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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 060 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 3 mars 2011

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, bonjour et bienvenue à la 60e séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie.
    Étant donné que nous recevons cinq témoins, formés en deux groupes, nous devrons régler rapidement les questions relatives aux travaux du comité.
    Je vais tout d'abord présenter les invités: Me Oliver Borgers et Me Anthony Baldanza, de l'Association du Barreau canadien; MM. David Coles et Guy Caron, Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier; et Me Calvin Goldman, associé, Blake, Cassels et Graydon.
    Je demanderais au témoin à ma gauche de commencer les exposés et aux autres de continuer dans l'ordre. Chaque organisation dispose de cinq minutes. Nous allons respecter le temps imparti de manière assez précise, car nous n'avons qu'une heure à accorder au présent groupe et nous devons d'abord régler quelques questions administratives.
    Monsieur Rota, vous avez remis un avis de motion; vous pouvez maintenant présenter la motion.
    Je n'ai pas la motion sous la main.
    Tout le monde a un exemplaire.
    Je suis le seul qui n'en a pas. Je vous remercie de m'avoir informé à l'avance, monsieur le président.
    Des voix: Ah, ah!
    M. Anthony Rota: Au fond, la motion est assez simple. Je souhaite que le ministre Clement se joigne à nous le 10 mars pour examiner le Budget supplémentaire des dépenses. Selon moi, la motion ne contient rien de controversé ou d'inhabituel. C'est quelque chose que nous faisons chaque fois qu'on dépose un budget. Grosso modo, c'est tout ce que je demande.
    Merci beaucoup, monsieur Rota.
    Je crois que, lorsque vous avez présenté la motion, on était d'accord des deux côtés de la salle. Y a-t-il toujours consensus à ce sujet?
    Allez-y, monsieur Wallace.
    Je ne vois pas de problème à ce que nous invitions le ministre et j'adore les budgets, mais selon moi, il vaut mieux discuter avec les fonctionnaires une fois l'aspect politique traité. Les représentants du ministère sont-ils invités aussi?
    Les fonctionnaires et le ministre seront ici. Nous souhaitons tenir une séance de deux heures, mais la réunion pourrait bien ne durer qu'une heure. Nous allons vérifier les disponibilités des témoins.
    J'aurai peut-être du mal à être ici jeudi prochain. Faut-il à tout prix recevoir les témoins ce jour-là ou pouvons-nous le faire mardi prochain?
    Non, mardi, nous discuterons du recensement.
    D'accord. Pourquoi ne pas voter la question du recensement tout de suite? Je suis contre et vous êtes pour; voilà, c'est fait.
    Je pense qu'il vaut mieux s'en tenir à la séance du 10 mars.
    Allez-y, monsieur Lake.
    Je veux simplement clarifier l'emploi du temps. Cela va-t-il retarder encore plus l'étude de la Loi sur Investissement Canada? Les choses restent-elles comme elles ont été convenues à la dernière séance?
    Nous devrions envisager l'annulation de la séance sur le recensement, qui sera sans doute plutôt redondante, en raison des nombreuses heures que nous avons déjà passées là-dessus. Il convient peut-être de retarder la séance sur le recensement pour donner la priorité à l'étude de la Loi sur Investissement Canada. Tout le monde dit que la question importe, mais personne ne semble y accorder de l'importance.
    Pouvons-nous obtenir des précisions sur l'emploi du temps? Dans les circonstances, quand aura lieu la prochaine séance qui concerne la Loi sur Investissement Canada?
    La séance suivante se tiendra le 24 mars. Nous passerons une semaine dans nos circonscriptions avant cela.
    À titre informatif, nous avons également annulé une séance sur le projet de loi d'initiative parlementaire en raison du budget qui sera présenté le 22 mars. Les deux séances sont remises à plus tard pour des raisons différentes: le Budget supplémentaire des dépenses et le budget.
    Selon les informations dont nous disposons, la séance du 10 mars sera consacrée au Budget supplémentaire des dépenses, celle du 22, au budget du ministre des Finances et celle du 24 mars, à la Loi sur Investissement Canada.
    Nous discuterons donc de la question le 24 mars.
    Pourtant, nous avons proposé, en janvier, une motion visant à commencer l'étude tout de suite, et tout le monde l'a soutenue. Nous parlons maintenant d'étudier la question dans trois séances, deux mois plus tard, à la fin de mars. Je tiens simplement à le mettre au clair et il semble bien que...
    Il est évident que le Budget supplémentaire des dépenses importe, mais nous devrions envisager de reporter l'étude du projet de loi d'initiative parlementaire sur le recensement, que nous n'avons pas à terminer avant mai. Nous souhaiterions peut-être étudier la question après l'examen de la Loi sur Investissement Canada, dont tout le monde semble dire qu'il importe, même si j'ai l'impression qu'un seul parti lui accorde de l'importance.
    Ce n'est qu'une proposition.
    Si c'est ce qui influence votre décision sur l'étude du Budget supplémentaire le 10 mars, il faut peut-être demander l'opinion des députés de l'opposition.

  (1535)  

    Je tiens à remercier l'honorable secrétaire parlementaire de la proposition, mais non, nous préférons maintenir l'étude du budget le 10 mars. Je pense que cela fonctionne bien pour nous tous. Je suis reconnaissant envers M. Lake, car je sais que la question lui importe, mais nous allons laisser les choses telles quelles.
    Nous en avons déjà discuté il y a deux ou trois semaines ou il y a quelques séances. Si nous pouvons simplement maintenir ce qui est proposé, ce serait l'idéal.
    Je sens que M. Lake veut faire un autre commentaire.
    Non, c'est correct.
    Avez-vous quelque chose à ajouter? Dans ce cas, qui est pour l'étude du Budget supplémentaire le 10 mars?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Merci beaucoup, madame et messieurs.
    Passons maintenant aux témoins. Nous allons d'abord entendre Me Borgers, de l'Association du Barreau canadien. Allez-y, monsieur; vous avez cinq minutes.
    Je m'appelle Oliver Borgers et je suis associé au groupe du droit de la concurrence qui fait partie du cabinet McCarthy Tétrault, situé à Toronto. Je suis ici aujourd'hui en ma qualité de président du Comité d'examen de l'investissement étranger. Le comité s'intéresse à la Loi sur Investissement Canada et il fait partie de la Section nationale du droit de la concurrence de l'Association du Barreau canadien.
    Je suis accompagné du vice-président du comité, mon ami Tony Baldanza. Tony est président du groupe de pratique antitrust, concurrence et commercialisation du cabinet Fasken Martineau DuMoulin S.E.N.C.R.L., s.r.l. Tony et moi donnons régulièrement des avis juridiques sur d'importantes transactions soumises à la Loi sur Investissement Canada.
    L'ABC est une association nationale qui regroupe quelque 37 000 avocats, juges, notaires, professeurs de droit et étudiants en droit de partout au Canada. Ses principaux objectifs comprennent l'amélioration du droit et de l'administration de la justice.
    Nous vous remercions de l'invitation à comparaître devant le comité et nous espérons que nous pourrons vous aider. Nous savons que vous étudiez la Loi sur Investissement Canada pour établir les approches qui pourraient être adoptées concernant trois points.
    Dans l'exposé, nous aborderons chacun de ces points. Ensuite, nous répondrons avec plaisir aux questions que vous nous poserez.
    Vous cherchez à déterminer si l'intérêt du Canada est servi par les restrictions sur la publication des raisons qui expliquent qu'une demande d'examen est acceptée ou refusée en vertu de la loi et la forme que cette communication peut prendre.
    Selon nous, la transparence et la prévisibilité sont des composantes très importantes d'une administration appropriée et équitable de la Loi sur Investissement Canada. Il est donc dans l'intérêt des Canadiens et des futurs investisseurs de connaître les raisons relatives à la décision du ministre d'approuver — ou, tout particulièrement, de rejeter — un investissement donné.
    Cependant, la transparence et la prévisibilité ne doivent pas entraîner la communication de renseignements confidentiels ou concurrentiels, sauf si la partie concernée y consent. Par ailleurs, il ne faut pas obliger le ministre à révéler ses raisons si elles sont liées à des enjeux de sécurité nationale.
    Nous sommes d'avis que la publication des raisons générales relatives aux décisions du ministre suffit pour encadrer et guider les futurs investisseurs et leurs conseillers. En outre, nous soutenons que le ou la ministre devrait avoir l’obligation de divulguer les raisons de décisions qu’il ou elle pourrait prendre par rapport à une demande d’examen donnée, et ce, même si l’investisseur retire ensuite sa demande.
    Vous avez demandé si la loi comporte des mécanismes d'application efficaces et comment les améliorer.
    Selon nous, les mécanismes de la partie VII de la Loi sur Investissement Canada sont solides et ils ne demandent pas d'amélioration à ce moment-ci. Jusqu'à présent, le gouvernement n'a pas souvent appliqué la Loi sur Investissement Canada. Nous n'avons donc aucune raison de croire que les mécanismes actuels sont insuffisants. Ce sont les représentants du gouvernement qui décident s'ils appliquent les dispositions et ils ne l'ont fait qu'à quelques reprises, jusqu'à maintenant. Sauf votre respect, nous pourrons évaluer si les dispositions sont suffisantes seulement lorsqu'un certain nombre de décisions auront été prises en vertu de la partie VII de la Loi sur Investissement Canada.
    Nous aimerions rappeler au comité qu'aux termes du paragraphe 40(2), les dispositions actuelles permettent aux tribunaux de rendre, selon les circonstances, une ordonnance qui concerne le dessaisissement, différentes injonctions, l'obligation pour l'investisseur de se conformer à un engagement et des pénalités de 10 000 $ par jour de contravention. Je répète que les mécanismes d'application de la loi sont solides et qu'ils sont adéquats pour veiller au respect de la loi.
    Vous avez demandé s'il est dans l'intérêt du Canada que le gouvernement fédéral consulte les provinces concernées par une décision et quelle forme les consultations peuvent prendre.
    Conformément à l'alinéa 20e) et aux facteurs qui déterminent si un investissement fera l'objet d'un examen, la Division d'examen des investissements d'Industrie Canada et la Division d'examen des investissements sur le secteur culturel de Patrimoine canadien consultent actuellement les gouvernements de toutes les provinces concernées par un investissement qui fait l'objet d'un examen en vertu de la loi.
    Nous sommes d'avis que la procédure de consultation confidentielle actuelle est appropriée. La Section nationale du droit de la concurrence ne conseille pas la tenue de consultations publiques. Cependant, nous proposons que le gouvernement communique à l'investisseur les informations obtenues durant les consultations, contrairement à ce qui se fait à l'heure actuelle.

  (1540)  

    Nous espérons que notre bref exposé vous aura été utile. Je répète que nous répondrons avec plaisir à vos questions.
    Merci.
    Merci beaucoup, Me Borgers.
    Nous allons maintenant passer au Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier. Qui de M. Caron ou de M. Coles présentera l'exposé?
    Nous nous partagerons la tâche, monsieur. Je vais parler deux minutes et demie puis M. Caron prendra la relève.
    Nous n'allons pas vous ennuyer avec tous les détails du mémoire, qui est dans les deux langues officielles, si je ne m'abuse. Je vais commenter les points saillants.
    Notre syndicat national représente les travailleurs d'entreprises privées qui font partie de nombreux secteurs essentiels de l'économie canadienne, comme les sables bitumineux, la potasse, les télécommunications, etc.
    Les dispositions actuelles présentent un certain nombre de problèmes, dont la transparence. Des quelque 18 000 investissements étrangers effectués au pays, 14 000 visaient la prise de contrôle et 1 600 ont été examinés. Il faut se demander pourquoi.
    Nous pensons que les critères seraient trop élevés. Les investissements étrangers effectués au pays depuis 1985 s'élèvent à quelque 1 000 milliards de dollars, et, de cette somme, seulement 21,5 milliards n'ont pas servi à une prise de contrôle. À quelques exceptions près donc, l'investissement étranger signifie la prise de contrôle par des intérêts étrangers.
    Nous sommes préoccupés, car 50 p. 100 de tous les investissements portaient sur la prise de contrôle d'entreprises des secteurs primaires, dont l'extraction pétrolière, gazière et minière et les métaux de première fusion. C'est un problème, car ces secteurs sont essentiels et, pour toutes sortes de raisons, ils doivent être sous le contrôle d'entreprises canadiennes. Il importe beaucoup d'établir une stratégie d'investissement qui se fonde sur le contrôle de nos ressources par des entreprises canadiennes.
    Je demanderais maintenant à Guy Caron de parler de télécommunications.

[Français]

    Les télécommunications représentent un cas intéressant. Vous savez très bien que le ministre Clement a annoncé son intention d'ouvrir prochainement le secteur à la propriété étrangère. On sait également que les trois grandes compagnies qui détiennent le marché présentement ne sont pas très populaires et que les gens perçoivent donc d'un bon oeil cette décision. Cependant, il faut tenir compte du fait que depuis deux ans, on est passé de quatre à onze opérateurs de réseaux mobiles au Canada. On est le deuxième pays pour le nombre d'opérateurs de réseaux mobiles. Dans les autres pays, à part quatre pays incluant le Canada, il y a un maximum de quatre opérateurs de réseaux mobiles. Il n'y a donc pas plus d'opérateurs de réseaux mobiles, même si ces pays permettent la propriété étrangère.
    Là où je veux en venir, c'est que si l'on permet la propriété étrangère, c'est bien évident que la solution la plus facile pour une compagnie comme AT&T, Vodafone ou autre qui veut s'intégrer dans le marché n'est pas d'installer une structure parallèle, mais bien de venir acquérir les compagnies existantes, ce qui fait qu'au bout du compte, il n'y aura pas nécessairement plus de compétition.
    Dans ce cas-ci, si une telle transaction se présente devant Industrie Canada, la question sera de savoir si celle-ci, même s'il ne s'agit pas de ressources naturelles, par exemple, sera étudiée pour vérifier si elle représente un avantage net pour le Canada et sur quelles bases cet avantage reposera. Pour l'instant, il n'y a aucun moyen de le savoir. Selon nous, ce ne sera pas le cas, mais la question de la transparence est flagrante dans ce cas-ci. Dans le mémoire que j'ai déposé, il y a également des mentions de nos préoccupations par rapport aux sables bitumineux et au secteur minier. Pour nous, la question de la transparence est une question majeure.

  (1545)  

[Traduction]

    Pour terminer, monsieur le président, madame et messieurs les députés, il importe pour nous tous et les investisseurs de nous fonder sur une définition claire du terme « avantage net du Canada ». Il faut déterminer ce que le terme signifie et s'assurer que les Canadiens et les investisseurs le comprennent.
    De plus, l'application de la loi ne semble pas fonctionner du tout. Si on pense à tout ce que nous considérons comme des manquements à des engagements de la part de Vale Inco et d'autres, l'application de la loi ne semble pas avoir d'effet dissuasif.
    Nous n'appuyons ni le protectionnisme aveugle — qui ne servirait pas les meilleurs intérêts du Canada — ni le laissez-faire total, qui consiste à s'en remettre au marché. Étant donné que je ne sais pas ce qui motive le marché, et les politiciens non plus, il vous faut trouver un compromis.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Coles.
    Passons à M. Goldman.
    Merci, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du comité.
    Je m'appelle Cal Goldman. Je suis un associé du cabinet Blake, Cassels et Graydon, à Toronto, où je copréside le groupe concurrence, antitrust et investissement étranger. Je suis ici à l'invitation du comité, et j'en suis très heureux. Je comparais à titre personnel.
    À l'instar de mes collègues de l'Association du Barreau canadien, je donne régulièrement des conseils juridiques sur d'importantes transactions qui sont subordonnées aux conditions d'examen prévues par la Loi sur Investissement Canada. Je fais ce travail depuis la fin des années 1980. Je dirigeais, à l'époque, le Bureau canadien de la concurrence. Je suis revenu à la pratique privée au début des années 1990. J'espère que vous allez trouver mes propos utiles.
    Je tiens à dire d'emblée que je partage les vues exprimées plus tôt par l'Association du Barreau canadien relativement aux trois grands thèmes examinés en priorité par le comité.
    Premièrement, la transparence et la prévisibilité sont des composantes très importantes d'une bonne administration de la Loi sur investissement Canada, sous réserve de garanties touchant la protection de renseignements concurrentiels ou confidentiels délicats, comme le prévoit l'article 36 de la loi.
    Sur ce point, il serait possible d'améliorer la transparence et la prévisibilité du processus si le ministre, au moment de rendre une décision, émettait des précis d'information plus détaillés. On le fait déjà dans le cadre de la Loi sur la concurrence, sous réserve de garanties de confidentialité et de protection de renseignements concurrentiels délicats, lorsque des décisions touchant des projets de fusion majeurs sont rendues. Certaines fiches d'information comptent trois ou quatre pages, sinon plus.
    Deuxièmement, les mécanismes d'exécution que prévoit la loi n'ont pas, selon moi, à être modifiés.
    Troisièmement, le processus de consultation défini dans la Loi sur Investissement Canada est adéquat. La loi précise clairement que les décisions rendues par le ministre sont prises en consultation avec les provinces visées par un investissement qui fait l'objet d'un examen et qui constitue un avantage net pour le Canada.
    J'aurais d'autres suggestions à formuler. Si le temps ne me permet pas de le faire maintenant, je pourrais vous les envoyer plus tard. Elles portent sur le principe fondamental suivant: pour pouvoir prendre des décisions éclairées, les investisseurs doivent connaître, avec une certitude et une prévisibilité raisonnables, les critères autorisant les investissements étrangers. Nous voulons attirer au Canada des investissements solides et sérieux qui profitent au marché canadien, tel que déterminé par le ministre, et qui procurent un avantage net au Canada.
    À cet égard, l'utilisation continue, dans les médias et ailleurs, d'expressions comme « acquisition stratégique » ou « ressource stratégique », quand il est question d'une transaction particulière, soulève beaucoup d'incertitude additionnelle. Le concept de l'actif stratégique, mentionné par le sous-ministre adjoint et la directrice adjointe des investissements, Marie-Josée Thivierge, dans sa déclaration du 17 février, ne figure pas dans la loi. Ces mots n'apparaissent pas dans la loi. Donc, le fait que les médias les associent à des transactions possibles, et je me fonde sur ce qu'ont dit mes collègues du Barreau et des gens d'affaires au Canada et à l'étranger, ne contribue qu'à créer de l'incertitude. Je tiens à attirer votre attention sur ce point. Le mot « stratégique » est un mot subjectif. Les intervenants ne lui accordent pas tous le même sens.
    Autre point: il faudrait produire des résumés plus détaillés. Cela permettrait d'améliorer la transparence, et aussi de favoriser la compréhension des motifs qui sous-tendent la décision du ministre.
    Il faudrait par ailleurs offrir davantage de conseils dans un contexte confidentiel. Des modalités en ce sens sont déjà prévues dans les principes directeurs énoncés dans la loi. sauf qu'il faudrait en informer les gens d'affaires. Ils pourraient se servir de tels conseils au moment d'évaluer des transactions possibles. Cette démarche est utilisée dans le cadre de la Loi de la concurrence. Elle peut l'être encore davantage dans le cadre de cette loi-ci.
    Ces suggestions n'exigent pas l'adoption de modifications à la loi. Celles-ci peuvent être apportées par voie administrative, à la demande du ministre. Il revient aux parlementaires de décider si la loi doit être ou non modifiée. Toutefois, à mon avis, elle n'a pas besoin de l'être pour l'instant.
    Je sais fort bien que cette décision relève du Parlement. Je ne fais qu'exprimer mon point de vue.

  (1550)  

    Ceci met fin à mon exposé. Je répondrai volontiers à vos questions.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Goldman.
    Est-ce que votre déclaration peut être déposée auprès du comité?
    Oui. J'ai remis une copie...
    Dans les deux langues officielles?
    Nous allons faire traduire la déclaration et la distribuer aux membres du comité.
    Je n'ai pas eu le temps de m'en occuper. J'ai reçu la convocation la semaine dernière.
    C'est très bien.
    Nous allons passer aux questions, car nous avons d'autres témoins à entendre. Notre temps est calculé. Nous allons entreprendre des tours de cinq minutes.
    Monsieur McTeague, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être venus nous rencontrer. Je connais M. Borgers et M. Goldman depuis très longtemps. Je suis heureux de vous revoir. Je souhaite également la bienvenue aux représentants du SCEP.
    Ma première question s'adresse à vous, monsieur Goldman. Vous proposez, ici, une solution de rechange. Vous dites qu'il faudrait, pour améliorer la transparence et la prévisibilité, préparer des fiches d'information pour expliquer les motifs d'une décision. Il n'est pas question ici d'établir une jurisprudence. Toutefois, il est vrai que cela permettrait, à tout le moins, d'ajouter à la compréhension, d'apporter un élément de certitude aux décisions.
    Je me demande, monsieur Goldman, si vous avez eu l'occasion, à titre personnel, de discuter de cette proposition avec M. Borgers et l'Association du Barreau canadien. Ils pourraient d'ailleurs nous dire s'ils se sont penchés là-dessus, ou ce qu'ils en pensent.
    Merci, monsieur McTeague.
    Je n'ai pas abordé la question avec mes collègues de l'Association du Barreau canadien avant ma comparution d'aujourd'hui. Il y a un facteur principal et pondérateur qui doit être pris en compte en tout temps, et c'est l'article 36 de la loi. À cela, il faut ajouter le besoin de protéger les renseignements concurrentiels délicats, comme on le fait dans les précis d'information technique publiés en vertu de la Loi sur la concurrence.
    Il s'agit là d'une exigence primordiale et fondamentale, et ce, pour deux raisons: d'abord, la loi exige que les renseignements confidentiels soient protégés en vertu de l'article 36. Ensuite, les principes d'équité dans un marché concurrentiel, et je suis certain que vous et vos collègues connaissez fort bien ces principes, commandent que l'investisseur — l'entité qui fait affaire au Canada — ne soit pas exposé à des désavantages injustes.
    De tels désavantages pourraient survenir si un programme de dépenses en capital hautement sensible, par exemple, ou d'autres investissements ou plans stratégiques étaient divulgués au public, et donc accessibles aux concurrents qui, eux, ne seraient astreints à aucune obligation de divulgation. À mon avis, il est possible de publier des précis d'information plus détaillés, comme on le fait dans le cadre de la Loi sur la concurrence, tout en assurant la protection des renseignements qui sont toujours gardés confidentiels lors des examens menés en vertu de la loi.
    Il est possible de le faire. C'est quelque chose qui demande beaucoup de temps, et je ne dis pas que le ministre et ses fonctionnaires ne sont pas prêts à consacrer du temps à cette démarche. Cette démarche permettrait de favoriser les discussions éclairées, d'encourager les entreprises à aller de l'avant, et d'aider la population à comprendre les raisons qui motivent les décisions.

  (1555)  

    Votre réponse est très claire. Merci, monsieur Goldman.
    Je sais que vous avez, tout comme M. Borgers et M. Baldanza, une longue expérience du droit de la concurrence. Je me demande si vous recommanderiez ou proposeriez — sans nécessairement le recommander — l'adoption de lignes directrices similaires à celles qui figurent dans la Loi sur la concurrence. Je sais que les transactions ne sont pas toutes identiques, mais est-ce qu'une telle mesure pourrait être envisagée, étant donné qu'elle contribuerait, à tout le moins, à dissiper la perception selon laquelle les décisions sont prises sur un coup de tête? Nous avons déjà une idée de la façon dont ces transactions se déroulent sur le marché intérieur. Est-ce que cela pourrait avoir un effet sur les décisions ministérielles?
    Nous savons qu'il y a des investissements qui sont assujettis à des restrictions pour des raisons de sécurité. Il existe d'ailleurs une certaine jurisprudence à cet égard. Nous comprenons tous l'importance d'assurer la protection des renseignements pour ne pas nuire aux parties, d'offrir — comme l'a laissé entendre l'Association du Barreau canadien — des conseils à l'investisseur éventuel. Toutefois, je me demande s'il existe une façon plus précise de procéder  — je fais allusion au principe de réciprocité. Quelles sont les meilleures pratiques recensées à l'échelle internationale dans ce domaine? A-t-on pris des mesures concrètes qui vont au-delà de l'amélioration de la transparence? Est-ce que l'adoption de lignes directrices, des meilleures pratiques en vigueur à l'échelle internationale, pourrait être envisagée? Et qu'en est-il de la réciprocité?
    Monsieur Borgers, j'aimerais savoir ce que vous pensez de tout cela.
    Je vais vous répondre avec plaisir, monsieur McTeague.
    Pour ce qui est de la première question, les précis d'information, nous n'avons pas discuté de la suggestion de M. Goldman, mais l'Association du Barreau canadien est en faveur de la divulgation de l'information, sous réserve de garanties de confidentialité données par le cabinet du ministre et les divisions du ministère de l'Industrie qui sont chargées d'administrer la loi.
    À l'heure actuelle, la loi autorise le ministre à fournir les motifs à l'appui de toute décision visant l'acceptation ou le refus d'un projet. Que l'on utilise les mots motifs ou précis d'information, je pense que le concept est essentiellement le même. Nous voulons des renseignements, des directives qui permettent d'assurer la transparence et la prévisibilité, et qui permettent aussi aux conseillers et aux investisseurs de comprendre la portée des décisions rendues.
    Pour ce qui est des pratiques internationales, le Canada dispose d'une loi unique en son genre. Mis à part l'Australie et la Nouvelle-Zélande, aucun autre pays ne dispose d'une norme internationale dans ce domaine, parce que cette loi est unique au Canada. Par ailleurs, les divisions qui administrent la loi au nom du ministère du Patrimoine et d'Industrie Canada émettent des directives qui visent, par exemple, les entreprises publiques et culturelles. Nous encourageons, bien sûr, ces divisions à émettre un plus grand nombre de directives pour aider l'ensemble des intervenants.
    Merci beaucoup, monsieur Borgers. Votre temps est écoulé.
    Nous allons maintenant entendre M. Bouchard, du Bloc québécois.

[Français]

    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps de parole avec mon collègue M. Cardin.
    S'il en reste.
     Bonjour, messieurs. Merci d'être venus témoigner. Je poserai ma première question à M. Caron.
    Monsieur Caron, vous savez que la Loi sur Investissement Canada permet au ministre de fixer des conditions lorsqu'il fait l'examen d'un investissement étranger. Étant donné que ça s'applique depuis quelques années, j'aimerais savoir si les investisseurs étrangers ont de bons antécédents en la matière et s'ils ont respecté les conditions, par exemple s'il y a des conditions relativement à un plancher en matière d'emplois au siège social.
    Je vais répondre conjointement avec M. Coles, le président du syndicat.
    Ce qui nous vient en tête, c'est évidemment l'exemple de Vale Inco. Vale avait acquis Inco et s'était effectivement vu imposer des conditions pour l'achat, des conditions qui avaient trait notamment à l'emploi, et qui n'ont pas été respectées, a-t-on appris.
    Évidemment, on parle de possibilités qui sont incluses dans la loi, mais encore faut-il que ces dernières soient appliquées et utilisées pour imposer le pouvoir gouvernemental à l'égard de ceux et celles qui ne respectent pas le contenu de la loi ou de leurs ententes.
    La question de Vale était effectivement primordiale, surtout dans la situation de Sudbury. On le constate également à Thompson actuellement.
    Ce qui nous dérange un peu, quand je parle du manque de transparence, c'est le fait qu'on ne soit pas toujours au courant de ces conditions, sauf celles qui sont publiées ou dévoilées publiquement.
    De plus, on a mis beaucoup de temps à révéler l'information relative à Vale Inco. On peut donc avoir une loi qui soit bien écrite, qu'on modifie ou non, mais encore faut-il avoir la volonté de l'imposer, ce qu'on n'a pas vu dans ce cas-ci.

  (1600)  

[Traduction]

    J'ajouterais un autre exemple récent, et il y en a plusieurs, soit celui de l'entreprise sidérurgique américaine. Encore une fois, la transparence pose problème, car nous ne savons pas tout ce qui a été promis. Par contre, nous savons qu'elle n'a pas respecté les conditions imposées en ce qui a trait à l'emploi et le maintien de certaines activités au Canada.
    Ce sont les deux exemples les plus récents que nous connaissons, mais il y en a d'autres. À défaut d'avoir tous les renseignements en main, il est très difficile de savoir s'il y a d'autres conditions qui n'ont pas été respectées.

[Français]

    Bonjour et bienvenue, monsieur.
    Je crois pertinemment que la transparence, la prévisibilité, les mécanismes d'application que vous qualifiez de « robustes », les consultations et la nécessité d'informer les investisseurs de ce qui en ressort, sont des éléments importants. Industrie Canada nous a remis, la semaine dernière si je ne me trompe pas, un document portant sur la décision du ministre qui vient appuyer l'importance de ces éléments. On y disait ceci — et cela venait du ministère: « La décision du ministre est un exercice de discrétion, elle est aussi définitive et ne peut pas faire l'objet d'un appel. Il est possible de faire appel du processus auprès de la Cour fédérale. » À ce moment-là, la transparence est éminemment importante et obligatoire. C'est la possibilité d'en savoir le plus possible, pour une question de sécurité, de compétitivité et de confidentialité, bien sûr. Je pense que ce sont des éléments importants.
    Présentement, on étudie la loi. Quels éléments, selon vous tous, serait-il pertinent d'améliorer? Vous nous avez énuméré les choses qui allaient bien, mais quelles sont les choses qu'il faudrait améliorer dans la loi? Également, M. Caron et M. Coles nous ont donné quelques pistes. Il y a une différence énorme entre le point de vue de la compétition et le point de vue des investissements. Il devrait donc y avoir des lignes directrices pour ne pas seulement favoriser les prises de contrôle, mais également amener de nouveaux investissements et favoriser l'installation de nouvelles entreprises. M. Caron nous a parlé des télécommunications, et c'est flagrant. Il y a d'ailleurs un représentant de Globalive, une compagnie étrangère, qui est allé en Cour fédérale.
    Que peut-on faire pour améliorer encore plus la Loi sur Investissement Canada et pour faire en sorte que l'avantage net soit su et connu de façon très transparente?

[Traduction]

    Monsieur Cardin, vous avez dépassé de beaucoup votre temps de parole. Nous allons devoir nous contenter de cette réponse. Les témoins pourront, s'ils le désirent, ajouter d'autres précisions au cours de la discussion. Excusez-moi, monsieur. Je suis désolé. Nous devons continuer.
    Gardez cette question en tête, si vous voulez y revenir plus tard.
    Nous allons maintenant céder la parole au Parti conservateur. Monsieur Lake, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les témoins d'être venus nous rencontrer.
    Monsieur Coles, vous avez dit, très clairement, qu'un plus grand nombre d'investissements doivent faire l'objet d'un examen. Quel devrait être, à votre avis, le montant du seuil d'examen?
    Je me suis surtout penché, dernièrement, sur les critères liés à la transparence et à l'avantage net pour le Canada.
    Je me retrouve dans une situation un peu étrange en tant que chef syndical: je parcours le monde à la recherche d'entreprises étrangères qui souhaitent acheter des usines de pâtes et papiers. Je dois trouver des avocats spécialisés en droit commercial qui sont en mesure de leur expliquer ce que l'on entend, entre autres, par avantage net pour le Canada.
    C'est une question parmi d'autres, mais je pense que...

  (1605)  

    Avez-vous un montant en tête? Je n'ai pas beaucoup de temps et j'ai beaucoup de questions à poser.
    Si on jetait un coup d'oeil arbitraire aux chiffres, qu'on les réduisait de moitié, un plus grand nombre de projets d'investissements seraient probablement examinés. On saurait alors que la loi est appliquée. Si l'on augmentait le seuil, comme certains le proposent, moins de projets seraient examinés.
    Donc, ce serait la moitié de 312 millions de dollars?
    M. David Coles: C'est une suggestion.
    M. Mike Lake: Monsieur Borgers, monsieur Goldman, quel impact ce seuil aurait-il? Pouvez-vous nous le dire?
    Le fait de réduire le seuil augmenterait, bien entendu, le nombre de transactions examinées par le ministre de l'Industrie.
    C'est exact.
    Le seuil d'examen pour l'achat d'entreprises culturelles est inférieur à 5 millions de dollars.
    Quelle incidence une telle mesure aurait-elle sur les investissements étrangers au Canada?
    C'est difficile à dire. Le nombre d'examens effectués par le gouvernement augmenterait.
    M. Mike Lake: D'accord...
    Puis-je ajouter quelque chose? Concernant la baisse des seuils, nous sommes tenus, en vertu des traités que nous avons négociés, de réduire le nombre d'examens.
    Vous pourriez peut-être nous en dire plus sur le sujet, car il a été question, par exemple, de définir plus clairement le principe de l'avantage net. J'allais d'ailleurs aborder ce point. Est-ce que l'adoption d'une définition plus claire, de restrictions plus sévères aurait un impact sur ces traités?
    Je ne crois pas que l'adoption d'une définition plus claire nuirait à nos obligations de traités. Je pense qu'il y a des améliorations à apporter de ce côté-là.
    Cela dit, on pourrait apporter cette précision dans les lignes directrices plutôt que dans la loi.
    Certains ont proposé que l'on resserre le critère de l'avantage net. Est-ce que cela pourrait avoir une incidence sur nos accords commerciaux?
    En théorie, oui.
    C'est-à-dire?
    L'imposition de restrictions additionnelles aux investissements étrangers pourrait, en théorie, se traduire par un manquement aux obligations qui découlent des traités.
    D'accord.
    M. Coles a laissé entendre que le mécanisme d'exécution ne fonctionne pas bien. Or, M. Goldman et M. Borgers ont recommandé qu'aucun changement ne soit apporté aux dispositions d'exécution de la loi. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Pourquoi dites-vous qu'il n'y a pas lieu de les modifier?
    Monsieur Goldman.
    Je ne vois pas l'utilité, pour l'instant, de modifier le mécanisme d'exécution de la loi, parce que celle-ci accorde au ministre de nombreux pouvoirs, y compris celui de s'adresser à la cour supérieure pour obtenir des ordonnances dans le but, par exemple, d' enjoindre quelqu'un de se départir de son investissement, de se conformer aux engagements, de payer une pénalité, ainsi de suite. La loi prévoit un mécanisme bien structuré qui permet d'assurer un suivi.
    Au cours des dernières années, nous avons été témoins de certaines situations créées par la crise financière. Or, si nous jetons un coup d'oeil à ce qui s'est passé depuis l'entrée en vigueur de la loi, en 1985, nous constatons qu'il n'y a pas eu beaucoup de problèmes au chapitre de l'application ou du respect de la loi dans un grand nombre de cas. Les pouvoirs sont là.
    Il existe des façons de renforcer le mécanisme d'exécution, encore une fois sans modifier la loi. Le cabinet du ministre, la division chargée d'examiner les investissements pourraient disposer d'un plus grand nombre de ressources. Dans certains cas, notamment dans les dossiers délicats ou qui attirent l'attention du public, de manière exceptionnelle, il est possible de voir ce qui se fait dans le cadre d'examens de fusion parallèles, par exemple en vertu de la Loi sur la concurrence, où des organismes professionnels, de grands cabinets comptables, sont appelés à participer au processus de suivi. Il existe des moyens de faire en sorte que les pouvoirs déjà existants, pouvoirs qui sont très nombreux, soient appliqués de manière très efficace.

  (1610)  

    Nous allons entreprendre un autre tour.
    Monsieur Angus, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je trouve la discussion fort intéressante.
    Je viens de Timmins—Baie James, une région qui fait partie du secteur minier international. Mes voisins travaillent au sein d'équipes internationales, de sorte que nous sommes des habitués des projets d'investissement. Nous vivons en fonction des investissements qui sont effectués ici, et nous investissons ailleurs.
    J'aimerais vous parler de quatre entreprises de la région, parce qu'elles reflètent certains des enjeux auxquels nous sommes confrontés.
    Il s'agit de De Beers, Georgia-Pacific, Xstrata et Vale.
    De Beers a organisé des réunions publiques. Elle a signé des ententes sur les répercussions et les avantages avec les collectivités. Elle a cherché, en tant que multinationale minière, à adopter une approche ouverte avec les politiciens régionaux, à régler des problèmes avec les collectivités. Elle a investi un milliard de dollars. Nous avons dans notre région un joueur économique majeur que nous n'aurions peut-être pas eu autrement.
    Georgia-Pacific est arrivée après Xstrata et Vale. Nous allons parler de celles-là dans un instant. Elle était venue faire l'acquisition d'une entreprise.
    Il s'agissait, monsieur Coles, d'une entreprise de votre région qui avait été mise sous séquestre, une des plus grandes usines de fabrication de panneaux OSB en Amérique du Nord. Cette situation soulevait beaucoup d'inquiétudes.
    Nous avons tenu des audiences publiques. Il ne s'agissait pas d'audiences officielles, mais les gens étaient préoccupés. Les syndicats étaient là, les membres de la collectivité aussi. Nous avons posé beaucoup de questions. La transaction de Georgia-Pacific a été approuvée, et la société a investi dans l'usine. Elle essaie de se comporter, selon nous, comme un bon citoyen. Nous savons que le SCEP a appuyé la transaction. Voilà un autre exemple. On aurait pu avoir une usine qui ne fonctionnait plus, ou une usine qui faisait l'objet de nouveaux investissements. Nous aurions aimé qu'elle reste entre les mains d'intérêts locaux, mais c'est la vie.
    Passons maintenant à Xstrata et Vale, qui se sont comportées en mauvais citoyens. Nous avions là l'occasion de permettre à Inco et à Falconbridge de fusionner. Nous avions deux entreprises qui affichaient un bilan incroyable. Les synergies qui existaient dans le bassin de Sudbury auraient permis de transformer l'industrie d'extraction des métaux de base. Ces sociétés jouissaient d'excellentes réputations internationales.
    La question à l'époque n'était pas de savoir s'il fallait empêcher la prise de contrôle par Xstrata, mais de donner à une entreprise canadienne l'occasion de franchir les obstacles réglementaires. Le gouvernement a préféré ne pas donner aux entreprises canadiennes la chance de le faire. Il a approuvé l'offre d'Xstrata, une entreprise qui affichait déjà un piètre bilan. Tout le monde savait qu'elle était là pour le court terme, et non pour le long terme.
    Que s'est-il passé? L'entreprise a écrémé les dépôts de gisements. Elle a fermé les installations de raffinage de cuivre en Ontario. Vale a essentiellement mené une guerre contre Sudbury, Voisey's Bay et Thompson, au Manitoba. Tous ceux qui travaillent dans le milieu syndical ou dans le milieu de l'industrie vont vous dire Vale est l'équivalent de l'affaire Avro Arrow: l'industrie minière du Canada a perdu le pouvoir qu'elle possédait avec Falconbridge et Inco en cédant ces entreprises à ces deux bandits du monde des affaires.
    Monsieur Coles, votre bureau s'est occupé de l'une de ces prises de contrôle. Est-ce la loi qui n'a pas fonctionné dans ce cas-ci, ou avons-nous tout simplement manqué à notre responsabilité de diligence raisonnable?
    Comme je l’ai dit précédemment, je ne suis certainement pas contre la propriété étrangère, parce que les investisseurs étrangers ont renfloué bon nombre de sociétés canadiennes en difficulté. Le ministre a pris une décision. Que je sois d'accord ou pas, le ministre l’a prise, et c’est son droit.
    Encore une fois, mon problème est dans l’application de la loi. Les avocats ont peut-être raison. La loi nous dit peut-être que c’est possible, mais cela dépend si le ministre veut le faire ou pas. Notre problème est que des promesses avaient été faites; une société l’a remporté sur une autre en raison de ces promesses et personne ne l’a forcée à les respecter.
    Nous ne sommes pas du tout opposés à tout investissement étranger. Le problème est dans l’application de la loi. Je ne suis pas avocat, mais je crois que c'est le ministre qui a décidé de ne pas les appliquer.
    Monsieur Borgers, je vous pose donc la question. Si nous ajoutons U.S. Steel aux deux autres, nous avons là trois entreprises qui rendent la tâche difficile, à mon avis, à bon nombre d’entreprises étrangères qui veulent investir ici. J’ai discuté avec des représentants de Georgia-Pacific qui m’ont dit: « Nous sommes arrivés après Vale et Xsrata. Nous comprenons que ces gens soient très craintifs et qu’ils essayent d'anticiper nos moindres gestes. »
    Est-ce seulement le cas de trois joueurs malhonnêtes qui ont crû tout bonnement pouvoir acquérir des actifs, ce qui a été très mal vu par la population canadienne? Si c’est le cas, devrions-nous apprendre de cette erreur ou, comme certains l’ont suggéré, le problème n’est-il pas justement que cette situation se soit produite?

  (1615)  

    Veuillez répondre aussi brièvement que possible.
    Je ne suis vraiment pas en position de commenter quelque transaction que ce soit. Les investisseurs ont certainement soumis une demande au ministre et fourni tous les renseignements nécessaires. À mon avis, il ne fait aucun doute que ces entreprises ont pris des engagements écrits et détaillés à long terme en ce qui concerne leurs investissements.
    Les raisons pour appliquer la loi dans certains cas, mais pas dans d'autres appartiennent au ministre et à l’organisme d'exécution. Je crois que nous n’avons pas suffisamment de détails pour comprendre les différences en raison d’un élément très important: la protection des renseignements confidentiels et délicats sur les concurrents. Je crois que les investisseurs trouveraient difficile que cette information soit révélée au grand jour en raison des désavantages concurrentiels que cela entraînerait.
    Merci, monsieur Borgers.
    Madame Coady, c’est votre tour; vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup d’être présents ici aujourd’hui. Je vous remercie non seulement de nous accorder votre temps, mais aussi de nous faire part de vos connaissances et de vos commentaires bien étayés.
    Je vous ai entendu parler aujourd’hui du besoin d’adopter des lignes directrices, d’avoir des fiches d’information, de faire preuve d’une plus grande transparence, et tout le reste. J’aimerais parler du rapport publié en 2008 de Red Wilson, intitulé « Foncer pour gagner ». Le rapport parlait d’améliorer la transparence. Je crois qu’il était question de prévisibilité et de rapidité. Il se trouve que j’en ai une copie ici avec moi. Je vais vous en lire quelques lignes. Messieurs Goldman, Borgers et Coles, j’aimerais savoir si c’est ce que nous voulons dire lorsque nous parlons de transparence.
    Dans le rapport, les auteurs recommandent que les ministres soient tenus de faire état publiquement de tout refus d’une transaction particulière et de préciser les motifs du refus, que leur rapport annuel présente des données sur l’élaboration de toute nouvelle politique ou ligne directrice, ainsi qu’un survol de toutes les transactions assujetties à la LIC et des engagements fournis par les investisseurs étrangers. Dans la page suivante du rapport, les auteurs disent que le gouvernement devrait s’appuyer davantage sur des lignes directrices et d’autres documents consultatifs pour présenter les données portant sur le processus d’examen.
    Ces propos ont été publiés il y a deux ans dans le rapport de Red Wilson, intitulé « Foncer pour gagner ».
    Monsieur Goldman, connaissez-vous bien ce rapport? Est-ce ces éléments que vous avez en tête lorsque vous demandez d’utiliser des lignes directrices, d’avoir des fiches d’information et de faire preuve d’une plus grande transparence?
    Oui, tout à fait. Ce rapport présente un certain nombre de recommandations bien pensées et bien réfléchies. J’étais parmi ceux qui ont témoigné devant ce groupe d’étude.
    Les recommandations sur l’élaboration de lignes directrices additionnelles vont certainement dans le même sens que ce dont nous avons parlé aujourd’hui. J’aimerais ajouter quelque chose.
    D'autres lois existent au Canada, aux États-Unis et ailleurs, dont les lignes directrices, comme l’a indiqué M. McTeague, ont permis d’étoffer le cadre réglementaire pour donner aux investisseurs — les entreprises qui envisagent des fusions ou des acquisitions —, et au public et aux parties intéressées — c’est-à-dire les parties concernées dans l’ensemble du marché — une meilleure compréhension des dispositions législatives. Par exemple, les facteurs clés mentionnés dans l’article 20 seront appliqués plus précisément par l’organisme d'exécution, par la Division de l’examen des investissements et enfin par le ministre.
    Ç'a été le cas lors d’examens des fusions. Ce sujet fait l’objet d’une étude — MM. Borgers et Baldanza y participent — du Bureau de la concurrence.
    Monsieur Borgers, vous avez parlé de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande.
    Tout d’abord, pour conclure sur le sujet du rapport de Red Wilson, monsieur Goldman, j’en comprends que vous demandez au gouvernement d’adopter au plus vite les recommandations.
    Je suggère seulement que ce domaine mérite un examen minutieux.
    Je me fais l’écho de mon collègue. Au sujet du rapport de Red Wilson, la loi a été modifiée et le ministre est maintenant tenu de fournir les motifs à l’appui de tout refus. Il y a donc eu cette modification. Je sais que la Division de l’examen des investissements rédige actuellement son rapport annuel. Donc, cela s'en vient aussi vraisemblablement. Pendant que nous encourageons fortement la Division de l’Examen des investissements et l’Examen des investissements dans le secteur culturel à adopter d’autres lignes directrices, Patrimoine Canada s’applique actuellement à la rédaction d’une nouvelle politique plus détaillée sur la distribution des livres. Donc, il y a effectivement des projets en chantier.
    Tony, vouliez-vous compléter?

  (1620)  

    Je suis d'accord avec ce que M. Borgers vient de dire. Des mesures sont prises en ce qui concerne la transparence. À bien des égards — et cela vient rejoindre ce qu’a exprimé Cal Goldman —, le Bureau de la concurrence et ses pratiques peuvent être vus comme un modèle de transparence. Il y a beaucoup de lignes directrices, de fiches d’information et une assez forte prévisibilité que les décisions soient fondées sur des principes. Cet élément peut être utile à cet égard.
    Merci.
    J’ai une dernière question pour M. Coles. Il me reste peu de temps.
    Vous avez abordé la question d'une définition claire de l’avantage net. Ensuite, nous avons entendu une autre personne dire que la loi ne traite pas vraiment des atouts ou des ressources stratégiques. Pourriez-vous nous préciser ce que vous vouliez dire au sujet de la clarté de la définition d’un avantage net? Auriez-vous une suggestion ou simplement une orientation à nous donner pour la préciser?
    Très brièvement, je demande une orientation. Je pourrais mettre en doute l’interprétation que vous en faites, s’il y avait une définition. Chaque investisseur étranger avec qui j'ai discuté m'a demandé, entre autres, ce que cela veut dire. À leurs yeux, pour que tout le monde soit sur le même pied d'égalité, le concept doit être défini.
    Merci beaucoup, monsieur Coles.
    Passons maintenant à M. Van Kesteren. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de leur présence.
    Il y a évidemment certains problèmes. Nous aimerions certainement modifier certains aspects, et vous avez chacun une opinion différente à ce sujet.
    Je crois fermement que nous devrions toujours examiner ce qui se fait ailleurs. Notre situation n’est pas unique. Les circonstances entourant nos ressources, nos gens et notre système ne sont pas uniques. Je présume que d’autres pays ont éprouvé les mêmes problèmes.
    Existe-t-il un autre pays qui a trouvé la solution ou qui en a une qui ne demanderait que de légères modifications?
    Je laisse la question ouverte.
    Je m’adresse à M. Goldman en premier. Y a-t-il un pays dont nous devrions examiner le modèle?
    Sauf votre respect, selon mon expérience dans divers forums internationaux et dans les communications bilatérales dans le secteur public et dans le secteur privé durant des années — par exemple, la semaine dernière, je participais à une rencontre de l’OCDE, où bon nombre de pays discutent —, je ne crois pas que nous pouvons dire qu’un pays a un modèle qui est beaucoup plus efficace qu’un autre.
    La loi canadienne dans ce domaine, au contraire de la loi sur la concurrence, est unique au Canada. En plus du critère de l’avantage net, qui ne se retrouve pas exactement sous la même forme dans une autre loi, que nous avons maintenant, depuis le rapport de Red Wilson et les modifications législatives, nous avons les dispositions sur la sécurité nationale. C'est très complexe. On essaye de traiter des consultations avec les provinces et des diverses politiques fédérales dans notre dynamique canadienne unique.
    Est-ce que le fait que les provinces soient responsables de leurs propres ressources naturelles rend la situation un peu plus difficile? Est-ce l’un des obstacles que nous rencontrons sur notre chemin?
    À mon humble avis, parmi les obstacles uniques que le Canada rencontre sur son chemin, il faut clarifier davantage l’un des problèmes avec lesquels le gouvernement est aux prises, c'est-à-dire le processus consultatif avec les provinces. En le précisant clairement dans la loi, aucune province n’aurait de facto un droit de veto, mais l'opinion des provinces pèserait pour beaucoup dans la balance. C’est le fédéral qui prendrait la décision au sujet de l’avantage net du Canada. Cela aiderait à améliorer la prévisibilité et la certitude, mais ce sont des enjeux uniques au Canada dans le présent environnement.
    J’espère que cela répond à votre question.

  (1625)  

    Je passerai aux autres témoins bientôt, mais j’aimerais vous poser une dernière question. Le Canada a-t-il la réputation d’être fermé aux investissements?
    En me fondant sur diverses discussions que des collègues et moi avons eues avec d’autres conseils et des gens d’affaires, je ne crois pas que ce soit le cas. Les gens posent, par contre, des questions pour bien comprendre les lignes directrices lorsque quelqu’un examine minutieusement une question délicate qui suscite beaucoup d’inquiétudes. Ils posent beaucoup de questions comme celles que j’ai abordées, à savoir si les provinces possèdent de facto un droit de veto ou s’il y a un traitement particulier pour les éléments d'actifs stratégiques. Les médias en font état; tout le monde les remarque. En raison de la grande couverture médiatique des derniers mois autour de cette loi, les gens posent ces questions autant au Canada qu’à l’étranger.
    C’est ma réponse. Je ne crois pas que notre réputation soit rendue à ce point. Les gens posent seulement des questions.
    Messieurs les représentants de l’Association du barreau canadien, auriez-vous un bref commentaire à faire à ce sujet?
    Jusqu’à présent, rien ne suggère que le Canada soit fermé aux investissements en raison de l'administration de cette loi.
    Examinez-vous le modèle d'un autre pays en vous disant que nous devrions modifier le nôtre en fonction de ses lignes directrices?
    Je ne connais pas un autre modèle dans le monde que j’aimerais mettre en place au Canada. Je crois que la loi apporte certains avantages au Canada. Elle a été pensée pour favoriser les intérêts du Canada. Nous aimerions voir plus de transparence et de prévisibilité pour que les investisseurs non canadiens qui viennent ici comprennent les obstacles qui doivent être surmontés pour obtenir cet investissement.
    Merci, monsieur Borgers.
    Merci, monsieur Van Kesteren. Je m’excuse du peu de temps, monsieur. Nous avons déjà pris plus de temps que prévu et nous avons un autre groupe de témoins à entendre.
    Messieurs, merci beaucoup de vos témoignages.
    Nous allons suspendre la séance deux ou trois minutes pour nous permettre de changer les noms et permettre aux prochains témoins de s’installer, puis les travaux reprendront avec le témoignage du deuxième groupe de témoins.

  (1630)  

    Mesdames et messieurs, nous reprenons.
    Nous accueillons trois autres témoins aujourd'hui: M. Michael Bloom, vice-président de Rendement organisationnel et Apprentissage au Conference Board du Canada, M. Bruce Campbell, directeur exécutif du Centre canadien de politiques alternatives et M. Michael Hart, témoin à titre personnel, qui représente la chaire de politique commerciale Simon Reisman de la Norman Paterson School of International Affairs.
    Je vais suivre l'ordre de présentation qui est devant vous et je demande donc à M. Bloom de commencer.
    Je veillerai à ce que les cinq minutes qui vous sont allouées pour faire vos déclarations préliminaires soient respectées, et ensuite, nous passerons à la série de questions.
    Allez-y, s'il vous plaît, monsieur Bloom. Vous disposez de cinq minutes.
    Puisque nous nous penchons sur la Loi sur Investissement Canada, je crois qu'il est important de tenir compte du fait que plusieurs préoccupations stratégiques sont en jeu. Premièrement, il est important de faire en sorte que les conditions soient favorables aux investissements étrangers au Canada.
    Deuxièmement, il faut nous assurer que les investissements reposent sur une base économique transparente et non pas sur une base politique ou gouvernementale. Nous devrions au moins dire clairement si c'est le cas ou non.
    Troisièmement, il est important de maintenir la confiance des investisseurs commerciaux internationaux en faisant preuve d'honnêteté et d'ouverture quant aux possibilités offertes au pays.
    Nous avons fait des travaux sur ces questions. L'automne dernier, nous avons rédigé un rapport au sujet de PotashCorp pour le gouvernement de la Saskatchewan. Nous avons mené d'autres travaux sur les prises de contrôle, les fusions et les acquisitions de sociétés. Nous en avons conclu qu'elles ont un avantage net légèrement positif et que les règles législatives actuelles permettent de bien des façons de s'assurer que le pays retire des avantages. Cependant, les questions qu'on semble soulever de plus en plus concernent notre compréhension de la question, la façon raisonnable et équitable pour nous de l'évaluer et la façon dont nous communiquons l'information au Canada et à l'étranger.
    Dans le cadre de nos travaux, nous avons proposé une typologie des effets de la prise de contrôle lors des acquisitions. Nous avons étudié les effets sur les actionnaires, la gouvernance, la gestion, les activités, le capital, les gens et la collectivité. Nous avons utilisé cette typologie dans notre étude sur PotashCorp, qui n'était pas destinée à influencer la recommandation du gouvernement de la Saskatchewan, mais plutôt à analyser des stratégies pour les prises de contrôle et des options.
    Ensuite, j'ai fait des recommandations que je crois utiles. Premièrement, et vous en avez peut-être entendu parler, il s'agit d'envisager une série de critères et de mesures qui s'appliqueraient à l'examen de toutes les fusions et les acquisitions. Encore une fois, la Loi sur la concurrence peut servir en partie de modèle.
    Deuxièmement, si on le fait, il faudrait que la typologie couvre toute la gamme d'avantages. Il faut aller au-delà des considérations financières et évaluer toute la gamme d'avantages et de coûts qui servira de base pour l'examen.
    Troisièmement, je recommande de communiquer les critères et les mesures aux investisseurs canadiens et étrangers pour qu'ils connaissent les règles du jeu.
    Quatrièmement, il faut examiner le terme « actif stratégique » ou « ressource stratégique » et le rejeter clairement dans ce cadre ou, si l'on décide de l'utiliser, en fournir une définition et y associer des critères qui permettraient aux acquéreurs éventuels de le comprendre.
    Cinquièmement, je crois qu'il faut songer à faire connaître les résultats des examens publiquement, soit en faisant un résumé des résultats, soit en donnant les résultats complets pour que les marchés comprennent clairement le processus décisionnel. La prochaine fois que des gens examineront une possibilité, ils seront capables d'évaluer leurs priorités et de décider si cela fonctionnera.
    Sixièmement, il faut définir clairement les critères de fusions et d'acquisitions pour les entreprises d'État. Y a-t-il des secteurs exclus mis à part ceux qui le sont déjà, que nous ne voulons vraiment pas ouvrir aux gens, comme certains types de ressources? Qu'en est-il pour les entreprises d'État qui ont des partenariats avec des organismes canadiens? Quels liens seraient acceptables dans ce cas? Existe-t-il une norme pour le contrôle, etc.?
    Septièmement, la même chose, mais pour les fonds souverains.
    Enfin, il faut définir clairement le rôle des provinces. N'ont-elles pas davantage qu'un rôle consultatif, de fait ou de droit? Devrait-il en être ainsi? Comment cela peut-il être établi pour comprendre les relations fédérales-provinciales?
    Je vais m'arrêter ici.

  (1635)  

    Merci beaucoup, monsieur Bloom.
    Nous passons à M. Campbell. Vous disposez de cinq minutes. Allez-y, s'il vous plaît.
    Je vais commencer par faire un certain nombre d'observations. Tout d'abord, tous les pays principaux qui reçoivent des investissements directs étrangers se limitent à des secteurs clés ou stratégiques et ont tous des mécanismes d'examen ou de sélection, et cela ne semble pas avoir de répercussions importantes sur les flux d'IDE en général.
    À titre d'exemple, le Brésil a des restrictions au chapitre des investissements étrangers dans les actifs miniers. Dans certaines régions, seules des entreprises appartenant majoritairement au Brésil peuvent mener des activités. Fait intéressant, concernant la prise de contrôle d'Inco par l'entreprise brésilienne Vale, si l'on avait voulu faire l'inverse, la prise de contrôle aurait presque certainement été rejetée. Le gouvernement détient des actions préférentielles qui protègent Vale d'une prise de contrôle par des intérêts étrangers non désirée.
    Dans le cas de l'Australie, dont les règles sont semblables aux nôtres, l'organisme de réglementation a indiqué clairement que le pays préférait que les investissements étrangers dans ses grandes sociétés soient maintenus en deçà de 15 p. 100. La prise de contrôle d'Alcan par Rio Tinto, une société australienne a été possible, mais l'inverse ne l'aurait pas été.
    Les États-Unis sélectionnent les investissements directs étrangers. Leur outil principal, c'est la clause de sécurité nationale, qui n'est notoirement pas définie. Vous savez qu'on y a recours. Elle a été utilisée dans le cas d'une société des Émirats arabes unis, Dubai Ports World, dans le cadre de son achat de la société américaine qui gérait le réseau portuaire américain. Elle l'a forcée à vendre ses activités portuaires américaines. On a aussi eu recours à la clause en 2005. Une société pétrolière appartenant à l'État chinois a été forcée de laisser tomber son offre pour la société pétrolière américaine Unocal.
    Mon autre observation porte sur une évidence: le Canada est ouvert aux IDE et on ne peut pas l'accuser du contraire. Vous connaissez les chiffres sur l'approbation par Investissement Canada de prises de contrôle étrangères, qui n'en examine que 10 p. 100. En 2008, les sociétés sous contrôle étranger détenaient 56,4 p. 100 de l'actif du secteur de la fabrication — ces chiffres viennent tout juste d'être publiés aujourd'hui, et les sociétés sous contrôle étranger se partageaient 45 p. 100 des recettes d'exploitation dans l'industrie pétrolière et gazière. En 2006, le contrôle étranger dans le secteur minier du Canada a grimpé à 47,4 p. 100, à la suite des prises de contrôle; et les recettes d'exploitation que se partageaient les sociétés sont passées à 66 p. 100. Le Canada est donc assurément un pays ouvert.
    Nous savons qu'il y a des problèmes. On en a évoqué aujourd'hui. J'ai écouté une partie de la discussion du groupe de témoins précédent et ce qui a été dit sur les problèmes de transparence. Le ministre a dit lui-même que son gouvernement veut obliger les investisseurs étrangers à faire connaître publiquement leurs engagements quant aux emplois, à la transformation locale, aux transferts de technologie, etc.
    Je suis sûr que vous connaissez aussi certains des exemples très médiatisés où le processus n'a pas fonctionné. Dans le cas de Vale Inco, parmi les engagements, il ne devait pas y avoir de mises à pied avant trois ans et le taux d'emplois ne devait pas tomber en deçà de 85 p. 100. La société a coupé 463 postes en 2009, et face à des concessions vraiment énormes, les travailleurs ont été forcés de déclencher une grève longue et violente à Sudbury et ailleurs. L'automne dernier, Vale Inco a finalement annoncé qu'elle cessait ses activités à Thompson, entraînant ainsi la mise à pied de 500 travailleurs — ce qui représente 40 p. 100 de la main-d'oeuvre de la ville.
    En ce qui concerne la société australienne, Rio Tinto, et Alcan, les engagements qui avaient été pris n'ont pas été respectés.
    Le dernier exemple, c'est l'industrie sidérurgique qui, en l'espace de quelques années seulement a pratiquement été vendue.

  (1640)  

    Je dirais que dans le cadre de la révision de la politique d'examen de l'investissement étranger, il faudrait l'intégrer à une politique industrielle plus vaste. Elle comporterait un plan pour protéger et développer les ressources naturelles, les technologies et les secteurs stratégiques.
    Merci, monsieur Campbell. Je suis désolé, mais nous avons de loin dépassé le temps qui vous était alloué.
    J'allais faire deux ou trois suggestions sur des changements à apporter à la loi. Je le ferai durant la série de questions.
    Ce serait très bien. Vous aurez la possibilité de le faire. Nous avons suffisamment de temps pour les questions.
    Monsieur Hart, vous disposez de cinq minutes. Allez-y, s'il vous plaît.
    Comme je suis ici en tant que particulier, ancien fonctionnaire et présentement professeur de politique publique, je peux prendre du recul et examiner la question de façon globale.
    Lorsqu'on replace la question dans le contexte plus large des intérêts canadiens, au cours des 60 ou 70 dernières années, le Canada a participé activement aux efforts visant à réduire les obstacles aux échanges internationaux, qu'il s'agisse de biens, de services ou de capitaux.
    Au cours de la comparution du groupe de témoins précédent, les membres du comité ont demandé où se situe le Canada par rapport aux autres. Contrairement à ce que dit M. Campbell, je crois que le Canada est un cas à part. Parmi les pays de l'OCDE, le Canada et l'Australie font bande à part.
    Je suis d'avis que nous avons fait du chemin depuis l'adoption de la Loi sur l'examen de l'investissement étranger. Lorsqu'elle a été adoptée en 1984, la Loi sur Investissement Canada, elle nous a très bien servis en tant qu'outil de transition. Toutefois, de nos jours, les décisions quant à ce qu'il faut acheter, de qui il faut l'acheter et où il faut investir devraient dans une large mesure relever du secteur privé, qu'il s'agisse des consommateurs ou des investisseurs.
    En ce sens, le rapport sur la politique de la concurrence au Canada que Red Wilson a préparé pour le gouvernement il y a un peu plus de deux ans, et qui portait également sur des questions liées à l'investissement, est tombé en plein dans le mille. J'étais l'un des témoins pour ce comité. Permettez-moi de citer le conseil qu'il a donné:
    ...que toutes restrictions sur l'investissement étranger devraient être rares, bien définies, limitées aux prises de contrôles très importantes et fondées sur des préoccupations en matière de sécurité nationale.
    Si j'étais à votre place, j'envisagerais sérieusement d'abolir la Loi sur Investissement Canada et de la remplacer par une loi sur la sécurité nationale bien définie. Les restrictions sur l'investissement étranger sont très peu utiles pour les problèmes que les gens tentent de régler en y recourant.
    Si votre objectif consiste à prendre des mesures face au comportement des entreprises, par exemple, vous devriez alors le faire au moyen de la Loi sur la concurrence ou de la Loi sur les corporations canadiennes. Si vous tentez de régler des problèmes d'ordre fiduciaire, vous devriez le faire en ayant recours à la Loi sur la gestion des finances publiques et d'autres lois de ce type.
    Le recours à des restrictions relatives à la propriété étrangère a presque toujours des effets pervers. Il fait baisser la valeur des actifs détenus par les Canadiens, restreint les possibilités pour les Canadiens de profiter du capital étranger et du savoir-faire étranger et réduit l'esprit d'entreprise au pays.
    Je ne peux penser à aucun objectif de politique publique pour lequel des restrictions relatives à la propriété étrangère seraient utiles, mis à part dans de rares circonstances où l'investisseur étranger se fait passer pour un investisseur privé alors que c'est en réalité un gouvernement qui investit. Lorsque les gouvernements investissent, peu importe les moyens qu'ils utilisent, leurs objectifs diffèrent de ceux des investisseurs privés. Pour le reste, je crois que la décision quant au lieu d'investissement et à la façon d'investir doit être prise par l'investisseur privé.
    Au Canada, on croit à tort que lorsqu’il y a une prise de contrôle d’une compagnie canadienne par des intérêts étrangers, les Canadiens subissent une perte nette. Je crois que c’est une très grave erreur. En réalité, tout ce que cela signifie, c’est qu’un groupe d’investisseurs à l’extérieur du pays estime qu’ils peuvent utiliser un actif précis de façon plus efficace que les investisseurs actuels. Ils sont prêts à prendre le risque. En revanche, ils fournissent des capitaux aux investisseurs précédents qu’ils peuvent alors investir dans n’importe quelle entreprise qui est à leur avis plus rentable. Il en résulte que l’économie canadienne fonctionne mieux.
    De ce point de vue, je vais adopter une position qui diffère complètement de celle que semblent adopter certains de vos autres témoins. Je vous propose de repenser la loi plutôt que de la remanier.
    Merci.

  (1645)  

    Merci beaucoup, monsieur Hart.
    Nous disposons d'un peu plus de temps que prévu, car nous n'avons pas fait les travaux du comité et nous avons procédé très rapidement après le changement. Nous allons donc commencer avec des séries de questions de sept minutes.
    Monsieur Rota, vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Et je vous remercie tous de votre présence.
    C’était intéressant. En écoutant les exposés, il me semble que le Canada ressemblerait davantage à l’Australie et à la Nouvelle-Zélande ou à d’autres pays qui ont beaucoup de ressources naturelles. Lorsque j’examine les investissements étrangers, j’évalue ce qu’ils apporteront au pays sur le plan des emplois, de la technologie et de l’innovation. C’est pertinent également pour le secteur des ressources naturelles.
    Toutefois, lorsque j’examine les investissements étrangers, il s’agit de rentrées d’argent qui servent à développer quelque chose, alors que l'exploitation de ressources naturelles consiste à extraire des ressources, exporter des matières premières, et peut-être créer quelques emplois.
    Pourriez-vous intervenir à ce sujet? Pourriez-vous faire la distinction, si possible, entre un investissement étranger et l’acquisition d’une ressource naturelle?
    Monsieur Campbell, voulez-vous commencer?
    Je pense que vous pouvez peut-être examiner un cas précis, comme celui de la potasse. Je crois que le gouvernement a fait preuve de sagesse en s’opposant à la prise de contrôle. Je crois que c’était une sage décision parce qu’il s’agit d’une ressource stratégique. Comme l’a dit Dick Haskayne, un ancien président de diverses entreprises de l'industrie des ressources et un farouche opposant à cette acquisition, ce qui se passe lorsque l'un de nos champions nationaux — et il considérait PotashCorp comme un champion national, et il y en a d’autres — est repris et que les décisions sont prises à l’extérieur du pays, c’est que même s’il y a une succursale ou un siège social, les décisions sont prises à l’étranger. Dans le cas de la structure de commercialisation… surtout si PotashCorp avait décidé — et elle a dit qu’elle avait pris cette décision — de se retirer.
    Je crois seulement que c’est un exemple de société stratégique, et lorsque vous parlez d’éloigner le centre de prise de décision du conseil d’administration et du directeur général pour l’envoyer à l’extérieur du pays, alors ce n’est pas dans l’intérêt du public. C’est un exemple de la divergence entre les intérêts publics et privés.
    Monsieur Bloom, j’aimerais connaître votre opinion à ce sujet également.
    Monsieur Hart, si vous n’y voyez pas d’inconvénient, j’aurai une autre question pour vous plus tard. C’est seulement que mon temps est très limité.
    Je vais prendre l’exemple de la vente de Potash Corporation à laquelle j’ai réfléchi pendant un certain temps. C’était une occasion d’attirer des investissements au Canada. Il se peut, comme cela se produit dans le cadre de nombreuses ententes, que les capitaux soient injectés de toute manière, parce ce que BHP envisage toujours d’exploiter la mine de Jansen Lake et d’investir 12 milliards de dollars.
     À mon avis, si vous examinez l’analyse des répercussions qu’une prise de contrôle aurait eues jusqu’en 2030, il est important de noter qu’elle aurait entraîné la création de 1 000 emplois liés à la construction de la mine de Jansen Lake et de l’infrastructure auxiliaire que toute grande mine requiert. Puis, la mine aurait employé de nombreux travailleurs et aurait eu des effets directs et indirects sur l’économie.
     Donc, l’exploitation d’une ressource, selon sa nature et la façon dont elle est utilisée, peut, en fait, engendrer un très grand nombre d’emplois et d’importants investissements étrangers dans les collectivités.
     En ce qui concerne la potasse, on ne peut pas l’entreposer hors du sol pendant de longues périodes et son marché est international.

  (1650)  

    Cela dépend vraiment des conditions que l’entreprise négocie avec le gouvernement au moment où elle offre d’acheter la ressource naturelle.
    C’est en effet le cas. Par exemple, il était très clair qu’en Saskatchewan, le régime de redevances et la structure fiscale permettaient au gouvernement de négocier une entente qui l’aurait satisfait à bien des égards.
     Je vais devoir vous interrompre, car notre temps est compté.
     Je vais m’adresser à M. Hart. Je ne tiens pas à ce qu’il ait l’impression d’avoir été exclu de cette conversation.
     Il y a un terme qui est employé très souvent, que j’ai entendu encore aujourd’hui et que mes électeurs mentionnent de plus en plus fréquemment, à savoir la réciprocité. Pourquoi autorisons-nous des pays à investir au Canada alors qu’ils ne nous autorisent pas à investir chez eux? Je ne dis pas que c’est la voie à suivre, mais c’est l’opinion qu’expriment de plus en plus de gens. Je ne sais pas si c’est faire preuve de protectionnisme ou si c’est une façon de dire que le libre-échange doit être bidirectionnel. Ne permettons pas aux autres de racheter nos ressources, si nous ne sommes pas autorisés ensuite à investir dans leur pays.
     Quel effet la réciprocité aurait-elle sur l’économie canadienne? J’aimerais connaître l’opinion de M. Hart, puis celle de M. Campbell, si cela ne les ennuie pas.
    Je pense que cela aurait un effet très négatif. L’utilisation du concept de réciprocité dans les négociations commerciales est un moyen efficace de faire tomber les barrières commerciales mais, à mon avis, en employant la même tactique pour supprimer les obstacles à l’investissement, on se tirerait assurément dans le pied, car ce n’est pas la nationalité des capitaux qui est problématique, mais leur disponibilité.
     Dans presque tous les cas, les capitaux n’ont pas de nationalité. Donc, si nous souhaitons développer ce pays — peu importe qu’il s’agisse d’une ressource naturelle ou de la partie de l’économie consacrée au secteur manufacturier ou au secteur des services —, nous aurons besoin de capitaux. Si le Canada ne dispose pas des capitaux nécessaires pour investir dans une certaine entreprise, nous devrions faire bon accueil à tout autre investisseur qui est prêt à risquer ses capitaux dans celle-ci.
    Donc, l’origine de l’argent n’importe pas, qu’il vienne de Chine, d’une société publique, ou de…
    Non, j’ai dit qu’à mon avis, il y avait un cas où cela importait. C’est lorsqu’il ne s’agit pas d’un investisseur privé, mais plutôt d’un investisseur contrôlé par un État… Dans ce cas-là, je fouillerais davantage afin de déterminer si cet investissement pourrait avoir des conséquences sur la sécurité nationale.
    Monsieur Campbell.
    Pour tenir compte des secteurs stratégiques lors du calcul des avantages nets, il faut avoir une stratégie. Je pense que votre examen devrait s’inscrire dans le cadre d’un examen plus approfondi portant sur la nature de cette stratégie. La réciprocité ne me préoccupe pas tellement, bien que, dans ma déclaration liminaire, j’aie mentionné quelques exemples où la réciprocité était absente.
     L’important, c’est d’avoir une politique, puis de déterminer les principaux secteurs stratégiques qu’elle englobe.
     Les principaux bénéficiaires d’investissements directs étrangers — le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine — ont tous des politiques industrielles. Ils ont tous élaboré des stratégies à partir desquelles ils examinent les investissements étrangers ou refusent…
    C’est tout. Je suis désolé. J’ai accordé à votre témoin un peu plus de temps.
    M. Bouchard du Bloc dispose de sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos invités qui témoignent devant nous cet après-midi. Je poserai ma première question à M. Campbell.
    Vous avez parlé de l'acquisition d'Alcan par Rio Tinto. Ai-je bien compris que le ministre aurait dû refuser cette transaction?

[Traduction]

    Je ne suis pas au courant de toutes les délibérations qui ont eu lieu dans le cadre de cet examen et qui ont établi cette relation. Mais, dans le cas de Rio Tinto, je sais que certains des engagements qu’ils ont pris n’ont pas été remplis, à ce qu’il paraît.
     Ils s’étaient engagés à dépenser des capitaux et ne l’ont pas fait. Ils devaient effectuer d’importants travaux pour moderniser leurs usines au Saguenay et à Kitimat, en Colombie-Britannique, et ces investissements n’ont pas été réalisés. Ils ont fermé l’usine de Beauharnois et réduit la production à Vaudreuil. Le nombre d’emplois au siège social a été réduit de près de 20 p. 100. Je pense qu’en tout, cela représentait 1 100 postes. C’est la perte d’emploi qui a été estimée.
     Il me semble que si l’on planifie d’ajouter à la loi des critères pour mesurer les avantages nets, il faudrait pouvoir s’assurer que ces avantages ont été concédés et contraindre l’entreprise à les concéder, au besoin. Les mesures visant à contraindre l’entreprise devraient comprendre des sanctions allant jusqu’à l’annulation de la transaction, de la prise de contrôle.

  (1655)  

[Français]

    Donc, au départ, il manquait des conditions d'acceptation. Selon votre opinion, le suivi dans l'application de cette transaction a connu de grands manques.

[Traduction]

    Exactement. Voyons les choses en face. Selon moi, Alcan peut être placée sur le même plan que Potash Corporation. Son acquisition avait à peu près la même valeur que la prise de contrôle de Potash Corporation proposé par BHP, soit environ 40 milliards de dollars. Il s’agit de l’un de nos champions nationaux. Les examens détermineront si cette décision était judicieuse. Si elle l’était, les conditions qui s’appliquaient n’ont pas été satisfaites de manière appropriée.

[Français]

    J'aimerais vous poser une autre question, monsieur Campbell.
    On sait que le seuil applicable à l'examen relatif à l'« avantage net du Canada » est actuellement fixé à 312 millions, donc tout ce qui se situe en deçà de ce montant ne fait pas l'objet d'un examen. On sait aussi qu'au Canada et au Québec, il y a beaucoup de petites et moyennes entreprises. J'aimerais savoir quels changements cela apporte au Canada et au Québec que des investisseurs étrangers fassent l'acquisition de petites et de moyennes entreprises. Est-ce que cela a un impact considérable? Est-ce que cela entraîne des changements?

[Traduction]

    Je dirais que je serais très sceptique si l’on proposait de hausser ces seuils par rapport aux niveaux actuels. Je sais qu’il a été recommandé de les faire passer à un milliard de dollars dans certains cas et d’assouplir les examens des avantages nets.
     Je pense qu’avant de décider s’ils doivent… on devrait les examiner auparavant. Selon l’article portant sur la sécurité nationale, ils peuvent être révisés, même s’ils sont inférieurs. Ils peuvent aussi être révisés s’il s’agit d’investissements dans des secteurs comme la culture, bien entendu.
     Mais, pour les autres, nous avons des résultats antérieurs. Investissement Canada a examiné ces prises de contrôle ou, du moins, en a fait état. Par conséquent, nous avons une trace de ces transactions. Il y en a quelque 13 000. Il serait intéressant de produire un rapport ou de mener une étude sur les transactions qui étaient inférieures au seuil, ou sur un échantillon de ces transactions, et de voir ce qui s’est produit. Avant d’envisager de hausser ou de réduire les seuils, j’estime qu’il serait important d’examiner en fait l’histoire de ces prises de contrôle. Les compagnies ont-elles prospéré ou périclité après ces prises de contrôle?

[Français]

    Voyez-vous d'un bon oeil cette hausse du seuil de 312 millions de dollars à 1 milliard de dollars? Est-ce qu'on ne se prive pas d'un outil, dans le fond, qu'on ne pourra plus utiliser pour un certain nombre de transactions? Actuellement, cela touche tout ce qui est en bas de 312 millions de dollars, mais éventuellement, le ministre n'aura pas son mot à dire pour tout ce qui sera en bas de 1 milliard de dollars. Il n'y aura pas une instance gouvernementale qui aura à se prononcer. Selon vous, est-ce qu'on se prive d'un instrument important?

  (1700)  

[Traduction]

    En un mot, oui. Je vous déconseille de hausser les seuils.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Il vous reste encore une minute.

[Français]

    Je dispose d'encore une minute? C'est vrai que la réponse était assez courte.
    J'aimerais revenir sur l'exemple de Rio Tinto qui a acquis Alcan. Au Québec, on considère la compagnie comme un fleuron et on voulait que le ministre fixe deux conditions: le niveau d'emploi et l'obligation de faire de la transformation dans notre région. Pensez-vous que cela aurait été une bonne mesure d'avoir deux conditions semblables dans le protocole d'acceptation de la part du ministre?

[Traduction]

    Absolument, je pense que les conditions auraient dû être rendues publiques dès le début afin que tout soit clair tant pour la compagnie que pour les collectivités où elle exerce ses activités. Je crois que cela aurait créé une bien meilleure situation que celle qui s’est déroulée avec Rio Tinto.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup, messieurs Campbell et Bouchard.
     Nous passons maintenant à M. Braid qui dispose de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Je tiens à remercier tous les membres du groupe d’experts de leur présence ici cet après-midi. J’ai vraiment le sentiment que nous avons accueilli aujourd’hui deux groupes qui nous ont fait beaucoup réfléchir, alors, une fois de plus, je vous en remercie infiniment.
     J’espère être en mesure de vous poser une ou deux questions chacun, et je vais commencer par vous, monsieur Hart.
     Dans votre déclaration, vous avez indiqué qu’à votre avis, le Canada était un cas à part. Pourriez-vous étoffer un peu ce que vous entendez par là?
    M. Campbell a mentionné que le Canada était l’un des pays qui recevaient le plus d’investissements. En fait, le Canada est également un important investisseur à l’étranger. Par conséquent, le Canada devrait vraiment compter parmi les pays de l’OCDE qui exportent et importent des capitaux. En ce sens, le Canada est un cas à part, car, parmi les pays de l’OCDE, seule l’Australie met en oeuvre des politiques semblables.
     Je ne crois pas que nous devrions nous considérer membres du groupe composé du Brésil, de la Chine, de la Russie et de l’Inde. Si vous examinez le développement économique du Canada et que vous le comparez à celui de ces pays, je doute que vous souhaitiez imiter leurs politiques.
    Merci.
     Vous avez parfaitement préparé le terrain pour la deuxième question que je veux vous poser.
     Nous nous efforçons d’atteindre un équilibre fragile qui nous permettra de prendre des décisions prudentes et appropriées concernant les investissements proposés ici au Canada, mais qui ne nuira pas aux grandes sociétés canadiennes qui exercent leurs activités à l’échelle internationale et qui sont en train de faire des acquisitions dans l’un des marchés auxquels elles participent. Pourriez-vous formuler des observations à ce sujet? Comment trouver cet équilibre? Est-ce une importante considération? Si oui, pourquoi?
    Pour atteindre cet équilibre, nous devons admettre qu’il s’agit de capitaux privés et que, par conséquent, les décisions de l’investisseur privé sont la première chose à prendre en considération. Je ne vois pas pourquoi il faudrait, dans l’intérêt public, comparer les intentions d’un groupe d’investisseurs à celle d’un autre groupe d’investisseurs. Je pense que c’est ainsi que les choses devraient se passer dans une économie mature.
     Le fait est que, dans le genre de monde où nous vivons, les entreprises doivent s’ouvrir sur le monde entier pour réussir dans leur secteur d’activité, quel qu’il soit; elles doivent faire partie de chaînes de valeur et de chaînes d’approvisionnement beaucoup plus importantes. Elles doivent nouer des relations avec les clients et les fournisseurs du monde entier qui, dans certains cas, peuvent nécessiter des investissements et, dans d’autres cas, d’autres genres de rapports.
     Je ne recommande pas que le gouvernement intervienne dans ce genre de décisions. À mon avis, on ne devrait pas demander à un groupe de fonctionnaires du ministère de l’Industrie de critiquer après coup les décisions des investisseurs.
     Ayant moi-même été fonctionnaire, je sais que, malheureusement, ils ne sont pas en mesure d’effectuer ce genre d’analyses ou de prendre ce genre de décisions. À mon avis, on devrait s’en remettre à la sagesse des investisseurs qui ont tout à perdre ou à gagner dans ces investissements.
    Merci.
     Monsieur Bloom, nous allons enchaîner avec des questions à votre intention. Selon de récents rapports, dont les rapports du Conference Board du Canada, le Canada a bénéficié de l’ensemble des investissements internationaux. Quels facteurs ont contribué à cette réussite?

  (1705)  

    Premièrement, c’est imputable à l’ouverture de notre économie et à notre volonté d’importer et d’exporter des capitaux. Nos sociétés d’exploitation aurifère, nos banques et un certain nombre de nos autres entreprises sont très occupées en ce moment à faire des acquisitions partout dans le monde. Elles sont accueillies à bras ouvert la plupart du temps. Je pense que beaucoup d’endroits sont toujours préoccupés par leur sécurité nationale, mais la plupart des pays où nous investissons sont favorables à ces investissements et la plupart de ceux qui investissent ici fréquemment sont prêts à réciproquer.
     Je pense que nous nous comportons comme des gens qui recherchent des capitaux et qui sont prêts à investir lorsque l’occasion se présente. J’espère que cela continuera.
    Merci.
     Dans votre déclaration liminaire, vous avez énuméré huit recommandations. Dans la deuxième recommandation, vous avez suggéré que nous envisagions la gamme complète des bénéfices et des coûts. Qu’entendiez-vous par là?
    Je pense que s’il y a des inquiétudes… Par exemple, notre analyse de 540 fusions et acquisitions réalisées de 1994 à 2007 a démontré que les actionnaires avaient bénéficié d’une prime de 28 p. 100 en moyenne. C’était le cas de la forte augmentation des investissements dans le secteur des ressources qui a rapporté quelque 50 milliards de dollars de plus aux investisseurs canadiens. Nous pouvons suivre l’évolution de données comme les gains réalisés par les actionnaires, et nous le faisions. Nous pouvons aussi examiner certains aspects de la place occupée par les activités des entreprises, etc.
     Lorsqu’on entend les gens discuter des géants et de leurs répercussions générales, les inquiétudes qui ressortent sont les suivantes: quel effet auront-ils sur nos collectivités? Auront-ils une incidence sur nos dons ou sur la capacité de la région de soutenir nos écoles, nos collèges, etc.?
     À mon avis, si nous utilisions une typologie qui indiquait que nous tenons compte de tous les aspects financiers, mais qui montrait aussi que nous allons plus loin, une plus grande confiance régnerait. Les gens soutiennent qu’il y a une façon plus globale d’aborder ces questions.
    Formidable. Merci.
     Pour être équitable, je vais poser une dernière question à M. Campbell.
     Avec le groupe d’experts précédent, nous avons passé beaucoup de temps à parler de l’importance de donner au ministre une plus grande latitude pour qu’il puisse divulguer les détails d’une transaction particulière lorsqu’il le juge approprié.
     Pouvez faire des observations à ce sujet ou expliquer pourquoi cela pourrait être important? Quels sont les avantages de ce processus, non seulement dans chaque cas, mais aussi avec le temps?
    Si vous parlez de consultation publique et d’obligations, le ministre devrait-il avoir le pouvoir discrétionnaire de consulter les travailleurs touchés, les collectivités concernées, ou l’échelon inférieur...?
    En fait, il ne s’agit pas tellement des consultations qui, la plupart du temps, ont lieu au préalable. Je parle plutôt de ce qui se passe après, de la divulgation des détails de la transaction et du fait que le ministre devrait avoir la latitude de le faire, d’apporter davantage…
    Vous voulez dire de rendre publics les engagements.
    Oui, au bon moment.
    Absolument, c’est une question transparence. En fait, j’irais plus loin. Je dirais qu’au lieu de laisser cette décision à la discrétion du ministère, on devrait l’obliger à le faire. Ces engagements devraient être rendus publics; ils devraient faire partie des résultats de l’entente.
     Je me demande si je pourrais formuler des observations au sujet…
    Je suis désolé, monsieur Campbell, vous avez fini de répondre juste à temps.
    M. Bruce Campbell: Merci.
     Le président: Je suis désolé de vous interrompre de nouveau, mais l’heure continue d’avancer.
     Monsieur Angus, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Lorsque je parle avec des gens de l'industrie minière au niveau national, mais dont les activités s'étendent au niveau international, ils parlent d'un sujet qui, à mon avis, a été débattu à de nombreuses reprises au sein de notre comité, c'est-à-dire le besoin de décisions qui s'appuient sur des règles, sur la transparence, sur la certitude. N'importe quel investisseur au Canada ou à l'étranger veut savoir quelles sont les règles.
    Je voudrais vous parler un peu du domaine des télécommunications, car je pense que la décision concernant Globalive met en évidence une tendance troublante. Tous les investisseurs savent que le CRTC est un organisme quasi judiciaire qui peut statuer. On en perd, on en gagne; il y a des règles à suivre. Le CRTC décide donc si Globalive ne satisfait pas aux critères. Le ministre intervient ensuite et annule la décision. La Cour fédérale intervient à son tour et passe outre aux désirs du ministre, ce à quoi le ministre répond qu'il n'a rien à faire de la décision de la Cour fédérale, et qu'il amène le cas devant la Cour suprême. Et c'est un ministre d'un gouvernement minoritaire. Si j'étais un investisseur en télécommunications à l'échelle internationale, j'éviterais le Canada comme la peste, car je n'aurais aucune idée à quelle autorité je devrais me soumettre là-bas.
    Ne pensez-vous pas, monsieur Campbell, que nous envoyons le message assez inquiétant que le ministre décide que les organismes indépendants n'ont aucune autorité, qu'il peut intervenir comme bon lui semble, même si les tribunaux ont infirmé sa décision?

  (1710)  

    Je pense que vous avez soulevé un point très important; je parle de l'importance d'être transparent, d'avoir des règles claires et d'être constant. Si une entité du gouvernement peut en contredire une autre et voir sa décision rejetée à son tour, il est évident que cette incertitude minera le climat d'investissement en général. Nous parlons présentement d'un cas qui est assujetti à une limite d'investissements directs venant de l'étranger, mais je pense que les autres domaines d'investissement sont tout de même touchés.
    Monsieur Bloom, vous avez mentionné qu'il fallait une approche plus holistique, mais encore une fois, j'en connais plus sur le secteur minier que sur n'importe quel autre. Cependant, pour exploiter une mine, on peut miser seulement sur le minerai à teneur élevée, c'est-à-dire prendre ce qui est facile et s'en aller. Un grand nombre d'entreprises l'ont déjà fait. Il est aussi possible de choisir l'approche à long terme et d'aller chercher le minerai à teneur inférieure et d'utiliser celui à teneur élevée pour garantir une durée de vie plus longue à la mine et créer, de cette façon, un processus de valeur ajoutée.
    Examinons une entreprise comme Falconbridge, dont les activités remontent à 90 ans, ce qui nous permet de connaître son historique. Nous savons donc qu'elle a une excellente expertise métallurgique; elle était en effet connue pour ses procédés et ses percées technologiques dans ce domaine partout dans le monde.
    Maintenant, une entreprise apparue de nulle part, Xstrata, profite d'un sommet dans le marché pour amasser des liquidités, mais ses antécédents sont douteux. Cela dit, tous les capitaux ne sont pas égaux; certains sont à court terme et d'autres montrent des antécédents qui laissent croire qu'ils vont croître. Falconbridge a donc été rachetée par Xstrata, ce qui a ouvert la voie à Vale pour absorber Inco. À cette époque, le ministre a déclaré que Vale venait au secours de Sudbury, car la ville, selon son expression, se trouvait dans la « Vallée de la mort ». Il s'agissait d'un commentaire assez bizarre, étant donné que Inco et Falconbridge étaient sur le point de fusionner, alors qu'on en était au point culminant du plus grand boom à survenir dans le domaine métallurgique depuis des lustres.
    Les pertes pour les collectivités et pour les installations de raffinage de cuivre sautent aux yeux, mais personne n'a jamais mentionné les pertes d'emplois à Toronto, dans les sièges sociaux, la gestion, les ventes et le champ d'expertise développé par ces entreprises. Personne ne souligne le fait qu'une fois devenue une succursale, sa valeur change totalement dans l'économie nationale.
    Monsieur Bloom, avez-vous des commentaires au sujet des effets qu'entraîne le passage de chef de file mondial à succursale?
    Je peux vous donner des exemples de succursales canadiennes qui sont des chefs de file mondiaux dans leur domaine. Certaines de nos activités de recherche et développement les plus ambitieuses sont menées par des entreprises étrangères. Vous pouvez voir des investissements importants dans Xerox ou IBM, ainsi que dans certaines sociétés pharmaceutiques étrangères.
    Je ne fais pas le lien entre les deux parties, mais si vous voulez revenir à la première partie de votre commentaire au sujet des répercussions d'une prise de contrôle, il est légitime d'exiger des investisseurs qu'ils satisfassent à certaines conditions qui favorisent l'intérêt du public, si elles sont transparentes, que les représentants du public les ont annoncées et que les gens comprennent quelles sont les circonstances, afin que les règles du jeu soient équitables.
    Je dois vous dire que nous avons travaillé sur le sujet. J'ai en ma possession un rapport récent que nous avons complété sur les sièges sociaux au Canada et leurs répercussions sur l'emploi, entre autres. Il n'existe aucune donnée probante concernant une baisse de l'emploi attribuable à ces changements. Par exemple, la ville de Toronto ne semble pas être touchée. Il faut faire preuve de prudence lorsqu'on établit des liens entre des répercussions qui se produisent à un endroit avec un autre endroit.
    Cela dit, je pense quand même qu'il est légitime de la part du gouvernement de se pencher sur la question et de vouloir l'explorer, car il y a matière à établir certaines règles, mais il faut qu'elles soient claires et constantes, et on doit les appliquer de la même façon partout.

  (1715)  

    Enfin, monsieur Campbell, je vais seulement vous poser une autre question. J'ai demandé au groupe précédent si nous étions en train d'envisager une enquête du coroner au sujet du désastre de Vale, Xstrata et U.S. Steel. Est-ce ce qui se passe?
    Est-ce qu'il y a un problème avec la loi, ou le problème réside-t-il dans le fait qu'on a sciemment permis à ces trois entreprises de s'installer et de nuire carrément à notre secteur primaire?
    Il y a un peu des deux. La loi représente certainement un problème. Je ne pense pas que le calcul des avantages nets et que l'application... on laisse probablement trop de possibilités aux entreprises concernées de s'en sortir facilement. Pour parler en termes plus généraux, dans ces prises de contrôle dans le domaine minier et le domaine de l'acier que vous avez mentionnées, qui sont devenus totalement étrangers pratiquement du jour au lendemain, il n'existait pas de politique industrielle qui aurait identifié ces ressources ou actifs stratégiques et le besoin d'élaborer une politique pour les entretenir et les protéger, et pour développer la valeur ajoutée et les avancées hautement technologiques qui auraient suivi. Il s'agit d'un manquement à la fois dans les politiques générales et dans les aspects qui sont propres à l'industrie.
    Merci, monsieur Campbell.
    Nous allons maintenant passer à Mme Coady. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup. Je vous suis certainement reconnaissante d'avoir pris le temps de nous faire profiter de votre expertise aujourd'hui. Nous n'en sommes que plus éclairés.
    Je vais poser ma première question à M. Hart. J'ai étudié un rapport de l'Institut de recherche en politiques publiques. Je vais vous en lire un extrait. À la page 3, on dit que :
... le Canada n'est plus aussi attirant pour les autres pays sur le plan des investissements étrangers. En effet, les investissements directs étrangers au Canada sont en baisse depuis le milieu des années 1980, que l'on tienne compte des nouveaux marchés ou non. Étant donné les avantages liés aux investissements étrangers, y compris les transferts de technologie et une économie nationale plus concurrentielle, cette tendance a affecté la santé financière du Canada.
    C'est un point très intéressant soulevé par cette étude de l'IRPP. Êtes-vous d'accord avec ces affirmations, monsieur Hart? Deuxièmement, pensez-vous que c'est parce que notre système n'est pas transparent et prévisible, ou la raison se trouve-t-elle ailleurs?
    Notre système est transparent, mais il pourrait être grandement amélioré, car comme d'autres témoins l'ont déjà indiqué, il existe une certaine lacune sur le plan de la prévisibilité. Lorsqu'une loi confère à un ministre un pouvoir discrétionnaire étendu, cela signifie que les investisseurs doivent ensuite assumer un ensemble de défis, et certains se demanderont si c'est l'endroit idéal pour le faire ou s'ils veulent aller ailleurs.
    Je ne retire pas grand-chose des statistiques concernant notre part des investissements. Je ne la connais pas. Ce qu'il est important de savoir, ce n'est pas si nous obtenons notre juste part, mais si nous sommes une économie ouverte qui accueille favorablement les investissements et qui aime travailler avec les investisseurs, tout comme nous voulons que les pays dans lesquels nous investissons soient ouverts, transparents et prévisibles.
    Nous pouvons améliorer cette prévisibilité et cet accueil.
    Vous avez parlé tout à l'heure du rapport de Red Wilson et vous avez dit appuyer cette approche. Avez-vous des réserves en ce qui concerne l'approche globale adoptée dans ce rapport pour améliorer la transparence et la prévisibilité?
    J'ai eu l'occasion de discuter de ce rapport à quelques reprises avec M. Wilson. Je crois que son approche de base est très solide. Après tout, son mandat n'était pas d'entreprendre une révision de la Loi sur Investissement Canada, mais bien de se pencher sur les politiques canadiennes en matière de concurrence; il a donc ajouté des éléments relatifs à la dimension investissement. Je crois que s'il avait eu un mandat plus large, il aurait abordé la question plus en profondeur, mais les recommandations générales qu'il a formulées étaient bonnes, soit que nous devrions ouvrir notre économie, améliorer la prévisibilité et faire de l'examen des prises de contrôle une activité très restreinte.

  (1720)  

    Merci.
    J'ai une question pour M. Campbell. Tout à l'heure, un témoin a parlé de donner une définition du terme « avantage net » afin que nous comprenions bien ce terme quand nous l'utilisons. Un autre témoin a dit que le concept des actifs ou ressources stratégiques ne figure pas nécessairement dans les dispositions de la loi actuelle. Pourriez-vous nous parler plus en détail de l'avantage net? Vous êtes-vous penché sur cette question?
    D'abord, je crois qu'il peut être utile de définir ce qu'on entend par « stratégique », mais pour le faire, on doit avoir une stratégie, n'est-ce pas? Cela doit être stratégique au sein d'une stratégie globale de politique industrielle, et je crois que c'est ce qui manque.
    Je pense que le rapport de Red Wilson, si je me souviens bien, visait à remplacer le critère d'avantage net par le critère d'intérêt national, qui est, à mon avis, encore plus vague. Il faudrait aller dans la direction opposée, c'est-à-dire le rendre plus clair, le renforcer, le rendre plus précis et accessible au public.
    La question du fardeau de la preuve a également été abordée dans les recommandations du rapport. Ce comité a recommandé d'inverser le fardeau de la preuve; on présumerait donc que tous les investissements sont bons, et il incomberait au gouvernement de déterminer le contraire. Je suis contre. Nous voyons cette tendance dans le domaine réglementaire — M. Hart sait de quoi je parle — quand, par exemple, les compagnies mettent sur le marché un produit chimique nocif et que le fardeau de la preuve repose sur l'organisme de réglementation plutôt que sur la compagnie.
    J'aimerais vous poser une brève question, monsieur Bloom, si vous le permettez. Vous avez parlé un peu plus tôt de consulter les provinces et de mettre en place des mécanismes pour le faire dans le cadre d'un processus transparent et prévisible. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Oui. Je pense qu'il y a certains secteurs qui soulèvent des questions très délicates dans les provinces; le secteur des ressources, par exemple, auquel certaines provinces tiennent énormément. Actuellement, selon l'industrie en cause, la province ne joue pas un rôle officiel, mais un rôle politique. Je pense que le fait d'expliquer clairement comment cela fonctionne peut jouer. Est-ce un rôle consultatif? Le fait d'être honnête à ce sujet serait utile pour que tout le monde comprenne. On saurait alors si toutes les provinces fonctionnent de la même manière, et cela éclairerait les investisseurs.
    Merci beaucoup, monsieur Bloom et madame Coady.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Wallace, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie nos témoins de leur présence cet après-midi.
    J'espère que le président fera preuve de leadership. Monsieur le président, tous les groupes de témoins nous ont parlé de l'OCDE, et je crois qu'il est temps que le comité lui rende visite.
    Monsieur Wallace, j'appuie cette motion.

  (1725)  

    Plus sérieusement, je trouve ce sujet très intéressant. Je viens de Burlington, la circonscription qui se trouve de l'autre côté de la baie où sont situées l'ancienne entreprise Stelco, devenue U.S. Steel, et l'ancienne Dofasco, devenue ArcelorMittal Dofasco; elle a conservé le nom. Nous avons deux aciéries sur la même rue, et deux situations différentes.
    Mittal investit, et les choses vont bien. Il y a eu un investissement étranger, une prise de contrôle, comme vous diriez. Malheureusement, les choses ne vont pas aussi bien pour la compagnie U.S. Steel, et le gouvernement la poursuit devant les tribunaux. Même M. Angus, dans le groupe de témoins précédent, vous a donné quatre exemples: deux qui fonctionnaient bien et deux qui ne fonctionnaient pas, ou pas de la manière prévue.
    Il est difficile de savoir qui va gagner, d'après ce que j'ai entendu jusqu'ici.
    Monsieur Hart, vous avez dit que si vous étiez à notre place, c'est ce que vous feriez. Mais ce que vous semblez oublier, c'est que nous sommes des politiciens et que tout ce que nous faisons a une dimension politique; donc, ce n'est peut-être pas aussi simple que vous le pensez.
    En ce qui concerne l'étude, on parle notamment d'accroître le pouvoir du ministre de dire après coup si cela a procuré un avantage net, pourquoi telles décisions ont été prises et quel critère a influencé la prise de décision. Êtes-vous en faveur de ce changement? Êtes-vous favorable à ce que la loi reste telle qu'elle est actuellement, sans qu'on donne suite à ce que vous recommandez? Y a-t-il des limites? Cela changera-il quelque chose, à votre avis?
    Il y a un avantage à obliger le ministre à justifier publiquement sa décision. Cette transparence forcera le ministre et ses fonctionnaires à examiner soigneusement leurs actions afin de justifier ces décisions. Il aurait été intéressant, par exemple, que le ministre actuel justifie sa décision en ce qui a trait à la société Potash, mais on lui a épargné cette tâche difficile.
    Je suis certain que le ministre avait pris la décision contraire avant que le Cabinet du premier ministre ne le fasse changer d'avis. Il a dû convaincre ses fonctionnaires que tout le travail qu'ils avaient accompli devait être changé. Ce fut sûrement un exercice intéressant, et j'aurais aimé en voir les résultats.
    Mais le vrai argument à faire valoir est le suivant: c'est une bonne politique publique que de restreindre la portée du pouvoir discrétionnaire. Plus un ministre en a, plus il y a de risques de manigance politique. Je crois donc qu'il est dans l'intérêt du gouvernement et des politiciens d'avoir un pouvoir discrétionnaire limité, car lorsqu'il est vague et étendu, il est difficile de gérer le lobbying.
    Monsieur Bloom, j'ai utilisé votre étude pour réagir un peu aux critiques. Souvent, des gens de ma circonscription m'appellent pour me demander pourquoi le gouvernement laisse telle compagnie acheter telle autre compagnie. Ils disent que nous vendons le Canada à rabais, et patati, et patata. J'argumente un peu en disant que des études ont été menées, dont une par le Conference Board du Canada, qui est assez neutre, et qu'elles révèlent que ce n'est pas le cas. Je leur dis qu'en fait, les entreprises canadiennes investissent davantage à l'étranger que les entreprises étrangères au Canada. Je n'entre pas dans les détails, mais voilà.
    Que faites-vous pour que les Canadiens investissent davantage au Canada, dans les compagnies canadiennes? Le Conference Board a-t-il une position arrêtée sur ce que le gouvernement actuel pourrait faire afin d'améliorer les conditions d'investissement pour les Canadiens qui veulent investir dans les entreprises canadiennes?
    C'est une question intéressante et réfléchie. Nous somme en train de créer un centre d'innovation en affaires. L'une des questions liées à cette propension à investir est l'accès au capital. Il y a également l'expertise que possèdent les Canadiens et leur attitude à l'égard de l'investissement. Il semble que nous soyons plus conservateurs que d'autres. Cela nous a sans doute placés dans une position avantageuse auprès des banques, dernièrement, mais c'est un défi à relever.
    J'ai discuté de cette question avec de nombreux PDG, et il semble qu'ils ne considèrent pas que le régime fiscal pose problème. Ils estiment qu'il est assez raisonnable. Je pense que l'enjeu le plus important, c'est de développer une culture dans laquelle on considère qu'il vaut la peine de prendre certains risques calculés. Toutefois, c'est plus facile à dire qu'à faire.
    Je suis désolé, monsieur Wallace, mais c'est tout le temps dont nous disposons.
    Il voulait nous présenter trois solutions. Je ne crois pas qu'il l'ait fait.
    Non.
    Il ne reste qu'une minute avant la fin de la réunion.

[Français]

     Je vais prendre la minute restante, monsieur le président, puisque vous avez réussi à m'en enlever quatre au total.

[Traduction]

    Je suis désolé, monsieur Cardin, mais le temps nous manque. Je veux simplement vous demander si vous acceptez que M. Campbell utilise la dernière minute pour nous présenter ses trois recommandations.
    Monsieur Campbell, vos trois recommandations.
    Merci beaucoup. Je suis vraiment content de pouvoir vous en parler.
    Je vais vous présenter trois recommandations pour l'amélioration de l'avantage net.
    Il faut des engagements obligatoires quant aux niveaux de production et d'emploi, des contrats pour les travailleurs actuels, de nouveaux investissements en capital fixe et en technologie, et une expansion du contenu canadien dans les contrats d'approvisionnement et les entrées.
    Les ordres inférieurs de gouvernement, les acteurs du milieu et les organisations de travailleurs doivent être autorisés à participer au processus d'évaluation et d'examen des prises de contrôle potentielles par des intérêts étrangers.
    Tous les engagements doivent être rendus publics de façon obligatoire et non pas optionnelle. Ils doivent être contrôlés de manière efficace pour en assurer la conformité. En cas de non-respect des engagements, des sanctions pouvant aller jusqu'à la révocation rétroactive de l'acquisition doivent être imposées.
    Voilà quelques-unes des recommandations.

  (1730)  

    Merci beaucoup, monsieur Campbell.
    Je vous remercie, messieurs.
    Encore une fois, je vous demande de m'excuser, mais ce n'est pas ma faute si le temps passe si vite. Je vous remercie beaucoup de votre témoignage.
    La séance est levée.
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