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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 18 septembre 2001

• 1108

[Traduction]

La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Bonjour, mesdames et messieurs. J'espère que vous avez tous passé un bel été et que vous êtes prêts à reprendre le collier.

Comme vous le savez, la liste officielle des membres du comité n'a pas encore été déposée à la Chambre. Vous pourriez certainement contribuer à accélérer les choses en encourageant vos whips à remettre leur liste. Lorsque j'ai appris qu'il faudrait probablement encore deux bonnes semaines avant que la liste soit prête j'ai décidé, avec le greffier et les attachés de recherche, que nous devrions nous mettre à l'oeuvre parce que le temps presse et je ne voudrais certainement pas perdre deux semaines. Je suis sûre que vous non plus. Cependant, la composition du comité pourrait être modifiée après ces deux semaines. Je ne sais pas exactement.

Autre chose, c'est qu'au cours de l'été, les attachés de recherche étaient censés passer en revue les témoignages reçus au printemps dernier, ce qu'ont dit les témoins mais aussi vos interventions, y compris les questions que vous avez posées. C'est ainsi qu'ils ont découvert qu'il y avait certaines incohérences, parfois en ce qui concernait les définitions, parfois...

Vous n'entendez pas? Cela ne fonctionne pas?

• 1110

Bon, maintenant ça va, alors je vais revenir à ce que je disais au sujet des attachés de recherche. Ils ont examiné en détail les témoignages et ont découvert certaines incohérences dans la définition ou l'objet de l'ébauche de projet de loi. Ils ont, en quelque sorte, dressé la liste des problèmes, et cette liste se trouve dans vos trousses d'information d'aujourd'hui, sous la forme de questions.

Maintenant, pour les nouveaux venus, rappelons que les attachés de recherche sont chargés de rédiger l'ébauche de notre rapport. C'est pourquoi il est très important qu'ils cernent bien les définitions et l'objet du texte de loi. Je vous demanderai donc aujourd'hui d'essayer de régler ces questions, parce qu'il est important, pour eux et pour nous, que le contenu et le sens de cette loi soient très clairs.

Vous vous rappelez sans doute que certains des témoins ont signalé des segments du texte qu'ils trouvaient un peu vagues. Certaines de ces observations ont été jointes à la liste des questions, qui commence à la page 2 du document d'aujourd'hui. Alors même si vous avez vos propres questions à poser, je vous demande d'essayer surtout de trouver des réponses aux questions que les attachés de recherche ont extrait à grand peine des témoignages. Je vous remercie beaucoup.

Vouliez-vous faire des observations préliminaires, monsieur Shugart?

M. Ian Shugart (sous-ministre adjoint, Direction générale de la politique de la santé et des communications, Santé Canada): Madame la présidente, sur le conseil de nos collaborateurs, nous avons pensé donner un aperçu, qui pourrait peut-être bien répondre à certaines questions que vous avez relevées.

La présidente: Avez-vous une copie des questions?

M. Ian Shugart: Oui. Nous l'avons reçue un peu plus tôt.

La présidente: D'accord. Pendant que vous donnez votre aperçu, s'il y a une réponse à l'une de ces questions, peut-être pourriez-vous le signaler.

M. Ian Shugart: Certainement.

Glenn, pouvez-vous ajouter quelque chose?

Nous avons pensé faire un petit récapitulatif de la structure et de l'objet des dispositions de cette loi. Nous allons faire de notre mieux pour donner des réponses à certaines de ces questions aussi.

La présidente: Je vous remercie.

M. Ian Shugart: De fait, conformément à la procédure qui veut que l'on reçoive les questions au préalable, s'il manque de temps pour régler certaines de ces questions, nous pourrions aussi fournir des réponses par la suite, si cela peut être utile.

La présidente: Oui. Un bref aperçu ou un bref examen de l'objet de la loi nous conviendrait. Nous ne voulons pas prendre trop de temps, parce que je tiens vraiment à ne pas partir sans avoir reçu de réponses au plus grand nombre de questions possible.

M. Ian Shugart: Très bien.

La présidente: Alors soyez bref, je vous prie.

M. Ian Shugart: Je vous remercie. Je ferai de mon mieux, madame la présidente.

Nous sommes très heureux d'être ici à nouveau. Je tiens à dire qu'il nous a été utile d'entendre les témoins et de faire l'examen du genre de problèmes qu'ils ont soulevés. Comme vous le savez, la démarche suivie a été une occasion pour le gouvernement et le ministère d'entendre tout l'éventail des intéressés avant que des décisions définitives soient prises au sujet de la proposition formelle à présenter au Parlement. Nous faisons donc le suivi du processus dans cette optique.

Comme vous le savez, l'objet de la loi est de constituer un régime qui fasse en sorte que les personnes désireuses de créer une famille avec l'aide de ces technologies puissent le faire d'une façon qui soit acceptable pour la société dans la mesure du possible et qui tienne compte des aspects de la santé et de la sécurité à une époque où la science évolue tellement rapidement pour créer le contexte approprié à ces activités.

• 1115

[Français]

L'avant-projet de loi couvre deux types d'activités: celles qui sont interdites en tout temps, les interdictions, et celles pour lesquelles il faut se conformer au règlement, les activités contrôlées ou les activités réglementées. Les interdictions sont énoncées et les activités réglementées seront exposées en détail dans les règlements à venir.

Une des questions importantes, c'est la distinction entre les règlements et les interdictions dans le texte législatif. Comme on l'a indiqué au commencement de ce processus, on attend de connaître la direction ou les conseils du comité pour mieux savoir quelle est la distinction la plus appropriée.

[Traduction]

Enfin, la loi s'applique à deux objectifs différents dans chacune de ces deux catégories d'interdictions et d'activités contrôlées; la procréation assistée en elle-même et l'utilisation des embryons à des fins de recherche.

Vous avez devant vous un bref document, je crois, qui donne un aperçu du sujet. Je passerai très rapidement son contenu en revue, comme on me l'a demandé. La loi, comme vous le savez, vise les activités de cueillette, de manipulation, d'entreposage et de traitement du sperme, des ovules et des embryons à des fins de reproduction, et elle propose de réglementer l'utilisation des embryons à des fins de recherche. Seuls les embryons déjà recueillis pourraient être utilisés, et le consentement éclairé des donneurs est exigé. J'en parlerai brièvement un peu plus loin.

Le projet de loi ne traite pas des embryons qui se trouvent dans le corps d'une femme, et par conséquent ne touche pas à la grossesse en temps que telle. C'est donc que ce qui concerne les procédures de diagnostic—l'amniocentèse, l'écographie, etc.—ne sont pas prévues dans la loi. Il n'y est question que d'embryons ex utero ou in vitro.

Je sais que le préambule a fait l'objet de certaines observations de vos témoins. C'est la déclaration de principes si on veut, ou la reconnaissance de ce qui fait que ce domaine est si important et qui justifie cette loi. On y reconnaît que la procréation assistée est bénéfique à la société et elle est reconnue comme telle dans la société. Dans ce contexte, l'objet de ce projet de loi est de promouvoir la santé et la sécurité dans l'optique de ces technologies, et aussi d'aborder la question de la dignité de l'embryon et, de fait, des femmes et des enfants qui sont le plus touchés par ces technologies et ces procédures.

Le consentement libre et éclairé est un principe fondamental de ce texte de loi. De plus, il est très clair dans le préambule que la reproduction est une fonction et une activité humaine unique et spéciale et qu'elle ne doit pas être commercialisée, ce qui susciterait, de toute évidence, des considérations relatives à la santé et à l'éthique.

Enfin, il le caractère unique, l'intégrité, l'individualité du génome humain sont reconnus et ce texte de loi s'efforce de les préserver.

Ce sont donc les principes qui ressortent des interdictions et du contrôle des activités. Le préambule est par conséquent un important élément de l'objectif éducatif et de l'objectif symbolique et directif du texte de loi.

Les interdictions sont décrites pour vous dans les pages suivantes. Nous pouvons en parler si vous voulez, mais permettez-moi d'en souligner trois, parce qu'il me semble qu'elles ont suscité des questions de la part des témoins que vous avez entendus.

Tout d'abord, en ce qui concerne le clonage, la loi qui est proposée vise à interdire toutes les techniques de clonage, qu'elles soient reproductives ou thérapeutiques. Le clonage reproductif est la forme la plus connue de clonage. C'est la manipulation d'un embryon en vue de produire un individu qui aie exactement la même composition ou le même code génétique qu'un autre. Pour ce faire, on recourt notamment à la technique de la division de l'embryon.

• 1120

Vous connaissez certainement le cas de Dolly. C'est un exemple de clonage reproductif. Vous prenez le matériel génétique d'une cellule adulte d'un sexe indéterminé, et vous le placez dans un ovule dont le matériel génétique aura été supprimé.

Le clonage thérapeutique se fait avec les mêmes techniques, mais dans un but différent. L'objet du clonage thérapeutique est de créer des embryons à des fins de recherche, à des fins thérapeutiques et non pas de produire une personne qui aie la même composition génétique qu'une autre. L'objet de ce type de clonage est, bien sûr, de produire des cellules qui pourraient servir à des fins thérapeutiques et éviteraient la réaction normale de rejet attribué au processus immunologique.

Alors, lorsqu'on parle de recherche sur les cellules embryonnaires et, en fin de compte, de thérapies fondées sur l'utilisation de cellules embryonnaires, on parle de clonage thérapeutique. Le projet de loi porte sur les deux types de recherche.

Par l'interdiction, on reconnaît que c'est un affront à la dignité humaine que de reproduire des êtres humains. Comme je l'ai dit, le préambule souligne le caractère unique du génome humain des individus. Le clonage remet en question ce caractère unique et est par conséquent, de l'avis du gouvernement et, je dois le dire, de la Commission royale, tout à fait inacceptable.

Ceci n'empêche pas la recherche sur les cellules embryonnaires. Comme vous le savez, en vertu des règlements, les chercheurs seraient en mesure de poursuivre ce type de recherche.

La deuxième chose dont je voudrais parler brièvement, c'est le pourquoi de cette limite de 14 jours. Certains l'ont déclarée arbitraire. La raison d'être de cette limite de 14 jours, et c'est reconnu à l'échelle internationale dans la communauté scientifique, c'est que c'est à ce stade du développement de l'embryon qu'apparaissent les premiers signes d'un système nerveux.

La présidente: Excusez-moi, monsieur Shugart. Je ne pense pas que vous ayez besoin de défendre chacune des lignes de ce document. Je vous demande seulement d'en faire un bref récapitulatif.

M. Ian Shugart: D'accord. La dernière chose dont je veux parler est le choix du sexe, mais je pense que le raisonnement a été exposé plus tôt.

Les accords commerciaux visant les mères porteuses—j'en suis à la page 8. Il y a plusieurs aspects à cette question. Le principe de base est que, bien que les frais... il va falloir préciser les règlements, faire une énumération assez détaillée, je suppose, de la nature de ces frais. Il nous faudra être assez spécifiques, en fin de compte. Le principe, c'est qu'il faut éviter l'incitation, et donc la commercialisation, et les contrats de grossesse seraient interdits. Il en est de même de la vente et de l'achat d'embryons, la matière reproductive, y compris du sperme et des ovules.

À la page 10, nous parlons de consentement, et il y a une liste. La raison de cela est qu'il ne s'agit pas ici d'activités superficielles, et le consentement est considéré comme l'un des piliers de la loi. Il est évident qu'il ne touche que les activités contrôlées. Ceci touche tant la cueillette que l'entreposage de ce matériel. Il en est de même pour les objectifs, que l'embryon serve à la recherche ou soit cédé à des fins de reproduction.

Le consentement peut être modifié à tout moment. De toute évidence, l'un des aspects qu'il faudra préciser dans le règlement, étant donné l'importance du consentement, est celui des bases de données et de la capacité de faire le suivi des personnes afin qu'elles puissent revenir et modifier les modalités de consentement, et un suivi pourra être assuré des données sur la santé et la sécurité des donneurs.

• 1125

L'article 8 traite des activités contrôlées. Elles se rapportent aux dispositions sur la sécurité, etc., des méthodes de fécondation in vitro. Les membres du comité se rappellent peut-être les règlements qui ont été mis en oeuvre avec la Loi sur les aliments et drogues récemment, au sujet de la sécurité du sperme. C'est un autre exemple du genre de règlements avec lesquels il faudra composer dans le cadre de ce régime. Ces éléments s'insèrent donc sous la catégorie générale des règlements sur la santé et la sécurité.

Les activités contrôlées engloberaient aussi l'utilisation des embryons à des fins de recherche et à des fins thérapeutiques. Ce sont les buts, les activités pour lesquels les chercheurs obtiendraient un permis sous l'autorité réglementaire du ministre de la Santé, et cela touche la manière dont le contrôle par les pairs, le contrôle déontologique et ce genre de chose seraient appliqués. Nous pourrons en parler plus longuement si vous voulez.

Comme je l'ai déjà dit, l'article 10, qui serait aussi sous la rubrique des activités réglementées, traiterait de la nature des frais, étant donné que la rétribution d'une mère porteuse n'est pas acceptable mais qu'il n'en va pas de même pour le remboursement des frais.

En ce qui a trait aux types de recherche, nous prévoirions suivre plus ou moins le modèle qui a été établi et expérimenté en partie au Royaume-Uni, là où la loi permettrait l'octroi d'autorisations, la réglementation ou, si vous préférez, la loi pourrait préciser les types de recherche qui seraient acceptables.

Enfin, à la page 13—et certains de mes collègues pourront vous en dire plus à cet égard—les activités réglementées se rapportant aux chimères et embryons transgéniques sont précisées. Il s'agit d'un domaine où la ligne de démarcation entre l'interdiction et la réglementation est importante. Certains témoins ont déjà fait des observations à cet égard et nous écouterons attentivement aujourd'hui afin de voir si nous nous sommes sur la bonne voie. Il y aura des discussions à cet égard.

Des scientifiques spécialisés dans ce domaine nous ont conseillé de ne pas nous précipiter pour condamner des domaines très prometteurs du point de vue scientifique, là où l'on estime que la bonne approche en ce qui a trait aux chimères et aux embryons transgéniques est très importante. Mais nous sommes très conscients qu'il s'agit d'un domaine où nous devrons donner des précisions, où nous serons probablement aiguillés un peu différemment par le comité.

C'est un aperçu, madame la présidente. Nous n'avons pas abordé toutes les questions. J'inviterais Glenn, Lise et Rhonda, dont vous vous souvenez, à faire maintenant leurs observations maintenant. Nous répondrons ensuite à des questions précises.

La présidente: Glenn, en regardant les questions que nous avons aujourd'hui, pouvez-vous répondre immédiatement à l'une ou l'autre d'entre elles?

M. Glenn Rivard (avocat général, Services juridiques, ministère de la Justice): Je peux certes les passer en revue avec vous en commençant par la première à l'égard de laquelle il y a vraiment deux observations.

Simplement pour en finir avec une chose, il n'y a pas de répétition de définitions entre les articles 2 et 9. «Génome» est défini à l'article 2 alors que «génome humain» est défini à l'article 9. La définition de «génome» s'applique à la cellule individuelle et ce terme est utilisé à l'article 3 en ce qui a trait à l'interdiction de modifier une lignée cellulaire germinale. Ainsi une définition au niveau cellulaire est la définition appropriée pour cette interdiction.

L'autorisation de réglementer aux termes du paragraphe 9(2) concerne l'espèce et la combinaison de gènes entre espèces, et par conséquent, la définition de «génome humain» se situe au niveau de l'espèce. Il nous fallait donc une définition précise qui était plus appropriée à cette autorité de réglementation.

• 1130

Quant à la raison pour laquelle il y a deux articles différents, il n'y a pas d'explication particulière à cela. Les définitions du paragraphe 9(3) ont été placées là parce qu'elles ne se rapportent qu'aux dispositions de l'article 9. Cependant, elles pourraient se retrouver dans le paragraphe 9(2) si on estimait que c'est plus clair. Comme je l'ai dit, il n'y a pas d'explication particulière à cela.

Je vais continuer, à moins qu'il y ait des questions.

La loi précise que «donneur» s'agissant d'embryons s'entendrait au sens des règlements. C'est parce que les circonstances entourant le traitement d'un embryon particulier peuvent varier. Nous devons donc en tenir compte. La façon la plus simple de procéder c'est de passer par la réglementation.

Prenez l'exemple d'un couple donneur de gamètes d'un embryon in vitro et dont l'un des deux meurt. Si la loi exige le consentement des deux, vous êtes pour ainsi dire coincés. Vous n'avez aucune façon de traiter cet embryon. La réglementation doit donc laisser une certaine souplesse et prévoir de ce genre de situation.

Un autre scénario très typique: un donneur de sperme anonyme. La femme peut être le donneur de gamète et son partenaire n'est pas un parent biologique. S'il faut décider quoi faire de l'embryon, il semblerait que vous ne voulez pas vous retrouver dans une situation où vous devez obtenir le consentement du donneur de sperme étant donné qu'au départ l'intention était qu'il resterait toujours anonyme et qu'il ne serait partie à aucune décision entourant l'embryon.

La réalité, c'est qu'il y a tout simplement beaucoup de situations qui diffèrent en ce qui concerne les embryons et qui exigent de votre part une certaine souplesse lorsqu'il s'agit de décider qui participera à la prise de décisions entourant l'embryon.

En ce qui a trait à l'expression «zygote», il s'agit simplement d'une expression utilisée dans les tous premiers stades de développement d'un embryon. En ce qui a trait à cette mesure législative, aucune disposition ne s'attache aux premiers stades de développement de l'embryon. Ainsi dans le contexte de cette mesure législative, l'expression serait redondante, elle serait tout simplement inutile. Toute disposition qui porte sur l'embryon in vitro inclut le zygote.

En ce qui concerne la définition du «génome», il s'agit de l'expression utilisée à l'alinéa 3(1)b), où il est dit qu'il est interdit de modifier la lignée germinale. Les milieux scientifiques se sont toujours inquiétés de la modification de l'ADN à l'intérieur du noyau de la cellule, qui contient de loin presque toute l'information génétique de l'individu. Cette expression a donc été définie pour régler vraiment ce qui a été considéré comme le problème le plus important.

Très récemment, une nouvelle technique, l'hybridation mitochondriale, a été mise au point. Elle fait intervenir l'ADN qui se trouve à l'extérieur du noyau. Nous nous penchons là-dessus.

• 1135

Je suppose que deux options s'offrent vraiment à nous. D'une part, nous pourrions laisser la définition dans sa forme actuelle, étant donné qu'en vertu du paragraphe 8(1) nous avons clairement l'autorité de réglementer l'hybridation mitochondriale et même d'interdire ce processus s'il pose un problème. D'autre part, nous pourrions songer à modifier la définition pour inclure tout ADN. Comme je l'ai dit, nous examinons cette question. Mais si rien n'est fait, je suis très confiant que nous pouvons encore, en vertu de la loi, régler ce problème.

En ce qui a trait au matériel reproductif humain, dans les ébauches internes préalables de la mesure législative, les dispositions incluaient une liste de tout ce qui figure sur la feuille que vous avez devant vous. Cette expression inclurait donc les spermatozoïdes, les ovules, d'autres cellules humaines, les gènes humains, les embryons in vitro ou toute partie de ceux-ci. Ce serait l'expression standard que vous utiliseriez dans ces articles.

On craignait qu'en fait l'intention de ces articles soit perdue étant donné qu'en les lisant il fallait passer par toute cette longue liste de choses visées par la disposition. Nous avons donc inventé une expression au moment de la rédaction de la mesure législative pour faciliter la compréhension de chacune des dispositions. Nous avons opté pour «matériel reproductif humain» et nous avons inclus la liste de toutes ces choses. Il s'agit vraiment de se demander ce qui est plus clair pour le lecteur. Est-il plus clair d'énumérer tous ces éléments dans chacune des dispositions ou est-il plus simple d'utiliser cette expression et de préciser dans la réglementation qu'elle inclut tous ces éléments?

Je suppose que nous sommes prêts à entendre ce que vous avez à dire là-dessus. Il existe peut-être une autre expression, mais c'est la meilleure que nous avons pu trouver jusqu'à maintenant. Je suppose que la logique derrière cette expression, c'est tout simplement qu'il s'agit de tous les éléments qui, dans le contexte de leur utilisation, contribuent au processus de reproduction ou en sont une composante.

Je vois des questions au sujet de l'utilisation de la forme singulière et de la forme plurielle. En matière d'interprétation des lois, l'utilisation du singulier inclut le pluriel. C'est bien accepté en droit et cela simplifie la lecture d'une mesure législative.

En ce qui concerne la définition de «embryon in vitro», nous pouvons certes songer à une autre formulation. Je ne suis pas convaincu que cela améliore quoi que ce soit. Bien sûr, de prime à bord, je pourrais voir un problème en ce qui concerne l'utilisation de l'adjectif «maintenu» si quelqu'un devait soutenir qu'il ne voulait pas vraiment faire quelque chose pour maintenir activement cet embryon. Cela semble invraisemblable, mais nous aimons être le plus inclusif possible et utiliser l'expression appropriée la plus englobante.

Au sujet de «créer», l'inconvénient, je pense, c'est que ce mot n'est pas entièrement applicable étant donné que dans le cas de l'embryon in vitro, ce qui nous préoccupe, ce n'est pas uniquement le moment de la création, mais cette période de 14 jours. Par conséquent, le mot «exister» semble un peu plus pertinent, mais on peut certainement envisager d'autres expressions.

Pour ce qui est du mot «chimère», nous cherchons à régler essentiellement la question des chimères inter-espèces et c'est la raison pour laquelle ce mot est ainsi défini. Dans le cas des chimères intra-espèces, ces genres d'actes seraient réglementés en vertu du paragraphe 8(1). Ils ne soulèvent pas les mêmes genres de préoccupations essentiellement éthiques. Ils peuvent soulever des préoccupations, mais le problème n'est pas le même.

• 1140

L'autre difficulté, bien sûr, c'est que les autres dispositions parlent d'embryons, définis comme des organismes humains. Lorsque l'on commence à parler de chimères, on se heurte immédiatement à un problème de définition: s'agit-il ou non d'un organisme humain? Par conséquent, que l'on s'en tienne à la réglementation de cet acte ou que l'on crée une interdiction, il faut prévoir quelque chose de très précis pour les chimères inter-espèces.

Pour expliquer la logique de tout cela, il faut savoir que le problème fondamental, c'est que l'on ne souhaite pas avoir un organisme vivant dont le matériel génétique est incertain, si vous voulez; en d'autres termes, lorsque l'on ne sait pas avec certitude s'il appartient à l'espèce humaine ou non. Une façon de réagir consisterait certainement à complètement interdire cet acte. Il existe toutefois des champs de recherche, autant que je sache, notamment dans le domaine du cancer, où des chimères, techniquement parlant, sont créées pour un très court laps de temps afin d'étudier l'interaction de la cellule étrangère dans l'embryon animal. C'est pour cette raison que l'on a retenu l'approche de la réglementation.

Reste à savoir si nous voulons laisser la porte ouverte à ce genre de recherche circonscrite. Il existe certainement une restriction éthique bien comprise sur la durée de vie d'un tel organisme et il ne s'agit jamais d'une naissance vivante ou autre chose du genre. Cela apparaîtrait donc dans les limites fixées par réglementation.

La présidente: Monsieur Shugart, vous avez maintenant conclu cette première partie sur les définitions. Je vous remercie pour ces explications. Les attachés de recherche ont indiqué qu'ils comprennent maintenant pourquoi elles sont présentées de la sorte.

Je dois demander à mes collègues s'ils ont des questions sur cette partie ou s'ils préfèrent passer à la partie des actes prohibés.

Monsieur Manning.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, AC): Peut-être juste une question d'ordre général qui se rapporte aux définitions.

Je me demande—et cela relève peut-être de votre ministère, Glenn—si vous pourriez nous indiquer l'actuel statut juridique du matériel reproductif humain détenu par une clinique ou par un laboratoire. En droit, ce matériel est-il considéré comme la propriété des donneurs, du laboratoire ou de la clinique? Lorsque l'adjectif «humain» y est rattaché, ne s'agit-il pas plutôt de quelque chose d'humain qui est détenu et qui n'appartient à personne? Je ne sais pas si vous me comprenez bien, mais je me demande en fait quel est le statut juridique générique de ce matériel reproductif humain actuellement et faut-il donner des éclaircissements à ce sujet pour l'avenir?

M. Glenn Rivard: Il faut dire, je pense, que vous ne trouverez pas une source, une loi ou autre chose du genre qui accorde un statut particulier à ce matériel. Si vous examinez la jurisprudence, vous verrez que les approches sont différentes. Cela dépend véritablement de la façon et jusqu'où vous voulez envisager l'avenir.

• 1145

Il serait, je crois, plus exact de dire que ce matériel est considéré sui generis, au sens juridique du terme, ce qui veut dire essentiellement que le statut est véritablement unique en son genre. Les juristes ne sont pas tant préoccupés par la classification de ce matériel; ils cherchent plutôt à établir les droits des particuliers à propos de la façon dont ce matériel est considéré. Par conséquent, la jurisprudence et les lois vont créer une exigence relative au consentement d'utilisation de ce matériel ce qui en fait signifie, par exemple, de la part du donneur, un genre de droit de contrôle ou de partage de contrôle, selon les circonstances relatives à ce matériel.

Ce matériel n'est donc pas décrit comme une propriété et ni la jurisprudence ni les lois ne lui accordent de classification. On s'est plutôt attaché à savoir qui véritablement détient le contrôle de ce matériel, dans quelles circonstances, cela dépendant du matériel en question et des circonstances particulières.

M. Preston Manning: Devrions-nous en fait tenter, dans la partie des définitions ou ailleurs, de préciser le statut juridique du matériel reproductif humain, aux fins de cette loi à tout le moins? Une clarification s'impose-t-elle à ce sujet et devrait-elle se trouver dans la loi ou pensez-vous qu'il s'agit d'un point qu'il faudrait laisser de côté?

M. Glenn Rivard: À mon avis, les définitions servent essentiellement à éclairer les dispositions de la loi. C'est ce qui doit nous guider. Lorsque vous avez une disposition qui utilise un terme en particulier, comprenez-vous clairement ce qu'il signifie?

C'est cette approche que nous avons retenue dans la rédaction de cet avant-projet de loi et sur laquelle nous voulons mettre l'accent: qui a le contrôle et dans quelles circonstances. La question du consentement relatif à l'utilisation en est bien évidemment un élément clé. L'avantage, selon moi, c'est qu'on s'est arrangé pour répondre aux exigences des dispositions de la loi, alors que si l'on optait pour la précision du statut—si on définissait ce matériel comme une propriété, par exemple—cela pourrait entraîner des conséquences non intentionnelles que l'on n'aurait pas vraiment prévu, car dès que l'on étiquette ce matériel de cette façon-là, tout le droit relatif à la propriété s'applique et la question serait alors de savoir comment cela fonctionnerait dans chaque cas particulier. Par exemple, si les gamètes sont la propriété d'une personne, et si en fait vous restreignez le droit de vendre des gamètes, s'agit-il d'expropriation sans indemnisation? Vous arrivez à des concepts qui n'ont pas vraiment leur place dans ce domaine.

Pour résumer ma réponse, je crois que cette approche répond aux exigences de la loi en matière de clarté et évite l'introduction de concepts qui pourraient avoir des conséquences non intentionnelles.

M. Preston Manning: Merci.

La présidente: Merci.

Monsieur Lunney.

M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, AC): Merci, madame la présidente.

Pour en revenir à la question des chimères—je veux parler de l'association de produits animaux et humains—et à l'interdiction prévue dans l'avant-projet de loi, sauf avec une autorisation, je voudrais connaître la raison d'être d'un tel procédé. Vous avez abordé la question en parlant de la recherche sur le cancer et peut-être faudrait-il entendre un témoin à ce sujet. Je pose la question. Vous avez clairement indiqué que des problèmes d'éthique se posent au sujet de la durée de l'existence d'une telle chose. Ce qui m'inquiète, c'est qu'une fois que vous allez dans ce sens, il y aura toujours quelqu'un qui voudra aller plus loin pour voir où cela mène. Pourquoi, de toutes façons, voudrions-nous opter pour un tel procédé?

• 1150

M. Glenn Rivard: Eh bien, votre question me semble très légitime et nous amène à nous demander si nous voulons véritablement mettre un terme à un champ de recherche qui, comme on nous l'a déjà expliqué, est certainement utile, notamment en ce qui concerne la recherche sur le cancer.

Peut-être que les chercheurs dans ce domaine pourraient donner des explications plus claires à cet égard.

M. James Lunney: Y a-t-il quelqu'un d'autre qui souhaite répondre à cette question?

M. Ian Shugart: À mon avis, la question politique fondamentale qui se pose constamment dans ce domaine, c'est de savoir où s'arrêter. Je crois que vous avez raison d'explorer, avec des spécialistes indépendants, les utilisations, etc. Il est prévu—en fait, c'est déjà dans les usages—de porter attention aux considérations éthiques lors de l'examen des protocoles de recherche. Cela continuerait de faire partie du processus normal de la recherche. Les commissions d'éthique s'appuient sur des valeurs et des principes de société lorsqu'elles évaluent les protocoles pour déterminer s'ils dépassent les limites, etc.

Le domaine fondamental de la biologie du développement est certainement l'un des domaines d'application. Quels sont les mécanismes, par exemple, au niveau de la cellule, les changements dans la composition de la cellule, etc., qui contribuent à la progression du cancer? Dans la recherche sur les nouveaux médicaments, soit le précurseur à l'essai d'une technologie dont l'effet sur l'homme n'est pas connu, cela revient à pouvoir observer ce genre d'interaction au niveau cellulaire et génétique. Au fur et à mesure que les produits médicinaux, les techniques et les thérapies s'appuient de moins en moins sur les interactions chimiques et de plus en plus sur les mécanismes génétiques, la science est appelée à découvrir ce qui se passe à ce niveau.

Par conséquent, dans le contexte d'un protocole de recherche, le principe de base, comme l'a indiqué Glenn, serait le suivant: la viabilité d'un organisme n'est non seulement pas recherchée, mais est en fait exclue. Par conséquent, vous limitez l'examen de ce qui se passe au niveau cellulaire ou intracellulaire, ainsi que la recherche à cet égard, et vous ne recherchez absolument pas la viabilité de cet organisme.

Vous avez toutefois abordé une question de principe essentielle. Nous ne pouvons pas prétendre détenir la bonne réponse de façon définitive. Je crois donc que vous avez raison d'examiner les conséquences futures, peut-être des deux côtés de la médaille, les dangers ainsi que les avantages, en compagnie de témoins extérieurs au ministère.

La présidente: Monsieur Lunney, les attachés de recherche en ont pris note et nous allons probablement faire venir de tels spécialistes de manière à approfondir ce débat.

M. James Lunney: Excellent. Merci.

La présidente: Quelqu'un de ce côté veut-il prendre la parole?

Madame Picard, ensuite nous passerons au domaine des actes prohibés.

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Madame la présidente, j'aimerais d'abord m'assurer que les témoins qui sont ici pourront nous faire parvenir leurs réponses écrites aux questions qui ont été préparées par la recherche. C'est important pour l'étude qu'on a à faire actuellement.

[Traduction]

La présidente: Madame Picard, il y a beaucoup de bruits parasites sur le réseau des traducteurs anglais. Je me demande si vous pourriez recommencer, car je ne vous ai absolument pas entendue.

[Français]

Mme Pauline Picard: Madame la présidente, compte tenu du manque de temps, les témoins qui sont ici ne peuvent pas répondre aux questions qui ont été proposées par la recherche ou élaborer davantage sur ces questions. J'aimerais m'assurer qu'on pourra avoir les réponses à ces questions. Les membres du comité sont d'accord que les témoins du ministère de la Santé répondent aux questions élaborées par la recherche.

• 1155

[Traduction]

La présidente: Mme Picard souhaiterait une réponse écrite.

[Français]

M. Ian Shugart: Madame la présidente, après avoir étudié ces questions, si nous pouvons vous donner des réponses, nous serons heureux de vous les offrir sous forme écrite. Il y a aussi la transcription de nos réponses ici.

Mme Pauline Picard: On devrait pouvoir répondre à toutes les questions parce qu'on n'avait pas passé à travers les notes d'information que nous avions. Vous n'avez pas répondu à toutes les questions par manque de temps.

M. Ian Shugart: Nous allons réexaminer les questions en vue d'ajouter des détails additionnels.

Mme Pauline Picard: D'accord.

Madame la présidente, si j'ai bien compris, le ministère, qui se penche sur cette étude, a refait ses devoirs cet été et nous proposera un autre avant-projet de loi, parce qu'il semble qu'il y ait des choses qui changent beaucoup.

Dans un premier temps, avant de poser mes questions, je voudrais vous dire que je suis très déçue de cet avant-projet.

[Traduction]

La présidente: Excusez-moi, madame Picard, il y a de nouveau tellement de bruits parasites que je ne peux pas entendre l'anglais. On va faire venir un technicien pour essayer de régler le problème.

Entre-temps, peut-être pourrait-on parler un peu plus lentement. Lorsque l'on parle vite, on ne comprend absolument rien.

Madame Picard, avez-vous bien dit que vous souhaitez obtenir des réponses écrites à toutes ces questions?

[Français]

Mme Pauline Picard: Oui, mais c'était de l'information que je demandais. Ce n'était pas ma question.

[Traduction]

La présidente: D'accord. Posez votre question.

[Français]

Mme Pauline Picard: Je disais que j'étais déçue. On se penche sur toutes ces questions depuis 1989. Il y a eu la Commission Baird et le projet de loi du gouvernement. J'ai même déposé un projet de loi. Il y a eu beaucoup de témoins en comité. Le gouvernement dépose un avant-projet de loi qui est tellement compliqué qu'on ne s'y retrouve pas. Aujourd'hui, le ministère nous dit qu'il a refait ses devoirs cet été et il nous arrive avec d'autres définitions.

Je pense qu'il est très difficile pour les membres du comité permanent de vous suivre. Je ne sais pas où on va en arriver avec ça. J'étudie cela article par article avec des gens de la recherche, des gens qui connaissent cela, et on ne s'y retrouve pas. J'espère que si vous déposez un autre document, on sera capables de comprendre. Là, il y a des termes... Et même dans la traduction française, on suppose que vous voulez dire telle ou telle chose.

Si on arrive avec des points de droit, n'importe qui pourra interpréter à sa façon ce qui est dit dans les articles. Je trouve que vous avez encore beaucoup de travail à faire.

Voici ma question. Dans le projet de loi, on nous oblige à prendre position quant à la valeur de la vie humaine.

• 1200

Pour vous, l'embryon humain est-il, au plan biologique, un individu humain, et quelle est votre définition de la notion d'être humain? D'un point de vue éthique et juridique, si un embryon devait être détruit, quelle valeur reconnaissez-vous à l'embryon humain? Dans le libellé de l'avant-projet de loi, on tend à chosifier l'embryon humain. C'est du moins ma compréhension de l'article 29, qui traite de la confiscation. On y lit que «la chose saisie [...] est confisquée». Quelle est votre définition de «la chose»?

[Traduction]

M. Glenn Rivard: Peut-être pourrais-je répondre à la dernière question en premier lieu. Le mot «chose» est général. D'autres témoins ont demandé si cela visait également la saisie d'un embryon, d'un embryon in vitro ou d'un foetus. C'est peut-être un domaine dans lequel il faudrait être plus clair pour que les gens comprennent que c'est une possibilité qui peut s'avérer nécessaire si l'on veut déterminer s'il y a eu infraction de la loi ou des règlements. L'intention visée toutefois, c'est que, en cas de nécessité, on pourrait avoir à examiner un embryon in vitro, par exemple.

De façon plus générale, cela semble être une variante de la question à laquelle on a répondu un peu plus tôt—à savoir s'il est avantageux de définir le terme «embryon» comme un être humain, ou non, ou de définir l'expression «être humain». J'imagine que la réponse serait la même, à savoir que les définitions doivent être vues comme des moyens de faciliter la compréhension des dispositions particulières. Par conséquent, elles servent à clarifier l'utilisation des termes dans les dispositions particulières de la loi. Essayer de les faire tomber dans des catégories plus vastes ou de leur accorder un statut particulier ne fera que susciter des questions et des problèmes qui ne contribuent pas véritablement à une meilleure compréhension du fond des dispositions de la loi.

La présidente: Monsieur Ménard.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Je voudrais poser une courte question, si vous me le permettez.

Je ne sais pas si vous vous le rappelez, madame la présidente, mais quand les représentants de l'Organisme catholique pour la vie et la famille ont comparu devant le comité, ils nous ont dit que le document d'information indiquait qu'on pouvait réglementer la question de la maternité de substitution pour des raisons ou des fins altruistes. J'ai cherché à concilier le témoignage qui avait été fait devant le comité avec les différentes définitions du projet de loi, et je me suis demandé si l'interprétation des représentants de l'Organisme catholique pour la vie et la famille n'était pas erronée. Est-ce qu'ils ont raison de penser qu'une chose comme celle-là serait possible, qu'avec les définitions et le cadre réglementaire que vous nous proposez, il pourrait y avoir une exception autorisée par le ministre, où on pourrait parler de maternité de substitution pour des raisons altruistes?

Mme Francine Manseau (analyste principale des politiques, Direction générale de la politique de la santé et des communications, Division des projets spéciaux, ministère de la Santé): Votre question est de savoir si ce serait réglementé par la loi.

M. Réal Ménard: Est-ce possible dans le projet de loi?

Mme Francine Manseau: Oui, c'est réglementé dans le projet de loi.

M. Réal Ménard: Mais ce n'est pas dans la définition.

Mme Francine Manseau: Dans la définition de la maternité de substitution?

M. Réal Ménard: Eh bien, qu'est-ce que cela veut dire? Ils sont venus nous parler de maternité de substitution, donc des mères porteuses,...

Mme Francine Manseau: Des mères porteuses, oui.

M. Réal Ménard: ....pour des raisons altruistes. Évidemment, quand les catholiques nous ont dit cela, on a cherché et on s'est dit qu'il y avait sûrement une définition de «raisons altruistes», mais cela ne figure pas dans le projet de loi. On n'a pas de définition comme celle-là. J'essaie de comprendre depuis le début ce que cela pourrait vouloir dire. Pourquoi n'est-ce pas défini, et à quoi fait-on allusion quand on parle d'une réalité comme celle-là?

• 1205

Mme Francine Manseau: Ce qui est défini, c'est ce qu'est une mère porteuse ou une maternité de substitution. Ce qui est interdit dans la loi, c'est l'aspect commercial: on ne peut pas offrir de payer quelqu'un pour devenir mère porteuse. C'est ce qu'on interdit.

Quant à la réglementation, les mères porteuses sont souvent génétiquement reliées à l'enfant, c'est-à-dire que le sperme utilisé peut être celui du couple qui veut avoir l'enfant. D'autres fois, on dit que c'est une mère porteuse qui va porter l'embryon qui a été créé par les gamètes du couple qui veut avoir l'enfant. Évidemment, ces manipulations-là vont tomber sous le paragraphe 8(1), qui dit qu'on devra avoir une autorisation pour pouvoir modifier, manipuler, traiter du matériel reproductif humain afin de créer un embryon. C'est sous cette autorité-là que la création de cet embryon et le fait de remettre cet embryon dans le corps d'une femme seront réglementés.

M. Réal Ménard: Qu'entend-on par des raisons altruistes?

Mme Francine Manseau: On parle de raisons altruistes quand la personne fait cela sans recevoir un paiement en échange, sans but lucratif.

M. Réal Ménard: Mais est-ce que ce n'est pas justement incompatible avec le parti pris que l'on retrouve dans le texte législatif, qui dit qu'on ne doit pas payer quelqu'un pour porter un enfant ou qu'il ne doit pas y avoir d'intermédiaire qui encourage cela? Est-ce qu'on ne pourrait pas faire indirectement ce que vous ne voulez pas faire directement? C'est ça, l'inquiétude des catholiques.

Mme Francine Manseau: Je n'ai pas compris le dernier commentaire.

M. Réal Ménard: Ce qu'on nous a dit dans le témoignage, c'est qu'on s'inquiète de ce que le texte législatif, comme le Code civil du Québec, a un parti pris clair en disant qu'on ne peut pas payer les mères porteuses ou qu'une personne ne peut pas porter un enfant pour quelqu'un d'autre. Ça, c'est du droit positif. C'est inscrit dans la loi et c'est clair. Quand on dit que le ministre pourrait autoriser, pour des raisons altruistes, un scénario autre et qu'on ne donne pas la définition de ce que sont les raisons altruistes, est-ce que ça ne permet pas une maternité de substitution indirecte? C'est ça que les catholiques sont venus nous dire.

Mme Francine Manseau: Le texte législatif n'interdit pas comme telle la maternité de substitution. Ce qu'il interdit, c'est la rétribution. Au Québec, c'est la même chose: on ne reconnaît pas le contrat comme tel. Mais, à moins que je ne me trompe, il n'y a rien dans le Code civil qui empêche une femme de porter un enfant pour quelqu'un d'autre. Ce n'est pas mon impression. Ce qu'il dit, c'est que le contrat comme tel n'a pas force de loi, et ce que dit le Code civil, c'est que la mère de l'enfant est celle qui en a accouché, que ce soit son ovule ou non.

Donc, ce qui est altruiste, c'est quelque chose fait sans rétribution. On dit que si une femme veut porter un enfant pour un autre couple, ce n'est pas interdit. C'est certainement réglementé, parce que c'est un processus qui requiert une manipulation à l'extérieur du corps d'une femme pour créer un embryon et, ensuite, remettre cet embryon dans le corps d'une femme. Il y a tout le processus du consentement éclairé. Il y a les questions relatives à la sécurité de la personne qui subit cela pour l'enfant qui va naître et ainsi de suite. Donc, tous ces actes-là tombent sous le paragraphe 8(1). Ils seraient donc réglementés.

Est-ce que c'est clair?

M. Réal Ménard: Oui. C'est un bon débat, mais je vais laisser la parole à d'autres. Merci.

[Traduction]

La présidente: Merci, monsieur Ménard.

Avec votre permission, mesdames et messieurs, nous allons demander aux...

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, AC): Puis-je poser une question rapide, madame la présidente?

Cela se rapporte au point numéro cinq et cette question s'adresse véritablement à Glenn. Si l'on veut élargir la définition de matériel reproductif humain de manière qu'elle englobe une liste de choses, il me semble alors que tout ce qui n'est pas inclus dans cette liste en serait exclu.

La question que je vous pose est la suivante: y a-t-il quelque chose, à votre avis, qui pourrait de manière prévisible tomber dans la catégorie de matériel reproductif humain et qui ne serait pas inscrit dans la liste actuellement présentée et qui, par conséquent, pourrait, en théorie, être exclu de la portée de la loi?

M. Glenn Rivard: J'imagine que la réponse est non.

Je le répète, pour chacune de ces dispositions, nous avons commencé par identifier les points particuliers que nous voulions viser. Nous nous sommes bien sûr rendu compte que nous énumérions les mêmes points article après article, les mêmes choses, si vous voulez. Nous avons donc créé une phrase générale pour éviter d'avoir à énumérer constamment ces choses-là.

• 1210

L'expression «matériel reproductif humain» est simplement une expression pratique. Nous avons examiné à fond les choses qu'il fallait protéger en vertu de chacune des dispositions. Vous verrez dans certains cas que l'on ne retrouve pas cette expression dans certaines dispositions, qui sont limitées à... Par exemple, l'achat des gamètes. Cette disposition ne traite que des gamètes. Nous en avons une autre distincte qui traite des embryons in vitro, car nous voulions les traiter de façon légèrement différente.

Selon nous, tout ce que vous voulez que ces dispositions visent est prévu de façon précise par l'utilisation de cette expression.

Mme Diane Ablonczy: Merci.

La présidente: Madame Picard, vous essayez de dire quelque chose. Je suis désolée, je ne vous ai pas entendue.

[Français]

Mme Pauline Picard: Je pensais qu'on avait jusqu'à 13 heures pour poser des questions. Est-ce que je me trompe? On avait été convoqués de 11 heures à 13 heures.

[Traduction]

La présidente: Nous procédons par parties. Nous en sommes actuellement à la partie relative à l'interprétation des termes. Les représentants officiels vont revenir pour essayer de répondre aux questions de la partie B intitulée «Actes prohibés». Lorsqu'ils auront terminé cette partie, tous ceux qui, autour de la table, veulent d'autres explications ou souhaitent aborder un autre thème dans cette liste d'actes prohibés pourront le faire.

J'essaie de procéder par parties pour que nous ayons l'impression de progresser, en quelque sorte. Nous sommes sur le point de terminer la partie A.

[Français]

Mme Pauline Picard: Voici une question assez rapide.

[Traduction]

La présidente: Une question dans la partie A?

[Français]

Mme Pauline Picard: Oui.

[Traduction]

La présidente: D'accord.

[Français]

Mme Pauline Picard: Mesdames et messieurs les fonctionnaires du ministère, je voudrais savoir pourquoi Santé Canada n'a pas fait deux textes distincts, un sur le clonage à des fins de reproduction et un sur le clonage à des fins thérapeutiques, tel que cela a été élaboré en Grande-Bretagne, par exemple. J'ai l'impression que cela aurait été beaucoup moins compliqué que de mêler tout cela dans l'avant-projet de loi que je vois. Il y a des actes prohibés qui sont réglementés plus loin par le ministre.

Mme Francine Manseau: Pour ce qui est du clonage, je pense que c'est clair. Le texte législatif dit, à l'article 3, qu'on ne peut pas créer un clone, et un clone est défini comme un embryon qui aurait le même ADN qu'un autre embryon ou un autre foetus.

Il y a aussi, dans le texte législatif, un autre article qui interdit la création d'embryons à des fins de recherche ou en vue d'une utilisation thérapeutique.

Quand on parle de clonage thérapeutique, finalement, c'est englobé dans les deux interdictions. Dans le cas du clonage thérapeutique, on crée un embryon, non pas à des fins de reproduction, mais en vue de l'utiliser comme source de cellules souches. Il est interdit de créer un embryon en vue de l'utiliser uniquement à des fins de recherche.

Mme Pauline Picard: Oui, mais ne croyez-vous pas qu'il aurait mieux valu que ce soit distinct? Aux États-Unis et en Grande-Bretagne, c'est distinct. Actuellement, on ne s'y retrouve pas. C'est très compliqué de savoir comment vous allez pouvoir appliquer au niveau juridique, pour les peines ou les accusations, les articles qui concernent les actes prohibés pour le clonage reproductif et la réglementation pour le clonage à des fins thérapeutiques.

Mme Francine Manseau: Toute forme de clonage est interdite.

Mme Pauline Picard: Pourtant, vous permettez la recherche au niveau du clonage.

Mme Francine Manseau: Non. On permet que des cellules souches soient dérivées d'un embryon qui est déjà créé et qu'un couple décide de donner pour la recherche, mais on ne permet pas la création d'un embryon qui aurait des cellules identiques à celles d'un autre individu, pour quelque raison que ce soit. C'est interdit. C'est à l'alinéa 3(1)a) et c'est très clair.

M. Ian Shugart: Pour la recherche, on utilise seulement des embryons déjà existants qui ont été créés dans un but de reproduction.

Mme Francine Manseau: Par exemple, on pourrait se servir de ces embryons pour dériver des cellules souches pour faire de la recherche, s'il y a consentement des gens à qui appartiennent ces embryons et ainsi de suite. Mais il est très clair que le clonage, pour quelque raison que ce soit, est interdit.

• 1215

[Traduction]

Le vice-président (M. Rob Merrifield (Yellowhead, AC)): Merci. Il est effectivement très difficile d'obtenir la traduction. Je crois que la moitié des membres du comité manquent quelque chose de la conversation, mais j'espère que l'on a répondu à cette question.

Je crois que nous allons passer maintenant aux interdictions.

Avez-vous une autre question?

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): J'ai simplement un léger rappel au Règlement. Si vous permettez, je dois me rendre à la Chambre pour y suivre le débat en cours, mais je voulais prendre le temps de demander des éclaircissements. Si je comprends bien, une employée de Santé Canada est portée disparue dans les attaques terroristes de mardi. J'ai appris que Christine Egan, employée à Winnipeg, rendait visite à son frère. Au nom du comité, je voulais exprimer nos condoléances et demander qu'elles soient transmises à sa famille et à ses collègues.

J'aimerais demander à Ian s'il a d'autres nouvelles ou si d'autres employés ont été touchés par cette tragédie.

M. Ian Shugart: Merci beaucoup pour cette intervention. Je n'ai aucune confirmation et rien de précis au sujet d'employés touchés. Je sais que des employés se trouvaient à Washington au moment de l'attaque et qu'ils se sont retrouvés bloqués, y compris une collègue enceinte de huit mois. Ils s'en sont toutefois bien sortis et ont trouvé à se loger près d'un hôpital. Je n'ai pas d'autres nouvelles pour l'instant. Je vous remercie de votre message que je vais transmettre.

Merci beaucoup.

Le vice-président (M. Rob Merrifield): Merci. Passons maintenant aux interdictions.

M. Glenn Rivard: La première disposition nous ramène en fait au clonage. Je vais répéter ce qui a été dit plus tôt, l'interdiction elle-même porte sur le clonage sans aucune restriction. Si vous lisez la définition de «clone humain», vous voyez qu'aucune restriction n'est fixée quant au but de la création du clone. La simple création du clone est interdite. L'interdiction prévue par la loi ne porte pas sur le but de la création d'un clone.

Je répondrais donc en disant que pour cette raison, ce n'est pas nécessaire de l'indiquer. Les rédacteurs diraient probablement que c'est redondant, mais nous pouvons certainement l'examiner. Je le répète toutefois, rien dans l'interdiction ou dans la définition de «clone» limite de quelque façon que ce soit le but qui est visé. Toute création de «clone» est interdite en vertu de la loi.

Peut-être qu'un représentant du ministère de la Santé est mieux placé pour répondre à la deuxième question.

Mme Francine Manseau: Le point soulevé ici, me semble-t-il, c'est que le fait d'interdire la recherche thérapeutique a des conséquences et des répercussions de portée considérable sur l'interdiction du clonage à des fins de reproduction. Vous demandez si nous avons consulté à ce sujet et comment les autres pays ont réglé la question. C'est certainement une question qui fait l'objet de débat dans beaucoup de pays—des pays qui se sont montrés très restrictifs, qui n'ont permis aucune forme de recherche sur l'embryon. On peut parler de l'Allemagne, à titre d'exemple. Même la France n'a pas encore... parce qu'elle n'a pas encore mis au point de réglementation à cet égard.

C'est donc une question sur laquelle se sont penchés beaucoup de pays. Nous avons examiné également la question ici et avons entendu beaucoup d'exposés. Je crois que même dans le domaine animal actuellement, les expériences faites font ressortir certaines préoccupations en matière de santé et de sécurité. Les scientifiques nous ont dit que pour l'instant, il vaudrait peut-être mieux poursuivre la recherche sur les animaux avant de se lancer dans la création de ces embryons et dans l'utilisation des tissus à des fins de transplantation chez l'être humain—que c'était inutile pour l'instant.

• 1220

J'aimerais également souligner qu'en mars dernier, les Instituts de recherche en santé du Canada ont publié un rapport, un document de consultation, dans lequel ils recommandent également de ne pas créer d'embryons à des fins de recherche pour le clonage thérapeutique. C'est donc une recommandation de plus.

À notre connaissance, je crois que le Royaume-Uni, les Pays-Bas et le Japon ont des lois qui permettent ce genre de recherche. Par contre, les autres pays n'ont pas encore... La France a déclaré qu'elle le ferait, mais en raison de la controverse que cela a suscité, elle a, en quelque sorte, fait marche arrière. Elle n'a pas encore publié les changements à la législation. Elle prévoit le faire en 2002, mais il semble qu'elle n'opte pas pour cette approche. C'est donc certainement une question sur laquelle se penchent beaucoup de pays.

[Français]

M. Réal Ménard: Je voudrais bien comprendre une chose. Il est clair qu'il n'y a pas de permis ministériel possible pour la création d'embryons à des fins exclusives de recherche. Ça fait partie des activités interdites en toute circonstance. En ce qui concerne les embryons existants, dans quel contexte ces embryons existent-ils? Est-ce qu'il s'agit des embryons surnuméraires, qui sont en surplus dans des cliniques de fertilité? Est-ce qu'il s'agit de circonstances où un homme et une femme consentent à ce qu'il y ait de la recherche sur un embryon existant et en font don à une clinique?

Mme Francine Manseau: Oui.

M. Réal Ménard: Ce sont les deux seules circonstances où il peut y avoir de la recherche sur des embryons existants.

Mme Francine Manseau: C'est ça. Il faut que les embryons aient été créés pour des fins de reproduction, que le couple décide qu'il n'en a pas besoin et qu'il veuille les donner pour la recherche.

M. Réal Ménard: Donc, en toute circonstance, cela veut dire que ça va passer par des cliniques de fertilité. Est-ce qu'on peut imaginer des circonstances où ce ne serait pas à l'intérieur d'une clinique de fertilité?

Mme Francine Manseau: De toute façon, pour créer un embryon, il va falloir avoir une autorisation. C'est ce que dit le texte législatif à l'article 8. Quiconque va manipuler ou traiter du matériel reproductif humain—il peut s'agir de gamètes—dans le but de créer un embryon devra avoir une autorisation. Effectivement, où seront les embryons? Ils seront dans des cliniques, si vous voulez, qui ont reçu l'autorisation de créer des embryons et de les conserver. Tout le processus du consentement, de la façon dont cela va être conservé et ainsi de suite va être réglementé.

M. Réal Ménard: Par exemple, les Instituts de recherche en santé du Canada, les 13 instituts qui ont été créés... On a lu, dans notre briefing book, le document sur les cellules souches. Mais si des gens voulaient faire de la recherche sur des embryons à partir de fonds fédéraux ou des Instituts de recherche en santé du Canada, cela ne serait pas possible.

Mme Francine Manseau: Pourquoi pas? Je ne vois pas le...

M. Réal Ménard: C'est-à-dire que l'embryon... Un embryon, c'est un ovule et un spermatozoïde ensemble.

Mme Francine Manseau: Oui.

M. Réal Ménard: Vous dites que cela va toujours être dans le cadre d'une clinique de fertilité parce que....

Mme Francine Manseau: La création.

M. Réal Ménard: La création.

Mme Francine Manseau: Oui.

M. Réal Ménard: Mais ceux qui existent, s'ils existent, c'est parce qu'ils ont déjà été créés.

Mme Francine Manseau: Oui. Ils sont souvent dans des cliniques de fertilité, dans des contenants où ils sont congelés, parce que des embryons surnuméraires sont souvent créés au moment où un couple reçoit un traitement. Souvent ils créent plus d'embryons qu'ils n'en ont besoin. Tout le processus de création des embryons peut entraîner des conséquences assez graves pour la femme parce qu'il y a tout le processus d'hyperstimulation et ainsi de suite. On ne veut pas obliger une femme à subir ce régime de médicaments et d'injections. Donc, on a souvent tendance, dans les traitements, à hyperstimuler, à retirer plus d'ovules que ce dont on aura besoin, parce que dans le processus même de création d'un embryon, il y en a plusieurs qui ne réussissent pas, qui n'atteignent pas le stade où ils peuvent être remis dans l'utérus d'une femme. Donc, les embryons dont on n'a pas besoin sont effectivement congelés.

M. Réal Ménard: Donc, dans un contexte de fertilité, de stimulation, il peut y avoir plusieurs embryons. Un couple peut choisir d'en garder un à des fins de reproduction et d'en donner un autre à des fins de recherche.

Mme Francine Manseau: Peut-être. Le couple peut aussi choisir de les garder tous et d'essayer une autre fois parce que la femme ne veut peut-être pas tomber enceinte. Ainsi, il y a des embryons qui peuvent être utilisés.

M. Réal Ménard: Mais ce que je veux comprendre—et je m'arrête là-dessus—, c'est qu'il ne peut pas y avoir de contexte autre, si vous voulez, qu'une utilisation d'embryon à l'intérieur d'une clinique de fertilité.

Mme Francine Manseau: Oui. Si, par exemple, un couple décide de donner un embryon pour un projet de recherche qui se fait dans une université située à un autre endroit, il pourrait être amené là. Mais l'université ou l'institution qui fera la recherche devra avoir une autorisation. Donc, il va falloir s'assurer que les conditions sont...

M. Réal Ménard: Donc, votre réponse, c'est qu'un couple pourrait très bien le donner à un centre de recherche universitaire qui lui, de toute façon, devra avoir une autorisation ministérielle pour poursuivre sa recherche.

Mme Francine Manseau: Oui.

• 1225

M. Réal Ménard: Donc, il y a des situations autres qu'une clinique de fertilité où on va manipuler des embryons.

Mme Francine Manseau: Oui, effectivement.

M. Réal Ménard: D'accord.

La présidente: Monsieur Castonguay.

M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.): Merci, madame la présidente.

Dans la foulée de ce qu'a dit M. Ménard, je comprends très bien qu'à l'heure actuelle, dans les cliniques de fertilité, on crée un certain nombre d'embryons lorsqu'un couple le souhaite. Est-ce qu'il y a une réglementation ou quelque chose d'autre qui empêche quelqu'un d'en créer 20 au lieu de 10 afin d'en avoir un surplus pour faire de la recherche? Est-ce que c'est fermé? Est-ce que c'est contrôlé? Est-ce que des mesures seront prises pour prévenir cela? C'est un des dangers que je vois à l'heure actuelle. Il devient très tentant pour des chercheurs d'en créer plus afin d'en avoir pour faire de la recherche.

Mme Francine Manseau: Quand on va élaborer la réglementation, on tiendra certainement compte des questions d'éthique de ce genre. Je pense aussi que ce sont des questions sur lesquelles devraient se pencher les médecins et leur association, parce que ce sont vraiment des questions d'éthique et de pratique de la médecine. Il y aura une réglementation, et on va certainement vouloir examiner ces questions. Il faut aussi qu'il y ait des consentements. II faut que les individus sachent ce qui va se passer et quels sont les risques. Un individu peut aussi décider des limites qu'il veut imposer. Il faudra se pencher sur les considérations éthiques et de santé pour les personnes, parce qu'une hyperstimulation qui permettrait de retirer 20 embryons serait risquée.

M. Jeannot Castonguay: Merci.

La présidente: Madame Scherrer.

Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Je continue dans la même veine. Tout à l'heure, en répondant à la question de M. Ménard, on a dit que la création d'embryons se ferait normalement ou exclusivement dans une clinique de fertilité. Par contre, par la suite, s'il y a lieu de faire une recherche ou s'il est pertinent de faire une recherche et qu'on a besoin d'embryons, il sera évidemment possible d'aller les chercher si le couple est d'accord.

Je me pose une question. Est-ce qu'on va demander au couple s'il accepte que l'embryon serve à telle recherche, à tel endroit, sous la direction de tel chercheur? Les parents avaient pour premier objectif d'avoir un enfant ou un deuxième enfant, et on leur donne maintenant la gestion du matériel non utilisé en leur demandant où, quand, comment, avec qui et pourquoi on devrait se servir de ces embryons. Je pense qu'on entre dans un champ qui n'a pratiquement plus de bon sens. Leur objectif était de procréer, et cela a pris trois ou quatre ans. On a fait une stimulation artificielle et on se retrouve avec un embryon surnuméraire. Est-ce que la loi va décider que les porteurs ou les propriétaires de cet embryon vont avoir à tout jamais le droit de dire où, quand, comment, par qui et pourquoi va se faire la recherche? Cela n'a plus de bon sens.

Mme Francine Manseau: Avec ce texte législatif, on veut préciser que l'embryon appartient à ce couple et que c'est à lui de décider ce qu'il veut faire de cet embryon. C'est évident que le couple va décider. Quand il aura terminé sa famille, qu'il ait réussi ou non, on lui demandera ce qu'il veut faire des embryons surnuméraires. On lui demandera s'il veut les donner à un autre couple, les détruire ou les donner pour de la recherche. On va certainement élaborer les types de recherche possibles qui pourraient être faits en utilisant des embryons, et le consentement sera donné à ce moment-là. Si le couple consent à donner ses embryons à des fins de recherche, son consentement s'arrêtera là. Il ne donnera pas ses embryons à telle institution pour tel projet.

Mme Hélène Scherrer: D'accord.

Mme Francine Manseau: Ce sont les projets de recherche qui sont acceptables. La réglementation définira les projets de recherche qui seront acceptables, et si le couple décide de donner ses embryons à des fins de recherche, ça s'arrêtera là. Il ne les donnera pas à telle institution ou à tel médecin. Au contraire, il les donnera à des fins de recherche, et ça s'arrêtera là. On veut s'assurer que les couples soient conscients qu'au moment où les embryons sont créés, ils en ont la responsabilité. C'est à eux de décider du sort de ces embryons s'ils ne servent pas à leurs fins de reproduction.

Mme Hélène Scherrer: Ils pourraient décider de leur destruction, par exemple.

Mme Francine Manseau: Oui.

[Traduction]

La présidente: Merci, madame Scherrer. Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard: Je voudrais revenir sur le mot «consentement», à l'article 6.

Mme Francine Manseau: Oui.

Mme Pauline Picard: Vous parlez du mot «consentement». Je ne trouve pas cet article clair et je pense qu'il y aurait lieu de donner plus d'explications. Au lieu de parler d'une autorisation ou d'un consentement écrit, on pourrait peut-être parler d'un consentement éclairé.

• 1230

Je pense que vous savez que, quand la femme donne ses ovules, que cela fonctionne et qu'elle est donc fertile, elle est vraiment très enthousiaste de se voir enceinte. N'importe qui pourrait lui demander son consentement pour remercier le médecin ou qui que ce soit d'autre, et elle pourrait facilement le donner parce qu'elle attend un enfant et qu'elle en est très heureuse. Il faudrait donc qu'il y ait une définition du mot «consentement», que ce soit plus explicatif. Il faudrait aussi que la personne qui consent puisse dire qu'elle a été informée.

Mme Francine Manseau: Je pense que vous soulevez un point très important. Le consentement est vraiment un des fondements de ce texte législatif. Dans la réglementation, les détails ayant trait au consentement seront beaucoup plus élaborés, parce que les consentements peuvent être différents selon qu'il s'agit, par exemple, de quelqu'un qui donne des gamètes de façon anonyme ou de quelqu'un qui se sert de ses propres gamètes pour former un embryon. Donc, effectivement, le principe d'un consentement éclairé est très important. La réglementation va préciser l'information minimum qui devra être donnée à une patiente avant qu'elle accepte un traitement.

M. Ian Shugart: Également, madame Picard, le terme «consentement informé» est bien établi, non pas dans ce texte législatif, mais en droit, et il est bien accepté et utilisé partout par les professions et les services de santé. C'est la réglementation qui va offrir des détails dans ce contexte. Le terme est assez bien établi en droit.

Mme Pauline Picard: Madame la présidente, j'ai en mémoire un autre article. Je n'ai pas le numéro de cet article, mais c'est celui où on parle d'un donneur mort, par exemple, ou qui pourrait mourir et à qui on demande son consentement ou la signature d'un document. Il n'y a rien de précis là-dedans. Un peu plus loin, justement, au niveau du droit, on dit que l'authenticité de la signature, en preuve, ne sera pas nécessaire. Il y a quelque chose d'inquiétant là-dedans. Est-ce qu'on a cet article?

M. Réal Ménard: C'est concernant les gens qui décèdent et qui pourraient faire des dons d'organes.

Mme Pauline Picard: Oui, et on dit à l'article 29 que quand on fait la preuve... Je pense que c'est dans la saisie. Non?

Une voix: Les articles 6 et 32.

Mme Pauline Picard: Les articles 6 et 32. Lorsqu'on parle du certificat de l'analyste, on dit:

    ...sauf preuve contraire, fait foi de son contenu sans qu'il soit nécessaire de prouver l'authenticité de la signature qui y est apposée ou la qualité officielle du signataire.

Je trouve qu'il y a là une contradiction.

[Traduction]

M. Glenn Rivard: Peut-être pourrais-je répondre à cette question.

L'article 32 est en fait assez standard. Il suit de très près, par exemple, les dispositions de la Loi sur les aliments et drogues. Pour appliquer la loi, le ministre peut créer des emplois d'inspecteurs qui se rendraient dans une clinique, par exemple. Ils pourraient en inspecter le fonctionnement et, en cas de besoin, saisir du matériel ou des dossiers écrits. Le ministre peut également créer des postes d'analystes. Les analystes sont des scientifiques formés pour examiner le matériel—qui peut être un embryon in vitro—et pour conclure si, par exemple, il a été manipulé d'une façon qui ne cadre pas avec l'autorisation donnée. Peut-être a-t-on essayé de modifier le génome de l'embryon, contrairement à l'interdiction de la loi, ou autre chose du genre. L'analyste prépare alors un rapport qu'il signe.

• 1235

Cette disposition permet de présenter ce rapport devant un tribunal, sans que l'on ait à prouver que l'analyste est en fait un analyste du ministère de la Santé, formé, etc., pour faire ce travail. Elle permet également de convoquer l'analyste dans le cas où ses capacités seraient contestées par l'autre partie, par l'intimé, pour que son expertise puisse être établie devant le tribunal. En général, cela facilite le processus judiciaire puisque l'on n'a pas à faire constamment venir ces analystes au tribunal, pour les questionner et démontrer leur formation scientifique, etc. Cela s'applique à l'employé de Santé Canada qui a une formation d'analyste.

L'article 6, en général, traite des autres personnes. Ce sont surtout les gens qui font don de gamètes ou qui ont le contrôle de l'embryon in vitro, selon le cas. Le paragraphe 6(1) interdit, en fait, l'utilisation de matériel reproductif humain—c'est-à-dire les gamètes ou les embryons in vitro—à des fins de reproduction sans le consentement écrit du donneur à l'utilisation visée. Ainsi le donneur est-il protégé et l'on s'assure que son consentement a été obtenu.

Le paragraphe (2) traite du cas particulier où le donneur est décédé. Il dit en fait qu'on ne peut prélever du matériel reproductif humain sur un donneur après sa mort à moins d'en avoir obtenu le consentement écrit avant son décès. On vise surtout ici à prévoir les situations des couples dont l'époux meurt et l'épouse souhaite faire prélever son sperme dans le but de porter son enfant. On précise bien ici que cela ne peut se faire sans qu'il y ait eu consentement écrit préalablement au décès.

Ce sont deux situations très différentes.

La présidente: Il y a déjà quatre personnes qui attendent de pouvoir poser des questions. Je vous demanderai de limiter vos questions à l'article que nous examinons actuellement si c'est possible.

Le nom suivant sur la liste est celui de Mme Parrish, puis ce sera à M. Mayfield, M. Manning et M. Ménard.

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je suis absolument fascinée par ce concept de consentement éclairé, parce que les deux moments les plus traumatisants d'une vie, je le crois, sont ceux de la naissance et de la mort. Je pense que les femmes qui se font féconder in vitro vivent une expérience très traumatisante, que la plupart d'entre nous ne pouvons même pas imaginer. C'est pourquoi le moment de l'obtention du consentement dans ce processus m'apparaît important. J'ai donné mon consentement pour le prélèvement d'organes sur mon permis de conduire, ou sur une carte que je porte sur moi. J'ai pris cette décision à tête reposée; je ne l'ai pas prise tandis que je gisais sur une civière dans un hôpital. Je pense qu'il faut rendre hommage aux gens qui prennent une décision éclairée relativement au don d'organes, mais si une femme, tandis qu'elle est au comble de la joie d'apprendre que l'essai de fécondation in vitro est réussi et qu'elle donnera naissance à un enfant, se fait demander par un docteur ou un clinicien de consentir à l'utilisation du reste des créatures fécondées, elle peut très bien donner son consentement alors qu'elle ne le ferait pas en un moment de calme.

• 1240

Il me semble vraiment que le consentement devrait être obtenu au début d'un processus et non pas lorsque quelque chose est survenu qui comble de joie et influe sur les décisions. Ça me tient à coeur.

Une autre chose que j'ai remarquée, que vous manquez... au paragraphe 6(2), vous parlez du prélèvement de sperme d'un époux décédé. Je suppose que le temps est un facteur critique. Cependant, vous n'avez pas parlé de sperme qui a déjà été donné, dans le cas d'un couple qui a entrepris la procédure, puis l'époux meurt d'une crise cardiaque et l'épouse poursuit la démarche sans qu'il ait consenti à ce qu'elle élève l'enfant seule. Je connais l'un de ces cas. La femme n'a pas dit à la clinique que son époux était décédé, puis elle a été au bout de la procédure et est devenue enceinte.

Cela me préoccupe beaucoup. Je sais qu'il y a beaucoup d'hommes qui diraient c'est fantastique, mais s'ils devaient mourir, ils ne voudraient pas laisser leur enfant être élevé par un seul parent, ou dans une situation de famille monoparentale qui éprouve des difficultés financières. Il n'en est pas question dans ce projet de loi. Je me demande s'il y a moyen d'examiner ces possibilités.

Mme Francine Manseau: Si vous permettez, je pense que toute la question du consentement n'est pas détaillée, c'est vrai, dans le projet; elle le sera dans les règlements. Le but est certainement qu'au moment où la matière est prélevée sur un patient—que ce soit les ovules ou le sperme—, le consentement relatif à ce qu'il en sera fait soit obtenu à ce moment-là.

Si un couple entame un traitement de fertilité, puis le sperme est prélevé du mari pour créer un embryon—disons que le sperme pourrait même être prélevé sur un patient qui souffre de cancer—à ce moment-là, les questions sont posées sur ce qui sera fait du sperme. En cas de décès, veut-on qu'il serve à créer un embryon pour cette personne en particulier? Alors, sans consentement écrit du donneur, cela ne pourrait pas se faire.

Mme Carolyn Parrish: D'accord. Nous entendons souvent, au sujet des lois, que certaines questions seront réglées par l'entremise des règlements, mais nous ne portons pas autant d'attention aux règlements qu'aux textes de loi. Je dis cela au nom de tous mes collègues. Alors j'espère que la préoccupation que j'ai exprimée au sujet du moment où est obtenu le consentement est bien inscrite dans vos mémoires, pour qu'on ne dise pas seulement on va s'en occuper dans les règlements, parce que je ne pense pas que c'est sa place.

La présidente: Si je peux dire un mot, ici, au sujet de concept de consentement, j'aimerais rappeler à mes collègues qu'une éthicienne qui a témoigné devant nous, Mme Françoise Baylis, nous a dit que le concept de consentement fait tellement partie intégrante du corps de ce projet de loi qu'il ne devrait certainement pas, selon elle, figurer dans les règlements. Alors bien que Mme Manseau ait dit que ce sera dans les règlements, je ne pense pas que ce soit gravé dans la pierre. Je pense que si nous le voulons, nous pouvons recommander au ministre que ce ne soit pas dans les règlements, que tout l'article soit développé et plus détaillé, et aussi que ce soit dans la loi. Je ne vous présente cela que comme une possibilité, parce que j'ai vraiment l'impression que Mme Baylis a été l'un des témoins les plus utiles que nous ayons entendu.

Monsieur Rivard.

M. Glenn Rivard: Il se peut que les dispositions puissent être développées, mais à tout le moins, toutes les situations de base sont prévues dans ces articles. Je pense que quelles que soient les précisions ou les changements qui seront apportés, il faudra tout de même une disposition très semblable à celle de l'alinéa 40(1)c), qui donne le pouvoir de réglementer en ce qui concerne le consentement. Le but visé, ici, c'est la création d'une formule de consentement qui renfermerait plus de détails sur le type de renseignements qui doit être fourni pour assurer le consentement éclairé, et la prévision de choix différents pour des résultats différents relativement aux embryons.

• 1245

Je pense qu'il est très difficile de prévoir toutes les circonstances auxquelles pourrait s'appliquer le consentement et, au bout du compte, d'être satisfaits des dispositions de la loi.

La présidente: Non, je peux le comprendre.

M. Glenn Rivard: Je ne dis pas qu'elles ne peuvent pas être modifiées, mais je pense qu'il faudra toujours ce supplément de flexibilité réglementaire.

La présidente: Ce qui nous inquiète, en tant que législateurs, c'est ce que vous appelez la «flexibilité réglementaire». Une trop grande flexibilité réglementaire met la plupart des députés très mal à l'aise. C'est pourquoi je dis que nous pourrions décider, en tant que groupe, que nous voulons des éléments très spécifiques dans la loi elle-même, même si les règlements prévoient qu'il faut des choses comme une formule, la description d'une formule, une liste de renseignements que doit recueillir la personne qui, en principe, amène le patient à donner un consentement éclairé.

Je pense que la quantité de gens qui veulent en parler constitue un avertissement aux auteurs de la loi et des règlements, selon quoi c'est un domaine de préoccupation. C'est tout ce que je dis. J'essaie d'assurer Mme Parrish et d'autres que nous avons ce moyen à notre disposition pour nous assurer que c'est dans la loi de même que dans les règlements, de manière que les principes essentiels de consentement éclairé puissent à tout le moins être dans la loi.

Madame Parrish, avez-vous terminé?

Mme Carolyn Parrish: Oui. Je vous remercie beaucoup. Vous m'avez très bien interprétée.

La présidente: Merci.

Monsieur Merrifield.

M. Rob Merrifield: Je voulais seulement revenir sur le sujet antérieur, à propos des embryons in vitro. L'on suggérait qu'à l'avenir, il puisse y avoir des limites de ce côté-là.

Je pense que c'est un domaine flou, parce que l'intention est quelque peu subjective sur ce plan. L'objectif, au départ, est de reproduire un autre enfant de couples qui le souhaitent. Mais le but devient très flou et vague lorsqu'il s'agit de recherche. C'est tellement subjectif.

Ce que je voudrais savoir, je suppose, c'est si nous créons des embryons aujourd'hui qui sont congelés à des fins obscures, et s'il y a moyen d'empêcher cette pratique maintenant? Nous en parlons au sujet de l'avenir, mais c'est le présent qui me préoccupe vraiment. Devrions-nous fixer un nombre raisonnable d'embryons...? Je sais qu'il y a des cliniques de fécondation in vitro qui ne prélèvent que trois ovules, ou deux ovules. D'autres en prélèvent un nombre indéfini.

Mme Francine Manseau: Parlez-vous du nombre d'embryons qui sont créés ou du nombre d'embryons implantés dans une femme?

M. Rob Merrifield: Je parle plutôt du nombre d'embryons créés.

Mme Francine Manseau: Qu'il y ait une limite du nombre d'embryons pouvant être créés.

M. Rob Merrifield: C'est cela.

Mme Francine Manseau: Je dirais que l'objet de la loi est certainement de protéger la santé et la sécurité des gens qui sont touchés. Sans aller jusqu'à dicter exactement les détails, je pense qu'il nous faut... Les médecins sont formés pour prendre des décisions, non pas pour mettre en péril la vie de leurs patients. Il ne fait pas de doute qu'avec le pouvoir de réglementation, s'il y a des cas où on apprend que, par exemple, une femme a été hyperstimulée et que 20 à 25 ovules en ont été prélevés, je pense qu'on pourrait aller poser certaines questions. Je crois que c'est un protocole de bonnes pratiques médicales, et non pas quelque chose qui...

M. Rob Merrifield: Je voulais seulement signaler cela. Je ne m'attends pas vraiment à recevoir une réponse.

Mme Francine Manseau: Non.

M. Rob Merrifield: Mais il y a autre chose qui m'a un peu frappé, et c'est au sujet du clonage thérapeutique et reproductif. Vous laissez entendre, et le projet de loi laisse entendre, que ces deux formes de clonage seraient interdites parce que peu importe le but visé, tant qu'il y a clonage, que ce soit à des fins reproductives—une autre Dolly—ou thérapeutiques, c'est-à-dire le prélèvement de cellules embryonnaires, aucune différence n'est faite, et ça va. L'autre moyen d'obtenir la cellule embryonnaire est d'un embryon, sans clonage. Y a-t-il une distinction entre un embryon cloné et une cellule embryonnaire? Je sais bien que ce sont tous les deux des embryons, mais il y a une différence.

Mme Francine Manseau: Ce sont des embryons dans les deux cas.

Je pense que le raisonnement qui a été exposé, au sujet de la création d'embryons spécifiquement à des fins thérapeutiques, est que la cellule embryonnaire qui viendrait de l'embryon cloné, disons, d'un autre être humain... le raisonnement est que la cellule embryonnaire ne serait pas rejetée par l'individu chez qui ces cellules seraient transplantées. C'est un peu le raisonnement donné pour justifie l'acceptation du clonage thérapeutique.

• 1250

Je pense que le monde trouve encore qu'il n'y pas eu assez de recherche avec les embryons existants et ces cellules embryonnaires. Il n'y en a pas eu tellement. Certains pensent que, peut-être, le rejet ne serait pas le même que lorsqu'on transplante des cellules adultes dans un autre adulte, parce que ces cellules ont acquis une espèce d'immunité, ce qui ne serait pas le cas des cellules embryonnaires. Je pense que les gens trouvent que nous n'avons pas encore fait assez de recherche, même avec les embryons existants. Nous devrions faire cela avant d'aller de l'avant et de commencer à créer des embryons rien qu'à des fins de prélèvement de cellules.

La présidente: Merci, monsieur Merrifield...

M. Ian Shugart: Madame la présidente, je voudrais donner une précision. Le clonage n'est pas, c'est sûr, le seul moyen de créer l'embryon. Pour les fins de recherche, des solutions sont proposées qui seraient autorisées sous réserve d'obtention de permis, mais il est catégoriquement proposé de rejeter le clonage à des fins thérapeutiques ou reproductives.

M. Rob Merrifield: Bien sûr, et je suis bien d'accord. Ce que je disais, c'est pourquoi pousser, et vous l'avez expliqué: à cause du rejet. C'est pourquoi il y en a pour laisser entendre que, peut- être, il y a une raison au clonage thérapeutique. Je ne comprenais pas la raison.

Je vous remercie.

La présidente: Merci.

Monsieur Manning.

M. Preston Manning: J'ai seulement un commentaire à faire et une question à poser. Je pense toujours à la façon dont les non initiés qui lisent la loi peuvent l'interpréter. Je sais qu'on ne peut satisfaire à la fois les non initiés et les avocats.

Il y a une certaine confusion, lorsque vous dites que les gens ne doivent pas créer un clone humain ou participer à sa création. Le non initié pense que vous parlez de créer une personne entière. Lorsque vous parlez au public, et même à certains de nos collègues, vous faites une distinction entre le clonage reproductif et le clonage thérapeutique: avec l'un, on essaie de créer une personne entière et avec l'autre, on essaie de créer des organes. Je sais que ce n'est pas le cas. Ceci définit un clone humain comme étant un embryon. Mais je suis conscient du fait que nos collègues politiques auront de la difficulté à expliquer cela.

Ce texte, tel qu'il est maintenant, on l'a déjà dit, interdit le clonage reproductif autant que le clonage thérapeutique. Pourriez-vous résumer les raisons que l'on peut avoir de vouloir interdire le clonage reproductif? Il y a une distinction. Quels sont les principaux motifs d'interdiction du clonage thérapeutique et aussi du clonage reproductif?

La présidente: Vous voulez vraiment entrer dans ce sujet maintenant? Cela pourrait prendre une heure.

M. Preston Manning: Non, 30 secondes seulement. Quelle est la principale raison? Je pense que nous savons tous de façon tout à fait instinctive pourquoi nous nous opposons au clonage reproductif. La plupart d'entre nous avons de grandes réserves à l'égard du clonage thérapeutique aussi. Quelle est la principale raison, qui n'a rien à voir avec le clonage reproductif?

Mme Francine Manseau: Je pense qu'il y a une autre interdiction qui est prévue dans la loi, selon laquelle on ne peut créer un embryon à des fins de recherche seulement. Que ce soit à des fins de clonage reproductif ou autre, c'est impossible.

Pour ce qui est précisément du clonage thérapeutique, je pense que ce que nous avons entendu, c'est que même maintenant, dans le domaine animal, il y a encore des problèmes et des enjeux qui ne sont pas réglés au sujet de la sécurité des cellules dérivées de ces animaux qui ont été clonés à ces fins, et de la vérification de la procédure, pour savoir si elle va bien ou non. Certains chercheurs disent qu'il nous faut encore faire d'autres recherches dans le domaine animal avant d'aller de l'avant et de créer des embryons, si nous ne sommes pas sûrs maintenant que ça marchera. Il y a des gens qui disent qu'il y a actuellement des embryons qui ne servent pas à des fins de reproduction, des surnuméraires, et nous n'avons pas encore fait de recherche avec eux pour tirer les conclusions qu'il nous faut pour créer des embryons juste à des fins de recherche.

Comme je l'ai dit, les Instituts canadiens de recherche sur la santé, le groupe de scientifiques qui travaille là, qui a rédigé le rapport du groupe de travail, recommande aussi que, pour l'instant, il n'y ait pas de création d'embryons à cette fin.

La présidente: Merci.

Monsieur Lunney.

• 1255

M. James Lunney: Un simple petit ajout. Les grandes découvertes sur les cellules embryonnaires adultes qui ont été faites récemment à l'université McGill et à d'autres universités, où on a pu prélever des cellules cutanées et créer avec elles des neurones in vitro, des cellules musculaires, etc. vont parer à la nécessité de recourir au clonage thérapeutique.

Mme Francine Manseau: C'est bien possible. Je suppose qu'il y a d'autres moyens...

M. James Lunney: Cela éviterait les problèmes de transmission de virus, d'ADN mitochondrial du donneur, etc.

La présidente: Monsieur Lunney, êtes-vous satisfait de...?

M. James Lunney: Je voulais seulement faire cette observation. Il y a de phénoménales découvertes dans ce domaine particulier qui sont très prometteuses et pareraient au besoin de recourir... Il serait possible de prélever les cellules de notre corps, de cultiver des tissus de notre propre corps.

La présidente: Oui. Je pense que la plupart d'entre nous avons entendu parler, au milieu de l'été, de cette découverte particulière au sujet des cellules cutanées, à Montréal. C'était très encourageant.

Y a-t-il d'autres questions relativement à la partie B? Je devrais vous dire que nos témoins reviendront jeudi alors que nous allons poursuivre nos travaux.

L'un des avantages, selon moi, de ce processus... Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais on m'a rappelé des questions, on m'a rappelé ce par quoi nous sommes passés au printemps, simplement en suivant le processus. Je suis donc très reconnaissante aux attachés de recherche pour tout le travail qu'ils ont abattu au cours de l'été ainsi que pour la préparation de cette séance avec des représentants de Santé Canada.

Avant de clore la séance, avez-vous d'autres questions concernant la partie B? Dans la négative, nous allons commencer avec la partie C à la prochaine réunion.

M. Ian Shugart: Madame la présidente, je me demande si je peux ajouter quelque chose. Tant dans les questions de Mme Parrish concernant le consentement informé et indirectement dans la question de M. Merrifield concernant les dispositions du projet de loi et des règlements futurs et compte tenu du point que vous avez soulevé très clairement au sujet des limites qu'il faut se fixer, nous devons prendre soin de ne pas empiéter sur les directions ou les questions qui, en fait, toucheraient à la pratique de la médecine. C'est purement une question de compétence et cela ne se rapporte pas vraiment trait à la question de savoir si cela se trouve dans la loi elle-même ou dans les règlements.

Il y aurait, par exemple, des codes professionnels de pratique et autres qui porteraient sur ces questions de pratique de la médecine, sur la façon d'obtenir le consentement éclairé, etc.—des codes bien établis qui évolueraient et ainsi de suite.

L'une des choses auxquelles il nous faut faire attention c'est la question de compétence du gouvernement fédéral et des provinces en ce qui a trait à la pratique de la médecine.

C'est donc une question que vous ne devez pas perdre de vue en tant que membres du comité et pour laquelle nous devrons avoir beaucoup de rigueur au moment de la rédaction.

La présidente: Permettez-moi de répondre à cela, monsieur Shugart. Certaines des lettres que nous recevons de personnes qui ont participé à ce processus de fertilisation in vitro me laisseraient croire que certains des codes de conduite mis en place par les confréries ou sororités médicales dans les provinces ne fonctionnent pas très bien. N'est-ce pas le fait que nous songeons à utiliser le Code criminel précisément parce que cela relève de la compétence du gouvernement fédéral et qu'en fait certaines de ces pratiques pourraient nécessiter la surveillance du gouvernement fédéral?

M. Ian Shugart: Vous avez tout à fait raison. C'est absolument la raison de l'utilisation du Code criminel.

Je dis simplement qu'il faudra faire preuve de jugement lorsqu'il faudra justifier que le recours au Code criminel aura préséance sur quelque chose du genre comme la pratique de la médecine.

Je ne veux pas prétendre que tout est bien à cet égard, mais je veux simplement repérer un domaine de... La communication à cet égard est assez complexe et il faudra finir par en tenir compte dans la mesure législative.

La présidente: Oui et je pense que mes collègues et moi-même comprenons qu'il nous reste à entendre des représentants de la fraternité ou de la sororité médicale et qu'ils tenteront de défendre leur droit à beaucoup de leurs propres choix. Nous n'avons pas encore entendu de représentants du milieu de la recherche scientifique qui exerceront sur nous des pressions pour limiter les règles afin de pouvoir obtenir le plus possible de cellules souches à partir d'embryons, etc, afin d'attiser leur passion pour la recherche. Nous comprenons les pressions qui seront exercées sur nous. Cependant, au départ, nous nous disons que notre objectif principal consiste à protéger le public de même que l'intégrité de... l'humanité? Il existe une certaine expression concernant le code génétique, je crois.

• 1300

M. Ian Shugart: L'intégrité du génome humain.

La présidente: L'intégrité du génome humain. C'est notre règle de base. Ces gens viendront donc essayer d'exercer ça et là des pressions, mais nous connaissons notre objectif.

Je vous remercie beaucoup d'être venus aujourd'hui.

Je veux dire à mes collègues qu'on m'a remis une motion de M. Merrifield laquelle, présentée aujourd'hui comme avis, reviendra au comité jeudi. Elle se lit comme suit: «Il est proposé que le comité recommande au gouvernement de prendre immédiatement des mesures pour interdire le clonage humain au Canada», l'idée principale étant «immédiatement» ce qui irait plus loin que ce que nous faisons.

Je veux donc que vous y réfléchissiez vu que nous allons voter à l'égard de cette motion et probablement en discuter un peu jeudi. Considérez donc que vous en avez eu l'avis.

Je vous remercie beaucoup. Je suis désolée d'avoir été en retard ce matin. Je vais essayer d'être plus ponctuelle la prochaine fois.

La séance est levée.

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