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AANR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles


Témoignages du comité

TABLE DE MATIÈRE

Le jeudi 21 février 2002




Á 1105
V         Le président

Á 1110
V         M. John Sinclair (sous-ministre adjoint principal, Secteur des politiques et des orientations stratégiques)
V         Le président
V         M. John Sinclair

Á 1115

Á 1120

Á 1125

Á 1130
V         Le président

Á 1135
V         M. Reed Elley (Nanaimo--Cowichan, Alliance canadienne)
V         M. Elley
V         M. John Sinclair
V         M. Reed Elley
V         Le président
V         M. Richard Marceau (Charlesbourg--Jacques-Cartier, BQ)

Á 1140
V         M. John Sinclair
V         Le président
V         Mme Grey
V         Le président
V         Mme Grey
V         M. John Sinclair
V         Mme Grey
V         M. John Sinclair
V         Mme Grey

Á 1145
V         M. John Sinclair
V         
V         Le président
V         M. Guy St-Julien (Abitibi--Baie-James--Nunavik, Lib.)

Á 1150
V         Le président
V         M. Guy St-Julien
V         Le président
V         M. Guy St-Julien
V         M. John Sinclair
V         
V         M. Richard Marceau
V         M. John Sinclair
V         M. Richard Marceau
V         Le président
V         M. Richard Marceau

Á 1155
V         M. John Sinclair
V         M. Richard Marceau
V         M. John Sinclair
V         Le président
V         Mme Karetak-Lindell

 1200
V         M. John Sinclair
V         Le président
V         M. John Sinclair

 1205
V         Le président
V         Mme Grey
V         Le président
V         Mme Grey
V         M. John Sinclair
V         Mme Grey
V         M. Dan Beavon (directeur stratégique intérimaire, Direction de la recherche et des analyses, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien)

 1210
V         Mme Grey
V         M. John Sinclair

 1215
V         Le président

 1220










CANADA

Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles


NUMÉRO 040 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

Témoignages du comité

Le jeudi 21 février 2002

[Enregistrement électronique]

Á  +(1105)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Nous sommes le Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles. L'ordre du jour porte sur le paragraphe 108(2) du Règlement : vue d'ensemble de la Loi sur les Indiens.

    Il s'agit de notre première séance d'examen. Alors, pour donner le ton, je demanderais à nos témoins, aujourd'hui et les jours suivants, de nous instruire le mieux possible, de façon à ce que nous partions tous du même point, au cas où le ministre déposerait un projet de loi sur la gouvernance.

    Nous ne sommes pas ici pour essayer de deviner ce que renfermera le texte de loi, mais plutôt pour comprendre ce qui existe actuellement et certains des problèmes qui se posent sans doute, du point de vue de nos témoins. Je voudrais donc que nous ne nous perdions pas en conjectures sur ce que sera la loi. Sur ce point, j'adresse ce commentaire à mes collègues.

    Je suis heureux de recevoir des représentants du Aboriginal Peoples Television Network, le réseau de télévision des peuples autochtones. Je le dis en toute sincérité, parce que je suis de ceux qui approuvent la télédiffusion des séances. D'après la nouvelle politique, celle-ci est maintenant permise. Je voudrais donc, au nom des membres de ce comité, vous souhaiter la bienvenue.

    Il y a certaines règles de base qui s'appliquent. Lorsque vous parlez, les caméras vous prennent en plan américain, de sorte qu'on ne voit pas ce que vous faites de vos notes—autant que possible. Lorsque vous n'intervenez pas, vous n'êtes pas filmé. Mais les cameramen doivent passer d'une personne à l'autre; nous devons garder cela à l'esprit.

    Nous sommes heureux de vous avoir parmi nous.

    Nous avons aussi des représentants du ministère. Je souhaite la bienvenue à M. John Sinclair, sous-ministre adjoint principal, Secteur des politiques et des orientations stratégiques, du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Nous avons également M. Pierre Gauvin, directeur intérimaire, Direction de la gestion de l'information ministérielle, et M. Dan Beavon... Est-ce exact? Cela se prononce comme “heaven”? Je vais essayer de m'en souvenir. M. Beavon est directeur stratégique intérimaire, Direction de la recherche et des analyses.

    Je vois le nom de Geneviève Thériault. Est-elle ici? Voulez-vous qu'elle vienne s'asseoir à la table principale?

Á  +-(1110)  

+-

    M. John Sinclair (sous-ministre adjoint principal, Secteur des politiques et des orientations stratégiques): Non, pas pour le moment, monsieur le président.

+-

    Le président: Très bien, nous vous laissons le soin de choisir vos invités, mais nous vous demanderons de nous les présenter.

    Vous pouvez faire votre exposé, ensuite nous poserons des questions. Il s'agit d'une séance très informelle, nous sommes ici pour apprendre ensemble, alors, pour une fois, je serai souple en ce qui concerne le temps imparti, de façon à ce que nous puissions en apprendre le plus possible.

    Monsieur Sinclair, c'est à vous.

+-

    M. John Sinclair: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Tous les membres du comité ont devant eux, je crois, le contenu de l'exposé. Nous allons également faire une projection sur l'écran ou bien sur le mur, là devant. Nous pourrions peut-être commencer l'exposé et suivre par les acétates. Cela vous convient-il?

    Le président: C'est bien, c'est vous qui décidez.

    M. John Sinclair: Merci.

    Permettez-moi de vous présenter plus en détail mes deux collègues. M. Gauvin traite énormément de données que nous recueillons au sein du ministère et qui ont une incidence sur la façon dont nous appliquons les programmes. M. Beavon a publié des dizaines d'articles sur la recherche démographique. Il travaille beaucoup avec Statistique Canada. Le présent exposé renferme donc des données sur ces deux aspects.

    Pour ce qui est des objectifs, nous voudrions parler brièvement de trois choses. Tout d'abord, nous verrons la taille de la population et les lieux où les collectivités des Premières nations sont établies; je pense que c'est un point très important. Deuxièmement, nous examinerons les disparités socio-économiques, lesquelles sont essentielles à la compréhension des défis politiques. Troisièmement, nous nous projetterons dans le futur et parlerons de la dynamique démographique, parce que cette collectivité a des caractéristiques uniques. Ceci est important pour la collectivité elle-même, mais aussi pour l'avenir social et économique du Canada. Voici donc les trois thèmes que nous traiterons.

    L'acétate suivante illustre la taille de la population des Premières nations. Les chiffres indiqués sont toujours sujets à changement. Par exemple, les données du recensement que nous présentons ici sont celles de 1996, parce que nous n'avons pas encore reçu celles du recensement de 2001; elles seront disponibles l'année prochaine.

    Dans le présent contexte, il s'agit d'une population autochtone de 700 000 personnes dont 60 % vit dans des réserves et 40 % à l'extérieur des réserves. C'est un pourcentage national, et la différence de répartition par région et par sous-région est beaucoup plus importante, quand on considère le nombre de personnes vivant dans les réserves par rapport au nombre de personnes établies dans les municipalités environnantes ou dans des centres urbains.

    J'aimerais aussi attirer l'attention des membres du comité sur le fait que nous parlons de plus de 600 collectivités des Premières nations s'exprimant dans 50 langues différentes. La diversité est donc très grande.

    Sur l'acétate suivante, si vous regardez dans la partie gauche, vous voyez qu'il y a 32 collectivités autochtones qui comptent plus de 1 000 habitants. Certaines d'entre elles, comme Kahnawake, la réserve Blood, dans le sud de l'Alberta, et la bande indienne des Six-Nations, de Grand River, sont de très grandes collectivités.

    Toujours sur cette acétate, vous voyez que le diagramme à barres horizontales indique 146. Cela signifie qu'il y a 146 collectivités dont la population est inférieure à 100 habitants. Cela vous donne donc une idée de la différence de taille d'une collectivité à l'autre.

    Sur l'acétate suivante, le diagramme à secteurs vous donne un aperçu du niveau d'urbanisation. Jusqu'à la fin des années 90, les gens ont quitté les zones rurales pour aller s'installer dans les villes, tout comme le reste de la population canadienne. Ensuite, ils ont abandonné les petits centres urbains pour aller s'établir dans les grandes agglomérations. Ce processus d'urbanisation est donc un phénomène qui a touché l'ensemble de l'Amérique du Nord au cours des dix dernières années.

    Si vous y regardez de plus près, vous voyez que 35 des collectivités des Premières nations sont établies en zone urbaine, c'est-à-dire à proximité d'un centre de services. Un centre de services a au moins une institution financière, ainsi que des bureaux fédéraux et provinciaux, et habituellement un établissement de soins de santé.

    Quand on parle de collectivités urbaines, on pense, par exemple, à la Première nation Squamish, que l'on retrouve essentiellement au nord du pont Lions Gate, à Vancouver. Il y a donc beaucoup d'établissements urbains. Il y a également les établissements ruraux qui sont assez loin des centres de services. On trouve aussi des collectivités éloignées, comme Clearwater et River Dene, dans le nord-ouest de la Saskatchewan.

Á  +-(1115)  

    Il s'agit essentiellement de collectivités des Premières nations qui ne sont pas accessibles en tout temps par route. Cela veut dire, monsieur le président, que le ministère des Affaires indiennes surveille de près le début de la période de réchauffement. Si la neige commence à fondre un mois ou une semaine plus tôt, vous ne pouvez pas faire livrer vos matériaux de construction. L'été, il faut avoir recours aux ambulances aériennes. Pour ce qui est de la prestation de services et des nombreux autres défis...

    Cet aspect de la politique d'intérêt public a ceci d'intéressant qu'on retrouve des Autochtones dans toutes sortes de milieux, des milieux aussi bien très urbanisés que très éloignés. Plusieurs membres des Premières nations vivent dans des collectivités qui ne sont pas accessibles en tout temps par route et qui ne sont pas branchées au réseau hydroélectrique.

    Enfin, nous arrivons au dernier point de la première partie de l'exposé—«Les collectivités autochtones et inuites au Canada». Cette diapositive vous donne une idée du nombre de collectivités qui existent au Canada. Bon nombre d'entre elles sont regroupées autour des grands centres urbains. Toutefois, on en retrouve dans des endroits très isolés comme dans le nord-ouest de l'Ontario, le nord du Manitoba et de la Saskatchewan, régions qui font partie du Bouclier, à l'intérieur de la Colombie-Britannique et le long des côtes de la baie James et de la baie d'Hudson, du côté de l'Ontario et du Québec. Donc, la population est très dispersée et vit dans des milieux aussi bien très urbanisés que très éloignés.

    La deuxième partie de notre exposé porte sur les écarts. L'indice du développement humain qu'utilisent les Nations Unies se fonde sur la scolarisation, l'espérance de vie et, surtout, le revenu. Or, on constate, si l'on se fie aux données de recensement allant de 1981 à 1996—M. Beavon a travaillé là-dessus—que l'écart a diminué de 31 p. 100. Il s'agit là d'une très bonne chose. Toutefois, je n'irais pas jusqu'à dire qu'il n'y a plus d'écart et que les conditions sont excellentes. Les collectivités des Premières nations ont fait d'énormes progrès. Toutefois, il reste encore beaucoup à faire.

    Des changements et des progrès notables ont été réalisés dans le domaine de l'éducation, comme vous allez le constater dans un instant. Des progrès intéressants ont également été réalisés au chapitre de l'espérance de vie. Toutefois, les disparités de revenus et d'emplois demeurent inchangés.

    Passons maintenant à la diapositive suivante, qui porte sur la scolarité. Je vous demanderais de la regarder avec un certain recul et de vous dire qu'il y a environ 20 p. 100 de plus de jeunes autochtones que de non-Autochtones qui quittent l'école autour de la neuvième année pour rentrer sur le marché du travail. C'est là un fait important, car il y a beaucoup de gens qui disent qu'il faut un diplôme d'études secondaires ou en tout cas plus qu'une neuvième année pour se tailler une place dans l'économie du savoir.

    Les autres données sur cette diapositive ont trait aux autres membres des Premières nations. Le nombre d'inscriptions a beaucoup augmenté, tout comme le nombre total de diplômés au sein des Premières nations. Cela s'applique également aux Inuits. Il y a 30 ans, quelques milliers de membres des Premières nations possédaient un diplôme d'études postsecondaires. Aujourd'hui, on en compte plus de 30 000. Côté scolarité, il faut surveiller cette cohorte postsecondaire de même que les jeunes qui comptent moins d'une neuvième année.

    La diapositive suivante porte sur l'espérance de vie. J'espère que le tableau n'est pas trop compliqué. On peut mesurer l'espérance de vie selon quatre groupes distincts. En 1975, les hommes des Premières nations étaient ceux qui avaient la plus faible espérance de vie. Elle était d'un peu moins de 58 ans. Si vous comparez leur espérance de vie à celle des Canadiennes en général, vous allez constater qu'il y a un écart de vingt ans. Donc, en 1975, les hommes des Premières nations étaient ceux qui avaient la plus faible espérance de vie; ils étaient suivis des femmes des Premières nations. On voit ensuite qu'il y une coupure très nette, l'espérance de vie des Canadiens étant d'un peu plus de 70 ans, et celle des Canadiennes, d'environ 78 ans. Vingt ans plus tard, on observe une amélioration de l'espérance de vie. Elle s'est accrue de neuf ans, en moyenne, chez les hommes des Premières nations. Les femmes des Premières nations sont au même point que les Canadiens. Pour ce qui est des Canadiennes, leur espérance de vie est maintenant d'un peu plus de 80 ans. L'écart entre les hommes des Premières nations et les Canadiennes est maintenant de 14 ans au lieu de 20.

Á  +-(1120)  

    ll y a beaucoup de changements, beaucoup de déclins, des déclins marqués, depuis la Deuxième Guerre mondiale dans les taux de mortalité infantile chez les collectivités des Premières nations.

    La diapositive suivante montre essentiellement...[Note de la rédaction: difficultés techniques]

    On m'a débranché. Je m'excuse.

    Techniquement, le nombre de personnes vivant à l'intérieur de la réserve sert de dénominateur, tandis que le nombre de personnes vivant de l'aide sociale sert de numérateur.

    Les chiffres varient en fonction du nombre de personnes qui vivent dans la réserve, et en fonction aussi des conditions économiques. Dans le sud de l'Ontario, par exemple, plusieurs membres des Premières nations participent de façon active à l'économie régionale et locale. Les taux d'emploi sont élevés, tandis que le nombre de bénéficiaires d'aide sociale diminue. Toutefois, dans le nord de l'Ontario, du Manitoba et de la Saskatchewan, régions qui font partie du Bouclier, les taux augmentent. En Colombie-Britannique, les taux sont plus élevés dans le secteur intérieur, mais plus faibles dans le Lower Mainland. Ces chiffres reflètent les écarts de chômage et de revenus qu'on a pu voir dans la diapositive précédente.

    Passons maintenant à la santé. Les taux de diabète, de tuberculose, de maladies respiratoires, de maladies cardiovasculaires et d'arthrite sont plus élevés, parfois de trois à quatre fois plus élevés, chez les membres des Premières nations. Le syndrome d'alcoolisation foetale, de même que ses effets, sont plus graves chez les communautés des Premières nations. Bien que les taux fluctuent, le nombre de suicides chez les jeunes des Premières nations, surtout chez les hommes, est de quatre à cinq fois plus élevé que chez les non-Autochtones.

    Je vous ai montré, plus tôt, une diapositive qui portait sur les communautés de 200, 400, 600 habitants. Si ces petites communautés connaissent, et c'est ce qui s'est produit dans certains cas, un ou deux suicides sur deux ou trois ans, imaginez l'impact et le désarroi que cela crée.

    Enfin, pour ce qui est des écarts, vous avez... L'infrastructure s'améliore. Nous nous sommes attachés, pendant les années 90, à améliorer les réseaux d'aqueduc et d'égout et les logements. Nous avons également construit un plus grand nombre d'unités d'habitation. Le surpeuplement demeure, bien entendu, une importante source de préoccupation. Or, dans quelle mesure le surpeuplement et la qualité des logements influent-ils sur le rendement scolaire? Est-ce que les enfants ont de l'espace pour faire leurs devoirs? De plus, s'il y a de la moisissure qui se développe dans les logements, il est évident que cela va avoir un impact sur la santé.

    Tous ces facteurs sont reliés entre eux. La situation s'améliore, mais il reste encore beaucoup à faire.

    La troisième partie de notre exposé porte sur la population. Il y a trois choses qu'il faut retenir. D'abord, la population autochtone augmente beaucoup plus rapidement que la population canadienne.

Á  +-(1125)  

    Si vous regardez à gauche, vous allez remarquer qu'en 1971 et 1973, le taux naturel de croissance, comme disent les démographes, qui est la différence entre le nombre de naissances et le nombre de décès, a augmenté d'environ 1 p. cent chez la population canadienne. Les communautés des Premières nations ont connu un taux de croissance de 2,5 p. cent, ce qui correspond à deux fois et demie le taux de croissance observé chez la population canadienne. Cela a un impact, évidemment, sur les écoles et sur le groupe d'âge qui fait son entrée sur le marché du travail. Je vais y revenir dans quelques instants.

    On observe la même dynamique en 2001. Le taux de croissance chez les communautés des Premières nations diminue quelque peu, mais il est toujours deux fois plus élevé que la moyenne canadienne.

    Passons maintenant à la croissance naturelle et à la croissance législative. Voici ce qui s'est en 1985.

    Si vous vous souvenez bien, la Charte canadienne des droits de la personne a reçu la proclamation royale le 17 avril 1982. Or, on a constaté, à ce moment-là, qu'une partie de la Loi de 1951 sur les Indiens allait à l'encontre de l'article 15 de la Charte, où il est question des droits à l'égalité. En vertu des modifications apportées à la Loi de 1951 sur les Indiens, quand un membre d'une Première nation épousait une non-Autochtone, les enfants issus de cette union gardaient le statut et étaient admissibles aux programmes. Toutefois, quand une femme membre d'une Première nation épousait un non-Autochtone, elle perdait son statut. Ses enfants étaient eux aussi privés de leur statut, en plus d'être jugés inadmissibles aux programmes, une situation qui allait tout à fait à l'encontre de la Charte.

    Le projet de loi C-31 a permis aux femmes des Premières nations qui avaient perdu leur statut par suite des modifications apportées aux règles de 1951 de récupérer celui-ci. Leurs enfants ont, eux aussi, récupéré le leur. Le nombre d'Indiens inscrits a augmenté. En fait, l'ensemble de la population a augmenté—on compte aujourd'hui environ 700 000 Autochtones. Les taux de croissance sont toujours les mêmes.

    J'aimerais faire deux autres commentaires. La population autochtone est beaucoup plus mobile que la population canadienne en général. J'ai parlé plus tôt du phénomène d'urbanisation qui s'est produit dans les années 90. M. Beavon s'est attaché à examiner la situation entre les recensements de 1991 et de 1996, et il a constaté que, même s'il y avait beaucoup de personnes qui déménageaient, il y avait plus d'Autochtones qui vivaient à l'intérieur des réserves en 1996 qu'en 1991. Nous avons cru pendant des années que la migration se faisait dans un sens, c'est-à-dire de la réserve à la zone urbaine, alors qu'en fait, ce n'était pas nécessairement le cas. Bien entendu, les gouvernements ont, au cours de cette période, investi beaucoup dans les infrastructures, dans les soins de santé, ainsi de suite.

    Cela dit, les deux derniers points sont très importants. Les Indiens inscrits déménagent souvent sur une période d'un an. Ils déménagent pour plusieurs raisons--parce qu'ils veulent faire des études supérieures ou trouver un emploi, parce qu'ils vivent une situation familiale difficile à l'intérieur de la réserve. Or, quand vous arrivez dans une ville et que vous constatez que les logements coûtent trop cher, vous déménagez trois ou quatre fois et ensuite vous retournez dans votre communauté.

    Ce barattage est très difficile, surtout pour les jeunes de Winnipeg—ils vont quitter la même école cinq ou six fois pendant l'année. Je voulais attirer votre attention sur ce point. Bien entendu, cela crée toutes sortes de problèmes au niveau de la prestation des programmes, des soins de santé, toutes des choses que les gens qui ne se déplacent pas tiennent plus ou moins pour acquis.

Á  +-(1130)  

    J'aimerais faire un dernier commentaire à ce sujet. La population autochtone connaît une forte croissance. Elle est mobile et beaucoup plus jeune. On le voit beaucoup mieux sur papier: la ligne jaune représente la pyramide d'âge de la population canadienne, qui est beaucoup plus âgée que la population autochtone. La pyramide verte, ici, représente les cohortes d'âge pour les hommes, les femmes, les jeunes garçons et les jeunes filles des Premières nations. Prenons, par exemple, le groupe des cinq à neuf ans. Il est assez symétrique. Environ 3,5 p. 100 de la population canadienne est composé de jeunes garçons ou de jeunes filles qui se retrouve dans cette cohorte d'âge. Or, comme l'indique la pyramide verte, les Premières nations comptent deux fois plus de jeunes garçons âgés entre cinq et neuf ans. Il en va de même pour les jeunes filles.

    Si on passe à la cohorte des 10 à 14 ans, on constate que le nombre de pré-adolescents et de jeunes adolescents est 80 p. 100 plus élevé chez les Premières nations. Il y a convergence chez les 15 à 19 ans qui commencent à entrer sur le marché du travail, sauf que le nombre de jeunes Autochtones est 50 p. 100 plus élevé.

    Par contre, pour revenir au tableau d'espérance de vie que nous vous avons montré plus tôt, si nous étions remonté plus loin en arrière, les chiffres auraient été beaucoup moins élevés. Cela m'amène à faire trois constatations qu'il serait bon de garder à l'esprit.

    D'abord, le nombre d'élèves depuis la prématernelle jusqu'à la 12e année est beaucoup plus élevé chez les Premières nations que chez les non-Autochtones.

    Deuxièmement, le nombre de personnes qui font leur entrée sur le marché du travail est nettement plus élevé. C'est là un facteur important quand on songe aux départs à la retraite qui s'annoncent pour les membres de la génération du baby-boom, phénomène qui va entraîner certaines conséquences. Prenons l'exemple de la Saskatchewan ou du Manitoba, où la population autochtone—y compris les Métis, les Indiens non inscrits et les membres de Premières nations—représente 13 p. 100 de la population de la province. Si la population de la province est relativement stable, songez à tous les employés d'Hydro-Manitoba, de Sasktel ou des autres grandes entreprises qui vont prendre leur retraite au cours des 10 années à venir et demandez-vous où vous allez puiser votre main-d'oeuvre.

    Troisièmement, au fur et à mesure que cette population jeune et sans cesse croissante fait son entrée sur le marché du travail et commence à vieillir, les coûts liés aux soins de santé pour les personnes âgées vont, pour la première fois, augmenter de façon marquée chez les Autochtones. Par exemple, mes collègues de la santé me disent que c'est entre 65 et 75 ans que les coûts liés aux soins de longue durée, aux soins de santé généraux et aux soins actifs augmentent. La même chose va se produire chez les Premières nations, sauf que c'est entre 60 et 70 ans, ou entre 55 et 60 ans, et non entre 65 et 70 ans, comme c'est le cas chez les non-Autochtones, que les coûts vont commencer à augmenter. Donc, les pressions vont se faire sentir sur tous les groupes d'âge de la population autochtone.

    Pour résumer, les Premières nations comptent environ 700 000 membres, dont 60% vivent à l'intérieur des réserves, et 40%, à l'extérieur. La taille des collectivités varie grandement, ce qui veut dire que les dirigeants des Premières nations, les décideurs, les fournisseurs de services doivent composer avec une situation où la population autochtone, tout comme la population non-autochtone, vit dans toutes sorte de milieux, des milieux aussi bien très urbanisés que des éloignés. Par ailleurs, si l'écart socio-économique diminue, il est encore trop tôt pour crier victoire. Enfin, il s'agit de l'un des segments les plus mobiles, les plus jeunes et dont la croissance est la plus rapide. Ce phénomène démographique—peut-être pas à l'échelle nationale, mais de plus en plus à l'échelle provinciale et régionale—va avoir un impact énorme sur notre main-d'oeuvre.

    Je vais m'arrêter ici.

+-

    Le président: C'est très intéressant, c'est vraiment le coeur du problème auquel nous nous intéressons. Nous devons être conscients de la situation. Je tiens à vous remercier pour cette excellente présentation.

    Je ne doute pas que nous ayons d'autres choses à dire; moi du moins, c'est certain. Cependant, nous allons passer aux questions. Nous essaierons de nous limiter à cinq minutes, chers collègues. Si vous les dépassez, je ne vous interromprai pas mais je vous demanderais de ne poser qu'une question, et nous ferons le tour autant de fois qu'il le faudra. Plutôt que de poser quatre ou cinq questions, n'en posez qu'une. Je vous donnerai toutes les occasions que vous voudrez de poser les autres.

    Monsieur Elley.

Á  +-(1135)  

+-

    M. Reed Elley (Nanaimo--Cowichan, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je tiens moi aussi à vous remercier personnellement d'être venu devant notre comité aujourd'hui. Je pense qu'il y a certaines choses que nous avions déjà entendues, mais il est bon d'avoir tout cela en un résumé condensé auquel nous pouvons nous reporter.

+-

     Je m'inquiète énormément, comme, j'en suis sûr, la plupart des Canadiens, des conditions de vie des Autochtones sur les réserves; c'est pourquoi les statistiques que vous avez présentées sur l'assistance sociale m'ont semblé très intéressantes. Je ne suis pas tout à fait sûr de comprendre comment vous êtes parvenu à ce chiffre particulier. Par assistance sociale, entendez-vous les gens des réserves qui reçoivent ce que nous pourrions appeler des prestations d'aide sociale dans la population en général, et les taux sont fondés sur ceux des provinces où se trouvent ces réserves? Si c'est le cas, si c'est le critère que vous appliquez, pourquoi 90 p. 100 des Autochtones des provinces de l'Atlantique vivent-ils de l'aide sociale, comparativement à 27 p. 100 dans ma province, la Colombie-Britannique? Pourriez-vous étoffer un peu cela pour nous aider à mieux cerner la situation?

+-

    M. John Sinclair: Je laisserai Pierre Gauvin expliquer les calculs techniques. En gros, ce que vous avez dit est assez juste dans le sens où, lorsque nous parlons d'assistance sociale, il s'agit bien des bénéficiaires d'aide sociale. Je pense que c'est aussi les bénéficiaires des services de bien-être de l'enfance et des familles, mais en gros, c'est une dépense d'assistance. Nous nous appuyons effectivement sur les taux des provinces.

    Comme je l'ai dit plus tôt, monsieur, en examinant ces fluctuations régionales, il faut tenir compte de la conjoncture économique en général. Par exemple, le contraste entre la Colombie-Britannique et la région de l'Atlantique est assez intéressant. Vos réserves de la Colombie-Britannique sont plus grandes et plusieurs ont d'importantes ressources. La première nation Westbank est à proximité d'une ville et a des revenus de location et d'impôt. Aussi, s'il fallait faire une ventilation, l'on constaterait un taux d'emploi nettement plus élevé en Colombie-Britannique, tandis que dans le Canada atlantique, l'économie est généralement plus modeste. Je pense que la diapositive que j'ai projetée montrait un taux de chômage plus élevé.

    Quelle qu'en soit la raison, il y a plus d'Autochtones du Canada atlantique qui vivent en réserve qu'en ville. C'est là qu'il faut être plus précis, et mes connaissances sont limitées sur la question mais en général, les réserves des Premières nations du Canada atlantique sont de dimensions plus restreintes. Elles n'ont pas la même base de ressources. Il y a des réserves, en Alberta, en Saskatchewan et en Colombie-Britannique qui ont d'importants gisements de pétrole et de gaz. Lorsque l'on met tout cela ensemble, l'on peut probablement constater qu'il s'agit d'une économie plus restreinte. Le taux de chômage est plus élevé au Canada atlantique.

    De plus, si l'on examine l'aspect de l'entrepreneuriat autochtone, l'Alberta, actuellement, est un foyer d'activité économique et de coentreprise, avec les compagnies pétrolières et ce genre de choses. Il y a diverses combinaisons de projets dans tout le pays. Il n'y en a pas beaucoup au Canada atlantique, alors les occasions d'emploi sont plus limitées, les opportunités d'entrepreneuriat ne sont pas développées. La base de la réserve elle-même n'est pas aussi vaste.

    Alors, c'est une combinaison de tout cela. Il n'y a pas une raison particulière, mais cela vous donne une idée du contexte.

+-

    M. Reed Elley: Je vous remercie.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Marceau.

+-

    M. Richard Marceau (Charlesbourg--Jacques-Cartier, BQ): Merci, monsieur le président.

    Depuis plusieurs années, il y a un débat sur l'autodétermination des premières nations. C'est un concept que mon parti, le Bloc québécois, appuie assez fermement, même très fermement. Est-ce qu'il y a des chiffres ou est-ce que vous avez des chiffres qui indiquent que plus une nation autochtone est autonome, plus les indicateurs que vous utilisez, c'est-à-dire l'indice de développement humain, la scolarité, l'espérance de vie, etc., sont meilleurs dans cette nation autochtone qu'ils peuvent l'être dans des nations qui sont davantage dépendantes du gouvernement fédéral?

Á  +-(1140)  

+-

    M. John Sinclair: Permettez-moi de vous répondre en anglais.

[Traduction]

    Il n'y a pas eu d'analyse systématique de la question mais il y a des preuves non scientifiques. Par exemple, la Première nation Sechelt, en Colombie-Britannique, qui a une forme d'autogouvernement depuis 1986, affiche une économie très dynamique et d'excellents indicateurs socio-économiques. Si je me souviens bien, je crois que c'était en juin 2000 que Stephen Cornell, de l'University of Arizona, est venu devant ce comité pour parler de la recherche qu'avait fait son université auprès de bandes amérindiennes particulièrement bien gouvernées et dans les activités desquelles le Bureau des affaires indiennes n'intervient vraiment pas. Ces bandes amérindiennes, dont la Première nation Navaho et plusieurs autres, ont un bien meilleur rendement au plan du développement économique et affichent des résultats nettement supérieurs au plan de la qualité de vie.

    Je pense qu'il convient aussi de souligner que pendant les années 90, il y a eu un changement énorme dans le mode de prestation des services dans les collectivités des Premières nations. En 1985, notre ministère avait probablement 7 500 employés. Nous assumions la livraison des chèques d'aide sociale, de l'enseignement, etc. Au cours des années 90, nous avons délégué tout cela, ce qui fait que maintenant, ce sont les administrations des Premières nations qui s'en occupent elles-même. Elles dirigent elles-même leurs autorités de logement, et cette participation locale et cette auto-administration, qu'elles découlent de la Loi sur les indiens ou d'accords d'autodétermination comme l'accord Nisga, ont stimulé la fierté dans la propriété et a accru le rendement des programmes.

    Alors je pense qu'on peut généralement soutenir l'argument ainsi, mais pour ce qui est d'analyses statistiques pour le prouver, nous n'en sommes pas encore là.

+-

    Le président: Madame Grey.

+-

    Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, PC/RD): Merci beaucoup.

    Et merci d'être venu ici nous faire cette présentation.

    J'ai l'impression que nous sommes en train de faire un examen de la Loi sur les indiens, puisque nous parlons de cette question de gouvernance. Ces trousses d'information paraissent extraordinaires. Est-ce qu'elles viennent de vos gens, ou est-ce autre chose qu'on nous a remis? J'ai un peu de difficulté à combiner les deux séries de documents. Votre présentation est excellente, mais je présume d'après ceci que nous allons devoir faire quelque chose au sujet des règles de gouvernance. Alors peut-être puis-je demander d'où cela vient?

+-

    Le président: Je viens seulement d'en avoir mon exemplaire, quand vous en avez parlé.

+-

    Mme Deborah Grey: Non, je comprends bien, mais j'aimerais savoir d'où ils viennent?

+-

    M. John Sinclair: Oui, je peux vous l'expliquer.

+-

    Mme Deborah Grey: Cela fait partie de tout le reste. C'est parfait.

+-

    M. John Sinclair: C'est pour la prochaine présentation, sur l'initiative de gouvernance des Premières nations.

    Mme Deborah Grey: Je comprends.

    M. John Sinclair: C'est pourquoi ça été remis en même temps, pour ne pas ennuyer...

+-

    Mme Deborah Grey: Parfait. C'est bien. Nous sommes impatients d'entendre cela aussi, alors. C'est parfait.

    Au sujet de ces aperçus, je pense que si nous regardons de près la question de la poussée démographique de la population, je suis l'un de ces baby boomers, et je m'étonne que tout le monde ait su, au gouvernement, que nous allions être là, en fait, depuis 50 ans pour moi, et mes soeurs aînées ont de l'avance sur moi... Nous avons ces données statistiques, ici, selon lesquelles ces jeunes gens, qu'ils vivent sur les réserves ou hors d'elles, constituent une énorme poussée démographique. Les statistiques, c'est bien beau mais qu'allons-nous en faire en fin de compte?

    J'ai enseigné dans une réserve du nord de l'Alberta, alors je suis assez déterminée à veiller à ce que les jeunes gens, à leur sortie du système scolaire, d'abord, aient un emploi et, ensuite, lorsqu'ils auront travaillé toute leur vie, le moment venu de prendre leur retraite en même temps que tout le monde qui a fait partie de cette incroyable explosion démographique... Pouvez-vous faire des recommandations au gouvernement, ou y a-t-il quelqu'un qui réfléchit à ce qui pourrait se profiler à l'horizon? Si vous regardez les coûts des soins de santé, du logement, de l'habitation, des caisses de retraite, et tout cela, il y aura une explosion, ici, pour nous, qui avons 30 ans d'avance sur la forte population de jeunes Autochtones. Quel genre de prévision est faite, et je ne parle pas d'un mignon petit plan quinquennal, mais d'un plan sur 35 ou 40 ans?

Á  +-(1145)  

+-

    M. John Sinclair: Je ne suis pas sûr que quiconque ait formellement conçu un plan sur 35 ans, mais je comprends très bien le sens de votre question.

    Permettez-moi de vous exposer mon point de vue. Je suis au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien depuis 1993, et je me suis occupé pendant un temps des négociations relatives aux revendications, alors j'aborde ce sujet d'après mon expérience.

    Au sujet de votre question sur les prévisions, madame Grey, à cette époque, entre 1985 et 1995, il se passait plusieurs choses. Il y avait beaucoup de gens qui se préoccupaient de la mise en place des services de base. Je pense que si vous revenez sur le début des années 80, nous avons eu quatre conférences sur les affaires constitutionnels des Autochtones en cinq ans. Et puis, si vous vous souvenez bien, il y a eu la crise d'OKa. C'est donc que l'on a beaucoup insisté sur ce qu'on pourrait appeler les enjeux des droits. C'était très important, et je ne pense pas que cela ait été une erreur de nous intéresser à ces préoccupations.

    Au cours des années 90, beaucoup de gens ont pu dire, d'une façon ou d'un autre, on constate un certain engagement dans le dossier des droits, revenons aux enjeux de la qualité de vie. C'est alors que des intervenants de divers domaines ont commencé à sortir des chiffres. Par exemple, mon collègue, Dan Beavon, a entamé une bonne part de ces travaux au milieu des années 90. Santé Canada faisait ce type de travail.

    Je pense que ce qui est vraiment très intéressant, par exemple, c'est que les gouvernements provinciaux—ceux de la Saskatchewan et du Manitoba—faisaient déjà de ces espèces de projections démographiques dès le milieu des années 90. La Federation of Saskatchewan Indian Nations l'a fait. J'étais à Calgary il y a deux semaines, à une conférence parrainée par la National Aboriginal Achievement Foundation—John Kim Bell.

+-

     Il y a toute sorte de sociétés du secteur privé, dans l'ouest du Canada, qui font se genre de projections. Elles observent le renouvellement de la main-d'oeuvre. Les compagnies de pipeline, en Alberta, et les compagnies hydroélectriques de la Saskatchewan créent des coopératives de travailleurs et commencent à participer aux activités de placement et de formation professionnelle. C'est donc que c'est en train d'arriver. Ce peut être inégal entre les régions. Je pense que dans l'ouest du Canada, avec les opportunités démographiques et économiques, et le renouvellement des générations, tout le monde y participe et le tout suscite beaucoup d'intérêt et d'activité.

+-

    Le président: Monsieur St-Julien, vous avez la parole.

[Français]

+-

    M. Guy St-Julien (Abitibi--Baie-James--Nunavik, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Ma question sera précise. Je ne suis pas satisfait du tout de votre rapport. Il y de belles couleurs, mais je ne suis pas satisfait du tout. Je vais vous dire pourquoi.

    Vous mentionnez ici, à la page 10, l'aide sociale. C'est plus profond que ça. Il y a 612 collectivités chez les premières nations et il y en a 49 chez les Inuits. Vous dites que les indicateurs économiques viennent de Statistique Canada. Vous savez que Statistique Canada a fait un rapport sur la dépendance économique dans la perspective des transferts canadiens aux provinces, notamment le Québec, des accidents de travail, de l'aide sociale et ainsi de suite.

    Je vais vous donner un exemple. À Kuujjuaq, sur un montant de 100 $, il y a un transfert de 26,10 $ des gouvernements du Canada et du Québec. Dans la ville de Val-d'Or, au sud, ce transfert est d'environ 22 $ pour 100 $.

    Ce rapport-là existe. Je suis surpris qu'il n'ait pas été déposé en même temps que le vôtre. Vous faites mention de l'aide sociale, mais c'est plus profond que cela. Il n'y a pas seulement l'aide sociale. Il y a la prestation fiscale pour enfants, les accidents de travail et ainsi de suite. Cela existe et je vais vous dire pourquoi.

    Il s'agit du rapport de 1999 et le prochain rapport sortira en août 2002. Ce sera le rapport de l'an 2000 qui va sortir. Pourquoi est-ce que je vous parle de cela? C'est important parce qu'on sait que dans les premières nations, il y a des gens qui ne paient pas d'impôt, alors que les Inuits du Nunavik en paient.

    Vous parlez de l'aide sociale et vous dites qu'il y a 612 collectivités des premières nations et 49 communautés inuits. Il y a là une différence. Les membres du comité ont besoin de recevoir le rapport de Statistique Canada de 1999 sur toutes les premières nations et surtout sur les Inuits, afin de vraiment savoir ce qu'est la dépendance économique, et pas juste l'aide sociale. C'est là qu'on va vraiment voir la situation de chaque collectivité autochtone au Canada. Je pense que M. Gauvin doit connaître ce livre. J'ai dû prendre 349 $ de mon budget de député pour obtenir la partie de ce rapport concernant toute ma région. C'est là qu'on voit vraiment les changements.

    À la page 12, vous parlez des problèmes de logement. Vous dites que 22 p. 100 des logements dans les réserves comptent plus d'une personne par pièce, mais vous ne nous dites pas combien il y a de personnes par pièce. Dans certains cas, six, sept, huit ou même neuf personnes vivent dans une même pièce. Il faudrait aussi nous dire quelle est la grandeur de la pièce. Je sais qu'il existe des pièces de 10 pieds par 12 pieds où vivent huit personnes durant l'hiver.

Á  +-(1150)  

+-

    Le président: En toute justice, on demande à des témoins de nous faire une présentation d'une quinzaine de minutes et ils vont revenir le 26. Vous devez être raisonnable. Vous avez l'occasion de poser toutes vos questions, et il est un peu prématuré de critiquer la présentation parce qu'on est au tout début de notre étude.

+-

    M. Guy St-Julien: Oui, je le sais, mais j'aime mieux frapper au début parce que je pense que mon intervention est bonne. On ne comprend pas. Vous nous mentionnez l'aide sociale. Cela va donner aux gens l'impression que l'aide sociale paie les autochtones et les Inuits. Chaque membre du comité veut obtenir le rapport sur la dépendance économique qui a été préparé par Statistique Canada en 1999, s'il vous plaît. Cela va nous renseigner non seulement sur l'aide sociale, mais sur tous les aspects.

+-

    Le président: Monsieur St-Julien, si vous voulez que des gens de Statistique Canada viennent témoigner, c'est possible. Soyons raisonnables. Il ne faut pas en demander trop. Ça ne fait même pas une heure qu'on est ensemble. On va passer trois ou quatre mois sur ce sujet-là. Nous devons vraiment être raisonnables. Allez-y si vous avez une question.

+-

    M. Guy St-Julien: Je déposerai le rapport que j'ai auprès du comité.

[Traduction]

+-

    M. John Sinclair: Je suis conscient des limites de cette présentation. On m'a bien dit que ce serait sur les collectivités des Premières nations seulement. Je pense avoir dit dans le cadre de ma présentation que certains des problèmes de logement sont assez extraordinaires. Vous pourriez passer deux ou trois heures rien qu'à parler de toute la question de la dépendance de divers facteurs. Nous aurions pu entrer dans les sujets comme celui du nombre d'enfants mis sous garde préventive. Il y a toute une gamme d'enjeux.

    Monsieur Bonin, si c'est le genre de choses que veut le comité, je laisserai la parole à l'une de mes collègues qui passe beaucoup de temps, en tant que sous-ministre adjointe, sur ces programmes sociaux. Il y a beaucoup de facteurs à examiner dans le domaine.

+-

     J'essayais seulement de vous donner un aperçu, dans cas, du sommet de la montagne sur les situations des taux d'assistance sociale et de chômage. Je pense que tout le monde comprend que ce sont des indicateurs raisonnables de la conjoncture.

    Mais vous avez raison, monsieur, au sujet du logement, c'est en soi un sujet extrêmement complexe dont nous pourrions parler indéfiniment, mais je pense que je m'en tiendrai là pour l'instant.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Monsieur le président, j'aimerais revenir à la présentation qu'on a faite. Ma question est très simple. À la page 10 de votre présentation, vous avez ventilé le taux de dépendance envers l'aide sociale par région ou encore par province. Est-ce qu'il vous serait possible, lors de votre prochaine visite, le 26, de faire la même chose pour les autres indicateurs que vous avez, c'est-à-dire l'urbanisation, l'indice de développement humain, la scolarité, l'espérance de vie et l'âge?

[Traduction]

+-

    M. John Sinclair: Permettez-moi de faire une mise en garde. Il faudrait que je détermine avec mon collègue ce que nous pourrions faire, et ce qu'il est possible de faire d'ici au 26. Je soupçonne que nous ne le puissions pas, mais si c'est possible, il faudra pour cela examiner les statistiques de Statistiques Canada et tout le reste.

    Nous pourrions faire une version régionalisée de cette présentation ou de certains de ces aspects, mais j'hésiterais à m'engager à le faire pour le 26.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Si ce n'est pas possible pour le 26, est-ce que ce le sera avant la fin de notre étude, qui durera trois ou quatre mois?

+-

    Le président: D'accord.

+-

    M. Richard Marceau: Dans le débat sur l'autodétermination des premières nations, il y a évidemment un facteur économique très important: la nécessité de se prendre en main, le développement économique au niveau local, etc. Mais il y a aussi le côté culturel qui est très important. Avez-vous des chiffres sur ce que j'appellerais le pourcentage de rétention de l'homme autochtone par nation ou encore par région? C'est un enjeu qui est très important pour plusieurs premières nations que j'ai rencontrées. Donc, premièrement, est-ce qu'on a les chiffres et, deuxièmement, qu'est-ce que le ministère des Affaires autochtones et du Nord canadien fait pour encourager la rétention et empêcher la disparition de cet important patrimoine culturel que sont les langues autochtones?

Á  +-(1155)  

[Traduction]

+-

    M. John Sinclair: Permettez-moi de donner plusieurs réponses. Je laisserai la parole à M. Bevan dans un instant, mais si je me souviens bien, Statistique Canada a fait une analyse de la préservation des langues, et je pense que nous pourrions probablement remettre ce rapport au comité.

    Une voix: Oui.

    M. John Sinclair: Cela a donc été fait, et je pense que ce que dira ce rapport, c'est que plusieurs de ces langues sont en danger, en raison du nombre de personnes qui les parlent. Il y a peut-être cinq ou six groupes de langues qui ont une masse critique d'utilisation et de population. C'est donc un élément.

    La deuxième chose, c'est qu'alors que nous allons au-delà du concept de prestation des services de base et que nous commençons à comprendre comment certains programmes réussissent mieux, nous commençons aussi à découvrir, par exemple, dans les écoles, que si les enfants qui sont élevés dans une collectivité crie peuvent avoir une partie de leurs classes, de la maternelle à la 4e année, en cri, ils se reconnaissent dans le système scolaire; et ils sont beaucoup plus efficaces. Il y a une recherche qui est en cours actuellement, justement sur cette question. Je ne sais pas dans quelle mesure elle est publiée, mais il est certain qu'il y a des gens qui examinent la question.

    Pour ce qui est des programmes axés sur la préservation des langues, les Affaires indiennes y participent principalement par le biais du système scolaire—autrement dit, qu'est-ce qui fait un système scolaire de première nation plus efficace? La langue en est un élément, mais en gros, le mandat du programme, au plan du soutien linguistique, relève de Patrimoine Canada. Le ministère collabore avec nous, dans le cadre d'un partenariat, mais c'est lui qui détermine l'orientation des politiques en la matière.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Avez-vous un accord d'autodétermination avec une nation en particulier? Y a-t-il un genre de programme de rétention des langues administré conjointement par vous et par Patrimoine Canada, et dévolu à la nation locale pour faire en sorte qu'elle s'occupe du développement?

[Traduction]

+-

    M. John Sinclair: Il faudra que nous nous renseignions sur la question dans notre propre ministère, et à Patrimoine Canada. Rien ne me vient à l'esprit, mais ce n'est pas un domaine d'expertise pour moi. Je soulignerais en passant, par exemple, que la revendication territoriale globale et l'entente finale des Nisga'a comportent des dispositions relatives à l'utilisation de la langue Nisga'a, et dans la plupart des accords d'auto-détermination, c'est généralement négocié et fait partie de l'accord final.

    Alors il est clair que la langue joue un rôle tant dans la prestation des services, et particulièrement l'éducation, et aussi dans les négociations relatives à l'auto-détermination. Je peux m'engager à essayer de rassembler de l'information là-dessus et de vous la fournir, monsieur le président. Je ne sais pas quand nous pourrons le faire, mais nous en ferons une priorité et verrons ce que nous pouvons faire. D'accord?

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Mme Karetak-Lindell.

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Merci.

    Je regarde aussi la page 10, mais j'ai des observations plutôt que des questions. Par exemple, lorsque je vois des pourcentages comme 90 p. 100 et plus dans l'Atlantique et 27 p. 100 en Colombie-Britannique, j'en viens à la conclusion que plus les traités sont récents et plus la population a participé à l'établissement d'un règlement, plus on peut déterminer si cette population est davantage autosuffisante ou non.

    En Colombie-Britannique, nous savons que les traités sont plus modernes et que la population a plus l'occasion de faire valoir son point de vue au moment de la conclusion des accords. J'aimerais aussi pouvoir penser que ces facteurs se reflètent dans le nombre de personnes qui ont présentement recours à l'aide sociale.

    En ce qui concerne la discussion portant sur la gouvernance, il serait intéressant d'avoir une carte du Canada indiquant à quels endroits les différents traités ont été établis. Je crois que bon nombre d'entre nous, pour qui cette question ne fait pas partie du quotidien et qui ne connaissons pas tous les faits, devons nous en remettre à l'information qui nous est fournie. Si je savais quels traités ont été signés, quand et dans quelle région du Canada, il me semble que je comprendrais mieux ce dont nous parlons. Nous examinons cette question dans une perspective nationale, mais je sais que chacun de ces traités est tout à fait distinct. Je crois que c'est la raison pour laquelle nous en sommes là aujourd'hui.

    Mais par dessus tout, je ne soulignerai jamais assez le fait qu'en tant que peuples autochtones, nous voyons les études se succéder sans qu'il n'y ait jamais de résultat réel. Je crois que le moment est venu d'agir concrètement et de prendre des mesures tangibles auxquelles les membres des collectivités pourront donner suite.

    Vous avez parlé quelque peu des besoins fondamentaux. Chaque fois que j'en ai l'occasion, j'en parle. Aussi longtemps que les besoins fondamentaux en matière de santé et de logement ne seront pas comblés, il sera difficile pour les populations de voir plus loin et de concentrer leurs efforts sur les études supérieures et l'esprit d'entreprise. Il faut donc tenir compte de ce fossé.

    Comme je vous le disais, ce ne sont que des commentaires, mais je crois qu'il serait utile que nous puissions savoir quels traités ont été signés, quand ils l'ont été et dans quelles régions du pays.

  +-(1200)  

+-

    M. John Sinclair: Monsieur le président, je...

+-

    Le président: Avant que vous ne poursuiviez, j'aimerais dire que je comprends très bien les commentaires que vous avez faits. Toutefois, j'aimerais savoir de quelle manière la Loi sur les Indiens empêche—le cas échéant—les collectivités de devenir prospères ou de résoudre certains de leurs problèmes? Est-ce que la Loi sur les Indiens est un obstacle à la qualité de vie? Nous devrons éventuellement discuter de la Loi sur les Indiens et des gouvernements.

    Allez-y, monsieur Sinclair.

+-

    M. John Sinclair: Si vous m'accordez une minute, j'aimerais vous montrer une diapositive qui indique quand les traités ont été signés. Il faut une minute ou deux pour la faire apparaître.

    Mais j'aimerais répondre à une partie de la question. Vous découvrirez en regardant la carte que, fondamentalement, aucun traité relatif aux terres n'a été signé dans la région de l'Atlantique, tandis que vers l'ouest à partir de la tête des Grands Lacs... La voilà.

    Regardez, des traités de paix et d'amitié ont été signés dans la région de l'Atlantique pendant que les dirigeants des colonies françaises et britanniques—les Britanniques venant de la Nouvelle-Angleterre et les Français venant du Québec—se servaient principalement de la région de l'Atlantique comme terrain de combat. Si vous réussissez à convaincre le professeur Leslie de vous rendre visite, vous verrez qu'il en sait beaucoup plus que vous et moi à ce sujet. En réalité, les traités de paix et d'amitié étaient principalement des traités de non-agression: nous ne nous battrons pas contre vous; vous n'attaquerez pas nos colonies; nous n'attaquerons pas vos colonies de peuplement; et nous ferons du commerce ensemble. Mais ces traités ne prévoient rien en ce qui concerne la cohabitation, et encore moins en ce qui concerne le partage des terres et tout le reste.

    À partir du traité du Haut-Canada, du traité Robinson-Supérieur et du traité Robinson-Huron, les traités ne sont pas numérotés. Lorsque les colons—les loyalistes de l'Empire-Uni—sont arrivés, ces traités ont été signés pour réserver des terres pour l'usage exclusif des Premières nations, d'où le mot «réserve». Tout cela s'est fait dans le contexte de la Proclamation royale de 1763, qui stipulait que seul la Couronne pouvait acheter ou acquérir des terres des Premières nations. C'est ce qui a déclenché la Révolution américaine, parce que les colons américains n'étaient pas d'accord, ils voulaient se procurer ces terres, les acheter, mais la Couronne ne le voulait pas, car elle voulait contrôler la croissance.

    Ensuite, des traités numérotés ont été signés. Dans un certain sens—et Mme Grey sait de quoi je parle—des réserves ont été ainsi créées, mais du point de vue des Premières nations, ces traités ont été négociés entre les commissaires aux traités et les représentants. Par exemple, en Alberta, les Premières nations croient que les traités sont le fondement de l'Alberta. Elles croient qu'une relation permanente existe—la capacité d'utiliser ces terres à des fins traditionnelles. Donc, le dialogue était beaucoup plus intégré, même s'il est évident qu'il s'agissait d'un dialogue colonialiste et qu'il y avait un déséquilibre du pouvoir. Mais c'est le genre de discussions qui a eu lieu.

    Lorsqu'il n'y a pas de traité numéroté sur la carte, cela veut dire que des négociations sur les revendications globales ont lieu parce que, en Colombie-Britannique—et la Cour suprême a été très claire à ce sujet—où aucun traité de cession des terres n'était signé contrairement aux Prairies et où les titres et droits ancestraux non éteints existaient toujours, il fallait négocier. C'est ce qu'ont fait les Nisga'as, et je sais que votre comité connaît très bien ce traité.

    Sept ou huit des 14 Premières nations du Yukon ont maintenant des ententes sur les revendications globales et sur l'autonomie gouvernementale, et les autres Premières nations s'efforcent aussi d'obtenir de telles ententes. Je crois que la Fédération Tungavik du Nunavut représente la plus grande entente sur une revendication territoriale jamais négociée au monde. C'est ainsi que le Nunavut a été créé.

    D'une façon ou d'une autre, soit il existe déjà un traité plus traditionnel—un traité numéroté—soit une nouvelle entente sur des revendications globales. Dans le nord-est du Québec, sur la Côte-Nord, les revendications des Montagnais font l'objet de négociations. Il y a aussi l'entente Labrador-Inuit dans le nord et sur les côtes centrales du Labrador. Ce sont des processus qui permettent de créer une relation, de présenter des demandes, de partager des ressources et de règlementer certaines questions. Les traités occupent donc une place importante.

    La première partie de toute cette histoire, qui s'est déroulée dans la région de l'Atlantique, a été oubliée pour diverses raisons. C'est pourquoi la décision Marshall est si importante, puisqu'elle déclare que ces traités de paix et d'amitié visent des droits qui sont contemporains; donc, comment régler la question des droits de pêche ancestraux et tout le reste?

  +-(1205)  

    Mais vous avez raison. Certaines parties du pays ont déjà négocié—ou sont en train de le faire—des formes différentes de modus vivendi entre une première nation et le gouvernement fédéral. Par exemple, en Colombie-Britannique, ces négociations incluent le gouvernement provincial, qui est aussi un signataire.

    En quoi cela concerne la qualité de vie? Il existe de nombreux liens complexes, mais l'Atlantique est une région où le gouvernement provincial, le gouvernement fédéral et les Premières nations se penchent sur l'ensemble de cette question. S'agit-il d'une revendication globale? Comment établir des relations? Comment faire pour partager les ressources, que ce soit les ressources forestières au Nouveau-Brunswick ou les ressources de la pêche au Nouveau-Brunswick ou en Nouvelle Écosse? Ces ententes servent à bien définir ce genre de relations, et je crois qu'elles ont toujours des incidences sur la qualité de vie.

+-

    Le président: Madame Grey.

+-

    Mme Deborah Grey: J'ai aimé votre exposé. Je crois que lorsqu'on exagère, il faut faire face à la réfutation de ses arguments. Mais nous reparlerons de cela une autre fois, lorsqu'il sera présent.

+-

    Le président: Je suis d'accord.

+-

    Mme Deborah Grey: À la page 14, vous parlez de mobilité. C'est ce que nous vivons en Alberta, la province d'où je viens et celle que je connais le mieux. Je suppose qu'il existe une certaine controverse, mais aussi un certain malaise vis-à-vis du statut des Indiens inscrits vivant dans les réserves et à l'extérieur comme le définit le projet de loi C-31. Évidemment, c'est toujours difficile parce qu'il y a des enjeux financiers et parce que le logement et l'approvisionnement en eau doivent aussi être pris en considération lorsque des gens désirent retourner vivre dans la réserve. Ce sont des questions délicates, et je ne sais pas si vous trouverez des solutions. Toutefois, on se rend compte qu'il s'agit d'un nombre assez élevé de personnes.

    Sur le plan sémantique, il y a une partie de la page 14 que je ne comprends pas, et peut-être pourrez-vous me l'expliquer. On dit que «les réserves présentent un gain migratoire pour la période 1991-1996 et qu'il en est ainsi depuis 1966». S'il en est ainsi depuis 1966, pourquoi parle-t-on de la période de 1991 à 1996? Il y a certainement quelque chose que je ne comprends pas.

+-

    M. John Sinclair: Cela ne relève plus de mes compétences et j'aimerais demander à M. Beavon de répondre à votre question. Il s'agit de personnes visées lors de deux recensements. Je demanderais donc à Dan de répondre à votre question.

+-

    Mme Deborah Grey: Avez-vous entendu ma question? S'il en est ainsi depuis 1966, pourquoi parle-t-on de la période de 1991 à 1996?

+-

    M. Dan Beavon (directeur stratégique intérimaire, Direction de la recherche et des analyses, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Nous disposons d'autres recherches qui démontrent les tendances à partir de 1966. Nous avons mis l'accent sur la période de 1991 à 1996, parce que ce sont les données de recensement les plus récentes dont nous disposons. Lors du recensement de 1996, comme pour tous les autres recensements, on demandait aux gens où ils vivaient cinq ans plus tôt. Grâce à cette question, nous pouvons déterminer s'ils ont déménagé ou non.

    L'information présentée ne se rapporte qu'aux données de recensement les plus récentes, mais dans les recherches que nous avons, nous illustrons des tendances très claires depuis 1966. Pour chaque année de recensement depuis 1966, nous constatons un gain migratoire net vers les réserves. On calcule ce gain en soustrayant la migration d'entrée de la migration de sortie. Ces résultats sont contraires à l'opinion publique reçue selon laquelle on a assisté à un exode massif de la population des réserves vers les centres urbains.

  +-(1210)  

+-

    Mme Deborah Grey: C'est d'accord. Je suis prête à modifier cette phrase dans ce sens.

    À la page 11—Nancy, pour en revenir à vos propos—comment peut-on discuter d'éducation postsecondaire quand un enfant ne se nourrit pas correctement et qu'il ne va pas à l'école? Guy parlait de surpeuplement. Quand on est dans cette situation, la dernière chose à laquelle on pense, c'est d'aller à l'école.

    Je vivais à Fort Chipewyan, dans le nord de l'Alberta, en 1977, quand la télévision est arrivée. Elle a transformé la communauté à jamais. Du jour au lendemain, les enfants ont cessé d'aller à l'école, parce qu'ils étaient rivés sur leur petit écran. Dans le système scolaire, nous l'avons bien vu.

    Ceci mis à part, je ne critique nullement la télévision. Mais si vous n'allez pas à l'essentiel, si vous ne buvez pas de la bonne eau, si vous ne prenez pas trois repas par jour, si vous ne dormez pas correctement la nuit parce que vous êtes trop nombreux à partager la même chambre—ce n'est pas une situation courante, mais cela arrive parfois—votre santé se dégrade; c'est terrifiant. Nous devons pouvoir corriger la situation. Je sais que cela relève d'un autre ministère, en l'occurrence celui de la Santé, mais vous savez, tout est lié.

    La situation se détériore très rapidement. Un membre de ma famille a eu la tuberculose. Dans la population, on n'avait pas entendu parler de cette maladie depuis 15 ans, maintenant elle réapparaît. C'est épouvantable.

    Comment pouvons-nous nous occuper du logement, de l'eau, des soins médicaux, de l'alimentation et de la nutrition, et à côté de cela favoriser le développement économique, permettre aux gens de se lancer en affaires et d'entreprendre des études postsecondaires?

+-

    M. John Sinclair: Même si j'accepte tout ce que vous dites, j'aimerais faire deux ou trois commentaires.

    Reste à savoir comment les sociétés—ou les organisations auxquelles vous faisiez référence dans votre première question, je crois—perçoivent l'évolution de ces tendances ou ces problèmes, et comment elles y font face.

    Comme l'ont prévu les derniers budgets—si ma mémoire est bonne, mais je ne voudrais pas induire le comité en erreur—Santé Canada a reçu des fonds pour s'occuper de manière très ciblée du problème du diabète et, plus récemment, du syndrome d'alcoolisme foetal. Si vous avez des enfants qui souffrent de ce syndrome ou qui ont des manifestations d'alcoolisme foetal, ils ne pourront pas apprendre, ils ne pourront pas s'intégrer au marché du travail et ils risquent même de finir en prison, tout simplement parce qu'ils n'auront pu être traités.

    Nous comprenons donc bien mieux maintenant le lien qui existe entre la santé, le logement et la réussite scolaire. C'est pourquoi notre ministère s'efforce de régler les problèmes de logement, avec l'aide de la SCHL, par exemple. Il travaille aussi très étroitement avec des éducateurs autochtones pour résoudre l'ensemble des problèmes liés à l'échec scolaire.

    Nous avons créé, avec Développement des ressources humaines Canada, le Programme Bon Départ—Comment un enfant peut-il apprendre s'il a faim le matin? Il faut prendre en compte toutes ces considérations. De même, au chapitre de la santé—et cela est vraiment très important, Dan pourra vous en dire davantage—il existe...je pense, depuis deux exercices financiers... l'institut canadien de santé des Autochtones...

    M. Dan Beavon: Il s'agit des Instituts de recherche en Santé du Canada et de la NAHO, la National Aboriginal Health Organization.

    M. John Sinclair: Donc, en effet, le système de soins de santé lui-même, y compris les épidémiologistes, le ministère fédéral de la Santé et des organismes de financement commencent à recevoir des données très précises qui permettront aux professionnels de la santé d'effectuer un suivi, notamment auprès des personnes d'âge moyen atteintes de diabète. Vous avez une collectivité qui se serre les coudes et va de l'avant, qui prend en main son développement économique, et vous avez peut-être 30 à 40 personnes, sur 500 que compte la collectivité, qui font bouger les choses, et quatre d'entre elles sont diabétiques. Tout à coup, le médecin dit: «Non, n'allez pas à Ottawa donner une bonne leçon à ces gens du ministère des Affaires indiennes. Dieu sait qu'ils le méritent, mais vous ne pouvez pas voyager parce que vous avez un excédent de poids, vous avez un problème de santé. Vous devez rester ici».

    Alors, quand une petite collectivité est confrontée à tous ces problèmes, elle perd cette masse critique de leaders. Ce qu'il faut savoir, c'est que ces problèmes de santé affectent autant les jeunes que les gens d'âge moyen: ceux qui font fonctionner la collectivité. Et plus on a d'autonomie gouvernementale, plus on se demande comment toutes ces choses s'articulent. Dans un sens, c'est plus compliqué, mais dans l'autre, on se dit aussi qu'il suffit de travailler plus intelligemment avec les gens et de mieux cibler les investissements.

    Tout à coup, je me rends compte que je suis en train de discourir sur Santé Canada et sur d'autres ministères, alors je préfère m'arrêter.

  +-(1215)  

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    Le président: Y a-t-il d'autres questions?

    Tout d'abord, j'aimerais dire que l'information présentée aujourd'hui a été fournie aux membres. C'est très apprécié. Je vous remercie beaucoup pour votre exposé. Nous aurons l'occasion de nous revoir, avant et après le dépôt de la mesure législative.

    J'ai eu vent de rumeurs selon lesquelles quelqu'un aurait vu ou entendu dans les médias, que le projet de loi sur la gouvernance ne serait pas déposé avant juin. Je peux vous dire, chers collègues, que je n'ai pas reçu le même son de cloche de la part de ceux qui ont travaillé sur les exposés. Je ne crois pas tout ce que je lis dans les journaux, même si parfois c'est vrai. S'il est prévu de déposer le projet de loi en juin, nous aimerions le savoir, de façon à pouvoir transmettre l'information à nos membres.

    J'aimerais faire un autre commentaire avant de lever la séance... C'est un commentaire personnel. Si mes collègues ne sont pas d'accord, je serais heureux d'entendre leur point de vue. Cela fait maintenant vingt-cinq ans que je suis en politique. J'ai connu tous les ordres de gouvernement, sauf le provincial. J'ai toujours vu les bureaucrates défendre les personnes qui dépendent du ministère pour lequel ils travaillent.

    Étant donné que j'ai déjà présidé ce comité et que j'ai participé à l'étude de la Loi sur les Indiens, je peux dire que je considère les bureaucrates du ministère des Affaires indiennes comme des lobbyistes et comme des gens qui défendent les peuples des Premières nations. Si je dis cela, c'est parce que j'ai constaté, au cours de ma dernière expérience en la matière, que certains témoins avaient quelque peu malmené les bureaucrates, le ministre et les membres de ce comité. J'aimerais que les choses soient claires dès le départ: les membres de ce comité sont des personnes dévouées et sérieuses.

    Notre comité traite de questions difficiles. Le travail que nous faisons à une incidence directe sur la vie des gens. Certains des comités, sur la Colline, sont plus amusants, d'autres sont une vraie partie de plaisir, comme celui qui s'occupe des voyages à l'étranger, par exemple. C'est pourquoi je tiens à féliciter les députés qui ont accepté de siéger à ce comité. Ils font un travail difficile, mais utile et très important.

    Je veux que le ministère sache que, en tant que défenseurs des Autochtones, nous dépendons de vous, parce que notre but est d'améliorer la vie des Premières nations, de nos peuples autochtones.

    Le ton est donné. Comme il y a des gens qui lisent les bleus et les comptes rendus de nos séances, j'aimerais répéter que le travail que nous faisons avant de recevoir le projet de loi est un travail constructif qui nous aide à comprendre. Nous ne le faisons pas pour changer le projet de loi. Nous ne savons rien. En tant que président, même si je suis député ministériel, je n'ai aucune idée de ce qui nous attend. On ne m'a pas consulté. À ce stade-ci, nous n'essayons pas d'influencer le texte de loi. Nous aurons tout le temps de le faire lorsqu'il nous sera présenté.

    J'espère maintenant que les choses sont claires. Nous sommes ici pour améliorer le sort des personnes qui sont visées par cette mesure. Je vous remercie d'être ici pour nous. Je me manquerai pas de vous inviter, autant de fois que nécessaire. Lorsque nous aurons le texte de loi, nous vous inviterons encore, et avec vous tous ceux qui ont quelque chose à apporter, car le but de ce comité est d'améliorer la qualité de vie des Premières nations. Nous ne nous sommes investis d'aucune autre mission. Que ce soit clair pour le monde.

    Quelqu'un souhaite-t-il ajouter quelque chose? Vous pouvez ne pas être d'accord.

  -(1220)  

    Chers collègues, vous avez reçu une invitation pour la séance du 12 mars. En tant que président, j'ai un style différent. Je dirais à ceux qui aimeraient faire pression sur le président et qui voudraient déjeuner avec lui, que ce n'est pas possible. Ceux qui veulent faire pression sur moi doivent faire pression sur l'ensemble du comité. Par conséquent, quand quelqu'un veut me donner de l'information ou tenter de m'influencer, je réserve une salle et j'invite tous les membres du comité. Vous n'exercez pas de pression seulement sur le président de ce comité, mais sur l'ensemble de ses membres. C'est pour cela que vous êtes invités.

    Quelqu'un a-t-il quelque chose à ajouter?

    Je vous remercie.

    La séance est levée.