernement de nous aider.
    Avant de venir ici, j'avais une réunion ce matin sur la Colline. J'ai remarqué tous les travaux de construction. Je me suis demandé si l'entrepreneur chargé de tous ces travaux offrait des occasions d'apprentissage. Je ne sais pas si le comité le sait ou non, mais je crois que c'est une question impérative. Nous voulons que le gouvernement établisse un lien entre les projets d'infrastructure qu'il finance et les possibilités d'apprentissage offertes aux jeunes de nos communautés. Il ne lui en coûterait rien. Il n'en coûte rien aux employeurs, qui auront besoin de main-d'oeuvre pour effectuer les rénovations ou construire les nouveaux bâtiments prévus dans le cadre de vos projets d'infrastructure. Nous avons créé un programme qui nous permet d'offrir la formation et le mentorat dont ces jeunes ont besoin pour obtenir un plein emploi à la fin de notre programme.
    Le témoin précédent a parlé du maintien de l'effectif et de la façon de mobiliser les jeunes. Les jeunes qui se sont engagés dans notre programme vivent dans 13 quartiers prioritaires de Toronto. Je crois que nous avons beaucoup plus de quartiers difficiles mais, pour une raison quelconque, nous n'avons que ces 13 quartiers soi-disant prioritaires. Notre programme ciblait d'abord les jeunes de ces quartiers prioritaires, et nous l'avons ensuite étendu aux quartiers de nos communautés qui sont en manque de ressources.
    Nous accueillons des jeunes qui ont probablement été impliqués dans des activités de gangs, qui n'ont pas nécessairement terminé leurs études secondaires et qui ont eu des difficultés et des ennuis tout au cours de leur vie. Nous avons réussi à mobiliser ces jeunes et à transformer leur vie.
    L'un des objectifs de Hammer Heads était de produire un impact immédiat. Un grand nombre des jeunes que nous ciblons ont déjà été prestataires du programme Ontario au travail. Au cours de la courte période d'existence de notre programme — il existe depuis près de trois ans maintenant —, nous avons retiré 21 jeunes du programme Ontario au travail pour en faire des apprentis du secteur de la construction, ce qui a permis de réaliser des économies de 184 000 $. Je le répète, il n'en coûte rien au gouvernement, tandis que nous avons allégé le fardeau que représentaient les jeunes prestataires du programme Ontario au travail, qui sont aujourd'hui des contribuables.
    Je crois que ce modèle peut être reproduit ailleurs. Évidemment, nous oeuvrons à Toronto et dans la région du Grand Toronto, mais un programme semblable au nôtre peut être instauré partout au Canada. Il faut établir un pont entre les jeunes et les emplois spécialisés grâce à des possibilités d'apprentissage, ce que nous ne faisons pas suffisamment. Au bout du compte, lorsque nous investissons dans des projets d'infrastructure, il faut s'assurer que ces projets créent des possibilités d'apprentissage pour nos jeunes.
    Nous engageons 45 jeunes par année dans notre programme de 12 à 14 semaines. Ce programme fonctionne comme un camp d'entraînement. Il faut comprendre que les jeunes avec lesquels nous travaillons n'ont pas été des élèves modèles, ni forcément des citoyens modèles, alors nous dirigeons notre programme sans ménagement.

  (1215)  

    Voici une journée typique des jeunes inscrits dans notre programme: les jeunes se lèvent probablement à 5 heures; ils prennent le transport en commun pour se rendre à deux endroits — ils doivent se rendre d'eux-mêmes jusqu'à nos autobus —, où nous les attendons pour les conduire à nos centres de formation. Toute la journée, ils apprennent les technologies vertes, ils reçoivent une formation pratique dans nos centres de formation de pointe et ils ont la possibilité de toucher à chacun des métiers. Nous représentons 26 sections locales différentes et chacune offre la possibilité d'apprendre un métier différent. Au lieu de dire simplement aux jeunes ce qu'ils vont devenir, nous les mettons dans des situations réelles. Ils ont la chance de toucher aux métiers, de s'en imprégner, avant d'être évalués par des professionnels, par des instructeurs spécialisés.
    Les syndicats investissent collectivement entre 20 et 60 millions de dollars dans la formation, dans différentes régions du Canada. Nous avons des centres de formation à la fine pointe où nous formons nos membres. Rien ne nous empêche de former aussi quelques-uns de ces jeunes à risque pour leur permettre d'avoir une carrière intéressante. Hammer Heads, qui se trouve au coeur des métiers de la construction, peut s'adresser à tous les différents centres de formation pour trouver le métier qui convient à une personne qui n'a peut-être pas compris le métier d'électricien, de plombier, de calorifugeur, de monteur de charpentes métalliques ou de structures d'acier, de poseur de marbre et de tuiles ou de manoeuvre. Nous intégrons les jeunes dans ces environnements pour qu'ils puissent en faire l'expérience en temps réel et comprendre ce que serait leur vie dans ces métiers précis. Selon nous, c'est la meilleure façon d'évaluer les jeunes. Ils ne graviteront pas tous vers un métier particulier. Nous les laissons donc essayer toute la panoplie de métiers que nous représentons; c'est un aspect très important de ce que nous faisons.
    De plus, nous suivons les jeunes de très près. Dans un court laps de temps, nous avons eu 107 participants et 98 diplômés. Ce qui nous impressionne le plus et ce dont nous sommes le plus fiers, c'est qu'après avoir terminé notre programme, cinq de nos jeunes ont décidé de poursuivre des études postsecondaires. Ce sont des jeunes issus de certains milieux difficiles qui avaient abandonné l'école; une fois qu'ils ont développé des intérêts et se sont donné une orientation, nous les avons incités à retourner à l'école.
    Parmi nos 98 diplômés, 91 ont entrepris un apprentissage. Ce sont 91 jeunes dont nous avons transformé la vie. Le maintien en poste est essentiel. Comme John en a fait allusion, c'est fantastique d'entreprendre un apprentissage, mais encore faut-il le terminer. Nous suivons donc les jeunes pendant leur première année avec nous. Nous les accompagnons à leur première journée de travail pour les présenter aux employeurs; puis nous les évaluons à la fin de chacune des quatre premières semaines, et ensuite tous les mois pendant la première année, pour nous assurer qu'ils sont bien intégrés au système.
    Nous offrons différentes façons d'interagir avec nos employeurs, mais ce n'est pas facile de traiter avec les jeunes auxquels nous avons affaire. Lorsque nous avons lancé le programme, nous avions affaire plus particulièrement aux jeunes de la diaspora africaine. C'était notre groupe cible, et il reste encore dans notre mire. Nous avons élargi le programme pour inclure les jeunes Autochtones; nous avons inscrit sept Autochtones dans notre programme et ils ont très bien réussi. Deux ont terminé leur formation générale et un autre a obtenu un diplôme d'études secondaires; comme John l'a mentionné également, nous croyons que l'éducation occupe une place importante dans ce que nous faisons.
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, la journée des jeunes inscrits au programme Hammer Heads se déroule de la façon suivante: ils se lèvent à 5 heures, ils prennent un autobus pour se rendre au centre de formation à 6 h 30, ils y arrivent à 7 h 30, ils reçoivent une formation toute la journée et ils quittent le centre de formation à 16 heures. Deux soirs par semaine, nous les amenons en autobus au Collège Frontière où ils suivent des cours de rattrapage, puisqu'un grand nombre de nos métiers comportent des exigences minimales. Le métier d'électricien en est un bon exemple: vous devez avoir terminé le cours de mathématiques, d'anglais et de physique de 12e  année. Bon nombre des jeunes avec lesquels nous travaillons n'ont évidemment pas ces crédits. Nous travaillons donc avec eux pendant qu'ils font partie de notre programme pour nous assurer qu'ils obtiennent des mises à niveau dans ces matières afin de satisfaire aux exigences minimales et intégrer ainsi ces métiers. Les choses se passent assez bien.
    Nous pourrions en faire davantage avec votre aide. Il faut s'assurer d'établir un lien entre les projets d'infrastructure et les apprentissages. Nous avons la possibilité de former ces jeunes, mais après qu'ils ont terminé notre programme, nous devons prolonger les emplois. Nous changeons leur mode de vie, mais il est essentiel qu'après les 12 semaines de notre programme et au moment où ils obtiennent leur diplôme, nous les rattachons immédiatement à une possibilité d'emploi pour que nous puissions continuer à imprimer un changement dans leur vie.

  (1220)  

    Merci pour votre exposé. Je constate votre enthousiasme et je vois que vous investissez beaucoup dans chaque personne. Vous travaillez avec un étudiant à la fois. Nous prenons bonne note de ce que vous dites, et vous avez fait d'excellents commentaires.
    Nous allons poursuivre avec Mme Charlton. Allez-y, je vous prie.
    Monsieur le président, je dispose de combien de temps?
    Vous avez cinq minutes.
    Très bien. Ce n'est pas beaucoup.
    Ce que je vais faire, si vous le voulez bien, c'est vous poser, à tous les deux, toutes mes questions en même temps, et vous pourrez ensuite prendre le temps qui reste pour y répondre.
    Tout d'abord, monsieur St. John, quel programme vous avez! Quelle occasion extraordinaire de prendre un jeune à risque et de l'amener au seuil de la réussite, et vous le faites avec un seul jeune à la fois grâce à un programme de mentorat incroyable. Il me semble que ce programme devrait être reproduit d'un océan à l'autre.
    J'aimerais que vous nous disiez comment nous pouvons nous y prendre, et je comprends qu'il faut créer des occasions d'apprentissage en en faisant une exigence contractuelle. Je crois que c'est absolument essentiel. Y a-t-il d'autres domaines où le gouvernement fédéral pourrait apporter une aide afin que ce programme prenne de l'expansion et se répande dans d'autres communautés?
    Je voulais aussi vous poser une question au sujet des occasions à créer. J'utilise l'expression « exigence contractuelle ». Ce ne sont pas vos mots, mais il s'agit de faire en sorte que, grâce aux dépenses en infrastructure, nous créons des possibilités pour les jeunes qui participent à votre programme. Pensez-vous, comme M. Grimshaw, que si nous offrons un incitatif, il doit être accordé à la fin du projet? Les entrepreneurs ne peuvent pas soumissionner pour des contrats en disant simplement qu'ils vont créer x nombre d'occasions d'emploi, que 10 p. 100 des emplois seront réservés à des jeunes. Comment savoir s'ils vont tenir parole? Avez-vous réfléchi à cela? Comment pouvons-nous nous assurer que nous atteignons les objectifs que nous visons?
    Monsieur Grimshaw, vos commentaires sur le maintien des apprentis ont retenu mon attention. Vous avez parlé un peu de l'assurance-emploi et des six semaines par rapport aux huit semaines. Un certain nombre de témoins nous ont dit également que l'une des principales préoccupations et l'un des principaux obstacles au maintien en poste, c'est que le traitement des demandes d'assurance-emploi est incroyablement lent, si bien que les jeunes, en particulier, ne reçoivent pas leur argent à temps, ne peuvent survivre dans l'intervalle et doivent abandonner leur programme d'apprentissage pour gagner leur vie autrement. Est-ce aussi ce que vous avez observé?
    Nous avons travaillé ensemble dans une vie antérieure, lorsque vous étiez à Hamilton. Vous vous rappellerez que j'insistais beaucoup pour que des allocations de déplacement et de logement soient offertes aux gens de métier pour qu'ils puissent accepter des emplois loin de chez eux. À mon avis, c'est essentiel pour les apprentis également, et je crois vous avoir entendu dire que certains apprentis acceptent effectivement des emplois dans d'autres régions du pays. Pensez-vous que ce programme doit être offert aux apprentis également?
    Je vais m'arrêter ici, mais j'aimerais bien poursuivre.

  (1225)  

    Vous avez environ deux minutes et demie pour le faire, mais allez-y.
    Je peux dire très rapidement que je n'ai heureusement pas eu à demander de prestations d'assurance-emploi depuis un certain temps, mais je me rappelle l'époque où je fréquentais l'école de métiers. Vous avez tout à fait raison. La moitié du temps, on était là pendant huit semaines — et dans notre cas, c'était parfois 10 semaines —, et on obtenait enfin nos prestations d'assurance-emploi à la neuvième semaine. C'était une attente de deux mois et demi, et on parle ici d'une personne qui ne faisait pas beaucoup d'argent pour commencer. Il faut se rappeler qu'un apprenti touche 40, 50 et 60 p. 100, 80 p. 100 au moment de sa diplomation, depuis le premier jusqu'au cinquième niveau. Pour un apprenti de deuxième année qui ne fait pas beaucoup d'argent, qui a peut-être maintenant une famille et qui subit toutes sortes de pressions de l'extérieur, le fait de recevoir des prestations d'assurance-emploi en temps opportun serait très important.
    À l'époque où je faisais partie d'un comité mixte chargé de l'apprentissage, je ne sais pas combien de fois j'ai entendu un apprenti dire: « Écoutez, je n'ai pas les moyens de fréquenter l'école ». Ce sont nos apprentis; leur salaire est pratiquement le double de celui d'un apprenti non syndiqué, et ils n'ont pas assez d'argent pour aller à l'école. Alors je peux imaginer ce que c'est pour les autres. Très souvent, il est plus facile, je crois, d'aller conduire un camion ou de trouver un emploi qui rapporte plus et qui est moins compliqué à obtenir. Comme je l'ai dit, un apprentissage est un investissement.
    Lorsque j'ai accepté un emploi, il rapportait peu d'argent, mais je savais qu'au bout du compte, j'aurais une belle carrière. À la même époque, j'avais des amis qui balayaient les planchers à la Stelco pour un salaire deux fois plus élevé que le mien, et c'était bien plus difficile à faire.
    Je ne prendrai pas plus de temps, mais oui et, soit dit en passant, nous aimons aussi les allègements fiscaux.
    Monsieur St. John, plusieurs questions vous ont été posées, alors voulez-vous essayer d'y répondre dans la minute qui vous reste?
    Je suis d'accord pour verser l'incitatif à la fin de l'exercice. Toutefois, il faut, selon moi, que la demande de propositions parle de l'apprentissage, qu'on y précise que le contrat ne sera attribué que s'il y a un plan d'affaires montrant la façon dont on va intégrer le nombre d'apprentis prévu, et combien d'occasions d'apprentissage seront créées. Il faut absolument que ce soit précisé.
    Si des incitatifs sont prévus, je suis d'accord avec John pour dire qu'on pourrait peut-être donner à l'employeur une partie de l'argent au début, mais pas la somme au complet. On aurait ainsi un incitatif pour embaucher un apprenti, jusqu'à ce qu'il termine sa formation. Quant à Hammer Heads, nous voulons simplement qu'il soit question d'apprentissage dans les demandes de propositions pour que l'entrepreneur qui obtient le contrat garantisse des occasions d'apprentissage aux jeunes de notre région de façon significative.
    Grâce à notre programme, des liens sont lentement établis entre nous et les Jeux panaméricains. On essaie de régler certains problèmes liés à la diversité de la diaspora africaine et on cherche à rejoindre différents groupes démographiques, alors on a fait appel à nous. Nous croyons qu'il est possible d'agir ainsi pour chaque projet d'infrastructure dans lequel des fonds sont injectés, et non seulement dans le secteur de la construction: cette initiative devrait être généralisée. Si nous investissons et reconstruisons ou revitalisons un quartier, alors nous voulons nous assurer que les gens qui vivent à cet endroit ont la chance d'obtenir un emploi dans le cadre des travaux qui seront menés dans leur quartier.
    Monsieur St. John, il est aussi question de reproduire votre programme. Vous voulez peut-être répondre à cette question également, si vous le pouvez. Votre temps d'intervention est écoulé, mais nous allons vous laisser terminer.
    Merci.
    Nous venons de faire breveter notre programme. Nous croyons qu'il est unique en son genre, mais avec l'aide du gouvernement... Des liens doivent être établis avec des emplois. Nous avons très bien réussi à créer des occasions d'emploi sans demander d'argent, alors nous croyons que c'est tout à fait faisable.
    John représente la FIOE dans l'ensemble de la province, et la FIOE appuie pleinement notre programme, comme tous nos autres membres internationaux qui appartiennent au Provincial Building and Construction Trades Council, alors ma réponse est « oui ». Cela peut être fait entièrement avec l'aide du gouvernement, qui s'assurera que les contrats sont attribués à des entrepreneurs qui feront appel à des apprentis.

  (1230)  

    M. Butt est le prochain intervenant.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Messieurs, je vous remercie infiniment d'être avec nous. Monsieur St. John, votre équipe et vous semblez faire de l'excellent travail pour encourager les jeunes à songer aux métiers de la construction.
    Avant d'être élu, j'ai beaucoup travaillé dans le secteur puisque j'ai présidé la Greater Toronto Apartment Association pendant 12 ans. Je connais bien votre milieu, et je reconnais les mérites des partenariats fructueux, il me semble, qui ont été établis entre les employeurs et les syndicats dans certains de ces programmes.
    À l'époque, nous proposions un programme d'apprentissage de gérants d'immeubles particulièrement réussi. Lancé en partenariat avec la Ville de Toronto et ses services sociaux, le programme s'adressait aux prestataires de l'assurance-emploi ontarienne. L'objectif était de les recycler pour qu'ils deviennent gérants de nos immeubles. C'était une réussite. Il s'agissait d'un véritable partenariat; je suis donc heureux d'apprendre que vous partagez cet objectif.
    Monsieur Grimshaw, vous avez dit que le taux de rétention, de réussite et de placement de votre programme atteint 90 p. 100 alors qu'il n'est que de 50 p. 100 ou moins dans d'autres domaines. Pourriez-vous nous donner encore deux ou trois raisons précises pour lesquelles le taux d'achèvement de votre programme est aussi élevé comparativement aux autres?
    C'est une question d'aide. En fait, de nombreux éléments entrent en ligne de compte.
    Lorsqu'un étudiant commence l'apprentissage du métier, tout le monde lui dit que les apprentis électriciens syndiqués qui terminent leur formation sont très bien rémunérés, sans compter les avantages sociaux, le régime de retraite et une certaine sécurité. C'est ce qui les attire dès le départ.
    Les étudiants savent qu'ils auront de l'aide tout au long du processus. Prenons l'exemple des frais de scolarité dont nous avons parlé. La plupart de nos sections syndicales remboursent les frais de scolarité de l'apprenti à condition qu'il obtienne des résultats scolaires suffisants.
    Les livres aussi coûtent cher. Nous avons parlé du retard des prestations d'assurance-emploi et du reste. Par-dessus le marché, l'Ontario demande 400 $ à tous ceux qui fréquentent l'école, une somme qui s'ajoute aux 300 ou 400 $ de livres nécessaires à la formation d'électricien. L'étudiant assiste alors aux cours les poches vides et avec un salaire minable. C'est là que nous intervenons: nous veillons à ce que les étudiants aient leurs livres et se fassent rembourser leurs frais de scolarité.
    Les étudiants qui ont des problèmes en mathématiques peuvent recevoir l'aide d'un tuteur — dans notre milieu, ce sont généralement les mathématiques et les sciences qui posent problème. Nous avons des centres de formation et des responsables de formation. Nous disons à tous les étudiants de nous consulter sans tarder s'ils commencent à avoir des problèmes et à prendre du retard. N'oublions pas que les étudiants ont souvent 28 ans lorsqu'ils commencent leur formation; ils ne vont donc pas à l'école de métiers avant 30 ans.
    À cet âge, la plupart d'entre eux ont déjà des familles ou de mauvaises habitudes en matière d'apprentissage, mais on les place malgré tout dans un milieu scolaire où ils ont huit semaines pour se mettre à jour. Il s'agit d'un véritable bourrage de crâne en accéléré. Compte tenu de la quantité incroyable d'information à intégrer en huit semaines, ceux qui prennent du retard dans la première ou la deuxième semaine n'y arriveront tout simplement pas.
    Sans l'aide du syndicat, la plupart des apprentis doivent se débrouiller seuls pour rattraper leur retard, tandis que nous leur offrons des ressources faciles à obtenir. Il ne leur reste qu'à nous passer un coup de fil afin de parler à quelqu'un qui puisse les aider à rattraper leur retard ou à se remettre sur la bonne voie.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de ce que le député précédant a dit, et dont j'ai pris note.
    Il affirme qu'une des difficultés du programme, c'est de réussir à donner toute la matière en huit semaines. Indépendamment des problèmes d'assurance-emploi, sur lesquels le comité se penchera assurément dans le but d'émettre des recommandations, serait-il possible de répartir la formation en segments pour les étudiants qui le souhaitent? L'apprenti pourrait ainsi alterner les études et le travail, que celui-ci soit lié au métier ou non. Il pourrait gagner de l'argent avant de revenir étudier un autre segment, puis un autre. La formation durerait peut-être plus longtemps, mais l'étudiant toucherait au moins un revenu pendant son programme d'apprentissage jusqu'à ce qu'il soit autorisé à exercer sa profession.
    Est-ce faisable? Pour être efficaces, ces programmes d'apprentissage doivent-ils à tout prix être suivis intensivement de 9 heures à 17 heures du lundi au vendredi? Sinon, pourraient-ils être divisés en segments? Ainsi, l'étudiant pourrait étudier deux ou trois semaines avant de retourner gagner de l'argent pendant un mois, et il continuerait d'alterner les périodes d'études et de travail.
    Est-ce faisable? Pourriez-vous organiser le programme de cette façon? Je suis persuadé qu'être un électricien qualifié est un travail considérable, et qu'il faut de solides connaissances, des formations en cours d'emploi, des formations en matière de sécurité, et ainsi de suite. Est-ce tout simplement irréalisable compte tenu de la nature de ce métier en particulier?

  (1235)  

    Nous allons terminer avec votre réponse avant de passer au prochain intervenant.
    Je peux vous donner des exemples concrets.
    Lorsque je siégeais au comité mixte de formation par l'apprentissage — j'ai déjà été gestionnaire de la section syndicale des électriciens de Hamilton —, nous comptions environ 280 apprentis. Or, nous avions du mal à les garder sur les bancs d'école pour des raisons d'argent et je ne sais quoi encore. Nous avons donc rencontré les représentants du Collège Mohawk et du ministère de la Formation et des Collèges et Universités pour voir s'il était possible d'offrir des cours du soir deux fois par semaine, disons. Les apprentis pourraient alors travailler le jour et assister aux cours en soirée. Nous avons aussi demandé d'offrir la formation une semaine sur deux, exactement comme vous le proposez.
    Ce format a été mis à l'essai dans deux ou trois programmes, mais s'est avéré un échec lamentable puisqu'on n'arrivait pas à retenir l'attention des jeunes, surtout de ceux qui travaillaient.
    Les étudiants travaillent toute la journée, et parfois dehors. Vous qui avez évolué dans le milieu des immeubles résidentiels, vous savez assurément que ceux-ci sont construits à l'extérieur. Les étudiants passent donc la journée dehors et au froid, surtout en hiver. Ils doivent ensuite rentrer à la maison et manger en vitesse avant de se rendre au collège communautaire local pour apprendre une nouvelle matière pendant trois ou quatre heures. Que retiennent-ils? De manière générale, nous avons constaté qu'ils ne réussissent pas très bien.
    Certains arrivent à concilier les deux et à travailler dans ces conditions. Or, la majorité des gens de métiers ne sont pas des intellectuels. Ils n'ont rien à voir avec les universitaires qui ne cessent de se bourrer le crâne. Ils sont habitués à leur mode de vie et réfléchissent différemment, pour la plupart. Compte tenu du taux de réussite alarmant, nous avons finalement dû mettre fin au programme et obliger les étudiants à suivre la formation en bloc.
    En passant, je tiens à préciser que la formation ne dure pas 8 semaines seulement. Le premier bloc de 8 semaines est suivi de deux autres blocs de 10 semaines, pour un total de 28 semaines de formation.
    Comme je l'ai dit, l'expérience m'a appris que cette solution ne convient pas vraiment à ce groupe particulier.
    Bien. Je vous remercie infiniment de votre réponse.
    C'est maintenant au tour de M. Caron.
    Je vous remercie de votre exposé.
    Ce programme est vraiment impressionnant et constitue selon moi un excellent exemple de collaboration résolument constructive et utile entre les syndicats, les employeurs et les constructeurs de bâtiments.
    Les jeunes suivent les périodes d'apprentissage et peuvent ensuite travailler. Compte tenu de la nature conjoncturelle de l'activité, leur arrive-t-il souvent de ne pas travailler 12 mois par année? Travaillent-ils à longueur d'année? Passent-ils parfois des périodes sans trouver de travail?
    Je suis le directeur commercial à Toronto. Nous avons 1 700 apprentis en tout temps. Nous en acceptons constamment de nouveaux, et ils travaillent sans cesse.
    Oui, mais lorsqu'ils terminent leur formation en apprentissage, ils se retrouvent sur le marché du travail, qui...
    Non, ils deviennent compagnon d'apprentissage. D'ailleurs, je représente aussi 5 800 compagnons.
    Arrivent-ils à travailler 12 mois par année?
    Oui, ils effectuent environ 14 millions d'heures-personnes par année.
    Bien. Ils n'ont donc aucun mal à trouver du travail et à associer les emplois avec...
    Nous avons 400 employeurs qui ont toujours des travaux en cours. Nos apprentis sont très occupés. Nos compagnons aussi, puisqu'ils accueillent les nouveaux du programme Hammer Heads, qui offre une occasion unique aux jeunes. Lorsque ceux-ci retournent dans leurs quartiers, ils parlent du programme aux autres, ce qui les incite à sortir de leur milieu pour y participer à leur tour.
    Vous êtes au courant de la quantité incroyable d'immeubles qui ont poussé ces 10 dernières années entre Oakville et Trenton, et jusqu'à Parry Sound. Ce sera probablement ainsi pour 10 ans encore. Les travailleurs ont donc une multitude d'occasions d'affaires.

[Français]

    Maintenant que vous avez vos écouteurs, je vais continuer en français.
    La formation est généralement un domaine de compétence provinciale, même si le fédéral peut y jouer un certain rôle dans le cadre de différents programmes. Comme vous l'avez souligné, c'est le cas par exemple pour un programme en langue seconde. Néanmoins, un programme comme Hammer Heads, qui existe en Ontario, peut aussi avoir des équivalents dans les autres provinces.
    Présentement, quel est l'état de la situation dans les provinces, particulièrement en ce qui a trait à la rétention des apprentis? Cela varie-t-il d'une province à l'autre? Chaque province a-t-elle un programme qui peut s'apparenter à Hammer Heads ou à un programme qui serait idéal? Est-ce qu'il y a un désir de la part des provinces à cet égard? Je voulais avoir une idée de l'équité qui existe entre les provinces en ce qui a trait aux programmes pour les apprentis.

  (1240)  

[Traduction]

    Que je sache, le seul autre programme qui ressemble à Hammer Heads est BladeRunners, à Vancouver.
    Pourrait-on reproduire le programme dans d'autres provinces? Sans aucun doute. Toutes les provinces ont des syndicats de métiers du bâtiment. Pour l'instant, c'est notre association qui finance Hammer Heads, qui nous coûte dans l'ensemble 1 million de dollars par année. Nous choisissons de verser l'argent de nos poches pour venir en aide aux jeunes. Il ne fait aucun doute que d'autres provinces peuvent le faire elles aussi.
    Comme je l'ai dit, BladeRunners est le seul autre programme semblable que je ne connaisse. Nous nous sommes inspirés de ce modèle pour développer le programme exhaustif de 12 semaines que nous offrons actuellement.

[Français]

    Si je comprends bien, grâce entre autres à ce programme, vous estimez que l'Ontario est un pas en avant par rapport aux autres provinces en ce qui a trait à la formation des apprentis dans le milieu de la construction?

[Traduction]

    Cela ne fait aucun doute. Notre organisation est encore relativement jeune. Puisque nous avons vu le jour il y a à peine trois ans, nous apprenons encore. Le volet éducatif que nous avons ajouté il y a moins d'un an a eu des répercussions énormes. Nous essayons encore de nous ajuster à ce que nous faisons actuellement. Nous nous rapprochons de notre objectif, et lorsque nous aurons corrigé tous les défauts et autres petits problèmes, nous serons ravis que le programme soit offert dans toutes les provinces.
    Puisqu'il vous reste environ 30 secondes, je vais tout de suite passer au prochain intervenant, si vous me le permettez.
    Très rapidement, le gouvernement ontarien a-t-il joué un rôle quelconque dans le programme?
    Le gouvernement a lancé le programme en versant 51 millions de dollars au Youth Challenge Fund. De cette somme, nous avons reçu 272 000 $ pour son démarrage. Depuis, le MTCU nous a versé 100 000 $ pour un volet de formation préparatoire. La division autochtone du MTCU nous a aussi remis un peu d'argent pour que le programme soit offert à cette communauté. Le reste a été payé par les syndicats affiliés à notre organisation.
    Merci, monsieur Caron.
    La parole est maintenant à M. McColeman.
    Je vous remercie de comparaître, messieurs.
    Ce modèle est fantastique.
    Je me perds parfois avec tous ces acronymes. Qu'est-ce que le MTCU?
    C'est le ministère de la Formation et des Collèges et Universités.
    Je vois. Comment la province a-t-elle réagi à la réussite du programme, puisqu'elle est responsable de l'éducation et que le programme relève peut-être du ministère?
    Dans le cas du programme Hammer Heads en particulier, la province était surprise d'apprendre que certains de nos jeunes n'avaient jamais eu une occasion semblable auparavant. Les représentants étaient très étonnés de nos résultats, surtout auprès des jeunes que nous ciblons. Parmi les 107 qui viennent d'un quartier jugé prioritaire, 41 vivent dans des logements communautaires de Toronto. Chaque fois que nous recrutons, nous essayons de sortir un ou une jeune d'un foyer d'accueil pour qu'il bénéficie de notre programme. Les gens sont donc impressionnés de voir que nous parvenons à ces résultats même si nous ne nous adressons pas à des premiers de classe. C'est plutôt l'inverse, et nous réussissons quand même.
    En revanche, nous ne sommes pas encore aussi connus que je le souhaiterais, et j'espère que cela viendra au fil de nos réussites.
    Je m'intéresse davantage à la réaction de l'industrie de la construction syndiquée et non syndiquée de façon générale, parce que ce modèle semble fonctionner. À bien des égards, il pourrait s'appliquer à un milieu tant syndiqué que non syndiqué. Avez-vous eu des commentaires de tous les secteurs du milieu de la construction?
    Par chez moi, l'industrie de la construction syndiquée ne joue pas un rôle majeur au sein de la collectivité. L'industrie n'est pas syndiquée. Avez-vous songé à la façon d'appliquer ce modèle aux différents environnements?

  (1245)  

    Oui, bien sûr. Nous avons consulté des promoteurs immobiliers, entre autres. On ne peut pas les classer selon leur appartenance ou non à une organisation syndicale, mais quoi qu'il en soit, les promoteurs veulent produire un effet dans la collectivité. Nous allons à leurs devants et leur demandons de créer des possibilités d'apprentissage lorsqu'ils construisent un nouvel immeuble ou un complexe.
    Puisque les promoteurs veulent obtenir des résultats, petit à petit... Tridel a fait son apparition en grand et de façon notable, tout comme Concert Properties. Dans leurs demandes de propositions, ils écrivent eux-mêmes que les sous-contractants doivent faire valoir des jeunes du milieu.
    Je pense que le modèle pourrait bel et bien s'appliquer à tout le monde, surtout si nous tendons la main non seulement au gouvernement, mais aux promoteurs immobiliers aussi. C'est d'ailleurs ce que nous essayons de faire.
    Connaissez-vous le programme Helmets to Hardhats?
    M. James St. John: Très bien, oui.
    M. Phil McColeman: Dites-moi dans quelle mesure il s'apparente à ce que vous faites.
    C'est très semblable. Dans le programme Du régiment aux bâtiments, les anciens militaires peuvent trouver une carrière dans la construction. Aux États-Unis et au Canada, les métiers du bâtiment et de la construction soutiennent bien sûr les anciens combattants. C'est une des bonnes façons d'ouvrir la voie et de permettre aux anciens combattants et au personnel militaire d'entreprendre une deuxième carrière en construction.
    C'est un modèle très semblable au programme Hammer Heads. Nous aidons les jeunes de la même manière et nous leur donnons les occasions auxquelles ils n'ont pas accès d'emblée.
    D'accord.
    Un bref commentaire portait sur la formation préapprentissage. Quelle est l'importance des besoins?
    Voici un exemple. Dans ma collectivité, je représente la principale Première Nation au Canada, les Six Nations de Grand River. Le fédéral a travaillé en partenariat avec les organisations et les syndicats de Niagara. Nous avons lancé le programme Pipe Dreams, qui est dirigé par de jeunes Autochtones et qui les familiarise avec le métier de soudeur. Ce programme donne une formation préapprentissage à environ 60 jeunes tous les six mois, leur donne un avant-goût de ce qu'est le métier et leur permet de progresser en vue de suivre une formation d'apprenti et d'obtenir un emploi.
    Selon vous, s'agit-il de la suite logique pour ce programme? Si vous aviez les ressources, pourriez-vous former plus de gens, car c'est un modèle formidable? Je me demande quel est le potentiel. Combien de gens pourriez-vous former?
    Puis-je faire un commentaire bref?
    Je crois que vous avez parlé des Six Nations. Avec leur coopération, nous avons mis en oeuvre un programme pour les métiers de la construction de Hamilton et de Brantford. Ce programme se fonde sur Hammer Heads, car c'est un excellent concept. Nous avons demandé si un membre de l'organisme de placement des jeunes des Six Nations pouvait travailler avec nous.
    Les candidats ont été sélectionnés, et nous avons établi le programme exactement de la même manière. Les jeunes devaient se rendre dans un lieu central pour prendre l'autobus. Au bout du compte, nous avons acheté un autobus pour qu'ils passent à la prochaine étape. Les jeunes allaient dans divers centres de formation pour les différents métiers, comme les ferronniers, les tuyauteurs, etc. Le programme a connu beaucoup de succès. Ces jeunes n'auraient sans doute jamais eu cette occasion sans lui.
    Un tel programme peut-il se faire pour les gens de métiers syndiqués ou non? C'est clair que oui.
    M. Phil McColeman: Oui.
    M. John Grimshaw: En fin de compte, les syndicats ont tendance à être plus organisés et plus coordonnés. C'est facile pour moi d'appeler James ou Steve pour demander de nous réunir et d'établir un programme. Je ne sais pas si ce genre de réseau existe...
    Merci, monsieur Grimshaw.
    Le temps est écoulé, mais je pense que M. St. John veut faire des commentaires là-dessus.

  (1250)  

    En effet.
    Vous savez, John et Steve... et Peter sont aussi électriciens. La formation préapprentissage fonctionne pour certains secteurs. Dans notre programme, nous voulons donner aux jeunes l'occasion d'essayer tous les divers métiers. Les jeunes qui reçoivent leur diplôme après 12 semaines ont été évalués par des professionnels et orientés vers le métier qui leur convient le mieux. Lorsque les compétences, les aptitudes et les habiletés mécaniques des jeunes correspondent aux métiers appropriés, nous obtenons les taux de maintien de l'emploi et de succès dont John a parlé.
    Je pense que c'est tout à fait sensé dans notre contexte. Comme la population en général, bien des jeunes ne savent pas qu'il existe beaucoup de métiers. Si nous donnons aux jeunes la possibilité d'essayer bon nombre de métiers pour qu'ils trouvent ce qui leur convient le mieux, c'est l'idéal à notre avis.
    Merci.
    Monsieur Cuzner.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Les témoignages d'aujourd'hui sont très utiles.
    Lorsqu'une personne de métier atteint le niveau du Sceau rouge, le degré de mobilité au pays est excellent. Les métiers ont beaucoup progressé ces dernières années. Mais c'est très frustrant. Des employeurs et des apprentis nous ont dit que la formation entraînait beaucoup de frustration.
    Il y a un cas en Nouvelle-Écosse dont vous êtes sans doute au courant. Il n'est pas rare pour les gens de la Nouvelle-Écosse d'aller en Alberta; nous sommes comme des travailleurs étrangers, au Cap-Breton. Donc, les heures de travail accomplies par cet homme en Alberta n'étaient pas reconnues lorsqu'il est revenu en Nouvelle-Écosse; c'est très frustrant.
    Monsieur Grimshaw, l'approche du comité mixte pour les apprentis est sensée. Je pense qu'elle est très équitable. Les employeurs et les apprentis en voient le bien-fondé. Le travailleur du Sceau rouge qui forme un apprenti est content de savoir que ce dernier a un certain niveau de connaissance avant d'arriver au chantier.
    Pourquoi n'appliquons-nous pas ce modèle à un genre de programme national? Nous devons adopter une approche nationale pour aider à former les apprentis, selon chaque métier ou autrement. Vous faites du bon travail. Pouvons-nous élargir la portée de ce plan?
    Je ne vois pas pourquoi ce serait impossible. Je suis sûr que vous pouvez y arriver. Il faut s'organiser et réunir les bons intervenants.
    Qui sont les bons intervenants? C'est pourquoi nous sommes ici et c'est ce que nous voulons savoir. Les bons intervenants sont-ils les ministres du Travail ou les syndicats provinciaux? Quel rôle le fédéral doit-il jouer? Peut-il mener les travaux? Qui doit prendre l'initiative?
    Si tout le monde est concerné par le problème, rien ne se fait. Nous voulons faire progresser la question. Quels conseils avez-vous pour nous? À qui devons-nous confier la responsabilité, et quelles mesures devons-nous prendre?
    Bonne question. Par expérience, je dirais que l'argent est le moteur d'à peu près tout. Si vous commencez par le haut...
    La semaine dernière, j'ai participé à une réunion avec des gens de l'Alberta, de Suncor, de Shell et d'une autre société. Je ne pense pas que c'est la CNRL, mais c'est un autre grand exploitant des sables bitumineux. Les gens posaient le même type de questions. Comment pouvons-nous aider les apprentis à terminer leur formation et à devenir des compagnons d'apprentissage?
    C'est inutile de faire entrer des apprentis s'il n'y a pas de compagnons d'apprentissage. Ça ne va pas régler le problème au bout du compte, mais seulement pour un jour ou pour une ou deux semaines. L'entrepreneur qui obtient du travail doit maintenant embaucher un certain nombre d'apprentis.
    En passant, le taux en Alberta est d'un compagnon pour deux apprentis. Pour tous les métiers liés aux sables bitumineux, le taux de saturation est d'environ 30 p. 100 d'apprentis. Donc, même s'il peut y avoir deux apprentis pour un compagnon, le taux réel est d'environ trois compagnons pour un apprenti. Je parle des grands secteurs industriels, des sables bitumineux, des raffineries de pétrole, des usines de valorisation, etc. Ces secteurs n'utilisent pas seulement nos services; ils font aussi appel aux travailleurs non syndiqués, à d'autres syndicats et à d'autres gens pour faire le boulot. Tous les employeurs doivent désormais appliquer les programmes adéquats pour faire entrer des apprentis. L'entrepreneur va se conformer et prendre les mesures nécessaires pour obtenir le contrat.
    Il va prendre bonne note des exigences.
    L'objectif fixé sera atteint.
    Je ne peux pas dire comment le fédéral doit influencer la question. Nous adoptons les mesures qui s'avèrent nécessaires. Une de nos forces, c'est que nos membres sont compétents et prêts à travailler, qu'ils sont formés en matière de sécurité et qu'ils connaissent les dernières technologies. Grâce aux exigences que nous imposons à nos membres, nous obtenons du travail.

  (1255)  

    Ce qui empêche présentement les apprentis de se déplacer, c'est que toutes les provinces ont des normes de formation différentes. Tout ce que le fédéral peut faire, c'est de s'assurer que toutes les formations provinciales respectent certaines normes. Le programme du Sceau rouge doit devenir une exigence fédérale. Les apprentis et les compagnons pourront ensuite travailler partout au pays.
    Comme vous le savez, la construction est un secteur cyclique. Il y aura beaucoup à faire en Alberta durant deux ou trois ans, puis le travail va reprendre en Saskatchewan, en Colombie-Britannique et dans l'Est. Si les nombreux compagnons et apprentis d'une province ne peuvent pas travailler ailleurs, le problème reste entier. Nous nous retrouvons de nouveau avec une pénurie dans une région et un excédent dans une autre, sans pouvoir y remédier.
    Merci. Nous comprenons.
    M. Carmichael veut poser une question très brève, et il reste très peu de temps. Nous allons entendre sa question et les derniers commentaires.
    Monsieur le président, merci de mes 10 minutes...
    Des voix: Oh, oh!
    M. John Carmichael: Je dois dire tout d'abord que je suis très impressionné par les témoignages d'aujourd'hui. Je pense que certaines mesures que vous appliquez sont extrêmement importantes. Je représente une région où les jeunes à risque constituent un problème important. Selon moi, le programme d'apprentissage va... Lorsque je travaillais dans l'industrie automobile, nous investissions beaucoup de temps et d'argent dans la formation des apprentis, parce que ça favorise la durabilité du secteur.
    Pourriez-vous parler du programme Du régiment aux bâtiments? Vous avez un programme semblable, selon ce que vous avez dit. Ce programme aide-t-il aussi l'apprentissage et la formation des anciens combattants qui veulent exercer le métier?
    Absolument.
    Les anciens combattants sont évalués, et les responsables des métiers de la construction les orientent vers les entreprises affiliées qui peuvent le mieux tirer profit de certaines compétences acquises dans l'armée et les faire travailler dans un métier en particulier.
    Merci de votre réponse. C'est tout.
    Monsieur Reed, voulez-vous faire un commentaire? Nous allons ensuite mettre un terme à la séance. Allez-y.
    Dans le programme Hammer Heads, je dois surtout effectuer un suivi auprès des jeunes dans le secteur. Il importe de comprendre que les jeunes commettent des erreurs, qu'ils rencontrent des difficultés durant leur apprentissage ou au début de leur carrière. Le programme Hammer Heads n'y échappe pas.
    Bien souvent, les employeurs n'ont pas le temps de comprendre cela et ne s'en soucient pas. Ils peuvent accepter qu'un jeune arrive en retard ou rencontre un problème une fois, mais la fois suivante, ils vont simplement le remercier et engager quelqu'un d'autre. Comme les employeurs n'ont pas le temps nécessaire, les suivis dont James a parlé sont très importants dans notre programme. Il faut constater de première main ce qui se passe sur le terrain. Je peux parler avec le jeune qui arrive une fois en retard. C'est important pour régler le problème et éviter qu'il empire au point où l'employeur laisse tout simplement tomber le jeune.
    Les suivis obligatoires et l'interaction avec le jeune durant la première année sont très importants pour qu'il reste dans la bonne voie. Nous pouvons enseigner aux jeunes à se lever tôt, à éviter les retards et à préparer un bon plan, mais il faut s'assurer que les jeunes appliquent ces règles pendant toute la première année pour en faire de véritables habitudes. Douze semaines, c'est bien, mais les jeunes ont besoin de toute une année pour consolider leurs habitudes, devenir de bons travailleurs et s'assurer de trouver un emploi dans le secteur.
    Merci de votre intervention et de votre témoignage utile.
    La séance est levée.
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