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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 031 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 19 octobre 2006

[Enregistrement électronique]

  (0915)  

[Traduction]

    Je tiens d'abord à remercier tous les participants à cette séance car je sais que vous avez tous des programmes très chargés. Je crois cependant que le temps que vous passerez avec nous ne sera pas perdu car nous sommes tous très intéressés par ce que vous avez à nous dire et je vous remercie sincèrement d'être venus ce matin.
    Je vais vous expliquer ce que nous allons faire aujourd'hui durant cette 31e réunion de notre comité pendant cette législature. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous tenons aujourd'hui une table ronde consacrée à la question générale de la politique commerciale du Canada. Chacun des participants, tout comme les députés, a reçu un exemplaire des questions qui nous intéressent. La réunion d'aujourd'hui sera assez informelle et je donnerai la parole à quiconque voudra intervenir, y compris parmi les témoins. D'ailleurs, j'accepterai aussi que les témoins s'interrogent mutuellement s'ils le veulent -- mais nous ne voulons pas que les députés deviennent les principaux témoins, ce qui pourrait être inquiétant.
    Au début de cette semaine, des agents ministériels sont venus nous parler de la politique commerciale du Canada. Évidemment, ils n'ont pas pu nous dire ce qu'ils pensent qu'elle devrait être car leur rôle est d'exécuter le mandat de leur ministère. Vous, par contre, avez toute latitude pour nous dire ce que devrait être notre politique commerciale, et c'est de cela que nous allons discuter.
    Après la réunion, vous êtes invités à déjeuner avec nous, ce qui donnera aux membres du comité la possibilité de discuter informellement avec chacun d'entre vous.
    Comme je l'ai dit, il n'y aura pas d'ordre d'intervention très structuré. Je donnerai la parole aux membres du comité ou aux autres participants qui voudront poser une question ou faire des remarques.
    Avant de commencer, j'ai une question à poser.
    Malgré l'entente à laquelle nous étions parvenus lors de la dernière réunion, il ne faut apparemment adopter une motion pour le paiement du déjeuner d'aujourd'hui.
    Quelqu'un peut-il présenter une motion à ce sujet?
    Je présente cette motion.
    Ted Menzies présente la motion. Êtes-vous d'accord?
    Je propose que Leon paie le déjeuner.
    D'accord? Que Ted Menzies paie... non, cessons de plaisanter, Ted, car vous savez que cela a causé des malentendus lors de la dernière réunion.
    Vous avez raison, plus de plaisanteries.
    (La motion est adoptée [Voir le Procès-verbal])
    Il est 10 heures 45 et nous avons quelques questions à régler pendant une quinzaine de minutes. Tout d'abord, nous devons avoir une brève discussion au sujet du projet de loi C-24 sur le bois d'oeuvre, pour savoir comment nous commencerons mardi prochain. Je ne pense pas qu'il y ait grand-chose à discuter mais Peter Julian a aussi deux motions à présenter. L'une a été adoptée lors de la dernière réunion du comité mais sous une forme qui ne permettait pas vraiment au greffier de préparer le rapport et nous allons donc devoir y revenir.
    M. Julian, si vous voulez présenter votre deuxième motion aujourd'hui... En fait, il serait préférable que vous la présentiez lors de la prochaine réunion mais c'est à vous de décider.
    Continuons, donc. Je vais demander à chaque participant de nous donner quelques brèves informations biographiques puis de nous dire très brièvement qu'elle devrait être la politique commerciale du Canada, de manière très générale, mais sans faire de déclaration officielle.
    Nous allons faire un rapide tour de table pour que chacun puisse se présenter sans faire de longs discours. En ce qui concerne les députés, donnez simplement votre nom et votre circonscription.
     Je m'appelle Leon Benoît et je représente la circonscription de Vegreville--Wainwright en Alberta.
    M. Menzies.
    Vous croyez vraiment qu'un politicien peut être aussi bref?
    Intervention irrecevable. Votre nom et votre circonscription, M. Menzies.
    Je m'appelle Ted Menzies et je représente la circonscription de Macleod au sud de l'Alberta.
    Commencez, M. Myers.
    Je m'appelle Jason Myers et je suis vice-président principal et économiste en chef des Manufacturiers et exportateurs du Canada.

[Français]

    Bonjour. Mon nom est Serge Cardin. Je suis le député de la circonscription de Sherbrooke, au Québec. La circonscription de Sherbrooke vous dit peut-être quelque chose, car c'est celle du premier ministre Jean Charest, au provincial. Dans ce contexte, nous sommes un peu opposés.
     J'ai une expérience dans le domaine comptable. J'ai travaillé pour des gens d'affaires et j'ai été en mesure de voir aussi des gens qui travaillaient dans le domaine de l'importation et de l'exportation. Ils faisaient affaire avec les différents ministères du gouvernement fédéral, comme Exportation et développement Canada, ou EDC, par exemple. On aura la chance d'en parler aujourd'hui.

[Traduction]

    Un rappel pour ceux d'entre vous qui n'avez pas l'habitude de nos travaux et qui avez peut-être besoin de l'interprétation. L'anglais passe sur le canal 1, le français sur le canal 2, et l'intervention d'origine, car l'acoustique de cette salle n'est pas idéale, sur le canal 3.
    Allez-y, M. André.

[Français]

    Mon nom est Guy André. Je suis le député de Berthier—Maskinongé depuis 2004.
     C'est tout.

  (0920)  

    Merci.

[Traduction]

    Je m'appelle Peter Julian. Je suis le critique des politiques commerciales pour le NPD et je représente la circonscription de Burnaby—New Westminster dans la belle province de la Colombie-Britannique.
    Bonjour, monsieur le président et chers invités.
    Je m'appelle Ron Cannan et je représente la circonscription de Kelowna—Lake Country du sud de la Colombie-Britannique où nous produisons des vins excellents et des pommes.
    Je sais que Sherbrooke est une grande collectivité, beaucoup de mes bâtons de hockey y étaient fabriqués.
    Si quelqu'un veut dire plus que son nom et sa circonscription, c'est de la publicité payante. L'argent devra m'être versé directement et vous serez facturé à la seconde.
    M. Maloney.
    Je m'appelle John Maloney et je représente la circonscription de Welland dans la région de Niagara, en Ontario.
    Merci.
    M. Hodgson.
    Bonjour. Je m'appelle Glen Hodgson et je suis vice-président et économiste en chef du Conference Board of Canada. J'ai eu une carrière mouvementée puisque j'ai travaillé auparavant pour le ministère des Finances, Exportation et développement Canada ainsi que le Fonds monétaire international.
    Le sujet d'aujourd'hui est l'un de mes préférés, monsieur le président.
    Parfait.
    M. Murphy.
     Je m'appelle Mike Murphy et je suis vice-président exécutif, Politiques, de la Chambre de commerce du Canada.
    Merci.
    M. Temelkovski.
    Je m'appelle Lui Temelkovski et je représente la circonscription de Oak Ridges—Markham, au nord de Toronto.
    M. Eyking.
    Je m'appelle Mark Eyking et je représente la circonscription de Sydney—Victoria au Cap Breton, en Nouvelle-Écosse, sur la côte atlantique.
    Merci.
    M. Tomlin.
     Je m'appelle Ben Tomlin et je suis un boursier de la Fondation C.D. Howe à l'Institut C.D. Howe. Je fais aussi des études de doctorat en commerce international et en finances.
    Puis-je aussi demander aux chercheurs et au greffier de se présenter, très brièvement?
    Je m'appelle Peter Berg et je fais partie du Service d'information et de recherche parlementaires. Je suis aussi membre du personnel de ce comité depuis un certain temps -- depuis 2000.
    Je m'appelle Mike Holden et je fais aussi partie du Service d'information et de recherche parlementaires. Je suis attaché à ce comité depuis quatre ans.
    Monsieur le greffier.
    Je m'appelle Norm Radford et je travaille à la Chambre des communes depuis une vingtaine d'années. Je suis greffier de ce comité depuis quelques semaines.
    Merci.
    Avant d'aller plus loin dans les présentations, je dois vous signaler que nous avons au fond de la salle une classe d'étudiants interprètes de l'université d'Ottawa. Je leur souhaite la bienvenue.
    Je dois admettre que certains d'entre nous dépendons plus que d'autres des interprètes. Je ne sais pas ce que vous réserve votre avenir mais je vous souhaite bonne chance. C'est une très belle profession.
    Nous allons maintenant ouvrir la discussion en faisant un tour de table qui débutera avec M. Myers. Pourriez-vous nous donner tout d'abord un peu plus d'informations sur votre rôle au sein de l'organisme que vous représentez puis nous dire, très brièvement, ce que devrait être la politique du Canada en matière de commerce international, d'après vous?
    Merci beaucoup, monsieur le président et membres du comité de nous avoir invités aujourd'hui.
    Je crois que nous sommes tous convaincus non seulement que cette question est importante mais aussi qu'elle revêt une importance croissante. Notre aptitude à formuler une politique efficace de commerce international sera très importante du point de vue non seulement de la compétitivité future de nos entreprises mais aussi de notre implantation sur les nouveaux marchés étrangers.
    Les Manufacturiers et exportateurs du Canada sont une association existant depuis une dizaine d'années. Elle a été créée par la fusion de l'Association des manufacturiers canadiens et de l'Association des exportateurs canadiens.
    Ce phénomène est intéressant en soi. L'AMC avait été fondée en 1871 dans le but précis de lutter contre le libre-échange avec les États-Unis et de protéger l'industrie canadienne. L'AEC avait été fondée dans les années 40 pour ouvrir les marchés mondiaux aux biens et services canadiens.
    Le fait que ces deux organisations se soient réunies est très révélateur de la nature du secteur manufacturier canadien et de notre industrie dans son ensemble. Près des deux tiers des produits fabriqués aujourd'hui au Canada sont exportés, avant tout aux États-Unis. Cela veut dire que nos entreprises ne pourront réussir au Canada que si elles réussissent sur les marchés internationaux.
    J'ai travaillé avec l'AMC et l'AEC pendant une quinzaine d'années et j'ai collaboré étroitement avec certains de mes collègues qui sont dans cette salle au sujet des questions de politique commerciale.
    Permettez-moi de vous présenter cinq ou six des éléments que devrait comporter notre politique commerciale.
    Tout d'abord, on ne devrait pas parler de politique commerciale mais plutôt de politique du commerce international car, dans le monde d'aujourd'hui, nos entreprises doivent absolument oeuvrer à l'échelle internationale.
    Le succès de nos entreprises -- quelles qu'elles soient -- dépend des exportations, dépend des importations, dépend de l'investissement international et dépend de leur aptitude à obtenir des contrats de production mondiaux et à attirer des investissements étrangers. Il dépend de services, de technologie et de partenariats à l'échelle mondiale. Aujourd'hui, le commerce est mondial. On peut bien parler de commerce intégré mais il s'agit en fait de commerce mondial et cela devrait se refléter dans notre politique nationale.
    Deuxièmement, le rôle du gouvernement dans ce contexte est de négocier des accords avec d'autres pays afin d'assurer un accès objectif des entreprises, des exportateurs et des investisseurs du Canada aux marchés étrangers.
    Le but de notre politique devrait être d'effectuer cette négociation, mais un autre élément très important concerne les services commerciaux dispensés par le gouvernement et par ses agences pour appuyer les entreprises canadiennes présentes sur les marchés mondiaux.
    Troisièmement, nous devrions réagir aux marchés internationaux en fonction de la situation de notre propre économie. Notre attitude à l'égard des États-Unis et du commerce en Amérique du Nord devrait être notre priorité étant donné la relation de plus en plus intégrée qui s'est établie au cours des 15 dernières années. Nous devons aborder le marché nord-américain différemment des autres marchés étrangers, mais sans négliger ces derniers. Cela devrait être un autre volet crucial de notre politique du commerce international.
    Quatrièmement, notre politique du commerce international doit être intégrée du point de vue des ministères et organismes fédéraux et provinciaux. Je crois que nous avons beaucoup à faire à ce sujet.
    En outre, elle doit être intégrée à nos politiques nationales. Comment pourrons-nous tirer parti des marchés asiatiques si nous ne bâtissons pas de bonnes infrastructures dans notre propre pays -- concernant par exemple les transports vers les ports de nos côtes ouest et est -- et si nous n'avons pas des systèmes logistiques nord-américains nous permettant d'importer, d'exporter et de faire des affaires non seulement avec l'Asie mais aussi avec les États-Unis? Voilà un exemple d'intégration indispensable sur notre propre territoire.

  (0925)  

    Je crois aussi que nous devons avoir une approche intégrée en ce qui concerne l'application des règles commerciales. C'est bien beau de négocier des règles mais nous sommes déficients quand il s'agit de les faire respecter. Cela doit être un autre élément très important de notre politique.
    Finalement, qu'il s'agisse de négocier des accords internationaux ou de dispenser des services aux entreprises, notre action doit être axée sur le client, sur les entreprises canadiennes qui font des affaires dans le monde entier. Comme dans toute bonne entreprise, le service doit être adapté aux besoins du client. Ce que fait le gouvernement en matière de politique et de services aux entreprises doit être conçu pour fournir des solutions aux entreprises présentes sur les marchés étrangers.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Myers.
    M. Hodgson, pouvez-vous nous donner quelques précisions sur votre rôle au sein de l'organisme que vous représentez puis nous dire à quoi devrait ressembler la politique commerciale du Canada?
    Jay vient d'ouvrir le débat avec beaucoup de talent. Au lieu d'aborder six éléments, je me limiterai à trois car je reviendrai sur certaines de ses remarques.
    Tout d'abord, je dois dire au comité que le Conference Board est sur le point de publier la plus grosse étude qu'il a jamais réalisée. Il s'agit d'un projet appelé le Projet Canada -- un titre un peu grandiose -- financé en grande partie par le secteur privé il y a trois ans. Nous avons produit dans ce contexte 26 rapports de recherche jusqu'à présent et ce n'est pas fini. Nous publierons en janvier trois volumes, le premier concernant la place du Canada dans la mondialisation -- comment pouvons-nous rester un pays riche --, le deuxième, les ressources, et le troisième, les villes comme moteurs de la prospérité.
    Peut-être plus important encore pour votre comité, Maclean's y consacrera une édition complète à la mi-novembre comme il le fait pour les universités ou pour d'autres questions.

[Français]

    Le magazine L'Actualité fera à peu près la même chose en français. Je pense que l'article de L'Actualité sera moins long, mais qu'il aura la même qualité et transmettra le même genre de message.

  (0930)  

[Traduction]

    Ce projet avec Maclean's nous enthousiasme car il nous donne l'occasion de partager avec l'ensemble du pays, ainsi qu'avec des leaders d'opinion comme vous-mêmes, notre réflexion sur la place du Canada dans le contexte de la mondialisation.
    En bref, nous allons énoncer une série de stratégies fondamentales pour créer de la richesse au Canada, et l'une des pierres angulaires en sera la politique sur le commerce et l'investissement. C'est un élément crucial d'une stratégie nationale de productivité et, à cet égard, je suis complètement d'accord avec mon collègue, M. Myers.
    Jay et moi-même avons eu de nombreux débats animés depuis 15 ans sur ces questions et je peux vous dire que nous sommes parfaitement d'accord sur l'idée que formuler une politique cohérente sur le commerce international et l'investissement est essentiel pour élaborer une stratégie de productivité axée sur la création de richesse au Canada.
    Le commerce est important pour deux raisons essentielles. D'abord parce qu'il nous permet de tirer parti d'un plus grand nombre de marchés étrangers en nous donnant accès à des milliards plutôt qu'à des dizaines de millions de consommateurs. Évidemment, soyons honnêtes, cela a aussi pour effet d'intensifier la concurrence au Canada même.
    De par leur formation, les économistes sont sensibles à l'importance du commerce mais ce dont nous parlons ici, c'est de préserver le dynamisme de nos entreprises en les exposant à la concurrence internationale et en s'y adaptant plus rapidement. Hélas, force est bien de reconnaître que nous sommes endormis depuis une dizaine d'années. Je reviendrai là-dessus dans un instant.
    Notre message fondamental est que le commerce et l'investissement doivent être au coeur même de l'élaboration d'une stratégie cohérente de productivité nationale.
    Deuxièmement, je conviens avec Jay que le commerce et l'investissement sont inséparables. Ils sont complètement intégrés. De fait, on parle de plus en plus au gouvernement de « commerce intégrateur », expression inventée il y a environ quatre ans quand j'étais à EDC pour tenter de souligner le caractère inséparable des importations et des exportations, de l'investissement et du commerce, des services et des biens. Tous ces éléments sont aujourd'hui complètement intégrés et notre politique commerciale doit donc être formulée en conséquence -- je parle ici des politiques formulées par le gouvernement et de la manière dont vous négociez.
    Nous sommes toujours dans le monde du mercantilisme où l'on estime que les exportations sont bonnes et les importations, mauvaises, un monde où l'on veut attirer un petit peu d'investissements mais à nos conditions. Ça ne marche plus comme ça, aujourd'hui. Le monde est déjà passé à autre chose en laissant le Canada derrière lui. Nous sommes devenus un traînard plutôt qu'un chef de file en ce qui concerne le commerce international et il est temps de retourner dans le peloton de tête.
    Cela constitue peut-être d'ailleurs notre troisième message car, depuis l'ALENA, le Canada s'est vraiment laissé distancer sur le plan du commerce international. Nous ne sommes plus l'un des chefs de file de l'Organisation mondiale du commerce. Nous ne faisons plus partie des cercles d'initiés qui élaborent les politiques. Nous n'avons aucunement tenté d'approfondir l'ALENA. Nous n'avons négocié que trois petits accords bilatéraux alors que le reste du monde négocie avec frénésie. Les Américains, les Chinois et les Européens sont extrêmement actifs et s'efforcent d'élargir leur accès aux autres marchés et aussi de créer l'intégration de la concurrence. Il est temps pour le Canada de réintégrer la partie.
    Je pourrais revenir plus tard sur ces questions de manière plus détaillée et je vais en rester là pour le moment.
    J'aimerais que vous me disiez plus tard pourquoi vous pensez que le Canada n'est plus un chef de file depuis un certain temps.
    M. Murphy.
    Merci, M. le président. C'est un plaisir de participer à cette séance. Après avoir écouté mes deux collègues, je peux vous dire qu'il y a certains thèmes sur lesquels nous sommes tous parfaitement d'accord.
    Permettez-moi de présenter brièvement le point de vue de la Chambre de commerce. Vous savez tous que notre organisation représente des entreprises, grandes et petites, dans tous les secteurs de l'économie et dans toutes les régions du pays. Le point focal de nos activités -- et il est directement relié à notre discussion -- est la compétitivité et la productivité. C'est de là que doit partir le débat. J'ai constaté que le ministre du Commerce international avait commencé son discours de juin à l'occasion de la Journée du commerce international en partant de ces deux éléments, ce qui m'a encouragé. Je crois que c'était tout à fait pertinent.
    La compétitivité et la productivité sont le thème dominant de notre économie. Elles comprennent de nombreux éléments différents dont nous pourrons parler mais, en ce qui nous concerne, nous nous concentrons sur le commerce et l'investissement. Les deux vont ensemble, comme mes deux prédécesseurs l'ont dit.
    Toutefois, quand on parle de compétitivité et de productivité, il faut replacer les choses dans leur contexte. Nous aimons parler de ces choses en termes que les gens peuvent comprendre un peu plus facilement, en utilisant des expressions comme « niveau de vie », ou « qualité de vie » si on veut aller à l'extrême. Qu'il s'agisse du prochain budget, du prochain accord commercial que nous négocions ou de la politique nationale que nous devons formuler pour appuyer ces initiatives, c'est toujours notre niveau de vie qui est en jeu et nous ne devons jamais le tenir pour acquis. Voilà pourquoi je pense que ce que vous faites aujourd'hui -- réfléchir à la politique commerciale du Canada -- est important.
    Voilà le contexte pour nous et pour nos membres.
    Je répète qu'il est absolument essentiel que notre politique internationale ne soit pas séparée de notre politique nationale. Ce sont pas des mots sans importance car ils expriment ce que nous devons faire quotidiennement quand nous pensons au commerce et à l'investissement d'un point de vue stratégique.
    Pour conclure, je voudrais vous donner brièvement une idée de ce que défend notre organisation. Je le ferai en vous présentant nos axes prioritaires, car nous en discutons régulièrement avec nos membres. Lors de notre assemblée annuelle qui s'est tenue il y a quelques semaines à Saskatoon, nous avons beaucoup parlé des priorités commerciales de nos membres. Évidemment, notre relation avec les États-Unis et notre relation à l'intérieur de l'Amérique du Nord restent absolument prédominantes pour tous nos membres, et nous pourrons en reparler.
    Nous avons été déçus de l'échec des négociations multilatérales de Doha. Je ne pense pas qu'un pays comme le Canada puisse ne pas être profondément déçu de cet échec car, très franchement, le multilatéralisme est notre meilleure option en tant que pays, et le fait que nous soyons au point mort à l'OMC nous inquiète beaucoup.
    Comme nous discutons fréquemment de l'importance du commerce et de l'investissement, il ne nous a pas fallu longtemps pour nous assurer que nous voulons rester concentrés sur des accords de protection de l'investissement étranger. Ce sont des accords cruciaux et essentiels pour nos membres de tout le pays.
    J'en reste là, monsieur le président, ce sont les principales idées qui me sont venues à l'esprit.

  (0935)  

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Tomlin.
     Merci, monsieur le président.
    Jayson, Glen et Michael ont tous trois parlé de l'importance du commerce pour le Canada et de l'importance des négociations internationales. Comme ils ont dit bien des choses que j'aurais pu dire aussi, je serai bref. Je veux d'abord exposer ce que j'estime être les cinq possibilités qui s'offrent à nous dans les négociations commerciales. Elles ne sont pas mutuellement exclusives. Je crois que cela permettra de structurer le reste de la discussion.
    Évidemment, la première option, comme l'a dit Michael, est de continuer à tenter d'obtenir un accord à l'OMC, ce qui nous obligerait à concentrer nos efforts sur l'effort multilatéral. Ce serait évidemment la meilleure chose pour le Canada, sur le plan économique mais, comme nous le savons, il y a eu des problèmes et il ne semble pas que les choses puissent beaucoup avancer à partir de maintenant.
    Notre deuxième option est de négocier des accords bilatéraux, ce que nous pourrions faire de deux manières. La première consisterait à emboîter le pas aux États-Unis qui ont manifestement pour objectif, à l'heure actuelle, d'assurer leur hégémonie sur les marchés étrangers en formulant des accords commerciaux à l'américaine et en négociant des accords bilatéraux avec certains pays pour des raisons qui sont moins d'ordre économique que stratégique.
    Deux possibilités s'offrent à nous si nous voulons emboîter le pas aux États-Unis. La première est de participer aux futures négociations bilatérales avec les États-Unis -- c'est-à-dire essayer d'en faire des négociations trilatérales. Ce serait bon dans la mesure où cela limiterait relativement les effets de structure en étoile qui peuvent apparaître quand les États-Unis signent des accords séparément, sans le Canada. C'est une possibilité.
    La deuxième possibilité est que le Canada signe lui-même ses propres accords bilatéraux avec les pays avec lesquels les États-Unis en ont déjà négocié ou en négocient actuellement. Cela pourrait être présenté comme la négociation d'accords sous marque canadienne ou de style canadien.
     Une autre solution pourrait être de négocier des accords bilatéraux sans s'inspirer du modèle américain. Nous pourrions cibler des pays économiquement importants pour nous, ceux avec lesquels nous tenons vraiment à commercer, ou nous pourrions faire comme les Américains -- en offrant aux mêmes pays des accords sous marque canadienne ou de style canadien. Cela pourrait être stratégique dans la mesure où signer de nouveaux accords bilatéraux pourrait contribuer à ouvrir les négociations de l'OMC. Si nous offrons un accord selon les lignes et les négociations de l'OMC, cela pourrait contribuer à ouvrir l'OMC.
    La quatrième possibilité est celle que préféreraient les économistes mais je ne pense pas qu'elle serait très populaire ici. Il s'agit de la libéralisation unilatérale. Ce serait extraordinaire de voir des manchettes de journaux disant que le Canada croit tellement au commerce qu'il est prêt à libéraliser unilatéralement. Évidemment, cela exigerait que nous fassions des analyses sectorielles approfondies mais je pense que ce serait une bonne option pour le Canada.
    Je ne sais pas si la dernière possibilité est vraiment réaliste. Il s'agirait de ne rien faire et de ne pas essayer de négocier des accords bilatéraux -- nous nous contenterions d'attendre pour voir comment avancent les négociations américaines et ce qui se passe à l'OMC.
    J'en reste là. Cela pourrait être le cadre de votre discussion.

  (0940)  

    Bien. Qui lève la main? M. Menzies...
    Je veux dire un mot sur l'option de l'unilatéralisme. Vous dites qu'elle ne serait pas bien reçue ici mais, sur le plan du commerce interprovincial, c'est ce qu'a fait l'Alberta, avec beaucoup de succès. On ne peut donc pas rejeter d'office cette option. C'est un concept intéressant.
    J'aime cette option mais je ne suis pas sûr qu'elle soit politiquement viable.
    C'est intéressant.
    M. Menzies.
    Eh bien, Ben, j'espère que votre choix final n'est pas la dernière option. Je ne pense pas que ce serait bon pour le Canada. Je comprends que vous ayez lancé cette idée pour nourrir le débat mais vous réaliserez très vite que ce n'est pas une option envisageable autour de cette table.
    Je trouve intéressant que vous ayez été plusieurs à souligner l'importance de l'OMC. J'ai toujours été partisan du multilatéralisme car cela nous permet d'obtenir des mécanismes de règlement des différends ayant du mordant, des règles internationales pouvant nous protéger. À l'heure actuelle, nous essayons de relancer le processus. J'espère que le 8 novembre, après les élections aux États-Unis, nous verrons surgir des chances de reprise des négociations car c'est absolument crucial pour notre pays. Pourriez-vous nous donner des idées sur la manière de relancer le processus? Y a-t-il quelque chose que le gouvernement ne comprend pas ou quelque chose que nous pourrions faire pour redémarrer?
    Glen, vous avez parlé de compétitivité et de protection de l'investissement. L'une des choses que je voudrais réinsérer dans les objectifs du gouvernement est la convention du CIRDI. Je ne sais pas si vous connaissez le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements. Quelque 130 pays sont parties à cette convention, dont le Canada, bien que nous ne l'ayons pas encore signée, ce qui veut dire que les entreprises canadiennes qui investissent à l'étranger sont vulnérables au piratage de leurs investissements.
    Nous essayons de faire avancer les choses et nous sommes très près du succès. Nous avons un projet de loi que nous pouvons relancer. Pouvez-vous nous dire si vous pensez qu'il est important pour nous de signer cette convention? Je sais que c'est une question provinciale et fédérale. La plupart des provinces sont d'accord et il y en a quelques-unes qui sont sur le point de donner leur accord.
    Pouvez-vous nous donner votre avis là-dessus?
    Allez-y, M. Hodgson.
    J'ai une double réponse à vous donner.
    Tout d'abord, je crois que nous pensons tous que le multilatéralisme est la meilleure option. Si c'est vrai, pourquoi n'avance-t-on pas?
    Je regrette de devoir vous décevoir mais je pense que la Ronde de Doha ne reprendra pas tant que les États-Unis n'auront pas un nouveau président. Le président actuel aura des élections extrêmement intéressantes dans un mois, où il risque fort de perdre le contrôle de la Chambre des représentants -- peut-être pas du Sénat mais de la Chambre. En outre, même le degré d'engagement des Américains envers Doha est tout à fait douteux, y compris leur volonté de négocier sur des choses concrètes comme les subventions agricoles. À mon avis, Doha n'a aucune chance de redémarrer tant qu'il n'y aura pas un nouveau président des États-Unis, lequel devra alors demander une délégation de pouvoir au nouveau Congrès, ce qui nous amène déjà à 2009. Je souhaite bonne chance au gouvernement s'il veut essayer de relancer les choses d'ici là mais, pour moi, la realpolitik signifie que nous devrions surtout songer à ce que nous pourrions faire en attendant. J'y reviendrai.
    Au sujet du CIRDI, je ne sais pas. Certes, je sais que l'intérêt bien compris du Canada est d'avoir un système de règles solides et claires pour régler les différends. Si c'est ce que doit nous offrir le CIRDI, il nous le faut absolument. L'une des choses regrettables qui sont arrivées au cours de la dernière décennie a été l'échec de l'accord multilatéral sur l'investissement. Nous pouvons essayer d'obtenir une protection bilatérale comme succédané mais la solution optimale serait d'avoir un système mondial protégeant l'investissement sur une base globale.
    Si l'on peut faire quoi que ce soit pour que le Canada signe et ratifie le CIRDI, je pense que ce serait la bonne chose -- mais je ne suis pas un expert en la matière. Sur le plan des principes, tout ce qui peut protéger l'investissement est absolument souhaitable car le Canada est aujourd'hui un investisseur net dans le monde. Nous ne sommes plus un simple récepteur d'investissements étrangers, nous envoyons à l'étranger beaucoup plus d'investissements que nous n'en recevons et nos ventes à l'étranger qui en résultent sont presque aussi élevées que nos exportations de marchandises. L'investissement extérieur est un élément crucial du succès pour le commerce international canadien.
    J'aime bien ce que disait Jay au sujet des affaires internationales. J'ai moi aussi tendance à parler d'affaires internationales car il ne s'agit pas seulement de commerce et d'investissement. Il s'agit de voir tout cela comme un aspect intégré de la manière dont nos entreprises peuvent réussir sur le plan mondial.

  (0945)  

    Nous passons à M. André puis à Peter Julian mais, avant ça, si certains des participants veulent s'interroger mutuellement, il leur suffit de le signaler au président.
    M. André.
    J'espérais obtenir un commentaire de chacun d'entre vous sur l'OMC mais on vient de décider que ma question n'était pas recevable.
    Je crois qu'il est préférable de poser directement la question à l'un des participants. Si les autres veulent ensuite absolument à y répondre aussi, ils le pourront le faire mais cela nous permettra d'aller un peu plus vite.
    Oui, Peter.
    Je crois que M. Menzies a raison car j'estime que nos questions sont destinées aux quatre témoins. Si certains préfèrent ne pas répondre, c'est leur droit, et je pense qu'il serait plus difficile pour nous d'essayer d'adresser nos questions à l'un des participants seulement alors que nous souhaitons en réalité obtenir l'avis de tous.
    Bien. Quelqu'un d'autre veut-il parler de l'OMC ou de la question de M. Menzies?
    Allez-y, M. Myers.
    Je pense que nous vous donnerons tous une réponse.
    Je crois que l'échec à l'OMC n'a pas été seulement un échec des États-Unis ou un échec des pays membres. Je pense que c'est en réalité un bon exemple de l'absence de leadership du Canada dans ces négociations. Nous ne pouvons pas entreprendre des négociations multilatérales ou des négociations sur l'investissement en ayant les mains liées parce que nous ne sommes pas prêts à négocier sur toutes les choses mises sur la table. On ne peut pas négocier comme ça.
    Merci.
    M. Murphy.
    Je suis d'accord avec M. Myers. J'estime qu'il a parfaitement raison.
    Il y a un certain nombre de facteurs clés dans ce contexte et il est évident que les objectifs politiques mondiaux font absolument partie de la réalité. C'est aussi ça, négocier des accords commerciaux -- il faut que ce soit donnant-donnant. Je ne sais pas pourquoi mais notre pays, qui était aussi important que n'importe quel autre à l'OMC, ce qui n'est pas négligeable considérant sa taille -- et c'est pourquoi l'OMC et le multilatéralisme sont si importants -- a été marginalisé, si je peux m'exprimer ainsi, de sa propre faute en campant sur des positions défensives, d'une part, et en s'imposant lui-même un handicap ou, comme l'a dit Jay, en liant les mains de ses négociateurs. Ça aussi, ça fait partie de la réalité. Quand on entreprend ce genre de négociation, il faut être prêt à dire ce qu'on est prêt à faire pour faire avancer les choses.
    Et cela vaut tout autant pour les autres, notamment, comme nous l'avons vu, l'Union européenne et les États-Unis.
    Très bien.
    Je pense qu'on a bien répondu aux questions. Il s'agit simplement pour le Canada de définir clairement ce qu'il veut protéger et ce qu'il est prêt à céder. Je n'ai rien à ajouter.
    M. André.

[Français]

    Je viens d'un territoire rural, dans le comté de Berthier—Maskinongé. Je mentionne que sur ce territoire rural se trouvent des industries du meuble, des industries du textile — qui sont des secteurs très fragilisés — et des entreprises agricoles. À cause du libre-échange, des ententes bilatérales et de la mondialisation, ces territoires ruraux ont des problèmes de pertes d'emplois et d'appauvrissement de la population. Les taux de chômage croissent et la population se déplace vers les villes parce qu'on perd des emplois, entre autres. Depuis la venue du libre-échange, de l'OMC et des ententes bilatérales, entres autres, je constate que ces territoires ruraux vivent une dévitalisation et que les gens s'appauvrissent.
    Vous avez mentionné M. Murphy et le cycle de Doha. J'y étais. Vous savez que la question de l'agriculture est aussi un grand enjeu. Il y aussi la question de la gestion de l'offre et l'ouverture des marchés. Ces éléments menacent les agriculteurs. Les agriculteurs ne font plus fortune. Ce milieu est très dur. Ces choses menacent la qualité de vie d'une population.
    Je me pose une question. J'ai vu des statistiques dernièrement qui indiquent que ces ententes — les ententes multilatérales et celles de l'OMC — créent une situation où une certaine catégorie de gens s'enrichit et où beaucoup plus de gens s'appauvrissent. On dit souvent que les riches s'enrichissent et que les pauvres s'appauvrissent. Cela fait partie du jeu de la négociation.
    Votre politique commerciale comprend-elle des stratégies ou des moyens pour, à la fois, ouvrir nos marchés — je crois que nous sommes dans une ère d'ouverture des marchés — et protéger davantage nos secteurs manufacturiers, notre population et nos territoires? Il faudrait une approche qui tienne compte de l'ensemble du territoire ou de l'occupation du territoire dans l'ensemble du Québec et du Canada, car il ne faut pas exclure des territoires et des couches de population entières. Est-il utopique de penser que ces ententes pourraient faire en sorte que tout le monde aura une place dans cette société, sans que notre population s'appauvrisse et tout en tenant compte de la concurrence asiatique et autre? Cette concurrence exerce des pressions sur nos industries pour qu'elles produisent davantage à moindre coût.
    J'aimerais vous entendre sur ce sujet. Y a-t-il des stratégies possibles? Pourrait-on mettre en place des moyens pour arriver à maintenir nos secteurs fragilisés?

  (0950)  

[Traduction]

    Merci, M. André.
    M. Hodgson.

[Français]

    Monsieur André, j'aimerais mieux répondre en anglais, parce que je m'exprime mieux dans cette langue. Mon français n'est pas du même niveau.

[Traduction]

    Vous venez de mettre le doigt sur les problèmes fondamentaux qu'ont toujours connus les secteurs ou les régions qui ont défendu le protectionnisme. C'est un cercle vicieux, et il est d'autant plus vicieux que, plus on veut protéger, moins les firmes sont compétitives et innovatrices car moins elles ont à s'adapter aux nouvelles technologies et à faire face à la concurrence internationale. Ça devient donc absolument un cercle vicieux car on doit bâtir des murs toujours plus hauts pour résister à la nouvelle concurrence. Voilà pourquoi nous essayons de formuler une stratégie nationale positive dans notre prochain rapport. Au lieu de protéger, investissons. Investissons dans le capital humain, investissons dans les nouvelles technologies, investissons dans l'innovation, et laissons les entreprises se positionner elles-mêmes.
    Il est clair que les secteurs qui sont protégés et qui sont aussi exposés ont besoin d'aide pour s'adapter. Ce dont ils n'ont pas besoin, c'est de protection et d'être traités comme des pupilles de la nation.
    Je conviens que c'est très difficile pour la première génération de travailleurs qui, bien souvent, ne sont pas éduqués comme il le faudrait. Ils ont occupé une profession assez standardisée ne les obligeant pas à être des penseurs créatifs et, d'un seul coup, on les plonge dans un monde différent. La plupart des économistes sont formés pour dire que le libre-échange est préférable car il vous tient sur la ligne du rasoir. Je crois que nous vous dirons cependant tous aussi que, si vous voulez supprimer la protection d'un secteur en l'exposant à la concurrence internationale, vous avez le devoir d'aider ses travailleurs. Vraiment. En fait, vous devez investir au moins autant dans l'adaptation des travailleurs que dans la recherche du libre-échange. C'est quelque chose dont nous allons beaucoup parler dans notre rapport.
    Je sympathise beaucoup avec les gens de secteurs comme les textiles et l'ameublement, dans les provinces atlantiques, dans le Canada rural, au Québec. Tout allait bien tant qu'ils restaient cachés derrière les murs protectionnistes mais, comme vous le savez, les murs tombent. Nous avons constaté les bienfaits globaux de la libéralisation des échanges grâce aux diverses rondes de l'OMC. La question clé aujourd'hui est de trouver des moyens positifs d'investir dans le capital humain et de nous assurer que les jeunes qui sortent de nos écoles peuvent être aussi compétitifs que le seront les Chinois ou les Américains. Voilà pourquoi l'adaptation de la main-d'oeuvre actuelle est si importante.
    Je ne suis pas aussi attaché à protéger le capital. Je ne tiens pas particulièrement à protéger les détenteurs de capital car ils ont vu le vent venir. Je pense qu'il est beaucoup plus important de protéger les travailleurs qui sont directement touchés, afin de les aider à s'adapter.
    Pour que tout soit clair, quand vous parlez de ne pas protéger le capital, voulez-vous dire que nous n'avons pas vraiment besoin du genre de choses dont parlait M. Menzies, c'est-à-dire un accord sur la protection du capital?
    Non, je parle de subventionner des industries pour leur permettre de continuer à faire comme toujours derrière des murs protectionnistes.

  (0955)  

    Très bien.
    M. Myers.
    Je viens moi aussi d'une petite ville où l'industrie du meuble était très importante. En 1990, la plupart de ces firmes ont fermé leurs portes, essentiellement parce qu'elles ne pouvaient tout simplement pas faire concurrence aux meubles à bas prix qui arrivaient au Canada, surtout des États-Unis. Elles ont été confrontées à une concurrence féroce des États-Unis. Des droits de douane de 23 p. 100 ont été abolis du jour au lendemain et il n'y a pas eu de programmes d'ajustement. Elles n'ont bénéficié d'aucune aide. Je ne parle pas de subventions mais plutôt de politique fiscale, de politique d'emploi, de politique de formation professionnelle. Il n'y avait aucun filet de sécurité qui leur eût permis de s'adapter.
    L'industrie canadienne du meuble, qui était une industrie de 3 milliards de dollars en 1990, était tombée à environ 1,5 milliard en 1992. Aujourd'hui, c'est une industrie de 12 milliards de dollars. Pourquoi? Parce que l'ouverture des marchés a obligé les entreprises à devenir plus compétitives, plus spécialisées, plus flexibles. Dans l'industrie du textile, du vêtement, vous aviez des entreprises comme Peerless qui n'avaient littéralement pas leur pareil sur le plan de la satisfaction des clients.
    C'est une manière de travailler très différente. Ce ne sont pas seulement les effets du libre-échange. Nous entrons aujourd'hui dans une nouvelle ère de concurrence mondiale qui va provoquer une restructuration générale de l'industrie manufacturière du Canada, que ça nous plaise ou non. Ça veut dire que nous devrons formuler des politiques nationales qui rendront cette transition aussi facile que possible. Nous devrons fournir aux entreprises et aux travailleurs la possibilité de rehausser leurs compétences et d'améliorer leurs produits et leurs méthodes.
    Cela veut dire qu'il nous faut une politique fiscale facilitant l'investissement dans les nouvelles technologies. Or, le niveau de nos taxes sur les investissements dans les nouvelles technologies nous place au huitième rang mondial. Nous allons devoir mettre sur pied les bons systèmes de logistique et les bons programmes de formation professionnelle. L'une des raisons pour lesquelles les fabricants de textiles, les producteurs agricoles et les fabricants de meubles sont entrés dans le libre-échange avec une main liée dans le dos était que les obstacles au commerce interprovincial qui ont existé jusqu'en 1990 les empêchaient de vendre dans le reste du Canada. Les entreprises sont confrontées à des obstacles réglementaires. On ne peut pas dans ce pays importer de déodorant sans passer par un processus d'inspection différent de celui des États-Unis. J'ose pourtant prétendre que les aisselles canadiennes ne sont pas très différentes des aisselles américaines. Et les consommateurs canadiens n'ont pas accès à beaucoup de produits qui sont vendus aux États-Unis. Ce n'est pas seulement une question de procédures d'inspection différentes. Pour résoudre ces différences réglementaires, il faut qu'il y ait un processus de production complètement différent aux États-Unis.
    Ça va aussi dans l'autre sens. Les différences réglementaires nous empêchent d'avoir accès à beaucoup de marchés, américains ou autres. Il faut abolir ces obstacles non tarifaires. Nous devons harmoniser nos politiques nationales de façon à permettre à nos entreprises de devenir prospères en tirant pleinement parti des accords commerciaux internationaux que nous négocions.
    Il y a une chose que je conteste dans la question de M. André et c'est l'idée que le commerce, considéré du point de vue de toute l'économie, nuit plus aux gens qu'il ne leur profite. Je ne pense pas que ce soit vrai. Nous avons beaucoup de données prouvant que le commerce est important pour notre économie et pour notre niveau de vie.
    Les deux commentateurs précédents ont parlé des programmes d'adaptation. Nous en avons eu pour l'ALENA et dans d'autres contextes. C'est un exemple classique de la nécessité d'harmoniser les politiques intérieures et nationales. Jay vient de dire que la politique fiscale joue un rôle important et j'estime pour ma part que la compétitivité fiscale sera aussi importante que la réglementation. Sur le plan des compétences professionnelles, je m'inquiète des facteurs entravant la mobilité de la main-d'oeuvre sur notre marché. Nous avons beaucoup de problèmes à régler et c'est pourquoi on ne peut pas cloisonner la politique commerciale.

  (1000)  

    M. Tomlin.
    Quand les économistes parlent des bienfaits de la mondialisation, il importe de distinguer le court terme du long terme. Les économistes parlent généralement du long terme. À court terme, il y a des inconvénients, comme les coûts de transition et le fait que les gens doivent déménager. Les problèmes que vous évoquez, M. André, sont des effets à court terme.
    Beaucoup d'études montrent que le libre-échange est en réalité bénéfique à l'économie du Canada à longue échéance. Une étude récente et souvent citée de l'Université de Toronto montre que l'ALENA a engendré d'énormes gains de productivité. Il faut au moins 10 années de recul pour pouvoir mesurer ce genre de gains.
    Certes, il y a des problèmes à résoudre dans l'immédiat et je me fais l'écho de Jayson à ce sujet. Il nous faut minimiser ces effets à court terme et l'une des choses que nous devrions faire serait de simplifier et de clarifier notre régime fiscal. À l'heure actuelle, comme il l'a dit, notre taux réel d'imposition du capital est le sixième ou le huitième au monde, ce qui ne permet pas aux entreprises jeunes et établie de s'épanouir ou de résister à la concurrence.
    Pour contrer ces effets à court terme, il nous faut un programme gouvernemental de recyclage des travailleurs qui perdent leur emploi à cause de la mondialisation. Il nous faut un programme qui leur apprenne à devenir plus productifs dans leur propre industrie ou qui les prépare à un nouvel emploi en leur permettant de rester là où ils sont. Je pense que ce sont deux questions importantes.
     Avec ce qui se passe aujourd'hui en Alberta, l'industrie est bien souvent obligée de faire elle-même le recyclage. L'Alberta cherche désespérément des travailleurs.
    De nouveaux députés viennent d'arriver. Dominic et John, veuillez vous présenter.
    Je suis un député libéral du Nouveau-Brunswick. Je représente la circonscription de Beauséjour, une circonscription rurale essentiellement francophone du sud-est de la province. Veuillez excuser mon retard.
    Je m'appelle John Williams et je représente la circonscription d'Edmonton-St. Albert. Hélas, je ne pourrais pas rester longtemps, monsieur le président, mais je serais très heureux de vous donner mon grain de sel et de vous faire profiter de ma grande sagesse.
    M. Julian.
    Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui, notamment M. Murphy. Je suis un fier membre de la Chambre de commerce de New Westminster et du Board of Trade de Burnaby. Je suis du secteur de la petite entreprise.
    Je reviens sur les remarques de M. André. Elles expriment l'opinion de nombreux Canadiens sur les résultats du libre-échange, 15 ans après la signature de l'accord. Ce n'est pas un impact à court terme. Statistiques Canada nous dit, comme Ron Cannan vient juste de me le rappeler, que le revenu réel de 80 p. 00 des familles canadiennes a baissé depuis 1989. Pour ces 80 p. 100 de familles, le revenu réel est aujourd'hui inférieur à ce qu'il était en 1989, à l'entrée en vigueur du libre-échange.
    Il y a donc un problème. Ça ne concerne pas que les industries en déclin, c'est un problème général. Quand on veut parler de qualité de vie, comme M. Murphy vient de le faire, on doit savoir que les familles canadiennes ont plus de mal à joindre les deux bouts. Les semaines de travail sont plus longues.
     Il y a là un problème fondamental auquel nous devons nous attaquer et je ne pense pas que nous puissions le faire en faisant les mêmes choses et en essayant de négocier des accords commerciaux copiés sur le modèle américain.
     Les autres pays voient les accords de libre-échange sous un angle différent. En Europe, on intègre dans les accords de libre-échange des normes sociales, le droit au travail et des normes environnementales. Autrement dit, on égalise les règles du jeu au lieu de les abaisser. On ne creuse pas un trou. On améliore les règles tout en les harmonisant. Voilà le contexte en Europe.
    En Amérique latine, on envisage des accords commerciaux axés sur le développement économique des collectivités pauvres.
    J'ai donc une question à vous poser à tous les quatre, en commençant par M. Murphy. Ne devrions-nous pas envisager les accords commerciaux sous un angle différent, et le commerce lui-même, en y voyant le moyen de rehausser le niveau relatif de prospérité de tous les Canadiens, plutôt que ce que nous voyons aujourd'hui, c'est-à-dire un creusement de l'écart entre les 20 p. 100 prospères et les 80 p. 100 qui perdent du terrain?

  (1005)  

    Qui veut répondre à la première?
    M. Murphy.
    D'accord. Merci.
    Pour ce qui est de l'importance du commerce dans notre économie, j'ai deux brèves remarques à faire.
    Premièrement, maintes études ont montré qu'il est incontestable que les bienfaits du commerce, qu'ils résultent de l'ALENA, de l'ALE ou de l'OMC, sont cruciaux pour le Canada. Nous avons une petite économie qui dépend absolument de la libéralisation du commerce. L'accès aux marchés est absolument crucial pour notre niveau de vie.
    Certaines personnes, des économistes, par exemple, disent que les années 90 sont la « décennie perdue » pour le Canada. Il y a de bonnes raisons à ça. L'une d'entre elles a été notre désir incompréhensible de surtaxer les Canadiens. Oublions les entreprises pour le moment, parlons uniquement des particuliers et de ce que nous avons fait des taux d'imposition de leurs revenus et des taxes salariales. Le fardeau fiscal des Canadiens était beaucoup trop lourd. Et il l'est encore.
    Je crois que le ministre des Finances a fait une déclaration en ce sens l'autre jour, et nous sommes en 2006. C'était certainement vrai dans les années 90 qui ont été des années particulièrement difficiles pour l'économie canadienne, pour une foule de raisons. En ce qui concerne la possibilité d'avoir un niveau plus élevé de revenu disponible, je dirais que l'une des raisons pour lesquelles un certain nombre de familles... C'était la politique fiscale du Canada dans les années 90. Il y avait beaucoup à faire et on a commencé à le faire avec le budget de 2000 mais il reste encore beaucoup à faire.
    Quand vous parlez du rôle du commerce, c'est un autre exemple de ce que nous pouvons répondre. Où serions-nous si nous n'avions pas négocié l'ALE puis l'ALENA? A mon avis, notre économie serait dans une situation bien pire.
    Je ne vais pas vous citer de chiffres sur l'évolution de notre PIB depuis lors. Toutefois, j'ai eu l'occasion de jeter un coup d'oeil sur une publication très utile -- si vous me permettez d'en parler une seconde, monsieur le président -- qui vient d'être publiée par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, intitulée L'ALENA: déjà 10 ans. C'est un excellent rapport où vous trouverez d'excellentes contributions de plusieurs acteurs qui savent de quoi ils parlent.
    L'un d'entre eux joue dans votre cour, M. Julian, à l'université Simon Fraser. Richard Harris est un économiste et il fait dans ce rapport une affirmation très intéressante:
Dans pratiquement tous les domaines où il est possible d'effectuer des mesures économiques -- les courants d'échanges commerciaux, l'investissement, l'emploi, les avantages pour les consommateurs, la croissance de la productivité, l'amélioration de la concurrence sur les marchés des produits et la réduction des mesures protectionnistes sur le marché des exportations américain -- ces accords ont eu d'importants impacts mesurables et positifs.
    Vous pourriez sans doute ajouter des éléments à cette liste. Essentiellement, le niveau de vie des Canadiens a augmenté grâce au travail effectué dans ce domaine. Y a-t-il encore des problèmes? Je conviens avec vous qu'il y en a. Je crois que nous avons encore, comme Ben vient juste de le dire, un taux réel trop élevé d'imposition du capital, ce qui a un effet négatif sur l'investissement au Canada. Le fait que nous soyons encore une économie où le capital est imposé est un énorme problème. Et le fardeau de l'impôt sur le revenu des particuliers est encore beaucoup trop lourd.
    Il y a des choses précises que nous vous recommandons de faire à ce sujet mais je n'ai pas le temps d'en parler maintenant.

  (1010)  

    Merci.
    M. Hodgson.
    Monsieur le président, je vais voir la chose sous un angle un peu différent. Je conviens avec M. Julian qu'il y a un problème fondamental avec la mondialisation. C'est le changement des parts du capital et de la main-d'oeuvre à l'échelle mondiale. Les données du Canada montrent que le niveau de vie réel des familles n'a pas beaucoup augmenté au cours des 10 à 15 dernières années.
    Voilà le problème. Quelles en sont les causes et les solutions? Il est difficile d'attribuer ce problème au libre-échange, à l'ALENA ou même à l'OMC. Je crois que la cause réelle du faible niveau des revenus au Canada est la faible croissance de notre productivité. Nous enregistrons à ce sujet avec les États-Unis un écart qui n'a fait qu'augmenter pendant 20 ans. Nos recherches montrent qu'il a atteint un point tel que les revenus canadiens sont aujourd'hui inférieurs de 20 p. 100 aux revenus américains de manière générale.
    Si vous comparez le Canada aux pays industrialisés connaissant la plus forte croissance, des pays avec des régimes sociaux avancés comme la Suède, la Finlande, le Danemark et la Norvège, l'écart est encore plus grand.
    Selon un rapport récent du Forum économique mondial, le Canada est 16e au monde sur le plan de la compétitivité. La plupart des pays qui nous précèdent sont des pays industrialisés d'Europe du Nord ayant des régimes sociaux très avancés et des impôts élevés sur les sociétés.
    Le FÉM, qui n'est pas un organisme axé sur le social mais sur l'entreprise, affirme que ce sont les investissements massifs dans l'éducation que font les pays d'Europe du Nord qui leur donnent cet avantage critique. Il y a là un vrai problème.
    Les choses sur lesquelles nous devrions nous pencher, comme nous le dirons dans notre rapport, sont des choses telles que le taux d'imposition marginal punitif que nous infligeons aux travailleurs pauvres. Le taux d'imposition marginal des gens qui gagnent moins de 40 000  $ par an au Canada peut atteindre 90 p. 100 parce qu'ils sortent des programmes sociaux pour entrer dans le régime fiscal. On leur enlève leurs prestations sociales plus vite qu'on ne leur permet de gagner un revenu. Cela vient de l'Institut C.D. Howe, et des gens comme Jack Mintz et Finn Poschman peuvent en prendre le crédit.
    C'est un problème fondamental -- pas un problème fédéral mais un problème national. C'est en Ontario et en Alberta que les taux d'imposition marginaux sont les plus élevés. Pourquoi tenons-nous tellement à punir les gens qui veulent recommencer à travailler? Pourquoi ne relevons-nous pas plutôt les exonérations de base afin de leur assurer une meilleure passerelle quand nous les faisons sortir de l'assurance-emploi et des autres formes de bien-être social s'ils réintègrent la population active?
    Je résiste vigoureusement à l'idée d'alourdir encore plus le fardeau des exigences sociales et environnementales. Nous l'avons déjà fait dans une certaine mesure avec l'ALENA. Il y avait un volet environnemental dans l'ALENA. Il n'était peut-être pas adéquat, vous pouvez en juger vous-même. Je sais que, dans bien d'autres cas, nous utilisons maintenant cela comme excuse pour éviter le libre-échange et, en fait, nous nous en servons comme d'une autre forme de barrière au commerce.
    Les Européens sont peut-être les gens les plus surréglementés au monde. Il est difficile de vendre quoi que ce soit en Europe sans satisfaire aux normes européennes. Vous ne savez peut-être pas que les ventes canadiennes de nos filiales en Grande-Bretagne, par exemple, représentent huit fois nos exportations à la Grande-Bretagne parce que la seule manière de franchir les barrières qui entourent l'Europe est de devenir une entreprise européenne. Nous allons devoir changer notre modèle pour faire face à ce genre de choses.
    Je ne pense pas que la solution consiste à élever de nouvelles barrières. Je préférerais de loin des politiques publiques mieux conçues au Canada. Si nous voulons relever les bas revenus, pensons à réformer complètement notre régime fiscal.
    La plupart de mes arguments ont déjà été présentés. Aujourd'hui, sans l'ALENA, il est clair pour moi que notre situation serait pire.
    Si vous voulez vous pencher sur les différences de revenus ou de niveau de vie entre les riches et les pauvres au Canada, ce n'est pas vers l'ALENA qu'il faut vous tourner mais plutôt vers nos politiques internes, comme les taux marginaux d'imposition des travailleurs pauvres. Voyons d'abord ce que nous faisons chez nous au lieu de nous opposer à ces accords commerciaux.
    C'est tout ce que j'ai à dire pour le moment.
    Merci.
    M. Myers.
    Permettez-moi de dire que je suis d'accord avec la majeure partie de ce qui vient d'être dit. Bien sûr, les revenus réels ont baissé, surtout pendant les années 90. Pour de nombreuses familles, le revenu réel est aujourd'hui inférieur à ce qu'il était à ce moment-là. Les revenus réels sont certainement plus élevés aujourd'hui qu'ils ne l'étaient en 1990 mais je ne suis pas sûr que la raison en soit le libre-échange.
    En fait, si je prends le secteur manufacturier de 1991 à 2004, je constate que 600 000 nouveaux emplois nets y ont été créés et que ce sont des emplois qui ne l'auraient pas été si les entreprises n'avaient pas eu la possibilité de faire plus de commerce, notamment en Amérique du Nord. Certes, il y a eu d'importantes pertes d'emploi pendant la période de transition de 1989 à 1991 mais nous avons encore aujourd'hui environ 250 000 nouveaux emplois nets de plus qu'en 1990. D'ailleurs, le secteur manufacturier canadien a enregistré des niveaux d'emploi records en 2004. Le fait que la valeur de notre devise ait augmenté de 50 pour cent au cours des trois dernières années a été un véritable coup de massue pour l'emploi, mais cela ne résulte pas de l'ALENA ou du libre-échange. C'est le résultat des marchés financiers mondiaux.
    Je me fais l'écho de ce que les autres vous ont dit : le facteur clé et l'une des raisons pour lesquelles nos revenus réels ont eu tendance à rester à la traîne est que nous avions un énorme déficit et une énorme dette qui menaçaient la viabilité de notre pays. Nous avons entrepris de rembourser la dette pendant les années 90 et c'est pourquoi nos revenus réels n'ont pas augmenté autant qu'ils l'auraient dû. Je peux vous dire que les revenus réels aux États-Unis recevront un coup de massue similaire dans les 10 prochaines années.
    Ce qu'il faut faire, si nous voulons que les Canadiens puissent participer à la prospérité économique d'aujourd'hui, c'est investir beaucoup plus dans les compétences de nos travailleurs et dans les capacités de notre main-d'oeuvre, et investir beaucoup plus dans la productivité. Voyez les pays scandinaves et les pays européens. Deux choses caractérisent leurs régimes fiscaux. Premièrement, ils ne pénalisent par l'entrée sur le marché du travail. Deuxièmement, les taux d'imposition -- ceci peut paraître étrange mais c'est vrai -- font partie des plus bas au monde en ce qui concerne l'investissement des entreprises. Les pays scandinaves, l'Irlande, ont tous de très bas taux d'imposition des sociétés. Cela permet à leurs entreprises d'investir dans la technologie, de s'agrandir et de fournir à leurs employés les outils et les technologies qui assurent leur croissance. C'est ça qui devrait être notre priorité.
    Votre principal argument concerne la politique du commerce international. Avons-nous besoin d'accords différents pour des marchés différents, et d'un style de négociation différent? Absolument car ce que nous essayons de réaliser en Amérique du Nord est différent de ce que nous essayons de réaliser en Chine, en Inde, au Brésil, en Australie ou en Europe. Nous devons nous occuper en particulier des barrières non tarifaires dont Glen vient de parler.
    Or, je ne pense pas que nous puissions abolir ces barrières non tarifaires au moyen des accords commerciaux que nous avons traditionnellement essayés de négocier. Il faut adopter une démarche différente. Il faut une démarche qui nous permette d'avoir un accès garanti au marché et de nous attaquer en particulier aux différences de réglementation, aux obstacles réglementaires.

  (1015)  

    Il ne nous reste qu'une demi-heure et j'ai sur ma liste les noms de messieurs Cannan, Temelkovski, Maloney et Williams. Nous avons aussi une liste de questions qui ont été préparées par nos chercheurs en vue de cette discussion et que vous avez tous reçue.
    J'aimerais beaucoup que vous ayez aussi l'occasion de répondre à ces questions. Il y en a trois en particulier auxquelles nous aimerions avoir des réponses. Je vais laisser les députés vous interroger et je me réserverai peut-être le droit de vous poser certaines de ces questions si aucun d'entre eux ne les aborde.
    En particulier, que devrions-nous faire pour approfondir la relation économique nord-américaine, du point de vue d'accords commerciaux bilatéraux? Nous n'en avons signé aucun depuis cinq ans. Pourquoi? Avec quels pays devrions-nous négocier? Le Canada est-il trop tributaire de l'économie américaine? Devrions-nous nous diversifier de manière agressive ou la diversification est-elle trop risquée? Pensez à ça.
    M. Cannan, je commence avec vous. Vous avez la parole.
     Merci de nous donner la possibilité de participer à cette intéressante discussion, monsieur le président.
    Je suis de la Colombie-Britannique. Comme vous le savez, l'un des plus gros défis de l'Ouest canadien est aujourd'hui le manque de ressources humaines. Je sais que la population de notre pays vieillit et je crois qu'il est très important de commencer d'abord par mettre de l'ordre chez nous, dans une approche unilatérale ou intégrée. Notre gouvernement a lancé plusieurs initiatives pour aider les travailleurs âgés et les apprentis, avec 70 millions de dollars sur deux ans. Je veux parler aussi du remboursement de la dette et d'essayer de mettre de l'ordre dans la maison. Ce sont toutes des initiatives importantes.
    Au point où nous en sommes maintenant, avec l'absence de discussions à l'OMC, comme l'a dit M. Menzies, la réalité reste l'ALENA. Nous entendions mardi des représentants du ministère du Commerce nous dire que 97 pour cent de nos échanges depuis l'ALENA se sont faits sans litige dans le cadre de négociations plus ou moins positives, comme l'a dit Jayson.
    il y a eu une augmentation nette du nombre de travailleurs. Mon honorable collègue et voisin profite quasiment de chaque réunion du comité pour citer le chiffre de 1989, et vous avez validé ça avec votre remarque sur le fait que les gens sont dans une bien meilleure situation avec 250 000 nouveaux emplois nets en plus. Cela me rappelle cependant ce que me disait toujours mon professeur de statistique : elles sont intéressantes par ce qu'elles révèlent mais vitales par ce qu'elles dissimulent. Il faut voir les deux côtés de la médaille.
    En ce qui concerne notre avenir avec l'ALENA, voici la question je vous pose. Elle correspond aux questions des chercheurs sur notre compétitivité et sur une intégration plus étroite au sein de l'Amérique du Nord.
    Je demande simplement à nos témoins s'ils pensent, sur le plan de la productivité et de l'innovation et de la compétitivité, que c'est vraiment en Amérique du Nord que réside notre capacité de compétitivité. Est-ce là que nous avons les meilleures chances?

  (1020)  

    M. Tomlin, voulez-vous répondre? Je ne veux pas vous mettre sur la sellette si vous n'êtes pas prêt.
    Je crois effectivement que c'est en Amérique du Nord que nous pourrons obtenir les plus grands gains de productivité. Bien que nous ayons l'ALENA, nous avons encore plusieurs questions à régler concernant les barrières non tarifaires, notamment l'harmonisation de la réglementation. Nous traitons avec les États-Unis mais toutes nos petites entreprises qui essayent d'avoir accès au marché américain font face à un nombre extraordinaire d'obstacles.
    La question est de savoir si nous voulons une meilleure harmonisation avec les États-Unis. Elle est aussi de savoir si les Américains sont prêts à négocier avec nous ou si nous allons devoir adopter le système américain. Il semble qu'il puisse y avoir de la place pour la négociation mais, fondamentalement, nous allons devoir adopter le système américain. La question sera alors de savoir quel effet cela aura sur l'économie canadienne.
    Il y a plusieurs autres obstacles mais je pense que c'est celui-là le plus important, et je crois que nous devons nous pencher sur le marché nord-américain pour trouver nos gains de productivité. C'est là que nous faisons tout notre commerce et c'est là que fonctionnent nos entreprises. Nous pouvons bien négocier des accords avec d'autres pays mais ce sont elles qui vont décider où elles vont fonctionner, et elles l'ont montré en fonctionnant dans l'ensemble sur le marché nord-américain.
    Je pense que c'est sur ce plan que nous devons faciliter les choses aux entreprises. Faire cela affectera aussi le transfert de la technologie mais les petites entreprises sont celles qui peuvent augmenter le plus rapidement leur productivité et c'est pourquoi je pense que c'est là-dessus que nous devons nous concentrer.
    Merci.
    M. Hodgson.
    Comme j'ai déjà parlé, je serai bref.
    Je pense qu'il y a actuellement trois grands blocs mondiaux. Il y a le bloc nord-américain, où nous avons la très grande chance de vivre dans ce qui est probablement le meilleur coin de la planète.
    Ben a parfaitement raison. Notre avenir réside dans un approfondissement de l'ALENA. Le prochain problème crucial est celui des barrières non tarifaires mais ce sera très difficile à négocier avec les Américains si nous ne mettons pas les choses en ordre chez nous.
    L'un des autres messages de notre prochain rapport est que nous devons créer un marché canadien unique du point de vue de la réglementation et de la déréglementation. Il nous faut abolir toutes ces barrières imbéciles qui existent entre les provinces et nous devons mieux harmoniser les palier fédéral et provincial en ce qui concerne la réglementation de pratiquement tout, très franchement. Le nombre d'exemples de règlement parfaitement imbéciles existant au Canada est absolument effarant.
    Il y a donc trois grands blocs. Le premier est l'Amérique du Nord. Avec quel autre bloc voulons-nous négocier? Avec les Européens, qui sont très tournés vers eux-mêmes? Ils voient leur expansion vers l'Europe de l'Est. Ils sont actuellement très tournés vers les nouvelles économies émergentes de l'Est mais je crois qu'il y a aussi autour de l'Europe une sorte de mur qui fait qu'il sera très difficile au Canada de faire plus de commerce avec l'Europe.
    Allons-nous donc nous tourner vers l'Ouest, où les taux de croissance sont spectaculaires? La Chine connaîtra une croissance de 8 à 10 pour cent par an pendant les 20 prochaines années. L'Inde est 10 ans derrière la Chine et pourrait connaître une croissance encore plus forte pendant 20 à 25 ans.
    Je crois qu'il y aura là des occasions extraordinaires mais elles exigeront un changement d'attitude fondamental sur le plan de notre politique étrangère et de la manière dont nous pensons l'Asie. À l'heure actuelle, en fait, nos parts de marché sont en train de chuter dans des pays comme la Chine. Nous avons constaté une baisse de notre part du commerce et de l'investissement au cours des 10 dernières années parce que nous n'avons pas de plan.
    Je suis donc très fortement en faveur d'une politique à deux volets. Nous pouvons approfondir l'ALENA mais nous devons commencer aussi à voir comment étendre notre place sur le marché asiatique en très forte croissance.

  (1025)  

    Avant de donner la parole à M. Myers, puis-je vous demander, M. Hodgson, de préciser ce que vous avez dit au sujet du commerce interprovincial car c'est très intéressant. J'étais le critique officiel du Parti réformiste pour le commerce interprovincial en 1996-1997, alors que notre accord sur le commerce intérieur était très faible. J'ai parlé à des propriétaires d'entreprises qui se préparaient alors à partir aux États-Unis -- et certains l'ont fait -- pour obtenir un accès plus facile aux autres provinces canadiennes. Vous voyez à quel point notre situation est aberrante. Voilà où nous en sommes.
    Votre remarque était excellente et je vous en remercie.
    M. Myers.
    Comme vous le savez, monsieur le président, il est très difficile de traverser ce pays en camion car on est confronté à des règlements de transport différents dans chaque province. De ce fait, une grande partie de notre camionnage passe par les États-Unis. Vous avez donc raison, il est extrêmement important de résoudre notre problème de commerce interprovincial, surtout maintenant.
    Permettez-moi de faire une remarque d'ordre général sur l'orientation de notre politique du commerce international. En fait, celle-ci ne devrait pas être formulée en fonction de principes politiques mais de la réalité des entreprises. Les entreprises sont en Amérique du Nord. Elles se développent ailleurs mais la diversification de notre politique commerciale devrait être fondée sur les possibilités d'affaires qui existent.
    En outre, je conviens qu'il nous faut une approche très différente en Amérique du Nord. Nous devons voir des choses comme... et c'est en dehors de l'ALENA. On doit voir le dossier différemment. La majeure partie de notre commerce avec les États-Unis se fait sans problème mais une grande partie du commerce entre le Canada et les États-Unis, surtout celui des petites entreprises, ne se fait pas sans tarifs de douane en vertu de l'ALENA. Les coûts administratifs, les règles d'origine et les faibles droits de douane que nous avons déjà font qu'il est beaucoup moins coûteux pour les entreprises de ne pas tirer parti des droits de douane nuls de l'ALENA. Elles le font en acceptant de payer les droits de douane existants.
    Avec l'ALENA, nous avons des problèmes concernant les règles d'origine, dont beaucoup sont très restrictives. Il existe par exemple au Canada un fabricant d'équipement qui ne peut exporter sans droits de douane aux États-Unis à cause de règlements très protecteurs inscrits dans les règles d'origine -- parce qu'une partie de son équipement vient d'Europe. Pour moi, ça ne tient pas debout. Voilà le genre de chose qu'il faut éliminer en négociant avec les États-Unis.
    Ce que dit Ben sur la réglementation est juste. Nous avons des obstacles réglementaires au Canada même. Il est important de nous demander s'il est vraiment nécessaire que les choses soient différentes d'une province à l'autre, afin de rendre notre système de réglementation plus efficace. Dans beaucoup de domaines, comme celui du déodorant, je ne vois vraiment pas pourquoi nous avons besoin de règlements différents au Canada. Nous devons nous pencher sur cette question mais de manière très ciblée, au cas par cas. Ça veut dire des négociations beaucoup plus intenses avec les États-Unis.
    Nous voyons actuellement beaucoup de restrictions sur le marché américain sous forme de lois obligeant les organismes publics à acheter américain, et sous forme de RAIR et de restrictions imposées aux gens pouvant travailler dans le secteur de la défense du Canada.
    Les règlements frontaliers sont en train de devenir de plus en plus restrictifs. Je crains très sérieusement qu'ils deviennent des obstacles non tarifaires bloquant notre accès au marché américain. Les problèmes frontaliers sont très importants. Il nous faut régler les questions d'infrastructures de transport et de complexité des règlements à la frontière.
    Tout cela est important. Bons nombres de ces choses sont négociées dans le contexte du partenariat sur la sécurité et la prospérité et nous devons avoir une position de pointe à ce sujet. Or, j'ai l'impression que nous sommes encore des suiveurs. Nous devrions être beaucoup plus dynamiques.
    L'autre remarque que je veux faire au sujet de l'Amérique du Nord est que, quand nous nous penchons sur les problèmes, nous avons tendance à voir les problèmes bilatéraux ou trilatéraux au sein de l'ALENA. Or, la réalité est qu'il y a en Amérique du Nord des problèmes de compétitivité communs qu'il faut régler si nous voulons être compétitifs mondialement. Nous avons des problèmes communs d'amélioration des compétences de la main-d'oeuvre, d'amélioration de la compétitivité et d'instauration des systèmes d'investissement dont nous avons besoin pour nous développer. Nous faisons face à des défis provenant de l'Asie et d'autres marchés. Si nous n'arrivons pas à régler ces problèmes entre nous, en tant que nord-américains, il nous deviendra très difficile d'être compétitifs.
    Pour ce qui est de l'autre aspect de nos négociations avec les États-Unis, il n'y a pas seulement les questions bilatérales, il y a aussi les questions qui touchent toute l'Amérique du Nord, et pour lesquelles des politiques communes peuvent être élaborées. À moins que le Canada ne prenne les devants à ce sujet, nous serons des suiveurs, et nous serons perdants.

  (1030)  

    Merci, monsieur Myers.
     Je donne la parole à M. Murphy. Nous pouvons continuer jusqu'à 10 h 55 car M. Julian a généreusement accepté de reporter à plus tard le débat concernant sa motion -- la seule dont nous étions saisis jusqu'à maintenant. L'autre, il pourra la déposer quand il voudra et il n'a pas l'intention de le faire aujourd'hui.
    Nous aurons une discussion de cinq minutes sur le projet de loi C-24. Je ne pense pas qu'elle durera plus longtemps. Ensuite, nous pourrons déjeuner de manière informelle à 11 heures. Tous les membres du comité, les employés et les autres invités seront les bienvenus pour le déjeuner.
    J'ai maintenant sur ma liste messieurs Temelkovski, Maloney et Williams.
    M. Murphy, nous allons terminer avec votre réponse à M. Cannan sur cette question.
    Très bien. Je serai bref, monsieur le président.
    M. Cannan avait posé plusieurs questions en une. Il avait d'abord fait une remarque au sujet de la formation professionnelle et j'en parlerai à la fin.
    Je voudrais juste dire un mot sur l'importance de la relation nord-américaine. Comme je l'ai dit au début de mon intervention, appelez-la comme vous voulez, dites que c'est la première de toutes si vous voulez, mais il est incontestable qu'elle est primordiale et que c'est là que vous devez concentrer votre attention selon nos membres.
    J'allais dire deux choses. L'une concernait la réglementation mais, comme on vient déjà de beaucoup en parler, je n'insiste pas. L'autre est qu'il faut aborder ces questions de manière stratégique, qu'il s'agisse de négocier avec les États-Unis, de négocier avec nos partenaires de l'ALENA ou d'envisager des négociations commerciales multilatérales. Il faut le faire de manière stratégique.
    Si nous faisons ça, je pense que nous avons quelque chose à exploiter avec le PSP, le Partenariat pour la sécurité et la prospérité, qui a été lancé par les trois partenaires de l'ALENA. Nous espérons beaucoup qu'en réunissant ces initiatives... et je sais qu'il y en a quelque 300 dans le PSP, ce qui rend la chose un peu intimidante. Toutefois, quand les dirigeants des trois pays se sont réunis, plus tôt cette année, ils se sont entendus sur cinq thèmes de priorité et la réglementation en fait partie. J'en suis heureux.
    C'est la même chose pour la frontière. Jay en a déjà parlé et c'était le deuxième élément que je voulais mentionner. Je ne pense pas que vous pourrez jamais consacrer trop de temps à cette question qui est primordiale pour nous.
    Quel est le contexte de cette discussion aujourd'hui? Il y en a deux très différents. Le premier est le nôtre, qui est très intéressé, du point de vue du commerce, par le renforcement de la sécurité. Mais nous traitons avec notre partenaire du Sud qui est fondamentalement concentré sur les questions de sécurité. Pour lui, tout part de là. Ça ne finit pas là mais c'est nous qui faisons des pressions sur cette question avec l'Amérique pour que les questions de circulation des gens et des biens fassent partie de la discussion sur la sécurité. Nous devons donc appuyer les objectifs concernant la sécurité et nous devons continuer à nous battre sur... et je pense que le PSP nous aidera à cet égard.
    Voilà les deux remarques que je voulais faire et, s'il nous reste du temps plus tard, monsieur le président, je parlerai des compétences professionnelles.
    Merci, M. Murphy.
    M. Temelkovski.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    On a beaucoup parlé des questions de frontière. On a beaucoup parlé du commerce interprovincial. Vous avez parlé de la Porte d'entrée du Pacifique, des chemins de fer, des transports et des ports.
    Nous étions récemment à Vancouver où nous avons rencontré des responsables des autorités portuaires qui nous ont dit sans aucune ambiguïté qu'il leur est absolument impossible d'accueillir plus de marchandises à l'importation si nous ne réglons pas nos problèmes d'infrastructures.
    Pouvons-nous augmenter notre commerce de 20 pour cent sans rien changer à notre infrastructure? Je ne le crois pas.
    Notre main-d'oeuvre a-t-elle les compétences dont nous avons besoin et dont nous aurons besoin dans les 10 prochaines années? La réponse est non.
    Pouvons-nous transporter plus rapidement nos marchandises aux États-Unis comme ils le font en Europe?
    Les frontières sont tombées. Quand nous allons là-bas et que nous voulons passer d'un pays à un autre, nous ralentissons aux frontières mais les douaniers nous font signe d'aller plus vite, ce qui veut dire que le commerce va de plus en plus vite.
    Que faisons-nous chez nous? Nous parlons de murs avec les États-Unis. Nous parlons de donner des armes à feu à nos douaniers. Nous parlons de passeports. Ne pensez-vous pas que tout cela est contraire au commerce? À mon avis, si.
    À plus petite échelle, si je dois importer un sac de fèves au Canada puis le transporter d'un bout à l'autre du pays, et si je sais que je ne le pourrais pas... avant d'aller dehors nous ferions mieux de voir dedans et de nous assurer que notre propre barrière est réparée, pour sortir et pour entrer. Nous avons des problèmes de main-d'oeuvre. Nous avons des problèmes de paperasse avec tout le commerce qui entre et qui sort. Nous l'avons vu avec le projet de loi C-24. Il y aura encore plus de paperasse à remplir. Est-ce que ça nous prépare pour l'étape suivante? C'est une question dont j'aimerais parler.
    L'autre question est de savoir si nous devrions commercer avec de grandes économies comme la Chine, le Brésil et l'Inde ou si nous devrions, en même temps, commercer avec d'autres économies.
    J'ai été en affaires pendant 20 ans et l'expérience m'a appris que le commerce se bâtit sur des relations. Chaque fois qu'il y a un nouveau président ou premier ministre, nous voulons voir qui a été voir qui en premier. Pour bâtir quoi? Des relations. Au Canada, nous avons beaucoup de gens de beaucoup de pays différents qui ont des relations avec un très grand nombre de pays. Voilà des ressources naturelles dont dispose le Canada et que nous n'exploitons même pas à 5 pour cent de leur capacité.
    il nous est très facile de faire du commerce dans le monde entier car nous parlons les langues, nous comprenons les cultures et nous savons comment les autres font des affaires. C'est très facile pour nous de faire ça mais sommes-nous capables de mettre de l'ordre dans notre maison, de développer chez nous la capacité qui nous permettra de faire venir tous ces marchandises et de faire toutes nos exportations? À l'heure actuelle, je ne peux répondre oui avec certitude. Au lieu de nous attaquer aux grandes économies, pour faire du commerce, nous devrions peut-être commencer avec les petites. Voyez-vous, les petites économies d'il y a 20 ans sont aujourd'hui de grandes économies.

  (1035)  

    Comme l'a dit Ben, le plan à long terme devrait être de commencer avec les petites économies. Certaines deviendront peut-être les tigres géants auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui.
    Merci, monsieur. Vous avez fait des remarques importantes et posé des questions importantes. Voyons si nous pouvons concentrer les réponses sur la question des pays avec lesquels nous devrions envisager nos prochains accords bilatéraux ou de meilleures relations commerciales.
    M. Murphy.
    Je pense qu'il y a là beaucoup de matière à réflexion.
    En ce qui concerne la situation nord-américaine et notre relation avec les États-Unis, nous avons à bien des égards une économie intégrée mais nous avons encore une frontière qui nous sépare. Voilà le défi. Le capital est très mobile. Pour les entreprises qui envisagent d'investir dans le monde entier -- et nous leur parlons tous les jours -- la frontière est un très gros problème et nous devons le résoudre. Nous devons nous demander comment, face à ce problème de frontière, nous pourrons nous assurer que notre marché continuera à se développer.
    L'une des questions que nous avons posées au gouvernement -- et qui commence à obtenir une certaine traction -- est cette notion de dresser un plan d'urgence en cas de fermeture de la frontière. Comment relancer les opérations après? Qui sera concerné? Qui aura la priorité? Nous avons beaucoup travaillé là-dessus et nous avons cerné certains principes pour fonder notre réponse. L'Agence des services frontaliers du Canada et d'autres organismes ont travaillé avec nous sur cette question. Nous pensons que c'est extrêmement important.
    En ce qui concerne les activités en dehors de l'Amérique du Nord, j'ai dit au début que nous devrions nous concentrer sur l'OMC. La réalité avec l'OMC nous oblige à réfléchir à ce que nous pouvons faire d'autre. Les accords bilatéraux en sont une partie énorme, que ce soit avec le CA4 ou la Corée. Nous les avons sur notre radar.
    Il y a aussi la Chine et l'Inde. Nous avons récemment produit une étude importante sur la Chine, et je crois d'ailleurs qu'elle a été distribuée aux membres du comité. Nous sommes sur le point de faire la même chose sur l'Inde. Ces deux marchés posent des défis importants au Canada en ce qui concerne notre part des investissements et du commerce. Tous les deux sont extrêmement importants pour les investisseurs canadiens et pour nos entreprises. Nous devons donc également en faire une priorité. Nous devons nous demander comment nous allons faire ça stratégiquement.

  (1040)  

    Je veux revenir à cette question des petits marchés, comme une manière de prendre la température de l'eau. Ça me ramène à ce que je disais au début sur le fait que le Canada devrait négocier ses propres accords bilatéraux.
    Nous devons décider si ces accords seraient stratégiques au sens où ils créeraient une marque ou un style purement canadien de négociations commerciales, ou si nous devrions simplement envisager les marchés ayant une importance stratégique. C'est ce que nous avons essayé de faire dans le passé. Nous avons signé un accord avec le Chili -- une petite économie où nous pouvions prendre la température de l'eau -- et notre commerce avec le Chili a baissé depuis lors. Bien souvent, quand nous signons des accords avec des petits pays, nous constatons que le volume commercial n'est tout simplement pas là.
    Nous faisons la majeure partie de notre commerce avec les États-Unis, l'Union européenne, la Chine et le Japon. Je ne sais pas si nous avons beaucoup à apprendre en signant des accords avec des petites économies, si ce n'est sur les accords eux-mêmes, ce qui pourrait être une marque ou un style canadien de négociation pouvant déboucher sur des accords multilatéraux ou régionaux de libéralisation. Par exemple, signer des accords avec le Chili et avec d'autres marchés sud-américains pourrait déboucher sur l'ouverture de négociations dans l'ALENA. Dans ce sens, ces petits accords ne sont pas sans intérêt mais, sur le plan du lien économique ou de ce qu'ils nous apprennent, ils ne nous apportent pas grand-chose.
    M. Hodgson.
    Dans le même ordre d'idées, vous avez absolument raison, les relations sont importantes, mais les règles le sont aussi, tout comme les voies aériennes et les liens de transport. Nous avons l'avantage d'être un pays développé. Nous accueillons des immigrants du monde entier. On peut dire cependant que nous n'avons pas tiré parti de notre connaissance des langues, des cultures locales, de toutes les choses que nous avons, que ce soit avec l'Europe centrale ou l'Europe de l'Est, avec l'Afrique du Nord ou l'Asie. Nous avons une occasion exceptionnelle, pour les entreprises ainsi que pour le gouvernement, d'obtenir une capacité interne -- de vrais experts linguistiques, des gens qui connaissent le marché polonais ou le marché chinois -- et de faire des choses très concrètes.
    Donc, oui, les relations comptent, mais beaucoup d'autres choses aussi, et cela s'applique au grand problème et au petit problème. Le facteur vraiment crucial est de savoir si l'on peut vraiment obtenir un avantage réel, si l'on peut vraiment intégrer d'une certaine manière, afin que nos entreprises puissent trouver une raison de faire effectivement des affaires sur ces marchés.
    L'exemple du Chili est excellent, Ben, car nous avons abaissé les tarifs douaniers mais il n'en est rien résulté, et c'est parce que nous n'avons pas trouvé le moyen d'intégrer vraiment les chaînes d'approvisionnement des entreprises canadiennes et des entreprises chiliennes.
    C'est ça ma vraie crainte avec la Chine, Mike. C'est que nous n'avons pas vraiment trouvé le moyen d'intégrer la Chine dans nos chaînes d'approvisionnement ou d'intégrer les entreprises canadiennes dans les chaînes d'approvisionnement chinoises. Nous sommes perçus comme un fournisseur de matières premières et c'est tout. Nous achetons de plus en plus de produits chinois et, bien sûr, nous avons un énorme déficit commercial qui atteint près de 20 milliards de dollars aujourd'hui. Les Chinois trouvent le moyen de s'intégrer à notre chaîne d'approvisionnement. Nous avons pas trouvé le moyen de nous intégrer aux leurs.
    Si nous voulons faire des progrès sur une base bilatérale, il nous faut trouver le facteur de succès crucial -- ce que nous pouvons offrir à l'autre pays et ce qu'il peut nous offrir.

  (1045)  

    Merci.
    M. Myers.
    Je suis un peu inquiet de voir que les problèmes du marché mondial peuvent être très intimidants. Nous savons quels sont les problèmes, nous faisons de bonnes analyses mais, quand vient le moment de faire des choses concrètes, nous levons les bras au ciel en disant que nous ne pouvons rien faire. Je pense que nous devons nous concentrer sur des mesures concrètes qui peuvent être mises en oeuvre.
    L'un des problèmes, qui me semble très important pour ce comité, c'est que les accords commerciaux ne sont peut-être pas nécessairement le meilleur moyen d'encourager les affaires internationales -- ou en tout cas les accords commerciaux traditionnels, comme le disait Glen. La négociation d'accords sur le transport aérien est cruciale, tout comme la négociation d'accords sur l'investissement ou d'accords fiscaux. Cela veut simplement dire que nous devons peut-être aller voir ailleurs pour trouver le type d'infrastructure, le type d'accès au marché et le type de services commerciaux qui sont nécessaires pour l'expansion de nos entreprises.
    Nous négocions actuellement un accord avec la Corée-du-Sud. Cet accord ne veut pas dire grand-chose car les tarifs douaniers actuels sont déjà très bas, voire inexistants. Le problème avec la Corée est un problème de barrières non-tarifaires, de réglementation, et je ne pense pas que cet accord permettra de le résoudre.
    Voilà certains des problèmes : comment pouvons-nous négocier multilatéralement, bilatéralement ou régionalement au sujet des vrais obstacles au commerce sans renoncer aux avantages dont nous bénéficions actuellement? J'espère que l'accord avec la Corée réussira mais il ne réussira pas si nous ne pouvons pas obtenir un accès garanti au marché coréen.
    C'est juste un exemple. Nous nous inquiétons parce que nous avons un déficit commercial croissant avec la Chine -- comme toute l'Amérique du Nord -- mais ce que cela signifie vraiment, c'est qu'on peut acheter un conteneur au Canada ou louer un conteneur au Canada au dixième du prix auquel nous pouvons le louer à Shanghai. Dofasco et Stelco à Hamilton peuvent expédier 1 tonne d'acier à Shanghai à un prix moins élevé que les entreprises de Shanghai ne peuvent l'acheter au nord de la Chine.
    Pourquoi n'en profitons-nous pas? Que devrions-nous faire pour en profiter? Ce qu'on constate, c'est qu'il y a beaucoup de questions de réglementation et de taxes auxquelles sont confrontées les compagnies ferroviaires qui ne permettent pas à ces conteneurs de circuler facilement au sein de l'Amérique du Nord. Peut-être devrions-nous nous pencher sur ces questions de taxes et de règlements, ce qui nous permettrait de tirer avantage de ces conteneurs bon marché afin de pouvoir les bourrer de produits à expédier en Chine.
    Pourquoi avons-nous ces contraintes d'ordre fiscal et réglementaire? Parce que ces règlements ont été adoptés depuis les années 1800. Il est temps de les revoir. Je pense qu'il y a des choses concrètes qu'on peut faire et au sujet desquelles le gouvernement pourrait prendre l'initiative.
    Dans tous ces cas, cependant, les politiques et le gouvernement fédéral ne suffisent pas. Il faut toujours des ports, des chemins de fer, des camionneurs, des douaniers, des agents de sécurité. Personne ne réglera ces problèmes tant que quelqu'un ne fera pas preuve d'initiative sur la base d'une vision et d'une stratégie axées sur des résultats concrets, et je pense que ces résultats doivent être adaptés à ce que veulent les entreprises.
    Nous faisons beaucoup plus d'affaires avec l'Australie et l'Afrique qu'avec beaucoup de pays asiatiques. Pourquoi négocions-nous donc des accords avec l'Asie? Pourquoi ne regardons-nous pas plus loin pour trouver ce qui est vraiment nécessaire pour faciliter les affaires internationales? Je ne pense pas que la politique du gouvernement soit l'élément primordial. Ce qui compte avant tout, c'est de comprendre quels sont les problèmes des entreprises et de prendre l'initiative de leur fournir des solutions concrètes, en faisant venir les bonnes personnes à la table pour trouver les bonnes solutions.
    Merci.
    Il nous reste environ cinq minutes avant de consacrer cinq minutes au projet de loi C-24.
    Nous pouvons apparemment continuer. Nous pourrions prendre nos sandwiches à 11 heures et revenir ici pour continuer les discussions, au moins pendant un certain temps, peut-être une demi-heure. Cela vous convient-il ?
    M. Hodgson, je crois comprendre que vous devez partir à 11 heures mais nous pourrons continuer avec les trois autres.
    Très bien, il semble que les autres témoins peuvent rester.
    Je donne la parole à M. Maloney. Je sais que vous attendez depuis longtemps.

  (1050)  

    Le consensus des témoins est que notre avenir commercial réside avant tout aux États-Unis et que c'est donc là que nous devrions faire porter nos efforts. Les États-Unis ont une dette galopante et ma crainte est que, s'ils trébuchent, nous trébucherons aussi. Nous dépendons tellement d'eux. Si l'économie américaine entre en récession, serons-nous plus gravement touchés au Canada?
    Ceci nous amène à la suggestion d'une politique bicéphale, avec une voie axée sur la Chine, le Brésil et l'Inde, mais M. Murphy a terminé son intervention en demandant comment nous pourrions stratégiquement prendre pied dans ces pays émergents.
    La question est de savoir si nous devrions craindre d'être en contact trop étroit avec les États-Unis, sur le plan commercial, et de savoir comment prendre stratégiquement pied sur les marchés émergents que sont le Brésil, l'Inde et la Chine.
    Nous allons commencer avec M. Murphy.
    Merci, M. Maloney.
    Je ne suis pas de ceux qui vous diront que nous sommes trop proches des États-Unis. Nos membres souhaitent continuer à faire des affaires avec les États-Unis. L'un des facteurs dont nous n'avons pas encore parlé aujourd'hui est la nature et la taille de nos entreprises. Comme nous le savons, la plupart de nos membres sont des PME -- puisque la plupart des entreprises canadiennes sont des PME. Nous avons très peu de grandes entreprises parmi nos membres bien que nous en ayons dans de nombreux secteurs de l'économie. En revanche, nous avons beaucoup de petites firmes qui font face à leurs propres problèmes, même lorsqu'elles veulent traiter avec les États-Unis, pour les raisons que nous avons mentionnées aujourd'hui. Certains de ces problèmes se posent également aux grandes entreprises mais d'autres sont particuliers aux petites qui essayent de faire des affaires en dehors de nos frontières. De ce point de vue, je pense qu'il y a encore beaucoup à faire avec les États-Unis. Que ce soit le PSP, comme je l'ai dit, et ses 300 initiatives axées sur des choses importantes comme améliorer la frontière et éliminer -- cette merveilleuse expression -- la tyrannie des petites différences de réglementation entre nos deux pays... Je pense que c'est très bien dit. Toutes ces choses doivent rester au premier plan de nos préoccupations.
    Pour ce qui est de transiger avec les autres économies, c'est un secteur incroyablement concurrentiel. Puisque nous parlons d'accords bilatéraux, j'ai vu récemment des chiffres indiquant que nos amis du sud de la frontière ont une très grande puissance de frappe commerciale, si je puis m'exprimer ainsi, quand ils proposent à d'autres pays de négocier un accord de libre-échange. Je pense qu'ils en ont fait adopter une douzaine récemment par le Congrès, que trois autres sont prêts à être présentés et 11 autres sont en cours de négociation. Voilà un niveau d'activité formidable. Nous ne faisons rien de semblable de notre côté.
     Avec la Chine, nous avons essayé de faire deux choses dans le document que nous avons produit. Nous avons pris acte de l'opportunité qu'elle offre. Je pense que Glen a parfaitement raison de dire qu'il y a des défis. Il y en a beaucoup. Certains relèvent de notre propre économie, du point de vue de l'aménagement des infrastructures dont nous aurions besoin pour profiter des occasions de commerce avec la Chine.
    Nous avons essayé de nous pencher sur tous les aspects de la relation et l'une des choses sur lesquelles nous avons fini par nous concentrer -- c'est l'une des 9 ou 10 que nous avons incluses dans notre document -- est cette question de relations que M. Temelkovski a soulevée en demandant si nous sommes bien positionnées en Chine. L'une des choses dont le gouvernement a fait grand cas l'an dernier -- et c'est une chose que nous avons appuyée -- a été d'ouvrir plus de consulats aux États-Unis. C'était une bonne chose à faire. Nous sommes maintenant représentés dans un plus grand nombre que jamais de régions des États-Unis mais nous ne faisons pas encore très bien à ce chapitre en Chine.
    Il y a beaucoup de choses que nous pourrions faire, à condition de réfléchir.
    La gouvernance, du point de vue de la gestion du dossier au sein du gouvernement du Canada, doit aussi être prise en considération. Sommes-nous focalisés? Y a-t-il quelqu'un qui assume la responsabilité première de faire preuve de leadership sur ce dossier? Je ne pense pas que ce soit encore très bien coordonné. Je pense qu'on commence juste à s'organiser. L'une des raisons pour lesquelles nous avons produit notre rapport est que nous voulions contribuer à la réfection du ministère du Commerce sur le processus en cours.
    Je crois qu'il y a un certain nombre de choses précises que nous pouvons faire mais ce serait l'une des manières, du point de vue structurel, de démarrer.

  (1055)  

    M. Hodgson, je sais que vous devez partir à 11 heures. Je sais que M. Williams doit également nous quitter à 11 heures et qu'il aimerait poser une question.
    Pourrions-nous passer à la question de M. Williams et revenir ensuite aux autres réponses à votre question, M. Maloney?
    John.
     Je n'ai pas vraiment de questions à poser, je vais plutôt faire un commentaire.
    Quand on parle de politique commerciale, on doit tenir compte de l'objectif fondamental qu'on veut atteindre, de la stratégie qu'on veut mettre en oeuvre et des détails de ce qu'on veut faire, et identifier les choses qui entravent le libre-échange et celles qui y contribuent.
    Si l'on se penche sur les succès du passé, comme les Grands Lacs, la Voie maritime, l'ALENA et d'autres mesures importantes qui ont contribué à notre commerce international, il faut se demander qu'est-ce qui se profile à l'horizon. Comme l'a dit M. Myers, si nous avons des règlements désuets qui entravent la circulation des marchandises et nous empêchent de tirer parti des conteneurs bons marchés pour expédier en Asie, nous devons nous demander comment les remplacer et pourquoi on ne le fait pas.
    On a fait grand cas de la Porte d'entrée du Pacifique mais qu'en est-il de l'Halifax et des expéditions transcontinentales? Qu'en est-il de l'Arctique? La région s'ouvrira-t-elle dans une vingtaine d'années et comment pourrons-nous en tirer parti? Comment pouvons-nous obtenir un avantage stratégique?
    Voyez ce que nous avons. Nous avons des ressources; nous avons de la valeur ajoutée, que nous négligeons depuis tellement longtemps; nous avons des industries manufacturières et nous avons le savoir.
    Le savoir est la clé de l'avenir. L'Inde et la Chine vont nous donner du fil à retordre dans le secteur manufacturier. Il faut réaliser que la fabrication se déplace vers cette partie du monde. Nous avons le capital intellectuel et, si nous n'investissons pas dans le capital intellectuel pour pouvoir répondre aux besoins des clients, notre niveau de vie va sérieusement baisser. Nous devons donc être beaucoup plus stratégiques et aller au-delà d'une simple adaptation de l'ALENA, par exemple.
    Autrefois, la taxe de vente à la fabrication nuisait gravement à nos exportations mais personne ne prenait la peine de s'en occuper. C'est la même chose avec la Commission du blé, qui entrave sérieusement l'ajout de valeur. Personne n'a rien fait à ce sujet.
    Le Pacte de l'automobile fut une grande réalisation mais nous avons maintenant un goulot d'étranglement et nous ne pouvons plus faire passer nos marchandises à la frontière. Qui fait quelque chose à ce sujet? Ces problèmes existent depuis des années mais personne ne fait rien pour les régler. Donc, quand on parle de politique commerciale, voilà les choses qu'il faut cerner et essayer de régler.
    Merci, M. Williams.
    La cloche sonne parce qu'il y a un vote. Il y a eu une alerte à l'incendie à l'Édifice du centre mais elle est passée. C'est juste pour votre information.
    Une voix : Le feu est-il éteint?
    Le président : Non, il continue de faire rage mais ça ne nous dérange pas, nous sommes dans l'Édifice de l'ouest.
    Vous avez la parole, M. Hodgson.
    Je voulais revenir sur la remarque de M. Williams. En fait, Ben et moi-même avons publié ensemble un rapport quand il travaillait avec moi l'an dernier au Conference Board. C'était un rapport sur les exportations de services. Je constate que nous discutons depuis 1 h 30 et que nous n'avons pas encore parlé des services. C'est précisément pourquoi nous avons publié ce rapport.
    Le message fondamental de ce rapport, intitulé Opportunity Begins at Home, est que ce ne seront pas de nouveaux accords commerciaux, Jay, qui nous permettront de vendre plus de services, qui représentent 70 pour cent de notre PIB. Certes, nous aurons probablement besoin d'être présents dans les villes chinoises mais il faudra avant tout entreprendre une réforme chez nous.
    Je crois que cet argument vaut pour toute la discussion que nous venons d'avoir car, dans notre rapport, nous avons souligné les mesures unilatérales que nous devons prendre au Canada même et le fait que nous ne sommes pas prêts à parler de libre-échange dans des secteurs tels que les services de santé, les services d'éducation ou les services de transport. Nous avons tenté d'avancer l'idée -- et c'est peut-être un peu radical -- que nous pourrions peut-être nous positionner comme exportateurs de services, ce qui pourrait être énorme, par des mesures unilatérales ou en prenant vraiment l'initiative de remettre de l'ordre chez nous, ce qui nous permettrait de jouer un rôle beaucoup plus grand dans l'économie mondiale. C'est là qu'il y aura vraiment de la valeur ajoutée à l'avenir. Pas en vendant des rondins et des cailloux ni même peut-être en vendant des automobiles mais en vendant de la matière grise.
    Je sais que les Chinois investissent également dans la matière grise, tout comme les Indiens, les Européens et tous les autres. Mais vous savez quoi? Nous n'avons pas à dominer le marché mondial de la matière grise. Il nous suffit de trouver des créneaux d'excellence. Notre part du PIB mondial est 2 pour cent. Imaginez que nous trouvions les bons 2 pour cent, les meilleurs 2 pour cent, pour vraiment créer de la richesse de manière continue. Nous aborderons aussi cette question dans le rapport que nous publierons en janvier.
    Nous lirons ce rapport avec beaucoup d'intérêt.
    M. Hodgson, je sais que vous devez partir.

  (1100)  

    Oui, dans cinq minutes.
    Partez quand vous voulez. Merci beaucoup d'être venu et nous surveillerons attentivement la publication de votre rapport.
    Merci de m'avoir invité.
    Est-ce que la version Maclean's de votre rapport sera une sorte de condensé à la Reader's Digest?
    Ce sera un aperçu préliminaire.
    Presque tout un numéro consacré à ça, ça paraît fascinant.
    C'est le magazine qui aura rédigé le condensé, bien sûr, car il essaye d'atteindre un public plus large que notre public habituel.
    Merci.
    Je constate que le déjeuner n'est pas arrivé mais nous allons quand même faire une pause de cinq minutes.
    Messieurs, vous pouvez rester à la table ou faire une pause aussi. Nous allons avoir une très brève discussion sur le projet de loi C-24, concernant l'accord sur le bois d'oeuvre, puis nous prendrons notre déjeuner et continuerons notre discussion.
    Les membres du comité peuvent peut-être rester quelques minutes pour parler du projet de loi C-24 et de ce que nous ferons mardi à ce sujet.
    Nous suspendons la séance. Je ne sais pas si c'est la bonne expression car, en réalité, nous continuons.
    Au sujet du projet de loi C-24, je n'ai que deux choses à dire. Bien sûr, les premiers témoins seront des représentants du ministère, qui viendront mardi. C'est la procédure normale. Pendant cette discussion, il sera important, comme nous l'avons déjà dit, de limiter le débat à l'accord de mise en oeuvre et d'éviter d'engager un débat sur l'accord lui-même. L'accord a été signé et on ne peut pas y revenir. En plus, le budget a été voté et approuvé. Manifestement, cette question est réglée.
    Notre objectif fondamental sera d'entendre des experts au sujet de l'accord de mise en oeuvre. Nous aurons quatre experts et des représentants du ministère. Trois ont été recommandés par M. Julian, et l'autre, je ne sais pas. Les trois de M. Julian sont Elliott Feldman -- nous l'avons déjà accueilli devant notre comité --, Steven Shrybman, de Goldblatt and Mitchell, et Darrel Pearson, de Gottlieb & Pearson de Montréal. Nous pourrons décider l'ordre de leur comparution. Il y aura aussi le Bureau du bois de sciage des Maritimes qui a des préoccupations d'ordre technique au sujet de l'accord.
    Discussion?
    M. Julian.
    Monsieur le président, je croyais que nous étions convenus de n'examiner que des questions d'ordre juridique. Si nous discutons de questions d'ordre technique en invitant le Bureau du bois de sciage des Maritimes, il y a aussi des organisations de la Colombie-Britannique qui voudront témoigner. Cela élargit la portée de la discussion. Je n'ai absolument rien contre le Bureau mais je ne veux pas non plus désavantager les autres groupes de l'industrie qui pourraient avoir des préoccupations similaires à celles du Bureau.
    Je me suis peut-être mal exprimé. Ils veulent venir parler des aspects juridiques de l'accord.
    Si ça ne vous dérange pas, monsieur le président, j'aimerais en parler aux gens de ma région.
    M. LeBlanc.
    Je peux peut-être vous aider, monsieur le président.
    Sur cette question précise, et sans prétendre m'exprimer au nom du Bureau du bois de sciage des Maritimes, je crois comprendre que le Bureau discute actuellement avec des hauts fonctionnaires et des membres du gouvernement. Il semble y avoir un problème de libellé. L'une des phrases de l'accord ne se retrouve pas dans la législation de mise en oeuvre. Sur les conseils d'avocats, le Bureau souhaite que le passage pertinent soit modifié. Il espérait qu'un membre du gouvernement proposerait un amendement à cette fin. Je ne pense pas que nous ayons besoin d'accueillir le Bureau. Le greffier peut vérifier avec ses représentants. Je leur ai parlé ce matin -- c'est pourquoi j'avais quelques minutes de retard -- et je ne pense pas qu'ils tiennent à venir devant le comité.
    Je respecte ce qu'a dit M. Julian. Notre intention était de parler uniquement des aspects strictement juridiques et, très franchement, la discussion de ce matin comme celle de mardi était assez intéressante. Si nous voulons que le comité se penche sur certaines de ces autres questions, notre préférence serait d'étudier le projet de loi mais sans perdre de temps. Je crois que les préoccupations du Bureau pourraient être satisfaites au moyen d'un amendement que le gouvernement proposera peut-être, et qu'il n'est donc pas nécessaire de le convoquer comme témoin. Évidemment, s'il n'y a pas d'entente sur le libellé de la législation -- nous n'avons pas à en parler maintenant -- le Bureau voudra peut-être venir témoigner. Si nous ouvrons cette porte, nous nous écarterons de l'intention exprimée par M. Maloney et d'autres.

  (1105)  

    Vous avez peut-être raison, M. LeBlanc. Je vous remercie de ces précisions. Nous pourrons peut-être régler la question de cette manière. Nous verrons bien.
    Comme je l'ai dit, j'aimerais prendre note de la situation et en parler à certaines personnes de ma région.
    Je vous tiendrai au courant. Je ne sais pas encore si le Bureau tient particulièrement à comparaître ou s'il veut simplement que son problème soit réglé autrement. C'est un problème d'ordre juridique.
    Si vous êtes d'accord, M. Julian, je vous tiendrai au courant.
    Y a-t-il autre chose à ce sujet?
    M. LeBlanc.
    Je veux juste vérifier quelque chose, monsieur le président. Avez-vous l'intention de convoquer les représentants du ministère mardi, et les quatre autres personnes dont vous avez parlé, jeudi, ou tout le monde sera-t-il ici mardi?
    Seulement trois seront nécessaires. Elles viendront ensemble.
    Et ce sera jeudi?
    Oui.
    Bien. Donc, les deux réunions de la semaine prochaine porteront sur le projet de loi C-24?
    Oui, et nous devrions pouvoir entreprendre l'étude article par article la semaine suivante, si ce n'est pas une semaine de congé.
    Ça n'en est pas une? Bien.
    M. Julian.
    Les trois personnes que j'ai mentionnées ont toute une solide formation juridique et des liens avec l'industrie du bois d'oeuvre. J'aimerais proposer que nous prolongions la séance comme nous l'avons fait mardi et jeudi de cette semaine, en nous réunissant de neuf heures à midi jeudi prochain pour entendre ces trois témoins. Ils viendront avec beaucoup de documents et il vaudrait la peine de prévoir du temps supplémentaire. Si nous n'avons pas besoin de toute la période prévue et si les députés ont pu poser toutes leurs questions, nous pourrons arrêter plus tôt mais je préférerais que l'on prévoie au départ une séance plus longue.
    M. Julian, je conviens avec vous que nous devrions peut-être prévoir une séance plus longue car, comme vous le savez, il y a une limite de temps pour ce projet de loi.
    Pouvons-nous revenir à la question principale? Tout cela me convient. Y a-t-il une objection quelconque à ce qui est proposé?
    Pas d'objection? Très bien.
    Comme le déjeuner n'est pas encore arrivé, continuons avec nos témoins. Nous avons peut-être une demi-heure de plus.
    M. Maloney, pouvez-vous reformuler vos questions pour que nous puissions avoir les dernières réponses?
    C'était une sorte de question à deux volets.
    À deux volets, oui.
    Craignons-nous d'être trop dépendants des États-Unis? S'ils trébuchent, trébucherons-nous aussi? En outre, comment pouvons-nous stratégiquement prendre pied sur les marchés émergents -- Brésil, Inde, Chine -- surtout au moment où notre commerce avec la Chine est en déclin?
    Merci beaucoup.
    M. Tomlin.
    Je vais faire quelques remarques en réponse.
    Je crois qu'il y a un malentendu au sujet de notre dépendance à l'égard des États-Unis, qui est généralement exagérée par les statistiques commerciales. L'Institut C.D. Howe a récemment consacré un rapport à cette question et je vais vous en citer quelques éléments.
    Tout d'abord, nous n'avons pas de bonnes statistiques sur les activités à l'étranger des filiales étrangères de sociétés canadiennes. Nous avons des raisons de croire qu'elles sont peut-être très élevées en Europe et en dehors des États-Unis, ce qui voudrait dire que notre dépendance à l'égard des États-Unis est surestimée.
    Ensuite, il est difficile de mesurer le commerce des services. Nous ne savons pas comment cela influe sur les données entre le Canada et les États-Unis.
    Finalement, dans notre commerce avec les États-Unis, il y a beaucoup d'intrants intermédiaires qui traversent plusieurs fois à la frontière dans chaque sens et sont comptabilisés à chaque passage. On s'est efforcé de corriger ce problème mais il y a encore des éléments qui sont comptés plusieurs fois, ce qui a pour effet de surestimer notre commerce avec les États-Unis.
    Il faut donc faire attention quand on cite les statistiques du commerce et le chiffre de nos exportations vers les États-Unis.
     J'ajoute aussi que l'indice de fluctuation des exportations du Canada est l'un des plus faibles, même quand on le compare à ceux des pays européens qui ont un portefeuille d'exportation très diversifié. Donc, notre dépendance à l'égard des États-Unis est beaucoup moins fluctuante qu'on ne pourrait le penser.

  (1110)  

    M. Tomlin, pouvez-vous nous dire pourquoi? Je peux le deviner mais je voudrais connaître votre réponse.
     Notre mesure de la fluctuation du marché d'exportation ne reflète que les variations d'écarts-types des 10 dernières années.
    Bien. Merci.
    Les États-Unis sont donc un marché relativement stable, ce qui est important pour nous. En ce qui concerne les prévisions, il est vrai que nous trébucherons si le marché américain trébuche. Pour l'éviter, nous n'avons pas beaucoup de solutions car les autres marchés stables vers lesquels nous pouvons nous tourner sont l'Europe et la Chine, avec lesquels nous essayons déjà d'accroître nos relations commerciales. Il n'y a donc pas grand-chose de plus qu'on puisse faire.
    Pour ce qui est de faire du commerce avec d'autres pays, plus petits, la plupart sont également tributaires de l'économie américaine et trébucheront donc en même temps que nous si les États-Unis trébuchent. Nous avons perdu notre temps quand nous avons négocié des accords avec d'autres pays de plus petite taille.
    C'est tout ce que je voulais dire.
    Merci beaucoup.
    M. Myers, veuillez nous pardonner ces discussions parallèles. Nous réglons d'autres questions en même temps mais nous écoutons. Nous avons appris à écouter des deux oreilles.
    Allez-y, M. Myers.
    C'est un talent.
    Je suis d'accord avec M. Tomlin. Si les États-Unis trébuchent, le monde entier trébuche, et c'est une possibilité à l'heure actuelle. Je pense que le déficit et la dette des États-Unis sont très préoccupants. Pour l'an prochain, si je mets ma casquette d'économiste, je pense que l'économie américaine sera en récession ou tout au bord. Je crois que ce sera la même situation pour l'économie canadienne et cela doit donc nous inquiéter.
    Je ne pense pas que la solution soit pour nous de chercher à diversifier notre commerce -- M. Tomlin a raison à ce sujet. Je me trouvais il y a quelques années à Sichuan, en Chine, où j'étais accueilli par le président de l'association chinoise de l'industrie de l'automobile, qui a des bureaux et des usines importantes dans cette province. Il m'a demandé si je savais que la voiture étrangère qui se vendait le mieux dans l'ouest de la Chine était une voiture canadienne et je lui ai répondu que non. Selon nos statistiques, nous n'exportons pas d'automobiles en Chine mais la voiture qui se vend le mieux à Sichuan est fabriquée à Brampton : c'est la Chrysler 300. Nous l'exportons aux États-Unis qui la réexpédient ensuite en Chine. C'est la même chose pour beaucoup de produits et nous n'avons donc pas de connaissance exacte de notre commerce international car une bonne partie se fait sous cette forme et n'est pas saisie par les statistiques.
    Le commerce des services est également très important. Quand on parle de services, je ne connais aucun produit qui sois expédié à l'étranger -- je parle ici d'exportation directe de services -- sans être accompagné d'un bon service, d'un bon savoir. Quand on parle de différence entre une économie du savoir et une économie de la fabrication, la fabrication n'existerait pas si elle ne devenait pas aussi une économie de services et une économie du savoir. Certaines de ces distinctions que font les économistes ne sont pas vraiment pertinentes.
    N'oubliez pas que 60 pour cent de nos échanges commerciaux sont des échanges intérieurs aux entreprises, reliés aux chaînes d'approvisionnement. C'est General Motors qui vend à General Motors et IBM qui vend à IBM. Ce degré d'intégration signifie que nous sommes connectés au sein d'une économie nord-américaine, que ça nous plaise ou non.
    Le nombre d'entreprises individuelles qui font effectivement des affaires à l'échelle internationale est relativement petit et, comme le disait Mike, ce sont généralement des PME. Ce sont des entreprises canadiennes qui se développent très rapidement et c'est à elles que nous devons prêter attention.
    Si j'avais le choix entre négocier un accord de libre-échange avec la Chine, avec tous les retards et toutes les incertitudes que ça implique, et voir comment EDC pourrait étendre son financement des exportations et l'octroi de crédits à la Chine, je sais ce que je choisirais si je dirigeais une entreprise. Je ne choisirais pas d'entamer des négociations de 10 ans qui ne déboucheraient probablement sur rien. Je voudrais plutôt m'assurer d'avoir le genre de services de financement et de services aux entreprises qui me permettraient d'avoir du succès en Chine ou sur n'importe quel autre marché au monde.
    C'est de ça que nous devrions parler quand nous parlons de politique commerciale et de négociation d'accords commerciaux, et nous devons nous pencher attentivement sur ce que font les organismes gouvernementaux, les ministères et les sociétés d'État, pour aider nos entreprises à faire des affaires dans le monde entier.

  (1115)  

    Merci beaucoup, M. Myers.
    M. Fitzpatrick veut intervenir sur cette question.
    Je n'ai que M. Fitzpatrick sur ma liste et j'aurais moi aussi quelques questions. Si quelqu'un veut reprendre la parole, qu'il le fasse. Sinon, nous continuerons la réunion de manière informelle. J'espère que le déjeuner sera arrivé vers 11 h 30. Je crois comprendre que le retard est dû à l'alerte à l'incendie.
    M. Fitzpatrick.
    J'ai lu ces dernières années un livre que j'ai trouvé très profond, The World is Flat, de Tom Friedman. Pour moi, ça a été un signal d'alarme. J'utilise l'analogie de la convergence qui s'est passée avec le Japon et, à mon avis, avec la Chine et l'Inde où nous sommes engagés dans une convergence de 30, 40 ou 50 ans pour absorber le phénomène économique mondial. Pour les pays qui n'en sont pas conscients et qui ne deviennent pas compétitifs, il est tout à fait vrai non seulement qu'ils se feront manger la laine sur le dos mais aussi qu'ils perdront leurs emplois.
    Dans la partie du livre où il disait qu'il y a certaines choses que doit faire une économie moderne pour s'adapter à ça, la liste des choses à faire, les éléments négatifs, je pense qu'il parlait plus, du point de vue des politiques publiques, des États-Unis, mais ça m'a fait penser à une liste équivalente pour le Canada et, à mon avis, ce serait une liste très longue d'éléments négatifs. Je ne pense pas qu'il y ait réellement dans notre pays la volonté politique d'agir mais il se trouve que j'estime que ce type a mis le doigt sur quelque chose, ce Tom Friedman, et que nous faisons l'autruche si nous ne sommes pas prêts à nous pencher attentivement sur ce que nous faisons sur le plan interne.
    Il y a une grave pénurie de main-d'oeuvre dans ma circonscription. On ne trouve pas de travailleurs. Je parle de la Saskatchewan. Il y a dans d'autres régions des gens qui posent des questions pendant la période des questions sur l'amélioration des programmes d'assurance-emploi, par exemple, alors que nos employeurs de la Saskatchewan ont besoin de travailleurs -- et nous avons le droit à la mobilité, etc.
    J'aimerais savoir quelles sont selon vous les choses dont nous devrions nous occuper au Canada même si nous voulons nous réveiller et prendre conscience de la réalité contemporaine qui est que la Chine sera un grand facteur, pas seulement pour les États-Unis mais pour tous les autres pays aussi. Et l'Inde aussi.
    Qui veut répondre en premier?
    M. Murphy.
    Oui, je veux bien lancer quelques idées en réponse. Je crois qu'il y a là des éléments importants. Je vais mentionner quatre choses.
    Du point de vue de la politique fiscale, la compétitivité fiscale est extrêmement importante. Nous en avons déjà parlé, en termes de compétences et d'attirer plus de gens dans la population active. Nous avons participé au processus prébudgétaire avec le Comité des pendant les deux ou trois dernières semaines. C'est la quatrième période budgétaire durant laquelle nous soulevons cette question du matraquage fiscal des Canadiens à revenus modiques -- essentiellement ceux qui gagnent entre 25 000 $ et 45 000 $ par an -- avec la récupération de leurs prestations. En fait, comme le disait Glen un peu plus tôt, leur taux d'imposition marginal est complètement aberrant.
    Il y a donc là une possibilité, en ce qui concerne les compétences, car on dissuade complètement les gens de se perfectionner et d'entrer dans la population active puisqu'ils devront payer un prix gigantesque sur le plan fiscal.
    C'est juste l'un des problèmes de notre fiscalité.
    Je suis totalement d'accord avec vous au sujet de l'assurance-emploi et de son effet dissuasif sur la mobilité de la main-d'oeuvre. Nous avons discuté de cette question au Comité des ressources humaines en juin. Il tient actuellement des audiences sur l'employabilité, ce qui est une question importante pour mettre les gens au travail. Je pense que les facteurs de dissuasion à cet égard sont réels et doivent être réglés.
    L'un de nos autres thèmes est que nous devons cibler les dépenses. Vous devez décider comment vous serez stratégiques en termes de dépenses de programmes. Il y a deux secteurs. L'un est l'infrastructure, qui comprend beaucoup d'éléments. Nous avons parlé des transports, aujourd'hui, et c'est l'un des éléments clés. L'autre est l'enseignement supérieur, en termes de perfectionnement des compétences dans l'économie. Faites de ces deux secteurs votre première priorité.
    Je n'ajoute rien sur la réglementation et le commerce car nous en avons déjà beaucoup parlé aujourd'hui. Je laisse les autres s'y attaquer.

  (1120)  

    D'accord.
    M. Myers.
    Je suis d'accord avec Mike et le message clef de ce livre est que nous devons mettre de l'ordre chez nous en Amérique du Nord. Il est frappant de voir combien les problèmes sont similaires quand on parle de compétitivité, pas seulement en Amérique du Nord mais dans n'importe quelle économie avancée. Il y a des problèmes de compétences, d'investissement dans les compétences et les capacités de la main-d'oeuvre, d'investissement dans l'innovation et le savoir, d'investissement en infrastructures, d'investissement en technologie -- tout ça est extrêmement important.
    Je dirais que l'autre message est que nous devons penser très différemment les affaires internationales. Mike et moi avons dans notre organisation beaucoup d'entreprises avec lesquelles il est très difficile de parler de commerce international car ce n'est pas ce qu'elles font. J'ai des propriétaires-exploitants canadiens, des ingénieurs, des concepteurs qui travaillent avec des ingénieurs indiens ayant des ateliers de fabrication en Chine et au Canada qui n'ont pas de produit, ou dont le produit final ne provient pas du Canada mais est expédié aux États-Unis et sur les marchés mondiaux. Ce sont des entreprises virtuelles. Les gens les dirigent en même temps qu'ils conçoivent des nouveaux produits, et vous avez des concepteurs et des ingénieurs dans le monde entier qui travaillent dans plusieurs pays différents en même temps.
    Si l'on se demande quel est l'effet de notre régime fiscal de R-D sur ça, la réponse est probablement que cette recherche n'est pas admissible car elle est internationale. Comment dire que les bienfaits sont au Canada? Vous cherchez le financement d'EDC ou les retombées au Canada. Il est difficile de savoir combien de valeur a été créée au Canada car ça fait partie des activités internationales. Il faut donc penser très différemment la nature des affaires internationales et comment nous les appuyons.
    Une dernière chose. Le secteur de la politique commerciale auquel nous devons prêter beaucoup plus d'attention est celui de l'application des règles commerciales. Le libre-échange, ce n'est pas seulement l'ouverture des marchés, c'est aussi le respect des règles. Nous avons fort bien défini les règles du jeu mais nous sommes pitoyables en ce qui concerne leur exécution, et je vous donne un exemple : la contrefaçon et la vente de produits contrefaits au Canada. On expédie plus de moules de l'industrie de l'automobile du Canada aux États-Unis avec l'indication « Made in Canada » que nous n'en fabriquons. C'est un véritable drapeau rouge pour le représentant au Commerce des États-Unis, qui a déjà inscrit le Canada sur sa liste des pays à surveiller. Nous sommes un gros exportateur de produits contrefaits et frauduleux aux États-Unis, ce qui va devenir un grave problème pour notre relation commerciale si nous ne réussissons pas à interdire l'entrée de produits contrefaits au Canada.
    En 2004, les douanes américaines ont effectué 36 000 saisies de produits contrefaits arrivant à leurs frontières; l'Agence canadienne des services frontaliers en a effectué six. Même en multipliant par 10, on est loin de 36 000. Nous ne sommes donc pas capables de faire respecter ces règles commerciales.
    Quand des entreprises sont confrontées à des produits importés bénéficiant de subventions déloyales, notre procédure est très lourde. Il est très difficile pour les entreprises d'intenter des poursuites. Quand elles s'adressent au Tribunal canadien du commerce extérieur, elles sont souvent rejetées par le gouvernement. Songeons par exemple aux cas des bicyclettes et des barbecues où les entreprises ont été complètement abandonnées parce que des hauts fonctionnaires ont décidé que le Canada ne fabrique pas de bicyclettes ou de barbecues. Ensuite, nous disons que la Chine est un marché libre, ce qui impose aux entreprises canadiennes le fardeau de prouver qu'il y a du subventionnement en Chine. Dans chaque secteur de production, ce sont les Chinois qui doivent montrer qu'ils ne donnent pas de subventions. Cela désavantage considérablement les fabricants canadiens qui sont dans l'impossibilité de justifier des poursuites.

  (1125)  

    En ce qui concerne notre politique du commerce extérieur, nous ne prêtons pas suffisamment attention au fait que tout le monde ne respecte pas nécessairement les règles du jeu. Nous devrions non seulement veiller à protéger l'industrie canadienne mais aussi nous assurer que les autres respectent les règles du jeu.
    Veuillez m'excuser, M. le président, je n'arrive pas à m'arrêter.
    Un autre problème que connaissent les entreprises canadiennes qui font des affaires à l'étranger est qu'elles sont utilisées comme des pions de politique étrangère. Je vous en donne un exemple. Le gouvernement canadien aimerait imposer des contrôles à l'exportation de produits au Bélarus, pour des raisons d'ordre politique -- raisons qui sont peut-être au demeurant tout à fait valables. Les diplomates ne veulent rien faire. Nous reconnaissons toujours le Bélarus sur le plan politique mais nous allons bloquer les exportations.
    J'ai un membre du Québec qui exporte des graines agricoles et de l'équipement au Bélarus. Ce blocage va le ruiner. Dans le cas des petits pays, comment se fait-il que notre gouvernement pénalise les exportateurs canadiens en voulant donner un signal de politique étrangère qu'il n'est cependant pas prêt à donner par la voie diplomatique? Pourquoi utiliser les exportateurs canadiens comme des pions afin d'essayer d'atteindre un objectif diplomatique?
    En fin de compte, nous devons mettre de l'ordre dans notre maison en réglant des problèmes comme ceux-là. Nous devons nous demander quels objectifs nous essayons d'atteindre en politique étrangère et en politique commerciale, et nous assurer que les deux sont beaucoup mieux intégrés.
    Bien.
    Monsieur Cardin.
    Veuillez m'excuser, vous étiez sur la liste mais je vous ai oublié.
    Allez-y.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Parmi les questions nous ont été soumises, il y en a une qui retient mon attention. Elle servira d'introduction à mon intervention.
    Comment pouvons-nous obtenir un accès accru au marché de pays émergents — la Chine, l'Inde, le Brésil — et à des marchés bien établis de l'Union européenne — le Japon, la Corée du Sud —, afin de stimuler la croissance économique?
    Dans le fond, quand on parle de commerce extérieur, de mondialisation, de libéralisation des marchés, tout est en fonction de la volonté des gens d'atteindre une certaine croissance économique; on ne se le cache pas. De plus, croissance économique veut aussi automatiquement dire consommation. Donc, tout le monde partout veut faire la mondialisation dans les autres pays; les autres pays veulent la faire ici. Il en résulte que la concurrence est énorme à l'échelle de la planète. On pourrait comparer la situation à une patinoire où, comme le disait justement M. Myers, les règles du jeu ne sont pas tout à fait les mêmes pour tout le monde, et quand elles le sont, elles ne sont pas nécessairement respectées par tout le monde. Donc, si on a des organismes internationaux pour s'occuper des échanges économiques, il y aurait peut-être lieu d'avoir des organismes qui pourraient d'abord définir la réglementation et, ensuite, appliquer les règles et avoir les moyens de les appliquer.
    Je reviens à cela parce que l'automne dernier, j'ai été appelé à faire une tournée de plusieurs régions au Québec, dans le cadre d'une évaluation des conséquences de la mondialisation et d'une reconnaissance des entreprises fragilisées. On s'est aperçu rapidement que les gens mettaient en relation certaines règles qui n'étaient pas les mêmes pour tout le monde. Quand on regarde l'ensemble du tableau, on voit très bien qu'il y a des disparités énormes quant au traitement de la main-d'oeuvre dans le monde. La gestion des matières premières et les quantités disponibles dans les différents secteurs constituent aussi une grande différence, de même que les règles en matière de protection de l'environnement.
    Déjà là, on s'aperçoit qu'à bien des niveaux, les règles ne sont pas les mêmes pour tout le monde. Quand on se lance dans une production de masse, on n'est pas toujours en position d'être en grand joueur, compte tenu principalement des coûts de main-d'oeuvre.
    Dans notre économie d'aujourd'hui, on sait très bien que la matière première a de plus en plus de valeur. Mais ce qui a de plus en plus de valeur aussi, c'est la valeur ajoutée ou, à toutes fins pratiques, la valeur intangible. Dernièrement, je prenais l'exemple de mes lunettes, tout simplement. Regardez la valeur des matériaux qui les composent. C'est rendu qu'ils nous vendent cela environ 700 $. Que nous vendent-ils? Ils vendent un style, donc de l'intangible, ainsi que qu'une valeur ajoutée et, peut-être, la performance des lentilles. Donc, de plus en plus, la valeur n'est pas nécessairement en fonction des matériaux, mais elle est aussi en fonction de l'innovation, de la création. Bien sûr, dans la production, il faut aussi ajouter l'innovation technologique.
    C'est l'ensemble de tous ces éléments qui fait que la concurrence est planétaire. Tant et aussi longtemps que l'on visera ce qui est évidemment la base de l'économie, soit la croissance économique... On peut philosopher et on peut aussi soulever des points techniques, mais on sait très bien qu'à un moment donné, à l'intérieur de ce marché mondial, si on peut, à certains endroits de la planète, continuer à prospérer et à maintenir une croissance économique, c'est parce qu'il y a des disparités quelque part et que certains n'ont pas cette croissance mais contribuent à la croissance des autres. Donc, l'équité économique n'existe pas afin que certains puissent continuer de croître.
    M. Myers a mentionné tout à l'heure l'appui des gouvernements aux entreprises pour, entre autres, l'exportation. En termes d'assurance sur les comptes à recevoir, de clients extérieurs, EDC a mis sur pied la protection des capitaux. Donc, les gens se sentent sécurisés. C'est un élément important. Je pense que si j'avais à vendre des produits à des pays étrangers, je saurais que le gouvernement peut m'aider, qu'une assurance existe à cet égard.

  (1130)  

    Je voudrais vous parler d'un cas bien pratique, monsieur le président, qui démontre que parfois, les politiques qu'on établit pour aider les entrepreneurs n'atteignent pas toujours les objectifs visés. Personnellement, comme député, j'ai une assurance-vie de la Chambre des communes. À titre de député, disons que je décide de m'attaquer au crime organisé et que ma tête soit mise à prix dans les journaux demain et que la Chambre des communes décide d'annuler unilatéralement mon assurance-vie.
    EDC fait la même chose. Comment un entrepreneur canadien qui fait affaire ailleurs peut-il avoir confiance dans les programmes du gouvernement quand EDC agit de cette façon à son endroit?
    Je ne donnerai pas de nom, mais j'ai connu le cas d'une entreprise qui avait un compte à recevoir très substantiel d'une compagnie étatsunienne. Quand EDC s'est rendu compte que cette compagnie risquait de faire faillite, on a annulé l'assurance de cette entreprise canadienne. On essaie de donner des outils aux entrepreneurs d'ici pour les protéger et pour qu'ils puissent réussir à l'étranger — et au fond ils payent aussi leurs primes d'assurance —, mais du jour au lendemain, on annule leur assurance, et l'entreprise perd des sommes substantielles.
    Au fond, monsieur le président, il n'est pas vraiment facile de se retrouver à l'intérieur de tous les éléments que j'ai mentionnés et de créer des politiques cohérentes et intégrées dans tous les éléments, y inclus la participation du gouvernement.
    Je me réfère souvent à M. Myers, qui parlait des économistes, des professionnels, des grands penseurs de l'économie qui font des études, des rapports, des modèles théoriques. Or, souvent l'action ne suit pas. À toutes fins pratiques, cela me fait penser au sexologue qui est encore puceau: il parle beaucoup de sexualité, mais il ne sait pas ce que c'est vraiment et n'en tire aucune satisfaction. La comparaison est toujours un peu boiteuse, mais il reste que c'est l'action qui, à la fin, est importante. La patinoire est grande, c'est nous qui devons décider si nous irons jouer de façon un peu plus robuste dans les coins ou si nous nous contenterons de jouer au centre de la patinoire, où c'est plus léger et où nous pourrons continuer d'investir dans des secteurs où nous pouvons travailler dans le cadre d'accords bilatéraux ou multilatéraux avec différents pays.
    Je pense que cette politique de commerce extérieur doit vraiment être articulée et intégrée à tous les niveaux pour qu'on puisse avancer. De plus en plus, comme je l'ai dit, il faut tenir compte de l'économie du savoir et, jusqu'à un certain point, du virtuel, car c'est du non-tangible. Donc, c'est à nous d'y voir et de choisir nos vis-à-vis pour la consommation de nos produits et services.

  (1135)  

[Traduction]

    Le déjeuner vient d'arriver. Nous aurons plus tard les réponses aux remarques de M. Cardin. J'aurai en outre une question à poser, tout comme M. André.
     Nous allons prendre quelques minutes pour aller chercher de quoi nous sustenter et nous aurons ensuite les réponses à M. Cardin.
    La séance est suspendue pendant deux ou trois minutes.

  (1138)  


  (1144)  

    Nous reprenons nos travaux.
    Nous commençons avec les réponses à M. Cardin.
    Mr. Myers.
    Je crois, M. Cardin, que vous venez d'indiquer l'avantage qu'il y a à voir au-delà des négociations commerciales de haut niveau et à chercher des appuis aux activités concrètes des entreprises sur les marchés internationaux. Vous avez raison de souligner l'importance d'EDC, de la CCC et de l'ACDI à cet égard.
    Mike et moi entendons souvent dire des choses comme : « Nous allons entreprendre une nouvelle ronde de négociations commerciales avec tel ou tel pays » ou « Nous voulons faire quelque chose à l'OMC; pourriez vous réunir plusieurs de vos membres pour que nous puissions en discuter avec eux ?» et nous cherchons ensuite des membres que cela peut intéresser. Le problème est qu'il est très difficile de trouver des gens que ces grandes questions de politique intéressent.
    Par contre, si nous disions qu'il y aura une réunion sur l'adoption par EDC d'un nouveau service de financement innovateur susceptible de résoudre les problèmes que connaissent les entrepreneurs en Chine, nous n'aurions aucun problème à avoir des participants.
    Les entreprises s'intéressent aux choses concrètes et c'est pourquoi je pense qu'il est extrêmement important de s'intéresser à EDC, à la CCC et à l'ACDI. Nous devons sans cesse nous assurer que leurs services répondent aux besoins des entreprises canadiennes.
    Il y a quelques années, nous nous préparions à une révision de la loi sur EDC. C'était il y a 10 ans mais personne n'essayait de savoir quels seraient les besoins des entreprises canadiennes 10 ans plus tard et si EDC serait prête à y répondre. Nous avons passé beaucoup de temps à examiné les problèmes du passé.
    Nous devons nous assurer que les activités d'organismes comme EDC, la CCC et l'ACDI reflètent l'évolution des besoins des entreprises canadiennes oeuvrant à l'échelle internationale.
    M. Cardin a parlé des différences de réglementation entre les divers pays. C'est un vrai problème -- les différentes normes concernant le travail et l'environnement qui existent un peu partout.
    Il importe d'adopter une démarche intégrée entre les activités de l'ACDI et nos politiques d'expansion du commerce. Nous avons une agence de développement qui devrait se demander comment aider les autres pays à améliorer leurs normes environnementales et leurs normes du travail tout en s'assurant que les entreprises canadiennes contribuent activement à ce processus.
    Je vais vous donner un exemple d'une chose qui a très bien marché. Elle a produit de très bonnes idées. Après le tremblement de terre de Kyoto, le Canada a été l'un des premiers pays à offrir son aide en proposant des maisons préfabriquées. C'est l'une des raisons pour lesquelles nos fabricants de maisons préfabriquées connaissent aujourd'hui tant de succès au Japon.
    Après le tsunami, il y a deux ou trois ans, les Australiens ont voulu aider l'Indonésie. Ils se sont dits : « Tirons les leçons du Canada mais essayons de faire mieux. Que pourrait faire notre gouvernement qui pourrait aussi être utile à l'industrie australienne? » Le ministère australien de l'Industrie, des Sciences et des Ressources, avec AusAid et des associations d'entreprises manufacturières et de fabricants de maisons, a décidé d'organiser un concours de construction d'une maison à 100 $ devant répondre à diverses conditions -- normes de construction, connexion Internet, connexions électriques, etc. Non seulement la maison a-t-elle été construite en six mois mais le coût a été ramené à 50 $.
    Aujourd'hui, l'industrie australienne dispose d'une maison modulaire avec de nouveaux matériaux de construction qu'elle peut exporter dans le monde entier. Ainsi, les parties concernées se sont réunies, ont analysé le problème, ont décidé d'agir ensemble et ont harmonisé leurs programmes intérieurs, de financement et de développement.
    Nous, nous semblons passer tout notre temps à discutailler à un niveau très abstrait puis, quand vient le moment d'agir, nous levons les bras au ciel et ne faisons rien.

  (1145)  

    Je crois que nous avons beaucoup à apprendre d'autres pays comme l'Australie qui, très franchement, ont beaucoup appris de nous mais ont ensuite été capables de passer à l'action.

  (1150)  

    Il ne nous reste que 10 minutes et nous devons finir à l'heure. Je vous demande de répondre brièvement à M. Cardin, après quoi moi-même et Monsieur André vous poseront une autre question, ce qui devrait être la fin.
    Mr. Tomlin, vous avez la parole.
    Je serai très bref. J'ai deux remarques à faire.
    Sur toute cette question de promotion de la croissance et du commerce, et de promotion du commerce, EDC est importante mais il y a quelque chose que nous pouvons faire chez nous pour aider nos entreprises. À l'heure actuelle, les PME qui veulent s'agrandir butent sur des obstacles considérables, notamment d'ordre fiscal. Comme vous le savez, dès qu'une entreprise atteint 300 000 $, elle tombe dans un nouveau palier fiscal, ce qui est très dissuasif. Or, il est important pour notre économie que nous ayons de solides entreprises capables de grandir. Certes, on a déjà apporté des changements à notre fiscalité pour réduire la différence pénalisant les PME mais il y a encore beaucoup à faire à ce sujet.
    L'autre question dont je veux parler, que vous avez soulevée, concerne le fait que le Canada est un grand producteur de biens à valeur ajoutée. Il y a une autre question dont il faut discuter, c'est le fait que nous devons entreprendre des discussions pour établir un régime tarifaire externe commun avec les États-Unis. À l'heure actuelle, nous avons un processus de règles d'origine qui fait que, quand nous importons des intrants intermédiaires pour fabriquer un produit final, ce produit est assujetti à toutes sortes de processus si nous voulons l'expédier aux États-Unis.
    Si nous pouvions adopter un régime tarifaire externe commun, nous pourrions abroger la législation sur les règles d'origine, ce qui faciliterait considérablement le commerce.
     Merci, M. Tomlin.
    M. Murphy, avez-vous une réponse?
    Je peux faire une très brève remarque sur EDC car, aussi large notre sociétariat soit-il, nous avons aussi EDC comme membre. Nous sommes donc souvent en relations.
    D'autres pays ont créé des organismes similaires et on essaye toujours de se comparer aux autres. Je ne suis pas expert en la matière mais je sais qu'EDC déploie beaucoup d'efforts pour rester en contact avec nos autres membres. C'est une bonne chose et nous l'y aidons dans la mesure du possible. Je pense qu'elle fait un excellent travail pour rester à l'écoute des besoins des entreprises et je tenais à le mentionner.
    Pour ce qui est des questions de mondialisation évoquées par M. Cardin -- et il y en a plusieurs -- la chose intéressante est de voir comment nous pouvons intégrer nos diverses politiques touchant le commerce extérieur avec toutes les autres questions que nous avons à régler au Canada même. C'est la question centrale pour nous tous. Nous essayons d'y contribuer par nos contacts avec les parlementaires et avec le gouvernement sur un large éventail de questions d'intérêt public car tout est relié, en fin de compte. On ne peut pas discuter d'une de ces choses-là sans comprendre que ça aura aussi un impact sur toutes les autres.
    Je n'ai rien de plus précis à ajouter à ce que j'ai dit plus tôt au sujet de nos priorités sur le plan du commerce et de nos politiques intérieures, si ce n'est qu'il est important de les envisager globalement comme on l'a dit plusieurs fois ce matin.
    Bien. M. André n'a pas de questions à poser, si je comprends bien. Je vais donc vous poser une brève question puis je vous inviterai à faire vos remarques de conclusion, messieurs.
    Quand l'accord de libre-échange a été signé, puis avec l'ALENA, nous avons eu beaucoup de problèmes dans les secteurs des textiles, du meuble et du vin car nous pensions qu'ils se feraient massacrer. Il est intéressant de constater que l'industrie vinicole est passée d'un régime à l'autre sans heurts et qu'elle a connu une forte expansion. Comme vous l'avez dit, M. Myers, l'industrie du meuble a connu de graves difficultés mais elle est aujourd'hui beaucoup plus grande que jamais. En ce qui concerne l'industrie textile, elle ne s'en est pas bien tirée -- à ma connaissance.
    Vous disiez que nous avons actuellement un déficit de 20 milliards de dollars dans notre commerce avec la Chine. Je me demande si c'est là un phénomène à long terme ou à court terme. Avec l'expansion de l'économie chinoise, les gens s'enrichissent et réclament des biens de meilleure qualité -- et peut-être aussi des services. Je me demande donc si ce déficit ne sera pas temporaire et si le Canada est bien placé pour tirer parti de ce nouveau marché qui émerge en Chine, ce qui pourrait nous aider à avoir un excédent commercial avec la Chine. Qu'en pensez-vous?
    Oui, M. Myers.

  (1155)  

    Je peux peut-être commencer.
    L'industrie du meuble a eu beaucoup de succès parce que les fabricants se sont spécialisés. L'évolution leur a permis de se concentrer sur la conception et la fabrication de meilleurs meubles, avec de meilleurs processus et de meilleurs systèmes de distribution parce qu'ils ont dû s'attaquer à un marché beaucoup plus vaste. Le secteur fait actuellement face à de sérieux problèmes, en grande mesure à cause de la remontée du dollar, mais c'est très récemment que j'ai appris que les concepteurs de meubles canadiens sont au deuxième rang sur le plan des ventes internationales, après les seuls Italiens. Voilà donc une toute nouvelle industrie qui a vu le jour avec le libre-échange et c'est un bon exemple d'intégration des services et de la fabrication. Vous avez donc parfaitement raison.
    La Chine fabrique quelque chose comme 70 pour cent des climatiseurs du monde entier. Nous avons parmi nos membres une société qui fabrique des climatiseurs pour la Chine. Un économiste vous dirait que c'est stupide mais, voyez-vous, les économistes ne savent peut-être pas tout.
    L'une des choses fondamentales que l'on apprend en micro-économie est que de nouvelles firmes entreront toujours sur un marché tant que les profits n'auront pas été ramenés à zéro, ou plutôt le taux de rendement du capital. C'est le problème que toute entreprise veut éviter. Dans le monde d'aujourd'hui, l'économie mondiale est axée sur la banalisation de la production sauf pour les entreprises qui sont très spécialisées, très rapides et très focalisées sur le service au client. C'est dans ces domaines que l'on peut exceller et c'est ce que les fabricants de meubles ont commencé à faire il y a 15 ans et que les sociétés textiles qui connaissent du succès ont fait également.
    L'industrie textile est en difficulté aujourd'hui parce que nous avons éliminé tous les quotas d'importation, mais certaines entreprises s'en tirent fort bien. Nous pourrions permettre à cette industrie de connaître beaucoup plus de succès si nous continuions, par exemple, à réduire les droits de douane sur les textiles entrant au Canada. C'est une question importante pour beaucoup de sociétés mais nous ne semblons rien faire à ce sujet. Nous pourrions faire beaucoup plus pour rendre l'industrie du textile et du vêtement beaucoup plus compétitive.
    Pour revenir à la Chine, nous ne pourrons réussir que si nous sommes axés sur la spécialisation, la rapidité et le sur-mesure. La raison pour laquelle ces types s'en tirent très bien sur le marché chinois est qu'ils n'essayent pas de faire directement concurrence à la Chine sur le plan des climatiseurs qu'elle fabrique. Ils ont vu apparaître de nouvelles couches de clients chinois et se sont demandés quels seraient leurs besoins. Ils ont constaté qu'ils n'auraient pas besoin de gros climatiseurs de maison qui ne pourraient pas être installés dans les appartements chinois et qui ne fonctionneraient pas à cause des coupures de courant. Par contre, ils ont réalisé que les Chinois auraient besoin de petits climatiseurs avec un système de piles leur permettant de continuer à fonctionner pendant les coupures de courant.
    Ils n'arrivent pas à répondre à toute la demande du marché de Shanghai. Ils sont basés à Calgary et sont en train d'agrandir leurs opérations au Canada et en Chine. Voilà un bon exemple d'entreprise -- et il y en a beaucoup d'autres au Canada -- qui connaît du succès sur le marché chinois.
    C'est tout ce que je voulais dire.
    Il nous reste environ deux minutes et je vais donc vous donner une minute chacun pour répondre à mes questions ou faire de très brèves remarques de conclusion. Merci.
    Mr. Tomlin.
    Je n'ai rien de plus à ajouter si ce n'est pour dire, au sujet de l'industrie vinicole, qu'une bonne partie de son succès résulte des arcanes de l'Union européenne et du système des appellations contrôlées. Le Canada a réussi à en tirer parti. C'est tout ce que j'ai à dire.
    Très bien.
    Un dernier commentaire, M. Murphy?
    Je veux simplement ajouter, au sujet de la Chine et de l'Inde, quand on pense aux défis très importants que nous avons à y relever -- et ils sont nombreux -- que, quand nous nous sommes mis à étudier la situation, nous avons passé autant de temps à réfléchir à ce que nous avons à faire au Canada même plutôt qu'à l'autre bout de l'équation, qu'il s'agisse de propriété intellectuelle ou d'infrastructures. On ne sort jamais de cette question qui est l'une des plus importantes.
    J'en reste là.
    Bien. Merci, M. Myers, M. Murphy, M. Tomlin et M. Hodgson d'être venus aujourd'hui. La réunion a été très intéressante et nous vous en remercions. Nous attendrons avec beaucoup d'intérêt l'étude que vous allez publier.
    Merci beaucoup à tous. La séance est levée.