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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 065 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 21 mars 2013

[Enregistrement électronique]

  (0850)  

[Traduction]

    Chers collègues, je déclare la séance ouverte.
    Il s'agit de la 65e séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Soixante-cinq, c'est un chiffre important, mais nous ne pouvons pas prendre notre retraite, nous devons poursuivre notre travail.
    Chers collègues, concernant l'examen en cours du projet de loi C-428, nous allons commencer par Michèle Audette et Teresa Edwards de l'Association des femmes autochtones du Canada.
    Je vous remercie d'être parmi nous ce matin. Nous sommes ravis de vous accueillir et d'entendre vos témoignages.
    Vous aurez la parole pendant les 10 premières minutes pour faire votre déclaration préliminaire, puis nous passerons aux questions. Merci encore de votre présence.

[Français]

    [Le témoin s'exprime en langue autochtone.]
    Je souhaite dire merci à la nation hôte, la nation Anishinabe, de nous accueillir sur son territoire maintenant partagé où, maintes fois, plusieurs mocassins de partout au Canada sont venus rappeler au gouvernement fédéral la réalité des peuples autochtones.
    C'est avec fierté que je suis accompagnée de mes collègues Mme Claudette Dumont Smith, directrice générale de l'Association des femmes autochtones du Canada, et Mme Teresa Edwards, responsable du dossier des droits de la personne et avocate de l'Association des femmes autochtones du Canada.
    L'Association des femmes autochtones du Canada existe depuis 1974 et est très active dans plusieurs dossiers, notamment celui de la discrimination à l'égard des femmes, dont une des causes premières est la Loi sur les Indiens.
     L'histoire vous a sûrement appris que nous, les peuples autochtones, étions présents ici depuis des millénaires. Il est important de réitérer que cela veut dire que nous étions des sociétés extrêmement organisées, des sociétés dans lesquelles la gouvernance était très structurée sur les plans politique, social, culturel et économique.
    Je me permets de donner un petit cours d'histoire sur la Loi sur les Indiens. L'Acte pourvoyant à l'émancipation graduelle des Sauvages avait pour objectif — et c'est malheureusement encore le cas aujourd'hui, en 2013 — que les enfants du ministre des Affaires indiennes, c'est-à-dire les Indiens statués, puissent être émancipés et devenir des Canadiens en bonne et due forme. Je m'excuse, mais nous sommes encore très vivants, très actifs et très fiers de nos origines, de notre histoire, de notre présent et de nos aspirations pour demain.
    Il est important de mentionner que le 28 janvier, j'ai participé à l'ouverture de vos débats à la Chambre des communes. Selon les médias, il y a eu 5 000 consultations auprès des peuples autochtones ici, au Canada. Je ne crois pas que des périodes de 5 ou 10 minutes en comité parlementaire constituent une consultation. On parle ici du présent et de l'avenir de nos nations. Ceci n'est pas une consultation, mais un endroit où je peux me permettre, au nom d'une organisation, de partager avec vous des solutions ou des préoccupations.
    Je tiens quand même à saluer le courage et la volonté d'un membre du comité, M. Rob Clarke, de dénoncer l'aspect archaïque de la Loi sur les Indiens. Oui, la loi est archaïque, paternaliste et désuète. Rappelons que cette loi nous a été imposée. Aucun de nos leaders autochtones, de nos aînés ou de nos jeunes n'a participé à l'élaboration de cette loi. Vous en voyez les résultats aujourd'hui: lorsque nous ne participons pas au bien-être des nations, nous faisons face à des échecs. Nous sommes dans un état de survivance, et la loi est une des causes importantes de cette réalité.
    Pourquoi alors, monsieur le député, ne pas faire les choses autrement en 2013, avec ce projet qui va peut-être faire en sorte de changer notre présent et notre avenir? Je vous invite donc, monsieur le député, à vous assurer que nous allons travailler ensemble, en étroite collaboration. Il ne suffit pas de nous accorder 10 minutes pour vous dire si nous sommes d'accord ou pas. Non, l'Association des femmes autochtones du Canada n'est pas favorable au projet de loi. Or, j'estime que nous pourrions faire un travail remarquable ensemble.
    Les femmes autochtones sont les plus touchées par la Loi sur les Indiens.

  (0855)  

[Traduction]

    Je vais passer à l'anglais. Mon café est maintenant à la bonne température.
    Les femmes autochtones sont les plus touchées par la Loi sur les Indiens, et nous savons tous pourquoi. C'est triste à dire, devant le comité, qu'en 2013, dans tout le Canada, les femmes autochtones sont les plus marginalisées. À l'heure où nous parlons, la Loi sur les Indiens ne protège pas les droits de la personne de ces femmes, ni leurs droits individuels, ni même leurs droits collectifs, et la Loi sur les Indiens ne garantit pas leur sécurité.
    Je connais la situation. Je sais. Mais pourquoi reproduisons-nous ce que nos ancêtres ont fait — mon père est blanc — lorsqu'ils ont imposé la Loi sur les Indiens? Il n'y a pas eu de réelle consultation, ni de consentement. Selon moi, consultation et consentement doivent aller de pair, deux êtres humains qui s'engagent dans un échange et se demandent: « Qu'est-ce qui sera le mieux pour moi aujourd'hui et à l'avenir? » Il me semble qu'aujourd'hui nous sommes encore dans la vieille approche paternaliste qui consiste à imposer ce que nous pensons être le mieux pour autrui.
    J'ai 41 ans et je sais ce qui est le mieux pour ma famille, pour moi et pour mon peuple. Les gens diront la même chose, je l'espère, que chaque personne, que chaque organisation qui s'exprime ici... Il nous faut travailler ensemble, plutôt que d'imposer les choses comme l'ont fait nos ancêtres.
    Il y a une occasion à saisir. J'en appelle à chacun d'entre vous, écoutez votre cœur et votre esprit, pouvons-nous faire les choses différemment cette fois? Les femmes autochtones du Canada seraient si fières de travailler avec vous si nous procédions autrement, si nous pouvions être impliquées, avoir une voix, ajouter des choses merveilleuses à cette loi. Oui, il nous faut supprimer la Loi sur les Indiens, mais pas de cette manière, pas comme cela a été proposé.
    Je vais maintenant donner la parole à ma collègue et je reviendrai à la fin.
    Bonjour.
    [Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]
    Je m'appelle Teresa Edwards, comme l'a dit Michèle.
    Je fais partie de la Première nation Mi'mac à Listuguj, au Québec.
    Comme l'a si bien dit Michèle, le député Rob Clarke a dit avoir présenté cette mesure parce que la Loi sur les Indiens est une loi archaïque qui considère les Autochtones comme des pupilles de l'État, sans aucun pouvoir. Pourtant il n'y a eu aucune démarche approfondie de rencontre avec nos dirigeants, nos gouvernements ou les gens des collectivités afin d'entendre la voix des femmes et leur avis sur la meilleure manière d'amender la Loi sur les Indiens.
    Convoquer des témoins à un comité ne constitue aucunement un processus consultatif rigoureux. Nous devons nous assurer que les changements apportés à la loi soient élaborés par les Premières nations elles-mêmes. Si elles ne font pas partie de la solution, il n'y aura pas de mise en œuvre réussie. Il y a des siècles que nous assistons à cela. Les Autochtones ont besoin de clauses qui protègent leurs droits. Mais le gouvernement continue d'avancer unilatéralement, comme avant, et continue de nous traiter comme des pupilles de l'État et à prendre des décisions selon ce qu'il pense être notre intérêt, même en 2013.
    Il est désormais clair pour tous le canadiens que ce gouvernement ne consulte pas notre peuple, et la résistance s'exprime à chaque manifestation du mouvement Idle No More, dans chaque communauté du pays.
    Il y a eu peu, ou pas d'occasions pour les femmes autochtones d'exprimer leur point de vue, d'établir une stratégie ou de défendre leurs idées concernant des amendements à la Loi sur les Indiens.
    Malgré le fait que les droits autochtones soient protégés par la Constitution et que la Cour suprême du Canada ait mis en place des processus spéciaux pour que les gouvernements consultent, tiennent compte des besoins et obtiennent un consentement pour les lois qui touchent les Autochtones, le gouvernement actuel a systématiquement fait passer des lois qui nous dépouillent de nos droits et de nos protections, en ne nous consultant quasiment pas, en violation des lois de ce pays.
    Toute tentative de modification de la Loi sur les Indiens doit se fonder sur une collaboration entre les Premières nations et le gouvernement, et non sur l'action isolée d'un député ou du gouvernement seul.
    L'AFAC s'oppose à ce projet de loi pour plusieurs raisons. Par exemple, les pensionnats ont créé des générations de personnes exclues qui dès leur plus jeune âge ont été arrachées à leurs familles et à leurs communautés, ont subi un racisme profond et des mauvais traitements. Au total, environ 150 000 enfants autochtones ont été placés dans 130 pensionnats indiens entre le XIXe siècle et 1996 lorsque le dernier a été fermé. C'est une histoire qui a duré plus d'un siècle, puisque le dernier pensionnat a fermé en 1996. Les conséquences sont très fortes et très présentes, pour les générations passées, présentes et futures de notre peuple.
    Les traditions culturelles honorant les enfants et les aînés ont été remplacées par des pratiques euro-canadiennes, infligeant une violence physique, émotionnelle et sexuelle tout en instillant profondément la notion de honte et d'infériorité. La violence était banalisée et l'impunité complète pour ses auteurs. Au même titre que la violence est un symptôme qui se manifeste contre nos femmes et dans nos communautés, elle est au cœur du traumatisme intergénérationnel actuel résultant des pensionnats indiens et elle occupe une place centrale parmi les défis qui nous attendent désormais.
    Les conséquences actuelles sont visibles dans les niveaux d'instruction, les problèmes de toxicomanie, la protection de l'enfance, la surcriminalisation, la pauvreté, la vulnérabilité des femmes et des filles vis-à-vis des prédateurs, et la hausse des indicateurs de mauvaise santé mentale.
    Au regard de ces nombreux faits, il serait plus approprié d'instaurer une loi qui garantirait que tous les élèves canadiens apprennent à l'école la véritable histoire de nos peuples afin que l'on puisse enfin s'attaquer au racisme grâce à une éducation appropriée, que l'on puisse déboulonner ces mythes.
    Il faut de toute urgence s'attaquer au contexte inégalitaire et au traumatisme intergénérationnel qui touche les femmes et les filles autochtones. Il faut en particulier prêter attention à la permanence de la violence et de la pauvreté face auxquelles les filles autochtones sont sans défense, re-victimisées et ensuite criminalisées.
    Les mesures et les processus tels que ceux-ci ne sont pas une bonne manière d'avancer. D'autres lois pourraient bien mieux servir nos intérêts et être bénéfiques pour les générations futures. Cette loi, ainsi que les autres réformes législatives du même acabit qui sont proposées, posent les fondements pour qu'il y ait à l'avenir davantage de dépossessions de terres, de pertes de ressources et de bénéfices; mettant en péril notre sécurité socio-économique, mais aussi l'environnement, l'eau et les animaux, tout en permettant aux gouvernements, à la fois fédéraux et provinciaux, d'avoir plus de pouvoir sur notre avenir et sur nos ressources. En aucun cas ces mesures ne seront bénéfiques pour notre peuple.

  (0900)  

    Je vous parle de cette législation en particulier mais aussi de toutes les autres mesures législatives qui sont menées de la même manière.

[Français]

    En conclusion, je vous dirais encore une fois que vous avez maintenant une occasion unique de faire en sorte que nous travaillions ensemble. Je parle ici des organisations, et notamment de l'Association des femmes autochtones du Canada. Vous manifestez la volonté de changer la réalité des Autochtones. Pourquoi ne pas le faire avec nous?
    Ensemble, nous pourrions nous assurer de faire diminuer les statistiques en matière de pauvreté à laquelle les femmes font face dans les communautés et les centres urbains. Nous pourrions aussi faire diminuer les statistiques en matière de violence, de disparition ou d'assassinat, autant de problèmes auxquels font face les femmes autochtones du Canada. J'appellerais cela un réel partenariat. Pourrions-nous, cette fois-ci, avoir un réel partenariat?
    Rappelons-nous que cette approche telle qu'elle est proposée par M. le député va à l'encontre des droits de la personne et de plusieurs droits autochtones, ainsi que de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, que le Canada a signée.
    En terminant, je répète que nous avons la chance de travailler ensemble. Pourquoi ne pas abandonner ce projet de loi et en bâtir un ensemble pour le présent et l'avenir des Premières Nations au Canada?
    Merci beaucoup.

  (0905)  

[Traduction]

     Merci pour cette déclaration préliminaire.
    Nous allons commencer nos tours de questions par Mme Crowder, durant les sept premières minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci madame Audette, merci madame Edwards, il me semble que vous avez défini votre position très clairement.
    Nous sommes d'accord pour dire que, quelques soient les bonnes intentions d'un projet de loi proposé par un député, en l'occurrence un projet de loi d'initiative parlementaire, s'il continue à modifier petit à petit la Loi sur les Indiens, il faut l'abandonner. Nous sommes également d'accord que d'après la déclaration de l'ONU sur le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause, il devrait y avoir un processus de collaboration avec les Autochtones pour amender ou supprimer la Loi sur les Indiens.
    Vous avez raison: nous sommes tous d'avis qu'il s'agit d'une mesure législative colonialiste et qu'elle doit changer. Tout le monde au Canada n'est pas d'accord sur la façon dont cela doit se faire, ce processus est donc nécessaire.
    J'ai deux questions et je vais poser la première. Par deux fois lors de votre exposé vous avez utilisé le mot « collaboration ». Dans son préambule, le projet de loi C-428 dit: « pour le développement de cette nouvelle législation en collaboration avec les organisations des Premières nations », et dans l'article 2, on lit — et c'est là que le ministre est censé rendre compte à la Chambre — « concernant le travail entrepris par son ministère en collaboration avec les organisations des Premières nations ».
    De notre point de vue, collaboration n'équivaut pas à consultation et n'est pas égal à consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. Pourriez-vous commenter ces deux articles du projet de loi qui parlent de collaboration et nous dire si selon vous collaboration équivaut à consultation.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la députée.
    En effet, ce sont des approches fragmentaires.

[Traduction]

    J'exhorte le comité à abandonner cette législation ou ce projet. Je vous exhorte à le faire. Nous pouvons faire autre chose, en collaboration avec les femmes autochtones du Canada — je ne parlerai pas au nom des autres organisations. Nous avons tant à apprendre des évènements passés. Pourquoi sommes-nous en train de refaire les mêmes erreurs alors que nous pourrions débattre de tout ceci ensemble, avoir un échange?
    De mon point de vue, la collaboration, c'est lorsque qu'il y a consultation, quand on a le temps non seulement d'intégrer ce qui est proposé, mais aussi de faire des contre-propositions. C'est ce que j'appelle une relation d'égalité qui fonctionne. Dans le cas présent, nous avons appris voici quelques jours que nous étions invitées ici et que nous aurions 10 minutes pour donner notre point de vue. Cela aura des conséquences durant la prochaine décennie, durant je ne sais combien de décennies. Je ne veux pas porter cette responsabilité, ni même la faire porter à l'AFAC.
    Pour répondre à votre question, madame la députée, mon point de vue, le point de vue de l'AFAC, c'est qu'il ne s'agit pas ici d'une consultation. La collaboration, c'est quand nous avons le temps de parcourir le Canada à la rencontre des femmes pour qu'elles puissent comprendre la situation et le projet de loi qui est proposé, mais ce n'est pas le cas ici.

[Français]

    En ce qui concerne l'indice de développement humain, le Canada a déjà été le meilleur pays au monde. Aujourd'hui, il se trouve au 11e rang. En matière d'égalité entre les hommes et les femmes, il est tombé à la 18e place. Alors, imaginez ce qu'il en est de la question autochtone. On doit être rendu au 80e rang.
    Dans le cadre de ce projet de loi, nous pourrions peut-être renverser la tendance si nous travaillions à améliorer ces statistiques ensemble.

  (0910)  

[Traduction]

     Vous avez évoqué deux ou trois choses qui constituent à vos yeux une consultation. Je sais qu'un travail énorme a été fait pour définir ce qui constitue une consultation. Si la Loi sur les Indiens était entièrement refondue ou abrogée, que faudrait-il mettre en place d'après vous pour qu'existe un processus consultatif approprié impliquant l'Association des femmes autochtones du Canada?

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.
    Il est extrêmement important de faire en sorte d'outiller notre organisation nationale et toutes nos régions pour que nous puissions, dans nos communautés, parler librement et confortablement de ce que pourrait être un projet de société ou un projet dans une région.
     Il faut aussi, selon nous, arrêter de faire des projets de manière uniforme, dans lesquels tous les Autochtones sont pareils. C'est faux. Parmi les Premières Nations, il y a une diversité culturelle riche et incroyable partout au Canada.
    Je vous dirais que la Loi sur les Indiens a créé une violence latérale au sein de nos nations et de nos communautés. Selon la façon dont cela a été bâti au fil des années, les femmes ont été les plus touchées. Alors, il faudrait s'assurer d'avoir des forums et des endroits où l'on peut rédiger, nous aussi, des recommandations ou bâtir une vision de ces choses. Les femmes ont un mot à dire, qu'elles soient dans une communauté extrêmement isolée ou dans un centre urbain parce qu'elles ne peuvent plus retourner dans leur communauté pour telle ou telle raison.
    Lors de cette consultation, il faudrait faire en sorte aussi d'appliquer toute la question de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. On y parle clairement de l'éducation, de la culture, de l'identité, de la protection, de la sécurité, du droit individuel, du droit collectif, du droit de la femme, du droit de l'enfant, etc. Tout est beau dans ce projet. On pourrait avoir une bonne base.
    Il faut s'assurer d'avoir le financement nécessaire et les experts autochtones nécessaires. Il faut pouvoir disposer d'une période de temps intelligente, et non pas seulement de 10 minutes. Je parle ici d'une période d'un an ou deux au cours de laquelle cette réflexion et cette mobilisation provenant de la base nous mèneront vers un projet de société grâce auquel, enfin, nous ne serons plus traités comme des enfants.
    Madame Edwards, vous vouliez dire quelque chose.

[Traduction]

    Nous allons passer au député suivant.
    Puis-je répondre?
    Une réponse très courte, si possible.
    Je suggèrerais que le comité travaille à mettre en application la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. L'AFAC a fourni des indications pour un guide qui explique comment mettre cela en application et je serais ravie de les transmettre au gouvernement. Ce guide énumère des processus pas à pas permettant d'aboutir à un consentement libre, préalable et informé, ainsi que les méthodes pour construire sur une, deux cinq ou dix années une véritable collaboration, et non pas en un an, avec les témoignages épisodiques d'un ou deux témoins devant le comité permanent.
    Merci.
    Merci.
    La parole est à M. Rickford pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui. Quelques précisions méritent peut-être d'être apportées.
    Teresa, lors de votre exposé vous avez insinué par deux fois au moins, qu'il s'agissait d'un projet de loi gouvernemental, je veux préciser qu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire. De plus, ce projet de loi d'initiative parlementaire est proposé par un député membre d'une Première nation, qui, c'est important pour éclairer ces débats, est soumis dans sa vie quotidienne aux conditions et aux modalités prévues par la Loi sur les Indiens. J'en reviens donc à ma clarification initiale sur la différence entre projet de loi gouvernemental et projet de loi d'initiative parlementaire.
    Les députés ont la possibilité de proposer des projets de loi présentant un intérêt particulier pour eux, indépendamment du parti politique qu'ils représentent. Cela peut être personnel, ou au nom d'un électeur, d'un groupe de personnes de leur circonscription ou de n'importe quelle partie du pays. C'est pourquoi, ayant vécu et travaillé toute ma carrière dans les collectivités des Premières nations, je suis très heureux qu'un de mes collègues de ces collectivités propose une mesure législative — laquelle, dois-je ajouter pour votre gouverne, était initialement fort différente de la mesure dont nous débattons aujourd'hui dans ce comité.
    Le travail de Rob ces deux dernières années est à l'origine d'un débat au sujet de certains éléments de la Loi sur les Indiens qui le concernent, à travers notamment l'histoire de sa famille, et la ou les collectivités dans lesquelles il a grandi. Michèle et Teresa, c'est le reflet de ses propres expériences, dont beaucoup sont très personnelles, expériences que je voudrais respectueusement vous soumettre, et qui ont eu sur lui un effet profond et l'ont amené à inscrire ces articles en particulier dans le projet de loi d'initiative parlementaire qu'il propose.
    Par exemple, en matière de testaments et de successions, avant d'être député, Rob a effectué une carrière au sein de la Gendarmerie royale du Canada. Il a accumulé des prestations de retraite et divers actifs. Cela ressemblait tout a fait à ce que les autres canadiens accumulent. Une nuit, il a perdu un collègue, tué par un coup de feu. C'est alors que Rob s'est rendu compte qu'à la différence de son collègue il lui faudrait faire signer son testament, le transfert de ses actifs et de son legs à sa famille, par le ministre délégué aux Affaires autochtones, selon les dispositions prévues par la Loi sur les Indiens.
    Sur ce point très précis, Michèle, êtes-vous d'accord pour dire qu'il y a là un problème? Oui ou non?

  (0915)  

[Français]

    Oui.

[Traduction]

    Mais s'il vous plaît ne me citez pas en me faisant dire que j'approuve cette législation.
    Je mets à plat les enjeux.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Bien sûr vous êtes venue au comité à plusieurs reprises Michèle et vous comprenez les enjeux que nous voulons mettre à plat.
    De plus, Teresa, si je peux revenir à vous, je n'ai pas bien saisi la raison pour laquelle vous ne voulez pas que toutes les mentions au sujet des pensionnats indiens soient retirées du projet de loi, malgré le récit plus large que vous appelez de vos vœux concernant toute législation. Pour être plus précis, pourquoi ne voulez-vous pas que toutes les mentions au sujet des pensionnats indiens soient retirées du projet de loi? Qui plus est, n'êtes-vous pas d'accord pour dire qu'un député membre d'une Première nation qui a dans sa famille des personnes qui sont allées dans les pensionnats indiens, ce qui a eu un effet profond sur lui, devrait avoir l'occasion de retirer les mots « pensionnat indien » de la Loi sur les Indiens?
    Ce n'est pas que je m'oppose à ce que l'on retire les mots « pensionnat indien » de la loi. Je crains simplement que l'on retire des vérités historiques de la Loi sur les Indiens, vérités qui témoignent de ce qui s'est passé dans les pensionnats indiens au moment où la Commission de vérité et de réconciliation fait son travail et émet des recommandations sur la mise en œuvre de stratégies qui pourraient guérir les générations actuelles.
    Je ne voudrais pas que la Loi sur les Indiens soit amendée par petits bouts, en supprimant l'article concernant les pensionnats indiens, pour que nous puissions nous tourner vers le passé, sans qu'une solution de rechange soit en place, et dire que cela n'a jamais eu lieu. Nombreux sont les députés et les canadiens qui disent que cela s'est passé voici 100 ans, alors que c'est faux. Le dernier pensionnat a fermé en 1996. C'est un enjeu crucial.
    Je suggère respectueusement que, malgré l'expérience personnelle du député, Michèle et moi, en tant que femmes des Premières nations, avons l'expérience de 30 années de militantisme et avons été personnellement affectées par les pensionnats indiens. Nous avons été touchées par les projets de loi C-3 et C-31. Cependant je n'ai pas la prétention de dire que j'ai la solution, et je n'irai jamais bricoler la Loi sur les Indiens par petits bouts dans mon intérêt personnel alors que je sais, même en tant qu'avocate, qu'une affaire qui va jusqu'à la Cour suprême du Canada constitue un risque énorme parce qu'il ne s'agit pas seulement de mon cas personnel mais aussi des 633 collectivités des Premières nations et de centaines de milliers, de millions de gens qui seront touchés par cette législation et par les affaires qui sont tranchées par la Cour suprême du Canada.
    Avec tout le respect que je vous dois, et en écartant les considérations personnelles, il nous faut procéder d'une manière qui soit en cohérence avec la déclaration de l'ONU, qui soit conforme à la décision de la Cour suprême du Canada.

  (0920)  

    Merci.
    Nous allons maintenant entendre Mme Bennet pendant sept minutes.
    Pourriez-vous faire passer au greffier une copie du guide dont vous avez parlé?
    Bien sûr.
    Il est important que tous les membres de ce comité comprennent comment la déclaration de l'ONU pourrait être mise en œuvre d'une façon significative, d'une manière qui organise une véritable consultation.
    Je suis frappée par l'éloquence et la qualité de votre exposé, comme toujours.
    Il est clair que vous ne soutenez pas ce projet de loi. Faut-il d'après vous le retirer?

[Français]

    En effet, je le crois, et ce, pour des raisons personnelles. J'habite dans une communauté où j'élève mes cinq enfants, et je vois de l'injustice, de la violence, de la discrimination. C'est une belle communauté, mais je n'ai même pas le droit de voter, parce que je ne suis pas membre. Il y a mille et une raisons.
    De plus, je dirais non à ce projet de loi pour des raisons liées au mieux-être. Je ne peux pas parler au nom de toutes les femmes au Canada, mais je peux facilement dire une chose, du fait que je défends les intérêts de ces femmes. Si nous avons la chance de nous départir d'une loi archaïque, pouvons-nous, les femmes autochtones, être au premier plan et apporter des solutions? Nous sommes celles qui sont touchées.

[Traduction]

    Pouvons-nous être en premier ligne et participer à la modification de la loi? Dans le cas présent, non.
    Alors, non. Mesdames et messieurs les députés, je vous en prie, retirez ou abandonnez ce projet de loi et faites que nous puissions participer à de tels changements, en tant que membres de collectivités, que mères, pour toutes les autres femmes au Canada. Nous sommes fabuleuses. Nous avons des avocats, des médecins, des travailleurs sociaux et des policiers. Nous disposons de toutes sortes de personnes capables de construire un projet magnifique pour nos sociétés. De grâce...
    Vous dites que ce projet de loi touche et concerne surtout les femmes autochtones. Est-ce que son auteur, le député, vous a rencontrée pour connaître votre opinion sur cette idée, puisque vous représentez la moitié de la population autochtone du pays?
    En octobre dernier, j'ai vu dans les médias que son collègue m'avait remis une carte de visite. J'en ai entendu parler, mais je n'ai pas été invitée personnellement. Je dois toutefois admettre que je ne suis pas allée cogner à sa porte, car je croyais que le projet de loi serait adopté et qu'il ne se rendrait pas à ce stade. Comme vous le voyez, j'en apprends aussi sur la politique. Assurons-nous d'entretenir ce dialogue pour travailler ensemble.
    Et s'il vous avait rencontrée ou s'il avait demandé à vous rencontrer, j'imagine que vous lui auriez dit la même chose que vous dites au comité aujourd'hui, c'est-à-dire d'abandonner le projet de loi.
    Probablement, mais avec plus de conviction. Nous aurions été face à face, peut-être autour d'un café, mais tout aussi soucieux... En français, en anglais, peu importe. Mais oui, nous lui conseillerions la même chose, et même plus, vu le moment.
    Vous avez dit très clairement que la Loi sur les Indiens doit être abrogée. Qui est responsable de cela? Selon vous, qui a la responsabilité de lancer un processus visant à éliminer la Loi sur les Indiens?

  (0925)  

    Je ne suis pas sûre de comprendre.
    Dans une assemblée où la Couronne et les Premières nations se trouveraient face à face, à propos de quelque mouvement que ce soit, qui faudrait-il avoir de son côté pour que les choses changent?
    Je suis certaine que M. Clarke souhaite bien faire. Cependant, l'Assemblée des Premières Nations devrait participer, et l'Association des femmes autochtones du Canada devrait ABSOLUMENT, j'insiste, y prendre part également.
    Mais du côté du gouvernement, qui doit diriger un tel processus?
    Le premier ministre?
    Croyez-vous que nous devrions inviter le premier ministre à venir devant ce comité pour voir s'il va vraiment entreprendre quelque chose de concret?
    Allons! Il n'a même pas accepté de participer à une simple rencontre avec le gouverneur général et les chefs canadiens. Je doute fort qu'il viendrait. Mais s'il acceptait d'écouter, je suis certaine que les gens sauraient lui faire comprendre que nous avons la volonté, que moi-même j'ai la volonté, de tenir ce dialogue.
    Vous avez vous aussi été touchée par la Loi sur les Indiens, tout comme le député qui a rédigé ce projet de loi. Certaines dispositions du projet de loi semblent poser problème, comme l'impossibilité pour les bandes de bannir l'alcool ou les questions concernant le Code civil du Québec au sujet des successions et des testaments. Donc, simplement pour récapituler: vous croyez qu'il est impossible d'ajuster ce projet de loi. À votre avis, il doit être rejeté, exact?
    Oui.
    Pour ce qui est des testaments et des successions, vous dites que ce sont des milliards de dollars appartenant aux Indiens qui se trouvent en fiducie. Le procédé a beau être archaïque, modifier les mesures de protection en place serait un jeu très dangereux.
    Pouvez-vous nous donner plus de précisions à ce sujet?
    Il faudrait adopter d'autres mesures. Il faudrait mettre d'autres mesures de protection en place. En ce moment, on assiste au démantèlement systématique de toutes les mesures servant à protéger les Premières nations. Les droits issus de traités sont éliminés pièce par pièce, la Loi canadienne sur les droits de la personne est maintenant appliquée sur les réserves, on tente de faire appliquer les droits concernant les biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves. Ensuite, ce seront les taxes, les testaments et les successions. On en vient donc au fait que tous les Indiens seront comme tous les autres Canadiens.
    Madame Bennett.
    Alors si ce projet de loi est adopté, vous craignez que tout cela, les testaments, les successions, soit mis en danger.
    Madame Bennett, votre temps est écoulé.
    Monsieur Boughen, c'est à votre tour.
    Merci, monsieur le président. Je souhaite la bienvenue à nos témoins de ce matin et je les remercie de nous réserver une partie de leur journée. Je leur en suis reconnaissant.
    Teresa, vous avez dit quelque chose à propos des mesures de protection. Je n'ai pas bien compris tout ce que vous avez dit. Parliez-vous de la discrimination entre les femmes des Premières nations et les hommes des Premières nations qui découle de la Loi sur les Indiens? Y a-t-il lieu d'obtenir une protection à ce sujet? Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
    Non, ce n'est pas de cela que je parlais. Je ne parlais pas d'une protection contre les hommes des Premières nations. Michèle a également mentionné à quel point nous sommes marginalisées dans la Loi sur les Indiens, même aujourd'hui, sur des sujets comme le statut. Je sais que ce n'est pas de cela qu'il est question, mais puisque nous parlons de protection... Le statut d'Indien a un effet direct sur l'appartenance, les avantages, le logement, l'éducation; tous les droits issus de traités ou de l'appartenance à une bande dont jouit une personne. En ce moment, même avec l'adoption des projets de loi C-31 et C-3, nous demeurons dans la situation problématique où une femme et un homme ayant les mêmes parents n'ont pas le même statut d'Indien, ce qui fait que les droits qu'ils lèguent à leurs enfants et à leurs petits-enfants sont aussi différents.
    Même si le projet de loi C-3 semble rectifier cette situation, le cas de Sharon McIvor, qu'elle porte devant les Nations Unies, montre qu'elle n'a toujours pas la même « Cadillac des droits » que son frère. Ils ont les mêmes parents, mais elle a moins de droits parce qu'elle est une femme. Cela a une importance par rapport aux droits qu'ils vont léguer à leur tour. C'est plutôt de protections à cet égard que je parlais.
    En 2013, la moitié des femmes autochtones ne sont pas mariées, et 80 p. 100 des femmes sont monoparentales. Lorsqu'elles vont enregistrer leur enfant pour qu'il soit Indien inscrit au sein de sa bande, la décision n'appartient pas à la bande, mais au registraire des Affaires indiennes. La mère doit inscrire le nom du père sur le certificat de naissance pour s'assurer que son enfant soit Indien inscrit. Or, une fois rendu au registraire à Ottawa — un seul registraire —, si le père n'a pas signé le document, le bureau le rejette. C'est une pratique qui a cours en ce moment. Dans beaucoup de cas, la mère n'est pas avec le père. Il est possible qu'elle ait été violée, il peut s'agir d'inceste ou peut-être que le père est un homme marié. Il va évidemment refuser de signer le certificat de naissance. La femme est à la merci de l'homme. Il y a donc une présomption négative que l'enfant n'est pas autochtone, ce qui prive ensuite la mère du droit d'accéder à un logement où elle pourrait élever cinq enfants. On lui accordera alors un logement pour elle seule, puisque, selon les ententes de financement, on ne compte que les Indiens inscrits. C'est à cela que je fais référence quand je dis que les femmes sont encore plus marginalisées et manquent de protection sous la Loi sur les Indiens. Il s'agit surtout des conséquences de l'imposition de la Loi sur les Indiens et des inégalités liées aux procédés gouvernementaux, ça n'a pas tant à voir avec les agissements des hommes autochtones.

  (0930)  

    Merci pour ces précisions.
     Mesdames, vous avez toutes les deux mentionné les changements que M. Clarke a introduits dans son projet de loi. Je vous pose la question suivante: si le contenu, ou l'existence même du projet de loi vous déplaît, que proposez-vous comme solution de rechange? Depuis des années, cette loi est en place et reste inchangée, ou très subtilement, trop peu pour que quiconque s'en rende compte. Aujourd'hui, un député déclare que la Loi sur les Indiens doit être modifiée et annonce publiquement qu'il est ouvert aux propositions d'amendement concernant son projet de loi. Une résistance semble toutefois vouloir empêcher que le projet de loi soit déposé à la Chambre pour faire l'objet d'un vote.
    Pouvez-vous m'aider à comprendre ce que vous feriez si vous procédiez autrement? Comment allez-vous faire changer les choses? C'est un vecteur de changement. Il est peut-être modeste, mais c'est le début d'un changement. Le projet de loi de M. Clarke est un vecteur de changement. Que feriez-vous différemment?
    Tout changement n'est pas nécessairement bon, n'est-ce pas?
    M. Ray Boughen: Non, non.
    Mme Teresa Edwards: Parfois les changements se font à notre détriment, comme nous l'avons vu. L'adoption de la loi elle-même était un changement. L'adoption de la politique sur les pensionnats indiens était un changement. Je dirais qu'elles ont eu des effets très dévastateurs sur nos nations.
    Pour ma part, comme je l'ai déjà dit, je recommanderais l'utilisation d'un modèle consensuel rigoureux, indépendant, informé et préliminaire, tel que décrit dans la déclaration des Nations Unies. Le gouvernement a signé cette déclaration. Il est donc possible d'en exercer les dispositions dans un partenariat complet.
    Vous demandiez avec qui nous voudrions traiter. Ce serait avec les dirigeants — le premier ministre devrait évidemment prendre part à ce mouvement de changement positif, de partenariat et de collaboration —, mais il faudrait aussi faire participer activement tous les groupes touchés: l'Assemblée des Premières Nations, les dirigeants, la gouvernance et les gens des collectivités.
    Il s'agirait d'un processus rigoureux, qui pourrait durer cinq ou dix ans, avec des buts et des objectifs clairs définis par les deux parties et qui serait dirigé par un membre des Premières nations, pas d'un processus précipité. Le gouvernement essaie toujours d'imposer des processus précipités. Cela donne lieu à de la résistance, et ensuite les gens se demandent pourquoi il y a résistance. Procédons comme il faut pour une fois, et évitons de faire dépenser des milliards de dollars aux contribuables pour des travaux juridiques. La tenue de petites réunions ne constitue pas une consultation.
    Faisons-le comme il faut pour la première fois. En fait, ce ne serait pas la première fois, mais procédons comme il faut pour faire changement, avec rigueur et en se fondant sur la déclaration des Nations Unies.

  (0935)  

[Français]

    Je vous poserais la question suivante, monsieur le député, en 30 secondes: pourquoi ne pas honorer votre ancien premier ministre M. Mulroney lorsqu'il a commandé une commission royale d'enquête? Dans les recommandations du rapport de la commission royale, on parlait aussi de l'avenir des peuples autochtones, en matière de droits, de gouvernance, etc. Pourquoi ne pas l'honorer et faire en sorte qu'on crée un projet de société, mais en incluant les personnes directement touchées, c'est-à-dire nous, dans les communautés?

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Genest-Jourdain pour cinq minutes.

[Français]

    Bonjour, mesdames. Il est rafraîchissant de vous avoir avec nous ce matin.
    J'ai vu, au cours des deux dernières années, les tentatives à peine voilées de ce gouvernement pour se délester du poids qui lui incombe face aux nations aborigènes un peu partout au pays. Ce sont des tentatives voilées parce qu'on les fait en présentant des projets de loi qui peuvent sembler anodins à première vue, mais on voit que les projets de loi émanant des députés ne font pas exception à la règle.
    J'ai particulièrement apprécié la partie de votre intervention qui portait sur l'étendue du concept de consultation et sur la recherche du consentement des parties. J'aimerais que vous approfondissiez la matière en nous parlant de la possibilité qui s'offre aux nations, d'abord et avant tout à leurs membres à titre individuel, de ne pas donner leur assentiment à une initiative donnée.
     De plus, j'aimerais que vous nous parliez de la nécessité pour ce gouvernement d'aller consulter les membres des communautés, d'abord et avant tout, et de ne pas se contenter de rencontrer les 9 dirigeants d'une communauté. À Uashat-Maliotenam, pour prendre un exemple connu, il y a 9 dirigeants pour 3 000 individus. On ne peut pas considérer qu'une consultation a été faite en bonne et due forme si on consulte seulement ces 9 individus.
    Merci, monsieur le député. Je souligne que vous êtes le député de mon comté.
    Comme l'a bien expliqué Mme Edwards, pour nous, la consultation est étroitement liée à un consentement. Lorsqu'on va dans les communautés pour voir ce qui se passe au quotidien, on remarque que la consultation, qu'elle relève du fédéral, du provincial ou des structures de nos communautés, est un processus nouveau. Ce type de démocratie arrive tranquillement, et c'est tant mieux.
    Notre organisation milite depuis 1974. Nous trouvons extrêmement important que nous puissions, si évidemment il y avait une collaboration avec le gouvernement conservateur dans le but de changer ou de modifier la Loi sur les Indiens, avoir une réelle consultation. Nous pourrions être outillés, que ce soit en ressources humaines, en expertise ou en financement, pour pouvoir faire de l'éducation populaire dans les communautés, car ce sont ces gens qui seront touchés directement. Il s'agirait d'aller sur le terrain. Pourquoi ne pas le faire en collaboration avec le ministère des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien? Il faut que les organisations puissent aller présenter leurs propositions et informer le gouvernement de ce qui se dessine, pour que celui-ci puisse à son tour leur dire ce qu'il en pense. Car les solutions émanent des communautés. Selon moi, dans un cas semblable, on pourrait parler de consultation.
    On doit donner aux gens le temps de réfléchir et d'absorber tout cela, parce que de tels projets de loi sont lourds. Ensuite, il faut s'assurer de pouvoir bâtir tout cela ensemble. Le Québec le fait avec ses états généraux. Pourquoi ne pas le faire cette fois-ci?
    Les histoires de cas personnels comme celles que j'ai entendues tout à l'heure, on pourrait les multiplier par 1 million d'un bout à l'autre du Canada. Chaque personne a un vécu. Si ce projet de loi est maintenu, on va se trouver à dire les mêmes choses dans 10 ans ou dans 20 ans.

  (0940)  

    Combien de temps me reste-t-il?

[Traduction]

    Vous avez une minute et demie.

[Français]

    À votre connaissance, les initiatives prises par ce gouvernement au cours des deux dernières années ont-elles donné lieu à un déploiement et à une réelle présence sur le terrain? A-t-on rencontré des gens?
    Vous avez dit qu'il était essentiel de se rendre dans les communautés et d'y tenir des séances d'information et de formation pour la population, compte tenu du faible taux d'alphabétisme parmi les habitants de certaines communautés. À votre connaissance, ces mesures proactives ont-elles été mises en avant au cours des dernières années?
    En fait, lors de la rencontre historique des Premières Nations qui a été tenue le 28 janvier de l'année passée entre la Couronne et certains de nos élus — et non l'ensemble de nos élus —, on nous avait annoncé officiellement qu'il n'y aurait pas de modification à la Loi sur les Indiens, et que si c'était le cas, il y aurait une consultation des peuples autochtones.
    Cependant, à peine un an plus tard, cet engagement n'a pas été respecté. Quand j'entends dire que 5 000 Premières Nations ont été consultées, j'aimerais savoir qui elles sont et à quel sujet ces personnes ont été consultées.
    Au lieu de se taper sur la tête ou de s'accuser, je suggère que l'on soit constructif, ici et maintenant, pour demain.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Passons maintenant à M. Rathgeber. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    J'aimerais seulement que vous précisiez une chose pour moi, madame Audette. Dans votre déclaration initiale, vous avez mentionné que les Premières nations et les Autochtones n'ont jamais été consultés avant l'adoption de la Loi sur les Indiens de 1876.
    Vous avez probablement raison, mais j'aimerais savoir comment vous pouvez en être sûre, étant donné qu'il n'existait pas de lois sur l'accès à l'information et que très peu d'informations étaient consignées à l'époque. Comment savez-vous quelles consultations ont eu lieu avant que le Parlement adopte la Loi sur les Indiens en 1876?

[Français]

    La tradition orale est extrêmement vivante dans nos communautés. J'habite dans une communauté qui avait signé un traité. Il s'agit du traité de Murray, je crois. Est arrivée ensuite la loi. Ce sont des écrits pour lesquels les gens n'ont pas été consultés. La loi a été imposée.
    Si on fait des recherches, on est capable de démontrer que cela n'a pas été fait après l'obtention d'un consentement éclairé. Souvent, nous connaissions la famine ou un état d'extrême pauvreté, sans comprendre les conséquences que cela pourrait avoir pour le lendemain ou pour les générations à venir. Certaines communautés ou nations se sont malheureusement fait avoir, selon moi.
    Je répète qu'il y a une tradition orale. Beaucoup d'historiens, d'anthropologues et de sociologues seraient en mesure, si vous les faisiez venir ici, d'affirmer qu'il n'y a pas eu de consultations et que cette loi a été imposée.

[Traduction]

    D'accord. J'aimerais poursuivre sur ce sujet.
    Vous croyez, et avec raison, à mon avis, que les Autochtones devraient être consultés en ce qui a trait à la modification de la Loi sur les Indiens. Veuillez m'excuser — je viens de me joindre à ce comité et je suis encore en rattrapage —, mais ce qui me préoccupe, ou plutôt ce que je remarque, c'est que je ne comprends pas bien qui le Parlement ou le gouvernement doit consulter. Ce que je veux dire, c'est que j'ignore qui représente les Autochtones et qui représente les Premières nations.
    J'ai participé à une discussion sur certains de ces sujets pendant la pause de février. Il m'a semblé clair que certains membres de la collectivité autochtone croient que le grand chef Shawn Atleo ne parle pas toujours en leur nom. Alors, j'aimerais savoir qui, selon vous, devrait être consulté et invité à participer aux travaux pour la suite du processus en cours?

[Français]

    Il est important de mentionner que le chef Atleo n'a été élu que par les chefs. Il n'y a pas eu de suffrage universel. Il est donc normal que certaines personnes disent qu'il ne les représente pas. Quoi qu'il en soit, je tiens à souligner que c'est une organisation qui défend très bien les intérêts des Premières Nations partout au Canada. Il n'est toutefois pas le porte-parole de tous, en ce sens qu'il n'y a pas eu de suffrage universel. Il est porte-parole des chefs seulement.
    Je dis que tous les Canadiens devraient être consultés: les hommes, les femmes, les Premières Nations, les communautés, les organisations qui oeuvrent en ce sens et qui pourraient être des partenaires du gouvernement fédéral dans ce projet de société.

  (0945)  

[Traduction]

    Il y a deux choses à considérer. D'abord, il est probablement impossible de consulter tous les Canadiens. Plus il y a de gens dans le processus, plus les chances d'atteindre un consensus sont minces. Vous comprenez cela.
    Je pourrais poser la même question au sujet du gouvernement actuel. Prétend-il représenter tous les Canadiens même si la participation au vote n'a jamais été aussi faible? Je crois que 20 p. 100 des Canadiens ont voté pour ce gouvernement. Peut-il prétendre qu'il représente tous les Canadiens? Je ne crois pas.
    Pour chaque loi, pour chaque consultation, ils cherchent à faire participer toutes les composantes de la collectivité. Michèle ne dit pas que vous devriez rencontrer chaque Canadien individuellement, évidemment que non. Le coût serait astronomique. Mais il faut vous assurer de rencontrer les dirigeants des Premières nations, à tout le moins. Les gouvernements précédents rencontraient toujours cinq ou six groupes — l'Assemblée des Premières Nations, l'Association des femmes autochtones du Canada, le Ralliement national des Métis... C'est pourtant simple.
    Comprenez que je ne dis pas que le grand chef parle au nom de tous les Autochtones. Je voulais savoir — et je suis satisfait de la réponse — quelle devrait être, à votre avis, l'étendue du processus de consultation. Je vous remercie pour vos réponses.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Nous tenons à remercier les témoins d'être avec nous ce matin. Nous vous sommes reconnaissants pour vos témoignages et vos réponses à nos questions.
    Chers collègues, nous allons suspendre pendant quelques minutes, le temps de faire entrer les témoins suivants.
    Merci.

  (0945)  


  (0950)  

    Chers collègues, nous allons reprendre la séance. Nous allons maintenant entendre des témoins du Congrès des Peuples Autochtones.
    Merci à M. Devoe et à Mme Lavallée d'être ici avec nous.
    Nous sommes heureux que vous ayez accepté de venir témoigner devant ce comité. Nous allons vous laisser la parole pour les 10 premières minutes, et nous vous poserons ensuite des questions.
    Encore une fois, merci d'être avec nous. Nous sommes heureux que vous soyez ici.
    Je vous demande pardon à l'avance, j'ai un petit rhume. Alors si je me mets à tousser, quittez la pièce, vous ne voudriez pas l'attraper.
    Des voix: Ha, ha!
    Le chef Betty Ann Lavallée: Kwey, hello et bonjour.
     Bonjour, monsieur le président Warkentin, ainsi qu'à vous, membres du comité. C'est un plaisir pour moi de me retrouver sur le territoire traditionnel des peuples algonquins pour vous parler du projet de loi C-428, la Loi modifiant la Loi sur les Indiens et prévoyant son remplacement Act.
    Je suis la cheffe nationale du Congrès des Peuples Autochtones. Depuis 1971, le Congrès des Peuples Autochtones, anciennement connu sous le nom de Conseil national des autochtones du Canada, représente les intérêts des Indiens hors réserve, des Indiens avec ou sans statut, des Inuits du Sud du Labrador et des Métis de partout au Canada. Le congrès sert aussi de voix nationale à ses organisations partenaires qui défendent les Autochtones vivant hors réserve.
    Depuis plus de 43 ans, le congrès exprime fermement son désir que la Loi sur les Indiens soit amendée. Aujourd'hui, plus de 60 p. 100 des Autochtones vivent hors réserve. Les dispositions de cette loi sont ancrées dans une ordonnance coloniale visant à imposer des restrictions et des règles à des fins d'assimilation. Ce sont ces restrictions qui ont en premier lieu entraîné le retrait des Métis et des Indiens sans statut de leurs collectivités historiques.
    Notre organisme souhaite le retrait des dispositions archaïques créées en vertu de la Loi sur les Indiens, dont le pouvoir ministériel en ce qui a trait aux testaments et aux successions. Le gouvernement canadien n'est pas maître du testament et de la succession du citoyen ordinaire. Les Autochtones devraient eux aussi avoir la possibilité de s'occuper de leurs propres affaires sans être sujets à une surveillance infantilisante et à une ingérence de la Couronne qu'aucun autre Canadien ne tolérerait.
    Le retrait du terme « pensionnats indiens » des clauses du projet de loi qui portent sur l'éducation est un important pas en avant. En juin 2008, le premier ministre s'est excusé pour les pensionnats indiens, mais personne n'oubliera jamais les tragédies et les injustices qu'ont vécues tant de nos peuples autochtones. Notre circonscription a souffert du système des pensionnats. En fait, beaucoup de gens de notre peuple ont renoncé à leur statut pour éviter que leur enfant ne soit forcé de quitter la maison pour aller dans un pensionnat.
    La Commission de vérité et réconciliation du Canada est maintenant un gros morceau de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens. Cet amendement pourrait faire partie du processus de guérison de tous ceux qui ont été personnellement victimes du système des pensionnats indiens.
    Des représentants du Congrès des Peuples Autochtones et d'autres participants se sont joints au gouvernement fédéral dans le cadre du comité consultatif ministériel mixte pour contribuer à la rédaction d'amendements à apporter à la Loi sur les Indiens. Ce comité a déposé son rapport final le 8 mars 2002. Il comprenait des recommandations et des options législatives pour la rédaction d'une Loi sur la gouvernance des Premières nations. À cette époque, notre organisme appuyait cette initiative.
    Certaines des propositions faites dans le projet de loi C-428 ressemblent à des propositions qui avaient été faites par le comité consultatif ministériel mixte et dans le cadre de la Loi sur la gouvernance des Premières nations. Par exemple, le projet de loi C-428 abroge l'article 85.1, « Règlements administratifs sur les boissons alcoolisées », de cette loi. La loi sur la gouvernance traite elle aussi de l'article 85.1 à l'effet que ces restrictions font depuis longtemps l'objet de critiques de la part de bandes et d'organismes de représentation parce qu'elles dérogent à la façon traditionnelle de faire des lois.
    Le projet de loi demande également que les conseils de bandes soient habilités à élaborer et à promulguer des règlements. Cette mesure facilite l'inclusion de tous les membres des collectivités, peu importe leur statut résidentiel. Les Autochtones devraient être informés au sujet de leur collectivité. Depuis la décision Corbiere, les Autochtones qui vivent hors réserve ont le droit de voter aux élections s'ils souhaitent le faire, et ils ont également le droit de participer, en exerçant leur droit de vote, aux décisions concernant des revendications et des enjeux relatifs aux ressources.
     L'un des plus importants aspects du projet de loi C-428 est que chaque année, le ministre devra faire rapport sur les travaux entrepris par son ministère, avec les organismes autochtones et les autres parties prenantes, pour rédiger de nouvelles législations servant à remplacer la Loi sur les Indiens. Au congrès, nous croyons qu'il s'agit d'une initiative utile et positive qui tiendra toutes les parties informées des progrès réalisés.

  (0955)  

    Comme je l’ai dit plus tôt, la Loi sur les Indiens a été l’une des premières mesures législatives à définir et à créer des classes arbitraires d’Autochtones comme les Indiens inscrits, les Indiens non inscrits et les Métis. Avant cela, on considérait que les Indiens non inscrits et les Métis étaient inclus dans le paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867. On nous l’a confirmé dernièrement. Ce paragraphe confère au gouvernement du Canada le pouvoir exclusif de légiférer sur les Indiens et sur les territoires qui leur sont réservés.
    L’application de la Loi sur les Indiens a graduellement retiré aux Indiens non inscrits et aux Métis les droits et les privilèges dont jouissent les Indiens inscrits. Dernièrement, un tribunal fédéral a jugé que les Métis et les Indiens non inscrits du Canada sont des Indiens aux termes du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867. Ce jugement établit une nouvelle relation avec le gouvernement du Canada.
    À titre d’organisme autochtone national, nous nous attendons à ce que le gouvernement s’acquitte de son devoir de mener des consultations.
    C’est exactement ce qu’a fait M. Clarke. Il a consulté à plusieurs reprises le Congrès des peuples autochtones au sujet du projet de loi C-428 qu’il présente et il a accepté l’invitation de toutes les communautés autochtones hors réserves qui lui demandaient d’expliquer ce projet de loi. Il a participé à notre assemblée générale annuelle et il a rencontré les membres de mon conseil d’administration pour en discuter. Il a consacré plus de temps encore à participer aux réunions de chacun de nos conseils d’administration tenues pendant cette assemblée et pour rencontrer des représentants des communautés.
    En gros, ce projet de loi propose de modifier des articles désuets de la Loi sur les Indiens et offre une meilleure participation aux membres vivant hors des réserves. Comme je suis Micmac, je suis Indienne inscrite en vertu de la Loi sur les Indiens et je suis liée à une bande en vertu de cette loi. Même si je vis en dehors d’une réserve, je suis reconnue comme micmaque et je jouis des droits de traités conférés aux Autochtones. La plus grande partie de la relation entre la Couronne et les peuples autochtones est régie par les traités et les rapports fondés sur des traités et non par la Loi sur les Indiens. Notre circonscription comprend des membres qui sont Indiens non inscrits et qui jouissent de droits conférés par traité et non de la protection de la Loi sur les Indiens.
    Les traités ont été conclus avant l’entrée en vigueur de la Loi sur les Indiens. Ils ne faisaient pas de discrimination contre les Métis. Ils incluaient les Indiens inscrits et non inscrits ainsi que les Métis.
    Le Congrès des peuples autochtones demande respectueusement l’ajoute d’un élément utile à ce projet de loi. Selon nous, le rapport annuel du ministre devrait être amendé de façon à comprendre l’application des traités. La plupart des non-Autochtones, et même les médias, semblent penser que la relation entre la Couronne et les peuples autochtones est régie par la Loi sur les Indiens. Ce n’est pas le cas. Cette relation dépend des traités et pas uniquement de la Loi. Tout autre point de vue nous limiterait aux seuls enjeux prévus à l’heure actuelle dans la Loi sur les Indiens en négligeant des enjeux qui ont une plus grande portée.
    Ce projet de loi est crucial, et il est important de régler la question des différences faites entre ceux qui vivent dans les réserves et ceux qui hors réserves, ainsi que les principes de plus grande portée.
    We lalioq. Thank you. Merci beaucoup.

  (1000)  

    Merci beaucoup pour cette déclaration préliminaire.
    Je vais maintenant passer la parole à M. Bevington, qui a sept minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie aussi les témoins.
    Ce que vous avez dit à la fin de votre déclaration au sujet des traités m’a frappé. Je pense que vous avez tout à fait raison. Cela fait partie des difficultés continuelles auxquelles font face les Premières nations et les Indiens non inscrits dans tout le pays. On confond les traités et les lois. Les lois viennent du Parlement et les traités sont assortis d’autres pouvoirs conférés par la Constitution. Vous avez tout à fait raison. Votre commentaire est parfaitement légitime.
    Mais nous parlons ici de la Loi à laquelle M. Clarke propose d’apporter quelques changements par son projet de loi d’initiative parlementaire. Vous avez dit que, selon vous, le règlement sur les substances intoxicantes est excellent. Je pense aux Territoires du Nord-Ouest où nos communautés ne vivent pas dans des réserves. Toutes les communautés ont le pouvoir, conféré par plébiscite, d’interdire la consommation d’alcool sur leur territoire. Cette interdiction s’applique à tout le monde. Alors vous voulez dire que les 259 réserves qui ont pris des décisions au sujet des substances intoxicantes n’ont pas les mêmes pouvoirs que les municipalités?
     Non, monsieur. Ce que je dis, c’est qu’elles devraient pouvoir adopter un règlement sans demander l’autorisation du ministre chaque fois. Si elles décident d’imposer une prohibition, il leur incombe, en établissant une structure de gouvernance adéquate, de charger leur conseil et leur chef d’interdire l’alcool, les drogues et toute autre substance dont elles désirent limiter la consommation dans la communauté, sans devoir faire ratifier un règlement par le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord. Ce que ça fait, c’est de redonner à la communauté le pouvoir de prendre des décisions à elle seule.
    C’est un autre point intéressant. Mais je ne parlais pas de cela, je disais qu’à la suite de l’abrogation de l’article 82, le ministre n’aurait plus le pouvoir de refuser l’adoption d’un règlement. La plupart des gouvernements établissent des mécanismes d’examen des lois que leurs collectivités adoptent. À un niveau plus élevé, nous avons les tribunaux. Vous nous dites donc que l’interprétation de la validité, de l’équité et de l’intention des règlements qu’adoptent les Premières nations ne dépendraient que des tribunaux? Vous nous dites que c’est la situation que nous devrions établir?

  (1005)  

     Non. Ce que je dis, c’est que tant qu’une bande agit en fonction de la Loi sur les Indiens, elle assume encore la même responsabilité que... Disons les choses franchement. Ce sont des municipalités fédérales. Nous parlons de la Loi maintenant. C’est ce qu’elles sont; elles ne sont pas différentes des autres villes et villages. Elles assument la responsabilité d’une région géographique pour laquelle elles promulguent des lois. Elles ont aussi l’obligation — et j’espère que nous en parlerons plus tard parce que la consultation va dans les deux sens — de publier, comme toute ville et tout village, les changements qu’elles se préparent à apporter à leurs règlements pour que les communautés soient pleinement informées de ces règlements et qu’elles puissent se présenter devant le chef et devant le conseil pour en discuter. C’est ce qu’on appelle une bonne gouvernance.
     La plupart des municipalités ont établi une structure d’examen de tous les règlements que la municipalité adopte. Si nous abrogeons tout simplement cette disposition, alors il n’y aura plus de structure d’examen des règlements qu’imposent les gouvernements des Premières nations. Pensez-vous que nous devrions aller dans cette direction? Ou devrions-nous en même temps travailler avec les Premières nations pour qu’elles établissent leurs propres mécanismes d’examen pour que les gens régis par les lois de la réserve ne perdent pas indûment leurs droits?
    Comme je le disais, ce n’est qu’un début.
    Vous enlevez une chose sans la remplacer. Que ferez-vous entre-temps?
    En réalité, je voudrais que toute la loi soit remplacée. Si j’en avais le pouvoir, je l’abrogerais aujourd’hui même. En fait, nous nous occupons de quelques articles. Je suis ouverte à tout. Nous avons participé aux travaux du Comité consultatif ministériel conjoint, le CCMC, et nous avons examiné l’ensemble de la Loi sur les Indiens, alinéa par alinéa, ligne par ligne. Nous nous sommes malheureusement heurtés à un statu quo à cause de certains dirigeants qui refusent de changer quoi que ce soit parce que cela limiterait leurs pouvoirs. C’est le statu quo dans la façon dont on fait les choses dans les réserves dans certains cas. Nous y sommes malheureusement encore assujettis à l’heure actuelle.
    Mais ceci est un bon début. Il faut vraiment que nous commencions à examiner ces dispositions législatives qui sont tellement désuètes qu’elles créent des problèmes pour les peuples autochtones, qu’ils vivent dans une réserve ou non.
    Pensez-vous que cette démarche fragmentaire pour nous débarrasser de la Loi sur les Indiens... Je suis d’accord avec vous, mais ce processus nous trouble un peu. Avons-nous choisi le bon processus pour refondre une loi qui régit un grand nombre de gouvernements des Premières nations partout au pays?
    Si j’en avais le pouvoir, j’ordonnerais qu’on la brûle, mais je ne peux pas. Je dois être réaliste et reconnaître que les choses ne vont pas changer du jour au lendemain. Si possible, il faudrait réunir toutes les personnes concernées et commencer à examiner globalement cette loi comme l’a fait le parti libéral. Ce sont les libéraux qui ont proposé une loi sur la gouvernance pour les Premières nations, à l’époque du ministre Nault. Nous avons mené beaucoup de consultations. Nous siégions au comité qui rédigeait une nouvelle Loi sur les Indiens avec l’appui du CCMC. Elle aurait produit une bonne gouvernance et de la bonne reddition de comptes et elle aurait régi la question des règlements. Elle aurait prévu toutes les choses dont nous parlons tous aujourd’hui. Malheureusement, elle n’a pas été adoptée. Nous ne sommes arrivés à rien.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Clarke pour sept minutes.
     Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier les témoins d’être venus aujourd’hui. Je suppose qu’ils ont fait une promenade divertissante en essayant de trouver l’édifice.
    Tout d’abord, j’ai entendu dire qu’il fallait abroger la Loi sur les Indiens dans sa totalité. C’est drôle, parce que c’était mon intention en rédigeant une des premières versions de mon projet de loi. J’avais l’intention de déposer un projet de loi abrogeant la Loi sur les Indiens après avoir consulté les Premières nations, puis après une période de deux ans, de mettre en vigueur un libellé tout nouveau, moderne et respectueux. Après avoir rencontré des dirigeants, des organismes et des personnes des Premières nations, nous avons rédigé trois versions, puis nous avons produit ma version définitive, la quatrième, celle que nous avons ici devons nous et que j’ai déposée en juin 2012. Mon collègue, M. Bevington, a mentionné ce qui est vraiment intéressant dans ce cas. Pour mémoire, je vais citer l’ancien juge de la Cour suprême, Ian Binnie, qui a affirmé que…
la Loi sur les Indiens regorge de dispositions archaïques, mais que le Parlement serait plus avisé de la réformer graduellement au lieu de l’abroger complètement pour la rédiger à partir de rien
    Et que...
le gouvernement devra aborder chaque domaine séparément avec l’aide des communautés autochtones et de divers intervenants, puis choisir les enjeux qu’il pourra résoudre tout de suite, abolir les aspects connexes de la Loi sur les Indiens, puis poursuivre la refonte point par point.
    Il a dit cela le 12 avril 2012. Cette entrevue est affichée sur le site Web de CBC News Saskatchewan. C’est intéressant, parce que le juge s’exprime avec une grande conviction. Voilà un juge de la Cour suprême qui comprend les lois de notre pays et qui a dû prendre ou appliquer des décisions ayant une incidence sur tous les Canadiens et les membres des Premières nations au Canada.
    Il y a un autre article publié par David P. Ball le 1er mars 2013 lorsqu’on a entamé l’enquête sur les femmes disparues et assassinées. Il écrit que…
l’Assemblée des Premières Nations exhorte les politiciens à aborder ce que le chef national Shawn A-in-chut Atleo appelle « un enjeu crucial ». Il ajoute qu’Atleo a déclaré qu’il espérait que les peuples indigènes auraient leur mot à dire au cours des travaux du comité et que le comité discuterait en priorité et avant tout des moyens de garantir que « nos gens puissent vivre en sécurité, où qu’ils habitent ».
    Cela concerne les règlements et le développement économique et les tentatives destinées à faire sortir les Premières nations de la pauvreté dans laquelle la Loi sur les Indiens les a jetées. Dans mon projet de loi, nous parlons aussi de nous rencontrer chaque année. Le ministre doit faire rapport au comité des progrès qu’il accomplit.
    À titre de chef national, pouvez-vous préciser qui vous représentez?

  (1010)  

    Comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, le Congrès des peuples autochtones — notre ancien nom est le Congrès national des Autochtones du Canada — qui existe depuis 43 ans. Notre organisme a été fondé dans les années 1970 pour aborder les problèmes de notre province. Cinq femmes expulsées de leur réserve ont fondé cet organisme en discutant autour d’une table de cuisine parce qu’elles avaient décidé de ne plus se laisser faire. Elles étaient déterminées à ne pas perdre leurs droits d’Autochtones ni les droits que leur conféraient les traités pour avoir eu l’audace d’épouser des hommes non autochtones alors que leurs frères s’étaient mariés avec des femmes non autochtones qui, elles, avaient été acceptées comme Indiennes inscrites. Ces femmes allaient donner des enfants dans le cadre de leur mariage tout comme les épouses non autochtones.
    Voilà qui nous représentons. Depuis plus de 43 ans, nous représentons les intérêts des Autochtones de partout au Canada qui vivent hors des réserves. Comme je l’ai mentionné dans mon document, la Cour fédérale du Canada a dernièrement félicité le Congrès des peuples autochtones d’avoir enfin abordé la question constitutionnelle de la responsabilité fiduciaire. Pendant un certain temps, nous nous surnommions « le peuple oublié », « les Indiens de personne ». Nous étions dans un vide. La Province disait qu’elle ne nous voulait pas. Malheureusement, le gouvernement fédéral a dit: « Eh bien non, nous ne sommes pas responsables de vous! » Quand la Loi sur les Indiens est entrée en vigueur au tout début, nous étions tous inclus parce que la Loi sur les Indiens incluait — c’est très intéressant, si vous avez l’occasion de lire les notes de service entre le premier ministre des Affaires indiennes et Sir John A. Macdonald, ils nous ont tous mis dans le même panier. Cette Loi n’a pas été créée dans le but de nous soutenir. À cette époque, ils promulguaient la Loi sur les Indiens en attendant de trouver une solution au problème des Indiens.

  (1015)  

    Merci, chef.
    Il y a des différences entre les membres de Premières nations qui vivent dans des réserves et ceux qui vivent hors réserves de même qu’avec les Autochtones qui vivent hors des réserves. Pourriez-vous expliquer certaines de ces différences?
    Tout d’abord, parlons de l’expression « Premières nations ». Tout le monde pense qu’il y a 633 Premières nations au Canada. Eh bien, c’est faux. Il y a 633 bandes fédérales en vertu de la Loi sur les Indiens. Il y a 73 Premières nations au Canada. La nation Micmac, la nation Malacite, la nation Cree, ce sont des nations. Les bandes en vertu de la Loi sur les Indiens font partie intégrante de leurs nations, mais elles ne constituent pas des nations à elles seules.
    Prenons l’exemple du Nouveau-Brunswick. Il y a cinq réserves malacites tombant sous le coup de la Loi sur les Indiens. Toutes ces réserves, comprenant ceux qui vivent dans la réserve et ceux qui vivent en dehors de la réserve, constituent la nation Malacite. C’est pour cela que c’est important. J’ai entendu des gens demander: « À qui faut-il parler pour les consultations? ». En réalité, il faut consulter tout le monde. Comment allons-nous faire ça, si nous allons passer graduellement de la Loi sur les Indiens pour revenir à une relation adéquate fondée sur les traités? Il faudrait trouver un moyen de consulter tous les bénéficiaires potentiels de cette nation — prenons ma propre nation, la nation Micmac — pour pouvoir abandonner la Loi sur les Indiens et revenir à notre nation historique de peuples gouvernants.
    Merci.
    Passons maintenant à Mme Bennett pour sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci de vous être déplacée, madame.
    Vous avez parlé de l’importance du devoir de consulter. Bien entendu, il était important que le député vous consulte, vous et les membres de votre conseil. Vous aurez entendu d’autres témoins dire et vous aurez vu dans les médias, j’en suis sûre, que les gens sont convaincus que le devoir de consulter n’a pas été respecté aussi sérieusement qu’on l’aurait espéré ou qu’on aurait dû le faire dans le cas d’un projet de loi qui est arrivé ici en seconde lecture, qui a été adopté en principe, qui est arrivé devant un comité parlementaire sans se heurter à une rétroaction négative et sans qu’on comprenne que cette démarche fragmentaire fâche les gens parce que nous consacrons notre temps et notre énergie à faire cela au lieu de suivre ce que beaucoup considèrent comme la seule manière de nous débarrasser de la Loi sur les Indiens, c’est-à-dire que le premier ministre dirige réellement un processus visant à la remplacer, y compris en ce qui concerne les responsabilités fiduciaires.
    Alors, ce que je veux savoir, c’est si vous estimez, même si on vous a consulté, que la consultation a été suffisante pour justifier que le projet de loi se trouve ici, devant ce comité. Ce comité ne peut pas vraiment faire beaucoup plus que de corriger d’éventuelles lacunes fatales, puisque le projet de loi a déjà été adopté en principe. Les dirigeants qui ont comparu devant nous nous ont dit que, tel qu’il est rédigé maintenant, ce projet de loi ne permettrait pas à une bande d’imposer une prohibition dans leur communauté. On aurait pu corriger de graves lacunes s’il y avait eu des consultations mais vous savez que le temps et l’énergie consacrés à ce projet de loi seraient plus utiles si le Parlement et d’importants intervenants comme vous s’attaquaient au vrai gros travail sous la direction du premier ministre du pays.
     Docteur Bennett, je ne peux pas parler au nom d’autres organismes autochtones, mais en tant que dirigeants autochtone, je peux vous dire que, quand j’ai entendu parler du projet de loi C-428, la première chose que j’ai faite, a été de communiquer avec le député et de fixer un rendez-vous avec lui pour en discuter. Ensuite, je lui ai présenté l’offre. Je suis ici depuis assez longtemps pour savoir qu’il n’y a jamais d’argent pour mener des consultations. Je savais que, pour une chose aussi importante, je devrais trouver un moyen de permettre aux gens dont je suis responsable de présenter leurs opinions d’une façon ou d’une autre. Je suis une dirigeante responsable, et comme je savais que tous mes gens allaient se réunir pour notre assemblée annuelle, j’ai invité M. Clarke à venir leur parler.

  (1020)  

     Si je comprends bien le devoir de consulter, il s’agit du devoir qu’a le gouvernement de consulter, et non celui des intervenants d’essayer de recueillir des rétroactions de la meilleure façon possible. Ce qui m’inquiète, c’est qu’il semble que certaines personnes de l’autre partie pensent que, comme il s’agit d’un projet de loi d’initiative parlementaire, le gouvernement n’a pas le devoir de consulter. Quelques adjoints de l’autre partie ont dit cela aussi, à la grande surprise de certains intervenants.
    Je n’accepte pas ça. En ce qui me concerne, la consultation va dans les deux sens. C’est donnant-donnant.
    Croyez-vous que du fait que ça touche les Autochtones du Canada, que pour tous les projets de loi d'initiative parlementaire, il y a obligation de consulter?
    Si le Parlement souhaite modifier les lois — parce qu'il pourrait s'agir d'un projet de loi d'initiative parlementaire déposé par n'importe quel parti — et si cela va toucher les peuples autochtones et que l'initiative est prise avec les meilleures intentions du monde, alors le Parlement lui-même va devoir étudier la question et mettre les ressources nécessaires aux consultations à la disposition de tout député.
    Est-ce que les consultations ne devraient pas avoir lieu avant que le projet de loi ne soit déposé et avant qu'il ne soit adopté en deuxième lecture?
    Bien, vous savez, je ne suis pas une parlementaire, je suis une simple citoyenne, donc je ne sais pas trop comment les choses fonctionnent à la Chambre parfois. J'ai connu des consultations qui avaient lieu avec les peuples autochtones après l'adoption de projets de loi.
    Mais cela ne correspond pas vraiment à l'obligation de consulter, non? Ce sont les mesures déjà adoptées qui touchent les Premières nations, les Inuits et les Métis. La loi est déjà en place, par opposition à la tenue de consultations antérieurement. Il y a une loi qui concerne les Autochtones au Canada.
    D'après ce que j'ai compris, si l'initiative va plus loin, il y aura consultations.
    Mais elle aura été adoptée; ces choses auront changé.
    Oui, mais ce n'est pas définitif, ce n'est pas applicable sur-le-champ. D'après ce que j'ai compris, il restera à passer par le Sénat et à ce moment-là, d'autres consultations sont possibles.
    Comparativement à beaucoup d'autres intervenants, vous semblez beaucoup plus à l'aise avec l'approche par étapes. Préféreriez-vous un engagement de la part du Premier ministre de remplacer la Loi sur les Indiens par la responsabilité fiduciaire de la Couronne?
    Comme je l'ai déjà dit, nous avons déjà emprunté cette voie avec le comité consultatif ministériel conjoint, ce qui était excellent, le projet de loi C-7 sur la gouvernance, sous le ministre Nault à l'époque. Que Dieu le garde! Il a essayé parce qu'il a vu l'effet de la loi sur nous. Malheureusement, quand vous avez plusieurs peuples autochtones, à l'instar de la société canadienne, vous avez des opinions différentes et des points de vue différents sur les enjeux. On dirait que c'est la seule façon qu'on va arriver à régler ça: cibler les petits morceaux pour le moment et ensuite, avec un peu de chance, les pourparlers sur les traités qui sont en cours un peu partout au Canada prendront le relais à un moment donné et nous libéreront du joug de la Loi sur les Indiens.

  (1025)  

    Merci.
    Nous passons à M. Seeback pour une durée de sept minutes.
    Je vous remercie des renseignements fournis dans vos déclarations préliminaires et une partie de vos réponses à nos questions. Je les ai trouvés très instructifs.
    Je veux parler un peu du sujet qui revient aujourd'hui quant à l'obligation de consulter et les consultations. Je suppose que vous considéreriez que votre organisation a été consultée au sujet de cette loi en particulier?
    Comme je l'ai déjà dit, dès que je me suis renseignée sur le projet de loi, j'ai communiqué avec M. Clarke et j'ai demandé une rencontre de nos deux équipes pour savoir d'abord et avant tout ce qu'il essayait de faire. J'ai ensuite rejoint les membres de mon conseil et leur ai transmis l'information, je leur ai fait une présentation complète du dossier et je leur ai demandé s'ils voulaient aller de l'avant ou autre chose et j'ai reçu des instructions en conséquence. Nous avons invité M. Clarke à notre assemblée générale et nous lui avons donné carte blanche pour parler à l'assistance, laquelle était composée de tous les membres de mon conseil et des conseils et porte-parole des communautés. Si je comprends bien, on s'est mis en rapport avec lui pour l'inviter à venir et il s'est rendu dans quelques-unes de nos communautés.
    Ces modifications ne nous ont pas beaucoup surpris, parce que, comme je vous l'ai dit, nous avons déjà étudié le projet de loi C-7 sur la gouvernance à l'époque du ministre Nault et nous avons siégé au comité chargé de rédiger l'avant-projet de loi visant à modifier la Loi sur les Indiens. Donc, les dispositions envisagées ne sont pas...
    Y avait-il des choses que vous auriez aimé voir? Avez-vous demandé que certains éléments se retrouvent dans l'actuel projet de loi de M. Clarke?
    J'ai simplement dit à tout le monde, aujourd'hui, ce que je souhaitais voir. Le dernier élément que j'aimerais voir inclus dans le projet de loi, c'est l'obligation de rendre compte non seulement de l'avancement des modifications à la Loi sur les Indiens, mais également de l'état d'avancement de la concertation sur les traités. Où en sont les tables de concertation partout au Canada? C'est tout.
    Vous avez dit quelque chose que j'ai trouvé instructif : il existe 633 bandes en vertu de la Loi sur les Indiens. Je n'ai jamais rien entendu de la sorte auparavant, mais c'est une donnée utile, à mon avis. Mais vous avez parlé de 73 Premières nations, donc...
    ... Premières nations historiques.
    ... les Premières nations d'un point de vue historique.
    Vous avez mentionné, par exemple, que le Nouveau-Brunswick compte, si je me souviens bien de ce que vous avez dit, cinq réserves.
    Au Nouveau-Brunswick, il y en a 15 en tout.
    Mais particulièrement...?
    Il y a cinq communautés malécites et les dix autres sont micmacs. Il y a aussi notre petit cousin du sud, près de la frontière du Maine, qui s'appelle les Pescomodys.
    Si je voulais tenir une consultation — disons que je veux présenter un projet de loi d'initiative parlementaire — ce qui n'est pas le cas, n'ayez crainte, mais si c'était le cas et que je voulais tenir une consultation, il faudrait que je consulte les cinq communautés?
    Actuellement, il le faudrait.
    Donc, il ne suffirait pas de consulter 73 Premières nations. Laissez-vous entendre que la consultation viserait 633 bandes indiennes au sens de la Loi, qu'il me faudrait tenir une consultation avec chacune d'entre elles?
    Actuellement, c'est ce que la loi exige, lorsqu'on veut pousser et contester un projet de loi, et ce, jusqu'à ce que les traités soient remis en application dans les 73 nations historiques. Tout le concept d'une consultation serait alors modifié: elle viserait alors la nation.
    Est-ce que M. Clarke vous a demandé de participer à l'élaboration de son projet de loi? Lors de votre rencontre, quand il est allé voir votre organisation, aviez-vous des suggestions à lui faire?
    Non, je ne lui ai pas parlé ce soir-là, si ce n'est pour le saluer, lui indiquer où était la salle et le remercier d'être venu. J'avais invité M. Bennett et Mme Crowder à la réunion; ils étaient là aussi. J'ai laissé aux membres de mon conseil et aux membres présents de l'organisation le soin d'aller voir M. Clarke pour lui parler.
    Je ne m'en suis pas mêlée, donc, s'il devait passer un mauvais quart d'heure, il devait se débrouiller seul.
    M. Clarke semble ouvert aux suggestions et être prêt à modifier son projet de loi. Le croyez-vous et avez-vous d'autres recommandations pour ce projet de loi?
    Celle que j'ai mise de l'avant, pour le moment, concerne les rapports sur les traités. Je considère qu'il est très important que les peuples autochtones partout au Canada sachent où en sont les pourparlers aux diverses tables de concertation, parce que beaucoup d'entre nous, et en particulier les membres vivant hors réserve, sont tenus complètement à l'écart du processus. Aucune consultation de quelque nature que ce soit n'a eu lieu.
    En ce moment, il y a une table de concertation au Nouveau-Brunswick, pourtant je n'y ai pris aucune part. La population vivant hors réserve n'y a pas été invitée non plus. Nous sommes tenus à l'écart et nous n'avons aucune idée de ce qui se passe. Nous espérons que l'ajout de cette disposition nous permettra de savoir en gros où en sont les pourparlers.

  (1030)  

    Super!
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Seeback.
    Nous passons maintenant à Mme Hughes, qui a droit à cinq minutes.
    Je vous remercie beaucoup d'être là et des commentaires exprimés à ce sujet. Je suis contente que vous ayez pu rencontrer M. Clarke, parce que ce n'est pas le cas pour tout le monde.
    Un chef qui fait partie de ma circonscription a écrit à M. Clarke et à M. Rickford pour les inviter à une rencontre à ce sujet, et malgré cette invitation dans leur communauté, la réserve indienne Whitefish River, la réponse a été un laconique accusé de réception, sans mention de l'intention ou non d'assister à la réunion pour débattre de ce projet de loi en particulier. Il n'a pas non plus été invité à se rendre à Ottawa. J'espère qu'il aura l'occasion de venir faire part de ses préoccupations en ce qui concerne ce genre de loi.
    Autre chose: comme vous l'avez mentionné, vous n'êtes pas une parlementaire, mais étant donné le poste que vous occupez, je suppose que vous pourriez vous dire politique d'une certaine manière, puisque vous devez prendre position dans certains dossiers.
    Vous avez aussi parlé de l'élément consultation et de l'élément traités. Dans le passé, il y a eu deux tentatives importantes de supprimer la Loi sur les Indiens. La première fois, un livre blanc signé de la main de Jean Chrétien, en 1969, a cherché à intégrer les Premières nations dans la société canadienne normale en supprimant la Loi sur les Indiens et les réserves.
    Pour la petite histoire, Harold Cardinal et d'autres chefs de Premières nations ont publié un « livre rouge », intitulé Citizens Plus, dans lequel ils ont exposé les grandes lignes de leur réponse:
Il n'est ni possible ni souhaitable de supprimer la Loi sur les Indiens. Il est essentiel de la réviser, mais pas avant d'avoir réglé la question des traités.
    Comme vous l'avez signalé, ces problèmes de traités ne sont pas encore réglés.
    Il faut bien reconnaître que ce projet de loi comporte des aspects qui font problème. Nous avons parlé des consultations. J'essaie de comprendre. Vous avez dit que vous aviez eu une rencontre et que vous aviez transmis de l'information à votre conseil; ensuite, vous avez organisé une réunion et je suis certaine que tous vos membres n'ont pas été en mesure d'y assister, si on tient compte de la taille du territoire canadien, n'est-ce pas?
    Quel pourcentage de vos membres ont été capables de participer à la réunion?
    Dans nos assemblées, nous avons droit à 18 représentants par province. Tous les membres de mon conseil sont chefs et présidents de la province où ils vivent et ils relèvent eux-mêmes d'un conseil d'administration provincial. Les membres de ces conseils sont les chefs et les conseils de bande des communautés de la province en question.
    Vous êtes donc en mesure d'affirmer qu'ils se sont réellement consultés afin de vous aider à prendre la décision de prendre position ou non face à ce projet de loi.
    Mon conseil m'a donné la consigne d'appuyer ceci, sous réserve de la modification demandée en ce qui concerne les traités.
    Je rappelle que c'est pareil à ce que c'était avec le comité consultatif ministériel conjoint. C'est la même chose. Ce sont les mêmes trucs sur lesquels il y a eu des discussions approfondies à l'époque du ministre Nault, lorsque je me suis promenée pendant un mois et demi dans toute la province du Nouveau-Brunswick. À l'époque, j'étais la cheffe provinciale. Nous avons parcouru l'ensemble de la province, à décortiquer la Loi sur les Indiens. Nous avions un siège au comité.
    Ma question à votre endroit, par conséquent, est la suivante. Pensez-vous que les Premières nations devraient avoir le pouvoir de consulter elles aussi? Devrait-on leur accorder du temps pour leur permettre de tenir des consultations et d'être en mesure de venir ici pour débattre de la question?

  (1035)  

    Je ne sais pas pourquoi ils ne demandent pas de témoigner.
    Certains le font. L'ennui avec les projets de loi d'initiative parlementaire, c'est qu'ils sont très contraignants quant au moment où des personnes peuvent comparaître et avoir voix au chapitre et quant au nombre de ces personnes. C'est ça l'ennui avec les projets de loi d'initiative parlementaire.
    M. Clarke a laissé entendre que le projet de loi, au fond, offre un certain cadre, un processus législatif permettant un dialogue sérieux d'année en année. Il a aussi parlé d'un important débat sur la possibilité de se débarrasser de la Loi ainsi que sur l'impossibilité de tenir une consultation de grande envergure et d'engager une conversation franche et ouverte.
    Je suis consciente que M. Clarke admet que son gouvernement ne se montre pas digne de ses responsabilités fiduciaires envers les membres des Premières nations et que le gouvernement adopte une approche « paternaliste ». Il a répété cela je ne sais combien de fois dans son exposé.
    Le fait est que le gouvernement n'assume pas une responsabilité fiduciaire. Croyez-vous que M. Clarke aurait dû collaborer avec le gouvernement en vue du dépôt d'un projet de loi d'initiative gouvernementale qui aurait permis une consultation appropriée et que, dans ce cas, il assumerait alors sa responsabilité fiduciaire?
    Votre temps est écoulé, mais j'autoriserai une réponse à votre question, si elle est rapide.
    Non, si j'ai l'occasion de modifier cette loi sur les Indiens, en tant membre des Premières nations, je vais la saisir.
    Merci beaucoup.
    Madame Ambler, c'est votre tour.
    Merci, monsieur le président. Je vous remercie tous les deux d'être là aujourd'hui et d'offrir un témoignage très instructif.
    Je veux revenir sur un point soulevé par ma collègue de l'opposition. Elle a affirmé que ce projet de loi comporte des aspects qui posent problème. Ce qui m'est venu à l'esprit le plus souvent aujourd'hui en vous écoutant et en me rappelant ce qu'on a entendu de la part d'une autre paire de témoins antérieurement, c'est un proverbe que tout le monde connaît, je crois: « Le mieux est l'ennemi du bien. » C'est la nature humaine. Nous cherchons tous la solution parfaite et il arrive que l'on rejette une option plus raisonnable pour ce motif: le verre à moitié plein ou aux trois quarts vide. Il me semble que c'est cela que bien des gens doivent se dire.
    Je tiens à vous remercier d'accepter le fait que cette initiative n'est peut-être pas ce que vous auriez aimé avoir, mais qu'elle est tout de même un pas dans la bonne direction: M. Clarke veut améliorer la qualité de vie des Autochtones du Canada. C'est ce qui me frappe le plus.
    Est-ce que cela traduit avec exactitude ce que vous essayez de nous dire?
    Je réponds par l'affirmative. Il faut commencer quelque part. Ce qui m'inquiète vraiment au sujet de cette loi sur les Indiens, c'est que je ne crois pas que la majorité des Canadiens se rend compte que l'apartheid sud-africain s'est basé sur la Loi sur les Indiens. Le Canada condamnait l'apartheid du gouvernement de l'Afrique du Sud devant les Nations Unies et les tribunaux internationaux, mais il se conduisait de la même manière sur son propre territoire. Ils ont compris leur erreur il y a 20 ans. Pourquoi pas nous? On ne parle pas d'un unique gouvernement; de nombreux gouvernements se sont succédé toutes ces années.
    Oui, M. Clarke l'a fait remarquer.
    Il faut commencer quelque part; si l'adoption de quatre amendements de faible importance constitue le point de départ, que l'on commence avec cela. On ne peut prendre la Loi sur les Indiens et simplement la déchirer, contrairement à ce que plusieurs souhaitent, car vous créeriez alors un vide. C'est ça le problème. À un moment donné, il faut néanmoins commencer à s'attaquer à ce qui n'a pas de sens dans la Loi. Les pensionnats...

  (1040)  

    J'allais vous en parler justement. Je viens d'être nommée à ce comité. Veuillez donc pardonner ma question. Est-ce que les Autochtones vivant hors réserve auraient été touchés eux aussi?
    Lors de son exposé devant le comité, mardi, M. Clarke a indiqué que ses grands-parents étaient des survivants. Donc, il aborde la question sous un angle personnel. Nous n'avons pas mentionné l'étape historique qu'ont constituée les excuses exprimées en 2008 par le gouvernement actuel, mais j'ai le sentiment que ce geste a fait prendre conscience à tous les Canadiens de ce chapitre peu glorieux de notre histoire.
    Je m'écarte du sujet. Je veux vous demander en particulier, parce que je suis nouvelle à ce comité, si les membres des Premières nations vivant hors réserve sont traités comme tous les Canadiens ou s'ils sont toujours en butte aux éléments paternalistes et archaïques de la Loi?
    En fait, il arrive de nous retrouver en terrain neutre. Ça dépend simplement de notre facilité à nous fondre dans la masse.
    D'accord.
    Par exemple, en ce qui concerne les testaments et les successions, est-ce que vous devez faire approuver votre testament par le ministre?
    Oui, mais avant cela, je dois m'assurer que tout a été confié à mes petits-fils.
    Ce sont là les problèmes matériels qu'entraîne une loi de ce genre.
    Je n'ai pas le choix. Si cette disposition n'est pas abrogée, je n'ai pas le choix. Avant de mourir, je dois veiller à ce que tout ce que je possède soit cédé à mes petits-enfants pour m'assurer qu'ils sont protégés. Je possède une terre à bois de 25 acres, ce qui est très précieux, et j'ai travaillé fort pour acquérir tout ce que je possède, tout comme mon mari, qui est encore dans l'armée.
    Et vous ne voulez pas risquer de tout perdre.
    Je ne vais pas mettre mon héritage en péril.
    À moins que ce projet de loi ne soit adopté, auquel cas...
    Dans ce cas, tout dépendra de la façon dont ils se conduiront au cours des 15 prochaines années. C'est ce qui déterminera ce qu'ils recevront en héritage.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous tenons à remercier les témoins de ce matin. Nous sommes sensibles à vos témoignages et à votre empressement à répondre à nos questions.
    Chers collègues, nous allons maintenant suspendre nos travaux quelques minutes et poursuivre ensuite notre réunion à huis clos pour examiner une ou deux questions intéressant le comité.
     [La séance se poursuit à huis clos.]
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