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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 019 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 1er février 2012

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Avant d'entendre M. Harris, j'aimerais aborder quelques points. Aujourd'hui, la cloche va sonner à 17 h 15, nous allons donc lever la séance un peu plus tôt. Nous devons également adopter un budget pour le projet de loi C-316, et la greffière va vous transmettre les renseignements. Nous aurons sans doute le temps de nous en occuper aujourd'hui, sinon, nous l'adopterons à la prochaine séance.
    Je vous annonce également que l'Association nucléaire canadienne désire présenter un témoignage au comité dans le cadre de l'étude sur le développement des compétences et l'emploi dans les collectivités rurales et éloignées. Les représentants de l'association désirent se faire entendre le 29 février. D'après notre calendrier, nous serons en train d'étudier le développement des compétences dans les collectivités rurales et éloignées les 27 et 29 février. Nous serons à l'étape de la formulation d'instructions en vue de la rédaction d'un rapport. Et j'imagine qu'ils feront une déclaration de cinq ou dix minutes et que par la suite, nous leur poserons des questions. Je vous invite donc à réfléchir à la possibilité de les recevoir comme témoins. Vous me ferez savoir ce que vous en pensez à une prochaine séance.
    Aujourd'hui, nous sommes saisis du projet de loi C-316, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi. Essentiellement, ce projet de loi vise à supprimer des dispositions de la Loi sur l'assurance-emploi qui permettent une prolongation de la période de référence si le prestataire a été incarcéré dans une prison, un pénitencier ou une institution de même type. Le projet de loi est parrainé par M. Richard M. Harris, qui est des nôtres aujourd'hui. M. Harris va nous faire une brève déclaration et ensuite, les membres du comité pourront lui poser des questions ou formuler des observations. Nous procéderons donc comme d'habitude.
    Monsieur Harris, allez-y si vous êtes prêt.
    Merci, monsieur le président.
    Je commence à aimer ce fauteuil. D'ordinaire, je suis assis là, et auparavant j'étais de l'autre côté. J'en conclus qu'il faut 19 ans pour aboutir à cette extrémité-ci de la table.
    Honorables membres du comité, j'imagine qu'il y a très peu de Canadiens qui passent beaucoup de temps à lire la Loi sur l'assurance-emploi pour mieux la connaître, et j'en faisais partie avant qu'un incident dans ma circonscription ne m'amène à le faire. Il s'agissait d'une jeune femme qui avait travaillé pendant 15 ans et qui avait cotisé au régime d'assurance-emploi. Or, elle a ensuite pris la décision personnelle de quitter temporairement son emploi pour se perfectionner à ses frais.
    Elle a donc passé de 12 à 13 mois sans travailler pour décrocher un certificat qui lui garantirait une meilleure chance de garder un emploi stable. Et elle a décroché un emploi. Elle s'était remise au travail depuis deux mois lorsqu'elle a commencé à éprouver des problèmes de santé. Elle a donc consulté un médecin, et après quelques analyses, elle a appris qu'elle souffrait d'un cancer. Il s'agissait d'un type de cancer très agressif, ce qui l'a poussée à abandonner son emploi et à s'aliter à la maison. Son mari a dû prendre congé de son travail pour s'occuper d'elle du mieux qu'il pouvait à la maison. Par conséquent, ses revenus ont décliné.
    Quelqu'un lui a dit qu'elle pourrait peut-être présenter une demande de prestations d'assurance-emploi. C'est ce qu'elle a fait, mais parce qu'elle avait auparavant pris la décision de quitter temporairement son emploi pour étudier, elle ne répondait pas au critère de la période de référence et donc, n'était pas admissible aux prestations. D'après la loi, il faut avoir travaillé durant la période de référence de 52 semaines. Malheureusement, elle n'avait tout simplement pas droit aux prestations.
    Voilà les circonstances qui ont attiré mon attention. J'ai déclaré que c'était injuste, et je voulais savoir pourquoi elle n'était pas admissible. J'ai donc étudié le cas et lu la loi et j'ai pu constater que la loi avait été respectée. J'ai pensé que peut-être une erreur avait été commise. Par contre, en lisant la loi, j'ai découvert que des prolongations pouvaient être accordées dans certaines circonstances. D'après le paragraphe 8(2) de la Loi sur l'assurance-emploi, une prolongation de la période de référence — qui aurait permis d'aider la jeune femme — peut être accordée si durant les semaines couvrant la période de prolongation demandée la personne ne recevait pas de prestations d'assurance-emploi et s'est vue empêchée d'exercer un emploi assurable pour l'une des raisons suivantes:
a) elle était incapable de travailler par suite d'une maladie, d'une blessure, d'une mise en quarantaine ou d'une grossesse;
c) elle recevait de l'aide dans le cadre d'une prestation d'emploi;
    De plus, d'après le « Guide de la détermination de l'admissibilité », à l'article 1.3.1:
3. participation à un cours ou à une autre activité reliée à l'emploi après y avoir été dirigé par Ressources humaines et Développement social Canada ou un tiers désigné;
    du même guide, il y a également l'article 1.5.1:
des indemnités reçues en vertu d'une loi provinciale pour... retrait préventif.
    Toutes ces raisons sont légitimes. Mais dans le cas de la jeune femme, elle avait volontairement quitté son emploi pour se perfectionner. Elle n'était pas malade durant cette période. Elle ne recevait aucune prestation ni indemnité provinciale. Or, il y a une quatrième raison qui est énoncée et qui permet une prolongation de la période de référence ou de prestation:
b) la détention dans une prison ou un établissement de même nature.
    Autrement dit, si vous avez travaillé un certain nombre d'années, que vous prenez la décision de commettre un crime, que vous vous faites attraper, que vous subissez un procès et devez purger huit mois en prison, lorsque vous sortirez, vous aurez droit à la prolongation. Il y a donc une partie de la loi qui s'interprète ainsi: « Bien sûr, nous n'avons qu'à prétendre qu'il ne s'est jamais rien passé, et nous allons vous accorder une prolongation pour compenser le temps passé derrière les barreaux, soit huit mois additionnels à la période de référence. »

  (1540)  

    J'ai donc commencé à en parler à mes électeurs et la plupart du temps, on me répondait « J'espère que vous blaguez, c'est injuste ». Effectivement, c'est injuste. Qui peut trouver juste une loi qui accorde un traitement de faveur à quelqu'un qui a commis un crime et qui est incarcéré par rapport à un autre qui travaille fort et qui, dans le cas de la jeune femme, avait pris congé pour se perfectionner professionnellement? Malgré le fait qu'elle soit retournée au travail pendant une brève période de temps, elle se retrouvait à nouveau sans emploi. Et surprise, aux termes de la Loi sur l'assurance-emploi, parce qu'elle n'a pas travaillé durant les 52 semaines précédant sa demande, elle n'était pas admissible.
    Dans sa forme actuelle, la Loi sur l'assurance-emploi fonctionne bien pour tous les Canadiens qui travaillent fort. Il faut être admissible pour percevoir des prestations qui ne durent qu'un temps, soit la période de prestations. Mais j'ai été atterré d'apprendre qu'une personne incarcérée pouvait se prévaloir d'un passe-droit quant à la prolongation de la période de référence. Je me suis dit que c'était injuste. Un journaliste m'a demandé aujourd'hui en quoi consistait mon projet de loi et si mes collègues et le public l'appuyaient. Je lui ai répondu que ce projet de loi était une question d'équité et que je ne voyais pas comment quelqu'un pourrait refuser le principe d'équité.
    Je pourrais vous citer bon nombre d'exemples. Par exemple, au Québec, une jeune mère s'est vu refuser l'assurance-emploi récemment parce que son employeur avait fermé ses portes. Malheureusement, elle revenait d'un congé de maternité et n'avait pas travaillé assez l'année précédente pour se voir accorder une prolongation. Mais devinez quoi? Si elle avait été incarcérée, elle y aurait eu droit. C'est injuste. Il est injuste d'accorder un traitement préférentiel à un criminel condamné par rapport à un Canadien travaillant fort qui prend la décision de quitter le marché du travail pendant quelque temps.
    Voilà en quoi tient mon projet de loi. Nous voulons nous assurer que les criminels condamnés sont soumis aux mêmes lois que les Canadiens qui respectent la loi, travaillent et essaient d'apporter une contribution à la société. Des personnes qui décident de ne pas enfreindre la loi pour ne pas avoir de démêlés avec la justice et risquer la prison.
    J'estime que mes explications résument assez bien le projet de loi. Je l'ai en fait surnommer le « projet de loi sur l'équité ». Les mesures législatives proposées ne vont pas changer le monde, non plus qu'elles vont constituer une refonte de la Loi sur l'assurance-emploi. Néanmoins, elles permettront de supprimer la partie qui accorde à un criminel condamné un traitement préférentiel par rapport à un Canadien respectueux des lois qui ne cherche qu'à mener une vie honnête.
    Monsieur le président, je suis prêt à répondre aux questions au sujet de mon projet de loi.

  (1545)  

    Merci.
    Je tiens à remercier le député de Cariboo—Prince George d'avoir très bien expliqué son projet de loi. Je suis certain que des questions lui seront posées par les députés des différents partis. Nous allons commencer par M. Patry.
    Monsieur Patry, vous avez la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Harris, je comprends que c'est inéquitable. Toutefois, je voudrais que l'on comprenne bien la différence entre deux choses. Comme vous le savez, les criminels endurcis écopent de peines de plus de deux ans et un jour. Ces gens n'ont pas droit à cela et ne seront jamais capables de réclamer les 104 semaines de prestations. Cela s'applique seulement à ceux qui purgent une peine de deux ans moins un jour.
    Monsieur Harris, j'aimerais vous faire comprendre une chose par mon exposé et ma question. Les gens qui vont en prison ne sont pas nécessairement des criminels endurcis. Certains d'entre eux n'ont pas payé leur contravention pour excès de vitesse. Puisqu'ils n'ont pas d'argent pour payer ladite contravention, ils passent du temps en prison; ce peut être deux ou trois mois. Il faut tenir compte de ces gens.
    Les gens qui purgent une peine de deux ans moins un jour ne sont pas tous des criminels endurcis. Il y a beaucoup de mères seules qui sont emprisonnées pour vol à l'étalage. Souvent, elles volent de la nourriture. Il faut faire attention à ça.
    Ce système a été mis en place en 1959 par des progressistes-conservateurs. Pourquoi l'enlever? Ne veut-on pas qu'il y ait toujours un volet de réinsertion?
    Si quelqu'un n'a pas payé ses contraventions et qu'il sort de prison au bout de trois mois, il fera une demande d'assurance-emploi afin de se remettre sur pied. Si on leur enlève ça, ces gens n'auront plus que des prestations d'aide sociale. Avoir fait de la prison paraît très mal sur un CV, même quand une personne a été incarcérée pour ne pas avoir payé ses contraventions ou pour un vol à l'étalage.
    J'aimerais savoir ce que ça rapporte au gouvernement de faire ça. Quel est le pourcentage? Quel montant d'argent y est rattaché? Combien allez-vous économiser? C'est ce que j'aimerais savoir.

[Traduction]

    Je vous remercie de la question.
    D'abord, je ne laisse certainement pas entendre que ce projet de loi s'appliquerait aux criminels endurcis, comme vous le dites, qui sont incarcérés pour une plus longue période de temps. Vous avez parlé de ceux qui se voient imposer une peine de deux ans moins un jour, et qui seraient dans un certain sens admissibles à un traitement préférentiel. Dans les faits, ces gens ne seraient pas allés en prison et ne seraient pas en prison s'ils n'avaient pas enfreint la loi. C'est une question de choix.
    Si vous choisissez de respecter les lois, de travailler fort, de contribuer à la société et d'élever votre famille et vos enfants et de leur donner de bons conseils, vous n'avez pas à vous inquiéter. Mais si vous choisissez d'enfreindre la loi, qu'il s'agisse d'infraction mineure ou grave, vous avez fait un choix. La Loi sur l'assurance-emploi accorde actuellement un traitement préférentiel aux gens qui ont choisi d'enfreindre la loi et qui se voient ensuite imposer une peine d'emprisonnement. C'est simplement injuste, parce que ces privilèges spéciaux ne sont pas offerts à ceux qui choisissent de respecter la loi.
    Pour ce qui est de savoir combien d'argent le projet de loi fera épargner, ce projet de loi n'a pas été rédigé pour des raisons d'argent. Je ne sais pas combien: 3 millions de dollars, 4 millions de dollars ou 5 millions de dollars... Ça ne va pas changer le monde. C'est une question d'équité. Voilà l'origine du projet de loi.

  (1550)  

[Français]

    Dans ce cas, monsieur Harris, que fait-on des gens qui sont incarcérés en attente de leur procès et qui sont acquittés par la suite? Comment va-t-on traiter ces gens quand ils vont réintégrer le marché du travail? Ils n'auront pas droit aux prestations d'assurance-emploi, ils n'auront droit à rien et seront pénalisés. Pouvez-vous m'expliquer cela?

[Traduction]

    Non. Ce changement ne s'applique qu'aux personnes condamnées. Les gens qui attendent d'être mis en détention, qui passent du temps... seront toujours admissibles à la prolongation. Il s'agit d'un amendement favorable en annexe. Il s'agit de l'un de deux amendements favorables. Si vous n'êtes pas condamné d'un crime, vous n'êtes pas touché, mais si vous êtes condamné, vous l'êtes.

[Français]

    Lorsque vous avez déposé votre projet à la Chambre des communes, j'ai abordé le sujet des 104 semaines pour les femmes qui sont en congé de maternité et qui perdent leur emploi. Il y a un problème à cet égard.
    Dans plusieurs cas, peu importe la convention collective, quand un travailleur est absent pendant plus de cinq jours, il est mis à pied et perd son droit d'ancienneté. Ces gens, même s'ils sont incarcérés, peuvent avoir commis une simple erreur. Il est possible que des gens ne soient pas de mauvaise foi. Plusieurs personnes mettent la contravention dans le panier au-dessus du réfrigérateur et ne s'en occupent pas. Un beau matin, les policiers arrivent, mais puisque l'individu n'a pas assez d'argent pour payer, il sera emprisonné pendant deux ou trois jours. On va pénaliser ces gens. Quand ils vont perdre leur emploi, leur seul recours sera l'assurance-emploi. Ce n'est pas très répandu, c'est vraiment spécifique. C'est ce qui m'inquiète. Des gens seront emprisonnés pendant une ou deux semaines pour des affaires simples.
    Il faut s'entendre sur le sens du mot « criminel ». Selon moi, quelqu'un qui n'a pas payé sa contravention n'est pas un bandit. Parfois, certaines personnes sont négligentes et ne paient pas, ce qui occasionne des problèmes. Ces gens seront pénalisés. On va créer une autre classe de gens qui seront punis. On va échanger quatre trente sous pour une piastre.

[Traduction]

    Eh bien, je comprends l'argument que vous tentez de faire valoir, mais honnêtement, je doute fort que quelqu'un qui oublie de payer un billet de stationnement ou une contravention pour excès de vitesse sera envoyé en prison. J'ai suivi les travaux de la cour pendant de nombreuses années, et je n'ai jamais eu connaissance d'un tel cas.
    Je vous remercie.
    Vous n'avez plus de temps, monsieur Patry.
    Je rappellerais aux intervenants de ralentir un peu, parce que les interprètes ont un peu de difficulté à suivre. Gardez cela en tête.
    Je vous remercie. Vous n'avez plus de temps.
    Nous allons maintenant passer à M. Rathgeber.
    Allez-y.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Merci, monsieur Harris.
    J'aimerais premièrement vous dire que j'appuie certainement le projet de loi. J'ai voté en faveur en deuxième lecture à la Chambre, mais j'ai quelques questions. La première est assez technique.
    J'ai un exemplaire du projet de loi, qui est très court, comme vous le savez, mais je n'ai pas d'exemplaire de la Loi sur l'assurance-emploi ni des règlements. Savez-vous si la loi renvoie en fait à un prolongement lorsque la personne purge une peine dans un pénitencier? La loi utilise-t-elle le mot « pénitencier »?
    Oui. Le paragraphe 8(2) de la Loi sur l'assurance-emploi stipule qu'une prolongation de la période de référence peut être accordée pour les semaines où une personne « était détenue dans une prison, un pénitencier ou une autre institution de même nature ».
    Pour cette raison seulement, je crois que nous devrions tous appuyer le projet de loi, parce qu'on envoie dans les pénitenciers, comme vous le savez, les personnes condamnées qui purgent une peine de deux ans ou plus. Il me semble que quiconque purge une telle peine est très loin de la période de référence normale de 52 semaines. Alors pour cette raison seulement, je crois que l'intention du projet de loi est bonne.
    Maintenant, pour répondre à la question de M. Patry sur les épargnes, je ne crois pas que vous aviez une réponse précise pour lui. Savez-vous combien de personnes profitent de cette disposition de la Loi sur l'assurance-emploi qui permet la prolongation de la période de référence pour cause de détention?
    Ils ne sont pas très nombreux. Je crois que ceux qui sont incarcérés pour moins de deux mois... Je crois que la proportion est d'environ 4 p. 100. La somme d'argent n'est pas très grande non plus. D'après les estimations les plus précises, la somme avoisinerait les 3 ou 4 millions de dollars.
    Mais pour réitérer ce que j'ai dit à M. Patry, ce projet de loi ne vise pas principalement à réaliser des économies. En fait, un montant de 3 ou 4 millions de dollars n'est pas grand-chose dans un budget de plusieurs milliards. Bien sûr, les économies sont toujours les bienvenues, mais nous voulons surtout faire en sorte qu'un détenu reconnu coupable d'un crime ne jouisse pas d'un traitement privilégié, traitement qui n'est pas offert aux gens honnêtes.

  (1555)  

    Je suis parfaitement d'accord avec vous, mais que répondez-vous aux critiques ou aux adversaires de votre projet de loi qui vous accusent de vous en prendre aux plus vulnérables ou de ne pas donner aux délinquants une deuxième chance à laquelle ils auraient droit?
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, on fait des choix dans la vie. Ceux qui choisissent d'être honnêtes et de travailler fort ne sont pas concernés par cette mesure. Mais ceux qui choisissent d'enfreindre la loi devront en payer le prix. On peut se retrouver en prison et dans ce cas, lorsqu'on est libéré, on a droit à toutes sortes de services d'aide. Rien ne prouve qu'un détenu qui reçoit des prestations d'assurance-chômage une fois sorti de prison va s'amender du tout au tout et qu'il ne commettra plus jamais de crime.
    Si on voulait vraiment obtenir ces chiffres, on pourrait le faire. À leur sortie de prison, les délinquants pourraient utiliser cet argent de bien des façons, certaines bonnes, certaines mauvaises, mais le fait demeure que nous consacrons quelque 400 millions de dollars à ce qu'on appelle des « interventions correctionnelles », c'est-à-dire des services conçus pour soutenir les ex-détenus et à les remettre sur le droit chemin. Il y a de l'argent pour cela. Les 3 millions ou 4 millions sont une somme assez modique si on la compare aux 420 millions de dollars dépensés à l'heure actuelle.
    J'imagine que vous avez consulté des gens à l'intérieur et à l'extérieur de votre circonscription. Y a-t-il des groupes qui s'opposent à ce que vous proposez, monsieur Harris?
    Pas dans ma circonscription, que je sache. Je n'ai pas non plus reçu d'appel de gens affolés me reprochant cette mesure. En revanche, j'ai reçu des appels et des courriels de gens qui ignoraient jusque-là l'existence de cette mesure qui avantage les détenus et qui se réjouissaient que je propose d'y mettre fin.
    Quelqu'un m'a demandé pourquoi les gens sont favorables à mon projet de loi. J'ai répondu c'est parce que c'est parce qu'il rétablit une situation équitable. Qui ne serait pas d'accord avec cela?
    Qu'en est-il des organismes qui défendent les droits des détenus? Je pense entre autres à la Société Elizabeth Fry ou la John Howard Society. Ont-ils communiqué avec vous?
    Non, pas du tout. Comme le Parlement a été saisi du projet de loi avant la période de congé, j'imagine que si ce projet de loi était une grande source d'inquiétude pour certains groupes, on les aurait déjà entendus, mais je n'ai pas eu de nouvelles.
    Merci, monsieur Harris.
    Je n'ai pas d'autres questions.
    Merci, monsieur Rathgeber.
    Nous entendrons maintenant les questions de Mme Crowder.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Harris. Je suis toujours ravie de voir des députés proposer des mesures donnant suite aux demandes de leurs électeurs. Plusieurs d'entre nous tâchent de faire ce que les électeurs nous demandent.
    Toutefois, vous avez parlé des choix qu'on fait dans la vie, et quelque chose m'intrigue. Vous aviez le choix de la mesure que vous voulez mettre de l'avant et d'après ce que je vois ici, votre projet de loi n'aide en rien la femme dont vous avez parlé, celle qui est tombée malade et n'avait pas droit aux prestations d'assurance-emploi.
    Je me demande pourquoi vous n'avez pas choisi de proposer un projet de loi qui aurait prolongé la période d'admissibilité pour les femmes dans cette situation et pour les hommes qui pourraient également perdre leur emploi. Pourquoi avez-vous choisi de supprimer des prestations qui existent au lieu de créer d'autres prestations pour les gens qui en ont besoin.
    Je vous répondrais tout d'abord qu'un projet de loi d'initiative parlementaire ne peut pas demander au gouvernement de dépenser de l'argent.
    Vous pouvez travailler avec le gouvernement pour obtenir la sanction royale.
    Mais ce n'est pas cette partie-là de la Loi sur l'assurance-emploi qui a attiré mon attention. Bien entendu, j'étais déçu de la situation de cette dame, mais cela m'a incité à lire la loi, pour voir s'il était possible de trouver des dispositions qui permettraient à cette dame de recevoir des prestations. Or, quand j'ai lu ces dispositions dans la loi, je me suis demandé si j'avais la berlue.
    D'autant plus que si cette dame avait été en prison, elle n'aurait pas eu à m'appeler pour demander de l'aide. Ce n'est pas juste.

  (1600)  

    Il est intéressant que vous disiez que ce n'est pas juste parce que bien sûr quand une modification de la loi a été déposée par un gouvernement conservateur, ils ont reconnu le fait que lorsque vous parlez... Vous avez parlé tout à l'heure d'un traitement privilégié qui serait accordé aux détenus. Mais il ne s'agit pas d'un privilège, car les travailleurs cotisent à la caisse de l'assurance-emploi. C'est comme une prime d'assurance qu'ils versent quand ils travaillent. Par conséquent, le fait de toucher des prestations d'assurance-emploi n'est pas un privilège mais bien un droit puisque les travailleurs cotisent à la caisse.
    Vous savez sans doute que quand les conservateurs ont déposé le projet de loi, ils ont tenu compte du fait que le travailleur incarcéré était doublement pénalisé. D'une part, il était incarcéré pour purger sa peine à cause d'un crime qu'il avait commis et, à sa sortie de prison, il n'avait pas droit aux prestations d'assurance-emploi même s'il avait cotisé à la caisse parce qu'il avait été incarcéré. Voila un facteur dont il faut tenir compte.
    J'admets qu'il n'y a pas de preuves indiquant que toucher des prestations favorise la réinsertion sociale, mais cela fait partie de cette démarche. Je crois qu'il est dans l'intérêt de tous les citoyens que les ex-détenus réintègrent la société et ne récidivent pas. Voilà une autre raison de verser ces prestations, outre le fait que ces personnes ont payé les cotisations.
    Alors quand vous disez que c'est un privilège et non pas un droit qu'ont les travailleurs...
    Madame Crowder, je parlais du traitement privilégié accordé à des criminels condamnés. Je disais...
    D'autres Canadiens ont droit à cette prolongation. Trouvez-vous qu'eux aussi jouissent d'un traitement privilégié et non d'une mesure prévue par la législation de l'assurance-emploi?
    Je vais vous dire. Vous avez tout à fait raison de dire que les Canadiens cotisent à l'assurance-emploi et qu'ils ont droit à des prestations. C'est parfaitement juste. Les Canadiens cotisent. Toutefois, ils le font compte tenu de règlements qui fixent la période d'admissibilité à 52 semaines. Il faut avoir travaillé un certain nombre d'heures pour avoir droit à 52 semaines de prestations. C'est bien connu et les Canadiens savent que s'ils respectent les critères et qu'ils versent leurs cotisations, ils ont parfaitement le droit, comme vous l'avez dit, de toucher des prestations.
    Je disais que dans certaines circonstances, selon les dispositions de la loi, comme je l'ai signalé, dans certaines circonstances — maladie, blessure, etc. — on peut demander une prolongation. Si vous...
    Excusez-moi, monsieur Harris, mais je dois vous interrompre. Comme vous le savez, je n'ai que cinq minutes de temps de parole, et je voudrais aborder une autre question.
    Mais permettez-moi de dire...
    Monsieur Harris, je pense que vous avez presque terminé votre réponse si bien que par souci d'équité, je vous laisse finir et nous allons poursuivre.
    D'accord.
    Voici ce que j'ajouterai: je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de Canadiens qui acceptent que quelqu'un qui enfreint la loi et est incarcéré devrait bénéficier d'un traitement favorable... plus avantageux que ce que l'on réserve aux citoyens respectueux de la loi qui travaillent et qui adoptent la vision sociétale du comportement d'un bon citoyen.
    Là où nous pouvons nous entendre est sur le fait que la prolongation devrait être accordée à d'autres personnes sans pour autant la retirer à ceux et celles qui ont cotisé.
    Une dernière chose. Nous savons tous que les contribuables paient des impôts et nous sommes en présence d'un autre exemple d'une facture imposée aux provinces. En effet, si les personnes concernées ne touchent pas l'assurance-emploi au sortir du pénitencier, il est fort probable que ce sera l'aide sociale provinciale qui devra s'occuper d'eux. Ainsi vous préconisez tout simplement que le gouvernement fédéral renvoie la balle au gouvernement provincial encore une fois, un peu comme c'est le cas pour le projet de loi C-10, le projet de loi omnibus sur la criminalité.
    Évidemment, je ne peux pas adhérer à votre conclusion. Je conclurai en disant que je ne demande pas qu'on modifie toute la Loi sur l'assurance-emploi. Ses dispositions fonctionnent très bien. Je pense que notre Loi sur l'assurance-emploi est l'une des meilleures du monde. Ce projet de loi vise à supprimer le traitement que l'on réserve à des criminels condamnés de préférence aux citoyens respectueux de la loi.
    Merci, monsieur Harris.
    La parole est à M. Shory.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Harris d'être venu témoigner au comité cet après-midi. Si j'ai bien compris, l'essentiel de votre projet de loi porte sur une question d'équité. Bien entendu, je suis d'accord avec vous: il n'y a pas de raison que des criminels condamnés reçoivent des prestations d'assurance-emploi plus généreuses que les Canadiens respectueux de la loi. Comme vous l'avez dit, ces personnes ont le choix. Elles peuvent respecter les règles établies ou les enfreindre et aller en prison.
    Très souvent j'aime à dire que mes électeurs de Calgary-Nord-Est sont les travailleurs canadiens qui travaillent le plus dur. Même si j'en suis convaincu, monsieur Harris, je sais aussi qu'il y a bien d'autres électeurs très travailleurs dans d'autres circonscriptions. Cela m'amène à me poser la question suivante: que penserait le Canadien moyen si on lui disait que des criminels — des gens qui troublent la paix, qui refusent de respecter les règles et qui s'attaquent à leurs concitoyens — bénéficient d'un traitement spécial au titre de l'assurance-emploi pendant qu'ils purgent une peine derrière les barreaux? Je pense connaître la réponse que me donnerait mes électeurs. Bien entendu, ils estimeraient que cela n'est pas juste.
    Pouvez-vous me dire quelle a été la réaction de vos électeurs à cette idée et ce quelle est en général?

  (1605)  

    Je vous dirai ceci: étant donné ce que j'ai entendu dire dans ma circonscription et dans d'autres régions de la province de Colombie-Britannique, il y a sans doute 99,9 p. 100 des Canadiens qui travaillent dur qui ne savent pas que ce traitement de faveur existe en vertu des dispositions de la Loi sur l'assurance-emploi et que quelqu'un au sortir de prison peut toucher des prestations d'assurance-emploi. Quand je leur dis, je le répète, ils répondent spontanément: « Sans blague! Comment cela se peut-il? » Quand je leur dis que je vais essayer de changer les choses, ils répondent: « À la bonne heure. »
    C'est leur réaction. Ils ne peuvent pas croire que ce traitement de faveur est prévu.
    Monsieur Harris, que répondez-vous à ceux qui préconisent que des criminels condamnés devraient toucher des prestations plus généreuses que des citoyens respectueux de la loi?
    Je leur dis que ces criminels n'auraient peut-être pas dû enfreindre la loi pour commencer. Ils avaient le choix de travailler dur et d'essayer d'apporter leur contribution à la société. Toutefois, ils ont fait un choix, celui d'enfreindre la loi. Dans ces cas-là, des règles sont prévues et l'une d'entre elles ne devrait certainement pas, s'agissant des prestations d'assurance-emploi, que les anciens détenus constituent un groupe spécial bénéficiant d'un traitement de faveur par rapport aux citoyens respectueux de la loi.
    Me reste-t-il du temps, monsieur le président?
    il vous reste environ deux minutes si vous voulez en profiter.
    Brad va les utiliser.
    Allez-y, monsieur Butt.
    Monsieur Harris, manifestement, vous avez bien fouillé la question des exemptions et de l'admissibilité en ce qui concerne les prestations d'assurance-emploi. Je pense que Mme Crowder essayait de dire que quiconque cotise à l'assurance-emploi y est admissible. Eh bien, nous savons que ce n'est pas vrai. En vertu du régime actuel d'assurance-emploi, il y a des cas où des gens ne sont pas admissibles même s'ils ont cotisé.
    Ne serait-ce pas comparable dans le cas qui nous occupe? Ainsi, une personne ayant purgé une peine de prison ne serait pas admissible à des cotisations d'assurance-emploi? Ce ne serait pas différent des autres cas d'exception déjà prévus, où l'admissibilité à toucher des prestations est refusée? Est-ce que je me trompe?
    Quiconque cotise au régime d'assurance-emploi est admissible à des prestations compte tenu des règles prévues dans la loi notamment la période de référence. Autrement dit, vous pouvez purger une peine de prison et toucher des prestations d'assurance-emploi. Par exemple, si votre peine est d'un mois, on tiendrait compte de ce mois dans le calcul de la période de référence en le défalquant des 52 semaines requises et il reste 11 mois pour réunir le nombre de semaines réglementaires. Un court séjour derrière les barreaux n'empêche personne de faire une demande de prestations et de l'obtenir pour la période à laquelle on a droit.
    Autrement dit, le Canadien moyen ne peut pas demander une prolongation simplement parce qu'il la souhaite. Mais un détenu qui aurait passé la durée de sa période de référence en prison, parce qu'il avait enfreint la loi, peut demander une prolongation en vertu de la loi actuelle. Voilà précisément pourquoi je demande qu'on abroge ces articles qui prévoient ce traitement de faveur.
    Une brève question complémentaire.
    Le principe de l'assurance-emploi — pouvoir la toucher et y être admissible — n'est-il pas que l'on est prêt à travailler? Comment quelqu'un qui est incarcéré peut-il être disponible pour un emploi?
    C'est pour une bonne raison que nous avons changé le terme et que l'on parle désormais « d'assurance-emploi ». Il ne s'agit pas d'une assurance-chômage. C'est une assurance-emploi car les gens qui touchent des prestations doivent être disponibles pour travailler. Le régime repose sur ce principe. Si vous êtes en prison, vous n'êtes manifestement pas disponible pour travailler.

  (1610)  

    Une brève réponse, si possible, monsieur Harris.
    Eh bien, je ne vais pas essayer d'expliquer les raisons pour lesquelles cette disposition a été incluse dans le projet de loi en 1959. Tout comme la plupart des Canadiens auxquels j'ai parlé de ce projet de loi, je ne suis pas d'accord avec cette disposition. À mon avis, c'est un élément injuste du régime, et je veux le corriger.
    D'accord. Passons maintenant à M. Cuzner, pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, et merci, Dick, d'être venu présenter votre témoignage aujourd'hui.
    J'aimerais apporter une précision à l'intention de M. Butt. Les détenus ne reçoivent pas de prestations. L'objectif du projet de loi vise en fait à traiter cet écart par rapport au programme. Il faut effectivement être disponible pour travailler. Les détenus ne remplissent pas les cartes qui indiquent leur disponibilité au travail pendant qu'ils sont incarcérés. Le projet de loi vise à retirer du système cette exemption d'une période de deux ans. C'est un peu différent.
    Quand j'ai lu le projet de loi j'ai été moi aussi étonné de voir que le régime d'assurance-emploi contenait une telle disposition. Je n'ai jamais eu à en traiter avec un électeur, mais je partage l'opinion de Mme Crowder, selon qui il s'agit d'un droit. Nous savons que l'incarcération est un recours qui vise à punir, mais la plupart des Canadiens estiment aussi que c'est une occasion, pour le détenu, de se corriger et de se réadapter. Ce ne sont pas les criminels endurcis qui purgent des peines d'une telle durée. Ce sont des personnes qui ont commis une erreur. Dans certains cas, ils ont commis un crime passionnel, dans d'autres cas, ils ont été victimes de leur stupidité, peu importe... et dans d'autres cas aussi il s'agit de personnes souffrant de maladies mentales. Nous savons qu'il y a dans le système carcéral de nombreuses personnes atteintes de maladies mentales, entre autres.
    Mais je suis en partie d'accord avec vous. C'est bien frustrant de rencontrer des électeurs à qui on a refusé des prestations alors qu'il semble tout à fait illogique de refuser ces prestations à quelqu'un qui veut simplement joindre les deux bouts. Ce qu'il faut, dans un tel cas, c'est régler ce problème-là du régime d'assurance-emploi plutôt que de s'attaquer à autre chose. Si un aspect du régime ne fonctionne pas, s'il ne donne pas les résultats escomptés, on peut le modifier. Mais parce qu'on estime qu'un aspect du régime semble injuste, je ne crois pas qu'il soit à propos d'en changer un autre aspect.
    Je suis un peu déçu de ce que nous n'avons pas d'information quant à la portée de la mesure, c'est-à-dire le nombre de personnes qu'elle touchera et les coûts qu'elle entraînera. Je me demande si nos attachés de recherche pourraient nous fournir cette information ou...
    Nous n'avons pas cette information.
    Vous ne l'avez pas non plus? D'accord. Nous devrions essayer de la trouver.
    Pour revenir aussi à la question de Jean, dans le cas du projet de loi C-10 — et je sais, monsieur Harris, que vous n'êtes pas d'accord — on a vu l'Ontario, le Québec et la Nouvelle-Écosse exprimer leur inquiétude quant aux coûts en immobilisations et aux coûts de fonctionnement que le projet de loi C-10 entraînera en raison du nombre de détenus supplémentaires. Il est certain que les personnes qui sortent de prison seront également touchées, puisque ces détenus remis en liberté n'auront pas d'emploi. Dans la plupart des cas, je crois, ces personnes devront avoir recours aux services sociaux des provinces.
    Savez-vous s'il existe de l'information à ce sujet? Si vous n'avez pas vous-même étudié la question, savez-vous s'il existe de l'information quelque part à ce sujet? Je suis étonné que la John Howard Society et la Société Elizabeth Fry n'aient pas communiqué avec vous, en fait. Cela m'étonne.
    Je signale au comité que ces deux organisations comparaîtront devant notre comité à sa prochaine réunion.
    À mon avis, la réadaptation commence dès le moment de l'incarcération. Les détenus ont la possibilité d'améliorer leurs compétences, leurs connaissances. Ces services sont à leur disposition. Comme je l'ai dit, on offre pour quelque 400 millions de dollars de services de soutien, d'un bout à l'autre du pays, aux détenus remis en liberté. Il faut espérer qu'ils se prévalent de ces services.
    Au sujet du programme lui-même et des raisons pour lesquelles nous corrigeons un autre élément, je dirais que le ministre et son ministère examinent constamment les dispositions de la loi. C'est le travail des fonctionnaires du ministère. Ils examinent la loi pour essayer d'en améliorer les résultats et de la rendre plus efficace pour les Canadiens qui doivent avoir recours au régime en raison de difficultés dont ils ne sont pas responsables. C'est à cela que sert cette assurance.
    Ils ont effectivement droit aux prestations en vertu du Règlement et de la loi dans sa version actuelle. On peut bien discuter de tous les aspects de la loi, mais ce n'est pas là le problème.
    Le problème est très simple. Une personne condamnée pour avoir commis un acte criminel doit purger une peine d'emprisonnement d'une courte durée. En raison de cette incarcération, cette personne peut, au terme d'une disposition de la loi, demander une prolongation de sa période d'admissibilité à l'assurance-emploi ou de sa période de prestations. Ce même droit n'est toutefois pas consenti aux citoyens qui respectent les lois, qui ne commettent pas de crime, qui ne sont pas incarcérés, qui travaillent fort et qui pour une raison quelconque se retrouvent dans une situation difficile qui les oblige à demander de l'assurance-emploi. Ces personnes ne peuvent pas demander une prolongation sur le motif qu'elles se trouvent dans des circonstances qu'elles ont provoquées elles-mêmes...
    Je ne dis pas que le problème vient du Règlement. Je trouve injuste qu'on accorde à des criminels condamnés un traitement préférentiel par rapport aux Canadiens respectueux des lois. Voilà ce que je dis.

  (1615)  

    Merci, monsieur Harris.
    Merci, monsieur Cuzner. Votre temps est écoulé.
    Monsieur McColeman, avez-vous des questions?
    Le président: Allez-y.
    M. Phil McColeman: Merci, monsieur le président.
    Pour commencer, monsieur Harris, je tiens à vous féliciter de tout le travail que vous avez accompli pour que votre projet de loi d'initiative parlementaire en arrive à cette étape. Vous avez détecté un problème qui vous semble une injustice, vous l'avez mis en lumière, vous avez consulté des gens de votre circonscription et d'ailleurs au pays, puis vous avez présenté ce projet de loi et l'avez amené jusqu'à cette étape. Je vous en félicite.
    Vous avez terminé votre intervention sur un élément que j'avais noté et sur lequel je voulais vous interroger; il s'agit de l'expression « traitement préférentiel ». Vous venez d'utiliser cette expression et je n'ai donc pas besoin que vous fassiez une vérification. Ce dont nous parlons, c'est du traitement préférentiel qui est accordé à certaines personnes dans le cadre de la loi, dans sa version actuelle. C'est bien cela?
    Oui.
    Mon honorable collègue, de l'autre côté, a parlé de réadaptation et il a tenté de faire le lien entre la réadaptation et les effets de cette disposition qui consent un traitement préférentiel. À votre avis, ce lien existe-t-il et la réadaptation a-t-elle quelque chose à voir avec cette période prolongée d'admissibilité à l'assurance-emploi?
    Eh bien, il n'existe aucune preuve que nous puissions produire pour montrer que le fait de pouvoir encore recevoir des prestations d'assurance-emploi influe énormément sur la vie de quelqu'un qui vient d'être remis en liberté. Il existe une multitude d'autres services de soutien pour les détenus qui sortent de prison. Il existe aussi des services de soutien durant leur incarcération afin qu'ils puissent améliorer leur éducation. Les détenus peuvent bénéficier de divers programmes pour améliorer leurs compétences. Ils sont ainsi mieux en mesure qu'avant leur incarcération de se trouver un emploi et, peut-être, de le conserver.
    Mais revenons à l'expression « traitement préférentiel ». La disposition consent aux détenus un privilège qui n'est pas offert aux autres citoyens respectueux des lois.

  (1620)  

    Je pense que c'est vraiment clair et que c'est tout à fait clair pour toutes les personnes assises autour de la table, du moins ce devrait l'être. Il faut appeler un chat un chat: c'est un traitement préférentiel en raison de la catégorie qui a été définie, la catégorie des particuliers incarcérés, en vertu de la loi actuelle.
    Maintenant, le lien dont je voudrais vous parler est celui ayant trait aux victimes. Dans ma circonscription, je fais face à des situations où des victimes se rendent à mon bureau pour dire que les criminels ont reçu une peine légère ou beaucoup plus légère que ce qu'elle devrait être selon eux et que dans certains cas, ils n'ont reçu aucune sentence.
    Seriez-vous d'accord pour dire que la plupart des personnes qui ont consciemment décidé, comme vous l'avez dit, de commettre un crime, laissent dans la plupart des cas une victime? Il ne s'agit peut-être même pas de particuliers; la société elle-même peut être victime. Diriez-vous que la plupart des activités criminelles laissent des victimes dans leur sillage?
    C'est dans le prolongement de ce dont nous parlons. J'imagine que cela ne porte pas directement sur le projet de loi, mais vous avez raison de dire qu'il y a une victime derrière chaque crime commis.
    Voici le lien que je veux établir. Je me mets à la place d'un criminel, ainsi qu'à la place de la victime. Dans ce cas, la victime pouvait être un particulier respectueux des lois ayant été victimisé et qui ne peut pas recevoir de traitement préférentiel ni toucher de prestations d'assurance-emploi. Que ressent une telle victime quand elle sait que le criminel, c'est-à-dire la personne ayant perpétré ce crime, est incarcéré et peut recevoir cette prolongation? C'est une pensée qui me scandalise.
    Oui. On peut faire de nombreuses comparaisons au traitement reçu par un criminel condamné et dire, « Comment peut-on refuser cette personne, lorsque l'on donne ce droit à un criminel? » Vous pouvez probablement utiliser toute une panoplie d'exemples. Et pour chacun de ces exemples votre seule réponse sera que c'est injuste.
    Je veux dire, comment peut-on dans la catégorie qui fait en sorte que vous êtes admissible à une prolongation et qui stipule « incapable de travailler par suite d'une maladie, d'une blessure, d'une mise en quarantaine ou d'une grossesse prévue par règlement » — conditions auxquelles tous seraient d'accord — quand il y a tout juste à côté « détenu dans une prison, un pénitencier ou une autre institution de même nature? » Cela n'a aucun sens. Cela n'a rien à voir avec un raisonnement logique.
    Merci, monsieur Harris, ainsi qu'à vous, monsieur McColeman.
    Je pense que Mme Crowder a une courte question à poser.
    Allez-y. Nous allons terminer là-dessus.
    Lorsque M. Patry a mentionné le fait que cela pourrait inclure des personnes incarcérées parce qu'elles n'ont pas payé leur contravention, vous avez mentionné que cela ne se produirait pas. En fait, il existe un certain nombre de cas du genre à Regina. Dans l'une de ces affaires, une femme a été incarcérée parce qu'elle n'avait pas payé ses contraventions pour stationnement interdit. Il s'agissait d'une femme de 31 ans mère de quatre enfants. Lorsqu'elle a été incarcérée pour ses contraventions, elle occupait un emploi. À ce moment-là, son époux a dû quitter son emploi pour aider à prendre soin des enfants pendant qu'elle était en prison.
    Et il y aurait, semble-t-il, d'autres instances à Regina où des personnes ont été incarcérées parce qu'elles n'ont pas payé leurs contraventions de stationnement. Je pense vraiment... Et elle était étudiante lorsqu'elle avait accumulé ces contraventions. Quelquefois, des étudiants se retrouvent dans des situations où le paiement de contraventions pour stationnement interdit ne figure pas sur leur liste de priorités parce qu'ils doivent payer leurs droits de scolarité et leurs frais de subsistance.
    Je soulève cette question, monsieur Harris, parce que je pense qu'il faut être prudent pour ne pas étiqueter quiconque se retrouve dans ce genre de situation comme étant en quelque sorte un criminel endurci. Cette jeune femme reconnaît qu'elle n'a pas payé ses contraventions et que c'était une erreur de ne pas les payer. Elle a essayé de le faire, mais comme elles étaient toujours en souffrance elle a été incarcérée.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de ce genre de situations.
    D'abord, jamais je ne qualifierai de criminel endurci une personne qui pourrait passer quelque temps en prison parce qu'elle n'a pas payé ses contraventions ou qu'elle a dépassé la limite de vitesse. Écoutez, c'est ridicule de dire quelque chose de la sorte.
    Je suis surpris, étant donné notre système de justice, que l'on mette quelqu'un en prison parce qu'il n'a pas payé ses contraventions pour stationnement illégal. Cela ne doit pas se produire très souvent. Et même si c'était le cas, je ne pense pas que la peine d'emprisonnement dépasse quelques semaines, un mois ou deux mois tout au plus. Écoutez, il y aurait un tollé au Canada si quelqu'un était mis en prison pour six mois parce qu'il n'a pas payé ses contraventions.
    Mais même si elle était incarcérée pendant seulement deux mois, elle aurait tout de même droit à une période de qualification de 10 mois. Je pense que pendant cette période si la personne occupait un travail constant, elle aurait eu amplement le temps d'être admissible aux prestations d'assurance-emploi au moment de quitter la prison.

  (1625)  

    Merci, monsieur Harris.
    Nous en sommes à la fin de cette partie de notre séance.
    Nous allons suspendre la séance pendant 10 minutes.

    


    

  (1635)  

    Je demande aux membres de bien vouloir prendre place. Nous allons accueillir le deuxième groupe de témoins.
    Nous recevons deux témoins: M. Gregory Thomas, directeur fédéral et de l'Ontario de la Fédération canadienne des contribuables, et Mme Sharon Rosenfeldt, présidente de Victimes de violence. Ils vont nous présenter leurs points de vue et faire quelques observations dans leurs déclarations préliminaires. Par la suite, chacun des membres des différents partis représentés ici poseront des questions.
    Qui va parler d'abord? Vous vous pointez l'un et l'autre.
    Madame Rosenfeldt, allez-y.
    Je veux remercier le comité de me donner la possibilité d'exprimer mon opinion en tant que Canadienne et au nom de l'organisation Victimes de violence en ce qui a trait au projet de loi C-316, Loi modifiant la Loi sur l’assurance-emploi concernant l'incarcération.
    Nous croyons que ce projet de loi adopte clairement des mesures pour faire en sorte que le programme d'assurance-emploi est assuré de façon efficace et équitable et de la façon la plus avantageuse pour les Canadiens. Le projet de loi C-316 se penche sur une mesure fondamentalement injuste; c'est-à-dire que les criminels condamnés jouissent actuellement d'un accès préférentiel aux prestations d'assurance-emploi par rapport aux citoyens respectueux de la loi.
    À l'heure actuelle, lorsque des particuliers font une demande d'assurance-emploi, ils sont évalués pour déterminer s'ils ont travaillé pendant suffisamment d'heures au cours de la période de référence pour recevoir des prestations. La période de référence habituelle est de 52 semaines. Cette période de référence peut seulement être prolongée dans le cadre de quatre exceptions en vertu de la loi et ce pour une période maximale de 104 semaines.
    La première raison permettant une prolongation est si la personne était incapable de travailler « par suite d'une maladie, d'une blessure, d'une mise en quarantaine ou d'une grossesse prévue par règlement. » Une deuxième raison justifiant la prolongation peut avoir lieu si la personne reçoit de l'aide dans le cadre d'une prestation d'emploi, comme en vertu d'un régime offert par un employeur antérieur. La troisième raison de prolongation relève du fait que la personne touchait des indemnités en vertu d'une loi provinciale du fait qu'elle avait cessé de travailler parce que la continuation de son travail la mettait en danger ou mettait en danger son enfant à naître ou l'enfant qu'elle allaitait. Et la quatrième raison est la suivante, c'est-à-dire si elle était « détenue dans une prison, un pénitencier ou un établissement similaire. »
    C'est la quatrième raison justifiant une prolongation que le gouvernement cherche à modifier, parce qu'elle porte sur des circonstances découlant des actions d'un particulier. Les articles 8 et 10 de la Loi actuelle sur l'assurance-emploi permet à des prisonniers de se prévaloir du même niveau de possibilité que les travailleurs canadiens qui travaillent fort et qui ont besoin du programme d'assurance-emploi.
    Je suis certaine qu'il y a de nombreux exemples où les honnêtes travailleurs canadiens pourraient profiter d'une prolongation de 104 semaines. Dans mon domaine d'activité, c'est-à-dire le travail avec les victimes de crimes, nous constatons cela de façon quotidienne. Comme vous le savez, la victimisation se produit soudainement et sans avertissement. Une victime se retrouve soudainement dans une situation très désespérante et la plupart du temps elle doit faire face au système de justice criminelle, comme les services policiers, les déclarations, les procureurs, les tribunaux, etc. C'est un domaine qui n'a pas reçu l'attention qu'il mérite en ce qui a trait à l'assurance-emploi.
    Nous comprenons bien que le gouvernement ne peut pas être la réponse aux besoins de tous et de chacun et qu'il doit y avoir des limites. Toutefois, nous comprenons également que le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences cherche actuellement des façons d'offrir de l'aide à l'avenir aux victimes de crimes en ce qui a trait à l'assurance-emploi.
    Ma question aux députés qui s'opposent à ce projet de loi est la suivante: qu'est-ce qui est plus équitable, une famille innocente dont un être cher a été victime de meurtre et qui ne peut travailler en raison du traumatisme, la victime de viol innocente, qui ne peut pas retourner au travail en raison des craintes et du traumatisme subi — et pour laquelle elle n'y est pour rien — ou une personne qui commet sciemment un crime et qui par la suite n'est pas seulement protégée mais récompensée au moyen d'une prolongation qui lui permet de recevoir le même niveau de traitement que les particuliers que je viens de décrire dans les trois circonstances précédentes? Nous pensons que cela ne doit pas être le cas.
    En ces temps économiques difficiles, les gouvernements devraient s'efforcer de s'assurer qu'ils investissent d'abord dans l'intérêt des Canadiens et pour faire en sorte que l'argent que les contribuables gagnent à leur dur labeur est utilisé à bon escient. Le gouvernement doit rassurer les Canadiens sur l'intégrité du ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences. L'intégrité de ce ministère est importante pour tous les Canadiens. Le gouvernement devrait prendre les mesures nécessaires pour assurer la sauvegarde de cette intégrité.
    En terminant, nous estimons que le Canada dispose d'un des meilleurs systèmes d'assurance-emploi. Toutefois, dans les circonstances exceptionnelles décrites par ce projet de loi d'initiative parlementaire, le ministère devrait agir rapidement pour apporter des mesures correctives. Ainsi, nous comparaissons ici aujourd'hui pour soutenir le projet de loi C-316.
    Je vous remercie.

  (1640)  

    Merci beaucoup pour cet exposé. Nous aurons des questions un peu plus tard.
    Nous allons demander à M. Thomas de nous présenter son exposé.
    Allez-y.
    Je m'appelle Gregory Thomas. Je suis le directeur fédéral de la Fédération canadienne des contribuables. Nous sommes le plus grand et le plus ancien groupe de défense des intérêts des contribuables. La fédération a été fondée il y a plus de 20 ans.
    Elle compte plus de 70 000 membres à travers le Canada. Périodiquement, vous recevez peut-être des courriels ou des appels téléphoniques de la part de certains de nos membres au sujet de différentes questions. Il n'y en a pas qui me vienne à l'esprit cette semaine, mais nos membres sont très actifs.
    Nous vous remercions de l'invitation à venir parler du projet de loi C-316. Nous nous réjouissons que le comité ait décidé d'examiner cette question, car nous croyons que le programme d'assurance-emploi est l'une de ces choses au Canada qui rend à peu près tous les Canadiens un peu fous.
    Je ne sais pas si vous avez vu l'étude qui a été faite par le Centre Mowat, l'École supérieure de politique publique à l'Université de Toronto et qui s'intitule Postal Code Lottery ou leur rapport plus positif sur l'assurance-emploi qui s'intitule Making it Work. Nous n'appuyons pas certaines des propositions de grosses dépenses que l'on retrouve dans ces documents publiés par le Centre Mowat, mais il illustre comment deux personnes peuvent travailler côte à côte dans la même usine, perdre leurs emplois le même jour et se retrouver dans une situation tout à fait différente sur le plan de l'assurance-emploi, selon l'endroit où elles habitent. Si elles habitent du mauvais côté de la voie ferrée ou dans un secteur qui n'a pas le bon code postal, elles ne recevront pas de prestations.
    Par ailleurs, pour ce qui est des régions, il est très clair que les travailleurs ontariens ont été durement frappés par la dernière récession et en ont subi les contrecoups. Cela a été très difficile. Moins de la moitié des Ontariens ont réussi à se prévaloir du programme d'assurance-emploi, tandis que dans d'autres régions du pays il y a une énorme participation au programme d'assurance-emploi, alors que toutes leurs économies fonctionnent de façon à extraire le maximum du gouvernement central sur le plan de l'assurance-emploi.
    Le projet de loi porte sur un tout petit élément. Selon certaines estimations, cela représente un million de dollars. Je pense que le coût d'administration du programme d'assurance-emploi s'élève à 186 millions de dollars, soit pour envoyer les chèques, etc., mais on parle ici de criminels reconnus que l'on met dans la même catégorie que les personnes handicapés et les mères allaitantes et qui reçoivent une prestation spéciale d'assurance-emploi.
    Dans la mesure où il s'agit d'un programme si compliqué, complexe et bizarre qu'il rend les Canadiens ordinaires fous, je pense que le Parlement se doit de s'y attaquer et de régler le problème. Il y a 58 districts séparés pour l'assurance-emploi. Il y a des « programmes pilotes », année après année, et cela montre tout simplement jusqu'à quel point le système est injuste.
    Si on examine le sort des victimes du crime et toute situation où on a l'impression que la Couronne, le gouvernement, les parlementaires et la justice traitent les criminels mieux que les victimes, on sait que ces gens se trouvent souvent dans des situations désespérées, qu'ils ont été blessés, qu'ils ont perdu un être cher, qu'ils souffrent et qu'ils tentent de combattre cette injustice. Toute injustice ne peut que désespérer et décourager les personnes les plus vulnérables et les plus victimisées dans la société, de sorte que nous comprenons très bien l'intention du projet de loi.
    Nous nous inquiétons des effets secondaires imprévus. Certains des accords dans le domaine du travail que le gouvernement fédéral a conclus avec les provinces par le passé empêchent les gens qui ne sont pas admissibles à des prestations d'assurance-emploi de recevoir une formation. Donc, s'ils ne peuvent se prévaloir du programme d'assurance-emploi, ils ne peuvent pas par exemple recevoir de formation. Si tous ces criminels qui purgent une courte peine dans un établissement provincial, qui sont en détention provisoire ou autre ne sont plus admissibles à l'assurance-emploi, est-ce que cela veut dire également qu'ils ne pourront plus recevoir de formation, et est-ce qu'il sera alors plus difficile pour eux de prendre le droit chemin? C'est une question qu'il faut sans doute examiner.

  (1645)  

    Je crois de plus qu'il serait bon que le gouvernement prenne les mesures pour qu'une étude soit effectuée sur l'identité de ceux qui réussissent à être admissibles à des prestations d'AE pendant un an alors qu'ils ont été reconnus coupables d'une infraction et envoyés derrière les barreaux. Tout semble indiquer que cela arrive peu souvent. Peut-être s'agit-il de personnes qui se livrent à des activités frauduleuses à l'égard du compte d'AE, ou peut-être s'agit-il de personnes qui cherchent à vivre dans le bon chemin.
    De toute façon, il s'agit d'un groupe très limité et je pense que le comité devrait essayer d'identifier qui fait partie de ce groupe. Vous savez, ils ont eu un emploi, ils ont cotisé au régime d'AE, ils font donc partie du petit groupe de détenus qui ont en fait cotisé au régime.
    Je ne m'oppose pas à ce que l'on cesse de payer des prestations à certains pour rétablir l'équité du régime, mais il faudrait se renseigner plus sur ce groupe de personnes pour savoir pourquoi et comment elles se distinguent des autres.
    Je vous remercie de votre exposé et de vos commentaires.
    Nous allons maintenant passer aux périodes de questions.
    Monsieur Patry, vous avez la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame, monsieur, je vous souhaite la bienvenue.
    Effectivement, il y a des coûts reliés à tout ça. On vit dans une société, dans un État de la justice, où l'on préconise aussi la réinsertion sociale et la réhabilitation. De bons programmes font en sorte qu'on réussisse. Je voudrais spécifier à mes collègues, à la suite des propos entendus, que les programmes sont offerts dans les pénitenciers, et non dans les prisons provinciales où les gens sont plutôt laissés à eux-même à leur sortie.
    Je veux en venir à la période de référence de 104 semaines dont vous avez parlé. Je vais parler du Québec. Au Québec, une femme dont le congé de maternité est terminé et qui revient au travail pour se rendre compte que son poste a été aboli n'a pas droit à des prestations d'assurance-emploi. J'aimerais bien qu'elle ait droit à cette période de référence de 104 semaines, car elle pourrait se qualifier de nouveau et recevoir des prestations. C'est sûr que c'est injuste. Va-t-on corriger une injustice en la remplaçant par une autre injustice? Il faudrait avoir une réforme à ce sujet. C'est mon opinion.
    Je voudrais savoir une chose. Comment voyez-vous l'argent et les rentrées d'argent? Selon vous, quel est l'impact des montants reliés à ça?
    À vrai dire, le projet de loi C-316 est l'initiative d'un député, soit M. Harris, avec l'appui du gouvernement.
    Mes études sur le sujet me révèlent que le système d'appui aux mères a certainement une meilleure réputation dans le monde développé que le système d'assurance-emploi. Je ne savais pas que les mères n'avaient pas le droit de recevoir de prestations, comme vous l'avez dit. Il me faudra étudier la question plus à fond.
    Notre organisation considère fortement que le système d'assurance-emploi dans son entier a grandement besoin d'une réforme et d'améliorations. Ce sera certainement une priorité dans les 18 à 24 prochains mois.
    Au sujet des...

  (1650)  

[Traduction]

    J'aimerais rappeler au témoin que nous n'étudions pas la Loi sur l'assurance-emploi mais plutôt un projet de loi d'initiative parlementaire. Je sais que vous avez fait des commentaires plus généraux quant aux questions qui intéressent votre organisation, mais je vous invite à limiter vos commentaires directement au projet de loi si c'est possible.
    Certainement.
    Tout semble indiquer en termes pratiques que nous allons permettre au gouvernement fédéral d'économiser un million de dollars en prestations d'assurance-emploi. Comme vous l'avez signalé, les provinces ne sont pas vraiment en mesure d'assurer la formation ou un soutien du revenu pour les détenus lorsqu'ils sortent de prison.

[Français]

les individus qui sont dans le système correctionnel, il faut le rappeler, ont les mêmes vues que les victimes. Il faut que la justice soit claire, autant pour la victime que pour le criminel. Pour ces cas limités, il y a des arguments assez substantiels pour que les prestations d'assurance-emploi soient éliminées, mais ça demeure une très petite catégorie de gens.
    Monsieur Thomas, vous savez que 80 p. 100 des femmes incarcérées le sont pour des crimes liés à la pauvreté. Je ne veux pas prendre le parti des prisonniers outre mesure, mais je veux que ces gens, quand ils réintègrent la société, puissent disposer d'un montant d'argent, chercher un emploi et être encadrés. Si on leur enlève cela et qu'ils deviennent prestataires de l'aide sociale, on les perd, à la longue, et ça coûte aussi cher à l'État.
    J'aimerais connaître votre opinion là-dessus.
    C'est vrai, mais à notre avis, les femmes ne sont pas dans le système correctionnel uniquement parce qu'elles sont pauvres. Il y a d'autres causes, notamment l'abus de drogues, de substances. Il y a aussi des questions systémiques dans nos prisons. C'est un fait. On sait très bien, par exemple, que la population autochtone est assez élevée et que les femmes autochtones font partie des personnes impliquées de cette façon.

[Traduction]

    Cependant, lorsque ces personnes seront libérées, si elles ne peuvent recevoir de prestations d'assurance-emploi, elles recevront probablement des prestations d'assistance sociale. Ainsi, ce sont les provinces qui devront offrir ces prestations, et le gouvernement fédéral aura un rôle à jouer par l'entremise des transferts.
    Vous avez déjà dépassé le temps qui vous était réservé, mais je vous laisserai terminer si vous le désirez.
    Vous avez terminé?
    Très bien. Nous passerons maintenant à M. Daniel.
    Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier nos témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
    Ma question s'adresse à Mme Rosenfeldt. M. Harris, parrain de ce projet de loi, nous a dit que des services d'une valeur d'environ 400 millions de dollars sont offerts pour assurer la réadaptation des détenus. J'aimerais que vous nous expliquiez, compte tenu de votre expérience auprès des victimes, quels services sont offerts aux victimes pour leur réadaptation.
    Je vous remercie de votre question.
    Très peu de services sont disponibles. En fait, aucun service n'est disponible pour la réadaptation des victimes. Pour les victimes d'activités criminelles au Canada aujourd'hui nous prenons la surtaxe pénale, soit 15 p. 100 ajoutés aux amendes imposées, dans chaque province canadienne. Cette surtaxe pénale est imposée par le gouvernement fédéral mais ce sont les provinces qui décident comment cet argent sera dépensé.
    Actuellement au Canada les services ne sont pas les mêmes d'une région à l'autre. Si vous êtes victime d'un acte criminel en Ontario, vous recevrez peut-être un excellent traitement, selon la région où vous vivez dans la province. Il n'existe pas du tout de réadaptation, et c'est justement ce que demandent beaucoup de victimes depuis déjà quelques années.
    Je dois rappeler cependant que les victimes ne veulent pas que l'on transfère à leur groupe une partie des fonds qui sont utilisés par la réadaptation de ceux qui sont actuellement derrière les barreaux, parce qu'on sait très bien que certains détenus peuvent être réhabilités. Nous représentons les victimes d'actes criminels et nous appuyons clairement le modèle de la réhabilitation.
    Cependant, il ne s'agit pas ici de réhabilitation. Lorsqu'une personne sort du pénitencier et dépend des services sociaux, c'est une question qui relève des provinces et non pas du gouvernement fédéral.
    Notre groupe est parfaitement conscient qu'il existe des limites quant à ce que le gouvernement fédéral — peu importe le parti au pouvoir — peut faire pour répondre aux besoins des Canadiens. Dans mon exposé, j'ai parlé des victimes. Il ne s'agit pas nécessairement des victimes. Il peut s'agir également d'autres particuliers. Il existe toutes sortes de circonstances dans lesquelles des prestations de 104 semaines seraient fort utiles. Cependant, ce n'est pas vraiment réaliste. Ce n'est pas possible, et dans ces circonstances il s'agit d'imposer des limites.
    Je ne sais pas combien l'abrogation de cet alinéa de la Loi sur l'assurance-emploi nous permettra d'économiser ou combien de particuliers seront touchés. Je ne crois pas qu'ils seront très nombreux, mais ce qui compte c'est le message que nous communiquons aux Canadiens. Nous comparons les citoyens respectueux de la loi et les problèmes auxquels ils sont confrontés à ceux qui ont décidé de commettre une infraction. Qu'il s'agisse d'hommes ou de femmes, peu importe. Toutes les femmes qui sont derrière les barreaux, je vous le garantis, n'y sont pas en raison de leur pauvreté.
    Je pourrais vous parler longuement de ce que vivent les victimes d'actes criminels — il y a les faillites... Nous pourrions verser bien des larmes, mais cela ne réglera pas du tout le problème.
    Je suis venue ici vous dire que ce n'est pas juste. Notre organisation n'était pas au courant de ces paiements. Il y a déjà plusieurs années que je représente les victimes — plus de 30 ans déjà — et je suis devenue consciente qu'il existait des dispositions qui étaient à l'avantage des criminels. En voici une autre, nous n'étions pas au courant de la situation, et depuis que nous avons appris l'existence de cette disposition, nous avons eu l'occasion de parler à bien des intervenants. Les Canadiens sont des gens bien corrects. Ils sont très justes, mais je crois qu'ils vous diront clairement que cette disposition est injuste.

  (1655)  

    Quelle a été la réaction des gens avec qui vous avez parlé de cette disposition?
    La réponse que j'ai est bien simple: « Quoi? Tu veux rire? Je n'étais pas au courant. »
    Très peu de Canadiens sont au courant.
    Ils ne sont pas au courant de l'existence de cette disposition.
    Quand vous demandez aux victimes ce qu'elles en pensent, elles vous relatent ce qu'elles ont vécu lorsqu'elles sont devenues des victimes.
    Je sais ce que les victimes ont vécu. Je n'ai pas le temps de vous décrire chaque situation aujourd'hui, mais je peux vous dire très clairement que cette situation est injuste. Nul besoin d'être un génie pour comprendre ce qui tient à coeur aux Canadiens, et nous savons que le gouvernement doit imposer des paramètres et des limites. C'est vraiment injuste.
    Merci, monsieur Daniel. Votre temps est écoulé.
    Nous revenons à M. Patry.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame, je comprends, mais je trouve assez contrariant de vous entendre dire que ce sont les provinces qui hériteraient des factures, du problème. Je ne suis pas d'accord. Quand on vit dans une société, on fait des choix.
    Pour ma part, je pense qu'il faudrait faire une réforme de la loi. Les gens qui sortent de prison ne sont pas tous des criminels endurcis. On parle ici d'une peine de deux ans moins un jour, donc de gens qui n'ont pas payé leurs contraventions ou qui ont volé de la nourriture pour pouvoir manger. Ce sont des individus qui ont commis des infractions mineures et non des gangsters ou des membres de la mafia. Il ne faudrait pas qu'ils se retrouvent à la rue demain matin et qu'ils ne soient pas encadrés. Les personnes qui font une demande d'assurance-emploi doivent communiquer chaque semaine avec un employeur pour tenter de trouver un emploi. C'est de cette façon qu'on peut aider les gens à réintégrer la société, à y participer comme tout le monde, en tant que Canadiens et Canadiennes, et à travailler.
    Si, parce qu'ils ont été malchanceux à une ou deux reprises, on leur retire cette possibilité, on leur enlève encore une fois l'occasion d'intégrer la société comme tout le monde. On ne parle pas ici de criminels endurcis. Ce n'est pas ceux qu'on défend. On parle de gens, hommes ou femmes, qui ont été malchanceux.
    Vous dites qu'à leur sortie de prison, ils vont devenir prestataires de l'aide sociale et que les provinces vont hériter de la facture, mais je ne suis pas d'accord. On s'est donné une société et on veut réhabiliter ces gens pour qu'ils aient la chance de se faire une meilleure vie. La manière dont vous m'avez expliqué votre point de vue me cause un peu de difficulté.
    J'aimerais savoir, madame, comment vous appliqueriez la loi.

  (1700)  

[Traduction]

    Eh bien, je dirais qu'il s'agit soit des provinces, soit du gouvernement fédéral. Choisissez: l'un ou l'autre. Vous êtes député à la Chambre des communes. Il faut choisir.
    Quoi qu'il arrive, dans bien des cas, les provinces paient, par le truchement de l'aide sociale. Je prétends que quiconque accumule un grand nombre d'amendes, non réglées, ne mérite pas de toucher des prestations, comme par exemple demander 104 semaines de prestations d'assurance-emploi. Il faut responsabiliser les gens et je pense qu'on a invoqué bien des prétextes au fil des ans.
    En fait, un des membres de notre conseil d'administration a été délinquant pendant bien des années et sa dernière peine était de 10 ans. Il était coupable de vol qualifié. Il a dit: « Il fallait bien que je m'arrête un jour ». Il est sorti de prison il y a 35 ans mais il y a refait quelques séjours. Sa peine était de 10 ans et le Service correctionnel souhaitait qu'il accepte une libération conditionnelle anticipée mais il a refusé. Et il a dit: « Si on m'a imposé une peine de 10 ans, je vais purger toute cette peine ». Il a dû se battre pour rester en prison pendant 10 ans.
    Il y a beaucoup de gens qui à vrai dire ne peuvent pas changer. Nous parlons ici de gens qui sont incarcérés pour moins d'un an. Je comprends cette situation mais je vous l'ai dit, il faut que quelqu'un paie. C'est soit le gouvernement provincial ou le gouvernement fédéral.
    Permettez-moi d'intervenir pour quelques secondes car vous avez dit que c'était soit le gouvernement fédéral soit le gouvernement provincial. Toutefois, vous oubliez qu'il s'agit de gens qui en fait ont travaillé — d'employés qui en fait ont cotisé. Il s'agit d'argent fédéral.
    Selon votre raisonnement, ce sont les provinces qui vont devoir assumer ce qu'il en coûtera pour que la personne trouve du travail ou un moyen de subsistance. Selon moi, ça ne va pas. Il s'agit ici de l'argent de l'employé et c'est pourquoi le gouvernement fédéral réserve cet argent. Il ne s'agit pas de l'argent des contribuables mais bien de l'argent des employés.
    Peut-être qu'il faut commencer à songer de donner aux gens de meilleures prestations...
    Je pense être d'accord avec vous là-dessus.
    Permettez-lui de finir.
    ... c'est-à-dire 104 semaines de prestations au lieu de le faire pour les criminels. Voilà la décision que les membres du comité doivent prendre.
    Comme j'ai travaillé pendant des années dans le domaine des services de libération conditionnelle, je sais que certaines personnes se ressaisissent. Celles qui ne paient pas leurs amendes, c'est parce qu'elles sont trop pauvres et ne peuvent pas le faire. Leurs revenus sont sans doute faibles.
    L'autre élément très important en l'occurence... au Comité de la santé, nous avons entendu dire sans cesse que les gens qui étaient frappés d'une maladie ou qui avaient besoin d'aides soignants devraient toucher des prestations plus élevées. Je pense que c'est là qu'il faut agir et non pas se préoccuper du très petit pourcentage de personnes que cette modification législative va toucher.
    J'ai énormément de sympathie pour les victimes. Pendant 13 ans, j'ai travaillé dans le domaine de la libération conditionnelle, comme je vous l'ai dit. Au lieu d'insister sur le fait qu'il s'agit de criminels, j'estime qu'il nous faut prendre conscience que si nous souhaitons que ces criminels se réadaptent, il nous faut leur donner accès à l'argent qui leur revient.

  (1705)  

    Je pense qu'il ne faut pas cesser de parler des criminels parce que ce que la loi actuelle prévoit les concerne. Nous sommes réunis ici aujourd'hui pour en parler. Les criminels ne sont pas à l'honneur. Je comprends qu'on fait beaucoup pour les réadapter.
    Si nous sommes réunis ici, c'est précisément pour parler des criminels. Je ne pense pas que vous devriez me blâmer parce que j'en parle. Ce projet de loi les vise précisément; il vise à abroger cette disposition.
    Madame Hughes, votre temps est écoulé.
    Je tiens à présenter mes excuses si elle pense que je la blâme. En fait, c'est parce que ce dossier me passionne.
    Moi aussi ce dossier me passionne énormément.
    Très bien. Nous comprenons très bien votre passion, soit, mais le temps de Mme Hughes est écoulé.
    Avez-vous terminé votre réponse? Si vous voulez ajouter quelque chose, je vais vous donner un peu plus de temps.
    Non, j'ai terminé, merci.
    Vous avez terminé? Très bien.
    Merci beaucoup.
    La parole est à M. Devinder Shory.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins d'être venus cet après-midi.
    Ma question s'adresse également à Mme Rosenfeldt. Il est parfois décevant d'entendre les membres de l'opposition dire que d'une part ils ont de la sympathie pour la victime mais en même temps ils préconisent un traitement de faveur pour les délinquants. Selon les dispositions actuelles de la loi, les criminels condamnés jouissent d'avantages que les citoyens respectueux de la loi n'obtiennent pas au titre de l'assurance-emploi. Si je ne me trompe, ce projet de loi garantira que les criminels ne jouissent pas d'un traitement de faveur dont ne bénéficient pas les familles canadiennes travailleuses qui respectent les règles.
    Madame Rosenfeldt, je tiens tout d'abord à vous remercier pour le travail remarquable que vous avez accompli au nom des victimes de la criminalité au Canada. Trop souvent, ce sont les victimes qui ont besoin de se faire entendre dans notre système judiciaire et ils ont besoin de gens dévoués comme vous pour se faire leur porte-parole. Je pense que ce projet de loi, le projet de loi C-316, est une forme de solution: il se porte à la défense des victimes. Les victimes de la criminalité doivent souvent subir les difficultés d'instances judiciaires, lesquelles font d'elles de nouvelles victimes. Il se peut qu'elles doivent s'absenter de leur travail pour des raisons émotives ou autres. Il se peut que les membres de leurs familles doivent en faire autant pour leur venir en aide.
    Selon vous, est-ce qu'on fait de ces victimes de nouvelles victimes quand elles savent que ceux qui les ont attaquées ont un accès plus favorable aux ressources de notre pays au titre de l'assurance-emploi et que les criminels qui ont bouleversé leurs vies peuvent être admissibles à des prestations d'assurance-emploi même s'ils ont purgé une peine de prison de près de deux ans?
    Oui, c'est ce que je pense. Je pense que c'est un affront non seulement à l'égard des victimes mais aussi de ceux qui ont toutes sortes d'autres problèmes. Je pourrais vous parler de ma propre situation quand mon mari était malade mais je ne vais pas le faire aujourd'hui.
    Il nous faut faire un choix. Ce que les gouvernements peuvent offrir est limité. Je ne vais pas me prononcer sur l'opportunité d'utiliser les ressources gouvernementales au profit des victimes plutôt que des délinquants. Je tiens à dire qu'il y a une différence entre un citoyen respectueux de la loi, victime ou autre, et un criminel. Il est clair que l'on réserve un avantage à une personne condamnée pour un crime ici au pays et c'est injuste.
    Je suis d'accord avec vous là-dessus.
    Je voudrais revenir à ce qu'a dit le membre de l'opposition qui m'a précédé. On a invoqué le fait que les coûts incomberaient aux provinces et qu'il existe des dizaines de millions de dollars pour financer la réadaptation. On dit que cette mesure législative va coûter plus cher en services de réadaptation car les ex-détenus vont devoir se prévaloir de ces programmes plutôt que de l'assurance-emploi ou de l'aide sociale.
    Je suis d'accord avec vous sur un point, à savoir... en fait, cela m'étonne également. Je ne savais pas que cette disposition concernant l'assurance-emploi existait. Quand je le signale à mes électeurs, ils répondent tous: « Vous blaguez ».
    Ainsi, si nous disons à nos électeurs que nous n'avons pas pu abroger cette disposition, quelle sera, selon vous, leur réaction?
    Si vous abrogez cette disposition?

  (1710)  

    Si nous ne sommes pas en mesure de l'abroger.
    Je ne sais pas exactement ce qui se passera à l'avenir, mais je ne pense que le public canadien prendra ces mesures à la légère. Je ne vois pas comment il pourrait le faire. C'est tout simplement illogique.
    La plupart des gens ne sont pas au courant, de toute façon. Toutefois, vous pouvez être certain que si le projet de loi n'est pas adopté, nous, les organisations des victimes, avons des recours. Comme je l'ai dit, il y a de nombreux services pour les victimes partout au Canada aujourd'hui, et je pense que toutes les organisations seraient très en colère si elles apprenaient que ce projet de loi favorise en fait quelqu'un qui a sciemment commis un crime — « sciemment », ça signifie que la personne puisse payer ou non une amende.
    Merci.
    Monsieur Shory, votre temps de parole est...
    Mme Sharon Rosenfeldt: Je...
    Le président: Avez-vous une conclusion à formuler? Vous pouvez certainement le faire.
    J'allais seulement dire que je suis à la retraite. Je ne reçois pas de salaire à Victimes de violence. Je reçois des prestations du RPC et de la Sécurité de la vieillesse, ainsi qu'une petite pension du gouvernement provincial. Croyez-moi, je ne commets pas d'infraction à la loi en faisant des excès de vitesse parce que je n'ai pas les moyens de payer une contravention de 100 $ ni même de 90 $. Je pense que les gens doivent assumer leur responsabilité personnelle. Je pense qu'en tout temps, si la personne a...
    C'est tout simplement totalement injuste. Ce projet de loi est vraiment injuste, et je n'étais pas au courant.
    Je vois. Merci.
    Ce serait le tour de M. Cuzner. Il n'est pas là. Il nous reste environ trois minutes.
    Passons à Brad Butt.
    Allez-y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous deux d'être ici.
    J'ai quelques questions brèves qui s'adresseraient aussi à Mme Rosenfeldt, je pense.
    Adhérez-vous au principe voulant que quelqu'un qui commet un crime et est reconnu coupable de ce crime perd certains des droits dont jouissent les autres Canadiens? N'est-ce pas...
    Oui, c'est ce que je crois.
    ... ainsi que le système fonctionne?
    Ce n'est pas seulement une question de savoir si c'est ainsi que le système fonctionne. Je pense que c'est ainsi que les Canadiens voient la situation.
    Je vois. Ce que je veux dire, c'est que nous avons certaines choses. Au Canada, un criminel reconnu coupable ne bénéficie pas des mêmes droits qu'un citoyen ordinaire qui respecte la loi. Je ne vois donc pas pourquoi il serait irrationnel ou irresponsable de notre part de modifier la Loi sur l'assurance-emploi pour empêcher ceux qui sont accusés d'un crime d'obtenir des prestations du système d'assurance-emploi. C'est essentiellement ce que prévoit le projet de loi. Ne s'agirait-il pas d'une mesure raisonnable.
    Je pense que c'est raisonnable, oui. Je pense que cette loi les protège. Elle les récompense, encore plus que les citoyens qui respectent la loi. À mes yeux, ce n'est tout simplement pas logique.
    J'aimerais avoir votre opinion sur une autre question; ce n'est peut-être pas toujours le cas, mais ça l'est assez souvent. Si la victime ne peut plus travailler en raison du traumatisme qu'elle a subi ou parce qu'elle a des problèmes de santé résultant du crime perpétré contre elle, il se peut qu'elle ne soit pas admissible aux prestations d'assurance-emploi non plus.
    Non.
    Essentiellement, donc, selon le système actuel, le criminel est presque toujours admissible aux prestations, mais dans la plupart des cas, le victimes ne le sont pas. Est-ce exact?
    C'est exact.
    Je ne dis pas que nous devrions verser des prestations aux victimes pendant 104 semaines. Ce que je dis, c'est que c'est déjà possible pour les criminels — et que vous devriez leur retirer cette possibilité. C'est ce que je vous dis: abrogez cette disposition.
    Exact, et c'est ce que je disais. Et je crois que M. Harris a dit au comité qu'il qualifie cette mesure de projet de loi pour l'équité. Il croit que tout le monde devrait être sur un pied d'égalité, qu'il faut être juste envers tout le monde afin que les victimes et les criminels... afin d'assurer une certaine équité. Mais les gens qui commettent des crimes n'ont pas les mêmes droits que les citoyens respectueux de la loi au Canada. Il est clair depuis très très longtemps au pays qu'il s'agit d'un fait reconnu.
    Oui. C'est une question de gros bon sens.
    Toutefois, je suis certainement en faveur d'investissement dans la réinsertion sociale des gens afin qu'ils puissent devenir des citoyens respectueux des lois. Je suis allée dans de nombreuses prisons partout au Canada, et je peux vous dire que d'excellents programmes y sont offerts. Je suis fière lorsque je parle à certains d'entre eux. Certains sont des criminels très endurcis aussi. Je comprends qu'il n'est actuellement question que des établissements provinciaux. Ce que je vous dis, c'est qu'il est vraiment bien de voir certaines personnes qui étudient pour devenir chef, et ainsi de suite. Si de l'argent doit être investi, selon moi, il devrait aller à la réinsertion sociale.
    Encore une fois, je voudrais souligner que je ne vous dis pas d'abroger cet article parce qu'il touche les criminels pour accorder plutôt quelque chose aux victimes. Ce n'est pas du tout ce que je vous dis. Ce que je dis, c'est qu'il faut que tout le monde soit sur un pied d'égalité.

  (1715)  

    Je vous remercie beaucoup de vos exposés, madame Rosenfeldt et monsieur Thomas.
    Le timbre ne sonne pas, et si le comité est d'accord, nous allons continuer à huis clos pour parler du budget. C'est une question de quelques secondes.
    Vous pouvez partir et nous allons poursuivre la séance à huis clos. Merci beaucoup d'avoir comparu.
    Merci beaucoup.
    [La séance se poursuit à huis clos]
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