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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 050 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 19 novembre 2012

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Chers collègues, nous allons commencer la 50e séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous nous penchons sur l'objet des articles 206 à 209 de la Loi sur les Indiens du projet de loi C-45, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012 et en mettant en oeuvre d'autres mesures.
    Mesdames et messieurs, avant de procéder à l'audition des témoins ici présents, nous devons traiter une question d'ordre administratif qui découle de la décision prise par le sous-comité. Il s'agit de l'adoption du budget.
    Nos témoins attendent ici dans la salle, mais si nous n'adoptons pas le budget, l'argent viendra de la paye de Jim...
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: ... nous avons donc intérêt à adopter le budget. Jim m'a dit qu'il a des moyens fort persuasifs de vous faire payer.
    Chers collègues, pourriez-vous proposer l'adoption du budget tel qu'il est présenté?
    Une voix: Je le propose.
    Le président: M. Rickford présente la motion, laquelle est appuyée par Mme Crowder. Êtes-vous tous en faveur? Y a-t-il des gens qui s'y opposent?
    (La motion est adoptée [Voir le Procès-verbal])
    Le président: Merci à tous.
    Chers collègues, nous accueillons aujourd'hui des représentants du ministère des Affaires autochtones et du Nord canadien. Ce n'est pas la première fois que ces témoins comparaissent devant notre comité.
    Andrew, je vous prie de commencer. Nous vous poserons ensuite des questions, conformément aux usages du comité.
    J'aimerais vous parler un peu du contexte des dispositions actuelles de la Loi sur les Indiens qui portent sur les désignations et je vous fournirai ensuite des renseignements quant aux amendements contenus dans le projet de loi C-45 qui modifient le processus de désignation.
    Avant que je ne commence, permettez-moi de me présenter. Je suis Andrew Beynon, directeur général de la Direction générale des opportunités pour les communautés du ministère des Affaires autochtones et du Nord canadien. Je suis accompagné de Kris Johnson, directeur principal de la Modernisation des terres. Nous avons également la chance d'être accompagnés de M. Paul Salembier, notre conseiller juridique qui a travaillé sur ces amendements.
    Je commencerai en vous disant que le concept de la désignation des terres contenu dans la Loi sur les Indiens est relativement récent à comparer à la plupart des autres dispositions de la loi. Les dispositions ont été ajoutées à la Loi sur les Indiens en 1988. Elles visent à apporter des précisions aux dispositions de la loi qui portent sur l'utilisation des terres des réserves afin de créer un processus qui permet aux Premières nations de gérer leurs terres sans devoir les céder à titre absolu.
    De cette façon, les terres désignées peuvent continuer à faire partie de la réserve sans être aliénées. Cette désignation s'avère particulièrement utile pour les baux. Un bail, comme vous le savez, autorise l'utilisation temporaire des terres, sans aliénation permanente des biens fonciers de la réserve. Les dispositions visant la désignation ont été incorporées à la Loi sur les Indiens pour permettre à certaines Premières nations de prendre les mesures nécessaires afin de percevoir des taxes foncières sur les terres cédées par bail, plutôt que d'avoir une tierce partie sur la réserve et de devoir céder les terres à titre absolu.
    Tout d'abord, vous, les parlementaires, devriez savoir que lorsque les dispositions sur la désignation ont été ajoutées à la Loi sur les Indiens, elles ont été incorporées à la partie qui porte sur les cessions à titre absolu et les cessions assujetties à des conditions. Si vous lisez les articles à partir de l'article 38 de la loi, vous constaterez que l'on fait référence aux cessions à titre absolu, aux cessions assujetties à des conditions et aux cessions par désignation.
    Dans le projet de loi C-45, qui modifie le processus de désignation afin de le rendre plus efficace, nous, ou bien plutôt les rédacteurs législatifs, ont tenté dans la mesure du possible de ne pas modifier les dispositions qui portent sur les cessions à titre absolu et les cessions assujetties à des conditions. Ils ont rendu plus distinctes et plus claires les dispositions portant sur la désignation. Je voulais vous le dire d'emblée: les dispositions contenues dans le projet de loi C-45 portent essentiellement sur la désignation et dans la mesure du possible ne touchent pas aux procédures et aux dispositions qui portent sur les cessions à titre absolu, c'est-à-dire lorsqu'une Première nation veut se départir de certaines des terres de sa réserve.
    Les désignations autorisées en vertu de la Loi sur les Indiens sont importantes, car elles ont permis aux Premières nations de créer des emplois pour les membres de leur collectivité grâce aux baux, comme je l'ai mentionné auparavant, de percevoir des taxes foncières des locataires commerciaux et industriels et même de s'attirer des capitaux afin de créer des petites et moyennes entreprises. Les dispositions s'ajoutent à celles de la Loi sur les Indiens qui portent sur la gestion des ressources minérales et pétrolières ainsi qu'à celles de la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes qui portent sur la désignation des terres.
    La désignation des terres peut servir à diverses fins, allant de l'exploitation du pétrole et du gaz naturel aux baux commerciaux et industriels, et je crois que certains des témoins qui me suivront aujourd'hui vont vous parler de leur expérience quant à l'utilisation de désignation de terres dans le cadre de baux à long terme.
    Sur le plan procédural, abstraction faite des amendements contenus dans le projet de loi C-45, la Loi sur les Indiens actuelle contient deux dispositions importantes qui portent sur la désignation des terres. L'une des dispositions prévoit l'organisation par la collectivité d'un référendum afin de soumettre la désignation au vote. Le conseil de bande n'est pas autorisé à procéder de lui-même. La procédure de vote prévue par la Loi sur les Indiens exige qu'une majorité d'électeurs admissibles soient présents.
    Depuis 1988, on a constaté qu'environ 80 p. 100 des collectivités des Premières nations qui ont tenu des scrutins concernant une désignation n'ont pas pu obtenir le seuil de participation exigé lors du premier tour de scrutin.
    En vertu du système actuel, si un conseil de bande n'obtient pas le nombre d'électeurs nécessaire au premier tour, il peut exiger un deuxième tour afin de voter sur la désignation proposée des terres. Lors de ce deuxième tour, le seuil de participation est abaissé.
    Il faut que les membres de votre comité comprennent que dans la pratique, 80 p. 100 des référendums ont nécessité un deuxième tour de scrutin avec un seuil de participation réduit, en conformité avec les dispositions actuelles de la Loi sur les Indiens.
    Il faut également comprendre qu'en vertu du processus de désignation actuellement prévu par la loi, lorsque la collectivité a terminé son scrutin, habituellement en deux tours, il faut obtenir une approbation fédérale afin de valider la désignation. Cette approbation vient du gouverneur en conseil. La désignation proposée est soumise à notre ministère pour examen par le ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien, mais il faut ensuite obtenir un décret.
    Je vais maintenant vous parler des dispositions proposées dans le projet de loi C-45. Comme je l'ai indiqué plus tôt, ces amendements portent uniquement sur les désignations. Dans la mesure du possible, nous avons tenté d'éviter de toucher aux dispositions qui portent sur les cessions à titre absolu, afin de ne pas les modifier.
    Les amendements contenus dans le projet de loi C-45 visent à apporter les deux améliorations que je viens de vous décrire, car le processus actuel de désignation des terres est long et coûte cher.
    Le premier amendement vise à réduire le seuil de participation du vote de chaque référendum portant sur une désignation de terres et à éliminer la nécessité de passer à un deuxième tour de scrutin, n'exigeant qu'une simple majorité d'électeurs qui voteraient en faveur. On croit qu'en procédant ainsi, le délai sera réduit de plusieurs mois et il y aura des économies sur le plan financier, du fait qu'un deuxième tour de scrutin ne soit plus nécessaire.
    Je souligne qu'il s'agit uniquement de modifier le seuil de participation, compte tenu de la pratique actuelle et de l'expérience que nous avons acquise. On ne modifie aucunement le rôle des électeurs qui vivent dans les réserves et à l'extérieur des réserves. En vertu des dispositions actuelles en la matière, ces deux catégories d'électeurs sont habilitées à voter et conserveront ce pouvoir si le projet de loi C-45 est adopté.
    Le deuxième amendement proposé, qui découle encore une fois de notre expérience quant à la rapidité et au coût des processus de désignation, vise à éliminer la nécessité d'obtenir l'approbation du gouverneur en conseil à la toute fin de la procédure, et accorde au ministre le pouvoir d'approuver la désignation.
    Ces deux mesures proposées ne représentent pas un changement énorme par rapport au concept de désignation en vigueur depuis 1988. Il s'agit toujours d'un processus d'aliénation de biens fonciers servant essentiellement à la cession par bail. Tous les membres de la collectivité peuvent participer au processus de ratification et le gouvernement fédéral approuve la désignation à la dernière étape. Tout ce que nous avons fait, c'est de simplifier le processus de référendum et d'approbation fédérale, mais aucune de ces étapes n'a été supprimée.
    J'espère que ces quelques observations vous ont permis de comprendre les dispositions. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

  (1540)  

    Merci, monsieur Beynon. Nous vous sommes très reconnaissants.
    Mme Crowder dispose maintenant de sept minutes.
    Merci beaucoup d'être venus aujourd'hui.
    Avant que je ne vous pose mes questions, je dois faire une observation sur le processus, qui ne fait pas partie de votre mandat.
    Notre comité est chargé d'examiner certaines dispositions du projet de loi C-45. C'est un projet de loi énorme et notre comité ne peut pas le modifier. Si nous le souhaitons, nous pouvons écrire au Comité des finances afin de proposer des amendements. Ce n'est pas la façon habituelle de procéder lorsqu'un comité entreprend l'étude d'un projet de loi, un projet de loi qui pourrait avoir une incidence très importante sur les collectivités des Premières nations de ce pays.
    Je me devais de faire cette observation.
    J'ai ici une lettre rédigée par les nations visées par le traité no 8 qui évoque certaines des préoccupations soulevées. Je cite:
Puisque le gouvernement a incorporé ces changements au projet de loi omnibus, les peuples indigènes n'ont aucune possibilité de s'exprimer. Nous avons été bâillonnés par le processus parlementaire. Nous ne pouvons intervenir verbalement.
    La lettre se poursuit et indique que, par conséquent, la nation soumettait ses observations par écrit. La nation précise que c'est un exemple clair du racisme manifesté par l'État du Canada à son égard. Les décisions sont prises sans son consentement.
    Vous avez apporté ces changements et j'aimerais vous poser deux questions. Tout d'abord, quel a été le processus de consultation effectué par le ministère avant de proposer les amendements?
    Ensuite, même si l'on indique que les amendements permettront d'accélérer le processus, j'aimerais savoir quels sont les changements qui sont apportés au sein du ministère? J'ai remarqué que dans la foire aux questions, votre ministère signale que les amendements proposés ne modifieraient pas le niveau de service actuel offert aux Premières nations, notamment les discussions initiales sur la planification et la communication de renseignements à la collectivité. Moi-même, j'ai rencontré des représentants des Premières nations du Canada qui continuent de me parler de retards considérables dans leurs échanges avec le ministère.
    Je vous saurais gré de répondre à ces deux questions.

  (1545)  

    Je vous demande pardon, mais je dois intervenir. Une simple vérification. La lettre que vous avez citée, est-ce celle de la bande d'Onion Lake? Si c'est le cas, je crois que cette bande relève du traité no 6 plutôt que du traité no 8.
    Je suis désolée. Vous avez raison. Il s'agit de la Nation crie d'Onion Lake, donc du traité no 6.
    Je crois qu'il s'agit uniquement d'une Première nation, et non pas de toutes les nations visées par le traité no 6.
    Oui. Je vous remercie pour cette clarification, monsieur le président.
    Pour répondre à votre première question sur le processus de consultation, les amendements contenus dans le document budgétaire n'ont pas fait l'objet de consultations élargies sur le fond du projet de loi, mais je vous assure que ces dispositions visant à modifier le processus de désignation, comme je l'ai dit plus tôt, ne le changent pas vraiment. Il demeure essentiellement le même, c'est-à-dire que la collectivité décide si elle veut ou non désigner des terres, processus pour lequel il faut obtenir une approbation fédérale.
    Monsieur Beynon, je suis sûre que vous connaissez la Déclaration sur les droits des peuples autochtones des Nations Unies. L'article 19 parle du « consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause ». On ne parle pas de la portée de la décision. Il est simplement indiqué que...
    Vous allez bien sûr entendre d'autres témoins, mais je vous dis que les amendements n'auront pas d'incidence sur les droits des Autochtones ou les droits conférés par traité, droits qui, selon la jurisprudence, doivent le plus souvent faire l'objet de consultations.
    Mais c'est le ministère qui a pris la décision. Vous n'avez pas consulté les Premières nations afin de déterminer si leurs droits ont été atteints ou non.
    Je vous le répète. Nous avons examiné ces dispositions, et je crois qu'il serait très difficile de suggérer qu'il y a atteinte aux droits des Autochtones et aux droits conférés par traité.
    Je vous dirais également que...
    Excusez-moi, mais je ne crois pas que ce soit au ministère de prendre cette décision. Je crois qu'il revient plutôt aux nations de le faire.
    Continuez.
    Ce que j'ai dit restera au compte rendu.
    J'aimerais également préciser qu'un certain nombre de groupes ont fait part de leurs préoccupations quant au processus nécessaire à la désignation des terres et au délai très long qui s'impose, surtout le scrutin à tours multiples et ensuite l'attente des approbations fédérales allant jusqu'au gouverneur en conseil. Lorsque les amendements ont été proposés, qui ne modifient pas de façon importante les dispositions visant la désignation des terres aux termes de la Loi sur les Indiens, nous étions bien au courant des préoccupations qui nous avaient été signalées par diverses Premières nations.
    Encore une fois, il ne s'agit pas de déterminer si ces changements sont souhaitables ou non. Il s'agit de la méthode utilisée pour les faire adopter. Nous sommes d'accord que le processus doit être accéléré. J'aimerais donc savoir ce que le ministère a fait quant à ses propres démarches internes, sans tenir compte du scrutin ni de l'approbation du gouverneur en conseil.
    En ce qui nous concerne, le ministère cherche à voir où il pourrait apporter des améliorations au processus de désignation. Puisque chaque désignation coûtera moins cher si les amendements sont adoptés, il se peut que nous soyons en mesure d'effectuer un plus grand nombre de désignations et de traiter une partie des dossiers en souffrance.
    En ce qui concerne le niveau actuel de service et le financement accordé aux Premières nations, pouvez-vous indiquer au comité le montant que dépense le ministère afin de fournir un soutien aux Premières nations qui cherchent à désigner des terres?
    Le coût varie considérablement selon la collectivité. Nous assumons les coûts associés aux fonctionnaires électoraux qui supervisent le déroulement du scrutin. Le coût de l'envoi par la poste des trousses d'information à tous les électeurs admissibles pourrait se chiffrer à quelques milliers de dollars si la collectivité est petite. Si elle est plus grande, le coût peut augmenter de façon considérable.
    Pouvez-vous nous indiquer de façon approximative combien le ministère dépense annuellement sur les processus de désignation?
    Nous effectuons de 10 à 12 désignations par année. Il faut parfois recourir à des tours de scrutin multiples. Il peut y avoir 20 tours de scrutin, et chaque tour coûte entre 7 000 et 50 000 $. Les coûts peuvent être un peu plus élevés si la collectivité est particulièrement grande. Le coût varie d'une année à l'autre, mais cela vous donne une idée.

  (1550)  

    Y a-t-il un certain nombre de dossiers en souffrance pour ce qui est des collectivités qui voudraient organiser un scrutin?
    Non, pas en ce qui concerne l'organisation d'un scrutin, car le nombre de demandes n'est pas élevé. Toutefois, nous avons entendu parler de cas de collectivités qui ont évité le processus en raison des difficultés inhérentes.
    Merci, madame Crowder.
    Monsieur Richards, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais commencer par demander des précisions au sujet de la cession et de la désignation des terres. Évidemment, la loi contient des dispositions à ces deux égards. On confond souvent la désignation et la cession des terres en raison du libellé de la Loi sur les Indiens.
    Pouvez-vous préciser quelle est la différence entre ces deux concepts, lequel des deux est modifié dans le projet de loi C-45 et pourquoi? Pourquoi est-il important que les modifications à la mesure touchent seulement la désignation?
    Je vais donner une réponse simple. Mes collègues voudront peut-être ajouter quelque chose.
    En gros, avant 1988, la Loi sur les Indiens prévoyait deux choses: la cession à titre absolu et la cession assujettie à des conditions des terres de réserve. Comme les termes le disent, la cession à titre absolu était utilisée quand une Première nation, pour une raison quelconque, voulait céder une partie de ses terres de réserve. La cession assujettie à des conditions permettait à la Première nation de faire la même chose, mais en liant une condition quelconque à l'abandon de ses terres — par exemple, la cession des terres à des fins ferroviaires aussi longtemps que les terres étaient utilisées à cette fin, ou à des fins de service public d'électricité aussi longtemps que le service public se servait de la réserve.
    Surtout dans le cas de la cession assujettie à des conditions à un utilisateur donné pour une période limitée, ce qui s'est produit, c'est que certaines Premières nations ont suggéré que l'usage donné et la fin très précise qui avaient motivé la cession assujettie à des conditions voulaient dire que la Première nation conservait un intérêt à long terme. Elles ont tenté de taxer les terres, mais les tribunaux ont jugé qu'étant donné la nature de la cession à titre absolu ou assujettie à des conditions, il n'était pas clair que les terres faisaient toujours partie de la réserve et qu'elles ne pouvaient donc pas être taxées.
    Les modifications apportées à la Loi sur les Indiens en 1988 ont précisé deux choses. Elles ont rendu très clair le fait que les Premières nations peuvent prendre une mesure moindre: elles peuvent désigner des terres sans les céder totalement. La désignation permet aux Premières nations de conserver un intérêt suffisant dans les terres, notamment pour en permettre la taxation. C'était là l'avantage principal des modifications de Kamloops de 1988.
    Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, le projet de loi C-45 cible les dispositions visant la désignation — que nous gérons maintenant depuis environ 20 ans — afin de simplifier et d'accélérer le processus de désignation. Les modifications sont ponctuelles. Elles ne touchent pas les dispositions qui portent sur la cession à titre absolu.
    Les modifications concernent donc uniquement la désignation. La cession n'est pas modifiée par le projet de loi C-45.
    C'est exact.
    Merci.
    Maintenant que ce détail est clair, pouvez-vous me dire quels défis le processus actuel de désignation pose aux gestionnaires des terres des Premières nations qui font affaire avec des investisseurs privés potentiels? Des exemples seraient très utiles.
    D'un côté, les dispositions actuelles qui portent sur la désignation sont utiles, car elles ont permis de donner des baux à long terme et de taxer les droits de tenure à bail. De l'autre, l'expérience a montré qu'elles posent problème, surtout sur le plan des délais causés par le fait qu'il faut souvent que la bande tienne deux votes pour faire en sorte que la désignation soit valable. En plus, il faut ensuite suivre le processus fédéral jusqu'à l'obtention d'une décision par le gouverneur en conseil.
    Je pense que des témoins des Premières nations vous parleront plus tard aujourd'hui des délais, mais pour de nombreuses bandes, le long processus de désignation prend un total d'environ deux à quatre ans. En fait, dans un cas, il a fallu huit ans pour obtenir la désignation. Cela ne suit tout simplement pas le rythme des affaires, ce qui pose problème sur le plan du développement économique. Les localités voisines peuvent prendre des décisions sur l'utilisation commerciale, industrielle ou résidentielle potentielle des terres beaucoup plus rapidement et saisir les occasions économiques. Voilà la première chose.
    La deuxième chose, c'est que les Premières nations qui suivent le processus actuel de désignation ne peuvent pas être tout à fait certaines du temps qu'il faudra pour procéder aux votes et pour obtenir l'approbation du gouverneur en conseil. Par conséquent, si un promoteur externe propose un projet que la Première nation voudrait poursuivre, elle ne peut pas garantir d'avance au promoteur que le processus prendra 6 ou 18 mois.
    Selon vous, les avantages sont donc que les modifications permettront d'accélérer la prise de décisions et d'éliminer des doutes pour les investisseurs éventuels par rapport aux délais relatifs à l'obtention de l'autorisation, ce qui, évidemment, est très important quand on tente de faire des affaires.
    Le fait de permettre au ministre d'approuver les désignations sans les renvoyer au gouverneur en conseil comporte-t-il d'autres avantages, à votre avis?
    Oui, j'en ajouterais un autre, comme je l'ai déjà dit en réponse à une question précédente: la réduction du coût prévu pour la cession. En ce moment, la tenue de deux votes engendre des frais d'administration.

  (1555)  

    Ainsi, en plus de ces deux faits, les coûts seront réduits. À votre avis, la modification accélérera le processus d'approbation des désignations de terres.
    À quel point le processus sera-t-il accéléré?
    Depuis les cinq dernières années, environ quatre mois s'écoulent, en moyenne, entre le premier et le second vote. Ainsi, si le besoin de tenir un deuxième vote est éliminé, le processus prendra en moyenne quatre mois de moins. Parfois, c'est encore plus long parce qu'il faut déposer une demande officielle, attendre que le deuxième vote soit autorisé, transmettre les renseignements aux membres de la bande, leur donner un certain temps pour les examiner, puis procéder au vote.
    Cela varie aussi, mais il faut également attendre des mois, en moyenne, avant de recevoir l'approbation du gouverneur en conseil après avoir obtenu celle du ministre. Au total, on parle donc probablement d'au moins six mois, et de beaucoup plus longtemps dans la plupart des cas.
    Merci, monsieur Richards.
    Madame Bennett, vous avez sept minutes.
    Comme vous le savez, notre comité étudie actuellement la gestion des terres. C'est étrange que, selon les deux lettres que nous avons reçues de la part de la Première nation d'Onion Lake et de la bande indienne de Penticton, certains trouvent que c'est une bonne idée, alors que d'autres sont très offusqués. Comme ma collègue l'a dit, nombre de personnes à qui nous avons parlé ont affirmé qu'il n'y avait eu aucune discussion préalable à ce sujet — aucune rencontre et aucune consultation —, et ces personnes jugent qu'on porte atteinte à leurs droits issus de traité en modifiant la Loi sur les Indiens sans les avoir consultées.
    En tant que directeur général de la Direction générale des opportunités pour les communautés, pouvez-vous nous expliquer comment il est possible qu'on souille la relation avec les Premières nations en imposant des décisions sans les consulter et sans même les en informer? Elles n'ont même pas eu droit à une séance d'information cette fois-ci, à ce qu'on fait habituellement passer pour une consultation. Elles ont reçu une lettre qui leur disait ce qui arrivait.
    Pour citer à nouveau la déclaration des Nations Unies concernant le « consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause », comment faites-vous pour entretenir les relations avec les Premières nations quand ce genre de choses se produit?

  (1600)  

    Je dirais deux choses.
    Premièrement, pour reprendre ma réponse précédente, sauf votre respect, je suis d'avis que les modifications proposées ne concernent pas les droits ancestraux ou issus de traités.
    Deuxièmement, la désignation n'est pas une obligation des Premières nations; c'est un outil dont elles peuvent se servir. Je dirais aux parlementaires que simplifier le processus tout en maintenant le rôle de la bande dans le vote sur les désignations n'est pas une atteinte grave à une disposition de la Loi sur les Indiens.
    Au-delà de cela, je laisse aux parlementaires le soin de décider si, pour les modifications proposées ou pour des modifications plus générales à la Loi sur les Indiens ou à d'autres mesures législatives, ils voudraient collaborer davantage avec les Premières nations avant de proposer des changements.
    Je le répète, la mesure législative ne concerne que la nature des dispositions en question, en réponse à une plainte sur les délais et le coût des désignations.
    Par rapport à votre affirmation selon laquelle les modifications ne portent pas atteinte aux droits issus de traités, n'est-ce pas aux Premières nations d'interpréter ce qu'elles considèrent comme le droit d'être consultées sur des questions qui les touchent?
    Cela va dans les deux sens. C'est le gouvernement qui a l'obligation juridique de consulter; c'est donc à lui de déterminer si les décisions ou les mesures législatives proposées risquent de porter atteinte aux droits ancestraux issus de traités et si elles sont justifiées.
    Je le répète, à mon avis, ce n'est pas le cas ici.
    Or, d'insérer une mesure aussi délicate que la Loi sur les Indiens dans un projet de loi omnibus... Avez-vous déjà vu cela?
    Je dois dire que non, mais je tiens aussi à souligner que ce n'est pas à moi qu'il revient de décider comment le gouvernement présente les mesures législatives. En tant que fonctionnaire, je n'ai pas à choisir entre le projet de loi C-45 et une autre mesure.
    Toutefois, en tant que directeur général des relations avec les communautés, pour que ces relations soient fructueuses, d'habitude, vous travaillez probablement en collaboration avec les Premières nations. Dans ce cas-ci, elles n'ont pas été consultées du tout — il n'y a pas eu une seule rencontre.
    C'est vrai qu'en tant que directeur général, je travaille beaucoup en collaboration avec les Premières nations, et obtenir leurs points de vue a beaucoup de mérite. C'est ce que nous faisons souvent, sinon la plupart du temps. Dans ce cas-ci, le choix est fondé sur le fait qu'il est question de changements mineurs à des dispositions discrétionnaires de la Loi sur les Indiens — il ne s'agit pas d'une obligation des Premières nations — dans le but d'éliminer des obstacles évidents à l'efficacité économique.
    Je comprends pourquoi vous soulevez la préoccupation et vous rapportez les propos de certaines Premières nations, mais je ne peux vous en dire plus.
    De ce point de vue, vous ne pouvez pas savoir ce qu'elles pensaient puisque vous ne leur avez pas demandé.
    Je vais répéter ce que j'ai dit plus tôt. Nous avons reçu des indications des Premières nations — en grand nombre — selon lesquelles les délais d'approbation des désignations étaient très problématiques. Je n'ai pas créé les modifications sans avoir une idée de l'avis des Premières nations.
    Recevoir la lettre d'Onion Lake par la suite ne peut pas vous faciliter la tâche en ce qui touche l'entretien de la relation.
    Je dirai simplement que certaines Premières nations ont affirmé qu'elles appuient les modifications parce qu'elles répondent aux préoccupations concernant les délais du processus de désignation.
    Je le répète, c'est une disposition discrétionnaire. Ce n'est pas une obligation des Premières nations.
    Croyez-vous que le gouvernement est obligé de consulter les Premières nations sur les questions qui les concernent?
    M. Andrew Beynon: Je ne sais pas si...
    Madame Bennett, nous devons faire attention aux questions que nous posons aux témoins quand ils sont fonctionnaires. Évidemment, nous voulons veiller à respecter leur compétence et leurs responsabilités.

  (1605)  

    La possibilité de donner des conseils sans crainte, oui, et la confidentialité.
    D'accord, cela va.
    Merci.
    Monsieur Wilks, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de leur présence.
    Vous avez parlé, dans votre déclaration, d'éliminer l'approbation par le gouverneur en conseil et de permettre au ministre d'approuver les désignations. Pouvez-vous en dire plus sur les possibilités qui découleront de la rapidité du processus pour les Premières nations sur le plan du développement économique? Aussi, le fait que le ministre approuvera les désignations à la place du gouverneur en conseil comporte-t-il des désavantages pour les Premières nations?
    Je vais répondre d'abord à la deuxième partie de votre question.
    Actuellement, la désignation est approuvée à l'échelle fédérale par le gouverneur en conseil. La modification proposée vise simplement à faire en sorte que ce soit le ministre qui donne l'approbation à l'échelle fédérale. Franchement, je pense que c'est un détail interne qui concerne le gouvernement fédéral.
    Pour répondre précisément à votre question, je ne vois aucun désavantage pour les Premières nations, pour les entreprises ou pour les membres individuels des Premières nations dans le changement du gouverneur en conseil au ministre.
    Le processus de vote actuel me semble voué à l'échec, dans certains cas. Il est double. On semble obliger les Premières nations à employer une méthode qui n'est utilisée nulle part ailleurs.
    Pouvez-vous nous parler de la majorité double, par opposition à la majorité simple qui est demandée presque partout ailleurs?
    Le système actuel, prescrit par la loi et les règlements, est très inhabituel. Il consiste à procéder à un premier vote à seuil élevé et, à la discrétion du conseil, à un deuxième vote à seuil moins élevé. Comme je l’ai dit plus tôt, en pratique et selon ce que nous avons appris, on a souvent tendance à participer uniquement au vote à seuil moins élevé.
    Je ne peux pas le confirmer, et je ne peux pas non plus parler au nom des membres des Premières nations, mais la plupart d'entre eux savent qu’un second vote est probable. C’est pourquoi ils n’ont pas beaucoup d’intérêt à se présenter pour le premier vote.
    Convenez-vous avec moi qu’il est difficile d’obtenir la majorité de la majorité, si l’on prend pour acquis que celle-ci est de 50 p. 100 plus un dans chaque cas?
    En effet, c’est difficile à obtenir lors du premier vote.
    Pour répondre à la première partie de votre question, l’obtention d’une majorité simple — c’est-à-dire exprimant la volonté de ceux qui votent —, comme le propose ce projet de loi, est pratique courante. C’est la pratique employée, notamment, pour choisir les chefs dans les communautés des Premières nations.
    J’aimerais ajouter une chose.
    Une partie de votre question portait sur la comparaison de cette pratique avec celles employées dans les autres types de collectivités. L'obligation de tenir un vote diffère de ce qui se fait dans la plupart des collectivités lorsqu’il est question de l’utilisation des terres. Par exemple, dans le cadre du processus de désignation, de nombreuses municipalités où un référendum n'est pas nécessaire modifient simplement le zonage des terres concernées. Il n’y a pas de référendum sur la question.
    Étant donné le caractère unique des terres de réserves, l’obligation de tenir un référendum communautaire a été imposée. La tenue d’un vote à seuil très élevé distingue davantage cette pratique de celle employée dans les autres collectivités. La simplification du processus de vote, soit l’obtention d’une majorité simple, rapproche cette pratique de ce qui se fait ailleurs, même si ce n’est pas la même chose.

  (1610)  

    À mon avis, ce serait un processus plus équitable.
    Monsieur le président, s’il me reste du temps, j’aimerais le partager avec M Clarke.
    Je terminerai en disant que, selon moi, les modifications proposées seraient avantageuses pour la majorité des Premières nations, notamment en matière de développement économique.
    J’ignore ce qu’en pense l’opposition, mais je crois que le statu quo n’est pas acceptable. Le système actuel n’est tout simplement pas efficace. Êtes-vous d’accord avec moi?
    Oui, j’aurais tendance à être d’accord avec vous sur ces deux points: la difficulté à obtenir le seuil élevé exigé lors du premier vote et les retards associés à la tenue d’un second vote, puis les retards liés au renvoi du dossier au plus haut niveau d'acceptation, comme le gouverneur en conseil.
    Les modifications proposées tiennent compte du fait qu’il doit y avoir un vote au sein de la communauté des Premières nations concernée et qu’il faut également obtenir l’approbation du gouvernement fédéral. Elles ne font que simplifier les choses en limitant les coûts liés au processus et en accélérant les démarches.
    S’il me reste du temps, j’aimerais le partager avec M. Clarke.
    Il ne vous reste que 30 secondes, ce qui ne vous sera probablement pas suffisant.
    Nous remercions les témoins d’être venus aujourd’hui. Nous vous sommes reconnaissants pour vos témoignages et vos réponses à nos questions. Nous avons un autre groupe de témoins à entendre, alors nous allons l'accueillir.
    Merci beaucoup. Mesdames et messieurs les membres du comité, nous allons suspendre les travaux le plus brièvement possible pour permettre au prochain groupe de témoins de s’installer. Nous voulons avoir suffisamment de temps pour leur permettre de répondre à nos questions.
    Dans le prochain groupe, nous aurons des représentants de l’Assemblée des Premières Nations, de la Federation of Saskatchewan Indian Nations, de la Commission de la fiscalité des Premières nations, du Conseil national de développement économique des Autochtones et de l’Association nationale des gestionnaires des terres autochtones.
    Je demanderais donc à ces représentants de bien vouloir s’approcher. Merci. Nous allons faire ça rapidement.
    Nous allons maintenant suspendre les travaux.

  (1610)  


  (1615)  

    Nous sommes prêts à reprendre les travaux.
    Accueillons maintenant notre prochain groupe de témoins. D'abord, Kathleen Lickers et Simon Bird, de l’Assemblée des Premières Nations.
    M. Jules, de la Commission de la fiscalité des Premières nations. Merci d’avoir accepté notre invitation. Ce n’est pas votre premier témoignage chez nous.
    Chef Sharon Stinson Henry, du Conseil national de développement économique des Autochtones, une autre habituée. Merci d’être venue.
    Finalement, Wanda McGonigle et Mme Irons, de l’Association nationale des gestionnaires des terres autochtones.
    Merci à tous d’être ici.
    Nous allons procéder dans l’ordre de l’avis de convocation et commencer par l’Assemblée des Premières Nations. Madame Lickers, vous pourriez nous faire votre exposé.
    Nous entendrons tous les témoins, après quoi nous passerons aux questions.
    Mesdames et messieurs les membres du comité, bonjour et merci de nous avoir invités à témoigner. Je tenterai d’être brève afin de laisser le temps à mes collègues de s’exprimer à leur tour.
    Je suis avocate-conseil externe auprès de l’Assemblée des Premières Nations pour toutes les questions touchant les ajouts aux réserves et la réforme de ce processus, ainsi que la réforme des revendications particulières.
    Je viens vous transmettre le point de vue de l’assemblée sur les modifications proposées, point de vue tempéré par le processus utilisé pour proposer ces modifications. Mais, permettez-moi d’abord de parler des modifications elles-mêmes.
    Commençons par les modifications à la Loi sur les Indiens. Nous avons lu le témoignage qu'a livré le ministre devant le comité sénatorial pour présenter le projet de loi et les modifications proposées à la section 8 visant à simplifier le processus de désignation. Ce processus long, coûteux et parfois complexe ne concerne pas la cession, mais bien la location de terres. Proposé en 1988, ce processus est communément appelé la modification Kamloops en l’honneur de la Première nation ayant exercé des pressions pour que ces changements soient apportés. Il permet aux non-membres de louer des terres.
    Les modifications proposant de faire la distinction entre « désignation » et « cession » entraîneraient deux changements. Premièrement, elles modifieraient le seuil du vote prescrit actuellement par la loi. Nos collègues du ministère ont déjà expliqué ce système à deux paliers: un premier vote avec un seuil de la majorité de la majorité et, si cet objectif n'est pas atteint, un second vote. Selon toute vraisemblance, ce processus complexe, comme je l’ai souligné plus tôt, serait plus efficace et plus économique si l'on en retirait la « désignation ».
    Les autres modifications beaucoup plus techniques proposées à la section 8 du projet de loi C-45 concernent la recommandation soumise au ministre après la tenue du vote.
    En vertu de la Loi sur les Indiens, le vote doit respecter les critères prescrits par règlement en application de la loi. Selon ces dispositions réglementaires, un préposé aux élections doit être nommé. Ses responsabilités y sont expliquées en détail; il doit notamment envoyer un avis et superviser le processus référendaire. Une fois les résultats du vote connus, le préposé et un représentant de la Première nation concernée doivent signer une déclaration sur la validité du vote. Selon la modification proposée, à la suite de ce processus, la communauté devra recommander au ministre d’accepter le résultat du vote.
    Lors de son témoignage devant le comité sénatorial le 7 novembre dernier, notre collègue, M. Kris Johnson, a expliqué que cette modification visait à introduire une mesure palliative permettant à la communauté d’informer le ministre qu’elle n’est pas prête à recommander la proposition de désignation.
    Ce qu’il y a d’intéressant dans tout cela, et je ne prétends pas que cette modification repose entièrement sur ce fait, c’est qu’aucune modification n’a été proposée au règlement lui-même. Donc, la nomination d’un préposé aux élections demeure obligatoire.

  (1620)  

    D’ailleurs, les dispositions réglementaires concernant le référendum permettent à tout membre de la communauté désirant en contester le résultat de demander la tenue d’un examen dans les sept jours suivant leur publication. La modification proposée dans ce projet de loi ne touche en rien ce processus, mais le ministre peut toujours choisir de rejeter la proposition de désignation, même dans le cas d’une majorité.
    Le deuxième changement, lui aussi d'ordre technique, qu’entraînera cette modification concerne le remplacement de l’acceptation de la désignation par le gouverneur en conseil par l’adoption d’un arrêté ministériel. Nous connaissons déjà cet outil, puisqu’il est utilisé dans le cadre de désignations précédant la création d’une réserve en vertu des lois sur la mise en oeuvre de mesures concernant le règlement de revendications que l’on retrouve en Alberta, en Saskatchewan et au Manitoba. Ces lois ont été adoptées uniquement pour régler les nombreuses revendications en suspens relatives aux droits fonciers issus d’un traité qu’il y avait dans ces provinces en 2002.
    Le vérificateur général du Canada a examiné de nombreux éléments de ces conventions de règlement, mais l’utilisation du terme désignation renvoie aux procédures de désignation prescrites dans l’Acte d’Union. Par conséquent, cette loi sera tout aussi touchée par les modifications proposées dans le projet de loi C-45.
    L’important dans tout cela, et cela m’amène à mes commentaires sur le processus…

  (1625)  

    Madame Lickers, votre temps est écoulé, mais je veux vous permettre de faire valoir votre point de vue. Je vous informe, toutefois, que vous avez dépassé votre temps de parole…
    Je suis désolée. Et moi qui ai dit vouloir être brève.
    Je terminerai donc en disant ceci: le processus utilisé pour proposer ces modifications menace les efforts de collaboration entre l’Assemblée des Premières nations et le ministère relativement à la réforme des ajouts aux terres. Les modifications proposées auront un impact sur ces lois sur la mise en oeuvre de mesures concernant le règlement de revendications auxquelles j’ai fait référence. Elles ont déjà été abordées dans le cadre des discussions entourant la réforme des ajouts aux terres.
    Alors que nous approchons du premier anniversaire du rassemblement entre les Premières nations et la Couronne, en janvier, nous nous interrogeons sur le cheminement que nous avions cru entreprendre avec le ministère et l’esprit de collaboration et de coopération que l’on nous avait promis.
    Cela met fin à mon exposé. Merci beaucoup.
    Merci énormément.
    Monsieur Jules, vous avez la parole.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité permanent, c'est un honneur pour moi d'avoir été à nouveau invité à comparaître devant vous.
    Vous entreprenez la tâche essentielle de légiférer dans le but de réintégrer les membres des Premières nations à l'économie, ce que j'approuve. Je crois que les modifications proposées à la procédure de désignation encourageront le développement économique de nos terres. J'ai passé les 38 dernières années à servir mon peuple à titre de conseiller, de chef et de dirigeant. Pendant cette période, j'ai appris que la collaboration des secteurs public et privé peut stimuler la croissance économique.
    Le public et le privé dépendent l'un de l'autre. En effet, les entreprises privées ne peuvent pas vendre leurs produits et services sans infrastructures, ni services fiables, ni cadre légal et administratif protégeant leurs propriétés.
    En revanche, sans les revenus fiscaux du privé, le secteur public ne peut ni bâtir des infrastructures, ni améliorer les services, ni mettre en place un système juridique entourant les droits de propriété et l'administration. La réussite économique passe donc par un soutien mutuel entre les secteurs public et privé.
    Malheureusement, ce n'est pas ainsi que les choses se passent pour les Premières nations. Notre secteur privé est extrêmement limité, mais il faudra d'abord changer la donne au sein du secteur public. J'espère que la courte histoire de ma collectivité vous permettra de comprendre pourquoi les modifications proposées sont à ce point essentielles.
    En tant que chef de ma collectivité, j'ai fait adopter en 1988 la toute première modification à la Loi sur les Indiens d'origine autochtone. Le projet de loi C-115, ou modification Kamloops, a permis d'ajouter le terme « désignation » à la Loi sur les Indiens au sujet des terres que nos collectivités veulent consacrer au développement économique. L'objectif était d'établir une distinction nette entre la désignation, qu'on appelait autrefois une « cession avec conditions » et qui signifie que la terre n'est pas véritablement cédée, et la cession, qui signifie que la réserve abandonne une partie de ses intérêts.
    Vous n'êtes pas sans savoir que, depuis l'entrée en vigueur de cette modification à la Loi sur les Indiens, un grand nombre de collectivités ont désigné des terres, ce qui a permis d'attirer des millions de dollars en investissement, de générer des millions de dollars en recettes foncières, en plus de contribuer à la création de milliers d'emplois.
    Nous avons toutefois découvert en 1993, alors que j'étais encore chef de ma collectivité, à quel point le processus de désignation peut être complexe. Un promoteur est venu frapper à notre porte pour louer plus de 400 acres de nos terres afin d'aménager un parcours de golf et une zone de villégiature. Le complexe devait s'appeler Sun Rivers. Une fois les travaux terminés, il devait rapporter des recettes fiscales de plusieurs millions de dollars à notre collectivité, en plus de permettre la création d'emplois et de logements pour nos membres. À l'époque, nous pensions qu'il faudrait deux ans pour finaliser la procédure de désignation et les dispositions de l'entente, pour améliorer les infrastructures, puis pour entreprendre la construction. Nous étions bien trop optimistes.
    Le problème, c'est que le site visé par la proposition de Sun Rivers était composé de terres de réserve selon la Loi sur les Indiens. Conformément à la procédure de désignation prévue par le ministère des Affaires autochtones, les terres devaient donc être désignées pour être données à bail. Le ministère doit alors évaluer le dossier pour confirmer l'absence de responsabilité du gouvernement. Malheureusement, il faut pour investir mettre en balance les risques et le rendement attendu.
    Le projet de Sun Rivers semblait très prometteur, mais il n'était pas à l'abri du risque, comme c'est le cas de tout investissement. Puisque le gouvernement fédéral n'était prêt à prendre aucun risque, il voulait définir assez rigoureusement le terme « usage » de la disposition sur la désignation. Le promoteur et nous avions besoin de plus de souplesse puisque l'objectif était de maximiser le rendement en fonction de notre tolérance à l'égard du risque. Ce différend a retardé la procédure de désignation et en a multiplié les coûts.
    De plus, cette différence fait porter une responsabilité bien plus lourde au promoteur que s'il s'agissait d'un projet normal hors réserve. En fait, celui-ci devait fournir des documents d'information à la collectivité et organiser des présentations pour exposer en détail les plans de son développement. Nous croyons qu'il est bien d'informer la collectivité et de planifier soigneusement, mais dans ce cas-ci, l'excès de zèle a coûté 200 000 $ de plus au promoteur que s'il s'agissait d'un projet hors réserve.
    Par ailleurs, Pêches et Océans s'est lui aussi mêlé du processus de désignation sans qu'on s'y attende. Le ministère avait examiné la proposition à partir de ses bureaux de Vancouver avant de déterminer qu'elle poserait un risque pour certaines frayères. C'était assez surprenant puisque la proposition visait une zone où l'on n'avait pas vu l'ombre d'un ruisseau depuis des centaines d'années, et encore moins d'un saumon. Ceux qui connaissent le secteur de Kamloops savent que ses précipitations annuelles en font une zone désertique.

  (1630)  

    Malheureusement, ces facteurs géographiques et climatiques ne sautent pas aux yeux si l'on examine un cliché aérien à partir de Vancouver. Cette intervention a elle aussi retardé inutilement la procédure de désignation. Nous avons heureusement réussi à convaincre nos membres du bien-fondé du projet, qui l'ont approuvé à 74 p. 100.
    Une fois l'étape de la désignation franchie, il nous restait trois choses à faire. Nous devions tout d'abord créer un système juridique et administratif permettant au promoteur et aux futurs résidents de faire confiance aux droits de propriété, ce qui aurait déjà été fait dans un contexte municipal.
    En deuxième lieu, nous devions conclure une entente de services avec la Ville de Kamloops et le promoteur pour veiller à ce que Sun Rivers bénéficie d'infrastructures et de services de qualité.
    Troisièmement, nous devions obtenir la collaboration du gouvernement fédéral pour que les transferts de baux se fassent au rythme des affaires plutôt qu'à celui du gouvernement.
    Le registre des terres indiennes n'est pas aussi efficace que le régime des titres Torrens, utilisé dans tout le reste du Canada. Compte tenu du fardeau supplémentaire que représente la procédure de désignation actuelle, la construction n'a pas débuté avant la fin de 1998, soit deux années entières plus tard que prévu. Le projet a coûté plus de 2 millions de dollars au promoteur et à notre collectivité.
    Notre histoire devrait vous permettre de mieux comprendre pourquoi la plupart des terres de réserve sont si peu développées. Autrement dit, il fallait à l'époque quatre à six fois plus de temps et cinq fois plus d'argent en moyenne pour réaliser un projet sur réserve comparativement à tout autre projet, et ce, en raison de la Loi sur les Indiens. Réduire ces coûts et réduire la pauvreté chez les Premières nations, c'est du pareil au même.
    J'ai une autre histoire, mais je vais m'arrêter ici puisque le temps file.
    Comme mon père l'a souvent répété, ce système dans lequel nous vivons depuis des générations nous permet de voter pour nos chefs et nos conseillers, mais pas pour les bureaucrates qui tiennent véritablement notre sort entre leurs mains.
    Les modifications proposées visent à simplifier la procédure de désignation et constituent un pas dans la bonne direction. À tout le moins, les modalités du vote entourant la désignation ne devraient pas différer de celles qui s'appliquent à toute autre instance gouvernementale canadienne, où la majorité suffit. Je suis donc en faveur des modifications à la Loi sur les Indiens proposées dans le projet de loi C-45.
    Merci, monsieur Jules.
    Nous allons maintenant écouter l'exposé du chef Sharon Stinson Henry.
    Aaniin kinaweya. Bonjour tout le monde.
    [Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]
    Je m'appelle Sharon Henry Stinson, et je suis chef de la Première nation des Chippewas de Rama, en Ontario. Je comparais aujourd'hui en tant que membre du Conseil national de développement économique des Autochtones. Je vous remercie de m'écouter.
    Comme vous le savez peut-être, le Conseil national de développement économique des Autochtones est un comité consultatif fédéral qui a vu le jour en 1990 dans le but de prodiguer des conseils stratégiques au gouvernement fédéral sur les politiques et les programmes ayant trait au développement économique des Autochtones. Le conseil réunit des dirigeants d'entreprises et des membres de Premières nations ainsi que de collectivités inuites et métisses de partout au Canada, qui prodiguent des conseils au gouvernement fédéral dans le but de favoriser la participation des hommes, des femmes et des collectivités autochtones à l'économie canadienne.
    Je suis heureux de vous transmettre de l'information qui pourrait vous aider dans votre étude des articles 208 et 209 de la section 8, partie 4, du projet de loi C-45, qui propose de modifier la Loi sur les Indiens pour changer les procédures de vote et d'approbation applicables aux propositions de désignation de terres.
    J'aimerais aussi vous dire ce que le conseil national pense des modifications, et les raisons pour lesquelles nous croyons qu'elles ne vont pas assez loin. En effet, les Premières nations devraient avoir la latitude nécessaire pour modifier la durée et l'usage des désignations de terres si les circonstances changent. Lors de notre dernière comparution devant le comité en mars dernier, nous avons souligné toute une gamme d'obstacles qui empêchent les réserves d'avoir une économie robuste. La plupart sont liés aux procédures de gestion des terres prévues par la Loi sur les Indiens, qui sont trop souvent coûteuses, complexes et extrêmement lentes, ce qui fait rater des occasions économiques aux collectivités.
    Cette année, le Conseil national de développement économique des Autochtones a mené trois études de cas sur des collectivités de Premières nations qui ont permis de recueillir des données solides sur leur réalité. Il s'agissait de la Première nation de Membertou, en Nouvelle-Écosse, de la Bande indienne d'Osoyoos, en Colombie-Britannique, et de ma Première nation de Rama. La réussite économique de ces trois Premières nations est relativement grande si l'on considère qu'elles sont régies par un système archaïque qui n'a pas été conçu pour tout l'éventail d'occasions économiques qui pourraient se présenter aujourd'hui au pays.
    Voici ce que nos études de cas ont révélé en ce qui touche les modifications proposées à la Loi sur les Indiens dont le comité est saisi. D'autres témoins ont déjà souligné certains de ces problèmes, mais je vais répéter.
    Pour commencer, les votes de désignation font perdre temps et argent aux Premières nations. Avant de procéder au vote, la collectivité doit consacrer beaucoup de temps à en informer tous ses membres, qu'ils habitent sur la réserve ou non, et c'est cher. Ceux-ci doivent avoir suffisamment d'information pour prendre une décision éclairée. La Première nation doit donc organiser des rencontres, créer du matériel d'information, puis tenir le vote.
    Par exemple, la Bande indienne d'Osoyoos a organisé un vote de désignation en 2008 au sujet du projet Senkulmen; la désignation permet à l'industrie légère d'utiliser le parc pendant 69 ans. La bande a dû consacrer 50 000 $ et près de cinq mois au vote.
    Plus tard, la bande a voulu saisir une occasion économique stimulante entourant la construction d'un centre correctionnel de 250 millions de dollars. Or, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada et le ministère de la Justice ont insisté pour qu'elle tienne un deuxième vote de désignation concernant les mêmes terres, et ce, pour changer la période de bail et permettre la construction d'un tel établissement. Le deuxième vote de désignation a coûté 20 000 $ de plus à la bande.
    Au total, Osoyoos a dû engager des dépenses de 150 000 $ pour respecter les exigences du gouvernement fédéral en matière de désignation et de bail.
    En deuxième lieu, les votes de désignation pourraient compromettre les activités économiques actuelles. Toute modification de l'usage et de la durée d'une désignation exige un nouveau vote des électeurs de la Première nation en question. Les collectivités n'ont pas la marge de manoeuvre nécessaire pour modifier la durée ou l'usage des terres désignées lorsque des occasions économiques se présentent ou se poursuivent après l'échéance originale.

  (1635)  

    Dans ma collectivité, par exemple, les terres du Casino Rama sont désignées pour une période donnée. À l'échéance de l'entente, la Loi sur les Indiens exige que nous tenions un autre référendum pour approuver la désignation subséquente des terres. Nous risquons ainsi de perdre des revenus nets de 30 millions de dollars.
    C'est inacceptable. Imaginez si le Canada devait tenir un référendum tous les 40 ans sur l'emplacement des édifices parlementaires. Imaginez en plus toutes les entreprises locales qui dépendent de cet emplacement, et dont l'avenir se jouerait lors du référendum. Une telle procédure perturbe la collectivité et l'économie. Si les terres où vous vous trouvez aujourd'hui devaient faire l'objet d'un nouveau référendum tous les 40 ans — et parfois même après 20 ans —, ce serait tout aussi inacceptable.
    Pour conclure, le Conseil national de développement économique des Autochtones appuie la direction générale du projet de loi C-45, aux conditions suivantes. D'une part, nous appuyons l'amendement proposé visant à ce qu'une simple majorité suffise dans le cadre du vote, comme il a été discuté. Toutefois, le conseil est d'avis que le projet de loi doit aller encore plus loin et supprimer la nécessité de tenir un deuxième vote lorsqu'il faut modifier le bail ou l'usage des terres.
    D'autre part, le conseil national appuie toute mesure qui simplifie la procédure de désignation, comme l'amendement proposé permettant au ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien d'approuver, à la place du gouverneur en conseil, la désignation de terres dès qu'il reçoit la résolution du conseil de bande. Toutefois, le conseil insiste sur le besoin de moderniser davantage le système de gestion des terres prescrit par la Loi sur les Indiens. Par exemple, la procédure de désignation devrait ressembler davantage à celle qu'une autorité municipale doit suivre pour destiner des zones à un usage particulier. D'autres l'ont dit plus tôt.
    En admettant qu'il existe une planification urbaine détaillée, il faudrait limiter le recours aux référendums coûteux et interminables pour prendre des décisions. Les Premières nations qui le souhaitent et qui en ont la capacité devraient avoir accès à des outils leur permettant de se libérer de l'engorgement bureaucratique attribuable au refus de prendre des risques du gouvernement fédéral.
    Personnellement, je recommande au comité d'envisager sérieusement d'éliminer le terme « cession » de la Loi sur les Indiens, et de le remplacer par « transfert ». L'utilisation de ce terme est inacceptable.
    D'autres témoins ont déjà parlé du vote. Il faut exiger une majorité simple aux Premières nations, comme c'est le cas pour toute autre collectivité. Bon sang, nous n'avons même pas le droit de demander l'adresse de nos électeurs pour leur faire parvenir l'information dont ils ont besoin afin de voter en toute connaissance de cause.
    Je pourrais continuer longtemps, mais je vais m'arrêter ici puisque le temps file.
    Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.
    Meegwetch. Je vous remercie.

  (1640)  

    Merci beaucoup, chef.
    Nous allons maintenant laisser Mme Irons prononcer sa déclaration préliminaire.
    J'aimerais tout d'abord faire honneur au territoire traditionnel du peuple algonquin. Je remercie le comité permanent de m'avoir invitée à m'adresser à lui aujourd'hui. C'est une belle occasion de faire valoir la nécessité d'accroître les normes professionnelles liées à la gestion des terres des Premières nations, et d'insister sur le fait qu'une bonne gestion des terres est nécessaire au maintien du développement économique.
     J'aimerais également préciser la position de notre association à l'égard du projet de loi C-45, notamment la section 8, qui propose des amendements aux articles 206 à 209, de même qu'à l'égard des amendements proposés à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale par le projet de loi C-38, que vient clarifier le projet de loi C-45. Nous partageons les préoccupations de l'Assemblée des Premières Nations en ce qui a trait à ces amendements.
    Je m'appelle Leona Irons et je suis la directrice exécutive de l'Association nationale des gestionnaires des terres autochtones. Je suis accompagnée aujourd'hui de Wanda McGonigle, directrice à l'ANGTA et présidente de l'Association ontarienne de la gestion des terres autochtones. Le président de notre conseil d'administration, Gino Clement, est désolé de ne pas pouvoir être présent aujourd'hui.
    J'aimerais vous présenter notre organisation pour valider notre témoignage devant le comité. L'Association nationale de la gestion des terres autochtones a été fondée officiellement en 2000 à titre d'organisme non politique sans but lucratif. L'ANGTA est une organisation technique dirigée par des professionnels de la gestion des terres des Premières nations, et elle est financée par Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. Elle compte à son bord huit associations régionales, qui représentent 127 collectivités inuites et des Premières nations, soit dans les régions de l'Atlantique, du Québec et du Labrador, de l'Ontario, du Manitoba, de la Saskatchewan, de l'Alberta, du Nunavut et de la Colombie-Britannique. Notre organisation compte également quelques membres associés.
    Nos membres fonctionnent selon différents régimes de gestion des terres. Notre programme de gestion des terres de réserve et de l'environnement est assujetti à la Loi sur les Indiens. Certaines de nos terres sont régies en autonomie gouvernementale conformément à la Loi sur la gestion des terres des Premières nations, et d'autres membres ont le plein contrôle de leurs terres dans le cadre de leur régime d'autonomie gouvernementale. Il est intéressant de noter que nos membres administrent plus de un million d'hectares de terres communautaires. Si on ajoute à cela les revendications relatives aux droits fonciers découlant des traités, et d'autres revendications particulières, les estimations augmentent considérablement.
    Nous avons trois mandats fondamentaux, c'est-à-dire que nous offrons à nos membres des occasions de perfectionnement professionnel et de réseautage, de même que du soutien technique. Cela permettra d'accroître les normes professionnelles afin de répondre aux besoins actuels et futurs, de façon à ce que les gestionnaires de terres puissent faire leur travail de façon efficace et efficiente.
    La gestion des terres autochtones pose de nombreux défis. Nous en avons relevé au moins trois importants. Comme la gestion des terres jette les bases d'un développement économique durable, nous avons besoin d'une plus grande capacité professionnelle, de plus d'outils et de systèmes de gestion, et de ressources suffisantes pour continuer à soutenir nos programmes de gestion des terres.
    La gestion des terres de réserve est unique en soi. Rien ne s'y compare vraiment. La définition de « terres de réserve » complique à elle seule la question de la gestion des terres.
    Au cours des 12 dernières années, nous avons fait beaucoup de progrès en ce qui concerne le rehaussement des normes professionnelles et la promotion et le renforcement des capacités en matière de gestion des terres. Pour ce qui est des défis liés précisément à la désignation des terres de réserve, il est à noter que ce processus est impératif et primordial au maintien des terres de réserve destinées au développement économique ou à des fins non traditionnelles pendant de longues périodes. Le processus de désignation comporte normalement plusieurs étapes. Il s'échelonne sur deux ans environ, et parfois plus, comme vous l'avez entendu. Vu la complexité de ce processus de désignation à plusieurs étapes, bien des collectivités des Premières nations ont dû renoncer à des possibilités lucratives de développement économique. Étant donné qu'il faut beaucoup de temps et de ressources pour obtenir une telle désignation, on en conclut que le processus n'est pas favorable à un développement économique rapide.
    L'étape la plus difficile du processus de désignation est de se conformer aux exigences entourant le vote référendaire prévu par la Loi sur les Indiens et le règlement connexe. Le but du vote référendaire est de déterminer si une majorité d'électeurs des Premières nations consent en toute connaissance de cause à la désignation proposée et à la transaction proposée ou à l'utilisation prévue. Il peut s'avérer extrêmement difficile d'obtenir la majorité des votes, et parfois impossible, particulièrement lorsqu'il y a une importante population à l'intérieur et à l'extérieur de la réserve.

  (1645)  

    Le processus référendaire comporte plusieurs procédures et impose un échéancier explicite. Et il va sans dire que la tenue d'un référendum coûte cher. Si les procédures référendaires ne sont pas suivies à la lettre, les résultats du vote pourraient être contestés et invalidés.
    Le processus d'approbation administratif peut aussi entraîner d'importants délais. Trop d'entités gouvernementales sont tenues d'examiner et d'approuver la désignation avant d'en arriver à un décret.
    Notre organisation est très fière de dire qu'elle a réussi à régler de nombreux problèmes liés à la désignation des terres de réserve. Comme je l'indiquais, rien ne se compare à la gestion des terres en vertu de la Loi sur les Indiens, et cela suppose de nombreux défis.
    Pour aider nos membres à gérer les exigences de la loi à l'égard du développement économique, nous avons conçu, en partenariat avec Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, une trousse d'outils sur la désignation des terres de réserve. Cette trousse d'outils pratiques était attendue depuis longtemps, et nous espérons pouvoir en élaborer d'autres semblables pour différents aspects de la gestion des terres. Elle est composée d'un ensemble de documents papier, de feuilles de travail, de graphiques, de listes de vérification et d'études de cas regroupés sous différents modules, tous conçus à l'intention des Premières nations et de leurs membres professionnels associés. Il s'agit d'un guide uniforme pour la planification et la préparation judicieuses des propositions de désignation à l'échelle du Canada. Nous avons très hâte à janvier 2013, car nous allons offrir une formation pilote sur l'utilisation de la trousse, et nous avons l'intention de continuer à offrir une formation officielle plus tard.
    En conclusion, en tant que gestionnaires de terres, notre responsabilité première est d'assurer une gestion des terres de qualité afin de favoriser la croissance et la prospérité à long terme de nos collectivités. Nous avons aussi la responsabilité d'offrir un encadrement et des conseils de nature technique pour faire avancer la résolution des problèmes entourant la gestion des terres des Premières nations. L'Association nationale des gestionnaires de terres autochtones reconnaît donc que les amendements proposés à la loi, tels qu'énoncés à la section 8, articles 206 à 209 du projet de loi C-45, pourraient améliorer le processus de désignation.
    Je vais vous laisser un exemplaire de la trousse d'outils pour vous aider dans votre étude. Le chapitre 4 parle du processus de vote référendaire. D'après les nombreuses étapes énumérées, cela peut paraître compliqué, et ça l'est.

  (1650)  

    Merci beaucoup.
    Une dernière chose: j'ai une présentation PowerPoint qui énonce les autres exigences associées à la désignation.
    Encore une fois, merci de m'avoir permis de m'adresser à vous. Nous avons hâte de connaître les résultats de votre étude.
    Merci, madame Irons. Merci pour cette présentation.
    Nous allons maintenant céder la parole aux membres du comité. Nous allons commencer par M. Genest-Jourdain, pour sept minutes.

[Français]

    Mesdames, messieurs, bonne fin de journée.

[Traduction]

    Je vais poser mes questions en français, alors je vous invite à mettre les écouteurs.
    Je crois que la traduction est à la chaîne 1. Est-ce que notre personnel pourrait s'assurer que tout le monde a des écouteurs? Je pense que M. Bird n'en a pas. Merci.
    Monsieur Genest-Jourdain, nous vous écoutons... Oui, monsieur Wilks?
    Monsieur le président, pourrions-nous permettre à M. Bird de changer de place pour avoir un écouteur. Il n'y en a pas à son siège.
    Bien sûr. C'est peut-être la meilleure façon de régler le problème. Je pense que ça y est.
    Merci beaucoup. Je pense que nous sommes prêts.

[Français]

    Maintenant que ça fonctionne, nous reprenons.
    À titre d'introduction, je vais laisser la parole au vice-chef Bird.
    Vous n'avez pas eu la chance de vous exprimer, et on aimerait bien entendre vos commentaires sur les tergiversations et les discussions qui ont eu lieu aujourd'hui, de même que sur les initiatives législatives mises en avant.
    La parole est à vous, monsieur Bird.

[Traduction]

    Il faut respecter le temps alloué à l'intervention de M. Genest-Jourdain, soit sept minutes. Vous êtes son témoin, alors il vous le dira quand ce sera terminé.
    Très bien. Merci beaucoup.
    Ce que je vais vous dire est une évidence. Je suis le vice-chef Bird, membre de la nation des Cris de Peter Ballantyne, élu par 74 Premières nations de la Saskatchewan représentant les traités 4, 5, 6, 7 et 8. Je veux préciser que même si j'ai le titre de vice-chef de la Federation of Saskatchewan Indian Nations, je ne suis pas du tout ici pour représenter toutes les Premières nations de la Saskatchewan, et encore moins toutes celles du Canada. Je veux simplement rappeler une évidence — il ne s'agit pas d'une consultation, mais on m'a donné l'autorisation de parler au nom de la bande d'Onion Lake.
    J'affirmerai d'abord que nous voulons que les articles 206 et 209 soient retirés du projet de loi omnibus et que soit adopté un processus qui respecte les liens que nous avons tissés, afin que nous puissions discuter adéquatement des changements proposés. Si vous me le permettez, j'aimerais lire la déclaration que m'a remise le chef Wallace Fox de la Première nation d'Onion Lake. Je peux vous dire une chose, je suis heureux d'entendre les témoignages de ceux qui appuient les Premières nations, particulièrement de ceux de ce côté-ci de la table.
    Je n'ai jamais été aussi gêné de ma vie. C'est gênant de voir que trois personnes du gouvernement décident de l'avenir de ma Première nation, signataire d'un traité. Mes aînés et nos anciens chefs nous parlent des pensionnats et des permis indiens, nécessaires pour quitter la réserve. C'est très choquant de voir qu'on revient à cela, que le gouvernement veut décider à la place des Premières nations et leur imposer de faire ceci ou cela.
    Comme je le disais, je suis issu du milieu de l'enseignement. J'ai moi-même été enseignant et je suis porte-parole pour la nation des Cris, et je vis encore de la terre quand il le faut. Pour moi, c'est être libre de choisir mon mode de vie. Je n'ai aucun problème avec les gens assis à cette table qui veulent... Peu importe la façon dont ils veulent faire des affaires avec les terres, cela les regarde. Je ne vais pas dire à la Première nation voisine comment faire les choses. Qu'est-ce qui vous fait croire que vous pouvez venir chez nous et nous dire quoi faire?
    Je vais m'en tenir à cela pour l'instant.

  (1655)  

    Avez-vous une autre question?

[Français]

    Oui, bien entendu.
     Combien de minutes me reste-t-il, monsieur le président?

[Traduction]

    Vous avez trois minutes et demie.

[Français]

    Je vais poser une question aux témoins et ils pourront choisir la personne qui y répondra.
    Lors de leurs interventions, on a entendu ma collègue et ma consoeur parler de consultations. Je vais donc aborder un sujet fort similaire, c'est-à-dire la relation fiduciaire qui doit exister entre la Couronne et les nations aborigènes un peu partout au pays.
    J'aborde bien entendu cette notion de relation fiduciaire parce qu'on parle de questions qui sont identitaires pour les Premières Nations. On parle donc d'aliénations possibles, de locations possibles, de territoires et de réserves. Il faut comprendre qu'avec la hausse démographique dans nos communautés, ce sont des questions identitaires puisque l'on doit visualiser l'occupation du territoire sur des superficies bien limitées.
    À la suite du jugement de la Cour suprême relativement à la Nation haïda, l'obligation fiduciaire qui incombe à la Couronne implique le fait qu'elle doit s'assurer que l'intérêt des Premières Nations prime lorsqu'elle prend des décisions unilatérales. Lorsqu'on parle d'intérêts des Premières Nations, cela signifie qu'elles doivent cerner les tenants et aboutissants d'une législation donnée, d'une initiative donnée. Lorsqu'on dit que les Premières Nations votent très peu et qu'il y a des problèmes liés au vote — c'est la raison pour laquelle on avait prévu deux tours de scrutin —, il y a fort probablement à parier que c'est à cause de l'absence d'information que les gens ne se sont pas mobilisés.
    Selon vous, quelle est l'obligation exacte de la Couronne pour ce qui est de veiller à ce que les gens des communautés soient bien informés avant de pouvoir se prononcer sur une question donnée et avant même de pouvoir envisager de voter une ou deux fois sur une question identitaire? J'aimerais vous entendre et sentez-vous libres de répondre.

[Traduction]

    Il reste une minute et demie, si un des témoins veut répondre à la question de M. Genest-Jourdain.
    Allez-y, monsieur Jules.
    Pour ce qui est des désignations, j'ai à traiter avec les problèmes que cela comporte depuis 1974 ou 1975. De notre point de vue, les collectivités qui ont eu affaire avec le développement des terres ont toujours considéré les formalités entourant les relations fiduciaires comme un processus fastidieux. Parce que le gouvernement fédéral est propriétaire de terres de réserve, chaque fois qu'il est question de développement, il faut traiter avec cette notion de fiduciaire, qui découle de l'arrêt Guerin, à Musqueam. Je pense que c'est un processus désuet qui, comme l'indiquait le chef Bird, ne reconnaît pas que les propriétaires légitimes de ces terres devraient être au bout du compte les Premières nations. Elles devraient pouvoir décider elles-mêmes de leur avenir.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Seeback pour sept minutes.
    Chef Jules, j'aurais quelques questions à vous poser sur certains des points que vous avez soulevés dans votre déclaration préliminaire, et sur certaines des choses dont il a été question dans la séance d'aujourd'hui.
    Je vous considère comme l'un des piliers de l'établissement d'économies prospères dans les réserves, quand je pense aux obstacles que vous avez abattus à l'égard des terres, en particulier en ce qui a trait à l'amendement de Kamloops.
    Comment entrevoyez-vous les amendements proposés? Pensez-vous qu'ils sont complémentaires à l'amendement de Kamloops, un peu comme le prolongement de cette mesure? Comment voyez-vous cela?

  (1700)  

    En 1988, nous avons été confrontés à une décision judiciaire qui avait déterminé que les terres cédées conditionnellement ne nous appartenaient plus. Le seul moyen de changer cela était d'amender la Loi sur les Indiens. Je ne me souviens plus qui a abordé la question, mais un des anciens chefs de Kamloops a dit: « Céder? Je ne céderai jamais. J'ai une 30-30 à la maison. » Il fallait donc trouver un terme qui nous permettrait d'assurer le développement de nos terres, sans parler de « cession » ni de « terres cédées conditionnellement », alors j'ai pensé à « désignation ».
    Les amendements proposés constituent en fait un pas de plus vers la simplification du développement économique pour les Premières nations. Plus il y aura d'étapes à franchir et plus le processus sera fastidieux, moins il y aura de Premières nations qui vont prendre part à l'économie nationale.
    Oui, et le comité en a discuté. Je sais que vous le savez. La Loi sur la gestion des terres des Premières nations et la loi sur le droit de propriété des Premières nations, à laquelle vous avez fait référence, sont des mesures qui visent à établir des économies prospères dans les réserves.
    Je crois que vous avez dit que les changements apportés en 1988 avaient créé des milliers d'emplois et rapporté des millions de dollars en revenus. Pensez-vous que simplifier le processus comme le prévoient les amendements proposés aura le même effet?
    Il ne s'agit pas d'une solution miracle en soi, mais j'appuie toute mesure qui permet d'alléger le processus fastidieux auquel doivent se soumettre les Premières nations qui veulent se lancer dans le développement économique sur leurs terres. En fin de compte, nous voulons que les Premières nations participent pleinement à l'économie. Pour cela, nous devons être en mesure d'établir nos propres institutions. Plus nous allons devoir dépendre de quelqu'un d'autre, quelqu'un qui n'appartient pas à notre collectivité, pour décider de ce qui est bon ou pas pour nous, plus il sera difficile de se sortir du bourbier de la pauvreté.
    Mais comme vous dites, cela va accélérer le processus. Ne croyez-vous pas que...
    Absolument.
    Je pense que cela va permettre de stimuler davantage le développement économique...
    Qu'on parle de revendications relatives aux droits fonciers découlant des traités ou encore de désignations, il sera plus facile pour les Premières nations d'envisager de franchir les étapes nécessaires pour promouvoir le développement économique. Cela se traduira par une plus grande autonomie des collectivités des Premières nations et plus de possibilités d'emploi et, bien sûr, par de plus grands revenus fiscaux pour les administrations communautaires.
    J'entends souvent dire qu'il faut suivre le rythme des affaires. Je ne suis pas tout à fait sûr de ce que ça signifie, mais nous en parlons beaucoup. Pensez-vous que ce concept est utile aussi? Un représentant a dit que le processus pourrait durer six mois de moins, tandis qu'un autre a indiqué qu'il pourrait être réduit encore davantage. À votre avis, suivons-nous presque le rythme des affaires concernant la désignation des terres?
    Mon père a inventé cette expression en 1968 à propos de l'élection de notre propre chef de conseil pour nous diriger, au lieu de bureaucrates à Ottawa. Il a dit qu'il fallait de quatre à six ans pour louer des terres et que les locataires potentiels n'attendaient pas si longtemps.
    Il faut être en mesure de suivre le rythme des affaires, de prendre des décisions au niveau local.
    Le projet de loi facilite le processus.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Environ deux minutes et 15 secondes.
    J'ai terminé.
    Madame Bennett, pour sept minutes.
    En tant que parlementaires, nous avons beaucoup de mal à ne pas condamner les mauvais comportements. Nous pensons que les projets de loi omnibus sont condamnables, mais c'est intolérable de ne pas consulter les Premières nations sur les projets de loi qui les concernent.
    Comme vous l'avez souligné, la Rencontre de la Couronne et des Premières nations se tenait il y a moins d'un an. Pourtant, une panoplie de mesures législatives tous azimuts sont présentées, et il n'y a eu presque aucune consultation.
    Nous avons besoin de votre aide pour que tous les Canadiens comprennent que c'est tout à fait inacceptable. Même si le projet de loi proposait de tripler le budget en éducation, en santé ou autre, nous estimons à titre de parlementaires que le gouvernement doit consulter les Premières nations. Nous devons voter contre tout ce sur quoi les Premières nations n'ont pas été consultées de manière appropriée.
    Ma question s'adresse sans doute plus aux témoins politiques qu'aux représentants d'associations. Monsieur le vice-chef ou madame la conseillère juridique, est-ce une question que les Canadiens doivent comprendre, selon vous?

  (1705)  

    Merci beaucoup de votre question.
    J'ai précisé que je viens du milieu de l'éducation. Je dirais aux non-Autochtones et aux Canadiens en général que nos traités ont été conclus par les deux nations, qui ont toutes deux des obligations. Une d'entre elles a accepté de partager la terre et de maintenir la paix. Les liens découlant des traités sont sacrés, parce que nous croyons fermement que les deux nations les ont tissés et entretenus, avec l'accord de notre Créateur.
    Il y a beaucoup de frustration dans les Premières nations. Si vous voulez qu'elles respectent leurs obligations liées à leurs droits et aux traités, c'est très important que le gouvernement du Canada ne prenne pas de décisions unilatérales. Les deux nations ont signé les traités. À titre de vice-chef de la FSIN, je n'ai même pas le pouvoir de parler au nom des Premières nations que je représente. Ce sont elles qui me disent ce sur quoi je dois mettre l'accent.
    Je crois fermement qu'il ne faut pas imposer des projets de loi omnibus concernant les droits des Premières nations. Une grande partie des membres des Premières nations peuvent comprendre que les deux nations... Ils ont le leadership; il faut simplement les consulter.
    Voici un extrait de la lettre du chef Fox:
Le 18 octobre 2012, le gouvernement du Canada a déposé un autre projet de loi omnibus, le C-45. Ce projet de loi contient des modifications à la Loi sur les Indiens qui facilitent la cession de terres de réserve. Dans le contexte actuel, une double majorité d'électeurs doivent accepter la cession des terres, mais une majorité simple suffirait selon les modifications. La cession serait légale si 30 ou 16 personnes l'appuyaient. Le ministre prendrait acte du vote de la majorité et demanderait un décret au Cabinet pour que les terres ne soient plus visées par le paragraphe 91(24).
    Merci.
    Allez-y, madame Lickers.
    Madame Bennett, je tiens à répondre à votre préoccupation, que je partage. Les politiciens de l'organisation pourront en parler à une autre occasion, mais permettez-moi de parler des actes condamnables.
    Ce qui est difficile, c'est que même si les modifications sont en grande partie positives sur plan formel, le rejet en bloc des mesures orienterait notre organisation...
    Le processus de désignation actuel est complexe et coûteux. Les modifications qui réduisent les mesures sont en grande partie positives. Mais dans le contexte plus global de collaboration établi au début de l'année, nous ne pouvons pas connaître les autres options ou les examiner ensemble.
    Quelle méthode montrerait plus d'ouverture? Quelle forme auraient prise des consultations plus vastes et plus transparentes sur la location des terres, le développement économique et le rythme des affaires? Quel seuil du vote de la collectivité ne représente pas la réglementation de la Loi sur les Indiens? Quels termes faut-il employer concernant le transfert des terres pour éviter de parler de cession, même conditionnelle? Nous ne le savons pas. Nous n'avons pas été consultés. Nous ne savons pas quelles étaient les autres options. Cependant, comme la nature des modifications est en grande partie positive, l'opinion est divisée en deux parties égales.
    Les discussions dans le cadre de la collaboration et de la réforme de la politique sur les ajouts aux réserves, pour laquelle le comité du Sénat a déposé son rapport au début du mois, se poursuivent avec les mêmes représentants qui soumettent les modifications. Elles ont lieu dans un contexte de collaboration, mais quels effets le projet de loi aura-t-il sur ces discussions? C'est tout à fait contradictoire de parler de collaboration quant aux options et de présenter un tel projet de loi.

  (1710)  

    Merci, madame Lickers.
    Monsieur Rickford, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins aujourd'hui.
    J'ai deux questions. Je vais commencer par Kathleen, puis je passerai au chef Jules.
    Kathleen, je veux d'abord parler des commentaires du chef Sharon Stinson Henry sur l'examen du processus de référendum. Comme vous le savez, le processus actuel fondé sur les décisions avisées est soumis au Règlement sur les référendums des Indiens. Il contient des éléments essentiels, les discussions initiales, la planification et les réunions d'information dans les collectivités.
    Veuillez fournir la réponse la plus brève possible. Êtes-vous d'accord que les modifications proposées accélèrent le processus sans changer les exigences de fond qu'il faut protéger pour le moment, en ce qui a trait aux dispositions sur la désignation?
    Oui. C'est important de signaler que les modifications présentées aux articles 206 à 209 concernent un élément très précis de la désignation, le vote exigé en vertu du règlement. Le seuil de vote qui passe des deux tiers à la majorité simple constitue un changement très important, mais ce n'est qu'un élément du processus.
    La double majorité était problématique. Dans la lettre de la bande indienne de Penticton que nous avons sans doute tous reçue, il est indiqué entre autres que des mesures énergiques sont prises concernant un certain nombre d'initiatives de développement économique et que la Loi sur les Indiens ne correspond pas au rythme des affaires. Nous avons entendu parler de ce concept de rythme des affaires.
    En tant que comité, nous avons visité la bande indienne de Penticton, qui est bien située pour profiter de formidables occasions de développement économique et qui participe activement au processus. Toutefois, cette bande n'est pas favorable à la double majorité.
    Je pense que vous l'avez souligné plus tôt, mais avez-vous d'autres commentaires sur l'importance de réduire le seuil de majorité?

  (1715)  

    Les représentants du ministère en ont parlé tout à l'heure, seulement concernant le temps nécessaire. Les séances d'information se poursuivent aussi jusqu'au deuxième vote. Le processus varie selon la complexité de la question. Il y a un délai de quatre à six mois entre le premier et le deuxième vote. C'est un facteur considérable pour les locataires potentiels qui veulent maximiser l'occasion qui se présente.
    L'autre aspect lié à l'efficience ne concerne pas forcément le vote, mais la façon dont l'arrêté du ministère peut remplacer la décision du gouverneur en conseil. Dans l'exposé, j'ai dit qu'on en avait la preuve. Les mesures législatives sur les établissements dans les Prairies permettent ce processus. L'expérience montre que les délais sont réduits d'environ six mois et que des économies sont réalisées.
    Oui, c'est juste. Je comprends, Kathleen.
    Dans votre exposé, vous avez aussi parlé de la nouvelle exigence sur la résolution du conseil de bande. Cette exigence novatrice permet aussi à la bande d'indiquer au ministre qu'elle approuve ou qu'elle rejette les mesures. C'est un nouveau mécanisme de contrôle mis en oeuvre dans la collectivité. Vous avez dit que c'est un peu problématique à votre avis.
    N'est-il pas vrai aussi que cette nouvelle exigence sur la résolution du conseil de bande faciliterait la prise de décisions appropriées par le ministre?
    Même si la mesure semble banale sur papier, le gouvernement du Canada doit nous consulter sur la nécessité de mettre en oeuvre une autre mesure provisoire qui survient après le vote de la collectivité.
    Je veux en savoir plus. La collectivité aurait voté par référendum. Ce court segment de la modification sous-entend que la collectivité peut mettre en doute le consentement éclairé que la majorité simple vient de donner.
    La collaboration permettrait d'en savoir plus sur la nécessité d'une telle modification. Si le référendum prévoit une majorité simple et un examen, je ne vois pas pourquoi la collectivité devrait prendre une autre mesure. Pourquoi le bureau électoral et un représentant de la direction doivent-ils approuver le vote, si la bande peut encore opposer son refus?
    Ça pourrait être le résultat contraire à...
    La collectivité pourrait recommander de rejeter la mesure, mais le ministre a le dernier mot et pourrait faire fi du vote, même avec la majorité simple. Les mesures provisoires sont nombreuses. Je ne comprends pas quand la mesure devient définitive.
    Il reste 10 secondes.
    Merci, monsieur Rickford.
    Merci au groupe de témoins. Merci d'avoir été brefs et d'avoir mis de l'avant des questions essentielles.
    Nous allons maintenant suspendre la séance.
    Nous accueillerons ensuite le prochain groupe de témoins, MM. John Gailus et Gordon Shanks.
    Nous avons un peu de retard, chers collègues, mais je pense que la dernière série de questions était importante.
    Monsieur le vice-chef, avez-vous besoin d'une précision?

  (1720)  

    Oui, j'ai deux questions brèves. Puis-je remettre un document?
    Vous pouvez le donner au greffier, qui nous remettra des copies.
    Merci beaucoup. Nous allons maintenant suspendre la séance pour que les prochains témoins s'installent.

  (1720)  


  (1725)  

    Nous reprenons la séance.
    Chers collègues, les diverses parties ont convenu de rassembler les deux derniers groupes de témoins, puisqu'il n'y avait qu'un seul représentant dans le dernier groupe. Je pense que c'est une meilleure utilisation de notre temps. C'est pourquoi vous allez constater que la composition du groupe diffère de celle prévue à l'ordre du jour.
    Le dernier groupe de témoins aujourd'hui est formé de MM. John Gailus et Gordon Shanks, qui sont déjà venus ici. Merci beaucoup de vous joindre à nous, messieurs.
    Nous recevons aussi le chef John Thunder, Première nation de Buffalo Point.
    Nous allons suivre l'ordre de la liste des témoins.
    Nous allons d'abord entendre l'exposé de M. John Gailus, puis ceux de M. Gordon Shanks et du chef Thunder. 
    Merci, monsieur le président. Je suis content de revoir le comité.
    Pour mettre les membres en contexte, je suis avocat. Ne m'en tenez pas rigueur, je suis certain qu'il y a beaucoup d'autres avocats dans cette pièce.
    Je fais partie de la Nation haïda, qui est établie sur la côte nord-ouest de la Colombie-Britannique. Je suis également un ancien employé du MAINC, mais il semble que je n'y ai pas travaillé aussi longtemps que M. Shanks, donc je vais m'en remettre à ses connaissances.
    J'ai travaillé au ministère environ quatre ans et demi à titre d'agent de location pour la gestion des terres. J'ai fait quelques désignations et locations. Depuis 1999, j'exerce le droit dans le secteur privé.
    Mon travail consiste en partie à m'y retrouver dans les dédales de la procédure de désignation prescrite à la Loi sur les Indiens et à faire démarrer des projets de développement économique sur les réserves.
    Je n'ai que quelques observations à faire sur les modifications proposées, et je vais être bref.
    De mon point de vue professionnel, je suis très en faveur des modifications. J'ai deux dossiers en cours qui portent sur des désignations; je dois dire que j'en ai parlé à l'un de mes clients la semaine dernière et qu'il m'a dit de vous dire qu'il était en faveur des modifications.
    Je crois que l'élimination de l'exigence de la majorité double et de l'approbation par le gouverneur en conseil va accélérer la procédure de plusieurs mois.
    De plus — et j'en ai parlé dans ma comparution sur l'utilisation des terres —, ces mesures vont favoriser le respect de la loi. Beaucoup de Premières nations renoncent à présenter une demande en bonne et due forme et préfèrent se débrouiller par eux-mêmes, ce qui les prive de la meilleure utilisation possible de leurs terres et pourrait les exposer ou exposer le gouvernement à devoir rendre des comptes.
    Cependant, les avocats cherchent toujours à trouver les failles, et il y a quelques éléments qui me préoccupent.
    Premièrement, il y a l'ampleur du pouvoir discrétionnaire qui sera accordé au cabinet du ministre. Comme vous le savez probablement, la procédure de désignation remonte à la Proclamation royale de 1763. Son objectif aujourd'hui est d'obtenir le consentement éclairé des membres de la bande qui vivent dans la réserve et de ceux qui vivent hors réserve.
    La nécessité d'obtenir la majorité double est commune à toutes sortes d'organisations, c'est à tout le moins courant dans les entreprises. Selon moi, il doit y avoir un quorum. Je parle de quorum dans le sens où on l'entend dans les entreprises; aux termes de la Loi sur les Indiens, le quorum doit être de 50 p. 100 des membres plus un. Les gens doivent se présenter pour voter ou participer à des scrutins électroniques.
    Dans une entreprise, s'il n'y a pas assez de personnes présentes pour constituer le quorum, la séance est levée. Il y a ensuite une autre réunion, où il faut obtenir la majorité simple. Ce qu'on trouve dans la loi actuelle correspond donc à la règle dans les entreprises, si l'on veut.
    Faute de quorum, on peut désigner des terres pour une longue durée, par exemple 99 ans, sans qu'une si grande partie des membres ne votent. J'estime que cela pourrait donner lieu à des contestations juridiques.
    À mon avis, il faut clairement définir le quorum que le ministre va accepter avec le consensus du plus grand nombre. Pour le préciser, on pourrait adopter une politique ou modifier le règlement sur les référendums, mais personnellement, j'opterais pour l'intégrer à la loi.
    Quoi qu'il en soit, ces modifications sont un pas important en avant, mais je vous préviens que l'absence de quorum — et j'utilise le terme comme on l'utilise dans les entreprises — pourrait donner lieu à des contestations juridiques.

  (1730)  

    Merci, monsieur Gailus.
    Nous allons maintenant laisser M. Shanks nous présenter son exposé.
    Merci, monsieur le président.
    Mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître à nouveau devant vous.
    Vous vous rappelez peut-être que je vous ai dit lors de ma dernière comparution, en mai dernier, que j'ai passé plus de 20 ans au ministère des Affaires indiennes, où j'ai été pendant le plus longtemps sous-ministre adjoint. Je connais donc assez bien le sujet à l'étude, mais mes connaissances ne sont pas parfaitement à jour.
    J'ai eu l'occasion d'entendre les témoins qui m'ont précédé, et malheureusement, la plupart des arguments que j'avais l'intention de faire valoir ont déjà été présentés d'une manière beaucoup plus éloquente que je ne peux le faire.
    Je vais toutefois souligner trois choses, brièvement. La première est la plus évidente. Vous y avez peut-être déjà réfléchi, mais le fait est que les terres sont un aspect central des préoccupations des Premières nations au Canada. Je crois qu'on pourrait dire que sans la protection de la Loi sur les Indiens, les Premières nations telles qu'on les connaît aujourd'hui (des entités dynamiques et intactes) n'existeraient probablement plus. Les notions de la Loi sur les Indiens et des terres indiennes font partie de notre réalité depuis longtemps et occupent une place centrale dans l'histoire des Premières nations.
    La question que vous étudiez en ce moment vise à déterminer les normes à privilégier dans l'éventualité de la location de terres indiennes à des tiers, en règle générale, à des non-Indiens. La Loi sur les Indiens, comme vous le savez, ne permet pas aux non-Indiens d'utiliser ces terres, sauf avec la permission de l'État.
    Je dirais que si une Première nation propose d'abandonner complètement ses terres, pour toujours, ce qu'on appelle une « cession » dans la Loi sur les Indiens, la barre doit être très haute. Il s'agit de terres de propriété collective, il est donc légitime de mettre la barre haute et de ne pas envisager de modifications à la Loi sur les Indiens. Je suis d'accord avec cela.
    La décision concernant la location à bail est une tout autre question. Les terres louées à bail continuent d'appartenir à la collectivité; c'est simplement une allocation à quelqu'un d'autre pour une période donnée, et les terres reviennent à la Première nation à l'échéance du bail.
    Les terres sont des biens nécessaires pour le développement économique, comme Manny Jules l'a souligné. Le temps est un facteur déterminant dans le développement économique. J'ai entendu beaucoup, beaucoup de Premières nations se plaindre de difficultés pour que les choses soient faites rapidement. Je conviens que tout ce qui peut accélérer les démarches est positif. Je serais donc en faveur de cette modification.
    La dernière chose que j'aimerais souligner a été mentionnée par d'autres personnes, mais peut-être pas aussi directement. Je me demande si ces modifications vont assez loin, en ce sens qu'il faut toujours que le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord approuve les projets de référendum. Je pense qu'il serait temps pour le comité de songer à laisser tomber les vestiges du colonialisme et à transférer cette obligation fiduciaire de l'État fédéral aux Premières nations elles-mêmes.
    Bien entendu, c'est une question complexe qui nécessiterait une analyse en profondeur, mais je crois que l'idée de la désignation devrait vraiment nous porter à y réfléchir. Quand une Première nation décide qu'elle souhaite louer des terres à bail, sur quelle base le ministre peut-il se fonder pour passer outre la volonté de cette Première nation? Si les choses ont été faites en bonne et due forme, que la Première nation a respecté toutes les normes et toutes ses obligations, je crois que le comité pourrait recommander que la décision revienne à la Première nation et que l'État n'ait pas son mot à dire.
    Sur ce, j'ai terminé mon exposé, monsieur le président.

  (1735)  

    Merci, monsieur Shanks.
    Nous allons maintenant entendre l'exposé du chef Thunder.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité permanent, je vous remercie de l'occasion qui m'est présentée.
    Je m'appelle John Thunder. Je suis le chef de la Première nation de la pointe Buffalo, qui vit au Manitoba, sur les rives majestueuses du lac des Bois, en bordure de la frontière des États-Unis.
    J'ai 52 ans. La première fois où j'ai agi par procuration au nom de mon père, j'avais 18 ans, et c'était pour participer à des réunions de l'Assemblée des chefs du Manitoba. J'ai côtoyé des gens comme Walter Dieter, Robert Conley et Brian Vino. J'ai une photo de Jean Chrétien coiffé de plumes d'aigle pour la mise en oeuvre du Livre blanc de 1969. Mon père et moi sommes des chefs de file des Premières nations pour la gestion des terres et le développement économique. En fait, nous avons écrit un livre sur le sujet, et c'est l'objet de mon exposé d'aujourd'hui. J'en ai apporté quelques exemplaires pour vous aider à comprendre notre histoire.
    L'héritage de mon père, financièrement et personnellement, c'est 35 ans d'efforts pour créer un centre de villégiature moderne, une destination touristique de calibre international, qui représente aujourd'hui un investissement total d'environ 50 millions de dollars en infrastructure et en développement économique, ce qui surpasse la plupart des villes au Canada. Nous avons un déficit d'à peine 3 millions de dollars. Nous avons littéralement gradué de la Loi sur les Indiens et nous n'avons plus besoin de tous les obstacles qui pavent notre voie. J'ai pour objectif et priorité d'être l'hôte d'une cérémonie en 2015 afin d'enterrer cette contribution et de rompre à tout jamais nos liens avec le ministère de la dépendance.
    Nous devons adopter notre propre code de gestion des terres, sans risque de sabotage, d'annulation ou de manipulation des référendums de nos collectivités. Surtout, nous voulons profiter de tout l'impact économique de ce que nous avons créé sur nos terres. Cette péninsule génère quatre fois plus de revenus en taxes et en ressources naturelles. C'est ce de quoi notre gouvernement devrait disposer pour nous-mêmes, plutôt que des miettes que nous tendent du bout des doigts d'autres gouvernements. C'est ce qui nous permettra un jour de nous sortir du cycle de dépendance dans lequel ont été placées les Premières nations.
    Il y a littéralement des milliards et des milliards de dollars qui passent chaque jour par chez nous. Notre lac est un réservoir d'hydroélectricité et bien sûr, c'est la source d'eau potable de Winnipeg. Il y a deux lignes de transmission qui traversent nos terres. Un oléoduc de gaz naturel passe à une dizaine de kilomètres de mon village, et toutes ces exportations vers les États-Unis se font sans que le moindre sou ne revienne à ma collectivité. Les trains de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada passent quatre heures par jour dans notre collectivité, mais ne paient des taxes qu'à la municipalité rurale de Piney, alors que la voie ferrée passe par notre village. L'impôt foncier découlant de ces activités revient à notre Première nation et à aucun autre gouvernement.
    J'ai retenu une bonne phrase de Paul Fauteux aujourd'hui, qui a étudié 25 Premières nations prospères: « Je l'ai volé honnêtement. » J'ai trouvé l'analogie assez bonne. C'est cette injustice que j'essaie de réparer, mais avec très peu de succès, voire pas du tout.
    Nous sommes considérés comme l'une des collectivités les plus saines et à la croissance la plus rapide au Manitoba, et ce même quand on nous compare aux collectivités non autochtones. Le maintien de procédures qui prennent au minimum cinq ans n'est rien d'autre qu'un véritable suicide économique. Le fait de permettre ensuite à des terroristes économiques de saboter notre travail acharné nous reléguera au rang de Première nation encore 30 ans. Il est insensé de demander à une collectivité de voter pour décider si une entreprise peut s'établir sur ses terres, c'est le moins qu'on puisse dire. Il est plus que temps de nous débarrasser de la Loi sur les Indiens et de permettre aux Premières nations d'évoluer selon leurs propres mérites.
    Il est intéressant de constater que dans nos négociations de revendications territoriale, la procédure de référendum prévoit un second vote à la majorité simple, de sorte qu'un résultat favorable est garanti. Cela peut sembler un peu contradictoire, mais il faut comprendre que la plupart des membres de notre collectivité n'ont pas les connaissances ni la confiance qu'il faut pour prendre les décisions éclairées que nous renvoie en bout de ligne le ministère des Affaires autochtones. Il serait on ne peut plus logique que tout cela fasse partie du programme de gestion des terres.

  (1740)  

    J'aimerais aussi savoir pourquoi le ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord a édulcoré l'étude sur les histoires de succès chez les Premières nations et pourquoi il fait fi des recommandations qu'elle contient. J'ai dû publier cette étude sur mon blogue pour permettre à d'autres Premières nations d'avoir accès à ce document, parce que personne au gouvernement fédéral n'était prêt à le faire.
    Comme les chefs l'ont dit à Wilfrid Laurier en 1910, ils nous disent que ce sont eux qui ont le pouvoir sur nous, ils prétendent que ce pays est le leur, ils utilisent leurs tribunaux pour nous réglementer et nous contrôler. C'était il y a 102 ans, et pourtant cette menace plane toujours sur nous.
    Pour terminer, permettez-moi de vous dire que si nous n'obtenons pas le pouvoir de prendre nos décisions financières et judiciaires, nous risquons de compromettre l'avenir du Canada et des Premières nations du pays. Nous devrions être considérés comme des atouts et non comme des charges. Nous pouvons vous aider à protéger notre pays contre l'exploitation, apporter une valeur ajoutée à nos ressources plutôt que de continuer à les vendre en gros. Nous devrions être considérés de la même façon que les autres membres de la société canadienne.
    Si nous jouons bien nos cartes, nous pouvons devenir des moteurs économiques en utilisant nos terres et nos ressources à l'avantage de tout notre peuple. Nous pouvons protéger l'environnement en réinvestissant l'argent là où il le faut. C'est ce que je considérerais comme une stratégie durable à long terme pour l'avenir de notre collectivité.
    Meegwetch, merci.
    Merci, chef.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Bevington pour les sept premières minutes.
    Je remercie nos trois témoins.
    Nous sommes tous très heureux d'entendre des témoins sur ce projet de loi, mais je pense que nous sommes tous un peu frustrés aussi, parce qu'il ne nous permet pas de modifier la loi. C'est la façon dont les choses fonctionnent en ce moment au Parlement.
    Je souhaite me tourner vers l'avenir, parce que de toute évidence, vous avez tous les trois dit que nous ne faisions pas les choses convenablement. Qu'est-ce qui serait acceptable pour les Premières nations? Quelle orientation les Premières nations voudraient-elles donner à ce type de projet de loi? Que veulent les Premières nations, en tant que nations et en tant que gouvernements?
    Je pense comprendre très clairement ce que vous voulez, chef Thunder.
    J'aimerais simplement que chacun de vous me donne une idée de ce que les Premières nations voudraient, d'après votre expérience et votre compréhension des faits. Ma question s'adresse aussi à M. Shanks, qui a travaillé de l'autre côté pendant de nombreuses années.

  (1745)  

    En tant que chef de Première nation, j'ai passé toute ma vie à étudier et à observer ce qui se passe pour les Premières nations partout au Canada; j'ai voyagé d'un bout à l'autre du pays et j'ai vu un grand nombre de Premières nations. J'ai consulté plus de 50 Premières nations à des fins de développement économique. Au bout du compte, tout ce que je peux dire, c'est que nous possédons seulement 4 p. 100 des terres au Canada. Le reste, c'est-à-dire 96 p. 100, est contrôlé par le gouvernement du Canada et par les provinces et pourtant, les 4 p. 100 que nous possédons continuent d'être exploités au maximum par les gouvernements provinciaux dans leur propre intérêt. Les autres 96 p. 100 des terres ne nous rapportent rien, et cela comprend notre territoire traditionnel, c'est-à-dire notre territoire en vertu du Traité no 3. Je n'en retire rien. Ma collectivité n'a jamais reçu un cent et pourtant, il y a des milliards de dollars en transactions autour de ma collectivité.
    Je n'essaie pas de profiter de quelqu'un d'autre en prenant son argent, son entreprise et ses revenus. Ce que je dis, c'est que les retombées économiques que nous avons créées sur notre terre valent plus que tout ce qu'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada nous donnera.
    Je me suis toujours demandé pourquoi le Manitoba reçoit 1,5 milliard de dollars en paiements de péréquation pour financer sa petite population, alors que la même société utilise notre population pour établir une formule de plafonnement. C'est la raison pour laquelle les Premières nations sont si réticentes à négocier avec le gouvernement du Canada: il s'agit essentiellement d'un processus à sens unique qui ne nous permet pas de gagner du terrain.
    Affaires autochtones et Développement du Nord Canada a blâmé mes sociétés, m'ont appelé « une entreprise », et a dit que notre système d'égout ne serait pas financé par le ministère des Affaires indiennes à cause de cela. Lorsque le gouvernement fédéral peut se croiser les bras et blâmer mes entreprises et ensuite utiliser Revenu Canada, un autre de ses ministères, pour faire volte-face et imposer ces mêmes entreprises en percevant la TPS, l'impôt sur le revenu, les gains en capital, et ensuite nous refuser ces impôts pour que les profits et les revenus de nos entreprises servent à bâtir l'infrastructure des collectivités, c'est un suicide économique, à mon avis. Cela ne peut plus continuer. Soit le gouvernement fédéral se retire de nos terres et laisse ces revenus à notre gouvernement, soit il prend la responsabilité fiduciaire de nos affaires. Il ne peut pas avoir les deux.
    Il vole notre argent et ensuite il nous refuse l'accès à ces dollars. Si nos entreprises doivent construire les infrastructures de nos collectivités, il ne sert à rien de se lancer en affaires, car aucune personne sensée ne mettrait sur pied une entreprise pour ensuite investir ses profits dans quelque chose qui n'a rien à voir avec ses affaires. Ce n'est pas la façon dont les choses fonctionnent dans le reste de la société. Pourquoi les Premières nations devraient-elles fonctionner ainsi?
    Pour répondre à votre question à savoir où se dirigent les Premières nations, selon mon expérience, elles veulent reprendre la discussion des années 1980, lorsqu'on parlait beaucoup de l'autonomie gouvernementale en vertu de la Constitution canadienne. Je pense que ce que recherchent vraiment les Premières nations, c'est qu'on reconnaisse qu'elles représentent un niveau de gouvernement dans le sens constitutionnel, et elles veulent être traitées de façon équitable sur le plan juridique. On ne peut pas vraiment parler des Premières nations de manière monolithique, car les différents points de vue sont nombreux. Par contre, celles qui participent au développement économique et à la gestion des terres aimeraient, en général, mettre sur pied un régime foncier différent. Elles aimeraient que leurs terres ne soient plus celles de Sa Majesté la Reine du chef du Canada et elles souhaitent créer un régime foncier des Premières nations qui n'est pas assujetti à la Couronne.
    C'est une chose difficile à réaliser, mais c'est essentiellement, au bout du compte, la voie que veulent emprunter les Premières nations.

  (1750)  

    Je suis d'accord avec les commentaires du chef Thunder et de M. Shanks à ce sujet. Je pense qu'il n'y a pas de solution unique ou universelle.
    On peut se rendre compte que les Premières nations ont des aspirations communes. Par exemple, elles veulent devenir autonomes. Toutefois, en ce qui concerne son degré de préparation envers la question de l'autonomie gouvernementale, chaque collectivité est limitée par son emplacement géographique, sa capacité et son éducation. En effet, les Premières nations dont je m'occupe varient énormément dans leur capacité à gérer leurs collectivités. Ce n'est pas leur faute, mais je ne pense pas qu'il existe une solution universelle.
    Toutefois, en Colombie-Britannique, où j'accomplis la plus grande partie de mon travail, des Premières nations entreprennent le processus des traités. Là-bas, au moins la moitié des Premières nations veulent obtenir l'autonomie gouvernementale.
    Dans le contexte du développement économique, plusieurs Premières nations réclament un code foncier en vertu de la Loi sur la gestion des terres des Premières nations. Il y a une longue liste de Premières nations qui souhaitent être visées par cette loi, mais je sais que le financement représente un problème.
    Il y a aussi un transfert des pouvoirs. Je ne sais pas si le gouvernement procède toujours à des délégations en vertu des articles 53 et 60. Je pense plutôt qu'il pousse tout le monde vers le code foncier.
    Le thème commun, c'est que les Premières nations veulent prendre des décisions au sujet de leurs terres en toute autonomie.
    Merci beaucoup, monsieur Gailus, et merci, monsieur Bevington.
    Nous allons maintenant passer à M. Boughen; il a sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais aussi remercier les témoins d'être restés avec nous cet après-midi. Nous vous sommes reconnaissants de vos commentaires et de vos avis. Si les gens de nos circonscriptions ne communiquent pas avec nous, nous ne savons pas ce qu'ils pensent, et nous vous remercions donc de nous faire connaître vos opinions.
    Il m'a semblé qu'un thème commun revenait pendant les témoignages: le temps et les délais. J'aimerais que chaque témoin nous donne son avis sur la question du temps. Si le gouvernement vous permettait de fixer les délais et les échéances, que répondriez-vous?
    Dans le cadre du processus par lequel est passée la Première nation de la Pointe Buffalo, on a formé le conseiller Green, l'un de mes conseillers. On m'a également donné une formation, ainsi qu'à mon adjoint administratif. Nous avons donc l'expertise nécessaire.
    Une fois notre formation acquise, nous avons tenté de lancer le processus; on nous a dit qu'il n'y avait aucun financement et que nous devions attendre trois ans. Nous avons attendu trois ans, et lorsque le processus a été lancé, on nous a dit qu'il n'y avait toujours pas de financement et que nous devions assumer les coûts, et c'est ce que nous avons fait. Je pense que nous sommes la seule Première nation du Canada à qui l'on a demandé d'assumer les coûts liés au processus.
    Nous avons achevé le processus, qui exigeait de tenir trois réunions communautaires et une consultation avec tous les membres. En janvier, il y a deux ans, nous avons fixé une date pour le référendum, mais le ministre n'a pas signé notre entente indépendante, et pour une raison quelconque, il a attendu un an et demi avant de la signer.
    Une fois que nous avons obtenu la signature du ministre, nous avons envoyé la date du référendum et les documents pertinents, mais l'horaire et les échéances ont été décalés d'une semaine en raison de certains retards. Le programme de délégation des pouvoirs en matière de gestion des terres a repoussé sa partie. Ensuite, nous avons dû organiser un autre référendum; nous l'avons donc fait trois fois.
    À ce point-là, nos gens étaient extrêmement frustrés, ils n'avaient aucune idée de ce qui se passait et ils remettaient la date en question. Lorsque nous avons finalement tenu notre référendum la semaine dernière, des membres de la bande ont envahi le bureau et ont mis fin au référendum.
    J'ai réussi à obtenir une injonction du tribunal et une extension à cette injonction. La GRC a refusé d'obéir à l'injonction du tribunal, et ces gens occupent toujours mon bureau. C'est la troisième fois qu'ils l'occupent. La dernière fois, il y a 12 ans, j'avais obtenu une injonction du tribunal. Les tribunaux ne voulaient pas s'en occuper et la GRC ne l'a pas fait respecter. J'ai dépensé des dizaines de milliers de dollars en poursuites judiciaires et pourtant, la GRC a refusé d'obéir aux injonctions du tribunal.
    En conclusion, depuis que nous avons entrepris le développement de notre collectivité... Une inondation nous a forcés à quitter notre collectivité. Personne n'y a vécu pendant plus de 50 ans. Lorsque mon père a fondé cette collectivité moderne, il l'a créée de toutes pièces. Il n'y avait rien à cet endroit. Nous avons dû construire nos propres routes, notre propre infrastructure. Nous avons dû tout faire. AADNC s'est contenté d'essayer de nous faire échouer. Je crois toujours que le ministère essaie de nous faire échouer, car je ne peux pas comprendre pourquoi la GRC n'obéit pas à une injonction qui vient de la Cour fédérale.
    D'une façon ou d'une autre, tout ce que je sais, c'est que plus vite nous éliminons la Loi sur les Indiens et le ministère des Affaires indiennes, plus vite nous pourrons retrouver un mode de vie sain et productif.

  (1755)  

    Merci.
    Monsieur Boughen, il vous reste environ deux minutes et demie.
    J'aimerais entendre l'avis d'autres témoins sur la question du temps, car il semble que ce thème revenait partout. D'après ce que le chef vient tout juste de dire, il s'agit certainement d'un facteur important. Vous attendez trois ans pour lancer un plan d'affaires, et pendant ce temps, on gagne et on perd des guerres, on marche sur la lune et toutes sortes de choses bizarres se produisent.
    Je peux seulement être d'accord avec le fait que les frustrations éprouvées par les Premières nations concernent les délais administratifs. Tout ce qui peut accélérer les choses sera utile.
    Manny Jules a parlé de la vitesse des affaires. Nous ne parlons pas d'une chose très compliquée; nous disons seulement que si je souhaite ouvrir un magasin et louer un terrain, je veux savoir si le terrain en question est à louer. Mon banquier me donnera 60 jours, et je veux que les choses soient faites. Je dois savoir si vous participez ou non.
    Ce n'est pas très compliqué. Il n'est absolument pas nécessaire de rendre le processus aussi tortueux, et on pourrait le simplifier beaucoup plus. Le projet de loi n'accomplit pas grand-chose en ce sens, mais il s'agit d'un pas dans la bonne direction.
    La situation actuelle est certainement inacceptable, c'est-à-dire qu'il s'écoule beaucoup trop de temps entre une proposition de projet et la location de l'espace nécessaire. Comme je pense l'avoir dit dans mon exposé, éliminer l'exigence de la double majorité et la responsabilité du gouverneur en conseil pourrait retrancher de 6 à 12 mois au processus.
    Il reste le Règlement sur les référendums des Indiens qui, si ma mémoire est bonne, exige 49 jours d'avis; cela représentera donc encore un problème. Ensuite, il y a toute une série d'exigences en matière de politiques pour obtenir un vote de désignation. Il y a des évaluations, des sondages et des évaluations environnementales, mais je ne suis pas certain qu'il s'agisse toujours d'une exigence aux termes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale de 2012, car je ne l'ai pas encore examinée. Il y a des réunions communautaires et ensuite des négociations avec les promoteurs, et le ministère des Affaires autochtones et le ministère de la Justice imposent des durées de location qui pourraient déplaire aux tiers. Il y a aussi beaucoup de négociations à ce sujet.
    Les modifications proposées représentent certainement un pas dans la bonne direction et comme je l'ai dit, il y a d'autres solutions, par exemple, un code foncier. Je pense que c'est ce dont parlait le chef Thunder, c'est-à-dire de tenter d'établir un code foncier. Ce n'est pas un processus rapide; nous devons donc nous mettre au travail.

  (1800)  

    Merci beaucoup. Je suis désolé, mais votre temps est écoulé, monsieur Boughen.
    Nous allons maintenant passer à Mme Bennett; elle a sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci d'être ici, car comme vous le savez, ce processus nous préoccupe beaucoup.
    Monsieur Shanks, avez-vous déjà vu des modifications à la Loi des Indiens insérées dans un aussi volumineux projet de loi d'exécution du budget?
    Non.
    Pensez-vous que c'est une bonne idée?
    Eh bien, d'après mon expérience, si vous ne menez pas de consultations, vous finissez par vous tirer une balle dans le pied. L'un des vieux chefs sages me disait qu'il fallait aller lentement pour aller rapidement, car autrement, on ne va nulle part. Vous devez veiller à ce qu'un nombre suffisant de gens puissent s'exprimer et, comme l'un des chefs l'a dit aujourd'hui, il faut explorer les options. Qui sait quelles options ont été mises de côté, ou pourquoi ces options ont été choisies au détriment d'autres? Personne ne le sait lorsqu'on est mis devant le fait accompli.
    D'après mon expérience, il est logique de mener des consultations et de rencontrer les personnes concernées.
    Pour ce qui est de comprendre le contexte, je crois que tous les témoins ont parlé du but ultime, soit l'autonomie, et je crois que cette partie du projet de loi omnibus vise à éliminer certains irritants, mais comme nous l'avons entendu, même de la bouche du conseiller juridique de l'APN, nous ne connaissons pas le contexte ou les autres solutions qui auraient pu être envisagées. Monsieur Gailus, vous avez dit craindre, je crois, les conséquences imprévues des obligations légales en l'absence de quorum, et celles que pourraient avoir aussi les décisions prises à majorité simple par un nombre insuffisant de membres.
    Est-ce bien cela?
     Mes craintes sont de deux natures.
    D'abord, la loi actuelle précise très clairement les exigences en matière de quorum lors d'une réunion, c'est-à-dire 50 p. 100 plus un, alors que les modifications laissent la question ouverte. Si je rencontre un client ou un promoteur et que je lui dis « Voici les nouvelles procédures, et c'est ainsi que ça fonctionne », il va me demander combien de personnes nous devons réunir.
    Eh bien, quel est ce seuil? Est-ce 30 personnes? Est-ce 50 personnes? Comme je l'ai mentionné, le projet de loi laisse une grande latitude au ministre pour approuver ou rejeter une décision. On ouvre la porte aux poursuites, assurément, si le vote a été approuvé à majorité simple, comme le prévoit la loi, et que le ministre dit ensuite que le seuil n'a pas été atteint parce que, pour telle ou telle Première nation, il faut que 25 p. 100 ou 40 p. 100 des membres soient présents. C'est le problème que j'envisage.
    Comme je l'ai dit, on peut remédier en partie au problème en adoptant une politique. Si le ministère adopte, au départ, une politique qui fixe le seuil à 25 p. 100... Dans le cas des codes fonciers adoptés par les Premières nations, souvent, le seuil semble être de 25 p. 100, mais ce sera différent; le seuil pourrait être plus élevé suivant le nombre de personnes qui vivent sur la réserve et hors réserve.
    Il faut aussi composer maintenant avec ce que vous avez appelé les « conséquences imprévues ». Les conséquences imprévues de l'arrêt Corbiere, qui a accordé le droit de vote aux membres vivant hors réserve, sont que bon nombre d'entre eux ne participent pas et que leur absence équivaut à un « non » dans le système actuel. Ils sont comptabilisés dans le quorum exigé, bien qu'ils choisissent de ne pas participer.

  (1805)  

    C'est ce que nous ont dit des chefs, soit que les membres votent librement, et que lorsqu'ils ne participent pas, cela équivaut parfois à un « non » pour eux.
    Chef Thunder, vous avez manifesté très clairement votre frustration à l'égard d'un problème d'attitude qui se traduit encore et toujours par l'imposition de décisions sans qu'on ait pris le temps de vous écouter et d'écouter les solutions pratiques que vous aviez à proposer.
    Quelle voie devrait-on emprunter, comme l'a demandé mon collègue?
    À titre de chef, je sais — et j'ai déjà mentionné ce point dans mon exposé — que bon nombre de nos gens n'ont pas confiance. Quand une loi nous vient du ministère des Affaires indiennes, c'est difficile pour nous de convaincre nos gens qu'elle a été adoptée dans notre intérêt, car sa source n'est pas la bonne. Il faut qu'elle vienne de nous, pas de quelqu'un d'autre. Le ministère des Affaires indiennes n'a pas un très bon bilan en faveur des Premières nations. Quand les lois ou les programmes viennent d'en haut, il est très difficile pour moi, en tant que chef, de convaincre mon peuple que cela sert son intérêt. Nous devons trouver nos propres façons de faire et nos propres solutions.
    L'autre question qu'il faut régler, et j'en ai parlé il y a deux semaines lors du Forum sur le droit autochtone qui s'est tenu à Toronto, c'est celui des échéanciers, et le temps presse aussi en affaires.
    Lorsque nous avons conclu l'accord concernant les droits fonciers issus de traités au Manitoba, nous avons examiné les transferts et constaté qu'il fallait 22 mois pour convertir les terres en terres de réserve. Il y avait beaucoup de double emploi entre les gouvernements fédéral et provincial. Nous avons simplifié la procédure et nous avons réussi à ramener le temps nécessaire à 18 mois. Aujourd'hui, quinze ans plus tard, il faut quatre ans et demi pour convertir des terres en terres de réserve. Nous avons fait un grand pas en arrière.
    La solution que je propose est d'inclure une disposition de sanctions. Si le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial ne respecte pas l'échéancier prévu dans la mise en oeuvre de l'accord, la Première nation devrait se voir accorder une acre de terre supplémentaire par jour de retard. Je peux vous assurer que si une telle disposition faisait partie des accords, le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial ne se traîneraient pas les pieds, et il ne faudrait pas attendre de 5 à 20 ans pour régler un dossier.
    Merci, chef Thunder, et merci à vous, madame Bennett, d'avoir soulevé la question.
    Chers collègues, M. Rickford était le dernier à poser des questions pour le Parti conservateur, mais il propose plutôt que nous passions aux affaires du comité, car nous avons, bien sûr, des questions à régler, et il sait que nombre d'entre vous ont des engagements ce soir.
    Nous allons donc remercier nos témoins. Je vous remercie beaucoup, messieurs, de votre présence. Nous vous savons gré de vos témoignages et de vos réponses à nos questions.
    Chers collègues, nous allons suspendre la séance avant de passer à huis clos pour discuter du rapport au Comité des finances. La séance est suspendue.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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