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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 020 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 26 mai 2010

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale se réunit aujourd'hui pour poursuivre l'étude du projet de loi C-391, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu (abrogation du registre des armes d’épaule).
    Nous accueillons aujourd'hui des représentants de la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario. M. Murray Grismer, un sergent de police de Saskatoon, comparaît à titre personnel. Est également présente Mme Priscilla de Villiers, défenseure des droits des victimes pour l'organisation Canadiens contre la violence partout recommandant sa révocation. Nous avons aussi des représentants de l'Institut national de santé publique du Québec: M. Pierre Maurice, chef d'unité scientifique, et M. Étienne Blais, professeur adjoint à l'école de criminologie de l'Université de Montréal. Finalement, M. William Blair comparaît au nom de l'Association canadienne des chefs de police, dont il est le président.
    Bienvenue à tous. Nous avons hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire. Vous disposez de 10 minutes chacun pour présenter votre déclaration, puis nous passerons aux questions et commentaires des députés des différents partis.
    Allez-y, monsieur Maurice.

[Français]

    Monsieur le président, distingués membres du comité, permettez-nous d'abord de nous présenter.
    Je suis le docteur Pierre Maurice et je suis expert en prévention des traumatismes de l'unité scientifique, Sécurité et prévention des traumatismes, de l'Institut national de santé publique du Québec. Je suis accompagné de M. Étienne Blais, qui est criminologue au sein de mon équipe et professeur adjoint à l'École de criminologie de l'Université de Montréal. M. Blais a développé au cours des dernières années un programme de recherche sur la prévention des traumatismes par arme à feu.
    Nous vous remercions de nous offrir l'occasion de présenter notre analyse du projet de loi C-391. C'est après avoir constaté que le débat entourant le Registre canadien des armes à feu était presque uniquement axé sur les enjeux de la criminalité que nous avons voulu être entendus auprès de ce comité. En effet, l'enjeu entourant le projet de loi C-391 dépasse largement la problématique de la criminalité, et c'est pourquoi il nous apparaît essentiel aujourd'hui de situer le débat également dans une perspective de santé publique. Cette dernière nous amène à considérer les conséquences possibles de ce projet de loi sur l'ensemble des décès et blessures liés aux armes à feu et non pas uniquement ceux relatifs à la criminalité.
    À ce chapitre, précisons d'entrée de jeu que les suicides sont de loin la première cause de décès par arme à feu au Canada, lesquels représentent plus de 75 p. 100 du total des décès liés à ce type d'armes. La plupart de ces décès impliquent des armes à feu sans restriction. Globalement, les données démontrent que la problématique des décès liés aux armes à feu concerne surtout les personnes aux prises avec des problèmes personnels, conjugaux, ou des problèmes de santé mentale, plutôt que le milieu criminel. Il ressort également que le domicile est le principal lieu où surviennent ces décès, ce qui en fait un lieu d'intervention important dans une perspective de prévention.
    De nombreuses études ont démontré que l'accessibilité aux armes à feu constituait un facteur de risque important de suicide, d'homicide et de décès accidentel. C'est pour cette raison que le Programme national de santé publique du Québec comprend une mesure spécifique pour soutenir l'élaboration et l'application de mesures législatives et réglementaires visant à rendre les armes à feu moins accessibles aux personnes susceptibles d'en faire un mauvais usage.
    Au cours des 30 dernières années, plusieurs mesures ont été mises en oeuvre par le Parlement canadien pour contrôler les problèmes associés aux armes à feu. La plupart de ces mesures portent sur le contrôle des armes à feu sans restriction, c'est-à-dire les carabines et les fusils de chasse. C'est depuis 1998, à la suite de l'adoption du projet de loi C-68, que tous les propriétaires de ce type d'armes sont obligés de détenir un permis de possession d'armes à feu et d'enregistrer chacune des armes qui sont en leur possession.
     Dans une perspective de santé publique, il faut se poser la question suivante: est-ce que les mesures mises en vigueur à la suite de la mise en vigueur du projet de loi C-68 ont permis de réduire le nombre de décès liés aux armes à feu? Une étude récente a permis d'évaluer cet effet en tenant compte de la tendance à la baisse observée depuis 1974 en ce qui concerne les taux d'homicide et de suicide, ainsi que de l'effet concomitant d'autres facteurs associés aux décès par arme à feu.
    Les résultats observés démontrent que l'entrée en vigueur du projet de loi C-68 est associée à une diminution de 250 suicides et de 50 homicides par arme à feu en moyenne chaque année au Canada. Les résultats de cette étude démontrent également qu'aucun effet de substitution n'a été observé à la suite de la mise en oeuvre du projet de loi C-68, c'est-à-dire que la baisse du nombre de suicides et d'homicides par arme à feu n'a pas été compensée par une augmentation du nombre de suicides et d'homicides commis par d'autres moyens.
    En se fondant sur les données disponibles concernant les coûts directs et indirects associés aux décès par arme à feu, on estime à plus de 400 millions de dollars par année les coûts épargnés qui sont reliés à la diminution de 300 décès associée à l'entrée en vigueur du projet de loi C-68. Il importe de rappeler que les deux principales mesures mises en oeuvre à la suite de la mise en oeuvre du projet de loi C-68 sont l'obligation pour tous les propriétaires d'armes à feu sans restriction de détenir un permis de possession d'arme et l'obligation d'enregistrer chacune des armes qui sont en leur possession. L'efficacité de la loi est liée à l'interaction de ces deux mesures. De façon plus spécifique, le permis et l'enregistrement permettent de lier chaque arme à son propriétaire, ce qui a pour effet d'inciter les propriétaires d'armes à feu sans restriction à respecter les règlements en vigueur concernant l'entreposage, la vente, le prêt ou le don d'une arme à feu.

  (1535)  

    Cette possibilité de lier chaque arme à son propriétaire permet également de soutenir les policiers dans l'exercice de leurs fonctions, par exemple lors de l'exécution d'une ordonnance d'interdiction de possession d'arme à feu. Ces effets sur les propriétaires et les policiers ont pour résultats de diminuer le nombre d'armes à feu sans restriction mal entreposées, perdues ou égarées et, ce faisant, de rendre ce type d'arme moins facilement accessible aux personnes susceptibles d'en faire une mauvaise utilisation. Cela est important, sachant que l'accès à une arme à feu est reconnu depuis longtemps dans la documentation scientifique comme un facteur de risque important de suicide et d'homicide par arme à feu, l'arme étant un facteur qui facilite le passage à l'acte chez ceux enclins à commettre un suicide ou un homicide.
    L'efficacité de ces deux mesures, le permis et l'enregistrement, est également due au fait qu'elle vise tous les propriétaires d'arme à feu sans restriction, ce qui permet d'agir sur toutes les armes appartenant à cette catégorie.
    En conclusion, considérant que: la grande majorité des décès liés aux armes à feu sont des suicides et n'impliquent pas le milieu criminel; que l'entrée en vigueur du projet de loi C-68 est associée, en moyenne, à une diminution de 300 décès par arme à feu, chaque année, au Canada, dont 250 suicides; que l'enregistrement obligatoire des armes à feu sans restriction est une des principales mesures implantées à la suite de l'adoption du projet de loi; que le système canadien d'enregistrement des armes à feu sans restriction est maintenant bien implanté et fonctionnel; que la plupart des armes à feu sans restriction présentement en circulation au Canada ont déjà été enregistrées; que le coût actuel de fonctionnement du système d'enregistrement est relativement faible — on parle de 9 millions de dollars, au regard des 300 vies sauvées et de coûts ainsi évités, d'environ 400 millions de dollars chaque année depuis l'entrée en vigueur du projet de loi C-68 —; que le fait d'enregistrer une arme à feu sans restriction n'empêche pas l'utilisation légitime de cette arme par son propriétaire pour la chasse ou le tir, mais vise plutôt à rendre les armes à feu sans restriction moins accessibles aux personnes susceptibles d'en faire un mauvais usage, l'Institut national de santé publique du Québec formule la recommandation suivante: maintenir intégralement les mesures de contrôle des armes à feu implantées à la suite de l'adoption du projet de loi C-68, incluant l'obligation pour tous les propriétaires d'armes à feu sans restriction d'enregistrer chacune des armes possédées.
    En résumé, d'un point de vue de santé publique, c'est comme si la société canadienne disposait d'un médicament permettant d'éviter 300 décès par année. Deux ingrédients importants entrent dans la composition de ce médicament. Dans le cas présent, il s'agit du permis et de l'enregistrement. Il nous semble périlleux de changer la composition de ce médicament en l'amputant d'un de ses ingrédients importants, d'autant plus que les effets secondaires associés à l'enregistrement des armes à feu sont minimes.
    Merci de votre attention.

  (1540)  

[Traduction]

    Merci.
    Passons maintenant à M. William Blair.
    La parole est à vous, monsieur.
    Je m'appelle William Blair et je suis le chef du service de police de Toronto.
    Tout comme les autres chefs au Canada, j'ai été policier sur le terrain pendant des dizaines d'années. Je fais partie du service de police de Toronto depuis le 1er novembre 1976, et au cours des 33 dernières années, j'ai occupé pratiquement toutes les fonctions policières possibles. J'ai travaillé dans certains des quartiers les plus durs des grandes villes du pays. J'ai passé des années comme agent d'infiltration au sein de l'escouade antidrogue. J'ai aussi fait partie de la brigade des attaques à main armée et j'ai mis sur pied des unités de lutte contre la narcocriminalité, de même que notre escouade contre les armes à feu et les gangs.
    Pendant trois ans, j'ai été commandant de toutes les unités de détectives à Toronto, dont la brigade des homicides, l'unité sur les crimes sexuels, l'escouade antidrogue de Toronto et nos services du renseignement. En 2005, j'ai été nommé chef du service de police de Toronto; du coup, j'ai accepté la responsabilité législative d'assurer la sécurité des 2,7 millions de Torontois et de mes 5 600 agents. C'est une responsabilité que je prends très au sérieux.
    Cette responsabilité consiste en partie à fournir aux agents tous les outils, toute la formation et toutes les ressources dont ils ont besoin pour faire leur travail de manière efficace et en toute sécurité. Le Registre canadien des armes à feu est l'un de ces outils.
    Depuis ma nomination, le service de police de Toronto a mis en place l'une des plus grandes escouades intégrées contre les armes à feu et les gangs en Amérique du Nord, parmi les premières sur le continent. Nous travaillons dans un milieu d'enquête intégré en partenariat avec, entre autres, l'Équipe nationale de soutien à l'application de la Loi sur les armes à feu de la GRC, l'Unité provinciale de contrôle des armes de la Police provinciale de l'Ontario et tous les services de police régionaux de la région du Grand Toronto. L'escouade est l'une des unités d'enquête les plus efficaces dans le domaine de la violence armée au Canada. Elle a mené quelques-unes des plus importantes enquêtes sur les gangs en Amérique du Nord et a l'un des taux de succès les plus élevés. Son expertise est reconnue à l'échelle internationale. Elle se sert du registre des armes à feu chaque jour.
    L'escouade me dit qu'elle a besoin de l'information que contient le registre pour faire son travail, pour élucider des crimes et poursuivre des délinquants en justice. Elle s'en sert pour contrôler l'offre d'armes à feu légales et pour retracer l'origine de toutes les armes ayant servi à commettre un crime.
    Les enquêteurs chargés du dossier de la violence familiale consultent régulièrement le registre pour déterminer la quantité et le type d'armes enregistrées au nom d'une personne impliquée dans une dispute susceptible de devenir violente; dans un tel cas, ils pourront obtenir un mandat relatif à la sécurité publique en vue de retirer ces armes de la circulation. Ils savent que ce genre d'effort a déjà sauvé des vies et permis d'éviter des tragédies. La diminution des cas de violence familiale armée prouve qu'ils ont raison.
    Les enquêteurs criminels vérifient régulièrement le registre pour déterminer l'origine des armes qui sont saisies et le nom du propriétaire. Ils l'utilisent pour obtenir des preuves en vue de poursuites au criminel, pour identifier une arme volée et la remettre à son véritable propriétaire, pour résoudre des crimes graves. Ils l'utilisent chaque jour.
    Dans mon service, les agents me disent qu'ils ont besoin des renseignements que contient le registre pour faire leur travail. Les répartiteurs vérifient régulièrement les adresses pour donner aux premiers intervenants des renseignements qui les garderont du danger. Les agents de première ligne demandent à ce que le registre soit vérifié dans une situation qui pourrait s'avérer dangereuse. Les agents des unités tactiques consultent le registre pour déterminer la quantité et le type d'armes auxquelles ils ont des chances d'être confrontés lorsqu'ils doivent forcer la résidence d'une personne qui s'est barricadée ou lorsqu'ils doivent exécuter un mandat de perquisition.
    Ces vérifications ne sont pas faites, comme on l'a suggéré, par ordinateur. Elles sont demandées par des policiers qui tiennent à avoir des renseignements précis et fiables pour accomplir leur travail. Ils savent que le registre des armes à feu est un outil qui les aide à faire leur travail de manière efficace et en toute sécurité.
    Ils m'ont demandé de les représenter devant vous et de vous demander en leur nom de ne pas leur enlever l'accès aux renseignements que contient le registre. Le syndicat de la police de Toronto, qui représente leurs intérêts, est lui aussi un grand défenseur du registre. Il sait que les renseignements qu'il contient permettent de protéger ses membres du danger. Nous connaissons tous sa valeur et nous tenons à ce que vous le sachiez aussi.
    Nous connaissons également les limites de tout système d'information à l'appui du travail des policiers. Les renseignements doivent être vérifiés. Le renseignement criminel est à l'image de sa source, ni meilleur ni pire, et on doit toujours le mettre en contexte. La base de données du registre des armes à feu est un des outils qui existent. Elle ne permet pas de prévenir ni d'élucider tous les crimes, non plus qu'elle peut garantir la sécurité de chaque policier. Personne ne s'attend à ça. Mais nous nous attendons à avoir accès aux meilleurs renseignements, et aux plus précis. Nous demandons l'accès aux renseignements contenus dans le registre des armes à feu.
    Comme tous les outils que nous utilisons, le registre des armes à feu n'est ni parfait, ni efficace dans toutes les situations. Ce ne sont pas tous les criminels qui enregistrent leurs armes. Il y aura des infractions à la loi. Le registre ne permettra pas de dissuader tous les criminels ni d'élucider tous les crimes. La police n'a jamais prétendu que c'était le cas. Ce que nous prétendons, forts de l'autorité que nous confère l'utilisation quotidienne des renseignements contenus dans le registre, c'est que c'est un outil qui nous aide à faire notre travail. Les criminels n'enregistrent pas tous leurs armes, c'est bien d'accord, mais grâce au registre, nous pouvons déterminer l'origine de l'arme d'un criminel. Nous pouvons les tenir responsables, eux et les personnes qui leur ont fourni ces armes.
    Le registre nous fournit des renseignements, des preuves. Il rend les propriétaires d'armes responsables et il les encourage à s'occuper de leurs armes de manière responsable. C'est un outil précieux qui reste malgré tout faillible. Ce n'est évidemment pas le seul outil dont nous avons besoin, et personne ne prétend que c'est une panacée. C'est néanmoins un outil important.
    De même, aucune loi, aussi détaillée et bien rédigée soit-elle, ne peut prévenir tous les crimes. Aucune peine minimale, aussi sévère et certaine soit-elle, ne peut dissuader tous les criminels à l'esprit violent. Aucun investissement dans la collecte de renseignements criminels ne garantira notre sécurité. Même la certitude absolue d'être arrêté et envoyé en prison ne dissuade pas tous les criminels. Je le répète, aucune personne sensée ne ferait une telle suggestion.
    En 2009, j'ai été élu président de l'Association canadienne des chefs de police. Parmi nos membres, on compte des chefs de police et des membres supérieurs des services de police de toutes les tailles et de toutes les régions du Canada, comme les commissaires de la GRC, de la Police provinciale de l'Ontario et de la Sûreté du Québec, de même que des chefs des services policiers des grandes villes comme des petites.

  (1545)  

    Depuis 1905, les chefs de police du Canada entier rassemblent leurs forces au sein de l'Association canadienne des chefs de police pour promouvoir la sécurité publique. Depuis plus d'un siècle, nos contributions et notre appui ont été prisés et recherchés par les gouvernements successifs du pays.
    La légitimité de l'ACCP en tant que voix nationale et rassurante en matière de leadership policier au Canada n'a jamais été remise en question auparavant. L'intégrité de nos membres et notre engagement à assurer la sécurité de leurs communautés et des agents qui y travaillent sont acceptés et reconnus dans les villes et les municipalités d'un bout à l'autre du Canada.
    En tant que président de l'ACCP, il en va de ma responsabilité de faire valoir les positions adoptées collectivement par nos membres. Depuis 1974, l'ACCP plaide en faveur des outils qui nous permettront d'enrayer efficacement la violence armée.
    En 1994, l'ACCP a adopté une résolution demandant au gouvernement du Canada de promulguer des lois exigeant l'enregistrement de toutes les armes à feu, y compris des armes d'épaule. L'ACCP n'a jamais dérogé à cette position. Cela ne veut pas dire que nous sommes en faveur des dépenses inutiles; nous ne le sommes pas. L'ACCP reconnaît que la Loi sur les armes à feu n'a pas été mise en oeuvre efficacement.
    Avant 2005, nos membres s'étaient également dit irrités du coût du programme des armes à feu et de son manque d'efficacité apparent. Par exemple, en janvier 2003, le commissaire Fantino a exprimé sa frustration à l'égard du système. C'était il y a plus de sept ans. Aujourd'hui, la Police provinciale de l'Ontario qu'il dirige se sert du registre plus de 1 500 fois par jour. Elle le fait de façon très efficace. Elle s'en sert pour rendre la province plus sûre pour tous les Ontariens.
    Le fonctionnement du registre des armes d'épaule s'est nettement amélioré depuis que cette responsabilité a été transférée à la GRC en 2006. Celle-ci s'est tout de suite attaquée à la création d'un système plus efficace et économique. Le registre des armes d'épaule coûte aujourd'hui 4,1 millions de dollars par année. La GRC a simplifié le processus d'enregistrement des armes pour les Canadiens. L'information consignée au registre est maintenant plus accessible et plus fiable. Les enquêteurs et les agents de première ligne ont maintenant accès à une meilleure formation en ce qui a trait à l'information figurant au registre. La GRC a élaboré des outils d'établissement de rapports dont se servent les services policiers pour encourager l'utilisation responsable des armes à feu par leurs propriétaires. Elle a rendu possible l'application des ordonnances d'interdiction et la révocation des permis en fournissant des renseignements précis et fiables quant au nombre, au type, au calibre et aux numéros de série d'armes en possession de personnes réputées dangereuses. Sans cette information du registre, les policiers n'auraient aucun moyen de déterminer quelles armes ont véritablement été enregistrées par une personne à qui il est interdit d'en posséder. La loi nous permet de saisir ces armes à feu mais, en l'absence du registre, nous n'aurions aucun moyen de déterminer qu'elles existent.
    Ce n'est pas un hasard si les quelques détracteurs au sein des forces de l'ordre — sur lesquels s'appuie d'ailleurs le lobby des armes à feu — sont des gens qui ont pris leur retraite il y a au moins cinq ans ou qui n'ont pas d'expérience récente de l'utilisation de la base de données du registre des armes à feu. Ils ne savent pas comment fonctionne le registre. Ils ne l'ont jamais utilisé, mais ils savent qu'ils le réprouvent. Personne ne devrait se leurrer au point de penser se faire la voix de la majorité silencieuse des policiers en service au Canada.
    Les policiers sont parfaitement capables d'exprimer leurs propres opinions. Nous le faisons individuellement et nous sommes nombreux à le faire, en dépit de déclarations clairement erronées comme quoi les chefs ont muselé tous ceux parmi leurs rangs qui ont des opinions divergentes. Quiconque oserait avancer l'idée voulant que les syndicats policiers sont complices de la suppression des préoccupations légitimes des policiers ne connaît pas grand-chose à propos des policiers ou espère du moins avoir affaire à quelqu'un qui en sait peu.
    Le plus souvent, nous élisons des représentants qui s'expriment en notre nom. Les chefs de police ont formé des associations pour représenter leurs intérêts nationaux ou régionaux. Les policiers deviennent membres d'associations ou de syndicats qui s'expriment en leur nom. Cette façon de faire fonctionne de façon optimale lorsqu'une majorité écrasante voit d'un même oeil une question considérablement importante liée à la sécurité du public et des policiers.
    Le maintien du registre des armes d'épaule est une de ces questions. C'est un enjeu qui a rassemblé peut-être plus que tout autre l'ensemble des dirigeants de services policiers au Canada. C'est un enjeu qui a rassemblé les chefs de services policiers, les associations de policiers et les commissions de police du Canada entier. Nous sommes tous d'avis que l'enregistrement de toutes les armes à feu, y compris des armes d'épaule, est important pour assurer la sécurité des Canadiens et des agents de police.
    Nous estimons que le projet de loi C-391 est malavisé et qu'il se fonde sur une incompréhension révolue du système actuel. Nous estimons que l'abolition du registre des armes à feu rendra nos collectivités moins sûres. Nos policiers ne pourront pas lutter aussi efficacement contre les crimes violents. Cette situation fera en sorte d'augmenter le niveau déjà élevé de difficulté et de danger qui caractérise le travail des policiers.
    J'ai avec moi aujourd'hui des résolutions et des lettres produites par les associations de chefs de police de toutes les provinces du Canada au sujet du registre des armes à feu. Je vous implore de lire ces résolutions. Elles abondent toutes dans le même sens. De la Colombie-Britannique jusqu'à Terre-Neuve-et-Labrador, les dirigeants et les chefs de police indiquent au Parlement qu'ils appuient le maintien du registre.
    Certains sont allés plus loin encore, non seulement en reconnaissant la valeur du registre actuel, mais également en demandant au gouvernement d'en faire davantage. Ils veulent une amélioration du registre. Ils aimeraient que le registre soit encore plus efficace. Ils veulent tenir compte des préoccupations légitimes des propriétaires d'arme à feu respectueux des lois, en éliminant la menace de sanctions criminelles et en établissant un mécanisme de contraventions pour encourager la conformité; l'ACCP appuie cette mesure. Ils veulent de nouveaux outils de recherche et de saisie, des peines plus strictes pour les auteurs de crimes violents perpétrés au moyen d'armes à feu et un meilleur contrôle des armes qui traversent leurs frontières. Ils ne sont pas en faveur du retrait de renseignements utiles auxquels ils avaient auparavant accès.
    En plus des résolutions de chacune des associations provinciales des chefs de police, je vous ai fourni des lettres écrites par des chefs de police oeuvrant dans de plus petites collectivités ou dans des collectivités rurales et nordiques. Ils ont manifesté leur appui quant au maintien du registre des armes d'épaule. Ils ont fait connaître leurs opinions auprès de leurs députés. Comme les autres chefs du Canada, ils expliqueront au cours des prochaines semaines aux citoyens qu'ils se sont engagés à appuyer le maintien du registre des armes d'épaule et à s'opposer au projet de loi C-391.

  (1550)  

    Lorsque les Canadiens entendront leurs chefs de police parler de l'importance du registre pour assurer la sécurité du public, je crois qu'ils en appuieront le maintien.
    Je sais aussi que la GRC a mené une vérification interne du programme des armes à feu et qu'elle a évalué son efficacité. Si je ne m'abuse, les rapports indiquent tous deux que le programme des armes à feu offre un excellent rapport coût-efficacité et qu'il est géré de façon efficace. Lorsque les Canadiens auront accès à ce rapport, je crois qu'ils trouveront la réponse à bon nombre des questions qui demeurent en suspens.
    Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Priscilla de Villiers.
    Pourrais-je demander au greffier de distribuer cette dernière page manquante de mon exposé en anglais et en français?
    Certainement. Nous allons la distribuer.
    Allez-y.
    Merci.
    Merci beaucoup de m'avoir invitée ici aujourd'hui. Mon nom est Priscilla de Villiers et je travaille depuis 19 ans auprès des victimes d'actes criminels. Mon exposé d'aujourd'hui s'intitule « Coûts liés à la violence commise par arme à feu et répercussions sur les victimes ».
    Ces dernières années, dans le cadre des nombreux débats au sujet du registre des armes à feu, nous avons très peu abordé le sujet de l'innommable douleur humaine découlant de l'utilisation criminelle, accidentelle ou auto-infligée des armes à feu. On présente les décès et les traumatismes comme des statistiques, et ce sans tenter d'évaluer l'énormité des pertes causées à notre société, à nos communautés et à nos familles. Il est temps de mettre l'accent du débat non plus sur les « droits » des propriétaires d'armes à feu, mais sur le droit de la population à la sécurité. En particulier, il faudrait reconnaître le rôle des armes à feu acquises légalement dans la violence familiale perpétrée à l'endroit des femmes et des enfants.
    Depuis le début, les victimes ont été à l'avant-scène de la lutte visant à renforcer les lois canadiennes sur le contrôle des armes à feu, et nous avons applaudi l'adoption de la Loi sur les armes à feu en 1995. Les mesures adoptées avaient pour objectif de prévenir des tragédies et de prendre en compte les droits des Canadiens à la sécurité. En 1993, nous avons présenté au gouvernement la pétition de Villiers, signée par 2,5 millions de Canadiens. On faisait observer que les crimes violents contre la personne étaient répugnants et que certaines personnes y étaient particulièrement vulnérables, c'est-à-dire les enfants, les femmes et les personnes handicapées.
    Bien que nombre de modifications aient été apportées et que des lacunes soient en voie d'être corrigées, il faut en faire encore davantage pour protéger les Canadiens. Nous nous sommes présentés devant un certain nombre de comités, avons parlé aux médias et avons écrit aux élus. Nous avons lutté jusqu'en Cour suprême du Canada afin de défendre nos lois sur les armes à feu et ce n'est pas maintenant que nous allons abandonner.
    Bien que nous soyons d'accord avec la proposition d'améliorer certains aspects du système, permettez-moi de vous rappeler que ces améliorations ne doivent pas être apportées aux dépens de la vie de gens. La violence armée constitue un problème social complexe qui nécessite un ensemble complet de solutions. Un contrôle strict des armes à feu fait partie de cette solution. Peu importe le soutien, les services ou les bons mots offerts aux victimes, nous sommes convaincus qu'aucune vie ne devrait être sacrifiée, qu'aucune blessure ne devrait être tolérée et qu'aucune personne vulnérable ne devrait être prise en otage au Canada alors que ces situations pourraient être évitées dans une grande mesure.
    Ceux qui comme moi ont souffert veulent éviter que d'autres personnes subissent le même sort. Dans leur forme actuelle, les lois canadiennes sur le contrôle des armes à feu sont le résultat d'au moins six enquêtes publiques ayant souligné l'importance d'obtenir un permis et d'enregistrer les armes comme moyen d'empêcher que des tragédies se produisent dans l'avenir. Les mesures prévues dans la Loi sur les armes à feu constituent d'importants moyens de prévenir la violence.
    Je vais aborder certains des faits et des mythes à propos du contrôle des armes à feu au Canada. On dit que les fusils de chasse ne sont pas dangereux. C'est un mythe. Ma fille a été tuée au moyen d'un fusil de chasse, tout comme un nombre trop élevé d'autres victimes. J'ai ici quelques données que vous pouvez consulter.
    En 1991, Karen Marquis et ma fille, Nina de Villiers, se sont fait tirer et tuer par un prédateur sexuel qui possédait sa propre carabine, qu'il avait utilisée peu avant pour terroriser et menacer sa victime lors d'une agression sexuelle violente. Il a par la suite retourné son arme contre lui. L'enquête au sujet de sa mort et de celle de cinq autres personnes commandait la création d'un registre des armes à feu. Voici un message clair du coroner au sujet des terribles tragédies de nature criminelle, accidentelle ou auto-infligée: « Ce que nous apprenons dans un cas peut contribuer à sauver la vie de nombreuses personnes. »
    Les carabines et les fusils de chasse sont les armes à feu les plus souvent utilisées dans les cas de violence familiale, de suicide, d'accidents et de meurtres d'agents de la paix. Il y a trois mécanismes par lesquels l'accessibilité des armes à feu augmente la violence. Les armes à feu incitent à la violence. Les armes à feu facilitent la violence. Les armes à feu intensifient la violence.
    Le fait que les armes puissent être utilisées dans les sports, constituer des objets de collection ou remplir d'autres objectifs ne change en rien leur dangerosité inhérente. Les armes à feu présentes dans les domiciles continuent d'être la principale cause de suicide chez les jeunes hommes, deviennent des armes mortelles dans les cas de violence familiale, servent à intimider et à terroriser les enfants et sont la cause de blessures accidentelles et de décès. Beaucoup de ces cas ne sont jamais signalés publiquement.
    Bien qu'il y ait plus de fusils dans les régions rurales et dans l'ouest du pays et que l'opposition au contrôle des armes à feu y soit plus forte, c'est aussi là que les taux de décès et de blessures par armes à feu sont les plus élevés et qu'ils mettent en cause des carabines et des fusils de chasse. Les carabines et les fusils de chasse constituent de puissantes armes qui peuvent se révéler mortelles ou causer de graves blessures lorsqu'elles sont mal utilisées.

  (1555)  

    Par exemple, un seul fusil semi-automatique, un Ruger Mini-14, a été utilisé pour assassiner 14 jeunes femmes et en blesser 27 autres en 22 minutes à l'École Polytechnique de Montréal. Ce fusil est toujours vendu comme un fusil de chasse sans restriction.
    Le deuxième mythe, c'est que le registre ne fonctionne pas; les permis octroyés aux propriétaires de fusils suffisent. Les faits sont les suivants: de fois en fois, des recommandations sont formulées dans le cadre d'enquêtes publiques aux fins de l'obtention de permis et de l'enregistrement des armes. Les responsables de six enquêtes distinctes ont réclamé ces mesures et ont formulé de nombreuses recommandations pour renforcer les processus de sélection et réduire la période de renouvellement. Vous trouverez la liste des enquêtes dans le document.
    Les victimes ont mené leur combat jusqu'en Cour suprême du Canada afin de défendre la loi qui a été forgée dans la mort et la misère. En juin 2000, dans une décision rendue à l'unanimité, les neuf juges de la Cour suprême ont indiqué ce qui suit:
Les dispositions relatives à l'enregistrement ne peuvent être retranchées de la Loi. [...] Ces catégories de dispositions de la Loi sur les armes à feu sont étroitement liées au but visé par le Parlement, la promotion de la sécurité par la réduction de l'usage abusif de toutes les armes à feu. Ces deux catégories sont partie intégrante et nécessaire du régime.
    La rapporteure spéciale des Nations Unies sur la violence envers les femmes et le rapporteur spécial sur les droits de la personne et les armes légères ont souligné que les États qui ne réglementent pas adéquatement les armes à feu ne remplissent pas leurs engagements en vertu du droit international.
    Au Canada, la cour a statué à maintes reprises que posséder une arme à feu est un privilège et non un droit. Nos proches ont aussi des droits. En effet, l'article 7 de la Charte affirme que tout un chacun a le droit à la sécurité de sa personne. Les propriétaires de fusil ont un privilège et ce privilège s'accompagne de responsabilités et d'une obligation de rendre compte.
    Il est impossible de contrôler efficacement les armes à feu sans disposer de renseignements sur leurs propriétaires. L'enregistrement des armes à feu responsabilise les propriétaires par rapport à leurs fusils et réduit les risques que des pistolets acquis légalement soient détournés vers des propriétaires sans permis. L'enregistrement fait également en sorte de réduire les risques que des personnes dangereuses aient accès à des armes.
    Nous avons entendu parler de tous les avantages pour les policiers. Sans enregistrement, il est impossible pour la police de s'assurer que toutes les armes à feu sont retirées d'un propriétaire non détenteur de permis.
    Le troisième mythe, c'est que l'enregistrement est un cauchemar bureaucratique onéreux qui n'a pas sauvé une seule vie canadienne. Quels sont les coûts de la vie humaine? La violence armée coûte 6,6 milliards de dollars aux Canadiens. Selon le ministère de la Justice, ce sont les victimes qui assument 47 p. 100 de ces coûts. Il n'existe aucune police d'assurance qui indemnise les victimes de violence. Celles-ci assument non seulement les coûts financiers, mais aussi les effets continus sur leur santé mentale, leurs capacités physiques, leurs relations personnelles et leur emploi. En 2004, l'Institut canadien d'information sur la santé a estimé qu'il coûte en moyenne 7 000 $ pour chaque patient qui doit passer une nuit à l'hôpital. Cela ne comprend pas les soins d'urgence, les chirurgies d'un jour, les soins à long terme, les cliniques d'hôpital ou les paiements à l'acte versés aux médecins.
    Il faudrait aussi prendre en compte les coûts indirects de la violence armée ainsi que de l'intimidation et du harcèlement au moyen d'une arme à feu. Les effets sur la victime peuvent être profondément invalidants.
    C'est bien beau d'examiner le passé, mais je suis également d'avis qu'il faut toujours regarder vers l'avenir. Compte tenu des données et des faits mentionnés dans le présent document, nous recommandons au comité de voter contre le projet de loi C-391. Le registre des armes d'épaule est une composante essentielle de la loi canadienne sur le contrôle des armes à feu. Nous sommes disposés à faire quelques compromis pourvu que ceux-ci ne mettent pas en danger la sécurité publique. Les propositions visant à abolir de manière permanente les frais d'enregistrement des armes à feu tout en retirant des ressources financières du programme constituent un compromis raisonnable avec les propriétaires d'armes à feu. La création d'une infraction non criminelle supplémentaire pour tout manquement à enregistrer une arme à feu l'est également.
    Enfin, nous demandons aussi la mise sur pied d'une campagne nationale d'information visant à renseigner les Canadiens sur toutes les questions importantes mentionnées dans ce document, dans le cadre d'une stratégie nationale de santé publique et d'une stratégie de prévention de la violence. Aucun programme d'enregistrement ne peut fonctionner efficacement sans que des renseignements éclairés, précis et à jour soient transmis de façon constante à la population.

  (1600)  

    Nos vies et notre sécurité méritent bien mieux.
    Merci.
    Merci, madame. Je vous ai accordé un peu plus de temps et je sais que vous avez probablement omis certains éléments, mais vous pourrez peut-être y revenir pendant les séries de questions.
    Certainement. Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous entendrons maintenant M. Greg Farrant, représentant de la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario. À vous la parole, monsieur.
    Bon après-midi, monsieur le président, membres du comité et collègues panélistes.
    Au nom de l'Ontario Federation of Anglers and Hunters, organisation qui compte 100 000 membres et 670 clubs membres répartis dans tout l'Ontario, je vous remercie de l'occasion qui m'est donnée de témoigner devant vous aujourd'hui pour présenter des commentaires sur le projet de loi C-391 déposé par Mme Hoeppner.
    Si on remonte de quelques années dans le temps, le projet de loi C-68 a été conçu au lendemain d'un événement tragique et il est né des préoccupations du public après l'effroyable assassinat de 14 femmes à l'École polytechnique, à Montréal. Aucune personne sensée ne saurait sous-estimer l'impact d'un tel événement sur les familles des victimes, et personne ne peut dire en toute certitude, à moins d'en avoir fait directement l'expérience, le coût émotionnel que doivent supporter les membres des familles d'autres victimes d'armes à feu, dont certains panélistes ici présents, ni les conséquences pour leur vie.
    L'OFAH est en faveur d'un contrôle efficace des armes à feu, un peu comme l'ancien système d'autorisation d'acquisition d'armes à feu, qui ne ciblait pas injustement ou inutilement les propriétaires légaux d'armes à feu qui respectent les lois; mais je dois dire que c'est faire fausse route que d'établir une politique publique basée sur l'émotion, plutôt que sur les faits. À la suite de la fusillade de Marc Lépine, la Coalition canadienne pour le contrôle des armes a convaincu le gouvernement qu'un contrôle plus rigoureux des armes renforcerait notre sécurité. Au fil des ans, malheureusement, d'autres incidents — les fusillades au Collège Dawson et à Mayerthorpe, entre autres — ont démontré l'absence de fondement de l'argument initial voulant que le registre des armes d'épaule préviendrait la criminalité et améliorerait la sécurité du public.
    Le projet de loi C-68 prévoyait un système d'attribution de permis et l'imposition de sentences obligatoires pour l'utilisation d'une arme à feu à des fins criminelles, un élément qui a été ignoré, qui a fait l'objet de marchandage et dont on a abusé de façon générale en négociant les peines des contrevenants, notamment en prenant en considération le temps déjà passé derrière les barreaux et les ententes « deux pour un ». Il a aussi établi une nouvelle procédure d'attribution des permis aux propriétaires d'armes à feu qui reposait sur une série de mesures de contrôle telles qu'une période d'attente obligatoire, une vérification des antécédents criminels et de santé mentale, ainsi que la consultation du conjoint qui, si elles étaient appliquées de manière appropriée, donneraient au public une assurance raisonnable que le demandeur peut posséder et utiliser une arme à feu de façon légale et sécuritaire. Malheureusement, ces mesures de vérification ne sont pas toujours appliquées.
    Au départ, de nombreux spécialistes, au gouvernement et à l'extérieur, ont affirmé qu'un registre des armes d'épaule serait beaucoup trop coûteux et ne serait rien d'autre qu'un symbole politique vide de sens. En fait, selon M. John Dixon, qui à l'époque était conseiller principal du ministre de la Justice, toutes les études portant sur l'opportunité de créer un registre universel des armes à feu au ministère de la Justice en arrivaient essentiellement à la même conclusion: une telle mesure serait prohibitive et pourrait même avoir une incidence négative sur la sécurité publique. À l'époque, la présidente de la coalition pour le contrôle des armes a déclaré à la CBC que l'argument en faveur du contrôle des armes n'a jamais reposé sur des cas individuels. Il a toujours reposé sur le principe qu'un contrôle adéquat de l'ensemble des armes contribuerait à réduire les risques que des personnes dangereuses y aient accès. Mais elles ne disparaîtront pas. Dans la meilleure des hypothèses, cette position est malhonnête.
    Le débat sur le contrôle des armes et la création d'un registre des armes d'épaule en vertu du projet de loi C-68 découlaient directement des gestes insensés d'une seule personne. Avant cet incident, le contrôle des armes n'était aucunement un enjeu de politique publique, et la création d'un régime visant à réglementer les armes à feu légales, dans le cas présent les armes d'épaule, comme moyen de protéger le public contre des personnes éprouvant de la rancoeur était une mauvaise idée dès le départ. Les arguments actuellement invoqués pour prétendre qu'en apportant simplement des ajustements au registre pour qu'il fonctionne mieux et que la création du registre serait ainsi justifiée sont tout aussi erronés. Même un registre bien administré ne préviendra pas les crimes de violence imprévisibles. Croire cela ne tient pas compte du fait évident que les criminels n'enregistrent pas leurs armes à feu et que, pire encore, le projet de loi C-68 ne comportait aucune disposition découlant de la Loi sur les armes à feu pour garder la traces des délinquants frappés d'une interdiction, qui sont les plus susceptibles de commettre des crimes avec une arme à feu.
    Au fil des années, on a beaucoup parlé du coût du registre des armes d'épaule; certains ont affirmé qu'il en avait coûté aux contribuables plus d'un milliard de dollars. En fait, la vérificatrice générale a abondamment commenté cet aspect du régime et je n'ai pas l'intention de m'y attarder longuement aujourd'hui. Toutefois, si alarmants que soient ces coûts énormes, le commentaire le plus accablant, peut-être, qu'a fait la vérificatrice générale tant dans son rapport de 2002 que dans celui de 2006 est que le Centre des armes à feu Canada a été incapable ou a refusé de remettre à son ministère des renseignements qui auraient permis d'étayer le besoin d'un registre des armes d'épaule en tant que mesure de sécurité publique. Je la cite:
Le Centre ne démontre pas comment ces activités contribuent à réduire au minimum les risques pour la sécurité publique avec des résultats reposant sur des faits, par exemple une diminution du nombre de décès, de blessures et de menaces attribuables aux armes à feu.

  (1605)  

    Dans les débats récents et les déclarations publiques sur le projet de loi C-391, les défenseurs du registre des armes d'épaule ont exprimé l'avis que, bien que les coûts avec les années se soient révélés exorbitants, ils se situent maintenant entre quatre et huit millions de dollars par année, montant qu'ils jugent acceptable. À titre de contribuable et de propriétaire d'arme d'épaule, j'estime qu'une telle hypothèse est d'une arrogance inqualifiable. Nous avons tous en tête des exemples de situations où une enquête publique a été réclamée après que le gouvernement ait gaspillé des sommes moins importantes. Pourtant, dans le cas du registre des armes d'épaule, dont les dépassements budgétaires ont atteint des proportions monumentales, certains défenseurs du système passent sous silence la mauvaise gestion financière qui a caractérisé celui-ci dès le départ, en faisant valoir que les dépenses sont aujourd'hui sous contrôle.
    Cette vision étroite ne fait aucun cas du principe fondamental que lorsqu'un système ne fonctionne pas, aucune dépense qui lui est consacrée ne peut être acceptable. Elle ignore aussi le fait qu'à deux occasions, l'ancien gouvernement a réalisé une analyse avantages-coûts du registre: la première est due à l'ancien député Shaughnessy Cohen, et la seconde, à l'actuelle députée et alors ministre Albina Guarnieri. Ces examens n'ont jamais été rendus publics. Pour cette raison, nous sommes incités à penser que si ces études avaient démontré que le système offrait un bon rendement sur l'investissement, elles auraient été diffusées à grand renfort de publicité plutôt que de rester cachées derrière le voile de la confidentialité des délibérations du cabinet. Dans le cas du rapport de Mme Guarnieri, commandé par l'ancien premier ministre Martin après qu'il ait admis que le système faisait fausse route et placé l'ensemble du programme sous observation, les recommandations de l'étude ont été rejetées sans autre forme de procès par ses collègues du cabinet.
    Une lacune fondamentale du registre est que le nombre d'armes à feu et de propriétaires d'armes à feu au Canada ne fait pas l'unanimité et qu'il n'existe aucune évaluation précise du nombre d'armes en circulation. Si on ignore si une grande majorité des armes à feu a été enregistrée, comment peut-on affirmer que le système fonctionne puisqu'il y a un aussi grand nombre d'armes à feu non recensées? Étant donné que toutes les dépenses prévues du programme sont estimées sur la base du nombre possible d'armes à feu au pays, si ce chiffre est erroné, les coûts peuvent fluctuer à l'avenant.
    À mon avis, le commentaire le plus intéressant est celui qui a été formulé par l'ancien commissaire, M. Bill Baker, devant le Comité de la justice de la Chambre des communes, qui affirmait, le 23 octobre 2003: « Je pense que personne au pays ne sait combien il y a d'armes à feu ».
    Pendant des années, le registre des armes d'épaule a été une source de préoccupation sous l'angle de la protection de la vie privée. L'ancien commissaire à la protection de la vie privée a exprimé des inquiétudes au sujet du manque de sécurité des renseignements et de mesures de protection intégrées au système. Tant la vérificatrice générale que la GRC ont reconnu que la vitesse de compilation et la précision des renseignements contenus dans le registre soulevaient des doutes. La Coalition canadienne pour le contrôle des armes a rejeté du revers de la main l'idée selon laquelle le système n'est pas sécuritaire, en faisant valoir qu'il est aussi sécuritaire que le CIPC, la principale base de données utilisée par les policiers au Canada pour l'application des lois. Cependant, selon l'information fournie par la GRC en réponse à une demande d'accès à l'information déposée en 2003, il y avait eu à l'époque 1 495 intrusions dans le système du CIPC, dont 427 ont été confirmées. Devant de tels faits, les assurances données au sujet de l'efficacité du système perdent du poids.
    Ces dernières années, le soutien du public pour le registre a diminué. Les Canadiens et les Canadiennes se sont inquiétés de plus en plus des coûts excessifs du système et commencent à douter de la capacité du système de prévenir la criminalité et de protéger la sécurité publique.
    Pour ne pas dépasser le temps alloué et par souci de brièveté, je vais abréger mes commentaires, monsieur le président. Je parlerai de quelques-unes des recommandations que nous présentons dans notre rapport. Nous en faisons huit au total, mais je ne reviendrai que sur deux d'entre elles aujourd'hui. J'espère que vous aurez l'occasion de lire la totalité de la présentation.
    Première recommandation, il faut supprimer le registre pour toutes les armes à feu sans restrictions. L'adoption du projet de loi C-391 sans modification et l'abrogation subséquente du registre des armes d'épaule réduiraient le fardeau qui pèse sur le système. L'adoption du projet de loi C-391 ne toucherait pas l'enregistrement des armes à feu interdites et à autorisation restreinte, qui se poursuivrait. Le système d'attribution de permis serait aussi maintenu, tout comme la vérification obligatoire des antécédents. L'entreposage et le transport sécuritaires et la formation obligatoire sur l'utilisation des armes à feu se poursuivraient. L'adoption du projet de loi C-391 n'aurait d'incidence que sur le registre des armes d'épaule — rien de plus, rien de moins.
    La deuxième recommandation concerne la création d'un registre des délinquants visés par une interdiction afin de pouvoir surveiller ceux qui ont été condamnés auparavant pour des crimes commis avec une arme à feu. Nous ne devons pas avoir au Canada un registre de personnes autorisées à posséder des armes à feu, mais plutôt un registre des personnes jugées trop dangereuses pour posséder une arme à feu. Cela ressemblerait aux systèmes utilisés par les corps policiers de New York, de Baltimore et de Virginie, qui se sont révélés non seulement très efficaces, mais ont entraîné une baisse du nombre de crimes commis au moyen d'armes à feu. Les délinquants sont obligés de s'enregistrer auprès de l'État, un peu à la manière du registre des délinquants sexuels. Comme l'a indiqué David Kennedy, directeur du Center for Crime Prevention and Control, au John Jay College of Criminal Justice de New York, mettre l'accent sur un nombre restreint d'individus dangereux plutôt que de courir après une foule de gens pour des peccadilles insensées relève du bon sens.
    C'est sur ces mots que je conclurai ma présentation. Je vous remercie encore au nom de l'OFAH de m'avoir donné l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui.

  (1610)  

    Merci beaucoup.
    Nous entendrons maintenant le sergent Murray Grismer.
    Monsieur le président, honorables membres du comité, mesdames et messieurs les témoins, c'est un honneur et un privilège pour moi de témoigner devant vous aujourd'hui afin de vous apporter mon aide dans vos travaux sur le projet de loi C-391.
    Comme vous le savez déjà, je m'appelle Murray Grismer. Ce que certains d'entre vous ignorent peut-être, c'est que je suis membre du service de police de Saskatoon où, au cours de mes 23 années de service, j'ai assuré la protection des citoyens de Saskatoon et de la Saskatchewan. J'ai actuellement le grade de sergent-détective affecté à l'unité des crimes majeurs et des crimes graves.
    Les tribunaux de la Saskatchewan m'ont reconnu le statut de témoin expert, apte à donner une opinion éclairée sur les armes à feu. J'ai apporté mon aide aux autorités fédérales et provinciales dans des cas de poursuites consécutives à des crimes faisant intervenir des armes à feu. Je suis instructeur en sécurité dans le maniement des armes à feu au Canada et je suis vérificateur autorisé reconnu par le directeur de l'enregistrement au Registre canadien des armes à feu.
    Je veux établir clairement dès le départ que les commentaires que je formulerai devant le comité aujourd'hui n'engagent que moi-même. Ils ne représentent en rien l'opinion de mon employeur, du chef ou du service de police.
    Cela dit, j'ai été élu porte-parole de la Saskatoon Police Association pour les questions reliées aux armes à feu, et plus particulièrement la Loi sur les armes à feu et le registre des armes à feu. J'ai également été porte-parole de la Saskatchewan Federation of Police Officers pour les questions reliées à la Loi sur les armes à feu et le registre des armes à feu jusqu'à l'automne 2002. Au cours de mon mandat, j'ai été membre du comité consultatif de l'honorable John Neilson, ministre de la Justice et procureur général de la province de la Saskatchewan; c'est ce comité qui a élaboré la position de la Saskatchewan consistant à se soustraire à l'administration et à l'application de la Loi sur les armes à feu.
    Je sais que votre auguste comité a eu l'occasion d'entendre un certain nombre de policiers à la retraite qui partagent ma conviction selon laquelle il y a lieu de mettre fin à l'existence du registre des carabines et fusils sans restrictions, ce qu'on appelle communément les armes d'épaule. Je crois également comprendre que je suis le seul policier en exercice partageant ce point de vue à être appelé à témoigner.
    Par conséquent, je transmets du même coup l'opinion de milliers de policiers au Canada qui forment, à mon avis, la majorité silencieuse et, dans certains cas, la majorité réduite au silence: pas seulement les policiers auxquels on a ordonné de ne pas exprimer leur opposition au registre des armes d'épaule, mais également ceux qui craignent pour leur carrière s'ils expriment publiquement leur opposition au maintien du registre ou leur divergence avec le point de vue adopté par l'Association canadienne des chefs de police, leur propre chef ou leur commandant.
    Dire que les avis sont partagés au sein de la collectivité des policiers quant au soutien à apporter ou non au registre des armes d'épaule est un euphémisme. Le comité a entendu le témoignage de M. Charles Momy, président de l'Association canadienne des policiers, qui a prétendu exprimer l'opinion de 41 000 policiers au Canada. L'ACP se prononce en faveur du maintien du registre, mais à la vérité, elle adopte cette position sans avoir sondé ses membres.
    La position de l'ACP n'est pas celle de la Saskatchewan Federation of Police Officers, ni celle de la Saskatoon Police Association. La Saskatchewan Federation est la seule fédération ou association provinciale à avoir sondé tous ses membres sur la question du registre des armes à feu. À 99,46 p. 100, les membres de la Saskatoon Police Association se sont prononcés contre le registre des armes d'épaule, tandis que nombre de nos compatriotes en Saskatchewan étaient à 100 p. 100 opposés au registre.
    Certains peuvent choisir de considérer, par arrogance ou égarement, le point de vue des opposants au registre comme étant le produit d'un manque d'information ou de sensibilisation. Rien ne peut être moins vrai; c'est faux dans les deux cas. Nous sommes plutôt d'avis que la pierre angulaire de la sécurité publique est la formation et le filtrage de sécurité des propriétaires d'armes à feu et la délivrance de permis, et non pas l'enregistrement de carabines et de fusils sans restrictions.
    L'ancien gouvernement en exercice et l'ACCP répétaient toujours la même rengaine, à savoir que contrôler les armes à feu, c'est contrôler la criminalité. Le registre est à côté de la plaque quand il s'agit de l'utilisation criminelle d'armes à feu. Il cible les millions de propriétaires légitimes d'armes à feu au nom de la répression de la criminalité. Le fait est que le registre ne permet aucunement de prévenir l'utilisation criminelle d'armes à feu ou l'obtention par des criminels d'armes à feu, pas plus que l'enregistrement des véhicules n'empêche les vols d'auto ou la conduite avec les facultés affaiblies.
    Mme de Villiers, de CAVEAT, défend le point de vue des Canadiens contre la violence. Cette cause louable bénéficie, je crois, du soutien de tous les Canadiens, parce que la violence fait de nous tous des victimes. Madame de Villiers, je vous offre mes plus sincères condoléances pour la perte de votre fille, Nina de Villiers. Mais l'existence d'un registre des armes d'épaule n'aurait pas empêché un événement si tragique de survenir, ni compensé les lacunes du système de justice, et le maintien du registre ne contribuera aucunement à prévenir d'autres actes de ce genre. La formation, un processus plus serré de filtrage de sécurité et le processus de délivrance d'un permis aux propriétaires d'armes à feu auraient pu dès le départ, comme on peut le voir rétrospectivement, empêcher Jonathan Yeo de se procurer une arme à feu. Toutefois, ni le strict régime de délivrance de permis ni le registre des armes à feu du Canada ne peuvent empêcher les actes de violence arbitraires. J'en veux pour preuve la fusillade meurtrière à laquelle s'est livré Kimveer Gill au Collège Dawson.

  (1615)  

    M. Blair, de l'Association canadienne des chefs de police, soutient que les Canadiens maintiennent leur appui à un registre qui coûte aux contribuables plus de deux milliards de dollars et dont il ne peut être démontré après une dizaine d'années d'existence qu'il a contribué à sauver une seule vie. De plus, il passe sous silence le fait qu'il n'y a pas unanimité chez les membres de l'ACCP en ce qui concerne le soutien au registre et qu'il n'y en a jamais eu. Le fait est que l'ACCP a publiquement exprimé son soutien à Allan Rock relativement à la mise sur pied du registre au début et qu'elle lui a conservé son soutien au cours des 15 années suivantes, niant les vertigineux dépassements de coûts alors même que le véritable coût que doivent assumer les Canadiennes et les Canadiens devenait de plus en plus évident. Les groupes d'utilisateurs d'armes à feu de partout au Canada l'avaient prédit dès le départ.
    La complicité entre l'ACCP et les gouvernements libéraux successifs au sujet de l'établissement et du maintien du registre relève de la duplicité. Aujourd'hui, l'ACCP préconise devant vous que les Canadiennes et les Canadiens ferment les yeux sur les deux milliards de dollars qui ont échappé aux prédictions, soutenant que l'argent est déjà dépensé. Elle dit qu'il faut tourner la page, que l'administration du registre n'en coûte plus maintenant que quatre millions de dollars par année. En passant, ce chiffre tend à changer selon le chef ou le cadre de la GRC qui parle.
    À première vue, on pourrait croire qu'il s'agit d'un miracle de gestion d'entreprise plutôt que du produit d'un exercice de créativité comptable attribuable au regroupement avec la GRC. Les anciens budgets annuels du Centre des armes à feu du Canada dépassaient les 92,8 millions de dollars.
    M. Blair tentera de vous convaincre que le maintien du registre est un enjeu de sécurité des policiers. Pour quiconque n'a aucune connaissance personnelle des armes à feu ou du registre, ce point de vue peut sembler raisonnable. Toutefois, dès que l'on connaît et comprend les lacunes du registre, l'enjeu de la sécurité des policiers prend une coloration beaucoup plus sombre. Le policier qui consulte le registre et qui s'en remet à l'information inexacte et non vérifiée qui y figure court à la catastrophe.
    Sachant ce que je sais, je ne peux baser une demande de mandat de perquisition sur l'information qui figure au registre. Agir autrement constituerait un acte criminel. Je ne peux en toute conscience dire à un policier, subalterne ou principal, qu'il peut se fier aux résultats d'une recherche en ligne dans le registre canadien des armes à feu.
    Pour illustrer mon propos, il est bien connu dans les milieux policiers et chez les propriétaires d'armes à feu destinées à des activités sportives qu'il y a au minimum plus d'un million d'armes à feu au Canada qui n'ont jamais été enregistrées. Le registre n'indique ni où les armes à feu sont entreposées, ni qui est à même d'exercer le contrôle sur elles, ni qui est le propriétaire réel de l'arme. Des dizaines de milliers d'armes à feu sont incorrectement enregistrées à l'aide de numéros de brevet ou de catalogue au lieu de numéros de série ou de modèle. Beaucoup d'armes à feu font l'objet d'enregistrements multiples dans le registre.
    Ce n'est là que la pointe de l'iceberg. D'après des projections réalisées à l'interne au Centre canadien des armes à feu, il faudra plus de 70 ans pour éliminer graduellement toutes les erreurs et pour enregistrer toutes les armes actuellement en circulation au Canada.
    Un tel degré d'inexactitude est inacceptable dans quelque secteur d'activités que ce soit, et en particulier en matière d'application de la loi. Les policiers méritent mieux; le public et les tribunaux exigent mieux. S'il y avait un risque d'erreur de même ampleur à la Banque nationale de données génétiques ou dans le Système informatisé de dactyloscopie, le public et les tribunaux seraient indignés, et avec raison. Chaque entrée dans ces bases de données est empirique — un degré d'exactitude que le registre n'atteint pas et ne peut pas atteindre.
    Dans l'exercice de mes fonctions à titre de chef d'équipe du service de sécurité des Jeux olympiques, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec des policiers de partout au Canada. L'immense majorité de ceux avec qui j'ai parlé n'étaient pas favorables au maintien du registre. Ils n'ont pas confiance dans l'information qu'ils y trouvent et ils y voient un gaspillage de temps et d'argent. Certains de ceux avec qui j'ai parlé et qui étaient favorables au registre ont été stupéfaits d'apprendre à quel point le registre était truffé d'inexactitudes et mettait potentiellement à risque la sécurité des policiers.
    Je reviens sur la question de la sécurité des policiers. Les policiers canadiens ne peuvent pas et ne doivent pas mettre leur confiance dans l'information inexacte et non vérifiée que renferme le registre ni exposer leur vie sur la foi de ce dernier. Pour moi, si l'abandon du registre des armes d'épaule devait sauver la vie ne serait-ce que d'un agent de police de première ligne au Canada, cela vaudrait la peine. Conserver le registre au risque qu'un seul policier perde la vie est un prix trop élevé à payer.
    M. Ignatieff a proposé de traiter une première omission d'enregistrer une arme d'épaule comme une simple contravention plutôt que comme un acte criminel, comme c'est le cas actuellement. Cette révélation a été accueillie favorablement par nombre de membres de l'ACCP. Toutefois, elle est, au mieux, fallacieuse et n'est rien d'autre qu'un écran de fumée visant à calmer les inquiétudes du public et des propriétaires d'armes à feu canadiens.
    La vérité, c'est que l'ACCP a exigé qu'Allan Rock et le gouvernement libéral de l'époque se plient à cette condition pour bénéficier de son soutien au projet de loi C-68, la Loi sur les armes à feu. C'est dans cette optique qu'a été rédigé l'article 112 de la Loi sur les armes à feu, qui rend coupable d'une infraction punissable par procédure sommaire tout propriétaire d'une arme à feu dont l'arme n'a pas été enregistrée au départ. La seule différence réside dans le fait que la proposition de M. Ignatieff n'en fait qu'une infraction analogue à une contravention. Le problème est qu'il n'existe pas de mécanisme fédéral analogue à la Summary Offences Procedure Act qui autoriserait une telle approche. Les propriétaires d'armes à feu seraient toujours obligés, sur citation à comparaître, de se présenter devant le tribunal et s'exposeraient, en cas de prononcé de culpabilité, à une amende ne dépassant pas 2 000 $ ou à une peine d'emprisonnement de six mois, ou aux deux.
    En terminant, je voudrais vous remercier pour votre attention en espérant que vous trouverez matière à réflexion dans mes propos.

  (1620)  

    Les sondages indiquent que la majorité des Canadiens veulent que le registre des carabines et des fusils de chasse sans restriction soit aboli. Cette position est appuyée par la majorité des policiers au Canada.
    Le projet de loi C-391 est digne de votre considération et de votre appui, car il vient mettre un terme à un registre qui représente la plus importante et la plus litigieuse perte d'argent des contribuables. Il s'agit d'un registre truffé d'erreurs et de données erronées. Encore plus important, ce registre nuit à la sécurité des policiers de première ligne de l'ensemble du Canada.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Le protocole en vigueur pour les travaux de ce comité permet à chaque parti de s'exprimer pendant sept minutes au cours du premier tour afin de faire des commentaires et de poser des questions aux témoins. Nous commencerons ainsi.
    Je dois dire à ce comité que je quitterai mon siège dans environ 20 minutes. M. Phil McColeman a accepté de me remplacer. Certains autres membres m'ont également dit qu'ils devront se retirer pour peut-être revenir par la suite. Il y a eu une entente préalable à cet égard — je dis ça pour que ceux qui regardent la télédiffusion des travaux du comité comprennent ce qui se passe.
    Monsieur Holland, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci beaucoup aux témoins qui ont comparu aujourd'hui.
    Chef Blair, je pourrais peut-être commencer avec vous. Combien de chefs l'Association canadienne des chefs de police représente-t-elle?

  (1625)  

    Nous comptons plus de 1 100 membres. Elle est composée de chefs de tous les services de police du pays. Toutefois, elle ne se limite pas aux chefs de police. Elle comprend également tous les cadres supérieurs et les chefs adjoints de ces organisations.
    Donc, elle couvre l'ensemble du pays et chaque région.
    C'est une organisation nationale. Elle représente les services de police municipaux, provinciaux et nationaux ainsi que la GRC d'un océan à l'autre.
    Je comprends qu'il y a trois chefs parmi les 428 qui appuient le projet de loi C-391, qui appuient le démantèlement de...
    Comme j'ai déjà siégé au conseil d'administration d'un service de police, je sollicite votre aide. Un sergent qui, j'en suis convaincu, fait un excellent travail à Saskatoon, nous a parlé d'une scission dans le milieu policier. J'ai un problème avec le fait que presque tous les chefs de police du pays, et que presque toutes les associations de policiers du pays, qui sont élus par des membres de première ligne, sont en faveur du registre.
    J'ai un problème avec ça. En tant qu'ancien membre du conseil d'administration d'un service de police, je sais que les membres ne restent pas muets lorsqu'ils ont des préoccupations ou lorsqu'ils sont en désaccords avec leur chef ou leurs associations élues. Est-il raisonnable de croire que cette scission existe, ou croyez-vous que ce point fait presque l'unanimité?
    Je crois fermement qu'il est hautement improbable qu'un policier se soit vu interdire d'exprimer son opinion. Je crois qu'il est tout à fait inimaginable que les syndicats des policiers soient complices de telles choses. Ce sont des sornettes, si je puis dire.
    Lorsque j'ai parlé aux dirigeants des services de police de l'ensemble du pays, j'ai également parlé à des représentants de chaque association de chefs de police provinciale. Bon nombre des chefs de police ne participent pas aux activités de l'organisation nationale, mais les dirigeants des services de police participent aux activités des organisations régionales et des associations provinciales. Chacun d'entre eux s'est dit tout à fait d'accord avec le maintien du registre des armes.
    Nous avons parlé à l'Association canadienne des policiers, mais également aux dirigeants syndicaux des services de police de l'ensemble du Canada. Dans mon service, j'ai parlé à Mike McCormack, le président de notre association de policiers. Il est un grand défenseur de ses membres, de la sécurité de ses membres et du maintien de ce registre. Nous avons reçu des lettres rédigées à titre personnel de chefs de police et de policiers des quatre coins du pays. Aucun ordre n'a été donné, comme on l'a laissé sous-entendre, pour empêcher les policiers d'exprimer leur opinion.
    Nous avons constaté dans presque tous les cas que, lorsque nous donnons des informations précises aux policiers et même aux associations de policiers, ils constatent rapidement la valeur du registre. Lorsqu'ils reçoivent une formation, l'utilisation de ce registre augmente de manière exponentielle.
    Même aujourd'hui, un membre de mon service, le chef de mon unité des armes et des gangs, s'est rendu à Estevan, en Saskatchewan, où il a rencontré l'association des policiers de la Saskatchewan. Des responsables de cette association nous ont écrit pour nous demander de venir leur expliquer le fonctionnement du registre des armes afin qu'ils puissent prendre une décision éclairée à cet égard. Cette réunion s'est déroulée à Estevan ce matin.
    Je crois que les gens veulent réellement connaître les faits, même ceux qui ont entendu des informations erronées concernant le registre. Dès qu'ils connaissent les faits, ils appuient le maintien de ce registre.
    Donc, l'association des policiers, qui est élue par ses membres... le groupe de la Saskatchewan, qui est composé de six associations sur plus de 150, remet en question sa position maintenant qu'il connaît les faits.
    Je me demandais, cependant... Et permettez-moi de dire avant que je passe à mon point suivant que je suis très désolé que le débat ait dégénéré au point où certaines personnes attaquent les chefs de police ou leur prêtent des intentions. Je tiens à vous remercier pour le travail que vous faites. Je crois que c'est une honte que cela se produise.
    Une des choses que je ne comprends pas, c'est que les conservateurs et les autres qui essaient de se débarrasser du registre disent que nous devrions nous débarrasser de l'enregistrement des armes d'épaule parce que l'enregistrement de celles-ci ne fait aucun sens, et du même souffle, ils disent que l'enregistrement des armes de poing devrait être maintenu. Les mêmes arguments ne peuvent-ils pas tenir pour les armes de poing et les armes d'épaule? Ne s'agit-il pas de la même chose?
    L'enregistrement des armes est important pour les services policiers. Il est important pour mes enquêteurs. Savoir que quelqu'un est titulaire d'un permis d'arme à feu est utile. Nous appuyons le régime de permis de ce pays.
    Il est également extrêmement important de savoir combien d'armes une personne possède. À titre d'exemple, si on se rend sur les lieux d'une mésentente conjugale où la vie d'une femme est menacée, on doit savoir combien d'armes se trouvent dans la maison. Le registre nous donnera des renseignements sur la marque, le modèle, le calibre et les numéros de série des armes. Aucun policier n'entrera dans la résidence, trouvera neuf armes enregistrées, et quittera les lieux. Ils continueront. S'ils n'ont pas trouvé les neuf armes enregistrées, ils poursuivront leur recherche pour s'assurer qu'ils ont fait tout ce qui était possible pour retirer les armes à feu et rendre la situation sécuritaire.
    L'information contenue dans le registre nous aide à identifier les armes qui ont été volées et les armes qui ont été utilisées pour commettre des crimes. Elle nous aide à retourner ces armes à leurs propriétaires.
    J'aimerais donner l'exemple d'une situation qui s'est produite à New Glasgow, en Nouvelle-Écosse. Un des chefs, qui avait exprimé son opposition en public, a été très bien cité dans un article de journal à la fin d'une enquête qui a permis de saisir 77 armes à feu. Lorsqu'on lui a demandé ce qu'ils allaient faire, il a dit qu'ils allaient d'abord vérifier si les armes à feu étaient consignées dans le registre pour savoir à qui elles appartiennent afin de les retourner à leurs propriétaires.
    J'ai communiqué avec lui pour savoir ce qui avait été fait. Toutes les armes ont été identifiées. On a réussi à établir l'identité des propriétaires enregistrés et leurs armes leur ont été retournées. La personne qui était en possession de ces armes a été poursuivie en justice pour vol.
    Notre temps est très limité. J'ai une question rapide puis une question plus longue.
    À l'heure actuelle, nous devons enregistrer nos voitures, enregistrer nos chiens et enregistrer nos bateaux. Ces processus ne nous plaisent pas, mais je ne crois pas qu'ils fassent l'objet d'un examen aussi approfondi que l'enregistrement d'une arme. Pouvons-nous dire qu'il est aussi simple d'enregistrer une arme que d'enregistrer une voiture ou autre chose?
    L'enregistrement d'une arme, particulièrement lorsqu'il se fait au point de vente, est en fait plus simple que l'enregistrement d'un véhicule motorisé. J'ai vu comment ça se fait. J'ai vu des gens qui sont très bons dans ce domaine. Ils ont procédé à l'enregistrement d'une arme en 37 secondes. Il faut normalement quelques minutes pour le faire en ligne.
    C'est ma dernière question. Vous avez mentionné qu'une vérification interne a été menée par la GRC. Elle n'a pas été publiée. Elle est frappée d'embargo. Avez-vous une copie de cette vérification interne?

  (1630)  

    J'ai eu le privilège de la voir.
    Il existe en fait deux documents. Le premier est une vérification interne et le second est une évaluation interne du programme des armes à feu. À ce que je comprends, ces deux documents appuient l'efficacité et la valeur du programme des armes à feu, mais ils n'ont pas encore été rendus publics.
    Monsieur le président, c'est la troisième fois qu'un témoin fait référence à ce document, qui est sorti en février 2010. J'aimerais que le comité en demande une copie au commissaire de la GRC. S'il n'est pas possible d'en obtenir une copie bilingue, je suis certain que le comité accepterait volontiers une version unilingue, étant donné que ce dossier est urgent et que trois témoins y ont fait allusion.

[Français]

    Non, monsieur le président, je n'accepte pas de version unilingue anglaise.

[Traduction]

    D'accord. Nous discuterons du point que vous avez soulevé à la fin de la réunion.
    Serait-il possible de réserver cinq minutes à cette fin?
    Je ne serai pas ici. Si vous le souhaitez, et si le comité en décide ainsi, vous pouvez le faire.
    Madame Mourani, la parole est à vous.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Bonjour à tous et merci d'être ici. Je voudrais commencer par M. Maurice, si vous le permettez.
    Monsieur Maurice, dans votre allocution, vous disiez que 300 décès par année sont évités grâce au registre. Hier, nous avons reçu en comité M. Boisvenu et il nous disait qu'il doutait de l'efficacité du registre en tant qu'outil de prévention.
    Que pensez-vous de cela?
    Premièrement, nous n'avons pas dit que 300 décès ont été évités grâce au registre. Nous avons dit qu'il y a eu une réduction de 300 décès associée à la loi C-68.
    Mme Maria Mourani: Excusez-moi, j'avais mal compris.
    Dr Pierre Maurice: Cette loi est composée de deux ingrédients essentiels et très importants que sont le permis de possession et l'enregistrement. Il nous apparaît très périlleux en ce moment, compte tenu de l'efficacité de la loi qui comprend ces deux ingrédients importants, d'amputer la loi d'un de ses ingrédients principaux étant donné qu'on sauve 300 vies par année, au Canada, avec la loi telle qu'elle est.
    Sauf erreur, vous pensez que si on enlève un des deux ingrédients, le système ne serait pas aussi efficace?
    L'efficacité du système est assez grande, car il y a une réduction de 300 décès par année. Considérant que cette mesure est aussi efficace, et considérant tous les coûts que cela représente, il nous apparaîtrait raisonnable de fournir des preuves assez solides et assez bien étayées pour démontrer l'inefficacité du registre avant d'apporter des changements au système. On sait que la loi, telle qu'elle est présentement, permet de réduire efficacement le nombre de décès par armes à feu.
    Vous dites donc que le registre permet de réduire efficacement le nombre de décès par armes à feu?
    On dit que la loi permet de réduire efficacement le nombre de décès, et la loi est composée d'ingrédients, dont le registre.
    Avez-vous des exemples à nous donner relativement au registre en tant qu'outil de prévention?
    Vous voulez dire en dehors des armes à feu?

  (1635)  

    Non. Je parle du registre des armes à feu en tant qu'outil de prévention. Avez-vous un exemple?
    D'une part, le registre des armes à feu et l'ensemble de la loi qui l'accompagne font en sorte que les propriétaires d'armes à feu seront beaucoup plus enclins à suivre les règlements en ce qui concerne l'entreposage, le transfert de possession de l'arme à feu, le don, la vente, etc. D'autre part, c'est un moyen de protection très important pour les forces policières qui ont à intervenir, notamment lorsqu'elles ont à retirer les armes de quelqu'un qui est réputé dangereux.
    Je veux ajouter autre chose. Jusqu'à présent, on a entendu beaucoup d'arguments de la part de gens qui considèrent que le verre est à moitié vide, c'est-à-dire qui considèrent davantage ce que le registre ne permet pas de faire. Or, il faut aussi considérer que la majorité des décès par armes à feu au Canada ne sont pas causés par des criminels qui ne se conforment pas aux lois et aux règlements. La majorité des gens qui décèdent par armes à feu au Canada sont des gens comme vous et moi, des gens bien intentionnés qui respectent les lois et les règlements du Canada et qui, en pratique, la plupart du temps, enregistrent leurs armes. Ainsi, cette connaissance, l'enregistrement des armes et aussi le processus imposé pour l'émission du permis d'arme à feu permettent de diminuer les risques qu'une personne possédant une arme à feu puisse en faire un mauvais usage par suite d'une crise, de difficultés personnelles, d'une maladie mentale, de problèmes de dépression, etc.
    Hier, on a reçu M. Mauser, qui est souvent cité par les membres du gouvernement conservateur et par les différents députés. D'ailleurs, on nous signalait que monsieur avait aussi été cité par M. Day, ex-ministre de la Sécurité publique. On mentionne souvent, même dans les arguments du gouvernement, que les couteaux, et non les armes d'épaule, sont les plus souvent utilisés pour tuer les femmes dans les cas de violence conjugale. D'ailleurs, Mme Hoeppner, elle-même porte-parole en ce qui concerne ce projet de loi, disait qu'un four était aussi dangereux qu'une arme à feu.

[Traduction]

    Il vous reste deux minutes.

[Français]

    Dans votre pratique, avez-vous constaté que les couteaux, les fours, les objets de la maison sont beaucoup plus utilisés que les armes à feu?
    Je vais laisser mon collègue M. Blais répondre à votre question.
    J'ai deux précisions à apporter. Premièrement, il faut savoir que l'arme à feu est l'instrument par excellence pour se suicider ou commettre un homicide, car elle donne un avantage incroyable à l'assaillant sur sa victime. Elle permet de tuer la personne plus rapidement et de façon impersonnelle. Il y a beaucoup de personnes qui ne commettraient pas d'homicide ou qui ne se suicideraient pas avec un couteau si elles n'avaient pas d'arme à feu à leur portée, parce qu'elles seraient incapables de le faire. Prenez l'exemple d'une femme de 100 livres qui attaque un homme de 200 livres; l'arme à feu lui donne un pouvoir incroyable par rapport à sa victime. L'écart de force entre les personnes impliquées n'est plus tellement important avec une arme à feu, mais il le reste avec un couteau.
    La deuxième chose qu'il faut savoir, c'est que si les couteaux sont autant utilisés dans les homicides, s'ils sont utilisés dans une proportion aussi importante, c'est notamment en raison de l'efficacité du contrôle des armes à feu. Le pourcentage d'homicides commis par couteaux peut augmenter en même temps que peut diminuer le taux d'homicides en général. C'est parce que le taux d'homicides par armes à feu diminue que celui par couteaux augmente. Toutefois, ça ne veut pas dire que les couteaux sont plus dangereux.
    Voilà pourquoi ces statistiques doivent être mises en parallèle avec la tendance des taux d'homicides par armes à feu ou par d'autres méthodes.
    J'ai une formation de criminologue et je me rappelle qu'on nous disait, dans le cadre des cours magistraux qui étaient offerts, qu'il était beaucoup plus facile de tuer avec une arme à feu qu'avec un couteau. Tenir un couteau à la main et poignarder quelqu'un comporte toute une dimension personnelle, un contact avec l'individu, ce qui fait que c'est beaucoup plus facile de tuer quelqu'un avec une arme à feu qu'avec un couteau.
    Tout à fait.

[Traduction]

    Nous devons nous arrêter là. Je suis désolé, madame Mourani, mais votre temps est écoulé.
    Je cède maintenant la parole à M. Comartin pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Monsieur Maurice et monsieur Blais, dans votre mémoire et dans vos remarques, vous avez mentionné des études dont les conclusions sont diamétralement opposées à celles présentées hier par le professeur Mauser.
    Êtes-vous au fait des travaux du professeur Mauser? Pourriez-vous nous en parler? Je ne vous demande pas d'en évaluer la qualité, mais plutôt de nous dire si les conclusions qu'il a tirées s'apparentent ou s'opposent à celles des criminologues ou d'autres spécialistes du domaine. Plus précisément, j'aimerais que vous commentiez ses conclusions, à savoir qu'une personne qui possède une arme d'épaule ou une autre arme dans sa maison est plus en sécurité ainsi, qu'elle est moins susceptible de commettre des crimes qu'une personne qui n'en possède pas, et que le registre des armes d'épaule et de poing n'a eu aucun effet bénéfique, s'il n'a pas entraîné la hausse du nombre de crimes. Il a fait une autre remarque encore plus ahurissante, mais je n'arrive pas à m'en rappeler.
    Bref, j'aimerais que vous répondiez à deux questions. Est-ce que ses conclusions s'apparentent ou s'opposent à celles des autres criminologues? Êtes-vous au courant de ses études sur la méthodologie?

  (1640)  

[Français]

    Je vais répondre, étant donné que je mène un programme de recherche en matière de prévention des traumatismes causés par une arme à feu.
    Premièrement, j'ai un grand respect pour M. Mauser. Il a fait d'excellents travaux sur les armes à feu et il y a deux études vraiment citées à répétition dans lesquelles il évalue l'effet de la loi C-51 sur les vols qualifiés et les homicides. Cela étant dit, il faut faire attention lorsqu'on fait des associations. Si l'on parle, par exemple, d'une tendance dans les taux d'homicide ou les taux de vols qualifiés, on ne peut faire une association entre cette tendance et les mesures mises en place par le gouvernement pour lutter contre les homicides et les suicides commis par arme à feu.
    Il faut savoir, à mon avis et par expérience, que le professeur Mauser n'a pas fait d'études d'impact de la loi C-68. Nous en avons réalisé une conformément aux mêmes méthodes statistiques qui étaient fort rigoureuses et nous en sommes arrivés à la conclusion qu'il y a en moyenne, depuis la loi C-68, 50 homicides en moins par année et 250 homicides en moins par année commis par arme à feu, sans effet de déplacement tactique.
    Ces conclusions, professeur Blais, sont-elles aussi celles des autres criminologues au Canada?
    Tout à fait. Je vous dirais qu'une chose ressort. J'ai lu beaucoup de rapports de Gary Mauser — il se cite, lui, et Gary Kleck, mais il ne fait pas référence à d'autres criminologues tels que Philip Cook ou des personnes qui travaillent à Harvard comme David Hemenway, Anthony Braga, ou David Kennedy que l'on citait plus tôt. Ce sont tous de grands chercheurs qui montrent parfois qu'il y a des lois, qu'il y a des programmes policiers contre les armes à feu qui sont efficaces, mais ils ne sont pas cités par Gary Mauser.
    C'est la même chose pour les cas d'autodéfense impliquant les armes à feu. Il va citer l'étude qui est l'exception à la règle. Cependant, tous les autres chercheurs sont unanimes: les plus grandes études montrent que le fait de posséder une arme à feu augmente les risques d'être tué, soit par suicide ou par homicide. Je dirais que c'est une sélection un peu arbitraire de la documentation scientifique.

[Traduction]

    Merci.
    Sergent Grismer, j'ai cru comprendre d'après vos notes d'allocution et vos remarques d'aujourd'hui que vous vous opposez depuis longtemps au registre. Êtes-vous aussi contre le registre des armes de poing?
    Pas du tout.
    Alors je ne comprends pas votre position. Dans ses deux rapports, la vérificatrice générale a clairement indiqué, au sujet des coûts et de l'efficacité, que 60 ou 65 p. 100 du budget était affecté à la délivrance de permis et au registre des armes de poing et que moins du tiers était alloué au registre des armes d'épaule. De plus, tout particulièrement dans le rapport de 2006, elle a conclu que les données du registre des armes de poing n'étaient pas plus justes que celles du registre des armes d'épaule.
    Étiez-vous au courant des conclusions qu'elle a tirées au sujet des coûts associés aux registres des armes de poing et des armes d'épaule et de la qualité des données qu'ils renferment?
    Non, je n'étais pas au courant. Cependant, pour ce qui est de la justesse des données des différents registres, j'aimerais préciser que celles contenues dans le registre des armes d'épaule n'étaient pas recueillies de la même façon que celles qui sont consignées dans le registre des armes à feu à autorisation restreinte et le registre des armes à feu prohibées; en fait, depuis 1934, les données sont consignées par la GRC et ajoutées à une base de données nationale.
    D'accord.
    Je vous conseille de lire le rapport parce que cela a nui considérablement à l'efficacité du registre des armes de poing.
    Mais vous ne me laissez pas finir de répondre?
    Non, je n'ai pas le temps.
    Monsieur Blair, j'en reviens aux propos du sergent Grismer, selon lesquels il ne peut pas se servir du registre pour obtenir la délivrance d'un mandat de perquisition — si j'ai bien compris ce qu'il a dit. À quelle fréquence utilisez-vous le registre pour les déclarations sous serment?
    Mes services de police utilisent tous les jours le registre pour les déclarations sous serment, pour présenter des affidavits aux tribunaux et pour faire délivrer des mandats de perquisition. Les agents de tout le pays se servent des données du registre et du Centre des armes à feu Canada à des fins judiciaires.
    Je crois que le procureur général de l'Ontario a expliqué hier au comité l'utilité des données fournies par le Centre des armes à feu.

  (1645)  

    Je vous interromps encore une fois. Avez-vous...
    Il vous reste 30 secondes, monsieur Comartin.
    Avez-vous l'impression de contrevenir à la loi ou, autrement dit, de commettre un acte criminel chaque fois qu'on fait une telle déclaration sous serment?
    Non, monsieur, pas du tout.
    Merci.
    Nous entamons une nouvelle série de questions. Nous commencerons d'abord du côté des conservateurs. Monsieur Rathgeber, la parole est à vous pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins.
    Monsieur Blair, le 9 mai dernier, vous avez participé à une entrevue à CTV, au cours de laquelle vous avez dit:
Selon moi, le lobbying est une activité politique, et l'Association canadienne des chefs de police et la collectivité policière laissent volontiers les politiciens s'en charger.
    Vous rappelez-vous avoir dit cela?
    Oui.
    Je sais que vous croyez au registre; si je cherchais dans le registre des lobbyistes, est-ce que je découvrirais que l'Association canadienne des chefs de police a fait appel aux services de lobbyistes actifs?
    Parmi les lobbyistes actifs? À ma connaissance, nous n'avons retenu les services d'aucun lobbyiste.
    Eh bien, monsieur...
    Nous avons conclu un contrat de courte durée avec une entreprise de liaison gouvernementale. Mais le contrat a trait à un dossier d'une autre nature.
    Est-ce que cette entreprise serait Ensight Canada?
    Oui.
    Vous devriez donc savoir que vous faites affaire avec trois lobbyistes, à savoir M. John Weir, M. Will Stewart et Mme Lisa Pearson. Est-ce que ces noms vous sont familiers?
    Oui.
    Donc si vous êtes contre les activités de lobbying, pourquoi faites-vous affaire avec trois lobbyistes?
    Selon leur contrat, ils ne font pas du lobbying pour notre compte; ils s'occupent d'assurer une liaison avec le gouvernement. Nous avons fait affaire avec eux, mais compte tenu de leur relation avec votre gouvernement, ils ont refusé de faire valoir, de quelle que façon que ce soit, les intérêts de l'ACCP...
    Je crois que la plupart des gens considèrent que la liaison avec le gouvernement est une forme de lobbying, mais restons-en là pour l'instant.
    Vous connaissez sans doute M. Peter Cuthbert, le directeur exécutif de votre association.
    Oui.
    Il a envoyé un courriel à tous les chefs de police et à tous les membres de votre association — y compris le conseil d'administration, les directeurs et les présidents des associations provinciales — environ une semaine après votre entrevue du 17 mai pour les informer de votre présence ici aujourd'hui et pour leur demander d'obtenir des entrevues avec les médias et de saisir toutes les occasions de faire valoir l'importance du registre en tant qu'outil d'application de la loi auprès des agents de première ligne, des membres de la collectivité et des membres du Parlement qui habitent dans leur secteur.
    Si vous n'approuvez pas les activités de lobbying, alors pourquoi votre directeur exécutif a-t-il envoyé ce courriel?
    Parce que nous croyons fermement — comme je l'ai expliqué à l'entrevue télévisée — à la nécessité d'assurer la sécurité de la population. Vous l'avez dit vous-même. Nous croyons que si la population, les policiers de première ligne et les membres du Parlement sont bien informés, ils seront alors en mesure de prendre des décisions éclairées en ce qui concerne la sécurité publique. Nous voulions donc, puisque beaucoup de renseignements faux ou erronés ont circulé au sujet de la position des forces policières, clarifier les choses, dans l'intérêt de tous les Canadiens.
    D'accord. Je dois gérer mon temps de parole.
    Pourquoi les policiers de première ligne auraient-ils besoin qu'on leur vante les avantages du registre des armes d'épaule en tant qu'outil d'application de la loi?
    C'est une excellente question. Merci de me la poser.
    Dans tous les secteurs où nous avons expliqué aux policiers les données qui se trouvent dans le registre, la façon dont ils peuvent y avoir accès et leur utilité dans le cadre de leur travail, nous avons constaté que la fréquence d'utilisation du registre a augmenté de façon exponentielle. Et cette formation leur a permis de mener de meilleures enquêtes, d'avoir gain de cause dans un plus grand nombre de poursuites et d'améliorer leur sécurité. Donc, en leur fournissant cette information, c'est-à-dire en leur expliquant en quoi le registre leur permet d'être plus en sécurité et d'assurer celle de nos collectivités, nous avons accru leur efficacité.
    Bien sûr.
    Connaissez-vous Marty Cheliak de la GRC?
    Très bien, monsieur.
    Et savez-vous qu'il voyage au pays pour faire exactement la même chose, c'est-à-dire pour promouvoir l'utilité du registre des armes d'épaule auprès des policiers de première ligne?
    Oui. Je l'ai accompagné à quelques reprises lors de rencontres avec des associations de chefs dans différentes régions du pays; d'ailleurs, à l'une de ces rencontres, Marty a fait un exposé sur le travail du Centre des armes à feu, présenté les données auxquelles les chefs de police de l'ensemble du pays ont maintenant accès et expliqué en quoi ces données peuvent aider à assurer la sécurité des collectivités.
    Si les policiers de première ligne ont besoin qu'on leur explique l'utilité du registre des armes d'épaule, comment peuvent-ils seulement avoir une opinion éclairée sur le sujet?
    Selon moi, une fois que nous leur avons communiqué cette information, ils seront capables d'avoir...
    Nous devrions peut-être les sonder maintenant, étant donné que vous les instruisez. Nous devrions peut-être les sonder dès maintenant.
    En fait, nous les informons. L'association policière dont ils font partie et leur chef de police les informent. Nous croyons que les policiers doivent savoir en quoi le registre peut leur être utile.
    Nous avons constaté que les secteurs où nous offrons de la formation... Laissez-moi vous donner un exemple. Il y a deux villes en Alberta...
    Non, ça attendra.
    Il y a quelques semaines, Charles Momy prenait place dans le même siège que vous. Il m'avait dit à cette occasion que les policiers de première ligne ne pouvaient pas fonder leurs décisions tactiques sur le registre des armes d'épaule. Avez-vous lu son témoignage?
    Non, mais je...
    Est-ce que ces propos vous surprennent?
    Je ne peux pas parler au nom de M. Momy, mais les policiers utilisent cette information pour se familiariser avec les circonstances qui entourent l'affaire dont ils sont saisis. Est-ce que ça clôt le débat? N'y a-t-il aucune autre situation où ils devraient envisager d'autres possibilités? C'est évident qu'il y en a, et je suis certain que c'est ce à quoi M. Momy faisait allusion. Il reste que l'information mise à notre disposition est utile.

  (1650)  

    Je vais vous poser la même question. Vos agents interviennent dans un cas de violence conjugale. Ils font une recherche sur ce domicile d'après l'adresse et le propriétaire, s'ils en connaissent l'identité. Les résultats montrent qu'il n'y a aucune arme à feu enregistrée à cette adresse. Il m'a dit — et je suis certain que vous serez d'accord avec moi — que ces agents ne peuvent pas se fier à cette recherche et qu'ils doivent s'attendre à ce qu'il y ait des armes à feu lorsqu'ils se rendront sur place.
    Je crois que j'ai dit plus tôt que l'information que renferme le registre est extrêmement utile, mais que peu importe les résultats, les policiers continueront leurs recherches parce que notre principale responsabilité consiste à assurer la sécurité de la population et, dans votre exemple, celle des gens qui habitent ce domicile.
    Vous êtes d'accord avec moi: cette recherche n'est pas fiable. Une recherche dont les résultats montrent qu'il n'y a aucune arme à feu au domicile où est survenu un cas de violence conjugale n'est pas fiable.
    Non. Ce que je vous dis, c'est que la recherche peut révéler qu'il y a des armes enregistrées. Dans ce cas, l'information obtenue est très fiable et très importante pour nous. Elle nous aidera dans le cadre de notre enquête.
    Comment? D'après les recherches, il y a une arme enregistrée dans la résidence. Vos policiers y vont et saisissent l'arme. La crise est évitée et ça s'arrête là ou s'ils présument qu'il pourrait y en avoir d'autres?
    Ils vont présumer qu'il y en a d'autres, évidemment. Mais s'ils entrent dans cette maison...
    M. Brent Rathgeber: Donc dans les deux cas...
    Chef William Blair: Si je peux terminer...
    M. Brent Rathgeber: ... les recherches ne sont pas fiables, monsieur.
    Chef William Blair: S'ils vont dans cette maison et qu'ils trouvent 20 armes, mais qu'ils n'ont pas encore trouvé celle qui est enregistrée, ils vont continuer à la chercher.
    Merci. Vous êtes d'accord avec moi sur le fait que ces deux recherches ne sont pas fiables.
    En fait, je ne dirais pas que ma réponse signifie que je suis d'accord avec vous, monsieur.
    Dans votre magazine, le Bulletin ACCP, printemps 2010, vous êtes cité au bas de la page 6: « Nous perdons le registre des armes à feu à nos risques et périls. » Cette citation vous est attribuée. Reconnaissez-vous l'avoir dite?
    Oui, j'ai fait ce commentaire.
    Je partage votre avis. Mais parlez-vous du registre des armes à feu ou du registre des armes d'épaule? Ce sont des choses très différentes.
    Je parle des deux, monsieur, de l'enregistrement de toutes les armes à feu, y compris du registre des armes d'épaule.
    Êtes-vous d'accord avec M. Grismer, à savoir que lors de certains incidents, le fait de s'être fié au registre des armes d'épaule a en réalité mis en péril la sécurité des policiers?
    Non.
    Qu'en est-il de Mayerthorpe?
    En fait, ils ne se sont pas fié à cette information, mais l'information a été utile pour résoudre ce crime et déterminer certaines des personnes qui étaient responsables de la mort des policiers.
    Nous en parlerons plus tard.
    Nous passons maintenant à la seconde série de questions.
    Monsieur Kania, vous avez cinq minutes.
    Puis-je vous demander de m'avertir 30 secondes avant la fin? Mme Jennings va prendre la parole en premier et nous allons partager mon temps.

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Maurice et à M. Blais. Elle concerne un sujet dont vous avez discuté avec Mme Mourani, à savoir la baisse du nombre de suicides, le non-déplacement de suicides par l'entremise d'une arme à feu et le non-déplacement de suicides par d'autres moyens.
    Vous avez dit qu'il y avait une étude à ce sujet. On a entendu aujourd'hui des déclarations selon lesquelles il n'y a pas de preuve que le registre des armes à feu a sauvé ne serait-ce qu'une vie. Si on avait la preuve que cela a sauvé au moins une vie, la personne qui a fait cette déclaration ne serait plus un opposant au registre des armes à feu et serait en faveur de son maintien.
    Par conséquent, j'aimerais que vous expliquiez l'étude qui a été faite et comment vous avez pu démontrer que des vies ont été sauvées grâce à la loi et au registre.
    Comme M. Blais est le coauteur de cette étude, je vais le laisser vous donner des explications en ce sens.
    Je vais essayer de répondre dans un langage clair, qui s'écarte du jargon du statisticien et, dans certains cas, du criminologue.
    Bref, on réalise des analyses de tendance sur les taux d'homicides ou de suicides commis au moyen d'une arme à feu ou par d'autres moyens. On réalise des analyses dans lesquelles on tient compte des tendances déjà présentes. On sait très bien que c'est à la baisse. On tient compte aussi de la conjoncture socioéconomique. En effet, on sait que le contrôle des armes à feu n'est pas le seul facteur à pouvoir influencer les taux. Enfin, en tenant compte de tous ces facteurs, on détermine si, avant et après la mise en vigueur du projet de loi C-68, il y a eu une baisse des taux de suicides et d'homicides commis au moyen d'une arme à feu. On répète la même procédure pour les taux de suicides et d'homicides commis par d'autres moyens et, à l'aide de critères statistiques, on crée des estimés.
    Ces estimés nous indiquent qu'il y a eu une baisse significative des taux d'homicides et de suicides commis par arme à feu à la suite de la mise en oeuvre du projet de loi C-68 et que, parallèlement à ça, les taux d'homicides et de suicides commis par d'autres moyens n'ont pas connu de hausse à la suite de la mise en vigueur du projet de loi C-68. C'est donc dire que le fameux effet de déplacement n'est pas présent. J'ajouterais que ces méthodes sont reconnues comme étant les plus rigoureuses, dans le domaine scientifique.

  (1655)  

    Donc, la preuve scientifique voulant que la loi et le Registre canadien des armes à feu aient sauvé des vies existe. Point final.
     On est en mesure de dire que c'est la loi. Par contre, d'autres recherches vont peut-être s'avérer nécessaires, comme le disait M. Maurice, pour déterminer clairement tous les mécanismes. Il reste qu'à ce stade-ci, on trouve risqué de retirer une composante essentielle de la loi et de risquer par le fait même de compromettre la santé et la sécurité de la population.
    Mais la réponse est que la preuve scientifique existe.
    Elle existe.
    Je dois partager mon temps avec mon collègue M. Kania.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Chef Blair, vous avez dit avoir apporté des documents et des lettres avec vous. Pourriez-vous veiller à les déposer afin que le comité les ait?
    Oui. Je crois qu'ils ont été remis au greffier et je les ai ici. Je m'excuse sincèrement, car certaines des résolutions que j'ai reçues des associations provinciales n'ont pas encore été traduites en français. Nous allons le faire dès que possible pour les membres du comité.
    Chef Blair, vous avez dit que sur cette question, les policiers sont unis comme jamais auparavant. Certaines personnes ont dit qu'il y a une majorité silencieuse de policiers, et une majorité réduite au silence, qui ne s'expriment pas. J'aimerais vous entendre à ce sujet, s'il vous plaît.
    Je ne me souviens pas d'aucune autre question de sécurité publique ou de politiques publiques qui a rassemblé les chefs de police de partout au Canada, pas seulement l'association nationale, mais également les associations provinciales dans les collectivités urbaines et rurales dans pratiquement chaque région du pays, ainsi que les associations de policiers, tant à l'échelle nationale que locale, de même que nos conseils de services policiers. Les documents que je vous ai apportés aujourd'hui font état d'un soutien remarquablement constant à l'égard du registre des armes de la part des chefs de police partout au pays.
    Nous avons rencontré les dirigeants des associations de policiers. Nous ne sommes pas toujours d'accord, mais nous sommes unis sur cette question. Je n'avance pas pour un instant que le soutien est unanime, mais je n'ai jamais vu, au cours de mes 33 années comme policier, les policiers faire front commun de la sorte et se prononcer en faveur de l'information qui nous aide à assurer notre sécurité et à faire notre travail.
    Est-ce que le fait que certaines armes ne soient pas enregistrées signifie que le système ne devrait pas exister?
    Non, et je crois que nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour encourager les Canadiens à s'y conformer. Plutôt que de simplement abandonner les efforts pour maintenir un registre parce que certaines personnes ne s'y conforment pas, nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour veiller à ce que les gens s'y conforment, et je crois que l'éducation publique nous permettra d'y arriver. Il faut sensibiliser les Canadiens à la valeur du registre, à la gratuité de l'enregistrement, à l'efficacité du processus, à l'efficience du système et au fait que le registre contribue réellement à faire appliquer la loi.
    Selon mon expérience, les chefs de police...
    Madame Hoeppner, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais remercier tous les témoins d'être ici. J'apprécie sincèrement votre présence et toutes les observations que vous avez formulées.
    Chef Blair, nous savons que vous et moi ne sommes pas du même avis sur cette question. Je pense qu'il est clair que vous appuyez le maintien du registre. J'ai présenté le projet de loi et je suis donc en faveur de l'élimination du registre.
    Un des facteurs à considérer est le coût, qui varie entre l'estimation de 4 millions de dollars que la GRC nous a donnée et l'estimation de 106 millions de dollars que la Fédération canadienne des contribuables nous a présentée hier. Selon le budget principal des dépenses du Conseil du Trésor et le site Web du gouvernement que j'ai consulté hier, l'enregistrement des armes à feu à lui seul — pas les permis, uniquement l'enregistrement des armes — a coûté 23 millions de dollars. Nous savons qu'environ 7 millions d'armes d'épaule et 700 000 armes à feu prohibées ou à autorisation restreinte font partie du registre. Alors nous nous situons quelque part entre 4 millions de dollars et 106 millions de dollars.
    Ma question est très simple. Si vous aviez entre 4 millions de dollars et 106 millions de dollars supplémentaires à dépenser, embaucheriez-vous plus de policiers ou maintiendriez-vous le registre des armes d'épaule?
    Laissez-moi vous dire...
    C'est une question assez simple: maintenir le registre d'armes d'épaule ou embaucher plus de policiers?
    Si vous ne pouvez pas répondre, je peux comprendre.
    Je peux répondre.
    Nous investissons des sommes assez importantes pour recueillir de l'information et la mettre à la disposition de nos policiers. Des renseignements exacts et fiables les rendent plus efficaces et contribuent à assurer leur sécurité. Alors pour nous, ce n'est pas une question de choix. Un policier qui ne possède pas d'information exacte et fiable pour prendre des décisions ne sera pas efficace.
    Je suis désolée, monsieur. Puis-je vous demander de répondre? C'est une décision difficile. Voudriez-vous embaucher plus de policiers ou maintenir le registre des armes d'épaule?
    Je vais poser la même question à l'autre policier.

  (1700)  

    Je vous dirai que je prends cette décision dans la gestion quotidienne des services de police.
    Registre des armes d'épaule ou policiers? Si vous ne voulez pas répondre, monsieur, je comprends.
    Permettez-moi de répondre. Je crois que le registre des armes d'épaule a suffisamment de valeur et je suis en faveur de son maintien.
    Vous préféreriez donc maintenir le registre des armes d'épaule.
    Oui.
    Merci beaucoup.
    Sergent Grismer, j'aimerais vous remercier également d'être ici. J'aimerais vous poser la même question.
    Vous êtes un policier de première ligne en Saskatchewan et vous patrouillez les rues et avez affaire à des criminels tous les jours. À votre avis — et j'aimerais bien savoir ce que les policiers de Toronto qui patrouillent les rues actuellement avaient à dire à ce sujet —, comment préféreriez-vous dépenser l'argent: embaucher plus de policiers ou maintenir le registre des armes d'épaule?
    Il est très simple de poser cette question et d'y répondre.
    J'investirais dans les ressources limitées et j'augmenterais le nombre de policiers qui patrouillent les rues. Au cours des derniers mois à Saskatoon, nous avons ciblé particulièrement les responsables d'une vague de crime dans la ville, et c'est pourquoi nous savons qu'en augmentant le nombre de policiers qui patrouillent les rues, nous sommes en mesure de constater une réduction des crimes. Nous parlons de crimes violents. Nous parlons de meurtres et de voies de fait graves. Le fait d'avoir plus de policiers qui patrouillent les rues et qui sont visibles rend notre société plus sécuritaire que celui de maintenir un registre qui renferme des données erronées et imprécises qui ont été recueillies, monsieur Comartin, d'une manière qui ne fait qu'engendrer des erreurs et des inexactitudes.
    Merci beaucoup de votre réponse.
    L'une des questions qui a été soulevée aujourd'hui concerne le fait que des policiers ont été réduits au silence. Quand j'ai présenté ce projet de loi, je ne connaissais pas vraiment beaucoup de policiers, à l'exception de ceux de mon caucus. Pourtant, j'ai reçu d'innombrables courriels, téléphones et lettres de policiers qui ont dit appuyer ma démarche, mais qui m'ont demandé de taire leur nom.
    Je vous le dis, c'est ce que j'entends.
    Je comprends ce que vous dites également, chef Blair. Vous affirmez que c'est inexact, que ces policiers ne se font pas dire de se taire. J'aimerais donc vous demander, aux fins du compte rendu, d'être très clair: avez-vous directement ou indirectement laissé entendre à un agent de la paix ou à un chef de police qui appuie mon projet de loi de ne pas faire connaître son opinion publiquement?
    Non.
    D'accord. Merci beaucoup.
    J'ai une autre question concernant des propositions que M. Ignatieff a faites à propos des changements au registre, mais également à l'obtention des permis.
    Appuyez-vous sa proposition d'éliminer les droits de permis pour les personnes qui demandent un permis pour la première fois?
    La structure actuelle des droits a très peu à voir avec l'efficacité du système d'obtention de permis. C'est une question administrative. Honnêtement, je n'ai pas d'opinion bien arrêtée à ce sujet.
    Croyez-vous que c'est au cours du processus d'obtention de permis qu'on contrôle les gens pour déterminer s'ils peuvent posséder des armes à feu?
    Je crois que l'obtention de permis est extrêmement importante de même que le contrôle des gens qui en font la demande. Quant au droit qu'il convient de leur imposer, je laisse la décision aux administrateurs.
    Seriez-vous en faveur de l'allègement du processus d'obtention de permis ou de son renforcement?
    Je crois que le processus d'obtention de permis doit demeurer rigide. Il a une raison d'être.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant au Bloc québécois et à M. Desnoyers.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Farrant.
     Votre sixième recommandation se lit comme suit:
6) La violence conjugale est un grave problème social qu'il est possible de prévenir. L'éducation publique et les conseils sur l'endettement peuvent aider à réduire le stress à la maison et au travail; en conséquence, aider à réduire l'incidence générale de la violence conjugale. Utiliser les fonds gaspillés dans le registre des armes d'épaule pour lutter contre les causes profondes de la pauvreté, un autre facteur de tension au sein des ménages.
     En lisant cette recommandation, je me suis demandé si vous étiez sérieux.

[Traduction]

    Quand nous avons formulé...

[Français]

    Connaissez-vous la violence conjugale?

[Traduction]

    Nul n'est besoin de m'insulter, monsieur. Oui, je sais ce qu'est la violence conjugale. Elle revêt de nombreuses formes, il n'y a pas que la violence physique, il y a également la violence verbale. Il en existe certainement de nombreuses formes. Ce n'est que l'une des recommandations que nous avons formulées. L'une des suggestions que nous avons faites...

[Français]

    Cette recommandation est importante parce que vous parlez de la violence conjugale, et tous les témoins entendus sont venus nous dire que, dans la violence conjugale, les armes à feu pouvaient jouer un rôle important, ce que vous ne dites pas dans ça. L'avez-vous oublié?

[Traduction]

    Oublié de dire que ça fait partie de la violence conjugale? Nous faisons une recommandation...
    Monsieur, vous m'avez posé la question. J'aimerais essayer d'y répondre.

  (1705)  

[Français]

    Plusieurs témoins sont venus nous dire que dans la violence conjugale on utilisait les armes à feu. Êtes-vous au courant de ça? Je comprends que vous ne soyez pas un expert.
    Je vais poser une autre question, mais cette fois-ci je la poserai à M. Maurice.
    Vous avez parlé d'un volet important: la santé. Vous avez parlé d'économiser 400 millions de dollars. Je trouve ce chiffre important. Si le registre ou la loi 68 ou le certificat permet de sauver des sommes d'argent aussi importantes, je crois que les deux côtés de cette Chambre devraient tenir compte de ce volet de façon importante.
    En fait le calcul est assez simple. Il est basé sur une étude faite par un expert dans le domaine des études coûts-bénéfices, M. Ted Miller. Il a fait une étude sur le coût des décès par armes à feu au Canada — ces coûts ont été ajustés en dollars d'aujourd'hui. On estime grosso modo une vie sauvée à 1,5 million de dollars, en tenant compte uniquement des coûts directs et indirects. Ces coûts sont surtout composés de la perte de productivité des gens qui décèdent. Souvent ce sont de jeunes gens qui ne produiront pas dans le courant de leur vie active, etc.
    Si vous faites le calcul, c'est assez facile d'arriver à la conclusion qu'on économise pas mal d'argent pour la société canadienne dans son ensemble.
    C'est un volet qu'on oublie trop souvent dans ce comité, surtout du côté des conservateurs, parce qu'on veut l'abolir plutôt que de voir ce que cet investissement peut rapporter à la société.
    Monsieur Blair, vous avez parlé d'un outil additionnel. Vous n'avez pas parlé d'un outil qui règle tous les problèmes des policiers, mais vous avez dit que, dans l'arsenal des policiers, c'est un outil important. J'aimerais vous entendre un peu plus sur cela.

[Traduction]

    Merci.
    Le registre est un outil d'information important. Nous avons beaucoup d'outils à notre disposition. Il y a les lois, d'autres bases de données sur lesquelles nous nous appuyons, des renseignements qui proviennent de notre service du renseignement criminel, des renseignements qui proviennent de nos systèmes de gestion des dossiers, des renseignements que nous échangeons entre services de police et entre partenaires. Voilà les outils qui nous aident à faire notre travail efficacement.
    Le registre des armes à feu est l'un de ces outils. Il n'est pas parfait, comme je l'ai dit. Il ne règle pas tous nos problèmes et ne prévient pas tous les crimes, et nous ne nous attendons pas à ce que les renseignements le fassent non plus.

[Français]

    Madame de Villiers, hier, un sénateur conservateur, qui est également représentant d'une association de victimes, s'est présenté devant nous. Il ne savait pas où se brancher, mais vous, vous le savez. J'aimerais vous entendre un peu plus sur la violence conjugale.

[Traduction]

    Merci de poser la question.
    Je vais distribuer ce document pour vous montrer que je parle au nom d'un grand nombre d'organismes et de victimes, et non seulement en mon nom personnel.
    Oui, au cours des 19 dernières années environ, j'ai vu une foule de cas d'homicides et d'actes de violence grave en tout genre, et bien sûr des cas d'extrême violence familiale — de la violence conjugale, des enfants assassinés ou très gravement blessés — et dans la plupart des cas, dont certains sont énumérés ici, il y avait des antécédents de maladie mentale, de dépression ou d'idées suicidaires qui laissaient présager ce qui allait se produire.
    Une des choses qui me préoccupe depuis 20 ans est l'information erronée, mensongère et carrément déformée qui empêche les familles ou les gens dans leur foyer d'avertir quelqu'un que l'arme ne se trouve plus dans la maison. C'est là où le registre des armes à feu a eu une énorme...
    Nous devons nous arrêter là. Merci.
    Monsieur Wrzesnewskyj.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Blair, d'être parmi nous. Avant de commencer, j'aimerais aussi vous remercier pour ces 33 années passées à servir et à protéger les citoyens de Toronto.
    J'invoque le Règlement.
    Je suis désolé. C'est mon erreur, je n'ai pas beaucoup d'expérience comme président. Veuillez m'excuser.
    Vous faites un bon travail.
    J'étais si fier d'avoir prononcé correctement son nom que j'ai oublié que c'était à notre tour de poser la prochaine série de questions. Je m'en excuse au comité.
    Madame Glover, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup.
    Je veux également remercier les membres du comité de leur présence aujourd'hui.
    J'ai deux ou trois questions.
    Je dois admettre que je suis quelque peu déçue que vous n'ayez pas pu terminer, monsieur Grismer. C'était une question importante sur les armes de poing et sur la différence entre l'enregistrement de ces armes et celui des armes d'épaule. J'aimerais que vous terminiez. Il y a une différence considérable entre les deux.
    J'ai longtemps fait partie du corps policier, et c'est aussi le cas de plusieurs députés conservateurs. Il n'y a aucun agent de police dans les autres partis de la Chambre des communes. Bon nombre de représentants élus sont des policiers et appuient très fortement le projet de loi de Candice Hoeppner.
    Je veux vous donner la chance de répondre à cette question, car elle est importante.

  (1710)  

    À l'époque de l'ancien régime national de contrôle des armes à feu — je ne me souviens pas du nom exact —, l'enregistrement des armes de poing et des armes à feu prohibées était régi par le système national d'enregistrement des armes à autorisation restreinte. Toutes les vérifications étaient effectuées par ce système.
    Lorsqu'une personne allait s'acheter une arme à feu, elle se rendait ensuite au poste de police avec un permis qui lui permettait de transporter son arme jusqu'au poste de police. L'agent sur place faisait une vérification complète de l'arme à feu.
    C'était avant que vous receviez une arme de poing.
    C'était avant que nous soyons autorisés à ramener l'arme de poing à la maison.
    C'est une différence majeure qu'il faut absolument faire ressortir quand on parle du registre en soi et des raisons pour lesquelles le registre des armes de poing est plus utile que celui des armes d'épaule. C'était un système par lequel des Canadiens de tous horizons et de toutes les régions du pays fournissaient volontairement de l'information.
    Vous avez parlé de sondages. Je suis très heureuse d'entendre que vous avez sondé vos membres.
    Quand j'étais policière, on nous a demandé notre avis quand le registre des armes d'épaule a été instauré par le gouvernement précédent. La très grande majorité des agents de première ligne se sont déclarés en désaccord avec ce registre et ont dit qu'ils n'en voyaient pas l'utilité.
    Certains agents, comme M. Blair, ont été sanctionnés par leur chef et ont été transférés pour avoir exprimé leur désaccord. C'est pourquoi ils se taisent aujourd'hui et ont peur de s'affirmer. J'ai reçu des milliers d'appels téléphoniques en provenance de Toronto, de Montréal et d'autres régions du pays. Les policiers ont peur de prendre position parce qu'ils craignent les conséquences qu'ils pourraient subir dans leur travail.
    Je trouve ça honteux. J'ai honte en tant que policière. J'ai honte en tant que représentante élue.
    Vous avez mené un sondage auprès de vos membres. Je vous en félicite. Quels ont été les résultats? Combien d'entre eux avez-vous sondés? Quelles ont été les réponses?
    Je suis désolé, je n'ai pas cette information.
    Je sais qu'il y a eu un sondage auprès de notre association locale. Tout le monde a été interrogé. Au sein du service de police de Saskatoon, le nombre de policiers varie mais se situe habituellement autour de 440. Évidemment, ils ne sont certainement pas aussi nombreux que dans l'association de M. Blair.
    Avez-vous une idée des chiffres approximatifs? Avez-vous obtenu 75 p. 100 de réponses? Combien d'entre eux ont répondu au sondage?
    Pourriez-vous obtenir ces renseignements pour nous?
    Je suis désolé. Je peux essayer.
    D'accord. Si vous pouviez nous fournir l'information plus tard, je vous en serais très reconnaissante.
    Je veux faire remarquer que le président de l'ACP a parlé d'un sondage effectué par la GRC. Il a été mené auprès de 75 000 agents de police de tout le pays. L'ACP en a parlé à plusieurs reprises.
    Je suis désolée. C'est M. Wrzesnewskyj qui a posé une question au président de l'ACP qui indiquait que 92 p. 100 des répondants au sondage disaient utiliser fréquemment le registre. Il y a 408 personnes sur 75 000 qui ont répondu à ce sondage. C'est ridicule d'établir une statistique à partir de ce nombre. C'est ridicule.
    Il faut rétablir la vérité et les faits là-dessus. C'est une question controversée.
    Monsieur, je vous félicite de prendre position. Je sais que c'est très difficile, compte tenu de la pression exercée par beaucoup d'autres policiers et d'autres organismes.
    Le chef de police, M. Blair, a également mentionné que l'enregistrement d'une arme à feu prend 37 secondes. Voilà qui inspire la confiance! Ça prend 37 secondes. Pouvons-nous compter sur un enregistrement d'information de 37 secondes pour nous sauver la vie?
    Je ne compte pas du tout sur le Registre canadien des armes à feu pour me sauver la vie, encore moins s'il prend 37 secondes. Je ne me fie pas à l'information qui s'y trouve.
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, je ne présenterai jamais une demande de mandat de perquisition fondée sur de l'information contenue dans le registre parce que, pour obtenir un mandat de perquisition, je dois jurer sur la Bible que je crois en toute sincérité et au meilleur de ma connaissance que l'information à l'origine de ma demande de mandat est exacte et véridique. Je ne peux pas et je ne vais pas faire une telle affirmation au sujet du Registre canadien des armes à feu.
    Merci beaucoup. J'admire tous les policiers pour leur service, mais nous devons voir la vérité en face au sujet de ce registre des armes d'épaule. Nous n'avons pas de réponse nette et précise, mais le fait que la majorité des policiers ne savent même pas comment s'en servir 10 ans après son entrée en vigueur en dit long sur son manque de rentabilité, son inefficacité et son inutilité.
    Merci.
    Passons maintenant à M. Wrzesnewskyj.
    Je vous remercie de ces 33 années passées à servir et à protéger les citoyens de Toronto, dans certains des quartiers les plus durs, il faut le souligner, et dans des rues extrêmement dangereuses.
    J'aimerais également faire remarquer qu'au cours des dernières années, alors que vous étiez toujours chef, la ville de Toronto a fait face à un grave problème de gangs de rue. Vous vous êtes attaqué à ce problème de façon très efficace, et nous avons assisté à une diminution des crimes violents dans la ville de Toronto. C'est donc au nom de tous les Torontois que je vous adresse mes remerciements pour le travail exceptionnel que vous accomplissez depuis une trentaine d'années.
    Monsieur — voici une question difficile —, vous a-t-on déjà qualifié de membre d'un culte par le passé?

  (1715)  

    Ça m'a surpris un peu, mais oui, ça m'est déjà arrivé.
    L'ensemble des chefs de police qui sont membres de votre association cumulent au total 5 000 années d'expérience au service de la protection des Canadiens d'un océan à l'autre. À titre de président de l'association, avez-vous reçu une lettre d'excuses de la part du président de ce comité pour la communication qui a été envoyée?
    Nous n'avons reçu aucune communication de sa part.
    C'est étonnant, bien que je crois que la plupart des Canadiens trouvent cette théorie du culte tout à fait risible.
    Nous passons maintenant à une autre théorie qui a été suggérée, une théorie du complot. Nous avons entendu Jack Tinsley, officier de Winnipeg à la retraite, dire que des officiers ont été intimidés et forcés de ne pas participer. Prétendre que des officiers ont été empêchés de participer à une séance d'un comité permanent du Parlement du Canada est une allégation grave. Il ajoute que les officiers ont été forcés au silence et nous avons entendu ce même type d'allégation ici aujourd'hui. En fait, le sergent Grismer a affirmé que les officiers de police en avaient reçu l'ordre.
    Monsieur Grismer, soutenez-vous toujours cette théorie du complot que nous avons entendue et selon laquelle la majorité, vous dites la majorité silencieuse, des officiers de police du pays ont été muselés?
    Je maintiens ce que j'ai déclaré dans ma présentation.
    Vous dites donc que ce complot qui implique des milliers d'officiers... En fait, vous dites plus que ça. Vous avez dit lors de votre présentation aujourd'hui que vous représentez des milliers d'officiers de police du Canada qui, selon vous, sont une majorité silencieuse ou, comme vous dites, une majorité muselée. Ipso facto, vous prétendez représenter des milliers d'officiers au pays?
    J'ai eu la possibilité de me lever et d'exprimer mon opinion sans qu'on m'ordonne de me taire, de cette façon je prétends représenter ces gens ipso facto.
    Nous avons reçu l'Association canadienne des policiers. Ils ont été élus démocratiquement. Êtes-vous d'accord sur le fait qu'ils ont été élus de manière démocratique pour représenter des milliers et des milliers d'officiers d'est en ouest du pays?
    Je ne suis pas d'accord avec l'élection démocratique, parce que l'officier moyen de première ligne n'a rien à dire sur le choix du président ou des membres du conseil des directeurs de l'Association canadienne des policiers.
    Mais il y a bien un processus électoral et les représentants sont élus?
    Il y a bien un processus électoral...
    C'est exact. Peut-être pourriez-vous vérifier en quoi consiste ce processus.
    Sgt-dét. Murray Grismer: Je connais très bien ce processus.
    M. Borys Wrzesnewskyj: Mais cela a peu d'importance, parce que vous avez décidé ipso facto de représenter des milliers d'officiers. On vous a entendu dire dans une infopub de la NRA aux États-Unis qu'un peuple incapable de se défendre est difficile à gouverner, il devient assujetti. Êtes-vous toujours d'accord avec cette déclaration?
    Avez-vous reçu une quelconque forme de rémunération de la part de la NRA?
    Je n'ai rien reçu d'eux.
    Mais ils vous utilisent comme porte-parole. Donc, en fait, vous êtes un porte-parole de la NRA, dans leurs infopubs, et ici vous représentez des milliers d'officiers du pays. Tout cela fait partie de la théorie du complot.
    D'après vous, est-ce que la Charte canadienne des droits et libertés devrait être amendée pour y ajouter le droit de posséder une arme?
     Vous avez 30 secondes.
    Merci.
    Nous allons passer au gouvernement.
    Monsieur Norlock pour cinq minutes.

  (1720)  

    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous les témoins qui sont ici aujourd'hui.
    J'aimerais poser une question à M. Farrant de la Ontario Federation of Anglers and Hunters. Dans sa présentation, M. Farrant n'a pas eu le temps de parler des mythes qui entourent le registre des armes d'épaule ainsi que des sondages qui ont été faits à cet égard.
    Pourriez-vous, monsieur Farrant, vous référer à votre partie vers la fin où vous parlez du mythe selon lequel la majorité des Canadiens appuient le registre des armes d'épaule du fédéral et veulent qu'il soit maintenu. Pourriez-vous nous parler des quatre ou cinq premiers?
    Oui. Merci, monsieur Norlock.
    Dernièrement nous avons eu, vous parlez bien des sondages? Est-ce que c'est à cela que vous voulez que je réfère?
    Oui, uniquement les résultats.
    Bien. Pour le sondage du jeudi 29 avril 2010, il y a environ un mois, CTV News a posé une question fort simple: appuyez-vous le Registre des armes à l'épaule? Cinq pour cent, soit 1 413 personnes, ont dit oui. Quatre-vingt-quinze pour cent, soit 26 172 personnes, ont répondu non.
    Avant cela, le 12 novembre 2009, à Kamloops, en Colombie-Britannique, la question était: êtes-vous d'accord avec l'abolition de l'enregistrement obligatoire des carabines et fusils de chasse? Quatre-vingt-huit pour cent ont dit oui et 12 p. 100 non.
    Le Toronto Sun, juste une semaine avant cela, a demandé si le gouvernement fédéral devait rejeter le Registre national des carabines et des fusils de chasse. Quatre-vingt-un pour cent ont dit oui et 19 p. 100 ont dit non.
    Depuis les quatre dernières années, 16 sondages ont démontré que les Canadiens en ont marre de ce registre et qu'ils veulent qu'il disparaisse.
    Lorsque vous dites que vous représentez 100 000 Ontariens, plus particulièrement les pêcheurs à la ligne et les chasseurs... Dans certaines de vos publications, que j'ai eu la chance de lire, vous parlez de l'usage sécuritaire des armes à feu et de la responsabilité que doivent assumer les propriétaires d'armes à feu.
    Pourriez-vous nous dire à quelle fréquence reviennent les questions entourant la sécurité des armes à feu dans votre publication?
    Monsieur Norlock, la Ontario Federation of Anglers and Hunters publie également le magazine Ontario Out of Doors et produit Angler & Hunter Television, et on peut dire que nous répétons ces questions à chaque occasion qui se présente.
    L'année dernière nous avons produit plus de 100 000 brochures sur la chasse responsable dans lesquelles nous parlions des méthodes d'entreposage, de transport et d'usage sécuritaire des armes à feu, des permis, etc. Des copies de cette brochure ont été distribuées dans toutes les villes de la province de l'Ontario.
    Chaque année, je me présente dans 50 ou 100 municipalités pour discuter des règlements sur les armes à feu, d'une part en tant que membre de la fédération et représentant, mais également à titre de vice-président d'une commission de services policiers. Je discute avec les agents de la PPO de ce sujet constamment et je note leurs recommandations quant aux informations que je dois communiquer à nos membres en ce qui concerne l'usage en toute sécurité des armes à feu.
    Merci beaucoup.
    Sergent Grismer, si je vous disais qu'en 1998 le pourcentage d'homicides impliquant une arme à feu était de 27 p. 100 et qu'il est resté à peu près le même plus ou moins 2 ou 3 p. 100... En 2001, bien sûr, le Registre des armes d'épaule avait commencé et le pourcentage d'homicides impliquant des armes à feu était de 31 p. 100. Si je vous dis aussi qu'en 2003 — à ce moment-là les armes d'épaule devaient être enregistrées — les homicides impliquant des armes à feu étaient de 29 p. 100, et que ce taux est resté passablement stable, quelle conclusion en tireriez-vous?
    Eh bien, les données sur le recours d'une arme à feu pour un crime fluctuent dans tout le pays. Si vous en faites le suivi sur plusieurs années, elles ont augmenté... Nous avons déjà été plus haut, nous avons déjà été plus bas, et maintenant il semble que tout se stabilise. Si l'on consulte les données d'autres pays concernant les crimes commis avec une arme à feu, nous pouvons constater qu'il y a une baisse dans les crimes violents aux États-Unis. J'imagine donc que la réponse est que les données actuelles sont relativement stables.
    Merci beaucoup.
    Maintenant...
    Vingt secondes, monsieur Norlock.
    C'est tout? Merci.
    La période de questions est maintenant terminée.
    J'ai l'honneur de parler au nom du président et de vous remercier pour votre présence et pour l'expertise que vous nous avez apportée au sujet de cette question essentielle. Merci, merci d'être venus à Ottawa.
    On nous avait dit que le Parti libéral requérait cinq minutes à la fin de cette séance pour traiter d'une motion qui devait être présentée par M. Holland. C'est ce que j'ai cru comprendre de la part du président.

  (1725)  

    C'est exact, et comme M. Holland n'est pas ici, je suis plus qu'heureux de présenter une motion pour que les rapports de la GRC soient présentés à notre comité.
    D'accord. Pouvez-vous préciser quels sont les rapports que nous demandons à la GRC?
    Malheureusement, je n'ai pas les titres exacts de ces rapports, mais je crois qu'il en est question dans le compte rendu.
    J'ai consulté le greffier pour savoir si la motion était recevable, et je voulais que les membres du parti ministériel le sachent.
    Ce sont des vérifications internes faites par la GRC sur le registre des armes à feu.
    D'après le greffier, étant donné que ces rapports ont un lien avec la question que traite le comité en ce moment, il est tout à fait approprié de présenter la motion. Je voulais simplement que tout soit très clair pour tout le monde.
    Est-ce qu'il y a des commentaires, des questions ou un quelconque débat au sujet de cette motion?
    Monsieur Norlock.
    J'ai quelques commentaires, parce que nous traitons de quelque chose que nous ne connaissons pas exactement. Si je me souviens bien, lors du témoignage de M. Sweeney de la GRC, on avait laissé entendre qu'il s'agissait d'un exposé de principe sur le projet de loi C-391 que la GRC avait élaboré en consultation avec d'autres, peut-être bien avec le chef Blair.
    M. Holland connaît très bien le contenu de cet exposé de principe, mais tous les députés ici présents n'ont pas eu la chance d'y jeter un oeil. On pourrait penser que l'opposition officielle — je n'en suis pas certain; je tente simplement de dresser un portrait logique —, la GRC et, dit-on, le chef Blair... En fait, je ne suis pas sûr si c'est exact, mais d'après les déclarations dont je me souviens, étant donné que je n'ai pas accès au compte rendu — mais je pourrais probablement le trouver rapidement —, ce document a été présenté comme étant la position que la GRC a adoptée, en consultation avec d'autres. C'est un rapport interne, et je vais vous lire un extrait, juste pour qu'on sache où on s'en va.
    Le sous-commissionnaire Sweeney a dit:
Merci de me permettre de clarifier mes propos. J'ai parlé d'un comité du Cabinet, alors que j'aurais dû dire « comité parlementaire ». Je vous prie de m'en excuser. Je travaille avec le chef Bill Blair et d'autres intervenants. Le surintendant principal Marty Cheliak nous aide à élaborer des principes concernant le projet de loi C-391...
    Je ne veux pas vous interrompre, mais il vous reste à peu près 30 secondes avant que je mette fin à la séance et que la sonnerie d'appel se fasse entendre.
    Je ne crois pas que le comité doive être saisi maintenant d'une position interne que la GRC a adoptée en consultation avec d'autres, d'un document que l'opposition détient mais qui n'a pas été rendu public. Ce n'est pas un document public et j'aimerais dire...
    Une voix: Monsieur le président...

  (1730)  

    M. Norlock a la parole. Nous entendons la sonnerie. Je surveille le temps. Il reste environ 10 secondes. Continuez pour 10 secondes.
    J'essaie tout simplement de dire que si cette question est du domaine public, nous devons être mis au courant.
    Le président suppléant (M. Phil McColeman): La séance est levée.
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