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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 26 septembre 2001

• 1541

[Traduction]

La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): Mesdames et messieurs, la séance est ouverte. Veuillez excuser ce retard.

Je voudrais signaler, à l'intention des témoins, que nous devons d'abord régler une question de procédure. À la fin de séance d'hier, j'ai promis aux membres du comité que nous réglerions dès le début de la séance d'aujourd'hui la question qui avait été laissée en suspens.

Vous vous rappellerez que M. Dromisky avait proposé une motion en vue de reporter la question. J'avais déclaré que la question ne pouvait pas faire l'objet d'un débat mais pouvait toutefois faire l'objet d'un vote, et je voulais justement passer à la mise aux voix lorsque plusieurs membres de l'opposition ont remis en question la validité de mon interprétation. M. Ménard, qui était présent hier, a laissé entendre qu'il la contesterait à moins que le greffier ne puisse lui faire la preuve du contraire. Comme le greffier n'avait pas apporté son livre de procédure, j'ai suggéré que nous mettions fin à la séance, pour que le greffier fasse les recherches voulues, et me permettre de vous faire part des conclusions au début de la séance suivante, soit aujourd'hui.

Gary Sokolyk, greffier du comité, m'a donc fait parvenir une lettre que je cite:

    Comme vous me l'avez demandé, je me suis penché sur la recevabilité procédurale d'une motion visant à reporter l'étude d'une question dont un comité est saisi.

    La source ultime en matière de procédure parlementaire au Canada est l'ouvrage intitulé «La procédure et les usages de la Chambre des communes» de Robert Marleau et Camille Montpetit. Les ouvrages «Beauchesne», «Bourinot» et d'autres encore sont désormais considérés comme des sources secondaires.

    La motion dont il est question est une motion de remplacement. Autrement dit, elle est présentée afin de remplacer la question à l'étude du comité. À la page 456, Marleau et Montpetit établissent que parmi les questions de remplacement, seule la motion proposant «que cette question soit maintenant mise aux voix» ne peut être proposée en comité.

    Tel qu'il est signalé plus haut, les motions de remplacement ont préséance sur la question à l'étude et la supplantent.

Je poursuis à la page 456.

    Parmi les motions de remplacement que le règlement permet de proposer en comité, on trouve celles qui proposent de «ajourner le débat» et de «reporter l'étude d'une question à une date ultérieure».

Par conséquent:

    La motion visant à reporter le débat fait l'objet d'un vote mais non d'un débat et supplante la question à l'étude.

Y a-t-il des questions?

Puisqu'il n'y en a pas, je demanderai à notre greffier de relire la motion que je mettrai aux voix.

M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Pourrait-on avoir un vote par appel nominal?

Le greffier du comité: M. Dromisky a présenté une motion portant que le débat soit reporté à une date ultérieure.

La présidente: Merci.

Vous avez tous compris?

Monsieur le greffier, nous aurons donc un vote par appel nominal, comme l'a demandé l'opposition.

• 1545

(La motion est adoptée à huit voix contre six)

La présidente: Comme cette motion est adoptée, il n'y a donc plus lieu de reprendre la motion précédente dont nous avions été saisis.

Nous pouvons donc passer à l'ordre du jour d'aujourd'hui qui, je vous le rappelle, est la suite des séances que nous avons eues avec les représentants de Santé Canada. Je leur souhaite à nouveau la bienvenue. Lorsque nous nous sommes quittés, nous étions à parcourir les questions sur lesquelles nous avions besoin de précisions et qui nous avaient été suggérées par les audiences que nous avions eues et nos premiers témoins.

J'essaie de me rappeler où nous en étions dans le document. Il s'agit du document intitulé «note d'information» préparée à notre intention en vue des séances des 18 et 20 septembre. Nous avions donc commencé et je crois que nous étions arrêtés à...

M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.): Au chapitre C.

La présidente: Avions-nous terminé les «actes prohibés»?

M. Jeannot Castonguay: Oui.

La présidente: Dans ce cas, nous passons à la page 5, au chapitre C intitulé «Activités réglementées». Vous vous rappellerez que la distinction entre les actes prohibés, d'une part et les actes réglementés, d'autre part, est le fondement même de l'avant-projet de loi.

Madame Ferderber, voulez-vous vous lancer à l'eau?

Mme Rhonda Ferderber (directrice, Division des projets spéciaux, Direction des politiques, de la planification et des priorités, Direction générale de la politique de la santé et des communications, Santé Canada): Volontiers.

La présidente: Bien. Nous aimerions que vous commenciez par répondre aux questions que nous nous sommes posées dans la section C.

Mme Rhonda Ferderber: Nous sommes heureux de comparaître à nouveau pour poursuivre les discussions entamées la semaine dernière. Toutefois, permettez-moi de commencer par une remarque. Je sais que vous continuez à être préoccupée par certaines choses comme les chimères et la recherche entourant les animaux, notamment. Je tiens à ce que le comité comprenne bien que, pour notre ministère, cette question fait toujours l'objet d'un examen actif. Nous avons d'ailleurs l'intention de rencontrer d'autres scientifiques et de vous transmettre l'information recueillie pour que vous ayez plus de connaissances en la matière et que vous soyez mieux informée.

Sachez, par conséquent, que c'est une question d'actualité pour nous. Je sais que certains d'entre vous s'en inquiétaient, et je tenais à vous le signaler, au cas où nous n'aurions pas été suffisamment clairs la semaine dernière.

La présidente: Merci.

Mme Rhonda Ferderber: En ce qui concerne maintenant les activités réglementées, ainsi que les questions que vous vous êtes posées, nous sommes tout disposés à y répondre et à répondre aussi à d'autres questions qui vous viendraient à l'esprit en cours de route.

Comme le signalait la présidente, les activités réglementées sont un des fondements de l'avant-projet de loi. Il s'agit essentiellement d'actes qui ne seraient autorisés que par un permis. Ce permis établirait les conditions dans lesquelles ces activités seraient menées en fonction de ce que les règlements, qui seront élaborés ultérieurement, établiront comme étant nécessaires.

Vous vous êtes demandée quels critères avaient présidé à la décision d'établir que certaines activités devaient être prohibées et d'autres réglementées. C'est très simple: toutes les activités interdites se fondent sur un principe de déontologie. C'est d'ailleurs ce même principe qui nous avait aidés à établir la liste des actes prohibés. Ces principes sont ceux de la dignité humaine et de l'intégrité du génome humain, de même qu'une opposition fondamentale à la commercialisation de la reproduction.

Bien évidemment, certains des autres actes prohibés le sont aussi pour des raisons de sécurité, et je pense notamment à l'interdiction de modifier la ligne germinale. Certaines des autres interdictions font moins appel à des considérations de santé et de sécurité, mais font plutôt appel à des considérations déontologiques, notamment l'achat de gamètes. On pense également à l'interdiction entourant la limite de 14 jours, qui se conforme aux normes internationales existantes.

• 1550

Passons maintenant aux activités réglementées qui soulèvent à plusieurs égards des préoccupations en matière de santé. Ces règlements existent pour protéger la santé et la sécurité des femmes qui subissent les traitements d'une part, et des enfants issus de ces traitements d'autre part. Voilà ce sur quoi nous voulons exercer un certain contrôle.

Vous vous demandez ensuite si le ministère peut vous fournir une liste assez complète des activités qui seront réglementées. Nous enverrons sous peu au greffier une liste qui, je l'espère, vous expliquera en détail les règlements qui pourront être élaborés, avec un renvoi aux articles pertinents de l'avant-projet de loi. J'espère qu'en voyant cette liste vous comprendrez mieux à quel point le projet de loi informe sur les activités qui pourraient être réglementées. L'avant-projet de loi donne beaucoup d'informations là-dessus, même s'il est parfois difficile de le saisir à la première lecture. C'est effectivement tout un défi.

En outre, j'ai pensé qu'il serait utile pour nous de vous fournir une copie du code de pratique suivi au Royaume-Uni et qui provient de l'administration HFEA (Human Fertilisation and Embryology Authority). J'imagine que vous avez beaucoup entendu parler de ce qui se fait au Royaume-Uni. Là-bas, le code de pratique donne de façon assez détaillée les divers secteurs d'intervention et énumère la gamme et le type d'activités auxquelles le code s'applique. Cela pourrait vous aider à mieux comprendre la façon dont nos règlements seront élaborés et ce sur quoi ils porteront.

Quant à la gamme des activités susceptibles d'être réglementées, elle sera semblable. Ces activités sont liées à l'utilisation du matériel reproductif, au processus de fécondation in vitro, et à l'injection intracytoplasmique d'un spermatozoïde qu'on désigne parfois par le sigle IICS. Ces activités comprendront également la collecte et l'entreposage des gamètes, toute la recherche portant sur les embryons humains, l'importation et l'exportation de gamètes et d'embryons, la délivrance de permis d'exploitation de locaux et de laboratoires. Comme vous le voyez, une vaste gamme d'activités devront être réglementées.

Une partie très importante de la réglementation visera à répondre aux besoins d'information des personnes qui ont recours à la procréation assistée. À titre d'exemple, la loi et donc le règlement prévoiront la collecte de renseignements sur les donneurs de sperme, d'ovules et d'embryons de sorte que les enfants conçus à partir d'un don de matériel reproductif humain pourront connaître les antécédents médicaux de leurs parents génétiques. Il s'agit d'une question très importante.

On vous a aussi beaucoup parlé des dispositions de la loi portant sur le consentement éclairé. Il s'agit de l'un des piliers du régime proposé qui devra être étoffé pour satisfaire aux exigences de la loi.

Je crois maintenant avoir répondu à l'essentiel de vos questions sur les points C(1) et (2).

La présidente: Je pense que vous devez aborder deux autres points sous C avant que j'ouvre la période de questions.

Mme Rhonda Ferderber: D'accord. Je vais demander à ma collègue, Francine, d'aborder les deux points suivants.

La présidente: Cela peut peut-être vous paraître bizarre, mais certains de nos témoins ont laissé entendre que si les couples pour lesquels on a créé plusieurs embryons en utilisent trois par exemple, ils pourraient faire don à la clinique des embryons non utilisés. Ces embryons appartiendraient alors à la clinique qui pourrait consentir à ce qu'ils soient utilisés. Ce n'est pas très clair dans nos esprits.

Mme Rhonda Ferderber: Vous soulevez de bonnes questions.

• 1555

Mme Francine Manseau (analyste principale des politiques, Direction de la politique de la santé et des communications, Division des projets spéciaux, Santé Canada): Ce n'est pas la clinique qui décide de l'usage qui est fait de l'embryon. Seul un couple pour qui l'embryon a été créé peut décider de l'usage qui en sera fait. C'est à ce couple de décider si l'embryon sera donné à un autre couple, sera détruit ou servira à des fins de recherche. Seul le couple pour lequel l'embryon a été créé peut décider de l'usage qui en sera fait.

La clinique spécialisée dans le traitement de stérilité n'effectue peut-être pas des recherches. Les recherches ont peut-être lieu ailleurs. Il faudra que le couple visé indique clairement sur la fiche de consentement qu'il permet que l'embryon serve à des fins de recherche. Certains pensent qu'une clinique pourrait avoir tendance à exercer des pressions—je ne sais pas si c'est vraiment le mot qui convient—sur un couple pour l'amener à accepter que davantage d'embryons que ce dont il a besoin soient créés pour obtenir que le couple lui fasse ensuite don de ces embryons à des fins de recherche. Je crois que la réglementation précisera que les personnes qui doivent obtenir le consentement du couple ne doivent pas être les mêmes que celles qui effectuent des recherches sur les embryons. Seuls les deux membres du couple pour lequel l'embryon a été créé peuvent décider de l'usage qui sera fait de l'embryon qui ne servira pas à leur propre reproduction.

La présidente: Dans la partie sur les définitions, on lit que le terme «donneur» sera défini dans le règlement. Ne vaudrait-il pas mieux que cette définition figure dans la loi? De cette façon cela empêcherait la clinique...

Mme Francine Manseau: Si vous prenez les dons de gamètes, il est très clair que la personne qui en fait le don est celle qui doit décider de l'usage qui en est fait. Nous avons fait la même chose pour les embryons parce que l'embryon pourrait avoir été créé dans certains cas à partir de gamètes obtenus grâce à un don.

Supposons qu'un couple suive un traitement de l'hypophyse et ait besoin de sperme d'un donneur anonyme. Nous prétendons qu'une fois l'embryon créé, ce qui arrive à ce dernier est la responsabilité du couple pour qui il a été créé. Autrement dit, à notre avis, il n'est pas nécessaire d'obtenir du donneur de gamètes anonyme une autorisation pour utiliser l'embryon à des fins de recherche.

Pourquoi? C'est parce que le donneur de sperme n'a jamais eu l'intention de jouer un rôle dans la vie du futur enfant. Une fois que le sperme aura été utilisé pour créer un embryon, l'embryon doit appartenir au couple pour qui il a été créé.

Prenons le cas où un embryon a été ainsi créé pour un couple, et le mari décède. Avant de créer l'embryon, le couple suit d'habitude une démarche bien précise avant de donner son consentement, démarche au cours de laquelle il est établi très clairement ce qu'il adviendra de l'embryon si l'un des deux membres du couple décède. Autrement dit, si mari et femme ont décidé qu'advenant un décès il ne fallait pas inséminer la femme, et que le donneur anonyme ait décidé pour sa part qu'il ne souhaitait pas détruire les embryons et qu'il préférerait qu'ils soient utilisés par sa femme, alors...

Dans certains cas, il pourrait être très difficile de décider ce qu'il adviendra des embryons. À notre avis, celui qui a fourni anonymement son sperme... Autrement dit, ces gens seraient informés au moment du don qu'ils ont la possibilité de retirer éventuellement leur don advenant qu'ils changent d'avis et refusent qu'on fasse appel à leur sperme. Toutefois, dès lors qu'un embryon a été créé, le donneur ne pourra plus demander la destruction de l'embryon.

La présidente: Autrement dit, la clinique n'intervient pas à ce moment-là. C'était ce qu'avait laissé entendre un de nos témoins. Bien.

Vous pouvez continuer.

Mme Francine Manseau: Passons maintenant au point C(4), soit les dispositions relatives au remboursement des dépenses liées au don de spermatozoïdes ou d'ovules, à la création d'un embryon et à la mère porteuse qui laissent entrevoir la possibilité que ces actes puissent être permis en vertu d'une autorisation. Vous demandez au ministère d'expliquer certains cas où les dépenses pourraient être permises en vertu de l'autorisation, et pour quelles raisons.

Les règlements seront rédigés de façon à permettre certaines dépenses. À l'époque du projet de loi C-47, nous avions essuyé beaucoup de critiques lorsque nous avions affirmé qu'il ne fallait ni acheter ni vendre du sperme ni même rembourser des dépenses.

• 1600

Certains avaient dit qu'on en arriverait peut-être au point où plus personne ne donnerait du sperme et que, par conséquent, nous devions permettre un certain remboursement des dépenses. Nous avons accédé à cette demande. Toutefois, il n'est pas prévu que les dépenses permises soient élevées au point que le don de sperme devienne éventuellement un incitatif; ce qui est prévu, c'est que les frais et débours soient énumérés par voie législative. Il n'est certainement pas prévu que l'indemnisation lors du don de gamètes soit suffisamment élevée pour qu'elle devienne un incitatif financier.

La présidente: Bien.

Mesdames et messieurs, nous venons de terminer un chapitre, mais j'imagine que nous avons des questions. Vous n'êtes pas tous obligés d'intervenir, mais j'aimerais vous permettre de le faire avant de passer à la section suivante.

Monsieur Manning.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Alliance canadienne): J'aimerais parler de l'urgence de la situation. Vous savez bien que la commission royale d'enquête remonte maintenant à dix ans et que la dernière tentative d'ordre législatif remonte quant à elle à cinq ans. Le comité vient tout juste de rejeter une motion visant à faire accélérer le dossier, et vous comprenez donc pourquoi cela est pour moi prioritaire.

De l'avis du ministère, y a-t-il, parmi les activités qui doivent être réglementées, certaines qui sont de la plus haute urgence ou dont on devrait se préoccuper immédiatement, du simple fait que ces activités ont actuellement cours, et ce, sans surveillance, ou du fait qu'elles posent de graves risques pour la santé? À votre avis, y a-t-il certaines des activités réglementées que vous avez énumérées sur lesquelles nous devons nous pencher de toute urgence à cause de leur importance? Avez-vous des activités à nous suggérer en priorité?

Mme Rhonda Ferderber: Je vais certainement essayer de répondre à votre question. Nous n'avons pas encore établi une liste de priorités. Je vous le signale parce que la liste que je vais vous distribuer n'est donc pas une liste de priorités. Pour nous, cette liste varie tous les jours étant donné qu'elle est fonction des progrès scientifiques et de l'évolution des activités dans le domaine de la reproduction assistée. Jusqu'ici, nous n'avons pas ressenti le besoin d'établir une liste de priorités; nous continuons plutôt à faire progresser ce que nous appelons l'étape initiale de l'élaboration de la réglementation.

Je ne vous apprends rien en vous disant que l'élaboration de règlements au Canada est un processus qui prévoit une large participation des parties intéressées. L'élaboration de règlements fait l'objet de vastes consultations et d'un examen approfondi auprès de la population et les spécialistes du sujet, les provinces, les territoires, les chercheurs dans ce cas-ci ainsi que les scientifiques peuvent participer au processus et doivent même le faire. Cet élément du processus va être très important lors des étapes finales de l'élaboration de la réglementation.

Nous nous efforçons actuellement, et nous continuerons de le faire, à définir les questions qui se posent dans le but d'établir celles sur lesquelles il faudra se pencher en premier. Nous avons discuté de ces questions avec un bon nombre d'intervenants auprès desquels nous avons recueilli des données. Lors des dernières consultations que nous avons menées auprès de ces intervenants, nous leur avons justement posé la question de savoir quelles étaient à leur avis les questions qui devaient être réglementées en premier.

Je dirai que les réponses que nous avons obtenues étaient fonction des groupes auxquels nous nous sommes adressés. Les personnes aux prises avec le problème de l'infertilité, pour leur part, se préoccupent de l'accès à de l'information de qualité. Elles veulent disposer des bons formulaires de consentement et insistent sur la nécessité d'obtenir l'information pertinente dès que possible.

Les personnes conçues au moyen des techniques de reproduction humaine assistée voulaient surtout avoir accès à l'information concernant leurs parents génétiques.

Les provinces et les territoires ont dit se préoccuper de façon générale du chevauchement possible de diverses lois. Ils veulent participer à l'élaboration de la réglementation dans les domaines où, s'il n'y a pas chevauchement des compétences, les compétences sont contiguës.

Un grand nombre d'intervenants nous ont donc fourni de l'aide jusqu'ici. Nous continuons de collaborer avec eux. Le processus officiel de l'élaboration de la réglementation ne doit cependant débuter qu'après l'adoption de la loi. Comme nous avons déjà préparé le terrain, nous espérons que l'étape officielle de l'élaboration de la réglementation progressera assez rapidement. Il faudra évidemment pour cela que nous obtenions la collaboration de tous les intervenants.

• 1605

M. Preston Manning: J'ai une deuxième question à vous poser. La réglementation d'une activité peut aller de son interdiction pure et simple par le rejet d'une demande de permis à un laisser-faire quasi total en passant par une autorisation assujettie à des conditions très strictes. À votre avis, est-ce que le projet de loi est clair à ce sujet?

Je crois que lorsque les gens voient l'expression «activité réglementée», ils présument presque naturellement que cela signifie que l'activité sera permise lorsque ce n'est pas le cas. Un organisme de réglementation pourrait rejeter toutes les demandes de permis se rapportant à l'activité visée.

À votre avis—peut-être que Glenn serait mieux placé pour répondre à cette question—le fait que la réglementation peut aller de l'interdiction et de moratoires jusqu'à l'autorisation pratiquement illimitée d'une activité ne devrait-il pas être précisé dans la loi?

M. Glenn Rivard (conseiller juridique, Services juridiques, Ministère de la Justice Canada): L'article 40 qui porte sur le pouvoir de réglementation traite de cette question. L'alinéa 40(1)a) précise qu'il existe des catégories désignées d'activités réglementées qui peuvent être autorisées et d'autres qui peuvent ne pas l'être. La loi pourrait donc aller jusqu'à préciser qu'aucun permis ne sera accordé à l'égard d'une activité donnée qui présenterait des risques pour la santé, par exemple.

M. Preston Manning: L'organisme de réglementation pourrait donc interdire certaines activités en vertu de cet alinéa, n'est-ce pas?

M. Glenn Rivard: L'organisme pourrait indiquer qu'il n'autorisera pas certains types d'activités. Vous avez raison.

M. Preston Manning: Je vous remercie.

La présidente: Monsieur Merrifield.

M. Rob Merrifield: Revenons aux interdictions. Certaines d'entre elles ne sont pas très claires. À votre connaissance, fait-on au Canada des recherches portant sur les cellules souches en se servant d'embryons?

Mme Rhonda Ferderber: À notre connaissance, ces recherches sont très limitées. Les IRSC discutent actuellement de cette question avec des scientifiques. Les instituts mettent au point à l'heure actuelle des lignes directrices visant le financement fédéral des projets de recherche portant sur les cellules souches. La question qui nous intéresse tout particulièrement est celle des recherches menées sur les embryons.

Nous collaborons donc avec les instituts à l'élaboration de ces lignes directrices qui seront très utiles aux chercheurs. Nous croyons savoir que les chercheurs se sont retenus de faire des recherches de ce genre jusqu'ici sachant qu'une loi allait être présentée et que le financement fédéral portant sur ces recherches allait être assorti de lignes directrices très bientôt. Je sais que les IRSC espèrent que ces lignes directrices seront prêtes cet automne.

M. Rob Merrifield: Vous n'êtes donc pas très sûre si des recherches de ce genre se font au Canada. Vous avez dit qu'à votre connaissance ces recherches étaient très limitées, ce qui signifie qu'elles existent.

Mme Rhonda Ferderber: Il est possible qu'elles existent. Je n'aime pas dire catégoriquement qu'elles n'existent pas, mais on ne nous a pas signalé le fait qu'elles existaient.

La présidente: Pour poursuivre sur le même sujet, n'est-il pas un peu présomptueux de la part des IRSC d'élaborer des lignes directrices alors que le projet de loi n'est pas encore prêt?

Mme Rhonda Ferderber: Ils nous ont posé la question, madame la présidente. La question du financement pour le gouvernement fédéral de recherches menées sur des êtres humains fait déjà l'objet d'une réflexion depuis un certain temps. Les trois conseils de recherches ont déjà adopté un énoncé de politiques sur la question. À titre d'organisme subventionnaire fédéral, les IRSC veulent édicter des lignes directrices claires sur la question. Ils discutent avec le ministre du moment opportun pour publier ces lignes directrices.

• 1610

Pour l'instant, il ne s'agit cependant que de lignes directrices qui peuvent être modifiées selon la portée du projet de loi.

M. Preston Manning: Madame la présidente, j'aimerais faire une observation.

J'ai visité un certain nombre de ces laboratoires qui ne diraient pas agir de façon présomptueuse. Ces laboratoires diraient qu'ils attendent ces règlements depuis des années. Comme ils n'existent toujours pas, c'est la raison pour laquelle ils doivent se doter de lignes directrices. Une loi dans ce domaine s'impose.

La présidente: C'est la deuxième fois que vous insistez sur la lenteur du processus, monsieur Manning. Je pense que nous vous avons compris.

Monsieur Merrifield, je vous prie de continuer.

M. Rob Merrifield: Je pourrais aider le député à comprendre.

Des voix: Oh, oh!

M. Rob Merrifield: Nous blaguons, mais il s'agit d'une question grave. Nous devons vraiment nous y attaquer.

Je me pose une autre question lorsqu'on mentionne la possibilité de rembourser pour ses dépenses un donateur de sperme, d'ovules ou d'embryons. Il semble évidemment normal, à première vue, qu'on rembourse pour ses dépenses quelqu'un qui offre un service, mais il conviendrait peut-être de préciser de quelles dépenses il s'agit. Beaucoup de choses pourraient être considérées comme des dépenses.

Mme Rhonda Ferderber: Je suis d'accord avec vous. Il s'agit peut-être d'un des domaines prioritaires dont nous parlions plus tôt. Nous voulons imposer des limites raisonnables sur les dépenses pouvant faire l'objet d'un remboursement de manière à ce que l'appât du gain ne soit pas ce qui motive les donneurs.

Par dépenses raisonnables, j'entends quelque chose comme les frais de stationnement que le donneur doit payer lorsqu'il vient faire son don. Dans le cas du donneur de sperme, le don n'est pas une affaire ponctuelle: il faut qu'il consacre du temps et des efforts. Voilà donc ce que nous pourrions considérer, par exemple, comme étant des dépenses raisonnables, et les règlements pourraient en fixer les limites.

Il faut néanmoins faire en sorte de bien respecter notre priorité première ainsi que le principe de base qui est la non-commercialisation de ce secteur. Et nous en sommes très conscients.

M. Rob Merrifield: Je veux bien, mais ce qui vous semble raisonnable à vous peut être tout à fait différent de ce qui est raisonnable pour moi et raisonnable pour le donneur.

Mme Rhonda Ferderber: Bien sûr.

La présidente: Monsieur Lunney.

M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente.

J'aimerais continuer dans la même veine que M. Merrifield et m'attarder à l'indemnisation pour les dons de gamètes et la maternité de substitution. Nos témoins d'hier ont discuté à fond de la maternité de substitution. Maître Levitan, une avocate prônant la maternité de substitution, nous disait que, pour ce qui est des dépenses, son organisation suggérait de plafonner à 5 000 $ par mois les dépenses. Sur une période de dix mois, cela représenterait donc quelque 50 000 $.

Il faut se demander si, ce faisant, nous n'encourageons pas une nouvelle carrière pour les femmes, celle de productrices d'enfants? Une femme ne pourrait-elle pas décider d'en faire une «production» annuelle, à 50 000 $ par année, quitte à donner à son corps quelques mois de repos entre les grossesses, jusqu'à ce qu'elle décide de se retirer de la production? À moins que nous ne définissions tout cela avec grand soin, je crains que nous ne servions l'objectif de ceux qui prônent déjà cette industrie.

J'aimerais d'abord savoir ce que vous en pensez.

Mme Rhonda Ferderber: Je sais que cette façon de penser circule déjà. Je suis également convaincue qu'il nous faut être extrêmement prudents dans le choix des limites raisonnables.

Lorsque l'on parle des dépenses courues par une mère porteuse, nous songeons aux coûts qu'elle doit peut-être assumer avant qu'elle prenne sa décision. Ainsi, si elle veut avoir des conseils psychologiques ou juridiques, nous devons les rendre disponibles pour qu'elle puisse prendre la meilleure décision qui soit pour elle-même et pour l'enfant qui sera issu de sa démarche.

Voilà pourquoi si vous décidez d'indemniser un donneur de sperme et de lui rembourser ses dépenses raisonnables, nous ne voyons pas pourquoi vous ne devriez pas rembourser également, dans des limites bien définies, la femme qui déciderait d'être mère porteuse pour des raisons altruistes. On peut songer à des dépenses qu'un régime de soins de santé provincial ne rembourserait pas, par exemple. Il faudrait éventuellement les définir.

• 1615

On m'a en effet informée hier du montant de 2 500 $ par mois qui a été suggéré, et je vous assure que nous n'en sommes pas encore là.

M. James Lunney: Peut-être faudra-t-il préciser tout cela un peu plus au fil de notre réflexion.

On a également signalé que ce type de maternité de substitution risquerait de réduire, voire de remplacer, le marché de l'adoption. En effet, des parents pourraient choisir cette voie plutôt que de choisir d'adopter un enfant qui serait déjà à la recherche de parents. Ils préféreraient produire leur propre enfant avec l'aide de quelqu'un d'autre, pour que leur enfant soit né de leurs gamètes.

Cela pose de sérieuses questions, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez. Santé Canada a-t-il déjà envisagé cette éventualité?

Mme Rhonda Ferderber: Nous avons regardé ce qui se passait du côté de l'adoption qui est déjà aujourd'hui accessible pour tous. Cela fait déjà longtemps que les parents ont le choix d'adopter ou de faire appel à une mère porteuse. À l'heure qu'il est, la fréquence de la maternité de substitution est beaucoup plus faible au Canada qu'elle ne l'est aux États-Unis, où elle est, nous le savons, assez forte.

Ce sont des décisions qui sont prises par des personnes très responsables. Je ne suis pas vraiment en mesure de dire quelles décisions ces gens vont prendre. Mais je ne crois pas que l'incitatif des limites raisonnables pour certaines dépenses va créer un problème dans les cas d'adoption. Lorsque les gens préfèrent avoir recours à une mère porteuse plutôt qu'à l'adoption, c'est parce qu'il intervient des considérations qui ont probablement moins à voir avec le coût qu'avec des opinions ou d'autres préoccupations personnelles.

M. James Lunney: J'ai seulement une dernière question.

La présidente: Rapidement.

M. James Lunney: Ma question fait suite à une observation qui a été faite plus tôt au sujet de l'importation et de l'exportation d'embryons et de gamètes. Je me demande seulement pourquoi nous jugeons un tel libellé nécessaire. Qu'on soit obligé d'importer ou d'exporter des gamètes ou des embryons ressemble drôlement à une réification de l'être humain.

Quel est votre avis à ce sujet?

Mme Rhonda Ferderber: Glenn, auriez-vous l'obligeance de répondre.

M. Glenn Rivard: À l'heure actuelle, par exemple, on importe du sperme des États-Unis à des fins de reproduction. Le fait est qu'il se peut que des gamètes ou des embryons franchissent la frontière. Cette mesure nous autoriserait donc à contrôler cette activité et à nous assurer que, par exemple, le sperme importé respecte les mêmes normes de santé et de sécurité qui s'appliqueraient au sperme recueilli au Canada.

M. James Lunney: Est-ce que quelqu'un peut me dire pourquoi on a besoin d'importer du sperme? Y a-t-il lieu de croire que nous en manquons au Canada?

M. Glenn Rivard: Je ne sais pas exactement ce qu'il y a derrière cela, mais le fait est que les dons de sperme sont insuffisants au Canada pour répondre à la demande. J'imagine que les indemnités sont plus élevées aux États-Unis. On sait également que le sperme est déjà réglementé en vertu de la Loi sur les aliments et drogues. Au cours de la dernière année ou à peu près, certaines cliniques ont eu de la difficulté à respecter les normes de sécurité imposées par Santé Canada. Ces normes permettent de s'assurer que le sperme ne devient pas un vecteur de la transmission de maladies. C'est ce qui explique que l'on manque de sperme, à tout le moins pour ce qui est de la demande.

La présidente: Merci.

Monsieur Dromisky.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Merci beaucoup.

J'aimerais qu'on revienne un peu à toute la question de la surveillance et du contrôle de la recherche qui se fait dans ce domaine. S'il s'agit d'un projet de recherche subventionné par des fonds fédéraux et probablement d'autres ressources, je peux comprendre que l'on impose des contrôles au type de recherche qui se fait. Cependant, voyons ce qui se passe dans le secteur privé.

• 1620

Y a-t-il moyen en ce moment de savoir quel genre de recherche on pratique dans ce domaine dans le secteur privé, dans les laboratoires privés? De même, dans le secteur privé, dans le domaine de la reproduction humaine assistée, existe-t-il des contrôles ou des lignes directrices qui obligent les entreprises à rendre compte aux autorités du genre de recherche que l'on fait?

Mme Rhonda Ferderber: Je vais commencer, et j'inviterai ensuite mon collègue à faire ses observations.

Pour ce qui est expressément de la recherche dans le secteur privé, nous avons bien sûr au Canada des comités d'éthique pour la recherche. On les trouve dans les universités, etc. Mais en ce qui concerne le financement fédéral de ces recherches, on est obligé de respecter des lignes directrices rigoureuses que l'on retrouve dans l'énoncé de politique des trois conseils et que l'on est en train de raffiner pour répondre aux exigences croissantes de la recherche d'aujourd'hui. Voilà pourquoi les instituts canadiens de recherche en santé sont en train de mettre au point en ce moment leurs propres lignes directrices.

Donc le secteur privé au Canada, au niveau de la recherche, devrait suivre ces lignes directrices, mais il n'y est pas aussi contraint qu'un groupe de chercheurs qui reçoit des fonds fédéraux.

M. Stan Dromisky: Oui, je comprends, mais les entreprises doivent-elles rendre des comptes à une autorité quelconque?

Mme Rhonda Ferderber: Pas vraiment.

M. Stan Dromisky: Pas vraiment. Ils peuvent faire leur recherche secrètement.

Mme Rhonda Ferderber: Oui.

M. Stan Dromisky: Très bien.

Je vous remercie.

La présidente: Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Je voudrais qu'on revienne à la question des embryons surnuméraires.

Il y aura un consentement éclairé des donneurs pour que ces embryons surnuméraires servent à des fins de recherche, si j'ai bien compris. J'ai compris aussi qu'il y aura une réglementation pour encadrer ces travaux. Il va falloir un permis, une autorisation.

Est-ce qu'un comité de surveillance ou un comité bioéthique sera chargé de surveiller ces travaux? Quelle orientation va-t-on donner à ces recherches? Est-ce qu'une orientation sera donnée à ces recherches? Est-ce que ce sera, par exemple, pour soigner l'infertilité ou—vous allez peut-être trouver cela un peu tortueux—si on va contourner le problème et développer des techniques qui pourraient faire en sorte que cela déboucherait sur la création d'enfants? J'aimerais savoir comment vous voyez l'encadrement de ces embryons surnuméraires à des fins de recherche.

Mme Francine Manseau: C'est une bonne question. La recherche sur les embryons surnuméraires sera une activité contrôlée. Il y aura une réglementation. Par exemple, en Angleterre, on détermine les raisons pour lesquelles on peut faire de la recherche en utilisant des embryons. Par exemple, on peut essayer de comprendre davantage la raison de l'infertilité, ainsi que ce qui se passe au moment où l'embryon est créé, au moment où il s'attache à l'utérus d'une femme, etc. Donc, il s'agit de déterminer quel type de recherche quelqu'un pourrait faire.

On prévoit avoir le même type de réglementation au Canada. Cela veut dire que quelqu'un qui voudra avoir une autorisation va devoir expliquer ce qu'il entend faire de ces embryons-là et qu'il va falloir que cela corresponde à certaines des raisons pour lesquelles on est prêt à autoriser des recherches utilisant des embryons. Une des conditions sera peut-être aussi que cette proposition de recherche soit approuvée par un comité d'éthique avant même d'être étudiée par les autorités qui pourront donner l'autorisation. Il faudra aussi s'assurer qu'il y ait un consentement de la part des gens dont les gamètes ont servi à créer cet embryon, etc.

Mme Pauline Picard: Merci. J'ai une autre question.

Madame Ferderber, je voudrais revenir sur une question que M. Manning vous a posée tout à l'heure. Je n'ai pas vraiment été d'accord sur votre réponse.

• 1625

Au sujet des actes prohibés, qu'on mentionne dans l'avant-projet de loi, vous sembliez dire qu'il y avait une espèce de controverse dans la population, dont certains membres sont pour et d'autres, contre, alors que les consultations qu'on a faites depuis la Commission Baird nous ont démontré que 85 p. 100 de la population est contre les actes prohibés mentionnés. Santé Canada est aussi contre ces actes, de même que les fonctionnaires qui ont rédigé l'avant-projet de loi. Le gouvernement et le ministre sont contre ces actes. L'UNESCO et le Conseil de l'Europe se sont prononcés là-dessus. Il y a même le président Bush qui l'a fait dernièrement.

La loi va peut-être nous arriver dans seulement deux ans. Ne trouvez-vous pas qu'il y a actuellement un vide juridique dangereux?

Mme Rhonda Ferderber: Je voudrais d'abord mentionner que je n'avais pas l'intention de dire qu'il y avait une controverse ou des personnes qui ne sont pas nécessairement d'accord sur tout ce que j'ai dit. J'aimerais signaler que durant les consultations que nous avons faites, il y avait un certain niveau d'entente concernant cette liste d'interdictions. Quand nous avons fait une consultation au sujet des activités de contrôle et des règles, nous avons recueilli des opinions différentes concernant ce qu'il y a de plus important ou ce que nous pouvons faire pour les établir.

Ce sont des discussions de ce genre que nous avons entreprises avec les stakeholders, avec les autres intervenants. Il n'y a pas tant de controverse que cela, mais tout dépend de leurs intérêts, de leurs questions et de l'endroit où ils sont dans le milieu des stakeholders. Les chercheurs ont leur opinion et les autres aussi.

Je suis tout à fait d'accord avec vous concernant l'urgence et la nécessité d'entreprendre l'élaboration de ces règlements le plus rapidement possible, mais avec des experts.

Mme Pauline Picard: Merci beaucoup.

[Traduction]

La présidente: Je vous remercie, madame Picard.

Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): J'ai certaines questions aussi sur les dépenses.

Que prévoit à l'heure actuelle la loi ou la pratique pour ce qui est des dépenses dans le cas d'autres dons de vie comme le sang ou des organes? Existe-t-il à l'heure actuelle un précédent juridique à cet égard? Ce projet de loi y est-il conforme? Et comment en général s'occupe-t-on des pénuries de dons de vie?

M. Glenn Rivard: Ce sont des questions qui relèvent de la compétence fédérale. Les provinces adoptent toutes une approche similaire, mais aucun paiement n'est prévu pour ce genre de chose. Si vous donnez du sang, par exemple, aucun paiement n'est prévu pour ce don.

En vertu des lois provinciales, on est autorisé à rembourser les dépenses liées directement à la grossesse d'une mère enceinte qui a l'intention de donner son enfant en adoption. Dans la mesure où il s'agit d'une comparaison valable avec la maternité de substitution, il s'agit d'une exception, pour ainsi dire.

Mme Judy Wasylycia-Leis: S'agit-il d'une comparaison valable lorsque l'on parle de dépenses pour les dons de sang et d'organes et les dépenses pour les dons de sperme ou d'ovules, ou pour la maternité de substitution? Je l'ignore. C'est pourquoi je pose la question.

Mme Rhonda Ferderber: Selon ce que j'ai pu observer de nos traditions, ou de la façon dont nous procédons dans notre société, on considère qu'il s'agit d'un don au sens propre du terme. Nous tâchons de ne pas l'oublier et d'agir de façon conforme à la pratique établie. Mais il s'agit d'une question qui mérite d'être approfondie.

• 1630

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je suppose que nous tâchons de déterminer, compte tenu des témoignages que nous avons entendus entre autres hier, s'il y aurait lieu d'éliminer de toute loi cet article sur l'autorisation des dépenses. Car il pourrait faire l'objet d'une vaste interprétation et pourrait nous entraîner sur la pente glissante de la commercialisation.

Une témoin que nous avons entendue hier, Phyllis Creighton, est pour sa part fermement convaincue que dès que l'on autorise des dépenses—il s'agit en fait d'un terme ambigu—cela permet de faire de façon détournée ce qui avait été interdit au départ. Est-ce que cet argument est légitime? Et pourquoi l'invoque-t-on?

Mme Rhonda Ferderber: Je répéterai simplement ce que j'ai dit plus tôt à propos de ce que nous espérons accomplir grâce aux règlements—c'est-à-dire de préciser très clairement les dispositions concernant les dépenses de façon à ce qu'il ne règne aucune ambiguïté; et d'établir les limites et les séries d'activités pour lesquelles des dépenses peuvent être remboursées. Ensuite, il faudra de toute évidence s'attendre à ce que des mécanismes de mise en application soient prévus de façon à ce que les gens ne pensent pas qu'il s'agit d'un incitatif. C'est un facteur dont nous allons devoir tenir compte.

La présidente: Je vous remercie, madame Wasylycia-Leis.

Avant de changer de sujet, j'ai une question.

Vous avez dit que dans un projet de loi précédent, toute cette idée de rémunération et d'indemnisation n'existait pas. Comme Mme Wasylycia-Leis l'a si bien souligné, selon notre tradition au Canada, les dons ne sont pas payés. Même dans des circonstances qui créent un danger de mort. Être sans enfant n'est pas une situation qui crée un danger de mort.

Vous pouvez probablement déduire d'après les questions qui vous ont été posées que la plupart d'entre nous sont extrêmement impressionnés par les témoignages que nous avons entendus hier. Donc j'aimerais que vous me disiez... Qui s'opposait à ce qu'on prévoit une indemnisation lorsque le projet de loi C-47 ne prévoyait aucune indemnisation, et qu'est-ce qui vous a fait changer d'avis lors de la rédaction du présent projet de loi?

Mme Rhonda Ferderber: Je céderai la parole à mon collègue, qui était ici à l'époque du projet de loi C-47. Auparavant, j'aimerais simplement ajouter que, comme vous le savez, nous travaillons bien entendu très étroitement avec Mme Creighton, et nous sommes très intéressés par son apport au débat et au dialogue. Il s'agit certainement d'une question à laquelle nous réfléchissons sérieusement.

La présidente: Permettez-moi de préciser que c'est moins Mme Creighton que l'autre aspect de l'argument qui a fait grosse impression.

Mme Rhonda Ferderber: Bien. Merci de cette précision.

Mme Francine Manseau: À l'époque du projet de loi C-47, je pense que le débat s'est porté davantage sur les dons de sperme. Des inquiétudes ont été exprimées par la profession médicale et par les patientes, qui craignaient qu'il n'y ait pas de donneurs. C'est ce qu'on disait très explicitement.

Les dons de sperme existent depuis des années, certainement depuis 40 à 50 ans. L'usage a toujours voulu qu'ils se fassent contre rémunération. Je pense que si l'on veut s'écarter de cette formule, il va falloir envisager une période d'adaptation et même un effort d'information pour que les hommes se rendent compte de ce qui se passe.

À l'époque, on a entendu de vives objections selon lesquelles il n'y aurait aucun donneur. C'est ce que prétendait la profession médicale. Les patientes voulaient éviter une telle éventualité, qui les aurait privées de toute possibilité d'avoir un enfant... Mais je pense que cette crainte a été formulée avant qu'on ait vérifié s'il y avait des donneurs ou non. Nous savons que certains pays ont réussi à passer d'un régime de don contre rémunération à un régime de don gratuit.

Je pense donc qu'il va falloir passer par une période de remise en question. Nous en aurons peut-être le temps. Un jour viendra peut-être où nous n'aurons plus à assumer ces dépenses.

Voilà donc d'où viennent les pressions. Un grand nombre de pays ne rémunèrent pas les dons de sperme. C'est le cas de l'Angleterre, par exemple. Mais il y en a d'autres. Dans ces pays, les donneurs sont indemnisés de leurs frais, mais la dépense est minime. Très souvent, elle est du reste plafonnée. C'est très peu.

• 1635

La présidente: J'ai peine à imaginer les frais occasionnés par un don de sperme, à part le prix d'un billet d'autobus. D'après ce qu'on nous a dit hier, il est très facile de multiplier les dépenses.

Mme Francine Manseau: Si l'on compare le don de sang et le don de sperme, ce dernier est différent dans la mesure où le plus souvent, les cliniques de collecte de sang viennent sur le lieu de travail ou à proximité. Pour le don de sperme, le donneur s'engage à se déplacer chaque semaine, ou même plus souvent. Il doit subir des tests. Il doit être du bon groupe sanguin et doit se libérer pendant un certain temps chaque semaine, peut-être pendant un mois, et peut-être deux fois par semaine.

Je pense donc que ce qu'on exige d'un donneur de sperme est différent, mais cela ne veut pas nécessairement dire qu'il doive être rémunéré. Je dis simplement que c'est différent.

Prenez le cas des dons d'ovules, par exemple, et des médicaments que la femme doit prendre pendant qu'elle est hyperstimulée. À moins d'un régime d'assurance-médicaments qui couvre ce genre de dépense—et tous les Canadiens n'en bénéficient pas—une femme qui donne des ovules s'expose à des dépenses qui doivent être prises en compte. Si elle n'a pas d'assurance-médicaments, je ne sais pas ce qu'elle devrait faire.

La présidente: C'est très intéressant: nous veillons à ne pas faire du bébé un produit, mais nous sommes en train de parler de rémunération pour des dons censément altruistes. Nous parlons d'importation et d'exportation. Le mot «commerce» apparaît dans le projet de loi. Je pense donc que rien n'est encore décidé. Nous envisageons toutes les possibilités.

Voilà un simple commentaire de la part de la présidence. Excusez-moi. Passons à l'article suivant.

M. Rob Merrifield: C'est bien dit, madame la présidente. Il ne s'agit que de dollars canadiens, mais...

Mme Rhonda Ferderber: C'est une question d'administration, qui regroupe plusieurs thèmes. Le premier concerne la délivrance d'une autorisation: quels essais cliniques faut-il faire avant d'obtenir une autorisation, qui obtient une autorisation, etc.?

Vous nous avez demandé précisément si nous avions une idée du nombre d'essais cliniques ou du nombre de propriétaires ou d'exploitants d'établissements susceptibles d'être candidats à l'autorisation. Pour les essais cliniques, nous n'avons aucune idée de leur nombre mais pour les établissements, nous savons, grâce au travail que nous faisons avec la Société canadienne de fertilité et d'andrologie qu'il existe actuellement de 20 à 25 centres de fécondation in vitro au Canada et sans doute une centaine d'établissements de stockage de gamètes ou d'embryons.

Nous faisons actuellement des recherches pour avoir une meilleure idée de l'étendue du secteur des techniques de reproduction assistée, si vous me permettez d'utiliser cette expression. Nous allons devoir faire enquête, notamment avec la Société canadienne de fertilité et d'andrologie, pour déterminer la nature de ce secteur, et nous avons l'intention de vous faire part de cette information.

Vous nous avez posé antérieurement des questions qui nous ont amenés à étudier ce secteur. Nous avons déjà effectué certains travaux, mais il faudrait les mettre à jour, et ce sera une excellente occasion pour le faire.

Vous nous avez aussi posé la question suivante: «Dans le cas d'essais cliniques auxquels participent plusieurs chercheurs, à qui l'autorisation est-elle délivrée?» Dans un tel scénario, la réglementation devrait fournir la réponse. Elle devrait indiquer s'il y aura une seule autorisation, accordée par exemple au directeur de la recherche, ou si chaque chercheur en recevra une. On pourrait aussi exiger la désignation d'une ou de plusieurs personnes qui seront responsables de la conformité à la loi et à toutes les exigences de l'autorisation.

Votre question suivante concerne directement les propositions d'autorisation, l'intervention du ministre et les structures de soutien. Vous voulez sans doute parler de la forme d'autorité qu'il faudrait créer, etc. C'est une question importante, car chacun se demande quel genre d'organisme de réglementation on va créer.

• 1640

Selon l'orientation choisie, selon qu'il s'agit d'un service ministériel ou d'un organisme extérieur, nous pensons que la délivrance des autorisations va nécessiter un soutien administratif important. Voici donc notre réponse: quel que soit l'organisme de réglementation, il devra assumer la fonction d'autorisation, et disposer pour cela des ressources nécessaires.

Glenn, voulez-vous vous charger des questions suivantes?

M. Glenn Rivard: La question suivante concerne l'article 15. En particulier, pourquoi le paragraphe 15(3), où il est question de protection des renseignements personnels, est-il placé ici plutôt que dans la partie suivante, qui traite de façon générale de la protection des règlements personnels? En résumé, ce paragraphe répond à la question soulevée par la procédure énoncée au paragraphe 15(1), et nous avons donc estimé qu'il est plus simple et plus clair de tout mettre dans l'article 15.

Je vais apporter quelques précisions. L'article 15 traite de la procédure d'octroi de l'autorisation et de l'étude de la demande d'autorisation. Il précise que le ministre est habilité à prendre en compte toute une gamme de renseignements concernant la demande ou concernant diverses personnes.

Par souci de transparence, le paragraphe 15(2) précise qu'en règle générale, cette information doit être à la disposition des requérants et du public, mais nous sommes conscients du fait que certains renseignements sont de nature personnelle et, à ce titre, doivent être protégés. Au demeurant, il peut être opportun de les communiquer au moins au requérant, de façon qu'il comprenne les éléments que le ministre va prendre en considération.

Le paragraphe 15(3) permet au ministre de concilier ces intérêts divergents et de déterminer s'il faut, au besoin, divulguer des renseignements personnels au requérant pour la présentation de sa demande.

Il est apparemment plus explicite d'évoquer cette autorité et la conciliation de ces préoccupations dans le corps même de l'article puisqu'elles se rapportent à la procédure évoquée au premier paragraphe.

La question suivante, D(3), concerne l'article 16, qui confère au ministre des pouvoirs extraordinaires ou pouvoirs d'urgence pour intervenir rapidement de façon à prévenir les dangers d'une activité réglementée pour la santé humaine, l'environnement, etc. En vertu de ces pouvoirs, le ministre peut autoriser un inspecteur à pénétrer dans un établissement ou à en assumer la gestion.

Vous nous demander particulièrement quels sont les dangers et préjudices envisagés dans cette disposition. Je précise encore une fois qu'il s'agit là de pouvoirs extraordinaires. En situation normale, l'inspection et les conditions de l'autorisation devraient suffire à réglementer l'établissement. Il s'agit là de pouvoirs qui ne seront invoqués qu'exceptionnellement, mais qui sont néanmoins indispensables.

On peut évoquer quelques exemples où le ministre est fondé de croire, par exemple, qu'un laboratoire va créer des embryons à des fins de recherche, alors que cela lui est interdit; il peut être indispensable d'intervenir rapidement pour prévenir une éventuelle tentative de clonage humain; ou même, dans un contexte plus terre à terre, le ministre peut être fondé de croire qu'on va utiliser du sperme non testé ou insuffisamment testé pour créer des embryons qui vont être implantés et devenir de ce fait le vecteur de la transmission d'une maladie.

• 1645

Dans certains cas, il peut être indispensable d'assumer le contrôle de la clinique pour prévenir de telles éventualités ou pour déterminer si elles se sont effectivement produites. Encore une fois, ce sont là des circonstances inhabituelles, mais il apparaît souhaitable de disposer de ces pouvoirs extraordinaires.

La présidente: Bien. Nous en sommes maintenant à la question D(4).

Mme Rhonda Ferderber: Vous nous demandez si Santé Canada a une idée de la manière dont fonctionnerait cette participation des ONG à la promotion des normes, etc. En fait, tout récemment, nous avons rencontré un groupe de travail composé d'un certain nombre de représentants d'organismes extérieurs au gouvernement, notamment d'associations médicales; il y avait un groupe de consommateurs de l'Association canadienne de sensibilisation à l'infertilité, le Conseil canadien d'agrément des services de santé et l'Association canadienne de normalisation.

Nous avons invité ce groupe de travail à collaborer avec nous pour élaborer un ensemble de modèles de structures de réglementation en matière de reproduction assistée. Tout ce qui s'est dit ou que l'on a appris lors de ces rencontres a paru très utile à tous les participants, notamment à nous. Nous avons donc déjà profité de ce genre de collaboration et nous en profiterons encore certainement à l'avenir; cette disposition du projet de loi nous donne donc une excellente occasion de collaborer avec les experts et tous les intervenants concernés.

À ce propos, le rapport de ce groupe de travail vous a déjà été communiqué. Il est peut-être plus conforme à vos intérêts de mieux comprendre la nature éventuelle de l'organisme de réglementation, et ce rapport vous donnerait une idée de la façon dont les associations et organismes non gouvernementaux peuvent collaborer avec nous à l'obtention de résultats fort utiles.

Quant à la possibilité que les normes soient élaborées plus rapidement et nécessitent des changements moins fréquents, c'est très vraisemblable. L'intervention des ONG serait sans doute moins lourde que les procédures officielles actuelles, dont j'ai parlé tout à l'heure, même si la présente formule d'élaboration des règlements et des normes est tout à fait pragmatique. Nous ne voulons rien inventer ou réinventer. Au contraire, si les associations professionnelles appliquent déjà des normes, nous pensons qu'elles pourraient être mentionnées en référence dans les règlements dans la mesure où cela nous permettrait de répondre aux exigences du gouverneur en conseil, qui exige que les normes ou les lignes directrices soient conformes aux objectifs de la loi.

Nous parlions tout à l'heure de la réglementation concernant le sperme. Dans cette nouvelle logique, cette réglementation devrait relever de la nouvelle loi, et non plus de la Loi sur les aliments et drogues.

Il est donc certain que grâce à ces experts de l'extérieur, les normes et les règlements devraient être étudiés et préparés en meilleure connaissance de cause et devraient donc être, à mon avis, de meilleure qualité.

La présidente: Bien. Nos témoins nous ont parlé de la partie E. Y a-t-il d'autres questions à ce sujet?

Monsieur Manning.

M. Preston Manning: Est-ce que vous pourriez nous donner votre avis sur une histoire d'importation de sperme dont j'aimerais vous parler et qui n'est pas sans rapport avec la future réglementation. Je me suis souvenu de cette histoire lorsque mon collègue a posé une question sur l'importation de sperme.

J'ai visité un jour une clinique de fertilité, et l'histoire qu'on m'a racontée—je ne suis pas certain de l'avoir bien comprise à 100 p. 100, et c'est pourquoi je vous pose la question—c'est que Santé Canada a un règlement sur l'utilisation du sperme, l'un des premiers règlements concernant du matériel reproductif humain, qui s'applique dans les cliniques de fécondation. Le règlement n'était pas suivi de façon très rigoureuse, et quelqu'un a dénoncé ce laxisme. Je crois que c'était quelqu'un de Hamilton, ou quelqu'un de l'université McMaster. Je ne me souviens plus de l'établissement.

Dans cette histoire, on contestait l'innocuité et la salubrité du sperme utilisé dans les cliniques de fertilité. C'est un peu comme le sang contaminé, puisque le sperme peut transmettre des maladies infectieuses.

Par la suite, Santé Canada a imposé des critères très rigoureux pour l'utilisation du sperme, mais d'après le personnel de cette clinique, les dépenses afférentes à l'application de ces critères étaient telles qu'il était plus facile d'importer de l'étranger, notamment des États-Unis, du sperme conforme aux critères en question.

• 1650

Cette histoire m'a passablement dérangé. Dans cette clinique, le personnel s'est mis à douter considérablement de la capacité de Santé Canada de réglementer le domaine. Les fonctionnaires ont eu l'occasion de réglementer du matériel reproductif humain, et ils ont créé une situation très problématique, puisqu'il est plus facile pour les cliniques de se conformer aux critères des ministères en important du sperme.

Je n'ai peut-être pas bien compris cette histoire, mais j'aimerais savoir ce qu'il en est de la réglementation applicable au sperme, par ailleurs, peut-on tirer de cette expérience des leçons qui pourraient, de façon plus générale, nous être utiles en matière de réglementation du matériel de reproduction humain?

Mme Rhonda Ferderber: Permettez-moi d'intervenir. Glenn aura peut-être d'autres arguments à ajouter, car il vient précisément de dire que nous avons récemment soumis le règlement à une mise à jour et à une révision...

M. Preston Manning: Son propos était passablement moins passionné que ceux du personnel médical qui m'a raconté cette histoire.

Mme Rhonda Ferderber: Tout à fait.

Ce fut une entreprise d'envergure. Évidemment, le changement a eu un effet certain sur les cliniques dans la mesure où elles ont dû imposer une longue quarantaine à leur stock de sperme en attendant la publication du nouveau règlement, ce qui a suscité bien des contrariétés à différents niveaux. D'après l'histoire que vous racontez, et dont je ne peux confirmer tous les éléments... Nous avons dû déterminer les éléments d'innocuité et de salubrité dont nous avions besoin, et veiller à ce qu'ils soient énoncés de façon très claire et très explicite.

Il a également fallu renforcer les mesures entourant les inspections et l'application de la loi. C'est l'un des éléments essentiels que nous en avons retenus. Nos collègues de Santé Canada qui assument des responsabilités dans ce domaine sont toujours prêts à nous proposer... Nous les consultons fréquemment dans le cadre de notre effort d'innovation et d'élaboration de méthodes qui nous soient spécifiques. Nous avons donc beaucoup appris de tout cet exercice.

Glenn, avez-vous autre chose?

M. Glenn Rivard: J'ajouterai...

La présidente: Un peu plus d'enthousiasme, Glenn.

Des voix: Oh, oh!

M. Glenn Rivard: J'ajouterai deux choses. Premièrement, qu'il s'agisse de sang, d'organes ou de sperme, l'établissement et l'application de normes de santé comportent toujours des coûts. Si vous voulez protéger la santé et la sécurité des personnes, vous ne pourrez éviter ces coûts.

Deuxièmement, la réglementation concernant les dons de sperme—Rhonda a indiqué qu'il en allait de même pour le règlement connexe à cet avant-projet de loi—est élaborée ou sera élaborée en collaboration avec les spécialistes et les professionnels de la santé. Ce règlement ne sera pas inventé de toutes pièces. Nous avons déjà mené des consultations exhaustives auprès des professions intéressées, et elles nous ont aidés à établir où se situera la norme scientifique qui prévaudra pour la sécurité du sperme utilisé à cette fin.

M. Preston Manning: Ma deuxième question porte sur les coûts. Comme vous le savez et comme le passé nous l'a prouvé dans d'autres domaines—celui que je connais le mieux est celui de l'énergie—dès qu'on commence à imposer des règlements, cela entraîne des coûts qui sont parfois énormes. À une certaine époque, la réglementation dans le domaine des services publics a fait que le fardeau réglementaire pouvait représenter 5 p. 100, 10 p. 100 ou même 15 p. 100 du coût de l'électricité; ce n'est donc pas négligeable.

En l'occurrence, comment assumera-t-on le coût de la réglementation et de l'administration? Normalement, c'est le demandeur ou l'utilisateur qui assume ces coûts. Souvent, le demandeur transmet les coûts à l'utilisateur. J'imagine que c'est ce que feront les cliniques spécialisées dans le traitement de stérilité.

Ces coûts seront-ils assumés par les demandeurs, les utilisateurs ou les contribuables? Avez-vous une idée de ce que représenteront ces coûts et de qui en assumera le fardeau?

Mme Rhonda Ferderber: À mesure que nous établirons le profil du secteur, nous trouverons des réponses à ces questions. Nous avons à peine commencé cet exercice. C'est l'une des questions que nous voulons explorer, monsieur Manning, bien que nous ne puissions peut-être pas aborder tous les aspects de cette question particulière.

• 1655

Nous sommes tous conscients du fait que tout organisme de réglementation a besoin de fonds. Nous ignorons encore quel sera le budget de cet organisme, puisque nous ne savons pas encore quelle forme il prendra, quelle fonction il remplira et comment il fonctionnera. Ce qui nous guide, c'est la façon dont d'autres sections du ministère ont établi ce genre de coût.

En général, nous savons que le ministère—en fait, le gouvernement—devra déterminer quelle sorte d'organisme réglementaire devra être créé et quelles seront les ressources financières et humaines qu'il lui faudra.

Qui assumera ces coûts? Il est certain que cette question soulève des préoccupations. Ceux à qui nous avons parlé nous en ont fait part; ils craignent que les clients, ceux qui sollicitent ces services pour tenter d'avoir un enfant, doivent assumer ces coûts. Manifestement, ce ne serait pas la solution la plus efficace, et nous avons encore des préoccupations quant à la façon dont ces coûts devront être partagés.

La présidente: Merci.

Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: L'avant-projet de loi traite-t-il de la façon dont les cliniques spécialisées dans le traitement de stérilité pourraient encourager la surproduction d'embryons? Je sais que le texte législatif comporte des interdictions. Je me demandais si cette question était abordée dans la partie concernant la réglementation et l'octroi de permis aux cliniques.

Encore une fois, je me demande s'il existe une interdiction d'une part et une forme d'encouragement d'autre part.

Mme Rhonda Ferderber: Je crois que l'avant-projet de loi...

Glenn, est-ce l'article 8?

M. Glenn Rivard: Le paragraphe 8(1) prévoit le pouvoir de réglementer le processus de création d'embryons, d'implantation, etc. Par conséquent, avec ce pouvoir, on pourrait établir le nombre d'embryons qui est acceptable ainsi que les conditions dans lesquelles il se reproduit, et ainsi de suite.

Mme Judy Wasylycia-Leis: J'ai une autre question. Est-il fait mention quelque part dans l'avant-projet de loi d'un mécanisme permettant de s'assurer que les cliniques spécialisées dans le traitement de fertilité fournissent aux femmes toutes les informations qu'elles doivent avoir au sujet des dangers pour leur santé et leur bien-être? Certaines inquiétudes mentionnées portaient sur le fait qu'il existerait des preuves selon lesquelles il y aurait une relation de cause à effet entre les fécondostimulants que l'on prend pour produire des embryons et une fréquence plus élevée du cancer, et l'on se préoccupe du fait que les femmes ne reçoivent pas toutes les informations dont elles ont besoin avant de prendre une décision.

Je me demande donc si l'avant-projet de loi prévoit cela ou s'il y a quelque chose dans le règlement à ce sujet. Comment va-t- on gérer cela dans ce train de mesures?

M. Glenn Rivard: L'article 6 établit la nécessité du consentement pour l'utilisation de tout matériel de reproduction humaine, ce qui comprend la collecte d'embryons, etc. Le consentement est une notion juridique qui oblige les intéressés à communiquer toutes les informations pertinentes à la personne, qui doit être en mesure de les évaluer dans des circonstances exemptes de toute contrainte ou pression, après quoi la personne peut donner son consentement.

Je crois qu'il est prévu que le règlement consolidera plus tard cette exigence légale fondamentale en énonçant plus précisément les informations qui devront être communiquées par la clinique à la personne, de telle sorte que les cliniques sauront exactement ce que l'on attend d'elles.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Cela me semble encore un peu vague, cependant, étant donné qu'on obligera les cliniques à expliquer en détail les effets possibles de ce traitement et à mentionner la recherche qui peut se faire dans ce domaine, qu'elle soit concluante ou non.

• 1700

Mme Rhonda Ferderber: Je peux peut-être mentionner un autre aspect de l'information. La réflexion qui entoure en ce moment les fonctions de l'organisme de réglementation fait intervenir cette exigence selon laquelle il faut fournir au public des informations complètes, qu'il s'agisse des traitements ou de la recherche qui se fait. Nous croyons donc que cette responsabilité est très importante pour les clients qui vont se présenter et qui auront à tout le moins un point d'entrée, si vous voulez, un endroit où ils peuvent s'adresser pour obtenir des informations et s'assurer que les informations qu'ils obtiennent proviennent de sources plus neutres, par opposition, par exemple, à un médecin ou à une clinique qui ne serait pas en mesure d'avoir des informations aussi pointues que l'organisme de réglementation. C'est donc sûrement l'un des secteurs où l'on pourrait apaiser les préoccupations dont vous parlez.

Nous espérons aussi qu'au fil du temps, lorsque cet organisme de réglementation ou cette entité sera en place, ce genre d'information qui n'est pas vraiment à la portée de tout le monde, ou qui n'est pas accessible aussi aisément, etc. permettra de régler ce problème. Nous espérons que nous disposerons de connaissances plus étendues à partir desquelles les gens pourront agir et prendre leurs décisions.

La présidente: Merci, madame Judy Wasylycia-Leis.

Si je reprends ce que vous dites, il semble que les cliniques pourront utiliser ces dons avec le consentement de la personne, mais il me semble—à mes yeux, en tout cas—que le consentement pourrait être obtenu de la personne après qu'elle aura fait son don. Pourquoi ne pas exiger le consentement avant le don? Ce n'est pas clair dans l'avant-projet de loi.

Mme Francine Manseau: Au moment du don.

La présidente: Non, «au moment du don» est trop vague. Pour tous les usages possibles que le don peut avoir à la clinique ou à l'université, etc, le consentement devrait être donné par la personne avant, de telle sorte qu'elle connaisse l'ensemble des activités possibles. Une fois le don fait, vous pourriez être tenté de signer n'importe quoi rien que pour sortir de là au plus vite. Je pense qu'il faut réfléchir à tout cela avant. On pourrait aussi prévoir un temps d'attente.

Mme Rhonda Ferderber: Ce sont de bonnes idées. Je répète que j'ai pris note d'une observation qui allait plus ou moins dans le même sens mardi dernier, au sujet de la question du temps. Donc pour ce qui est du règlement, et de ce processus, bien sûr, pour ce qui est d'informer les gens, c'est très utile.

Encore là, je pense que vous parlez davantage de l'élaboration du règlement que des détails du projet de loi. J'aurais seulement besoin d'une clarification de votre part de ce côté, si c'est possible.

La présidente: Il y a deux séances de cela, lorsque M. Shugart était ici, je lui ai dit que la plupart d'entre nous hésitent fortement à s'en remettre à l'élaboration du règlement, étant donné qu'un règlement peut-être changé deux semaines plus tard par la bureaucratie et le ministre sans qu'on nous demande notre avis.

J'incline à croire—et mes collègues peuvent secouer la tâche si je me trompe—que les parlementaires aujourd'hui ont tendance à demander plus de précisions dans le projet de loi et moins dans le règlement. Nous savons qu'il est désirable, du point de vue des autorités, d'avoir plus de souplesse, mais je pense que dans ce domaine-ci, il y a des préoccupations d'ordre éthique d'une part qui, à mon avis, sont pancanadiennes—je déteste cette expression—et d'autre part, nous devons composer avec les pressions d'un groupe de lobbyistes dont plusieurs ont des intérêts financiers en jeu, qui se confondent avec les experts. Certains experts ont des intérêts financiers même s'il ne s'agit que de chercheurs qui essaient d'obtenir des fonds des ICRS.

Donc s'il y a d'une part l'idée que le grand public se fait de ce qui est bien et de ce qui est mal, et d'autre part, des personnes compétentes à qui vous faites appel pour rédiger le règlement, ou établir des normes, et que ces gens, dont beaucoup ont des intérêts financiers en jeu, nous croyons qu'il est dans l'intérêt public d'avoir un projet de loi aussi précis que possible.

Preston Manning va...

M. Preston Manning: Non, non.

La présidente: Il est peut-être d'accord avec moi de manière générale, mais il va vous dire que je me trompe.

• 1705

M. Preston Manning: Eh bien, non, je crois que nous sommes nombreux à être d'accord avec vous. L'argument que fait valoir le milieu scientifique, cependant—et c'est là où nous devons instaurer un équilibre—c'est que la connaissance scientifique dans ce domaine évolue tellement vite...

La présidente: Oui, je comprends.

M. Preston Manning: ...dans six mois, votre projet de loi sera désuet, et bien sûr, il faut tellement de temps pour modifier une loi. J'imagine que ce que nous essayons de faire, c'est...

La présidente: Instaurer un équilibre.

M. Preston Manning: ...c'est d'adopter une loi qui est faite de telle manière qu'on ne devra pas la modifier tout en conservant la souplesse qu'il faut pour suivre l'évolution de la connaissance scientifique.

La présidente: Oui. Comme cela rejoint un peu ce que je dis, je peux peut-être revenir à l'autre chose que je disais.

Monsieur Lunney, vous êtes le suivant.

L'élaboration des normes, ou l'établissement des normes, qui est un processus permanent, j'imagine, qui suit l'évolution de la science, et où interviennent les ONG, me préoccupe. J'aimerais ajouter une chose à ce que je disais il y a un instant—«Quels experts?»—parce qu'il est sûr que nous constatons un conflit entre des gens qui fournissent des services pour de l'argent. Je pense qu'on pourra en dire autant du milieu scientifique lorsqu'il viendra nous dire à quel point il est important d'aller de l'avant. Il y a donc cet aspect du débat qui se compare avec l'aspect religieux et éthique du débat, où l'on dit qu'il faut être très prudent, aller lentement. Intervient ensuite notre propre préoccupation générale au sujet de l'intégrité du génome humain, préoccupation qui doit décider de tout, en quelque sorte. Je m'inquiète donc de savoir qui vous recrutez dans ce processus.

Imaginez que vous avez un comité composé de sept scientifiques et d'un éthicien. Pour moi, cela n'irait pas du tout. Donc cette question D(4), l'élaboration de normes par des organisations non gouvernementales, me semble porteuse de... pour tout dire, je suis inquiète.

Monsieur Lunney.

M. James Lunney: J'aimerais revenir à une observation qui a été faite plus tôt et qui avait trait à la question du consentement. Lorsqu'on parle du consentement, particulièrement du consentement éclairé, je crains que certains éléments de la population soient vulnérables à l'exploitation, particulièrement si l'on mêle des dollars aux gamètes.

Je constate que vous devez avoir plus de 18 ans. Je crois qu'on craint que les jeunes personnes, à 18 ans... Nous nous souvenons tous de comment nous étions à 16 ans, quand on croyait tout savoir. En vieillissant, avec le recul, on est troublés à la pensée de tout ce qu'on ignorait.

Je crois que les jeunes peuvent être très vulnérables à l'exploitation, à l'argent qu'on leur donnerait pour leurs gamètes; on pourrait exploiter de jeunes femmes, malgré les risques causés par l'accélération des ovulations dans le but de produire des ovules surnuméraires, de même que les risques liés à la maternité de substitution. De jeunes femmes pourraient être séduites par les gains financiers éventuels et se lancer dans une carrière de gestatrice, sans vraiment tenir compte des conséquences pour leur fertilité future, par exemple. La question du consentement éclairé est donc une question très sérieuse, surtout pour les jeunes.

Je ne sais pas si quelqu'un a des commentaires là-dessus. Je voulais simplement qu'on en parle, puisque vous avez fait allusion au consentement.

Mme Rhonda Ferderber: Nous sommes tout à fait d'accord. C'est l'un des principes fondamentaux que nous avons cernés et qui doit être au centre du projet législatif. En lisant le texte de loi, vous constaterez qu'on fait souvent allusion au consentement écrit et éclairé préalable.

Nous sommes donc d'accord. Ce n'est pas encore un acquis, mais il faut certainement que ça le devienne. Certains pourraient prétendre qu'il y a consentement, mais... vous verrez que c'est au haut de la liste des règlements que je transmettrai au greffier.

La présidente: Merci.

Monsieur Castonguay.

[Français]

M. Jeannot Castonguay: Je reviens sur le point qu'a soulevé James. Un consentement peut être un document d'une page comme il peut être un document de 20 pages et il peut y avoir une signature au bas, mais cela ne m'assure pas que c'est un consentement éclairé.

Je veux surtout aborder l'aspect du counselling. Comment peut-on s'assurer que ce counselling qui va permettre aux gens de voir les deux côtés de la médaille... Pour moi, c'est cela qui permet de s'assurer qu'il y a un consentement éclairé, bien plus qu'un document de 10 ou 20 pages qui contient toute l'information.

J'ai travaillé dans un domaine où j'ai vu beaucoup de documents de consentement signés et je dois vous dire que ça vaut ce que ça vaut. La discussion que je pouvais avoir avec un client avait beaucoup plus d'importance que ce qui était écrit sur une feuille de papier. Comment peut-on s'assurer qu'un tel counselling va se faire? Je pense que c'est extrêmement important.

• 1710

Il y a là beaucoup d'inconnues. Comme M. Manning le disait, on veut permettre à la science d'évoluer, mais d'un autre côté, il faut avoir le pied autant sur les freins que sur l'accélérateur. Comment peut-on s'assurer de ça?

[Traduction]

Mme Rhonda Ferderber: Si vous voulez connaître la passion de l'équipe, Francine est la passionnée du counselling et des efforts qu'il faut faire pour le renforcer. Je lui donne donc la parole.

[Français]

Mme Francine Manseau: Je suis d'accord sur ce commentaire. Effectivement, dans la réglementation, on espère faire en sorte qu'il y ait beaucoup plus de counselling. En ce moment, la plupart des cliniques n'ont pas de conseillers à plein temps, des personnes qui ont un diplôme qui permet de les définir comme des gens qui peuvent faire du counselling. Cela n'existe pas, et on voudrait que cette situation change.

Je suis d'accord avec vous que pour avoir un consentement éclairé. Il faut vraiment avoir discuté avec les personnes, leur avoir donné des choses à lire et auxquelles réfléchir et les rencontrer à nouveau avant de vraiment établir ce consentement. Il faut s'assurer que les gens se posent les questions nécessaires pour le long terme.

Donc, dans la réglementation, on veut s'assurer le plus possible que ce counselling soit donné à ces gens-là. Cependant, je pense qu'on aura peut-être un problème au Canada, parce que je ne sais pas si on a formé assez de gens dans ce domaine pour donner ce counselling nécessaire.

Je ne suis pas en désaccord, loin de là. On va vouloir définir ces choses dans la réglementation. On parlait des donneurs de sperme. En ce moment, ces gens-là ne reçoivent aucune information. On les informe peut-être des types de tests qu'ils vont devoir subir, mais on n'essaie pas de leur faire comprendre la portée de leur geste. C'est important que ce soit fait, de telle sorte que lorsqu'un donneur donne de son sperme, il soit conscient que des enfants seront créés à la suite de son geste. Jusqu'à maintenant, on a essayé de dissocier complètement ces choses. Tout ce qu'on voulait, c'était le sperme. On payait le donneur et il n'avait rien à dire. Par exemple, on ne lui donnait pas nécessairement la possibilité de limiter le nombre d'enfants qui pouvaient être créés par son sperme. On n'en parlait pas. Dans la loi et dans la réglementation, on voudra s'assurer qu'avant de prendre le sperme de quelqu'un, ce dernier ait du counselling et une véritable compréhension du geste qu'il s'apprête à poser. Quand on demande de l'information sur l'histoire médicale ou génétique de la personne, il est essentiel qu'elle soit sensibilisée à l'impact de son don. Cela veut dire qu'une personne sera créée et que cette personne va devoir avoir cette information.

Donc, il ne fait aucun doute qu'il va falloir changer la façon dont le système fonctionne en ce moment. Je pense que toute la question du counselling est très importante et qu'on doit en tenir compte beaucoup plus qu'on ne le fait en ce moment.

[Traduction]

La présidente: Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard: Merci, madame la présidente.

Madame Manseau, je pense qu'il va falloir des travailleuses sociales spécialisées dans le counselling sur ces techniques-là. Ce sera peut-être une nouvelle profession.

Mme Francine Manseau: Il y en a qui le font en ce moment au Canada. On a été en contact avec des gens. Je ne dis pas qu'il n'y en a pas du tout, mais ce n'est pas organisé de la même façon qu'en Angleterre ou en Australie, où cette chose a été développée beaucoup plus qu'elle ne l'a été ici. C'est peut-être parce que cela a été vu comme une pratique médicale beaucoup plus que comme une pratique qui nécessitait l'intervention d'une équipe multidisciplinaire. On a beaucoup évolué dans un modèle médical, peut-être sans donner assez d'importance à d'autres aspects, mais ce sont des choses qu'on espère changer.

Mme Pauline Picard: Ma question concerne le fichier du ministre, qui va contenir une foule de renseignements personnels. Le ministre lui-même nous a déclaré qu'il préférerait que ce soit régi par une agence indépendante, et je suis d'accord avec lui. Dans l'article, on dit que le ministre pourra, à sa discrétion, révéler certaines informations. Est-ce que j'interprète cela correctement? Quelles seront ces informations qu'il pourra révéler, et qui aura accès à ces informations?

• 1715

Mme Rhonda Ferderber: De quel article parlez-vous?

Mme Pauline Picard: Je parle des paragraphes (2) et (3) de l'article 15.

[Traduction]

M. Glenn Rivard: Il est vrai que le ministre, en remettant l'avant-projet de loi au comité, a précisément demandé au comité de se pencher sur la question de l'administration de la loi, en particulier l'existence d'une agence administrative. Mais lorsque nous avons préparé le texte législatif, il fallait faire un choix. L'ébauche de projet de loi laisse tout pouvoir administratif entre les mains du ministre lui-même. C'est la norme.

Concrètement, en vertu de cet avant-projet de loi, c'est le ministère de la Santé qui administrerait la loi, qui veillerait à son application et qui traiterait les demandes de permis. Tout ce qui relève de cette loi relèverait du ministère de la Santé, au nom du ministre. S'il est décidé de créer une agence à qui confier une partie ou toutes ces fonctions, il est clair qu'il faudrait récrire le projet de loi.

[Français]

Mme Pauline Picard: Très bien. Le comité voulait recommander qu'il y ait une agence. Merci.

[Traduction]

La présidente: Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Revenons à la question du consentement éclairé. Je ne sais toujours pas ce qui serait changé, si cette loi et cette méthode étaient actuellement en vigueur. Je ne sais pas si les cliniques de fertilité seraient obligées de renseigner les clients sur les effets secondaires possibles à long terme, ou les risques de problème de santé.

Je pense à quelques études dont j'ai entendu parler, sur des cliniques de fertilité en Ontario, par exemple, dans des sondages effectués à ces cliniques, 60 p. 100 des femmes rapportaient ne pas avoir été informées des liens possibles avec le cancer des ovaires. Une autre étude dont on parlait dans un article que j'ai lu récemment, constatait que 70 p. 100 des endocrinologistes de la reproduction ne croient pas que les inducteurs de l'ovulation augmentent le risque de cancer ovarien; pourtant, 83 p. 100 d'entre eux affirment en avoir parlé avant d'obtenir le consentement de leur patient.

Voici ma question: Dans ces mesures législatives, dans cet avant-projet de loi, qu'est-ce qui garantit que la situation sera corrigée et qu'est-ce qui changerait si on l'adoptait demain?

M. Glenn Rivard: Je vais peut-être répondre à cette question. Il y a quelques différences importantes. Le droit civil exige actuellement qu'avant de procéder à une chirurgie, il faut obtenir le consentement éclairé du patient et, par conséquent, le renseigner sur les risques associés à l'opération. La méthode, si je peux dire, pour s'assurer que cette exigence est respectée, c'est la possibilité de poursuites pour négligence contre le médecin qui n'aurait pas obtenu le consentement de son patient. On peut aussi concevoir qu'une plainte puisse être déposée auprès de la société qui donne l'autorisation.

Avec cet avant-projet de loi, il y a à mon avis deux différences importantes. D'abord, le fait de ne pas fournir l'information nécessaire avant d'obtenir un consentement deviendrait un acte criminel. Ensuite, et d'un point de vue plus pratique, en vertu de l'article 40, on peut prendre des règlements relatifs au consentement. On pourrait donc envisager la création de règles précisant de manière détaillée et précise le genre d'information qui doit être fournie aux patients qui feront l'objet des procédures réglementées par le projet de loi. On saurait donc plus clairement ce qui est exigé comme information.

• 1720

Mme Rhonda Ferderber: J'aimerais simplement formuler un commentaire au sujet du travail que nous faisons auprès des cliniques existantes, notamment celles qui ont déjà mis au point des formules de consentement. Nous commençons à les recueillir et nous constatons une grande diversité dans le genre de renseignements fournis dans le contexte de la formule de consentement, puis recueillis. Nous savons qu'en adoptant ce genre de mesure législative et de règlement à l'échelle pancanadienne, on fera beaucoup pour combler certaines de ces lacunes, ou les lacunes actuelles.

Nous espérons que dans le cadre de cet exercice, nous pouvons répondre à certaines de vos préoccupations puis, de plus, déterminer les renseignements qui doivent être fournis au public de manière plus courante, etc.

La présidente: Est-il possible que le concept du consentement éclairé et celui du counselling soient interreliés? Je me demande si c'est à la clinique de fertilité elle-même qu'il faut donner le consentement éclairé.

Même s'il n'y a pas de versement d'argent, les gens qui y travaillent sont rémunérés et leur gagne-pain est associé au volume de clients et au maintien des activités de la clinique. Il me semble donc qu'on y est mal placés pour parler de tous les aspects négatifs avec un donneur potentiel ou une mère porteuse, selon le cas. Je me demande si le counselling et le consentement éclairé doivent être gérés par deux instances différentes.

Mme Rhonda Ferderber: C'est une possibilité.

Mme Francine Manseau: C'est en effet une possibilité. Il y a des pays qui le font depuis déjà quelque temps, par exemple, l'Australie et la Grande-Bretagne. Nous sommes en communication avec ces pays pour essayer de comprendre comment les choses fonctionnent dans leurs cliniques. Au sujet du conflit dont vous parlez, il est peut-être apparent, mais je n'en suis pas certaine.

Ce que je veux dire, c'est que les professionnels du counselling doivent respecter un code d'éthique dans le cadre de leur travail.

La présidente: Oui, mais n'est-il pas vrai que dans ces autres pays où on suit le modèle médical, une infirmière accréditée peut s'occuper à la fois du counselling et du consentement, plutôt qu'une personne qui peut traiter des conséquences psychologiques?

Mme Francine Manseau: Je crois que dans ces pays les règlements précisent qui peut être considéré comme un conseiller compétent. On décrit ensuite le genre de diplôme ou l'expérience nécessaires. Très souvent, en effet, ce n'est ni une infirmière, ni un médecin qui fait le travail, mais quelqu'un qui a la formation nécessaire. Je pense qu'on pourrait envisager la même chose ici et que la personne apte à faire le counselling pourrait être une personne qui a ces compétences.

La présidente: Mais si cette personne est à l'emploi de la clinique et présente aux participants éventuels un portrait complet de la situation, et que neuf sur dix se désistent, après avoir appris quels étaient les risques, ce conseiller ne resterait pas longtemps à l'emploi de la clinique.

Mme Francine Manseau: C'est une possibilité, je ne suis pas...

La présidente: Voilà matière à réflexion.

Mme Francine Manseau: Je suis d'accord avec vous, il peut y avoir des risques, mais je crois qu'il faut être très prudent dans la définition qu'on donnera du poste de conseiller, afin de s'assurer que ceux qui font le counselling soit vraiment qualifiés pour le faire.

La présidente: Oui.

Monsieur Lunney.

M. James Lunney: J'abonde dans votre sens, ayant moi-même travaillé dans un milieu où le consentement éclairé est nécessaire, dans celui des soins médicaux. D'autres députés à cette table conviendront comme moi que bien souvent, pour les actes médicaux, le consentement est pris à la légère par ceux qui veulent aller de l'avant, et il n'y a pas véritablement de consentement éclairé. C'est certainement une grave question en droit, aussi, lorsqu'il s'agit de prouver la négligence.

Quoi qu'il en soit, vos arguments sont bien notés.

La présidente: Merci, mesdames et messieurs.

Nous arrivons à la fin d'une section, mais pas à la fin du document. Chaque fois que nous travaillons sur trois ou quatre questions, nous avons l'occasion de faire deux choses. D'une part, clarifier la question dans notre esprit, et d'autre part, faire savoir aux fonctionnaires comment l'attitude de notre groupe évolue, afin qu'ils aient une idée de ce pourquoi ils pourraient ou non obtenir une approbation. Je crois que nous fonctionnons dans les deux sens.

• 1725

J'aimerais remercier les fonctionnaires d'être venus aujourd'hui et les aviser que nous les réinviterons probablement. Entre-temps, nous recevrons des témoins et nous pourrions revenir sur ce document pour formuler des commentaires, sur certains de ces sujets.

La prochaine fois, nous commencerons là où nous avons terminé, soit à la page 6 en anglais. Nous commencerons par le point E.

Entre-temps, je me permets de dire à nos collègues que nous avons de plus en plus d'aide. Vous avez pu voir, dans les notes d'information, que M. François Côté, de la Division des sciences et de la technologie, s'est ajouté à la liste de nos attachés de recherche. C'est une autre personne à qui vous pouvez poser des questions.

Mme Monique Hébert, de la Division du droit, s'est aussi rajoutée. Nous avons donc maintenant un scientifique et une juriste pour nous aider dans nos délibérations.

Bienvenue à vous deux, et merci de vous joindre à nous.

Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard: Madame la présidente, j'aimerais savoir, est-ce qu'on va pouvoir avoir des détails sur ce qui se fait ailleurs, sur les lois qui ont été passées, comme en Grande Bretagne, par exemple? Est-ce qu'on se trouve à avoir une comparaison avec ce qu'on nous propose et ce qui se fait ailleurs?

[Traduction]

La présidente: Nous planifions de nous entretenir avec quelqu'un de la Grande-Bretagne, probablement par téléconférence.

[Français]

Mme Pauline Picard: Ah, parfait.

[Traduction]

La présidente: Avant cette rencontre, j'espère que nous pourrons lire une description de ce que vous savez sur ce qui se passe en Angleterre, et peut-être en Australie, pour mieux profiter de notre rencontre électronique avec ces gens de l'étranger.

En fait, je travaille avec les attachés de recherche et le greffier sur nos projets, pour une fois que sera déposée la liste du comité. Nous aurons de nouveaux membres et certains de nos membres actuels ne reviendront pas. Je veux que le nouveau comité approuve nos projets. C'est pourquoi je ne les ai pas encore présentés.

Entre-temps, tous ces gens essaient de mettre quelque chose en place. Hier, nous avons discuté de toute la question de la scène internationale. On essaie d'arriver à des résultats. Mais je crois qu'il faudrait d'abord faire des lectures et nous vous invitons à partager avec nous ce que vous savez déjà.

Monsieur Manning.

M. Preston Manning: Il me semble que la dernière chose dont nous avons besoin, c'est encore plus d'information. En décrivant le secteur de la reproduction—et vous y avez sans doute songé—l'une des sources d'information que j'ai trouvées des plus utiles et dont j'ignorais l'existence même, c'est le site Web des compagnies pharmaceutiques qui vendent des inducteurs de l'ovulation. Les sites Web présentaient une liste complète non seulement des cliniques, mais même des médecins qui étaient favorables à ce genre de traitement. C'est une source qui pourrait être intéressante, si vous ne l'avez pas déjà consultée.

Le deuxième commentaire s'adresse à vous, madame la présidente. Je parlais à l'ancien vérificateur général et il m'a dit que dans le cadre de son travail, il avait examiné tous les organismes de réglementation imaginables. Je me demandais si, lors de notre examen de la section portant sur les différents modèles de réglementation—c'est-à-dire le domaine de spécialisation de Monique—nous pourrions obtenir des renseignements du bureau du vérificateur général ou même de l'ancien vérificateur général. Il a déjà examiné beaucoup de modèles pour voir ce qui marchait bien, ce qui posait un problème et ce qui serait la meilleure combinaison de modèles. Cela pourrait nous être utile lorsque nous examinerons cette section.

La présidente: Nous demanderons aux attachés de recherche de noter cette possibilité. Merci.

Comme personne d'autre n'a demandé la parole et étant donné qu'il est 17 h 30, je voudrais remercier tout le monde d'être venu et d'avoir contribué à la réunion.

Je voudrais aussi remercier nos invités et leur dire que j'ai hâte de les revoir demain matin à 11 h.

La séance est levée.

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