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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des finances


NUMÉRO 056 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 octobre 2009

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Bienvenue à la 56e réunion du Comité permanent des finances.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous étudions le rapport de la Banque du Canada sur la politique monétaire
    Nous avons le plaisir d'accueillir ce matin deux représentants de la Banque du Canada, soit le gouverneur, Mark Carney — bienvenue à nouveau, M. Carney — et le premier sous–gouverneur, Paul Jenkins.
    M. Carney, je crois comprendre que vous avez une déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du comité. Je vous remercie d'être venu devant le comité et vous donne tout de suite la parole.
    Merci, monsieur le président. Merci de votre accueil.

[Français]

    Monsieur le président, distingués membres du comité, bonjour.
    M. Jenkins et moi sommes ravis de nous présenter devant ce comité aujourd'hui pour discuter du point de vue de la Banque du Canada au sujet de l'économie et de l'orientation de la politique monétaire. Bien que les conditions économiques au Canada se soient améliorées depuis que nous vous avons rencontrés en février et en avril, bon nombre des défis fondamentaux demeurent. J'aimerais vous donner un aperçu de la plus récente livraison du Rapport sur la politique monétaire, que nous avons publiée la semaine dernière.
    Les indicateurs récents font état du début d'une reprise à l'échelle du globe. L'évolution économique et financière a été un peu plus favorable que la Banque du Canada ne l'entrevoyait en juillet, quoique des vulnérabilités importantes subsistent.
    Le Canada, comme prévu, a lui aussi renoué avec la croissance économique, après avoir connu trois trimestres de suite de forte contraction. Cette reprise est soutenue par la détente monétaire et budgétaire, l'augmentation de la richesse des ménages, l'amélioration des conditions financières, le renchérissement des produits de base et le regain de confiance de la part des entreprises et des consommateurs.
    Toutefois, la volatilité accrue et la vigueur persistante du dollar canadien ont pour effet de ralentir la croissance et de contenir les pressions inflationnistes. La banque estime qu'avec le temps, la force actuelle du dollar viendra plus que contrebalancer les effets de l'évolution positive observée depuis juillet.
    À la lumière de tous ces facteurs, la banque s'attend à présent à ce que, comparativement à ce qui était escompté dans la livraison de juillet du Rapport sur la politique monétaire, la composition de la demande globale continue à se modifier, la demande intérieure finale gagnant en importance au détriment des exportations nettes.

[Traduction]

    Nous prévoyons maintenant que le taux de croissance sera légèrement inférieur en moyenne durant le reste de la période de projection. La Banque du Canada estime que l'économie canadienne aura subi une contraction de 2,4 p. 100 cette année et connaîtra ensuite une expansion de 3 p. 100 en 2010 et 3,3 p. 100 en 2011. Nous prévoyons par conséquent une reprise de la croissance un peu plus modeste que lors de la moyenne des cycles précédents.
    L'inflation totale mesurée par l'IPC a baissé au troisième trimestre pour atteindre un creux de moins 0,9 p. 100, ce qui s'explique par une baisse importante des prix de l'énergie d'une année sur l'autre.
    L'inflation totale mesurée par l'IPC devrait atteindre 1 p. 100 ce trimestre, alors que nous prévoyons que l'inflation fondamentale touchera un creux de 1,4 p. 100 durant la même période.
    Comme l'économie se caractérise aujourd'hui par une offre excédentaire importante, la Banque s'attend à ce que l'inflation fondamentale et l'inflation totale retrouvent la cible de 2 p. 100 au troisième trimestre de 2011, soit un trimestre plus tôt que nous l'avions prévu en juillet.
    Les principaux risques de poussée inflationniste sont reliés à la possibilité d'une reprise plus forte que prévu de l'économie mondiale et d'un raffermissement plus soutenu de la demande intérieure au Canada.
    En ce qui concerne les risques de baisse, la reprise mondiale pourrait être moins ferme que prévu. En outre, un dollar canadien plus fort que prévu, résultant d'une réduction des portefeuilles internationaux libellés en dollars américains, pourrait freiner de manière importante la croissance de l'économie canadienne et exercer d'autres pressions à la baisse sur l'inflation.
    Mardi dernier, la Banque a réitéré son engagement conditionnel de maintenir le taux cible du crédit à un jour à son niveau plancher de 0,25 p. 100 jusque fin juin 2010 de façon à atteindre sa cible d'inflation.
    La Banque conserve une flexibilité considérable dans la conduite de la politique monétaire dans un contexte de taux d'intérêt bas, conformément au cadre que nous avons énoncé dans le Rapport d'avril.
    Notre objectif en matière de politique monétaire est d'atteindre la cible de 2 p. 100 pour l'inflation. Le taux de change doit être envisagé dans ce contexte. C'est un prix relatif important que la Banque surveille attentivement, mais ce qui compte en dernière analyse, c'est l'incidence du taux de change conjugué aux autres facteurs internes et externes qui influent sur la demande globale et l'inflation au Canada. Autrement dit, la Banque analyse toute la situation économique à travers le prisme de son objectif en matière d'inflation.
    Sur ce, monsieur le président, membres du comité, Paul et moi sommes à votre disposition pour répondre à vos questions.

  (1105)  

    Merci beaucoup, monsieur Carney, de votre déclaration liminaire.
    Nous entamons la période des questions avec M. McCallum, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président, et bienvenue à nos deux témoins.
    Permettez-moi de dire d'emblée, monsieur Carney, que vous faites à mon avis un excellent travail. Je sais que je ne suis pas le seul à apprécier la franchise et la clarté de vos messages, surtout quand on les compare à ceux d'autres gouverneurs de banques centrales.
    Je voudrais parler d'abord du niveau élevé de notre dollar. Lorsque j'étais étudiant, je me souviens qu'on discutait beaucoup de la question de savoir si une intervention non stérilisée ou une intervention stérilisée était terriblement efficace à moyen terme, surtout dans un monde où chacun semble penser que le dollar américain devrait fléchir. Si tel est le monde dans lequel nous vivons, j'appuie certainement les efforts que vous déployez pour empêcher le dollar canadien de trop monter à cause des dommages que cela pourrait causer, comme vous le dites, à l'emploi et au secteur de la fabrication. Toutefois, s'il est vrai que la partie se joue entre la Banque du Canada et les tendances mondiales, je me demande s'il y a assez de cordes à votre arc.
    Voilà ma question.
     Merci.
    Tout d'abord, comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, ce qui importe en dernière analyse, c'est que nous ayons assez de cordes pour atteindre notre cible en matière d'inflation, et je vous rappelle — même si je sais que vous le savez — que l'objectif de la Banque du Canada est de tirer parti de toute sa panoplie de politiques pour atteindre la cible de 2 p. 100 d'IPC. Dans ce contexte, le taux de change est un facteur important.
    Pour vous répondre directement, l'histoire a montré que l'intervention est en soi rarement efficace à longue échéance si elle ne s'appuie pas sur des politiques ou des mesures concordant avec son orientation. Ce que nous avons souligné, au sujet de la situation actuelle du dollar canadien, c'est que, dans le contexte de tous les autres facteurs qui influent sur la demande totale et sur l'inflation au Canada, c'est un risque baissier. Les mouvements récents ont causé un décalage d'un trimestre quant au moment où nous retournerons à notre cible d'inflation et, dans ce contexte, la Banque conserve beaucoup d'options pour offrir plus de stimulation à l'économie, si c'est nécessaire, afin d'atteindre cette cible.
    Vous ne voulez peut-être pas dévoiler tout votre arsenal publiquement mais, à part l'intervention, quels autres instruments pourriez-vous utiliser pour influer sur la valeur du dollar si vous estimiez qu'il monte trop?
    Ce sont les instruments dont nous disposons pour atteindre la cible inflationniste. Lors de ma dernière comparution devant le comité, en avril, nous avions publié un rapport similaire dont l'annexe exposait en détail notre stratégie, c'est-à-dire nos principes et notre volonté d'appliquer une politique monétaire non conventionnelle — une politique de taux d'intérêt très bas comprenant des options d'assouplissement du crédit ou de détente quantitative — avec l'engagement conditionnel que nous avons appliqué.
    Nous avons donc ces options pour stimuler la croissance économique si c'est nécessaire, et je vous rappelle une évidence qui est qu'à cette étape, nous pensons que les politiques que nous avons adoptées, notamment l'engagement conditionnel jusqu'en juin 2010, concordent avec notre souci d'atteindre la cible inflationniste à échéance raisonnable.

  (1110)  

    Merci.
    Ma deuxième question porte sur la notion de gestion macroéconomique prudentielle dont vous avez souvent parlé ces derniers temps. Si je comprends bien, vous avez laissé entendre à plusieurs reprises dans le passé que le mandat de la Banque du Canada pourrait être de voir au-delà de l'inflation et inclure une certaine forme de gestion macroéconomique prudentielle pouvant englober une action plus directe vis-à-vis des banques.
    J'ai donc une double question à vous poser.
     « Lutte de pouvoir » n'est sans doute pas la bonne expression dans ce contexte, mais comment décririez-vous la répartition actuelle des tâches entre le BSIF, la Banque du Canada et le ministère des Finances, y compris le ministre?
    Deuxièmement, j'ai lu ce matin dans The Globe and Mail un éditorial intéressant disant qu'il conviendrait peut-être d'élargir le mandat de la Banque du Canada — c'est peut-être ce que vous pourriez appeler de la gestion macroéconomique prudentielle — mais, si la Banque du Canada devait avoir un mandat élargi, je pense qu'il devrait y avoir un débat parlementaire à ce sujet car cela pourrait exiger qu'on apporte des modifications à la Loi sur la Banque du Canada.
    Voilà donc ma double question: premièrement, quelle est la répartition des tâches actuellement et, deuxièmement, que pensez-vous d'un débat parlementaire sur la possibilité de confier un rôle élargi à la Banque du Canada?
    En ce qui concerne la première question, sur la répartition des tâches, je tiens à souligner ce que j'ai dit hier, et que Paul Jenkins a dit il y a environ un mois lors d'une allocution publique, dans le droit sillage des paroles du ministre des Finances: le ministre des Finances assume la responsabilité globale du système financier. C'est le ministre des Finances qui détient cette responsabilité globale et, par son intermédiaire, le Parlement. C'est parfaitement clair.
    Cela dit, la structure de réglementation actuelle au Canada englobe un organisme de réglementation prudentielle, de réglementation des banques, de réglementation des assurances, avec le BSIF, la Banque du Canada — qui détient une responsabilité plus ou moins bien définie, ou imparfaitement définie, de stabilité financière — et d'autres agences. Nous collaborons avec les instances provinciales de réglementation des marchés boursiers, la SADC, le BSIF et le ministère fédéral des Finances pour nous assurer qu'il n'y a pas de faille dans le système. Je pense que ce niveau de coopération et d'interaction, qui est relativement pragmatique, s'est avéré très efficace parce que nous travaillons très efficacement ensemble.
    La crise qui a frappé les autres pays les a amenés à se demander quelle est la meilleure manière d'organiser ces micro–responsabilités et macro–responsabilités entre les diverses agences. Évidemment, différents pays auront diverses solutions selon leurs antécédents en matière de réglementation, leurs succès et leurs échecs. Le Canada, c'est évident, a connu des succès. En dernière analyse, c'est au ministre et au Parlement qu'il appartient, tout à fait légitimement, de décider quelle est la meilleure manière de structurer le régime canadien eu égard à nos atouts et à notre passé. La Banque participera comme il convient à ces discussions et à ces décisions. Je tiens à souligner que le système s'est avéré très efficace à la fois durant la crise et durant la sortie de cette crise.
    Je termine en disant que nous collaborons très étroitement avec le BSIF, avec le ministère fédéral des Finances et, s'il y a lieu, avec les instances de réglementation provinciales pour redessiner tout l'appareil réglementaire dans le cadre du processus du G-20. La plupart de ces décisions ou de ces consensus sont forgés au niveau international et il est donc important que nous agissions de concert, et c'est ce que nous faisons.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur McCallum.
    Monsieur Laforest, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur Carney et monsieur Jenkins.
    Monsieur Carney, hier, vous étiez devant l'Autorité des marchés financiers, à Montréal, où vous avez prononcé un discours.
    Les journaux nous rapportent un résumé de votre discours. Vous avez dit, premièrement, que vous êtes un peu sceptique par rapport aux institutions financières. Vous dites qu'elles doivent changer d'attitude. Deuxièmement, vous dites: « Les institutions financières doivent démontrer qu'elles sont conscientes de leurs responsabilités élargies. »
    Quand j'ai lu cette phrase, j'étais un peu étonné. Je m'interroge particulièrement au sujet du mot « élargies ».
    Selon vous, en quoi les responsabilités des institutions financières ont-elles été élargies par rapport à celles qu'elles avaient avant la crise? À cet égard, qu'attendez-vous des institutions financières?

  (1115)  

    Merci de votre question.
    Premièrement, je voudrais souligner que mon discours d'hier, à Montréal, visait davantage l'extérieur de nos frontières que le Canada. Encore une fois, nos institutions financières, pendant la crise, ont travaillé dans un esprit étroit de collaboration, de façon très efficace et qui a profité à notre pays. C'est le premier aspect.
    Le second, c'est que dans le cas de toutes les institutions financières — de n'importe quel pays —, l'important, selon moi et selon la Banque du Canada, est de penser au système et pas seulement à elles-mêmes. Par exemple, l'institution financière doit se demander quel sera l'impact de ses actions sur la stabilité financière. C'est nécessaire, parce qu'on peut changer la manière de faire des institutions.
    C'est bien résumé dans La Presse.
    Vous dites que les institutions financières ont des responsabilités élargies, comme s'il s'agissait de nouvelles responsabilités. Quelles sont ces responsabilités qu'elles n'avaient pas auparavant?
     Il ne s'agit pas de nouvelles responsabilités, puisqu'elles avaient ces responsabilités avant la crise économique. Une institution financière qui est systémique a une responsabilité envers le système.
    Je terminerai ma réponse en anglais.

[Traduction]

    Ce qui a été clair, au niveau international, c'est que certains établissements ne se sont pas comportés de cette manière. Ils ont pris avantage des filets de sécurité et ont mené leurs affaires en tenant pour acquis qu'ils seraient secourus, ce qui a accru le risque.
    Ce qui se fait au G-20 consiste en partie à imprimer des changements à ces attitudes par le truchement de processus tels que les testaments biologiques et une transformation des marchés qui amèneront ces établissements à penser plus au système dans son ensemble et à agir en conséquence.

[Français]

    C'est bien.
    En ce qui a trait à la reprise économique, vous anticipez, pour l'an prochain, un taux de croissance de 3 p. 100, et d'un peu plus au cours de l'année suivante. Dernièrement, vous avez dit que la montée rapide du dollar canadien mettait en péril la croissance économique.
    Selon vous, le Québec est-il plus en péril que les autres provinces canadiennes? Quelles sont les provinces qui seraient le plus touchées si une certaine parité s'installait entre le dollar canadien et le dollar américain?
     Nous faisons des projections nationales, des projections canadiennes, mais nous ne faisons pas de projections pour l'une ou l'autre des provinces. Je peux dire que certains secteurs seront plus affectés. Par exemple, le secteur manufacturier connaît des difficultés quand le dollar a une vigueur persistante et une volatilité accrue.
    Avez-vous prévu des mesures pour contrer un tel phénomène? Quelles mesures envisagez-vous si la parité s'installe?
    Si la...?
    S'il y avait parité rapidement.

  (1120)  

    Je peux peut-être ajouter quelque chose.
    Tout d'abord, on constate que l'économie canadienne connaît plusieurs éléments positifs. Dans toutes les régions, le prix des produits de base est un peu plus élevé. Le niveau de confiance des entreprises et des ménages est aussi plus élevé qu'il y a un an. La richesse, avec l'augmentation et les changements des conditions financières... Dans toutes les régions, il y a des éléments positifs.
    Dans le cadre de nos prévisions, nous avons fait remarquer que si le dollar continue à être élevé, cela aura un effet qui pourrait contrebalancer les éléments positifs. Comme l'a mentionné le gouverneur, la politique monétaire porte sur l'économie au complet. Nous nous concentrons sur nos objectifs en termes d'inflation.
    La valeur actuelle du dollar est-elle sa réelle valeur, ou subit-il l'effet d'une certaine spéculation? À combien estimez-vous la valeur réelle du dollar, actuellement?
    Nous ne faisons jamais d'estimation officielle de la valeur du dollar.
    Ce n'est qu'une hypothèse.
    Merci.

[Traduction]

    Merci, monsieur Laforest.
    Monsieur Menzies.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les deux témoins d'aujourd'hui.
    En vous écoutant, je repensais à ce qui s'est passé il y a un an, à peu près. Beaucoup de choses ont changé en un an. Nous ne savions pas comment la situation allait évoluer et j'aimerais parler du rôle qu'a certainement joué notre ministre des Finances. Ce n'est pas pour rien qu'on l'a nommé ministre des Finances de l'année. Je pense que les gens ne réalisent pas le rôle que vous jouez. Vous aussi, monsieur le gouverneur, allez à ces réunions pour palabrer avec vos homologues internationaux. J'aimerais vous faire parler de cela et je passerai ensuite à certaines des remarques que vous avez faites hier. car je pense qu'elles concordent avec le thème du rôle du Canada pour essayer de faire en sorte que nous maintenions le cap.
    J'aimerais que vous me parliez un peu du rôle du Canada dans ce contexte. J'ai le sentiment qu'il est plus large que ne le pensent la plupart des Canadiens. Nous avons joué un rôle important dans la relance parce que c'est nous qui avons insisté continuellement pour qu'on maintienne le cap avec ces dépenses de stimulation économique. C'était la bonne décision et on en a la preuve tous les jours.
    Vous dites que notre situation s'est améliorée mais seulement de manière très minime. Pourriez-vous donc nous expliquer le rôle que vous jouez et votre interaction avec les gouverneurs des banques centrales des autres pays, du G-8 et du G-20 par exemple?
    Merci.
    Tout d'abord, pour l'information des membres du comité, il y a maintenant de fréquentes communications entre les gouverneurs des banques centrales du G-7, du G-10 et du G-20, mais par des rencontres directes très fréquentes, des réunions mensuelles, des rencontres face à face et des rencontres téléphoniques plus fréquentes. Nous avons eu malheureusement des conversations très fréquentes l'an dernier, à cette époque, parce que nous devions discuter de beaucoup de choses, et cela a continué durant l'année.
    Je peux vous assurer qu'il s'est établi un niveau de confiance et de franchise très élevé entre les grandes banques centrales au cours des années. Cela s'est maintenu durant la crise et nous en avons bénéficié. Chaque fois qu'une très mauvaise chose allait surgir, nous en étions informés avant que ça devienne public, directement par un gouverneur de la banque centrale concernée. Cela s'est avéré extrêmement utile pour dresser des plans d'urgence de notre côté mais aussi pour avoir une bonne idée de l'ampleur des problèmes.
    La deuxième chose au sujet des banques centrales — et je n'irai pas dans tous les détails — concerne la création coordonnée de liquidités par une série de mesures qui ont été prises, d'urgence, malheureusement, pour maintenir le fonctionnement du système. À cette époque, l'an dernier, nous avons participé à une baisse coordonnée des taux d'intérêt des grandes banques centrales et avons aidé à l'appliquer parce que nous pouvions voir la détérioration très rapide de l'économie. Cela est utile. Il faut un certain temps pour en ressentir les effets mais cela a été utile à la marge.
    Je crois que là où on commence à voir le rôle plus large du Canada — et j'inclus évidemment là-dedans le rôle du ministre des Finances, du ministère des Finances, et des organismes de réglementation —, c'est lorsqu'on a eu recours à la politique budgétaire pour sauver le système. Lors de la réunion d'octobre du G-7, c'est-à-dire lorsqu'il est malheureusement devenu nécessaire de prendre des mesures très audacieuses et sans précédent, le Canada avait de la crédibilité pour défendre l'idée que l'heure était venue pour chacun d'intervenir vigoureusement pour défendre son institution afin que le système dans son ensemble puisse continuer de fonctionner. Cela n'a été une décision agréable pour personne, mais il était utile qu'il y ait au moins autour de la table quelqu'un pour qui ce n'était pas immédiatement nécessaire, et je pense que cela a contribué à forger ce consensus. Des décisions importantes ont été prises à cette occasion.
    Depuis lors, la question importante est de voir comment rebâtir le système. La crise a duré longtemps après ce moment-là mais cette décision a évité la catastrophe. Les décisions prises en octobre dernier donnaient le signal qu'on allait interrompre la dégringolade. La question suivante était de rebâtir le système et c'est ce à quoi s'emploie le G-20 depuis. Je pense que le Canada a joué un rôle important en partie parce qu'il y a des leçons à tirer du fait que notre système n'a pas eu le problème, et nous avons tiré ces leçons. Ce qui a également été important, c'était de jouer un rôle constructif avec les autres, d'être honnêtes et d'admettre que nous aussi avons des leçons à tirer de ce qui s'est passé ailleurs, qu'il y a des choses que nous pouvons améliorer dans notre système, et de participer aux discussions de cette manière.

  (1125)  

    Très bien. Merci.
    C'est très utile car je pense que la plupart des gens ne comprennent pas tous les rôles que joue la Banque du Canada.
     Si vous me permettez de m'écarter un instant du sujet, je veux rendre hommage à Paul Jenkins pour tous les conseils qu'il m'a donnés sur les pensions de retraite. Je ne pense pas que les gens connaissent le rôle que joue la Banque du Canada dans le domaine des pensions, ni les études que vous y avez consacrées. Je vous remercie de l'aide que vous m'avez accordée à ce sujet, Paul.
    Très rapidement, j'ai lu une déclaration de Christian Noyer, si je prononce bien son nom, le gouverneur de la banque centrale de France, qui affirme qu'on voit des signes de résurgence des pratiques à haut risque qui ont provoqué la crise. Parmi les leçons de la crise, j'espère que nous avons appris combien il a été difficile d'y faire face. J'espère que nous avons appris cette leçon et que nous n'allons pas retomber dans les comportements à risque du passé. Je suis sûr que c'est le rôle que vous avez joué.
    Très brièvement, je m'associe aux déclarations du gouverneur Noyer. On s'inquiète au niveau mondial de la réapparition de certaines de ces pratiques.
    Merci, monsieur Menzies.
    C'est maintenant au tour de monsieur Mulcair.

[Français]

    Bienvenue, messieurs Carney et Jenkins.
    Pendant une période de crise, les réponses claires aident les citoyens à comprendre des questions somme toute assez complexes. La dernière fois qu'on a eu le plaisir de se rencontrer, monsieur Carney, on en était à parler des paradis fiscaux. Vous nous entreteniez de ce que vous appelez en anglais aggressive tax planning.
    J'aimerais que vous nous donniez plus de détails sur cette question parce que depuis notre dernière rencontre, l'OCDE a publié un chiffre assez effarant. Il s'agit de 6 billions de dollars qui se trouveraient maintenant dans des paradis fiscaux. Il vaut toujours la peine de rappeler qu'en français, un billion signifie 1 000 milliards. Autrement dit, un billion équivaut à ce qu'on appelle en anglais un trillion. Ça rend les choses un peu difficiles à suivre. On parle donc de 6 000 milliards de dollars.
    Un comité d'experts qui a étudié la question en Angleterre a fait une remarque qui est intéressante sur le plan social. Ces gens ont dit que souvent, les sommes d'argent étaient gagnées grâce à des institutions stables comme les banques centrales, les tribunaux, les services de police et les institutions gouvernementales, notamment, mais qu'une fois gagné, cet argent était retiré de l'économie par des gens qui le transférait ailleurs.
    Je veux revenir à votre expression, qu'on peut traduire en français par « planification fiscale agressive ». On a toujours dit que l'évitement fiscal n'était pas permis. Par contre, personne ne nous oblige à planifier nos affaires de façon à payer un maximum de taxes. J'aimerais vous demander quelle distinction vous faites.

  (1130)  

[Traduction]

    L'évitement fiscal est légal. Personne ne vous oblige à organiser vos affaires de manière à payer le maximum d'impôt possible. Par contre, l'évasion fiscale est illégale.
    J'aimerais savoir si la Banque s'est penchée sur le chiffre plutôt alarmant de 6 millions de dollars mentionné par l'OCDE au sujet des abris fiscaux. Cela fait-il partie de votre réflexion en ce qui concerne la masse monétaire globale?

[Français]

    Merci. C'est une question très importante. La question des paradis fiscaux est l'une des grandes priorités du G20. J'aimerais vous faire remarquer qu'il y a présentement au G20 un processus prioritaire présidé par le sous-ministre délégué principal, M. Macklem, et le chef de ce comité. Donc, de concert avec la France, un processus a été mis en vigueur le mois dernier qui va se terminer en janvier, je crois. Il a pour but de

[Traduction]

examiner la cohérence de la mise en oeuvre des nouveaux principes convenus à Pittsburgh au sujet des paradis fiscaux et identifier ceux qui sont douteux, ceux qui permettent de franchir la ligne que vous avez légitimement tracée entre l'évitement et l'évasion et ne donnent pas suffisamment d'informations pour un recours adéquat.
    C'est une priorité dont on s'occupe, et le Canada le fait par le truchement du ministère des Finances. Cela ramène à la question de M. McCallum concernant la répartition des tâches. Il y a au ministère des gens qui s'occupent de ça. Nous sommes conscients du problème mais c'est le ministère qui est chargé de s'en occuper et il le fait.
    Merci de cette réponse claire.
    Comme le temps passe vite, j'aborde tout de suite un autre sujet. Cela peut sembler un peu éloigné du sujet immédiat de l'économie, mais je pense pouvoir vous convaincre que c'est relié à la valeur du dollar canadien. L'un des principes fondamentaux du développement durable est ce qu'on appelle « l'internalisation des coûts ». Quand on veut que les gens comprennent le concept, on leur dit que les trois dollars supplémentaires qu'ils payent pour un pneu sont justifiés si le coût de recyclage du pneu est de trois dollars et que les gens qui conduisent une automobile devraient payer ces trois dollars afin qu'ils ne soient pas prélevés dans les recettes fiscales de l'État. C'est un principe fondamental du développement durable.
    En ce qui concerne les sables bitumineux — ou, pour plaire à nos amis de l'Alberta, les sables pétrolifères —, on peut avancer l'argument que nous n'internalisons pas le coût total dans ce qui est vendu, à la fois environnementalement et pour les générations futures. Cet afflux de dollars qui n'a pas été réduit par l'internalisation des coûts est l'un des moteurs de la revalorisation de notre dollar, ce qui a évidemment pour effet secondaire de rendre nos exportations encore plus difficiles et de faire encore plus mal à nos industries manufacturières et forestières.
    Considérant la répartition des tâches que vous avez décrite tout à l'heure, examiner ces questions fait-il partie de votre rôle? Je pense que oui. Même si les sables bitumineux peuvent sembler être un sujet très éloigné de vos préoccupations quotidiennes, je crois honnêtement que, si nous voulons adopter une politique de développement durable — autrement dit, chaque fois que le gouvernement a une décision à prendre, tenir compte des aspects environnementaux, sociaux et, bien sûr, économiques pour déterminer quelle est la meilleure voie à prendre...
    À l'heure actuelle, nous dépensons 60 milliards de plus cette année sur le dos des générations futures, mais nous ne leur laissons rien en termes d'avenir énergétique durable vert renouvelable, comme nous aurions pu le faire avec cet argent et comme le font les Américains. Nous leur laissons un héritage qui les obligera à dépenser encore plus pour réparer les dégâts.
    J'aimerais vous faire parler un peu de cette notion de développement durable, d'internalisation des coûts, et des sables bitumineux qui sont l'un des moteurs de la montée du dollar canadien, et vous demander si cela fait partie de votre réflexion dans votre répartition des tâches.
    Je suis tenté de vous dire non, ça ne fait pas partie de la répartition des tâches mais, bien sûr, le secteur de l'énergie est très important pour l'économie canadienne. Il nous incombe de comprendre les moteurs à court, moyen et long terme de l'investissement dans ce secteur. De fait, dans notre rapport de la semaine dernière, nous avons mis en relief certains développements et certains changements structurels des marchés de gaz naturel, qui sont importants du point de vue des perspectives d'investissement dans le gaz naturel au Canada. C'est quelque chose que nous avons pris en compte, c'est-à-dire une rupture structurelle potentielle de l'investissement dans le gaz naturel à cause des développements dans le secteur des schistes gazeux américains, facteur important pour le Canada. Donc, oui, nous examinons les divers secteurs et ces diverses forces.
    Je constate que les décisions d'investissement transfrontalier en énergie sont en partie influencées par les attentes concernant la tarification du carbone, à terme, dans différentes juridictions. Les échéanciers à cet égard, ainsi que le niveau de la tarification, sont également influencés par les perspectives d'entente dans les divers processus UNCC, notamment ceux qui mènent à Copenhague. Ce sont des dossiers séparés mais il y a eu des discussions à ce sujet dans le cadre du G-20.
    En tant que banque centrale, nous prenons évidemment note de ces décisions afin d'en analyser les répercussions sur l'investissement et l'activité au Canada.

  (1135)  

    Il faudra poursuivre cette discussion au deuxième tour.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de monsieur McKay.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Carney et monsieur Jenkins, de votre présence.
    J'aime beaucoup votre franchise. J'ai constaté dans le journal de ce matin que vous n'hésitez pas à vous élever contre l'orgueil de certaines banques centrales. Je vous souhaite bonne chance! Ce sera peut-être un nouveau péché originel la semaine prochaine.
    Dans la catégorie guerre contre les moulins à vent dont votre récente conversation sur le dollar canadien nous a donné un exemple, je vous félicite des efforts que vous déployez pour contrer la hausse de notre dollar, mais j'ai le sentiment que nous souffrons au Canada d'une sorte de mal hollandais dans la mesure où ce sont nos ressources naturelles qui propulsent notre dollar. Nous n'avons pas choisi la solution norvégienne consistant à isoler les ressources naturelles de leur incidence économique. Par défaut, ou pour une autre raison, nous avons choisi le modèle hollandais. Nous avons appauvri pour toujours certaines régions du pays qui n'ont pas de ressources naturelles tout en aidant celles qui en ont à s'enrichir.
    Les décisions que nous n'avons pas prises finiront par faire de nous des coupeurs de bois et des tireurs d'eau jusqu'à la fin des temps, sans perspective réaliste, malgré les meilleurs efforts de la Banque du Canada, de voir le dollar canadien retourner à un niveau qui permettrait à un vrai secteur manufacturier d'avoir du succès dans notre pays.
    Une précision: j'ai parlé de l'orgueil des banquiers, pas des banques centrales. Il n'y a pas d'orgueil dans les banques centrales, ni de péché originel.
    Votre question est importante. Beaucoup de facteurs influent sur les marchés monétaires, au Canada et ailleurs. Comme vous l'avez laissé entendre, l'économie canadienne ne comporte pas que des industries primaires. Les autres secteurs — le secteur manufacturier, les services, les industries primaires autres que l'énergie — sont des volets importants de notre économie qui agissent sur les pressions inflationnistes, ce qui est en fin de compte notre mandat. Ce que nous avons essayé d'expliquer, c'est que nous aurons recours à tout notre arsenal de politiques pour nous assurer le plus possible d'atteindre notre cible inflationniste à échéance raisonnable. Le problème du dollar doit être envisagé dans ce contexte.
    Si je vous comprends bien, et mes paroles vont peut-être dépasser un peu ma pensée, vous dites que votre politique sur l'inflation est le seul instrument dont vous disposez pour lutter contre la hausse injustifiée du dollar canadien. Vous ai-je mal interprété?

  (1140)  

    Le mandat clair de la Banque dans la conduite de la politique monétaire est d'atteindre une cible d'inflation de 2 p. 100. C'est là notre mandat, c'est à cette aune que nous sommes jugés et c'est de cela que nous devons rendre compte. Dans ce contexte, et il n'y a pas toujours de chevauchement, nous avons une politique d'intervention acceptée par le gouvernement du Canada. Elle prévoit une intervention sur le marché des changes dans deux scénarios: un déséquilibre majeur du taux de change, ce qui arrive assez rarement étant donné la liquidité de ces marchés, ou une volatilité du marché suffisante pour faire craindre une incidence profonde sur la croissance économique. Ce sont des situations qu'il ne faut pas prendre à la légère.
    En réponse à votre question, monsieur Mckay, il n'est pas inutile de revenir à la déclaration liminaire du gouverneur exprimant notre analyse de la situation actuelle. Nous avons un régime de taux de change flottant qui fait partie de notre système de contrôle de l'inflation, et c'est à travers ce prisme que nous jugeons le taux de change. Ce que nous avons dit dans notre communiqué de presse et dans notre rapport sur la politique monétaire, c'est que, nonobstant les facteurs positifs actuellement en jeu dans l'économie canadienne, la montée du dollar canadien, si elle devait durer, risquerait de faire contrepoids. Nous examinons donc attentivement l'incidence du dollar sur l'économie canadienne et les conséquences inflationnistes de cette incidence. C'est à travers ce prisme que nous analysons la situation.
    Merci, monsieur McKay.
    Je donne maintenant la parole à monsieur Roy, pour cinq minutes.

[Français]

    Bonjour, messieurs Carney et Jenkins.
    Je vous écoutais répondre tout à l'heure à mon collègue M. Laforest que les institutions financières doivent faire preuve de civisme financier parce qu'elles ont des responsabilités élargies. C'était l'essence de votre commentaire. La majorité des observateurs constatent actuellement que, dès qu'il y a eu une reprise, les institutions financières américaines, particulièrement, ont recommencé à agir de la même façon.
    Est-ce trop espérer que de penser que les institutions financières pourraient faire preuve de civisme sur le plan de leurs activités? La crise économique actuelle a été créée par le fait que les institutions financières, particulièrement américaines, ont pris des risques absolument énormes sans avoir les réserves nécessaires pour y faire face.
    On peut dire la même chose des grandes entreprises. On peut parler de GM, de Chrysler et de beaucoup d'autres entreprises qui, finalement, n'ont pas pu faire face à la crise parce qu'elles n'avaient pas suffisamment de réserves et qu'elles n'avaient pas réussi à planifier de façon raisonnable leurs activités. Ford, au contraire, avait les réserves nécessaires et a été capable de faire face à la crise.
    À l'heure actuelle, les observateurs nous disent que le système n'a pas changé, mais pas du tout. On songe, particulièrement en Europe, à imposer une taxe sur le capital des institutions financières. On pourrait faire la même chose dans le cas des entreprises, afin de créer une espèce d'assurance afin que les gouvernements — comme cela a été fait aux États-Unis — ne soient pas obligés d'investir massivement des centaines de milliards de dollars dans une crise provoquée par l'irresponsabilité des dirigeants d'entreprises et d'institutions financières. Je pense qu'on devrait créer une espèce d'assurance.
    Je voudrais savoir, monsieur Carney, si vous avez des discussions à l'heure actuelle avec le ministère des Finances pour la création d'une espèce de taxe sur le capital qui ferait en sorte qu'on ait un fonds pour faire face à l'irresponsabilité de certains dans le secteur financier?
    Je vais d'abord répondre à la dernière partie de votre question.
    Non, nous ne sommes pas en discussion avec le ministère des Finances en ce qui concerne un nouvel impôt sur les transactions ou un impôt sur le capital. Au Canada, il y a environ cinq ans dans certaines provinces, et une dizaine d'années au palier fédéral, nous avions cette taxe sur le capital. Selon moi, l'idée d'une taxe sur le capital est très mauvaise. Par contre, la question de la réglementation du capital est très importante.
    La Banque du Canada, le Bureau du surintendant des institutions financières, notre régulateur, et le ministère des Finances travaillons en étroite collaboration à l'échelle globale pour augmenter les règles de capital pour toutes les institutions financières, mais en ce qui concerne les institutions européennes et américaines...

  (1145)  

    Mais vous ne le faites pas pour les grandes entreprises.
    Nous ne le faisons pas pour les entreprises.
    Pourtant, il s'agit d'un problème semblable à celui des banques.
    À une certaine époque, les grandes entreprises automobiles jouissaient d'un grand capital, mais subissaient des pertes année après année.

[Traduction]

    Personne ne parle de réglementer le capital des entreprises. Nous parlons des établissements financiers à cause de leur rôle central et de leurs répercussions.

[Français]

les retombées sur les autres aspects de l'économie.

[Traduction]

C'est là qu'il faut jouer un rôle de soutien.
    Nous essayons de faire évoluer les normes mondiales du capital vers les normes canadiennes. Nous sommes convaincus que cela se fera mais il y a encore du travail à faire à ce sujet dans ces discussions.
    Merci.
    Brièvement, monsieur Jenkins.
    M. Paul Jenkins : Non, ça va.
    Le président : Merci.
    C'est maintenant au tour de monsieur Dechert.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, gouverneur Carney, et merci de votre déclaration et de votre rapport.
    J'ai lu avec intérêt la page 15 de votre rapport où vous faites l'analyse du rétablissement de notre économie au deuxième et au troisième trimestres. Vous dites que l'économie a commencé à se rétablir au deuxième trimestre, grâce à un certain nombre de facteurs, notamment de nouveaux achats de produits de consommation durables et d'une relance de l'investissement domiciliaire. Vous dites aussi que les stimulants budgétaires ont contribué à stimuler la rénovation.
    Voulez-vous parler du crédit d'impôt pour la rénovation domiciliaire?
    Oui, c'est ça.
    Bien.
    D'après vous, quel est le type de stimulant, en dollars, qui a contribué à l'amélioration de la situation au deuxième trimestre?
    Ce qu'il faut comprendre, c'est que, même si le marché domiciliaire nous tient à coeur et est très important pour l'économie, il n'en représente qu'une petite proportion. Pour l'avenir, nous pensons que le marché du logement sera très ferme. Nous prévoyons son rétablissement durant le deuxième trimestre. Toutefois, la contribution totale du marché du logement ne représente que quelques dixièmes de 1 p. 100.
    Cela dit, même s'il est difficile de quantifier ces choses-là, nous croyons que la conjugaison d'une sortie évidente de la crise — de la dégringolade, si vous voulez —, de la stimulation monétaire et de la stimulation budgétaire, ajoutée à la coordination à l'échelle mondiale, a eu et continuera probablement d'avoir un effet positif sur la confiance des ménages.
    D'accord. Donc, cela a eu un effet de relance sur l'économie.
    À la page 14, vous dites au sujet du deuxième trimestre:
Autre source de demande importante, les dépenses publiques ont vu leur apport à la croissance atteindre 1,2 point de pourcentage (en rythme annuel) pour le trimestre.
Les indicateurs disponibles, y compris la récente reprise de l’emploi, donnent à penser que le PIB réel a recommencé à progresser au troisième trimestre. Les dépenses des ménages ont poursuivi leur redressement, et la contribution des dépenses publiques a pris de l’ampleur.
    De quel type de dépenses publiques voulez-vous parler dans ce contexte?
    Ces paragraphes font référence, de manière très générale, au début des dépenses d'infrastructures dans le cadre du Plan d'action économique du gouvernement.
    Nous pensons — et je crois que c'est important pour guider le comité — que cet effet va faire boule de neige en 2010. D'ailleurs, pour ce qui est de la croissance en 2010 — c'est très important —, ce sera une relance relativement inusitée sur le plan historique. Elle sera un peu plus molle que dans le passé, mais les éléments clés en seront la consommation, qui jouera un rôle plus marqué que d'habitude, le logement, lui aussi un peu plus prononcé que d'habitude mais c'est minime, et le gouvernement. La relance proviendra moins que d'habitude des exportations nettes à cause de l'atonie de l'économie américaine.

  (1150)  

    On peut cependant dire clairement que vous percevez un impact des dépenses gouvernementales?
    Nous commençons à percevoir cet impact, oui.
    Très bien. Merci.
    Monsieur le président, j'aimerais donner le reste de mon temps à M. Bernier.
    Le président: Monsieur Bernier.

[Français]

    Bonjour, monsieur Carney. Je vous remercie de votre présence.
    Les journaux ont rapporté à plusieurs reprises, la semaine dernière, que vous n'hésiteriez pas à intervenir si notre dollar augmentait trop par rapport au dollar américain. En lisant les propos rapportés dans La Presse, on a l'impression que la force d'une devise n'a que des conséquences négatives pour les industries exportatrices et pour la croissance à court terme de l'économie canadienne.
    Toutefois, une monnaie forte a également des conséquences positives. Cela permet aux consommateurs de bénéficier de prix réduits, à cause des importations. Cela permet aux voyageurs vers les États-Unis de voyager avec une monnaie forte. Cela profite aussi aux entreprises qui importent de la machinerie, comme vous le savez, des États-Unis ou d'ailleurs dans le monde. Finalement, cela permet aux investisseurs canadiens investissant à l'étranger d'avoir un meilleur rendement sur leurs investissements.
    Par conséquent, une intervention de votre part aurait aussi des conséquences négatives. Cela signifierait créer des dollars canadiens pour dévaluer notre monnaie aussi vite que le dollar américain est dévalué par la Réserve fédérale américaine. Il est également reconnu que, durant la dernière Grande Dépression, les dévaluations compétitives ont aggravé la crise.
    J'aimerais donc vous demander si vous trouvez aussi qu'il y a des effets à la fois positifs et négatifs à la hausse du dollar. Si oui, comment ferez-vous pour prendre une décision équilibrée qui tienne compte de tous ces effets?
    Je vous remercie de votre question. C'est très important, absolument...

[Traduction]

    Veuillez m'excuser, monsieur Carney. Les députés ont l'habitude de poser des questions qui prennent tout le temps qui leur est accordé. Vous aurez donc cinq minutes pour réfléchir à cela. Nous passons à un député libéral et reviendrons ensuite à un député conservateur, et c'est à ce moment-là que vous pourrez répondre à la question.
    Monsieur Pacetti, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence, monsieur Carney et monsieur Jenkins. Je ne suis pas sûr que vous aurez besoin de cinq minutes pour répondre à cette question.
    J'ai aussi quelques questions à poser sur les monnaies, mais je pense que nous en avons déjà parlé.
    J'aimerais avoir votre avis sur l'annonce récente, vendredi, que le gouvernement américain a fermé sept autres banques régionales. Cette décision n'a pas été abordée, mais je pense qu'elle aura une influence sur l'activité de nos propres banques.
    Sans exprimer d'avis sur ces banques en particulier, vous savez, comme les autres membres du comité, que le secteur de l'immobilier commercial est en difficulté aux États-Unis, en plus du secteur immobilier domiciliaire. Un certain nombre de petites banques régionales sont particulièrement touchées et une série de ces fermetures résulte de pertes dans l'immobilier commercial.
    Dans la plupart des cas, il n'existe aucun lien entre ces établissements et les établissements canadiens.
     Cela allait être ma deuxième question car nos établissements bancaires ont beaucoup d'investissements aux États-Unis. Nous voyons déjà certaines contraintes dans l'octroi de prêts ici, au Canada. Il y a moins d'argent disponible, même si les banques disent qu'il y en a plus. Cela aura-t-il un effet sur les liquidités ou sur la solidité générale des banques canadiennes?
     Les banques canadiennes ont des degrés divers d'exposition au marché américain. Je pense que cette exposition est parfaitement documentée.
    Cela a-t-il un effet sur leur capacité de prêt ici même, au Canada?
    Dans l'ensemble, les banques canadiennes sont très bien capitalisées et elles prêtent de l'argent. Le crédit aux ménages, essentiellement fondé sur le crédit bancaire, a augmenté de plus de 7 p. 100 sur une base annualisée jusqu'en septembre. Le crédit commercial est aussi redevenu positif. Il avait été brièvement négatif en septembre. Il y a donc une capacité de prêt et elle est utilisée.

  (1155)  

    Merci.
    Je voudrais questionner ce que vous venez de dire. Je ne sais pas à quoi vous faisiez référence. Vous avez dit que la Banque du Canada savait ce qui allait se passer et que vous étiez bien préparé. J'examine les différentes projections de la banque et d'autres experts. La seule chose que nous savions, c'était que nous ne savions rien. C'est mon sentiment.
    Dès avril, nous avons dit que l'économie subirait une contraction de 3 p. 100, chiffre qui a été ramené à 2,3 p. 100 en juillet. Je ne sais pas où nous en sommes maintenant. Ça change continuellement. L'économie évolue.
    Je vais répondre rapidement pour vous permettre de poser une autre question.
    Nous savions à l'avance que certains établissements avaient des problèmes — c'est ce que je voulais dire. Pour ce qui est de la révision de la projection de 3 p. 100 à 2,3 p. 100, elle s'explique presque totalement par la révision des chiffres du premier trimestre par Statistique Canada. C'est un changement arithmétique plutôt qu'un changement de projection.
    Lors de votre dernière comparution, c'était quasiment inexplicable. Chaque fois que nous accueillons des économistes, ils nous donnent des chiffres différents et ils nous présentent des prévisions différentes sur la reprise. Nous recevons des chiffres différents de différents secteurs. Je comprends que c'est un peu inévitable, mais les gens essaient de s'y retrouver. Que devrions-nous savoir aujourd'hui sur ce qui se passera dans les six prochains mois?
    La première chose que je peux vous dire — et je ne suis peut-être pas très objectif — c'est que notre projection, d'un point de vue général, s'est avérée exacte. En janvier, nous vous avons dit que, selon nos prévisions, la reprise débuterait au deuxième semestre de cette année, essentiellement à cause des mesures de relance adoptées, et c'est ce qui s'est passé. Quant à savoir si ce serait dans le troisième ou le quatrième trimestre, et quelle serait la vigueur exacte de cette reprise... Nous avons dit cela et nous avons été légitimement interrogés par le comité sur nos raisons. Dans l'ensemble, tout cela a été avéré.
    Que disons-nous pour l'avenir? Nous disons que la reprise sera plus molle que d'habitude et qu'on aura donc moins le sentiment d'une expansion bien robuste, si vous voulez.
    Si je vous demande cela, c'est parce que nous assistons à une reprise sans création d'emplois, si je peux employer cette expression. Devrions-nous nous inquiéter du fait que les banques — pas les banques canadiennes mais internationalement — ne semblent pas se rétablir aussi rapidement? Aux États-Unis, certaines se sont rétablies, d'autres, pas. Y a-t-il un risque que notre reprise soit une reprise en montagnes russes?
    Oui, il y a des risques des deux côtés, absolument. Il y a incontestablement des risques importants provenant de l'étranger, des deux côtés, et des risques provenant des États-Unis. Il risque donc d'y avoir des hauts et des bas.
    Ce que nous avons dit au sujet du marché du travail, et nous sommes encore au tout début de la reprise, c'est que nous percevons des signes préliminaires de stabilisation du marché du travail canadien. Cela dit, comme chacun sait, le chômage a fortement augmenté et le nombre d'heures travaillées est très bas. La moyenne des heures travaillées est très basse. Je n'aime pas employer de jargon économique mais il y a beaucoup de jeu à l'heure actuelle dans le marché du travail canadien. Si vous me permettez une remarque d'ordre général, ce jeu des circuits économiques, ce jeu dans l'activité des entreprises et dans l'utilisation des capacités, signifie que nous connaissons un gros manque à produire, ce qui affecte les pressions ultimes sur l'inflation. C'est en partie pour cette raison que notre politique est telle que vous la connaissez, parce qu'il faudra un certain temps pour éliminer ce jeu.
    Merci.
    Merci, monsieur Pacetti.
    Si vous voulez bien, monsieur Carney, nous pouvons retourner à la question de M. Bernier.
    Voulez-vous la répéter, monsieur Bernier?

[Français]

    Non, ça va.
    Monsieur Bernier a raison, c'est clair. Il y a des conséquences positives et négatives à la vigueur de notre devise. L'important est l'incidence du taux de change, conjugué à tous les autres facteurs internes et externes sur la demande globale et l'inflation au Canada. C'est ce qui détermine la politique monétaire de la Banque du Canada.

[Traduction]

    Merci.
    Nous avons à peu près quatre minutes en ce moment.
    Je voudrais revenir sur ce que vous avez dit, monsieur Carney, au sujet de la restructuration des règles à l'échelle internationale. Dans votre discours de Montréal, vous avez parlé du programme de réforme du G-20 et, en parlant de « Protéger le cycle contre les banques », vous avez dit trois choses intéressantes.
    Vous avez dit qu'il faut « édifier un système qui soit capable de résister à la défaillance de n'importe laquelle des institutions financières ». Cela fait évidemment penser à Lehman Brothers.
    Vous avez dit aussi qu'il y a « une ferme conviction parmi les décideurs publics que, dans les crises à venir, les pertes devront être assumées par les institutions elles-mêmes ». Cela fait évidemment penser à AIG.
    Ensuite, vous avez dit qu'il faut « créer un système où l'accent porte moins sur les institutions financières individuelles et davantage sur les marchés ». C'est très intéressant.
    Dans ce contexte, vous avez mentionné quatre mesures, dans ce discours. Je voudrais que vous en parliez.
    Nous avons évidemment connu une période difficile. Le 15 septembre dernier, Lehman Brothers était sur la sellette, c'était le point focal de la crise financière. Ensuite, il y a eu, et je pense que chacun en conviendra, une réaction excessive au sujet de AIG. On a eu tellement peur que d'autres banques s'effondrent qu'on a réagi de manière excessive.
    Quand vous parlez de créer un système où l'on attache moins d'importance aux institutions financières elles-mêmes et davantage aux marchés, que voulez-vous dire exactement, et comment cela pourrait-il se faire?

  (1200)  

    Je vous remercie de cette question, monsieur le président.
    Très brièvement, l'un des problèmes de la crise était qu'il y avait une série d'établissements à sauver. Le jugement des autorités compétentes a été qu'ils devaient être sauvés parce que leur faillite aurait entraîné une paralysie de marchés déjà fragilisés et aurait provoqué la chute d'autres établissements car tous sont tellement interconnectés.
    Très franchement, c'était une situation inacceptable, c'est-à-dire que la survie des marchés soit devenue tributaire d'établissements individuels. Ce qui est aussi inacceptable, c'est qu'après que cette situation ait été révélée, on continue à gérer le système de la même manière. En effet, si l'on sait que les établissements seront « sauvés », cela change les comportements.
    Que peut-on y faire? Notre très ferme conviction est qu'il faut changer dans plusieurs pays, dont le nôtre, certains aspects de l'infrastructure des marchés de façon à ce qu'ils puissent continuer à fonctionner même si un établissement s'effondre. Autrement dit, et c'est expliqué en détail dans le discours que vous avez cité, nous nous sommes penchés sur les marchés du crédit au Canada. Je veux parler des marchés des opérations de pension contre valeurs et des marchés interbancaires. Nous travaillons avec les acteurs de ce secteur pour voir s'il serait sensé — ça reste à déterminer — de les transférer sur une plate-forme de compensation centralisée. Il y a beaucoup de jargon là-dedans. En bref, les transactions passent par une chambre de compensation qui est une sorte d'organisme de service public bien capitalisé et très robuste existant dans tous les pays. Si l'un des établissements exécutant ces transactions par le truchement de cette chambre de compensation devait faire faillite, pour une raison quelconque, la chambre de compensation serait protégée. Tout ne serait pas perdu et le système, dans son ensemble, serait protégé.
    Je suis désolé de prendre autant de temps pour vous répondre, mais c'est important. Si vous examinez les problèmes qu'avait Bear Stearns, l'un d'entre eux était qu'elle opérait sur ce marché à très court terme. C'était un acteur clé du marché des opérations de pension contre valeurs, et tout le marché, selon le jugement de la Réserve fédérale, et c'était à mon avis le bon jugement, aurait cessé de fonctionner. Si Bear Stearns n'avait pas ouvert ses portes le lundi suivant, cela aurait paralysé le marché des obligations et les autres marchés. Voilà le genre de situation que nous voulons éviter. Cela exigera des changements assez profonds à l'infrastructure des marchés.
    Sur le plan pratique, comment pourrait-on empêcher la faillite d'une future Lehman Brothers?
    Ce serait...
    Ce n'est pas la faillite en soi, ce sont les effets de la faillite sur tout le système.
    L'un des problèmes posés par Lehman Brothers, Bear Stearns et les autres grandes institutions, quand elles font faillite, c'est que les institutions ne savent pas, parmi celles qui faisaient des transactions avec Lehman Brothers, par exemple, quelles sont celles qui ont perdu de l'argent parce que Lehman s'est effondrée. Par conséquent, tout le monde a commencé à se méfier de tout le monde et cela a paralysé le système.
    Si les transactions d'un marché donné se faisaient par le truchement d'une contrepartie centrale, la seule chose qui compterait serait la faillite de la contrepartie centrale. L'institution pourrait bien faire faillite, et ce serait dommage pour elle mais, en ce qui concerne le marché des opérations de pension contre valeurs dans son ensemble, dans mon exemple, comme la contrepartie centrale serait toujours là, personne n'aurait perdu d'argent, y compris la contrepartie centrale, parce que ce serait un système avec garantie. Évidemment, quelqu'un devrait surveiller la contrepartie et s'assurer qu'elle est robuste, mais c'est faisable. Ça se fait pour d'autres marchés et c"est ce qu'on devrait faire.
    La grande question, qui fait l'objet de vifs débats — elle concerne plus les autres pays que le Canada — est de savoir ce qui se passe sur le marché des produits de crédit dérivés qui, selon certaines estimations, représente des dizaines de billions de dollars et dépend totalement de relations bilatérales.

  (1205)  

    J'aimerais poursuivre cette discussion mais mon temps de parole est écoulé. Nous pourrons peut-être la reprendre plus tard.
    C'est à nouveau autour de monsieur McCallum.
    Merci.
    Je suppose que vous conviendrez, puisque c'est un fait, que l'Allemagne, la France et le Japon ont enregistré un taux de croissance positif du PIB au deuxième trimestre de cette année.
    Oui, nous en convenons. C'est un fait.
    Je suppose que vous conviendrez aussi, puisque c'est aussi un fait, que ces pays sont par définition sortis de leur récession au deuxième trimestre de cette année.
    Je ne serais pas aussi catégorique à ce sujet. Comme vous le savez, les définitions de la récession et de la reprise fondées seulement sur le PIB ne sont pas totalement représentatives. Il y a d'autres facteurs plus larges, comme la production industrielle, le chômage, etc...
    D'accord mais, si l'on prend la définition simple d'une récession, si l'on a des trimestres consécutifs de croissance négative puis une croissance positive, d'après cette définition simple, on est sorti de la récession?
    Aux fins de cette discussion, je suis d'accord avec vous.
    Vous pouvez deviner ce que je vais dire. On propage actuellement le mythe que le gouvernement du Canada est en tête du G-7 pour la sortie de la récession. Le gouverneur vient tout juste d'admettre que trois des pays du G-7 viennent d'enregistrer une croissance positive au deuxième trimestre de cette année et, selon la définition que je viens de rappeler, sont sortis de leur récession alors que le Canada enregistrait non seulement une croissance négative mais aussi la croissance la plus négative des quatre autres pays du G-7.
    Ma question sera peut-être un peu politique...
    Des voix: Oh!
    M. John McCallum: ... mais comment peut-on prétendre que le Canada mène le peloton de sortie de la récession parmi les pays du G-7 quand trois des quatre en étaient déjà sortis au deuxième trimestre, ce qui n'était pas le cas du Canada?
    Puis-je demander une décision d'intervenir?
    Quand nous aurons bien saisi les caractéristiques de la récession et de la reprise, ainsi que le temps qu'il faut aux économies pour retrouver le chemin de la croissance, il est probable que nous constaterons que le Canada a retrouvé ce chemin plus rapidement que les autres économies touchées par la crise, y compris les deux économies européennes que vous avez mentionnées, mais c'est une chose que nous pourrons juger avec le temps.
    Merci.
    Je vais maintenant vous poser une question moins politique. Je suis sûr que vous n'allez pas nous dire jusqu'où le dollar devrait avoir monté avant de vous inquiéter mais permettez-moi de vous poser deux questions à ce sujet.
    Je suppose que si l'appréciation du dollar s'expliquait par la hausse des prix du pétrole et des ressources naturelles, cela vous préoccuperait moins que si c'était à cause de... la spéculation, si je peux dire. En outre, je suppose que ce n'est pas seulement le niveau de la hausse qui vous préoccupe, c'est aussi sa rapidité. Mes deux hypothèses sont-elles exactes, c'est-à-dire que vous seriez moins préoccupé si la hausse du dollar résultait des cours des denrées, et que vous êtes particulièrement préoccupé par une hausse très rapide?
    Je vous dirai simplement que ce qui compte pour la Banque, c'est où se situe le dollar, et où se situent tous les autres facteurs intérieurs et extérieurs, et la totalité de leur incidence sur la demande globale et, par conséquent, sur l'inflation au Canada. Évidemment, les termes de l'échange, les cours des denrées, sont un des facteurs externes, mais prendre seulement le taux de change et les termes de l'échange en laissant tout le reste de côté — l'activité aux États-Unis, l'activité au Canada, le marché domiciliaire, etc. — produirait une analyse partielle et ne serait pas conforme à notre mandat relatif à notre cible d'inflation.
    Qu'en est-il de la rapidité?
     Certes, la question de la rapidité est importante, ainsi que son incidence sur la confiance, mais il faut intégrer cela à l'analyse globale.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur McCallum.
    C'est maintenant au tour de M. Kramp.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à vous tous.
    Je suis heureux de voir, d'après vos réponses, que la Banque du Canada n'agit pas en fonction d'hypothèses mais en fonction de faits concrets. Toutefois, je vais vous poser une question un peu hypothétique, mais dans un contexte différent, au sujet de la situation aux États-Unis plutôt qu'au Canada. Évidemment, nous savons que la relation est très bien cimentée: on dit souvent qu'il suffit que l'un éternue pour que l'autre prenne froid, et on parle aussi de la souris et de l'éléphant. Quand on examine la situation financière actuelle des institutions américaines, il est clair que cela a des conséquences sérieuses et sévères sur les politiques de la Banque du Canada et sur l'économie canadienne en général. Pourriez-vous nous dire où en est actuellement le secteur américain des services financiers, d'après votre analyse, et quelles sont les perspectives de croissance de l'économie américaine, à long terme et à court terme?

  (1210)  

    En ce qui concerne les établissements financiers américains, comme vous le savez sans doute, la Réserve fédérale, de concert avec les instances de réglementation, a appliqué un test de stress exhaustif aux 19 plus grands établissements, plus tôt cette année, ce qui a révélé des besoins de capitalisation concordant avec une récession encore sévère jusqu'à la fin de 2010. Ces établissements ont maintenant tous étés recapitalisés et, dans bien des cas, plus que recapitalisés, ce qui veut dire qu'ils ont maintenant plus de capital que ce qui était nécessaire au titre du SCPA, le programme américain de surveillance de la capitalisation. Ces établissements représentent plus de 80 p. 100 de tous les actifs bancaires aux États-Unis. Donc, pour revenir à la question de M. Pacetti, nous verrons que des petites institutions sont en difficulté mais les 19 représentent le coeur même du système américain.
    Cela dit, les gouverneurs et les instances de réglementation du G-7 estiment que les établissements mondiaux de l'extérieur du Canada, qui ont retrouvé la rentabilité, ont maintenant l'occasion de gonfler leurs coussins de capital de façon à fournir les crédits dont a besoin l'économie, et l'on estime qu'ils devraient tenir compte de cela lorsqu'ils envisagent de rémunérer leurs actionnaires et leur personnel, étant donné les perspectives mondiales. Cela vaut autant pour les États-Unis que pour les autres pays.
    En ce qui concerne les perspectives à court terme et à long terme aux États-Unis, l'histoire nous a montré — et nous en parlons dans le rapport — que les pays subissant une crise financière enregistrent souvent une baisse de leur potentiel de croissance et qu'il leur faut longtemps pour se rétablir. Autrement dit, le niveau absolu d'activité économique, la capacité de l'économie, est réduit et, pour ce qui est de la vitesse avec laquelle ils peuvent se rétablir, ça prend du temps. Ce sera certainement le cas aussi pour les États-Unis et c'est l'une des nombreuses raisons pour lesquelles nous prévoyons dans leur cas une reprise inférieure à la norme. De fait, il y a un graphique à la page 11 du rapport qui montre toutes les reprises économiques aux États-Unis depuis la Grande Dépression, et celle-ci sera plus molle.
    Le potentiel à long terme des États-Unis dépendra toujours de l'esprit d'invention et des ressources du peuple américain. Il dépend maintenant aussi des décisions du gouvernement, de la banque centrale dans une moindre mesure, parce qu'il s'agit de décisions à longue échéance, et des citoyens eux-mêmes, et c'est quelque chose que nous allons tous devoir surveiller.
    Ma dernière remarque à ce sujet est que nous estimons que cette crise marque un tournant décisif à bien des égards dans la mesure où il aura un ajustement de la demande aux États-Unis, moins de consommation, et plus d'exportations nettes, et où une plus grande part de la croissance mondiale émanera des grands marchés émergents plutôt que de nos marchés historiques. Donc, à moyen terme, les entreprises canadiennes auraient intérêt à s'implanter sur ces marchés et à développer ces liens.
    Une dernière brève question, s'il vous plaît.
    Vous avez 10 secondes.
    Que pensez-vous du remplacement éventuel du dollar par le renminbi chinois à l'avenir?
    Le dollar américain est la monnaie de réserve de choix. Ce n'est pas un droit, c'est une réalité. Par choix, le dollar américain est la monnaie de réserve et nous nous attendons à ce que cela continue dans l'avenir prévisible.

  (1215)  

    Merci, monsieur Kramp.
    Je donne à nouveau la parole à M. Mulcair.
    Monsieur Carney, dans vos remarques sur la situation aux États-Unis, vous nous avez présenté certaines leçons de l'année passée, certaines des choses que nous avons apprises et certaines des choses qu'on essaie de corriger, du moins peut-on l'espérer.
    Vous avez mentionné l'insistance du gouverneur de la Banque de France sur le fait que nous devons renoncer à certaines des pratiques à haut risque du passé car, selon lui, elles sont en train de revenir en catimini. Il n'est pas exagéré de dire que le président Sarkozy a pris une position de pointe sur la question des abris fiscaux et sur cette question des pratiques du passé. Il était très satisfait de sa première rencontre avec le président Obama lors du G-20 car la question des abris fiscaux, dont vous avez fort justement parlé, avait été soulevée.
    L'une des choses que nous voyons ici, au gouvernement, si tout cet exercice doit avoir un sens... Vous avez aussi légitimement mentionné la différence entre votre rôle comme gouverneur de la banque centrale et le rôle du ministre et de son ministère, ainsi que notre rôle à nous, parlementaires, qui sommes censés donner une forme législative à toutes ces belles idées. Sur quelles autres choses devrions-nous nous pencher?
    M. Menzies a mentionné le travail de M. Jenkins sur les pensions de retraite. Je pense qu'il y a une chose qui transcende les allégeances politiques, c'est l'idée que nous pouvons faire mieux pour protéger les pensions de retraite, et que le long terme a beaucoup à voir avec la stabilité de notre économie et la qualité de vie dans notre société. Quelles sont cependant les autres choses sur lesquelles nous pourrions et devrions nous pencher?
    Par exemple, est-il possible de réfléchir au simple fait objectif que le salaire de bon nombre de cadres supérieurs est aujourd'hui égal à 250 ou 300 fois le salaire moyen d'un salarié? Les membres des conseils d'administration des grandes entreprises ne devraient-ils pas avoir la responsabilité fiduciaire, lorsqu'ils fixent les rémunérations, tous éléments compris, de s'assurer qu'elles reposent sur la valeur vraiment ajoutée à l'entreprise et non pas sur de la spéculation pure et simple sur l'avenir? Y a-t-il quelque chose que nous, législateurs, pourrions faire par voie législative pour mieux protéger les générations futures en ce qui concerne les institutions qui, dans bien des cas, se sont révélées très fragiles?
    C'est une question importante.
    Dois-je en conclure que vous ne voulez pas de réponse sur les pensions de retraite?
    Je crois que nous convenons tous que nous sommes sur la bonne voie en ce qui concerne les pensions de retraite, et nous aurons un rapport important en décembre.
    Exact.
    En ce qui concerne les rémunérations, des principes très soigneusement et attentivement formulés — avec l'appui direct du président Sarkozy — ont été approuvés par le G-20 à Pittsburgh. Ils correspondent à bien des égards aux remarques que vous avez formulées et vont au-delà de la rémunération reliée à la performance à long terme, à la rémunération acquise dans le futur, de façon à s'assurer qu'il y a bien eu une performance à long terme; il y a la possibilité de reprendre la rémunération si la performance s'est avérée éphémère, des réformes de gouvernance qui permettent aux actionnaires, par le truchement des conseils d'administration, et des principes de divulgation permettant aux gens de prendre des décisions éclairées à ce sujet. Tous ces principes ont été approuvés. L'objectif est de les mettre en application très rapidement, au cours des prochains mois. Les organismes de réglementation vérifieront si les pratiques réelles sont conformes à ces principes. Cela sera un critère de l'efficacité du processus car il y a au niveau du G-20 quelque chose qui s'appelle le Conseil de stabilité financière — réunissant les organismes de réglementation, des banques centrales et des trésors publics — qui analysera les divers programmes des différents pays pour voir s'ils sont conformes. Autrement dit, il y aura un examen par les pairs qui permettra d'intervenir auprès des pays dont les pratiques ne concordent pas avec ces principes, ce qui est pertinent dans un...

[Français]

    On pourrait nous pardonner de croire qu'il s'agit du loup dans la bergerie, si on n'est pas en train de le faire par voie législative avec la capacité d'appliquer rigoureusement ces principes, avec un droit de regard du public. Est-ce suffisant ou sera-t-on obligé d'adopter des mesures plus contraignantes? Qu'en pensez-vous?
    Selon moi, il est mieux d'avoir des principes et des processus pour assurer les législateurs que ces principes sont mis en oeuvre au Canada et à l'échelle mondiale. Le processus qui a été défini par le G20 est un processus qui inclut les régulateurs et le Conseil de stabilité financière. Après la première ébauche de ce...

  (1220)  

[Traduction]

La première fois pour ce processus, qui sera...

[Français]

cinq ou six mois, ce sera le temps de poser des questions
    Tous les partis se sont entendus pour attendre au mois de décembre pour discuter des pensions. Dans six mois, on aura une première mouture de ce dont vous venez de parler et on saura mieux si on doit intervenir ou pas.
    Ce sera en février ou en mars, je crois.

[Traduction]

    Merci.
    Je donne maintenant la parole à M. Mckay.
    Merci, monsieur le président.
    Merci encore, monsieur Carney.
    Je voudrais revenir sur cette question d'une reprise économique qui n'y ressemble pas. D'aucuns parlent à ce sujet de reprise sans emplois. Quand je regarde le graphique 14 de votre rapport, je vois qu'il reste une offre excédentaire dans l'économie canadienne. Cela concorde avec l'expérience de ma famille puisque j'ai un neveu récemment diplômé d'une école de génie qui avait un emploi et qui a été mis à pied. Un autre était diplômé d'une école de commerce, avait un emploi et a été mis à pied. Les deux ont du mal à retrouver du travail aujourd'hui, et c'est aussi ce que je constate généralement dans ma circonscription.
    Ce matin, les journaux nous ont appris que les statistiques de l'assurance-emploi sont décalées dans le temps. Aux États-Unis, le taux de chômage, à 9 ou 10 p. 100, est deux fois plus élevé que normalement. C'est la même chose chez nous.
    Je me demande donc si nous allons devoir nous habituer à une sorte de chômage structurel à court terme et à moyen terme. En effet, selon vos propres informations et celles qui nous viennent de l'étranger, il semble que la nouvelle normalité sera un taux de chômage de 8 à 10 p. 100 au Canada, soit sensiblement le même qu'aux États-Unis. Qu'en pensez-vous?
    Je vais prendre cette question, si vous me le permettez.
    À mon avis, l'une des caractéristiques très impressionnantes de l'économie canadienne, au cours des 5 à 10 dernières années, a été sa flexibilité, notamment sur le marché du travail, car nous avons été en mesure de réagir aux chocs. Cela ne veut pas dire que c'était facile mais nous avons réussi.
    Si je repense à la question de M. Mulcair, je crois que nous devons maintenir des politiques qui vont nous aider à continuer d'améliorer ce que j'appellerai l'efficience économique du Canada, notre capacité d'adaptation. La plupart des chocs que nous avons connus au cours des 15 ou 20 dernières années provenaient de l'étranger. J'ai été très impressionné par la flexibilité du marché du travail canadien et je ne souscris donc pas à la thèse que vous venez de présenter concernant un ajustement structurel, un chômage structurel.
    Pour l'avenir, il ne fait aucun doute que nous devrons continuer à nous concentrer sur une certaine restructuration de l'économie canadienne en réaction aux événements récents. J'ai la ferme conviction que nous serons capables de le faire mais cela exigera des efforts soutenus.
    Je suis très impressionné par l'aptitude des Canadiens à s'adapter à l'évolution du marché du travail et je ne conteste donc pas ce que vous dites à ce sujet. Je suis par contre moins impressionné par la réaction du gouvernement au changement de situation et à sa réticence apparente à s'engager dans les nouvelles économies, à encourager les nouvelles économies et les choses de cette nature.
    Il me semble que les Canadiens sont à certains égards laissés à eux-mêmes et qu'ils vont devoir s'adapter tout seuls, qu'ils vont devoir accepter une réduction des heures de travail pendant un certain temps. Ils vont devoir chercher d'autres formes d'emploi, peut-être en acceptant un petit boulot par-ci, un petit boulot par-là, de façon à pouvoir payer leurs factures.
    Pouvez-vous me dire quelle serait la politique la plus efficace à mener, selon vous, pour lutter contre ce risque de chômage irréductible?

  (1225)  

    Le gouverneur a parlé d'initiatives sur le plan financier. En ce qui concerne l'économie réelle, l'une des choses que nous devons continuer à faire est d'abolir les obstacles au commerce interprovincial. Je crois vraiment que c'est une question qui reste importante, même si nous avons déjà fait certains progrès, car il nous faut vraiment avoir une union économique pouvant fonctionner efficacement en réponse aux changements qui surgissent dans le monde et qui continueront à nous affecter. Ce serait certainement un aspect très important.
    L'autre chose dont a parlé le gouverneur pour l'avenir, c'est cette composition changeante de la demande au niveau mondial, qui sera un facteur crucial. Nous avons déjà dit que les taux d'épargne aux États-Unis devront augmenter. Cela signifie que le consommateur américain achètera moins durant cette période d'adaptation et qu'on dépendra plus de la croissance en Asie. Il y a là-bas des marchés qui connaîtront une très forte croissance et je crois que nous bénéficions d'un avantage comparatif dans un certain nombre d'industries, ce qui nous permettra de vendre sur ces marchés.
    Monsieur Laforest.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Carney, je reviens sur votre discours d'hier. Vous avez dit que pour éviter une nouvelle crise financière, la Banque du Canada veut miser davantage sur une réglementation qui se fonde sur des principes et sur la confiance dans le jugement des personnes.
     De façon très terre à terre, on vient de traverser une crise financière qui n'est peut-être pas complètement finie. La Caisse de dépôt et placement du Québec a subi des pertes de 40 milliards de dollars, et une partie importante de ces pertes sont attribuables à l'achat de papiers commerciaux de façon massive. Les réponses qu'on a entendues étaient beaucoup en lien avec le fait qu'on faisait confiance au jugement de certaines personnes. Or, j'ai l'impression que leur jugement n'était pas très bon.
     Quand vous dites que vous voulez éviter une nouvelle crise financière en faisant davantage confiance au jugement des personnes, je me pose beaucoup de questions.
    Je comprends votre inquiétude, mais je n'ai jamais dit cela.
    Alors, c'est la traduction.
    Non, ce n'est pas la traduction.
    La Banque du Canada a une nette préférence pour une réglementation qui se fonde sur des principes et sur la confiance dans le jugement des personnes plutôt que sur une foi aveugle en la sécurité de la surcapitalisation, mais dans le contexte d'un nouveau cadre de réglementation des institutions, d'une augmentation de fonds propres de catégorie un et de la création d'un buffer — pardonnez mon anglicisme — macroprudentiel pour les banques.
    La création d'un nouveau buffer macroprudentiel ou contracyclique sera très importante pour éviter les crises futures et pour réduire les bulles. C'est l'un des aspects très importants du travail du BSIF. Il y a plusieurs facteurs, mais dans le contexte d'un nouveau cadre de réglementation, le cadre du G20, il faut faire confiance au jugement des individus, des régulateurs et des sociétés.
    Ce que je comprends de votre réponse, c'est que vous êtes d'accord avec moi pour dire que beaucoup de personnes ont manqué de jugement.

  (1230)  

    Avant la crise et pendant la crise, oui, absolument.
    Vous avez certainement des comptes en réserve. Y a-t-il encore beaucoup d'argent dans le compte d'opérations de change, qui est l'une des réserves, sinon la principale réserve de la Banque du Canada? Quand avez-vous utilisé ce compte la dernière fois? Comptez-vous l'utiliser pour diminuer la valeur du dollar, si la parité avec le dollar américain est trop proche?

[Traduction]

    Le compte du fonds des changes représente les réserves du gouvernement du Canada. La Banque joue le rôle d'agent du gouvernement du Canada pour gérer ces réserves, lesquelles se sont accumulées progressivement ces dernières années. C'est en partie le résultat de certaines réformes du FMI, le Fonds monétaire international. Pour que ma réponse soit bien claire, j'attire votre attention sur les réponses que nous avons déjà données aux questions concernant les taux de change.
    Pour qu'il n'y ait pas de malentendu, quand on parle d'intervention pour ralentir l'appréciation de la monnaie, il ne s'agit pas d'une utilisation des réserves mais plutôt d'une augmentation des réserves. Il n'y a pas de niveau fixe des réserves.
    Ce que je vous dis là n'est rien d'autre qu'une réponse factuelle directe à la question.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci, monsieur Laforest.
    C'est maintenant au tour de M. Wallace.
    Je remercie le gouverneur et le sous-gouverneur de s'être joints à nous à l'occasion de cette visite semestrielle devant notre comité. J'apprécie les réponses que vous nous donnez depuis une heure et demie.
    Je n'ai pas beaucoup de sujets à aborder et je le ferai sans sectarisme, j'espère.
    Votre estimation du taux de croissance de 3 p. 100 l'an prochain et 3,3 p. 100, je crois, l'année suivante, repose-t-elle strictement sur vos modèles économiques? Cette semaine, un autre organisme nous a dit qu'il y a beaucoup d'opinions différentes à ce sujet. Certains organismes font la moyenne des nombreuses prévisions qui sont publiées.
    Vous fondez-vous donc uniquement sur votre propre modélisation, sans tenir beaucoup compte de ce que font les autres?
    C'est bien plus que de la modélisation économique. Lors de comparutions antérieures, nous avons dit que nous avons toute une série de modèles économiques, plus d'une vingtaine, que nous utilisons pour nous faire une opinion sur les perspectives de croissance au Canada. Toutefois, cette opinion repose aussi sur des réunions avec tous les grands secteurs de l'économie, comme l'énergie, la vente au détail, etc. Je parle là du travail de nos bureaux régionaux sur le terrain — et c'est beaucoup de travail —, des enquêtes que nous effectuons régulièrement et dont nous venons de publier la plus récente. Ensuite, c'est notre conseil de direction qui intervient, avec toutes les informations fournies par la Banque. Avec toutes ces informations, toute cette modélisation technique, il appartient au premier sous-gouverneur, à moi-même et aux quatre sous-gouverneurs du conseil de direction de se former un jugement sur l'orientation de l'économie mondiale et de l'économie canadienne. C'est nous qui sommes chargés de cette projection et elle reflète donc, monsieur Wallace, un amalgame de données techniques, de résultats d'enquêtes, de réunions face-à-face et de jugements individuels.
    Je comprends.
    Il y a à la page 25 un graphique indiquant que la reprise au Canada devrait être plus modérée qu'au cours des cycles antérieurs. C'est un graphique intéressant. Doit-on cependant vraiment comparer cette reprise, ce cycle, aux autres cycles? Je crois que vous remontez jusqu'à 1961, mais l'économie de l'époque, les variables, les circonstances étaient tellement différentes de ce qu'elles étaient dans les années 1970, 1980 ou 1990, que je me demande honnêtement si ce graphique est vraiment utile.
    Je pense qu'il offre plusieurs avantages. La raison pour laquelle nous l'avons inclus est qu'il permet de faire une comparaison avec la page 12, concernant les perspectives aux États-Unis, où la reprise sera la plus lente depuis la Grande Dépression. Si vous pouviez voir tous les détails, qui ne sont pas dans le rapport... Par exemple, la consommation aux États-Unis est très faible par rapport aux reprises du passé. La raison pour laquelle nous remontons aux années 1930 pour les États-Unis et seulement à 1961 pour le Canada est reliée aux données dont nous disposons. Statistique Canada n'avait pas commencé à produire des données trimestrielles et on ne peut donc pas reconstruire ce graphique.
    Nous l'avons publié parce que nous pensons que c'est important, d'abord à titre de comparaison et, ensuite, pour indiquer dans quel contexte se fait la reprise. Il y a autant de gens qui nous disent que la reprise sera trop rapide que de gens qui nous disent qu'elle sera trop lente. Ce qui nous semble certain, à l'horizon des deux prochaines années, c'est que notre reprise ne sera pas aussi forte que les précédentes. C'est un facteur important par rapport à l'ampleur de la capacité excessive que nous avons dans notre économie et, par conséquent, du temps qu'il faudra pour l'éponger, des pressions exercées sur l'inflation et de la formulation de notre politique.

  (1235)  

    Ne serait-il pas préférable d'avoir un graphique sur la relance du G-7, par exemple, pour nous permettre de nous comparer à nos concurrents, dans le contexte actuel, sur la base des conditions relativement similaires auxquels ils sont confrontés? D'ailleurs, ce graphique existe-t-il?
     Nous pourrions produire ce graphique. Ce ne serait pas parfait pour faire une comparaison sur une base trimestrielle mais nous pourrions très bien le préparer et l'envoyer au comité.
    Merci, monsieur Wallace.
    C'est maintenant à monsieur Pacetti.
    Merci, monsieur le président.
    Le comité s'est rendu à Washington en juin pour rencontrer des sénateurs, des membres du Congrès et des organismes de réglementation. Il y avait alors un consensus sur la nécessité d'une réforme de la réglementation mais il n'y en avait pas sur la manière dont elle serait entreprise. On spéculait beaucoup à ce sujet. On a beaucoup écrit là-dessus. J'aimerais savoir ce qui se passe sur la scène internationale et quelle incidence cela aura sur le Canada.
    Merci, monsieur Pacetti.
    C'est une question très importante. Il est crucial que les diverses réformes dont nous avons parlé ce matin soient conformes à l'accord du G-20 et qu'elles soient acceptées au niveau international. La crise est venue de l'étranger et a durement frappé le Canada. Il faut que les autres mettent de l'ordre chez eux, c'est la première chose.
    Un facteur connexe est que nous ne voulons pas désavantager notre système en adoptant des règles que les autres n'appliquent pas. Disons qu'il s'agit là d'une décision appartenant totalement aux autorités canadiennes compétentes mais qu'il serait de loin préférable que les nouvelles règles soient acceptées et mises en oeuvre au niveau international.
    Il y a une longue liste de réformes à mettre en oeuvre. Pour vous en donner une idée, une question-clé concerne le capital des banques: quel sera le nouveau minimum? À quoi ressemblera ce coussin anticyclique? Les dirigeants et le comité pertinent de Bâle s'entendront-ils sur un ratio de levier commun? Quel sera-t-il?
    Les minimums sont plus élevés au Canada. Le Canada a un ratio de levier du capital. Nous partons d'une bonne position à ce sujet mais il faut que les autres acceptent de réduire le risque.
    Quel est l'obstacle?
    Il s'agit de décisions très importantes. Le problème vient en partie du fait que certaines économies étrangères manquent de capital, alors que ces règles accéléreront la nécessité d'accroître le capital. Nous devons donc calibrer les nouvelles études d'impact.
    Ne pourriez-vous pas demander qu'elles soient mises en oeuvre progressivement sur plusieurs années?
    Si, mais il faut que la transition se fasse bien. Nous devons nous entendre là-dessus. Nous essayons d'accélérer. Nous nous sommes entendus sur les principes fondamentaux. Nous allons faire les bonnes études d'impact au cours des six ou neuf prochains mois de 2010. L'objectif convenu explicitement et annoncé publiquement est de prendre une décision finale — les chiffres réels pour ces niveaux — et d'arrêter définitivement les formules d'ici la fin de 2010. C'est pour bientôt.
    La deuxième chose qui est très importante internationalement et qui est difficile à mettre en oeuvre est de transférer les produits dérivés hors cote standardisés sur des plates-formes publiques comme des chambres de compensation ou des bourses. Je parlais tout à l'heure des opérations de pension contre valeurs, qui sont des crédits à court terme, mais il y a aussi les dérivés de crédit et les swaps sur taux d'intérêt. Ça représente des dizaines de billions de dollars.

[Français]

— des billions de dollars, en français.

  (1240)  

[Traduction]

    C'est précisément ce dont je voulais parler aussi. Y a-t-il un blocage en Amérique du Nord ou en Europe ou y a-t-il une adhésion générale — je cherche le bon mot — des pays du G-20?
    Nous déployons beaucoup d'efforts pour nous assurer...
    Pouvez-vous donner un nom?
    Nous déployons beaucoup d'efforts pour nous assurer qu'il n'y a pas de blocage et je peux vous dire qu'un certain nombre de gouverneurs de banques centrales se sont exprimés la semaine dernière sur l'urgence de ces réformes.
    Très bien. Pour revenir aux opérations de pension contre valeurs, comment cela fonctionne-t-il au Canada? C'est la première fois que j'entends parler de cela. Quel est le rôle de la Banque du Canada?
    Les opérations de pension contre valeurs sont fondamentalement des prêts à court terme qui sont garantis par une obligation, la plus simple étant une obligation du gouvernement. Vous possédez une obligation du gouvernement et vous me la donnez pendant deux jours. Je vous donne de l'argent liquide. Vous me payez un taux d'intérêt mais vous êtes protégé.
    Cela devrait être un marché privé. Quand nous prêtons, quand nous injectons des liquidités dans le système, nous le faisons sur la base d'une transaction qui est très concrètement une transaction de type opération de pension contre valeurs, lorsque nous injectons des liquidités exceptionnelles, mais nous ne parlons pas d'un marché de banque centrale, nous parlons d'un marché privé qui est beaucoup plus vaste et profond ailleurs qu'au Canada, et notre position est préjudiciable à notre système, selon nous. La crise offre l'occasion de redessiner ce marché et nous collaborons avec le secteur pour l'aider à...
    Mais il faut que ça se fasse très rapidement car je constate que les ventes à découvert reviennent à la mode.
    Très brièvement.
    Les opérations de pension contre valeurs, ça ne réglera pas la question des ventes à découvert, mais ce sera une réforme réglementaire plus profonde. Le programme de réforme général avance rapidement mais sa mise en oeuvre, même sans retard, nous occupera collectivement pendant l'année 2010, rien que pour guider les attentes.
    Merci.
    Merci, monsieur Pacetti.
    C'est maintenant au tour de monsieur Dechert.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le gouverneur, vous parliez tout à l'heure de la valeur du dollar canadien en disant, à juste titre, que c'est une préoccupation. Nous sommes loin d'être sortis de la crise étant donné ce que cela pourrait faire au secteur de la fabrication du Canada. Toutefois, la valeur du dollar canadien ne représente-t-elle pas en réalité un vote de confiance international à l'égard de l'économie canadienne et de sa gestion par rapport aux autres pays industrialisés?
    La valeur des monnaies, que ce soit la monnaie canadienne ou une autre, est le produit de nombreux facteurs fondamentaux: les échanges commerciaux, les positions des comptes courants, les positions budgétaires, les positions relatives des taux d'intérêt, les attentes concernant les taux d'intérêt et les mouvements de capitaux, etc. Il est donc difficile d'isoler un facteur donné pour une monnaie donnée.
    Toutefois, les gens n'achèteraient certainement par des dollars canadiens s'ils pensaient que l'économie canadienne est dans une situation pire que celle de nos principaux concurrents, je suppose.
    Si le taux de change du dollar canadien reste relativement élevé par rapport au dollar américain, par exemple, quelle est l'importance des taux d'imposition des entreprises au Canada pour maintenir la compétitivité de notre économie? Si le dollar canadien nous emmène dans une direction, que pouvez-vous dire des taux d'imposition et du niveau auquel ils devraient être dans l'avenir proche?
    Je crois que vous aurez l'occasion de rencontrer le ministre des Finances un peu plus tard aujourd'hui et je vous recommande donc... Je préfère ne pas parler de fiscalité.
    Je répète cependant que nous recevons ces décisions, qui sont en dernière analyse des décisions des parlementaires, telles qu'elles sont et que nous en tenons compte dans nos prévisions économiques en même temps que le taux de change. D'autres facteurs externes influent sur les perspectives inflationnistes et nous formulons notre politique dans ce contexte, comme il se doit.
    Merci de cette réponse.
    Que pouvez-vous dire du ratio dette-PIB par rapport à celui des autres pays du G-7? Où se situe-t-il actuellement et où se situera-t-il dans les prochaines années?
    Le Canada est entré dans cette crise avec un ratio dette nette-PIB inférieur à celui de ses pairs du G-7. Selon les estimations actuelles — estimations de l'OCDE ou du FMI — le ratio dette nette-PIB de tous les pays va augmenter à cause des mesures de relance budgétaires mais, si l'on en croit ces analyses externes, on ne s'attend pas à ce que le Canada perde sa position de pays ayant le ratio le plus faible à court terme.

  (1245)  

    Me reste-t-il du temps?
    Il vous reste deux minutes.
    Madame Block voulait poser une question, et Daryl Kramp aussi, je crois.
    Monsieur Carney, j'ai une brève question à vous poser dans le sillage de notre discussion de tout à l'heure
    Quand vous parlez de protéger le cycle contre les banques, vous voulez dire que les parties devront mettre plus de capital dans la plate-forme, si j'ai bien compris, et plus de réserves. Ce sera un système plus stable mais, si je comprends bien, la quantité totale de crédit sera réduite. Ai-je raison et, dans l'affirmative, cela ne présente-t-il pas un autre problème de politique fondamentale? Je pose cette question parce que le comité s'est également penché sur l'accès au crédit. Si vous pouviez me répondre brièvement, je vous en serais reconnaissant.
     Le résultat d'équilibre général ne signifie pas nécessairement que le crédit disponible pour les ménages et les entreprises sera réduit par ces réformes, et cela sera examiné dans l'étude d'impact qui est exécutée par ce comité de Bâle, le comité international. C'est partiellement ce que cela signifie pour les banques, mais aussi ce que signifient tous ces changements collectivement: quelle sera la conséquence probable pour les économies et pour la disponibilité du crédit?
    L'autre question, monsieur le président, est de savoir s'il sera plus attrayant, en termes relatifs, de prêter du capital plutôt que d'effectuer des transactions sur les marchés de capitaux. L'une des choses que la crise a révélées, c'est que la quantité de capital mise de côté en vertu des réglementations de Bâle II était très faible par rapport à l'activité des portefeuilles de transactions et des marchés de capitaux. Cela a été très rapidement corrigé par un ajustement du capital des portefeuilles de transactions. C'est le Surintendant des institutions financières qui s'occupe de ces questions et je crois que la nouvelle règle entrera en vigueur au premier trimestre. Il y a déjà un accord mais il entre effectivement en vigueur maintenant.
    Je vous remercie de cette précision.
    Je donne la parole à M. McCallum.
    Je suis heureux d'avoir une troisième chance.
    Ma question va peut-être vous sembler très facile. On voit régulièrement réapparaître, c'est cyclique, l'idée d'abandonner les taux de change flottants et l'établissement de cibles pour l'inflation, ainsi que l'idée d'adopter une monnaie nord-américaine commune, ou la dollarisation, ou un taux de change fixe. Cette idée avait été avancée lorsque le taux de change était très faible. J'ai lu la semaine dernière une argumentation à ce sujet dans The Globe and Mail. Comme vous le savez sans doute, j'ai toujours été en faveur du statu quo et je me demande si vous pourriez expliquer pourquoi vous croyez qu'un taux de change flottant et une cible pour l'inflation constituent une politique préférable pour le Canada, pour des raisons d'ordre économique, qu'une monnaie nord-américaine commune.
    Merci. C'est une question très importante. Je sais que vous êtes à l'origine de certaines recherches importantes à ce sujet.
    La première fois que je me suis présenté devant le comité, c'était à l'automne, il y a environ deux ans, et nous avions brièvement discuté de cette question mais nous n'avons certainement rien vu depuis lors, pendant le déroulement de la crise, qui modifie notre opinion que le Canada est bien servi par cette double politique de taux de change flottants et de cible sur l'inflation. En fait, ce que nous avons vu a renforcé notre opinion.
    Permettez-moi de parler brièvement des avantages d'un taux de change flottant. Premièrement, je pense qu'il faut convenir qu'il y aura des chocs dans l'économie réelle — au Canada, internationalement, les cours des denrées, etc. — et que notre économie devra s'y adapter d'une manière ou d'une autre. Le taux de change constitue d'abord un pare-chocs qui s'ajuste rapidement en temps réel à ces chocs, ce qui aide notre économie à avancer dans la bonne direction. L'autre solution consisterait à apporter des changements massifs aux salaires et aux prix, ce qui est beaucoup plus pénible et beaucoup plus lent que les ajustements pouvant résulter du taux de change, comme vous le savez.
    Nous avons pu le constater lors de la crise asiatique, du fléchissement causé par la crise asiatique. La valeur de notre dollar a changé en prévision d'un fléchissement qui allait finalement toucher les cours des denrées, facteur important, ce qui allait aider notre économie. Plus récemment, la valeur du dollar a changé en prévision d'un raffermissement des denrées, du point de vue des termes de l'échange et des avantages relatifs, ce qui a encore une fois aidé notre économie à s'adapter.
    Avec un taux de change fixe, l'adaptation est encore nécessaire mais elle se fait plus péniblement. On le constate dans les effets régionaux de la crise aux États-Unis et en Europe où le besoin d'adaptation est très réel mais beaucoup plus pénible à cause d'un taux de change fixe. Il est bien préférable d'avoir un taux de change flottant ou d'avoir effectivement la même composition industrielle, la même composition de l'économie, dans les différents pays faisant partie de la même zone monétaire.
    Un autre facteur que nous voulons souligner est que les avantages des taux de change fixes sont en grande mesure microéconomiques — le passage au taux de change fixe, des coûts de transaction plus bas, moins d'incertitude et, dans certains cas, des coûts d'emprunt plus bas et une plus grande crédibilité des politiques. Eh bien, le gouvernement du Canada — et cela vient juste d'être renforcé par la souscription en dollars américains faite par le gouvernement au cours des trois derniers mois — a l'un des taux d'emprunt les plus bas au monde; c'est l'une des meilleures cotes de crédit au monde. Il nous serait bien difficile d'améliorer nos coûts d'emprunt, comme beaucoup de pays européens l'ont fait et, du point de vue de la crédibilité de nos politiques, je pense que nous n'avons rien à envier à personne tant sur le plan monétaire que sur le plan budgétaire.
    Il est donc difficile de voir les avantages, mais il est facile de voir les inconvénients.

  (1250)  

    Merci.
    Une dernière question. Je partage votre opinion mais que dites-vous à l'entreprise qui a besoin de certitude et qui ne voudrait rien de plus qu'un dollar fixé pour toujours à 92 ¢?
    Nous lui disons d'abord que nous mènerons notre politique de façon à produire le maximum de certitude sur l'inflation. Cette cohérence politique réduit l'incertitude globale pour l'entreprise. Elle réduit les coûts d'emprunt, le coût du capital, ce qui l'aide.
    En outre, nous lui disons que les mouvements du taux de change donnent des informations importantes sur l'évolution future des forces économiques et constituent des signaux importants. Ils offrent également, comme le disait M. Bernier, certains avantages en matière d'investissement, entre autres choses.
    Du point de vue de l'économie dans son ensemble, et c'est de cela que nous et vous devons tenir compte, il est parfaitement clair à nos yeux que les avantages d'un taux de change flottant, conjugués à une politique monétaire crédible — c'est crucial — sont largement supérieurs aux avantages apparents d'un taux de change fixe.
    Merci.
    Je donne la parole à M. Kramp.
    Merci.
    Comme nous arrivons à la fin de cette séance, j'aimerais profiter de cette occasion, en mon nom propre et au nom du gouvernement du Canada ainsi que, je suppose, de la grande majorité des personnes rassemblées ici et d'un très grand nombre de Canadiens, pour vous remercier et vous dire que nous apprécions la diligence avec laquelle vous avez réagi à cette situation inédite et largement imprévue. Nous vous en remercions mais je me permets d'ajouter aussi qu'il y a des préoccupations. J'aimerais savoir combien d'essence il restait dans le réservoir avant de tomber à sec?
    Autrement dit, M. McCallum et d'autres ont dit que vous aviez divers instruments à votre disposition pour faire face aux difficultés que nous avons rencontrées, qu'il s'agisse des taux d'intérêt ou de la détente quantitative dont vous avez parlé. En bon joueur de poker, avez-vous encore un as dans votre manche? Aviez-vous encore des cartes à jouer si la situation avait empiré, et en auriez-vous encore si elle devait ressurgir?
    Merci de votre question.
    Oui. Nous n'avons cessé de souligner que la Banque du Canada conserve beaucoup de souplesse dans la conduite de la politique monétaire. Vous vous souviendrez que nous avons constamment rappelé les principes fondant notre politique de taux d'intérêt très bas — notre politique dite non conventionnelle. Nous avons dû employer ces instruments au-delà de l'engagement conditionnel avec lequel vous êtes familier mais nous avons certainement réservé toutes nos autres options. Je souligne à nouveau notre détermination à avoir recours à ces options si la situation l'exige afin d'atteindre notre cible sur l'inflation mais nous ne le ferons que dans la mesure où c'est nécessaire pour atteindre la cible de l'inflation.
    Pour reprendre votre analogie, le réservoir est plein. C'est comme les camionnettes qui avaient deux réservoirs: le réservoir des taux d'intérêt est vide et nous sommes maintenant passés au réservoir plein des mesures non conventionnelles. Nous ne l'avons pas encore utilisé.
    Pour l'information des membres du comité, je confirme que nous estimons que notre politique est adéquate pour atteindre la cible, en restant à 0,25 %. Nous prévoyons rester là jusqu'à la fin de juin 2010, eu égard aux perspectives actuelles de l'économie mondiale et de l'économie canadienne, afin d'atteindre cette cible d'inflation.

  (1255)  

    Très bien. Merci.
    Je conclus en vous disant que si vous avez des idées quelconques au sujet d'autres mesures réglementaires que nous pourrions envisager pour nous préparer à conserver un niveau additionnel de carburant dans le réservoir, nous en serions très reconnaissants.
    Voulez-vous répondre à cela, gouverneur?
    Je pense que cette question méritera une réponse exhaustive au moment voulu. Notre rôle est de laisser le gouvernement jouer le sien.
    Merci.
    Nous allons conclure avec M. Mulcair.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je suis sûr que le ministre apprécie votre sollicitude, mais il reste qu'une des raisons d'être de ces rencontres est justement de pouvoir profiter de votre situation unique. Comme d'autres collègues l'ont dit déjà — et je le dis moi-même très sincèrement —, nous avons confiance en vous, en votre capacité d'analyser les faits et de nous faire des recommandations, le cas échéant, non seulement pour réagir à ce que nous avons déjà fait mais aussi, possiblement, pour nous guider face à l'avenir.
    Je veux revenir sur la première question que je vous ai posée, la première fois que nous nous sommes rencontrés, et qui demeure pour moi une préoccupation. Même si vous regardez tout à travers le prisme d'une inflation de 2 p. 100, êtes-vous préoccupé à l'idée qu'en changeant de réservoir d'essence et en imprimant plus d'argent, on puisse nous-mêmes générer de l'inflation? Avec les dollars qui entrent, le Canada est devenu une « puissance pétrolière ». Va-t-on subir le même genre d'instabilité qu'ont connue les Pays-Bas lorsque, dans les années 1950, ils ont généré énormément de richesse à partir du pétrole, mais ont anéanti des pans entiers de leur économie, notamment leur secteur manufacturier?
    Y a-t-il des questions qui vous causent de l'insomnie et que nous devrions étudier?
    Merci.
    La grande inquiétude de la Banque du Canada, à moyen terme, est la restructuration profonde de l'économie mondiale. Nous venons de sortir d'une grande récession, à l'échelle mondiale. Pour le Canada, ça implique que les sources, en matière de demande, vont changer. Il est et il sera nécessaire à l'avenir d'apporter plusieurs changements à nos stratégies de commerce et à nos marchés, ce qui va avoir des conséquences sur les pouvoirs législatifs.
    À la Banque du Canada, nous ciblons l'inflation, mais nous travaillons aussi en étroite collaboration avec le Bureau du surintendant des institutions financières, le ministère des Finances et nos homologues à l'échelle mondiale. Il faut que nous réglions toutes ces questions concernant le système financier. C'est absolument nécessaire.

[Traduction]

    C'est un plaisir de discuter avec vous, comme d'habitude, gouverneur Carney.
    Dans les deux minutes qui nous restent, j'aimerais vous demander d'étoffer un peu cette réponse. Vous nous avez donné une idée de ce qu'il faut faire. Craignez-vous que nous ayons oublié quelque chose? Que cette profonde récession que vous venez de décrire ne soit que la première de deux ou trois si nous n'avons pas pris toutes les mesures nécessaires? Y a-t-il un danger réel de retomber dans un trou une fois que nous serons sortis de celui-ci?

  (1300)  

    Le danger est que la reprise en dehors de nos frontières soit trop molle, ce qui exigerait une restructuration encore plus profonde de notre économie. Il y a aussi un risque — dans l'esprit de la discussion d'aujourd'hui — que le programme du G-20 ne soit pas mis en oeuvre correctement à temps. Cette discussion pourrait rapidement devenir très technique. Il serait très utile pour nous tous que les gens soient bien informés sur les aspects techniques clés de la situation.
    Oui, le diable se niche dans les détails mais c'est un programme important. Il n'a été approuvé que par les chefs d'État. Le Canada peut être un chef de file à ce sujet mais il faut que les autres agissent aussi. Pour revenir à la répartition des tâches, la nôtre est de travailler avec ceux qui ont la responsabilité première de veiller à ce que ce travail soit fait.
    Merci, monsieur Mulcair.
    Je vous remercie, monsieur Carney et monsieur Jenkins, d'être venus répondre à cette série de questions difficiles et sérieuses. Nous vous remercions sincèrement d'avoir accepté de passer deux heures complètes avec nous. Nous attendrons avec plaisir votre prochaine visite, dans six mois ou plus tôt si vous le souhaitez.
    Chers collègues, je pense que nous avons eu une excellente discussion aujourd'hui. Nous accueillerons cet après-midi le ministre des Finances et nous nous reverrons donc à 15 h 30.
    Merci à nouveau.
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